Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI TRICHER


TRICHER, v. act. et n. TRICHERIE, s. fém. TRICHEUR, EûSE, s. m. et f. [Tri--ché, cheri-e; cheur, cheû-ze; 2e é fer. au 1er, e muet au 2d, lon. au 4e.] Ils sont du style familier, et se disent des tromperies faites au jeu; et par extension, des tromperies faites en de petites chôses, et par des voies petites et bâsses. "Cet homme vous triche: il ne joûe pas franchement: il triche, il aime à tricher. "Ce Marchand m' a triché. "Cet homme ne cherche qu' à tricher.
   Il faudrait commencer par éloigner d' ici
   Ce fripon d' Intendant qui chaque jour le triche.
       Dest. Le Dissip.
"Il m' a fait une tricherie, plusieurs tricheries. = Marivaux emploie assez plaisamment tricherie, au figuré: "La Nature fait assez souvent de ces tricheries là: elle enterre je ne sais combien de belles âmes sous de pareils visages. = On dit proverbialement, la tricherie en reviendra à ses maîtres: elle tournera contre les tricheurs.

TRICOT


TRICOT, s. m. [Triko: le t final ne se prononce pas.] Bâton grôs et court. "Il le menaça de coups de tricot: il lui dona du tricot, st. famil.

TRICOTAGE


TRICOTAGE, s. m. TRICOTER, v. a. TRICOTEUR, EûSE, s. m. et fém. TRICOTèTS, s. m. pl. [Trikotage, té, teur, teû-ze, tè: 3eé fer. au 2d, lon. au 4e, è moyen au dern.] Tricoter, c' est pâsser les fils les uns dans les aûtres, et en former des mâilles avec des aiguilles longues et émoussées. "Tricoter des bâs, etc. "Il a apris à tricoter. "Elle tricote bien. = On dit aussi tricoter de la dentelle, pour, faire de la dentelle sur un oreiller avec des épingles et des fuseaux. = Tricotage, travail d' une persone qui tricote: aprendre le tricotage. _ Ouvrage qu' elle fait: ce tricotage est lâche. = Tricotage se prend encôre en mauvaise part. "C' est du tricotage: il ne fait que du tricotage. MARIN. = Tricoteur, eûse, celui, celle qui tricote. "Un mauvais tricoteur; une bone tricoteûse. = Tricotèts, sorte de danse: "Danser les tricotèts. = * Anciènement on disait la tricotée; et on l' avait ainsi nomée, parce que le mouvement du pied y est aussi promt que l' est celui de la main d' une tricoteûse de bâs.
   M. De La Monnoie avait lu dans les Noels du Lucas Le Moigne:
   Nous jetterons nos sabots
   Pour danser la tricotée.

TRICTRAC


TRICTRAC, s. m. [Triktrak. = On a écrit aûtrefois trictrac, ou Trique-trac: on n' écrit plus que le premier: ils se prononcent de même, l' e du second étant três-muet.] Sorte de Jeu, où l' on joûe avec deux dés et trente dames, qu' on apèle aussi tables. Voy. TABLIER
   ......Morbleu je te saurai,
   Maudit jeu de trictrac, ou bien je ne pourrai.
       Le Joueur.
= Il se prend aussi pour le tablier même dans lequel on joûe.

TRIDENT


TRIDENT, s. m. [Tridan: 2e lon.] Fourche à trois dents ou pointes. "Les Poètes et les Peintres donent à Neptune un trident pour scèptre. "Neptune avec son trident.

TRIENNAL


TRIENNAL, ALE, adj. TRIENNALITÉ, s. fém. TRIENNAT, s. m. [Tri-én-nal, nale, nalité, na: en n' y a pas le son d' an, mais l' e y conserve son propre son, comme dans moyen. _ Plusieurs prononcent tri-anal, etc. et l' on a adopté cette prononciation dans le Dict. Gram. mais elle n' est pas la plus autorisée.] Triennal est 1°. qu' on exerce, tous les trois ans. Oficier triennal. = 2°. Qui est en place pendant trois ans. "Prieur triennal, Prieure triennale. _ Qui dûre trois ans. Prieuré triennal. = Triennalité, qualité d' une dignité, d' une administration qui ne dûre que trois ans. = Triennat, l' espace de trois ans, pendant lequel on exerce un emploi, etc. "Durant son triennat. _ L' Acad. ne met point celui ci: il est dans Trév. et dans le Rich. Port.

TRIER


TRIER, v. act. [Tri-é: 2eé fer. Devant l' e muet, l' i est long: il trie: aux futurs, cet e muet ne se fait guère sentir: il triera, trierait, etc. pron. trî-ra, trî-rè, en deux syllabes.] Tirer une chôse d' un plus grand nombre avec choix et préférence. "Trier des raisins, des pois, des lentilles, du café. "Les libraires ont trié les meilleurs Livres de cette Bibliothèque. "On a trié ces Soldats parmi les meilleures troupes. _ Il n' est que du style simple. = En st. prov. trier sur le volèt, c' est choisir avec soin. "Ce sont des persones triées sur le volèt, distinguées, ou par leur qualité, ou par leur mérite.

TRIGAUD


TRIGAUD, AUDE, adj. et subst. [Tri--gô, gôde: 2e lon.] Qui n' agit pas franchement, qui se sert de mauvaises finesses. "Il est trigaud: il a la mine trigaude. "C' est un trigaud, un franc trigaud: cette femme est une franche trigaude, st. famil.

TRIGAUDER


TRIGAUDER, v. n. TRIGAUDERIE, s. fém. [Trigodé, gôderie: 2e dout. au 1er, lon. au 2d, 3e é fer. au 1er, e muet au 2d.] Trigauder, n' agir pas franchement: "Il ne fait que trigauder. = Trigauderie, action de trigaud; mauvaise finesse. "C' est une trigaûderie: je conais ses trigaûderies.

TRIMèSTRE


TRIMèSTRE, s. m. [2e è moyen, 3e e muet.] Espace de trois mois, pendant lequel on est ataché à certaines fonctions, à certains emplois; comme semèstre est l' espace de six mois.

TRINGLE


TRINGLE, s. f. [Trein-gle: 1re lon. 2e e muet.] Verge de fer, menûe, ronde et longue, qu' on pâsse dans les anneaux d' un rideau.

TRINITÉ


TRINITÉ, s. f. Un seul Dieu en trois persones, Père, Fils et Saint-Esprit. "La Sainte Trinité: le Mystère inéfable de la Trinité.

TRINQUER


TRINQUER, v. n. Boire en débauche en se provoquant l' un l' aûtre. St. famil. = En Provence, on dit: se trinquer, être trinquée, pour, se parer, être parée.

TRIO


TRIO, s. m. TRIOLèT, s. m. [Tri-o, tri-olè: 3e è moy. au 2d.] Le premier se dit d' une composition de Musique à trois parties. = Fig. st. famil. Trois persones qui se trouvent ensemble, ou qui sont liées d' intérêt. = Le second se dit d' une petite pièce de huit vers, dont le premier se répète aprês le troisième, et le premier et le second se répètent encôre aprês le sixième.

TRIOMPHAL


TRIOMPHAL, ALE, adj. TRIOMPHANT, ANTE, adj. TRIOMPHATEUR, subst. masc. TRIOMPHE, s. m. et fém. TRIOMPHER, v. n. [Tri-onfal, fale, fan, fante, fa-teur, fe, fé: 2e lon. 3e lon. au 3e et au 4e, e muet au 6e, é fer. au dern.] Triomphe, s. m. est 1°. cérémonie pompeûse, qu' on fesait chez les Romains à l' entrée d' un Général d' armée, lorsqu' il avait remporté quelque grande victoire. "Le Sénat lui décerna le triomphe: la pompe d' un triomphe; char de triomphe. "La gloire ne suit pas toujours le triomphe. L. F. = 2°. Il se dit des victoires et des grands succês de la guerre. "Les triomphes d' Alexandre. = Fig. le triomphe de la Foi, de la vertu, du vice.
   Laissons aux Grands du siècle, aux tyrans, aux impies,
   Leur triomphe aparent.
       Le Franc.
"Plus les obstacles se montrent nombreux et puissans, plus le triomphe a de gloire et d' éclat. Neuville. = II. Triomphe, s. f. à certains jeux de cartes, est la couleur de la carte qu' on retourne. "De quoi est la triomphe? La triomphe est de coeur. _ En st. proverb. on dit: voilà de quoi est la triomphe; de quoi il s' agit présentement.
   TRIOMPHER, a le sens de triomphe, s. m. "Pompée triompha trois fois. Scipion triompha de l' Afrique. "Ce Prince a triomphé de tous ses énemis. = FIG. Triompher de ses envieux, de ses rivaux. _ Triompher de ses passions; les vaincre, les surmonter. = V. n. sans régime. Exceller. "Quand il est sur cette matière, il triomphe. "Ce Peintre triomphe, quand il peint les chevaux. = Être ravi de joie: "Quand on lui parle de ses enfans, elle triomphe. = Avec la prép. de: tirer vanité. "Il triomphe de sa perfidie. "Il a obtenu ce qu' il desirait: il en triomphe.
   TRIOMPHAL et TRIOMPHATEUR ne se disent que dans le 1er sens. "Char, arc triomphal; pompe, courone, robe triomphale. "Quand le Triomphateur était entré dans la ville. = Triomphant, qui triomphe; il a vaincu ses énemis, il est triomphant: "Il est revenu glorieux et triomphant.
   De ses triomphantes années,
   Le tems respectera le cours.
       Rouss.
= L' Église triomphante: les bienheureux qui sont dans le Ciel.

TRIPâILLE


TRIPâILLE, s. f. TRIPE, s. f. [Tripâ--glie: 2e lon. au 1er, 3e e muet, mouillez les ll.] Tripe et tripâille se disent des boyaux des animaux et de certaines parties de leurs intestins. "Cela sent la tripe. Manger de la tripe. Vendre des tripes. "Ce n' est-là que de la tripâille. = Tripe est du style simple. Tripâille ne se dit guère que par mépris. = On dit, proverbialement, d' un homme qui a beaucoup vomi; qu' il a vomi tripes et boyaux.

TRIPERIE


TRIPERIE, s. f. [2e et dern. e muet; 3e lon.] Lieu où l' on vend les tripes.

TRIPIER


TRIPIER, IèRE, s. m. et f. [Tri-pié, piè-re: 2e é fer. au 1er, è moy. et long au 2d.] Tripier ne se dit que des oiseaux de proie, qui ne peuvent être dressés. = Tripière, femme qui vend les tripes et les issûes des animaux qu' on tûe à la boucherie. = On dit, par mépris, d' une femme trop grâsse: que c' est une grôsse tripière; et adjectivement, qu' elle est un peu tripière. = Couteau de Tripière, qui tranche des deux côtés, se dit, dans le même st. d' un homme qui dit du bien ou du mal de la même persone, suivant les ocasions; ou, qui, entre deux énemis, fait de mauvais raports de part et d' aûtre.

TRIPLE


TRIPLE, adj. TRIPLEMENT, adv. et s. m. TRIPLER, v. act. et n. TRIPLICITÉ, s. f. [2e e muet aux deux prem. é fer. au 3e; en, dans le 2e, a le son d' an: tripleman.] Triple, qui contient trois fois le simple. "Des souliers à triple semelle. "Bâtiment à triple étage. _ Fig. st. fam. Fripon, menteur, fanfaron à triple étage, à l' excês. = S. m. "Je payerai le triple, si, etc. "Je parie le triple contre le simple, que, etc. = Triple, adj. aime à précéder le subst.
   Où donc aller? Quel mur, quel triple airain,
   Nous sauvera d' une invisible main?      Rouss.
"Sur un Trône auguste, éternel, une seule lumière brille d' une triple clarté. Jérusalem Déliv. Belle image de la Trinité.
   TRIPLEMENT, adv. En trois façons. Il est triplement courageux, malheureux. = S. m. Augmentation jusqu' au triple. Il n' est d' usage qu' en Finance. "Lever des droits par doublement et triplement. _ M. Moreau l' a employé dans ses discours sur l' Histoire de France. "Il avoit demandé que la composition fût triple: mais ce triplement ne fut point acordé. "Il suprima le triplement qui avoit été demandé.
   TRIPLER, v. act. Rendre triple. Tripler un nombre, une somme. "Si vous triplez le travail, il faut tripler la récompense. = V. n. Devenir triple. "La somme a triplé depuis ce tems là.
   TRIPLICITÉ, qualité de ce qui est triple. Il ne se dit que dans trois ocasions: en parlant des actes de Notaires. "Ils ont fait cet acte triple: À~ quoi bon cette triplicité? _ En parlant des pièces de Théâtre. Dans cette Piêce, il y a non seulement duplicité, mais triplicité d' action. _ En parlant du Mystère de la Trinité. "Dans la Sainte Trinité, il y a triplicité de persones: il n' y a pas triplicité de substances.

