Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI ROCHE


ROCHE, s. f. ROCHER, s. m. [2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Roche est le même que roc. "Eau, cristal de roche: couper, tâiller des roches, pour en faire du pavé. = Fig. Coeur de roche, coeur dificile à émouvoir.
   Mais moi jamais je ne veux la revoir.
   Que du château jamais elle n' aproche.
   M' entendez-vous? - - - J' entends. - - - Quel coeur de roche!
       Nanine.
= On dit proverb. vieille roche, des moeurs antiques. "Il n' y a point d' esprits ni de coeurs sur ce moule: il n' y en a plus de cette vieille roche. SÉV. "Homme, ami de la vieille roche. Noblesse de la vieille roche, fort anciène. _ Voy. ANGUILLE.
   ROCHER a la même signification que roc et roche. "Le pied, la pointe d' un rocher. "Son vaisseau s' est brisé contre un rocher. = "En st. prov. parler aux rochers, à des gens qui ne sont point touchés de ce qu' on leur dit. "Coeur de rocher, coeur insensible. "Cet homme est un rocher, un coeur de rocher.

ROCHèT


ROCHèT, s. m. [Rochè, 2e è moy.] Sorte de surplis à manches étroites. = Quelques-uns donent aussi ce nom à un surplis sans manches. * D' aûtres disent roquet. En ce sens, c' est un barbarisme, un provençalisme. Roquet est aûtre chôse. Voyez-le à sa place.

RôDER


RôDER, v. n. RôDEUR, s. m. [1re lon. surtout devant l' e muet. Il rôde, il rôdera.] Rôder, c' est courir çà et là. "On voit des gens qui rôdent autour de la maison. "Il a bien rôdé par le monde. = Il se dit plutôt en mauvaise qu' en bone part. = RôDEUR, qui rôde. "C' est un grand rôdeur; un rôdeur de nuit. St. fam.

RODOMONT


RODOMONT, s. m. RODOMONTADE, s. f. Fanfaron; Fanfaronade, en fait de bravoûre. "C' est un rodomont, il fait le rodomont.
   Il faut que je sois bien possédé du démon,
   Pour soufrir les hauteurs d' un pareil rodomon.
       Dest. le Glorieux.
Le Poète retranche le t à rodomont, pour l' exactitude de la rime. "Il se rend ridicule par ses rodomontades. = S' il falait en croire La Touche, quoiqu' on écrive rodomontade, on devrait prononcer rodemontade; mais il est douteux que ce fût le bel usage de son tems; et il est certain que ce n' est pas celui du nôtre.

ROGATON


ROGATON, s. m. 1°. Il se dit des papiers de nulle importance: de vieux rogatons: 2°. des mets, comuns ou réchaufés. "On ne nous a doné que des rogatons: 3°. des restes de viandes ramassées: ce gueux a sa besace toujours pleine de rogatons. = Dans tous les sens, il n' est que du st. fam. et s' emploie ordinairement au plur. = Au fig. il est du st. plaisant ou crit. "En quoi consistent les maximes prétendûes, qu' on admire en bâillant dans tous les rogatons emphatiques de vos Orateurs. Anon. "Il avoit reçu sur ce sujet (la Cour d' Amour) mille autres rogatons qui ne valoient rien. Sévigné.
   Il fit venir le maître d' Épicure,
   Et lui dit: Tiens, lis moi ce rogaton.
       Rouss.

ROGNE


ROGNE, s. f. ROGNER, v. act. ROGNEUR, s. m. ROGNEUX, EûSE, adj. ROGNûRE, s. f. [Mouillez le g: 2e e muet au 1er, é fer. au 2d, lon. aux trois dern.] Le 1er et le 4e ont raport au même sens, et n' en ont aucun avec le 2d, le 3e et le 5e. = Rogne, gale invétérée. Rogneux, qui a la rogne.
   ROGNER, retrancher quelque chôse des extrémités. "Rogner un manteau, les bords d' un chapeau, du cuir, etc. "Se rogner les ongles; et non pas rogner ses ongles. = Figurément, ôter à quelqu' un une partie de ce qui lui apartient. "On lui rogne sa portion. "On leur a bien rogné leurs droits, ou de leurs droits, de leurs gages, de leur pouvoir, etc.
   ROGNEUR, ne se dit que de ceux qui rognent, par fraude, les pièces de monaie. "On punit de mort les rogneurs, aussi bien que les Faux-Monoyeurs.
   ROGNûRE; la partie qui a été rognée. "Rognûre de papiers, de livres, de gants, d' ongles, etc.

ROGNON


ROGNON, s. m. ROGNONER, v. n. [Mouillez le g; 3e é fer. au 2d.] Rognon est le rein d' un animal. Il ne se dit que de certains animaux, dont les reins sont bons à manger: rognons de veau, de beuf, de mouton. = On dit populairement, tenir, mettre ou avoir les mains sur les rognons, pour dire, sur les hanches. "Il se promenait fièrement, les mains sur les rognons.
   Rem. Suivant La Touche, on dit indiféremment rognon ou roignon; mais on prononce rognon, quoique Ménage soit d' un sentiment contraire. _ Mais si l' i ne se prononce pas, pourquoi l' écrire? = Il ajoute qu' on dit ordinairement, rein, les reins, en parlant de l' homme; et rognon, en parlant des animaux; et que cependant l' Académie ne fait pas cette distinction. Elle l' a faite dans les édit. suiv. où elle ne dit rognon, que des animaux, dont les reins sont bons à manger, et ne le dit des hommes qu' en st. popul.
   ROGNONER n' a point de raport à rognon, pour le sens, quoiqu' il semble en être dérivé. Gronder, murmurer entre ses dents. Il ne fait que rognoner. C' est un mot du peuple.

ROGNûRE


ROGNûRE, voy. ROGNE.

ROGUE


ROGUE, adj. [Roghe: 2e e muet: l' u ne se prononce pas: il n' est mis là que pour doner au g un son rude, qu' il n' a pas devant l' e.] Fier, arrogant. "Des airs rogues: mine, humeur rogue. St. fam. et crit.

ROI


ROI, s. m. [Roa: monos. long au plur. Rois.] Monarque, Prince Souverain du premier ordre. "Roi d' Espagne, d' Angleterre, de France. Dans chaque Royaume, les sujets disent, le Roi tout court, en parlant de leur Souverain. "Craignez Dieu, dont le Roi est la vive image.
   Mais puisqu' il faut, en Roi, m' expliquer avec vous,
   Redoutez mon pouvoir ou du moins mon courroux.
       Rhadamiste.
  L' instant, qui fit les Rois, fit leur indépendance.
      Cromwel.
   Mais je suis malheureux, inocent, étranger.
   Si le Ciel t' a fait Roi, c' est pour me protéger.
       Mérope.
= En st. prov. Vivre en Roi, faire une dépense de Roi; être magnifique, faire une grande dépense. _ Avoir un coeur de Roi, être généreux et libéral. _ Être heureux comme un Roi, comme un petit Roi, extrêmement heureux. _ Parler en roi, faire le roi; être impérieux et hautain. _ C' est le roi des hommes, il aime à faire plaisir: ou il est d' un agréable comerce. _ Un plaisir de Roi, un grand plaisir. _ Roi en peinture, Roi de cartes, ou de théâtre; Roi faible et qui ne sait pas user de son pouvoir. _ Noble comme le Roi, d' une noblesse anciène et avérée. _ Être sur le pavé du Roi, dans la rûe, ou dans le chemin, qui ne dépend que du Roi. = On apèle le Lion, le roi des animaux; et l' aigle, le roi des oiseaux; c. à. d. le plus noble, le plus excellent. = Roi se dit aussi aux jeux des cartes et des échecs.

ROIDE


ROIDE, adj. ROIDEUR, s. f. ROIDILLON, s. m. ROIDIR, v. act. [Roade, deur, di-glion, di: 2e e muet au 1er: mouillez les ll au 3e. _ Les opinions et la pratique sont partagés sur la prononciation de ce mot. Plusieurs, avec Regnier, veulent qu' on prononce roade; d' autres, avec Richelet, sont pour rède. M. de Wailly, dans le Rich. Port. met entre deux crochets, où il place comme nous les caractères, signes de la prononciation, raide, raideur, raidir. L' Académie, en n' avertissant pas qu' on prononce raide, fait entendre qu' on doit prononcer roade. Quelques-uns enfin admettent celui-ci pour le discours soutenu, et l' autre pour la conversation. Je pencherais pour ce dernier sentiment.] Roide, 1°. Qui est fort tendu, et qu' on a de la peine à plier. "Être roide de froid; avoir le brâs roide, les jambes roides. = 2°. Tomber, être tué roide mort, d' un seul coup. = 3°. Montagne roide, dificile à monter. = 4°. Fig. En parlant des persones, inflexible, opiniâtre. "Homme, esprit roide. _ En st. prov. Roide comme une bârre de fer. = 5°. Roide, adv. Vite. "Cela va aussi roide qu' un trait d' arbalête. Pour bien jouer au volant, il faut jouer bâs et roide.
   ROIDEUR, qualité de ce qui est roide. "La roideur du brâs, des jambes. Être à cheval sans roideur. = Impétuosité de moûvement: balle poussé avec roideur. = La roideur d' une montagne, d' un escalier; la dificulté à monter et à descendre. = Inflexible fermeté ou sévérité: avoir de la roideur dans l' esprit, dans l' humeur. Aporter beaucoup, trop de roideur dans les afaires.
   Cette grande roideur des vertus du vieux âge,
   Heurte trop notre Siècle et les comuns usages.
       Misantr.
  ROIDIR, rendre roide. "Roidissez le brâs, la jambe. "Le froid lui avait roidi les jambes, et non pas avait roidi ses jambes = V. n. ou réc. Devenir roide. "Le linge mouillé roidit ou se roidit par la gelée. = Se roidir, en parlant des persones; tenir ferme; ne vouloir pas se relâcher. "Se roidir contre l' autorité, contre les obstâcles, contre les abus, contre l' adversité et les maux de la vie. "Loin de s' afaisser par le poids de l' infortune, son âme se roidit et s' éleve. Neuville. Or. Fun. du Maréchal de Belle-Isle.
   ROIDILLON, pente roide à monter dans un chemin. "Les chevaux eurent de la peine à monter ce roidillon.

ROIGNON


ROIGNON, Voy. ROGNON.

