Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI REPTILE


REPTILE, s. m. [1re è moyen, dern. e muet.] Il se dit des animaux qui rampent, qui se traînent sur le ventre. "Les vers et les serpens sont des reptiles. = Par extension, on le dit de ceux qui ont les piés si courts, qu' ils semblent~ se traîner plutôt que marcher. Ainsi l' on dit d' un lézard, que c' est un reptile. = Adj. "Animal, insecte reptile. Il est plus usité comme substantif. = Regnard l' emploie figurément.
   Hé bien! vit-on jamais un esprit plus reptile?
   Puis-je avoir jamais fait une telle imbécile?
= Cela serait précieux, hors du style comique.

RÉPUBLICAIN


RÉPUBLICAIN, AINE, adj. et subst. RÉPUBLIQUE, s. f. [Républi-kein, kène, ke: 1re é fer. 4e. è moyen au 2d; e muet au 3e.] République est proprement, un État gouverné par plusieurs. La République Romaine. La République d' Athènes, de Venise, de Gènes, de Hollande, etc. "On sait assez que tout Prince veut être absolu, et que toute République est ingrate. Volt. = Fig. La République des Lettres: les Gens de Lettres, considérés en général, comme s' ils faisaient un corps. = En st. famil. on dit d' une famille, d' une Communauté nombreuse, d' une maison où il y a grand nombre de ménages, que c' est une petite république.
   Rem. Bossuet considérant bien plus l' origine de ce mot que l' emploi qu' il a dans la langue, s' en sert au pluriel dans un sens que l' usage, je crois, n' a jamais admis: "Moïse fonde toutes leurs lois et toutes leurs Républiques~ sur les merveilles qu' ils ont vûes. C' est un latinisme: Res public‘. = L' Acad. dit qu' il se prend quelquefois pour toute sorte d' État, de Gouvernement. "On ne doit point soufrir dans une République bien policée, etc. "Le mépris des Lois est la peste de la République. _ Il me parait vieux dans cette aception; et il me semble qu' on dit aujourd' hui État, Gouvernement. Les Néologues disent, la chôse publique.
   RÉPUBLICAIN, qui apartient à la République. Gouvernement républicain. _ Qui favorise ce Gouvernement. "Esprit, système républicain; âme républicaine; maximes républicaines. = S. m. Passioné pour ce Gouvernement. "C' est un vrai républicain. Presque tous les Anglais sont républicains, sont des républicains enthousiastes.

RÉPUDIATION


RÉPUDIATION, s. f. RÉPUDIER, v. act. [Répudi-a-cion, di-é: 1re é fer. dern. é aussi fer. au 2d.] Ils expriment l' action de faire divorce avec sa femme. = En termes de Droit, on dit, répudier une succession, y renoncer.

RÉPUGNANCE


RÉPUGNANCE, s. f. *RÉPUGNANT, ANTE, adj. RÉPUGNER, v. n. [1re é fer. mouillez le g. On voit dans plusieurs livres repugnance, repugner, sans accent sur l' e: cette ortographe est contraire à l' usage et à l' analogie.] Répugnance est une sorte d' aversion pour quelque chôse, à faire quelque chôse. Répugner, avoir de la répugnance. "J' ai grande répugnance à cela; cela me répugne, répugne au sens comun: la raison, mon goût y répugne. "Autant l' esclavage me répugne, autant la liberté m' effraie. Marm. = Il se dit quelquefois des persones comme sujet: la mère répugnait à ce mariage: on eut beaucoup de peine à vaincre ses répugnances. * Mais il n' est point actif; il n' a pas le régime simple. Dire, je répugne la manne, le séné, c' est un gasconisme.
   REM. Répugnance régit à et l' infinitif. "L' éducation qu' il (M. Ozanam) avoit eûe, lui donnoit beaucoup de répugnance à recevoir le prix de ses leçons. Fonten. "Il avoit senti le danger de la voir, par la répugnance qu' il avoit à la fuir. Marm.
   RÉPUGNANT, qui répugne, qui est contraire à. "Ce n' est que la consécration qu' on croyoit répugnante à la tristesse du jeûne. Boss. "Proposition répugnante à la Foi, à la raison. Trév. Une forme plus authentique, peut-être plus répugnante à son coeur, lui étoit prescrite par les Lois. Target. L' Ac. ne met point cet adj. verb.

RÉPUTATION


RÉPUTATION, s. f. RÉPUTER, v. act. [Réputa-cion, en vers, ci-on; réputé: 1re é fer. dern, é aussi fermé au 2d.] Réputation, renom, estime publique. Bone ou mauvaise réputation. Être en bone ou en mauvaise réputation, en~ réputation~ d' homme savant, de bel esprit.
   La réputation des moeurs est la première.
   Sans elle, croyez-moi, tout succès est trompeur,
   Mon estime toujours commence par le coeur.
   Sans lui l' esprit n' est rien       Le Méchant.
= Quand réputation est sans épithète, il se prend toujours en bone part; être en réputation. Avoir de la réputation, etc. = Réputation, célébrité, renommée, (synon.) Une réputation honête est à la portée de tout le monde: on l' obtient par les vertus sociales... L' esprit, les talens, le génie procûrent la célébrité. C' est le premier pas vers la renommée, qui n' en difère que par l' étendue: mais les avantages en son peut-être moins réels que ceux d' une bone réputation. Duclos. Voy. CONSIDÉRATION. "Tant de réputations usurpées, capables de décourager toute émulation. Palissot. "Il faut du tems pour que les réputations mûrissent. Volt. "Il est plus dificile (dans les grands emplois) d' y soutenir que d' y aporter une grande réputation. Neuville.
   Rem. On dit, c' est un homme de réputation. Mde. de Sévigné dit, un Évêque de réputation: on peut aussi dire, un Auteur, un Écrivain de réputation; mais cette locution ne ferait pas bien avec toute sorte de noms. = Être en réputation et avoir la réputation régissent de et l' infinitif. "Il est en réputation, ou il a la réputation de s' avantager. = * Le P. D' Avrigni dit, se faire réputation, comme on dit, se faire honeur. "Piscator s' étoit mis dans la tête de se faire réputation par la singularité de ses sentimens. On dirait plutôt, en pareil câs, se faire une réputation, ou une grande réputation. _ Faire réputation, à l' actif, est encôre plus mauvais. "Quelques cures un peu singulieres m' avoient fait réputation. Let. Édif. = On voit dans LA BRUYèRE, entrer en réputation; aûtre expression peu usitée. "Tout le monde s' élève contre un homme qui entre en réputation. On dirait plus régulièrement, qui comence à être en réputation, ou d' avoir de la réputation. = Être de grande réputation est une expression douteûse, à mon avis, dans l' usage actuel. Elle était fort usitée dans le dernier siècle. "Il étoit brave, riche, libéral, heureux à la guerre et de très-grande réputation. Maimb. = Perdre quelqu' un de réputation est une expression três-française; ce serait une extravagance à me perdre de réputation. Marm.
   RÉPUTER, estimer, croire. L' actif régit des adjectifs~ ou des substantifs employés adjectivement. "On le réputait homme de bien: je le réputais homme d' honeur. Le passif gouverne la prép. pour. "Louis XI est réputé pour l' Auteur des cent Nouvelles. Journ. de Lit. BOURDALOUE met ce régime avec l' actif; et il est bon pour les chôses. "Combien de ces injustices, dont ils s' aplaudissent, au lieu de les réputer pour des crimes. = Un Auteur, cité par M. De Bufon, done à être réputé, pour régime, la prép. de et l' infinitif. "L' animal, que j' ai vu, était réputé d' avoir trois ans. Je crois que de est là de trop. On dit, il est estimé avoir: il convient donc de dire: il est réputé avoir.
   Réputé, censé. "Un homme, absent pour les afaires de sa compagnie, est réputé présent.

REQUÉRABLE


REQUÉRABLE, adj. REQUÉRANT, ANTE, adj. et subst. REQUÉRIR, v. act. [Rekéra--ble, ran, rante, rir: 1re e muet, 2e é fer. 3e dout. au 1er, lon. au 2d et au 3e.] Je requiers, nous requérons; je requérois, ou requérais; je requis; j' ai requis; je requerrai; je requerrois ou requerrais; requiers; que je requière; je requisse; requérant, requis. Voy. ACQUÉRIR. = * Mde. B... (Hist. d' Angl.) dit, au prétérit, requéra pour requit. "Il requéra qu' ils dressassent des Lettres Patentes dans les formes. Requéra est un barbarisme. _ 1°. Prier de quelque chôse. "C' est lui qui m' en a requis. "Requérir du Roi une amnistie. H. d' Angl. "Les requérir de quelque grâce, c' est leur faire plaisir. Mariv. "J' en ai été requis. = 2°. Au Palais, demander quelque chôse en justice. "Le Procureur du Roi a requis. = On dit, dans le style simple, la nécessité le requérait; cela requiert célérité, diligence; requiert votre présence. "Cet emploi requiert un homme assidu. Demander est plus du beau style, requérir du style familier.
   REQUIS, ISE, adj. Convenable, nécessaire. "Avoir l' âge requis, les qualités requises pour posséder une charge. = De requise: cela sera de requise, sera râre. V. Requête, à la fin.
   REQUÉRABLE, qui doit être requis. Dans la plupart des coutumes, le cens est requérable; dans d' autres, il est portable.
   REQUÉRANT, qui requiert, qui demande en justice. "Le requérant, ou celui qui est requérant.

REQUêTE


REQUêTE, s. fém. RÉQUISITION, s. f. RÉQUISITOIRE, s. m. [Rekête; rekizi-cion, rékizitoâ-re: le 1er a la 1re et la dern. e muet, 2e ê ouv. et long.: les deux aûtres ont l' accent à la 1re, quoique dérivés de requérir, qui n' a point d' accent.] Requête est une demande par écrit. "Présenter requête au Conseil, au Parlement. Répondre, signer une requête, etc. = Maîtres des Requêtes, Magistrats qui raportent les requêtes des Parties au Conseil du Roi, où ils ont voix délibérative. = Les Requêtes du Palais; Tribunal où l' on juge en premiere instance les caûses des privilégiés. = En st. famil. requête est une demande de vive voix, ou une simple prière. "J' ai une requête à vous présenter. "Ayez égard à la requête que je vous fais.
   Rem. On apèle, au Palais, Requête civile, celle par laquelle on demande à revenir contre un Arrêt. On emploie cette expression au figuré, dans le style plaisant ou critique. "Vous avez Esther. L' impression a fait son effet ordinaire. Vous savez que M. de la Feuillade dit que c' est une Requête civile contre l' aprobation publique. Sévigné. = Suivant La Touche, on dit, de requête, ou de requise; mais le premier est le plus usité "Les bons vins seront de requête cette année: ils seront râres . "C' est une marchandise de requise. Il ajoute que l' Acad. dit de celui-ci, qu' il est vieux. Dans la dern. édit. elle l' a mis sans remarque: elle n' a pas mis de requête.
   RÉQUISITION, action de requérir: "À~ la réquisition de... Sur la réquisition du Procureur du Roi.
   RÉQUISITOIRE, acte de réquisition, qui se fait par écrit, sur-tout par le Procureur du Roi, ou par le Procureur Fiscal. "Son réquisitoire ne fut pas favorable à, etc.~

REQUIN


REQUIN, s. m. [Re-kein: 1re e muet. = On a dit anciènement requiem.] Gros poisson de mer três-vorace.

REQUINQUER


REQUINQUER (SE), v. réc. [Re-kein-ké: 1re e muet, 2e lon. 3e é fer.] Il se dit en style familier et moqueur, des vieilles, qui se pârent plus qu' il ne convient à leur âge. On le dit même quelquefois des vieillards. "Voyez cette vieille, comme elle se requinque. "Vieillard requinqué; vieille requinquée. = J. J. Rousseau le dit des jeunes gens. "Nos beaux petits Messieurs requinqués.

REQUISE


REQUISE, voy. REQUêTE, à la fin.

RÉQUISITION


RÉQUISITION, RÉQUISITOIRE, voyez aprês REQUêTE.

RESCINDANT


RESCINDANT, s. m. RESCINDER, v. a. RESCISION, s. f. RESCISOIRE, subst. masc. [Ré-cein-dan, dé; réci-zion, zoâ-re: 1re é fer.] Termes de Palais. Rescinder, casser, annuler un acte, un arrêt. Rescision, cassation des actes, des contrats contre lesquels on se pourvoit par lettres du Prince. Rescindant, voie, moyen pour casser un arrêt. Rescisoire, l' objet pour lequel on s' est pourvu par lettres, et qui reste à juger, quand l' acte ou l' arrêt a été annulé.

RESCRIPTION


RESCRIPTION, s. f. RESCRIT, s. masc. [Rèskrip-cion, rèskri: 1re è moy.] Le 1er se dit d' un ordre ou mandement par écrit que l' on done pour toucher certaine somme sur quelque fonds, sur quelque personne. = Le 2d se dit des réponses des anciens Empereurs et des Papes sur des questions de Droit, de Gouvernement, de Police civile ou Éclésiastique, pour servir de décision ou de Loi.

RÉSERVATION


RÉSERVATION , RÉSERVE, s. f. RÉSERVER, v. act. [Rézêrva-cion, ve, vé: 1re é fer. 2e ê ouv. 3e e muet au second, é fermé au 3e.] Réserver, c' est, 1°. retenir quelque chôse du total. "Il a vendu les fruits de son jardin, et il s' est réservé vingt arbres. "Il a résigné son bénéfice, et s' est réservé une pension. "Dieu se réserve la vengeance. _ Le pronom se est au datif. = Il se réserve de l' exercer ou à l' exercer dans l' aûtre vie. "Le Roi de Sardaigne se réservait de prendre, quand il voudrait, d' autres mesures. Volt. = 2°. Garder pour un aûtre tems, pour un aûtre usage. "Réserver un discours, un Sermon pour une aûtre ocasion. "Réserver de l' argent pour les besoins imprévus. "Les Dieux... nous réservoient à d' aûtres dangers. Télém.
   À~ quels mortels regrets ma vie est réservée.
       Phèdre.
  RÉSERVÉ, ÉE, partic. et adj. Câs réservés, péchés dont il n' y a que le Pape ou l' Évêque qui puisse absoudre. = Circonspect, discret. "Il est réservé en paroles. "Il faut être fort réservé avec ces gens-là: cette femme est fort réservée. = S. m. et fem. Faire le réservé, la réservée, est aûtre chôse qu' être réservé, réservée. Celui-ci est une vertu, la prudence: l' aûtre est un vice, l' hypocrisie.
   RÉSERVE a les deux sens, du verbe et du participe. 1°. Action de réserver. "Dans ce contrat, il a fait plusieurs réserves. = Les chôses réservées. Les réserves de sa terre montent plus haut que ce qui est afermé. = En réserve, adv. À~ part, à quartier. "Il a mis mille écus en réserve. = Sans réserve, sans exception. = À~ la réserve, excepté. "À~ la réserve de deux ou trois. = On dit, n' avoir rien de réservé, ou n' avoir point de réserve, ou aucune réserve pour quelqu' un; avoir en lui une entière confiance. Il n' y avoit que le seul Mentor, pour qui il n' avoit aucune réserve. Télém. Se tenir sur la réserve; être réservé; sur ses gardes. "Convaincu par ces détours de la mauvaise foi de, il se tint sur la réserve. Me. Tronchet. L' Acad. ne le met pas.
   Rem. Vaugelas avait remarqué deux Ecrivains d' une certaine Province, qui disaient à la réservation, au lieu de dire, à la réserve. _ Dans Trév. on trouve réservé que, pour, à la réserve que, conjonction, excepté que. C' est contre l' usage actuel.
   2°. Réserve, ou corps de réserve; les troupes que le Général d' armée réserve un jour de bâtaille, pour les faire combatre, quand il le jugera à propos. On a toujours dit le second; mais le premier est déja ancien. On disait, il y a plus de cinquante ans, M. de Belle-Isle comande la réserve sur le Bâs-Rhin.
   3°. Discrétion, circonspection, retenûe. "User de réserve. "En user avec plus de réserve. Parler avec beaucoup de réserve.
   RÉSERVATION, action par laquelle on réserve. Il ne se dit que dans le Droit, des bénéfices, dont le Pape se réserve la nomination dans les pays d' obédience, et des droits qu' on s' est réservé dans un acte. "Il a résigné son bénéfice à la réservation d' une pension. Hors de-là, on dit, avec réserve d' une pension, à la réserve de, faire une réserve, etc.

RÉSERVOIR


RÉSERVOIR, s. m. [Rézêr-voar: 1re é fer. 2e ê ouv.] Lieu fait exprês, pour y réserver certaines chôses. On ne le dit que de l' eau, excepté en Anatomie, où l' on dit le réservoir de la bile. Pour l' eau, on dit absolument, le réservoir, un réservoir. "Il a toujours grande quantité de poisson dans son réservoir.

RÉSIDANT


RÉSIDANT, ANTE, adj. RÉSIDENCE, s. f. RÉSIDENT, s. m. RÉSIDER, v. n. [Ré--zidan, dante, dance, dan, dé: 1re é fer. 3e. lon. aux trois premiers, é fermé au dern. = Plusieurs écrivent l' adjectif avec un e comme les deux substantifs, mais il est mieux de les distinguer par la lettre caractéristique du participe, qui est l' a.] Résider, faire sa demeure en quelque endroit; résidant, qui réside, qui demeure. "Il est de Brétagne, mais il réside à Paris. "Le lieu où il est résidant, où elle était résidante. = Résider, sans régime, se dit d' un Évêque, d' un bénéficier, qui réside dans le lieu de son bénéfice. = Résider se dit des chôse au figuré. "Toute l' autorité réside dans la persone de, etc. Et en style moqueur: cet homme croit que toute la science, ou tout le bon sens, etc. réside dans lui. = Résidence est, 1°. Demeure ordinaire en quelque lieu. "Il fait sa résidence en tel lieu. "C' est le lieu de sa résidence. = 2°. Séjour actuel et continuel d' un Officier ou d' un Bénéficer dans le lieu de sa charge, de son bénéfice. Cet emploi, ce bénéfice oblige à résidence, à la résidence. = 3°. Emploi d' un Résident auprês d' un Prince. = Résidence, domicile, demeure (synon.) Le premier se dit de la demeure habituelle et fixe; le second de la demeure légale; le 3e du lieu où on loge. "Les gens en place ont une résidence nécessaire: les mineurs n' ont d' aûtre domicile que celui de leur père ou de leur tuteur: il y a beaucoup de misérables qui n' ont point de demeure. Tel qui a sa résidence naturelle dans la Province, aura un domicile dans la Capitale, et fera sa demeure habituelle à la Cour, etc. Extr. des Syn. Fr. de M. l' Ab. Roubaud.
   RÉSIDENT , celui qui est envoyé auprês d' un Prince, pour résider auprês de lui, et qui est moins qu' un Ambassadeur et plus qu' un Agent. "Le Résident de France à Genève. "Le Résident de l' Électeur Palatin à la Cour de France.
   Rem. 1°. Résider exprime une demeure habituelle. Il ne faut donc pas s' en servir pour exprimer une demeure passagère. "Warvick résidoit avec le Duc de Florence dans son Gouvernement de Calais, au commencement de la rébellion. Hist. d' Angl. "Ils se hâtèrent de se rendre au Château de Baynard, où le Protecteur résidoit. Ibid. Suivant le sens du discours, étoit eut été plus propre dans l' un et l' autre endroit, où il ne s' agit que d' une demeure courte et passagère. = 2°. On dit, faire sa résidence, et non pas tenir sa résidence, comme dit Maimbourg: "Un Évêque, qui tenoit sa résidence à Tomes, grande Ville sur la mer. Hist. de l' Arianisme. = 3°. Mde de Sévigné fait signifier à résidence, défaut d' exercice. "J' ai le plaisir de faire l' exercice aprês un an de résidence. "Il a fort bien dormi; mais cet état de résidence, et de ne pouvoir sortir, lui done beaucoup de chagrin et de vapeur. _ Résidence n' est point usité en ce sens. Pour l' expression, faire l' exercice, voyez EXERCICE.

RÉSIDU


RÉSIDU, s. m. [Rézidu: 1re é fer.] Il ne se dit que dans le comerce, résidu de compte; en Arithmétique, le résidu d' une division; et en Chimie, de ce qui reste d' une substance, qui a pâssé par quelque opération.

RÉSIGNANT


RÉSIGNANT, s. m. RÉSIGNATAIRE, s. m. RÉSIGNATION, s. fém. RÉSIGNER, v. act. et n. [Rézignan, natère, na-cion, né: 1re é fer. mouillez le g; 4e è moyen et long au second.] Résigner, se demettre d' un ofice, d' un bénéfice en faveur de quelqu' un. Résignant, celui qui résigne. Résignataire, celui à qui l' on a résigné. Résignation, démission d' un bénéfice.
   Rem. 1°. Quand on dit résigner, absolument et sans régime, on l' entend toujours de la résignation d' un bénéfice. "Il a résigné. Il n' a pas eu le tems de résigner. Il est mort sans résigner. = 2°. Résignation, se disait aûtrefois de la démission d' un ofice, d' une charge: on ne le dit plus que des bénéfices. = 3°. Résignation et se résigner expriment aussi l' abandonement à la volonté de Dieu. Il est mort avec beaucoup de résignation, bien résigné à la volonté de Dieu; ou, simplement, bien résigné. "Il faut se résigner en toutes chôses à la volonté de Dieu. = On dit aussi résigner son âme à Dieu; remettre son âme entre ses mains. * M. Portalis fait régir à se résigner la prép. à et l' infinitif. "Les voisins de ces Manufactures savent se résigner à en suporter l' incomodité. Ce régime n' est pas admis par l' usage, et se résigner n' est pas même reçu dans cette ocasion. = Au passif, on dit être résigné à: je suis résigné à soufrir tout ce que le bon Dieu voudra.
   4°. Malherbe a écrit résinée sans g pour le faire mieux rimer avec obstinée. La fureur de ce Poète était de rimer três-richement aux yeux comme à l' oreille. Il changeait souvent l' ortogr. des mots pour satisfaire cette manie.

RÉSILIATION


RÉSILIATION, s. f. RÉSILIER, v. a. [Rézili-a-cion, li-é: 1re é fer. dern. é aussi fermé au 2d.] Termes de Palais, qui expriment l' action de casser, d' annuller un acte. "La résiliation d' un bail, d' un contrat. "Il travaille à faire résilier son bail. Ce contrat a été résilié.

RÉSILIR


RÉSILIR, v. n. Terme de Pratique. Revenir contre un contrat, une promesse. "Un contrat dont on ne peut résilir, dit l' Apologiste moderne, et peu connu de l' État Réligieux. On dirait plus élégamment: un contrat que la mort seule peut dissoûdre.

RÉSINE


RÉSINE, s. fém. RÉSINEUX, EUSE, adj. [Rézine, neû, neû-ze: 1re é fer. 3e e muet au 1er, lon. aux deux aûtres.] Résine est une matière inflamable, grâsse et onctueûse, qui sort de certains arbres, tels que le pin, le sapin, le lentisque, le térébinthe, etc. = Résineux, qui produit la résine; arbre résineux, ou qui a quelque qualité de la résine; goût résineux.

RÉSIPISCENCE


RÉSIPISCENCE, s. fém. [Rézipi-sance: 1re é fer.] Reconaissance de sa faûte avec amendement. "Venir à résipiscence. "On n' a point de preuve de sa résipiscence.

RÉSISTANCE


RÉSISTANCE, s. f. RÉSISTER, v. n. [Rézistance, té: 1re é fer. 3e lon. au 1er, é fer. au 2d.] 1°. Ne céder pas au choc, à l' impression. "Matière qui résiste au ciseau, viande dûre, et qui résiste au couteau. Des bottes qui résistent à l' eau. "Vieux château, qui a résisté jusqu' ici aux injûres du tems. = 2°. Faire éfort contre. "Résister aux énemis. "Ce cheval résiste au cavalier. Et sans régime. "Ce Comandant ne se rendit que quand il ne put plus résister. = 3°. S' oposer à; tenir ferme contre. "Résister à quelqu' un: Je lui ai résisté en face. "Résister à la grâce, à la volonté de Dieu. Résister à la tentation, aux passions, à l' adversité. = 4°. Suporter facilement la peine, le travail. "Il résiste à toutes les fatigues. "Ce malade est bien afaibli: s' il vient encôre un redoublement, il n' y résistera pas. = Et en parlant de quelque incomodité, comme fumée, mauvaise odeur, etc. on dit, qu' on n' y peut plus résister; l' endurer. "C' est un homme qui se vante, qui contredit toujours~, qui redit toujours la même chôse: il n' y a pas moyen d' y résister.
   Rem. On dit, résister à. Le Chev. Follard et Mde. de B... ont dit: résister contre. "Elle étoit en état de résister contre la Cavalerie. "Une Armée, contre laquelle Leicester étoit hors d' état de résister. C' est contre l' usage et l' analogie. = Ce verbe peut quelquefois régir la prép. à et l' infinitif. "Ces substances fournissent ce feu, tandis qu' elles résistent à en recevoir dailleurs. Journ. de Litt. = Santeul, dans une de ses lettres, lui fait régir la préposition de. "J' avois toujours résisté de vous faire ce présent. _ Ces régimes de l' infinitif sont peu usités, sur-tout le dernier. Santeul aurait mieux dit, en disant: j' avais résisté à la pensée, ou à l' envie de vous faire ce présent. _ L' Académie ne done d' exemple que du régime des noms. = Le P. La Ruë emploie résistant, comme adjectif verbal. "Nation puissante, et plus de deux mille ans résistante aux efforts des plus redoutables ennemis. Cet adjectif n' a pas été admis par l' usage. Il faut dire, qui avait résisté plus de deux mille ans aux éforts, etc.
   RÉSISTANCE, s' emploie dans les divers sens de son verbe. La résistance de la matière; étofe qui n' a point de résistance. "Les assiégés ont fait une grande, une belle résistance. "Les journées de Fribourg et de Nortlingue, si célèbres par l' opiniâtre résistance des ennemis. Bourd. Il s' est rendu sans résistance. "Si vous proposez cela dans l' assemblée, vous trouverez bien de la résistance, ou grande résistance. "Il a obéï sans résistance. "On ne laissa pas de le mener, malgré qu' il en eut, quelque résistance qu' il pût faire. Maimb.
   REM. Malherbe écrit résistence, pour le faire rimer avec pénitence. Il ne voulait pas qu' on fit rimer ance avec ence: mais il acomodait l' ortographe à ses principes trop rigides, et se sauvait par là, dit Ménage. = M. Le Gendre, et d' autres Écrivains ou Imprimeurs, écrivent aussi résistence, contre l' usage le plus autorisé.
   RÉSOLU, UE, adj. Voyez aprês RESOûDRE.