TRIPOT


TRIPOT, s. masc. [Le t final ne se prononce pas.] 1°. Jeu de Paûme. "Tripot couvert ou découvert. "Le maitre du tripot. Ce mot est bas: on dit, jeu de paûme. = Fig. style fam. on dit qu' un homme est dans son tripot, quand il est dans un lieu, où il a de l' avantage pour la chôse dont il s' agit, ou, qu' il excelle dans la matière dont il est question. "Il faut le tirer de son tripot. Non, il est plus glorieux de le batre dans son tripot. = 2°. On apèle, par mépris, tripot, une maison où l' on done à jouer; et la plupart méritent bien ce nom.

TRIPOTAGE


TRIPOTAGE, s. m. TRIPOTER, v. n. et act. [Dern. e muet au 1er, é fer. au 2d.] Tripoter, c' est brouiller, méler diférentes chôses ensemble, et en faire quelque chôse de mauvais. "Cette femme ne fait que tripoter. "Ces enfans tripotent tout le jour. _ Figurément, st. fam. "Tripoter une afaire; la gâter. = TRIPOTAGE, mélange qui produit quelque chôse de mal propre, ou de mauvais goût. _ Figurément, Assemblage de chôses, qui ne s' acordent point ensemble. "Dans cette afaire, ils ont fait un étrange tripotage.

TRISAïEUL


TRISAïEUL, EULE, s. m. et f. [Triza--ieul, ieule.] Le père, la mère du Bisaïeul, de la Bisaïeule.

TRISSYLLABE


TRISSYLLABE, adj. et subst. [Tricilabe.] Qui est de trois syllabes. "Ce mot est trissyllabe: c' est un trissyllabe.

TRISTE


TRISTE, adj. TRISTEMENT, adv. TRISTESSE, s. f. [Tris-te, teman, tèce; 2e e muet aux deux prem. è moy. au 3e.] Triste, 1°. Afligé, abatu de chagrin, de déplaisir. "Il était si triste, qu' il n' avait pas de la force de parler. _ Il régit quelquefois la prép. de: il est fort triste de la mort de son ami; de la perte de son procês. = 2°. En parlant des chôses, afligeant, qui inspire de la mélancolie, du chagrin. "Un triste souvenir; triste accident; triste spectacle: il mène une triste vie: chant triste: ces lieux sont bien tristes. _ Faire un triste repas, où l' on ne se réjouit point: une triste consolation, une triste ressource; insufisante pour consoler, pour remplir les vûes qu' on avait. = 3°. Pénible, dificile à suporter. En ce sens, il se dit ordinairement avec le verbe être impersonel, et régit de et l' infinitif. "Il est triste de se voir traité de la sorte, aprês avoir bien servi. = 4°. Obscur, sombre. "Cette maison, cette chambre, ce jardin est triste. "Le tems est triste.
   REM. Triste se plait à précéder le nom qu' il modifie. "Vous ne trouvez plus ici maintenant que les tristes restes d' une grandeur, qui menace ruine. Télém. "Malheureux au sein d' une triste liberté, je n' ai coulé que de tristes nuits et des jours déplorables. Jérus. Déliv.
   Rome, en les voyant paroître,
   Cessa de se reconoître
   Dans ses tristes rejetons.
       Rousseau.
  Le pôle du midi, noir séjour du silence,
  N' ofre aux tristes humains qu' une éternelle nuit.
       De Lille.
"En style famil. Faire triste mine, avoir la mine chagrine. Faire triste mine à quelqu' un; le recevoir froidement. = Boileau done à triste le sens de malheureux.
   Sur les tristes mortels le faux honeur domine.
       Sat. X.
Il n' a pas voulu dire, sur les pauvres mortels, parce que l' expression est triviale; mais, les tristes mortels, a-t' il, selon l' usage, le sens qu' il lui done? J' en doute. = Dans le langage précieux moderne, on apèle triste tout ce qui est sérieux, ennuyeux. "Je ne puis soutenir la vue d' un homme, qui ose nier les tristes et fades déclarations, dont il m' a excédée. Marm. "Ce triste Savant, qui endoctrine votre fils. Coyer, Île Frivole. Id. Ibid.
   TRISTEMENT, d' une manière triste. "Il la regardait tristement. Il vit bien tristement, etc.
   TRISTESSE, Afliction, déplaisir. "Il est tombé dans une grande tristesse. "Ce nouveau chagrin achève de m' acabler et redouble la tristesse mortelle, qui me consume. Cic. à Atticus. Mongault.
   TRISTESSE, Chagrin, afliction, douleur, désolation, (syn.) Tristesse difère de chagrin, en ce que celui-ci peut être intérieur, et que la tristesse se laisse voir au dehors. La tristesse, dâilleurs, peut être dans le caractère et dans la disposition habituelle, sans aucun sujet; et le chagrin a toujours un sujet particulier. _ L' idée d' afliction ajoute à celle de tristesse; celle de douleur, à celle d' afliction, et celle de désolation, à celle de douleur. _ Chagrin, tristesse et afliction ne se disent guère en parlant de la douleur d' un peuple entier, sur-tout le premier de ces mots. Afliction et désolation ne se disent guère en Poésie, quoique afligé et désolé s' y disent très-bien. Chagrin, en Poésie, sur-tout lorsqu' il est au pluriel, signifie plutôt inquiétude et souci, que tristesse aparente ou cachée. Voy. CHAGRIN. _ Enfin, douleur se dit également des sensations désagréables du corps, et des peines de l' esprit et du coeur; les aûtres ne se disent que de ces dernières: (Encycl.) Beauzée, Synon.

TRITON


TRITON, s. m. Selon la Fable, dieu marin, de figûre humaine jusqu' à la ceintûre, et qui se terminait en poisson.

TRITURABLE


TRITURABLE, adj. TRITURATION, s. f. TRITURER, v. act. Ils expriment l' action de broyer, de réduire en parties três-menûes. Ce sont des termes de Chimie et de Médecine. "Matière triturable, qui peut être triturée. "Les Chimistes font la trituration des bois, des minéraux, en les pilant dans un mortier. "Quelques Médecins prétendent que la digestion se fait par voie de trituration.

TRIVIAIRE


TRIVIAIRE, adj. [Trivi-ère; 3eè moy. et lon. 4e e muet.] Où aboutissent trois chemins, en parlant d' un carrefour.

TRIVIAL


TRIVIAL, ALE, adj. TRIVIALEMENT, adv. TRIVIALITÉ, s. f. [Trivi-al, ale, aleman, alité: 4e e muet au 2d et au 3e.] Trivial, comun, usé, rebatu, en parlant des pensées et des expressions. "Pensée, phrase, expression, pointe triviale: cela est trivial. "Cet Auteur ne dit que des chôses triviales. "Un homme d' esprit dédaigne de dire des chôses triviales, par la même raison qu' il soufre lorsqu' il en entend de pareilles. L' Abé Trublet. = Trivial, ordinaire, comun, vulgaire, (synon.) Le 1er dit quelque chôse de plus que vulgaire, qui, à son tour, enchérit sur comun; et celui-ci sur ordinaire. Il parait aussi qu' ordinaire est d' un usage plus marqué pour la répétition des actions; comun, pour la multitude des objets; vulgaire, pour la conoissance des faits, et trivial, pour la tournure du discours. "La dissimulation est ordinaire à la cour: les monstres sont comuns en Afrique; les disputes de religion ont rendu vulgaires des faits qui n' étoient conus que des Savans: de tous les genres d' écrire, il n' y a que le Comique, où les expressions triviales puissent trouver place. = Ces mots peuvent être considérés dans un autre sens que dans celui du fréquent usage: ils se disent souvent du peu de mérite des chôses; et ils ont encôre un ordre de gradation; de sorte que trivial est celui qui ôte le plus au mérite. "Ce qui est ordinaire, n' a rien de distingué; ce qui est comun n' a rien de recherché, ce qui est vulgaire n' a rien de noble; ce qui est trivial a quelque chôse de bâs. GIR. Synon.
   Rem. 1°. Trivial n' a pas ordinairement de pluriel masculin. L' Ab. Des Fontaines a pourtant dit, détails triviaux. = 2°. Trivial se dit quelquefois comme substantif abstrait. "Leurs plans donent non seulement dans le trivial et le comun, mais dans l' incomode et le désagréable. L' Ab. Laugier. = 3°. Il ne se dit point des persones, ni en bone part des chôses. "L' Homme de Lettres est trivial, comme une borne au coin des places.... Il ne peut point être important, et il ne veut point l' être. La Bruy. La comparaison de la borne corrige un peu l' irrégularité de l' expression.
   TRIVIALEMENT, d' une manière triviale. "Il parle, il écrit trivialement.
   TRIVIALITÉ, caractère de ce qui est trivial. "La trivialité des expressions dépâre, dans cet ouvrage, la beauté des pensées. = Au pluriel, chôses triviales. "Ce Discours est rempli de trivialités.

TRIUMVIR


TRIUMVIR, s. m. TRIUMVIRAL, ALE, adj. TRIUMVIRAT, s. m. [Prononcez tri--ome-vir, viral, rale, ra; l' e sur-ajouté extrêmement muet.] Triumvir était, chez les Romains, un Magistrat chargé avec deux collègues de quelque administration publique. On ne le dit guère aujourd'hui que de César, Pompée et Crassus associés contre la Loi, et d' Octave, Antoine et Lépide, qui quelque tems aprês la mort de César, firent une pareille association. = Triumviral, qui apartient aux Triumvirs. "La puissance triumvirale. "Le despotisme triumviral. = Triumvirat, le règne des Triumvirs. "Le Triumvirat de Pompée, de César et de Crassus. "Le Triumvirat d' Octave, d' Antoine, de Lépide, fut signalé par d' horribles proscriptions.

TROC


TROC, s. m. TROQUER, v. act. TROQUEUR, EûSE, s. m. et f. [Trok, troké, keur, keû-ze: 2e é fer. au 2d, lon. au dern.] Troc, échange. Troquer, échanger, faire un troc. Troqueur, eûse, qui aime à troquer. Ils ne se disent que des meubles, des nipes, bijous, chevaux et aûtres chôses semblables. "Faire un troc avec quelqu' un. Doner un cheval en troc pour une montre. "Il a troqué sa tabatière contre un tableau. "Il n' y a rien pour quoi quelqu' un, qui se croit de l' esprit, le voulut troquer. L' Ab. Trublet. "Les curieux sont grands troqueurs: "C' est une grande troquêuse. = On dit, troc pour troc, ou troc de gentilhomme, lorsqu' on ne done point de retour et qu' on troque simplement une chôse contre une aûtre. = Troquer, Échanger, Permuter (Synon.) On échange des ratifications; on troque~ des marchandises; on permute des bénéfices. _ Echanger est du style noble; troquer du style ordinaire et familier: permuter du style du Palais (Encycl.) Beauz. Synon.

TROGNE


TROGNE, s. f. [mouillez le g: 2ee muet.] Visage plein, qui a quelque chôse de facétieux et qui marque le goinfre, ou, qui a quelque chôse de rebutant. "Il a une bone grôsse trogne; une plaisante, une vilaine trogne. = Rouge trogne ou, trogne enluminée, le visage d' un ivrogne. _ Ce mot n' est que du style plaisant et moqueur, et du bâs comique.

TROGNON


TROGNON, s. m. [mouillez le g.] Le coeur ou le milieu d' un fruit, principalement des poires et des pommes, dont on a ôté tout ce qui était bon à manger. = Le trognon d' un chou, ou un trognon de chou; la tige d' un chou, dont on a ôté les feuilles. On dit aussi trou de chou: l' Acad. avait dabord dit que ce mot était bâs: elle l' a mis ensuite sans remarque. = On dit, proverbialement, d' une chôse, qu' on méprise, qu' on n' en fait pas plus de câs que d' un trognon, ou d' un trou de chou.

