Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI SENTEUR


SENTEUR, s. f. [San-teur: 1re lon.] Odeur. "Bone, mauvaise senteur. Voy. ODEUR. On dit des eaux de senteur; de la poudre, des gants, des sachets de senteur; et absolument, au pluriel, des senteurs: Avoir, acheter, porter sur soi des senteurs; aimer, craindre les~ senteurs.

SENTIER


SENTIER, s. m. [San-tié, 1re lon. 2e é fer.] Au propre, chemin étroit au travers des champs, des bois, etc. "Il y a un sentier, qui abrège le chemin. " On disait aussi aûtrefois sente, s. f. et l' ancien Trév. les met tous deux indiféremment. Sente, ne se dit plus. = Sentier est beau au figuré. "Le sentier épineux de la vertu. Suivre les sentiers de la Vertu.
   Et toujours de la gloire évitant le sentier,
   Ne laisser aucun nom et mourir tout entier.
       Rac. Iphigénie.
  Seigneur, dans tes sentiers, que ton flambeau m' éclaire!
  Qu' il me guide à jamais et m' enseigne à te plaire!
  Sauve mon coeur, mes yeux, de tout funeste écueil.
       Le Franc.

SENTIMENT


SENTIMENT, s. m. [Santiman: 1re et dern. lon.] 1°. Sensation, Perception (Synon.) Ces mots désignent l' impression, que les objets font sur l' âme; mais le sentiment va au coeur, la sensation s' arrête aux sens, et la perception s' adresse à l' esprit. "Cet homage était encore plus de sentiment que de devoir; plus pour le Roi que pour le trône. Neuville, Or. Fun. du Maréchal de Belle-Isle. "Il s' exprimoit avec tant de force que ses sentimens passoient de son âme dans l' âme de ceux, qui l' entendoient. Id. Ibid. = 2°. Opinion, pensée (Synon.) Le sentiment est plus certain; l' opinion est plus douteûse; la pensée est moins fixe et moins assurée, elle tient de la conjectûre. _ Le mot de sentiment est plus propre en fait de goût, celui d' opinion convient mieux en fait de science; et le mot de pensée se dit plus particulièrement, lorsqu' il s' agit de juger des évènemens des chôses et des actions des hommes. _ Les sentimens sont un peu soumis à l' influence du coeur; les opinions doivent beaucoup à la prévention; les pensées tiennent assez de l' Imagination. GIR. Synon. = 3°. Avis, opinion (Synon.) Il y a un sens général, qui rend ces mots synonimes, lorsqu' il s' agit de conseiller, ou de juger; mais sentiment a plus de raport à la délibération: on dit son sentiment; Avis en a davantage à la décision: on done son avis; opinion en a un particulier à la formalité de Judicatûre : on va aux opinions. "Il peut y avoir des ocasions, où un Juge soit obligé de doner son avis contre son sentiment, et de se conformer aux opinions de sa compagnie. Id. Ibid. = 4°. En parlant des chiens, sentiment se dit de leur odorat. "Les chiens ont ordinairement le sentiment três fin, três subtil; mais il y a en a, qui n' ont point de sentiment.
   Rem. 1°. * Mallebranche dit toujours avoir sentiment de sans article: "On a sentiment intérieur de la volonté, par laquelle on remûe son brâs: "On a de plus sentiment intérieur d' un certain effort, qui accompagne cette volonté, etc. On dirait aujourd' hui, avoir le sentiment de, etc. avec l' article. = 2°. Marivaux a dit aussi; avoir sentiment de, sans article: "Il ne s' agissoit plus que d' une chose, que l' autre à son tour eut sentiment de son mérite. _ Là, eut le sentiment de, etc. ne vaudrait rien. Il faut se servir du verbe Sentir; que l' autre sentit son mérite. = 3°. Quand on emploie sentiment pour opinion, on l' emploie toujours au singulier, même quand il est question de plusieurs persones, à moins qu' on ne parle de plusieurs opinions. Ainsi l' on dit à plusieurs, dites-moi votre sentiment, et non pas vos sentimens, et de plusieurs; il m' ont dit leur sentiment, et non pas leurs sentimens. "J' ai voulu avoir la satisfaction de lire moi-même votre ouvrage, pour pouvoir vous dire mes sentimens. Wargentin. Il falait, mon sentiment.
   Si dans vos sentimens, mon zêle est criminel.
       Corn.
Le singulier irait mieux dans cette ocasion. Voy. plus bâs,n° 6°. = 4°. * Cultiver un sentiment est une expression barbâre. "Daniel Sennert a cultivé ce sentiment. LEIBNITZ . Dites, a soutenu, etc. = 5° On dit, entrer dans le sentiment de quelqu' un, l' adopter. "J' entre dans votre sentiment. * Bossuet dit, dans le même sens, tomber dans les mêmes sentimens: "Nous sommes tombés lui et moi dans les mêmes sentimens sur tant de points décisifs. Cette expression n' est pas de l' Usage actuel. _ Ailleurs, il emploie sentiment au lieu de sens, signification, interprétation~: "Quelle étrange disposition l' a obligé de doner des sentimens si malins à nos expressions les plus innocentes? On ne dit point ce mot en ce sens. = 6°. Quand sentiment est tout seul, et qu' il n' est joint ni à un adjectif, ni à un substantif, qui en dévelope le sens, c' est le nombre où il est employé, qui le détermine: au singulier, il signifie ordinairement, opinion, jugement, pensée. "C' est mon sentiment. Au pluriel, il signifie pensée ou afection: cela va quelquefois à l' esprit, quelquefois au coeur: les sentimens des Philosophes; les sentimens d' une mère, etc. BOUH.
   Quand sentiment est joint à un adjectif ou à un substantif, cet adjectif ou ce substantif détermine le sens de sentiment. Un sentiment extravagant, des sentimens raisonables se disent de l' esprit: un sentiment tendre, des sentimens passionés, se disent du coeur. De même, sentiment d' honeur, de piété, d' amour, quoiqu' au singulier, dénote afection, et non pas pensée. _ Remarquez encôre que si le substantif, joint à sentiment, est une persone, le caractère de cette persone détermine le sens: ainsi, quand je dis: ce ne sont pas là les sentimens des bons Philosophes, je parle de l' opinion ; mais si je dis: ce ne sont pas là les sentimens d' une véritable mère, je parle de l' afection. BOUH.
   Quelquefois on l' emploie absolument au singulier, pour signifier la sensibilité.
   D' autant plus dangereux que par un long usage
   Il sait de la raison afecter le langage;
   Et que pour mieux trahir, il emprunte souvent
   L' air de la vérité, le ton du sentiment.
       PALISSOT.

SENTIMENTAL


*SENTIMENTAL, ALE, adj. [Santi--mantal, tale: 1re et 3e lon.] Néologisme, qui a encôre l' air un peu précieux. "Le ton larmoyant et sentimental. L' Ab. de Fontenai. "On a voulu que la danse fut sentimentale. Les Numéros. "Expression douce, naïve et sentimentale. MERCIER . "Ces tirades sentimentales, qui sont si à la mode, et qui rendent nos écrits modernes si obscurs, si fatigans et si froids. Ann. Litt. Ce mot pourra rester dans le style critique. On l' emploie dans le Mercûre, três-sérieusement, comme a fait M. Mercier. "Le tableau des derniers momens de cette infortunée est peint avec ces couleurs sentimentales qui sont le caractère distinctif des productions de M. d' Arnaud. _ Des couleurs sentimentales! quel jargon! * Quelques Néologues ont dit aussi sentimenter pour passioner. "cet Acteur sentimente tout ce qu' il dit. Celui-ci a été encore moins heureusement inventé.

SENTINE


SENTINE, s. f. [Santine: 1re lon. dern. e muet.] Au propre, la partie la plus bâsse d' un navire, qui en est comme l' égoût. "Vider, netoyer la sentine. = Au figuré, on dit d' une Ville, où l' on done retraite à toute sorte de gens, que c' est la sentine de tout les vices. Cela est tout au plus du style médiocre.

SENTINELLE


SENTINELLE, s. f. [Santinèle: 1re lon. 3e è moy.] Il se dit et du Fantassin, qui monte la garde et fait le guet à un poste où il est placé; poser la sentinelle: on trouva la sentinelle endormie; et de la fonction qu' il fait. "Faire sentinelle: être en sentinelle.
   Rem. Sentinelle est toujours féminin. Quelques Auteurs l' ont fait masculin: les sentinelles anglais, Hist. d' Angl. "Le sentinelle. Anon.
   Parmi tous nos dangers sentinelle assidu.
       VOLT.
  L' oreille est du Lion le plus sûr sentinelle.
      FONTANES.
_ Il est vrai que l' Usage qui le fait féminin au 1er sens, est assez bizârre. = Rousseau l' emploie au figuré.
   Bientôt l' Ange, dans les airs,
   Sentinelle vigilante,
   Fit reluire les éclairs.
On dit, proverbialement, relever quelqu' un de sentinelle, le reprendre, le reprimander. "Il la releva bien de sentinelle sur les sotises qu' elle lui disoit. Sév. _ Faire sentinelle ou, être en sentinelle, veiller, garder, etc. _ Mettre quelqu' un en sentinelle, le mettre en un endroit où il puisse observer ce qui se pâsse.

SENTIR


SENTIR, v. act. et n. [Santir: 1re lon.] Je sens, nous sentons, je sentois, ou sentais, je sentis, j' ai senti; je sentirai; je sentirois ou sentirais; sens; que je sente: je sentisse, sentant, senti. = 1°. Au propre, c' est ressentir quelque impression par le moyen des sens. "Sentir du froid, un frais agréable; une chaleur douce; un grand plaisir, une grande douleur, etc. "À~ parler en général, la Religion doit être moins raisonée que sentie. L' Ab. du-Serre-Figon. _ Remarquez le passif être senti. C' est un néologisme, qui est à la mode. "La cause du rire est une des choses plus senties que conues. Volt. = Flairer. "Sentir une rôse, une tubereûse. = Répandre une certaine odeur: sentir bon ou mauvais. Cela sent le brûlé, le relent. = V. n. "Cela sent trop fort, désagréablement, etc. = V. impers. "Il sent bon: il sent mauvais: il sent le brûlé, etc. "Cette négligence même (dans le style), est une sorte d' ornement: comme on dit, que les femmes sentent bon, quand elles ne sentent rien. Let. de Cic. à Atticus. Mongault.
   Il me parait qu' il sent assez son bien.
       VOLT.
= Il se dit quelquefois du goût, de la saveur. "cette eau sent la terre; ce vin sent le fût, le toneau, le terroir. "Cette soupe ne sent rient, n' a point de goût. = 2°. Il a des significations três-élégantes au figuré: il signifie, goûter: la grandeur a besoin d' être quitée pour être sentie. _ Conaître, remarquer: "Il y a des gens, qui ne peuvent sentir les charmes des vers les plus nobles et les plus touchans. _ Apercevoir: juger: il exagère tant ses ennuis et son déplaisir, que l' on sent que tout cela est faux. _ Marquer, désigner: "il n' avait rien, qui ne fût noble et qui ne sentit la grandeur. _ Ressembler à: toutes ses manières sentent le pédant. _ Avoir l' air de: "Ce Gentilhomme sent son bien, c. à. d. il a l' air d' un homme comme il faut. Il sent l' homme, ou son homme de qualité. "Ce jeune homme sent l' enfant de bone maison. = Inculquer: "Il falait faire sentir cela davantage. = 3°. Sentir se met quelquefois pour ressentir: "elle était vive à sentir les injures et facile à les pardoner. Bouh. "Il ne se sent point des incomodités de la vieillesse: il a eu la fièvre quarte; il s' en sent encôre. Voy. RESSENTIR. = 4°. Se sentir, sans régime; conaitre, sentir en quel état l' on est. "Je me sens bien, je ne suis pas aussi malade qu' on le croit. "Il est si aise, qu' il ne se sent pas. = Conaitre ses ressources, ses talens, ce qu' on doit à son rang, à son mérite. "Cet homme se sent; peut-être un peu trop. = Ne se pas sentir de joie; être si pénétré de joie qu' elle nous ôte tout sentiment. = 5°. Sentir, neutre sans régime.
   ...Il faut, quelque loin qu' un talent puisse ateindre,
   Éprouver pour sentir, et sentir pour bien feindre.
       PIRON, Métrom.
  Plus je sens vivement, plus je sens que je suis, que j' existe, dit La Chaussée.
   Rem. Sentir régit quelquefois l' infinitif sans préposition: "Je sentois renaître mon courage au fond de mon coeur. Télém. "Il sent trembler sa main, tandis qu' il détache le casque. Jér. Dél. Mais cet infinitif ne fait pas si bien lorsque le verbe se raporte au sujet de la phrâse. "Sentant ne pouvoir exécuter son projet. Anon. Dites, sentant qu' il ne pouvait, etc. = Sentir, régissant un nom à l' acusatif, régit quelquefois la prép. à devant l' infinitif. "On sent un secret orgueil à honorer ceux qu' on a vaincus. Thomas. = Se sentir, sans régime, n' est que du style familier. "Dès que les Protestans se sentirent, dit Bossuet (c. à. d. sentirent leurs forces) les ligues et les guerres devinrent permises. On n' emploirait pas aujourd' hui cette expression dans le bon style. = * Sentir fournit à plusieurs gasconismes: sentir mal, pour, sentir mauvais; sentir gré, pour, savoir gré; je ne puis me sentir dans cette maison, pour dire, je m' y déplais; je ne puis sentir cet homme, c. à. d. le voir, le soufrir. = Senti participe, employé adjectivement, est une locution à la mode. "L' estime sentie, que j' ai pour ses talens. L' Ab. de Fontenai. Cela parait encôre un peu précieux et afecté.

SEOIR


SEOIR, v. n. [Soar.] 1°. Être assis. En ce sens, il n' est plus en usage que dans ses participes, séant et sis. Aûtrefois, on disait, il se sied, nous nous séyons. "St. Louis se séyoit auprês d' un chêne pour entendre les parties, etc. = 2°. Être convenable. Il est du bon usage en ce sens; mais il n' a point d' infinitif et il ne s' emploie qu' aux troisièmes persones. Souvent même il est impersonel. "Il sied, ils siéent, il séyoit, il sieroit, il siera. "Cet habit vous sied, vous séyoit bien, etc. "Il vous sied bien de me le reprocher; ce qui se dit ironiquement pour dire, il ne vous sied pas, il ne vous convient pas.
   Il vous sied bien d' avoir l' impertinence
   De refuser un mari de ma main.
       Nanine.

SEP


SEP ou CEP, s. m. Trév. les met tous deux: l' Acad. ne met que le 2d. Voyez-le sous la lettre C.

SÉPARABLE


SÉPARABLE, adj. SÉPARATION, s. f. SÉPARÉMENT, adv. SÉPARER, v. act. [1re é fer. tion dans le 2d a le son de cion, et en dans le 3e le son d' an: sépara--cion, séparéman.] Séparer, c' est 1°. Désunir des parties d' un même tout. "Un seul coup lui sépara la tête du corps, ou, d' avec le corps. "Séparer les chairs d' avec les ôs. = 2°. Distinguer, ranger. "Séparer des livres, qu' on a mis pêle-mêle. "Séparer le bon grain d' avec le mauvais. = 3°. Faire que deux persones, deux animaux, deux chôses, ne soient plus ensemble; séparer un mari et une femme. "L' absence ou la mort les a séparés. "Séparer des chevaux en diférentes écuries. = 4°. Diviser. "Séparer une cour en deux par un mur, une chambre en trois par deux cloisons. _ Séparer les biens, les héritages. = 5°. Se séparer est tantôt réciproque actif: "Ils se séparèrent: l' armée se sépara en deux corps; tantôt réciproque passif: l' écorce de cet arbre s' est séparée (a été séparée) du bois. = Bossuet emploie se séparer absolument et sans régime: "Quand les Vaudois se séparèrent. Il sous-entend, de l' Eglise. Il l' emploie aussi de manière que le pronom personel est au datif: "Dieu comença à se séparer un peuple élu. _ C' est un tour des livres saints, et ce régime ne peut être bon que dans des Discours de Religion. _ Enfin, il emploie séparé substantivement. "Il n' y a que ces séparés pour les biens éclésiatiques, (c. à. d. ceux qu' on prétend qui ne se sont séparés de l' Église que parce qu' elle possède des biens temporels) que persone n' a jamais conus. _ Que ce substantif soit de l' invention de Bossuet, ou qu' il fût usité de son tems, il n' est plus en usage aujourd' hui.
   SÉPARABLE, qui se peut séparer. "C' est erreur de croire que l' utile soit séparable de l' honête. "Ce n' est que par miracle que les accidens sont séparables de la substance.
   SÉPARATION, action de séparer. Séparation entière. "Mur de Séparation. "Avant la séparation de l' armée. C' est aussi la chôse, qui sépare. "Il faut ôter cette séparation.
   SÉPARÉMENT, à part l' un de l' aûtre: "On les a interrogés séparement. "Mettez ces choses séparément.

SEPT


SEPT, adj. et subst. SEPTANTE, adj. et subst. SEPTÉNAIRE, adj. et subst. SEPTENNAL, ALE, adj. [sèt devant une voyelle, Sè devant une consone. Sèptante, Sèpténère; sèptén-nal, nale: 1re è moy. 2e lon. au 2d, é fer. au 3e et au 4e, 3e è moy. et long au 3e.] Sept est un aprês six, ou trois et quatre, ou, deux et cinq. Les sept Planètes; les sept jours de la semaine; les sept Pseaumes de la pénitence; les sept Sacremens etc. = Sept se met quelquefois pour septième: Charles sept, Grégoire sept: le sept du mois. = S. m. Un sept, la carte, qui est marquée de sept points: un sept de coeur, de carreau, etc.
   SEPTANTE, s' est dit aûtrefois pour soixante-dix. On ne le dit plus que dans deux ocasions: les septante semaines de Daniel. Les septante, les soixante-douze~ Traducteurs de l' Ancien Testament. _ Quoiqu' au pluriel, il ne prend point d' s.
   SEPTÉNAIRE; nombre septénaire, nombre de sept. = S. m. celui, qui pendant sept années consécutives a professé dans une Université . = Espace de sept ans, à compter depuis le jour de la naissance. "On dit que les hommes changent de tempérament à chaque septénaire. "Le neuvième septénaire est la grande année climatérique.
   SEPTENNAL, qui arrive tous les sept ans.

SEPTEMBRE


SEPTEMBRE, s. m. [Sèptanbre: 1re è moy. 2e lon. 3e e muet.] Le mois qui était le septième de l' année, quand elle començait au mois de Mars, et qui est aujourd' hui le neuvième.

SEPTENTRION


SEPTENTRION, s. m. SEPTENTRIONAL, ALE, adj. [Sèptantri-on, onal, ale: 1re è moy.] Septentrion, Nord, pôle arctique; celui, qui, dans nos climats, est élevé sur l' horison. = On dit qu' un pays est au Septentrion d' un aûtre pays, lorsqu' il est plus proche du Nord. "Le Danemarc est au septentrion de l' Allemagne. = Septentrional, qui est du côté du septentrion. "L' Océan septentrional; les pays septentrionaux. L' Amérique septentrionale.

SEPTIèME


SEPTIèME, adj. SEPTIèMEMENT, adv. [Sètiè-me, meman: 1re et 2e è moy. 3e e muet.] Septième, nombre ordinal, qui suit immédiatement le sixième. "Le septième enfant; la septième partie. = S. m. "Il a un septième dans cette afaire. "Il est le septième dans le catalogue. "Le septième du mois, de la lune. "Cette femme est dans son septième, dans le septième mois de sa grôssesse. "Ce malade est dans son septième, dans le septième jour de sa maladie. On dit aussi, dans son sept, dans le sept. = S. f. Au jeu de Piquet, sept cartes de même couleur, qui se suivent. "Une septième major, une septième de Roi.
   SEPTIèMEMENT, en septième lieu. "Septièmement, je dis que, etc.

SEPTUAGÉNAIRE


SEPTUAGÉNAIRE, adj. et subst. SEPTUAGÉSIME, s. f. [Sèptu-agénère, gézime: 1re è moy. 4e é fer. 5e è moy. et long. au 1er.] Le premier se dit de celui qui est âgé de soixante-dix ans. "Il est septuagénaire. "Une femme septuagénaire. = S. m. "Les septuagénaires son exemts de certaines charges publiques. _ Le 2d est un terme de calendrier éclésiastique. Le 3e dimanche avant le premier dimanche du carême.

SÉPULCRAL


SÉPULCRAL, ALE, adj. SÉPULCRE, s. m. SÉPULTûRE, s. f. [1re é fer. 3e lon. au dern.] Sépulcre, tombeau, lieu destiné pour y mettre un corps mort. Tombeau est plus du discours ordinaire: sépulcre ne se dit que dans le discours soutenu, ou en parlant des tombeaux des Anciens. "Faut-il ressembler à ces sépulcres blanchis au dehors et peints de couleurs agréables, qui ne sont au dedans que puanteur et corruption. L. F. Poème de S. Grég. = Sépulcral, qui a raport au sépulcre. "Vâse sépulcral; urne, lampe sépulcrale. = Fig. Voix sépulcrale, qui semble sortir d' un tombeau.
   Ouvrant à peine un sépulcral organe.
       Ververt.
  SÉPULTûRE est 1°. le lieu où l' on enterre un corps mort. "Choisir sa sépultûre. "Cette famille a sa sépulture en telle Église. "St. Denis est la sépultûre des Rois de France.
   Hélas! de l' assassin le bras ensanglanté....
   Done à mon fils sanglant les flots pour sépulture.
       MÉROPE.
= 2°. L' inhumation même: "Privé des honeur de la sépultûre.

SÉQUELLE


SÉQUELLE, s. f. [Sékèle; 1re é fer. 2e è moy. 3e e muet. _ Plusieurs écrivent ce mot sans accent sur le 1er e, sequelle: l' Acad. y met un acc. aigu.] Il ne se dit que par mépris d' un nombre de gens, atachés à un parti. "Je me moque de lui et de toute sa séquelle. "Mille créanciers fondirent chez elle, avec des comissaires et toute leur séquelle. MARIV.

SÉQUENCE


SÉQUENCE, s. f. [Sékance: 1re é fer. 2e lon. 3e e muet.] Suite de plusieurs cartes de même couleur. Il en faut au moins trois pour faire une séquence. = On le disait autrefois des Prôses qu' on lit à certaines Messes.

SÉQUèSTRE


SÉQUèSTRE, s. m. SÉQUèSTRER, v. act. [Sé-kèstre, sékèstré: 1re é fer. 2e è moy. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Séquestre st 1°. l' état d' une chôse remise en main tierce par ordre de Justice, ou par convention des Parties. "Mettre en séquestre. "Le Juge a ordoné le séquestre. = 2°. Celui, entre les mains de qui les chôses sont mises en séquestre. "Choisir un séquestre solvables. = Séquestrer, mettre en séquestre. "On a séquestré les fruits: les revenus ont été séquestrés. = Fig. Écarter, séparer. "Cet homme est devenu insuportable: il faut le séquestrer de notre société. "Il s' est séquestré de tout comerce du monde.

SÉRAIL


SÉRAIL, s. m. [1re é fer. mouillez l' l finale; ai n' y a pas le son d' é; mais l' a et l' i conservent leur propre son. Plusieurs écrivent serrail.] Palais qu' habite l' Empereur des Turcs. _ Par extension, il se dit des Grands du Pays, et sur-tout de la partie de leurs maisons, où ils tiènent leurs femmes enfermées, mais mal; car l' appartement des femmes s' appelle le Harem. MARIN.

SÉRAPHIN


SÉRAPHIN, s. m. SÉRAPHIQUE, adj. [Séra-fein, fi-ke: 1re é fer.] Séraphin, esprit céleste de la première hiérarchie des Anges. = Séraphique, qui apartient aux Séraphins. "Zèle, ardeur séraphique. = On apèle St. François, le Patriarche Séraphique, son ordre, l' ordre séraphique; St. Bonaventure, le Docteur séraphique.

SEREIN


SEREIN, EINE, adj. SEREIN, s. m. SÉRÉNADE, s. f. SÉRÉNITÉ, s. f. [1re e muet aux 3 1ers é fer. aux 2 dern. dont la 2e est aussi un é fer.] Serein, adj. qui est clair, doux et calme. "Tems, jour, ciel, air serein: nuit claire et sereine.
   Tout respire en Esther l' inocence et la paix.
   Du chagrin le plus noir elle écarte les ombres,
   Et fait des jours sereins, de mes jours les plus sombres.
       Esther.
= Visage front, serein, qui anonce une grande tranquilité d' esprit. _ On dit aussi, figurément, esprit serein. Voltaire dit du Comte d' Oxford. "C' était une ame sereine, inaccessible à l' envie, à l' amour des richesses et à la crainte du suplice. = Âme sereine est une expression peu comune.
   SEREIN, s. m. Vapeur froide et maligne, qui tombe au coucher du soleil. "Aler, se tenir au serein, craindre le serein. = Ménage le dérive de serenum, parce que le serein tombe, dit-il, particulièrement des jours sereins. Peu de persones seront de son avis. Comme on a dit aûtrefois serée pour soirée et qu' on dit encôre sérénade pour soirenade, on dit de même serein pour soirein.
   SÉRÉNADE, concert de voix ou d' instrumens qu' on done le soir, la nuit, dans la rûe, sous des fenêtres.
   SÉRÉNITÉ, état de ce qui est serein. "La sérénité du tems, de l' air, du ciel, du visage, de l' esprit.

SÉRÉNISER


*SÉRÉNISER, SÉRÉNER, v. act. Le premier est sorti de la Fabrique de l' Ab. Coyer. "Un sourire, qui chasse les nuages et sérénise le ciel. Le second est un mot de Montagne: "La Philosophie doit séréner les tempêtes de l' âme. _ L' Acad. met rasséréner, pour rendre serein, en avertissant que ce mot ne se dit plus. Séréniser ne se trouve nulle autre part que chez l' Ab. Coyer.

SÉREUX


SÉREUX, EûSE, adj. SÉROSITÉ, s. f. [Sé-reû, reû-ze, rozité: 1re é fer. 2e lon. aux 2 1ers.] Sérosité, humeur aqueûse, qui se mêle dans le sang et dans les aûtres humeurs. "Sang plein de sérosité. = Séreux, aqueux. "Humeur séreûse: la partie séreûse du sang. = Trop chargé de sérosité: sang séreux.

SERF


SERF, SERVE, adj. et subst. [1re ê ouv. l' f se prononce au 1er.] Qui n' est pas libre; qui est dépendant d' un maître. "Il est serf: en Pologne les paysans sont serfs, sont de condition serve. "La condition des serfs, est à certains égards plus heureûse que celle de certains hommes libres. = Serf ne se dit que dans l' histoire moderne. Quand il est question de l' Histoire Anciène, on doit toujours dire, esclâve. BREBEUF dit de Marius qu' il
   Remplit des légions de Serfs et de forçats...
   Les Serfs sur leur Seigneur vengent leur servitude.
Cela ne vaut rien, même en vers. On ne savait ce que c' était à Rome que des serfs et des Seigneurs: on n' y conaissait que des esclaves et des Maîtres. = On ne doit pas confondre serf avec cerf, comme l' ont fait quelquefois des Imprimeurs, qui ignoraient ce que le premier signifie. "Les prisoniers faits dans les batâilles étoient réduits en esclavage: l' usage d' avoir des cerfs devint três-comun. Hist. d' Angl. "Ces esclaves ressembloient aux cerfs, qui sont en Pologne Ibid.