ROITELET


ROITELET, s. m. [Roa-telè: 2e e muet, 3e è moy.] Au propre, nom d' un oiseau fort petit et qui est toujours en moûvement. = Au fig. st. famil. et méprisant, un petit Roi. "Ce n' est qu' un roitelet.

RôLE


RôLE, s. m. ROLET, s. m. [1re lon. au 1er, 2e e muet au 1er, è moy. au 2d.] Rôle est 1°. en termes de Pratique, deux pages d' Écriture. Ainsi cinquante rôles font cent pages. = 2°. Liste, catalogue. "Le rôle des tâilles, des Soldats; de l' équipage ou des matelots. "Faire, dresser un rôle. = 3°. État ou liste des caûses, qui doivent se plaider au Parlement. = 4°. Ce que doit réciter un Acteur dans une pièce de Théâtre. "Aprendre, savoir son rôle. = 5°. Le personage représenté par l' Acteur, ou l' Actrice. "Le rôle de Pyrrhus, d' Andromaque. "Il ou elle joûe toujours les premiers rôles. "Il ou elle a bien joué son rôle. Voy. PERSONAGE. = Fig. st. famil. "Le Monde est une comédie où chacun joûe son rôle. ST. ÉVR. "Souvenez-vous que votre rôle est d' être plaisant. Voit. "C' est un hypocrite, qui sait bien jouer son rôle.
   Et sa perversité, que n' arrête aucun frein,
   Soutient ce rôle atroce avec un front d' airain.
       Palissot.
Avez-vous donc perdu, dites-moi, la parole?
Et faut-il qu' en ceci je fasse votre rôle.
MOL.
"C' est un beau rôle que celui de prendre en main la défense d' un homme innocent. Volt.
   ROLET, petit rôle. Il n' est d' usage qu' au figuré, n° 5° et dans ces deux locutions proverbiales. Jouer bien son rolet, son personage. Être au bout de son rolet, ne savoir plus que dire, ni que faire.

ROMAIN


ROMAIN, AINE, adj. ROMAINE, s. f. [Ro-mein, mène, mène: 2e è moy. 3e e muet aux 2 dern.] Nom de Nation. Les Romains, le peuple romain. "L' Église catholique Apostolique et Romaine, ou simplement l' Église Romaine. Breviaire, rituel, calendrier, rit romain. = Chifre romain, composé des lettres numérales, I, II, etc. IV. V. X, etc. par oposition au chifre arabe, 1, 2, 4, 5, 10, etc. = On dit d' un homme conu par une probité antique et par un grand amour pour la patrie, c' est un romain. _ Beauté romaine, femme qui a de grands traits bien marqués et un air, un port majestueux. = Laitûe romaine, espèce de laitûe longue, qu' on fait blanchir en la liant.
   ROMAIN, s. m. Caractère d' Imprimerie. Le grôs romain est entre le petit parangon et le grôs texte, et le petit romain entre la philosophie et la gaillarde. = Outre cela, dans chaque corps de caractère, on distingue le romain et l' italique. Les traits du romain sont perpendiculaires et ceux de l' italique sont inclinés.
   ROMAINE, instrument dont on se sert pour peser avec un seul poids. "Peser avec la romaine.

ROMAN


ROMAN, s. m. ROMANCE, s. f. ROMANCIER, s. m. ROMANESQUE, adj. [2e lon. au 2d et au 3e; la 3e est un e muet au 2d, un é fer. au 3e, un è moy. au 4e ce, cié, nèske.] Roman est un ouvrage contenant des aventures fabuleûses. "Le Héros, la Héroïne du Roman; style de roman. Cela tient du Roman. "Ce fut lui (Calprenède) qui mit les longs romans à la mode. Volt. "Le premier des Mathématiciens (Descartes) ne fit guère que des Romans de Philosophie. VOLT. "Le Télémaque, ce livre singulier, qui tient du roman et du poème, et qui substitue une prose cadencée à la versification. Id. = On dit d' une aventûre, qui parait surprenante, c' est une aventûre de roman; et d' un homme, qui afecte de parler et d' agir comme les Héros des romans et de les imiter, en ses façons de faire, que c' est un héros de roman. _ Prendre le roman par la queûe, aler dabord à la conclusion. = Toutes ces expressions sont tout au plus du st. médiocre, polémique ou critique. * Massillon en a employé une dans un de ses Sermons, en quoi je ne crois pas qu' on doive l' imiter. "L' Ambitieux regarde ces vertus romaines, qui ne veulent rien devoir qu' à la probité, à l' honeur et aux services, comme des vertus de roman et de Théâtre. _ Malgré un si grand exemple, je doute que le mot de roman soit convenable en chaire.
   ROMANCE est un mot emprunté des Espagnols. C' est comme qui dirait petit roman. "C' est une Histoire fabuleûse, mise en vers. "Le goût des romances et des Héroides avait pris dans ce siècle frivole; mais il n' a pas duré. À~ peine se souvient-on de deux ou trois.
   ROMANCIER, se dit des Auteurs des anciens romans, et par moquerie des Auteurs; des romans modernes. = Adj. Dorat dit de Volt.
   Historien romancier, romancier Philosophe.
   Dans ce vers, ce mot est dabord adjectif, ensuite substantif. = Rousseau l' emploie adjectivement au féminin.
   Les fâbles romancières.
   De ces fripiers d' impostures grossières.
   ROMANESQUE, qui tient du roman. "Aventure, style, histoire romanesque.
   Rem. Huet dit romaniste pour romancier, auteur de romans. Le Dict. de Trév. met romaniser, faire des romans. L' Ab. Des Fontaines voulait qu' on nomât romanédies ces drames romanesques qu' il apèle ailleurs Tragédies bourgeoises, ou comique larmoyant. Ce sont des mots forgés, bons pour le burlesque, le polémique et le satirique.

ROMPEMENT


ROMPEMENT, s. m. ROMPRE, v. act. [Ronpeman, ronpre: 1re lon. 2e e muet.] Rompre: je romps ou roms, etc. il rompt ou romt; nous rompons; je rompois ou rompais; j' ai rompu; je rompis; je romprai; je romprois ou romprais; romps ou roms, que je rompe, je rompisse, rompant, rompu. = 1°. Briser, mettre en pièces. "Rompre un bâton, une baguette, une porte. "Un coup de vent rompit le grand mât. "Se rompre une veine, une côte; se rompre le cou. = Fig. rompre ses chaines, ses liens, se mettre en liberté; ce qu' on aplique quelquefois aux passions. = On dit, proverbialement, rompre le cou à quelqu' un, lui faire perdre sa fortune; rompre la glace, faire les premiers pâs dans une afaire; rompre la tête à quelqu' un, lui faire trop de bruit.
   Monsieur! - - Retirez-vous, vous êtes une bête.
   - - - Monsieur, voulez-vous bien... - - - Vous me rompez la tête.
       Les Plaid.
  Allez donc et cessez de nous rompre la tête.
      Ibid.
Lui rompre les oreilles, lui redire les mêmes chôses; l' importuner; se rompre la tête à quelque chôse; s' y apliquer trop fortement ou inutilement. = 2°. Gâter, rendre impraticable. "Les pluies, les charrois ont rompu les chemins. "Rompre les ponts, les passages, les gués à l' énemi. = 3°. Détourner le moûvement droit de, etc. Rompre le vent, le fil, le cours de l' eau, la vague, l' impétuosité des flots. = Fig. rompre le fil de son discours, quiter brusquement la suite du discours et entrer dans une aûtre matière. = 4°. Détruire, faire cesser. Rompre l' amitié, l' aliance, un traité, un marché. = V. n. "Il a rompu avec moi: ils ont rompu ensemble. Et sans régime: ils ont rompu. "Il falloit se réformer, qui ne le reconoit? Mais il étoit encore plus nécessaire de ne pas rompre. BOSS.
   Non, non, j' ai fait sur vous un éfort inutile:
   Il faut rompre. - - - Il faut rompre! - - - Oui,
   Monsieur, à l' instant
       DEST. Le Dissipateur.
  De vos façons d' agir je suis mal satisfait,
  Contre elles, dans mon coeur, trop de bile~ s' assemble.
  Et je sens qu' il faudra que nous rompions ensemble.       Misantr.
"C' est toujours un malheur de rompre avec un ami, qui a du mérite et de bones qualités. L' Ab. de Mongault. Let. de Cic. à Atticus. = On dit dans le même sens, ou dans un sens aprochant, rompre un mariage, un voyage, un camp, une armée; une assemblée, une diète; son train, sa table, son ménage. Rompre le someil de quelqu' un. = 5°. Manquer à: "rompre son jeûne, le carême, la clotûre religieuse, sa règle, ses voeux, son serment. _ Rompre sa prison, s' évader; son ban, sortir des lieux où l' on était relégué. = 6°. Dresser, styler, exercer. "Je l' ai rompu au métier, aux afaires, à l' écritûre. = 7°. Se rompre, v. réc. ou rompre, v. n. celui-ci vaut souvent mieux. "Cette poutre se rompra ou rompra. "Cet arbre romt de fruits. Son épée se rompit ou rompit à la poignée. = On dit proverbialement, il vaut mieux plier que rompre, il vaut mieux céder que de se perdre. "Il rompra plutôt que de plier; il périra plutôt que de céder. = 8°. À~ tout rompre, adv. Tout au plus, au pis aller. "À~ tout rompre, cette terre ne vaut pas mille écus de rente. "À~ tout rompre, je suis en état de le payer. Il est du style familier et se met toujours à la tête de la phrâse.
   ROMPEMENT ne se dit qu' avec tête et au figuré; c' est un rompement de tête, auquel je ne puis résister; un grand bruit, ou un discours importun, ou une forte aplication à quelque chôse de dificile.

RONCE


RONCE, s. f. [1re lon. 2e e muet.] Arbuste épineux et rampant.
   De son généreux sang la trace nous conduit;
   Les rochers en sont teints; les ronces dégouttantes
   Portent de ses cheveux les dépouilles sanglantes.
       Phèdre.
= Au fig. et au pluriel, grandes dificultés. "Le chemin du Ciel est étroit, couvert de ronces et d' épines. "Je ne trouve partout que ronces et qu' épines.