TROIS


TROIS, TROISIèME, adj. et subst. TROISIèMEMENT, adv. [Troâ et, devant une voyèle, troaz, troa-ziè-me, ziè-meman: 2e è moy. 3ee muet au 2d et au 3e.] Ils expriment un nombre, qui contient deux et un. "Trois hommes; trois louis. "Il marchaient trois à trois, de trois en trois. _ S. m. "Un trois de chifre; un trois de pique; de coeur, etc. "Ce balot est marqué d' un trois. = Il se dit pour troisème: page trois, Henri trois. Il plaide à la trois, à la troisième chambre des Enquêtes. "Le trois de ce mois. "Le trois de Janvier. = Troisième, qui est aprês le deuxième. "Le troisième jour; la troisième année; la troisième place. = Subst. "Il ou elle est le, ou la troisième dans la liste. _ La troisième (on sous-entend classe) La troisième des Enquêtes (on sous-entend chambre) = Troisièmement, en troisième lieu. "Secondement, troisièmement, etc.
   Rem. Quand troisième est précédé de l' article, il suit ou précède le substantif; c' est l' article troisième, ou le troisième article du chapitre troisième ou du troisième chapitre. Quand il est employé sans l' article le, la, les, il suit toujours le nom auquel il se raporte. Livre cinquième, chapitre troisième.

TRôLER


TRôLER, ou TROLLER, v. act. et n. [Le 1er est de l' Acad. le 2d de Trév. Le 1er est préférable, puisque l' ô est long; tro--lé, il trôle, etc.] Actif, Mener avec soi. "Il trôle par-tout sa femme, son fils, toute sa famille. = Neutre, Aler; courir: il trôle, il ne fait que trôler tout le long du jour. _ Richelet dit que ce mot n' est pas du bel usage: l' Acad. le traite de populaire. Il est bon pour le style comique, ou critique et moqueur.

TROMBE


TROMBE, s. f. [Trombe; 1re lon. 2e e muet.] Terme de Marine. Tourbillon, ou nuage creux, qui descend sur la mer en forme de colonne. On l' apèle aussi Siphon.

TROMPE


TROMPE, s. f. [Tronpe: 1re lon. 2e e muet.] 1°. Il se dit pour trompette dans ces deux locutions; publier ou crier à son de trompe, par autorité des Magistrats. " Il fit crier à Rome à son de trompe que chacun eut à se trouver sans armes, etc. Conjurat. de Rienzi. _ FIG. Publier une chôse à son de trompe, la raconter à beaucoup de gens, afin qu' elle se divulgue. = 2°. Partie du museau de l' éléphant, qui s' alonge et se recourbe pour divers usages. = 3°. Cette petite partie avec laquelle les mouches, et aûtres pareils insectes, sucent et tirent ce qui est propre pour leur nourritûre. = 4°. En Architectûre, coupe de plusieurs pierres tâillées et apareillées en forme de coquille pour porter un édifice en saillie. = 5°. Coquille de mer faite en forme de limaçon.

TROMPER


TROMPER, v. act. TROMPERIE, s. f. TROMPEUR, EûSE, adj. s. m. et f. [Tron--pé, peri-e, peur, peû-ze: 1re lon. 2e é fer. au 1er, e muet au 2d, lon. au dern.] Tromper, 1°. User d' artifice pour induire en erreur. "Il trompe ses amis même; il vous trompera: il tromperait son père. _ Et sans régime, tromper au jeu. _ Être trompé: "Les plus fins y sont trompés. = Tromper, Décevoir, Abuser (Synon.) Le 1er signifie, induire malicieusement en erreur; le 2d, y engager par des moyens séduisans; le 3e, y plonger par un abus odieux de la faiblesse d' autrui. On vous trompe, en vous donant pour vrai ce qui est faux; pour bon ce qui est mauvais: on vous déçoit, en flatant vos goûts: on vous abûse, en captivant votre esprit. On trompe tout le monde et même plus habile que soi. On deçoit les gens, qui s' en raportent aux aparences, qui abondent dans leur sens, etc. On abuse les persones foibles, crédules, etc. Extr. des Syn. Fr. de M. l' Ab. Roubaud. = 2°. Fig. Faire quelque chôse contre l' atente ou l' espérance de quelqu' un. "Il a trompé mon atente, mes espérances. "On atendait beaucoup moins de lui: il a trompé tout le monde. = 3°. Plus figurément encôre, il se dit des chôses comme sujèt. "Sa maladie a trompé tous les Médecins. "L' aparence du beau tems m' a trompé. "L' air agité par les vents produit les orages, trompe les éforts de l' Homme, et le précipite au devant de la mort qu' il veut éviter. Thomas.
   Et tandis que les champs de tous les environs,
   Trompoient des possesseurs les voeux et l' espérance,
   Le Sien étoit pour lui la corne d' abondance.
       L' Ab. Reyre.
= Tromper sa douleur, sa peine, son ennui, etc. s' en distraire; l' apaiser, la charmer, me parait sur-tout une belle expression.
   Quelquefois pour tromper ma peine,
   Je m' en vais rêver dans la plaine.
       Volt.
"Elle me parlera de ma fille; je lui parlerai de la mienne; et, en contentant notre amour, nous tromperons, s' il se peut, notre douleur. L' Ab. REYRE. Ecole des Jeunes Demoiselles. = 4°. Se tromper, errer, s' abuser. "Vous vous trompez, cela n' est pas ainsi. "Il se trompe dans son calcul. "Je me suis trompé, quand j' ai dit que, etc. "Cet homme ne se trompe qu' à son profit (St. famil.) Il ne s' abûse que dans les chôses, où l' erreur peut tourner à son avantage. = * Bossuet fait régir à se tromper la prép. de et l' infinitif: "Ne vous trompez pas de croire que, etc. Ce régime est inusité. Je voudrais dire; ne vous trompez pas au point de croire, ou, jusqu' à croire que, etc. = Si je ne me trompe, formule et correctif usités, quand on n' est pas parfaitement assuré d' un fait, ou, quand on veut éviter le ton d' assurance et de présomption, en disant son avis. "Attale, le premier, si je ne me trompe, qui nomma pour héritier le peuple Romain. Rollin.
   TROMPERIE, Fraude, artifice employé pour tromper. "Tromperie visible, manifeste, insigne. "Il y a de la tromperie. = Avec le pronom possessif et au pluriel, il a le sens actif et se dit de celui, qui trompe. "Vous aurez à vous garantir de ses tromperies.
   TROMPEUR, EûSE, qui trompe. Il se dit des persones et des chôses; plus souvent des persones comme substantif et des chôses comme adjectif. "C' est un trompeur, une trompeûse. "Visage trompeur; mine, physionomie trompeûse. Discours trompeurs, promesses trompeûses. "Aparences trompeûses.
   Le bonheur nous expose à des dehors trompeurs,
   Mais c' est dans le malheur qu' on éprouve les coeurs.
       Dest. Le Dissipateur.
  Le plus adroit trompeur ne peut tromper long-tems.
      Palissot.
= Le Proverbe dit: À~ trompeur, trompeur et demi; un trompeur mérite de trouver un trompeur plus fin que lui.

TROMPETTE


TROMPETTE, s. f. et m. TROMPETER, v. act. [Tronpète, tronpeté: 1er lon. sur--tout au 2d.; 2e è moy. au 1er, e muet au 2d. = L' ancien Trévoux écrit Trompetter; mais le 1er e étant muet, il faut écrire trompeter. Avec les deux tt, on prononcerait tronpété.] Trompette, s. f. tuyau d' airain ou d' aûtre métal, dont on sonne à la guerre, dans les réjouïssances publiques, etc. "Sonner de la trompette. "La trompette sonnait la marche, la charge, la retraite. = FIG. Entoner la trompette, prendre le ton sublime. Acad. Plusieurs disent emboucher. = Plus figurément encôre, on apèle Trompette un homme qui a acoutumé de publier tout ce qu' il sait: c' est la trompette de la ville, du quartier. St. famil. = Aûtrefois on le disait même dans le style noble et élevé. "Alexandre estima Achile heureux d' avoir eu Homère pour trompette de ses louanges. "Les Poètes sont les trompettes des grandes actions des Hérôs.
   Oui, c' est toi, Peintre inestimable,
   Trompette d' Achille et d' Hector.
       Rouss.
La Touche, qui raporte les deux premiers exemples, ne les blâme pas. Aujourd'hui on ne s' en sert que dans le style plaisant et critique; et on ne le prend qu' en mauvaise part.
   TROMPETTE, s. m. Celui, dont la fonction est de soner de la trompette. "Le trompette d' une telle compagnie de Cavalerie. "Les trompettes du Roi, de la Ville. Voy. CHEVAL.
   TROMPETER, Publier, crier à son de trompe. Au propre, il ne se dit qu' en style de Pratique. Hors de là, il n' est bon que pour la Comédie et la Satire. "Il est râre, dit Du Cerceau, parlant de Rienzi, qu' un chef de conjurés fasse trompeter sa conjuration. L' expression est trop bâsse pour une Histoire. Il dit âilleurs, crier à son de trompe. = Fig. st. famil. Divulguer une chôse, qu' on voulait tenir secrète. "On lui avait recomandé le secret sur cette afaire; il a été la trompeter partout.

TROMPEUR


TROMPEUR, Voy. TROMPER.

TRONC


TRONC s. m. [Tron: le c ne se prononce que devant les voyèles.] 1°. Le grôs d' un arbre; la tige considérée sans les branches. "Un tronc d' arbre: le tronc est creux, pourri, etc. = 2°. Fig. En termes de Généalogie, la souche d' une même famille. "Ces deux maisons sortent du même tronc. = 3°. Boîte ou cofre, qu' on pôse dans une Église, et qui a une ouvertûre, par où l' on met l' argent, qu' on done par aumône.

TRONCHèT


TRONCHèT, s. m. [Tronchè: 1re lon. 2e è moy.] Grôs billot de bois, qui porte sur trois pieds.

TRONÇON


TRONÇON, s. m. TRONÇONER, v. act. [Tron-son, soné: 1re lon. 3eé fer. au 2d.] Tronçon est un morceau coupé ou rompu d' une plus grande pièce. "Tronçon de pique, de lance, d' épée. _ Tronçon d' anguille, de brochet, de Saumon, d' alôse. = Tronçoner, couper par tronçons: "Tronçoner une alôse, une anguille. "On ne voyoit que jambes coupées, que bras abatus, que membres tronçonés. MAIMBOURG

TRôNE


TRôNE, s. m. [1re lon. 2ee muet. = On écrivait aûtrefois throne, et plusieurs l' écrivent encôre de même.] 1°. Au propre, Siège élevé, où les Rois sont assis dans les fonctions solennelles de la Royauté. "Le trône de Salomon, d' Assuérus. "Le Roi se mit sur son trône, pour recevoir les Ambassadeurs. = Au figuré, il signifie la puissance Souveraine. "Monter sur le trône; prendre possession du trône. "Chasser un Prince de son trône. "La faûsse Philosophie sape les fondemens du trône et de l' autel. = On dit aussi par extension, le trône du Pape; le trône épiscopal; le Siège où le Pape, où l' Évêque se met dans de certaines cérémonies publiques.
   Rem. On dit assez noblement, porter des demandes, des représentations aux piés du trône, les faire parvenir au Souverain. = Monter sur le trône est l' expression d' usage, et elle est conforme à la raison et à l' analogie. Corneille dit toujours, dans le trône, ce qui n' est pas bien, ce me semble.
   Pour monter dans le trône et nous doner des Lois.
       Cinna.
  S' il n' est pas dans le trône, il a droit d' y prétendre.
      OEdipe.
  Aujourd'hui dans le trône et demain dans la bouë.
       Polyeucte.
Le P. Marion a dit aussi, dans le trône.
  Sous le poids de ses fers, ainsi que dans le trône,
  Un Roi de ce qu' il fait ne doit compte à persone.
       Cromvel.
Il aurait pu dire, ainsi que sur le trône, et il aurait bien dit.

TRONQUER


TRONQUER, v. act. [tronké: 1re lon. 2e é fer.] Retrancher une partie de... Au propre, il ne se dit que des statûes. "Les Gots ont tronqué la plupart des statûes de Rome. = Au figuré, on le dit des livres et des passages qu' on en tire. "Tronquer un livre, un passage. Il ne se dit qu' en mauvaise part..