SERGE


SERGE, s. f. SERGER, s. m. [1re ê ouv. 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Serge est une étofe légère, faite de laine. Serger est l' ouvrier, qui la fabrique. = On disait aûtrefois sarge, sarger ou sargier, et on le dit encôre ainsi en quelques Provinces.

SERGENT


SERGENT, s. m. SERGENTER, v. act. SERGENTERIE, s. f. [Sêrjan, janté, teri-e: 1re ê ouv. 2e lon. 3e é fer. au 2d, e muet au 3e.] Sergent est 1°. un oficier de Justice, dont la fonction est de doner des exploits, des assignations, etc.
   Ne conoîtrois-tu pas quelque honête faussaire,
   Qui servit ses amis, en le payant s' entend?
   Quelque Sergent zélé. - Bon, on en trouve tant.
       Les Plaideurs.
  Touchez-là. Vos pareils sont gens, que je révère.
  Et j' ai toujours été nourri, par feu mon père,
  Dans la crainte de Dieu, Monsieur, et des Sergens.       Ibid.
= 2°. Bâs Oficier dans une compagnie d' Infanterie. = Sergenterie ne se dit que dans le 1er sens. Ofice de Sergent, d' Huissier. _ Sergenter, au propre, c' est presser par le moyen des Sergens. "C' est un mauvais payeur: il faut le sergenter. = Il est plus usité au figuré, où il signifie, presser, importuner, fatiguer, pour obtenir quelque chôse. "Il vous sergentera jusqu' à ce que vous ayiez fait ce qu' il desire. "Peut-on ainsi sergenter les gens?

SERGER


SERGER, Voy. SERGE.

SÉRIE


SÉRIE, s. f. Terme de Mathématique. Suite de grandeurs, qui croissent ou décroissent suivant une certaine loi. = * Un Auteur moderne l' emploie dans une Histoire. "La campagne d' Italie de 1745 ne fut qu' une série continuelle de succês. Let. sur le Maréchal de Maillebois, insérée dans le Mercûre. "Ce discours n' est qu' une série de réflexions très ordinaires. Merc. Pourquoi se servir d' un terme technique inconu au comun des Lecteurs, quand il en existe un (celui de suite) que tout le monde conait?

SÉRIEûSEMENT


SÉRIEûSEMENT, adv. SÉRIEUX, EûSE, adj. [Sé-rieû-zeman, rieû, rieû-ze: 1re é fer. 2e lon. 3e e muet.] Sérieux, 1°. qui n' est pas gai, enjoué. "Air, maintien, discours sérieux. Mine, conversation sérieûse. Prendre un air sérieux. Faire une mine sérieûse. Prendre une chôse au sérieux, la dire ou l' entendre sérieûsement. "Cicéron ne prend pas au sérieux le raisonement qu' il fait. Mongault. = 2°. Solide, important. "Afaire, proposition, matière sérieûse. "Il n' y a point d' afaire plus sérieûse que celle du salut. _ Afaire sérieûse, en parlant d' un combat, considérable, hazardeûse. "L' afaire devint sérieûse. = 3°. Sincère, vrai. "Ces protestations d' amitié sont ou ne sont pas sérieûses. = * 4°. Quelques-uns disent, maladie sérieûse, grâve, considérable, dangereûse. "La plaie se rouvrit et le mal devint sérieux. P. Barre, Hist. d' Allem. "Il apréhendoit quelque maladie sérieûse. "Un maladie sérieuse me retint chez moi. Le Franc. Vie de St. Grég. de Naz. = Il y en a même qui le disent du malade. "Celui-ci sur-tout est un vrai gasconisme. Voy. DANGEREUX. L' Acad. ne dit sérieux, ni de la maladie, ni du malade. On pourrait le dire de la maladie, dans le même sens qu' on le dit d' une afaire, d' un combat.
   SÉRIEUX, s. m. Gravité dans l' air, dans les manières. Prendre son sérieux. Afecter un grand sérieux. Il a un sérieux qui glace. = Prendre une chôse dans le sérieux, c' est la croire vraie, quoique ce ne soit qu' une badinerie. Prendre quelque chôse au sérieux, sÞen formaliser, quoiqu' elle n' ait été dite qu' en badinant. = Le sérieux, en parlant des Auteurs, se dit des rôles sérieux. "Il joûe bien dans le sérieux: il n' est pas bon pour le sérieux.
   SÉRIEûSEMENT; d' une maniêre grave et sérieûse. "Il parle de tout sérieûsement. "Avez-vous pu écouter cette harangue sérieûsement? = Froidement. "Il reçoit tout le monde sérieûsement. = Sans plaisanterie: "Parlez-vous sérieûsement? = Tout de bon, avec ardeur. "Il travaille sérieûsement à son salut. "Je vais m' occuper serieûsement de cette afaire. = Prendre une chose sérieûsement, la prendre au sérieux. Voy. plus haut.
   *SÉRIEUSER, néologisme peu heureux. Rendre sérieux. "Ce sont des pièces telles que la sienne, qu' il croit propres à sérieuser le caractère national. Ann. Litt. Le mot est de M. R.... D. L. B. et le Journaliste s' en moque, tout en l' employant.

SERIN


SERIN, s. m. SERINETTE, s. f. [Se--rein, rinète: 1re e muet; 3e è moy. 4e e muet au 2d.] Serin est un petit oiseau, dont le chant est fort agréable, et qu' on aprend à sifler, à chanter des airs. Serin, tout court et sans addition, c' est le serin comun. Serein de Canarie, que quelques-uns apèlent simplement canarie, et en Provence canâri, faisant l' a long fort mal à propôs. Serin jaune, serin blanc. Serin panaché. = Serinette, espèce de très-petite orgue avec laquelle on aprend aux serins à chanter.

SERINGAT


SERINGAT, s. m. SERINGUE, s. f. SERINGUER, v. act. [Se-rein-ga, rein-ghe, rein-ghé: 1re e muet; 2e lon. 3e e muet au 2d, é fer. au 3e.] Seringat est une fleur blanche, qui vient au printems et dont l' odeur est três-forte. = Seringue, petite pompe, qui sert à atirer et à repousser l' air ou les liqueurs. On s' en sert à doner des lavemens et à d' autres usages. = Seringuer, pousser une liqueur avec une seringue. "Seringuer de l' eau de vie, etc. = Seringuer une plaie, y jeter avec une seringue quelque liqueur, pour la nétoyer.

SERMENT


SERMENT, s. m. [Sêrman: 1re ê ouv. 2e lon.] 1°. Afirmation d' une chôse, en prenant à témoin ou Dieu, ou ce qu' on regarde comme saint, comme divin. "Afirmer par serment. Faire serment sur les Évangiles. Prêter serment. Rompre, violer le serment, son serment, etc. "Vous manquez à votre parole et vous faussez vos sermens. DEST.
   J' ai trahi mes sermens, j' ai vaincu mes scupules,
   Et c' est pour me couvrir des plus grands ridicules.
       La Chaussée.
= 2°. Jurement. "Serment horrible, exécrable. = * Rem. Racine a dit jurer des sermens.
   Ils ne s' assurent point en leurs propres mérites;
   Mais en ton nom sur eux invoqué tant de fois,
   En tes sermens jurés au plus saint de leurs Rois.
       Athalie.
Mde Dacier l' a imité. On trouve cette même expression dans l' Ann. Litt. Cette façon de parler est tout au moins douteûse. = Les sermens des amoureux et des joueurs sont pâssés en proverbes, pour signifier des sermens peu réfléchis et qu' on n' acomplit pas. = Serment pour sarment est un barbarisme grossier.

SERMON


SERMON, s. m. SERMONAIRE, s. m. SERMONER, v. act. SERMONEUR, s. m. [1re ê ouv. 3e è moy. au 2d, é fer. au 3e, nère, né, neur.] Sermon, discours chrétien, fait pour être prononcé en chaire. = En st. famil. remontrance ennuyeûse. "Ah! voici les sermons, l' ennui, dit Valère, dans le Méchant. = Sermonaire, Recueuil de sermons, ou Auteur de sermons. Sermoner, faire d' ennuyeûses remontrances. "Il vient nous sermoner à toute heure. Sermoneur, qui sermone. "C' est un sermoneur éternel.
   Mondor, porte ces vers à l' Auteur du Mercure.
   - Beau fruit de mon Sermon. - Digne du Sermoneur.
       PIRON. Métrom.
  Je déteste la prose et les drames aussi....
  Ce sera sûrement quelque jérémiade,
  Quelque mauvais sermon gréfé sur un roman.
       Palissot.
= * La Bruyère dit Sermoneur pour Prédicateur: On ne pourrait le dire qu' en se moquant.

SÉROSITÉ


SÉROSITÉ, Voy. SÉREUX.

SERPE


SERPE, s. f. SERPETTE, s. f. [Sêrpe, pète: 1re ê ouv. 2e e muet au 1er, è moy. au 2d.] Serpe est un instrument de fer, large et plat, recourbé vers la pointe, emmanché de bois, dont on se sert pour couper du bois, émonder des arbres, les tâiller. = En st. fig. famil. et critique, on dit des ouvrages de la main, ou de l' esprit, qui sont mal faits, qu' ils sont faits à la serpe, ou, avec la serpe. On dit aussi, à coups de hache.
   SERPETTE, petite serpe, qui sert à tâiller la vigne, à émonder les arbres et à d' aûtres usages.

SERPENT


SERPENT, s. m. SERPENTEAU, s. m. SERPENTER, v. n. SERPENTIN, INE, adj. et subst. [Sêrpan, panto, té, tein, tine: 1re ê ouv. 2e lon. 3e é fer. au 3e.] Serpent, reptile. On comprend sous ce nom, dit l' Acad. les vipères, les couleuvres, les aspics, etc. "La morsûre, le venin, les sifflemens du serpent. = En st. fig. famil. et critique; un serpent, une langue de serpent, une persone médisante. = On dit, dans un style plus noble: c' est un serpent que j' ai réchaufé dans mon sein, un ingrat, qui se sert de mes bienfaits pour me nuire.
   C' est trop flater ta haine; et de ma faible main,
   Caresser le serpent, qui déchire mon sein.
       ORESTE.
_ Le serpent est caché sous les fleurs: les belles aparences cachents des pièges, des dangers. = Serpent, instrument de musique à vent, dont on se sert dans les choeurs de musique d' Église, pour soutenir les voix: son lui vient de ce qu' il est fait en figûre de gros serpent formant plusieurs replis.
   SERPENTEAU, le petit d' un serpent. = Feu d' artifice; petite fusée qui serpente; qu' on jette à la main, ou qui, renfermée dans une grosse fusée, en sort avec un moûvement tortueux.
   SERPENTER ne se dit qu' au figuré, des ruisseaux, des rivières, qui ont le cours tortueux. "Ruisseau, qui serpente dans la plaine. = On dit aussi d' un chemin, qu' il va en serpentant.
   SERPENTIN, adj. Marbre serpentin, dont le fond est vert avec des taches rouges et blanches. Langue serpentine, en parlant d' un cheval; qui remûe sans cesse. = S. m. Pièce de la platine d' un mousquet, à laquelle on atachait autrefois la mêche. _ En Chymie, tuyau, qui va en serpentant depuis le chapiteau d' un alambic jusqu' au bâs. = S. f. Sorte de pierre fine, tachetée comme la peau d' un serpent. = Sorte de plante, qui rampe sous les aûtres plantes.

SERPETTE


SERPETTE, Voy. SERPE.

SERPILLIèRE


SERPILLIèRE, s. f. [Sêrpi-gliè-re: 1re ê ouv. 3e è moy. et long. 4e e muet: mouillez les ll.] Toile grôsse et claire, qui sert aux emballages.

SERPOLET


SERPOLET, s. m. [Sêrpolè: 1re ê ouv. 3e è moy.] Herbe odoriférante, qui vient dans les lieux secs.

SERRE


SERRE, s. f. SERRÉMENT, adv. SERREMENT, s. m. SERRER, v. act. [Sêre, réman, reman, ré: 1re ê ouv. l' r se prononce fortement. 2e e muet au 1er et au 3e, é fer. au 2d et au dern.] Serre, est 1°. lieu couvert, où, pendant l' hiver, on serre les arbres et les plantes, qui ont le plus besoin d' être à couvert de la gelée. * Dans certaines Provinces, on dit serve, mais mal. = 2°. Pied des oiseaux de proie. "Les serres d' une aigle, d' un milan. = En st. famil. on dit d' un homme, qui a la main extrêmement forte, qu' il a la serre bone. On le dit, dans un autre sens, d' un avâre, d' un lârron, d' un concussionaire. = 3°. L' action de serrer, de presser les raisins: la première, la seconde serre. = 4°. Serre entre dans la composition de deux mots. _ Serre-file, le soldat, qui est le dernier de sa file. _ Serre-papiers, arrière cabinet, ou, armoire, où l' on serre des papiers.
   SERRÉMENT, avec trop d' économie. "Il vit fort serrément.
   SERREMENT ne se dit que dans ces phrâses: serrement de main, serrement de coeur. "Il m' a témoigné son amitié par un serrement de main. "Je n' y puis penser qu' avec un serrement de coeur inexprimable. Th. d' Éduc. * Rollin en a étendu l' usage. "Toute la force de la phalange consistoit dans l' union étroite de ses parties, dans le serrement de ses rangs.
   SERRER, 1°. Étreindre, presser. "Serrer un cordon, les sangles d' un cheval. = FIG. Serrer les noeuds de l' amitié. = En st. famil. Serrer les pouces à quelqu' un, le contraindre, à force de tourmens ou de menaces, à dire la vérité. _ Lui serrer le bouton, le presser vivement sur quelque chôse. = 2°. Joindre, mettre prês à prês. "Serrer les rangs, les files. "Se serrer les uns contre les aûtres. = Serrer l' écriture, les lignes. _ Serrer les dents. _ Serrer les voiles, les plier. = Serrer quelqu' un de prês, le poursuivre vivement. = Serrer son style, retrancher ce qu' il y a de superflu dans les mots ou dans les pensées. = 3°. Mettre à couvert, enfermer. "Serrer les foins, les blés.
   SERRÉ, ÉE, partic. et adj. "Drap bien serré, style serré. = Serré, concis, précis. (Syn.) On est concis, en employant le moins de mots qu' il est possible; on est précis en employant le mot propre, ou celui, qui rend exactement notre idée; on est serré en retranchant les propositions intermédiaires, les mots et les phrâses synonimes. L' Ab. Trublet. = Avoir le coeur serré, saisi de douleur; le ventre serré, constipé. = Homme serré, avâre. = Serré, adv. Bien fort. "Il a gelé bien serré. Mentir bien serré, etc. Jouer serré, ne jouer qu' à beau jeu et ne pas hazarder volontiers.

SERRON


SERRON, s. m. [Sêron: 1re ê ouv. r forte.] Boîte, dans laquelle on porte de certaines drogues ou marchandises. "Un serron de baûme; un serron d' ambre.

SERRûRE


SERRûRE, s. f. SERRURERIE, s. f. SERRURIER, s. m. [Sêrûre, rureri-e, ru-rié: 1re ê ouv. r forte: 2e lon. au 1er; 3e e muet aux 2 1ers, é fer. au 3e.] Serrûre, machine, qu' on aplique à une porte, à un cofre, etc. pour les fermer ou les ouvrir; et qui s' ouvre ou se ferme par le moyen d' une clef. = Serrurier, qui fait des serrûres et autres ouvrages de fer. = Serrurerie se dit de l' Art du serrurier, et des ouvrages des serruriers. "La serrurerie a été bien perfectionée. "La serrurerie de cette maison est fort belle.

SERVAGE


SERVAGE, s. m. SERVITUDE. Vieux mot. Il ne se dit plus en prôse, et il vieillit au figuré, même en poésie. M. Linguet l' emploie souvent. "Toutes les Puissances s' étoient soumises à ce honteux servage.

SERVANT


SERVANT, adj. m. SERVANTE, s. f. [1re ê ouv. 2e lon.] Servant ne se dit qu' avec gentilhomme, Frère et Fief. Gentilhomme servant, qui sert à table chez le Roi. Frère servant, celui, qui entre dans l' ordre de Malthe sans faire preuve de noblesse, et qui est d' un rang inférieur aux chevaliers. On les apelle par abus Chevalier servant. Fief servant, qui relève d' un autre fief, apelé Fief dominant.
   SERVANTE, fille ou femme, qui sert de domestique. On ne le dit point de celles qui servent dans les bones maisons; on ne se sert guère de ce mot qu' en parlant de celles des Auberges; servante de cabaret. L' Acad. ne le dit que des filles ou femmes, qui sont employées aux plus bas ofices d' une maison. Aûtrefois on l' employait comunément, en parlant d' un domestique femelle.
   Molière, avec raison, consultoit sa servante.
       Piron.
C' est une anecdote déjà anciène. = Servante est un terme de civilité pour les femmes, comme serviteur pour les hommes. "Je suis votre servante; votre très-humble et très-obéïssante servante. = En st. famil. une femme dit: je suis votre servante; comme un homme dit: je suis votre serviteur~; je ne suis pas de cet avis, je ne ferai pas ce que vous désirez.
   Mon coeur seul m' a dicté cette utile leçon.
   Votre gloire irritée en paroit mécontente.
   Je lui baise les mains et je suis sa servante.
       Destouches.

SERVE


SERVE, adj. fém. Voy. SERF et SERRE, n°. 1°.

SERVIABLE


SERVIABLE, adj. *SERVIABLEMENT, adv. Le 1er n' est pas du beau style: oficieux, qui a le même sens est plus noble; l' Acad. le met sans remarque. "L' un de ces gens empressés, serviables, etc. qui guettent les étrangers à leur passage. Volt.
   Sois parent serviable et fils respectueux.
       Le Franc.
= * Serviablement est encôre moins usité que serviable: d' habiles gens, consultés par Richelet, ne pouvaient le soufrir. Il n' a pas gâgné depuis. L' Acad. ne le met pas.

SERVICE


SERVICE, s. m. [1re ê ouv. dern. e muet.] Fonction d' un domestique. "Être, ou mettre en service. "Que faites-vous ici? _ J' y suis en service. DEST. Être au service de.
   Si bien que vous voilà plus heureuse aujourd' hui?
   - Autant qu' on le peut être au service d' autrui.
       DEST. Le Glorieux.
  Un Juge, l' an pâssé, me prit à son service,
  Et m' avoit fait venir d' Amiens, pour être suisse.
       Les Plaideurs.
"Service aisé, ou dur, dificile, vil et bâs. = Se consacrer au service de Dieu, des autels. = 2°. Usage qu' on tire de certains animaux, ou de certaines chôses. "Ce cheval, cette étofe est de bon, ou d' un bon service. = En st. famil. "Les jambes, l' estomac refusent le service, ne font leurs fonctions qu' avec peine. = 3°. Assistance, bon ofice. "Ofrir ses services, rendre des services. "Je suis à votre service. "Comment vous portez-vous? À~ votre service; prêt à vous servir. = 4°. Tems qu' on a servi dans un emploi: il a trente années de service. "Son élévation et ses services marchent d' un pas égal: rien n' est faveur; tout est récompense. Neuville. Or. Fun. du Maréchal de Belle-Isle. = 5°. Absolument, le service que les gens de guerre rendent à l' État dans les Armées. "Il y a vingt-ans, qu' il est dans le service. Il a quité le service, renoncé au service. Il s' est retiré, ou, il est retiré du service. = 6°. La célébration des ofices divins. "Le service se fait fort bien dans cette Église. = 7°. Messe haute ou Prières publiques, qui se disent pour un mort. "Nous avons été au service d' un tel, etc. = 8°. Nombre de plats, qu' on met à la fois sur la table et qu' on ôte de même. "Repas à trois, à quatre services.
   Rem. 1°. Service, ofice, bienfait. (Syn.) Le 1er et le 3e se prènent toujours en bone part; le 2d a besoin d' être caractérisé par une épithète: de bons ou de mauvais ofices. _ Bienfait est un don, service et ofice sont des secours. "Une simple parole, un mot dit à propôs, avec intelligence ou avec courage, est quelquefois un service signalé, qui exige plus de reconaissance que des bienfaits matériels (Duclos) BEAUZ. Synon. = 2°. Dans ce sens service ne doit pas se dire des persones, qui sont au dessus de nous. Il est impertinent de dire: j' ai reçu un grand service de M. le Duc de, etc. Mde la Comtesse m' a rendu de bons services. On doit se servir de grâce, ou de bon ofice. Pour ce qui est des plaisirs que nous faisons à nos égaux, nous devons toujours les apeler des services. "Je serai bien aise de vous rendre service. "Je lui ai ofert mes services. = 3°. Avec ofrir, comme avec rendre, on doit mettre service au pluriel, lorsqu' il est acompagné de l' article ou des pronoms personels. "Il avoit écrit au Roi pour lui ofrir son service, comme un vieux soldat. Mde se Sévigné. Je crois qu' il falait dire, pour lui ofrir de servir, comme un vieux soldat. Car ofrir ses services n' aurait rien valu dans cet endroit. = 4°. Au service, sans régime, ne se dit que des emplois militaires dans l' État dont est sujet celui, dont on parle. Ainsi l' on dira d' un Français, qui sert en France, qu' il est au service; mais s' il sert âilleurs, il faut ajouter le régime du pays où il sert. "Les troupes étrangères au service de la France. "Il est au service du Roi d' Espagne: il sert en Espagne. Entrer au service de, etc. * Maimbourg dit, prendre service sous: cette expression n' est pas de l' usage présent. "Sachant que Philipe (Auguste) donoit par mois trois écus d' or à chaque cavalier, il en promit quatre à ceux, qui le quiteroient pour prendre service sous lui. = 5°. Dit-on, homme de service, comme on dit, homme de condition? J' en doute. "Duplessis étoit homme de condition et de service, dit d' Avrigni. Je ne crois pas cette expression française. = 6°. * M. Targe toujours servile copiste de Smollet, emploie service pour expédition. "Il dona ordre au Capitaine Norris de détruire cinq galères Espagnoles dans la baie de St. Tropès; et ce service fut exactement rempli. Et parlant de l' expédition de l' Amiral Vernon, il l' apèle ce service si peu glorieux.

SERVIETTE


SERVIETTE, s. f. [Sêr-viè-te: 1re ê ouv. 2e è moy. 3e lon.] Linge, qui fait partie du couvert que chacun trouve devant soi, en se mettant à table. "Les Anglais n' usent point de serviette: chacun prend le bout de la nape, qui est devant soi.
   Elle eut du Buvetier emporté les serviettes,
   Plutôt que de rentrer au logis les mains nettes.
       Les Plaideurs.

SERVILE


SERVILE, adj. SERVILEMENT, adv. |1re ê ouv. 3e e muet.] Servile, qui apartient à l' État d' esclave. "Emploi servile; homme de condition servile. = Fig. bâs; rampant. "Esprit, âme servile: il rampe, adulateur servile, Gresset, ou, servile adulateur, Rousseau. "Complaisance servile; flaterie basse et servile. = Traducteur, traduction servile, qui s' atache trop à la lettre, aux termes~ de l' original
   Rem. 1°. Le Gendre écrit servil au masc. "Cette expression n' a rien de servil. Et M. De Rosoi:
   Ces préjugés servils, que mon âme dédaigne.
On dit, servile, au masc. comme au fém. = Servile ne se dit des persones, qu' en parlant d' un traducteur. "Seigneur foible et servile, dit M. Targe. On peut dire que dans cette phrâse, il est servile traducteur.
   Servile n' aime guère à précéder, sur-tout des noms, qui ont la terminaison féminine.
   Cela peut être vrai pour de serviles âmes.
       Regnard.
En prôse du moins, il faudrait dire, pour des âmes serviles.
   SERVILEMENT, d' une manière servile. "Il fait servilement sa cour aux Grands. = Traduire servilement, s' atacher trop à la lettre, aux termes, aux tours de phrâses, aux constructions~ des Auteurs que l' on traduit. On peut faire ce reproche à la plupart des traducteurs des livres Anglais.

SERVIR


SERVIR, v. act. et n. Je sers, nous servons, je servois, ou servais; je servis; j' ai servi; je servirai; je servirois ou servirais; sers, que je serve; je servisse; servant; servi. = Actif: 1°. Être à un maître comme son domestique. "Il m' a servi dix ans. "Persone ne peut servir deux maîtres. = V. n. "Il sert à la chambre, à la cuisine. Et sans régime. "Il ne sert plus: il ne peut plus servir. = Servir son maître à table; lui doner à boire, des assiètes, etc. = Servir une table: la couvrir de plats, de mets, etc. = 2°. Doner d' une viande, d' un metz à quelqu' un des convives. "Servez de la poularde, de la perdrix, à Monsieur, à Madame. = 3°. Servir le canon, l' artillerie; les tirer avec adresse et diligence. = 4°. Rendre de bons ofices; aider, assister. "Il m' a bien servi dans cette afaire. "Servir quelqu' un de son crédit. = Servir Dieu; lui rendre le culte et l' obéissance, qui lui sont dûs. _ Servir l' Église, l' État, la Patrie: Faire quelque chôse d' avantageux pour, etc. = Servir le Roi; être dans quelque emploi de guerre, ou de Magistratûre, ou de Finance. Servir le Roi dans des Ambassades, dans son conseil. = V. n. Et en parlant du service militaire seulement, ou de celui des domestiques. "Il sert bien; il a bien servi: il a servi sous un tel général. Servir sur mer, sur terre. FONTENELLE dit, par terre. Il me semble que c' est contre l' usage.
   On est bien malheureux d' être né pour servir.
   Travailler ce n' est rien; mais toujours obéir!
       Le Méchant.
= 5°. Servir de, tenir lieu de; tenir la place; faire l' ofice de: il m' a servi de père. "Cela lui a servi de médecine. "Servir de prétexte; et en st. famil. de couvertûre. = 6°. Servir à, être utile. "Cet instrument sert à un tel usage. "Cela lui servira à faire son voyage. "Ce cheval sert à tirer et à porter. "À~ quoi cela peut-il vous servir? = 7°. V. réc. "Se servir de, user de. "Il se sert de mon argent, de mes meubles, de mes chevaux. "Se servir de toutes sortes de moyens; de son crédit, de sa faveur, etc.
   Rem. 1°. On disait autrefois servir dans le sens d' adorer. "L' Église Catholique ne sert point les images. = Dans le sens de rendre des services, il régit l' acusatif. Quelques Auteurs lui ont doné le datif pour régime. "On ne peut servir à deux maîtres. Lett. Édif. L' Acad. dit que c' est l' anciène traduction de ce texte de l' Évangile: ce régime est un latinisme. Fontenelle a dit aussi servir à deux maîtres. Dans une chronique, on dit servir à Dieu. Fenélon. a dit servir à l' ambition de. Et Brebeuf.
   Certes, c' étoit pour Rome un charme à sa misère,
   Quelle n' eut qu' à servir à l' un de ses enfans.
L' à est de trop dans tous ces exemples. = 2°. Servir, tenir lieu de; faire l' ofice de; régit les prép. de et à "Il a servi de père à ses neveux.
   Cette austère vertu, dont se paroit l' ingrat,
   Ne servoit que de voile au plus noir atentat.
       Créb.
Mais servir, être utile, ne régit que la prép. à. On a souvent demandé s' il faut dire, cela ne sert à rien, ou ne sert de rien. "À~ quoi sert-il, ou de quoi sert-il? Il y a des exemples et des autorités pour tous les deux. L' Académie les met indiféremment et sans remarque: mais le premier parait plus analogue au sens de cette expression; car, cela ne sert à rien, à quoi cela sert-il, signifient, cela n' est utile à rien, à quoi cela peut-il être utile? = 3°. Le que, qui suit ces façons de parler, régit le subjonctif: à quoi sert-il? ou il ne sert de rien, (ou à rien) que J. C. soit venu nous aporter cette vérité, ou nous ofrir cette grâce, si nous n' en profitons pas. Grifet. "À~ quoi sert-il à un Peuple que son Roi subjugue d' aûtres Nations, s' il est malheureux sous son règne? Télém. _ Dans cette dernière phrâse, de quoi aurait mieux valu pour éviter deux à si près l' un de l' aûtre: à quoi sert-il à, etc. = On dit quelquefois, surtout en vers, que sert-il? pour, à quoi sert-il? Racine ne dit même, que sert sans il, avec de et l' infinitif.
   Mais que sert de pousser des soupirs superflus?
Gresset dit aussi, que servent mes accens? pour, à quoi servent mes accens? = Mallebranche et Rollin ont mis rien avant servir. "Ne nous peuvent de rien servir: il n' auroit de rien servi de conoitre sa honte. Cette construction est gauloise. * Cela ne sert en rien, est encôre plus mauvais: c' est un gasconisme. = Avec peu, on met de et non pas à: Il servira de peu (et non pas à peu), d' avoir fait cette démarche. = 4°. Voltaire fait régir à ce verbe des noms au nominatif et sans article. "Rosen vint dabord servir simple cavalier dans le Régiment de Brinon. _ On dit ordinairement: servir comme, ou en qualité de.