ROND


ROND, RONDE, adj. RONDELET, ETTE, adj. RONDEMENT, adv. RONDEUR, s. f. [1re lon. 2e e muet au 2d, 3e, 4e et 5e; de, delèt, delète, deman, 3e è moy. au 3e et 4e.] Rond est ce qui est de telle figûre que toutes les lignes tirées du centre à la circonférence soient égales. "Corps rond, figure ronde: rond comme une assiète, comme une boule, st. prov. = Fig. en parlant des persones, qui agit sans façon: il est rond et franc: il est tout rond: c' est un homme tout rond, st. famil. = Compte rond, sans fraction. "Vous en demandez cinquante deux livres; faisons un compte rond; je vous en donerai cinquante.
   ROND, s. m. Figûre circulaire. Faire, tirer, tracer un rond, un grand rond: Faites un grand rond, se dit a une assemblée nombreuse qu' on veut mettre, placer, en rond, autour d' un objet qui est dans le centre.
   RONDE, s. f. La visite qui se fait la nuit autour d' une place de guerre ou dedans, ou dans un camp. = C' est aussi la troupe même, qui fait la ronde. = Fig. Faire la ronde, tourner autour d' une maison pour observer, pour épier. = À~ la ronde, adv. "Cent pas à la ronde; dix lieûes à la ronde, à l' entour.
   Un si galant exploit, réveillant tout le monde,
   On a porté par tout des verres à la ronde.
       Boileau.
  Ces fades complimens qu' on promène à la ronde.
      Palissot.
= Boire à la ronde, les uns après les aûtres.
   RONDELET, diminutif de rond. Il ne se dit que des persones. Qui a de l' embonpoint. "Il est rondelet, elle est rondelette. "Ta bourse est rondelette. "St. Ange. St. famil.
   RONDEMENT, uniment, également. "Il travaille rondement: ce cocher mène rondement: = Fig. sans façon, sans artifice. "Il y va rondement: il va rondement en besogne.
   RONDEUR, qualité de ce qui est rond. Il ne se dit point au figuré; pour franchise. * "Vous n' aportez point en cela votre rondeur ordinaire. Lettre de J.... à St C.

RONDACHE


RONDACHE, RONDELLE, s. f. RONDEAU, s. m. RONDIN, s. m. Les deux premiers se disent d' un ancien bouclier; le 2d est le diminutif du premier. Rondeau se dit et d' une petite pièce de poésie à refrains; et d' une pièce de Musique instrumentale, dont le premier couplet se repète aprês chacun des autres couplets. Rondin, morceau de bois de chaufage, qui est rond. _ C' est aussi un grôs bâton.

RONFLEMENT


RONFLEMENT, s. m. RONFLER, v. n. RONFLEUR, EUSE, s. m. et f. [Ronfle--man, flé, fleur, fleû-ze: 1re lon. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d, lon. au 4e.] Ils expriment l' action de faire un certain bruit de la gorge et des narines en respirant pendant le someil. "Il ne fait que ronfler toute la nuit: "Elle ronfle à faire tout trembler. Rouss. "Son ronflement s' entend de toute la maison. "C' est un ronfleur, une ronfleûse insuportable.
   Rem. 1°. On dit ronfler, au figuré, du canon, de la trompette, de l' orgue et d' autres instrumens. = 2°. Ronflement, dit, Th. Corneille, est meilleur aujourd' hui (à la fin du dernier Siècle) que du tems de M. De Vaugelas; et l' on peut s' en servir sans scrupule. La Touche observait quelque tems aprês que l' Acad. l' aproûve. "Le ronflement des vents, de la mer. Richelet. = Ronfleur ne se dit qu' au propre.

RONGEANT


RONGEANT, ANTE, adj. RONGER, v. act. RONGEUR, adj. m. [Ronjan, jante, , geur: 1re lon. 2e lon. aux 2 1ers, é fer. au 3e] Ronger c' est couper avec les dents à plusieurs et fréquentes reprises. "Chien qui ronge un ôs. "Les rats, les souris rongent la pâille, les tapisseries, le pain, etc. "Les vers rongent le bois, les habits. = Voy. FREIN, OS. = Fig. On le dit des soucis et des remords, qui agitent, qui tourmentent. "Il est rongé de remords. = Rongeur ne se dit qu' au figuré: le ver rongeur, le remords, qui tourmente le coupable.
   RONGEANT est un mot de M. Linguet; ses mercenaires et rongeantes fonctions.
   Rem. Massillon fait régir au passif la prép. de et l' infinitif. "Il est moins flaté de laisser tant d' hommes derrière lui, que rongé d' en avoir encôre, qui le précèdent. = Ronger son coeur est un hellénisme, une expression propre de la langue grecque. Mde Dacier s' en sert quelquefois. "Pourquoi vous tenez-vous là sans manger et sans dire une seule parole, rongeant votre coeur. Odyss. _ Voiture dit, se ronger le coeur, et celui-ci est plus français.

RONGE-MAILLE


RONGE-MAILLE, adj. Nom doné aux souris dans les fâbles, parce qu' elles rongent le fil, les filets, le linge.
   Un chat perfide et fin matois,
   Qui déjà, dans mainte bataille,
   Contre le peuple ronge-maille
   Avoit fait cent divers exploits.
       L' Ab. Reyre.

ROQUET


ROQUET, s. m. [Rokè: 2e è moy.] Autrefois, espèce de manteau. Aujourd' hui, petit chien très-comun. "Un vilain petit roquet.

ROQUETTE


ROQUETTE, s. fém. [Rokète: 2e è moy. 3e e muet.] Sorte de plante, qu' on mange en salade.

ROQUILLE


ROQUILLE, s. fém. [Roki-glie: mouillez les ll; 3e e muet.] La plus petite mesûre de vin, contenant le quart d' un septier. "On ne lui done que roquille à déjeûner.

ROSAIRE


ROSAIRE, s. m. [Rozère: 2e è moy. et long, 3e e muet.] Grand chapelet, qu' on dit en l' honeur de la Ste Vierge, et qui est composé de quinze dixaines d' Avé, et chaque dixaine précédée d' un pater.

ROSASSE


ROSASSE, ou ROSACE, s. fém. ou ROSON, s. m. [Rozace, zon.] Ornement d' Architectûre, en forme de rôse, dont on remplit les compartimens des voûtes.

ROSAT


ROSAT, adj. m. et fém. quoiqu' il ait la terminaison purement masculine. [Roza.] Il se dit de plusieurs compositions, dans lesquelles il entre des rôses. "Onguent, vinaigre, sirop, huile rosat.

RôSE


RôSE, s. fém. RôSERAIE, s. f. ROSIER, s. m. [Rô-ze, zerê, ro-zié: 1re lon. aux deux premiers, 2e e muet au 1er et 2d, é fermé au 3e, la 3e est un ê ouv. et long au 2d.] La Rôse est la reine des fleurs: il y en a de simples et de doubles, de rouges, de blanches et de jaûnes. = Quand on dit couleur de rôse, on entend parler des rouges. = Eau de rôse, ou plus comunément eau rôse, est de l' eau qu' on tire des rôses par l' alambic. Voy. Épine, gratecu, pot. On dit, proverbialement, qu' il n' y a point de rôse sans épines.
   Quand on veut, dans le monde, avoir quelque bonheur,
   Il faut légèrement glisser sur bien des chôses:
   On y troûve bien plus d' épines que de rôses.
       La Chaussée.
"J' aurois moissonné des épines sans trouver de roses; J' aurois cueuilli des maux, sans mélange d' aucun bien. Le Franc. Traduct. de S. Grég. de Naz. = Rôseraie, terrein qui n' est planté que de rôses. = Rosé se dit d' un vin de couleur rouge et vermeille.
   ROSIER, Arbrisseau, qui porte des rôses.

ROSEAU


ROSEAU, s. m. [rozo; 2e lon. au plur. Roseaux] Plante aquatique, dont le tige est droite, ordinairement creûse et remplie de moelle. "Faible roseau. "Couvrir une maison de roseaux. = Le P. Bouhours remarque fort bien que ce mot, dans notre langue, ne signifie qu' une plante marécageûse, foible et qui plie fort aisément. Ainsi au lieu de dire, ils lui frapaient la tête avec un roseau, il fallait mettre, avec une canne, parce que le mot de roseau ne done l' idée que d' une chôse faible et incapable de faire du mal. Rem. Nouv. = On dit, proverbialement, d' un homme mou et faible, qui n' a point de fermeté, qu' il est comme un roseau, que c' est un roseau qui plie à tout vent. = S' apuyer sur un roseau; mettre sa confiance en quelqu' un qui n' a pas la force ou l' autorité de nous soutenir.
   Crois-tu que quelque voix ôse parler pour lui?
   Sur quel roseau fragile a-t-il mis son apui?
       Esther.

ROSÉE


ROSÉE, s. f. [Rozé-e: 2e é fer. et long, 3e e muet.] Humeur fraiche, qui tombe le matin sur la terre. Le soir, on l' apèle serein. = On dit, figurément, st. famil. d' une viande qui est fort tendre, qu' elle est tendre comme rosée. = Rosée se dit, au figuré, de la grâce, dans le beau style. "Épanche sur moi la rosée de ta grâce. Jér. Dél.

RôSERAIE


RôSERAIE. Voy. RôSE.

ROSETTE


ROSETTE, s. fém. [Rozète: 2e è moy. 3e. e muet.] 1°. Ornement, ajustement fait en forme de rôse. = 2°. Encre rouge, faite avec du bois de Brésil. = 3°. Cuivre pur: "De la rosette, du cuivre de rosette. = 4°. Craie teinte en rouge, qui sert à peindre.

ROSIER


ROSIER. Voy. RôSE.

ROSSE


ROSSE, s. f. ROSSER, v. act. [Roce, cé: 2e e muet au premier, é fer. au 2d.] Rosse se dit d' un cheval sans vigueur. "Vieille, méchante rosse: c' est une rosse, une vraie rosse. = On dit, proverbialement, quand on excède quelqu' un de travail; il n' est si bon cheval qui n' en devint rosse. On dit, au contraire: jamais bon cheval ne devint rosse; on montre encôre, dans sa vieillesse, des restes glorieux de ce qu' on valait dans la force de l' âge.
   ROSSER, batre bien quelqu' un. "Je le rosserai bien, il fut rossé d' importance. L' Acad. le traite de populaire. Il semble que c' est trop dire. Je crois qu' il est du style familier.

ROSSIGNOL


ROSSIGNOL, s. m. [Roci-gnol: mouillez le g.] Petit oiseau de passage, dont le chant est renomé et fort célébré par les Poètes. = On dit d' une persone, qui a la voix douce et les cadences agréables, qu' elle chante comme un rossignol; qu' elle a une voix, un gosier de rossignol; qu' elle a des rossignols dans la gorge. = On apèle burlesquement un âne, rossignol d' Arcadie. = Rossignol est aussi le nom d' un instrument, dont se servent les Serruriers, pour ouvrir toute sorte de serrûres.