RÉSOLUMENT


RÉSOLUMENT, s. m. RÉSOLUTION, s. fém. [Rézoluman, lu-cion; en vers ci--on: 1re é fer.] Résolution est 1°. Décision d' une question, d' une dificulté. = 2°. Dessein que l' on forme. Prendre sa résolution. Faire une bone, une ferme résolution, et sans article; il fit résolution de, avec l' infinitif. = 3°. Fermeté, courage. "Pour entreprendre une chôse si dificile, il faut bien de la résolution. "On revint à l' assaut avec plus de résolution et de fierté qu' auparavant. Maimb. "Il a de la résolution: il est homme, ou c' est un homme de résolution. "Il faut pour cela des hommes de résolution, et qui puissent faire de la dépense. Lettr. Edif. "Il se vantoit de pouvoir mettre en armes dix mille hommes de résolution. Histoire des Stuarts. = 4°. En Chimie, réduction d' un corps en ses premiers principes. = 5°. Au Palais, on dit, la résolution d' un bail, d' un contrat, la cassation de, etc. = 6°. En Médecine, la résolution d' une tumeur, d' un cancer; l' action par laquelle ils se résolvent.
   Rem. Dans le 2d sens, il régit de et l' infinitif. "Il est dans la résolution de tout tenter pour réussir. "Ils prirent la résolution de les aler combatre. = * Maimbourg dit prendre résolution sans article, contre l' usage. "Il prit résolution de les marier, etc.
   RÉSOLUMENT, avec une résolution fixe et déterminée, (n°. 2°.) "Il veut résolument~ que cela soit. = Il se met quelquefois à~ la~ tête de la phrâse. "Résolument, je n' en ferai rien. = Hardiment, avec courage, intrépidité. "Il va résolument au combat.

RÉSOLUBLE


RÉSOLUBLE, adj. RÉSOLUTIF, IVE, adj. Le 1er se dit en Mathématique, dans le sens passif, d' un problème, qui peut être résolu par une méthode conûe. Le 2d se dit en Pharmacie, de ce qui résout une humeur peccante. Il a le sens actif. "Sel, onguent résolutif. = Le Dictionaire de Trév. done à celui-ci le sens de décisif, et le dit des persones. "Les demi-Savans doutent toujours; mais ceux qui sont profonds, sont décisifs et résolutifs. On pourrait dire, avec plus de vérité, tout le contraire. Voy. Résolu, aprês RÉSOûDRE.

RÉSONNANT


RÉSONNANT ou RÉSONANT, ANTE, adj. RÉSONEMENT, s. m. RÉSONER, v. n. [Rézonan, nante, neman, né.: 1re é fer. 3e lon. aux deux prem., e muet au 3e, é fer. au dern.] Retentissant. Retentissement. Retentir. "Ce salon est trop résonant: la musique y réussit mal. "Voûte, église résonante, qui résone bien, qui résone trop. "Le résonement de cette voûte nuit à la voix, fatigue le Prédicateur et les Auditeurs.
   Il acorde, il marie aux accens de sa voix
   La lyre qui résone, et parle sous ses doigts.
       Le Franc.
REM. Résoner régit quelquefois la prép. de. "Tout résonait du bruit des instrumens. "Il poussait des cris horribles, dont le mont OEta résonoit. Télém. "Un nombre infini d' oiseaux faisoient résoner ces bocages de leur doux chant. Ibid. = L' Académie met cet exemple au figuré. "Tout résonoit du bruit de ses louanges, de ses exploits. Retentir est plus noble et plus usité. = Résonant et Résoner se disent aussi de la voix et des instrumens de musique: voix claire et résonante; violon bien résonant. "Voix, cloche, guitarre qui résone bien, qui rend beaucoup de son.

RÉSOûDRE


RÉSOûDRE, v. act. et neut. [Ré-zoû--dre: 1re é fer. 2e lon. 3e e muet.] Je résous, nous résolvons, je résolvois ou résolvais, je résolus; j' ai résolu, je résoudrai, etc. Résous-toi, résolvez-vous; que je résolve, je résolusse; résolu, (quand il signifie, déterminé, décidé à) et résous, (quand il veut dire, réduit, changé en aûtre chôse.) = Ce verbe a toujours au plur. du prés. de l' indicatif, nous resolvons, vous résolvez, ils résolvent; et non pas, nous résoudons, etc. comme disent certaines persones. L. T. Il ne garde le d qu' au futur et au conditionel, je résoudrai, je résoudrois, etc. Vaug. * Le même La Touche, qui décide plus haut, sans restriction, que résoûdre fait résolvons, dit âilleurs qu' on dit, nous resoudons, quand ce verbe a le sens de dissoûdre. Il ajoute pourtant que l' Académie parait aprouver, nous résolvons, même dans ce dernier sens, puisqu' elle done l' exemple qui suit. "Les fomentations résolvent les tumeurs. Dans la dern. édition, tout comme dans les aûtres, elle ne dit que résolvons, résolvez, résolvent. = Restaut met résoute, au fém. du participe. M. de Wailly dit au contraire qu' il n' a point de féminin, et l' Académie le dit aussi expressément = 1°. Décider une dificulté, une question. = 2°. Réduire. "Le feu résout le bois en cendre et en fumée. = 3°. Déterminer quelqu' un à quelque chôse. "On ne saurait le résoudre à la mort, à se soumettre à sa destinée. = 4°. En parlant des chôses, avec le seul régime simple; c' est aussi déterminer. "Qu' a-t' on résolu dans le Conseil? On a résolu la paix, la guerre, etc. = 5°. V. neut. Déterminer de faire. "Il a résolu d' aller à Rome. = Se résoudre, v. réc. Se déterminer: à quoi vous résolvez-vous? "Il a de la peine à se résoudre à se marier. _ Là il est réciproque actif; mais dans le sens de se réduire, il est réciproque passif. "Le brouillard se résout en eau.
   REM. Résoudre, signifiant prendre la résolution de, etc. a toujours été neutre; ainsi, suivant M. de Vaugelas, il faut dire: tâchez à faire résoûdre votre ami, et non pas, à résoudre votre ami. Depuis cette remarque, cette dernière expression s' est bien établie. Elle régit à devant les noms et les verbes. Voy. n°. 3°. = Quand résoûdre est neut. ou passif, il régit de devant l' infinitif; mais quand il est actif ou réciproq. il régit à: "J' ai résolu de partir. "Ils étoient résolus d' acomplir leur voeu. Maimb. On le résolut, ou, il se résolut à partir. = * Quelques Auteurs ont employé de avec se résoûdre. "Je me suis résolu de ne rien changer. CHARLEV. "Ils s' étoient résolus d' assembler une flote. Hist. d' Angl. On peut pâsser ce régime dans la dernière phrâse, pour éviter la rencontre de deux a: résolus à assembler: mais dans la 1re, il faut: j' ai résolu de, ou, je me suis résolu à ne rien changer. = * Maimbourg avait dit, plus anciènement: "L' Empereur s' étant enfin résolu d' implorer le secours des Princes Chrétiens; et l' on en trouve plusieurs exemples dans les Écrivains du siècle pâssé; mais ce régime n' est pas de l' usage actuel. = Faire résoudre régit aussi la prép. à: "Cela les fit résoûdre à se séparer. DEST. = Pour les noms, l' actif régit l' acusatif de la persone et le datif de la chôse. "On lui a envoyé un Docteur pour le résoûdre à la mort: ou le seul acusatif de la chôse: voilà ce qu' on a résolu. = Corneille fait régir au neutre la prépos. en, qui est à l' ablatif.
   Il a remis exprês à tantôt d' en résoudre.
       Othon.
  Résolvez en ensemble.      Ibid.
Ce régime est suranné. = Se résoûdre, se décider, se dit des chôses et non pas des persones; et, comme nous l' avons dit, il est réciproque passif. On dit, par exmple, les questions doivent se résoûdre, (être résolues) par tels principes: mais on ne doit pas dire, comme l' a fait Bossuet: "Il faut examiner par quelle autorité J. C. a voulu que les Chrétiens se résolussent dans les dificultés qui devoient naître dans son Église. "Nos pères se sont résolus par la Tradition. "C' est fureur que de disputer de cette sorte, en ne nous laissant aucun moyen de nous résoûdre. Dans toutes ces phrâses on doit se servir du réciproque, se décider.
   RESOLU et RÉSOUS, partic. du verbe RÉSOUDRE. Le 2d s' emploie dans le 2d sens: le 1er dans tous les aûtres. "C' est un point résolu, une entreprise résolûe. Question résolûe, bail résolu, tumeur résolûe. _ Brouillard résous en pluie, = Résous n' est que participe: résolu est aussi adjectif, apliqué aux persones. Déterminé, hardi. "Il est résolu. C' est une femme résolûe. Et substantivement, style famil. "C' est un grôs résôlu: il fait le résolu. * Bossuet lui done la signification de décidé, ferme dans une opinion. "Ils furent si peu résolus, qu' ils nous donnèrent dabord en cinq ou six façons diférentes, un article si important que celui de l' Eucharistie. L' usage d' aujourd' hui condamnerait cette expression. Résolu n' a ce sens que dans cette phrâse proverbiale: il est résolu comme Barthole. Trévoux dit résolutif, qui ne vaut pas mieux.

RESOURDRE


*RESOURDRE, v. n. Sourdre, sortir de terre. M. Du Vair, dans l' Oraison Funèbre de Libertat, prononcée à Marseille, dit: "Comme le fleuve du Nil, fort grand dès sa source, se vient incontinent enterrer, et à une espace de là resourd plus large et plus ample qu' auparavant, la valeur de Bayon..... s' est très-heureusement aparue au sieur de Libertat. Resourdre est vieux, et sourdre n' est pas du beau style.

RESPECT


RESPECT, s. m. RESPECTABLE, adj. RESPECTER, v. act. RESPECTUEUX, EûSE, adj. RESPECTUEUSEMENT, adv. [Rèspèk, table, té, tu-eû, eûze, eû-zeman; les deux prem. è moy. le t ne se prononce jamais au 1er: 3e dout. au 2d, é fer. au 3e, 4e lon. aux trois dern.] Respect, aûtrefois, raport. "La même proposition est vraie ou faûsse, sous divers respects: c' est un latinisme: sub diverso respectu. "La terre n' est qu' un point, au respect du ciel. Au respect de, se dit encôre en Province. = Aujourd' hui, vénération, ou déférence qu' on a à cause de l' excellence d' une chose, ou de la qualité, du caractère d' une persone. "Avoir du respect pour les chôses sacrées, pour les chôses de la Religion. "Vous lui devez respect, ou du respect. "On doit porter honeur et respect à l' âge: garder le respect. Se tenir dans le respect, etc. Voy. VÉNÉRATION. "Le respect n' est aûtre chose que l' aveu de la supériorité de quelqu' un. Duclos. "Il y a deux sortes de respects; celui qu' on doit au mérite, et celui qu' on rend aux places, à la naissance. Id.
   Rem. 1°. Respect ne se dit guère au plur. L' usage a bani ce nombre de plusieurs mots, où on l' admettait aûtrefois. On dit: écrire, parler avec respect, avec un grand respect, et non pas avec des respects infinis, comme on le disait anciènement, et comme on le dit encôre en Province. "Luther avoit écrit à Érasme avec des respects qui tenoient de la bassesse. Bossuet. "À~ qui je dois tant de respects et d' obéissances. Mascaron. * M. l' Abé Royou critique ce pluriel, dans le discours de réception de M. le M.... "Le Philosophe qui sait s' afranchir des respects de tradition, prodigués à des chimères. Comme s' il y avoit plusieurs respects, dit le Critique. Suivant Th. Corn. et l' Acad. on dit également au sing. et au plur. "J' irai vous assurer de mon respect, ou de mes respects. Rendre ses respects, ses três-humbles respects. Ce sont des fomules de politesse. Avec assurer, il me semble que le sing. vaut mieux: avec rendre, il faut le plur. = Racine emploie respects pour devoirs.
   Et m' aquiter vers vous de mes respects profonds.
   Quoique respects et devoirs soient presque synonymes, dit l' Abé d' Olivet, on ne dit pas s' aquiter de ses respects, comme on dit, s' aquiter de ses devoirs. = 2°. On dit, porter respect, sans article. "On auroit porté respect à la dignité Impériale, comme à celle de Roi. Hénaut. "L' enfant s' acoutumera à porter respect à l' âge et à l' expérience. Th. d' Éduc. "Les Tartares ont, comme les Turcs, leurs mosquées et leurs gens de loi, à qui ils portent grand respect. LETT. ÉDIF. * Quelques-uns disent, porter du respect, ou un grand respect. Cela n' est pas si bien, quoiqu' on puisse le dire, à mon avis. * Pour, imprimer du respect, comme dit Bossuet, je ne le crois pas bon. "Sa vie sainte imprimoit du respect; je voudrais dire, imprimait le respect, ou bien, inspirait du respect pour lui. = 3°. Respect, régissant le génitif, forme un aûtre sens, que quand il régit la prép. pour: Avec le génitif, il a un sens actif; avec la prép. pour, il a un sens passif. Le respect d' un enfant, se dit de l' enfant qui respecte: le respect pour son père, se dit du père, qui est respecté.
   Sans respect des ayeux, dont elle est descendue.
       Boil.
En vers, je n' ôserais le blâmer; en prôse, je voudrais dire, sans respect pour les aïeux, etc. "Les Juifs croyoient être plus en sûreté par le respect du Roi des Parthes. FLEURY, Hist. Éccl. Est-ce donc que ce Roi respectait les Juifs. Ce n' est pas ce que l' Auteur veut dire: il entend, au contraire, que les Juifs se croyaient en sûreté par le respect qu' ils avaient pour ce Roi. Il falait donc la prép. pour, au lieu de la prépos. de: par leur respect pour le Roi des Parthes. = 4°. Perdre le respect à quelqu' un, est une expression qui déplaisait au P. Bouhours. "Cette phrâse, dit-il, qui étoit si fort de la Cour autrefois, a beaucoup perdu de sa faveur. Je ne sache pas de bon Auteur qui s' en serve. Vaugelas n' ôse la condamner, quoiqu' il dise que, manquer de respect est le plus sûr, si ce n' est le meilleur. En éfet, dans celui-ci, le verbe manquer, a son régime ordinaire; mais dans le 1er, perdre prend un régime que l' usage ne lui done pas. Dirait-on, perdre l' amitié, l' afection à quelqu' un, pour dire, perdre l' amitié, l' afection qu' on avait pour lui? Non sans doute; cela paraitrait bizârre: perdre le respect à, ne l' est pas moins. Sans régime, il paraît bon. "Vous perdez le respect. L' Académie ne le dit que de cette manière. Et pour, perdre le respect à, elle dit que cette phrâse vieillit. = Il faut donc dire, manquer de respect à, etc. "Une jolie femme met le désordre partout: vous êtes cause que mon fils me manque de respect. Dest. = Quelques-uns disent, sortir du respect. Celui-ci me parait un peu précieux. "Je ne pouvois chercher à sortir du respect, sans éprouver une contrainte, qui produisoit le même éfet. Duclos. "Vous sortez du respect que vous me devez, ma fille. Mariv. 5°. Tenir en respect, se dit ordinairement des persones. "Il tient tout le monde en respect. On le dit quelquefois d' une place de guerre, poure dire qu' elle empêche les courses des énemis, ou qu' ils craignent de l' ataquer. "Cette place tient l' énemi en respect. = Se faire porter respect, se dit d' un homme puissant, qui se fait craindre. Acad. On peut le dire par extension, d' un père, d' un supérieur, d' un maitre, qui se fait respecter de ses enfans, de ses inférieurs, de ses écoliers. = Sauf le respect, ou avec le respect que je dois à, est une formule de politesse, un adoucissement dont on se sert, quand on veut dire quelque chose qui pourrait choquer ceux devant qui l' on parle, "Sauf le respect ou, avec le respect que je dois à la compagnie, cela n' est pas exactement vrai. = Lieu de respect, lieu où l' on doit être dans le respect. "Les Églises, les palais des Rois sont des lieux de respect..
   RESPECT HUMAIN: les égards que l' on a pour les jugemens des hommes. "Agir par respect humain. "Le respect humain le retient. "Si le respect humain fait faire quelques bones actions, il en empêche encore un plus grand nombre. "Combien qui ne paraissent impies et incrédules que par respect humain.
   RESPECTER, c' est 1°. Honorer, révérer, porter respect. "Respecter la vieillesse, la qualité, la dignité, la persone, les Lieux Saints. "Je l' ai toujours honoré et respecté. = 2°. Figurément, épargner, ménager, avec le régime des chôses. "Ce sont d' illustres monumens, que le tems a respectés.
   L' Amour n' a pas toujours respecté la Nature:
   Je ne le sens que trop à mes transports jaloux.
       Rhadamiste.
  Vents, grêle, chaleur ou gelées,
  Tout sembloit respecter ses fruits et ses moissons.
       L' Abé Reyre.
= 3°. Se respecter, ne rien faire qui puisse faire tort à notre réputation. Cette expression est três-belle. "Une femme, qui ne s' est pas respectée, ne doit pas s' atendre à l' être. MARM. "Respectez-vous autant que je vous respecte. Id. Ces hommes (les gens de lettres) mieux conus et plus considérés, ont apris à se respecter et à se montrer avec la dignité qui leur convient. Marin. "Je me respecte trop, pour faire un pareil éclat. Dest.
   Je vois qu' Olban se respecte avec elle.
   Ah! c' est encore une douleur nouvelle.
   J' espèrerais, s' il se respectait moins.
       Nanine.
  RESPECTABLE, qui mérite du respect. "Persone respectable par son âge et par sa conduite. Bouhours en parle comme d' un mot nouveau, qui avait été três-bien reçu. "Un homme de bien est respectable par lui-même. = Quelques Écrivains ont fait régir le datif à respectable.
   Et crois que votre front prête à mon diadême
   Un éclat, qui le rend respectable aux Dieux même.
       Rac. Esther.
"Vos droits et vos intérêts ne lui ont pas été respectables. RÉVOL. ROM. "Qui ne sait combien la vie du citoyen fut précieuse et respectable à ce vrai patriote. Neuville. Or. Fun. du Maréch. de Belle-Isle. "Si, malgré les passions de l' homme, le ministère du Pontife lui est encore si respectable. L' Abé Boulogne. Ce régime ne plait pas autant dans les deux Prosateurs que dans le Poète. Il est mieux avec rendre qu' avec être, et mieux avec les noms qu' avec les pronoms.
   RESPECTUEUX, qui porte respect à; qui a du respect pour. "Homme, enfant respectueux. = Il régit la prép. envers. Il est respectueux envers ses parens, envers ses maîtres. Maimbourg et d' autres Auteurs du siècle dernier lui font régir le datif. "Humble, modeste, dévot, respectueux au Saint Siège. = Il se plait à suivre le subst. même quand il est sans régime.
   Ce Sanctuaire impénétrable,
   Où tes Saints inclinés, d' un oeil respectueux,
   Contemplent de ton front l' éclat majestueux.
       Rousseau.
  RESPECTUEûSEMENT, avec respect. "Parler, écrire respectueûsement à; vivre respectueûsement avec.

RESPECTIF


RESPECTIF, IVE, adj. RESPECTIVEMENT, adv. [Rèspèktif, tive, tiveman: les deux prem. è moy. 4e e muet.] Qui a raport, ou comme on disait autrefois, qui a respect à; qui concerne de part et d' autre. "Droits respectifs. Demandes, prétentions respectives. = D' une manière respective. "Ils ont présenté respectivement leurs requêtes: on les a maintenus respectivement dans leurs droits.

RESPECTUEUX


RESPECTUEUX, etc. Voy. RESPECT.

RESPIRATION


RESPIRATION, s. f. RESPIRER, v. a. et neut. [Rèspira-cion, ré; 1re è moy. dern. é fer. au 2d.] le 1er se dit de l' action de respirer, au propre seulement. "Avoir la respiration libre, etc. = Respirer, c' est, 1°. proprement, atirer l' air dans sa poitrine et le pousser dehors par le mouvement des poumons. "Respirer facilement, ou dificilement. Avoir une grande dificulté de respirer, de la peine à respirer. _ Il ne respire plus: il est mort: il respire encôre: il n' est pas encôre mort. = Tout ce qui respire: tout ce qui vit. = 2°. Figurément, Prendre quelque relâche aprês de grandes peines. "Laissez-moi respirer un moment. "Après une longue guerre, les peuples començaient à respirer. = 3°. Actif. "Respirer un bon air, ou un air corrompu. = Figurément, avec les chôses pour sujet et pour régime: marquer, témoigner. "Tout respire ici la piété, une sainte joie. "L' audace, l' orgueuil, la fureur respirent dans ses derniers mots, dans ses derniers accens. Jer. Déliv. = 4°. Désirer ardemment. Il ne s' emploie qu' avec ne et que, ou avec aprês. "Il ne respire que la guerre, le sang, la vengeance. "Elle ne respire que les plaisirs, les divertissemens. "Elle respire aprês le retour de son fils. "Il ne respirait qu' aprês cela. Soupirer aprês, qui a le même sens, est beaucoup plus d' usage. Suivant M. l' Abé Roubaud, celui-ci marque un desir, ou un regret plus inquiet, plus triste, plus afectueux; celui-là, un desir plus vif, plus impatient, plus empressé. "Le malade, dont les forces renaissent, ne respire qu' aprês la santé: le malade, trop débile encôre, ne fait que soupirer aprês elle. Nouv. Synon. Fr.
   Rem. I. Respirer, dans le sens de vivre, s' emploie absolument. On dit: il respire encôre; mais on ne dit pas, il respire le jour, il respire la vie.
   Il a bien su de lui, que ce fils conservé
   Respire encor le jour, dans un rang élevé.
       Corn. OEdipe.
Je crois que, même en vers, on ne doit pas le dire. = II. Dans le sens de se reposer, reprendre haleine, il régit quelquefois la préposition de devant les noms. "Laissez-les respirer de leur acâblement. Mass. Dans le sens de desirer, il a ce régime devant les verbes. "Il ne souhaite que l' éternité: il ne respire que d' être uni à Dieu. Sévigné. Il ne se dit qu' avec la négative. "Vous ne respirer que les plaisirs; (n°. 4°.) On ne dirait pas à beaucoup prês aussi correctement: vous respirer les plaisirs. Peut-être, dit M. d' Olivet, cela vient-il de ce que respirer, employé sans négative, a un autre sens. Tout respire ici la piété, signifie, non pas que tout désire ici la piété; mais que, tout done ici des marques de piété. = III. Respirer, dans ce dernier sens, marqué au n° 3°. et au figuré, ne se dit que des chôses. Voltaire dit à Horace, dans une épitre qu' il lui a adressée.
   Je t' écris aujourd' hui, voluptueux Horace,
   À~ toi, qui respiras la tendresse et la grâce.
On dit bien, remarque M. Fréron, que des vers respirent la tendresse; mais peut-on le dire d' un homme? On répondra sans doute qu' on entend ici l' Auteur (c. à. d. ses ouvrages) et non pas l' homme. Dans ce câs, il falait mettre, qui respires. ANN. LITT. _ On lit aussi dans l' Hist. Univ. Angl. qu' Hérodote respire dans toute son Histoire un air de simplicité naïve; et dans les Grands Hommes Vengés, que GRESSET respire par tout ces grâces molles et élégantes, qui n' excluent pas la force. _ Dans ces deux endroits, l' usage voudrait: l' Histoire d' Hérodote respire, etc. Les Ouvrages de Gresset respirent, etc. = Dans l' Année Litt. on l' emploie impersonellement. "Il respire dans cette Histoire un ton de candeur et de probité. _ J' avoue que je n' aime pas ce verbe impersonel, et que je voudrais dire: cette Histoire respire, etc.

RESPLENDIR


RESPLENDIR, v. n. RESPLENDISSANT, ANTE, adject. RESPLENDISSEMENT, s. m. [Rèsplandi, di-san, sante, ceman: 1re è moy. 2e lon. 4e lon. au 2e et au 3e, e muet au 4e.] Ils se disent de ce qui brille avec éclat. "La nuit était claire: toutes les étoiles resplendissaient: dans ce palais tout resplendissait de lumière. "N. S. dans sa Transfiguration parut tout resplendissant de gloire et de lumière. "Ce grand amâs de lumière formait un merveilleux resplendissement. = * Au comencement du siècle, on disait, dans le Dict. de Trév., que quelques Auteurs prétendaient avec raison; que resplendir n' est guère usité; que cependant l' Académie l' admettait purement et simplement. Elle dit, dans la dern. édit. qu' il n' est que du st. soutenu. Elle ne dit rien de l' adjectif, ni du substantif. De tous les trois, l' adj. est le plus en usage.
   Rem. Mde. Dacier dit, dans sa Traduction de l' Iliade: "Le fils de Pélée, tout resplendissant de ses armes. Dans cette phrâse, le régime est mal apliqué. On ne dit pas d' un homme mis avec magnificence, qu' il est resplendissant de ses habits: on dit: resplendissant d' or et d' argent, de gloire, d' honeur. "Resplendissant de l' éclat de ses armes, devait dire Mde. Dacier.

RESPONSABLE


RESPONSABLE, adj. *RESPONSABILITÉ, s. f. [1re è moy. 2 lon. 3e dout. au 1er.] Qui doit répondre et être garant de. Il régit l' ablatif de la chôse, et quelquefois le datif de la persone. "Vous n' êtes pas, dites-vous responsable des faûtes d' autrui: vous en serez responsable à Dieu, si vous en êtes la caûse. "En certains câs, un maître est responsable de ses valets. Là il régit les persones. "Il s' estimoit, disait-il, responsable à Dieu, aux hommes et à soi-même, de la grâce qu' il avoit reçue, en quitant le parti de l' erreur, et s' atachant à celui de la vérité. Bourd. Or. Fun. de Henri de Bourb.
   *RESPONSABILITÉ est un mot de M. Necker. "La confiance dans ce papier naît de la responsabilité du Gouvernement. _ Ce mot peut-être utile en certaines ocasions. On lit aussi dans le Journ. de Gen. La responsabilité des Directeurs (de la Compagnie.)

RESS


RESS. On écrit les mots suivant avec 2 ss, quoiqu' on n' en prononce qu' une. C' est pour montrer seulement qu' on doit la prononcer fortement, et non pas comme un z, ainsi qu' on le pratique pour l' s simple placée entre deux voyèles. On pourrait écrire avec une division ou un tiret, re-saut, re-sembler, re-sentir, re-serrer, re-sort, re-source, ré-susciter, etc. Cela serait d' autant plus nécessaire, que dans beaucoup d' autres mots, la double s aprês l' e semble indiquer que cet e est fermé, au lieu que dans les suivans, il est muet. Blesser, cesser, presser, presséance, pressentir, etc. ont un é fermé à la 1re, quoiqu' il ne soit pas accentué. Les composés de ress, ont au contraire l' e féminin ou muet; excepté ressusciter.

RESSAC


RESSAC, s. m. [Re-sak: 1re e muet.] Terme de Marine. Choc des vagues, qui frapent avec impétuosité une terre, et s' en retournent de même.

RESSASSER


RESSASSER, v. a. [Re-sâ-sé: 1re e muet, 2e lon.] Au propre, sâsser de nouveau. "Ressâsser de la farine. = Au fig. Discuter, examiner de nouveau. Ressâsser une afaire, la conduite de quelqu' un; le ressâsser. "On l' a bien sâssé et ressâssé. St. famil. Ressâsser un ouvrage, l' examiner dans un esprit de critique, pour en découvrir jusqu' aux moindres défauts.

RESSAUT


RESSAUT, s. m. [Re-sô: 1re e muet, 2e lon.] Terme d' Architectûre. Avance ou Saillie d' une corniche, ou d' une aûtre partie, qui sort de la ligne droite.

