Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI


R



R


R, s. fém. ou m. Il est féminin, quand on prononce erre, suivant l' ancien usage, une r, et masculin, quand on prononce re, suivant un usage três-moderne, un r. Voy. ALPHABET. = C' est la 18e lettre de l' Alphabet, et la quatorzième des consones. Elle est du nombre de celles qu' on apèle liquide, parce qu' elles se lient aisément avec les consones muettes dans une même syllabe, comme on voit dans branche, crainte, France, grandeur, providence, travail, etc. = L' r a trois sortes de sons; un son doux, un son moyen, et un son rude et fort. = 1°. L' r a un son doux, quand elle est entre deux voyèles, comme dans Paradis, Empire, Père, gloire, aurôre, augûre, etc. C' est une faûte de lui doner, dans ces ocasions, un son fort, et de la prononcer comme si elle était redoublée: Parradis, Emprirre, perre, etc. = 2°. L' r a un son moyen au comencement des mots, rage, rebelle, rire, royaume, ruban, etc. c' est le même son que celui de reinigen en allemand, de remember en anglais, de ridere en italien, de retentar en espagnol. = 3°. Elle a un son rude et fort, quand elle est redoublée, comme dans, terre, tonerre; quand elle est jointe à une muette, branche, providence, travail; quand elle finit la syllabe, et qu' elle est suivie d' une consone; barbare, percer, lorgner, etc. Enfin, à la fin des mots aprês l' ê ouv. = M. de Wailly remarque que quand il y a deux rr de suite, on n' en prononce qu' une ordinairement; arroser, arriver, perruque (prononcez, ârozé, ârivé, pêruque): qu' on prononce les deux rr dans aberration, abhorrer, errer, erreur, horreur, terreur et leurs dérivés; dans les mots qui comencent par irr, irradiation, irraisonable, irrégulier, etc. et dans les futurs et les conditionels des verbes aquérir, courir, mourir; j' acquerrai, j' acquerrais, tu courras, tu courrais; il mourra, il mourrait, si, etc. _ À~ mon avis, cela se réduit à dire qu' on prononce l' r plus ou moins fortement dans ces divers mots; car, à proprement parler, on ne prononce pas plus la double r, que la double s: l' une et l' autre ne sont redoublées dans l' ortographe, que pour avertir que le son n' en est pas doux, comme quand elle est simple entre deux voyèles. = L' r redoublée a sur-tout un son rude et fort devant l' e muet: terre, guerre, tonnerre, et l' e qui la précède est fort ouvert.
   Un Avis important à doner aux habitans des Provinces méridionales; c' est que l' r est une consone linguale et non pas gutturale, et que lors même qu' elle a le son le plus rude et le plus fort, elle se prononce avec la langue, et non pas du gosier. C' est à quoi les Provençaux en particulier, et plus particulièrement les Marseillais, doivent faire atention. La dureté de leur accent vient en grande partie de là: il tient beaucoup de la prononciation arabe.
   4°. L' r finale ne se prononce point aprês l' é fer. soit dans les infinitifs des verbes, soit dans les substantifs, aimer, doner, barbier, chandelier, métier, etc. Prononc. émé, doné, bar-bié, chande-lié, mé-tié, etc. mais aux substantifs en er, où l' e est ouv. comme mer, enfer, etc. et dans les adjectifs, fier, altier (quelques-uns y ajoutent léger) l' r se prononce fortement. Pour les aûtres infinitifs, suivant Restaut, elle ne se prononce pas dans ceux qui finissent en ir; mais bien dans ceux qui finissent en oir; finir, recevoir, etc. Prononcez fini, rece--voar, etc. * La Touche prétend que l' r se prononce toujours à l' infinitif, même dans ceux qui sont terminés en er et en ir. Il se trompe pour les premiers. Voy. ER. Pour les seconds, les opinions et la pratique sont fort partagés; les uns la prononçant toujours, les aûtres ne la prononçant jamais; d' aûtres enfin voulant que du moins on la prononce dans le discours soutenu. = Il en est de même des substantifs en ir: repentir, plaisir; etc. La plupart des Gramairiens veulent qu' on prononce, repanti, plézi, etc. Mrs. Regnier, Wailly, etc. sont d' un sentiment contraire, et veulent qu' on prononce dans ces mots l' r finale. Ce qui est sûr, c' est que dans martyr et zéphir on la prononce. Elle se prononce aussi dans les mots terminés en air, or, eur: éclair, trésor, faveur, etc. et dans ceux qui ont la terminaison en ar, aur, our, ur, colmar, Lavaur, amour, obscur. On excepte la prép., sur suivie de son régime, où l' r ne se prononce point, dans le discours famil. si le régime comence par une consone. Sur la terre: pron. su la terre. = 5°. Quand l' r finale, dans les mots où elle ne se prononce pas, est suivie d' une voyèle, qui comence le mot suivant, elle se prononce alors et se lie doucement avec cette voyèle; elle a dans cette ocasion, le même son que si elle était placée entre deux voyèles: aimer avec passion: doner aux pauvres: consentir à tout: prononcez, emé-ravek pacion: doné-rô pôvre: consanti-ra tout. Cela doit s' entendre de la prononciation soutenûe: car, dans la conversation, on ne fait pas même alors soner l' r. = 6°. On ne fait pas non plus, dans le discours familier, entendre l' r dans votre, notre, quand ils précèdent leur substantif; et l' on prononce, notre maison, votre chambre, comme s' il y avait note maison, vote chambre; mais quand ils sont pronoms relatifs, le nôtre, la vôtre, sans substantif, il faut y prononcer l' r. = Plusieurs veulent aussi qu' on ne prononce point l' r dans quatre suivi d' un nom substantif començant par une consone: d' aûtres pensent qu' il faut toujours l' y prononcer.

RABACHAGE


RABACHAGE, s. m. RABâCHER, v. n. RABâCHEUR, s. m. [2e lon. aux deux dern. on apuye sur l' â, parce qu' il est pénultième: on pâsse plus légèrement sur cet a dans rabachage, parce qu' il est au milieu du mot: l' Académie met l' acc. circ. sur tous les trois: les Auteurs qui les emploient, ne mettent point d' accent.] Ces mots sont assez nouveaux. Ils expriment cette espèce de radotage, qui consiste à revenir souvent et inutilement sur ce qu' on a dit. Ils sont fort à la mode et apartiènent au style plaisant ou critique. "Tout ce qu' il dit n' est que du rabachage: "Il ne fait que rabâcher. "C' est un rabâcheur, une rabâcheuse. = L' Abé De Fontenai dit des Réflexions de l' Horloge parlante, qu' elles sont três-justes, et ne sont point du rabachage, malgré la vieillesse de la discoureûse. Affiches de Province. _ Rabachage y est imprimé en italique. "La multitude de ses ouvrages (de Voltaire) devroit moins étoner le Directeur de l' Académie, s' il faisoit réflexion qu' ils présentent les mêmes chôses redites cent fois, ce qui devient un pur rabachage. L' Abé Grosier. "Ces rabachages dégoûtans passoient pour des chefs-d' oeuvre. Linguet. "C' est toujours son même ton (de M. de Volt.) sa même couleur, son même rabachage. Année Litt. 1770. "M. de Voltaire retombe encôre ici dans l' ennuyeux défaut de se répéter lui-même; et, si l' on peut se servir de ce terme, de rabacher toujours les mêmes idées. Ibidem. 1772. Le correctif et le caractère italique, employés dans cet endroit par Fréron, prouvent qu' il ne croyait pas que ce mot fût encôre adopté par l' usage. = Dans sa manière d' écrire l' histoire, il (l' Abé de Mably) parut dur et rabacheur. Année Littér. = J. J. Rouss. dit de Genève: on ôse parler de patrie et de vertu, sans pâsser pour rabacheur. Il parait qu' il lui done en cet endroit le sens de radoteur. = Dans l' Ann. Litt. on fait rabacher actif: "Nous ne savons pas sans cesse nous répéter, comme ces Messieurs (les Philosophes) et rabacher toujours les mêmes chôses. On a vu plus haut, que M. Fréron le fait aussi actif. L' Acad. ne le marque que neutre.

RABAIS


RABAIS, s. m. RABAISSEMENT, s. m. RABAISSER, v. act. [Rabê, bèceman, bècé: 2e ê ouv. au 1er, è moy. aux deux aûtres; 3e e muet au 2d, é fer. au 3e.] Les deux substantifs signifient diminution de prix et de valeur; mais le 1er se dit de toute sorte de chôses, et même des monaies; le 2d ne se dit que des monaies et des tâilles. "Doner ou mettre un ouvrage au rabais. "Il y trouvera bien du rabais. "Rabais des monaies, des denrées, des marchandises: "Le rabaissement des monaies, des tâilles. = On dit fig. st. fam. Mettre au rabais, parler désavantageusement. "Il met trop cet auteur, cet ouvrage au rabais.
   RABAISSER, c' est, 1°. au propre, mettre plus bâs: "Rabaisser un tableau: une corniche, etc. "Rabaisser sa voix, parler plus bâs. = 2°. Diminuer: "Rabaisser le taux des denrées, les tâilles, les monaies. = Fig. Rabaisser l' orgueil, le caquet de quelqu' un; réprimer sa vanité: la 1re expression est du style noble; la 2de, du style famil. = Il régit aussi les persones. "On croit s' élever d' autant, qu' on rabaisse ceux, qui sont au-dessus de nous. Marin, l' Homme Aimable.
   On dit proverbialement, rabaisser son vol, retrancher sa dépense, ou modérer ses prétentions.
   REM. Rabaissement, au figuré, est un mot de Port-Royal. "Ils connoissent le rabaissement où l' on met les persones. L' usage n' a pas admis ce mot dans cet emploi.