ROT


ROT, s. m. ROTER, v. n. [Ro, roté, 2e é fer.] Rot est une ventosité, qui sort, par la bouche, de l' estomac avec bruit. Roter, c' est faire un rot. _ On évite de se servir de ce mot. Acad.

RôT


RôT, s. m. ROTI, s. m. ROTIE, s. f. ROTIR, v. act. [Rôt, difère du précédent par l' ô qui est long: il est bref dans les aûtres. On écrivait autrefois rost, rosti, rostir, etc. Quand on suprima l' s, on la remplaça par l' accent circonflexe; mais cet accent ne convient que sur l' o du premier, qui est long.] Rôt, ou roti, viande rotie à la broche. = Quand Boileau travaillait à sa 3e satire, il demanda à M. Du Broussin, fameux gourmet, s' il fallait dire le rôt ou le roti: il répondit qu' on pouvait dire l' un et l' aûtre; mais que rôt était plus noble. Servir le rôt. Brossette. L' Acad. les dit tous deux indiféremment. Rôt s' est conservé dans les expressions proverbiales, ce qui prouve qu' il était aûtrefois le plus usité. Molière s' est servi de rôt dans les Femmes Savantes.
   L' un me brûle mon rôt en lisant quelque histoire.
Et La Fontaine.
   Qu' il a fait un larcin de rôt ou de fromage.
Et Boileau de roti dans la Satire des Femmes.
   Aussitôt de chez eux tout roti disparut.
Il y a aparence que la mesûre du vers a ocasioné dans l' un et l' aûtre cette préférence respective. = On dit, proverbialement, être à pot et à rôt dans une maison, y être fort familier, y manger habituellement. V. FUMÉE.
   ROTIE, tranche de pain qu' on fait rotir sur le gril ou devant le feu: rotie au vin, au beurre, à l' huile. "Mettre des roties sous des bécasses, des grives.
   ROTIR, c' est faire cuire de la viande à la broche. "Rotir une perdrix, un chapon, un lièvre, etc. = Faire rotir, c' est faire griller. Faire rotir de la viande, du poisson, du pain sur le gril. = C' est aussi faire cuire à la braise. Faire rotir des marrons. = Rotir, v. n. et se rotir, v. réc. "Prenez garde que la viande ne rotisse, ou ne se rotisse trop. Voy. Bouillir, Balai.
   ROTIR se dit aussi de l' éfet que caûse la trop grande ardeur du soleil. "Le soleil a roti tous les bourgeons des vignes. "Que faites-vous là à rotir, à vous rotir au soleil?

ROTATION


ROTATION, s. f. [Rota-cion.] Terme de Physique. La rotation, ou le moûvement de rotation, est le moûvement d' un corps qui tourne sur lui-même.

ROTER


ROTER, Voy. ROT sans accent.

ROTI


ROTI, ROTIE, ROTIR, voy. RôT avec l' accent circonflexe,

ROTISSERIE


ROTISSERIE, s. f. ROTISSEUR, EûSE, s. m. et fém. [Roticerie, ceur, ceû-ze: 3e e muet au 1er, lon. au 3e.] Le premier se dit du lieu où les Rotisseurs vendent leurs viandes roties, ou prêtes à rotir. "Aller à la rotisserie. Le second se dit de celui ou celle qui vend de telles viandes. = On apèle Rotisseur en blanc, un Rotisseur qui fournit les viandes lardées et prêtes à rotir, mais qui ne les vend point toutes roties.

ROTONDITÉ


ROTONDITÉ, s. fém. Qualité de ce qui est rond. Il ne s' emploie que dans le style plaisant, et ne se dit que de la tâille. Ailleurs on dit rondeur.
   J' aurois bon carrosse, à ressorts, bien plians,
   De ma rotondité j' emplirois le dedans.
       Le Joueur.

ROTULE


ROTULE, s. fém. Ôs placé antérieurement sur l' articulation du fémur avec les ôs de la jambe. "Il s' est cassé la rotule.

ROTûRE


ROTûRE, s. f. ROTURIER, IèRE, adj. et subst. ROTURIèREMENT, adv. [2e lon. au 1er, 3e e muet au 1er, é fer. au 2d, è moy. et long au 3e et 4e, , rié, riè-re, riè-reman.] Ils expriment l' état d' une persone ou d' un héritage, qui n' est pas noble. "Il est né dans la rotûre: il est roturier, elle est roturière: c' est un roturier. Les roturiers sont sujets à la tâille. _ Biens roturiers, possédés en rotûre.
   L' adj. et l' adv. signifient aussi, qui n' a rien de noble, qui est grossier. "Air roturier, mine roturière; manières, façons roturières, penser roturièrement.

ROUAGE


ROUAGE, s. m. ROûE, s. f. ROUELLE, s. f. ROUER, v. act. ROUET, s. m. [Rou--age, roû-e, rou-èle, rou-é, rou-è: 2e e muet au 2d, è moy. au 3e et 5e, é fermé au 4e. Dans le verbe l' e est entièrement muet au futur et au conditionel: il rouera, rouerait, pron. roûra, roûrè; 1re long. en deux syllabes.] Roûe, machine ronde et plate, qui, tournant sur son essieu, sert au moûvement de quelque chôse. "Roûe de charrette, de carrosse. Roûes d' une horloge, d' une poulie, d' un moulin. = Figurément, la roûe de la fortune, les révolutions et les vicissitudes des chôses humaines, st. famil.
   Qu' à son gré désormais la Fortune me joue,
   On me verra dormir au branle de sa roue.
       Boileau.
= En style proverbial, on dit d' une chôse fort inutile, qu' elle sert comme une cinquième roûe à un chariot ou à un carrosse. Pousser à la roûe, aider. = Roûe, suplice qu' on fait subir aux assassins et aux voleurs de grands chemins, etc. qu' on atache sur une roûe, posée sur un poteau, aprês leur avoir rompu les brâs, les jambes et les reins.
   ROUAGE est un terme collectif. Toutes les roûes d' une machine. "Tout le rouage est rompu: il faut racomoder, nétoyer, réparer le rouage.
   ROUELLE, tranche coupée en rond. "Rouelle de citron, de pome, de betterave; de veau, de thon, de saumon.
   ROUER, avec le seul régime simple, punir du suplice de la roûe. "On l' a roué vif; il a été condamné à être roué vif. = Figurément. Rouer de coups, ou, de coups de bâton, batre excessivement. = Par exagération, se faire rouer, s' exposer à être écrasé par les roûes des voitures. = Être roué de fatigue (st. famil.) ou simplement être roué, être tellement fatigué, qu' on a peine à se remuer. "Je suis roué; le trot de ce cheval m' a roué. = En termes de Marine, rouer un câble, une maneuvre, les plier en rond, en cerceaux.
   ROUÉ, s. m. Scélérat qui mérite la roûe. On ne le dit guère des scélérats vulgaires. On disait aûtrefois pendard; on dit aujourd' hui Roué. "Apollon (dans le Jugement de Midas) fait le rôle de ce que nous apelons un roué. Ann. Litt. "La jeune persone séduite par le roué d' H... Journ. de Litt. "Le Lord Bidulphe est un de ces roués, qu' on trouve sur les bords de la Tamise, comme sur ceux de la Seine, pour qui un attentat n' est qu' une gentillesse. L' Ab. De Fontenai. "Ces aimables roués de la Ville et de la Cour. Telle est l' agréable dénomination que se donent avec orgueuil la plupart de nos Seigneurs, pour se distinguer de leurs laquais, qui ne sont que des pendards Journ. de Mons. "Ce qu' on apèle un aimable roué; expression bien ridicule, mais qui n' est pas extraordinaire dans un tems où la langue la plus riche refuseroit des mots capables de répondre à la plus grande partie de nos incroyables extravagances. Mercure.
   ROUET, machine à roue, qui sert à filer. = Cercle de bois, qui se met au fond d' un puits, et sur lequel s' élève la maçonerie.

ROUGE


ROUGE, ROUGEâTRE, ROUGEAUD, AUDE, adj. ROUGEUR, s. fém. ROUGIR, v. act. et neut. [Rou-ge, jâtre, , jôde, geur, gir: 2e e muet au 1er, lon. aux trois suivans.] Rouge exprime une couleur semblable à celle du feu, du sang, etc. = Rougeâtre, qui tire sur le rouge. Rougeaud, haut en couleur, qui a naturellement le visage rouge. "Il est rougeaud. = S. m. "Un grôs rougeaud; une grosse rougeaude. St. famil.
   ROUGE, s. m. Couleur rouge. "Un beau rouge: un rouge vif, éclatant, brun, foncé, ou, pâle, déteint. = Le rouge lui monte au visage. C' est l' éfet de la honte ou de la colère. = Rouge, espèce de fard que les femmes se mettent sur le visage. "Elle met du rouge: le rouge gâte le teint.
   ROUGEUR, couleur rouge. "La rougeur du Ciel, des yeux, des lèvres. "La rougeur, lui est montée au visage: est-ce de honte, de pudeur ou de colère.?
   Devois-je, en lui faisant un récit trop sincère,
   D' une indigne rougeur couvrir le front d' un père.
       Phèdre.
Tache rouge qui vient au visage. "Elle a des rougeurs; elle est sujette aux rougeurs; il m' est venu une rougeur à la joûe.
   ROUGIR, actif, rendre rouge. "Rougir une porte, un plancher, un livre sur la tranche, des roûes de carrosse, etc. = Neutre, devenir rouge. "Les cerises comencent à rougir. = Faire rougir un fer, la pelle dans le feu. = Rougir de honte, de pudeur, de colère. "Cette fille rougit aussitôt qu' on lui parle. Elle répondit en rougissant. = Figurément. Avoir honte, confusion, quoiqu' on ne rougisse pas. Il régit de devant les noms et les verbes. "Il rougit aujourd' hui de l' éclat qu' il a fait.
   Délibère long-tems, consulte avant d' agir,
   Si de tes actions tu ne veux pas rougir.
       Le Franc.
À~ force d' avoir à rougir de trop d' excès, l' on ne rougit plus de rien. L' Ab. Du-Serre-Figon. "Je rougis de le dire. "L' ignorance ne rougit pas de se hasarder, et la passion ne rougit pas de se contredire. Cerutti, Apol. de l' Inst. = Il est aussi neutre sans régime.
   Coquette impertinente et folle au par-dessus,
   Qui soutient que la mode est de ne rougir plus.
       Dest. Le Dissip.
  Je ne suis point de ces femmes hardies,
  Qui, goûtant dans le crime une tranquille paix,
  On sut se faire un front qui ne rougit jamais.
       Phèdre.