RESSAUTEMENT


*RESSAUTEMENT, s. m. [Re-sôteman: 1re et 3e e muet 2e lon.] Tressaillement. Mot fabriqué par M. Tissot. "Ils ont, au moment où ils s' endorment, de violens ressautemens, qui les réveillent douloureusement. Je ne sais qu' augurer de ce néologisme.

RESSEMBLANCE


RESSEMBLANCE, s. f. RESSEMBLANT, ANTE, adj. RESSEMBLER, v. n. [Re-san--blance, blan, blante, blé: 1re e muet; 2° et 3e lon. aux 3 1ers; 3e é fer. au dern.] Ils expriment un raport, une conformité entre des persones et des chôses. "Ce fils ressemble à son père. "Ces deux jumeaux se ressemblent à s' y méprendre. "Il y a grande ressemblance entre ces deux chôses. "Ce fils est la vraie ressemblance de son père. "L' homme, fait à l' image de Dieu, ayant cessé de lui ressembler, fit des Dieux à l' image et à la ressemblance de l' homme. L' Ab. Trublet. "Ceux, qui ne parlent que pour montrer de l' esprit, ressemblent à ceux, qui ne joûent que pour gagner. La conversation est pour les uns un travail de vanité, comme le jeu est pour les autres un travail d' avarice et d' intérêt. Id. "Ce portrait est ressemblant, ou n' est pas ressemblant. On sous-entend, à l' original. "Ces deux hommes sont bien ressemblans: ils se ressemblent beaucoup. = Se ressembler (en sous-entendant à soi-même) c' est être constant, être toujours le même; se soutenir ou dans la conduite, ou dans l' emploi des talens.
   Un lâche au gré des tems varie et se dément,
   Mais l' honeur se ressemble et n' a qu' un sentiment.
       Gresset, Édouard.
"Ce Peintre, ce Musicien se ressemble, se copie lui-même, se répète. = Le Proverbe dit: les jours se suivent, mais ne se ressemblent pas: le bonheur ou le malheur ne dûrent pas toujours. On dit, dans ce même style, de deux persones, qui se ressemblent parfaitement, qu' ils se ressemblent comme deux gouttes d' eau.
   Rem. Anciènement, on faisait ressembler actif. "J' ai vu en mon tems, dit Montaigne, cent artisans, cent laboureurs plus heureux que des Recteurs de l' Université, et lesquels j' aimerois mieux ressembler. On dirait aujourd' hui, à qui, etc.

RESSEMELER


RESSEMELER, v. act. [3 e muets, et un é fer.] Mettre de nouvelles semelles à une vieille chaussûre.

RESSENTIMENT


RESSENTIMENT, s. m. RESSENTIR, v. act. [Re-santiman, ti: 1re e muet, 2e lon.] Ressentir a le même sens que sentir, mais un sens plus fort. Il ne se dit que de la douleur et de la joie. "Il a ressenti de furieûses douleurs de colique. "J' ai ressenti un grand plaisir, une vive joie de votre retour. = Ressentir vivement la perte d' un ami, une injûre, les obligations qu' on a, etc.
   Ce qu' on ne ressent point, ne s' imagine pas.
       La Chaussée.
Là sentir aurait été plus propre; ce qu' on ne sent point: mais il aurait manqué une syllabe. = Se ressentir signifie aussi, avoir du ressentiment de, etc. "Les Anglais prirent et pillèrent Surate, sans que la Cour, aussi imbécile que pompeuse du Grand-Mogol, parut se ressentir de cet outrage. Volt. Voy. plus bâs Rem. I. = Se ressentir, c' est sentir quelque reste d' un mal qu' on a eu. "Il se ressent encôre des accês de fièvre qu' il a eu si longtemps. "Il se ressentira toute sa vie des débauches de sa jeunesse. "Ce peuple se ressent encôre des horreurs d' une si longue guerre~. "Cet homme se ressent de la mauvaise éducation qu' on lui a donée. "Cette lettre se ressent du mouvement et de l' embarras du voyage. Cic. à Atticus. MONGAULT.
   Rem. Ressentir ne régit point les verbes. On ne dirait pas aujourd' hui d' aprês Bossuet: "On voit comment ils ressentoient qu' il faut s' unir au corps de l' Église. On dirait, ils sentoient que, etc.
   RESSENTIMENT, est 1°. faible renouvellement d' un mal, d' une douleur. "Il a encôre un léger ressentiment de sa colique, de sa goutte: il en a quelques ressentimens. = 2°. Souvenir des injûres, et desir de vengeance. "Il en a fait paraitre un vif ressentiment. "Son ressentiment a éclaté. = 3°. Il s' est dit aûtrefois pour reconaissance. "Pour vous marquer le ressentiment que j' ai de votre générosité. Mde Dacier.
   La fortune, dit-il, à tes voeux asservie,
   Pour tout ressentiment de ses dons éclatans,
   T' en veut voir seulement accepter de plus grands.
       Brebeuf.
L' Acad. dans la dern. édit. définit Ressentiment, souvenir qu' on garde des bienfaits ou des injûres, et elle done cet exemple. "J' ai tout le ressentiment que je dois des services, que vous m' avez rendus. Mais elle ajoute plus bâs qu' il ne se dit guère qu' en parlant des injûres. = Racine l' emploie dans le sens de sentiment, au propre.
   Je demeure sans voix et sans ressentiment.
       Bérénice.
"Ce mot Ressentiment, dit Voltaire, dans son comentaire sur le Théâtre du grand Corneille, est le seul employé par Racine, qui ait été hors d' usage depuis lui. Ressentiment n' est plus employé que pour exprimer le souvenir des outrages, et non celui des bienfaits.
   Rem. 1°. Ressentir, se ressentir (Synon.) Quoique ces deux mots paraissent semblables, ils ne le sont pourtant pas tout-à-fait. Ressentir se prend en bone et en mauvaise~ part. On dit: je ressens le plaisir qu' il m' a fait, l' injûre qu' il m' a faite. Se ressentir ne se prend qu' en mauvaise part. On ne dit pas, je me ressens du plaisir qu' il m' a fait: on dit seulement, je me ressens, ou, je me ressentirai de l' injustice qu' il m' a faite. = Ressentir marque plus le tems présent. On dit à une persone, dont on reçoit un plaisir: je ressens, comme je dois, le plaisir que vous me faites. Se ressentir n' est pas si ataché au tems présent. "Il m' a fait aûtrefois un déplaisir: je m' en ressens encôre. = Je ressens ne signifie guère qu' un mouvement qui pâsse: je m' en ressens signifie quelque chôse de plus établi dans le coeur. = On dit, dans le sens oposé: il m' a fait un mauvais tour, mais il s' en ressentira; il en sera puni; je m' en vengerai. = Doner ses ressentimens à quelqu' un, pour dire, les lui sacrifier, est un latinisme, employé par des Historiens français du Peuple Romain. Voy. DONER Rem. n°. 3°. _ L' Acad. dit sacrifier; et M. l' Ab. de Mongault dans la Traduction des lettres de Cicéron à Atticus.

RESSERREMENT


RESSERREMENT, s. m. RESSERRER, v. act. [Re-sêreman, ré: 1re e muet., 2e ê ouv. prononcez l' r fortement; 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Resserrer, c' est 1°. Serrer davantage. Il se dit au propre et au figuré: resserrer un cordon, une jarretière. Resserrer les noeuds, les liens de l' amitié, de l' aliance. = 2°. Au fig. Abréger. Resserrer la matière, son sujet, un discours. Se resserrer dans des bornes plus étroites. = 3°. Renfermer. "Resserrez ces papiers, cette vaisselle, etc. _ Resserrer un prisonier. "Cette garnison est fort resserrée: elle ne peut sortir sans danger. Cette place est fort resserrée: on ne peut que dificilement y faire entrer des vivres, des munitions. = 4°. Rendre moins libre. "Certains fruits resserrent le ventre. Le ventre~ se resserre. Rendre moins ouvert: le froid resserre les pôres: ils se resserrent par le froid.
   Mon coeur de crainte et d' horreur se resserre.
       Esther.
= Se resserrer, devenir moins étendu, en parlant d' un terrein, d' un pays. = En st. famil. chacun se resserre, retranche de sa dépense.
   RESSERREMENT, action par laquelle une chôse est resserrée. "Le resserrement des pôres caûse souvent de grandes maladies. _ L' Acad. ne done que cet exemple. = Au figuré, c' est un mot de MM. de Port-Royal. "Quand ma grâce entre dans un coeur, il ne se troûve plus dans le resserrement. "Ce mot est nouveau, dit Bouhours; l' usage ne l' a pas encore autorisé. Doutes. Le Rich. port. met resserrement de coeur. L' Acad. ne le met point: malgré cela je crois qu' on peut le dire; qu' il est beau au figuré, et qu' il fait image.

RESSIF


RESSIF, ou RECIF, s. m. [1re e muet.] Terme de Marine. Chaîne de rochers, cachés sous l' eau.

RESSORT


RESSORT, s. m. [Re-sor: 1re e muet.] 1°. En Phisique, propriété par laquelle les corps se rétablissent dans leur premier état, aprês en avoir été tirés par force. "Le ressort de l' air. Faire ressort, se remettre au premier état, en cessant d' être contraint. "L' air: une branche pliée, etc. fait ressort. = 2°. Morceau de métal, fait et posé de façon qu' il se remet dans sa première situation, quand il cesse d' être contraint. "Le ressort d' un fusil, d' une montre: les ressorts d' un carrosse. = Fig. st. famil. on dit d' une persone, dont les moûvemens sont étudiés et composés, qu' il ne se remûe que par ressort; et de celui, qui n' agit que par l' impulsion d' autrui, qu' il n' agit que par ressort. = 3°. Au figuré, moyen dont on se sert pour faire réussir un dessein. "Faire mouvoir toute sorte de ressorts pour venir à ses desseins. "Il n' agit que par des ressorts secrets. "Tel fut le grand ressort de cette afaire.
   Par quels secrets ressorts, par quel enchaînement,
   Le Ciel a-t' il conduit ce grand évènement?
       Esther.
"Comme l' essentiel (de l' Éloquence) consiste tantôt à émouvoir les passions, tantôt à les calmer, il faut conaître tous ces ressorts secrets, que la Nature cache dans le coeur humain. D' OLIV. Pens. de Cic. = Faire jouer tous ses ressorts, mettre tout en oeuvre, employer tout son pouvoir, tous les moyens qu' on a st. famil. = 4°. Étendûe de juridiction. "Ressort d' une Sénéchaûssée, d' un Présidial, d' un Parlement, etc. Juger en dernier ressort, souverainement et sans apel. _ On ne dit point en premier ressort, mais en première instance. = En st. fig. mais simple, ou tout au plus médiocre, on dit: cela n' est pas de mon ressort; il ne m' apartient pas d' en juger. Cela est du ressort de la Théologie: c' est à la Théologie à traiter, à décider de cette matière. "Voilà la source de l' Éloquence, de la Poésie et de tous les Arts, qui sont du ressort de l' imagination. Ramsay.
   Rem. Ressort s' emploie quelquefois au figuré, dans le style le plus noble, dans un sens, qui aproche du sens propre. "J' étudie les ressorts inconus, qui entretiennent l' harmonie du monde. Jér. Dél. "D' Aguesseau venoit quelquefois parmi les Mûses ranimer son génie épuisé et en détendre les ressorts. THOMAS. Dans le dernier sens, ressort n' a raport qu' à la juridiction proprement dite. On dit le ressort d' un Parlement et le district d' une Paroisse. * L' Ab. Laugier emploie l' un pour l' aûtre. "Il convient de placer les Églises, autant qu' on le peut, dans le centre de leur ressort. "Les Paroisses de Paris sont presque toutes mal placées. Au lieu d' être au centre de leur ressort, plusieurs en ocupent l' extrémité. _ District était là le mot propre.

RESSORTIR


RESSORTIR, v. n. RESSORTISSANT, ANTE, adj. [Re-sorti, ti-san, sante: 1re e muet, 4e lon. aux deux derniers.] Ressortir a deux sens: 1°. sortir de nouveau aprês être rentré, ou aprês être déjà sorti: 2°. Être du ressort, de la dépendance de quelque juridiction. Ces deux acceptions n' ont aucun raport. Il semble que pour les distinguer, on devrait écrire pour la première, Re-sortir et pour la 2de Ressortir. _ Dans le 1er sens, ce verbe se conjugue comme sortir, dont il est composé: dans le 2d., voici sa conjugaison. = Ressortir, je ressortis, nous ressortissons, je ressortissois, ou ressortissais, je ressortis; j' ai ressorti; je ressortirai, je ressortirois ou ressortirais, que je ressortisse (pour le présent et l' imparfait) ressortissant, ressorti. = I. Ressortir, sortir de nouveau. "À~ peine était-il rentré, qu' il est ressorti. = Fig. "Pour en faire ressortir les traits, il a choisi un cadre assez usé. Ann. Litt. = II. Ressortir, être du ressort de. "Cette jurisdiction ressortit à un tel Bailliage. * "La Sénéchaussée ressort du Parlement. Anon. Il y a là deux faûtes; ressort pour ressortit, et du pour au: il faut ressortit au Parlement.
   RESSORTISSANT, qui ressortit. "Les Parties sont ressortissantes au Parlement de Paris. Acad.

RESSOURCE


RESSOURCE, s. f. [Re-sour-ce: 1re et 3e e muet.] Ce à quoi on a recours pour se tirer de quelque afaire. "Dieu a été ma seule ressource: parmi les hommes, je n' ai point trouvé de ressource. "Je suis sans ressource, je n' ai point de ressource dans mon malheur.
   Ma ressource est encor au fond de votre coeur,
   Consultez-le, Gernance, il est né pour l' honeur.
       Palissot.
"Avec lui, il y a de la ressource.
   Florise a de l' esprit, avec cet avantage,
   On a de la ressource, et je crois bien plus sage
   Que vous la rameniez par raison, par douceur~,
   Que d' aller oposer la colère à l' humeur.
       Le Méchant.
"Depuis que la République est dans un état si déplorable, les amusemens et les plaisirs de la vie n' ont plus rien de piquant pour moi; et je ne trouve de ressource que dans mes livres. Cic. à Atticus. MONGAULT. = Homme de ressource, qui est plein de ressources, qui a des ressources dans l' esprit; fertile en expédiens. On dit, dans tous les tyles, être de ressource, d' une grande ressource. "Telle Déesse étoit de ressource pour tel autre besoin. Hist. du Ciel. Et dans le st. famil. Faire ressource, rétablir ses afaires. "Pour supléer à la fortune, qu' ils n' ont pu trouver au bout du monde, ils (plusieurs Auteurs de Relations de Voyages) tâchent de faire ressource dans leur Patrie, avec la provision d' impudence qu' on raporte souvent des pays étrangers. Ann. Litt. = On dit aussi d' un cheval, qu' il a de la ressource, pour dire, qu' aprês une longue fatigue, il trouve encôre de la vigueur.

RESSOUVENIR


RESSOUVENIR, v. réc. et impers. et s. m. [Re-sou-venir: 1re et 3e e muet.] Rapeler, se souvenir. Il est ordinairement réciproque. "Je ferai ce que je pourrai pour m' en ressouvenir: il s' en est ressouvenu. Et avec le régime des verbes: je me ressouviens de vous avoir vu à Rome. = Avec le v. faire, il est actif. "Les Grands ont besoin qu' on les fasse ressouvenir de leur condition mortelle. = Il est aussi quelquefois impersonel. Vous en ressouvient-il? Il m' en ressouvient. = * Aûtrefois on le disait pour, considérer, et Vaugelas l' aprouvait. "Ses soldats voyant ce triste spectacle, et se ressouvenant qu' ils n' avoient plus de Chef. Coeffeteau. Il venait d' être tué. L' Auteur voulait donc dire, considérant, etc. L' Acad. avait omis cette acception de ce verbe dans son Dictionaire; mais dans les éditions suivantes, elle l' aprouve, et dit même que se ressouvenir s' emploie élégamment pour, considérer, faire attention, faire réflexion. Elle a continué de le dire dans la dern. édit. en retranchant pourtant élégamment. Voici les exemples qu' elle done. "Ressouvenez-vous que celui qui vous parle est le fils de votre meilleur ami. "Ressouvenez-vous sans cesse de toutes les grâces que le Seigneur vous a faites. "César le voyant à ses pieds, et se ressouvenant de l' instabilité des chôses de ce monde, etc. Il n' y a proprement que la dernière phrâse où se ressouvenir signifie considérer. On peut dans les aûtres le rendre tout aussi bien, et même mieux, par se rapeler. Dans la dernière même, on peut, sans beaucoup forcer le sens, lui doner cette signification. César se ressouvint de l' instabilité des chôses de ce monde: il se la rapela à ce moment: ses prospérités continuelles le lui avoient fait oublier. Cela ne ressemble point à la phrâse de Coeffeteau, que je ne voudrais pas imiter, malgré l' autorité de Vaugelas, qui l' aprouve. = L' Acad. ne met point de diférence entre se ressouvenir et se souvenir; mais se ressouvenir est plus propre, quand on parle des chôses éloignées; et se souvenir, de celles qui sont arrivées depuis peu.
   RESSOUVENIR est aussi s. m. Idée que l' on conserve d' une chôse pâssée. "Il ne me reste de cette afaire qu' un léger ressouvenir. = L' Acad. le dit aussi pour ressentiment d' une douleur qu' on a eûe aûtrefois. "Il y a des maux dont on n' est pas si bien guéri, qu' il n' en reste quelque ressouvenir, des ressouvenirs.

RESSUER


RESSUER, v. n. [re-sué: 1re e muet, 3e é fer.] Rendre l' humidité intérieure. "Les murs neufs ressuent pendant un certain tems. "Il faut laisser ressuer les plâtres, avant d' habiter les apartemens nouvellement faits.

RESSUI


RESSUI, s. m. [Re-sui: 1re e muet.] Lieu où les bêtes faûves et le gibier se retirent pour se sécher, aprês la pluie ou la rosée du matin.

RESSUSCITER


RESSUSCITER, v. act. et neut. [Re--sucité: 1re e muet, dern. é fer. M. de Wailly veut qu' on prononce résucité; 1re é ferm. Plusieurs le prononcent de même.] 1°. Ramener de la mort à la vie. "Ressusciter les morts. N. S. ressuscita Lazare. V. n. N. S. ressuscita le 3e jour: ainsi qu' il l' avait prédit. "Nous ressusciterons tous au jour du Jugement. = Par extension et exagération on dit, qu' un remède a ressuscité un malade, quand il l' a guéri promptement d' une maladie qui paraissait désespérée; et qu' une bone nouvelle ressuscite quelqu' un, quand elle le tire du chagrin mortel où il était. = On dit aussi, proverbialement, d' un vin, d' une liqueur, etc. pour les vanter, qu' ils ressusciteraient un mort. = 2°. Avec les chôses pour régime, renouveler, faire revivre. "Ressusciter un vieux procês, une opinion, une hérésie.
   Ce discours d' un guerrier que la colère enflâme,
   Réssuscite l' honeur déjà mort en leur âme.
       Boileau, Ép. IV.

RESSUYER


RESSUYER, v. n. [Ré-su-ié: 1re é fer. 3e é aussi fer.] Sécher. "Il faut laisser ressuyer ce mur. Chien qui se ressuye au Soleil.

RESTANT


RESTANT, ANTE, adj. verb. et subst. [Rèstan, tante: 1re è moy. 2e lon.] Qui reste. "C' est le seul héritier restant, de quatre qu' il avait. "Le nombre restant, la somme restante. "L' Arrêt adjugea les 300 quatre vingt-dix mille livres restantes aux héritiers. Marm.
   RESTANT est aussi subst. masc. "Je vous payerai le restant avec les intérês. _ Suivant l' Acad. on dit plus ordinairement le reste. On peut ajouter, sur-tout quand il ne s' agit pas de payement,
   Il s' agit d' épouser;
   C' est le point. Le restant doit peu vous amuser.
       Le Flateur.
Si la mesure du vers l' avait permis, l' Auteur aurait dit, le reste.

RESTAURANT


RESTAURANT, s. m. RESTAURATEUR, s. m. RESTAURATION, s. f. RESTAURER, v. act. [Rèstoran, ra-teur, ra-cion, ré: 1re è moy. 2e dout. au 1er et au dernier. Devant l' e muet, l' au est long: il restaûre, restaûrera, etc.] Restaurer, 1°. réparer, rétablir: "Ce remède est bon pour restaurer l' estomac, les forces, la santé: il m' a tout restauré. "Tenez-vous au lit, restaurez-vous, et contez moi bien l' état où vous êtes. Sév. = 2°. Fig. Dans le style soutenu: restaurer l' État, les Arts, le comerce, la discipline, les lois, etc. "Forcez-la à restaurer votre liberté politique, en même tems qu' elle restaure la liberté de votre commerce. Linguet. = 3°. En termes du Sculptûre, de Peintûre et d' Architectûre: restaurer une statue, un bâs-relief, un tableau, une colonne. = Restaurant ne se dit qu' au propre: Aliment qui restaure. En particulier, consomé fort suculent; pressis de viande. = Restaurateur et restauration ne se disent que dans le figuré et en termes d' Arts. (n°. 2°. et 3°.) Le restaurateur, la restauration de la Discipline, des Lois, du Comerce, des Belles-Lettres, etc. "Ce Prince a rebâti cette Ville ruinée: il en a été le restaurateur. "La restauration d' une statûe, d' un monument public. "Confucius n' est pas seulement un Philosophe célèbre: il est encôre regardé comme le restaurateur des Lois, ou plutôt comme le Législateur de la Chine. Pastoret; Zoroastre, Confucius, etc.
   Rem. Restauration ne se dit point des persones; et apliqué au rétablissement d' un Prince détrôné, c' est un anglicisme. "Tous les projets qu' on avoit formés pour sa restauration (de Jacques II.) Targe. "Les Anglais distinguent dans leur Histoire trois fameuses époques: la Réformation sous Henri VIII, la Restauration sous Charles II, et la Révolution sous Jacques II.

RESTE


RESTE, s. m. RESTER, v. n. [Rèste, té: 1re è moyen, 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Reste est, 1°. ce qui demeure d' un tout. "Le reste de son argent, de son bien, de sa fortune, de ses livres. "Le reste du diner, ou simplement, les restes.
   Des Hébreux égarés dans des sables funestes,
   La soif, la faim, la mort suivoient les tristes restes.
   Il entendit leurs cris, il conduisit leurs pas.
       Le Franc.
= 2°. Ce que quelqu' un a abandoné ou refusé. "Il n' a eu que mon reste, ou mes restes.. On le dit le plus souvent au pluriel. = 3°. On dit, dans le 1er sens: les restes d' un homme illustre, ses cendres. = Le reste des hommes, les aûtres hommes. = Être en reste, devoir encôre une partie d' une plus grande somme: "Il est en reste de tant. _ Fig. "Je suis en reste avec vous des bons ofices que vous m' avez rendus. = Et, proverbialement, jouer de son reste, faire ses derniers éforts, employer ses dernières ressources. _ Doner à quelqu' un son reste, lui repartir de telle sorte qu' il n' ait plus rien à répliquer. _ Il ne demande pas son reste, il se retire promptement sans rien dire, craignant quelque chôse de pis. = 4°. De reste, adv. Plus qu' il n' est nécessaire. Avoir de l' argent de reste: je vous entends de reste. "Pour venir à bout de cette afaire, il a de l' esprit, du courage de reste. "J' ai paru vous éviter; vous savez de reste quelle en est la raison. Créb. F. = En devoir de reste: être en reste. Il se dit sur--tout au figuré: "Brutus croit que je lui en dois de reste, parce qu' il m' apelle un très-bon Consul. Un ennemi pourroit-il me donner une plus maigre louange? Cicéron à Atticus. MONGAULT. V. DEVOIR. R. 3°. = 5°. Au reste, du reste, conjonction. Au surplus, malgré cela. "Au reste, je vous dirai que, etc. "Il est capricieux: du reste, il est honête homme. Voy. plus bâs, VII.
   Rem. I. Suivant Ménage, reste est fém. Dans cette expression, à toute reste, mais l' Acad. ne la raporte pas; et si elle a été aûtrefois d' usage, elle est aujourd' hui inusitée. = II. Le P. Sicard traite le reste comme la plupart, et lui done la vertu d' un pluriel. "Le reste des Égyptiens l' ignorent entièrement; mais la plupart et quelques aûtres collectifs ont seuls ce privilège: le reste ne l' a pas: il falait dire, l' ignôre. _ La règle des collectifs peut paraître favorable au P. Sicard; mais il me semble que l' usage y est contraire. Voy. COLLECTIF. = III. On peut dire du dernier rejeton d' une illustre famille, qu' il est le reste d' un sang illustre, et non pas qu' il en fait le reste. Le verbe faire ne va pas bien là, et je le vois avec peine dans ces vers de Racine:
   La plus sainte des lois, Ah: c' est de vous sauver,
   Et d' arracher, Seigneur, d' une mort manifeste,
   Le sang des Ottomans dont vous faites le reste.
       Bajazet.
Dont vous êtes le reste est, à la vérité, prosaïque; et c' est peut-être la raison pourquoi Racine a préféré l' aûtre manière. = IV. Plusieurs disent, devoir du reste, demeurer en reste, pour être en reste: l' Acad. ne met que celui-ci, et il est le plus usité; mais je pense qu' on peut aussi employer les aûtres, du moins au figuré. "Voilà sur quoi je vous devrai du reste, si vous voulez bien, pour l' amour de moi, avoir beaucoup de soin de vous. Sév. "Il ne voulait point demeurer en reste avec les Turcs sur ce point-là. Ducerc. Hist. de Perse. Il me parait que demeurer en reste est moins trivial que, être en reste. = V. * Jeux de reste, pour, jeux de hazard, est un gasconisme, comun dans toutes les Provinces méridionales. = VI. Avoir de beaux restes se dit, ironiquement et en mauvaise part, de quelqu' un qui se croit corrigé d' un vice. "Cela pâssera: moi, j' étois tout de même (parleuse impitoyable) dans ma jeunesse. _ Mais vous en avez encôre de beaux restes. Th. d' Éduc. = VII. Au reste et du reste s' emploient assez infidéremment par la pluaprt des Écrivains: cependant ils n' ont pas le même sens. Le premier enchérit sur ce qu' on a dit, et a le sens de outre cela; le second signifie presque la même chôse que à cela prês, et emporte toujours oposition. "Cette poursuite ne peut se faire qu' à grands frais: au reste elle a peu de bien, huit enfans et beaucoup d' afaires. "Il était colère, bizarre, emporté; du reste, homme d' honeur et bon ami. Bouh. Rem. Nouv. _ Au reste peut se mettre aprês quelques mots de la période: "Je dois vous dire au reste, etc. Du reste se met toujours le premier. "Du reste ne croyez pas que, etc. = Quand il est ainsi à la tête de la période, il signifie dâilleurs.
   RESTER, c' est 1°. Être de reste. "Voilà ce qui reste du dîner. "C' est-là tout ce qui reste de son bien; tout ce qui lui reste. = Verb. impers. Il régit le datif de la persone et l' acusatif de la chôse, ou la prép. à et l' infinitif. "Il ne lui reste que l' espérance. "Que me reste-t-il à faire? Il me reste mille pages à transcrire, etc. = 2°. Demeurer aprês que les aûtres sont partis. "Il est resté tout seul à la maison. "Il resta encôre quelque tems à Rome aprês notre départ. "Il resta deux Bataillons pour garder le défilé. = 3°. En termes de Marine, être situé. "Cette ÃŽle nous restoit au Sud-ouest.
   Rem. I. Vaugelas condamnait l' usage de ce mot dans le sens de demeurer; mais l' Acad. l' aprouvait pour la conversation. Dans ce sens, il prenait l' auxil. avoir; il a resté long--tems à Rome. Elle ne le dit plus dans la dern. édit. et ne l' admet que pour demeurer au delà du tems prescrit. = Les Normans disent rester pour demeurer; les Gascons le disent aussi dans ce sens, et même pour loger: "Où restez-vous? Je reste à telle rûe, chez M. un tel, etc. Gasc. corr. = II. Quand rester signifie être le reste de, ou persister, et quand il ne régit que le datif, il prend l' auxiliaire être. "Il n' y a eu que deux douanes, qui soient restées sur pied. "Je fus deux mois dans cet embarras, et j' y serois resté plus long-tems, si, etc. "Elle doneroit pour vous sa vie, le seul bien qui lui soit resté. Marm. "Les apointemens et les pensions sont restés les mêmes, et le prix des denrées est monté à plus du double. Volt. Quand il est impersonel, ayant le régime direct, il prend avoir pour auxiliaire: il ne lui a resté que l' espérance de réparer bientôt ses pertes. Plusieurs veulent que dans cette phrâse, qui revient rarement dans le discours, il faille dire, il ne lui est resté que l' espérance; et je crois qu' ils ont raison. Car, à le bien envisager, l' espérance n' est pas à l' acusatif, mais au nominatif: c' est comme si l' on disait, l' espérance seule lui est restée. Ainsi, le prétexte d' employer l' auxiliaire avoir, à cause du régime direct ou de l' acusatif, n' a point de fondement réel. = Voltaire fait régir à ce verbe, quand il est impersonel, la prép. de et l' infinitif. "Après la prise de Namur, il restait de dissiper ou de battre l' Armée des Alliés. Siècle de Louis XV. Je n' ai vu, qu' il me souviène, ce régime employé aûtre part qu' en cet endroit, mais je n' ôserais le condamner. = III. On suprime quelquefois le pronom il, et alors rester se met à la tête de la phrâse. "Restoient les Vénitiens, gens plus dificiles à amuser, ou à satisfaire. d' Avr. _ Il régit que avec l' indicatif, ou la prép. à et l' infinitif. "Reste donc que les États, qui forment le cercle de la vie civile, sont l' ouvrage de Dieu même. L' Ab. Poulle. "Reste à savoir si, etc. * Bourdaloue met la prép. de. "Reste donc de conclure que, etc. À~ conclure aurait mieux valu. Au reste, ce tour n' est pas du beau style. = IV. M. l' Ab. Royou et M. Salaun font régir à rester l' infinitif sans préposition. "Isaure lui témoigne qu' elle aimerait mieux qu' il restât lui répéter a elle même ces mots, dont le charme l' attendrit. Roy. "Edgard et Helmonde restent encôre quelque tems faire la conversation sous l' orage. Salaun. Il y a peu d' exemples d' un pareil régime. = V. En rester là, pour, en demeurer là, frise le gasconisme. "Je lui céderois la moitié de mon douaire, à condition que le procês en restât là. Miss Bidulph. = VI. Rester pour tarder, et ne pas rester de, pour, ne pas laisser de faire sont des provençalismes. * "Vous avez bien resté! "Si vous restez plus longtems de le faire, vous n' y serez plus à tems. * "Je ne resterai pas de le faire, ou que de le faire, etc.