TROP


TROP, adv. [Le p ne se prononce que devant les voyèles.] Plus qu' il ne faut; avec excês. 1°. Il modifie les adjectifs, les adverbes, les verbes. "Trop ambitieux; il va trop vite, ou, trop lentement: il mange, il dort, il parle trop = 2°. Il demande aprês lui l' article indéfini devant les substantifs. "Trop de pain, de vin, de viande; de mangeurs: trop de prudence, d' avidité; et non pas, comme on dit dans les Provinces méridionales, trop du pain, de la viande, de l' avidité, de la prudence, etc. = 3°. Il se met aprês le verbe dans les tems simples: il boit trop. Pour les tems composés, il se met entre l' auxiliaire et le participe, lorsqu' il est seul et sans régime; il a trop bu; et aprês le participe, lorsqu' il régit les noms au génitif: il a bu trop de vin.
   J' ai tardé trop, il est tems de partir.
       Nanine.
Sans la gêne de la mesûre du vers, Voltaire aurait dit, j' ai trop tardé. = 4°. Avec les négatives, il signifie guère: "Je ne me fie pas trop à lui: Cela n' est pas trop bien. = 5°. Il est quelquefois substantif: ôtez le trop; je me plains du trop.
   Le trop de promptitude à l' erreur nous expôse.       Mol.
On dit, proverbialement, Trop est trop, ou, rien de trop: il ne faut de l' excês à rien: ne quid nimis.
   Rem. Un Auteur moderne l' emploie comme régime simple. "J' embrasserois trop et je fatiguerois votre atention, etc. Le P. Le Febure de l' Oratoire; Él. Hist. du P. Beraud Jés. = Trop ne se dit point ainsi tout seul et sans régime. "J' embrasserois trop de matière, trop de faits, de détails. Alors c' est moins trop, qui est le régime, que les noms qu' il régit. Ainsi l' on ne dit pas: vous dites trop, mais vous en dites trop. = On dit, familièrement, par trop au lieu de trop. "Il est par trop grossier. "Vous êtes aussi par trop extraordinaire. MARIN. l' Amante Ingénue. Mais il y a de l' afectation à le dire à tout propôs, comme font quelques-uns, qui aiment à ne pas parler comme tout le monde. _ On dit, dans le même sens et dans tous les styles, beaucoup trop. = De suit ordinairement trop, mais quelquefois il le précède. "Cela est de trop. "Vous ne serez jamais de trop: ma maison est la vôtre; regardez-la comme la vôtre, etc.
   Ne suis-je pas de trop? - - - Non, non, mon cher Cléon,
   Venez et partagez ma satisfaction.
       Le Méchant.
= Trop plus et trop mieux sont surannés, et ne peuvent plus être admis que dans le marotique. "Les plus parfaites beautés ne peuvent trop plus se comparer à la sienne que la (le) bronze et l' ébène, à l' or et à l' ivoire. Voiture.
   Trop mieux aimant suivre quelque Dragon,
   Dont il savoit le bachique jargon.
       Ververt.
On dit aujourd'hui, ne peuvent pas plus se comparer, etc. "Aimant mieux, etc.

TROPE


TROPE, s. m. [2e e muet.] Terme de Rhétorique. Emploi d' une expression en sens figuré; comme cent voiles, pour, cent vaisseaux. "Traité des Tropes par M. Du Marsais, ouvrage três-estimé.

TROPHÉE


TROPHÉE, s. m. [Trofé-e: 2e é fer. 3e e muet.] 1°. Chez les peuples anciens, la dépouille d' un énemi vaincu, que l' on mettait ordinairement sur un tronc d' arbre, dont on avait coupé les branches. = 2°. Assemblage d' armes, élevées et disposées avec art, pour servir de monument d' une victoire, d' un conquête. "Dresser, ériger, élever un trophée, des trophées.
   Il renversera leurs trophées;
   Et leurs couleuvres étoufées
   Seront les jeux de son berceau.
       Rouss.
_ Peindre, graver, sculpter des trophées. = 3°. Il se prend poétiquement pour Victoire: fier de ses trophées, de tant de trophées. = 4°. Fig. On dit, mais toujours en mauvaise part, Faire trophée, faire gloire, vanité de: "Faire trophée du vice. "Bien loin de rougir d' une action si lâche, il en fait trophée.

TROPIQUE


TROPIQUE, s. m. [Tropike.] Cercle de la Sphère, parallèle à l' Équateur, et qui est le terme de part et d' autre du cours du Soleil. "Il y a deux tropiques, également distans de l' Équateur; le tropique du Cancer et le tropique du Capricorne. "Région située entre les deux tropiques, entre les tropiques.

TROPOLOGIQUE


TROPOLOGIQUE, adj. [Tropologike.] Figuré. "Le sens tropologique d' un emblème. Voy. TROPE Ce mot ne se dit que parmi les savans; et il est même peu usité. Figuré est du Discours ordinaire.

TROQUER


TROQUER, TROQUEUR, Voy. TROC.

TROT


TROT, s. m. TROTE, s. f. TROTER, v. n. [Le t final ne se prononce pas dans le 1er: 2e e muet au 2d, é fer. au 3e.] Trot est une sorte d' alûre des bêtes de voiture ou de charge, entre le pâs et le galop. "Grand trot. Mettre un cheval au trot. = Trote, espace de chemin. "Il y a une bone trote d' ici là. _ Il est bâs. Trév. Il est populaire. Acad. = Troter; aler le trot. "Cheval, qui trote rudement, qui trote menu. Faire troter un cheval. = Marcher beaucoup à pied. "J' ai troté tout le jour. _ Fig. Faire bien des pâs pour une afaire. "J' ai un procês sur le bureau: il y a quatre jours que je trote. "La critique
   Lui fournit de bons mots, qui trotant par la ville,
   Font citer leur Auteur.
       La Chaussée.

TROTERIE


TROTERIE, s. f. Course, c' est un mot de Mde de Sévigné. "Je gronde M. de Grignan de vous y avoir menée (à Marseille) je ne saurois aprouver cette troterie inutile. _ Ce mot peut être bon dans le style familier badin.

TROTEUR


TROTEUR, s. m. TROTIN, s. m. TROTOIR, s. m. [Tro-teur, tein, toar.] Le 1er se dit, dans les Académies, d' un cheval qu' on a dressé à n' aler que le trot. _ L' Acad. avait dabord mis trotteux: elle a mis trotteur dans les dernières éditions. = On dit en plaisantant, d' un homme qui va et qui vient, que c' est un troteur; et d' une femme qui aime à troter, à courir ça et là, que c' est une troteûse. L' Acad. ne le met pas. = Trotin, mot burlesque, pour signifier un petit laquais. "Elle n' a qu' un trotin. = Trotin ou Trotet. Il y a une vieille poésie, qui a pour titre: Les Pardons de Saint Trotet, à cause du plaisir que les femmes prenent à troter, sous prétexte d' aler visiter quelque Chapelle hors de la Ville. La Monn. _ Quelques-uns disent en ce sens, avoir dévotion à Saint Trotin; Ce sont des expressions burlesques, que l' Acad. n' a eu garde de mettre dans son Dictionaire.
   TROTOIR, chemin élevé, que l' on pratique quelquefois le long des quais, des ponts, des rûes, pour la comodité des gens qui vont à pied. Être sur le trotoir, se dit, fig. st. famil, d' une fille qui est à marier. _ Quelques-uns l' apliquent à d' aûtres objèts. "Cette afaire est sur le trotoir; elle sera bientôt conclûe, décidée. "Cet homme est sur le trotoir; il sera bientôt placé.

TROU


TROU, s. m. TROUÉE, s. f. TROUER, v. act. [Trou, monos. Trou-é-e: 2e é fer. au 2d et au 3e.] Trou, ouvertûre ordinairement ronde, ou aprochant; ce qui le distingue de la fente, qui est une ouvertûre en long. "Grand, petit trou. "Faire un trou à une murâille, à un plancher, en têrre. "Il a un trou à la tête, à la jambe, etc. et non pas à sa tête, à sa jambe. = Fig. st. famil. Boucher un trou, payer une dette. _ En st. prov. mettre la pièce auprês du trou; ne point apliquer le remède où il faudrait. Voyez Boire, Bouteille, Cheville, Lune. = Trou se dit par mépris d' un lieu fort petit. "Ce n' est pas une maison, c' est un trou: on m' a logé dans un trou. st. famil.
   TROUÉE, espace vide, qui perce tout au travers d' un bois. = Ouvertûre faite dans l' épaisseur d' une haie.
   TROUER, percer, faire un trou. "Les voleurs ont troué la murâille. "Les vers ont troué cet habit. _ Il n' est que du style simple.

TROUBLE


TROUBLE, s. m. et adj. TROUBLER, v. act. [Trou-ble, blé: 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Trouble, adj. Qui n' est pas clair, qui est brouillé. "De l' eau, du vin trouble. "La rivière est trouble. = L' air, le tems est trouble; il n' est pas serein. _ Ce verre est trouble; il n' est pas net, ou, clair. _ Avoir la vûe trouble; voir trouble, avoir la vûe chargée, ne voir pas bien. _ Fig. "Il voit trouble dans cette afaire; st. famil. = En st. prov. Pêcher en eau trouble, tirer du profit, de l' avantage, des désordres publics ou particuliers.
   TROUBLE, s. m. 1°. Brouillerie, désordre; causer, aporter du trouble. Mettre le trouble dans une famille, dans une société. Apaiser, faire cesser le trouble. = Au plur. Guerres civiles, soulèvemens, émotions populaires. "Pendant les troubles de la Ligue, ou simplement, durant les troubles. "Exciter des troubles dans un État, dans une Province. "Calmer, apaiser les troubles. = 2°. Inquiétude, agitation d' esprit. "Le trouble de son âme, de son esprit, de son coeur, se remarquait sur son visage, dans sa démarche, etc.
   Mais quel trouble, vous-même, aujourd'hui vous agite?
   Votre ame, en m' écoutant, paroit toute interdite.
       Esther.
  Commandez, chère Électre, au trouble de vos sens.
      Oreste.
REM. Être, mettre en trouble ne sont pas des expressions bien sûres, sur-tout la seconde. Il y a des exemples de la première. "Toute la famille étoit en trouble. Acad. "La ville étoit en trouble, pour savoir qui succéderoit à Pigmalion. Télém. = Fontenelle emploie en trouble, adverbialement:
   Moi, je ne vous l' ai dit qu' en trouble, qu' avec peine,
   D' une voix craintive, incertaine.
Pour celui-là, on peut dire, sans crainte, qu' il ne vaut rien.
   Trouble-Fête se dit, en st. famil. d' un indiscret, qui vient interrompre la joie d' une assemblée. "C' est un vrai trouble-fête.
   TROUBLER, au propre, rendre trouble. "Les pluies ont troublé la rivière: le tonerre trouble le vin. = Se troubler, devenir trouble. "Le vin se trouble; le tems comence à se troubler. = Troubler, au fig. aporter du trouble, du désordre. "Troubler l' ordre, le repôs public, un Royaume, une famille. "Nous étions en paix: il est venu nous troubler. "La peur les saisit, et leur troubla tellement l' imagination, qu' ils ne se purent désabuser. Maimb. = Inquiéter quelqu' un dans la jouissance de quelque bien. "Il a été troublé dans la jouissance de ce bénéfice, dans la possession de cette terre. = Interrompre: troubler un entretien. "Cet accident vint troubler la fête. = Se troubler, en parlant des persones, s' intimider, s' embarrasser, perdre la carte. "Acusé qui se trouble dans son interrogatoire. "Cet Orateur s' est troublé. = Être troublé se dit sans régime, des persones; et des chôses avec la prép. par. "On voyoit bien que cet homme était troublé. * "La Russie était troublée, dit Voltaire. Je crois qu' il falait ajouter, par des divisions, par des guerres intestines, ou autres chôses semblable. Il me semble qu' on ne dit pas absolument d' un Royaume, qu' il est troublé. = * Corneille fait régir à l' actif, la prép. de.
   D' obstacle sur obstacle, il va troubler le vôtre.
       Polieucte.
votre dessein. _ C' est un faux régime. Le Poète aurait dit, sinon plus élégamment, du moins plus régulièrement:
   Et par plus d' un obstacle, il va troubler le vôtre.

TROUÉE


TROUÉE, TROUER. Voy. TROU.