ROUGE-GORGE


ROUGE-GORGE, s. m. ROUGEOLE, s. f. ROUGET, s. m. [L' e devant l' o est muet au 2d; 2e è moy. au 3e; rou-jole, .] Le premier est le nom d' un petit oiseau, qui a la gorge rouge; le troisième d' un poisson de mer, dont la tête et les nageoires sont rouges. Le second est une sorte de maladie épidémique, qui vient ordinairement aux enfans, et caûse des rougeurs au visage et par--tout le corps.

ROUGEUR


ROUGEUR, ROUGIR, voy. ROUGE.

ROUILLE


ROUILLE, s. fém. ROUILLER, v. act. ROUILLûRE, s. fém. [Roû-glie, rou-glié, gli-ûre: mouillez les ll: 1er lon. au 1er: Dans le verbe elle est aussi longue devant l' e muet: il rouille, il rouillera, etc.] Rouille, espèce de crasse rougeâtre, qui se forme sur le fer exposé à l' air. = C' est aussi une maladie qui ataque les tiges et les feuilles de plusieurs plantes. Rouiller, faire venir de la rouille. Rouillûre, éfet de la rouille. "La rouille mange le fer. "Ces fromens sont chargés de rouille. "L' humidité rouille le fer. "Il se rouille aisément. "Vieux pistolets tout rouillés; orge, avoine rouillée. "Ôter la rouillûre.
   Rouille et Rouiller s' emploient au figuré. "Ses Sermons et ses Oraisons funèbres (de Lingendes, Évêque de Mâcon) quoique mélés encore de la rouille de son tems, furent le modèle des Orateurs, qui l' imitèrent et le surpassèrent. Volt.
"L' oisiveté rouille l' esprit; le goût se rouille dans l' oisiveté. "M. de Grignan ne s' est point du tout rouillé en Province; il a un très-bon air à la Cour. Mde de Coulanges.
   Mais ici je me rouille et je me trouve bête.
       Gresset, Sidney.
"Qu' un homme, après avoir été long-tems absent de la capitale, y reviène, on le trouve ce qu' on apèle rouillé. Peut-être n' en est-il que plus raisonable; mais il est certainement diférent de ce qu' il étoit. Duclos. _ V. ROULER. Rem. n°. 1°.

ROUïR


ROUïR, v. act. [Rou-ir]. Faire tremper dans l' eau le lin, le chanvre, afin que les filets puissent se séparer facilement de la partie ligneûse. "Rouïr du lin, du chanvre. = V. n. Faire rouir du lin. "Le chanvre ne rouït pas bien dans l' eau courante.
   ROUï, \ïE, adj. Du lin, du chanvre rouï. = S. m. Sentir le rouï, se dit d' une viande qui a un mauvais goût, provenant de la mal--propreté du vâse où elle a été cuite.

ROULADE


ROULADE, s. fém. ROULAGE, s. m. ROULANT, ANTE, adj. ROULEMENT, s. m. ROULER, v. act. et neut. [2e lon. aux 3e et 4e, e muet au 5e, é fermé au dern. lan, lante, leman, .] Rouler, actif, est 1°. Faire avancer en faisant tourner. "Rouler une boule, un toneau, des pierres du haut de la montagne. "Se rouler sur l' herbe, sur un lit. _ Fig. st. famil. "Cet homme se roule sur l' or et sur l' argent. _ Dans le même style, rouler sa vie, pâsser sa vie. "Il roule doucement sa vie: il roule sa vie comme il peut. _ Dans un style plus noble, rouler, méditer de grands desseins dans sa tête. = 2°. Plier en rouleau. "Rouler un tableau, une pièce d' étofe, un papier. = 3°. V. n. Avancer en tournant. "Boule qui roule, voitûre qui roule aisément. "Il tomba, et roula du haut en bâs du degré. _ L' argent roule dans cette maison, il est en abondance:
   Je ne m' étone plus si céans l' argent roule,
   Et si des emprunteurs il atire la foule.
       Dest. Le Dissip.
  Tu plains mon sort: un gueux est toujours tendre.
  Tu paraissais bien moins compatissant,
  Quand tu roulais sur l' or et sur l' argent.
       Voltaire.
"L' argent roule dans cette Ville, dans cette Province, il circule dans le comerce. = 4°. Rouler sur, être l' objet, le sujet de. "La conversation, le discours, le livre roule sur cette matière: tout roule là dessus. _ Cette afaire roule sur lui, elle est abandonée à ses soins. = 5°. Servir alternativement. "Il roule avec un tel: ils roulent ensemble. "Ces régimens roulent entre eux, ils ont le même rang, et se priment alternativement. = 6°. En termes de Marine, être agité par les vagues, et pencher tantôt d' un côté, tantôt de l' aûtre. "Le vaisseau ne faisait que rouler: nous roulâmes toute la nuit. = 7°. Trouver moyen de subsister. "Sans bien, il roule toujours; il ne laisse pas de rouler. "C' est lui qui fait rouler toute la maison. = 8°. Errer, sans s' arrêter à aucun lieu. "Il y a long--tems qu' il roule par le monde. "Il a roulé dans toutes les Cours de l' Europe. = Fig. "Mille pensées diférentes lui roulaient dans l' esprit, mieux que, roulaient dans son esprit; lui pâssaient et repâssaient dans l' esprit, sans qu' il s' arrêtât à aucune.
   Rem. 1°. La Touche remarque qu' on devrait dire rouler les yeux; que cependant l' Acad. dit qu' on se sert plus ordinairement de rouiller que de rouler. Il rouloit ou rouilloit les yeux d' une manière horrible. Richelet observe qu' on dit l' un et l' aûtre, mais que le vrai mot est rouler. Dans la dern. édit. l' Acad. ne dit que celui-ci. "Il rouloit les yeux comme un possédé. On le fait aussi neutre: les yeux lui roulaient dans la tête.
   Voyez comme les yeux lui roulent dans la tête!
   Quels regards assassins! Quels gestes menaçans!
       Rousseau.
= Lui roulent dans la tête, et non pas, roulent dans sa tête. = 2°. * Rouler toute la Ville, toute la maison, rouler son corps, rouler l' escalier, ou, comme on dit en Provence, les escaliers, sont autant de barbarismes, où l' on fait rouler actif dans ces sens où il est neutre. BOILEAU parlait bien aûtrement.
   Et du bois et des clous meurtris et déchirés,
   Long-tems loin du perron roulent sur les degrés.
       Lutrin.
Richelet dit, rouler les degrés d' une montée de haut en bâs; et Marivaux: "Je me brisai hier d' une chute sur l' escalier; je roulai tout un étage; mais l' Acad. l' emploie neutralement: il tomba et roula du haut en bas du degré. = 3°. J' ai toujours aussi regardé comme un gasconisme cette expression, rouler carrosse, avoir un carrosse à soi. L' Acad. la traite de populaire. "Si ces pêcheurs de baleines s' avisent de rouler carrosse, tout est perdu. Ann. Litt. * En Provence, plusieurs disent trainer carrosse, qui est encôre plus mauvais. "Tu me manques de respect, disait un gros richard à une harangère: sais-tu que je traine carrosse? _ Eh! Monsieur, lui répondit-elle, où trouverait-on à vous aparier?
   ROULADE, est 1°. en st. famil. action de rouler de haut en bâs. "Nous avons fait une belle roulade. = 2°. En termes de Musique, agrémens que fait la voix en roulant. "Ce chanteur fait de belles roulades.
   ROULAGE, facilité de rouler. "Le roulage des voitûres, du canon.
   ROULEMENT, moûvement de ce qui roule. "Le roulement du carrosse fait grand bruit sur le pavé.
   ROULANT, qui roule aisément. "Carrosse bien roulant. = Beau et comode pour le charroi: chemin roulant, bien roulant. = Chaise roulante, voitûre à deux roues, trainée par un cheval de brancard. On les a apelées long-tems, avec raison, chaises rouantes.

ROULEAU


ROULEAU, s m. ROULETTE, s. fém. ROULIER, s. m. ROULIS, s. m. [Rou-lo, lète, lié, li: 2e è moy. au 2d, é fer. au 3e.] Le premier se dit, 1°. d' un paquet de ce qui est roulé: rouleau de papier, de ruban, de tabac, de louis d' or. Mettre en rouleau. = 2°. Gros bâton rond, servant à divers usages. Rouleau de pâtissier, de corroyeur, de lingère. = 3°. Au pluriel, rouleaux, pièces de bois rondes, sur lesquelles on fait rouler les fardeaux. _ Pierres en forme de cylindre, dont les Jardiniers se servent pour aplanir les alées.
   ROULETTE, 1°. espèce de petite roûe de bois, de fer ou de cuivre, servant à faire rouler la petite machine où l' on l' atache. = 2°. Petite chaise à deux roûes, dans laquelle on se fait tirer par un homme. = 3°. Petite boule de bois, de fer ou de cuivre, qu' on atache aux piés d' un fauteuil ou d' un lit pour les faire rouler. "Fauteuil, lit à roulettes. = 4°. Petit lit fort bâs, qui se peut mettre sous un grand lit.
   ROULIER, charretier public, qui voitûre des marchandises, des ballots, etc.
   ROULIS, terme de Marine. Agitation d' un vaisseau, qui penche beaucoup d' un côté, et puis aussi-tôt d' un aûtre. "Le roulis d' un vaisseau.

ROUPIE


ROUPIE, s. fém. ROUPIEUX, EûSE, adj. [Rou-pi-e, pi-eû, eûse: 2e lon. au 1er, 3e e muet au 1er, lon. aux deux aûtres.] Roupie, goutte d' eau qui pend au nez. _ Roupieux, qui a souvent la roupie au nez. "Il a toujours la roupie au nez: il a le nez roupieux. = Subst. "Un vieux roupieux; une vieille roupieûse. = L' Acad. dit de l' adj. qu' il est peu en usage.