SERVITEUR


SERVITEUR, s. m. SERVITUDE, s. f. [1re ê ouv.] Serviteur, 1°. Domestique. Celui-ci se dit absolument. "Mon domestique, votre domestique: mais serviteur, dans le discours ordinaire, ne se dit qu' avec une épithète. "Bon, fidèle, vieux serviteur. Voy. VALET. Il ne se dit absolument qu' en style de pratique, et dans les Traductions de l' Écriture Sainte. = Grand Serviteur de Dieu: homme d' une grande piété. Bon serviteur du Roi; zélé et fidèle dans ce qui regarde son service. = 2°. En termes de civilité, fort ataché à: disposé à rendre service. "J' étois fort serviteur de votre maison, de votre famille. "Votre serviteur, votre três humble et três-obéissant serviteur: formules de complimens. = On dit, en st. proverbial: je suis votre serviteur, pour dire: je n' aprouve pas ce que vous dites, je n' en ferai rien.
   Je louerai, si l' on veut, son train et sa dépense,
   Son adresse à cheval, aux armes, à la danse;
   Mais pour louer ses vers, je suis son serviteur.
       MISANTR.
= On dit aussi, en ce sens; serviteur aux orgues. = Serviteur à, etc. Il n' est plus question de, etc. "Serviteur à la promenade. "Serviteur au nom de Jacob; il ne sera plus question que de M. de la Vallée. Mariv. = * Le peuple dit à un enfant: faites serviteur! les honètes gens disent: saluez!
   SERVITUDE, 1°. Esclavage, captivité. "Mettre en servitude: tirer, délivrer de la servitude, ou de servitude. Sortir de servitude. = Figurément: "La servitude du démon, du péché, des passions. = Servitude, Esclavage (synon.) Le 2d se présente sous un aspect plus dur, plus éfrayant que le 1er. La servitude impose un joug; et l' esclavage, un joug de fer. L' esclavage est la plus dure des servitudes, etc. Extr. des Synonimes Franç. de M. l' Abé Roub. = 2°. Contrainte, assujétissement. "C' est une grande servitude d' être sujet à l' heure, à la cloche, etc. = 3°. En termes de Droit, assujétissement imposé sur un fonds, une maison; l' obligation de soufrir certaines incomodités, comme l' écoulement des eaux, le passage, une vûe, etc. "Imposer, racheter une servitude.

SESSION


SESSION, s. f. [Cé-cion: 1re è moy. Session et cession se prononcent de même. Des Imprimeurs, qui ignorent souvent le sens du 1er, mettent le 2d à la place.] Il ne se dit que des séances d' un Concile: "Première, seconde session. * Quelques persone, dit La Touche, s' en servent en parlant des assemblées du Parlement d' Angleterre: mais séance est le vrai mot français: Session est un anglicisme: session of Parliament, que Boyer traduit par, séance du Parlement.

SETIER


SETIER, s. m. [Se-tié: 1re e muet, 2e é fer.] Mesûre de grains ou de liqueurs, diférente selon les lieux. "Un setier de blé, de vin, etc. _ Demi-setier, la moitié d' une chopine. _ Setier de terre, portion de terre où l' on peut semer un setier de blé.

SETON


SETON, s. m. [1re e muet.] Petit cordon, dont on se sert en plusieurs opérations de Chirurgie, en le pâssant à travers les chairs.

SèVE


SèVE, s. f. [1re è moy. 2e e muet.] L' humeur, qui se répand par tout l' arbre, ou par toute la plante, et qui lui fait pousser du nouveau bois, des fleurs et des fruits. "La sève est dans les plantes, ce que le sang est dans le corps des animaux. "Cet arbre est en sève; la sève y pousse avec force.
   Dieu verse également la sève,
   Et dans le chène qui s' élève,
   Et dans les humbles arbrisseaux.
       Le Franc.
= Sève se dit aussi d' une certaine force, qui est dans le vin, quand il est agréable. "Ce vin n' a plus de sève: il a une bone sève, une sève agréable. Bossuet et La Bruyère l' ont employé au figuré. "Cette ancienne Sève et cette ancienne vigueur du Christianisme. Boss. "Ici se cache une sève maligne et corrompûe sous l' écorce de la politesse. La Bruy. Le 1er fait allusion à la sève du vin; et le 2d, à la sève de l' arbre.

SÉVèRE


SÉVèRE, adj. SÉVèREMENT, adv. SÉVÉRITÉ, s. f. [1re é fer. 2e è moy. aux 2 prem. é fer. au 3e.] Ils expriment une rigidité, qui ne pardone point, ou qui pardone rârement. "Prince, juge, censeur sévère. "Morale, loi, punition, vertu sévère. "Air, mine, ton sévère. "Châtier, punir, traiter sévèrement. "La sévérité des lois. "La sévérité est quelquefois nécessaire. "User de sévérité: traiter avec sévérité.
   Tout pouvoir, en un mot, périt par l' indulgence,
   Et la sévérité produit l' obéissance.
       Alzire.
Rem. Sévère régit, pour, envers, à l' égard: il est plus sévère pour les autres que pour lui-même. "Ce père est trop sévère envers ses enfants, à l' égard de ses enfans. = Quelques Auteurs lui ont fait régir le datif.
   ...Que faut-il que Bérénice espère?
   Rome lui sera-t' elle indulgence ou sévère.
       Racine.
"Coriolan étoit sévère aux aûtres comme à lui-même. Révol. Rom. = Sans régime, il peut suivre ou précéder le substantif. "Un destin sévère m' atache à cette malheureuse patrie. Télém.
   Les inflexibles lois d' un sévère destin.
= Voy. AUSTÉRE. = Maimbourg emploie sévère, comme substantif: "Voilà jusqu' où la présomption et l' orgueuil portent les faux sévères. Histoire de l' Arianisme. Dans le dernier siècle, on employait beaucoup d' adjectifs substantivement. Bourdaloue dit aussi: "Les portraits qu' ils nous ont laissés de ces sévères corrompus. = Sévérité, Rigueur, (synon.) La sévérité se trouve principalement dans la manière de penser et de juger; elle condamne facilement, et n' excuse pas: la rigueur se trouve particulièrement dans la manière de punir: elle n' adoucit point la peine, et ne pardone rien. GIR. Synon. _ On dit, éprouver la sévérité de la justice de Dieu; et non pas, comme a dit un Auteur, tomber dans la sévérité de, etc.

SÉVEUX


*SÉVEUX, adject. Ce mot est dans Le Gendre. "Vaisseaux séveux, où la sève monte et descend. _ Je n' ai trouvé ce mot que chez cet Auteur.

SÉVICES


SÉVICES, s. m. pl. [1re é fer. dern. e muet.] Rude traitement que fait un mari à sa femme, et qui va jusqu' aux coups. C' est un terme de Palais.

SEUIL


SEUIL, s. m. [Monosyllabe: mouillez l' l finale.] Pièce de bois ou de pierre, qui est au bas de l' ouvertûre d' une porte, et qui la traverse. "Il étoit sur le seuil de la porte.
   ...Dès que la Reine, ivre d' un fol orgueuil,
   De la porte du Temple aura passé le seuil.
       Athalie.
  Du seuil des portes éternelles,
  Des légions d' esprits fidèles
  Ã€~ sa voix s' élancent dans l' air.
       Le Franc.

SÉVIR


SÉVIR, v. act. [1re é fer.] Agir avec rigueur. Il ne se dit que du supérieur à l' égard de l' inférieur: et de la punition que les Juges ordonent contre les coupables. On dit sévir contre.

SEUL


SEUL, SEULE, adj. SEULEMENT, adv. [Seul, seu-le, le-man: 2e e muet.] Seul, 1°. qui est sans compagnie. "Je l' ai trouvé seul: "Il était tout seul. "Ils se trouvèrent seul à seul. = 2°. Unique. "Un seul Dieu, une seule Foi, un seul Baptême. "C' est le seul homme qui vive de la sorte; le seul bien qui me reste. = Simple. "La seule pensée de cette action est criminelle: la seule idée en fait horreur.
   REM. Seul, placé devant le substantif, a un sens diférent de seul, placé aprês. Un seul homme, signifie qu' il n' y a qu' un homme, (n°. 2°.) Un homme seul, est un homme qui n' est pas acompagné, (n°. 1°.) Ces deux sens sont bien marqués dans les diverses éditions de ce vers de Boileau.
   Et d' être juste enfin; ce mot seul veut tout dire.
Dans l' édition in-12 de 1701, il y a, ce seul mot veut tout dire: c' est une faûte, un sens tout diférent et éloigné de la pensée du Poète. Car, ce seul mot signifierait, qu' il n' y a que ce mot, ou que ce mot est le seul, qui signifie ce qu' on veut dire; au lieu que: ce mot seul veut tout dire, c' est comme si l' on disait, que ce mot tout seul, et sans qu' on y ajoute autre chôse, veut tout dire, et fait assez comprendre en quoi consiste le véritable honeur. Brossette. = Seul précède plus régulièrement dans ce vers remarquable de l' Art Poétique, qui comprend les trois unités, du lieu, du tems et de l' action.
   Qu' en un lieu, en un jour, un seul fait acompli,
   Tienne jusqu' à la fin le Théatre rempli.
Dans l' édition de 1713, on a mis mal-à-propôs, un fait seul. = Cet adjectif ne fait pas bien aprês le substantif, dans la phrâse suivante. "Tant l' industrie et l' habileté d' un homme seul est capable d' aporter de changement dans une Ville et dans un État. Rollin. Il falait en cet endroit, d' un seul homme. = Le pronom relatif, aprês seul, régit élégamment le subjonctif. "c' est le seul but qu' on doive se proposer dabord. Bufon. "Ils sont les seuls moyens que nous ayions de conoître la natûre en toûte chôse. Idem.
   Nous perdons le présent, ce tems si précieux,
   Le seul bien qui nous apartienne.
       Des Houll.
L' Académie met des exemples de l' indicatif comme du subjonctif. "La seule loi qu' il faut suivre. "Le seul câs qu' on pourroit craindre. C' est le seul homme, qui vive de la sorte. Le subjonctif est toujours meilleur. à mon avis. Je dirais plus volontiers: la seule loi qu' il faille suivre; le seul câs qu' on put craindre. = Seul ne comporte guère d' être modifié par les adverbes de quantité. On ne dit pas: j' ai été fort seul, beaucoup seul, aujourd' hui: plus seul qu' hier. Mde. de Sévigné dit pourtant: je suis ici très-seule: mais on n' y regarde pas de si prês dans une lettre. = On disait aûtrefois, tout seul, pour dire, de soi-même, et on le dit encôre. Aujourd' hui quelques-uns disent, en ce sens, à lui seul, à elle-seule. "Elle sait à elle seule trouver et secourir les malheureux. Mercûre. Cette expression a l' air un peu sauvage; et elle a besoin du sceau de l' usage.
   SEULEMENT, rien de plus, pas davantage. "Je vous demande seulement votre parole. Dites-lui seulement que, etc. = Il est souvent remplacé par la particule ne et la conjonction que: c' est donc un pléonasme d' employer dans la même phrâse, et pour le même objet, ces deux manières d' exprimer la même chôse. "Ils ne se transmettoient seulement qu' à ceux qui, etc. Hist. d' Angl. Il falait dire, ou, ne se transmettoient qu' à ceux qui, etc. ou bien, se transmettaient seulement à ceux qui, etc. = Seulement signifie quelquefois, du moins. "Laissez-moi seulement reposer un quart-d' heure. M. l' Abé Trublet, l' employant dans ce sens, fait marcher le pronom nominatif aprês le verbe. "Dans ce câs là même, l' incapacité et par conséquent la sotise à l' égard de ces chôses-là n' en sont pas moins réelles: seulement ne sont-elles pas incurables. _ Je crois que c' est contre l' usage, et qu' il faut dire: seulement elles ne sont pas, etc. = * On disait aûtrefois, tant seulement: voy. TANT. = Il signifie aussi même: "Vous me croyiez mort; je n' ai pas seulement été malade. Il ne se met alors qu' avec la négative. = Non seulement ne se dit pas tout seul; il exige à l' autre membre de la phrâse, l' adverbe mais encôre. * M. l' Abé Richard l' a oublié dans cette phrâse. "Le Roi de Sardaigne a un esprit de détail admirable non seulement pour ce qui regarde sa maison en particulier, l' éducation des Princes ses enfans, la construction ou l' entretien de ses bâtimens, l' embellissement des villes, etc. L' énumération finit dans le même goût, et l' on atend en vain le 2d membre de la phrâse, que non seulement anonçait. Il falait placer, mais encôre pour, devant l' embellissement des villes, etc. = * M. Moreau retranche mais au 2d membre. "Ainsi non seulement on oublia les vrais titres du pouvoir et de l' obéissance, on se fonda même, pour les méconoitre, sur des lois assez récentes. Je crois qu' il falait dire, mais on se fonda même, ou mais encôre on se fonda; et non pas, mais même on se fonda; car ce mais même est bien dur. Voyez MAIS, Rem. III.

SEULET


SEULET, ETTE, adj. [Seu-lè, lète; 2e è moy.] Diminutif de seul. Il n' est en usage que dans le style pastoral. "Je n' irai plus au bois seulette.

SEUR


*SEUR, SEURETÉ, etc. Voy. SûR, SûRETÉ.

SEVRAGE


SEVRAGE, s. m. SEVRER, v. a. SEVREûSE, s. f. [1re e muet; devant la syllabe féminine, il se change en è moy. Il sèvre, sèvrera, etc.] Sevrer, ôter sa nourrice à un enfant, afin qu' il ne tette plus. Sevrage, action de sevrer, ou le tems où l' on sèvre. Sevreûse, femme qui a soin d' un enfant et de le gouverner, quand on le sèvre. "On n' a sevré cet enfant qu' à deux ans: sa soeur n' avait que dix mois quand on la sevra. "M. Vans-wieten suit l' enfant depuis sa naissance jusqu' au sevrage. ANN. LITT. "Vous fûtes sa nourrice, et moi sa sevreûse. Th. d' Éduc. _ L' Académie ne met que le verbe. = Sevrage et sevreûse ne se disent qu' au propre; sevrer se dit aussi au figuré: priver, frustrer. "On l' a sevré de l' espérance qu' on lui avait donée. "Se sevrer des plaisirs.

SEUR


SEUR, SEURE, SEURETÉ. Vieille ortographe. Voy. SûR, SûRETÉ.

SEXAGÉNAIRE


SEXAGÉNAIRE, adj. et subst. SEXAGÉSIME, s. f. [Sèksagénère, gézime: 1re e moy. 3e é fer. 4e è moy. et long au 1er.] Le 1er se dit d' une persone qui a soixante ans: il ou elle est sexagénaire: homme, femme sexagénaire. = Subst. "C' est un sexagénaire. = Le 2d se dit de l' avant dernier Dimanche avant le 1er Dimanche de Carème. "Le Dimanche de la Sexagésime.

SEXE


SEXE, s. m. [Sèk-ce: 1re è moy. 2e e muet.] Ce qui fait la diférence du mâle et de la femelle; sèxe masculin, sèxe féminin. "Elle a un courage au-dessus de son sèxe. Sans distinction d' âge, ni de sèxe.
   Ce n' est plus cette Reine éclairée, intrépide,
   Élevée au-dessus de son sexe timide.
       Athalie.
"Elle n' étoit femme que par son sexe; supérieure aux hommes par les moeurs. Le Franc. Traduct. de S. Grég. de Naz.
   REM. Le sexe, sans addition, ce sont les femmes. "Édouard IV aima trop le sexe. RAYN. "L' empire du sexe. J. J. Rousseau. "Le sexe doit s' y conformer (à cet usage.) Marm.
   Et tous ces vieux recueuils de satires naïves,
   Des malices du sexe, immortelles archives.
       Boileau, Sat. X.
"Qui peut douter de l' ascendant que sait prendre le sexe sur l' autre moitié du genre humain? L' Abé Du-Serre-Figon. = Comme il n' y a que deux sexes, tout ne se joint pas bien à ce mot; car tout supose plus de deux chôses. J' ai vu dans plusieurs Auteurs: de tout âge, de tout état, de tout sexe; etc. Je dirais: des persones des deux sexes, et de tout âge, de tout état. C' est ainsi que le disent La Bruyère et M. Linguet. "La politesse n' est point la même dans les deux sexes, ni dans les diférentes conditions. La Bruyère. "Les deux sexes et tous les états s' en sont également enthousiasmés, (des ballons aérostatiques.) Ling.

SEXTUPLE


SEXTUPLE, adj. [Sèkstuple.] Qui contient six fois: douze est sextuple de deux.

SÉYER


*SÉYER, v. act. Selon Ménage, on dit: séyer du blé; et sier du bois. L' Académie dit sier, pour tout, et elle écrit scier. L. T.

SI


SI, conjonction conditionelle. Elle peut se résoûdre par, en câs que, pourvu que, à moins que, etc. S' il vient, s' il arrivait, etc. Devant les noms, si est comme comparatif, et a le même sens que tant; mais celui-ci ne se met que devant les substantif, si ne s' unit qu' aux adjectifs. "Il a tant de bonté: il est si bon.
   Rem. 1°. Si perd son i devant le pronom il, ils: s' il vient, s' ils viènent, etc. = 2°. Devant les verbes, il régit l' indicatif; mais quand il y a plusieurs membres dans la même phrâse, régis par cette conjonction, au lieu de la répéter, on met que au 2d membre, et alors ce que régit le subjonctif. "Si vous le méritez, et que vous le demandiez, au lieu de, si vous le demandez. Celui-ci peut se dire; mais l' autre vaut mieux. = 3°. Si, pris au sens de suposé que, n' est jamais suivi d' un futur, même quand il s' agit d' une chôse à venir; mais on met le présent du verbe au lieu du futur. Vous serez content, si vous venez; et non pas, si vous viendrez. Que si le premier verbe est au présent du conditionel, le 2d doit être à l' imparfait de l' indicatif. "Vous seriez content, si vous veniez; et non pas si vous viendriez. Enfin, si le 1er verbe est au pâssé du conditionel, le verbe aprês si sera aussi au passé de ce même conditionel. "Vous auriez été content, si vous fussiez venu. _ Les Étrangers doivent faire atention à cette Remarque. = 4°. Quand si est entre deux verbes, et que le 1er est au futur, le 2d doit être au présent. Si le 1er est au présent conditionel, le 2d doit être à l' imparfait. Ainsi cette phrase est vicieûse: "Les Dieux seront bien injustes, si tant de vertus ne les forçoient, etc. Il faut dire: si tant de vertus ne les forcent; ou bien, ils seraient injustes, si tant de vertus ne les forçaient, etc. = 5°. Quelques Auteurs font régir à si le subjonct. mais mal. En voici un exemple. "Aprês cela, faut-il s' étonner si des hommes qui recherchoient les voluptés au milieu des périls.. ayent vu ensevelir leur liberté dans les champs de Pharsale. Révol. Rom. Il falait: s' étoner qu' ils ayent vu, ou s' ils ont vu, etc. = 6°. Si n' est pas toujours une conjonction conditionelle: elle n' exprime pas toujours le doute, et elle s' emploie souvent, par les Poètes sur-tout, pour exprimer ce qui est conu et avoué de tout le monde. On a repris dans l' Ann. Litt. ces vers de M. de Murville.
   Entendez Orosmane, et Vendome et Zamore,
   Et si l' illusion, qui créa leurs malheurs,
   Vous arrache à la fois des soupirs et des pleurs,
   Avouez que des vers l' éloquente magie
   N' a jamais peint l' amour avec tant d' énergie.
"Quel éloge, dit le Censeur, que de dire, que si une Pièce arrache des pleurs, il faut avouer qu' elle est bonne: cela est indubitable. Mais si elle n' en arrache pas, elle est mauvaise; et la conjonction si n' afirmant rien, on ne sait que statuer sur le mérite de l' ouvrage. _ Je ne puis être du sentiment du Critique, dans cette ocasion. Si, en cet endroit, équivaut à puisque: il afirme, par conséquent, et il statue sur le mérite de l' ouvrage. Le sens est: puisque l' illusion vous arrache des pleurs, avouez que, etc. Il serait aisé de citer un grand nombre d' exemples de la conjonction~ si, employée de la sorte. = 7°. Plusieurs si de suite, sans répéter le verbe, est un tour latin, bon quelquefois à employer en français. "Si j' épouse une femme avare, elle ne me ruinera point; si, une joueuse, elle pourra s' enrichir, etc. LA BRUY. = 8°. Une des propriétés de si, c' est de changer l' indicatif en subjonctif, dans le verbe régi par que, parce qu' il exprime le doute. Ainsi, vous direz: il est vrai que je suis sincère; et l' on vous répondra: s' il est vrai que vous soyiez sincère, expliquez-vous donc. "Si vous m' aviez convaincu, vous auriez été certainement flaté de cette publicité. Je vous crois trop juste pour vous en plaindre, si l' on venoit à trouver que vous n' ayiez pas réussi. Ling. "S' il est un avenir sur lequel la raison vous permette de porter vos regards, vivez de façon qu' il vous soit plus avantageux pour vous que le présent. Anti-Lucrèce.
   II. Si se met devant les adjectifs, comme les adverbes de quantité. Il est si aimable, si bon qu' il n' a pas son pareil. = 1°. S' il y a deux adjectifs, il faut répéter si; il est si sage et si avisé; et non pas si sage et avisé. = 2°. Aûtrefois on mettait si pour aussi devant les adjectifs et les adverbes, et on le faisait suivre de la conjonction que. "Personne ne vous honore si véritablement que je le fais. "Il n' est pas si faible que vous. Il faut, dans ces ocasions, aussi véritablement, aussi faible, etc. parce qu' il y a comparaison. On met si quand on ne compare pas: "Un corps si foible ne peut pas résister. Bouh. Le P. Buffier n' est pas tout-à-fait de cet avis. Il croit que si peut être employé pour aussi, soit après une négation, soit dans une interrogation: "Descartes n' est pas toujours si plausible que Gassendi: "Est-il si méchant qu' on le dit? L' Acad. dit aussi: "Il n' est pas si riche que son frère: il n' est pas si estimé que, etc.~ Je crois, comme le P. Bouhours, qu' aussi vaudrait mieux dans ces phrâses, comme autant vaut mieux que tant, lorsqu' il y a comparaison. = Vaugelas remarque que dans ces ocasions on doit mettre que aprês si, et non pas comme: "je ne le crois pas si grand que vous, et non pas comme vous. Si cette observation est inutile pour si, elle peut servir pour aussi. = 3°. Hors de la comparaison, si est suivi de que; et ce que régit le verbe au subjonctif, lorsque le verbe auquel si est joint est à l' impératif, ou lorsque les deux verbes sont employés négativement: "Faites-le si bien que vous ne soyiez pas obligé d' y revenir. "Il n' a pas été si leste, qu' il n' ait reçu un bon coup de sabre. Hors de là, il régit l' indicatif: "Il a été si atentif qu' il a retenu mot à mot tout ce qu' on a dit. = Remarquez que lorsque les deux verbes sont employés avec la négative, on retranche pas au second, comme dans le second exemple. On la retranche aussi au verbe qui est régi par si. "L' expérience avoit fait voir qu' on n' aurait jamais la paix au dedans, si on ne portoit la guerre au dehors. Révol. Rom. "Si Pigmalion ne change de conduite, notre gloire et notre puissance seront bientôt transportées à quelque aûtre peuple mieux gouverné que nous. Télém. On pourrait dire, sans solécisme, s' il ne change pas, etc. mais, s' il ne change est plus élégant. = 4°. Si ne se met point devant les substantifs. "Le judicieux Dion a si peur qu' on ne soupçone, etc. LING. Révol. de l' Emp. Rom. MALLEBRANCHE avait dit aussi. "Ils ont si peur de n' être pas au dessus de tous ceux qui les écoutent, etc. "Il a encore si mal, qu' il prendra peut-être le parti d' aller à Bourbon. Sév. Avec les substantifs, on doit se servir de tant: il a tant de peur, tant de mal, etc. _ Il est vrai qu' on dit, il est si mal; mais mal est là adverbe. _ La Bruyère dit aussi, se rendre si maître de sa matière, que, etc. Il faut dire, tellement maître que, etc. = Quelquefois si peut régir des substantifs, employés adjectivement, comme dans cette phrâse de Bossuet. "Nous ne sommes pas si brebis, ni si patiens que vous pourriez le croire: mais cela ne peut être bon que dans le style badin, ou critique, ou polémique. Ainsi l' on dira; il n' est pas si dupe, si cruche que vous le pensez, etc. = 5°. Quelques Auteurs se sont servi de si, suivi de que, dans le sens de quelque que: "Si conu que soit un tel, on n' a pu encore deviner son caractère. "Aucune âme, si parfaite qu' elle soit, n' a jamais ici bâs une contemplation perpétuelle. Fénélon. "Si divisée qu' elle pût être, etc. Pluche. "La mine, si riche qu' elle soit, s' est enfin épuisée. Journ. de Mons. = Le Rich. Port. dit: si beau qu' il soit, vous l' aurez; et l' Acad. "Si petit qu' il soit . _ Il me semble que ce tour vieillit, que du moins il n' est que du style familier; et que quelque que est plus sûr et plus autorisé. * Anciènement on mettoit si à la place de quelque, mais sans que, et l' on plaçait le pronom nominatif aprês le verbe. "En toute chôse, si dificile fût-elle. Vie de St. Pierre d' Alc. pour, quelque dificile qu' elle fût. = 6°. Comme si régit l' indicatif, et non pas le subjonctif. "La pauvre fille s' arrêta à cette partie de son histoire, comme si elle n' osât (n' osait) continuer. Miss. Bidulph. = 7°. Si ne modifie pas bien les participes, à moins qu' ils ne soient en même tems adjectifs verbaux. On dit, un homme si éclairé, si rangé; mais on ne dit pas, un homme si aimé, une éclipse si observée: il faut dire, si tendrement aimé, si exactement observée; et alors si modifie, non le participe, mais l' adverbe. _ Je ne dissimulerai pas qu' il y a beaucoup d' exemples contraires à cette Règle; mais je ne la crois pas moins juste. "Vigilance, qui s' oposoit à des sentimens si reçus. BOSS. "Télémaque, si désabusé des conquêtes. Fénél. "Quel est cet inconu, qui a si maltraité nos troupes. Mde. Dacier. "Votre Majesté est donc bien ingrate d' avoir si maltraité ses Maîtres. Fonten. * Il est à remarquer qu' on dirait fort bien, d' avoir traité si mal, parce que si s' unit fort bien avec les adverbes; mais quoique mal se trouve dans maltraiter, l' usage n' en a fait qu' un seul mot, de sorte que maltraité est un pur participe. = Racine le Fils a dit aussi:
   À~ ce pouvoir si craint tout mortel rend homage.
Tout cela a l' air sauvage, et surprend, et choque quand on le lit, ou qu' on l' entend. = Parmi les adjectifs verbaux même, et les adjectifs simples, si ne peut modifier que ceux qui sont susceptibles de degrés de comparaison. Démontré et inconnu, par exemple, ne comportent pas le plus et le moins; on ne dirait pas: une proposition peu ou beaucoup démontrée; une loi de la Nature peu ou beaucoup inconûe: on ne peut donc dire si démontrée, si inconûe, comme a dit Voltaire. "Cette force (la gravitation) si démontrée, et avant le grand Newton, si inconûe. Hist. de Russie. Je voudrais dire, si bien démontrée et si peu conûe; ou, et parfaitement, ou entierement inconûe. _ J. J. Rouss. dit aussi, si démontrée. M. l' Ab. De Lille dit, si infini; ce qui est encore plus singulier. _ Ce n' est qu' en badinant qu' on peut dire, comme Mde de Sévigné. "Me voici à Paris, où je trouve que ces deux Messieurs ne sont pas si morts qu' ils l' étoient hier. _ Ils avaient pâssé pour morts. = 8°. Quoique si modifie les adverbes, je trouve qu' il ne fait pas bien devant ceux qui sont composés. "Ce qui me metoit si en peine. VOIT. Je dirais, si fort en peine.
   III. Si bien que, de sorte que, était fort usité aûtrefois, même dans le beau style: il a vieilli et n' est plus admis que dans la conversation. Quand il est à la tête de la phrâse, il est encôre bon dans le style polémique. "Si bien que, à vous entendre, on ne trouve absolument rien qui vaille dans les anciens ouvrages scolastiques. Anon. Il régit l' indicatif. = On disait aussi, si malheureux que de, pour dire, assez malheureux pour: "Je ne serai pas si malheureux que d' être la seule chôse qui en soit sortie (de sa mémoire). Voit. Cette expression est encore réléguée dans le discours familier. = Si, pour cependant, est encôre plus suranné. "Toute incomparable qu' est la vaillance d' Alexandre, si a t' elle encore ses taches. Montaigne. "Quoique nous lisions de lui (d' Amadis) si faut-il avouer que vos fortunes sont aussi merveilleuses que les siennes. Voit. = Et si, pour, et cependant, a duré plus longtems. "J' ai fait tout mon possible; et si je n' ai pu en venir à bout. "Je n' ai point de goutte, et si je bois comme un trou. DE COULANGES. Vaugelas et Th. Corneille condamnent cette façon de parler: l' Acad. l' admettait dabord pour le style familier; ensuite elle dit que cette expression était bâsse. Dans la dern. édit. elle l' aprouve pour la conversation. On dit plus souvent et si pourtant; mais il n' est pas du beau style. M. Henaut l' a pourtant employé dans son Abr. Chronol. "Et si pourtant l' Edit de Henri III, qui régloit ainsi les rangs, (entre les Pairs) ne fut doné qu' en 1576. = Si se disait aussi pour ainsi et faisait marcher le pronom aprês le verbe: si ferai-je. La Font. = Si tant est que, etc. L' Acad. dit qu' on peut encore s' en servir dans le discours familier. "Si tant est que la chôse soit comme vous le dites, il faudra, etc. L. T. = Si est-ce que: cette façon de parler était fort bonne et fort élégante du tems de Vaugelas; mais elle ne l' est plus guère aujourd' hui, dirent bientôt Bouhours et Corneille. Suivant l' Acad. elle était toujours d' usage dans le discours familier. "Quoique vous ayiez pu dire, si est-ce qu' il est résolu de partir. _ Dans les éditions suivantes, elle dit que cette expression vieillit. L. T. = On disait aussi aûtrefois, si fais bien moi, pour, moi au contraire. "Je n' aime point le jeu. _ Si fais bien moi. M. de St. Real dit dans la Vie de J. C. "Ce n' est pas au coeur que vont les chôses que l' homme mange: ainsi elles ne sauroient le souiller; si font bien celles qui en sortent. _ Cette façon de parler, dit Andry, ne se peut souffrir que dans le discours familier. Réflex. = Si que, pour de sorte que, et si bien, pour quoique, sont tout-à-fait hors d' usage depuis longtems. "Si bien j' ai dit cela, je ne le ferai pas. C' est de l' Italien tout pur: se bene l' ho detto, etc.
   IV. Si est substantif dans cette phrâse: voilà bien des si et des mais.
   Votre coeur a toujours en réserve
   Quelques si, quelques mais.
       Dest. Le Glorieux.
"Voilà un bon cheval; il n' y a point de si: quel si y trouvez-vous? Et proverbialement avec un si on mettrait Paris dans une bouteille: avec de certaines supositions, on rendrait tout possible. _ L' Acad. troûve que tout cela est populaire. Je crois qu' il sufit de dire qu' il est familier. = Si est quelquefois particule afirmative. "Vous dites que non, et je dit que si; je gage que si. "Oh que si. MARIV. Mais si tout seul, pour oui est du Peuple. "Tu ne sais pas écrire. _ Si parbleu. _ Il dit aussi si fait. "Vous n' avez gardé que la robe que vous avez sur vous: si fait, si fait, j' en ai encore une aûtre. Th. d' Éduc. L' Acad. dit que cette façon de parler n' est pas du bel usage. Voltaire l' a employée dans ses Romans prétendus philosophiques.
   V. SI-TôT, adv. Dans un tems si prochain. Il ne le fera pas si-tôt. Il s' emploie toujours dans des phrâses négatives. = * Plusieurs disent, de si-tôt: la paix ne se rétablira pas de si-tôt. Journ. Polit. "Il serait à souhaiter que M. Priestley n' abandonât pas de si-tôt une carrière où il se montre avec tant de distinction. Journ. de Litt. "Il paroit impossible que l' incendie alumé s' apaise de si-tôt. Ling. "Il ne comptoit pas de revenir de si-tôt. Ann. Litt. "La Langue Anglaise ne fut pas de si-tôt à la mode. Hist. d' Angl. = Je ne sais si c' est un néologisme, ou un mot de Province; mais je crois que cette locution n' est pas du bel usage. Mde de G... l' a aussi employée. "M. le Chevalier vient-il? _ Oh! non pas de si-tôt. Th. d' Éduc. _ L' Acad. ne met que si tôt que, au mot TôT. = Si-tôt que conjonction, régit le futur et le conditionel. Si-tôt qu' il viendra, si-tôt que vous aurez fait. "Il me promit que si-tôt qu' il aurait reçu des nouvelles, il me les enverrait. _ Remarquez que, dans ces sortes de phrâses, on met le conditionel pâssé, lorsque le verbe du premier membre, qui est le membre régissant, est à l' aoriste ou à l' imparfait, ou au plusqueparfait. Il me promit ou il me promettait, ou il m' avait promis que si-tôt qu' il serait arrivé, il viendrait me voir. Mais si le premier verbe est au présent ou au prétérit, on mettra le verbe régi par si-tôt que, au futur passé: il me promet toujours, ou il m' a toujours promis que si-tôt qu' il aura reçu les nouvelles, il me les enverra. = Au reste, il ne faut pas confondre la conjonction si-tôt que avec si joint à tôt et suivi de que, tel qu' il est employé dans cette phrâse. "Faites-le si-tôt, que vous ayiez le tems d' aller où je vous ai dit. = Si-tôt ne régit pas les noms. "Si-tôt la lettre reçue, Berault. Hist. de l' Egl. "Si-tôt le saint expiré. Ibid. Cela sent le gasconisme.