RABAT


RABAT, s. m. [On ne prononce point le t.] 1°. Ornement de toile, que les hommes de certaines professions portent autour du cou, et qui se rabat des deux côtés sur la poitrine. Pour les Éclésiastiques, on dit plus souvent collet ou petit collet. = 2°. Au Jeu de quilles, il est oposé à venûe: c' est le coup que le joueur joûe de l' endroit où sa boule s' est arrêtée. "Il a fait trois quilles de venûe, et deux de rabat. "Dans certaines parties, quand on n' a rien fait de venûe, on ne joûe point de rabat.

RABAT-JOIE


RABAT-JOIE, s. m. [Raba-joâ.] Ce qui survient de fâcheux, de désagréable, lorsqu' on est en train de se réjouir. "Voyez quel rabat-joie (pour eux, qui me haïssoient) de me rencontrer en situation si brillante et si prospère. Mariv. "Je suis afligée de cette néphrétique, qui acâble ce paûvre homme à tout moment: point de jours sûrs; c' est un rabat-joie continuel. Sév. = Suivant le Dict. de Trév. Il est du style bâs et famil.: bâs est là de trop. Le Richelet Port. le met sans remarque. _ Suivant l' Acad. il est familier, et renferme toujours quelque sorte de plaisanterie maligne. Je pense qu' il sufisait de dire, le plus souvent: l' exemple tiré des Lettres de Mde. de Sévigné prouve qu' on peut le dire par un sentiment de compassion.

RABANISTE


*RABANISTE ou RABINISTE, s. m. La Touche avance dabord qu' on dit l' un et l' aûtre: il dit ensuite que le 2d est meilleur que le 1er: il finit par dire que l' Académie ne met ni l' un ni l' aûtre. Dans la dern. édition elle met Rabbiniste. Voyez RABBIN.

RABATTRE


RABATTRE ou RABATRE, v. act. 1°. Rabaisser, faire descendre: le vent rabat la fumée. Son emploi n' est pas fort étendu dans ce sens. = 2°. Diminuer du prix. "Ce Marchand ne veut rien rabatre du prix qu' il demande: il n' en rabatrait pas un sou. = Figurément: "Il ne veut rien rabatre de ses prétentions. = 3°. Rabatre un coup, le détourner, le rompre en le parant. _ Fig. rabatre les coups, apaiser, adoucir des gens aigris les uns contre les aûtres. = 4°. En parlant des plis et des coutûres, les aplatir. = 5°. Dans le style figuré, rabaisser: "Rabatre l' orgueil, la fierté de quelqu' un; il lui a bien rabatu son caquet: ce dernier est du style familier. = 6°. Neutre ou réciproque: se rendre en un lieu, par un endroit. "Quand vous serez en tel lieu, vous rabatrez par un tel endroit, à main droite, etc. "Les perdrix se rabatirent dans une pièce de blé. = Avec la prép. par, le neutre vaut mieux: avec la prép. dans, on doit préférer le réciproque. * "Il rabatit dans cette ville. Charlev. Je crois que, il se rabatit dans, aurait mieux valu. = On dit aussi, se rabatre sur, au propre et au figuré: "L' Armée se rabatit sur cette place: "Aprês avoir parlé de diverses chôses, il se rabatit sur la politique. "Il se rabatit enfin sur les procédés, ne pouvant rien dire de solide sur le fond de l' afaire.
   On dit proverb. Tout compté, tout rabatu, tout bien examiné.

RABBIN


RABBIN, s. m. RABBINAGE, s. m. RABBINIQUE, adj. RABBINISME, RABBINISTE, s. m. [On pourrait écrire tous ces mots avec un seul b, rabin, rabinage, etc.] Rabin, Docteur Juif. Rabinique, qui est particulier aux Rabins. Rabinisme, doctrine des Rabins. Rabiniste, qui suit cette doctrine. Rabinage, étude qu' on fait des livres des Rabins. "C' est le sentiment des Rabins. "Caractères rabiniques. "Il est Rabiniste, il est versé dans le rabinisme. "Il pâsse sa vie dans le rabinage. Ce dernier ne se dit que par mépris.
   On dit, par plaisanterie, d' un homme qui a beaucoup étudié les livres des Juifs, que c' est un vieux Rabin.
   Rem. Quelques-uns croient que Rabbaniste est mieux dit; mais l' usage l' a emporté pour Rabbiniste. Acad.

RABDOMAN


*RABDOMAN, s. m. RABDOMANCE, s. f. [3e lon. 4e e muet au 2d.] Rabdomance, est la prétendûe divination par la baguette-Rabdoman, celui qui devine par ce moyen l' eau ou les métaux cachés. Le 2d est un mot nouveau. "Jacques Aymar, que l' on pourrait nommer, à bon droit, le Prince des Rabdomans. MORVEAU. "Il y eut tout jours des Rabdomans consultés, et réussissant dans des villages. Linguet.

RABêTIR


RABêTIR, v. act. Rendre bête et stupide. "Le vin, la débauche, les aflictions rabêtisent les hommes. Trév. "Vous rabêtissez ce garçon là à force de le maltraiter. Acad. "Cet homme est tout rabêti depuis quelque tems. Trév. L' Acad. dit qu' il est populaire.

RâBLE


RâBLE, s. m. RâBLU, ÛE, adj [1re lon. 2e e muet au 1er, lon. au 3e.] Ils se disent au propre, de quelques animaux, comme le lièvre et le lapin. Râble, cette partie, qui est depuis le bâs des épaules jusqu' à la queûe. Râblu, qui est bien fourni de râble. = Par plaisanterie, on le dit des hommes forts et robustes. "C' est homme a le râble épais: c' est un grôs garçon bien râblu.

RABONIR


RABONIR, v. act. Rendre meilleur: "les bones caves rabonissent le vin.

RABOT


RABOT, s. m. RABOTER, v. act. [Ra--bo, boté: 3e é fer. au 2d.] Rabot est un instrument de menuiserie, qui sert à aplanir une pièce de bois et à la rendre unie et polie. = Raboter, rendre uni et poli avec le rabot. = Ils s' emploient au fig. dans le style médiocre, didactique, polémique, ou critique. "Pâsser le rabot sur un ouvrage de vers, de prôse, y doner un coup de rabot.
   Et reprenez cent fois le rabot et la lime.
       Boil.
"Il y a bien à raboter à cet ouvrage. _ On dit aussi d' un jeune homme qui n' est pas encôre formé, qu' il y a bien à raboter.

RABOTEUX


RABOTEUX, EûSE, adj. [3e lon. teû, teû-ze.] 1°. En parlant du bois, noueux, inégal. = 2°. En parlant d' un pays, d' un chemin, inégal: "Pays, chemin raboteux: alée raboteûse. = 3°. fig. En parlant du style, grôssier, mal poli.
   Sophocle, enfin, donnant l' essor à son génie,
   Des vers trop raboteux polit l' expression.
       Boil.

RABOUGRIR


RABOUGRIR, v. n. [Ra-bou-grir.] Il se dit des arbres qui ne profitent pas. "Les grandes gelées font rabourgir le jeune bois. = V. rec. "Ces arbres sont plantés dans un mauvais sol: ils se rabougrissent. = Son plus grand usage est au participe. "Jeune plant tout rabougri. = Figurément: Persone de petite tâille: petit homme rabougri; petite femme toute rabougrie.

RABOUILLèRE


RABOUILLèRE, s. f. [Ra-bou-gliè-re: mouillez les ll; 3e è moy. et long, 4e e muet.] Trou que les lapines creusent, pour y faire leurs petits.

RABOUTIR


RABOUTIR, v. act. Mettre bout à bout des morceaux d' étofe. _ L' Acad. dit qu' il est populaire.

RABROUER


RABROUER, v. act. [Ra-brou-é: 3e é fer. devant l' e muet, ou est long: il rabroûe; au futur et au conditionel, cet e muet ne se fait pas sentir: il rabrouera, rabrouerait: prononcez ra-broû-ra, ra-broû--rè, en 3 syllab.] Rebuter avec rudesse, avec mépris. "C' est un homme qui rabroûe tout le monde: si vous lui parlez de cela, il vous rabrouera; si vous lui faisiez une telle demande, il vous rabrouerait de la belle façon. Il n' est que du style fam.

RACâILLE


RACâILLE, s. f. [2e lon. 3e e muet: mouillez les ll.] La lie et le rebut du peuple. style familier et méprisant. "Ce n' est que de la racâille. Il est à-peu-prês synon. de canâille; et il est plus fort, plus énergique que celui-ci. "Je ne veux rien avoir à faire avec cette racâille.
   Les princes périrent tous:
   La racâille, dans des trous,
   Trouvant sa retraite prête,
   Se sauva sans grand travail.
       La Font.
= On le dit aussi des chôses de rebut. "On a pris tout ce qu' il y avoit de bon: on n' a laissé que de la racâille.