ROUPILLER


ROUPILLER, v. n. ROUPILLEUR, EûSE, subst. [Roupi-glié, glieur, glieû-ze: mouillez les ll; 3e é fer. au 1er, lon. au 3e.] Roupiller, someiller à demi. Roupilleur, qui roupille toujours. St. famil..

ROUSSâTRE


ROUSSâTRE, adj. ROUSSEAU, adj. et masc. [Rou-sâtre, so: 2e lon. au 1er.] Roussâtre se dit des chôses. Qui tire sur le roux. "Drap, poil, eau roussâtre. = Rousseau se dit des hommes. Qui a le poil roux. "Il est rousseau, c' est un rousseau, un vilain rousseau.

ROUSSEUR


ROUSSEUR, s. fém. ROUSSI, s. m. ROUSSIN, s. m. ROUSSIR, v. act. et neut. [Rou-ceur, ci, cein, cir.] Rousseur, tache rousse au visage ou aux mains. "Avoir des rousseurs, des taches de rousseur. = Qualité de ce qui est roux: la rousseur du poil.
   ROUSSI, cuir de Russie, qui est teint en rouge. "Cela sent le cuir de roussi, la vache de roussi, le roussi.
   ROUSSIN, cheval entier, un peu épais, entre deux tâilles.
   ROUSSIR, actif: faire devenir roux. "Le feu a roussi cette étofe, ce linge. "Le grand air roussit le papier. = Neutre, devenir roux. "Les étofes blanches roussissent aisément. "S. m. Cela sent le roussi; l' odeur d' une chôse que le feu a roussie, et qui est prês de brûler.

ROUTE


ROUTE, s. f. ROUTIER, s. m. ROUTINE, s. fém. ROUTINÉ, ÉE, adj. [Rou-te, tié, tine, , né-e: 2e e muet au 1er, é fer aux deux dern.] Route est, 1°. chemin qu' on tient par terre ou par mer. "La grande route; la route ordinaire. Route de Lyon, de Paris, etc. "Prendre sa route: être en route. = Faire route vers se dit sur-tout en mer * Mde B... dit faire route à: "Il fit route à Cadix. Hist. des Tud. Celui-ci est tout au moins douteux. = Figurément: "La route était dificile au commencement du siècle (de Louis XIV), parceque persone n' y avait marché: elle l' est aujourd' hui, parce qu' elle a été batue. Volt. Chap. XXXII des beaux Arts. = Être hors de route, s' égarer. Il se dit au propre et au figuré. "Quiconque n' y saisit pas dabord certains principes, est hors de route. L' Ab. de Houteville. = 2°. Grande alée, percée exprês dans une forêt. = 3°. Au figuré, conduite qu' on tient, moyen qu' on prend. "Prendre la bone route pour parvenir. Suivre la route des Anciens. La route des dignités, des honeurs, de la gloire. "La route de la vertu, du Ciel.
   O Dieu, par quelle route inconue aux mortels
   Ta sagesse conduit ses desseins éternels!
       Esther.
= 4°. À~ vau-de-route, adv. Précipitamment, en désordre. "Ils s' enfuirent à vau-de-route.
   Rem. La Fontaine dit, prendre sa route, pour dire, faire son chemin.
   Va-t' en, prend ta route et me laisse.
On dit, faire route, sans article et sans pronom; mais on ne dit pas faire sa route, et encore moins, prendre sa route, excepté pour le dernier, avec la prép. par: "Il pris sa route par la Savoie. = Prendre la route de; prendre une autre route. "S' il me faut prendre quelque autre route, j' ai également besoin de vos conseils pour me déterminer. Cic. à Attic. Mong. "Ne sachant pas quelle route vous tenez. Ibid.
   ROUTIER est, 1°. Livre qui enseigne les routes de mer; les caps, les mouillages, etc. = 2°. En st. famil. Homme qui a beaucoup d' expérience, de pratique. Il ne se dit qu' avec vieux: c' est un vieux routier.
   Le Père, vieux routier, non des plus complaisans
   Voit le malade, l' examine,
   Et comprend d' abord à sa mine
   Que pour déraciner son mal en peu de tems
   Il falloit employer remèdes d' autre espèce,
   Et chasser d' abord la paresse.
       L' Ab. Reyre.
  Fuyez, mon fils, fuyez cette flamme infidèle,
  Disoit un jour, à son cher nourrisson,
  Un vieux routier de papillon.
       Idem.
  ROUTINE, capacité aquise tant par une longue habitude, que par le secours de l' étude et des règles. "Il fait cela par routine. "Il ne sait pas le plain chant, la musique; il chante par routine. Mde de G... dit, de routine. "Vous jouez très-joliment du clavecin. _ Hélas! cela se borne à trois ou quatre pièces, que je sais de routine. Th. d' Educ. "La routine du Palais, du monde, de la Cour.
   ROUTINÉ, ÉE, qui agit par routine. st. famil. = Depuis quelque tems, on dit routinier. "Peut-être ce chapitre pourra-t-il déplaire aux routiniers admirateurs des Romains. L' Ab. Grosier.

ROUTINIER


ROUTINIER, IèRE, adj. Mot forgé. "On n' améliora pas la marche lente et routinière des classes (de la Marine). Anon.

ROUTOIR


ROUTOIR, s. m. [Rou-toar.] Lieu où l' on fait rouïr le chanvre.

R' OUVRIR


R' OUVRIR, v. act. Ouvrir de nouveau. Il se dit au propre et figuré. "R' ouvrir la porte, la fenêtre. "Je dois craindre de r' ouvrir trop souvent mes plaies. Cicér. à Attic. Mongault.

ROUX


ROUX, ROUSSE, adj. [Roû, et devant une voyèle, rouz, rou-ce.] Qui est de couleur entre le jaûne et le rouge. "Poil, cheveux roux; barbe rousse. = Homme roux, femme rousse, qui est de poil roux. = Subst. masc. Couleur rousse. "Il ou elle est d' un roux ardent, d' un vilain roux.

ROYAL


ROYALE, ALE, adj. ROYALEMENT, adv. ROYALISTE, adj. et subst. ROYAûME, s. m. ROYAUTÉ, s. fém. [Roa-ial, iale, leman, liste, roa-iô-me, o-té: 3e e muet au 2d et au 3e, lon. au 5e, dout. au 6e.] Royal, ale, 1°. qui convient à un Roi. "Trésor, sang royal. Maison royale. Manteau royal. = 2°. Juste, généreux, libéral, honête. "C' est un royal homme, une royale femme. St. famil. Acad. Royal homme forme une inversion dûre, à mon avis. Le féminin peut plus aisément précéder. "Une si royale main. Boss. "Cette royale maison. La Bruy. = Le Prés. Hénaut l' emploie substantivement au pluriel. Il dit, les royaux, pour les troupes du Roi, l' armée royale. Je ne me souviens pas d' avoir vu cette expression dans d' autres Historiens.
   ROYALEMENT, d' une manière royale, (n°. 2°.) noblement, magnifiquement. "Il vit royalement: il nous a traités royalement.
   ROYALISTE, qui suit le parti du Roi. On ne le dit que des guerres civiles de France et d' Angleterre. "Les Royalistes et les Ligueurs. Les Parlementaires et les Royalistes.
   ROYAûME se dit de l' État, et royauté de la dignité d' un Roi. "Le Royaume de France. Abdiquer la royauté: usurper la royauté.
   Rem. 1°. On dit, le Royaume des Cieux, et non pas du Ciel. = 2°. Royauté se dit de celui qui est Roi, et non de la Nation gouvernée par un Roi. * "Les Polonois, dit le P. Barre (Hist. d' Allem.) raportent à Othon III la première institution de leur royauté. Il devait dire, raportent à, etc. le titre de Roi doné à leur Souverain.

RU


RU, s. m. Canal d' un petit ruisseau. "Les pluies ont fait deborder le ru.

RUADE


RUADE, s. fém. Action d' un cheval, âne, ou mulet qui rûe, qui jette le pied, ou les pieds de derrière en l' air.

RUBAN


RUBAN, s. m. RUBANIER, NIèRE, s. m. et f. [3e. é fer. au 2d, è moy. et long au 3e; nié, nière.] Ruban, tissu de soie, de fil, de laine, etc. qui est plat et mince, qui n' a guère ordinairement que trois ou quatre doigts de large.
   Chacun de tes rubans me coûte une Sentence.
       Les Plaideurs.
= Rubanier, ière, celui, celle qui fait du ruban.

RUBICOND


RUBICOND, ONDE, adj. [Le d du 1er ne se prononce point: 3e lon. 4e e muet.] Rouge, en parlant du visage. "Visage rubicond; face rubiconde. St. plaisant. On reproche aux ivrognes d' avoir la face rubiconde, le nez rubicond.

RUBIS


RUBIS, s. m. Sorte de pierre précieûse, d' un rouge plus ou moins vif.

RUBRICAIRE


RUBRICAIRE, s. m. RUBRIQUE, s. f. [Rubrikère, rubrike: 3e è moyen et long au 1er, e muet au 2d.] Rubrique est, 1°. espèce de terre et de craie rouge. = 2°. Au pluriel, titres qui sont dans les Livres de Droit. = 3°. Règles qui sont au comencement ou dans le cours du Bréviaire et du Missel, pour enseigner la manière dont il faut dire ou faire l' Ofice divin. = 4°. Figurém. st. famil. Rûse, finesse, détour, adresse. "Il sait toute sorte de rubriques, toutes les vieilles rubriques. On dit, par mépris, d' une vieille loi, d' un vieux titre, que c' est une vieille rubrique. Trév. = * Pluche dit par rubrique, adverbialement. "Des cris perçans, qu' on jetoit par superstition~ et par rubrique. _ Je n' ai vu cet adverbe dans aucun aûtre livre.
   RUBRICAIRE, qui sait bien les rubriques. "Il est grand rubricaire.

RUCHE


RUCHE, s. f. Sorte de panier, en forme de cloche, où l' on met des abeilles.
   La ruche retenti de longs bourdonemens.
       Le Franc.
= On le dit aussi, et du panier, et des abeilles qui sont dedans. "Il a tant de ruches.

RUDANIER


RUDANIER, IèRE, adj. Terme populaire. Rude à ceux à qui il ou elle parle. "Il est bien rudanier. Beauté rudanière. _ Marivaux écrit Rude-ânier. "Elle a toujours été rude-anière envers moi. _ Ailleurs, il écrit rudanier.