RESTITUABLE


RESTITUABLE, adj. RESTITUER, v. act. RESTITUTION, s. f. [Rèstitu-able, tu--é, tu-cion: 1re è m. 4e dout. au 1er, é fer. au 2d.] Restituer c' est, 1°. Rendre ce qui a été pris ou possédé induement, injustement. "Si vous avez du bien d' autrui, il le faut restituer. "Il a été condamné à restituer cette somme et les intérêts, les fruits, etc. = 2°. Réparer. "Restituer l' honeur de, etc. = 3°. Rétablir. "Restituer un texte, un passage, un endroit d' un Auteur. = 4°. Au Palais, il régit les persones. Restituer en son entier, remettre quelqu' un dans l' état où il était auparavant. Se faire restituer contre son obligation, contre sa promesse. = Restituer est plus propre que rendre, lorsqu' il s' agit de ce qu' on a pris ou détenu d' une manière injuste. Voy. RENDRE.
   Rem. Restituer, au futur et au conditionel, n' est que de 4 syllabes: l' e y est muet: je restituerai, il restituerait, etc. pron. restitûré, tûrè.
   Je vous restitûrois un beau torrent d' injures.
       Piron.
  RESTITUABLE, qui peut être restitué, n' a que le 4e sens: "Les mineurs sont restituables contre les actes qu' ils ont souscrits en minorité, et où ils sont lésés.
   RESTITUTION a tout les sens de restituer. "Être obligé à restitution. "Restitution de fruits. "Restitution d' un texte, d' un passage. Restitution en entier.

RESTREINDRE


RESTREINDRE, v. act. *RESTREINTE, RESTRICTION, s. fém. RESTRICTIF, IVE, adj. [Rès-trein-dre, trein-te, trik-cion, tif, tive: 1re è moy. 2e lon. 3e e muet aux deux premiers.] Restreindre, au propre, c' est resserrer. "Médicament, eau qui restreint. Il n' est guère d' usage. Acad. = Au figuré, diminuer, réduire, limiter: "Restreindre une proposition, une prétention, un droit. "Se restreindre à des propositions raisonables. "L' usage a restreint ce droit aux Archevêchés. "Il a été obligé de se restreindre à un petit train. = Restriction, condition qui restreint. "Mettre, aporter quelque restriction. "Clause qui porte restriction. Acorder une grâce, une dispense sans restriction. "Le Gouvernement d' Espagne ne le tente que médiocrement, (Pompée) du moins à ce qu' il dit. Cette restriction est nécessaire lorsqu' on est sur le chapitre du personnage. Cic. à Atticus. MONGAULT. = Restreinte pour restriction est un anglicisme. "La plus grande restreinte, que cette Doctrine ait imposée. L' Ab. Prévot, Hist. des Stuarts. "Il jugea que ces restreintes étoient insufisantes. Id. Ibid. L' Anglais est restraint. = Restrictif, ive, qui restreint, qui limite. "Clause restrictive.

RESTRINGENT


RESTRINGENT, ENTE, adj. [Rès-trein--jan, jante; 1re è moy. 2e et 3e lon.] Cet adjectif est tiré du participe actif du verbe restreindre, qui n' est guère d' usage au propre; et ce n' est qu' au propre que cet adject. est usité. Qui a la vertu de resserrer une partie relâchée. "Médicament restringent, eau restreingente. = S. m. "Un restreingent.

RÉSULTANT


RÉSULTANT, ANTE, adj. RÉSULTAT, s. m. RÉSULTER, v. neut. [Rézultant, tante, ta, té: 1re é fer. 3e lon. aux deux prem. é fer. au dern.] Résulter, s' ensuivre. Il ne se dit qu' à la 3e persone et régit l' ablatif. "Que résulte-t-il de là? Qu' en peut-il résulter? "Il en résultera de grands inconvéniens. "Les faits qui résultent des informations.
   Rem. Plusieurs Auteurs ont doné à résulter le verbe être pour auxiliaire. "Il en seroit résulté des inconvéniens. Hist. d' Angl. "D' où il est résulté que, etc. L' Ab. Grosier. "De grands avantages en sont résultés. Neck. "Il est résulté que etc. Anon. Un des Auteurs du Mercure joint dans la même phrâse les deux auxilaires, avoir et être. "Loin qu' il en ait résulté du galimathias, il en est résulté des idées plus nettes. _ L' Acad. avertit que ce verbe se conjugue avec le verbe Avoir. Il faut donc dire. "Il en aurait résulté; d' où il a résulté; en ont résulté. "Il a résulté que, etc.
   RÉSULTANT, qui résulte. Il régit de, comme son verbe. "La beauté résultante de la diction venoit des principes de l' Art Poétique. Du Bos. "Les câs resultans du procês.
   RÉSULTAT, ce qui résulte. Il ne se dit guère que d' une délibération, d' une assemblée, d' une conférence, d' un calcul. "Le résultat de la Consultation des Avocats, des Médecins. "Voilà quel a été le résultat de l' assemblée; de cette dispute. Quelques Auteurs lui ont doné le sens de suite, fruit de, etc. Voltaire entre autres. "Quel fut le résultat de cette multitude innombrable de combats?... Rien que du sang inutilement versé dans des pays incultes et désolés, etc. "Si nous faisons des faûtes, c' est parce que notre calcul, soit défaut de lumières, soit ignorance ou passion, n' embrasse pas tout ce qui doit entrer dans le résultat. Duclos.

RÉSUMÉ


RÉSUMÉ, s. m. [Rézumé: 1re et 3e é fermé.] Précis. "Voici un triste résumé de ces malheurs. Volt. "Instruire par des resumés simples, aisés et à la portée de tout le monde. L' Ab. De Fontenai.

RÉSUMER


RÉSUMER, v. act. RÉSUMPTION, s. f. [Rézumé, zonp-cion: 1re é fermé.] Résumer, reprendre en peu de paroles ce qu' on a dit plus au long. Résumption, action de résumer. "Il résuma toutes les raisons qu' on lui avait oposées, et il y répondit. "La résumption d' un argument. _ Le subst. est peu usité, et ne se dit guère que dans cette phrâse. Le verbe a un emploi plus étendu.
   Rem. Un Auteur moderne fait résumer neutre, et lui done le sens et le régime de conclûre. "M. M... résume enfin de ces diférentes considérations, que c' est par l' abondance des belles chôses que les Italiens se dégoûtent des belles chôses. On peut dire que cette expression n' est point française. = Se résumer, récapituler, est du style du Bârreau. "En me résumant, on voit que, etc. dit M. Rangouse. M. Necker se sert aussi de cette locution, que M. Desgrouais met au nombre des gasconismes, quoiqu' elle ne soit pas particulière aux Provinces méridionales. "Les Avocats de Province disent, résumons-nous, pour nous résumer, etc. Il faut dire, ou, en résumant les avis, les raisons; ou, en résumant tout ce qui a été dit, il parait, etc. Gasc. corr. M. Moreau, qui a long-tems fréquenté le Barreau, dit dans ses discours sur l' Hist. de Fr. Résumons-nous et concluons.

RÉSURRECTEUR


*RÉSURRECTEUR, s. m. Celui qui ressuscite. Mot forgé par un Auteur très-moderne. "Il n' admire Gluck que parce qu' il croit voir en lui le résurrecteur de la Tragédie grecque. Observ. sur la Lit. en France. Je ne crois que ce néologisme fasse fortune.

RÉSURRECTION


RÉSURRECTION, s. f. [Rézurèk-cion: 1re é fer. 3e è moy. r forte.] Résurrection, retour de la mort à la vie. La résurrection de Lazare, de N. S. J. C. des Morts. = Par extension, guérison surprenante, inopinée.

RETABLE


RETABLE, s. m. [1re et dern. e muet.] Ornement d' Architectûre, contre lequel est apuyé l' Autel.

RÉTABLIR


RÉTABLIR, v. act. RÉTABLISSEMENT, s. m. [Rétablir, bliceman: 1re é fer. 4e e muet.] Ils expriment l' action de remettre au premier état, en bon ou en meilleur état. "Rétablir sa santé. "Ce remède l' a bien rétabli. "Il a été rétabli dans sa charge, dans ses biens. "Il a bien rétabli ses afaires. "Il s' est bien rétabli. "Rétablir le comerce, la discipline militaire. _ Rétablir un passage, un texte, le restituer. Voyez RESTITUER. "Le rétablissement d' un édifice, des chemins, de la santé. Depuis son rétablissement, etc. = Rétablir, Restaurer, Réparer (synon.) Le travail de rétablir est relativement plus grand que celui de restaurer, et celui-ci plus grand que celui de réparer. On rétablit un édifice ruiné, des fortifications détruites. On restaure un bâtiment qui dépérit, une statue mutilée, de vieux tableaux. On répare une maison négligée; et des ouvrages de l' art qu' on repolit. = On rétablit ses forces qu' on avoit perdues, en les recouvrant avec le tems: on restaure des forces, qui étoient fort afoiblies, en les ranimant par un moyen éficace: on répare ses forces diminuées, en les reprenant petit à petit. Extr. des Synon. Fr. de M. l' Ab. Roubaud. = Ce subst. n' a pas de pluriel. L' Ab. Prévôt l' emploie dans ce nombre. "On y joignit des Pagodes, des Prêtres idolâtres et des rétablissemens les plus oposés à la Religion Chrétiène. Hist. des Voy. On dit des établissemens au plur. mais l' usage n' admet pas rétablissemens.

RETâILLE


RETâILLE, s. f. [Retâ-glie: 1re et dern. e muet, 2e lon. mouillez les ll.] Morceau qu' on a retranché. "Retâille de peau, d' étofe.

RETAPER


RETAPER, v. act. [Retapé: 1re e muet, 3e é fer.] Retrousser les bords d' un chapeau contre la forme.

RETARD


RETARD, s. m. RETARDEMENT, s. m. RETARDER, v. act. et n. [Retar, deman, dé: le d final du 1er ne se prononce jamais: 1er e muet, 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Retard et Retardement ont le même sens, mais l' emploi du 1er est plus borné. Délai, remise. "Débiteur qui est en retard de payer: le retard d' une pendule. "Aprês un retard bien involontaire. "Causer, aporter du retardement à. "Il n' y aura point de retardement de ma part. "Le retardement d' un payement, d' un départ.
   Rem. Le Dict. de Trév. dit que retard n' est pas du bel usage. Il l' est dans les phrâses citées. = Il semble que retardement exprime mieux l' action de retarder, et retard l' éfet de cette action. Cependant le retardement peut être involontaire, comme retard, de la part de celui qui en soufre.
   Retarder, actif, c' est 1°. diférer. "Retarder le jugement d' un procês, un payement qu' on doit faire. "Il peut retarder sa perte, il ne peut l' éviter. Neuville. = 2°. Empêcher d' aler, d' avancer. "On a retardé le Courrier, l' horloge. "Cela retarde ses progrês. = 3°. Avec les chôses, comme sujet, faire qu' une chôse soit diférée. "Cet accident retarda son mariage, son départ. = V. n. Aler, venir plus lentement ou plus tard. "L' horloge retarde; la lune retarde tous les jours de trois quarts d' heure, ou environ. "La marée retarde; la fièvre retarde, etc. = Quelques Auteurs le disent neutralement des persones avec la prép. de et l' infinitif. "Je retarde quelques jours d' aller à Livri, pour voir comme tout ceci se démêlera. Sév. L' Acad. ne done point d' exemple de ce régime. Diférer est plus sûr, mais je n' ôserais condamner retarder, employé de cette manière.

RETENIR


RETENIR, v. act. RÉTENTION, s. fém. [Retenir, rétan-cion: 1re et 2e e muet au 1er; 1re é fer. au 2d, 2e lon. Le verbe a l' e muet à la 1re et le subst. l' é fer. C' est un caprice de l' usage.] Retenir, c' est 1°. Ravoir, tenir encôre une fois. "Je voudrais retenir l' argent que je lui ai prété. "Vous ne m' y retiendrez plus. Et familièrement: je voudrais bien retenir ce que j' ai dit, ne l' avoir pas dit. = 2°. Garder par devers soi ce qui est à un aûtre. "Retenir le bien d' autrui, les gages d' un domestique, le salaire d' un ouvrier, les papiers d' un procês. = 3°. Conserver ce qu' on a; ne point s' en défaire. De là maxime du Droit: Doner et retenir ne vaut; une donation n' est point valide, si l' on ne se dessaisit pas en éfet de ce que l' on done. = C' est aussi simplement, conserver. "Retenir l' accent de son pays, ses vieilles habitudes. = 4°. Réserver. "Il a afermé sa terre; mais il s' est retenu les bois et les vignes. "Retenir une pension sur un bénéfice. _ Et à peu prês dans le même sens. "Retenir sur les apointemens des Oficiers la capitation: "Il a tant retenu pour les frais, pour les réparations, pour ses peines. = En parlant des Juges, retenir une caûse; s' en réserver la conaissance. = 5°. S' assurer par précaution de etc. "Retenir une place au carrosse, une loge à la Comédie; une chambre, une fenêtre pour un spectacle. = 6°. Faire demeurer ou séjourner, ne pas laisser aler. "On m'~ a~ retenu dans cette assemblée, dans cette ville, plus que je ne voulais. Retenir prisonier, ou en prison. _ Et avec les chôses pour régime. "Retenir l' eau, son haleine, son urine ou son eau. = 7°. Empêcher. "Il serait tombé; il allait tuer cet homme, si je ne l' eusse retenu. "Se retenir, s' arrêter avec éfort, pour s' empêcher de tomber; s' empêcher de rire. "Plus il se passionoit, plus nous éclations de rire, quelque éfort que nous fissions pour nous retenir. Le Franc, Dial. de Lucien. = 8°. Réprimer, modérer. "Si la crainte de Dieu ne retenait les hommes, à quels excês ne se porteraient-ils pas? Qu' on en juge par ceux que cette crainte salutaire ne retient plus. "Retenir sa colère. "Je ne sais ce qui me retient que je ne, etc. = 9°. Mettre ou garder dans sa mémoire. "Retenir sa leçon. "Il n' a fait qu' entendre ces vers une seule fois: il les a retenus. "Avez-vous bien retenu tout ce que je vous ai dit? = 10°. V. n. ou réc. en parlant des chevaux de carrosse ou de charroi, empêcher le carrosse ou la charrette d' aller trop vite à une descente. "Ce cheval a les reins forts; il retient ou il se retient fort bien.
   Rem. 1°. Aûtrefois on employait retenir au lieu d' empêcher, et avec les mêmes régimes. "Une discipline si sainte devoit les retenir de rien avancer contre, etc. Boss. "Un si grand exemple a toujours retenu les persones sages de s' engager par eux-mêmes au ministère des Autels. = A retenu de s' engager n' est pas correct, dit M. de Wailly. Dites, a empêché de s' engager. = 2°. Un Auteur três-moderne lui a doné le même régime au passif, dans le sens d' être arrêté. "Cette Dame étoit retenûe de lui ofrir quelque assistance, dans la crainte de blesser sa délicatesse. L' Auteur devait du moins dire, par la crainte, qui est le vrai régime de ce verbe. Pour celui de l' infinitif, il serait utile, mais il n' est pas d' usage. = 3°. Montesquieu met à au lieu de de. "Auguste fut fort retenu à acorder le droit de bourgeoisie romaine. Là retenu est employé adjectivement et dans le sens d' avare, ou du moins de circonspect. En ce dernier sens, il a ce régime. Voy. l' article suivant.
   RETENU, ÛE, partic. et adj. Sage, modéré, circonspect. "Il est fort sage et fort retenu. "Une fille três-sage et três-retenûe. "Il est fort retenu dans ses discours. "Il faut être fort ou plus retenu sur de pareilles matières. "On ne saurait être trop retenu à blâmer la conduite des aûtres. Voy. Retenûe, s. f.
   RÉTENTION ne se dit qu' au Palais, dans le sens de réserve, réservation; clause de rétention sur des revenus; la rétention des fruits, d' une pension sur un bénéfice; et en Médecine, d' une maladie par laquelle l' urine est retenûe. "Il est malade d' une rétention d' urine, ou, simplement, d' une rétention. = Il n' a pas le sens d' action de retenir, de garder à son usage; et Mr. Reboulet s' est mal exprimé, quand il a dit dans son Hist. de Louis XIV: "L' Empereur accorda à l' Electeur de Saxe la rétention des biens ecclésiastiques pendant cinquante ans. On doit dire, permettre de retenir, et non pas acorder la rétention.

RETENTIR


RETENTIR, v. neut. RETENTISSANT, ANTE, adj. RETENTISSEMENT, s. m. [Re--tanti, ti-san, sante, ticeman: 1re e muet, 2e lon. 3e lon. au 2d et au 3e, e muet au dern] Ils ont le même sens que Résoner, Résonant, Résonement, et ils sont plus usités. Ils expriment l' action de rendre, renvoyer un son éclatant. "Voûte qui retentit; les échos retentissent. Lieu retentissant; voix, voûte retentissante. "Le canon a produit un retentissement à ébranler tous les corps environans, et toutes les têtes surtout. = Le verbe est souvent suivi de la prép. de: "L' air retentissait de cris d' allegresse. "L' armée fait retentir tous les environs de ses cris pitoyables. Maimb. Et figurément: "Toute l' Europe retentissait de ses louanges, du bruit de ses exploits. = Il se dit de ce qui renvoie le son et du son lui-même. "Ce coup de tonerre a retenti dans toutes les vallées des environs. "La voix retentit contre les voûtes de cette Église. "Ses louanges retentissent dans tout l' Univers. "Ô nuit éfroyable où retentit tout-à-coup, comme un éclat de tonerre, cette étonante nouvelle, MADAME se meurt, MADAME est morte. Boss. = Quelques Auteurs l' ont employé dans un sens métaphorique un peu précieux. "Ses tristes accens viènent retentir sur son coeur. Jér. Déliv. _ Dans l' Ann. Litt. on critique une expression à peu prês semblable.
   Vos cris ont retenti dans son coeur consolé.
"Des cris qui retentissent dans le coeur, dit le critique, est une métaphore, qui, pour être un peu usée, n' en est pas moins guindée.

RETENTUM


RETENTUM, s. m. [Pron. retentôme, 1re e muet, 2e lon. en n' y a pas le son d' an; l' e surajouté à la 3e extrêmement muet. _ C' est encôre une bizarrerie de l' usage, qu' on écrive rétention avec un accent aigu, et retentum sans accent.] Terme de Pratique, qui a pâssé du latin en français sans changement. Article, que les Juges n' expriment pas dans un Arrêt qu' ils rendent, mais qui ne laisse pas d' en faire partie, et d' avoir son exécution. Il ne se dit qu' au criminel. = Par extension, on le dit de ce qu' on retient soi-même par duplicité, lorsqu' on traite d' afaires avec quelqu' un. "Cet homme a toujours quelque retentum: il faut s' en défier, quand on traite avec lui.

RETENU


RETENU, UE, adject. Voy. aprês RETENIR.

RETENûE


RETENûE, s. fém. [1re, 2e et dern. e muet, 3e lon.] 1°. Modération, discrétion, modestie. "Il a de la retenûe: il n' a nulle retenûe. "Fille modeste, et qui a beaucoup de retenûe. "Il n' y a que trop de Lecteurs qui se laissent séduire par les mensonges d' un Écrivain sans pudeur et sans retenûe. VOLT. "L' usages des métaphores ne demande pas seulement de l' exactitude; il demande encôre de la retenûe. = 2°. Grâce que le Roi fait, lorsque sur les charges qui ne sont point héréditaires, il assure, par un brevet, au titulaire, ou à ses héritiers, une somme payable par celui, qui possèdera la charge aprês lui. "Brevet de retenûe, etc.

RÉTICENCE


RÉTICENCE, s. f. [Réti-sance: 1re é fer. 3e lon. 4e e muet.] Supression volontaire d' une chôse qu' on devrait dire, ou mentioner dans un acte. Il y a dans ce contrat une réticence frauduleûse ou vicieûse. = C' est aussi une figure de Rhétorique, par laquelle l' Orateur fait entendre une chôse sans la dire.

RÉTIF


RÉTIF, IVE adj. [1re é fer. 2e lon. au 2d.] Au propre, on le dit des chevaux, ânes, etc. qui s' arrêtent ou reculent, au lieu d' avancer. "Cheval rétif. Mule rétive et quinteûse. = Au figuré, en parlant des hommes: qui résiste et ne veut pas faire ce qu' on desire de lui. "Il est rétif; et substantivement, il fait le rétif.
   Pour eux Phébus est sourd, et Pégase est rétif.
       Boileau.
  Si ce palliatif
  N' opère rien sur leur esprit rétif.
      Rousseau.
   La Nature, envers moi, moins mère que marâtre,
     M' a formé três-rétif et três-opiniâtre,
   Sur-tout lorsque quelqu' un veut m' imposer la loi.
       Dest. Le Glorieux.

RÉTINE


RÉTINE, s. f. [1re é fer. dern. e muet.] Lacis formé dans le fond de l' oeuil par les filets du nerf optique.

RETIRADE


RETIRADE, s. f. RETIRATION, s. f. RETIREMENT, s. m. [1re e muet; tion dans le 2d, a le son de cion, et en, dans le 3e, le son d' an.] Le 1er est un terme de Fortifications: Retranchement fait derrière un ouvrage, et dans lequel les assiégés se retirent, quand les assiégeans ont emporté l' ouvrage. = Le 2d est un terme d' Imprimeur: c' est l' action d' imprimer le second côté d' une feuille de papier. = Le 3e se dit en Chirurgie. Contraction, racourcissement. "Le retirement des nerfs; un retirement de nerfs.

RETIRER


RETIRER, v. act. [1re e muet, 3e é fer.] 1°. Tirer une seconde fois. "Retirer une Loterie, qui a été mal tirée. = 2°. Tirer à soi une chôse qu' on avoit poussée dehors. "Retirer son haleine, etc. = 3°. Tirer une chôse d' un lieu où elle avait été mise. "Retirer un seau du puits; un homme de prison, un enfant du colège, une fille du couvent. "Il l' a retiré du péril, d' un mauvais pâs. _ Figurément: "Il l' a retiré du vice, de la débauche. = 4°. Reprendre ce qui était en gage, en dépôt. = 5°. Percevoir, recueuillir. "Il retire tant de sa charge, de cette maison, de cette terre. = 6°. Doner azile. "Je l' ai retiré chez moi. = 7°. Se retirer, s' en aller, s' éloigner. "Je vous ai assez importuné: je me retire. Se retirer de la ville, de la cour, du monde. Et sans régime, se retirer. _ On dit aussi, en ce sens, faire retirer. "Il fit retirer tout le monde. "Faites retirer vos gens. = 8°. En parlant des chôses, se racourcir. "Le parchemin se retire au feu. "Les nerfs se retirent. Voy. Retirement. = 9°. Rentrer dans son lit, en parlant d' une rivière débordée. "La rivière se retire, les eaux comencent à se retirer.
   RETIRÉ, ÉE, adj. Lieux retirés~, solitaires, peu fréquentés. Homme retiré, qui mène une vie retirée, qui vit dans une grande retraite. "La Cour fut moins vive et plus sérieuse, depuis que le Roi comença à mener avec Madame de Maintenon une vie plus retirée. Volt.
   Rem. M. Racine le fils, M. Linguet et un Anonyme, ont doné à retirer le datif pour 2d régime. "Le Poète, mécontent des Acteurs, leur retira sa Pièce (Alexandre.) "Elle peut nous les retirer (ces avantages), quand elle le jugera à propôs. "Le Prince lui retire, et à sa postérité, des privilèges qui, etc. Ce régime est peu usité, mais je n' ôserais le condamner. = Massillon done à ce verbe le sens de détourner. "Le premier écueuil de la piété des Grands, est de les retirer des soins publics, et de les renfermer en eux-mêmes. Je crois qu' on peut le dire aprês cet illustre Orateur. = On dit, se tirer d' afaire, d' une maladie, d' inquiétude, etc. Plusieurs Auteurs ont dit, à la place, se retirer: ce n' est pas l' usage.