RACCOMMODAGE


RACCOMMODAGE ou RACOMODAGE, s. m., RACOMODEMENT, s. m. RACOMODER, v. act. RACOMODEUR, EûSE, s. m. et f. [Rakomodage, deman, , deur, deû-ze: 4e e muet au 2d, é fer. au 3e, lon. au dern.] Racomoder, c' est 1°. Refaire, remettre en bon état. "Racomoder une murâille, un plancher, une maison, du linge, un habit. Faire racomoder une montre, etc. = 2°, Rajuster: une femme qui racomode ses cheveux, sa coîfe. "Racomodez votre rabat. = 3°. Réformer, corriger: Il y a beaucoup à racomoder à cette harangue, à cette pièce, à cet ouvrage. _ Et en parlant des afaires: on aura bien de la peine à racomoder cette afaire: on l' a gâtée par trop de précipitation. = 4°. Réparer. "Il a fait une sotise, il cherche à la racomoder. = 5°. Mettre d' acord des persones qui se sont brouillées. "On les a racomodés. "Le mari et la femme se sont racomodés.
   RACOMODAGE et RACOMODEMENT sont synon. pour le sens: ils ne le sont pas pour l' emploi. Le 1er ne se dit qu' au propre (n°. 1°.): le racomodage d' un habit, etc. le 2d ne s' emploie qu' au figuré. (n°. 5°.) J' ai travaillé à leur racomodement.
   RACOMODEUR, EûSE ne se dit aussi qu' au propre, et des petites gens qui font métier de racomoder de certaines chôses. Racomodeur de souflets: racomodeûse de dentelles.

RACCORDEMENT


RACCORDEMENT, ou RACORDEMENT, s. m. RACORDER, v. act. [Rakordeman, : 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Termes d' Architectûre. Ils expriment la réunion de deux corps, de deux superficies au même niveau, au même plan, et sur-tout d' un vieil ouvrage à un neuf.

RACCOURCIR


RACCOURCIR ou RACOURCIR, v. act. RACOURCISSEMENT, s. m. [Ra-kour-cir, ci--ceman: 4e e muet au 2d.] Racourcir, rendre plus court. Racourcissement, action de racourcir, ou l' éfet de cette action. "Racourcir un manteau, une jupe. Racourcir un discours: cet accident a racourci ses jours: en passant par là, vous racourcirez votre chemin de beaucoup. _ "Le racourcissement du pendule. = Le substantif n' a pas un emploi aussi étendu que le verbe. = Racourcir le brâs, le plier en dedans, le retirer. _ À~ brâs racourci, de toute sa force.
   RACOURCI, s. m. Terme de peintûre. Éfet de la perspective, par lequel les objets vus de face paraissent plus courts qu' ils ne sont en éfet. "Ce Peintre entend bien les racourcis.
   *RACOURCISSEUR, abréviateur, est un mot de M. Linguet. "Il a exercé son talent racourcisseur sur le chef-d' oeuvre de Quinaut, sur Armide. C' est un de ces mots forgés au besoin, que quelque aûtre emploiera peut-être dans une ocasion pareille.

RACCOûTREMENT


RACCOûTREMENT, ou RACOûTREMENT, s. m. RACOUTRER, v. act. [Ra--koû-treman, Ra-kou-tré; 2e lon. dans le 1er, dont la 3e e muet, br. dans le 2d, dont la 3e é fer.] Ils expriment l' action de racomoder, (n°. 1°.) de recoûdre. Ils sont vieux, et peuvent pourtant servir encôre dans le style plaisant ou méprisant.

RACCROCHER


RACCROCHER ou RACROCHER, verbe act. Au propre, acrocher de nouveau. = Au figuré, style familier: Se racrocher, regâgner les avantages qu' on avait perdus: "Laissez le faire, il trouvera bien le moyen de se racrocher.

RACE


RACE, s. f. [2e e muet.] 1°. Il se dit des hommes. Lignée. Tous ceux qui viènent d' une même famille. "Être d' une bone race; d' une race illustre, anciène, de race noble, de race Juive, de la race Royale. "Les trois races des Rois de France. = Les Poètes disent la race futûre ou les races futûres, ou les races à venir, la postérité. = On dit, par injûre et par mépris, race maudite, méchante race, on le dit aussi des enfans incomodes, et même au pluriel: "Ce sont de méchantes races. = Race, lignée, famille, Maison (synon.) La Race rapelle son auteur; la lignée, les descendans; la Famille, le chef et les membres; la maison, l' origine et les ancêtres.... De la race des Capétiens est notre Maîson Royale: dans la Maison Royale, on distingue la Famille Royale. Cette Maison est de la Lignée de St. Louis. Extr. des Synonym. Fr. de M. l' Abé Roubaud. = 2°. Par extension, on le dit des animaux domestiques: "Chien, cheval de bonne race; et absolument, en parlant des chevaux seulement, cheval de race. = Le proverbe dit: les bons chiens chassent de race: les enfans tiènent des moeurs et des inclinations de leurs pères. _ Chasser de race, se dit des hommes, en bone ou en mauvaise part; mais il ne se prend qu' en mauvaise part, quand on parle des femmes.

RACHAT


RACHAT, s. m. RACHETABLE, adj. RACHETER, v. act. [Le t ne se prononce pas dans le 1er; 2e e muet au 2d et au 3e: la 3e est dout. au 2d, é fer. au 3e: devant l' e muet, la 2e se change en è moy. il rachette ou rachète: il rachettera ou rachètera. = Le Gendre écrit rachapt: on disait autrefois rachept. PLUCHE met constamment deux t à ce mot, comme au simple, achetter, rachetter: cette ortographe n' est conforme ni à l' usage, ni à la prononciation. Les deux t rendent moyen l' e qui précède, et cet e est muet dans acheter, racheter, et dans tous les tems terminés par une syllabe masculine: je rachetais, nous rachetons, je rachetai, rachetant, racheté, etc.] Rachat, est, 1°. le recoûvrement d' une chôse vendûe, de laquelle on rend le prix à l' acheteur: Le rachat des biens éclésiastiques. Vendre à, ou avec faculté de rachat. = 2°. Le rachat d' une rente, d' une pension, est le payement d' une certaine somme pour l' amortissement ou l' extinction d' une rente, d' une pension. = 3°. Délivrance, rédemption: le rachat des captifs: le rachat du genre humain. Acad. Pour celui-ci, on ne dit guère plus que rédemption.
   RACHETABLE, ne se dit que dans le 2d sens. Qu' on a droit de racheter. "Rente, terre rachetable.
   RACHETER a tous les sens de rachat. "Il avoit vendu son cheval à un maquignon: il l' a racheté de lui. "Racheter une pension, une rente. "Racheter quelqu' un des galères, des mains des Turcs, de captivité. Racheter les prisoniers. J. C. a racheté le Genre humain par son sang. = On dit d' une chôse qu' on regrette, qu' on voudrait l' avoir rachetée de beaucoup; et d' une persone qui nous était três-chère, et qui est morte, qu' on voudrait l' avoir rachetée de tout son sang. "Si vous me faites ce plaisir là, vous me rachetterez la vie: expression du style famil. = Racheter a quelquefois le sens de dédomager. "Il rachète ses défauts par ses agrémens: elle rachète sa laideur par son esprit, par sa vertu. La Bruyère dit: Je me rachetterai toujours fort volontiers d' être fourbe, par être stupide, et passer pour tel. Ces deux régimes de l' infinitif sont peu usités.

RACHITIQUE


RACHITIQUE, adj. RACHITIS, s. m. RACHITISME, s. m. Ces mot sont tirés du grec. Le 2d se dit des hommes, et sur-tout des enfans. Maladie qui consiste principalement dans la courbure de l' épine du dôis, et de la plupart des ôs longs, dans des noeuds, qui se forment aux articulations et dans le rétrécissement de la poitrine. _ Le 3e se dit d' une maladie du blé, nouvellement conûe, et qui a quelque ressemblance avec le rachitis. _ Le 1er se dit proprement, des persones nouées et ataquées du rachitis; et, par extension, des blés avortés.

RACINAGE


RACINAGE, s. m. Décoction d' écorce et de feuilles de noyer, et de coques de noix, propres pour la teinture.

RACINAL


RACINAL, s. m. Terme de charpenterie. Grosses pièces de bois, qui servent au soutien et à l' afermissement des aûtres. _ Plur. Racinaux. "Les racinaux d' un pont, d' un comble, d' une grûe, d' une écluse.

RACINE


RACINE, s. f. 1°. La partie par où les arbres et les plantes tiènent à la terre, et en tirent la plus grande partie de leur nourriture. = 2°. Plus particulièrement, on le dit de certaines plantes ou herbes, dans lesquelles ce qu' il y a de bon à manger, est ce qui tient en terre, comme raves, betteraves, carotes, navets, etc. Vivre de racines: "Les anciens Solitaires ne vivoient que de racines. = 3°. Il se dit des ongles, des dents et des cheveux; et par extension, des cancers, polypes, loupes, cors, etc. = 4°. Figurément, Principe. "Aler à la racine, ou couper la racine du mal, ou, couper racine au mal. "On proposa de couper racine à toutes disputes futures, par un traité solennel. "Le vice ou la vertu a jeté dans son coeur de profondes racines. = On dit proverb. prendre racine dans un endroit; y rester trop long-tems.