SIBYLLE


SIBYLLE, s. f. [Sibile, 3e e muet.] Prophétesse chez les Païens. = Aujourd' hui, en style plaisant et moqueur, vieille Sibyle, Fille ou Femme âgée, qui fait parade d' esprit et de science. "Je vous ai sacrifié à un Bureau d' esprit; mais cela ne m' arrivera guères. Je n' aime pas ces maisons présidées par une Sibylle, qui done le ton et qui le reçoit à son tour de tous ceux qui environent son trépied. Palissot.

SICCITÉ


SICCITÉ, s. fém. [Sikcité; 3e é fer.] Qualité de ce qui est sec: la siccité de l' air. _ Ce mot ne se dit que par les Savans.

SIèCLE


SIèCLE, s. m. [Siè-kle: 1re è moy. 2e e muet.] 1°. Espace de cent ans. "Il y a tant de siècles depuis le déluge. = 2°. Tems: aux siècles pâssés; à la fin, à la consomation des siècles. = 3°. Espace de tems indéterminé. "Les moeurs de notre siècle: "Cet homme fait honeur à son siècle. = 4°. Tems célèbre par le règne de quelque grand Prince; par les ouvrages de quelque Grand Homme. "Le siècle d' Alexandre, d' Auguste, de Louis XIV. "Le siècle d' Homère, de Virgile et d' Horace, de la belle Latinité, etc. = 5°. Il se dit par raport aux bones ou mauvaises qualités des Hommes, qui vivent ou qui ont vécu dans le tems dont on parle. "Siècle grossier, barbâre, ignorant; ou, poli, éclairé. "Ce siècle, surnomé si mal-à-propos, siècle de lumière. "Dans des siècles d' ignorance, de ténèbres, etc. "Il est encore aujourd' hui des hommes, plus sages que leur siècle, qui ôsent préférer le mérite sans fortune à l' opulence sans talens, et quelquefois sans moeurs. l' Ab. Du-Serre-Figon. = 6°. Par exagération, tems considérable: "Il y a un siècle qu' on ne vous a vu.
   Dans quatre ans n' aurai-je pas vingt ans?
   -- Eh! mais un jour viendra que nous en aurons trente:
   D' ici là c' est un siècle; on n' en voit pas la fin.
       La Chaussée.
= 7°. Le siècle futur, la vie futûre: quelle folie de sacrifier les espérances du siècle futur pour les plaisirs du siècle présent. = 8°. Absolument, le siècle, l' état des gens du monde, en tant qu' il est oposé à l' état religieux: il est demeuré dans le siècle; ou de la vie mondaine, par oposition à la vie chrétiène: les maximes du siècle.

SIED


SIED (Il) v. impers. Voy. SEOIR.

SIèGE


SIèGE, s. m. [Siè-ge: 1re è moy. 2e e muet.] 1°. Meuble fait pour s' asseoir. Le peuple dit, une chaise; les gens du bon ton disent, un siège: donez, aportez un siège; donnez des sièges. "Siège de pâille, de jonc, de cannes, de tapisserie; garni de, etc. = 2°. Bancs de pierre ou de marbre, ou élévation de gazon, qu' on pratique dans les jardins. "Siège de pierre, de marbre, de gazon. = 3°. Siège du Cocher, où le Cocher s' assoie sur le devant d' un carrosse. = Siège d' une selle, sur lequel est assis le Cavalier. = 4°. Il se dit de la place où le Juge s' assied; et de la salle où l' on rend la justice, dans les juridictions subalternes; et du Corps des Juges, et de la Juridiction même de ces Juges inférieurs. = 5°. Évêché et sa juridiction. "Siège Pontifical, Patriarchal, Épiscopal, etc. _ Le Siège de Rome est apelé le Saint Siège, le Siège Apostolique. = 6°. La ville capitale d' un État. "Le siège de cet État. = Dans un sens aprochant, le siège de l' idolâtrie, des Sciences, des Beaux-Arts. = 7°. Établissement d' une armée autour d' une place, pour l' ataquer, la prendre. "Mettre le siège devant une place. Lever le siège. * On dit, en jouant sur le mot, lever le siège, s' en aller, se retirer d' une compagnie. "Vous parlâtes politique et gouvernement. Savez-vous ce qui fut dit lorsque vous eûtes levé le siège? Qu' il falloit vous faire Ministre ou Historiographe du Roi. L' Abé Coyer à une Dame Anglaise. "L' audience finie, Jupiter lève le siège et s' en va dîner. Geofroi, Journ. de Mons.

SIÉGER


SIÉGER, v. n. [Siégé: 2e é fer. Devant l' e muet, le 1er se change en è moyen: il siège, siègera, etc.] Il ne se dit que dans le 4e et le 5e sens de siège. "Le Parlement siège quelquefois au Châtelet pour la séance des prisoniers. "Un tel Pape siégea tant d' années. = * Les Picards et les Normands disent siéger, pour assiéger. C' est une faûte, dont ils doivent se corriger. Vaug. Corn.

SIEN


SIEN, SIENNE, pronom possessif relatif. [Sièn, siè-ne: 1re è moy.] Il se décline avec l' article défini. "Mes afaires et les siènes: de mon intérêt et du sien. = * Plusieurs se servent de ce pronom relatif, à la place du pronom absolu. Ils disent un sien frère, une sienne soeur. Il faut dire: son frère, sa soeur, ou bien, un de ses frères; une de ses soeurs. = On disait autrefois être sien, sienne, pour, être à lui, à elle; lui apartenir.
   Ainsi ce rang est sien, cette faveur est sienne.
       CORNEILLE, Polieucte.
Et ainsi des pronoms de la 1re et de la 2de persone. "Cette maison est miène. Dites est à moi, ou, m' apartient. "J. C. peut disposer des grâces, qu' il nous distribûe, comme de chôses qui sont siennes. BOSS.
   Vis pour ton cher Tyran, tandis que je meurs tienne.
       CORN. Cinna.
_ Ce que Dieu a comandé, ce sien serviteur (st. Augustin) le recomande. St. Fr. de Sales. = Le sien, subst. abstrait. "À~ chacun le sien ce n' est pas trop. "On ne fait tort à persone, quand on ne demande que le sien. Les siens; ses parens, ses héritiers, etc. "Il a soin des siens: il a stipulé pour lui et pour les siens. = Faire des siennes, c' est en st. prov. faire des tours de son métier, d' étourdi, s' entend, et de jeune fou.

SIèSTE


SIèSTE, s. f. [Siès-te: 1re è moy. 2e e muet.] Mot emprunté de l' Espagnol. Faire la sièste, dormir pendant la chaleur du jour.

SIEUR


SIEUR, s. m. [Monosyllabe.] Il ne se dit qu' en style de Pratique, ou par modestie: le sieur un tel. Hors delà on dit Monsieur. = Sieur est aussi un titre qui marque seigneurie. "Le sieur d' un tel village. = Autrefois les Auteurs disaient le sieur, et non pas Monsieur, en se nomant à la tête de leurs ouvrages. "Le sieur d' Ablancourt; le sieur Despréaux.

SIFFLEMENT


SIFFLEMENT, ou SIFLEMENT, s. m. SIFLER, v. n. et act. SIFLET, s. m. SIFLEUR, EûSE, subst. m. et f. [Sifleman, flé, flè, fleur, fleû-ze: 2e e muet au 1er, é fer. au 2d, è moy. au 3e.] Sifler, v. n. Former un son aigu en serrant les lèvres en rond et poussant son haleine. "Il sifle bien, bien fort; sifler pour apeler quelqu' un.
   C' est un petit jeune homme, à quatre pieds de terre...
   Qu' on voit toujours sautant, dansant, gesticulant,
   Qui vous parle en siflant, et qui sifle en parlant.
       Regnard.
= Par extension, il se dit de certains animaux, comme les serpens, etc. et du vent, d' une flêche, d' une balle de mousquet, etc. = V. act. chanter un air en siflant. "Il sifle toute sorte d' airs. = Sifler un oiseau; lui aprendre à sifler des airs. = FIG. sifler un homme; l' instruire de ce qu' il aura à dire, ou à faire en certaines ocasions. = C' est aussi désaprouver avec dérision. "On a siflé la pièce: cet Acteur a été siflé.
   SIFLEMENT ne se dit qu' au propre. Bruit qu' on fait en siflant. "Ses siflemens sont incomodes. Le siflement des serpens; du vent, d' une flèche, etc.
   SIFLET, petit instrument avec lequel on sifle. = En st. prov. la voix, le gosier, l' organe de la parole. "On lui a coupé le siflet; on l' a fait taire.
   SIFLEUR, qui sifle. "un sifleur importun. = On ne dit guère sifleuse, par ce que les femmes ne siflent pas ordinairement.

SIGNAL


SIGNAL, s. m. SIGNALEMENT, s. m. SIGNALER, v. act. [Mouillez le g: 3e e muet au 2d, é fer. au 3e, leman, lé.] Signal, signe, que l' on done pour servir d' avertissement. Faire un signal; doner le signal. "À~ ce signal; au premier signal, on se mit en marche. "Ils étaient convenus des signaux. = FIG. "Le signal de la révolte, etc. = Signal, signe (Synon.) Le 1re est toujours arbitraire; le 2d est quelquefois naturel. "Le coup de cloche est le signal, qui apèle les Chanoines à l' Église: les mouvemens, qui paraissent dans le visage, sont ordinairement les signes de ce qu' il se pâsse dans le coeur. "On s' explique par signes avec les muets ou les sourds: et l' on convient d' un signal pour se faire entendre des gens éloignés. GIR. Syn. Les hommes font des signes et les vaisseaux des signaux. "Il se firent précéder par le plus petit des trois bâtimens. Il avoit ordre de faire conoitre le succès de son entreprise par des signes. Hist. des Voy. Il falait dire, par des signaux.
   SIGNALER, c' est 1°. Faire par écrit la description de la figûre d' un soldat qu' on enrôle, et qui sert à le faire reconaître. = 2°. Dans un plus beau sens, rendre remarquable. "Signaler son courage, son zèle. = Se signaler, se distinguer; se rendre célèbre.
   ....Je vais loin de l' Asie,
   Signaler la fureur, dont mon âme est saisie.
       Sémiramis.
Quand il s' emploie indéfiniment, il se prend en bone part. "Il s' est signalé en diverses ocasions. Mais il a quelquefois un sens contraire, par les termes, qui l' acompagnent. "Il s' est signalé par ses perfidies, ses atentats. = Signalé est indiférent au bien et au mal. "Jour signalé par les victoires, par les défaites. "Service signalé: vertu, victoire, signalée. "Un crime, un vol signalé. Signalé, Insigne (Syn.) On est signalé par des traits particuliers, et insigne par des qualités peu comunes.... Plusieurs exploits signalés anoncent une insigne valeur; comme plusieurs crimes signalés anoncent un insigne scélérat, etc. Extr. des Syn. Fr. de M. l' Ab. Roubaud. = Cet adjectif verbal est une exception à la règle générale des participes, terminés en é masculin, qui ne doivent pas précéder le substantif. L' Usage permet à celui-ci de marcher devant. "Un signalé fripon: un des plus signalés Orateurs de son Siècle. Acad. "Vos vaisseaux rendront un signalé service à son fils. Télém. On rendit à Dieu des actions de grâces solemnelles de la grande et signalée délivrance, qu' il venoit de leur acorder. Rollin. D' ordinaire pourtant, il aime à suivre le nom qu' il modifie.
   SIGNALEMENT ne se dit que dans le 1er sens du Verbe. "Envoyer les signalemens des déserteurs.

SIGNAMMENT


*SIGNAMMENT, adv. Il s' est dit autrefois pour notamment.

SIGNATûRE


SIGNATûRE, s. f. SIGNER, v. act. [Si--gnatûre, sig-né: mouillez le g; et non pas Sinatûre, siné.] Signatûre est le nom de quelqu' un, écrit de sa main, mis à la fin d' une lettre, d' un billet, d' un contrat. Voy. Seing, qui a le même sens.
   Je n' ose pas, mon Pere, en apeler,
   - - Mais j' en apèle moi. - Voyez cette écriture,
   Vous n' apelerez pas de votre signature.
       Les Plaideurs.
= Signer, c' est mmettre son seing, ou sa signatûre. "Signer un contrat, une requête, un Arrêt, une lettre, une dépêche. = V. n. Il ne voulut pas signer: il a déclaré ne savoir signer. = Et avec la prép. à: "Signer à un contrat. Il ne se dit que des témoins, ou de ceux, qui y signent par honeur. = Fig. "Les Martyrs ont signé leur confession de leur sang. _ En st. famil. "Je suis prêt à vous le signer de mon sang, dit-on, pour assurer la sincérité de ses promesses, etc.

SIGNE


SIGNE, s. m. [Sig-ne: mouillez le g: 2e e muet.] 1°. Indice, marque de, etc. "La fumée est signe de feu. "Le pouls intermittent est souvent un signe d' une mort prochaine. Voy. SIGNAL.
   C' est lui-même: j' en ai des signes trop certains.
   Mes sens se sont troublés; Mes yeux se sont éteints,
   Mon coeur a tressailli~...       La Chauss.
= 2°. Démonstration extérieure, qui fait conaitre ce que l' on pense ou ce que l' on veut. "Se parler par signes. "Faire signe de la tête, des yeux, de la main. "Il lui a fait signe de venir. "Calipso fit signe aux Nymphes. À~ l' instant on chanta le combat des Centaures avec les Lapithes Télém. = 3°. Dans le langage de l' Écriture, il signifie quelquefois miracle, ou phénomène. "Cette Nation demande des signes. "Il y aura des signes dans le Soleil et dans la Lune, etc. = 4°. Marques ou taches naturelles qu' on a sur la peau. = 5°. Constellation. "Les douze signes du zodiaque. "Le signe du bélier, du taureau, etc.
   Rem. Dans les deux premiers sens, on dit, c' est signe, sans article, avec que suivi de l' infinitif ou de l' indicatif. "Ce serait mauvais signe pour son esprit et pour sa raison que de vous être contraire. Sév. "Vous avez peut-être chaud et vous êtes tourmentée des cousins. Ah! ma fille, c' est signe que nous sommes bien loin l' une de l' autre. La Même. à Paris, 29 Novembre. Sa Fille était en Provence. = En signe de, adv. Il est indéclinable, et se dit toujours au singulier, même quand il est question de plusieurs signes. "Il a plusieurs fois proposé au Roi de faire mourir tous ceux, qui refuseroient de fouler aux pieds les saintes images, en signes d' apostasie. Let. Édif. Retranchez l' s.

SIGNER


SIGNER. Voy. SIGNATûRE.

SIGNET


SIGNET, s. m. [Sinè: 2e è moy. Le g ne se prononce pas.] Plusieurs petits rubans, liés ensemble, qui tiènent à un bouton, ou petit peloton, et qu' on met au haut d' un bréviaire, ou d' un missel, pour marquer les endroits qu' on veut trouver aisément. = C' est aussi le petit ruban, que les Relieurs atachent à la tranchefile du haut d' un livre, pour marquer l' endroit du livre, ou l' on est demeuré.

SIGNIFIANT


*SIGNIFIANT, ANTE, adj. SIGNIFIANCE, s. f. Le 1er est dans Trév. Expressif. "Des expressions bien signifiantes. C' est quelque mot du style précieux et du jargon de ce tems là (au comencement du Siècle.) L' usage ne l' a pas adopté. = Le 2d est un mot populaire. Mr. de Sévigné, écrivant à sa soeur, Mde De Grignan, l' a employé en plaisantant. "On est sûr de votre coeur: mais ce n' est pas toujours assez: il faut des signifiances, c. à. d. des démonstrations, des témoignages.

SIGNIFICATIF


SIGNIFICATIF, IVE, adj. SIGNIFICATION, s. f. SIGNIFIER, v. act. [Si-gnifi--catif, tive, cion, fié: mouillez le g.] Signifier, en parlant des chôses, c' est 1°. Être signe de: "Ces murmures, ces atroupemens ne signifient rien de bon. = 2°. En Gramaire, marquer ce qu' on entend par un mot: "Ce mot signifie telle chôse au propre et telle chôse au figuré. = On l' étend aux pensées: "Ce que vous dites-là ne signifie rien; ne va point au fait, au sujet que nous traitons, à l' afaire, dont il est question. "Cet expédient ne signifie rien, ne servira de rien. = 3°. En parlant des persones: Déclarer, faire conaître. "Je vous ai signifié mes intentions: il lui signifia qu' il ne voulait plus le voir. = 4°. Notifier par procédûre de Justice. "Signifier une Sentence, un Arrêt: signifier qu' on renonce ou qu' on accepte, etc.
   REM. Signifier fait au présent, nous signifions, vous signifiez et à l' Imparfait, nous signifiions, vous signifiiez. VAUGELAS avait voulu substituer, aux deux i, un seul î, accentué d' un circonflexe. Son opinion n' a pas prévalu:
   SIGNIFICATION se dit à peu prês dans tous les sens du verbe. "La signification d' un hiéroglyphe, d' un symbole, d' un mot. "Ce mot a plusieurs significations. "La signification d' un Arrêt, d' une Sentence, d' un Acte, etc.
   SIGNIFICATIF, qui signifie, qui exprime bien. "Ce terme, ce mot et bien significatif. "Geste, souris bien significatif, qui exprime bien la pensée, l' intention, etc.