RETIROTE


*RETIROTE, s. f. Mot employé par Mde. de Sévigné d' aprês Louis XIV. "L' armée de M. de Monterey a fait la retirote. Voilà le même mot que dit avant hier Sa Majesté.

RETOMBER


RETOMBER, v. n. [Retonbé: 1re e muet: 2e lon. 3e é fer.] Tomber une seconde fois ou plusieurs fois. Il se dit au propre et au figuré. "Il s' était relevé: il est retombé. "Il retombe toujours dans les mêmes faûtes. "Quelquefois mon esprit s' élance vers Dieu; mais il retombe aussitôt dans les embûches du monde. L. F. Poème de S. Grég. "Il s' y trouvoit quelques Juges intègres, que le criminel (Clodius) n' avoit pu récuser; et qui, tristes et confus de se voir avec des gens qui leur ressembloient si peu, paroissoient craindre que l' infamie du Corps ne retombât sur les particuliers. L' Abé de Mongault, Let. de Cic. à Atticus.

RETORDRE


RETORDRE, v. act. RETORS, ORSE, adj. [1re e muet.] Retordre, c' est tordre une seconde fois: ou simplement tordre, en parlant du fil et de la ficelle. _ En st. prov. doner du fil à retordre à quelqu' un, lui susciter bien des embârrâs.
   Retors: au propre, qui a été retordu: du fil retors. = Au fig. rusé et artificieux. "C' est un homme retors: il est retors. On ne le dit guère au fém.

RÉTORQUER


RÉTORQUER, v. act. RÉTORSION, s. f. [Rétorké, cion.] Ils expriment l' action de tourner contre l' adversaire les argumens, les preuves dont il s' est servi. "Rétorquer un argument, un raisonement, une preûve. "Cet argument est sujet à rétorsion.

RETORTE


RETORTE, s. f. [1re et dern. e muet.] Vaisseau qui a un bec recourbé pour se joindre au récipient.

RETOUCHER


RETOUCHER, v. act. et neut. [1re e muet, 3e é fer.] Corriger, réformer, perfectioner. Il régit ou l' acusatif, ou le datif. On dit, retoucher un ouvrage, un tableau, ou bien, à un tableau, à un ouvrage. Le 1er est plus d' usage.

RETOUR


RETOUR, s. m. RETOURNER, v. n. et act. [1re e muet.] Retour: 1°. Au plur. Tours multipliés et contraires aux premiers: les tours et les retours d' un labyrinte, d' une rivière. = 2°. Action de revenir. "Être de retour. "Je verrai cela à mon retour.
   Les vertus de retour, par d' aimables prodiges,
   des antiques forfaits éfacent les vestiges.
= Figurément, être sur le retour, comencer à déchoir, à vieillir. = 3°. Changement, vicissitude. "La fortune a ses retours. "Sans espérance de retour; sans retour.
   Vos biens sont dans leurs mains, sans espoir de retour.
   Ne nous en flatons point, je n' y vois aucun jour.
       La Chaussée.
  Les plaisirs criminels, et leur retour amer.
      Le Franc.
= 4°. Arrivée au lieu d' où l' on est parti. "Au retour de la campagne, de la chasse. = Figurément, le retour du printems, d' un accês de fièvre. = 5°. Reconaissance éfective d' un bienfait, espèce d' équivalent de ce qu' on a reçu; l' amitié demande du retour. = 6°. Ce qu' on ajoute à la chôse qu' on troque, pour rendre le troc égal. ""Quel retour me donerez-vous? Un louis de retour.
   Rem. 1°. Régulièrement, de retour doit se raporter au sujet de la phrâse, à la tête de laquelle il est placé. "De retour chez moi, j' ai trouvé une lettre. Plusieurs le font raporter au régime. "De retour dans ses États, une révolte plus fâcheuse encôre, ne lui permit pas de quitter les armes. Moreau. Cette construction n' est pas régulière. Il faut dire alors, à son retour dans ses États, qui est une phrâse incidente et indépendante; au lieu qu' avec de retour, ainsi placé, le participe étant est sousentendu, et ce participe doit se raporter au nominatif du verbe. "Il avoient fourni des troupes à son frère, qui avoit voulu le massacrer à son retour. TÉLÉM. Ce dernier adverbe peut se placer au comencement, au milieu, ou à la fin de la phrâse. = On dit ordinairement, sans retour, au singulier: mais on peut pardoner aux Poètes de le mettre au plur., à cause de la rime.
   Mais les peuples rivaux sont jaloux sans retours,
   Ils cessent de combattre, et s' abhôrrent toujours.
       Le P. Follard, Thémistocle.
= Retour se dit agréablement au figuré. On dit, par exemple, qu' un homme a de fâcheux retours, pour marquer qu' il est capricieux; qu' il n' y a point de retour avec lui, pour signifier qu' il est irréconciliable L. T. Et plus sérieusement: le retour d' une âme vers Dieu, sa conversion; faire un retour vers Dieu; se convertir. Faire un retour sur soi-même; réfléchir sérieusement sur sa conduite.
   RETOURNER, c' est 1°. aler une autrefois au lieu où l' on a déjà été. = 2°. Recomencer à faire les mêmes chôses: Retourner au travail, à l' ouvrage. = Retourner à Dieu, se convertir. = 3°. Actif: Tourner d' un aûtre sens: retourner un habit. Se retourner dans son lit. = Se retourner, sans régime, et au fig. fam. prendre d' autres biais, d' autres mesûres. = 4°. S' en retourner, s' en aler.
   REM. Retourner, pour recomencer, avec l' infinitif pour régime, est un vrai gasconisme. "Voici l' été, je vais retourner maigrir. "Il retourne toujours faire la même chôse. = S' en retourner, se dit sans régime; et c' est mal-à-propôs que M. Desgrouais le traite de gasconisme. L' Académie dit: retournez-vous-en. "Aprês avoir long-tems frapé à la porte, il s' en retourna: mais retourner de, pour revenir de, est un barbarisme. "Il retourne de Paris. Dites, il revient.

RETRACER


RETRACER, v. act. [1re e muet, 3e é fer.] 1°. Au propre, tracer de nouveau. Il est peu usité. = 2°. Au fig. Décrire les choses pâssées, en renouveler la mémoire. "Retracer les glorieux exploits; en retracer l' idée. "Retracer l' image, l' histoire de nos malheurs.
   Rem. Mrs. de Port Royal avaient forgé retracement et effacement: l' usage n' a admis ni l' un ni l' aûtre.

RÉTRACTATION


RÉTRACTATION, s. f. RÉTRACTER, v. act. [Rétraktacion, té: 1re é fer. 3e é fer. au 2d.] Ils expriment l' action de se dédire, de témoigner qu' on n' a plus l' opinion qu' on avait avancée. Faire sa rétractation. "Se rétracter de ce qu' on a dit. "Rétracter une proposition qu' on avait avancée. = On dit aussi sans régime, se rétracter.

RETRAIRE


RETRAIRE, v. act. RETRAIT, s. m. RETRAIT, AITE, adj. [Retrère, trè, trè, trète: 1re e muet, 2e è moy.] Le verbe et le subst. se disent de l' action de retirer, par droit de parenté, ou par droit seigneurial, un héritage qui a été vendu. "Retrait lignager ou féodal ou conventionel. Retraire, ou faire, exercer un retrait. = L' adjectif se dit des blés, qui mûrissent sans se remplir. Blé retrait, avoine retraite.

RETRAITE


RETRAITE, s. f. [Retrète: 1re et dern. e muet, 2e è moy.] 1°. Action de se retirer. Faire retraite à l' entrée de la nuit. "La cloche, le tambour a soné la retraite. = 2°. La marche que font des Troupes pour se retirer. Faire retraite, une belle retraite: se batre en retraite. "Ils furent contraints de céder et de se retirer, en se batant néanmoins toujours en retraite. Maimbourg. = 3°. Etat de celui qui s' est retiré du monde, de la cour, des afaires. "Il est tems de faire retraite, de songer à la retraite. "Il vit dans une grande retraite. = 4°. Exercices spirituels pendant quelques jours. Être en retraite. Faire une retraite. = 5°. Le lieu où l' on se retire. "Douce, paisible, agréable retraite. = 6°. Lieu de retraite: "Doner retraite. "Il n' a point de retraite.
   Je l' ai conduit seize ans, de retraite en retraite.
       Mérope.
"Retraite de voleurs, de brigands. = 7°. Emploi ou pension qu' on done à un Oficier qui se retire. = 8°. En Architectûre, la diminution qu' on done à un mur, d' étage en étage.
   Rem. 1°. On dit, figurément, batre en retraite, d' un homme qui comence à mollir dans la dispute. = 2°. Il me semble que Retraite, dans le 1er sens, ne se dit qu' indéfiniment, et qu' il ne se combine pas bien avec les pronoms possessifs.
   Je vais tout disposer, Seigneur, pour sa retraite.
dit Crébillon dans Rhadamiste. Je ne voudrais pas le dire en prôse.

RETRANCHEMENT


RETRANCHEMENT, s. m. RETRANCHER, v. act. [Retrancheman, ché: 1re e muet, 2e lon. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Retranchement est, 1°. Supression ou diminution de quelque chôse. "Le retranchement de sa pension l' a mis à l' étroit. "Retranchement du luxe, des abus. = 2°. Espace séparé d' un plus grand. "Son valet couche dans un retranchement. = 3°. Travaux qu' on fait à la guerre, pour se mettre à couvert des ataques des énemis. "Faire un retranchement, des retranchemens. "On entra dans leurs retranchemens l' épée à la main. = Fig. Forcer quelqu' un dans ses derniers retranchemens, détruire ses dernières, ses plus fortes raisons.
   RETRANCHER, se dit dans toutes ces acceptions. Retrancher quelques branches d' un arbre. Retrancher sa dépense, son train, ou simplement, se retrancher. "On lui a retranché sa pension. Retrancher les abus. Retrancher quelqu' un de la Comunion des Fidèles, l' excomunier. = Retrancher un camp: se retrancher. = Se retrancher, se restreindre, se réduire. "Il s' est retranché à deux ou trois amis particuliers. Et sans régime: "Se retranchant pour payer ses dettes, et aimant mieux rabatre de sa grandeur, que d' intéresser sa justice. Bourdal. Or. Fun. de Henri de Bourbon. = Au fig. il régit à devant les verbes; et dans ou sur devant les noms. Il s' est retranché à dire que, etc. "Il se retranche dans mille vains prétextes. "Vous vous retranchez envain sur vos bones intentions.
   Mais conservant sa douce indiférence,
   Et retranché dans un noble silence,
   De ses rivaux il trompa les projets.
       Gresset.

RETRAYANT


RETRAYANT, ANTE, s. m. et f. [Re--tré-ian, iante: 1re e muet, 2e é fer. 3e lon.] Celui, celle qui exerce l' action de retrait.

RETRÉCIR


RETRÉCIR, v. act. RETRÉCISSEMENT, s. m. [Retréci, ciceman: 1re e muet, 2e e fer. 4e e muet au 2d.] Plusieurs Auteurs ou Imprimeurs ont écrit retressir avec deux s. J' ai trouvé cette ortographe dans les Lettres de Mme. de Sévigné, dans les Traductions de Mme. Dacier, dans Brebeuf, dans Télémaque, dans le Gendre. = Retrécir, c' est rendre plus étroit. Se retrécir, devenir plus étroit. Retrécissement, action par laquelle une chôse est retrécie. = Ils sont beaux au figuré: retrécir l' esprit, le retrécissement de l' esprit. "Bien diférente de ces âmes retrécies, dont les regards ne s' étendent pas au-delà du réduit étroit où elles sont renfermées. L' Abé Du-Serre-Figon, Panégyrique de Ste. Thérèse.
   La critique est aisée, et l' art est dificile:
   C' est là ce qui produit ce peuple de censeurs,
   Et ce qui retrécit les talens des Auteurs.
       Destouches.

RÉTRIBUTION


RÉTRIBUTION, s. f. [Rétribu-cion: 1re é fer.] Salaire, récompense. "Cela mérite rétribution. = Honoraire, que l' on done aux Éclésiastiques, pour leur droit de présence aux Ofices, ou pour quelques aûtres services rendus à l' Église. = Trév. met aussi le verbe rétribuer; l' Académie ne le met pas.
   REM. Rétribution, pour récompense, n' est guère bon qu' en vers, où il peut être utile pour la rime.
   J' assure à la vertu sa rétribution,
   Et me venge, en faisant une bonne action.
       Dest.
Il est de cinq syllabes en vers.

RÉTROACTIF


RÉTROACTIF, IVE, adj. RÉTROACTION, s. f. [Rétroaktif, tive, cion; 1re é fer.] Le 1er ne se dit qu' avec éfet. Qui agit sur le pâssé. "Les Lois n' ont point d' ordinaire d' éfet rétroactif: elles n' influent point sur les actes pâssés avant qu' elles fussent promulguées. = Rétroaction est l' éfet de ce qui est rétroactif. = L' adj. est d' un usage plus comun que le subst.

RÉTROCÉDER


RÉTROCÉDER, v. act. RÉTROCESSION, s. f. [Rétrocédé, cè-cion: 1re é fer. 3e é fer. au 1er, è moy. au 2d.] Termes de Pratique. Ils expriment l' action de céder, de remettre à quelqu' un le droit, qu' il avait cédé auparavant. "Rétrocéder une dette. Faire rétrocession d' une dette.

RÉTROGRADATION


RÉTROGRADATION, s. f. RÉTROGRADE, adj. RÉTROGRADER, v. n. [1re é fer.] Ils se disent, en Astronomie, du moûvement par lequel les planètes paraissent aler contre l' ordre des signes célestes. "La rétrogradation de Mars, de Jupiter. "Le Soleil et la Lune ne sont jamais rétrogrades, ne rétrogradent jamais. = Rétrograder se dit aussi dans le discours ordinaire. Revenir sur ses pâs. "Il m' a falu rétrograder.

RETROUSSER


RETROUSSER, v. act. RETROUSSIS, s. m. [Re-trou-cé, ci: 1re e muet, 3e é fer. au 1er.] Retrousser, c' est replier, relever en haut ce qu' on avait détroussé. "Retroussez votre robe, Retroussez-vous. = On dit aussi, retrousser ses cheveux, son chapeau, ses manches. Voyez BRâS, Rem. 1°. "Cheval qui a la queûe retroussée. Nez retroussé, dont le bout est un peu relevé en haut.
   RETROUSSIS, ne se dit que de la partie du bord d' un chapeau, qui est retroussée.

RETROUVER


RETROUVER, v. act. [1re e muet, 3e é fer.] 1°. Trouver une seconde fois. "J' avais trouvé un passage dans cet Auteur. J' espère le retrouver. = Il est beau au figuré. "On est homme, et l' on se retrouve toujours. "Je me craindrai moi-même, et me fuyant toujours, je me retroûverai sans cesse. Jér. Déliv. "L' on vient à oublier toutes ses peines, lorsqu' on se retrouve dans une situation agréable. Bouhier, Ve Tuscul. = 2°. Trouver ce qu' on avait perdu; j' ai retrouvé ma montre; ce qu' on avait oublié; j' ai retrouvé ce que je voulais dire.

RETS


RETS, s. m. plur. Filets pour prendre des poissons, des oiseaux. Il n' est guère plus usité qu' en vers.
   Et la perdrix, qui fuit une main homicide,
   Vient tomber dans ses rets.
       M. T. Rousseau.
L' Acad. met ce mot sans remarque.

REVALOIR


REVALOIR, v. n. [Reva-loar: 1re e muet.] Rendre la pareille. "Je le lui revaudrai; je le lui ai revalu. "Je le revaudrai au P. Alex.... Il m' a fait peur, mais je lui ferai confusion. = On le dit ordinairement en mal, et avec le pronom le, comme on dit, le céder.

REVANCHE


REVANCHE, s. m. REVANCHER, v. a. REVANCHEUR, s. m. [1re e muet, 2e lon. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Revancher, c' est défendre quelqu' un qui est ataqué. "Il a bien revanché son ami. "Je me suis revanché = Se revancher se dit plus souvent, pour rendre la pareille. Il se dit ordinairement du mal. Je m' en revancherai. Quelquefois pourtant on~ le dit du bien: Se revancher d' un bienfait. Il n' est que du style famil.
   REVANCHE, est 1°. Action par laquelle on se revanche du mal qu' on a reçu. "Avoir, ou en avoir sa revanche. On le dit quelque--fois du bien: "Vous m' avez rendu ce bon ofice; je tacherai d' en avoir ma revanche. = 2°. Au jeu, seconde partie que joûe le perdant, pour se raquiter de ce qu' il a perdu. "Jouer la revanche. "Prendre, demander sa revanche.
   Rem. Dans certaines Provinces, on dit revange, et un Auteur moderne l' a même écrit de la sorte: c' est un barbarisme. = On dit adverbialement, en revanche, pour, en récompense. "Il avait fort mal dîné, mais en revanche il a bien soupé. = On le dit ordinairement sans régime: Fontenelle l' emploie avec la prép. de: "En revanche de la Philosophie qu' elle aprenait de lui, elle lui voulut aprendre le François. _ Ce régime peut être bon en de pareilles phrâses. L' Académie n' en done point d' exemple.
   REVANCHEUR, qui revanche, est peu usité. "Il a trouvé dans son camarade un bon revancheur.

RÉVASSER


RÉVASSER, v. n. RêVE, s. m. RÉVER, v. n. RêVERIE, s. f. RÉVEUR, EûSE, s. m. et f. et adj. [1re é fer. au 1er, au 3e et au 5e, ê ouv. et long au 2d et au 4e. = On écrivait autrefois, resvasser, resve, resver: en suprimant l' s, qu' on ne prononçait plus, on la remplaça par l' accent circonflexe; mais cet accent ne convient que devant l' e muet, où la syllabe précédente est un ê ouv. et lon. Il rêve, rêvera, etc. Devant la syllabe masculine, l' accent aigu est plus convenable, puisque l' e y est fermé: nous révons, je révais, il réva, révant, etc.] Rêve, songe qu' on fait en dormant. Réver, faire des songes. Rêverie, pensée où se laisse aler l' imagination. Révasser, avoir de fréquentes rêveries pendant un sommeil inquiet. Réveur, qui rêve étant éveillé, qui s' entretient de ses imaginations. "Il a été toute la nuit dans de fâcheux rêves. "Jusques à quand, livrés au mensonge, ferez-vous des rêves en plein jour? L. F. Poème de S. Grég. "Il n' a fait que rèver, que révasser. Il est sujet à réver toutes les nuits. "Il a révé que, etc. _ V. act. "Réver des combats, des naufrages. = Réver, c' est aussi dire des chôses extravagantes, déraisonables. Vous révez, quand vous dites telle chôse. _ Être distrait, laisser aler son imagination~ sur des idées vaines et vagues. "Cet homme ne vous écoute pas; il rêve. "Elle pâsse les jours entiers à réver. = C' est dans ce sens qu' on dit rêverie et réveur: il s' entretient dans la rêverie: elle se plait dans ses rêveries: "Il est bien réveur; vous voilà bien réveûse. "C' est un esprit réveur: c' est un réveur perpétuel. = Ils se disent aussi des imaginations extravagantes. "Les rêveries des Astrologues: cet homme est un réveur, un vieux réveur; et pour rêverie seulement, d' un délire causé par la maladie. "Il entre, il tombe en rêverie.
   RÉVER, c' est enfin penser, méditer profondément sur quelque chôse. Il régit le datif. Révez-y; la chôse en vaut la peine; ou la prép. sur. "J' ai révé long-tems sur cette afaire, à cette afaire. "Je vous demande encore quelque tems, et je vous prie de me laisser ici pour réver à cette afaire. Dest.

REVêCHE


REVêCHE, adj. et subst. [1re et dern. e muet, 2e ê ouv. et lon.] Adj. Au propre, rude, âpre au goût. "Poire, vin revêche. Au figuré, rude, peu traitable. "Cet homme est bien revêche: cette femme est rude et revêche. = S. f. Sorte d' étofe frisée, faite de laine, et propre à faire des doublures.

RÉVEIL


RÉVEIL, s. m. RÉVEILLE-MATIN, s. m. RÉVEILLER, v. act. RÉVEILLON, s. m. [Rê-vèil, vè-glie-ma-tein, véglié, vé-glion: 1re é fer. 2e è moy. au 1er et au 2d; et, dans le verbe, devant la syllabe fém. il réveille, réveillera , etc. é ferm. au 3e et au 4e: mouillez l' l finale du 1er et la double l des aûtres.] Réveil, cessation de someil. "Un doux réveil: à son, à votre réveil. _ C' est aussi ce qu' on apèle aûtrement réveille-matin; c. à. d. une sorte d' horloge ou de montre, qui sone un espace de tems, pour éveiller précisément à l' heure, sur laquelle on a mis l' aiguille en se couchant. = Réveil est meilleur pour le propre, et réveille-matin, pour le figuré (st. fam.) où il signifie le bruit que fait le matin un Serrurier, un Forgeron, un Charron, etc. et une bone ou méchante nouvelle, qu' on aprend en s' éveillant.
   RÉVEILLER, suivant l' Académie, signifie la même chôse que, éveiller, tant dans le propre que dans le figuré. Il semble pourtant que l' usage y mette quelque diférence. Voy. ÉVEILLER. = Au figuré, sur-tout en parlant des passions, éveiller, c' est exciter des passions, qui ne s' étaient point encore montrées par les éfets; réveiller, c' est exciter de nouveau, renouveler des passions assoupies. "Cela leur réveilla le courage. "Vous ne faites que réveiller sa douleur. "Ceci réveille mon atention. Dest. "Réveiller un procês: des mets, qui réveillent l' apétit. = Se réveiller, dit encore l' Académie, signifie la même chose que s' éveiller. "Je me suis réveillé trois ou quatre fois cette nuit. _ Fig. Se réveiller de son assoupissement, de sa léthargie. "Sa haine sa tendresse se réveilla. "Ses maux, ses douleurs se réveillent.
   Quel feu mal étoufé dans mon coeur se réveille?
       Rac.
  Qu' aux accens de ma voix la Terre se réveille,
  Rois, soyez atentifs: Peuples, ouvrez l' oreille:
  Que l' Univers se taise et m' écoute parler.
       Rouss.
RÉVEILLON, petit repas extraordinaire, qui se fait entre le souper et le coucher. = Il y en a qui lui donent le sens de Médianoche. Voy. ce mot.

RÉVÉLATION


RÉVÉLATION, s. f. RÉVÉLER, v. act. [Révéla-cion; en vers ci-on; révélé: 1re et 2e é fer. au 1er: dans le 2d, trois é fer.] révéler, découvrir, déclarer ce qui était inconu et secret. Voy. DÉCLARER. "Dieu a révélé ses vérités à son Église. Les vérités de la Foi sont des vérités révélées. Révéler le secret de l' État, de son ami. Révéler ses complices, l' auteur d' une conjuration. _ Révélation, est 1°. l' action de révéler. La révélation d' un secret. _ Venir à révélation, style des Monitoires. = 2°. L' inspiration~ par laquelle Dieu a fait conaître aux Prophètes, aux Saints, à son Église; ses mystères, sa volonté, sa venûe, etc. St. Paul a eu des révélations. = Quand on dit, absolument, la révélation, on entend la révélation divine. "Il ne croit pas à la révélation. = 3°. Dans toutes ces acceptions, ce mot a le sens actif: c' est l' action de révéler; mais il a aussi le sens passif, et signifie les chôses qui ont été révélées. "Les révélations de St. Jean.

REVENANT


REVENANT, ANTE, adj. REVENANT-BON, s. m. [1re et 2e e muet~, 3e lon.] Revenant, qui plaît, qui revient. "Air revenant, phisionomie revenante. Voy. AVENANT. = S. m. Esprit que le peuple croit qui revient de l' autre monde. "Un revenant: Il a peur des revenans; ce qui se dit figurément, de ceux qui peuvent revenir, et dont on ne souhaite pas le retour. _ On peut le dire aussi dans le st. badin, en sens contraire, des persones, dont le retour surprend agréablement.
   REVENANT-BON, deniers qui restent entre les mains des comptables. = Profit, émolument. "Les revenant-bons d' une afaire. = Par extension, avantages qui reviènent par une espèce de hazard. "Le plaisir de rendre service est le seul revenant-bon de mon emploi; et ironiquement: il s' est attiré beaucoup de mépris: voilà les revenant-bons de ses faux airs.
   Rem. L' s, signe du pluriel, ne s' aplique qu' à bon; et revenant demeure toujours indéclinable.

REVENDEUR


REVENDEUR, EûSE, s. m. et fém. REVENDRE, v. act. REVENTE. [Revan-deur, deû-ze, de, te; 1re e muet, 2e lon. 3e lon. au 2d.] Revendre, vendre ce qu' on a acheté. Revendeur, qui achète pour revendre. "Acheter en grôs pour revendre en détail. "Revendeur de livres; Revendeûse de vieilles hardes. Revendeuse à la toilette. = En st. prov. En avoir à revendre, en abondance. "A-t' il de l' esprit? Il en a à revendre.
   Revente, seconde vente: la revente d' un domaine. = De revente, de rencontre. "Lit, tapisserie de revente.

REVENDICATION


REVENDICATION, s. f. REVENDIQUER, v. act. [Revandikacion, diké: 1re e muet, 2e lon.] Ils expriment l' action de réclamer ce qui nous apartient, et qui est entre les mains d' un aûtre. La revendication d' un héritage. Revendiquer un terrein. Le substantif ne se dit qu' au Palais; le verbe a un usage plus étendu. "Revendiquer un soldat, un esclâve. Revendiquer un livre, un ouvrage, dont un aûtre s' est déclaré injustement l' Auteur.