RACLER


RACLER, v. act. RACLEUR, s. m. RACLOIR, s. m. RACLOIRE, s. f. RACLûRE, s. f. [Raclé, cleur, cloar, cloâ-re, clûre: 2e é fer. au 1er, lon. aux 2 dern. _ Devant l' e muet l' a est long: il râcle, il râclera, etc.] Racler, c' est ratisser: enlever avec quelque chôse de rude ou de tranchant quelques petites parties de la superficie d' un corps. Racler des peaux, du parchemin, de l' ivoire, etc. "Racler des alées. = En style proverbial, on dit d' un breuvage médicinal, d' un vin trop vert, qu' il râcle les boyaux; et d' un homme qui joûe mal d' un violon, d' un viole, etc. qu' il râcle le boyau. = Racleur ne se dit que par mépris et dans ce dernier sens: c' est un racleur de violon, de guitarre; ou absolument, c' est un racleur.
   RACLOIR, instrument avec lequel on râcle~. = Râcloire, planchette qui sert à racler le dessus d' une mesure de grains, pour que la mesure soit juste et précise, et non pas comble.
   RACLûRE se dit des petites parties qu' on a enlevées en raclant. "Raclûre de parchemin, de corne de cerf, etc.

RACOLAGE


RACOLAGE, s. m. RACOLER, v. act. RACOLEUR, s. m. Ils se disent de l' action d' engager, soit de gré, soit par finesse, des gens pour le service militaire; et de celui qui fait profession de le faire.

RACOMODAGE


RACOMODAGE, RACOMODER, etc. Voyez RACCOMODAGE, etc. avec 2 c.

RACONTER


RACONTER, v. act. RACONTEUR, EûSE, s. m. et f. [Rakonté, teur, teû-ze: 2e lon. 3e é fer. au 1er, lon. au dern.] Raconter, c' est conter, narrer quelque chôse, soit vraie, soit faûsse. Voy. CONTER et NARRER. "Raconter un fait, une histoire, les particularités d' un évènement. = Raconteur, Raconteûse, celui, celle, qui a la manie de raconter. "Un ennuyeux raconteur, une raconteûse insipide. = Raconter est de tous les styles: Raconteur n' est que du st. famil. comique ou critique.

RACORDEMENT


RACORDEMENT, RACORDER: voyez RACCORDEMENT, RACCORDER, avec 2 c.

RACORNIR


RACORNIR, v. act. [Il n' est pas aisé de deviner la raison pourquoi l' on écrit racornir avec un seul c, et raccorder avec deux c.] Rendre dur et coriace. "Le feu a racorni cette viande. On dit que le vin racornit le fruit. "La viande se raconit à force de cuire. "Ces confitûres se sont toutes racornies.

RACOURCIR


RACOURCIR, RACOUTRER, etc. Voy. RACCOURCIR, RACCOUTRER, avec 2 c.

RACQUITTER


RACQUITTER, ou RAQUITER (Se) v. réc. Regâgner ce qu' on avait perdu. "Il avoit beacoup perdu à la première partie: il s' est raquité à la seconde. "Vous vous raquiterez une aûtrefois. = V. act. "Il avoit perdu dix louis: j' ai pris son jeu, et je l' ai raquité. = Fig. Dédommager d' une perte. "Cette afaire l' a raquité de plusieurs aûtres, où il avoit beaucoup perdu. "Le premier marché l' avoit fait perdre: il s' est raquité dans le second.

RACROCHER


RACROCHER: voy. RACCROCHER.

RADE


RADE, s. f. [2e e muet.] Étendue de mer, proche des côtes, qui n' est renfermée que par des collines environantes; qui met à l' abri de certains vents, et où les vaisseaux peuvent tenir à l' ancre.

RADEAU


RADEAU, s. m. [Rado: au pluriel, radeaux: eaux est long: radô.] Assemblage de plusieurs pièces de bois liées ensemble, et qui forment une espèce de plancher sur l' eau.

RADER


RADER, v. act. Terme de Marine. Mettre en rade. "Rader un vaisseau.

RADEUR


RADEUR, s. m. Mesureur de sel. On apèle radoire, l' instrument dont il se sert. On dit racloire, pour les grains.

RADIATION


RADIATION, s. f. [Ra-dia-cion.] 1°. En Physique, éfet des rayons de la lumière renvoyée par un corps. = 2°. Ratûre ordonée par autorité de Justice.

RADICAL


RADICAL, ALE, adj. RADICALEMENT, adv. [Radikal, kale, kaleman: 4e e muet au 2d et au 3e.] L' adjectif n' est usité qu' en Médecine, humide radical; et en Algèbre, signe radical, quantité radicale. = Quelques-uns l' emploient en Gramaire. Ils apèlent lettres radicales, les lettres qui sont dans le mot primitif, et se conservent dans les dérivés. _ M. de Wailly done le nom de radicaux aux noms de nombre, comunément apelés cardinaux ou absolus, parce qu' ils sont la racine des autres nombres, et qu' ils servent à les former.
   RADICALEMENT, se dit dans le discours ordinaire avec le mot guérir, au propre et au figuré: guérir radicalement une maladie. "L' alternative du cachot ou de sa main m' avoit guéri radicalement du peu d' inclination qui me restoit pour elle. Mariv.

RADICULE


RADICULE, s. f. RADIÉ, ÉE, adj. Termes de Botanique. Extrémité des racines d' une plante. = Radié se dit des fleurs, dont le disque est composé de fleurons, et la circonférence, de demi-fleurons, qui forment des rayons, comme le tournesol.

RADIEUX


RADIEUX, EûSE, adj. [Radi-eû, eû--ze: 3e lon.] Rayonant, brillant. Ménage trouvait que ce mot était toujours de la belle poésie, et que ceux qui faisaient dificulté de s' en servir étaient trop délicats, ou plutôt, qu' ils étaient dégoûtés.
   Celle-ci porte seule un éclat radieux.
       Malherbe.
Ces gens trop délicats ou dégoûtés, s' étaient si fort multipliés, depuis Ménage, que l' on ne disait plus radieux. Il a repris faveur, mais seulement dans le style badin ou critique, du moins en prôse. "L' habit gris de lin fut mis devant le miroir avec une secrette complaisance, et le Sage sortit radieux pour se rendre chez la Présidente. Marmont. _ Gresset l' a employé dans le style sérieux.
   Faut-il, d' Orphée, ou d' Ovide, ou du Tasse
   Interroger les manes radieux?
Rousseau avait dit avant lui:
   Comme un époux glorieux,
   Qui, dès l' aube matinale,
   De sa couche nuptiale,
   Sort brillant et radieux.
Le Rich. Port. le met sans remarque. Suivant l' Acad. il vieillit en prôse; mais on s' en sert en Poésie. = M. l' Abé Roubaud trouve cette diférence entre radieux et rayonant: que l' éfusion abondante de la lumière rend le corps radieux; et l' émission de plusieurs traits de lumière, le rend rayonant.... Le Soleil est radieux à son midi: à son coucher, il est encôre rayonant. L' aurore rayonante comence à jeter des feux: l' aurore radieuse est dans tout son éclat. Le Soleil est radieux avec un ciel pur: à travers des nuées transparentes, il n' est que rayonant, etc. = Nous disons familièrement, d' un homme qui a un air de bonne santé, de contentement, qu' il est radieux; et de quelqu' un qui vient de remporter un avantage honorable, qu' il est tout rayonant de gloire.

RADOTAGE


RADOTAGE, s. m. RADOTER, v. n. RADOTERIE, s. f. RADOTEUR, EûSE, s. m. et f. [3e é fer. au 2d, e muet au 3e, lon. au dern.] Radoter, c' est tenir des discours sans suite et dénués de sens, par un afaiblissement d' esprit causé par l' âge. Radoteur, eûse, celui, celle qui radote. Radotage, état de celui qui radote. Radoterie, éfet du radotage. "Il ou elle radote: il ne fait que radoter. "C' est un vieux radoteur, une radoteûse: il ou elle est dans le radotage: c' est un radotage continuel: il ne dit que des radoteries. Ils ne sont que du style famil. = On dit, figurément, dans ce même style, d' un homme qui dit des chôses sans raison, sans fondement, qu' il radote, qu' il ne fait que radoter; et quand cela lui arrive souvent, que c' est un radoteur.

RADOUB


RADOUB, s. m. RADOUBER, v. act. [On prononce le b final dans le 1er: radoub, dou-bé; 3e é fer. au 2d.] Réparation, réparer. Ils se disent d' un vaisseau, dont on met en bon état le corps, endomagé par quelque accident, ou par le tems. "Doner un radoub ou le radoub à un vaisseau, le radouber. * Quelques-uns disent radoubement. Trévoux. Danet le met dans son Dictionaire: radoub est plus en usage. Dict. d' Ortogr. Dans le Mercure, on dit radoubage, en parlant d' un ballon d' un aérostat. "Ils délibérèrent de faire un nouveau radoubage. _ Il semble qu' on aurait pu, et peut-être dû dire radoub, les ballons étant des navires aériens. = Dans les villes maritimes, où l' on est familiarisé avec les termes de marine, on dit d' un homme qui se porte mieux, aprês une grande maladie, qu' il ne faisait auparavant, qu' il a fait un radoub. Style figuré famil.

RADOUCIR


RADOUCIR, v. act. RADOUCISSEMENT, s. m. [Ra-dou-cir, ciceman: 4e e muet au 2e.] Ils expriment, au propre, l' action de rendre plus doux: la pluie a radouci le tems: le tems s' est fort radouci: le radoucissement du tems, de la saison. L' Acad. dit qu' il se disent principalement du froid. Au figuré, ils expriment l' action d' apaiser. "Radoucir quelqu' un, lui radoucir l' esprit. "Il n' est plus si en colère; il comence à se radoucir. Il s' est fort radouci. = En style fam.: se radoucir pour ou auprês d' une femme; en faire l' amoureux. L' Acad. met aussi radoucissement dans ce sens. "Il a eu beau se radoucir auprês d' elle; tous ses radoucissemens n' ont rien produit.