TROUPE


TROUPE, s. fém. TROUPEAU, s. m. [Trou-pe, po: 2e e muet au 1er, dout. au sing. du 2d, lon. au plur. Troupeaux, pron. troupô.] Troupe, multitude de gens assemblés. Il régit ordinairement l' art. indéf. de. "Une troupe de Paysans, d' Archers, de voleurs; et non pas des Paysans, des voleurs, etc. comme disent plusieurs dans les Provinces méridionales. _ Cependant quand troupe a l' article défini, le génitif qu' il régit prend le même article. La troupe des Comédiens est arrivée. = Troupe, Bande, Compagnie (synon.) Plusieurs persones, jointes ensemble, font la troupe: plusieurs persones, séparées des aûtres, mais pour se suivre et ne point se quiter, font la bande: plusieurs persones, réunies par l' ocupation, l' emploi ou l' intérêt, font la Compagnie. On dit, une troupe de Comédiens, une bande de voleurs, et la Compagnie des Indes. "Il n' est pas honête de se séparer de sa troupe pour faire bande à part; et il faut toujours prendre intérêt à la Compagnie où l' on se trouve engagé. GIR. Synon. = Dans la Farce du Baron de la Crasse, un personage s' écrie: voici la bande des Comédiens; on le reprend:
   Dites troupe: l' on dit bande d' Egyptiens:
   Et bande offenseroit tous les Comédiens.
Leur troupe voulut prendre la qualité de Compagnie, en présentant une suplique à un premier Président, et le Chef de la Compagnie souveraine lui promit d' en parler à sa troupe. L' Ab. Roubaud. = Troupes, au pluriel et sans régime, signifie des gens de guerre. "Ce Prince leva des troupes, a de bones troupes. = Mais il se dit aussi au singulier, pour un petit Corps de Cavalerie ou d' Infanterie. "Cet Oficier conduit bien sa troupe; il tient sa troupe en bon état. = En troupe, par troupe, adverbes. L' Acad. ne met que le premier. On dit aler en troupe, marcher en troupe, en parlant de gens qui vont ensemble en grand nombre; mais on dit aussi que: les loups vont en troupe ou par troupe.
   Rem. Plusieurs Traducteurs du Nouveau-Testament, et des Prédicateurs, ont traduit le mot latin turb‘, turbas, par le mot français troupes. "Toutes les troupes étoient dans l' étonement: toutes les troupes s' étonoient: stupebant omnes turb‘. "Le Sauveur rassasia miraculeusement les troupes dans le désert. "S' il desire qu' on le suive, c' est pour enseigner les troupes. "Votre Père et moi afligés vous cherchions parmi les troupes. BOSS. Dites, toute la multitude, tout le Peuple, etc. Bouh. = Troupe pour multitude, ne se dit que des persones. Ce n' est que dans les Provinces méridionales que l' on dit: j' ai une troupe d' afaires; il y a une troupe de nouvelles; elle a une troupe de robes. _ Et quoique monde signifie quelquefois les persones, ce n' est pas moins un gasconisme que de dire, une troupe de monde, pour, une troupe de gens. Desgr. Gasc. corr. _ Tirer sur ses troupes, c' est, dans le style figuré familier, faire des démarches, ou dire des chôses qui font tort à ceux de notre parti. "Vous tirez-là, à boulets rouges, sur vos propres troupes. ANON. _ L' Acad. ne le met point; mais cela est reçu. = * On disait autrefois faire des troupes, faire une armée, et Maimbourg le dit toujours de même. On dit depuis long--tems, lever des troupes; mettre sur pied une armée, etc.
   TROUPEAU, est, au propre, une troupe d' animaux d' une même espèce, qui sont dans un même lieu. Il régit toujours la prép. de. "Troupeau de moutons, de brebis, de vaches, etc. = Quand on dit absolument, troupeau, on entend ordinairement, un troupeau de moutons ou de brebis. = On apèle figurément l' Église, le troupeau de J. C. et le Peuple d' un Diocèse, d' une paroisse; le troupeau de l' Évêque, du Curé, qui en sont apelés les Pasteurs, et non pas les Bergers. "Veiller sur le troupeau, sur son troupeau, etc. = Troupeau se prend quelquefois pour troupe, multitude; et ordinairement en mauvaise part. "Un Auteur qui se distingue en un genre particulier, est bientôt suivi d' un troupeau d' imitateurs.

TROUSSE


TROUSSE, s. f. TROUSSEAU, s. m. TROUSSER, v. act. TROUSSIS, s. m. [Trou--ce, so, sé, ci: 2ee muet au 1er, é fermé au 3e.] Trousse, 1°. Faisceau de plusieurs chôses liées ensemble. "Trousse de linge mouillé qu' on raporte de l' eau; d' herbes, de fourage, de chaûme, de cordages. = 2°. Carquois. "Tirer des flèches d' une trousse. Òpuiser une trousse de flèches. _ Carquois est plus noble. = 3°. Sorte d' étui où les Barbiers mettent leurs rasoirs, leurs peignes et leurs ciseaux. _ On dit aussi trousse à peignes, la partie d' une toilette, où l' on serre les peignes. = 4°. Trousses, au plur. les chausses des Pages. _ De là l' adverbe, aux trousses, à la poursuite. "Il est aux trousses des énemis. "Je lui mettrai le Prévot aux trousses; je le mettrai à ses trousses.
   Aux trousses du fâcheux je vais en lâcher un,
   Qui, s' attachant à lui, saura bien m' en défaire.
       Piron.
  ....Un jour vous vous mordrez les pouces
  D' avoir eu si long tems des Flateurs à vos trousses.
       Rousseau.
= Fig. st. famil. Être aux trousses de quelqu' un, être toujours à sa suite, d' une manière qui l' incomode. = Cette expression n' est pas fort noble. "Tu crois voir par tout la mort à tes trousses. Mde Dacier., Iliade. Un Auteur a dit que le Seigneur est toujours à nos trousses, comme un maître qui poursuit ses esclaves. Cette expression ne convient pas à la Majesté divine. = * Maimbourg dit, à leur trousse, au singulier, contre l' usage. "Les Turcs se mirent à leur trousse. Hist. des Croisades.
   TROUSSE entre dans la composition de quelques mots, mais ce n' est pas comme substantif, c' est comme présent du verbe Trousser. Il signifie alors, qui trousse. _ Trousse-galant, en st. famil. sorte de maladie, qui fait mourir promptement. = Trousse-queûe, morceau de cuir ou de toile, garni de boucles, avec lequel on envelope et on retrousse la queûe d' un cheval. = Trousse-quin, pièce de bois cintrée, qui s' élève sur le derrière d' une selle, comme les arçons sur le devant.
   TROUSSEAU, petite trousse. On ne le dit guère que des clefs et des flèches. = Hardes, habits, linge, etc. qu' on done à une fille, quand on la marie, ou qu' elle se fait religieûse.
   TROUSSER, replier, relever ce qui pend, en parlant des habits qu' on porte sur soi. "Trousser une robe, un long manteau. _ Troussez cet enfant; troussez-vous, c. à. d. relevez sa robe, votre robe. = Fig. st. famil. Troussez bagage, partir, déloger brusquement. Voy. MALLE. Dans le même style; expédier promptement. "Les Juges ont troussé cette afaire dans une matinée. "La fièvre l' a troussé en trois jours. Si cette maladie le prend, il sera bientôt troussé. = Trousser un compliment me paraissait une locution proverbiale et ridicule; mais ma remarque m' a paru douteûse, depuis que j' ai vu dans le Dict. de l' Acad. "Un compliment bien troussé, c' est-à-dire, bien tourné. Je crois pourtant que celui-ci vaut mieux, et qu' il est plus du goût de tout le monde. = Troussé, ée, adj. "Un petit homme bien troussé, bien fait, bien proportioné, propre et joli. "Cheval bien troussé, bien pris et un peu ramassé. "Petite maison bien troussée, jolie petite maison. St. famil.
   TROUSSIS, pli qu' on fait à une robe, à une jupe, etc. pour la racourcir, ou pour l' empêcher de traîner.

TROUVABLE


*TROUVABLE, adj. Qui peut être trouvé. Il est peu usité, et l' Acad. ne le met pas. Il ne serait bon qu' avec la négative: cet homme n' est pas trouvable. On dit plutôt, est introuvable. L' Acad. admet celui-ci.

TROUVâILLE


TROUVâILLE, s. f. TROUVER, v. a. [Trou-vâ-glie, vé: 2e. lon. au 1er, mouillez les ll; é fer. au 2d. _ On a dit aûtrefois treuver, et le peuple le dit encôre en certaines Provinces.] Trouvâille est du style familier. Chôse trouvée heureûsement. "C' est une bone, une vraie trouvâille. _ Faire une trouvâille, rencontrer heureûsement quelque chôse par hazard. = On le dit quelquefois des persones. "Un homme de ce caractère est une trouvâille.
   TROUVER, 1°. Rencontrer quelqu' un, ou quelque chôse, soit qu' on le cherche, soit qu' on ne le cherche pas. "Il a trouvé un trésor. "Il a tant cherché ce papier, qu' enfin il l' a trouvé. = Trouver, Rencontrer (synon.) On trouve les chôses inconûes, ou celles qu' on cherche: on rencontre les chôses qui se trouvent en notre chemin, ou qui se présentent sans qu' on les cherche. "J' ai trouvé enfin ce passage, que je cherchois depuis long-tems. J' ai rencontré ce que je ne cherchois pas, et que je ne desirois pas. "Les plus infortunés trouvent toujours quelque ressource dans leurs disgraces. Les gens, qui se lient aisément avec tout le monde, sont sujets à rencontrer mauvaise compagnie. GIR. synon. = Trouver régit quelquefois à et l' infinitif. "J' ai trouvé un bon coup à faire. "Quel plaisir trouvez-vous à faire du mal? Molière met de au lieu d' à.
   Quel diable de plaisir trouvent tous les Chasseurs
   De se voir exposés à mille et mille peurs.
À~ se voir n' aurait rien dérangé dans le vers, et il aurait été plus conforme à l' usage.
   Rem. Le P. Bouhours trouve que trouver à redire et trouver à dire, sont également bons; mais que le second est le seul qui conviène, quand il s' agit d' une chôse qu' on ne trouve pas, ou d' une persone qu' on regrette. "J' ai trouvé cent écus à dire dans ma cassette. "C' est un homme agréable, et on le trouve à dire ici. "Les Chrétiens ne trouvèrent à dire (ne perdirent) qu' environ deux mille Soldats, etc. Maimb. = Trouver à redire, au contraire, est le meilleur, pour exprimer la critique.
   Est-ce qu' à mon Sonet vous trouvez à redire?
   - - Je ne dis pas cela, mais, etc.
       Misantr.
= 2° Inventer: "Il a trouvé un beau secret, un bon remède. = Trouver, inventer, (synon.) On invente de nouvelles chôses par la force de l' imagination: on trouve des chôses cachées par la recherche et par l' étude. L' un marque la fécondité de l' esprit et l' autre la pénétration. "La Mécanique invente les outils et les machines: la Physique, trouve les causes et les éfets. GIR. Syn. = 3°. Trouver se dit souvent de l' opinion fondée sur la réflexion de l' esprit, ou sur les aparences des chôses. "Je trouve cela bon, je trouve que cela est bon. _ Il régit le datif de la persone et l' acusatif de la chôse: je lui trouve de l' esprit, bon visage, de la fièvre, etc. Il me parait qu' il a, etc. = Il régit aussi des adjectifs et des participes. "Je le trouvai malade; il le trouva tout disposé à, etc. "Il le trouva se disposant à faire le voyage d' Italie. Moreau.
   Quoi, vous avez le front de trouver cela beau!
       Misantr.
= Pour les verbes, il régit l' indicatif dans la phrâse afirmative. "Je trouve qu' il raisone fort mal, qu' il fait des paralogismes. *M. Linguet lui fait régir le subjonctif. "Je vous crois trop juste pour vous en plaindre, si l' on venoit à trouver que vous n' ayez pas réussi. Ni le verbe trouver, ni le verbe qui le régit, ni la conjonction si qui le modifie n' exigent le subjonctif; car si l' on venoit trouver, est comme si l' on disait, si l' on trouve; et je ne crois pas qu' alors il faille se servir du subjonctif. _ Ce mode n' est bon que pour la phrâse négative ou interrogative; si l' on ne trouve pas que vous ayiez réussi; ou, trouvera-t-on que vous ayiez réussi? = Remarquez même que dans l' interrogation, acompagnée de la négative, on ne doit pas mettre le subjonctif. "Ne trouvez-vous pas que de semblables réflexions soient bien placées? L' Ab. Grosier. Je crois qu' il falait, trouvez-vous qu' elles soient bien placées, ou, ne trouvez-vous pas qu' elles sont fort mal placées. La raison de cette diférence de régime, c' est que, dans trouvez-vous, il y a du doute, et dans ne trouvez-vous pas, il n' y a pas du doute, quoique la forme soit interrogative; ne trouvez-vous pas est équivalent à, vous trouvez sans doute que, etc. = 4°. Se trouver ne signifie le plus souvent que, être; et il régit, comme ce verbe, des adjectifs, des participes et quelques adverbes. "Il se trouve soulagé: il s' est trouvé pauvre au milieu de ses richesses. "Je me trouvois un nouvel homme: la sagesse éclairoit mon esprit: je sentois une douce force pour modérer mes passions. Télém. "Il se trouve mal, bien, mieux. = Se trouver mal, c' est aussi tomber en faiblesse, s' évanouïr. = Se trouver bien ou mal de; avoir sujet d' en être content, ou mécontent. "Il se trouve bien de ce remède, de ce régime. = Il régit quelquefois l' infinitif. "Ils s' étoient mal trouvé d' avoir rejeté le Dieu de leurs Pêres. Boss. "Ceux que ma réflexion regarde, se trouveront bien de m' en croire. _ Dans cette expression, bien ou mal se placent aprês le verbe dans les tems simples; et dans les tems composés, entre l' auxiliaire et le participe: Il se trouve bien; il s' est mal trouvé de, etc. = Remarquez aussi que se mal trouver ne se dit guère que dans les tems composés. Ne dites pas: il se trouve mal; et encôre moins, il se mal trouve de ce conseil: dites, il s' est mal trouvé de ce conseil: il a eu pour lui de fâcheûses suites. = Se trouver, être présent, régit à: il s' est trouvé à cette action. = Se trouver en quelque lieu; s' y rendre, ou y être. "Je m' y trouverai:Trouvez-vous-y à telle heure. "Nous croyions être seuls en ce lieu, il s' y trouva quantité de monde. = Dans cette dernière phrâse, se trouver est impersonel. Il l' est aussi dans d' aûtres sens; il se trouve; il se trouva que; il arrive, il arriva que, etc. "Il s' en est trouvé, il y en a eu plusieurs qui, etc. * M. Bullet a eu une distraction, quand il a dit: ils s' en trouvoient toujours quelques-uns, etc. Peut-être faut-il mettre cette faute grossière sur le compte de l' Imprimeur, qui peut-être aussi, comme il arrive quelquefois, aura voulu corriger l' Auteur.
   Rem. Dans trouver bon, ou trouver mauvais, ces deux adjectifs sont indéclinables, quand ils signifient aprouver ou désaprouver. "Je trouve bon la charité que vous avez de me reprendre, et non pas, je trouve bone, etc. Bouh. _ Ils régissent que et le subjonctif. "Il trouve bon que je lise le Télémaque. "Votre père trouve mauvais que vous veniez si tard.