REVENIR


REVENIR, v. n. [1re et 2e e muet: il se conjugue comme Venir.] 1°. Venir une autrefois. "Il est revenu vous chercher. Il se dit proprement des persones, et par extension des chôses, du Soleil, de la fièvre, des bois, qui ont été coupés, des ongles, des cheveux, du tems, de la beauté, etc. = Une chose revient dans l' esprit, on s' en ressouvient tout à coup. "Elle ne me revient pas: je ne m' en ressouviens plus. = 2°. Retourner au lieu, d' où l' on était parti. "Il est revenu. "Je reviens à vous dans l' instant. Revenez bientôt. "Il s' en est revenu tout courant. = Revenir, retourner: le 1er se dit du lieu où est celui qui parle, et le 2d. du lieu où il n' est pas. * C' est un gasconisme de dire. "Je n' ai pas trouvé mon Avocat; il faudra que j' y reviène. Dites, que j' y retourne. = 3°. En parlant des alimens, causer des raports, des vapeurs, qui en portent le goût, l' odeur. = 4°. Recomencer à faire, à dire. Revenir à la charge. Voy. CHARGE. "Revenir sur une matière, sur une afaire: j' en reviens toujours là: il n' y a pas d' autre parti à prendre. = 5°. Se rétablir. Revenir en santé, en son bon sens. "Revenir à soi, ou simplement, revenir; reprendre ses esprits aprês un évanouissement. "Il est bien revenu de sa maladie: il revient à vûe d' oeuil. "La jeunesse revient de loin. _ Fig. st. famil. Revenir sur l' eau, se retrouver dans son premier état de fortune, de crédit, etc. = Ne pas revenir de; être surpris, étoné: "quelle nouvelle étrange! je n' en reviens pas. "Appius ne s' est point étoné de cet éclat, et n' a rien perdu de son air de confiance; mais son collègue en a été si étourdi, qu' il n' en est pas encore revenu. Let. de Cic. à Atticus. Mongault. = 6°. Abandoner une opinion, pour se ranger à l' avis d' un aûtre. "Je reviens à l' avis de, etc. "Les meilleures gens sont ceux, qui se fâchent le plus aisément et qui reviennent de même. L' Ab. de Mongault, Let. de Cic. à Atticus. "Cet homme est singulièrement opiniâtre: il ne revient jamais. Celui-ci est revenu de ses erreurs, de ses emportemens, des égaremens de sa jeunesse. "Je ne crois pas, dit Voltaire, qu' il y ait un peuple, qui revienne plus dificilement de ses anciennes impressions que la nation Hollandaise. Revenir à soi, prendre de meilleurs sentimens. = 7°. En parlant des chôses, procurer du profit. "Il ne m' en revient rien. "Quelle gloire peut-il vous revenir de cette entreprise? = 8°. Revenir à, coûter. "Cette étofe me revient à tant l' aûne. = L' un revient à l' aûtre; cela revient au même; c' est la même chôse. = 9°. Plaire. "Son humeur me revient; son air, ses manières ne me reviènent pas "Son prisonier, dont l' air lui revenoit extrêmement. Maimb. = 10°. Aprendre. "Il me revient de toutes parts que vous vous plaignez de moi. "Cela me revient de tous côtés. = 11°. Faire revenir de la viande, la mettre en état d' être piquée ou bardée, etc. = 12°. Au Palais, revenir sur, exercer contre quelqu' un une action en garantie. "Si un tel ne me paye pas, je reviendrai sur vous. = Se pourvoir contre: revenir contre une sentence par oposition, contre un Arrêt par requête civile. = 13°. * Revenir, pour redevenir est un gasconisme. "Il est revenu malade. DESGR. Dites, il est redevenu.

REVENTE


REVENTE, Voy. REVENDEUR.

REVENU


REVENU, s. m. REVENûE, s. f. [1re et 2e e muet, 3e lon. au 2d.] Revenu est ce qu' on retire annuellement d' un domaine, d' une charge, d' un bénéfice, etc. "Une terre de bon revenu. "Il a tant de revenu en terres, tant en capitaux, etc. "On a saisi tous ses revenus. = Revenûe ne se dit que du jeune bois, qui revient sur une coupe de tâillis.

RÉVER


RÉVER, Voy. RêVE.

RÉVERBÉRATION


RÉVERBÉRATION, s. f. RÉVERBèRE, s. m. RÉVERBÉRER, v. act. [1re et 3e é fer. au 1er et au 3e; 2e ê ouvert; 3e è moy. et long au 2d; tion dans le 1er a le son de cion.] Réverbérer, c' est réfléchir, renvoyer, en parlant de la chaleur et de la lumière. Réverbération, réfléchissement, réflexion. "Cette murâille réverbère fortement les rayons du soleil. "Les plaques de fer réverbèrent le feu dans les chambres. = V. n. "Les rayons du soleil réverbèrent contre les murâilles. "Les plaques de fer font réverbérer la chaleur du feu. _"La réverbération des rayons du soleil. "La chaleur la plus incomode est celle qui vient par réverbération. = Le substantif est plus d' usage que le verbe. = Mde de Sévigné l' emploie au figuré. "Je ne me vante pas d' être des amies de M. le Premier; mais je l' ai vu assez souvent: il me trouve avec ses amis; et vous savez les sortes de réverbérations que cela fait. "Nous n' étions son amie que par réverbération; mais nous étions selon son goût; et je crois que bien de ses anciennes amies n' en seront pas plus touchées que moi (de sa mort)
   RÉVERBèRE, se dit ordinairment dans cette phrâse, feu de réverbère, apliqué de manière que la flâme est obligée de rouler sur les matières, qu' on expôse à son action. = Depuis quelque tems, on apèle réverbère une plaque de métal qu' on ajoute à un flambeau, à une lampe, à une lanterne, pour en augmenter la lumière. = Plusieurs, pour abréger, apèlent réverbères les lanternes où l' on aplique cette machine, en la multipliant. L' Acad. ne le met point en ce sens. On dit plus régulièrement, lampe, lanterne à réverbère.

REVERDIR


REVERDIR, v. act. et n. [1re e muet, 2e ê ouv.] 1°. Actif. Peindre de vert une aûtre fois. Il faut reverdir ces barreaux, ces jalousies, dont la couleur est éfacée. _ Il est peu usité en ce sens. = V. n. Redevenir vert. "Les arbres comencent à reverdir. = Recomencer à paraitre. "Ces dartres, cette galle comence à reverdir. = En st. proverbial, Planter là quelqu' un pour reverdir, le laisser en quelque endroit sans le venir reprendre, comme on l' avait promis.

RÉVÉRENCE


RÉVÉRENCE, s. f. RÉVÉRENCIELLE, adj. fém. RÉVÉRENCIEUX, EûSE, adj. RÉVÉRER, v. act. [Révérance, ciè-le, ré--véré, ran-cieû, cieû-ze: 1re et 2e é fer. 3e lon. au 1er; 2d, 3e et 4e, é fer. au dern.] Révérer, honorer, respecter. "Révérer les reliques, les images, les Rois, les Puissances, les Lois. = Il se dit plus particulièrement des persones et des chôses saintes et sacrées. Voy. après RÉVÉREND.
   RÉVÉRENCE est 1°. Respect, vénération. "Vous lui devez respect et révérence. Il faut traiter les chôses saintes avec révérence. _ Il est vieux en ce sens. Acad. Il se soutient encôre un peu, quand on parle des chôses saintes, mais son contraire irrévérence est fort en usage. = 2°. Titre d' honeur, qu' on done aux Religieux, qui sont Prêtres. = 3°. Mouvement du corps qu' on fait pour saluer. "Faire la révérence: c' est un grand faiseur de révérences.
   Plus bas, encor plus bas. Mon Dieu, quelle ignorance!
   Ne savoir pas encor faire la révérence.
       Le Distrait.
  .....Je n' ai jamais su par qui ni coment,
  Ils ont pu se brouiller, mais naturellement
  Je crois qu' à rassembler toutes les aparences,
  On pourroit parier pour l' homme aux révérences.
       Le Flateur.
= Aler faire la révérence à un Grand; aller lui rendre ses respects.
   RÉVÉRENCIELLE ne se dit qu' avec crainte. C' est un terme de Palais. Le sentiment~ mélé de crainte et de respect, que les enfans doivent avoir pour leurs pères et mères.
   RÉVÉRENCIEUX ne se dit que dans le 3e sens de Révérence. Qui afecte de faire quantité de révérences. Il ne se dit que par moquerie. "Voilà un homme bien révérencieux.

RÉVÉREND


RÉVÉREND, ENDE, adj. [Révéran, ran--de: 1re et 2e é fer. 3e lon.] Digne d' être révéré. Titre d' honeur qu' on done aux Prélats, en style de Palais; et en style ordinaire, aux Religieux et aux Religieuses. "Le Révérend Père en Dieu. Le Révérend Père tel. La Révérende Mère. = Révérendissime, três-Réverend; titre doné aux Archevêques, Évêques et Généraux d' ordre.

REVERER


REVERER, v. act. [Revéré, 3 é fermés. Devant l' e muet, le 2d se change en è moy. et long: il révère, révèrera, etc.] Honorer, respecter, "Tout le monde révère sa vertu: elle est révérée de tout le monde. "Cette grande Ville (Rome) autrefois révérée de toute la terre. Maimb.
   Tes moeurs nous ont apris à révérer tes lois.
       Alzire.
  Moins il veut être grand, plus il est révéré.
      Volt.

RêVERIE


RêVERIE, Voy. RêVE.

REVERS


REVERS, s. m. [Revêr: 1er e muet, 2e ê ouv.] 1°. Coup d' arrière main. Il lui abati la tête d' un revers, d' un coup de revers.
   ....Pour châtier son insolence extrême,
   Il faut que je lui done un revers de ma main.
       MOL.
= 2°. Dans les médailles et les monaies, le côté oposé à celui, où est l' empreinte de la tête du Prince, etc. Le revers de la médaille; ce qui se dit fig. du mauvais côté d' une chôse, des mauvaises qualités d' une persone, dont on a montré le bon côté, etc. = 3°. La seconde page d' un feuillet. = 4°. Disgrâce, accident fâcheux. Revers de fortune. "Il a éprouvé de grands revers.
   De ses propres revers, l' homme est souvent l' auteur.
       Le Franc.
  Quelque revers, que le Ciel nous envoie;
  C' est notre sort d' en soufrir la rigueur
  Et rien ne doit éfrayer un grand coeur.
       Rouss.

REVERSI


REVERSI, s. m. [1re e muet, 2e ê ouv.] Sorte de jeu de cartes, où celui qui fait le moins de mains ou le moins de points gâgne la partie, et où le valet de coeur, qu' on apèle le quinola, est la carte la plus intéressante.

RÉVERSIBLE


RÉVERSIBLE, adj. RÉVERSION, s. f. [1re é fer. 2e ê ouv.] Termes de Jurisprudence. _ Qui doit retourner au propriétaire, qui en a disposé. "Héritage, apanage réversible à, etc. _ Retour, réunion d' un fief mouvant au fief dominant, dont il avait été détaché. Doné à charge de réversion: qui revient à.... par droit de réversion.

REVêTEMENT


REVêTEMENT, s. m. REVÉTIR, v. act. [Revêteman, revéti: 1re e muet; 2e ê ouv. et long au 1er, é fer. au 2d. = On écrivait aûtrefois revestement, revestir: quand on surpima l' s, qu' on ne prononçait plus, on la remplaça par l' accent circonflexe. Mais cet accent n' est que le signe d' un ê ouv. et long: on ne devait donc pas le mettre sur un e qui est fermé et bref. Il n' est à sa place que devant l' e muet. "Qu' il revête.] Revétir c' est au propre, 1°. doner des habits: revétir les pauvres. = 2°. Mettre des habits de dignité. "Deux Aumoniers revétirent ce Prélat de ses habits Pontificaux. "Le Roi était revétu de ses habits royaux. = 3°. Pourvoir. "Il est revétu d' une belle charge. = Revétu du pouvoir de. "Le Roi l' a revétu d' un plein pouvoir. = En termes de Pratique, Acte revétu de toutes ses formes, de toutes les formalités requises. = 4°. Couvrir, remparer de pierre, de brique.. "Revétir un fôssé, un bastion, une terrasse, etc.
   Rem. On dit dans la prôse ordinaire, se revétir des dépouilles de, etc. En vers et dans la prose poétique, on dit, revétir les dépouilles. _ M. Necker emploie souvent cette construction au figuré. "Revétir des sentimens. Revétir un esprit vigoureux d' administration, etc.
   REVÉTU, adj. orné, au fig. "Les vertus et les qualités aimables, dont il est revétu.
   C' est lui, c' est ce Ministre infidèle et barbare,
   Qui, d' un zèle trompeur, à vos yeux revétu
   Contre notre innocence arme votre vertu.
       Esther.
= Gueux revétu (st. prov.) Homme de rien, qui a fait fortune, et qui en est arrogant.
   REVêTEMENT, ne se dit que dans le 4e sens de revétir. "Le revêtement du fôssé. = Suivant La Touche, on dit également bien revêtement ou revestissement. Il~ cite Richelet en preuve. L' Acad. ne met que le 1er; et c' est le meilleur, si ce n' est pas le seul bon.

RÉVEUR


RÉVEUR, Voy. RêVE.

REVIRADE


REVIRADE, s. f. REVIREMENT, s. m. [1re e muet: 3e e aussi muet au 2d, en y a le son d' an.] Le 1er est un terme du jeu de Trictrac; c' est l' action du joueur, qui, pour faire une case avancée, emploie une câse d' une Dame déjà faite. = Le 2d est un terme de Marine et de Banque; action de revirer. Voy. Revirer et Virement.

REVIRER


REVIRER, v. n. [1re e muet, 3e é fer.] Il n' est d' usage que dans cette expression, revirer de bord, qui se dit au propre, dans la marine; et fig. st. familier, d' un homme qui change de parti. = En termes de Trictrac, faire une revirade.

RÉVISEUR


RÉVISEUR, s. m. RÉVISION, s. f. [Ré--vi-zeur, zion: 1re é fer.] Révision, action par laquelle on revoit, on examine de nouveau. Révision de compte: la révision d' un procês criminel. C' est tout l' emploi de ce mot. = Réviseur, celui, qui revoit aprês un aûtre. "Réviseur de compte. = Plusieurs disent aussi réviser dans ces occasions pour revoir: l' usage de ce verbe est douteux: l' Acad. ne le met pas.

REVIVRE


REVIVRE, v. n. [1re et dern. e muet.] Revenir de la mort à la vie. "Vous avez beau pleurer, vos pleurs ne le feront pas revivre. = Vivre de nouveau en quelque sorte. "Les Pères revivent dans leurs enfans. = Faire revivre, rétablir. "Le Roi a fait revivre cette charge. = Remettre en crédit: faire revivre une hérésie, une opinion. = Faire reparaitre; la noix de galle fait revivre les vieilles écritures. = Doner un nouvel éclat; le vernis fait revivre les couleurs. = Ralumer: faire revivre l' amour, la haine, etc.

RÉUNION


RÉUNION, s. f. RÉUNIR, v. act. [Ré--u-nion, nir: 1re é fer.] Ils expriment l' action de rassembler, d' unir, de joindre ce qui était épars, désuni, séparé. "La réunion des chairs, des lèvres d' une plaie. La réunion d' un Fief au Fief dominant. = Fig. la réunion des coeurs, des volontés. Depuis sa réunion à l' Église. _ "Réunir toutes ses forces contre l' énemi. "Réunir à un Fief ce qui en a été démembré. "Réunir les esprits, les partis. "Ils étaient brouillés, cet évènement les a réunis. "Il n' y a persone, qui réunisse toutes les sortes d' esprit, même dans le degré le plus médiocre. L' Ab. Trublet. = Se réunir: les chairs se sont réunies. "Les Protestans, quoique divisés entre eux, se réunissent contre l' Église Romaine. = Être réuni. "Toutes les vertus étaient réunies dans lui. "Les hommes ont formé les sociétés en partie pour s' y mettre à couvert de la méchanceté les uns des autres; mais réunis ils sont devenus plus méchans qu' ils ne l' étaient séparés. L' Ab. Trublet.
   Rem. M. Moreau l' emploie neutralement, aussi bien que diviser. "Les Grands, qui, aprês avoir eu intérêt de réunir, pouvaient avoir intérêt de diviser. Cet Écrivain, si estimable, emploie volontiers les verbes actifs neutralement. Voy. ACTIF. = Réunir régit à ou avec: le P. Rapin emploie les deux régimes dans la même phrâse, et il me semble que cela ne fait pas un mauvais éfet. "Il avait réuni en sa persone une probité si austère avec tant de grâce et de politesse; une justice si sévère à tant de douceur et de bonté, etc.

RÉVOCABLE


RÉVOCABLE, adj. RÉVOCATION, s. f. RÉVOQUER, v. act. [Révokable, ka-cion, ké: 1re é fer. 3e dout. au 1er, é fer. au 3e.] Révoquer, avec les persones pour régime; rapeler. "Révoquer un Procureur, un comis, un Intendant, un Ambassadeur. _ Avec les chôses, déclarer de nulle valeur à l' avenir. "Révoquer un ordre, un testament, une procuration, une résignation. = Révoquer en doute, douter, mettre en doute. _ Il régit que et le subjonctif. "Il révoque en doute que cela se soit pâssé de la sorte. _ Quand le sens est négatif, on ajoute la négative ne devant le verbe régi. "Personne ne révoquoit en doute qu' il n' eut été légitimement élu. Maimb.
   RÉVOCABLE, qui peut être révoqué. "Cet Oficier, cette comission est revocable.
   RÉVOCATION, action de révoquer. "La révocation d' un Procureur, des pouvoirs, donés, d' un testament. "La Révocation de l' Édit de Nantes. = Au Palais on dit aussi, acte, disposition révocatoire, qui révoque.

REVOILA


*REVOILA, adv. C' est un mot de conversation. "Me revoilà; me voilà de nouveau. "Me revoilà dans mes lamentations de Jérémie. Sév. "Vous revoilà donc à Versailles. Id.

REVOIR


REVOIR, v. act. [Re-voar: 1re e muet.] 1°. Voir de nouveau. "Je l' ai revu aujourd' hui. "Nous nous reverrons.
   C' est peu de l' avoir vu, chacun veut le revoir.
       Le Franc.
S. m. Adieu, jusqu' au revoir.
  Sufit. Adieu Muses jusqu' au revoir.
       ROUSS.
  Jusqu' au revoir. Songez qu' une naissance illustre
  Des sentimens du coeur reçoit son plus beau lustre
       DEST. Le Glorieux.
= 2°. Examiner de nouveau. "Revoir un livre. Faire revoir un procês. = V. n. "C' est un homme, qui examine les chôses avec soin: aprês lui, il n' y a pas à revoir.

REVOLER


REVOLER, v. n. [1re e muet, 3e é fer.] Voler une autre fois, ou, plusieurs fois.
   Mon coeur vers ces climats revolera sans cesse.
       Didon.
"Nous nous séparâmes; mais nos coeurs et nos esprits revolent sans cesse l' un vers l' autre. Le Franc, trad. de Rutilius. "Le Prince (de Condé) revole à l' armée, et joint à la gloire de comander encore Turenne, celle de réparer sa défaite (à Mariendal) VOLT.

RÉVOLTE


RÉVOLTE, s. f. RÉVOLTER, v. act. [1re é fer. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Révolte, rebellion, soulèvement. "Avoir l' esprit de révolte. "Ce fut une révolte générale. Soufler, exciter la révolte: apaiser, calmer une révolte. = Fig. La révolte des sens, de la chair, des passions.
   RÉVOLTER, c' est 1°. Porter à la révolte. "C' est lui, qui avait révolté toute les Provinces. "Révolter les enfans contre leur père, les Inférieurs contre les Supérieurs. = Se révolter contre son Prince. "La chair se révolte contre l' esprit, les sens contre la raison. = 2°. Choquer, indigner. "Son discours révolta toute l' assemblée.
   Rem. Plusieurs n' admettent révolter actif que dans ce dernier sens; et ils veulent pour le premier, qu' on dise faire révolter: C' est lui, qui a fait révolter toute la Province. Je serais volontiers de cette opinion. L' Acad. les met tous deux sans remarque. * Anciènement on faisait régir au réciproque l' ablatif. "Se révolter du parti du Parlement. Procês de Charles I: on dit constamment aujourd' hui, se révolter contre.
   RÉVOLTANT, ANTE, adj. verbal, qui révolte, qui choque, qui indigne. "Discours révoltant, manières révoltantes. = Il aime à suivre le nom, qu' il afecte; quelquefois pourtant il peut le précéder. "Le salutaire et révoltant détail des opinions extravagantes, que la philosophie moderne a répandûes depuis 30 ou 40 ans. Mde de Sillery.
   RÉVOLTÉS, s. m. pl. "Les révoltés se rendirent maîtres de cette place. = On ne le dit point au singulier. Au lieu de dire, on saisit un révolté, on doit dire, un des révoltés.

RÉVOLU


RÉVOLU, ÛE, adj. RÉVOLUTION, s. f. [1re é fer.] Révolu, achevé, en parlant du cours des astres et du tems. Avant que le cours de Saturne soit révolu; aprês le mois révolu, l' année révolûe.
   RÉVOLUTION est, 1°. le retour au même point: on le dit des astres et des tems. "La révolution des planètes, des tems, des saisons, des siècles. = 2°. Fig. Changement des afaires, des chôses du monde. "C' est ici un siècle de révolutions. "Il y a eu, depuis cent ans, en Europe, de grandes révolutions. "Rien de si éfrayant que la révolution qui s' est opérée chez les Femmes dans la façon de penser et d' agir. L' Abé Du-Serre-Figon. "On l' a dit: heureuse la Nation dont les Fastes n' amuseront point la postérité par le récit de sanglantes révolutions! Neuv. 3°. Révolution d' humeurs dans le corps humain; mouvement ordinaire dans les humeurs, qui altère la santé.

REVOMIR


REVOMIR, v. act. [1re e muet.] Vomir tout de suite ce qu' on vient d' avaler. "Revomir son dîner: "Dès qu' il a pris un bouillon, il le revomit.

RÉVOQUER


RÉVOQUER. Voy. RÉVOCABLE.

RÉUSSIR


RÉUSSIR, v. neut. RÉUSSITE, s. fém. [Ré-ucir, cite, et non pas reu-cir: 1re é fermé.] Réussir, avoir un succês heureux. Il se dit des persones et des chôses. "Cet Auteur réussit mieux dans la prôse que dans les vers. "Ce discours, cette pièce a fort bien réussi: Ce projet n' a pas réussi. "Ce qui réussit à l' un ne réussit pas à l' autre. = Il régit quelquefois à et l' infinitif. "Il réussit à faire de petits vers. = Faire réussir. "Il n' y a point de gens dont on tire plus de services que de ces hommes naturellement intrigans et actifs, qui se font un plaisir de se méler de tout, et un point d' honeur de faire tout réussir. L' Ab. Trublet.
   RÉUSSITE, bon succês, en parlant des chôses seulement. "La réussite d' une afaire. "Cette pièce a eu une grande réussite; n' a point eu de réussite. = Quelquefois il signifie que succês. "Il faut en attendre la réussite, voir quelle en sera la réussite. = Bouhours en parle come d' un mot nouveau. Selon lui, Il ne se dit que des ouvrages d' esprit: "Je vous réponds de la réussite de votre livre. Pour les armes et la négociation, on dit plutôt succês. "Le succês de la négociation; les succês des armes du Roi. Il y a bien du vrai dans cette Rem. de Bouhours.

REVûE


REVûE, s. f. [1re et dern. e muet, 2e lon.] En général, inspection, recherche. "Faire la revûe dans sa maison, avant que de s' aler coucher. = Figurément. Faire la revûe de ses actions, de sa vie pâssée. L' Acad. a dit aussi; en ce sens, faire une revûe sur, etc. = En particulier, examen des troupes qu' on met en batâille, et qu' on fait défiler, pour voir si elles sont complètes. Faire la revûe, passer en revûe. Le dernier se dit aussi au figuré; pâsser en revûe les actions de la journée. "C' est homme est fort médisant: il a pâssé en revûe tous les états, toutes les persones de cette nombreûse assemblée.

RÉVULSIF


RÉVULSIF, IVE, adj. RÉVULSION, s. fém. [1re é fer.] Termes de Médecine. Révulsion, retour des humeurs du corps humain, dont le cours est changé. Révulsif, qui détourne les humeurs.

REZ


REZ, adv. [Ré: é fer.] Tout contre, joignant. On ne le dit plus que dans cette expression: rez pied, rez terre. = Rez de chaussée, s. m. Niveau du terrein. "Le mur n' est encore qu' au rez de chaussée: Cette maison a cinq étages, non compris le rez de chaussée.

RHABILLAGE


RHABILLAGE, s. m. RHABILLER, v. a. [Rabi-glia-ge, glié: mouillez les ll.] Le verbe a deux sens. Avec le pronom personel, il signifie reprendre ses habits: je me suis habillé et rhabillé plusieurs fois dans le jour. Actif, il signifie racomoder. Le substantif n' a que ce dernier sens. = En Chirurgie, rhabiller c' est remettre en son lieu une partie rompûe ou laxée. L' Acad. ne le met pas en ce sens. Plusieurs disent Rhabilleur, de celui qui rhabille. = Dans le second sens, on dit, en style figuré familier: "Il aura de la peine à rhabiller ce qu' il a dit.

RHÉTEUR


RHÉTEUR, s. m. RHÉTORICIEN, s. m. RHÉTORIQUE, s. f. [Ré-teur, tori-cien, torike: 1re é fer.] Rhéteur, qui enseigne la Rhétorique, en parlant des Grecs et des Romains. = Aujourd' hui, Orateur, dont toute l' éloquence consiste dans une sèche pratique de l' Art. = Rhétoricien, 1°. qui sait la Rhétorique. "Cet homme est Rhétoricien, un grand Rhétoricien. Il vieillit en ce sens. = 2°. Ecolier de Rhétorique. = Rhétorique, l' Art de bien dire. Enseigner la Rhétorique. Professeur de Rhétorique, ou en Rhétorique. _ Figûres de Rhétorique. = La classe où l' on enseigne la Rhétorique. "Aler, être en Rhétorique. = Traité de Rhétorique: "La Rhétorique d' Aristote, du P. De Colonia, etc. = On dit, dans le style badin, j' ai épuise, ou employé toute ma Rhétorique, toute mon éloquence. "Nous fimes nos efforts pour la détourner de cette triste vue... nous épuisâmes nos rhétoriques Revel et moi. Sév. Vous y perdrez votre Rhétorique: vous avez beau parler, vous ne le persuadérez point.
   La peste! vous prenez un ton bien énergique,
   Et vous m' éblouissez par votre rhétorique:
   Voyons si les effets me toucherons autant.
       Dest. Le Dissip.
Hors de ce style, Rhétorique n' est plus de mode pour signifier éloquence."Elles le loueront mieux que tout ce que je puis avoir de Rhétorique. Mascaron. C' est du vieux style. On dirait aujourd' hui, tout ce que je puis avoir d' éloquence, s' il étoit permis par la bienséance de parler de la siène propre.

RHUBARBE


RHUBARBE, s. f. [Rubarbe: on écrivait autrefois Rheubarbe.] Plante dont la racine est un des meilleurs remèdes. = On dit, dans le style plaisant, pâsse-moi le séné, je te passerai la rhubarbe; pardone-moi cette sotise, je t' en passerai une aûtre que tu as faite, ou que tu feras. "On prétend que ta femme te pâsse la rhubarbe, et que tu lui pâsse le séné. Marm. C. à. d. que vous vous pardonez mutuellement vos infidélités.

RHUMATISME


RHUMATISME, s. m. RHUME, s. m. [L' h est muette.] On écrivait autrefois, rheume, etc. Rhumatisme, douleur dans les muscles, les membranes, acompagnée de dificulté dans le mouvement volontaire. Avoir un rhumatisme; être sujet au rhumatisme. "Rhumatisme universel. Rhumatisme goutteux. = Quelques-uns disent, douleur rhumatismale. L' Acad. ne met point cet adjectif.
   RHUME, fluxion causée par une humeur âcre, qui, ordinairement, excite la toux et rend la voix enrouée. Rhume de cerveau. "Le rhume lui est tombé sur la poitrine. Fièvre de rhume.