RAFALE


RAFALE, s. f. Terme de Marine. Coup de vent de terre, à l' aproche des montagnes.

RAFFERMIR


RAFFERMIR, ou RAFERMIR, v. act. RAFERMISSEMENT, s. m. [Rafêrmir, mice--man: 2e ê ouv. 4e e muet au 2d.] Ils expriment l' action de rendre plus ferme, et s' emploient au propre et au figuré. "Opiat, qui rafermit les dents, les gencives. "Le beau tems a rafermi les chemins. "Le bon air a rafermi sa santé. Rafermir l' autorité; la puissance. "Sa santé se rafermit; ses jambes se rafermissent. "Sa faveur auprês du Prince se rafermit tous les jours. _ "Le rafermissement de sa santé, de l' autorité royale.

RAFFINAGE


RAFFINAGE ou RAFINAGE, s. m. RAFINEMENT, s. m. RAFINER, v. act. n. et réc. RAFINERIE, s. f. RAFINEUR, s. m. [3e e muet au 2d et au 4e, é fer. au 3e, ne--man, , neri-e.] Rafiner, c' est 1°. au propre, rendre plus fin, plus pur. Rafiner le salpètre, le sucre. = 2°. V. n. au figuré, faire des recherches, des découvertes nouvelles: "Il a bien rafiné sur cette science. = C' est aussi, subtiliser: rafiner sur la langue, sur le point d' honeur: il rafine sur tout. = Se rafiner, devenir plus fin. "Le monde se rafine tous les jours: le siècle s' est bien rafiné: il était bien neuf; mais il s' est rafiné. Dans les deux derniers sens, il s' emploie ordinairement en mauvaise part. = Rafinage, Rafinerie et Rafineur ne se disent qu' au propre. Action de rafiner. Lieu où l' on rafine. Celui qui rafine. Rafinage du sucre, du salpêtre. Rafinerie de sucre. Rafineur de sucre, de salpêtre. = Rafinement, au contraire, ne se dit qu' au figuré. Trop grande subtilité. Il se dit, ou sans régime: c' est un trop grand rafinement, un rafinement ridicule; ou avec la prép. de: "Rafinement de politique, de spiritualité.
   Rem. * Dans le siècle pâssé, on employait rafineur au figuré. "C' est ce tour malin, que les rafineurs du monde aiment le mieux. Boss. _ Richelet le met aussi: mais cette expression n' est pas du goût et de l' usage actuel. _ * Mainard a employé rafiné substantivement, dans ce même sens. "La troupe des rafinés nous relève et nous ravale. Cela est aussi suranné.

RAFFOLER


RAFFOLER, RAFFOLIR, ou RAFOLER, RAFOLIR, v. n. [L' r finale ne se prononce point au 1er; 3e é fer. au 1er.] Le 2d se dit au propre: devenir fou: "vous me feriez rafolir. Il est peu usité. = Le 1er se dit au fig. style familier, avec la préposition de: se passioner follement pour quelqu' un, ou pour quelque chose: "Elle rafole de sa fille ainée: il rafole de cette femme, qui se moque de lui. "Un vieux Militaire, qui raffole de tous les nouveaux systêmes, et sur-tout des jardins anglais. L' Abé de Fonten.

RâFLE


RâFLE, s. f. RâFLER, v. act. [1re lon. 2e e muet au 1er., é fermé au 2d.] Râfle, est, 1°. grape de raisins, qui n' a plus de grains: quelques-uns prononcent rafe; on dit rape en plusieurs Provinces. = 2°. Au Jeu des dés, c' est quand les trois dés amènent le même point: râfle d' as; râfle de six. = Un Auteur moderne dit raflée, contre l' usage. = En style famil. Faire râfle ou râfler, c' est tout enlever sans rien laisser. "Les sergens, les soldats, les voleurs ont fait râfle, ils ont tout râflé.

RAFRAICHIR


RAFRAICHIR, v. act. RAFRAICHISSANT, ANTE, adj. RAFRAICHISSEMENT, s. m. [Rafrèchir, chi-san, sante, chiceman: 2e è moy. 4e lon. au 2d et au 3e, e muet au 3e.] Rafraichir c' est, 1°. rendre frais. "Rafraichir le vin, l' eau: cette petite pluie a rafraichi l' air, le tems. = Rafraichir le sang; le rendre plus calme par des remèdes, ou par le régime. = Rafraichir des troupes, rétablir leurs forces épuisées, en les mettant dans de bons quartiers. = 2°. Réparer, remettre en meilleur état. Rafraichir un tableau, une tapisserie. = 3°. En parlant de certaines chôses, rogner. "Rafraichir les cheveux, le bord d' un chapeau, un manteau, les bordûres d' un parterre, la racine d' un arbre, etc. = 4°. Renouveler. "Rafraichir une place d' hommes et de munitions. "Rafraichir à quelqu' un la mémoire d' une chôse. Le P. Rapin dit se rafraichir l' idée. "Ce discours ne sera peut-être pas inutile à ceux, qui s' apliquent à l' éloquence; pour s' en rafraichir l' idée. * Le P. Charlevoix dit rafraichir tout seul, mais mal. "Il rafraichit, (rapela) au Roi les instructions qu' on lui avoit autrefois données.. On dit; rafraichir la mémoire à... de... = 5°. V. n. ou réc. "Le vin rafraichit; le tems, l' air se rafraichit. = En parlant des persones, se rafraichir, c' est boire un coup; faire colation: "Venez vous rafraichir. = 6°. * En Provence on dit: rafraichir les verres; les rincer: c' est un mot provençal habillé à la française.
   En style figuré familier, on dit qu' une chose rafraichit le sang, pour dire qu' elle calme les inquiétudes. "Cette bonne nouvelle m' a bien rafraichi le sang; et non pas, a bien rafraichi mon sang.
   RAFRAICHISSANT, qui rafraichit. Il ne se dit qu' en Médecine. On ne dit point, un air, un vent rafraichissant, une pluie rafraichissante; mais on dit: remède rafraichissant, tisane rafraichissante; et substantivement, des rafraichissans.
   RAFRAICHISSEMENT, est 1°. ce qui rafraichit. "Avoir besoin de rafraichissement: prendre du rafraichissement. = 2°. Éfet de ce qui rafraichit. "Le trop de rafraichissement est nuisible. = 3°. Au plur. vivres, liqueurs, etc. dont on régale un Prince ou un Seigneur à son passage; ou munitions dont on rafraichit une place, une armée, un vaisseau. = 4°. Recouvrement des forces, par le repôs et les bons traitemens. "L' armée avoit besoin de rafraichissement. _ Delà, cette expression: quartier de rafraichissement, lieu où l' on envoie les Troupes fatiguées, pour se rafraichir.

RAGAILLARDIR


RAGAILLARDIR, v. act. [Raga-gliar--di.] Redoner de la gaîté. "Cette nouvelle l' a tout ragaillardi st. famil.

RAGE


RAGE, s. f. Au propre, délire furieux, qui revient ordinairement par accês, acompagné d' horreur pour l' eau et pour toute boisson. C' est ce qui lui a fait doner le nom d' hydrophobie. = Fig. Douleur violente. "Cette douleur est insuportable: c' est une rage. "Le mal de dents est une rage. * On dit en Provence: avoir une rage de dents: cette expression n' est pas française. = 2°. Transport violent de colère, de dépit. "Exercer sa rage contre quelqu' un: être emporté jusqu' à la rage. "Écumer de rage. "Avoir la rage dans le coeur. = En ce sens, il entre dans quelques expressions familières. _ Aimer à la rage, jusqu' à la rage. _ Il y a de la rage à cela. Avoir la rage, la passion de: il a la rage des tableaux. Il a la rage de rimer, de précher. "Cette rage de m' éloigner encore de vous, me done une véritable tristesse. Sév. = Faire rage, faire un grand désordre. "Les soldats ont fait rage dans cette maison.
   Un Loup, avide de carnage,
   Malgré notre berger et son chien, faisoit rage.
       La Fontaine.
= Faire rage pour ou contre, faire tout son possible pour servir ou pour nuire.
   Haranguez de méchans soldats:
   Ils promettent de faire rage;
   Mais au moindre danger, adieu tout le courage;
   Votre exemple et vos cris ne les retiendront pas.
       La Fontaine.
On dit, populairement, dans le même sens, faire rage des pieds de derrière. Dire rage, ou la rage de quelqu' un, en dire beaucoup de mal. = On dit proverbialement, que, quand on veut noyer son chien, on dit qu' il a la rage; quand on veut perdre quelqu' un, on lui cherche, ou on lui supose des torts.

RAGOT


RAGOT, OTE, adj. [On ne prononce pas le t final du 1er.] Qui est de petite taille; court et grôs. "Homme, cheval ragot; femme, jument ragote. = Subst. C' est un ragot, une ragote; en parlant des persones seulement.