TROUVèRE


TROUVèRE, TROUBADOUR, s. masc. [Trou-vère, ba-dour: 2e è moy. au 1er. _ L' Acad. écrit Trouverre, contre l' usage, ce me semble. Elle met aussi Trouveur, suivant l' exemple de ceux qui ont voulu franciser ce mot.] Le premier se dit des plus anciens Poètes français; le second des anciens Poètes provençaux. "Quels sont les modèles, quels sont les imitateurs, et qui mérite la préférence? Sont-ce les Trouvères? Est-ce les Troubadours? Grandes questions, qui ont exercé de savantes plumes. Ce qu' il y a de mieux démontré, c' est que les Troubadours ont précédé et formé les Poètes Italiens.

TRUAND


TRUAND, ANDE, s. m. et f. TRUANDâILLE, s. f. TRUANDER, v. n. Termes populaires. Vagabond, vaurien, mendiant. Gueuser, mendier. "Cet homme est un truand: cette femme est une grosse truande. "Ce n' est que de la truandâille, de la canâille. "Ils ne font que truander.

TRUCHEMAN


TRUCHEMAN, s. m. [2e e muet. _ Richelet dit Truchemant; d' autres disent Truchement. TRÉV. met Trucheman ou Truchemant. L' Acad. ne met que le premier des deux.] Trucheman est moins noble qu' Interprète. _ Brebeuf dit des Destins et des Dieux:
   Mon triomphe ou ma mort seront leurs truchemens.
On est plus délicat aujourd'hui; et l' on n' aprouverait point cette expression dans un Poème sérieux. L' Acad. le met sans remarque.

TRUELLE


TRUELLE, s. fém. TRUELLÉE, s. fém. [Truèle, tru-élée: 2eè moyen au 1er, é fer. au 2d; 3ee muet au 1er, é aussi fermé au 2d.] Truelle est un petit instrument de fer ou de cuivre, dont les Maçons se servent pour employer le plâtre et le mortier dans la construction d' un bâtiment. Enduire à la truelle. Blanchir à la truelle, avec du plâtre blanc. = En st. prov. Aimer la truelle; aimer à bâtir. = Truellée, plein une truelle. "Il ne faut, pour ce petit ouvrage, qu' une truellée, que deux ou trois truellées de plâtre ou de mortier.

TRUFFE


TRUFFE, ou TRUFE, s. f. [2ee muet. = On a dit long-tems truffle, ou trufe. La plus anciène prononciation est truffle: on trouve ce mot dans un ouvrage imprimé en 1501. On disait aussi alors Tartuffle. _ Richelet et Andry trouvaient que truffle était le meilleur. L' Acad. préférait trufe: C' est le seul qu' elle ait admis dans les dernières édit. et le seul dont on doive se servir. L. T.] Plante, qui n' est en aparence qu' une masse charnûe, qui se trouve dans la terre, qui ne pousse ni tige, ni feuille, et qui n' a ni fleurs, ni racines. Elle est bone à manger. "Trufe blanche, trufe marbrée. "Ces trufes ne sont pas encore mûres.

TRUIE


TRUIE, s. fém. [Tru-ie: 2ee muet.] La femelle du porc. = On apèle par mépris truie, grosse truie, une femme fort grâsse. = On dit, proverbialement, tourner la truie au foin, changer de discours, ou pour éluder une demande, ou pour faire cesser une conversation qui déplait.

TRUITE


TRUITE, s. fém. TRUITÉ, ÉE, adj. [Trui-te, té, té-e: 2e e muet au 1er, é fer. au 2d et au 3e.] Truite, poisson de rivière, fort délicat. = Truite saumonée, qui tient de la couleur et du goût du saumon. = Truité, qui a des taches rousses comme une truite. Il ne se dit que des chevaux et des chiens.

TRUMEAU


TRUMEAU, s. m. [Trumo. Plur. tru--meaux; pron. trumô: l' ô est long.] 1°. La partie d' un boeuf, qui est au-dessus de la jointûre du genou. On ne lui done ce nom que quand elle est coupée pour être mangée. = 2°. En Architectûre, l' espace d' un mur entre deux fenêtres. = Grande glace, ainsi apelée, parce qu' elle se met ordinairement dans le trumeau entre deux fenêtres; ou sur une cheminée.

TU


pron. pers. sing. de la 2e persone. On ne s' en sert qu' en parlant à des persones inférieûres, ou avec qui l' on est très-familier. Voy. TOI, et TUTOYER.

TUABLE


TUABLE, adj. Qu' on peut tuer. _ Il est peu usité et ne peut trouver place que dans le style comique. L' Acad. le met sans remarque et sans en doner d' exemple.

TUANT


TUANT, adj. [Tu-an, ante: 2e lon.] Fatigant, qui caûse beaucoup de peine. "Cet emploi, ce travail est tuant. "Cet homme est tuant: cette conversation est tuante. = M. Linguet l' emploie au propre et substantivement. Celui qui tûe. "Dans ce siège, il n' y avoit eu ni tuans, ni tués. _ Cela ne peut se dire qu' en plaisantant. Voyez TUER.

TU AUTEM


TU AUTEM, s. m. [tu-otèn.] Façon de parler familière, empruntée du latin. Le point essentiel; le noeud, la dificulté d' une afaire. "C' est là, ou voilà le tu-autem. "Il tiendra une table enragée; c' est là le tu-autem. SÉV. "Qu' il l' aime, qu' il l' estime toujours; mais sur-tout qu' il suive ses conseils: voilà le tu-autem. ID.

TUBE


TUBE, s. m. [2e e muet.] Tuyau, conduit, canal. Il ne se dit que par les savans. "Le tube d' une lunette de longue vûe. "Le tube d' un baromètre, d' un thermomètre, etc. Voy. TUYAU.

TUBERCULE


TUBERCULE, s. m. [2e ê ouv. dern. e muet. Quelques-uns le font mal-à-propôs fém.] 1°. Excroissance, en forme de bosse, qui survient à une feuille, à une racine, à une plante. = 2°. Élevûre, qui survient à la peau. = 3°. Petit abcês, attaché à la superficie du poumon.

TUBÉREUSE


TUBÉREUSE, s. f. [Tubé-reû-ze: 2e é fer. 3e lon. 4e e muet.] Fleur odoriférante, de couleur blanche, venant d' un oignon, et qui a la tige fort haûte.

TUDèSQUE


TUDèSQUE, adj. [Tudèske: 2e è moy. 3e e muet.] Il se dit de la Langue des Allemands; le langage tudèsque. = S. m. "Le tudesque est un indiôme três-ancien. = Il se dit souvent par mépris.
   D' un françois fade ou d' un latin tudesque
   Endormiront les siècles à venir.
       Gresset.
"Des manières naturelles et pourtant prévenantes, également éloignées de la rusticité tudesque, et de la pantomime ultra--montaine. J. J. Rouss.

TUER


TUER, v. act. TUERIE, s. f. TUEUR, s. m. [Tu-é, tûri-e, tu-eur: 2e é fer. au 1er; l' e muet du 2d est si muet qu' il ne se prononce pas, non plus que dans les futurs du verbe: il tuera, tuerait: pron. tûra, tûrè, en deux syllabes.] Tuer est, 1°. au propre, ôter la vie d' une manière violente. "Tuer un homme de sang froid, d' un coup d' épée, de pistolet; en traitre, ou à son corps défendant. Il fut tué d' un coup de canon. = On ne le dit point des morts violentes par exécution de Justice, ni de ceux qui ont été noyés, étoufés ou empoisonés. Acad. = 2°. Il se dit de toutes les morts violentes, arrivées par accident, et quelquefois des morts naturelles, causées par des maladies. "Une tuile lui tomba sur la tête et le tua: il tomba du haut du toit, et se tua. "Il fut tué d' un coup de tonerre. "Un coup de sang l' a tué. = 3°. Il se dit pareillement de tout ce qui caûse la mort. "La tristesse l' a tué: ses débauches le tueront. "Le grand travail tûe bientôt un homme. = 4°. Par exagération, fatiguer excessivement, altérer la santé. "Le chagrin le tûe: vous vous tuez à faire la vie que vous faites. = Se tuer: se doner beaucoup de peine pour réussir. Il régit de ou à: "On se tûe de lui remontrer son devoir. "Il y a donc du plaisir à faire une bonne action... Je me tuois à chercher des moyens de m' amuser et de me réjouir, lorsque j' avois sous la main cette source de bonheur. MARIN, Julie. "Je me tûe à relever les courages abatus. Vaug.
   On se tue à vous faire un aveu des plus doux,
   Cependant ce n' est pas encore assez pour vous.
       Molière.
= 5°. Tuer se dit aussi en parlant des animaux, que les bouchers assoment ou égorgent. Tuer des boeufs, des moutons. _ On dit même tuer de la viande. Et neutralement sans régime: "Ce Boucher tûe deux fois la semaine. _ On dit encôre, tuer des poulets, des pigeons, des lapins. _ Et par métaphôre: le grand froid a tué la plupart des arbres. = Le peuple dit, tuez ce feu: il faut tuer ces chandelles. L' Acad. ne le blâmait pas dabord. _ Dans les dernières éditions, elle dit qu' il est bâs et populaire. = Tuer le tems est du style familier. S' amuser pour que le tems ne paraisse pas trop long. = À~ tûe tête, de toute sa force. Crier, disputer à tûe-tête: c' est tout l' emploi de cet adverbe. = On dit figurément d' un homme, qu' il n' est~ pas bien tué, c. à. d. qu' il n' est pas assez bien convaincu, ou assez matté; quand on veut encôre disputer ou plaider contre lui. "Il n' est pas bien tué; je veux encôre lui porter quelques bottes. = On tue tout-à-fait, et non pas à moitié. La Fontaine a pourtant dit:
   Prit sa fronde et tua plus d' à moitié
   La volatile malheureuse.
Cela ne peut se dire qu' en plaisantant. = Tuer ne se dit figurément, dans le style sérieux, que dans cette phrâse, le péché tûe l' âme. On dit, plus noblement, done la mort à l' âme. Hors de là, tuer, au figuré, est un néologisme. "Il fait passer sous nos yeux une foule de personages, dont la confusion tûe le peu d' intérêt que ces tableaux auroient pu exciter. L' Ab. Fontenai. = Être tué. _ Voy. Il est mort, au mot MOURIR.
   TUERIE, carnage, massacre. "La tuerie fut grande dans la déroute. _ L' Auteur des Réflexions le trouve bon dans le style simple. Il cite Fléchier. "La tuerie fut grande. "Cette tuerie anima les Hérétiques contre Henri. "La bataille d' Ascalon fut plutôt une fuite d' un côté, et de l' aûtre une tuerie, qu' un combat. Maimb. = Ce mot me parait être que du style famil. L' Acad. n' en distingue point l' usage. Elle l' explique par carnage, massacre. Ceux-ci sont de tous les styles. = Tuerie signifie aussi l' endroit où les Bouchers tuent les animaux. _ Suivant le Rich. Port. le vrai mot est Échaudoir. L' Acad. met Tuerie, sans remarque.
   TUEUR, celui qui tûe. C' est un de ces mots qu' on forge dans la conversation. "Je ne connois ni le tueur, ni les tués. Mariv. _ L' Acad. ne l' admet que dans cette phrâse du style familier et moqueur. "C' est un tueur de gens. On le dit pour se moquer d' un homme qui fait le brâve. = Dans les Lettres Édifiantes, on l' emploie au propre et sérieusement. "Pour mériter, chez les Natchez (Sauvages de l' Amérique Méridionale) le titre de grand tueur d' hommes, il faut avoir fait dix esclaves, ou avoir levé vingt-chevelures.