RIANT


RIANT, ANTE, adj. [Ri-an, ri-ante: 2e lon.] 1°. Qui marque de la gaîté, de la joie. "Air, visage riant. "Mine riante. "OEil riant; bouche riante. = 2°. Agréable à la vûe. "Apartement, jardin riant. Maison riante.
   Rem. Cet adj. peut suivre ou précéder, mais au gré de l' oreille ou du goût. "Ils gardoient les moutons ensemble sur les bords rians de la Seine. Les rians bords ne vaudrait rien.
   Que tout y fasse aux yeux une riante image.
       Boileau.
Ces riantes moissons, vains fruits de tant de peines.
De Lille.
Image riante et moissons riantes ne seraient pas si bien. = Le féminin précède plus volontiers que le masculin.

RICANEMENT


RICANEMENT, s. m. RICANER, v. n. RICANEUR, EûSE, s. m. et fém. [Rikane--man, né, neur, neû-ze: 3e e muet au 1er, é fer. au 2d, lon. au dern.] Ricaner, c' est rire à demi, soit par sotise, soit par malice. = Ricanement, action de ricaner. = Ricaneur, eûse, qui ricane.
   Voilà-t-il pas, monsieur, qui ricane déjà.
       Molière.
"Il a un ricanement bête, ou malin, qui est fort déplaisant.
   Son air, des demi mots, que vous n' entendiez pas,
   Certain ricanement, un silence perfide,
   Voilà comme il parloit: et tout cela décide.
       Le Méchant.
"C' est un ricaneur impatientant; une ricaneûse insuportable. Il est aussi adjectif.
   Rien ne m' est échapé de leurs tons ricaneurs,
   De leurs propos légers, de leurs souris moqueurs.
       Palissot.

RIC-À~-RIC


RIC-À~-RIC, adv. [Rikarik] À~ la rigueur, sans faire de grâce. Il est du st. famil.

RICHARD


RICHARD, s. m. RICHE, adj. RICHEMENT, adv. RICHESSE, s. f. [Richar. Le d ne se prononce jamais: riche, cheman, chèce: 2e e muet au 2d et au 3e, è moyen au dern.] Richard, qui a beaucoup de bien. "C' est un richard, un grôs richard. Il ne se dit que de cette manière, et seulement des petites gens, dans le style familier; ou des gens plus élevés dans le style critique: "Ces richards, vos bons amis, fait dire l' Ab. de Mongault, à Cicéron, écrivant à Atticus.
   RICHE, 1°. Opulent, qui possède de grands biens. "Homme fort riche, extrêmement riche: il est riche en argent, en fonds de terre, en capitaux, en rentes constituées. "Elle étoit puissamment riche. Dest. = Fig. Riche en mérite, en vertus. Riche des biens de l' esprit.
   Et si le sort cruel vous a ravi vos biens,
   Soyez riche en vertus: voilà votre apanage.
       Dest. Le Glor.
  Vous êtes assez riche en bone opinion,
  Ã€~ ce qu' il me parait. - - Point. Sans présomption,
  On sait ce que l' on vaut.
       Le Joueur.
= 2°. En parlant des chôses, abondant, fertile. Riche moisson: mine fort riche. Pays riche en blés, en vins, etc. = Langue riche, abondante en mots et en tours. On ne peut pas dire que la Langue française soit riche; mais nos grands Écrivains en savent tirer parti. = 3°. De grand prix. "meuble, étofe riche. _ Orné. "Plafond, lambris fort riche. Une riche tapisserie, broderie, etc. = 4°. Fécond en idées, en images. "Sujet, matière riche. Expression, comparaison riche. = 5°. Rimes riches, qui vont au delà de l' exactitude exigée. = 6°. S. m. Il se dit ordinairement au pluriel, les riches: mais on dit aussi au singulier, le riche et le pauvre, pour dire, les pauvres et les riches. On le dit toujours indéfiniment. On ne dit pas un riche, mais un homme riche~. = 7°. En st. prov. on dit, riche comme Crésus, ou comme un Crésus, comme un Juif, comme un puits: riche à millions. "Est assez riche qui ne doit rien. Est assez riche qui est content. _ Et en style famil. Faire un riche mariage, épouser une femme fort riche. C' est un riche parti. Jeune homme ou jeune fille à marier, très-riche. On le dit plus souvent des filles que des garçons.
   Rem. Riche aime à précéder le substant.
   Il languit accablé sous son riche fardeau.
       De Lille.
Sous son fardeau riche serait mauvais, même en prôse. "Malgré les mines riches, qu' on exploitoit en Espagne. Ling. Je voudrais dire, les riches mines. Il y a pourtant des mots avec lesquels il ne fait pas bien devant, comme riche Prince, et sur-tout riche homme. "Le plus riche homme de Constantinople. Maimbourg. Dites: Prince fort riche, extrêmement riche; l' homme le plus riche, etc. = Il régit ordinairement les prépositions en et de, et le plus souvent la première. "Riche en bijous, en pierreries.
   Riche de fruits... de fruits d' inocence et de paix.
       De Lille, Jardins.
La Bruyère met par et de dans la même phrâse; celui-ci pour les noms qui expriment les biens, celui-là pour ceux qui expriment les moyens de les aquérir. "Nos ancêtres en avoient moins que nous; et ils en avoient assez; plus riches par leur économie et par leur modestie, que de leurs revenus et de leurs domaines. Ces deux régimes diférens peuvent faire un bon éfet dans des phrâse semblables.
   RICHEMENT a plusieurs sens. = Magnifiquement. "Richement vétu, meublé. = Rimer richement se dit d' un Poète, comme Rousseau, par exemple, qui n' emploie ordinairement que des rimes riches. = Marier une fille richement, lui faire épouser un homme fort riche. Pourvoir richement ses enfans, leur doner des établissemens considérables. = En style plaisant, extrêmement: femme richement laide.
   RICHESSE est, 1°. au singulier et au propre, abondance de biens. "C' est le comerce qui fait la richesse de cette ville. "Le bétail est une grande richesse en certains lieux. _ Les enfans font la richesse des pères. Le Proverbe dit, contentement pâsse richesse. = On dit aussi la richesse d' une mine; la richesse d' une langue; la richesse des rimes. Voy. n°. 2°. et 5°. = 2°. Éclat, magnificence. "La richesse d' une étofe, d' un habit. = 3°. Au pluriel, biens possessions, revenus. "Être ataché aux richesses du monde. Aquérir, entasser des richesses. Posséder de grandes richesses.
   Rem. La contrainte de la rime a fait préférer à Racine le singulier au pluriel, dans une ocasion où celui-ci méritait la préférence.
   Heureux qui de la sagesse,
   Attendant tout son secours,
   N' a point mis en la richesse
   L' espoir de ses derniers jours. {C480a~}
Peut-être n' est-ce pas une faûte en vers; mais en prôse c' en serait une.

RICOCHET


RICOCHET, s. m. [Rikochè: 3e. è m.] Au propre, Bond que fait une pierre plate, jetée obliquement sur la surface de l' eau. Faire des ricochets. Il ne se dit pas de la pierre, mais de celui qui la jette. _ En style prov. avoir de quoi faire des ricochets, avoir plus de revenu qu' il n' en faut pour vivre suivant sa condition, avoir de quoi contenter ses fantaisies. "Il a dix mille écus de rente: il a au moins six mille francs pour faire des ricochets. = Fig. Par ricochet, par circuits, non pas directement et de la première main. "Cette nouvelle est venue par ricochet jusqu' à moi. "Ce n' est que par ricochet que j' ai su le peu que je vous mande. Let. Edif. = Ricochet est aussi le vieux nom d' un petit oiseau, qui répète continuellement son ramage; de là l' expression proverbiale, c' est la chanson du ricochet; c' est toujours la même chanson, le même discours.

RIDE


RIDE, s. f. RIDER, v. act. [2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Ride se dit proprement des plis qui se font sur le front, sur le visage et les mains, fruits ordinaires de l' âge. "Avoir des rides, le front plein, couvert de rides. "Quoi, de si bone heure, les rides comencent à vous venir! = Par extension, il se dit de l' eau: le vent forme des rides sur la rivière. = Rider, faire, causer des rides. "Le chagrin ride le front: l' âge, la maladie l' ont tout ridé. "Son front se ride; son visage comence à se rider. Avoir le front ridé, les mains ridées.
   Le moindre vent qui, d' aventure,
   A ridé la face de l' eau,
   Vous oblige à baisser la tête.
dit le chêne au roseau, dans une Fâble de La Fontaine.
   Il faut, du moins, pour se mirer dans l' onde,
   Laisser calmer la tempête qui gronde,
   Et que l' orage et les vents en repos
   Ne rident plus la surface des eaux.       Volt.
= Rider, en termes de Marine, c' est acourcir une voile avec des ris.

RIDEAU


RIDEAU, s. m. [Rido: au plur. rideaux; l' o est long, ridô.] Morceau d' étofe ou de toile auquel sont atachés des aneaux qui coulent sur une tringle, et par le moyen desquels on le tire pour couvrir et découvrir, etc. "Tirer, ouvrir le rideau. = On dit figurément tirer le rideau, pour, découvrir ce {C480b~} qui est caché; et tirer le rideau sur, pour, couvrir ce qui devrait être caché, et qui ne l' est pas. Cette expression est du style familier. "N' est-il pas de notre devoir et de notre charité pastorale de tirer enfin le rideau, dit Bossuet. On est plus délicat aujourd' hui sur les bienséance du style. "Il auroit mieux fait de tirer le rideau sur cette action. D' Avr.

RIDELLE


RIDELLE, s. f. [Ridèle: 2e è moy. 3e e muet.] Un des côtés d' une charrète, fait en forme de râtelier. "Une de ridelles s' est rompûe: c' est la ridelle droite.

RIDER


RIDER; Voy. RIDE.

RIDICULE


RIDICULE, adj. RIDICULEMENT, adv. RIDICULISER, v. act. RIDICULITÉ, s. fém. [4e des deux premiers e muet, dern. des aûtres é fermé.] Ridicule, qui est digne de risée. "Cela est ridicule. "Se rendre ridicule. = Subst. "C' est un ridicule, un homme ridicule; c' est une petite ridicule. = Il remarque, il saisit le ridicule de chaque chôse. Doner un ridicule à quelqu' un. "Tomber dans le ridicule, dans un grand ridicule; se doner un ridicule. Tourner, traduire en ridicule.
   Ce n' est pas sur leurs moeurs que je veux qu' on en cause.
   Un vice, un déshoneur sont assez peu de chose:
   Tout cela dans le monde est oublié bientôt.
   Un ridicule reste, et c' est ce qu' il leur faut.
       Le Méchant.
  Comment! vous qui voyez si bien les ridicules,
  Ne m' en dites-vous rien? Tenez-vous aux scrupules.
       Ibid.
Rem. 1°. L' adjectif peut se placer devant ou aprês le substantif; mais c' est au goût et à l' oreille à lui assigner sa place dans la construction. Le ridicule Auteur: c' est une chôse ridicule. On ne dirait pas, le ridicule homme. "D' être toujours trompée sur cette guérison, dit Mde de Sévigné, c' est une trop ridicule chôse. D' abord l' inversion parait dûre; mais cette dûreté aparente rend~ l' expression plus énergique. = * Un Auteur anonyme le met à la tête de la phrâse~, en sous-entendant il est. "Ridicule donc de vouloir que, etc. Réfut. des Lett. Pacif. M. Moreau a traité de même l' adjectif Inutile. Voy. ce mot. = Ridicule a un sens passif: vos ridicules sont leS ridicules que vous avez, dont vous êtes rempli, et non pas ceux que vous donez aux aûtres. Un Avocat, répondant à Dom Ansart, dont la Lettre avait été insérée dans l' Ann. Litt. lui dit: je ne crains point vos ridicules (il voulait dire vos plaisanteries) ni ceux de Fréron. P.... a raison, dit l' Auteur de l' Ann. Litt.. P.... n' a à craindre que les siens.
   RIDICULEMENT, d' une manière ridicule.
"Il chante, il danse ridiculement.
   RIDICULISER, rendre ridicule, tourner en ridicule. "Ridiculiser un homme, une action, souvent louable. = L' Acad. avait dabord aprouvé ce mot, sans distinction de style. Dans les éditions suivantes, elle dit qu' il n' a d' usage que~ dans le style famil.
   RIDICULITÉ, action, ou parole ridicule. "C' est une ridiculité. St. famil. = C' est aussi la qualité de ce qui est ridicule. "La ridiculité de ce propôs, de ce procédé est sensible. _ L' Acad. ne met pas ce second sens, qui est aussi usité que l' aûtre.

RIEN


RIEN, s. m. [Monos. ien n' y a pas le son d' ian Pron. rien. = Quelques-uns prononcent ren; cela ne vaut ren: c' est une prononciation vicieûse.] S. m. Nulle chôse. "Dieu a créé le monde de rien. "Il ne fait rien: rien ne peut le toucher. = Il ne se dit que des chôses; il est du masculin sans pluriel: il se décline sans article, comme les noms propres: rien, de rien, à rien: on ne peut m' acuser de rien: je ne tiens à rien: je ne veux rien, je ne me soucie de rien. "Qui n' a besoin de rien n' est jamais pauvre. Volt. "Me voilà resté seul dans le bon parti; car... ceux-ci ne sont bons à rien, et ceux-là ne se soucient de rien. Let. de Cic. à Attic. Mongault. = 1°. Rien, employé dans une négative et suivi de que ou de comme, régit de et l' infinitif. "Rien n' est si beau que de pardoner. "Rien ne porte malheur comme de payer ses dettes. Cette dernière phrâse est de Regnard, dans Le Joueur; mais comme il y avait une syllabe de trop, il a retranché de:
   Rien ne porte malheur comme payer ses dettes.
= 2°. Sans négation, il a le sens de aucune chôse, quelque chôse: "Je ne crois pas que rien le touche: "Y-a-t-il rien de plus aimable? etc. REST. _ Boileau dit, dans sa 2e Satire:
   Pâsser tranquillement, sans souci, sans affaire,
   La nuit à bien dormir, et le jour à rien faire.
La Fontaine met la négative dans son Épitaphe.
   L' une à dormir, et l' aûtre à ne rien faire.
Boileau demanda à l' Académie laquelle de ces deux manières valait mieux. Il pâssa tout d' une voix que la siène était la meilleûre; parce qu' en ôtant la négative, rien faire était une espèce d' ocupation. Tout le monde ne trouvera pas peut-être cette raison trop bone, et plusieurs préfèreront la manière~ de La Fontaine. Rien faire, c' est ne faire quoi que ce soit; ne faire aucune chôse; le sens et l' analogie semblent~ donc demander la négation. = C' est sur-tout dans les interrogations et avec si, que rien signifie quelque chôse, et qu' il faut retrancher ne: "Y a-t-il rien qui conviène mieux: "S' il n' y eût jamais rien, dit Bourdaloue, qui fût capable de m' attacher fortement à Dieu.... c' étoit cette pensée: Dieu est mort pour moi. Il falait: s' il y eût jamais rien qui, etc. Peut-être cet illustre Orateur a mis la négative à caûse de jamais, mais avec si on ne met point de négation devant jamais. = 3°. Rien, à l' acusatif, se place aprês le verbe dans les tems simples; et dans les tems composés entre l' auxiliaire et le participe; il précède toujours l' infinitif. "Il ne fait rien; il n' a rien fait. Il ne veut ou ne peut rien faire; et non pas, il n' a fait rien, il ne veut faire rien. "J' aime à n' avoir rien à faire, et non pas à ne rien faire. J' aime le loisir et non l' oisiveté. L' Ab. Trub. "Racine et Molière le mettent aprês l' infinitif. "Je ne puis dire rien. Bajazet. "Et sans lui dire rien. École des Maris. Il faut je ne puis rien dire, et sans lui rien dire. Gresset a dit aussi:
   Elle vous croit trop bon pour lui refuser rien.
La contrainte de la rime ocasione ces constructions vicieûses, mais ne les autorise pas. Des Prosateurs, qui n' ont pas cette excûse, ont fait la même faûte, si c' en est une, comme je le crois. "Pour moi, je ne puis vous pardoner rien. Télém. "Je ne veux pas vous dire rien. Fonten. Remarquez outre cela pas, et Voyez n°. 4°. "Comencer tout et n' achever rien. Neuville. Il est mieux placé en cet endroit, à cause de l' oposition de tout et de rien. = Quand il est suivi de son régime, il peut se placer devant ou aprês l' infinitif. "Je voulois n' ignorer rien (ou, ne rien ignorer) de tout ce qui sert au gouvernement d' un grand Royaume. Télémaque. = Dans les câs obliques, aûtres que l' accusatif, rien se met toujours aprês le verbe, en quelque tems qu' il soit: "Il ne pense à rien: il ne s' est mis en peine de rien: il est heureux de ne se soucier de rien: il n' a servi de rien, et non pas, il n' a de rien servi, comme ont dit Molière, Jurieu, Rollin et autres Auteurs. = 4°. Quand rien est employé avec la négative, on ne met ni pas, ni point.
   On ne veut pas rien faire ici qui vous déplaise.
       Rac. Plaid.
"Voilà précisément, dit D' Olivet, le cas pour lequel les deux Savantes de Molière vouloient que leur servante fût chassée.
   De pas mis avec rien tu fais la récidive,
   Et c' est, comme on l' a dit, trop d' une négative.
Racine n' a usé de ce barbarisme, ajoute l' illustre Académicien, que pour faire rire; et peut-être auroit-il mieux fait de s' en pâsser. = 5°. Rien veut de devant l' adjectif qui le suit: il n' a rien de grand que la naissance. Vaugelas dit qu' on peut retrancher de devant l' adjectif qui régit de, apparemment pour éviter la cacophonie de deux de placés si prês l' un de l' aûtre. "Il ne fait rien digne de sa réputation. Il est vrai que rien de digne de est bien dur; mais il ne faut pas éviter les mauvaises consonances aux dépens des règles et de l' usage. Il vaut mieux prendre un aûtre tour, et dire: il ne fait rien qui soit digne de sa réputation. Wailly. Les phrâse suivantes pèchent contre cette Règle. "Rien n' aura de force, qui s' éloignera de ces saintes règles. Bossuet. Pour construire régulièrement cette phrâse, il faut dire: rien de ce qui s' éloignera, etc. "Il n' étoit rien plus comode, etc. Fonten. "Il n' y a rien si contraire que, etc. Mallebr. Dites, rien de plus comode; rien de si contraire. = On doit donc dire, il n' y a rien de tel, et non pas, il n' est rien tel, comme l' ont dit de bons Auteurs. "Il n' est rien tel que de prendre ses sûretés. Fonten. "Il n' est rien tel que les méthodes régulières. Id. "Il n' est rien tel qu' une main philosophique pour presser ces éponges (les Libraires). Linguet. = Rien tel n' est suportable que dans le style demi marotique.
   Il n' est, ma foi, rien tel que la richesse,
   Pour avoir grand nombre d' Amis.
       L' Ab. Reyre.
_ Le génitif, régime de rien, peut être placé à la tête de la phrâse: "De tout ce qu' on fait sur la terre, rien n' est utile que ce qu' on fait pour le Ciel. = Cette préposition de précède aussi rien, dans le cours de la phrâse, au lieu de le suivre, mais c' est dans un aûtre sens. "Le beau tems ne vous est de rien: vous y êtes trop acoutumée. Sév. On dit aussi, comme si de rien n' étoit. "Tout d' un coup on vient lui dire qu' il verra clair, et que ses paûvres yeux, que la fluxion avoit mis hors de la tête, y étoient rentrés heureusement, comme si de rien n' étoit. Id. "Elle va et vient par le monde, comme si de rien n' étoit. Id. (Comme si elle n' etait pas malade). "On canone, on tiraille... la nuit vient au milieu du tapage: chacun va chez soi écrire des relations... et puis on reparoit des deux côtés, comme si de rien n' étoit. Ling. Tout cela est du style familier. = 6°. Rien, suivi d' un pronom relatif, exige quelquefois que le verbe, qui vient aprês, soit afecté par la particule ne. "Il n' y a rien que je ne fasse pour vous faire plaisir. Si l' on retranchait cette négative, on dirait tout le contraire de ce que l' on voudrait dire dans ces ocasions. = 7°. Rien se met quelquefois au pluriel; et il est pur substantif: il signifie alors des bagatelles, des chôses ou des dificultés, qui n' en valent pas la peine. "Toutes ces objections sont des riens. "Grand diseur de riens; et non pas de rien, comme on le voit dans des Livres. "N' étoit ce pas le câs de ne rien répondre, ou de répondre des riens. L' Ab. Garnier, Hist. de Fr. Ce jeu de mots est frivole et trivial. = 8°. Rien se met quelquefois à la tête de la phrâse, en réponse à une interrogation. "Qu' y a-t-il donc dans ces Historiettes de Mr. Im...? Rien: rien à reprendre; rien à louer. Journ. de Mons. On sous-entend, il n' y a. = * 9°. On a dit aûtrefois rien au fém. pour chôse. On disait, sur toute rien, pour sur toute chôse; par nulle rien, pour, quelque chôse que ce soit. "Beau fils, la première chôse que je t' enseigne et commande à garder, si est que de tout ton coeur et sur toute rien tu aimes Dieu. Joinville, Vie de St. Louis. "Par nulle rien, on ne lui eut souffert. Monstrelet. = * 10°. En certaines Provinces, où l' on parle fort mal, bien des gens disent, cela ne fait de rien, ou, ne fait en rien. Il faut dire, cela ne fait rien. Le Peuple le dit en d' autres Provinces, où les gens qui ont reçu une éducation parlent bien. "Mon Dieu! c' est fête aujourd' hui. _ Cela ne fait en rien. Th. d' Éduc. _ 11°. Ne savoir rien de rien est du st. famil.
   Ne sachant rien de rien,
   Au susdit cloitre enfermé pour son bien.
       Ververt.
  Nouvel habitant de ce monde,
  Ignorant le mal et le bien,
  Ou plutôt ne sachant encore rien de rien,
  Un jeune rat de sa niche profonde
  Ã‰toit sorti pour la première fois.
       L' Ab. Reyre.
= Venir à rien. Voy. VENIR. = N' être de rien. "Il comptoit pour beaucoup cet avantage si peu recherché de n' être de rien. FONTEN. Él. du P. Reyneau de l' Oratoire. = * M. Rétif dit, homme de rien, gens de rien. "Les enfans de famille s' avancent dificilement, tandis que les fils de gens de rien parviennent. L' Acad. met homme de rien, d' une fort basse naissance. On dit aussi, homme de néant; mais je ne sais si l' on peut dire aussi des gens de néant, des gens de rien. = En moins de rien, adv. En peu de tems: "En moins de rien les Japonois furent sur les murâilles. Le P. Charlev. On dit, en ce sens, il n' y a rien que je l' ai vu, il n' y a rien d' ici là. Il sert alors à marquer l' espace de tems ou de lieu. = Il ne tint à rien que: il s' en falut peu que. "Il ne tint à rien qu' il ne se tuât. = Se réduire à rien se dit d' une chôse dont il n' est presque rien resté, ou d' une afaire dont on se promettait un grand succês, et qui n' en a eu aucun. = Cet homme ne m' est rien, n' est pas mon parent: il ne m' est rien, ou de rien; je n' y prends nul intérêt. = Il est venu de rien, il s' est élevé de rien; il est de basse extraction. = On dit, proverbialement, d' un mauvais ménager, qui n' entend pas ses afaires, que: "de cent sous il fait quatre liv. et de quatre livres rien. = On ne fait rien de rien: On ne saurait réussir sans moyens, sans secours. = On ne fait rien pour rien: on a presque toujours quelque vûe d' intérêt dans les services qu' on rend aux aûtres.

RIEUR


RIEUR, EûSE, s. m. et fém. [Ri-eur, ri-eû-ze: 2e. lon. au 2d.] 1°. Celui, celle, qui rit. Il ne se dit qu' au pluriel. Faites taire ces rieurs, ces rieûses. = 2°. Qui aime à rire: c' est un grand rieur, une grande rieûse. = 3°. Râilleur. "Vous êtes un rieur. = Avoir les rieurs de son côté, avoir l' aprobation du grand nombre: il a ou il n' a pas les rieurs de son côté, ou pour soi.
   Les rieurs sont pour vous, Madame, c' est tout dire,
   Et vous pouvez pousser contre moi la satire.
       Misantrope.
  Il est vrai; mais enfin, Cléon est respecté,
  Et je vois les rieurs toujours de son côté.
   - - - De si honteux succès ont-ils de quoi vous plaire?
   Du rôle de plaisant connoissez la misère.
       Le Méchant.

RIGIDE


RIGIDE, adj. RIGIDEMENT, adv. RIGIDITÉ, s. fém. [3e e muet aux deux prem. dans le 2d. en a le son d' an.] Rigide est en général, sévère, extrêmement et quelquefois trop exact. Il se dit des persones et des chôses qui ont raport aux persones. "Homme, Confesseur, censeur rigide. "Rigide observateur des règles, des Lois. Vertu, morale rigide. = En parlant des sectes de Religion ou de Philosophie; qui en soutient les dogmes sans la moindre altération; Calviniste, Cartésien rigide.
   RIGIDITÉ, grande sévérité, extrême et quelquefois excessive exactitude. "La rigidité des moeurs, de la morale, de la discipline.
   RIGIDEMENT, avec rigidité. "Jeûner rigidement tout le carême. Il examine tout fort rigidement.

RIGODON


RIGODON, s. m. C' est ainsi qu' on troûve ce mot écrit dans les Dictionaires. S' il en faut croire J. J. Rousseau, cette ortographe n' est pas conforme à l' étymologie. Il avait oui dire à un Maître à danser, que le nom de cette danse venait de l' inventeur, qui s' apelait Rigaud. Il faudrait donc écrire Rigaudon. = Sorte d' air; et danse qu' on danse sur cet air là. Acad.

RIGOLE


RIGOLE, s. f. [3e e muet.] 1°. Petite tranchée, qu' on creuse dans la terre ou dans des pierres de tâille, pour faire couler l' eau dans un jardin. = 2°. Petite tranchée qu' on fait pour planter des bordûres ou des palissades.

RIGORISME


RIGORISME, s. m. RIGORISTE, s. m. Le 1er se dit d' une morale outrée, et le 2d de celui qui la professe.

RIGOUREUX


RIGOUREUX, EûSE, adj. RIGOUREûSEMENT, adv. RIGUEUR, s. fém. [Ri-gou--reû, reû-ze, zeman, gheur: 3e lon. aux trois premiers, 4e e muet au 2d et au 3e.] Rigueur, sévérité, dûreté. "Grande, extrême, insuportable rigueur. Tenir rigueur à (style famil.) Avoir de la rigueur pour. La rigueur de la Règle, des tourmens, etc. = Fig. La rigeur du sort, du destin. = À~ la rigueur, trop à la lettre, sans modification. _ En rigueur, à toute rigueur, avec une extrême exactitude et sévérité. M. l' Ab. de Mongault dit, juger à la rigueur; d' autres, en plus grand nombre, disent, en rigueur. = À~ la rigueur se met ordinairement à la tête de la phrâse. "À~ la rigueur (absolument parlant) cela peut être ainsi.
   RIGOUREUX, en parlant des persones, qui a beaucoup de sévérité. "Juge, Magistrat, Créancier rigoureux. Homme rigoureux, qui ne pardone rien, ou qui ne relâche rien de ses droits. = Fénelon lui fait régir le datif: "La fortune ne nous est pas plus rigoureûse. Télém.
   RIGOUREûSEMENT, avec rigueur. "Traiter, punir rigoureûsement.