RUDE


RUDE, adj. RUDEMENT, adv. RUDESSE, s. fém. RUDOYER, v. act. [2e e muet au 1er et au 2d, è moy. au 3e; rude, deman, dèce, doa-ié. Devant l' e muet, l' y se change en i: il rudoie, pron. ru-doâ. Au futur, cet e muet ne se prononce pas: il rudoiera, etc. pron. ru-doâ-ra, etc.] Rude, en parlant des chôses, est, 1°. Âpre au toucher. "Toile, peau, poil rude. = Âpres au goût: "Du vin qui est rude. = 2°. Raboteux: "Chemin rude. _ Dificile, pénible: "Travail, métier bien rude. _ Qui fatigue: Voitûre rude; cheval qui a le galop rude. = 3°. Par extension, il se dit de plusieurs chôses qui choquent les yeux ou les oreilles: "Avoir le visage, l' air, le regard rude, les yeux, les manières rudes, la voix, la prononciation rude, le style rude. = "Peintre qui a le pinceau rude, barbier, cavalier qui a la main rude. = 4°. Violent, impétueux; rude choc, assaut, ataque, secousse, tempête. _ Fig. famil. rude joueur, homme à qui il ne fait pas bon se jouer. = 5°. Dificile à suporter. "Tems saison, froid rude. _ Figurém. les tems sont rudes, on a beaucoup à soufrir, on a peine à vivre. = 6°. Apliqué aux persones, fâcheux: humeur, esprit rude: maître qui est rude à ses écoliers: il est rude aux paûvres gens. = 7°. Austère, sévère. "La règle de ces Religieux est bien rude. Voy. Austère.
   Rem. Rude se plait à précéder le substantif.
   ......O fortune jalouse!
   Pouvois-tu m' accabler par de plus rudes coups?
       Didon.
"De rudes épreuves. "Un rude travail. V. plus haut n°. 4°.
   RUDEMENT a plusieurs des sens de rude. D' une manière rude. "Il lui a parlé, il l' a traité trop rudement: il a été rudement ataqué: cheval qui va, qui galope rudement. "Marquez-moi sur-tout quelle a été la contenance des consuls, lorsqu' ils se sont vus mener si rudement. Cic. à Atticus. Mongault. = En st. prov. Aler rudement en besogne, travailler vigoureûsement et sans relâche. "Il mange, il boit rudement, il y va rudement. = Extrêmement.
   L' animal, dis-je, éloquent et docile,
   En moins de rien fut rudement habile.
       Ververt.
  RUDESSE, qualité de ce qui est rude. "La rudesse du poil, de la barbe, de la peau. La rudesse de la voix, du pinceau, du style. = Ce qu' il y a de rude dans l' esprit, l' humeur, les manières. "Traiter quelqu' un avec rudesse. "La rudesse du traitement qu' on lui a fait.
   Son coeur, né pour la guerre, et non pour la tendresse,
   Des camps, qui l' ont nourri, garde encor la rudesse.
       Sémiramis.
= On ne le dit point dans les aûtres sens de rude.
Rem. Rudesse, au pluriel, se dit des actions, des paroles, dont la rudesse est le principe. Ainsi, l' on dit, la politesse, et des politesses, la grossièreté et des grossièretés. "Parce que je ne suis pas assez heureuse pour réver comme vous (en mauvaise compagnie), je m' impatiente, et je dis des rudesses. Sév. Hors de là on n' emploie que le singulier. On dit à plusieurs, ou de plusieurs, votre rudesse, leur rudesse, et non pas vos rudesses, leurs rudesses.
   RUDOYER, traiter rudement en paroles, st. famil. Il ne faut pas rudoyer les enfans. = Mener rudement de l' éperon, de la houssine: rudoyer un cheval.

RUDIMENT


RUDIMENT, s. m. [Rudiman.] Petit livre, qui contient les premiers principes de la Langue latine. "Il aprend le rudiment: il en est encore au rudiment. = Figurém. st. famil. "Cet homme est au rudiment, il est encore novice dans la profession dont il se mêle: il faut le renvoyer au rudiment, aux premiers principes de ce Art.
   Rem. On disait autrefois rudiments, au pl. pour élémens. "Les rudimens de la Grammaire, de la parole de Dieu. L' Académie le met encore: les rudimens, les principes de quelque conaissance que ce soit. C' est du vieux style: on dit, élémens.

RUDOYER


RUDOYER, voy. RUDE, au comencement et à la fin.

RûE


RûE, s. f. RUELLE, s. f. [Rû-e, ru--èle: 1re lon. au 1er, 2e è moy. au 2d.] Rûe, chemin dans une ville, bourg ou village, entre des maisons ou des murâilles. "Grande ou petite, large, longue rûe, ou rûe étroite, etc. "Maison, qui regarde, qui avance sur la rûe. "Cela s' est pâssé en pleine rûe.
   Rem. Ce mot est bâs, et l' on ne s' en servirait~ pas aujourd' hui dans une Ode, comme~ a fait autrefois Malherbe.
   Devons-nous douter qu' on ne voye...
   L' encens germer dans nos buissons,
   La myrrhe couler dans nos rues.
L' hyperbole est excessive, dit Ménage, et le mot de rûes est bâs. = On doit dire, dans la rûe, et non pas en rûe. Je l' ai rencontré dans la rûe. Outre que c' est l' usage, c' est qu' il faut éviter l' équivoque avec l' expression, en rut, qui présente un sens peu honête.
   Que diable, si matin que fais-tu dans la rue?
       Les Plaid.
  Vite un flambeau, j' entends mon père dans la rue.
      Idem.
= On dit d' une chôse comune, qu' elle court les rues. "Honête homme! Et qui ne l' est pas? c' est un mérite qui court les rûes. MARM. _ Il est fou à courir les rûes, ou les champs, extrêmement fou. = Dans l' Ann. Litt. on apèle trainées des rues, les viles courtisanes abandonées à la canaille. Cette expression est bien bâsse: je doute qu' elle soit française. "Le plus vil débauché qui ait pu exister, qui a passé sa vie avec les trainées des rues, dans les plus infâmes réduits.
   RUELLE est 1°. petite rue. "Une ruelle qui aboutit à une grande rûe. = 2°. Espace qu' on laisse entre un des côtés du lit et la murâille. "Il n' y a pas assez de ruelle. = Fig. Passer sa vie dans les ruelles, être souvent chez les Dames, se plaire à leur conversation. Propôs de ruelles, frivoles et souvent précieux. Le jargon des ruelles. St. fam. critiq. et moqueur.

RUER


RUER, v. act. et neut. [ru-é: devant l' e muet l' u est long: il rûe. Au futur et au conditionel, cet e muet ne se prononce pas: il ruera, ruerait; prononc. rûra, rûrè: 1re lon. 2e è moy. au 2d.] Ruer, actif, jeter avec impétuosité. "Ruer des pierres. _ Ruer, fraper de grands coups. "Il rue à tort et à travers; il frape à droite et à gauche dans la foule. = V. n. Sans régime. Jeter une pierre. "Il gage qu' il ruera plus loin que vous. = V. réc. Se jeter impétueusement sur. "Il se rua sur lui, et le maltraita. "On se rua sur la collation, et bientôt, il n' en resta plus rien. = Ruer se dit aussi neutralement, des animaux qui jètent les pieds de derrière en l' air avec force. "Prenez garde à ce cheval, à ce mulet, il rûe. = Ruer en vache, se dit d' un cheval, qui frape du pied de devant, contre l' ordinaire des chevaux. = On dit populairement, d' un homme, qui ne fait ni bien ni mal, qu' il ne mord, ni ne rûe; et d' une chôse qui n' est ni nuisible ni utile, qu' elle ne mord ni ne rûe.
   REM. Ruer n' est que du st. fam. Aûtrefois on ne le croyait pas indigne de la haute Poésie.
   Elle sauva le Ciel et rua le tonerre,
   Dont Briare mourut.
       Malherbe.
M. Chevreau, dans ses observations sur Malherbe, troûve que lancer eut été plus doux et plus beau, que ruer. M. Ménage pensait, au contraire, que le mot ruer n' est pas mauvais; et il remarque que M. de Segrais l' emploie souvent dans l' Énéide. Aujourd' hui on ne s' en servirait pas avec succês dans le beau style.

RUGIR


RUGIR, v. n. RUGISSANT, ANTE, adj. RUGISSEMENT, s. m. [Rugir, san, sante, ceman: 3e lon. au 2d et au 3e, e muet au 4e.] Ils expriment le cri du lion. "Un lion qui rugit: le lion rugissant: une lione rugissante: le rugissement du lion.
   Un moment a changé ce courage invincible;
   Le lion rugissant est un agneau paisible.
       Esther.
  Par leurs rugissemens les lionceaux demandent
  L' aliment qu' ils atendent
  des mains du Créateur.
       Le Franc.
= On dit, d' un homme en colère, qui fait beaucoup de bruit, qu' il rugit comme un lion.