SILENCE


SILENCE, s. m. SILENCIEUX, EûSE, adj. [Silance, cieû, cieûze; en vers ci-eû, etc.] Silence est au propre, l' état d' une persone, qui se tait, qui s' abstient de parler. "Garder, observer, rompre le silence.
   On observe en frapant un silence farouche.
       Didon.
"Le silence des Historiens, sur ce fait, doit le rendre suspect. "Votre silence, sur cet article, prouve qu' il vous embarrasse. Anon. Pâsser sous silence; ne pas parler de, etc. = Fig. Cessation du bruit. "Silence de la nuit, des bois, des vents, etc.
   Les flambeaux presque éteints sous ces portiques sombres,
   Rendent plus éfrayans le silence et la nuit.
       Didon.
  Des victimes vous-même interrogez le flanc:
  Du silence des vents demandez-leur la cause.
      Iphigénie.
= Silencieux ne se dit que des persones. Taciturne, qui ne parle guère. "C' est un homme fort silencieux: elle est bien silencieûse aujourd' hui!
   Rem. 1°. Silence n' a pas de pluriel; et il ne se joint pas avec le pronom un. Ce n' est qu' en Musique, qu' on dit des silences; un silence, pour signifier une marque, qui désigne un repôs dans le chant. Hors de là on dit toujours silence au singulier. "Vous l' assurez, dit-il, que malgré vos silences votre père comun (Descartes) et votre mère font une liaison entre vous et lui. Sév. Je crois qu' il falait dire, malgré votre silence réciproque; ou de part et d' aûtre.
   Ils étoient quelquefois suivis par un silence. FONTEN. Dites, par le silence. = Avec une épithète, un silence fait fort bien. "Un long, un profond; un morne silence. Acad. "Un souris malin, un geste expressif, un silence perfide, sont souvent plus cruels qu' une violente satire. Anon.
   Un éternel silence
   Cachera cet amour, dont ma gloire s' ofense.
       Fonten.
"Mentor, les yeux baissés, gardant un silence modeste, suivoit Télémaque. Fénélon, = 2°. Faire silence, se taire. Terre, faites silence! Écoutez Israel. Athalie. = Il se dit sans régime~. "M' ayant fait ensuite silence, j' ouvris mon livre des Évangiles. Miss. Du Lev Le pronom me est de trop. = 3°. Imposer silence; faire taire. Il est beau au figuré. "La misère ôse rârement réclamer les lois établies pour la protéger; et le crédit souvent leur impose silence. MASSILL.
   Prêt d' imposer silence à ce bruit imposteur,
   Achille en veut conoitre et confondre l' Auteur.
       Iphigénie.
  Un devoir rigoureux, dont rien ne me dispense,
  Doit forcer pour toujours votre amour au silence.
       RHADAMISTE.
"Ils ont aquis à leurs partisans le droit d' imposer le silence à quiconque n' est pas de leur avis. LING. Il me semble que dans cette expression, silence se dit sans article et que le est superflu. Avec prescrire, ou comander, je pense que le silence irait fort bien. = 4°. On dit, rompre le silence, et non pas rompre son silence, comme a dit Corneille:
   Il atend votre humen, pour rompre son silence.
       Agégilas.
On sait bien que ce n' est pas le silence d' un aûtre. C' est comme garder son lit, j' ai mal à mon pied, etc. Voy. GARDER. = 5°. Garder le silence parait être une expression consacrée par l' Usage. Voltaire, qui avait besoin d' une syllabe de plus, a substitué, observer à garder.
   Sur ce qu' on vu vos yeux observez le silence.       Cic.
Observez le silence est une expression de Couvent. On a vu plus haut, observer un silence farouche, mais il y a de la diférence d' une expression à l' aûtre. = M. Linguet fait régir l' ablatif à garder le silence. "Puisque le Ministre prudent en a gardé le silence. On dit sur, ou là dessus. = Demeurer en silence a le même sens; mais il ne se dit qu' au propre, et sans régime. "Calipso étonée et atendrie demeroit en silence. TÉLÉM. = 6°. Quelques-uns et La Touche entre aûtres écrivent silentieux avec un t; aparemment à cause de l' étimologie latine, silentium; mais l' analogie française mérite la préférence, silence. = Selon M. Andry, cet adjectif n' est en usage que dans le discours familier. "Vous êtes bien silencieux aujourd' hui. _ L' Acad. n' en distingue point l' usage. _ Il parait que taciturne serait plus noble, mais il n' a pas tout-à-fait le même sens. On peut être silencieux par intervales; mais quand on est taciturne, on l' est toujours. Il ne signifie pas seulement, qui parle peu, comme silencieux, ou même, qui ne dit mot, il veut dire, qui est d' humeur à parler peu, ce qui est habitude et vient du caractère. On ne pourrait donc pas dire: vous êtes bien taciturne aujourd' hui; car on pourrait répondre avec vérité, Monsieur l' est toujours, ou, je le suis toujours. = Suivant M. l' Ab. Roubaud, le silencieux garde le silence: le taciturne garde un silence opiniâtre. Le premier ne parle pas quand il pourroit parler: le second ne parle pas, même quand il devroit parler. Le silencieux n' aime pas à discourir; le taciturne y répugne, etc.~ Nouv. Syn. Fr.

SILLAGE


SILLAGE, s. m. SILLER, v. n. [Si--gli-age, glié: mouillez les ll.] Termes de Marine. Ils se disent de l' action du vaisseau, qui fend les flots en avançant sur sa route. "Le vaisseau sillait au Nord. "Ce vaisseau double le sillage de l' aûtre; il va une fois plus vite. _ Faire bon sillage, naviguer heureûsement.

SILLON


SILLON, s. m. SILLONER, v. act. [Si-glon, glio-né: mouillez les ll.] Sillon est la longue trace que fait le soc de la charrûe, dans la terre qu' on laboure.
   Que les champs moissonés d' un plein repos jouissent;
   Et qu' un an tout entier leurs sillons se durcissent.
       Le Franc, Géorgiques.
Silloner, faire des sillons. = On dit figurément sillons, des rides qui se trouvent souvent au palais des chevaux; et poétiquement, silloner les mers, la plaine liquide, etc. "Les ans ont silloné son front. "Son visage est silloné de rides. = Sillon est aussi un terme poétique. Trait, trace.
   ......La Déesse guerrière
   De son pied trace en l' air un sillon de lumière.
       Boil.

SIMAGRÉE

S
IMAGRÉE, s. f. [3e é fer. et long, 4e e muet.] Minauderies, manières afectées. Il se dit guère qu' au pluriel. "Ne faites pas tant de simagrées. Elle fait bien des simagrées. _ On dit pourtant au singulier. "Tout son fait n' est que pure simagrée: tout cela n' est que simagrée.

SIMâRRE


SIMâRRE, s. f. [Simâre: 2e lon. l' r se prononce fortement: 3e e muet.] Autrefois, robe longue et trainante, que portaient les femmes. _ Aujourd' hui robe que les~ Prélats, les Présidens au Parlement, etc.~ mettent quelquefois, quand ils sont chez eux, et que portent toujours le Chancelier de France et le Garde des Sceaux.

SIMILITUDE


SIMILITUDE, s. f. Figure de Rhétorique. Comparaison, raport entre deux choses de diférente espèce, parabole. "Les métaphores ne sont que des similitudes, dont on suprime la forme gramaticale. Gamache. l' Acad. dit que ce mot vieillit. On dit en éfet aujourd' hui Comparaison ou parabole, suivant les ocasions.

SIMILOR


SIMILOR, s. m. Composition métallique. Mélange de cuivre et de zinc.

SIMONIAQUE


SIMONIAQUE, adj. et subst. SIMONIE, s. f. [Simoni-ake, ni-e.] Simonie est une convention illicite, par laquelle on done ou l' on reçoit une récompense temporelle pour quelque chose de saint et de spirituel. = Simoniaque, où il y a de la simonie; contrat simoniaque. Qui comet simonie: clerc simoniaque. _ Subst. "Un simoniaque; les simoniaques.

SIMPLE


SIMPLE, adj. et subst. SIMPLEMENT, adv. SIMPLESSE, SIMPLICITÉ, s. f. SIMPLIFIER, v. act. [Sein-ple, pleman, plè--ce, plicité, plifi-é: 1re lon. 2e e muet aux 2 1ers, è moy. au 3e.] Simple est 1°. ce qui n' est pas composé. "L' âme est un être simple. _ En Gramaire, il y a des noms et des verbes simples; et des noms et des verbes composés. Saison est un nom simple: dresser est un verbe simple: Arrière-saison, redresser sont composés. _ On dit quelquefois substantivement, le simple et ses composés. = 2°. seul, unique. "Il n' avait sur le corps qu' une simple chemise. "Il n' a~ qu'~ une simple couvertûre sur lui. "Des souliers à simple semelle, etc. Bénéfice à simple tonsûre, ou bénéfice simple. _ Simple clerc, simple Prêtre, simple soldat, simple Gentilhome; qui ne sont que cela, qui n' ont pas d' aûtre titre. Le simple peuple, le bâs peuple. = S. m. "Parier le double contre le simple, ou, sans article, double contre simple, Celui-ci est le plus usité. = 3°. Sans ornement. "Habit tout simple, sans broderie, sans galons, etc. "Discours simple et sans ornement. "Relation simple et naïve. = 4°. En parlant des persones; qui est sans déguisement, sans malice. Simple comme un enfant. = S. m. Dieu aime les humbles et les simples. = Niais, crédule. "Je ne suis pas si simple, que de croire ce que vous dites: vous êtes bien simple, si vous vous fiez à lui.
   Rem. Cet adjectif a des sens diférens, suivant qu' il est placé devant ou aprês le substantif. Un Simple homme, est un homme, qui n' est qu' un homme: un homme simple est un homme, qui a de la simplicité. La Bruyère dit des Apôtres, que c' étoient de simples gens. Il devait dire, des gens simples.
   Oseras~-tu~ de ta musette
   Lui répéter les simples airs.
       GRES.
De simples airs sont des airs, qui ne sont pas acompagnés de paroles. Des airs simples, sont des airs tout simples, qui sont sans ornement, qui ne sont pas recherchés. "Vendôme réunit les plus simples moeurs avec ce naturel heureux, qui porte aux plus belles actions sans nul effort. Él. de, etc. Il falait, les moeurs les plus simples.
   SIMPLE, s. m. On dit les simples au plur. pour signifier les hommes simples et ignorans: on ne dit pas, je crois un simple au singulier. "Un simple, dit M. l' Ab. Bergier, n' a que ce seul raisonement à faire. Je dirais en pareil câs, le simple fidèle, etc. = SIMPLE est aussi le nom général des herbes et des plantes médicinales. "Conaitre les simples, les vertus des simples. Jardin des simples.
   SIMPLEMENT, d' une manière simple. _ Seulement. "Je lui ai dit simplement que. = Sans ornement. "Je vous raconterai la chôse simplement. = Bonement, sans finesse. "Il y va, il y procède bien simplement.
   SIMPLESSE et SIMPLICITÉ ont le même sens; mais le premier est vieux: il ne se dit que dans cette phrâse familière: il ne demande qu' amour et simplesse. = Simplicité, qualité de ce qui est simple (n° 4°) Simplicité chrétiène: la simplicité d' un enfant, d' un bon religieux. Simplicité de moeurs. = Seul et sans épithète ni régime; niaiserie. "On ne vit jamais une telle simplicité. = (n°. 3°.) Simplicité dans son langage, ses habits, ses meubles. Simplicité de style. "La simplicité du style, dans un ouvrage beaucoup et bien pensé, y produit à plusieurs égards les mêmes effets que la simplicité du caractère dans un grand homme L' Ab. Trublet.
   Rem. Au pluriel, il ne se prend qu' en mauvaise part. J' ôse le penser ainsi, quoique Mde de Sévigné, qui savait si bien sa langue, l' ait employé dans un bon sens. "Que ne demeurez-vous dans les droites simplicités de votre père (Descartes.) L' adjectif droites corrige un peu l' impropriêté du terme. Elle l' aplique mieux dans une aûtre Lettre. "Voyez si vous ne retrouvez pas votre Mère à ces sotes simplicités, qui vous ont tant diverti à Livri.
   SIMPLIFIER, rendre simple (n° 1°.) Simplifier un raisonement; une opération de Finance, un calcul, etc.

SIMULACRE


SIMULACRE, s. m. 1°. Représentation d' un fausse divinité. "Les simulacres des Dieux. = 2°. Spectre, Fantôme. L' Acad. remarque qu' il se dit ordinairement avec vain: de vains simulacres. = 3°. Vaine représentation de... "Après Jules César, il n' y eut plus à Rome qu' un vain simulacre de République. _ Il est beau en ce sens. Rousseau dit des Grands.
   Ne fondons point sur eux une espérance folle
   Leur pompe, indigne de nos voeux,
   N' est qu' un simulacre frivole
   Et les solides biens ne dépendent pas d' eux.

SIMULATION


SIMULATION, s. f. SIMULER, v. act. [Simula~-cion, lé.] Termes de Pratique. Déguisement. Feindre. "Simulation dans un contrat. Simuler une vente, une donation. Dette simulée. = On dit, hors du Palais, paix, réconciliation, dévotion simulée, feinte. _ Il ne se dit qu' au participe, employé adjectivement.

SIMULTANÉE


SIMULTANÉE, adj. m. et f. [Plusieurs disent simultané, au masculin.] Il se dit de deux actions, qui se font dans un même tems. "Moûvement, éfort simultanée, ou, simultané: action, impulsion, simultanée. = M. du Carla a employé simultanément. "La portion de cette masse, qui afecte simultanément les matières sur lesquelles on veut opérer. Cet Auteur n' est pas le seul qui ait employé ce mot; et simultanément a été adopté et se dit pour, en même tems, tout à la fois. MARIN.

SINCèRE


SINCèRE, adj. SINCèREMENT, adj. SINCÉRITÉ, s. f. [Sein-cère, cèreman, céri--té: 1re lon. 2e è moy. et long aux 2 1ers, é fer. au 2d.] Sincère, franc, sans artifice, sans déguisement. "Homme sincère; procédé sincère; Aveu sincère, etc. = Sincèrement, d' une manière sincère. Agir, parler sincèrement. = Sincérité, candeur, franchise. "Parler avec sincérité.
   Mais pour vous, vous savez quel est notre traité.
   Parlez-moi, je vous prie, avec sincérité.       MISANT.
"Il y a une grande sincérité; ou, il n' y a point de sincérité dans ses discours, dans ses procédés. = Sincérité, Franchise, Naïveté, Ingénuité (Synon.) La sincérité empêche de parler aûtrement qu' on ne pense: c' est une vertu. La Franchise fait parler comme on pense: c' est un éfet du naturel. La Naïveté fait dire librement ce qu' on pense: cela vient quelquefois d' un défaut de réflexion. L' ingénuité fait avouer ce qu' on sait et ce qu' on sent: c' est une bêtise. = Un homme sincère ne veut point tromper: un homme franc ne sauroit dissimuler. Un homme naïf n' est guère propre à flater: un homme ingénu ne sait rien cacher. _ Le sincère est toujours estimable. Le franc plait à tout le monde (pas toujours) le naïf ofense quelquefois: l' ingénu se trahit. GIR. Synon.
   Rem. Sincérité n' a point de pluriel. On dit à plusieurs votre sincérité, et non pas vos sincérités. Si on l' emploie dans ce nombre, comme naïveté, on n' entend pas parler de la vertu, ou du défaut, mais de ses éfets; et des discours, qu' ils produisent. On dit des sincérités, comme on dit des naïvetés. "Tous ceux, qui pouvoient se plaindre de quelques-unes de ces sincérités, allèrent le voir pour le rassurer sur l' inquiétude, où il aurait pu être à leur égard. Fonten.

SINGE


SINGE, s. m. SINGER, v. act. SINGERIE, s. f. [Seinge, gé, gerie: 1re lon. 2e e muet, au 1er et au 2d, é fer. au 3e.] Singe est celui de tous les animaux, qui a l' extérieur ressemble le plus à l' homme. Il est traitre et malin: de là l' expression proverbiale: malin comme un singe.
   Le singe est né pour être imitateur,
   Mais l' Homme doit agir d' aprês son coeur.
       Volt.
= Fig. Qui contrefait, qui imite les gestes, les actions de quelqu' un. "Cet homme est un vrai singe. "Ces copistes, ces singes de Sénèque. Bouh. "C' étoient des singes, qui contrefaisoient des Héros. Le Franc, Traduct. de Lucien. = * Singer, contrefaire, imiter. Mot nouveau: il est tout au plus bon dans le style satirique, où tout est bon. "Leur brillante jeunesse (des Anglais) acourt dans cette capitale (Paris) étudier nos moeurs et singer l' élégance de nos Petits-Maîtres. Ann. Litt. Le mot est en italique. "Qu' est-ce qu' un Acteur, qui ne suit que la routine? Singer la Nature, la faire grimacer.... Voilà sa destinée. L' Ab. De Fontenai.
   La Rotûre cherchant à déguiser son ton,
   Croit singer la Noblesse à l' aide d' un carton.
       La Charbeaussière.
Ce carton c' est un masque.
= Singerie, grimace, gestes, tours de malice. Acad. Le mot de malice parait trop fort. "Il fait mille singeries. = Imitation servile. M. L' Ab. Royou dit du Poème des Jardins, par le P. Rapin: "On y trouvera le goût et le style de Virgile, sans plagiat, sans imitation servile, sans aucune singerie des faiseurs de centons. Journ. de Mons. _ Dans ce 2d sens, c' est un néologisme, comme le verbe singer dont il exprime l' action.

SINGULARISER


SINGULARISER (se) v. réc. SINGULARITÉ, s. f. SINGULIER, IèRE, adj. SINGULIèREMENT, adv. [Sein-gularizé, rité, lié, liè-re, liè-reman: 1re lon. 3e é fer. au 3e, è moy. et long aux 2 dern. dont la 4e e muet.] Singulier est 1°. unique, particulier. "Cet exemple est singulier, façon singulière. = 2°. Râre, excellent. "Mérite, talent singulier; vertu, piété singulière. "Cet homme est singulier dans son art. = 3°. Bizârre, capricieux; afectant de se distinguer. "Singulier dans ses opinions, dans ses expressions, dans sa manière d' agir, de parler, de s' habiller. = 4°. Combat singulier; duel, combat d' homme à homme. = 5°. En Gramaire, nombre singulier; ou substantivement, le singulier: le nombre, qui ne marque qu' une seule persone, une seule chôse. "Ce mot ne se dit qu' au singulier. "Le singulier des tems, des verbes.
   Rem. I. Le singulier est marqué en français par le ou un pour le masculin, et la ou une pour le féminin, devant les noms. Un seul Dieu, le fils de Dieu. La vertu, une grande piété. = Pour les verbes c' est je, tu, il ou elle pour les trois persones. = II. On met quelquefois le singulier pour le pluriel: le soldat, le matelot, le paysan, le bourgeois, le magistrat, le citoyen, le courtisan, l' oficier, le marchand, l' artisan, le paûvre, le riche, le jeune, le vieux, l' home, la femme, etc. pour, les soldats, les matelots, les paysans, etc. "Le pillage fait la joie du soldat. "Le matelot fut éfrayé de la tempête, etc. BOUH. L. T. "Quel malheur pour les Grands d' entendre les Ministres de la Religion parler comme le courtisan. MASSILL. = On dit aussi, le Turc pour, les Turcs. "Le Turc entra dans la Hongrie. Mais nous ne disons pas de même, en parlant des autres Nations: le Français a passé le Rhin: nous disons, les Français ont pâssé, etc. On dit pourtant, le Français est brâve et léger, pour marquer le caractère de la Nation. = Quelquefois on dit, l' oeil, la main, pour, les yeux, les mains. "Je n' ai pas fermé l' oeil de toute la nuit. Bouh.
   .....Et leur main sanguinaire,
   Dispersa dans les champs ses membres déchirés.
          De Lille.
  SINGULIèREMENT, spécialement, principalement. "Home singulièrement ataché à ses devoirs. "Le quinquina est bon pour plusieurs espèces de fièvres, et singulièrement pour les fièvres intermittentes. = D' une manière afectée, bizârre. "Il parle, il marche, il s' habille singulièrement.
   SINGULARITÉ; ce qui rend une chôse singulière. (n°. 1°.) "La singularité de cet évènement. = Manière extraordinaire de penser, de parler, d' agir, etc. (N°. 3°.) "La singularité de cette opinion révolta tout le monde. "Il faut éviter la singularité en tout. "Plus on est vertueux, moins on doit s' exposer à dégoûter les autres de la vertu, par un mélange de singularité et de travers qu' elle désavoue. L' Ab. Trublet. "Rousseau n' a pas rendu justice à ses talens, en se réduisant, pour être célèbre, à la petite ressource de la singularité. PALISSOT. = En ce sens, il s' emploie quelquefois au pluriel. "Ses singularités le rendent ridicule.
   SE SINGULARISER, se distinguer, se faire remarquer par quelque singularité. "Il faut éviter de se singulariser. Mde G... l' emploie activement. "Le goût des sciences les singularise (les femmes) et les arrache à la simplicité de leurs devoirs domestiques.

SINISTRE


SINISTRE, adj. SINISTREMENT, adv. [Sinis-tre, treman: 3e. e muet.] Sinistre, qui cause des malheurs; accident, aventûre sinistre; ou, qui en présage. "Sinistre aûgure, présage sinistre.
   Eh bien! Que nous fait-elle anoncer de sinistre?
   Quel sera l' ordre afreux qu' aporte un tel Ministre?
       Athalie.
En st. famil. Phisionomie, regard sinistre; qui a quelque chôse de funeste et de mauvaise augûre. = Méchant, pernicieux. "Desseins sinistres. = Sinistrement, d' une manière sinistre, défavorable. "Penser, juger sinistrement de quelqu' un. = Ces mots sont du dernier siècle: ils sont fort beaux et fort usités.

SINON


SINON, adv. 1°. À~ faûte de quoi, sans quoi. "Faites ce qu' il souhaite, sinon n' en atendez aucune grâce. = 2°. Excepté. "Je ne sais rien, sinon qu' on dit que, etc.

SINUEUX


SINUEUX, EûSE, adj. SINUOSITÉ, s. f. [Sinu-eû, eû-ze, ozité: 3e lon. aux 2 1ers.] Sinueux, tortueux, qui fait plusieurs tours et détours. Selon l' Acad. il ne se dit qu' en poésie: les replis sinueux d' un serpent; le cours sinueux du Méandre, etc. Et en chirurgie: des ulcères profonds, étroits et sinueux. _ Hors de là tortueux est plus usité. = Sinuosité, qualité d' une chose sinueûse, tortueûse: la sinuosité des boyaux: rivière, qui a, qui fait beaucoup de sinuosités. = On dit sinuosité; et on ne dit guère sinueux qu' en poésie: on ne dit pas tortuosité, mais on dit sans cesse tortueux. Voilà ce qui s' apelle bizarrerie. _ On considère sur--tout les enfoncemens dans la chôse sinueuse et les obliquités dans la chôse tortueuse. On dit que le Méandre, si doucement sinueux, fournit à Dédale le modèle de son tortueux labyrinthe.... Sinueux n' a point un mauvais sens: tortueux se prend sur-tout en mauvaise part. Extr. des Syn. Fr. de M. l' Ab. Roubaud.

SIPHON


SIPHON, s. m. [Sifon] 1°. Tuyau recourbé, dont on se sert pour faire pâsser une liqueur d' un vâse dans un aûtre. = 2°. Tourbillon, ou nuage creux, qui descend sur la mer en forme de colonne, qui enlève et pompe l' eau de la mer: on l' apèle aussi trombe.

SIRE


SIRE, s. m. [1re lon. 2e e muet.] 1°. aûtrefois, Seigneur. "Le Sire de Couci, de Créqui, etc. On disait même le Sire Dieu. = 2°. Aujourd' hui, en st. famil. Homme, personage. "Un terrible sire, un paûvre sire. "Oui, beau sire.
   En ce fâcheux état, beau sire,
   Je ne laisse de vous écrire.
       Rousseau.
  Parce que chacun sait que c' est un pauvre sire,
  Sans fortune, sans bien; on voudroit suposer
  Que c' est par intérêt, qu' il veut vous épouser.
       Le Flateur.
Paûvre sire signifie, homme sans mérite. "C' est un paûvre sire. = 3°. Sire est un titre qu' on done aux Rois seuls, en leur parlant, ou en leur écrivant. Mais il me semble que ce titre n' est pas couvenable dans la bouche des Anciens, quand on les fait parler à leurs Rois. Brebeuf, Corneille et Rollin l' ont employé. Je ne crois pas qu' on doive les imiter. Dans les Tragédies, on dit Seigneur: l' usage à prévalu.

SIRèNE


SIRèNE, s. f. [2e è moy. 3e e muet.] Monstre fabuleux, moitié femme, moitié poisson, qui par la douceur de son chant atirait les voyageurs dans les écueuils de la mer de Sicile. _ Le chant des sirènes est pâssé en proverbe. _ On dit d' une persone qui chante bien, qu' elle chante comme une sirène; et d' une femme, qui séduit par ses charmes et ses manières insinuantes, que: c' est une sirène.

SIROP


SIROP, s. m. SIROTER, v. n. [On ne prononce point le p dans le 1er: 3e é fer. au 2d.] Sirop est une liqueur, composée du suc des fruits, des herbes ou des fleurs, avec du sucre ou du miel, et qu' on fait cuire. "Sirop de capillaire, de limon, de fleurs de pêcher, etc. "Sirop violat. = Siroter, boire à petits coups et long-tems. Il est populaire. Acad.

SITE


SITE, s. m. [2e e muet.] Terme de Peintûre. situation. "Le site d' un paysage.

SITUATION


SITUATION, s. f. SITUER, v. act. [Situ-a-cion, tu-é: 3e é fer. au 2d.] Situation, assiète, position. "La situation d' une maison, d' une ville, d' un château, etc. "Belle, agréable, comode, avantageûse, ou vilaine situation, etc. = 2°. Position, postûre, en parlant des animaux ou des hommes. "Ce malade est dans une situation incomode. = 3°. Fig. L' état, la disposition de l' âme. "Il était dans une situation tranquile; ou des afaires: "Il se troûve dans une triste situation. = Situation, état. (Synon.) Le 1er dit quelque chôse d' accidentel et de passager; le 2d quelque chôse d' habituel et de permanent. On se sert assez comunément du mot de situation pour les afaires, le rang, ou la fortune; et du mot d' état pour la santé. "Le mauvais état de la santé est un prétexte assez ordinaire dans le monde pour éviter des situations embarrassantes. GIR. Synon. = En situation, adv. régit de et l' infinitif. "On en dona la direction à ceux, qui étoient plus en situation de doner du poids à ces bones oeuvres. Anon. = 4°. Au Théatre, changement subit, qui survient dans l' état des personages. "Dans cette Tragédie, il y a de situations heureûses, intéressantes.
   SITUER, placer, poser. "On a mal situé cette maison. "Elle est située dans un valon. = Situé ne se dit qu' au propre. "Ville située sur un roc escarpé. D' ABL. Située sur la rivière. Vaug. Suivant le Dict. de Trév. il s' emploie aussi figurément. = Il cite Molière, qui parle d' une âme un peu bien située, pour le faire rimer avec prostituée. C' est un barbarisme d' expression.

SIX


SIX, adj. et subst. SIXAIN, s. m. SIXIèME, adj. et subst. SIXIèMEMENT, adv. [Sis, sizein, ziè-me, meman: 2e è moy. aux 2 dern. dont la 3e e muet.] Six est un nombre composé de deux fois trois ou de quatre et deux. "Six bataillons, six compagnies. Six hommes; six écus. "Il y en avait six. = Rem. Devant une consone, comme aux deux premiers exemples, on ne prononce point l' x; devant une voyèle, il se prononce comme un z. À~ la fin de la phrâse, on le prononce comme une s. = S. m. "Un six de chifre: un six de carreau, de trèfle, au jeu des cartes. = Quelquefois, il se dit pour sixième. Charles six. Pie six. "Le six du mois. = Sixième~ est le nombre d' ordre correspondant. "Le sixième jour, mois, rang, etc. "La sixième année. = S. m. La sixième partie d' un tout. "Il est héritier pour un sixième. _ Écolier de la sixième classe, qu' on apèle substantivement, la sixième. "Il a fait une faûte de sixième. = Sixièmement, en sixième lieu. "sixièmement, je dit que, etc. = Sixain est 1°. une petite poésie composée de six vers. = 2°. Un paquet de six jeux de cartes.

SOBRE


SOBRE, adj. SOBREMENT, adv. SOBRIÉTÉ, s. f. [2e e muet aux 2 1ers, é fer. au 3e. Sobre, breman, brié-té, en vers bri-été.] Ils expriment, proprement, la tempérance dans le boire et dans le manger. "Homme fort sobre, qui mange sobrement: la sobriété est utile à la santé. = Par extension, on le dit pour discrétion, retenûe, modération. Ainsi l' on dit: parler sobrement, être sobre en paroles, ou, à parler: user sobrement de toute chôse: être sage avec sobriété. Cette dernière expression est tirée de St. Paul, et elle est comme consacrée.
   La parfaite raison fuit toute extrémité,
   Et veut que l' on soit sage avec sobriété.
       Misantr.
= Hors du boire et du manger, ces mots ne s' emploient point dans d' aûtres phrâses. = * En Anglais sobriety a un emploi plus étendu. Aussi les Traducteurs de livres Anglais s' en servent-ils en toute ocasion dans le sens de modération. * Jurieu a dit aussi que: "Calvin étoit sobre à comparaison de Luther. Il veut dire modéré.