TUF


TUF, s. m. TUFIER, IèRE, adj. [2e é fer. au 2, è moy. et long au 3e, fié, fiè--re.] Tuf est une sorte de terre blanchâtre, qui tient plus de la natûre de la pierre que de la terre; et qu' on troûve assez ordinairement au-dessous de la terre franche. "Creuser jusqu' au tuf. = Fig. st. famil. On dit d' un homme superficiel, et qui ne sait rien à fond, que: pour peu qu' on l' aprofondisse, on rencontre le tuf. Le soi-disant Marquis dit dans le Joueur.
   ......Ma foi la Cour m' ennuye;
   L' esprit de ce pays n' est qu' en superficie:
   Sitôt que vous voulez un peu l' aprofondir,
   Vous rencontrez le tuf.
= Tufier, qui est de la natûre du tuf.

TUILE


TUILE, s. f. [Tui-le: 2e e muet.] Carreau peu épais, fait de terre grâsse, cuite au four, et dont on se sert pour couvrir des bâtimens. "Tuile plate: tuile creûse. "Maison couverte de tuiles. _ Être logé prês des tuiles, au plus haut étage de la maison. = On dit, proverbialement, qu' on ne donerait pas du feu sur une tuile à quelqu' un; qu' on ne voudrait pas lui doner, lui prêter la moindre chôse.
   Rem. Dans les Provinces méridionales, on fait tuile masculin. On le troûve avec ce genre dans une édition contrefaite des Révolutions Romaines: "Des corbeaux qui se batoient, firent tomber un tuile à ses piés. _ Le contrefacteur était aparemment Provençal. Il falait mettre, une tuile.

TUILEAU


TUILEAU, s. m. TUILERIE, s. fém. TUILIER, s. m. [Tui-lo, leri-e, lié: 2e e muet au 2d, é fer. au 3e.] Tuileau, morceau de tuile rompûe. "Faire un âtre avec des tuileaux. Batre, moûdre des tuileaux pour faire du ciment. = Tuilerie, lieu où l' on fait de la tuile. _ Delà on apèle Les Tuilleries, un des jardins du Roi à Paris, parce qu' il y avait aûtrefois des tuileries en ce lieu: "Se promener aux Tuilleries. = Tuilier, ouvrier, qui fait des tuiles.

TULIPE


TULIPE, s. f. Fleur printanière, à haute tige, qui vient d' oignon, qui n' a point d' odeur, et dont le calice est fait en vâse. "Tulipe blanche, jaûne, rouge, violette, panachée, bordée, rayée, etc.

TUMBER


*TUMBER. Il s' est dit aûtrefois pour tomber; et Vaugelas assûre qu' il l' avait ouï dire souvent à des gens qui parlaient três-bien. Th. Corneille se contente de dire que peu de persones disaient tumber de son tems; et que c' était une prononciation condamnée par tout ce qu' il y avait de gens qui parlaient bien. _ Aujourd'hui, il n' y a que le Peuple qui le dise encôre en certaines Provinces.

TUMÉFACTION


TUMÉFACTION, s. fém. TUMÉFIER, v. act. [Tuméfak-cion, fié: 2e é fer. dern. é aussi fermé au 2d.] Tumeur, enflûre. "Il y a une tuméfaction à ce brâs. = Causer une tumeur. "Cette fluxion a tuméfié la partie. = Ces mots ne se disent que par les Médecins. Dans le discours ordinaire, on dit tout bonement enflûre, et faire enfler. M. Mercier a employé le participe au figuré: "Les Échevins tuméfiés du poids de leur grandeur, sont jaloux de transmettre leurs traits à la postérité. _ Cela n' est bon que pour le burlesque.

TUMEUR


TUMEUR, s. f. [Tu-meur.] Enflûre en quelque partie du corps de l' animal, causée par quelque accident ou quelque maladie.

TUMULTE


TUMULTE, s. m. TUMULTUAIRE, adj. TUMULTUAIREMENT, adv. TUMULTUEUX, EûSE, adj. TUMULTUEûSEMENT, adv. [Tu--mul-te, tu-ère, èreman, tu-eû, eû-ze, eû-zeman: 3e e muet au 1er, 4e è moyen et long au 2d et au 3e, longue aussi aux trois dern. 5e e muet dans tous.] Tumulte, grand bruit, acompagné de confusion et de désordre. "On entendit un grand tumulte. "Il s' excita, il s' éleva un grand tumulte~: on eut de la peine à apaiser le tumulte.
   Ici, loin du tumulte, aux devoirs les plus saints,
   Tout un peuple naissant est formé par mes mains.
       Prologue d' Esther.
= Fig. Le tumulte des passions, le trouble qu' elles excitent dans l' âme. Cette expression est du beau style. = En tumulte, adverb. "Ils allèrent; ils s' assemblèrent en tumulte. = Tumultuaire et tumultueux paraissent avoir le même sens, et peu d' Auteurs les distinguent. Il semble pourtant à La Touche qu' il y ait quelque diférence entre ces deux mots; que le premier signifie proprement ce qui se fait à la hâte, avec trouble, sans ordre; et le second, ce qui se fait avec sédition. "Une assemblée tumultuaire: une assemblée tumultueûse. "Résolution, délibération tumultuaire. Bruit, Cris, tumultueux; esprit tumultueux, brouillon, emporté, séditieux. "On procéda tumultuairement à cette Élection. "Ils allèrent tumultueûsement trouver le Magistrat. _ Cette distinction est dans le Dict. de l' Acad. et les exemples en sont tirés. = * Rollin emploie tumultuaire d' une manière qui n' est pas fort usitée. "M. Pascal explique quelle est l' origine de toutes les occupations tumultuaires des Hommes. Hist. Anc. Il veut dire, les ocupations des hommes, agités par les passions. Nicole s' est aussi servi de cette expression. Il me semble, dit M. l' Ab. Roubaud, qu' il s' agit bien moins dans ces phrâses de marquer la précipitation, que l' agitation, le trouble, le désordre des occupations tumultueuses, d' une vie tumultueûse. = Mde de B... parle d' une armée tumultuaire: elle entend une armée levée à la hâte et indisciplinée. Cela a tout l' air d' un anglicisme.
   REM. Tumultueux précède quelquefois élégamment le substantif:
   Fuyez, fuyez, tumultueux desirs,
   Tyrans cruels, que nous nommons plaisirs.
   L' amitié pure et l' amour de l' étude,
   Présens du ciel, faits pour la solitude,
   Rempliront seuls mes paisibles loisirs.
       Le Franc.

TUNIQUE


TUNIQUE, s. f. [Tunike: 3e e muet.] 1°. Espèce de chemise de laine. Sorte de vêtement de dessous, que portaient les Anciens, et que certains Religieux et quelques Religieûses portent encôre. = 2°. Habillement que les Évêques portent sous leur chasuble, quand ils oficient pontificalement. _ Sorte de veste, dont nos Rois sont revétus à leur sacre, sous le manteau royal. _ Nom doné à la dalmatique des Diacres et des Sous-Diacres. Celui-ci est le mot d' usage. = 3°. Il se dit en Anatomie et en Botanique des pellicules ou membranes, qui envelopent certaines parties du corps de l' animal, ou des plantes. On dit sur-tout, les tuniques de l' oeuil.

TUORBE


TUORBE, s. m. [Tu-orbe: dern. e muet.] On a dit aûtrefois téorbe. L' Académie disait théorbe, et ajoutait: plusieurs prononcent thuorbe. Voilà donc quatre manières d' écrire ce mot. On n' écrit plus que tuorbe, et c' est le seul que mettre l' Acad. dans les dernières éditions. = Espèce de luth à long manche, dont les cordes sont simples, et dont on se sert également pour jouer des pièces, et pour acompagner la voix.

TURBAN


TURBAN, s. m. Coifûre des Orientaux, faite d' une longue pièce de toile ou de tafetas, entrelacée autour d' un bonet. = Prendre le turban, se faire Mahométan. st. famil.

TURBOT


TURBOT, s. m. TURBOTIN, s. masc. [Turbo, le t final ne se prononce pas: turbo-tein.] Turbot, poisson de mer du genre des poissons plats. = Turbotin, turbot de la petite espèce.

TURBULEMMENT


TURBULEMMENT, adv. TURBULENCE, s. fém. TURBULENT, ENTE, adj. [Turbu--laman, lance, lan, lante; 3e lon. aux trois derniers.] Turbulent, impétueux, porté à faire du bruit, à exciter du trouble, du désordre. Turbulence, caractère de celui qui est turbulent. Turbulemment, d' une manière turbulente. "Il est fort turbulent: il a un esprit, ou c' est un esprit turbulent. "La turbulence de son caractère le rend insuportable à tout le monde. "Agir turbulemment.
   REM. Turbulence s' emploie sans régime. Mde B... lui fait régir la prép. contre. "Les Anglois se trouvèrent à la veille de porter la peine sévère, quoique tardive, de leur turbulence contre Richard II. Hist. d' Angl. Il sufisait de dire de leur turbulence.

TURC


TURC, TURQUE, adj. et subst. [Turk, turke: 2e e muet.] Nom de Nation. = On dit le Turc, ou pour la Nation turque, ou pour l' Empereur des Turcs. "Le Turc fut vaincu. "Le Roi de Suède étant sorti enfin des États du Turc. Fonten. On apèle aussi le Sultan, le Grand Turc. "Le Grand Turc lui done trois écus par jour dans son azyle. Volt. Hors du st. famil. on dit, le Grand Seigneur. = On dit, en st. prov. fort comme un Turc: "C' est un Turc, un homme inexorable. _ Traiter quelqu' un de Turc à Môre, avec toute sorte de rigueur. _ À~ la Turque, adv. a le même sens.
   Rem. Tous les Turcs sont Mahométans, mais tous les Mahométans ne sont pas Turcs. Car, sans parler des Mahométans de la Perse, de l' Afrique, de la Tartarie, ceux du Mogol et des Indes sont apelés Môres, et c' est le nom que leur donent les Missionaires. Un d' entre eux a pourtant dit, les Seigneurs Turcs. Plus bas, il dit: les Seigneurs Mahométans, et il dit mieux. = Comme nous conaissons mieux les Turcs que les autres Mahométans, et que nous avons plus de relation avec eux, l' usage a prévalu de dire, se faire Turc, pour dire, se faire Mahométan.

TURCISME


TURCISME, s. m. Mot employé par Bossuet, pour signifier la religion Turque. Il dit le Turcisme, comme on dit le Christianisme; et en parlant des Sectes, le Luthéranisme, le Calvinisme. Ce mot n' a pas été admis par l' usage.

TURIFèRE


*TURIFèRE, ou TURIFÉRAIRE. Rich. Le 1er ne se dit point: le 2d est dans le Richelet Port. L' Académie l' écrit avec une h. Voy. THURIFÉRAIRE.

TURLUPIN


TURLUPIN, s. m. TURLUPINADE, s. f. TURLUPINER, v. n. et act. [Turlu-pein, pi--nade, né: dern. é fer. au dern.] Ces mots viènent d' un Comédien de Paris, apelé Turlupin, qui divertissait le peuple par de méchantes pointes et des jeux de mots, qu' on apela turlupinades. Ses imitateurs ont été només Turlupins. (C' est un vrai Turlupin: il fait, il dit des turlupinades: il ne fait que turlupiner.) Pendant quelque-tems on vit régner en France le goût des turlupinades, et la Cour même semblait être la source de cette corruption. Mais Molière vengea le bon goût et la raison par les sanglantes râilleries qu' il fit des Turlupins et des turlupinades. BROSSETTE. = Les gens d' esprit ne se les interdisent pas toujours, mais ils les placent avec goût, et ne les prodiguent pas. Mde. de Sévigné, qui est un modèle admirable du style épistolaire, écrit à sa fille: "Ne craignons pas de nous permettre les turlupinades, qui viènent au bout de nos plumes. _ Mais rien n' est plus insuportable dans la conversation que des turlupinades fades et sans sel, sur-tout quand elles sont fréquentes.
   Turlupiner, est quelquefois actif, et signifie se moquer, tourner en ridicule: il turlupine tout le monde. _ Vigneul Marville le fait neutre, en ce sens, et lui fait régir l' ablatif, qui est le régime de se moquer. "La Cour jette volontiers les yeux, quoique de haut en bâs, sur les vices de la ville, pour en turlupiner. Il falait dire, pour les turlupiner.