RAGOûT


RAGOûT, s. m. RAGOUTANT, ANTE, adj. RAGOUTER, v. act. [Ragoû, gou-tan, tante, : 2e lon. au 1er; 3e lon. au 2d et au 3e, é fer. au dern. = On écrivait autrefois Ragoust, ragoustant, etc. On a remplacé l' s par l' accent circonfl. mais cet accent ne convient que devant l' e muet, où la diphtongue ou, qui le précède, est longue: il ragoûte, ragoûtera.] Ragoût n' est pas ancien dans la Langue: il n' est ni dans Nicot, ni dans Monet. Il vient de regustus, parce qu' un ragoût remet en goût: facit ut regustemus. La Monn. Ragoût n' est donc pas le goût, mais ce qui l' excite. Le P. Rapin n' a donc pas parlé proprement et exactement, quand il a dit: "Néron, par un fantasque ragoût pour la Philosophie, fit venir des Philosophes magiciens de l' Arabie, pour rafiner sur ce qu' il en avait apris de Sénèque. = Ce que cet Auteur veut dire, s' exprime par rafinement de goût, et non pas par ragoût.
   RAGOûT, mets aprêté pour irriter le goût, pour exciter l' apétit. "Bon, excellent ragoût; un ragoût de champignons. "Poitrine de veau en ragoût. "Aimer les ragoûts. = Fig. Ce qui excite le desir. "La dificulté est un ragoût. "Il y a du ragoût dans la nouveauté. Style médiocre.
   RAGOUTER, redoner du goût, remettre en apétit. "Ragouter un malade. Il a perdu l' apétit; il faut essayer de le ragouter. = Fig. Réveiller le desir. "Rien ne le touche plus: il faut quelque chôse de nouveau pour le ragouter. _ Il n' est que du st. fam.
   RAGOUTANT, qui ragoûte. "Ce mets n' est guère ragoutant. = Qui flate, qui intéresse: parûre, physionomie ragoutante. _ "Cela n' est pas fort ragoutant, n' est guère ragoutant, ne done que de la peine, du chagrin. "Le métier de plaideur n' est guère ragoutant. St. fam.

RAGRÉER


RAGRÉER, v. act. RAGRÉMENT, s. m. [Ragré-é, ragréman: 2e é fer. 3e é aussi fer. au 1er.] Dans les arts qui emploient le fer ou le bois, c' est polir, unir. En termes de Marine, se ragréer, c' est se réparer, ou se pourvoir de ce qui manque. = Ragrément est, dans le 1er sens, l' action de ragréer, ou l' éfet de cette action.
   REM. Ragréer, au figuré, n' est bon que pour le style plaisant ou critique. "Dês qu' il fait des éforts pour ragréer sa fragile réputation, il faut bien le rabatre sur son fauteuil. Linguet,

RAIE


RAIE, s. f. [, mon. long.] 1°. Trait tiré de long avec une plume, un crayon, etc. "Tirer, faire une raie sur, etc. = 2°. Ligne plus longue que large, qui se trouve naturellement sur certaines matières, on qu' on fait sur des étofes. = C' est aussi l' entre-deux des sillons.
   À~ la raie, adv. L' un portant l' aûtre. "Ces soixante chevaux coûtent cent écus à la raie. style familier.
   RAIE, espèce de poisson de mer plat et cartilagineux. "Manger de la raie. = Raie de turbot, qui est plus grôsse que la raie ordinaire.

RAJEUNIR


RAJEUNIR, v. act et neut. RAJEUNISSEMENT, s. m. [Ra-jeu-ni, niceman: 4e e muet au 2d.] Ils expriment l' action de rendre ou de redevenir jeune; de reprendre ou de faire reprendre l' air et la vigueur de la jeunesse "Cet Empirique se vantoit de rajeunir les gens: cette bone nouvelle l' a rajeuni. "La perruque le rajeunit de vint ans. "Il rajeunit, au lieu de vieillir: il semble que cette femme rajeunisse. _ "C' est un rajeunissement artificiel. = Dans le style poétique, rajeunir se dit des chôses en régime.
   Le printems de retour rajeunit la Nature.
       Gresset.
  Le seul printems sourit au monde, en son aurore:
  Le printems, tous les ans, le rajeunit encore.
       De Lille.

RAIFORT


RAIFORT, s. m. [Rèfor: 1re long. è moy.] Espèce de rave d' un goût piquant. "Raifort cultivé; autrement rave ou radis; Raifort sauvage ou cran. = En Provence on apèle raiforts, les petites raves: ce mot n' est pas français en ce sens.

RâILLER


RâILLER, v. act. et n. RâILLERIE, s. f. RâILLEUR, EûSE, adj. et s. m. et f. [Râ--glié, glie-ri-e, glieur, glieû-ze: 1re lon. 2e é fer. au 1er, e muet au 2d, lon. au dern.] Râiller, c' est 1°. plaisanter quelqu' un, le tourner en ridicule. Il est actif et neutre. Il se dit, ou avec le seul régime direct: "Râiller quelqu' un agréablement, délicatement, adroitement, ou grossièrement: il ne faut pas râiller les Grands; ou avec l' ablatif pour 2d régime: "C' est de quoi tout le monde le râille; ou avec le seul ablatif: râiller des chôses Saintes; de tout le monde, de ses meilleurs amis: il râille de tout, et de la Religion même: ou comme réciproque, avec le pronom personel et l' ablatif: "Vous vous râillez de moi: c' est se râiller du monde, que de faire de pareilles propositions. "Peut-être les Stoïciens se râillent-ils de nous, lorsqu' ils nous prêchent de n' être point affligés de la perte de nos biens, de l' exil, d' une prison. Mallebr. "Le troisième se râilloit de la science magique de l' un, et des jeûnes de l' aûtre. Anon. = Se râiller me paraît un peu vieux. Il me semble qu' on dit plutôt, se moquer. L' Acad. le met sans remarque. = Quand il est sans régime, il signifie simplement badiner, ne pas parler sérieûsement. "On ne sait s' il râille, ou s' il parle sérieûsement. "Ne pensez pas vous râiller; cela pourroit bien arriver. "Ne voyez-vous pas qu' il se râille?
   RâILLERIE, plaisanterie, action de râiller. Voy. Plaisanterie. "Fine, agréable, inocente râillerie, ou râillerie piquante, ofensante, froide, méchante, fade, insipide. "Tourner la chôse en râillerie. = Cela passe la râillerie: cette expression a deux sens: la râillerie est trop forte; ou bien, la chôse dont il s' agit est sérieûse et considérable. _ On dit, dans ce dernier sens: il n' y a pas de râillerie; et dans le 1er, en style proverbial: cette râillerie pâsse jeu. = La râillerie en est-elle? Est-il permis de râiller? = Râillerie à part, adverbe: pour parler sérieûsement. Il se met à la tête de la phrâse, pour corriger ce qu' on a dit auparavant, où l' on a paru râiller, plaisanter.
   Rem. Il ne faut pas confondre, entendre râillerie et entendre la râillerie: l' un signifie prendre bien ce qu' on nous dit; l' aûtre, c' est entendre l' art de râiller: ne pas entendre râillerie sur, c' est ne pas pardoner les manquemens. Dans le 1er sens et dans le 3e, il se dit toujours sans article. * Mde. de Sévigné l' emploie avec l' article indéfini. "Soyez en repos de ma santé.... je sais que vous n' entendez pas de râillerie là-dessus. La négative pas, qui est ordinairement suivie de la prép. de, a ocasioné cette irrégularité. Cette préposition est déplacée dans cette ocasion; car dans les expressions composées, où les mots s' emploient sans article dans le sens afirmatif, ils ne l' exigent pas non plus, quand le sens devient négatif. On dit: vous n' avez pas raison, il n' a pas tort, je n' en ai pas besoin; et non pas, vous n' avez pas de raison; il n' a pas de tort, je n' en ai pas de besoin. Il faut donc dire: vous n' entendez pas râillerie, et non pas de râillerie.
   RâILLEUR, EûSE, qui est porté à la râillerie; esprit râilleur, humeur râilleûse. = Qui est plein de râillerie: discours, ton râilleur, paroles râilleûses. = S. m. Qui aime à râiller, qui râille souvent. "Un agréable râilleur, ou un mauvais, un froid, un fade râilleur. = Qui ne parle pas sérieûsement. "Vous êtes un râilleur. = Le proverbe dit: souvent les râilleurs sont râillés: on se moque souvent de ceux qui se moquent des aûtres.

RAINE


*RAINE, s. f. Vieux mot, encôre usité dans certaines Provinces. Grenouille. C' est un latinisme, rana. Dans d' aûtres lieux, on dit rainette, dans le même sens.

RAINSSEAU


*RAINSSEAU. Mauvaise ortographe, sur--tout pour la double ss, qui ne se met jamais aprês une consone. Voy. RINCEAU.

RAINûRE


RAINûRE, s. f. [Rènûre; 1re è moyen, 2e lon.] Terme de Menuiserie. Petite entaillûre faite en long, dans l' épaisseur du bois, pour y assembler une aûtre pièce, ou pour servir à une coulisse.

RAIRE


*RAIRE, v. act. Vieux mot. Raser. Le participe passif était rais. Il s' est conservé dans cette phrâse proverbiale; ne se soucier ni de rais, ni de tondus; c. à. d. de persone. _ Raire ou réer, v. n. En termes de Vénerie, le cri du cerf.: "Les cerfs raient, ou réent, quand ils sont en rut.

RAIS


*RAIS, s. m. Vieux mot. Rayon. On disait aûtrefois, les rais de la Lune, du Soleil: se promener aux rais de la Lune. Dites plutôt, à la clarté de la Lune. Th. Corn. L' Académie dit qu' il est hors d' usage en prôse, et qu' il vieillit en poésie. = On dit encôre rais pour rayon, en parlant des roûes. "Il y a un rais de rompu. "Remettre un rais, des rais à des roûes.