SOBRIQUET


SOBRIQUET, s. m. [Sobrikè: 3e è moy.] Surnom doné ordinairement par dérision.

SOC


SOC, s. m. Fer large et pointu, qui fouille dans la terre, et qui est au bout du sep de la charrue.

SOCIABLE


SOCIABLE, adj. SOCIABILITÉ, s. f. [dern. e muet au 1er, é fer. au dern.] Sociable, dans sa signification ordinaire, se dit d' une persone, qui est de bone société, qui a les qualités propres au bien de la société: homme, humeur, esprit sociable.
   Elle est d' humeur liante, afable, sociable,
   L' orgueuil est à ses yeux un vice insuportable.
       DEST. Le Glorieux.
= L' Acad. le dit aussi des êtres faits pour vivre en société: l' homme est un animal sociable. C' est dans ce sens que J. J. Rousseau opôse l' homme sociable à l' homme sauvage. Cette signification est moins ordinaire. = Sociabilité, qualité de l' homme sociable. Ce mot est assez nouveau, et il parait que l' usage comence à l' admettre.

SOCIAL


SOCIAL, ALE, adj. SOCIÉTÉ, s. f. [Soci--al, ale, so-cié-té: 2e et 3e é fer. au 2d.] Social, qui concerne la société. "Vertus, qualités sociales. L' usage de ce mot, pris en ce sens, est presque borné à cette phrâse. = Dans l' Histoire Romaine, on apèle guerre sociale, guerre des Aliés, la longue et sanglante guerre des peuples d' Italie confédérés contre les Romains.
   SOCIÉTÉ est 1°. Union des homes entre eux, formée par la Natûre ou par les Lois. "L' homme est né pour la société. "Société naturelle, ou civile. Troubler la société. = 2°. Union de plusieurs persones formée par quelque intérêt ou pour quelque afaire. "Société de comerce; entrer en société. = 3°. Compagnie de religieux, ou de savans. "La société des Jésuites, ou, absolument; la société. "La société royale de Londres, de Montpellier. = 4°. Compagnie de gens, qui se réunissent ordinairement pour le jeu ou des parties de plaisir. "Voulez-vous être~ de notre société? "Ils l' ont bani de leur société. "Quelquefois deux hommes, qui, dans leur société, passent chacun pour gens d' esprit, perdroient cette réputation, en changeant de société. L' Ab. Trublet. "La Motte avait beaucoup d' amis; c' est-à-dire qu' il y avait beaucoup de gens, qui se plaisaient dans sa société. VOLT. "Des vers médiocres, qu' on apelle des vers de société. ID. Art. St. Évremont. "L' Europe a dû sa politesse et l' esprit de société à la Cour de Louis XIV. Idem.

SOCLE


SOCLE, s. m. Piédestal quarré plus large que haut, qui sert de bâse à un ordre d' Architectûre.

SOEUR


SOEUR, s. f. [Seur, monosyllabe.] 1°. Terme relatif. Persone du sexe, née du même père et de la même mère, ou seulement de l' un ou de l' aûtre. "Le frère et la soeur: elles sont soeurs. Voy. Jumeau, consanguin, utérin, germain. = Fig. "La Poésie et la Peinture sont soeurs. Toutes les passions sont soeurs. J. J. Rouss. "Marseille était apelée la soeur de Rome. = Les Poètes apèlent les Mûses, les neuf soeurs. = 2°. Nom, que les Religieuses prènent dans les actes publics, et qu' on leur done en certains couvens, dans le discours ordinaire. = On le done aussi à des filles, qui vivent en comunauté, sans être religieuses.

SOI


SOI, pron. réc. [Soa, monos.] Il marque le raport d' une persone ou d' une chôse à elle-même, come dans "Chacun pense à soi. = Il est très-ordinaire et souvent indispensable d' ajouter même à soi. "Il ne faut pas se louer soi-même: il faut se rendre compte à soi-même, etc. "Avoir un ami; c' est avoir un aûtre soi-même. D' OLIV. Pens. de Cic. = Soi est des deux genres: un jeune homme doit être toujours propre sur soi: cette afaire est bone en soi. = Quoiqu' il soit d' ordinaire au singulier, il est pourtant des ocasions où il se raporte à des noms pluriels. Son pluriel ordinaire est eux-mêmes, elles-mêmes. = Il s' emploie rârement au nominatif: encore faut-il alors qu' il soit suivi de même. "Chacun doit veiller soi-même à ses afaires. = Dans les câs obliques, il se décline avec l' article indéfini. De soi, à soi, soi, de soi.
   Chacun n' est que pour soi, maxime d' une Égoïste.
   C' est pour le peuple enfin que sont faits les parens.
   Vous avez de l' esprit et votre fille est sote:
   Vous avez pour surcroit un frère, qui radote.
   Eh bien, c' est leur afaire après tout selon moi,
   Tous ces noms ne font rien, chacun n' est que pour soi.
       Le Méchant.
= Soi, lui (synon.) 1°. Quand on parle en général, sans marquer une persone particulière, qui soit le nominatif du verbe, il est certain qu' il faut se servir de soi. "On aime mieux dire du mal de soi, que de n' en pas parler. Mais quand il s' agit de quelqu' un en particulier, on met lui au lieu de soi. Voy. LUI. = M. l' Ab. d' Olivet, parlant de cette règle générale, dit qu' il serait inutile d' en chercher les principes, aujourd' hui qu' elle n' est plus contestée. Il condamne ces vers de Racine.
   Mais il se craint, dit-il, soi-même, plus que tout.
       Androm.
  Charmant, jeune, traînant tous les coeurs aprês soi.
Phèdre.
L' antécédent, dans ces deux ocasions, présente un sens déterminé: on n' y parle point en général; mais il y est question d' une persone en particulier: il falait donc dire, lui-même; après lui. = 2°. Soi est mieux, que lui, quand on parle de l' extérieur ou qu' il s' agit d' une chôse et non d' une persone. "Il est propre sur soi: cette figûre porte avec soi le caractère véritable d' une passion forte et violente. = Soi-même ne s' emploie jamais avec relation à un pluriel, quoique soi s' y emploie aprês une préposition. On dit: ces chôses sont bones en soi, ou de soi: mais on ne pourrait pas dire, sont bones en soi-mêmes, ou de soi-mêmes: il~ faudrait dire alors, en elles-mêmes, ou d' elles-mêmes. BUF. = De soi est bon devant l' adjectif pluriel; mais il ne vaut rien aprês. On dit, de soi, ces chôses sont indiférentes; ou, sont de soi indiférentes; mais on ne doit pas dire, sont indiférentes de soi. VAUG. L' Acad. n' admet de soi qu' à la tête de la phrâse. D' Olivet ne l' aprouve point avec un pluriel, de quelque manière qu' il soit placé dans la phrâse. Il parait pourtant que l' usage l' a toujours admis et l' admet encôre, au moins dans les deux premières manières, et peut-être dans toutes les trois.

SOIE


SOIE, s. f. SOIERIE, s. f. [Soâ, soâ-ri-e: 1re lon.] Soie est 1°. matière propre à filer, produite par une espèce de ver, qu' on apèle à cause de cela, ver à soie. = 2°. On done ce nom au poil long et rude de certains animaux, comme cochon, sanglier. Au singulier, il ne se dit que de ceux-ci. Au pluriel on le dit des chiens. "Cet épagneul a de belles soies. = 3°. La partie du fer d' une épée, d' un couteau, qui entre dans la poignée, ou dans le manche. = Soierie ne se dit que dans le premier sens. Toute sorte de marchandise de soie. "Le comerce de la soierie. "Les soieries de Levant. = Fabrique de soie, et lieu où l' on la prépare. "Établir une soierie.

SOIF


SOIF, s. f. [Soaf.] Besoin, envie de boire. "Avoir soif. "Brûler, mourir, enrager de soif. "Étancher, éteindre sa soif. "Ne boire qu' à sa soif. Boire sans soif. = Fig. Desir immodéré: "La soif des richesses, des grandeurs.
   Cette soif de régner que rien ne peut éteindre.
   La discorde et la guerre, au sein des Euménides,
   Puisent la soif du rang et l' art des homicides.
       Le Franc.
Rem. Mourir de soif n' est pas une exression fort noble. M. Roucher dit des fleuves desséchés, que
   Leurs bords mourans de soif ne sont pas abreuvés.
La métaphore est un peu forte, et elle est bâsse. _ Voy. Faim et boire.

SOIGNER


SOIGNER, v. act. [Soagné: 2e é fer. mouillez le g.] Avoir soin. Au propre, il est hors d' usage. Aûtrefois on le faisait neutre avec les choses au datif; soigner à ses afaires; et actif avec les persones: soigner un malade, soigner des enfans. "Les orangers veulent être bien soignés. Aujourd' hui il ne se dit que de la seconde manière: la première est du Peuple, en certaines Provinces, et à Paris même. = Au figuré, on le dit élégamment du style. "Compilateur laborieux, qui ne soignoit pas assez son style. Sabat. Trois Siècles, etc.

SOIGNEUX


SOIGNEUX, EûSE, adj. SOIGNEûSEMENT, adv. [Soa-gneû, neû-ze, neû-ze--man: 2e. lon. 3e e muet.] Soigneûsement; avec soin: travailler soigneûsement à, etc. "Examiner soigneûsement une afaire, un livre. = Soigneux, qui agit avec soin. "Il est fort soigneux: soyez dorénavant plus soigneux. Être soigneux de son honeur, d' obliger ses amis. "Femme soigneûse de sa réputation. "Soigneux d' éviter tout ce qui pourroit blesser les consciences délicates. * Un Auteur très-moderne emploie de et à dans la même phrâse. "Plus soigneux de garantir ses soldats du péril, qu' à l' éviter soi-même. Él. de Vendome. Le 2d régime est contraire à l' usage.

SOIN


SOIN, s. m. [Soein, monos.] Au singulier, il a un autre sens qu' au pluriel. "Je l' ai fait avec soin, c' est-à-dire, avec atention, avec aplication et exactitude: j' y ai doné tous mes soins, c. à. d. j' ai fait pour cela bien des démarches, etc. = soins au pluriel signifie aussi inquiétude, peine, souci. Dans ces vers d' Andromaque:
   Phénix, trop de prudence entraîne trop de soin.
   Je ne sais pas prévoir les malheurs de si loin.
   Soins, au pluriel aurait été le terme propre; mais la rime ne le permettait pas. Fénélon dit aussi. "Télémaque ne se lassoit pas d' exciter la défiance de Nestor et de Philoctète; mais son soin étoit inutile. Télém. Là, soin signifie éforts, démarches: je crois donc qu' il falait dire, ses soins étaient inutiles. _ La Fontaine dit, par son soin diligent; on dirait en prôse, par ses soins. = Avoir soin et prendre soin se disent sans article, et régissent de devant les noms et les verbes. "Ayez soin de lui: prenez soin de mon fils: prenez ou ayez soin de l' instruire. On lit, dans l' Ann. Litt. prendre le soin, avec l' article. "Il doit être étoné qu' un aûtre ôse prendre le soin de le lui reprocher. Destouches a dit aussi:
   L' Amour prendra le soin d' assortir nos humeurs.
       Le Glorieux.
L' Acad. dit l' un et l' aûtre, prenez soin, ou le soin de cela: on peut choisir sous la direction de l' oreille ou du goût. = Avec laisser, on met toujours l' article.
   Laisse au mépris le soin de les confondre.
       Gresset.
Mais avoir soin, même avec les adverbes de quantité, se dit sans article. "La Fontaine avoit plus soin de se renfermer dans la simplicité de l' Apologue. Ann. Lit. D' aûtres auraient dit peut-être, avait plus de soin, mais mal, à mon avis. Il faut convenir pourtant que, avait plus soin est un peu dur. = Soin, quoiqu' il ne soit pas joint à un verbe, régit aussi de et l' infinitif. "Le soin de s' embellir est presque le desir de plaire. Marm. = * On dit, faire tous ses éforts et employer tous ses soins. ROUSSEAU, géné par la mesure du vers, a dit: faire tous ses soins, en quoi ce grand Poète n' est pas à imiter.
   Et que souvent nous faisons tous nos soins
   De plaire à ceux que nous prisons le moins.
Il faudrait en prôse, employons tous nos soins à plaire. = * Comme on dit, se mettre peu en peine, BOSSUET a cru pouvoir dire ne pas se mettre en soin. "Je ne me suis pas mis en soin de chercher les aûtres. La Fontaine a dit aussi, n' en soyez point en soin, pour, n' en soyez point en peine.
   N' en soyez point en soin; je vous porterai tous.
   Soin, souci, sollicitude, (synon.) Toute afaire, tout embarras nous donne du soin. Toute crainte, tout desir nous donne du souci. Toute charge, toute surveillance nous donne de la sollicitude... La richesse donne plus de soin qu' elle n' en ôte. Les noirs soucis habitent plutôt les Palais que les cabanes. La plus grande des sollicitudes est celle du pouvoir suprême... Trop de prudence entraîne trop de soin. Trop de sensibilité entraîne trop de soucis. Trop de zèle entraîne trop de sollicitude. Extr. des Syn. Fr. de M. l' Ab. Roubaud.

SOIR


SOIR, s. m. [Soar, monos.] Les dernières heures du jour. "Prier Dieu soir et matin; matin et soir. "Travailler depuis le matin jusqu' au soir. "Demain au soir. = On doit dire, lundi, mardi au soir, et non pas à soir, comme disent certains. M. Linguet dit soir; lundi soir, le 23 Janvier soir: je ne crois pas que ce soit le bon usage. = Absolument et sans raport au jour, doit-on dire le soir ou au soir, ou peut-on les dire tous deux indiféremment? Pluche dit: les assemblées qui devoient se tenir au soir. Je crois qu' on doit dire le soir, et que c' est le seul bon: ce n' est qu' avec demain qu' on doit dire, au soir. = On dit, adverbialement, du matin au soir, ou du soir au matin: le 1er est le meilleur et le plus naturel. Voy. DEVENU. = Sur le soir, vers le soir. "Il sortit de la ville sur le soir.

SOIRIE


SOIRIE: écrivez et voyez SOIERIE.

SOIT


SOIT, conjonct. alternat. [Soa, et devant une voyelle, soat, monos. = Soit, subjonctif du v. être, se prononce sè devant une consone, et sèt devant une voyèle, è moy. dans le discours familier, mais dans le discours soutenu, on prononce soa et soat.] Soit, conjonction, doit toujours être redoublé; soit l' un, soit l' aûtre. Cependant, au lieu de répéter soit, on peut, aprês l' avoir mis une fois, mettre ou devant les aûtres mots; soit réflexion, ou instinct, ou hazard. = Quelques Auteurs ont mis ou et soit au même membre de phrâse: "Soit qu' ils fussent frappés des raisons dont il s' apuyoit, ou soit qu' ils respectassent son autorité. Hist. d' Angl. "Soit l' un ou soit l' aûtre. Anon. Il faut opter entre les deux et retrancher ou; soit qu' ils respectassent, soit l' autre; ou retrancher soit; ou qu' ils respectassent; ou l' aûtre. _ Vaugelas avait déja repris cette redondance. Il ne la pardonait qu' aux Poètes: mais Th. Corneille la trouvait aussi condamnable en vers qu' en prôse. _ Le Traducteur de l' Hist. d' Angl. met ou au premier membre de la phrâse aprês soit: "Soit qu' elles fussent formées, ou par le sang, ou par un choix libre. Le premier ou est inutile. = Soit régit quelquefois des noms sans verbes. "Soit indulgence du Ministère, soit embarras, crainte ou mépris, le Gouvernement n' a pas paru s' inquiéter de ces mouvemens passagers. Linguet: "Soit politique, soit convention, Arnould se rendit à ses raisons. Moreau. _ Les noms s' emploient sans article dans ce tour de phrâse. = Soit que régit le subjonctif. "Soit qu' il parte ou qu' il demeure. = Maimbourg étend l' influence de ce subjonctif jusqu' au second verbe, régi par celui, que soit que gouverne: "Soit qu' il crût qu' il y allâs de son honeur. Il faut dire, qu' il y alloit, etc. Croire dans le sens afirmatif régit l' indicatif. = Remarquez que soit se dit pour tous les tems des verbes. Aûtrefois on a employé fût dans le même sens: fût qu' il aimât mieux s' en aller; ou qu' il eût reçu des avis, etc. Aujourd' hui ce serait un barbarisme.

SOIXANTAINE


SOIXANTAINE, s. f. SOIXANTE, adj. SOIXANTIèME, adj. et subst. [Soi-santène, sante, tiè-me: 2e lon. 3e è moyen au 1er et au 3e, e muet au 2d.] Soixante et soixantième expriment un nombre composé de six dixaines. "Soixante écus; soixante chevaux, soixante Cavaliers. "Il est dans sa soixantième année. = S. m. "Il est le soixantième dans la liste. "Il a un soixantième dans cette affaire. = Soixantaine est un substantif numéral, collectif. Environ soixante. "Une soixantaine de persones, d' années, etc. "Avoir la soixantaine, avoir soixante ans. "Quel âge avez-vous? La soixantaine. Th. d' Éduc.

SOL


SOL, s. m. Terrein, considéré suivant sa qualité. "Sol fertile, grâs, sec, pierreux. "Ce sol est propre pour la vigne.
   Mais si le sol est maigre, il sufit qu' en automne
   Le soc légèrement l' entr' ouvre et le façone.
          Le Franc, Géorgiques.
= C' est aussi le fonds sur lequel on peut bâtir. "Il lui en a tant coûté pour l' achat du sol, et tant pour les frais de la bâtisse.

SOLAIRE


SOLAIRE, adj. [Solère: 2e è moy. et long, 3e e muet.] Qui apartient au soleil. "Rayons solaires. = Année solaire. = Quelques-uns disent, physionomie ou visage solaire, avenant, qui plait, qui prévient en faveur. "Son visage est solaire. Sév. L' Acad. ne le met pas en ce sens, et l' usage en est douteux.

SOLDAN


SOLDAN, ou SOUDAN, s. m. Trév. les met tous deux: on ne dit plus que le 2d. Corneille a employé le 1er.
   Tel le grand Saint Louis, le tige des Bourbons,
   Lui-même du Soldan forçoit les bataillons.

SOLDAT


SOLDAT, s. m. SOLDATESQUE, s. fém. [On ne prononce point le t final dans le premier; 3e è moy. au 2d, tèske.] Soldat, en général, Homme de guerre, qui est à la solde du Prince, d' un État. "Lever, enrôler, faire des soldats. = Plus particulièrement, on le dit des simples soldats, à la diférence des Oficiers; et des fantassins, à la diférence des Cavaliers.
   J' estime plus un vertueux soldat
   Qu' un important, que sa lâche industrie
   Engraisse en paix du sang de la Patrie.
       Nanine.
  La Nature, marâtre en ces afreux climats,
  Ne produit, au lieu d' or, que du fer, des soldats.
       Rhadamisthe.
= On dit souvent, le soldat pour, les soldats. "Le soldat ne demandoit qu' à retourner à Rome. Vertot. "La licence éfrénée, qu' il donoit au soldat. D' AVR. = Andry dit, en ce sens, la soldatesque. "La Noblesse, la Soldatesque et les Officiers. Réflex. _ Mais la soldatesque ne se dit que par mépris et en dénigrement. "La Soldatesque s' est révoltée contre les Oficiers. "La Bourgeoisie était exposée aux insultes de la soldatesque.

SOLDE


SOLDE, s. fém. SOLDER, v. act. [2e e muet au premier, é fer. au 2d.] Solde est 1°. la paye donée aux gens de guerre. = 2°. Le complément d' un payement. "La solde d' un compte. = Solder n' a que ce dernier sens. Doner la solde, compléter le payement. * Quelques-uns disent le solde, et souder un compte: l' un est un solécisme, et l' autre un barbarisme. = Au Palais on dit, la soute pour la solde.

SOLDOYER


*SOLDOYER. C' est ainsi qu' on a écrit long-tems. On dit aujourd' hui soudoyer. M. Le Gendre met tantôt l' un, tantôt l' aûtre.

SOLE


SOLE, s. f. [2e e muet.] 1°. Poisson de mer, qui est plat. = 2°. Certaine étendue de champ; ou, plutôt la succession des travaux qu' on y fait et des produits qu' on en retire. "On divise ordinairement une terre en trois soles, en trois portions, dont l' une est semée en blés, l' autre en menus grains, et l' aûtre est en jachère. = 3°. Le dessous du pied d' un cheval, d' un âne, d' un mulet, etc.

SOLÉCISME


SOLÉCISME, s. m. [2e é fer. dern. e muet.] Faûte grossière contre la syntaxe. "La contrainte de la mesûre et de la rime a occasioné beaucoup de solécismes dans les vers.

SOLEIL


SOLEIL, s. m. [So-leil, 2e è moy. mouillez l' l finale.] L' astre qui fait le jour. "Le disque, la lumière, le cours, le lever du Soleil.
   Soleil, je te viens voir pour la dernière fois.
       Phèdre.
_ Marcher entre deux soleils; partir aprês le lever, et arriver avant le coucher du soleil. = * Faire soleil m' avait toujours paru un gasconisme. Il fait soleil. J' ai vu ensuite que Vaugelas le condamne, et que La Touche trouve qu' il a raison. Mde de Sévigné dit pourtant: il fait un soleil charmant; et l' Acad. il fait déja, ou il fait encore grand soleil, c. à. d. grand jour: il fait trop de soleil; le soleil est trop ardent: mais ces locutions sont bien diférentes de la première. Voy. LEVANT et VENT.
   On dit, poétiquement, mon dernier soleil pour, mon dernier jour:
   Mon dernier soleil se lève,
   Et votre soufle m' enlève
   De la terre des vivans.
       Rousseau.
  SOLEIL, cercle d' or ou d' argent, garni de rayons, dans lequel est enchâssé un double cristal, destiné à renfermer l' hostie consacrée; et qui est posé sur un pied, ordinairement du même métal. Il sert à exposer le Saint Sacrement, et à doner la bénédiction au Peuple.

SOLENNEL


SOLENNEL, ELLE, adj. SOLENNELLEMENT, adv. SOLENNISATION, s. f. SOLENNISER, v. act. SOLENNITÉ, s. f. [So--lanel, nèle, nèleman, niza-cion, nizé, nité: 3e è moy. aux trois prem. = Anciènement on écrivait, et le grand nombre écrit encôre aujourd' hui, ou par habitude, ou par respect pour l' étymologie; solemnel, solemniser, solemnité, etc. Le Dict. d' Ortographe ne met que celui-ci. L' Académie et le Rich. Port. ne mettent que le 1er; le Dict. de Trév. met l' un et l' aûtre à la tête de l' article, et dans les exemples, il ne met que le 2d. = Quelques-uns prononcent solamenel, etc. et d' aûtres, solan-nel; mais mal.] Solennel est, 1°. ce qui est acompagné de cérémonies publiques et extraordinaires de Religion. "Jour solennel, Fête, Procession, Messe solennelle. = Voeux solennels, faits en face de l' Église, avec les formalités prescrites par les Canons. = 2°. Célèbre, pompeux, fait avec cérémonie. Jeux solennels: audience solennelle: entrée solennelle. = 3°. Authentique, revétu de toutes les formes requises. "Acte, testament, arrêt solennel. Déclaration solennelle. = Solennellement, d' une manière solennelle. "Mariage fait; paix jurée et publiée solennellement. = Solenniser une fête, un jour, la naissance d' un Prince. = Solennisation, action par laquelle on solennise. "La solennisation d' une fête. = Solennité, célébrité, cérémonies qui rendent une chôse solennelle. "La solennité d' une fête, d' un jour, d' un mariage. = Formalités qui rendent un acte authentique, solennel. (n°. 3°.) "La solennité d' un testament.
   Rem. Il y a des Écrivains qui ont dit: un génie solemnel; une pensée solemnelle; un caractère solemnel. Qu' est-ce que cela signifie, bon Dieu! s' écrie M. l' Abé Roubaud? Je le confesse humblement, je n' entends point ce langage: les Écrivains qui le parlent devroient bien nous expliquer, non ce qu' il veut dire, mais ce qu' ils veulent nous dire. Si ce n' est pas là du style barbare, il faut que ce soit du style solemnel. = On confond souvent, dans l' usage, solennel et authentique, comme en parlant d' un testament, d' un mariage, et ainsi des traités et de divers actes; et les formalités nécessaires à l' authenticité d' un acte, s' apèlent solennités. Mais c' est là le style du Palais. Hors de là on les distingue. L' acte est proprement solennel par l' apareil, la cérémonie, etc. et authentique, par les formalités légales, etc. La solennité constate l' acte; l' authenticité en constate la validité. La chose solennelle est notoirement vraie et incontestable: la chose authentique est légalement certaine et inataquable. Extr. des Synon. Fr. de M. l' Abé Roubaud.

SOLFIER


SOLFIER, v. act. [3e é fer.] Chanter un air, en apelant et prononçant les notes: ut mi, ut sol, ut si, etc. Ce mot vient de sol, fa, deux des noms des notes de musique.

SOLIDAIRE


SOLIDAIRE, adj. SOLIDAIREMENT, adv. SOLIDARITÉ, s. f. [Solidère, reman, rité: 3e è moy. et lon. aux deux prem. 4e e muet.] Solidaire se dit des débiteurs qui sont dans l' obligation de payer en entier une somme, au cas que leurs coobligés ne payent pas leur portion. On le dit de l' obligation et de la persone qui l' a contractée. "Il est solidaire: obligation solidaire: avoir action solidaire contre quelqu' un. = Solidairement, d' une manière solidaire. "Être obligé solidairement. = Solidarité, qualité qui rend solidaire. On dit ordinairement, solidité, en ce sens: ce contrat porte solidité: mais il serait à souhaiter que l' usage préférât solidarité, pour prévenir l' équivoque; car la solidité d' un débiteur, et sa solidarité , sont deux chôses fort diférentes. Un débiteur solide, est celui qui est en état de payer; un débiteur solidaire est celui qui est obligé de payer pour ses coobligés, quand ceux-ci ne payent pas. _ M. Desgrouais traite solidarité de gasconisme. Je serais bien plus tenté de traiter solidité de barbarisme, reçu, à la vérité, en termes de Pratique, où il y a déjà tant de termes barbâres. Solidarité n' est pas dans les Dictionaires. J' avoûe que l' usage ne l' admet pas. Je souhaite seulement qu' il l' adopte.
   REM. Solidairement signifie proprement, au défaut l' un de l' autre, et non pas conjointement avec. Ainsi M. Dandré-Bardon n' a pas bien conu le sens de ce mot, quand il a dit: "Il y a trois moyens généraux, qui concourent solidairement aux productions et à l' excellence des Beaux-Arts: le génie, la théorie et la pratique. Traité de Peinture.