TURPITUDE


TURPITUDE, s. f. Infamie procédant de quelque action honteûse. Il se dit des persones, et des chôses qui ont trait aux persones. "Cela fait voir la turpitude de cet homme. "Il y a une grande turpitude dans l' action dont vous parlez. "Ces sales équivoques et ces malhonêtes plaisanteries, qui coûtent si peu à la plupart de nos Écrivains, et qui font retomber le Théâtre dans la turpitude, d' où quelques Auteurs plus modestes l' avoient tiré. RAC. Préf. des Plaideurs. _ Découvrir la turpitude d' un homme, d' une famille; c. à. d. quelque chôse qui peut lui faire honte.

TURQUIN


TURQUIN, adj. m. TURQUOISE, s. f. [Tur-kein, koâ-ze: 2e lon. au 2d.] Le 1er se dit d' un bleu foncé et couvert. "Drap, tafetas, bleu-turquin. _ Il se dit toujours avec bleu. = Le 2d est le nom d' une pierre précieûse de couleur bleûe, et qui n' est point transparente.

TUTÉLAIRE


TUTÉLAIRE, adj. [Tutélère: 2e é fer. 3e è moy. et long, 4e e muet.] Qui tient sous sa garde, sous sa protection. Il ne se dit, parmi nous, que des Anges et des Saints. On le disait, chez les Païens, des Dieux Protecteurs. "L' Ange tutélaire de la France. "Les Saints tutélaires de ce Royaume. Les Dieux tutélaires.
   Que son aile tutélaire,
   Contre leur âpre colère,
   Soit ton rempart le plus sûr.
       Rouss.
= En prôse, il suit toujours le substantif. En vers, il peut quelquefois le précéder.
   Du Peuple Anglois, tutélaire génie.
       Gresset.
  De tes riches moissons ces tutélaires Dieux
  Feront croitre chez toi les trésors précieux.
       Le Noble.
Tutélaires Dieux forme une inversion dûre et choquante. Les adjectifs polysyllabes ne se placent pas avec grâce devant les substantifs monosyllabes.

TUTELLE


TUTELLE, s. f. [Tutèle, 2eè moy. 3e e muet.] Autorité donée par le Magistrat, ou par la loi, ou par la volonté d' un testateur, d' avoir soin de la persone et des biens d' un mineur. "Être chargé de la tutelle; prendre, accepter la tutelle. "Être en tutelle, hors de tutelle, se dit, au propre, des enfans mineurs, ou qui cessent de l' être.
   Je puis vous afranchir d' une austère tutelle~......
   Vous pouvez disposer de vous, de votre~ coeur.
       Phèdre.
_ Fig. style fam. Être géné, observé, gouverné, ou ne l' être plus.

TUTEUR


TUTEUR, TUTRICE, s. m. et f. Celui, celle qui est chargé de la tutelle de, etc. "Tuteur honoraire ou onéraire; testamentaire. Créer un tuteur à des mineurs. Son mari l' a nommée tutrice et curatrice de ses enfans.

TUTOIEMENT


TUTOIEMENT, s. m. TUTOYER, v. a. [Tu-toa-man, toa-ié; 3e é fer. au 2d.; le 1er e du 1er est entièrement muet; il l' est aussi dans les futurs du verbe: il tutoiera, tutoierait: prononcez, tutoâra, tutoârè, en 3 syllabes.
   ...Quand vous me conoitrez,
   De vos tons familiers vous vous corrigerez,
   Vous ne tutoirez plus un gendre de ma sorte.
       DEST. Le Glorieux.
  Il tutoye en parlant, ceux du plus haut étage,
  Et le nom de Monsieur est chez lui hors d' usage.
       Misant.
_ Plusieurs écrivent tutayer, et prononc. tuté-ié. LA TOUCHE le préférait. Il avoue pourtant que l' Académie veut qu' on écrive et qu' on prononce tutoyer. _ RICH. écrit tutaier, et veut qu' on prononce tutaié; mais celui-ci ne vaut tout-à-fait rien.] Ils expriment l' action d' user du mot tu et de toi, ton, ta, te, tes, en parlant à quelqu' un. "Il tutoie tout le monde. "En France, le tutoiement n' est reçu que de maitre à valet, ou entre des amis intimes. = Madame de G.... s' élève avec force contre la manie moderne d' aprendre aux enfans à tutoyer père et mère. "Votre petite fille vous tutoie, et je vous avoue que cela me choque beaucoup.... Une fille ne doit pas traiter sa mère comme une camarade: c' est contre l' ordre.... N' inspirons pas de crainte; mais sachons mériter le respect; la familiarité engendre le mépris.... elle n' a jamais servi qu' à cela, sur-tout de la part des pères et des mères. Th. d' Éd. = En vers, et dans la prôse poétique, on tutoie les Rois et Dieu même.
   Grand Roi, si jusqu' ici, par un trait de prudence,
   J' ai demeuré pour toi dans un humble silence.
       Boil.
  Seigneur~; dans ta gloire adorable
  Quel mortel est digne d' entrer?
      Rouss.
  Oui, grand Prince, j' ôse le dire,
  Tes sujets de bien si comblés.      Id.
"Ils t' invoquent, ô Toi, Père Tout-Puissant, et Toi, Fils égal au Père; et Toi, qui les unis tous deux par les noeuds d' un éternel amour. Jér. Déliv.

TUYAU


TUYAU, s. m. [Tu-io: plur. tuyaux; pron. tu-iô: l' ô est long.] 1°. Tube, ou canal de fer, de plomb, de fer-blanc, de cuivre, de bois, de terre cuite, etc. "Tuyau de fontaine, d' orgue, de lunette à longue vûe, etc. = Tuyau, tube (synon.) Ces deux mots ont la même signification; mais ils difèrent par l' emploi qu' on en fait. Le dernier ne se dit qu' en Physique, en Astronomie et en Anatomie. On dit, les tuyaux du blé, du chanvre, et d' aûtres plantes; des tuyaux d' orgues, etc. Et l' on dit, tubes des thermomètres, des baromètres, des lunettes, des télescopes, etc. Voy. TUBE. = 2°. L' ouverture d' une cheminée, depuis le manteau jusqu' en haut. = 3°. L' ouverture et le canal d' un privé. = 4°. Le bout creux de la plume des oiseaux. = 5°. La tige du blé et des autres plantes, qui ont la tige creuse.

TYMPAN


TYMPAN, s. m. [Tein-pan: 1re lon.] 1°. Partie de l' intérieur de l' oreille. C' est une membrane lisse, mince et transparente. = 2°. Dans l' Imprimerie, chassis composé de quatre barres de bois ou de fer, sur lesquelles est collée une peau de parchemin. "On étend sur le tympan les feuilles pour imprimer. = 3°. En Architectûre, l' espace du fronton, qui est compris entre les trois corniches. = 4°. Paneau de menuiserie, renfermé entre des moulûres. = 5°. En Mécanique et en Horlogerie, pignon enté sur son arbre, et qui engrène dans les dents d' une roûe.

TYMPANISER


TYMPANISER, v. act. [Tein-panizé; 1re lon. dern. é fer.] Ce verbe, qui signifie décrier publiquement, n' est d' usage que dans le style fam. "Il l' a tympanisé par-tout. "Il s' est fait tympaniser en plein Palais.
   C' est lui qui dans ses vers nous a tympanisés.
       Mol.
L' Académie n' en restreint point l' usage: c' est par oubli.

TYMPANITE


TYMPANITE, s. f. [Tein-panite: 1re lon. dern. e muet.] Hydropisie sèche; enflure du bas ventre, causée par des vents, qui y sont retenus.

TYMPANON


TYMPANON, s. m. [Tein-panon: 1re lon.] Instrument de musique, monté avec des cordes de fil de fer ou de laiton, et qu' on touche avec deux petites baguettes de bois. "Jouer du tympanon.

TYPE


TYPE, s. m. TYPIQUE, adj. [Tipe, pike: dern. e muet.] Symbole. "L' agneau pascal est le type de J. C.. "La manne est le type de l' Eucharistie. = Typique, symbolique, allégorique. "Le sens typique.
   Type, Modèle (synon.) Le type porte l' empreinte de l' objet: le modèle en done la règle. Le type vous représente ce que les objets sont aux yeux:le modèle vous montre ce que les objets doivent être. L' Imprimeur travaille sur des types, (mais l' usage ne permet pas de se servir de ce mot dans cette ocasion.) Le Sculpteur et le Peintre travaillent d' après des modèles. = On dit pourtant que, selon Platon, les idées sont les types de toutes les choses créées; mais elles sont types, en tant qu' elles représentent les chôses avant même que les choses soient: elles sont modèles, en tant que les choses doivent être faites d' après les idées mêmes. Extr. des Synon. Fr. de M. l' Ab. Roubaud.

TYPOGRAPHE


TYPOGRAPHE, s. m. TYPOGRAPHIE, s. f. TYPOGRAPHIQUE, adj. [Tipografe, grafi--e, fike.] Imprimeur, Imprimerie. Qui a raport à l' Imprimerie. = Ces mots sont assez nouveaux, sur-tout le 1er. "Erreur de Typographe. "Dans un endroit vous avez dit trois cent mille, et dans un aûtre, cent mille. Seroit-ce que vos Typographes auroient ajouté trois dans un de ces textes, ou qu' ils l' auroient omis dans l' âutre; ou est-ce une de vos distractions ordinaires. L' Abé Guénée à Volt. = On ne dit guère ces mots qu' en plaisantant, ou en critiquant.

TYPOMANIE


*TYPOMANIE, s. f. La manie de faire imprimer. Mot forgé par un Poète três-moderne.
   Vous allez donc en cornets de papier,
   Enveloper le poivre ainsi que Pelletier,
   Et faire un foible homage à la typomanie.

TYRAN


TYRAN, s. m. TYRANNIE, s. f. TYRANNIQUE, adj. TYRANNIQUEMENT, adv. TYRANNISER, v. act. ou TYRANIE, TYRANIQUE, etc. avec une seule n. [Tiran, ranie, nike, nikeman, nizé: 4ee muet au 2d, 3e et 4e. é fer. au dern.] Tyran, 1°. Qui a usurpé la puissance souveraine. = 2°. Prince légitime, qui gouverne avec cruauté et avec injustice. = 3°. Particulier qui abuse de son autorité contre le droit et la raison; ou, qui, dans la compagnie où il est, s' atribue plus d' autorité qu' il ne lui apartient; ou qui exerce durement son autorité dans sa famille, ou dans la société.
   Oui, nous verrons bientôt de petits conquérans,
   Du Parnasse François audacieux tyrans,
   De leurs maitres fameux proscrire les merveilles
   Et leur orgueil briser le sceptre des Corneilles.
       Le Franc. 1739.
* Balzac avait employé et inventé même tyrane: l' usage l' a rejeté. = Tyranie a tous les sens de tyran. La tyranie d' un Prince, d' un Gouvernement. "Gémir sous la tyranie. Exercer la tyranie. = Figurément. "La tyranie de la coutume, de la mode, des passions. = Tyranique, qui tient de la tyranie. _ Il ne se dit régulièrement que des chôses: action, ordre, gouvernement tyranique. "Tant l' amour déréglé est aveugle et tyranique dans un coeur qui n' a pas la force de s' en rendre le maitre. Maimb. * Voltaire dit du Cardinal de Richelieu, qu' il était ambitieux et tyrannique. Hist. du Parlement de Paris.
   Ce Fierenfat est par trop tyrannique.
       Enfant Prodigue.
Je ne crois pas qu' on le dise des persones. = Tyraniquement, d' une manière tyranique. "Gouverner tyraniquement. = Tyraniser, traiter tyraniquement. "Prince, Gouverneur, Magistrat, Seigneur, père, mère qui tyranise les peuples, ses vassaux, ses enfans. "Les passions tyranisent l' âme.
   On m' a, pour le choisir, presque tyrannysée,
   Et mon ame jamais n' y fut moins disposée.
       PIRON. Métrom.

TYRSE


TYRSE. Voy. TIRSE. {C761a~}