RIMâILLER


RîMAILLER, v. neut. RIMâILLEUR, s. m. RIME, s. fém. RIMER, v. n. et act. RIMEUR, s. m. [Rimâ-glié, glieur, rime, mé, meur: 2e. lon. aux deux premiers.] Rime est une uniformité de son dans la terminaison de deux mots: aimer, charmer est une rime masculine, belle, rebelle une rime féminine. "La contrainte de la rime ocasione beaucoup de solécismes, d' expressions et d' irrégularités de toute espèce. = La Rime est vicieûse en prôse. "Les eaux jaillissantes sont plus réjouissantes que les eaux tranquilles et les dormantes. Dites, les eaux qui jaillissent sont plus agréables que celles qui sont tranquilles et dormantes. Wailly.
   RIMER se dit, 1°. des mots, dont les dernières syllabes ont la même terminaison. "Ce mot ne rime pas avec celui-là: ces deux mots riment bien. 2°. Des Poètes, qui emploient des rimes bones ou mauvaises. "Il rime bien; il rime mal. 3°. Faire des vers. "Il emploie tout son tems à rimer. On le dit par mépris. = 4°. V. act. Mettre en rimes, en vers. "Il a rimé ce Conte. = On dit des vers prosaïques, que ce n' est que de la prôse rimée; quelques-uns ajoutent burlesquement (en jouant sur le mot vers) où les vers se sont mis. = V. n. Sans régime.
   Quel besoin si pressant avez-vous de rimer?
   Et qui diantre vous pousse à vous faire imprimer?
       Misantr.
= 5°. Dans le style badin, il se dit au figuré, dans le sens de s' acorder. "On a supprimé dans l' épitaphe la qualité de premier Commis, comme ne rimant pas bien avec toutes les autres qu' on lui confère. Anon. _ Cela ne rime à rien, ne signifie rien. "Vous lui faites des contes bleus qui ne riment à rien. Th. d' Éduc.
   RIMEUR, sans épithète, mauvais poète. Avec un épithète, il peut avoir un bon sens. "C' est un excellent rimeur: il emploie dans ses vers des rimes três-riches.
   Rimâiller, rimer; Rimâilleur, rimeur. Ils ne se disent que de ceux qui font de méchans vers.
   Si jamais tu rimailles,
   Ce ne sera morbleu, qu' entre quatre murailles.
       Piron.

RIMPRIMER


RIMPRIMER; écrivez et voyez RÉIMPRIMER.

RINCEAU


RINCEAU, s. m. [Rein-so: 1re longue. Plur. rinceaux.] Feuillage, qu' on emploie dans les ornemens de Peintûre et d' Architectûre.

RINCER


RINCER, v. act. RINCûRE, s. f. [Rein--cé, sûre: 1re lon. 2e. é fer. au 1er, lon. au 2d. = Plusieurs écrivent rinser, rinsûre, avec une s. Dans les éditions précédentes l' Acad. les avait mis tous deux: dans la dern. elle ne met plus que le premier. La seconde manière vaudrait mieux pour éviter de mettre au substantif la cédille ou le ç souscrit, lettre ou, pour mieux dire, caractère emprunté des Espagnols, et qui n' est pas dans le génie de notre langue; qu' on ne doit employer par conséquent que dans l' absolûe nécessité.] Rinser, c' est nétoyer en lavant et en frotant. Il ne se dit que des verres, tasses, cruches et aûtres vâses semblables, et de la bouche qu' on lave. = Populairement, on dit d' un homme, qui a été bien mouillé, qu' il a été bien rinsé. _ Quelques-uns le disent de celui qui a essuyé une verte réprimande.
Rinsûre; ce avec quoi on a rinsé quelque chôse.

RIOTER


RIOTER, v. n. Diminutif. Rire tout doucement. St. famil. 

RIPâILLE


RIPâILLE, s. f. On ne le dit qu' avec Faire: \çà, faisons ripâille. Volt. C. à. d. grand' chère.
   Et chacun de tirer, le mâtin, la canâille,
   À~ qui mieux mieux, Ils firent tous ripâille.
   Chacun d' eux eut part au gâteau.       La Font.
Cette expression est bâsse et populaire. Elle n' est bone que pour le burlesque, pour le st. poissard ou grivois.

RIPOPÉ


RIPOPÉ, s. m. [3e é fer. _ Rousseau l' a fait fém. et dit ripopée.] Il est populaire. Mélange que font les Cabaretiers de diférens restes de vin. "Ce n' est que du ripopé, un méchant ripopé. = Par extension, mélange de diférentes liqueurs, ou de diférentes sauces. = Figurément, discours mélé de diférentes chôses, qui ne font qu' un méchant composé.

RIPOSTE


RIPOSTE, s. f. RIPOSTER, v. n. [3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Dans le comencement de ce siècle, on écrivait encôre risposte, risposter. L' Académie disait alors, que quelques-uns écrivaient riposte, riposter avec une seule s, et La Touche prévoyait que cette prononciation l' emporterait; ce qui est arrivé. Réponse vive faite sur le champ. Répondre, repartir vivement. "Il a la riposte prête, la riposte en main. Il lui fit une riposte fâcheuse. "Il est prompt, ou vif à la riposte. "Il riposta fort à propôs. = V. act.. "Si vous le fâchez, il vous ripostera quelque chôse de désagréable. = Par extension, ils se disent de l' action de repousser une injure. "On lui dona un démenti; la riposte fut d' un souflet, ou un souflet; il riposta par un souflet, ou d' un coup d' épée au travers du corps. Ils ne sont que du style fam. = Riposter, en termes d' escrime, c' est parer et porter la botte du même moûvement.

RIRE


RIRE, v. n. et s. m. [1re lon. 2e e muet.] Je ris, nous rions; je riois ou riais; je ris, j' ai ri; je rirai, je rirois ou rirais; ris, que je rie, nous riions, je risse, riant, ri. = Rire, c' est proprement faire un certain moûvement de la bouche, causé par l' impression que fait sur nous quelque chôse de plaisant, qu' on dit ou qu' on fait devant nous. 1°. Ce verbe entre dans plusieurs expressions familières: Se prendre, se mettre à rire, éclater de rire. "Ils se prirent à rire, comme si j' eusse dit une chôse impossible. Voit. "L' Hôte et l' Hôtesse éclatèrent de rire. Volt. "Pardonez-nous, si nous nous sommes mis à rire. Id. "Il est permis de rire, mais de grands éclats de rire sont indécens. D' Olivet, IV Tuscul. Voy. ÉCLAT et ÉCLATER. "Tout se tourna en plaisanterie, selon le génie de la Nation, qui rit toujours le lendemain de ce qui l' a consternée ou animée la veille. Volt. = Aprêter à rire. "Vous deviez du moins ne pas aprêter à rire, où l' on ne rit jamais. Coyer. _ Mourir de rire, pâmer de rire. "On pensa mourir de rire. SÉV. "C' étoient des postures à pamer de rire. Id. _ Rire de tout son coeur. "M. de la R. F. en a ri de tout son coeur. ID. _ Rire tout son soul. "Je ne m' étone pas que vous ayiez ri tout votre soul, en m' écrivant l' étrange bruit qui court de moi. Voit.
   Riez donc. Rira bien, qui rira le dernier.
       Le Flateur.
  ....Qu' avez-vous donc à rire?
  ....Monsieur, cela ne se peut dire.
      Rousseau.
   Que diable a t' il à rire?
   C' est du mal qu' il a fait, ou du mal qu' il va dire.
       Palissot.
_ Avoir le mot pour rire. "Elle a toujours le mot pour rire. Th. d' Éduc. _ Mourir d' envie de rire. "Moi, je mourois d' envie de rire: pour Isabelle, elle étoit comme une souche, et faisoit la moûe. _ Ne faire qu' en rire. "Nous nous promenons sans fin et sans cesse, et sa jambe (auparavant malade) n' en fait que rire. M. de Coul. _ Rire du bout des dents; mal volontiers: rire aux Anges, sans sujet aparent; se chatouiller, ou se pincer, pour rire, faire des éforts pour rire. "Cet homme est plaisant: il ferait rire un tâs de pierres. _ Il n' y a pas le mot pour rire: il n' y a rien de plaisant dans un ouvrage qui est fait pour réjouir. = 2°. Rire ne signifie quelque--fois que se divertir, se réjouir. "Venez avec nous, nous rirons. Il aime à rire . = Rire aux dépens d' autrui. "Marchand qui~ perd ne peut rire: quand on essuye quelque perte, ou qu' on est dans le malheur, on ne peut se réjouir. = 3°. Râiller, badiner. "Il disait cela pour rire. "Tout en riant, il lui a dit de bones vérités. = 4°. Se moquer. "Rire de quelqu' un. * Autrefois on disait, se rire.
   À~ votre nez, mon frère, elle se rit de vous.
       Mol.
"L' on se rioit d' eux, et l' on ne rioit pas de ce qu' ils avoient dit. Vaugelas parlant des mauvais plaisans. Destouches l' a encore employé.
   Mais si je vais parler, vous vous rirez de moi.
       Le Glorieux.
Et d' autres Poètes. = On l' emploie encore dans le style badin ou plaisant. = 5°. Rire ou se rire, c' est aussi, se moquer, ne pas se soucier, s' inquiéter de. "Il rit de toutes les menaces qu' on lui fait. "Je me ris de ses menaces: je ne fais qu' en rire. = 6°. Rire, au fig. se dit des chôses, ou sans régime: tout rit dans cette maison, dans ce jardin, tout y est agréable; ou avec le datif: "Cela rit à l' imagination. "Tout lui rit, la fortune lui rit, tout rit à ses desirs, tout lui est favorable. = L' Abé de Lille lui fait régir élégamment la prép. de.
   Quand tout rit de bonheur, d' espérance et d' amour.
       Jardins.
Mais ce régime de rire, apliqué aux chôses, n' est que du st. poétique.
   RIRE, s. m. Bien diférent de la plupart des infinitifs substantifs, il s' emploie au pluriel, et s' unit à des adjectifs. On dit, des rires inocens. WAILLY. "Alors elle fait ses grands rires forcés. Th. d' Éduc.

RIS


RIS, s. m. [Ri, et devant une voyèle, riz.] 1°. C' est la même chôse que rire, subst. "Ris agréable ou dédaigneux et moqueur. Ris forcé, ris amer. "Des ris continuels, des ris éclatans. Les jeux et les ris.
   Le ris sur son visage est en mauvaise humeur.
       Boil.
On dit que le Poète, dans ce vers, avait en vue le Duc de Montausier. = 2°. Sorte de grain. Voy. RIZ. = 3°. Glandule, qui est sous la gorge du veau, et qui est un manger assez délicat. Un ris, des ris de veau.

RISÉE


RISÉE, s. f. [Rizé-e: 2e é fer. et long, 3e e muet.] 1°. Grand éclat de rire de plusieurs persones. "Il s' éleva une grande risée dans l' assemblée: on fit de grandes risées. = 2°. Moquerie. "S' exposer à la risée: être l' objet de la risée. = 3°. Il se prend pour l' objet même de la risée; comme terreur et éfroi, pour l' objet de l' éfroi, de la terreur. Cette femme s' est rendûe la fâble et la risée de toute la ville. "Il fut la risée de toute la compagnie: il lui servit de risée.
   Et votre abaissement servira de risée
   À~ vos propres flateurs.
       Rousseau.
Je vais servir à tous de fâble et de risée.
La Chaussée.

RISIBLE


RISIBLE, adj. RISIBILITÉ, s. f. [Rizi--ble, zibilité.] 1°. L' un et l' aûtre expriment, en termes de l' École, la faculté de rire. "L' Homme est un animal risible: la risibilité est le propre de l' Homme. = Dans le discours orinaire, le substantif n' est pas d' usage: l' adjectif, apliqué aux chôses, signifie, qui est propre à faire rire. "Ce conte est fort risible. "Le caractère (du Dissipateur) est moins ridicule que celui de l' Avâre, et par conséquent moins risible. DEST. = En parlant, et des chôses et des persones, qui est digne de moquerie. "Ce que vous dites là est risible. "Cet homme est risible, de prétendre que, etc. "C' est un homme risible.

RISIèRE


RISIèRE. Voy. RIZIèRE.

RISQUABLE


RISQUABLE, adj. RISQUE, s. m. RISQUER, v. act. et neut. [Riskable, ke, ké, 3e dout. au 1er, e muet au 2d, é fer. au 3e.] Le genre de risque a été long-tems incertain. Enfin le masculin l' a emporté. On a dit aûtrefois, nulle risque, PASC. Aucune risque, SARR. Courir de grandes risques, BOUH. On ne dit plus que, nul risque, aucun risque, grands risques. Le féminin ne s' est conservé que dans cette locution proverbiale, à toute risque, à tout hazard.
   RISQUE, péril, danger. Voy. DANGER. S' exposer au risque, ou courir le risque de. Il régit de et l' infinitif. "Il courut grand risque d' être condamné.
   Rem. 1°. Il y a grande diférence pour le régime, et même pour le sens, entre courir risque de faire, et courir un risque à faire. Le 1er signifie qu' on était dans le risque, ou sur le point de faire une chôse; et l' aûtre, qu' en la fesant, on était exposé à des malheurs. "Nous avons couru risque de faire naufrage. "On ne court aucun risque à faire cette route. = 2°. Courir risque, et risquer se disent du mal, et non du bien. * Ceux-là parlent mal, qui disent d' un malade, il court risque, ou il risque d' échaper; et d' un homme qui est en voie de s' enrichir, il court risque, ou il risque de faire fortune. = 3°. Courir risque régit-il l' ablatif des noms? Vertot lui done ce régime, et il fait très-bien dans la phrâse suivante. "Il n' étoit pas juste que dans la maison d' un homme tel que Claudius, Virginie courut plus de risque de son honeur, que de sa liberté. L' Abé Coyer et M. Salaun mettent au pluriel, courir les risques de: ce n' est pas trop l' usage.
   RISQUER, hazarder, mettre en danger. "Risquer sa vie, son honeur, son argent.
   On joue argent, bijous, maisons, contrats, honeur;
   Et c' est ce qu' une femme, en cette humeur à craindre,
   Risque plus volontiers, et perd plus sans se plaindre.
       Le Joueur.
  Je n' ai plus rien à perdre, et j' ai tout à risquer.
      Sémiramis.
= V. n. "Il risque de beaucoup perdre, pour peu gâgner. = Le Traducteur du Voyage d' Anson done à ce verbe le sens de tenter, essayer. "Nous risquâmes de nous servir de nos bâsses voiles. Ce verbe n' est pas usité en ce sens.
   REM. D' Avrigni fait régir à risquer, neut. la prép. à, au lieu de la prép. de: "Le Duc aime mieux risquer à tout perdre que de ne gâgner rien. Il falait, risquer de tout perdre, etc. Quand risquer est actif, et signifie courir des risques, la prép. à va fort bien. Vous risquez tout à prendre ces moyens; c. à. d. en prenant, etc. Voy. plus haut, courir risque, Rem. 1°. Voy. aussi 2°. = Risquer régit de avec l' infinitif, ou que avec le subjonctif. Le 1er régime est employé quand le verbe régi se raporte au nominatif de risquer; le 2d, quand il ne s' y raporte pas: vous risquez d' être méprisé, ou, qu' on ne vous méprise.
   RISQUABLE, qui a du risque: afaire, projet risquable. Il est peu usité. = Plusieurs le disent dans le sens de, qu' on peut risquer, hazarder. Il n' est guère plus en usage dans cette acception.

RISSOLE


RISSOLE, s. f. RISSOLER, v. act. [Ri--sole, solé. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Rissole, sorte de menûe pâtisserie, faite de viande hâchée et envelopée dans de la pâte frite dans du saindoux.
   RISSOLER, cuire, rôtir de manière que la viande prène une couleur rousse et apétissante. "Le feu a bien ou trop rissolé ce cochon de lait. "Cette viande comence à se bien rissoler: elle est bien rissolée. = En st. proverb. on dit d' un homme, dont le soleil a brûlé la peau du visage, qu' il a le visage rissolé.

RIT


RIT, ou RITE, s. m. Bossuet dit rite, au sing. et rits, au plur. Au contraire, quoique l' usage admette rite dans ce premier nombre, il préfère pourtant rit, et il n' aprouve que rites au plur. = Ordre prescrit des cérémonies, qui se pratiquent dans une Religion, et sur-tout dans la Religion Chrétiène. "Le rit Grec, le rit Latin. "Les rites Gallican, Mozarabe, Gothique. "La Congrégation des Rites.

RITOURNELLE


RITOURNELLE, s. f. Petite symphonie qui précède un chant, et qui quelquefois le suit. Acad.

RITUEL


RITUEL, s. m. Livre contenant les cérémonies, les prières, les instructions qui concernent l' administration des Sacremens, et les autres fonctions curiales.

RIVAGE


RIVAGE, s. m. [3e e muet.] Il se dit proprement des bords de la mer, et en vers de ceux des rivières. Pour celles-ci, on dit rive, dans le discours ordinaire.
   La mer, dans l' excês de sa rage,
   Se roule en vain sur le rivage,
   Qu' elle épouvante de son bruit;
   Un grain de sable la divise,
   L' onde écume, le flot se brise,
   Reconoît son maître et s' enfuit.
       Le Franc.

RIVAL


RIVAL, ALE, substantif m. et f. RIVALISER, v. act. RIVALITÉ, s. f. [Dern. du 2d e muet, et des deux autres é fer. lizé, lité.] Rival est, au propre, concurrent en amour. Par extension, il se dit de ceux qui aspirent en même tems à la même chôse. "Un dangereux rival; ils sont rivaux: elles sont rivales. "Il aspire à ce poste; il a bien des rivaux. Cartage était la rivale de Rome. Ils sont rivaux de gloire.
   Prenant la rage et le ton des Harpies.
   Mille rimeurs, honteusement rivaux,
   Par leurs sujets dégradent leurs travaux.
       Gresset.
  Qu' au mont sacré, de nouveaux habitans,
  Rivaux amis, rendent d' intelligence
  La vie aux moeurs, la noblesse aux talens.
       Id.
  Sois rival de toi-même, et fidèle à ta gloire........
  Et que tes derniers ans passent ton consulat.
   L' Abé de Mongault, Let. de Ciceron à Atticus.
   "Si Brutus entre dans les ressentimens de cet étourdi, vous pouvez l' aimer tout seul: vous ne m' aurez point pour rival. Cic. à Atticus. Mongault.
= On le dit figurément des chôses: "L' honeur, l' amour, deux puissans rivaux, se disputent son coeur et le déchirent. Jér. Dél. = Il s' emploie aussi adjectivement: Ces peuples rivaux: "Ces deux rivales et guerrières Nations. Hist. d' Angl. Dans cette phrâse, la construction est anglaise. En français, on dirait, ces deux Nations rivales et guerrières.
   RIVALITÉ, concurrence entre des rivaux. "Il n' y a point de rivalité entre eux. "La rivalité de ces deux Maisons Souveraines, de ces deux Nations, a causé de grands désordres.
   Chacun veut sur lui seul attirer les regards,
   Et la rivalité fait le progrès des Arts.
       Le Franc. Traduct. d' Hésiode.
= Ce mot ne doit pas être ancien dans la Langue. La Touche fait observer comme une chose digne de remarque, que l' Académie l' aprouve. Voy. ÉMULATION.
   RIVALISER est un terme nouveau. Être le rival de. "Un Art (des pierres gravées) qui semble rivaliser l' industrie de la nature dans la formation des insectes. Anon. "Ces fatales émigrations (dans les Colonies) qui ruinent la Métropole ou la rivalisent. Testament Polit. de l' Anglet. _ Ce mot serait utile. Il est à souhaiter que l' usage l' adopte.

RIVE


RIVE, s. f. Il se dit du bord d' un fleuve, d' un lac, de la mer. "N' aprochez pas si prês de la rive; rive bâsse ou escarpée: la rive droite, la rive gauche. "Le long des rives. Il se dit quelquefois pour pays. Dans des rives lointaines, désertes, etc. = On dit figurément, st. fam. ou tout au plus médiocre, d' une afaire embrouillée, d' un mystère impénétrable, qu' elle ou il n' a ni fond ni rive.

RIVER


RIVER, v. a. Abattre la pointe d' un clou sur l' aûtre côté du bois ou du fer qu' il perce, et l' aplatir de manière qu' il forme comme une autre tête. Voy. CLOU.

RIVERAIN


RIVERAIN, s. m. [Rive-rein; 2e e muet.] 1°. Qui habite le long d' une rivière. Les riverains de la Garone, de la Loire: = 2°. qui possède un héritage le long d' une forêt.

RIVET


RIVET, s. m. Pointe rivée du clou broché dans le pied d' un cheval.

RIVIèRE


RIVIèRE, s. f. [Ri-viè-re, 2e è moy. et long, 3e e muet.] Assemblage d' eaux, qui coulent dans un lit d' une étendue considérable. Voy. FLEUVE. "Descendre, remonter la rivière. "Boire de l' eau de rivière: poisson de rivière. = En style proverbial: porter de l' eau à la rivière: porter en quelque lieu des chôses qui y sont en abondance.
   Rem. 1°. Les noms propres de rivière quand ils ne sont pas précédés des mots rivière ou fleuve, doivent prendre l' article. On dit, la rivière de Seine, et les bords de la Seine. "Il y avoit une aûtre armée entre Sambre et Meuse, dit le Président Hénaut. On pourrait donc dire, entre Seine et Loire, entre Rhin et Rhône, ce qui n' est pas. Ce n' est qu' avec la prép. sur, que quelques rivières perdent l' article. "Châlons sur Marne, Châlons sur Saone. En Allemagne, on dit Francfort sur le Mein, Francfort sur l' Oder, avec l' article. = 2°. L' État de Gênes s' apèle la rivière de Gènes, on ne sait trop pourquoi.

RIZ


RIZ, s. m. RIZIèRE, s. f. Le 1er se dit d' une plante, qui produit un grain du même nom, que l' on fait bouillir, ou avec de la viande ou avec du lait. = Le 2d se dit d' une campagne semée de ce grain.

ROBE


ROBE, s. f. 1°. Sorte de vêtement long, diférent, suivant les persones qui le portent. Robe d' enfant, robe de Magistrat, de Palais, de Docteur, d' Avocat. = Robe-de-chambre que les hommes portent dans leur déshabillé. = 2°. Robe se prend pour la profession des gens de Judicature. "Les gens de robe. La Noblesse de robe; quiter l' épée pour la robe. = 3°. Avec les pronoms possessifs~, il signifie l' état des Éclésiastiques Séculiers ou Réguliers. "Je porte respect à votre robe. "Un homme de sa robe ne devrait pas tenir de tels propôs, une telle conduite.
   Le Proverbe dit, que Dieu done le froid selon la robe; qu' il ne nous envoie pas plus de maux que nous n' en pouvons porter. "Dieu done le froid selon la robe; de tous les maux que je pouvais avoir, j' ai eu précisément le moins périlleux. Sév. On dit aussi, dans le même sens, avoir la robe selon le froid, et le secours selon le besoin. "Je n' ai point trouvé, dit encore Mde. de Sév. que le proverbe fût vrai pour moi, d' avoir la robe selon le froid: je n' ai point de robe pour ce froid-là. Elle parle de l' absence de sa fille. "Il (Varron) vint si tard, qu' il auroit fallu le retenir; mais je m' y suis pris de manière que je n' ai pas déchiré sa robe pour l' arrêter. Cic. à Attic. Mongault.

ROBIN


ROBIN, s. m. [Ro-bein.] Homme de {C489a~} robe. C' est un robin, ce sont des robins. Il ne se dit que par mépris.

ROBINET


ROBINET, s. m. [Robinè, 3e è moy.] Pièce du tuyau d' une fontaine, qui sert à doner de l' eau, ou à la retenir, suivant qu' on la tourne à droite ou à gauche. = Quelquefois on apèle robinet la seule clef de ce tuyau, et c' est surtout à cette clef que la définition convient. "Ouvrir, fermer le robinet: la clef du robinet. On dit, proverbialement, d' un grand parleur: "Quand une fois le robinet est lâché, il a de la peine à finir.
   REM. Robin étant le nom ordinaire des moutons, il y a, comme M. le Duchat l' a remarqué, grande aparence que les robinets des fontaines ont été ainsi només, parce qu' ils étaient et sont encore faits la plupart en tête de mouton. La Monn.

ROBORATIF


ROBORATIF, IVE, adj. Qui fortifie. "Remède roboratif, propriété roborative. Il ne se dit qu' en Médecine.

ROBUSTE


ROBUSTE, adj. Qui est fort de corps et de complexion. = Cet adjectif suit ou précède, suivant le nom auquel il est joint: en prôse, il aime à suivre. "Homme robuste, santé, complexion robuste. En vers, il se plait à précéder, quand l' oreille et le goût le permettent.
   Mais enfin, quand tu vois ses robustes rameaux,
   Par des noeuds redoublés embrasser les ormeaux.
       De Lille.
= Rousseau aplique aux Auteurs l' épithète de robuste.
   Mais je soutiens, et j' en ai pour garans
   La Grèce entière, et l' Empire d' Auguste,
   Que tout Auteur mâle, hardi, robuste,
   Doit de ses vers bannir l' instruction,
   Ou, comme Homère, instruire en action.
Ailleurs il le dit de l' inocence.
   Votre innocence, inflexible et robuste,
   N' a point plié sous un pouvoir injuste.
   On peut croire, sans trop de témérité, je crois, que les rimes d' auguste et d' injuste ont ocasioné l' emploi de robuste dans ces deux endroits. Il surprend moins dans le second, étant associé avec inflexible. = L' Académie remarque qu' il ne se dit guère des hommes. Cela est surtout vrai dans le sens figuré. Voy. VIGOUREUX.

ROC


ROC, s. m. ROCâILLE, s. f. ROCâILLEUR, {C489b~} s. m. ROCâILLEUX, EûSE, adj. [Rok, rokâ-glie, glieur, glieû, glieû-ze: 2e lon. mouillez les ll: 3e lon. aux 2 dern.] Roc, masse de pierre três-dure, qui a sa racine en terre. "Percer le roc: bâtir sur le roc.
   Point de foiblesse au moins, ayez un coeur de roc.
       Le Joueur.
Voy. ROCHE. = Rocâille, petits caillous, coquillages, qui servent à orner une grote. = Rocâilleur, celui qui travaille en rocâille.
   *ROCâILLEUX est un néologisme, à la mode, dans le st. figuré. Raboteux. "La Musique est repoussée par des vers boursouflés et rocâilleux. ANON. "Bien diférent (M. Bernard) de plusieurs Poètes, qui n' ont pas craint de faire hurler la Musique dans des vers durs et rocâilleux. Sabatier, Trois Siècles, etc. "M. le M..... a beaucoup d' esprit, un caractère à lui, mais ce caractère est trop recherché. Sa poésie est pénible et rocâilleuse. En le lisant, on croit marcher sur des pointes de clous. Année Littéraire.

ROCAMBOLE


ROCAMBOLE, s. f. [Rokanbole: 2e lon. dern. e muet.] Espèce d' ail, moins violent que l' ail ordinaire. = Au fig. (st. fam.) ce qu' il y a de plus piquant dans une chôse. "La requête civile est la rocambole des procês. Acad.