RUINE


RUINE, s. f. RUINER, v. act. RUINEUX, EûSE, adj. [Ruine, en vers ru-ine, ru-iné, neû, neû-ze: 2e e muet au 1er, é fer. au 2d, lon. aux 2 dern.] Ruine est, 1°. au propre, dépérissement, destruction d' un bâtiment. "Bâtiment, qui est, qui tombe, qui s' en va en ruine, qui menace ruine. = Batre en ruine, se dit proprement, d' une forteresse qu' on bat à coups de canon; et figurément, d' un homme, qu' on ataque avec tant de force dans une dispute, qu' on ne lui laisse aucun moyen de se défendre. = 2°. Ruines, au plur. les débris d' un bâtiment abatu. = 3°. Figurément, Perte de biens. "Cette afaire a causé sa ruine, la ruine de sa maison. Depuis long-tems il courait à sa ruine. "La France touchait à sa ruine, au milieu de ces prospérités aparentes. Volt. = 4°. Ce qui est la cause de la ruine. "Il a été la ruine de sa famille: cette aventûre a été la ruine de sa réputation. _ 5°. On dit, figurément, s' élever sur les ruines de.... Faire sa fortune sur les ruines d' autrui. Voy. DÉBRIS et DÉCADENCE.
   RUINER, abatre, démolir. Ruiner un château, une ville. "La tempête a ruiné tous les arbres de son verger. = Causer la perte du bien. "Il a ruiné sa famille. "Ce procês l' a ruiné; ou de l' honeur, du crédit: cette afaire l' a ruiné d' honeur et de réputation; ou de la santé: ses débauches ont ruiné sa santé. = Se ruiner: ce château comence à se ruiner: la santé se ruine par les débauches. "Il s' est perdu; il s' est ruiné. = Ruiné, ée, adj. Bâtiment ruiné, famille ruinée: homme ruiné de débauches. "Il est ruiné d' honeur et de réputation. = S. m. "Ils s' étoient ligués entre eux, et d' autres ruinés. Me. Cochu.
   Rem. 1°. Ruine et Ruiner sont de deux syllabes, en prôse, et de trois, en vers.
   Leurs mains en ruines fécondes.
       Rouss.
  Il venoit de signer votre ruine entière.
      Dest.
  Ce prodige de cruauté,
  Par qui vous semblez entreprendre
  De ruiner votre beauté.
       Malherbe.
  Et de peur que la terre
  Ruine, en s' éboulant, cet apareil de guerre.
      Brebeuf.
   Il la ruinera, si l' on le laisse faire.
       Les Plaid
  J' ai ruiné Cléon....
      Dest.
  ....Eh bien! me voilà ruiné,
  De votre propre main je suis assassiné.
       ID. Ibid.
= 2°. Ruine, employé absolument et sans régime, ne s' emploie qu' au pluriel: "Ne faites-vous pas nettoyer votre terrasse, dit Mde. de Sévigné; cette ruine me déplait. _ On n' y regarde pas de si près dans une lettre. Ailleurs, on dirait, ces ruines me déplaisent. Ruine, au sing. signifie dépérissement; au plur. débris. = 3°. Au contraire, avec les pronoms possessifs et au figuré, on ne l' emploie qu' au sing. Ma ruine, et non pas, mes ruines, comme a dit un Auteur. = 4°. Menacer ruine se dit sans régime, dans le propre comme au fig. "Il s' élève dans mon âme un doute, qui~ menace ruine à mes espérances. Anon. À~ employer deux régimes, il falait du moins se servir de ceux du verbe menacer, et dire: qui menace d' une entière ruine mes espérances. Ce n' est pas que cette phrâse valut guère mieux, mais elle serait du moins plus conforme à l' analogie.
   RUINEUX, qui menace ruine. Édifice, fondement ruineux. = Figurément: Cet homme bâtit sur des fondemens ruineux; il fonde ses espérances sur des chôses peu solides. = Qui cause de la perte, du domage: emploi ruineux, afaire ruineûse. "Guerre ruineuse pour tous les partis. Voltaire. = Mde. de Sévigné a employé ruineûsement. "Votre pauvre frère est toujours tristement et ruineusement à Rennes. Il s' y ruinait par une grande dépense en qualité de Colonel d' un Régiment de Milice Bourgeoise.

RUISSEAU


RUISSEAU, s. m. RUISSELANT, ANTE, adj. RUISSELER, v. n. [Rui-so: 2e lon. au plur. ruisseaux: rui-selan, lante, ; 2e e muet, 3e lon au 2d et au 3e, é fer. au 4e.] Ruisseau, 1°. courant d' eau. "Le doux murmure d' un ruisseau. "Le cours d' un ruisseau. "Grôs, petit ruisseau. "Ce n' est pas une rivière, ce n' est qu' un grôs ruisseau. = On dit, proverbialement, les petits ruisseaux font les grandes rivières, de petites sommes réunies, en font une grande. = 2°. Le canal par où passe le courant d' eau. "Le ruisseau est à sec. "Creuser, élargir, curer un ruisseau. = 3°. L' eau qui coule au milieu des rûes. "Il tomba au milieu du ruisseau. = Cette nouvelle a été ramassée dans le ruisseau: (st. prov.) Elle a été prise chez le bâs peuple. = 4°. L' endroit par où l' eau coule dans les rûes. "Il n' y a pas une goutte d' eau dans le ruisseau. = 5°. Fig. Ce qui coule en abondance. "Des ruisseaux de vin, de sang, de larmes.
   RUISSELER, couler en manière de ruisseau. "L' eau ruisselait par divers endroits. "Le sang ruisselait de ses plaies. "Tout l' Empire ruisseloit du sang des Martyrs. Boss. "Le sang ruisseloit dans l' Empire. Id.
   RUISSELANT, qui ruissèle. "Des eaux ruisselantes. "Le sang ruisselant de ses plaies.

RUMEUR


RUMEUR, s. f. 1°. Bruit tendant à émotion, à querelle. "Il y avait rumeur parmi le peuple: toute la ville était en rumeur. = 2°. Bruit qui s' élève tout-à-coup, éfet de la surprise. "Une rumeur subite s' éleva dans la ville. "La rumeur publique l' acusait de ce meurtre.

RUMINANT


RUMINANT, ANTE, adj. RUMINATION, s. f. RUMINER, v. a. et n. [Ruminan, nante, na-cion; né: 3e lon. aux deux prem. é fer. au dern.] Ils se disent de certains animaux, qui remâchent ce qu' ils ont déjà avalé. "Les boeufs ruminent: ce sont des animaux runimans. "La rumination est l' action de ruminer. = Le verbe seul se dit au fig. Penser et repenser à... "Il y a long--tems qu' il ruminait ce dessein. "Il rumine quelque chôse dans sa tête. "Aprês avoir bien ruminé, il prit son parti.

RUPTûRE


RUPTûRE, s. f. [2e lon. 3e e muet.] 1°. Action, par laquelle une chôse est rompûe. "La ruptûre d' une porte, d' un cofre, d' un cabinet, d' une veine, d' une artère, etc. Académie. = 2°. Hernie, descente de boyau. = 3°. Figurément, Division entre des persones aûtrefois unies par traité, par amitié, etc. "Il y a ruptûre entre ces deux Courones. "Lequel des deux est Auteur de la ruptûre? "La scène finira par une ruptûre en forme. Dest.
   Rem. Le P. Bouhours n' admettait ruptûre, qu' au figuré, et presque toujours sans régime. L' Académie est tout-à-fait oposée au sentiment de cet habile Gramairien: elle dit ruptûre et au propre et au figuré, et avec un régime des chôses. Voyez plus haut.

RURAL


RURAL, ALE, adj. 1°. Il se dit des fonds de terre. Qui est situé à la campagne. "Fonds rural, servitude rurale. "Des biens, des fonds ruraux. = Doyen rural, Curé comis par l' Évêque pour avoir inspection sur les Curés d' un certain district.

RûSE


RûSE, s. f. RUSÉ, ÉE, adj. RUSER, v. n. [Rû-ze, ru-zé, zé-e, : 1er lon. au 1er, 2e e muet au subst. é fer. à l' adj. et au verbe.] Rûse, finesse, artifice. Rusé, qui a de la rûse, qui est plein de rûses. Ruser, se servir de rûses. "User de rûses. Ses rûses sont conûes. Quelle rûse! Voyez la rûse! "Rûse de guerre. "Il est bien rusé, elle est bien rusée. = Subst. "C' est un fin rusé, une fine, une petite rusée. "On dit qu' il est permis de ruser à la guerre. "Ce chicaneur rûse, ne fait que ruser.
   Le Ciel ne m' a point fait d' une étofe assez fine
   Pour faire un courtisan. Je n' en ai ni la mine,
   Ni le jeu. Je ne sais ni mentir, ni ruser,
   Je fais profession de ne rien déguiser.
       Le Flateur.
REM. Rusé, contre l' ordinaire des adjectifs terminés en é fermé, précede quelquefois le substantif. "C' est un rusé manoeuvre, un rusé matois. "Clovis, conquérant audacieux, rusé politique. Moreau. C' est que rusé est un pur adjectif, et qu' il n' est interdit qu' aux adjectifs verbaux ou aux participes employés adjectivement, de précéder le nom qu' ils afectent. Voy. ADJECTIF. V. n°. 4°.

RUSSE


RUSSE, adj. et subst. [Ruce; 2e e muet.] Qui est de Russie. On disait autrefois les Russiens; et Fontenelle a encore dit, la Langue Russienne, la Nation Russienne, les Armées Russiennes. Le Gendre dit aussi, les Russiens. On dit aujourd' hui, les Russes, la langue russe, etc.

RUSTAUD


RUSTAUD, AUDE, adj. et subst. RUSTICITÉ, s. f. RUSTIQUE, adj. RUSTIQUEMENT, adv. RUSTIQUER, v. act. RUSTRE, s. m. et adj. [Rustô, tôde, ticité, tike, keman, , rustre: 2e lon. aux deux prem. e muet au dern. 3e e muet au 4e et au 5e, é fer. au 6e.] Rustaud et rustre, ont le même sens. Qui est grossier, qui tient du paysan. "Il est bien rustaud: il~ a l' air rustaud, la mine rustaude; l' air rustre, {C506a~} la mine rustre. "C' est un grôs rustaud, un vrai, un grôs rustre; un paysan grossier; et par extension, un homme impoli, grôssier et brutal. = Rustauderie est un mot de Mde. de Sévigné. Rusticité. "Corbinelli me trouve un peu enrôlée dans la sacrée paresse; mais je ne sais si ma santé ne me rendra point ma rustauderie.
   RUSTICITÉ, grossièreté, rudesse, en parlant des persones. "Rusticité dans les manières, dans le langage. La Touche, au comencement de ce siècle, observe comme une chôse digne de remarque, qu' il est employé par de bons Écrivains, et qu' il est dans le Dict. de l' Acad.
   RUSTIQUE, 1°. champêtre. "Vie, air, danse rustique.
   Prêt à quiter pour toi la rustique musette.
       Gresset.
En prôse on dirait, la musette rustique.
  Sous ses rustiques toits, mon père vertueux,
     Fait le bien, suit les loix, et ne craint que les Dieux.       Mérope.
"La Maison Rustique, titre d' un Livre, qui traite du ménage de la campagne. = 2°. Inculte, sans art. "On trouve dans ce canton des promenades rustiques et solitaires. "Ce pays a un air rustique, qui plait. = 3°. Grossier, rude, peu poli. "Air, physionomie rustique; manières rustiques. Voy. IMPOLI.
   Il est vrai qu' il n' est point d' animaux plus rustiques,
   Ni plus impertinens, que certains domestiques.
       Rousseau.
  RUSTIQUEMENT, d' une manière rustique, grossière. "Il parle, il agit rustiquement.
   RUSTIQUER, terme d' Architectûre, crépir une murâille en façon d' ordre rustique.

RUT


RUT, s. m. Il se dit des cerfs, et de quelques autres bêtes faûves, quand elles sont en amour. "Quand les cerfs sont en rut. Pendant le rut,