SOLIDE


SOLIDE, adj. SOLIDEMENT, adv. SOLIDITÉ, s. f. [3e e muet aux deux prem. {C584a~} de, deman, dité.] Solide est 1°. qui n' est pas fluide, qui a de la consistance. "Les corps solides, les parties solides du corps humain. = 2°. Qui n' est pas fragile; qui peut résister au choc des corps et à l' injûre du tems. "Bâtiment solide; édifice solide. "Bâtir sur des fondemens solides; et substantivement: sur le solide; creuser jusqu' au solide. = 3°. Figurément, qui n' est pas vain, chimérique, frivole; qui est vrai, réel, éfectif. "Principe, raison, doctrine, dévotion solide. "Homme, esprit, jugement, amitié solide. = Subst. abstrait. "Chercher le solide: aler au solide. "On lui laissoit au fond tout l' éfectif et le solide qu' il avoit auparavant. Maimb. On dit le solide: on ne dit plus l' éfectif, mais le réel.
   REM.   Solide suit ordinairement; mais il peut précéder.
   Mais je veux que dans les alarmes,
   Réside le solide honeur;
   Quel vainqueur ne doit qu' à ses armes
   Ses triomphes et son bonheur?
       Rousseau.
  Quel est donc le Héros solide,
  Dont la gloire ne soit qu' à lui?
      Idem.
Solide, ne se dit guère des persones, dans le haut style sur-tout; et quand on le leur aplique, il signifie plutôt constant que véritable. Ainsi, il me semble que hérôs solide, c. à. d. vrai hérôs, pèche et par l' emploi et par le sens. "C' est un homme solide, à qui l' on peut se fier. Académie. "C' étoit un homme solide, dont toutes les vues alloient au bien. Bourdaloue. Oraison Funèbre de Henri de Bourbon. "L' idée d' un homme aimable emporte l' idée d' un homme constant et solide. Marin. L' Homme Aimable.
   SOLIDEMENT, d' une manière solide. "Bâtir solidement: établir solidement sa fortune. Penser, raisoner solidement.
   SOLIDITÉ, qualité de ce qui est solide. "La solidité d' un bâtiment, d' un discours, d' un raisonement. "Ce discours n' a point de solidité. Voy. SOLIDARITÉ, au mot SOLIDAIRE.
   Rem. On dit qu' un homme est solide; mais on ne dit guère, la solidité de cet homme: on dit, la solidité de son esprit, de son caractère. Bossuet dit du Prince de Condé: "Telle étoit la délicatesse, ou plutôt, {C584b~} telle étoit la solidité de ce Prince.

SOLILOQUE


SOLILOQUE, s. m. [Soliloke: dern. e muet.] Il signifie proprement, discours d' un homme qui s' entretient avec lui-mème: mais il ne s' emploie guère que dans cette phrâse: les Soliloques de St. Augustin; titre d' un Ouvrage de ce Saint Docteur. = Dans les Pièces de Théâtre, on dit; monologue.

SOLIPèDE


SOLIPèDE, adj. et subst. [3e è moy. 4e e muet.] Qui n' a qu' une corne à chaque pied. "Le cheval, l' âne, le mulet, le zèbre sont des solipèdes, des animaux solipèdes.

SOLITAIRE


SOLITAIRE, adj. et subst. SOLITAIREMENT, adv. SOLITUDE, s. f. [Solitère, tèreman, tude: 3e è moy. et lon. aux deux prem. 4e e muet à tous les trois.] Solitude, est, 1°. l' état d' un homme qui est seul, qui est retiré du comerce du monde. "Il aime; il suporte sans peine la solitude: troubler la solitude de quelqu' un. "Douze Comtes, en abandonnant le Prince, étoient sûrs de le réduire à la plus entière solitude. MOREAU. "Le Maréchal de Belle-Isle fut frère: il faut époux: il n' est plus que père. La solitude qui comence de naître autour de lui, l' aflige et l' épouvante. Neuville. = 2°. Désert, lieu éloigné du comerce des homes. "Afreuse ou charmante, agréable solitude: se retirer dans la solitude:
   Rem. Dans le 1er sens même, ce mot n' a pas un emploi aussi étendu que le mot seul, seule. On dit à quelqu' un, je ne veux pas vous laisser seul: mais je ne crois pas qu' on doive dire comme Racine fait dire par Olympe à Jocaste:
   Mais vous dois-je laisser en cette solitude?
Si l' on n' a pas présent le lieu de la scène, on croira qu' elle lui dit: dois-je vous laisser dans ce désert? * Bossuet et Neuville l' emploient plus figurément encôre dans ce même sens. "Ils étoient les seuls de leur croyance sur la terre: leur solitude leur fit tant d' horreur que, etc. BOSS. "Peut-il se faire que Calvin ne se soit point épouvanté de sa solitude.... Seul contre tous les Pères, contre tous les Docteurs, contre tous les Conciles, etc. seul contre le monde entier. Neuv. Ces exemples montrent que dans ce premier sens, solitude ne fait pas bien avec les pronoms démonstratifs ou possessifs.
   SOLITAIRE est 1°. qui aime à être seul: humeur solitaire: "Il ou elle est fort solitaire: vie solitaire.
   L' homme sensé, qu' au monde atache sa naissance,
   Sans quiter ses devoirs, sans changer de séjour,
   Peut vivre solitaire au milieu de la Cour.
       Sidney.
= 2°. Qui vit dans la solitude, dans le désert. Il est alors substantif. "Ce pieux Solitaire: les Solitaires de la Thébaïde. = 3°. En parlant des lieux: désert, écarté du bruit, du comerce du monde. "Ce lieu est fort solitaire. = Il peut précéder, ou suivre le substantif: mais il peut y avoir des inversions dûres, quand il précède: solitaire valon, ou valon solitaire.
   J' aimerai votre horreur, solitaires vallées.
       Gresset.
"Je redouterai les ombres solitaires de la nuit, qui me rapelleront ma funeste erreur. Jér. Déliv. _ Solitaires ombres, sonerait mal.
   SOLITAIREMENT, d' une manière solitaire. "Il vit, il a toujours vécu solitairement.

SOLIVE


SOLIVE, s. f. SOLIVEAU, s. m. [3e e muet au 1er, dout. au sing. du 2d, lon. au plur. solivaux: prononcez, vo, vô.] Solive, est une pièce de charpente, qui porte sur les murs, ou sur des poûtres, pour soutenir un plancher. Soliveau est une petite solive. Il est quelquefois synonyme de solive.

SOLLICITATION


SOLLICITATION, s. f. SOLLICITER, v. act. SOLLICITEUR, s. masc. [Sol-licita--cion, té, teur: dern. é fer. au 2d.] Solliciter, c' est 1°. inciter, ou exciter à faire, à dire, etc. Il régit à devant les noms et à ou de devant les verbes. Solliciter au mal, au péché, à la vengeance, à la révolte. "Solliciter quelqu' un à faire, ou de faire quelque chose. Le 1er est le meilleur, à mon avis. = 2°. Poursuivre, en parlant des afaires. "Solliciter son payement, son congé, la liberté, l' élargissement de, etc. Solliciter un procês. = Solliciter son Raporteur, ses Juges; leur recomander son afaire. = En ce sens, il est aussi neutre: mes amis ont sollicité pour moi. "Je suis lâs de solliciter.
   Mais, qui voulez-vous donc qui pour vous sollicite?
   - - - - Qui je veux? la raison, mon bon droit, l' équité.
       Misant.
Rem. Quelques Auteurs lui font régir l' ablatif de la persone. "Le Dauphin sollicita du Roi une Déclaration contre ces Écrivains (les Philosophistes) l' Abé Proyart. "Sollicitant du Souverain la grace de la naturalisation. TARG. L' Académie dit solliciter une grâce auprês du Roi: c' est ainsi qu' il faut dire. = Solliciter est élégant au figuré, avec le régime des chôses matérielles.
   Les champs sollicités par les mains des Camilles,
   De leurs dons à l' envi combloient leurs possesseurs.
       Poème des Saisons.
"Voyez d' un pôle à l' aûtre la terre sollicitée par les travaux assidus, qui la rendent féconde. Éphémérides du Citoyen. Cette expression figurée est meilleure en vers, et dans la prôse poétique, que dans le discours ordinaire. Il me semble que dans l' ouvrage cité, on embouche la trompette sans beaucoup de nécessité. = * On a dit aûtrefois, solliciter un malade, pour dire, en prendre soin, le servir avec soin, avec sollicitude.
   SOLLICITATION, a les sens du verbe. Faire quelque chôse à la sollicitation de quelqu' un. "La sollicitation d' une afaire, d' un procês. "Les sollicitations auprês des Juges sont ordinairement fort inutiles. Faire des sollicitations.
   SOLLICITEUR, 1°. Celui qui est employé à solliciter les afaires, les procês d' autrui. "Vous avez un bon, un habile solliciteur. _ Solliciteur de procês, se prend en mauvaise part. = 2°. On dit solliciteur, et même solliciteûse, des persones qui sollicitent une afaire pour eux-mêmes ou pour leurs amis. "Je me rendrai votre solliciteur. "Il est ardent solliciteur: c' est une solliciteûse pressante.

SOLLICITUDE


SOLLICITUDE, s. f. Souci, soin inquiet ou afectueux. Ce mot est três-bon, et se dit avec grâce, dit l' Auteur des Réflexions: "Les Fidèles doivent vivre sans sollicitude pour les chôses de la terre. "Les sollicitudes du siècle. "La sollicitude pastorale; la sollicitude des Églises. C' est presque tout l' emploi de ce mot. Voy. SOIN.

SOLSTICE


SOLSTICE, s. m. SOLSTICIAL, ALE, adj. Ils se disent du tems auquel le soleil est dans son plus grand éloignement de l' équateur. Solstice d' été; solstice d' hiver. Hauteur solsticiale.

SOLVABILITÉ


SOLVABILITÉ, s. f. SOLVABLE, adj. L' adjectif se dit de celui qui a de quoi payer; le substantif, des moyens qu' on a de pouvoir payer. "Il est solvable. "On ne doute pas de sa solvabilité.

SOLUBLE


SOLUBLE, adj. SOLUTION, s. f. [tion, dans le 2d, a le son de cion; solu-cion.] Solution est 1°. dénouement d' une dificulté. "La solution d' un argument, d' un problême. = 2°. En Chirurgie, séparation des parties. "Solution de continuité. = 3°. Au Palais, payement. "Jusqu' à parfaite solution et payement. = 4°. En Chimie, action de se joindre à un liquide. Il difère de dissolution, en ce que par la solution, les corps ne sont pas décomposés; au lieu qu' ils le sont par la dissolution. "Un sel est en solution dans l' eau: un métal est en dissolution dans l' eau forte.
   SOLUBLE ne se dit que dans le 1er sens de solution. Qui peut être résolu: ce problême n' est pas soluble; et dans le 4e sens: les sels sont solubles dans l' eau.

SOMBRE


SOMBRE, adj. [Sonbre: 1re lon. 2e e muet.] 1°. Qui est peu éclairé: maison sombre: tems sombre: sombre forêt. = Il fait sombre, absolument; c. à. d. le tems est sombre. Il fait sombre dans cet apartement; c. à. d. cet apartement est sombre. = 2°. Faible, qui éclaire mal. = Lumière sombre. Couleurs sombres, qui tirent sur le brun. = 3°. Obscur, ténébreux. "Une nuit sombre. = Poétiquement: les Royaumes sombres, les rivages sombres; les enfers chez les Païens. = 4°. En parlant des persones: mélancolique, réveur, chagrin. "Air, esprit, humeur, visage sombre.
   Sombre, Morne (synon.) Le 1er désigne quelque chose de plus noir, de plus triste, ou de plus horrible que le 2d. Avec une três-forte teinte de noir, une couleur est sombre; sans lustre et sans gaîté, une couleur est morne... On est morne dans le malheur: dans le malheur et le crime, on est sombre, etc. Extr. des Synon. Franc. de M. l' Abé Roubaud.
   Rem. Cet adjectif aime assez à précéder le substantif, dans le discours soutenu. "Sombres retraites. Rousseau. "Beaux vergers, sombres bois. De Lille. "Monarque des sombres. Royaumes. Jér. Déliv. Fénélon dit, forêts sombres pour, sombres forêts: il n' est pas à imiter en cela. M. Marin n' est pas de cet avis. Sombres, suit ou précède le substantif, selon le besoin de la rime ou l' harmonie de la phrâse. "Monarque des Royaumes sombres, vaut mieux que, des sombres Royaumes; et il est plus usité. Bois sombres en prose, vaut mieux que sombres bois. = Mais la prôse du Télémaque est une prôse poétique, et je persiste à croire que sombres forêts aurait été mieux que forêts sombres.

SOMBRER


SOMBRER, v. n. [Sonbré: 1re lon. 2e é fer.] Terme de Marine. Il se dit d' un vaisseau, lorsqu' étant sous voile, il est renversé par un coup de vent, qui le fait couler bâs. "Ce vaisseau sombra sous voiles. Hors de cette circonstance d' être sous voiles, on dit chavirer.

SOMMAIRE


SOMMAIRE ou SOMAIRE, adj. et subst. SOMMAIREMENT, adv. [Somère, mèreman. 2e è moy. et long, 3e e muet.] Somaire, court, abrégé. "Traité, discours, réponse, requête somaire. = S. m. Le somaire d' un livre, d' un discours, des chapitres. "En faire, en lire le somaire.
   SOMAIREMENT, d' une manière somaire. "Raporter somairement ce qui s' est pâssé.

SOMMATION


SOMMATION, s. f. SOMMER, v. actif. [Soma-cion, mé: 2e é fer. au 2d. = On pourrait écrire, somation, somer.] Somation est l' action de somer, de signifier à quelqu' un, dans les formes établies, qu' il ait à faire telle ou telle chôse, si non qu' on l' y obligera. "Faire une somation à, ou somer quelqu' un de payer, de sortir d' une maison, etc. "Somer le Gouverneur d' une place de se rendre. _ On dit aussi, somer une place, sans autre régime. = Somer quelqu' un de sa parole; lui demander qu' il la tiène. = Au Palais, somation est aussi l' acte par écrit, contenant la somation faite en Justice.

SOMME


SOMME, s. f. et m. [Some: 2e e muet.] Il est fém. 1°. Quand il signifie, charge, fardeau, que peuvent porter les animaux, qu' on apèle pour cela bêtes de somme, tels que cheval, mulet, âne, etc. "Somme de blé, de vendange; cheval de somme. = 2°. Une certaine quantité d' argent. "Grosse ou petite somme. "J' ai reçu la somme de tant. = Somme ou somme totale, est la grandeur qui résulte de plusieurs sommes jointes ensemble. = On dit plus familièrement, somme toute; ce qui se dit même quand il n' est pas question d' argent, dans le sens d' enfin. Ainsi, aprês avoir déduit plusieurs raisons, on finit par dire: somme toute, cette afaire est bone ou mauvaise, de quelque côté qu' on l' envisage.
   Somme toute, elle l' a prié jusques aux larmes,
   De bannir de ses yeux l' objet de ses alarmes.
       Le Flateur.
On le disait autrefois, mais on ne le dit plus guère. Marin. = On dit, en somme, dans le même sens et dans le même style.
   Je n' outre rien, tel est en somme,
   La demeure où je vis en paix.
       Gresset.
= 3°. Somme se dit de quelques ouvrages Théologiques, abrégés d' un plus grand. "La Somme de St. Thomas, etc.
   SOMME est masc. quand il signifie sommeil: "Un bon somme: à mon premier somme; j' ai dormi de bon somme.
   J' ai dormi d' un bon somme, et me voilà remis:
   Prêt à recomencer.
       DEST. Le Dissipateur.
= Il n' est que du style fam. "Ulisse se réveilla de son somme, dit Mde. Dacier, dans sa Traduction de l' Odyssée, farcie d' expressions triviales et proverbiales.
   REM. 1°. Somme signifie toujours le dormir, ou l' espace du tems qu' on dort: il a dormi un bon somme.
   Certes, je n' ai jamais dormi d' un si bon somme.
       Les Plaideurs.
Someil se prend quelquefois pour l' envie de dormir. Je suis acablé de someil. On ne dirait pas de somme; comme on ne pourrait pas dire: j' ai dormi un bon sommeil. L. T. = On dit familièrement: Faire la nuit tout d' un somme. Cette expression est assez bizarre; mais elle est reçue. = Somme (d' argent) est à la mode, au figuré. "La somme des plaisirs; la somme des malheurs, etc. "Le talent d' ajouter à la somme des lumières de l' Antiquité les conoissances de son siècle. Anon. _ Il parait qu' il y a encôre de la prétention et de l' afèterie à se servir de cette expression, et surtout à l' employer trop souvent.

SOMMEIL


SOMMEIL ou SOMEIL, s. m. SOMEILLER, v. n. [So-mèil, somé-glié: 2e è moy. au 1er, é fer. au 2d, dont la 3e é aussi fer. mouillez l' l finale du 1er, et la double l du 2d. Dans le verbe, le 1er e se change en è moy. devant l' e muet: il someille, someillera; prononc. somè-glie, glie-ra, etc.] Someil est le repôs de l' animal, causé par l' assoupissement de tous les sens. "Profond, long someil, tranquile, doux, paisible, ou inquiet, fâcheux, interrompu. "Être enseveli dans le someil. "Ne troublez pas son someil.
   Les ombres, par trois fois ont obscurci les cieux,
   Depuis que le sommeil n' est entré dans vos yeux.
       Phèdre.
_ Le someil est l' image de la mort
  La mort et le sommeil, si semblable à la mort.
       Le Franc.
= Il signifie aussi, envie de dormir: être acablé, abatu de someil. "N' en pouvoir plus de someil. _ Quelques uns disent, avoir sommeil; mais cette dernière locution est au moins douteûse: je la croirais presque un gasconisme. Voy. SOMME. Rem. 1°.
   SOMEILLER, c' est dormir d' un someil léger, imparfait. "Je ne dormais pas, je ne faisais que someiller. = Figurément, Travailler négligemment. "Quel est l' Auteur, qui ne someille quelquefois? Cette expression est tirée d' HORACE: Quand•que bonus dormitat Homerus.
   Les échos, s' il en est, dans ce triste séjour,
   D' aucun bruit n' y frapent l' oreille;
   Et leur troupe oisive someille
   Dans les cavernes d' alentour.
       Le Franc.
= M. Roucher fait someiller le soufre:
  ....Aux couches caverneuses,
  Où sommeille le souffre.

SOMMELIER


SOMMELIER, ou SOMELIER, LIèRE, s. m. et f. SOMELLERIE, s. f. [Some-liè, lière, somèlerie: 2e e muet aux deux prem. dont la 3e é fer. au 1er; è moy. et long au 2d; la 2e è moy. au 3e; dont la 3e e muet.] Le somelier ou la somelière est celui, ou celle qui, dans une Comunauté, ou dans une grande maison a en sa charge le linge, la vaisselle, le pain, le vin et le liqueurs. Somellerie se dit de la charge et fonction du somelier, de la somelière; et du lieu où il tiènent ce qu' ils ont en leur charge.

SOMMER


SOMMER. Voy. SOMMATION.

SOMMET


SOMMET, ou SOMET, s. m. [Somè: 2e è moy.] Le haut, la partie la plus élevée d' une montagne, d' un rocher, d' une tour, de la tête. = Il se dit fig. "Au somet des grandeurs, de la fortune, etc. Mais le sommet de l' âme est une vieille expression, fort à la mode, quand on parlait sans cesse de la partie supérieure et de la partie inférieure de l' âme. _ Le sommet de l' infamie, comme dit Voiture, n' est pas non plus une métaphore fort juste: "On n' arrive pas dabord au sommet de l' infamie: on y monte par degrés. L' abime serait une expression plus convenable: on ne tombe pas dabord dans l' abime de l' infamie: on y descend par degrés.

SOMMIER


SOMMIER, ou SOMIER, s. m. [So-mié: 2e é fer.] 1°. Cheval de somme. = 2°. Matelâs de crin, servant de paillasse. = 3°. Cofre, dans lequel les souflets des orgues font entrer le vent; qui delà se distribûe dans les divers tuyaux. = 4°. Les deux pièces de bois, qui servent à soutenir l' éfort d' une presse d' Imprimerie.

SOMMITÉ


SOMMITÉ, s. f. [Somemité: l' e muet sur-ajouté, très bref.] Le petit bout, la pointe des herbes, des fleurs, des branches d' arbres.

SOMNAMBULE


SOMNAMBULE, s. m. SOMNAMBULISME, s. m. [Somenanbule, lisme: l' e muet surajouté est très bref.] Ils expriment proprement l' action de marcher et d' aler ça et là pendant le someil. Par extension, on le dit d' un état mitoyen entre le someil et la veille. "Le somnabulisme magnétique. Journ. de Paris.

SOMNIFèRE


SOMNIFèRE, adj. et subst. [Somenifè--re: l' e surajouté est très bref: 3e è moy. et long, 4e e muet.] Qui provoque le someil; qui fait dormir. "Potion somnifère: le pavot est un somnifère, etc. Ce mot ne se dit guère dans le discours familier. On dit vulgairement un dormitif.

SOMPTUAIRE


SOMPTUAIRE, SOMPTUEUX, EûSE, adj. SOMPTUEûSEMENT, adv. SOMPTUOSITÉ, s. f. [Sonptu-ère, eû, eû-ze, zeman, ozité: 3e lon. excepté au dern. è moy. au 1er: 4e e muet. L' Ab. Mongault écrit sumptuaire. Il a consulté l' étymologie plus que l' usage.] Somptuaire ne se dit qu' avec Loi, ou règlement; qui réforme le luxe, qui règle la dépense dans les habits, les bâtimens, les festins. = Somptueux, magnifique, splendide. "Édifice, festin, somptueux. "Cet Homme est somptueux en habits, en festins, en bâtimens, etc. = Somptueûsement, d' une manière somptueûse. "S' habiller, vivre somptueûsement. = Somptuosité, grande, magnifique dépense: somptuosité en habits, en bâtimens, etc.

SON


SON, SA, pron. possessif de la 3e persone. Il fait au pluriel ses. = 1°. Son se dit au masculin: son livre, son chapeau: il sert aussi pour le féminin, lorsque le mot comence par une voyèle; ou une h muette; son âme ; son hôtesse. Sa se met devant les mots féminins, qui comencent par une consone. Sa table, sa maison. = 2°. Son, sa, leur, ne se disent que relativement aux persones: on dit d' un homme: je conais sa famille, ses talens; mais on ne dira point d' une maladie: je conais sa caûse, ses accês sont longs. Il faut alors se servir du pronom en: j' en conais la caûse: les accês en sont longs. Bouh. = 3°. Ce pronom ne doit pas se raporter à un nom pris indéfiniment, comme dans ces vers, qui étaient dans les premières éditions de Boileau.
   Les vers ne soufrent point de médiocre Auteur;
   Ses écrits, en tout lieu, sont l' éfroi du Lecteur.
Ce Poète les changea dans la suite. = Il est encôre plus mal de le faire raporter à un adjectif, comme a fait le P. Barre: "Il savoit le grec et le latin et parloit cette dernière langue, comme sa naturelle. L' Historien a craint de répéter le mot langue: mais cette répétition était indispensable; et elle n' est point desagréable. Il devait dire: il parlait cette dernière langue, comme sa langue naturelle. = 4°. Il faut aussi bien prendre garde comment on place ce pronom, parce qu' il forme quelque--fois un sens équivoque. Boileau dit, dans le Lutrin:
   Gilotin en gémit et sortant de fureur,
   Chez tous ses partisans, va semer la terreur.
Selon la construction, ses se raporte à Gilotin; et selon l' intention du Poète, il doit se raporter au Prélat, dont il est parlé quatre vers plus haut. Il y a la même faûte, dans les vers suivans, où le Poète dit, en parlant de Sidrac.
   Il devine son mal: il se ride; il s' avance
   Et d' un ton paternel réprimant ses douleurs.
C' est le mal, ce sont les douleurs non de (Il) Sidrac, mais du Prélat. La faûte est légère, dit M. de Saint Marc, quand le sens se présente de lui-même. = 5°. Quelques Écrivains transportent le pronom possessif du nom régi au nom régissant. "Sa solidité naturelle d' esprit, dit Fontenelle pour, la solidité naturelle de son esprit. "Ses plus grands embarras d' afaires. Fléchier. = Je n' ôserais condamner ces exemples; mais la phrâse suivante présente une transposition vicieûse, en sens contraire. "Démosthène vint à bout de surmonter les défauts de sa langue. P. Rapin Il falait dire, son défaut de langue.

SON


SON, s. m. 1°. La partie la plus grossière du blé moulu: "Grôs son. "Eau de son. = 2°. Son, bruit, l' objet de l' ouie. "Son aigu, perçant; clair, doux, harmonieux; rude, qui étourdit. "Le son des cloches, des trompètes, du tambour, etc. = Rousseau s' en sert, au lieu de paroles, discours. Il fait dire à Minerve.
   Je suis Minerve: écoutez mes leçons!
   Quoi! vous fuyez et méprisez mes sons.
Je ne crois pas qu' on doive imiter, en cela, même en vers, ce grand Poète. On dit bien, d' une chanteûse, qu' elle ne forme pas bien ses sons: mais on ne dirait pas à quelqu' un, écoutez mes sons, pour dire, faites atention à ce que je vous dis.

SONANT


SONANT, ANTE, Voy. SONNâILLE.

SONATE


SONATE, s. f. Pièce de violon ou de quelque aûtre instrument, composée de morceaux, dont les moûvemens sont alternativement lents et vites.

SONDE


SONDE, s. f. SONDER, v. act. [1re lon. 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Sonde est 1°. Instrument, dont on se sert pour reconaitre la profondeur des rivières ou de la mer et la qualité du fond. "Jeter la sonde. "Dans cet endroit, cette baie, etc. Il faut avoir toujours la sonde à la main. = 2°. Instrument, dont les Chirurgiens se servent, pour reconaitre, en l' insinuant dans certaines parties internes, les corps étrangers, qui peuvent s' y être formés. = Sonder, jeter ou introduire la sonde. "Sonder le rivage, un port de mer; un gué, une rivière. Sonder une plaie, un homme, etc. = FIG. Sonder quelqu' un, tâcher de découvrir sa pensée, son intention, son secret. "Elle le veut sonder sur son mariage. Mol. Sonder (vouloir pénétrer) les secrets de la Providence. = En st. famil. Sonder le gué, ou, le terrein, tâcher de conaître, s' il n' y a point de danger dans une afaire et coment il faudra s' y prendre.