RAISIN


RAISIN, s. m. RAISINÉ, s. m. [Rèzein, ziné; 1re è moy. dern. é fer. au 2d.] Raisin, est le fruit de la vigne. Voy. FIGUE. Raisiné est une confitûre liquide faite de raisins doux et ordinairement avec du miel au lieu de sucre. Plusieurs apèlent aussi de la sorte des fruits confits au moût de raisin, au lieu du sucre ou du miel.

RAISINE


RAISINE, ou RÉSINE, s f. L' Acad. met le 1er; Trév. le Rich. Port. et le plus grand nombre des Auteurs mettent le 2d. Voyez RÉSINE.

RAISON


RAISON, s. f. RAISONABLE, adj. RAISONABLEMENT, adv. [Rèzon, zonable, ble--man; 1re è moyen, 3e dout. au 2d, 4e e muet au 2d et au 3e.] Raison s' emploie en divers sens: 1°. En général, faculté de l' âme de poser des principes et de tirer des conséquences. "Les lumières de la raison. "La raison distingue l' Homme de la brute: la raison nous a été donée pour nous conduire. = 2°. En particulier, le bon sens, la droite raison. "Sa conduite est pleine de raison. Il n' a point de raison: il n' y a pas de raison à ce qu' il fait, à ce qu' il dit. "Il faut avoir perdu la raison, pour parler, pour agir de la sorte: il n' y a dans ce discours, dans cet ouvrage ni rime ni raison: il est contre le bon sens, et contre les règles de l' art. = 3°. Droit, devoir, justice, équité. "Se rendre, se mettre à la raison. "Réduire, ranger, amener quelqu' un à la raison. Avoir, ou n' avoir pas raison; entendre ou n' entendre pas raison, et non pas de raison. Voy. RâILLERIE. Rem. à la fin. = 4°. Satisfaction sur quelque chôse qu' on prétend. "Avoir, tirer raison de. _ Demander ou faire raison à, de. "Tirer raison d' une injûre; j' en aurai raison; je vous demande raison de l' insolence de vos gens. "Faites-moi raison de ce procédé, de la part que je dois avoir en cette succession.
   L' Insecte nous apèle, et certain de son prix,
   Ose nous demander raison de nos mépris.
       Louis Racine.
= 5°. Compte. Demander ou rendre raison à quelqu' un de quelque chôse, de sa conduite. = On dit, en ce sens, livre de raison. = 6°. Preûve. "Grande, forte, puissante, ou frivole, faible, fausse raison. Chercher, trouver, aporter, doner, alléguer des raisons, de bones, de mauvaises raisons. = Point tant de raison taisez-vous, obéissez, faites ce que je vous dis, dit un supérieur à son inférieur. = 7°. Motif, caûse, sujet. "Avoir raison, juste, grande raison de faire, de dire, de se plaindre, de croire, de douter, etc. "Il a raison de se mettre en colère.
   On dit, adverbialement, à plus forte raison, par un motif plus fort, plus puissant. "Si l' on est obligé de faire du bien aux étrangers, à plus forte raison à ses parens. = À~ telle fin que de raison, se dit au Palais et aussi dans le style familier. "Il fit faire un procès verbal de l' état des lieux, à telle fin que de raison. "Il faut porter des provisions, à telle fin que de raison. = À~ raison de, sur le pied de, à proportion de: "Vendre une étofe à raison de tant l' aûne. "Louer un hôtel garni à raison de cent francs par mois; payer un ouvrier à raison de l' ouvrage qu' il a fait. = En raison de: "Les loix se multipliaient en raison de ce qu' elles devenaient inutiles. Linguet. "Ses sentimens humbles croissoient en raison du nombre infini et de la singularité de ces faveurs. L' Abé Du Serre-Figon, Panég. de Ste Thérèse. = De raison, adv. du st. famil. Comme de raison, autant que de raison, plus que de raison, c. à. d. comme, autant qu' il est convenable; plus qu' il ne convient. "Je suis alé le remercier, comme de raison. "Lindor s' aimoit beaucoup lui-même, comme de raison. MARMONT. Cela est dit ironiquement. "Nous avons cru qu' en faveur des rochers (terre de Mde. de Sévigné) nous pouvions nous y amuser un peu plus que de raison. Sév. = Avec raison, par raison, sans raison, adv. sans régime. "Il vous a repris avec raison: je ne le fais que par raison: vous m' ataquez sans raison.
   Rem. Il ne faut pas confondre, avoir raison et avoir de la raison: le 2d signifie être raisonable; l' aûtre, n' avoir pas tort. ROUSS. a mis l' un pour l' aûtre. Angélique
   Voudroit se marier, pour sortir de prison....
   Elle a de la raison, la contrainte l' ennuye.
Il est clair qu' il faut en cet endroit, elle a raison, elle n' a pas tort de vouloir se marier, etc. = On dit aussi, faire entendre raison, sans article, persuader; et faire entendre la raison: raisoner avec quelqu' un. "J' ai eu bien de la peine à lui faire entendre raison. "On redresse les esprits à force de causer et de faire entendre la raison. SÉV. À~ force de parler raison, et de faire entendre la voix de la raison. = Faire raison se dit des persones en régime; et tirer raison, ou avoir raison, des chôses. Le 1er régit le datif et l' ablatif; les deux aûtres ne régissent que l' ablat. "Vous me ferez raison de ce procédé; j' aurai, ou je tirerai raison de cette injûre. * La phrâse suivante est vicieûse à tous égards: je tirerai ma raison de vous; car dans cette expression, raison doit être sans article et sans pronom: ainsi ma est de trop, outre le vice du régime de la persone. = Faire raison, avec le seul datif, veut dire, dans le style familier, répondre aux santés qu' on nous porte à table. "Tope à notre Gouverneur, tope à la grande Gouvernante: Monsieur, je vous la porte, Madame, je vous fais raison. Sév. _ La Fontaine dit fort plaisamment:
   Tous trois bûrent d' autant, l' Anier et le Grison
   Firent à l' éponge raison.
* Cette expression n' est pas trop noble, et elle est peu digne du ton et de la gravité de l' Histoire. "Il s' y trouva vingt convives. Alexandre but la santé de chacune des persones de la compagnie; et fit ensuite raison à tous les vingt, l' un aprês l' aûtre. Rollin. = * L' analogie trompe souvent: on dit, avoir raison, comme on dit, avoir tort; mais quoiqu' on dise, doner tort, on ne dit pas doner raison à quelqu' un. Encore moins peut-on dire, doner toute la raison, sous prétexte qu' on dit, doner tout le tort. "Pour se doner toute la raison, et nous doner tout le tort, dit Bossuet. Cela n' est pas à imiter. Quelques-uns, disent doner raison, dans un autre sens, et au lieu de, rendre raison; je vous donerai raison de toute chôse. Celui ci est douteux; rendre raison, est plus sûr. _ On peut demander pour celui-ci, si aprês avoir dit, rendre raison, sans article et indéfiniment, on doit dire, la rendre ou en rendre. Ni l' un, ni l' autre n' est bon; le 1er, parce qu' on ne doit pas faire raporter les pronoms relatifs à des noms pris indéfiniment; le 2d, parce qu' il n' y a aucune raison d' employer cet ablatif, exprimé par en. J. J. Rousseau l' a fait. "Ceci qui pouvoit rendre raison de la netteté des acords, n' en rendoit pas de leur énergie. Il faut alors employer une expression équivalente, ou répéter, rendre raison. * Mallebranche dit: je tâche de rendre la raison physique des lois du mouvement. Il devait dire sans article, de rendre raison des lois, ou, avec l' article, de doner, d' aporter la raison physique des lois, etc. = Avec l' adverbe, à plus forte raison, tantôt on met, tantôt on ne met pas le pronom nominatif aprês le verbe. On le met lorsque le sujet de la phrâse suit cet adverbe. "Si les Payens ont loué la chasteté, à plus forte raison les Chrétiens doivent-ils l' aimer et la pratiquer: mais si le sujet et le verbe précèdent cet adverbe, ce pronom personel n' a pas lieu: les Chrétiens doivent à plus forte raison, etc. et non pas, doivent-ils, etc. _ Quand il est joint à combien, ce dernier adverbe doit suivre la prép. à, au lieu de la précéder. "À~ combien plus forte raison, et non pas, combien à plus forte raison.
   Dans le langage des Bonnes, on apèle des petites raisons, des saillies d' enfant. "Elle est née comme cela: à quatre ans, elle avoit déja des petites raisons à faire mourir de rire. Th. D' Éduc. On doit dire, des petites raisons, comme on dit, des petits maitres, des petites maisons, quoique l' article soit devant un adjectif, et non pas de petites raisons, parce que dans ces locutions, l' adjectif et le substantif inséparables, ne forment qu' une seule expression composée.
   RAISONABLE, est, 1°. qui est doué de raison, qui a la faculté de raisoner. "L' homme est un animal raisonable. = 2°. Qui se gouverne selon la raison et l' équité. "Il n' est pas raisonable là-dessus; ce marchand est fort raisonable: vous n' êtes pas raisonable d' exiger cela de moi. "Les conditions qu' on lui propose sont fort raisonables. = 3°. En parlant des chôses, convenable. "Pension raisonable. "Le blé est à un prix, ou à prix raisonable. = 4°. Au-dessus du médiocre. "Faire une dépense raisonable: Jouir d' un revenu raisonable. = Il faut éviter de l' apliquer aux animaux, à cause de l' équivoque ridicule que cet assortiment peut produire. "Un boeuf, un cochon raisonable.
   RAISONABLEMENT, a tous les sens de raisonable. = Conformément à la raison, à l' équité: parler, répondre, en user raisonablement. = Convenablement: avoir du bien raisonablement. = Quelques-uns disent, avoir raisonablement de bien, comme on dit, avoir infiniment d' esprit; mais celui ci est reçu; l' autre ne l' est pas. = Passablement. "Maison raisonablement grande. "Écrire, peindre raisonablement bien. Il se met toujours devant les adjectifs et les adverbes, et toujours aprês les verbes. = On dit, en plaisantant: il est raisonablement bête; elle est raisonablement laide; fort bête, fort laide.