SONGE


SONGE, s. m. SONGE-CREUX, s. m. SONGER, v. act. et n. SONGEUR, s. m. [1re lon. 2e e muet aux 2 1ers, é fer. au 3e.] Songe; rêve, idée, imagination d' une persone qui dort. "Expliquer, interpréter les songes. = Le Proverbe dit: les songes sont mensonges.
   Un seul mot de Pammène a fait évanouir
   Ces songes imposteurs, dont vous ôsiez jouïr.
       Oreste.
  Ne m' avez-vous pas dit qu' un songe est une erreur,
  Qu' en bien, ainsi qu' en mal, il n' est d' aucun présage;
  Qu' il ne doit inspirer ni crainte, ni terreur.
       La Chaussée.
= Le mal d' autrui n' est qu' un songe; il fait peu d' impression sur ceux, qui en entendent parler. "Les chôses de ce monde, ou, la vie n' est qu' un songe: les chôses du monde n' ont aucune solidité: la vie pâsse comme un songe. = En songe, adv. "Voir une chôse en songe. "Un Ange lui aparut en songe.
   SONGE-CREUX; qui est en habitude de réver à quelque projet chimérique, ou à quelque malice noire. St. famil.
   SONGER, c' est 1°. Faire un songe. "J' ai songé que, etc. J' ai songé telle et telle chôse. Et avec la prép. de (st. famil.) Songer d' eau bourbeûse, de fêtes, de chasse. = 2°. Penser, considérer. Il régit le datif. "Songez à ce que vous faites: à quoi songez-vous? Toutes les fois que j' y songe. "Laissons là le passé et ne songeons qu' à l' avenir. Cic. à Atticus. Mongault.
   Songe à nos premiers noeuds. - - - Je songe à ton danger.
       Alzire.
= Il régit aussi à et l' infinitif, ou que avec l' indicatif: songez à y pourvoir: songez que vous l' avez promis. Voy. PENSER. = 3°. Avoir quelque dessein. "Il ne songe point au mariage: il songe à acheter une telle charge, etc. = Songer à malice, ou à la malice (st. famil.) C' est songer à faire quelque malice; ou, doner un sens trop libre à des chôses dites inocemment; ou, interpréter malignement tout ce qu' on entend dire. = Songercreux: Voy. plus haut. SONGE-CREUX.
   SONGEUR, celui qui raconte ses songes. Les Frères de Joseph dirent en le voyant: voici notre songeur. = Hors de cette phrâse, on ne le dit qu' en plaisantant, ou en critiquant.

SONICA


SONICA, s. m. Terme du jeu de la Bassette, qui a pâssé dans le discours familier. À~ point nommé. "Il est arrivé sonica.

SONNâILLE


SONNâILLE, ou SONâILLE, s. f. SONâILLER, v. n. SONANT, ANTE, adj. SONER, v. act. et n. SONERIE, s. f. SONETTE, s. f. SONEUR, s. m. [So-nâ-glie, nâ-glié; nan, nante, né, neri-e; nè-te, neur: 2e lon. aux 4 1ers; mouillez les ll, é fer. au 5e, e muet au 6e.] Soner, v. n. 1°. Rendre un son. "La cloche, l' horloge sone. "Soner de la trompette. = En gramaire, cela sone bien, sone mal; flate ou choque l' oreille. = 2°. Être marqué: anoncé par quelque son: les vêpres sonent, voilà midi qui sone . = 3°. V. act. Faire rendre du son. "Soner les cloches, la sonette, le tocsin, etc. = En st. famil. Ne sonez mot, ne dites mot. = Rem. Il semble qu' on ne devrait dire soner que des cloches: on dit pourtant, soner les Matines, les Vêpres, l' Assemblée, le réfectoire, etc. "Le diné sone, et vous voilà dans la Sale de compagnie, lorsque la cloche parle encôre. Coyer. = Soner ne se dit pas des persones, et c' est un gasconisme que de dire, on vous sone, pour dire, on vous apèle. * M. Rétif dit: "M. P..... la sona. = Il faut excepter cette phrâse, soner ses gens, soner la sonette, pour les faire venir. _ Cela pourrait aussi se dire dans un Couvent, où chaque Religieux est appelé au parloir par un certain nombre de coups de cloche. MARIN. = Il faut dire, midi est soné, dix heures sont sonées, et non pas, a soné, ont soné: mais on dit: l' horloge a soné; parce que c' est l' horloge, qui sone, et ce sont les heures, qui sont sonées par l' Horloge. = Faire soner bien haut, faire valoir, représenter avec force. "Il fait soner ce service bien haut. Rollin. = On dit d' une action qu' elle sone bien ou mal, qu' elle est aprouvée, ou blâmée. "Cela sone mal, ou, ne sone pas trop bien. On le dit plutôt du mal que du bien. = Soner la retraite se dit en st. fig. famil. pour, se retirer du monde: il est tems de soner la retraite.
   SONâILLER, Soner souvent et sans besoin. "On ne fait que sonâiller dans ce Couvent. = Sonâille se dit des clochettes atachées au cou des bêtes, qui voyagent; et sonettes de celles qui sont atachées aux murs des apartemens, ou qui sont sur une table, pour apeler les domestiques. On le dit aussi de certains grelots qu' on atache au cou des chiens, ou aux pieds des oiseaux de proie. Sonette est encôre une machine, dont on se sert pour enfoncer des pilotis.
   SONANT, ANTE, qui rend un son clair. "Étain, airain sonant. = Horloge, montre sonante, qui sone les heures. = À~ l' heure sonante, à l' heure précise.
   Nous partirons à cinq heures sonantes.
       NANINE.
Marivaux fait dire à un valet, à six heures frapantes. = Espèces sonantes, monoie d' or, d' argent: payer en espèces sonantes. = Proposition mal sonante, qui peut être prise dans un sens peu ortodoxe.
   SONEUR, celui qui sone les cloches.

SONNET


SONNET ou SONET, s. m. Ouvrage de Poésie, composé de quatorze vers, distribués en deux quatrains et deux tercets. = Ce mot était déjà en usage dès le comencement du Règne de St. Louis.

SONNEZ


SONNEZ, ou SONEZ, s. m. Terme du jeu de trictrac. Deux Six. "Amener un sonez. * J. J. Rouss. écrit sonnet et le fait rimer avec cornet. Trad. de l' Apocolokintosis.

SONôRE


SONôRE, adj. [2e lon. 3e e muet.] Qui a un son agréable et éclatant. "Voix sonôre: des vers sonôres. = En parlant, des lieux; qui rend bien la voix. "Église sonôre. = Syllabe sonôre, ou masculine; celle qui est aûtre que l' e muet.

SOPHI


SOPHI, s. m. [sofi.] Plusieurs regardent ce mot comme le nom générique des Rois de Perse, et lui donent plusieurs étymologies. D' aûtres, avec plus de raison, le regardent comme le nom d' une famille, qui a ocupé long tems le trône. Dans le pays, on dit, séphi.

SOPHISME


SOPHISME, s. m. SOPHISTE, s. m. SOPHISTIQUE, adj. SOPHISTIQUER, v. act. SOPHISTIQUERIE, s. f. *SOPHISTIQUEUR, s. m. [Sofisme, fiste, tike, ké, keri-e, keur: 3e e muet aux 2 1ers; 4e e muet au 3e et au 5e, é fer. au 4e.] Sophisme, argument captieux, qui ne conclut pas juste. "Les livres des Philosophistes sont pleins de sophismes. "L' esprit, entraîné par l' apas trop enchanteur d' une fausse liberté, aime à s' égarer dans un labyrinte de sophismes captieux, où il veut se perdre et ne se retrouver jamais. Neuville. = Sophiste s' est dit aûtrefois en bone part des Philosophes et des Rhéteurs. Aujourd' hui, il ne se dit que de ceux, qui n' argumentent que par sophismes.
   Des sophistes, armés d' audace et de blasphême,
   De vils censeurs des Lois et du pouvoir suprême.
       Le Franc.
"Les sophistes ont souvent plus de partisans que les vrais Philosophes. Le Franc, traduct. de Lucien. = Sophistique, captieux, trompeur. "Argument, raisonement sophistique. = Sophistiquer c' est 1°. Subtiliser avec excês. "Il sophistique tout. = 2°. Frelater: sophistiquer des drogues, des liqueurs. Fig. "L' esprit contentieux qui sophistique tout, et semble être un répertoire inépuisable de subtilités et de chicanes De la Litérature Allemande. = Sophistiquerie a les deux sens: fausse subtilité dans le raisonement. *Bossuet disait sophisterie. = Frelaterie: il y a de la sophistiquerie dans ce vin là. = Sophistiqueur, qui sophistique. Ce mot n' est bon que dans le style comique ou critique. L' Acad. ne le met pas.
   Ces écumeurs de dogmes arbitraires,
   Qu' on voit tout fiers de leur corruption....
   En argumens habiller tous leurs doutes
   Et convertir, subtils sophistiqueurs,
   Leur ignorance en principes vainqueurs.
       Rouss.

SOPORATIF


SOPORATIF, IVE, SOPOREUX, EûSE, SOPORIFèRE, SOPORIFIQUE, adj. Le 1er et les deux derniers ont, au propre le même sens. Qui a la vertu d' endormir. = Fig. On les dit d' un discours ennuyeux. = Soporeux, qui cause un someil dangereux. Afection soporeûse.

SOR


SOR, Voy. SAURE.

SORBE


SORBE, s. f. Fruit du sorbier, ou cormier.

SORCELLERIE


SORCELLERIE, s. f. SORCIER, CIèRE, s. m. et f. [Sorcèlerie, cié, ciè-re: 2e è moy. au 1er et au 3e, é fer. au 2d: 3e e muet au 1er et au 3e.] Sorcier vient de sort: c' est celui, qui, suivant l' opinion du peuple a un pacte avec le Diable pour faire des maléfices, et assiste aux assemblées du sabat. Voy. SORT, n° 4°; et SABAT. = On dit bâssement, d' un homme vieux et méchant, que c' est un vieux sorcier; et d' une vieille et méchante femme: vieille sorcière. _ Et proverbialement, n' être pas grand sorcier, n' être pas fort habile: "Cet homme n' est pas grand sorcier: "Il ne faut pas être grand sorcier pour deviner, ou pour faire telle chôse. = Sorcellerie, opération de sorcier. = Par extension et en plaisantant, ce qui parait au dessus des forces de la Nâture: "Il faut qu' il y ait de la sorcellerie. Cela ne se peut faire, ou, deviner sans sorcellerie.

SORÉ


SORÉ, SORET, SORER, Voy. SAURE.

SORDIDE


SORDIDE, adj. SORDIDEMENT, adv. [3e e muet, en a le son d' an: deman.] Sale, vilain, en parlant des avâres: c' est un avâre des plus sordides: gain, intérêt, avarice, épargne sordide. "Il vit sordidement, d' une manière sordide.

SORNETTE


SORNETTE, s. f. [Sornète: 2e è moy. 3e e muet.] Discours frivole: quelle sornette nous contez-vous là? Il ne dit que des sornettes. _ Il s' emploie ordinairement au pluriel.

SORT


SORT, s. m. [Le t ne se prononce jamais.] 1°. Dans le sens des Païens, la destinée: le sort le veut ainsi, l' a ainsi ordoné.
   Le mérite est toujours en guerre avec le sort.
       PALISSOT.
= 2°. Par un reste de ce langage, c' est encôre parmi nous, l' éfet de la destinée: "Son sort est heureux ou malheureux: je plains votre sort. = 3°. La manière de décider quelque chôse par le hasard. "Tirer au sort. "Le sort est tombé sur vous. = 4°. Paroles, caractères, etc. par lequels le peuple croit qu' on peut produire des éfets extraordinaires et faire des maléfices. "Jeter, mettre un sort sur: doner un sort à, etc.

SORTABLE


SORTABLE, adj. Qui convient à l' état, à la condition. "Emploi, parti, mariage sortable: "Entreprise si peu sortable à son rang.
   Oui: j' aime assez Dorante; et s' il ne déplait point,
   Ce serait un parti sortable de tout point.
       Palissot.
  C' est un parti de tout point fort sortable...
  C' est, en un mot, Blaise le Jardinier.
      Nanine.

SORTANT


SORTANT, s. m. Qui sort: "Les entrans et les sortans. LINGUET.

SORTE


SORTE, s. f. [2e e muet.] 1°. Espèce: "Quelle sorte de plante est cela? "Il n' est sorte de caresses qu' il ne m' ait faites. "Toute sorte de livres ne sont pas également bons. = Rem. Toute sorte au singulier, sont au pluriel, et bons au masculin et au pluriel, se raportant à livres, qui est le nom régi et non pas à toute sorte qui est le sujet de la phrâse et le nom régissant: tel est l' usage. = Vaugelas veut qu' on dise toute sorte avec le singulier: je vous souhaite toute sorte de bonheur; et toutes sortes avec le pluriel: toutes sortes de joies. = Je suis de l' avis de MÉNAGE; toute sorte vaut toujours mieux que toutes sortes, soit qu' il suive un pluriel ou un singulier. L' Acad. met l' un et l' aûtre indiféremment. Toute sorte de livres, et toutes sortes de livres, de drogues, d' étofes, etc. Voy. ESPèCE, Rem. 1°. = Avec quelque, le pluriel sortes est tout-à-fait mauvais: "Policer en quelques sortes les moeurs grossières et barbâres de sa Patrie. Anon. Dites, en quelque sorte. = 2°. Manière, façon: il s' est comporté, il a agi ou parlé dans cette ocasion de bone, ou, de la bone sorte. "De la sorte qu' il le conte, il n' a pas tort. "Voilà une sorte d' habillement, de coifûre, etc. assez extraordinaire. = 3°. État, condition. Il se dit ou par estime; c' est trop vous avilir pour un homme de votre sorte; ou par mépris: c' est bien à un homme de sa sorte, de vouloir s' égaler à vous. "Il a comencé par dire: un homme de ma sorte; il pâsse à dire: un homme de ma qualité. LA BRUY. "Comme vous voudrez, dit-il, mais c' est qu' on aime à être avec les gens de sa sorte. MARIV.
   Des Juges! Des messieurs de robe! Une persone
   De ma sorte? Ah vraiment, la pensée est mignone.
       Les Aïeux chimériques.
= De sorte que, ou, ensorte que, conjonctions: tellement que, si bien que. La 1re régit l' indicatif; de sorte que je n' ai pu réussir; la 2de régit le subjonctif, jointe au verbe faire, avec lequel elle s' associe: Faites ensorte qu' il soit content. Il a fait ensorte que j' en sois venu à bout. * On a dit aûtrefois, en sorte que, en séparant en de sorte, et dans le sens de l' adverbe, de telle sorte que, etc. "Le corps est fait en sorte (de telle sorte) que l' âme ne prend jamais de résolutions que les mouvemens du corps ne s' y acordent. On disait aussi de sorte, dans le même sens.
   S' aprivoise de sorte à cette cruauté,
   Qu' on ne lui voit jamais dépouiller sa fierté.
       Brebeuf.
"Ils ont confondu de sorte ceux qui en sont les ministres avec les Prêtres des aûtres religions, qu' il n' est pas toujours possible de les distinguer. Charlevoix. On doit dire, même en vers, de telle sorte.

SORTIE


SORTIE, s. f. SORTIR, v. n. et act. [2e lon. au 1er, sorti-e, ti.] Sortir a deux sens et deux conjugaisons diférentes, relatives à ces deux sens. 1°. Pâsser du dedans au dehors. Je sors, nous sortons, je sortois, ou sortais; je sortis; j' ai sorti; je sortirai; je sortirois, ou sortirais; sors, que tu sortes, qu' il sorte; que je sorte, je sortisse; sortant, sorti. = 1°. Sortir de la chambre, de la maison, de la ville. Et sans régime; il ne fait que de sortir: il vient de sortir. _ On dit aussi par ellipse, sortir de la Messe, du Sermon, de Vêpres, du Bal, du jeu, de la Comédie; c. à. d. du lieu où, etc. _ Sortir de prison: être élargi. = Relativement au tems, on dit, sortir de l' hiver, de l' enfance, de nourrice; et à l' état, à la condition; sortir de maladie; d' aprentissage, de condition, (pris pour l' état de domestique) de charge etc. = FIG. sortir d' un grand peril, d' embârras; d' affaire, d' erreur, du sujet, ou, de son sujet, de sa matière, de la question; de son devoir; des bornes de la modestie, etc.
   Ce style figuré, dont on fait vanité,
   Sort du bon caractère et de la vérité.
       Misantrope.
Sortir de son état.
  Vous n' êtes pas encor dans votre état.
  -- J' en suis sortie; et c' est ce qui m' acable;
  C' est un malheur, peut-être irréparable.
       Nanine.
_ En parlant d' un ouvrage d' esprit; il sort d' un bon Auteur, d' une bone plume. = 2°. Pâsser au dehors. "Les blés, les herbes sortent de terre: il lui est sorti un bubon, etc. = Exhaler: il sort une grande chaleur de ce fourneau; une agréable odeur de ces fleurs. _ Et par exagération, le feu lui sort par les yeux. = 3°. Être issu: il sort de gens de bien, de parents illustres. Il sent le lieu d' où il sort. = 4°. Il s' emploie quelquefois activement: sortir un cheval de l' écurie; au jeu de Trictrac, sortir son coin; en st. famil. sortir quelqu' un d' affaire. Hors de là, c' est une faûte de doner à sortir une signification active. Un Auteur moderne fait dire à une fille parlant de sa mère: elle me sortoit quelquefois du couvent. Cela a fort l' air d' un gasconisme. Vaugelas aproûve les phrâses suivantes: sortir le Royaume; sortez moi de cette affaire. La 2e est encore usitée: la 1re est hors d' usage. Mde de G.... l' emploie à l' actif plus figurément encôre. "Le génie est pour les femmes un don inutile et dangereux: il les sort de leur état. _ On dit il les fait sortir. = Sortir: pour ôter; et s' en sortir, pour s' en tirer, sont deux gasconismes; Vous ne me sortirez pas cela de l' esprit: un tel nous prêche: nous verrons comment il s' en sortira. DESG. Gasc. corr. En Provence, l' on dit de quelqu' un à qui il est sorti des boutons aux lèvres; qu' il a les lèvres toutes sorties: c' est un barbarisme d' expression. = 5°. Sortir est substantif dans cette phrâse adverbiale, au sortir de. "Au sortir de l' Église; des Vêpres, du Sermon. Au sortir du lit, de la table, ou de table, etc.
   II. Au Palais, obtenir, avoir. "Cette sentence sortira son plein et entier éfet. = Il difère de sortir, dans le 1er sens; au présent, et à l' imparfait. "Il sortit, sortissait, qu' il sortit; que cette clause sortisse son plein et entier éfet. Il n' est usité que dans ces tems et au futur; et toujours à la 3e personne.
   SORTIE, 1°. action de sortir, ne se dit que dans le sens du n°. I. "Depuis sa sortie du Royaume. "J' ai été deux mois malade: voici ma premiere sortie. = Par extension, la sortie des marchandises, de l' argent hors du Royaume. Droits d' entrée et de sortie. = 2°. Ataque, que font les assiégés, lorsqu' ils sortent pour combatre les assiégeans. = st. famil. Faire une sortie à, ou sur quelqu' un, s' emporter de paroles contre lui, ou lui dire brusquement quelque chôse de dur. = 3°. Issûe, endroit par où l' on sort. "Cette maison a deux sorties. Avoir une sortie sur la rue et une sur la campagne. = 4°. À~ la sortie de, adv. "À~ la sortie de l' hiver, du Sermon, du dîner, des Juges. = On dit plus ordinairement, au sortir. = 5°. Le Dict. de Trév. dit, la sortie d' une affaire, pour dire l' issue. Il ne cite point d' Auteur. Je doute de la bonté de cette expression. On dit bien sortir d' une afaire; mais on ne dit point qu' il en faut prévoir la sortie.

SORTILèGE


SORTILèGE, s. m. [3e è moy. 4e e muet. _ L' Acad. met un aigu sur l' e; sortilége, mais cet é n' est pas fermé; l' accent grâve y convient mieux. Voy. E.] Maléfice, dont se servent les prétendus sorciers.

SORTIR


SORTIR, Voy. SORTIE.

SOT


SOT, SOTE, adj. SOTEMENT, adv. SOTISE, s. f. SOTISIER, s. m. [Le t se prononce au 1er, 2e e muet au 2d et au 3e, lon. au 4e; 3e e muet au 4e, é fer. au 5e: sot, sote, teman, tî-ze, ti-zié.] Sot, stupide, grossier, sans esprit et sans jugement. Il se dit des persones et des chôses, qui y ont raport. "Un sot homme, une sote femme; un sot animal, une sote bête (toujours en parlant des persones.)
   C' est trop que d' être sot à la fois et bisarre.
       Palissot.
  L' Aigle d' une maison n' est qu' un sot dans une autre.
      Le Méchant.
Un sot discours, un sot livre; une sote entreprise. _ Une sote affaire; fâcheuse, embarrassante~. Subst. "Celui, celle, qui a dit cela est un sot, une sote. "La probité, qui nuiroit à leur fortune, n' est plus pour eux que la vertu des sots. MASSIL. _ Cela me parait un peu bâs, ou trop familier du moins pour le discours soutenu.
   Ce n' est qu' un jeune sot, qui voudroit être un fat.
       La Chaussée.
On dit, par élipse, en st. famil. Quelque sot, en sous-entendant, le croirait, le dirait, le ferait, et non pas moi. "Vous devriez faire cela... Quelque sot! c. à. d. je ne suis pas si sot que de le faire, etc. Voy. FAT.
   SOTEMENT., d' une sote manière. "Il a répondu sotement: "Il s' est laissé sotement duper.
   SOTISE, 1°. Qualité de celui, qui est sot. "La sotise de cet homme est inconcevable. "C' est sotise à vous que de croire, etc. = 2°. Actions ou discours, éfets de la sotise: "Il fait tous les jours quelques nouvelles sotises; il ne sait dire que des sotises.
   Eh quoi, vil complaisant vous louez des sotises!
       Misantrope.
= 3°. Paroles et actions obscènes. "Il est indigne d' un honête homme de dire des sotises devant des femmes et encôre plus devant de jeunes persones.
   SOTISIER, se dit d' un recueuil de sotises, de vers libres; et de celui qui débite des sotises. "Il a un ample sotisier. "Cet homme est un sotisier; st. famil.

SOU


SOU, s. m. [monosyllabe. _ On écrivait autrefois sol, et quelques-uns l' écrivent encôre; et qui pis est, le prononcent de même.] La vingtième partie de la livre de compte, valant douze deniers. = On dit en st. prov. n' avoir pas le sou, ou un sou; n' avoir ni sou, ni double, ou, ni sou, ni mâille, n' avoir point d' argent.
   Je ne veux plus jouer, mon père, absolument.
   - - Quand ils n' ont pas un sou, voilà de leur morale.
       Le Joueur.
  ....Valère est un vrai fou,
  Qui joueroit votre bien, jusques au dernier sou.
      Ibid.
   _ Mettre sou sur sou, amasser, acumuler, en épargnant.

SOUBâSSEMENT


SOUBâSSEMENT, s. m. [Sou-bâceman. 2e lon. 3e e muet.] 1°. Pente, qu' on met au bâs du lit, et qui descend jusqu' à terre. = 2°. En termes d' Architectûre, espèce de piédestal continu, qui règne le long d' un édifice, et qui lui sert comme de bâse. = Par extension, peintûre sur la murâille ou sur toile, qui règne, sous la tapisserie, tout au tour d' un apartement.

SOUBÇONER


*SOUBÇONER. C' est ainsi que plusieurs écrivaient autrefois. Voy. SOUPÇONER.

SOUBRESAUT


SOUBRESAUT, s. m. [Sou-bresô: 2e e muet, 3e lon.] Saut subit, inopiné et à contre-tems. "Ce cheval fait, ce carrosse done des soubresauts. = FIG. Traverse, contre-tems. "Il a eu un terrible soubresaut, on lui a doné de rudes soubresauts dans cette affaire. St. famil.

SOUBRETTE


SOUBRETTE, s. f. [Sou-brète: 2e è moy. 3e e muet.] Terme de mépris. Femme de chambre intrigante. "Une soubrette, petite soubrette. = Dans les comédies, rôle de soubrette, de suivante, de femme de chambre.
   La soubrette est bavarde: elle n' a pu me taire
   Que le Dorante envain s' était flaté de plaire.
       Palissot.

SOUBREVèSTE


SOUBREVèSTE, s. f. [2e et 4e e muet, 3e è moy.] Vêtement sans manches à l' usage des mousquetaires du Roi.

SOUCHE


SOUCHE, s. f. 1°. La partie d' en bâs d' un arbre, acompagnée de ses racines, et séparée du reste de l' arbre. = 2°. Fig. le 1er Noble d' une famille. = Faire souche, être le premier d' une suite de descendans. "De tous les enfans de St. Louis, il n' y en a eu que deux qui aient fait souche. "Voilà mon maître marié; pour moi, je vais chercher quelque jolie grisette, avec qui je puisse faire souche. Je serois responsable devant la postérité, si je laissois périr la race des Crispins. Destouche. = 3°. Souche de cheminée, assemblage de plusieurs tuyaux joints ensemble, et qui s' élèvent au-dessus du comble.

SOUCI


SOUCI, s. m. SE SOUCIER, v. réc. SOUCIEUX, EûSE, adj. [Sou-ci, ci-é, ci-eû, eû-ze: 3e. é fer. au 2d, lon. aux deux aûtres.] Souci est, 1°. une sorte de fleur jaûne, qui a une odeur forte. = On dit proverbialement, jaûne comme souci, qui a le visage fort jaûne.
   2°. Souci, soin acompagné d' inquiétude. "Avoir, prendre du souci; vivre sans souci. = "C' est un sans souci. St. famil. "Cette afaire lui done bien du souci.
   Rem. Avoir et prendre du souci s' emploient sans régime. La Fontaine dit, avoir souci de, comme on dit, avoir soin de, etc.
   J' espere qu' il aura de vous quelque souci.
Cela n' est pas de l' usage actuel. Molière dit prendre souci de:
   Monsieur, encore un coup, laissez-moi, s' il vous plait;
   Et ne prenez souci que de votre intérêt.
       Misantrope.
L' Acad. ne le met pas, mais je crois qu' il peut se dire. Voy. SOIN.
   SE SOUCIER, s' inquiéter, se mettre en peine. L' Acad. avertit qu' il s' emploie souvent avec la particule négative. Elle met pourtant en exemples: il faut se soucier de son honeur, de sa réputation. De quoi vous souciez-vous? Il se soucie peu de conserver ses amis, etc. _ Là peu équivaut à la négative; car se soucier peu, c' est ne se soucier guère. Mais pour, se soucier de son honeur, etc. dans le sens afirmatif, je ne le crois pas de l' usage actuel.
   Rem. 1°. La Fontaine fait soucier actif.
Le moucheron dit au Lion:
   Penses-tu que ton titre de Roi
   Me fasse peur, ni me soucie?
Pour parler régulièrement, il falait dire: ni que je m' en soucie. = 2°. Se soucier, régit de et l' infinitif, ou que et le subjonctif. Le 1er régime a lieu, quand le verbe régi se rapporte au sujet, au nominatif; le second quand il ne s' y raporte pas. "Je ne me soucie, ni de le faire, ni que vous le fassiez. "Je dis ce que je pense, dit quelque part Voltaire, et je me soucie fort peu que les aûtres pensent comme moi. = 3°. Ne se soucier pas se dit naturellement des chôses qu' on ne veut pas faire. Il y en a pourtant qui l' apliquent à des chôses qu' on fait volontiers. "Celui qui nous dit ces choses là, ne se soucie pas de nous faire injure. Art de penser, c. à. d. se met peu en peine s' il nous fait injûre ou non: il n' est point arrêté par la crainte de nous faire injûre. _ Ce n' est pas le sens de ce verbe _ Bossuet a dit aussi du Chancelier Le Tellier. "Après ce triomphe de la Foi, il ne se soucioit plus de finir ses jours. _ Au contraire, il s' en souciait, il le desirait en quelque sorte, puisqu' il dit, nunc dimittis, etc. L' Auteur veut dire, qu' il voyait venir la mort sans regret. C' est une espèce de contre-sens. _ Et Maimbourg: "Ce Patriarche (Photius) qui se soucioit fort peu des foudres d' un Pape qui, etc. _ Il faut dire, qui se mettoit fort peu en peine, etc.
   SOUCIEUX, inquiet, pensif, morne, chagrin. Il ne se dit que de l' air, de la mine. "Air, visage soucieux, mine soucieûse.