RAISONÉ


RAISONÉ, ÉE, adj. RAISONEMENT, s. m. RAISONER, v. n. RAISONEUR, EûSE, s. m. et f. [Rèzoné, neman, , neur, neû-ze: 1re è moy. 3e é fer. au 1er et au 3e, e muet au 2d, lon. au dern.] Raisoner, se servir de sa raison, pour conaitre et juger soi-même, et faire conaitre et juger aux autres. "Les bêtes ne raisonent point: c' est le propre de l' homme de raisoner. "Raisoner bien ou mal; juste ou faux; conséquemment ou de travers. "Il ne faut pas raisoner sur les mystères de la Foi: nous avons fort raisoné sur cette afaire. = Aporter, alléguer des raisons pour s' excuser, etc. "Il faut obéir sans raisoner. "Ne raisonez pas tant. = En termes de Marine, montrer ses passeports, et rendre compte de sa route. "Il ne peut encôre entrer dans le port; il n' a pas encore raisoné.
   RAISONÉ, ÉE, adj. Quoique ce verbe n' ait pas proprement de passif, on emploie pourtant le participe passivement. Apuyé de raisons et de preuves. Placet, mémoire, projet raisoné; requête raisonée. = Qui rend raison des règles. Arithmétique, Gramaire raisonée. = Fondé sur quelque raison, au moins aparente. "Délire qui ne laissoit pas d' être raisoné d' aprês les faits, qui avoient placé Pepin sur le Trône. Moreau.
   *RAISONANT, ANTE, qui raisone. Mot employé, et probablement fabriqué par M. Pluche. "S' il y avoit de la raison chez les hirondelles, il y auroit de la subordination. Les mieux raisonantes ou les plus entreprenantes acquerroient sans doute les premiers postes entre elles. Spectacle de la Nat.
   RAISONEMENT, est 1°. la faculté, ou l' action de raisoner. "Avoir le raisonement bon: être d' un raisonement solide. = Cette dernière expression ne se dit que d' un seule manière. On ne dit pas, il ou cet homme est d' un raisonement solide; mais, c' est un homme, etc. = 2°. Argumens, raisons, dont on se sert dans une question, dans une afaire. Raisonement juste, droit, clair, net, ou faux, obscur, captieux. "Homme fort, puissant en raisonement. = Il se dit au pluriel. "Tous ces raisonemens sont superflus~: à quoi tendent ces vains raisonemens? _ Faire des raisonemens à perte de vûe. (st. fam.) des raisonemens vagues, et qui ne concluent rien. = Point de raisonement, ou point tant de raisonement; obéissez sans raisoner, sans repliquer. Façon de parler, dont un supérieur se sert à l' égard d' un inférieur.
   Rem. On ne doit pas confondre raisoner et raisonement avec résonement, résoner. Les deux premiers se disent de l' usage qu' on fait de sa raison: il raisone bien: un bon raisonement; les deux autres signifient retentir, retentissement: "Cette voûte résone bien; le résonement de la voûte fatigue le Prédicateur et les Auditeurs. Ces mots se prononcent à peu prês de même; mais l' ortographe doit être diférente. L. T. Vailly. = Résoner comme un cofre, expression proverb. est un quolibet, un jeu de mots, sur les deux verbes raisoner et résoner. Mais ce quolibet, ce jeu de mots est reçu par l' usage.
   RAISONEUR, EûSE, Qui raisone. Avec une épithête, il se prend en bone ou en mauvaise part: mais il ne s' emploie qu' au masculin. Un bon, un excellent, ou un détestable raisoneur. _ Sans épithète, il ne se prend qu' en mauvaise part, et s' emploie dans les deux genres. Qui importune par de longs ou par de mauvais raisonemens. "Un raisoneur, un grand, un ennuyeux raisoneur. = Qui raisone au lieu d' obéir. "Ce valet est bien raisoneur, il fait le raisoneur. "Cette fille ou femme est une grande raisoneûse: elle fait bien la raisoneûse. = Il s' emploie quelquefois adjectivement. "Quelles contradictions dans les principes de ces Philosophes, plutôt raisoneurs que raisonables, qui méconnoissent l' existence et la providence de Dieu. Le P. Guérin du Rocher. "On est épouvanté de voir jusqu' à quel point notre siècle raisoneur a poussé, dans ses maximes, le mépris des devoirs de l' homme et du citoyen. J. J. Rousseau.

RAJUSTER


RAJUSTER, v. act. [3e é fer.] Racomoder, ajuster de nouveau. "Rajuster un ressort, une montre, une serrûre, un habit. "Rajuster votre collet. = Fig. famil. "La prudence rajuste bien des chôses. = On les a rajustés, réconciliés. * Trév. met rajustement, action de rajuster. L' Académie ne le met point. Ce mot est peu usité; mais il serait utile.

RâLE


RâLE, s. m. RâLEMENT, s. m. RâLER, v. n. [1re lon. 2e e muet aux 2 prem. é fer. au 3e.] Râle est 1°. une sorte d' oiseau bon à manger, qui est un peu plus grôs qu' une câille, et qui court fort vîte. Il a le plumage rougeâtre.
   2°. Râle et Râlement, l' action de râler, de rendre en respirant un son enroué, causé par la dificulté de la respiration. Ils se disent proprement des agonisans. "Le râle, ou le râlement de la mort. "Sa poitrine s' emplit, il comence à râler: on l' entend râler de l' antichambre. _ Il y a des persones qui râlent en dormant. = Suivant M. l' Abé Roubaud, le mot râle exprime le bruit qu' on fait en râlant: et celui de râlement, la crise qui fait qu' on râle. Un agonisant a le râle, et il est dans le râlement: vous entendez le râle; et vous voyez la poitrine opressée, la gorge embarrassée, {C351a~} l' expiration troublée par le râlement. Extr. des Synon. Fr.

RALENTIR


RALENTIR, v. a. RALENTISSEMENT, s. m. [Ralanti, ticeman: 2e lon. 4e e muet. _ Quelques-uns écrivent ralantir; mais ce mot venant de lent, doit être écrit avec un e.] Ils expriment l' action de rendre ou de devenir plus lent. On les emploie au propre et au figuré. "Ralentir sa course, le mouvement d' un ressort. "Cet accident a ralenti son zèle. "L' âge ralentira cette vivacité. "Ce mouvement s' est ralenti. "La ferveur, comme la passion, se ralentit avec le tems. "Le ralentissement du pendule, des travaux, du zèle, etc.
   Rem. Ce verbe ne régit pas les persones mêmes, mais seulement les chôses qui ont raport à la persone. "La réponse que lui fit Soubize (à~ Poltrot) n' étoit guère propre à le ralentir. BOSS. Je voudrais dire, propre à ralentir son ardeur, son zèle homicide, ou quelqu' autre mot semblable.

RâLER


RâLER. Voy. RâLE.

RALINGUES


RALINGUES, s. f. pl. [Ralein-ghe; 2e lon. dern e muet.] Terme de Marine. Cordes que l' on coud autour des voiles, pour en renforcer les bords.

RALLIEMENT


RALLIEMENT, ou RALIEMENT, s. m. RALLIER, ou RALIER, v. act. [Raliman: l' e est muet, rali-é: 3e é ferm.] Ralier, c' est remettre ensemble, rassembler des troupes, qui se sont dispersées. "Le Général les ralia: ils se ralièrent. Raliement, action des troupes qui se ralient. "Le raliement des troupes se fit derrière une grande haie. = Mot de raliement, que le Général done aux troupes pour se ralier, en cas de déroute, ou de séparation.

RALLONGER


RALLONGER, ou RALONGER, v. act. Rendre plus long. On ne le dit guère que des étofes. Ralonger un rideau, un habit, une jupe. Il n' a guère que le sens du simple, alonger; mais il n' a pas autant d' étendue dans l' emploi, que l' on en fait. L' Acad. dit, ralonger des étrivières, qui sont trop courtes: c' est, avec les exemples que nous avons doné, à peu prês tout l' usage de ce mot.

RALLUMER


RALLUMER, ou RALUMER, v. act. Alumer de nouveau. Il se dit au propre et au fig. "Ralumer des bougies, la guerre, la sédition, la colère, la passion, la fièvre, etc. "Le feu, qu' on croyoit éteint vint tout d' un coup à se ralumer. La guerre se raluma {C351b~} dans toute l' Europe. "Il sentit sa passion se ralumer.

RAMAGE


RAMAGE, s. m. RAMAGER, v. n. [3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Le substantif se dit et d' une représentation sur une étofe des rameaux, branchages, feuillages, etc. Velours à ramage; damas à grands, à petits ramages; et du chant des petits oiseaux. "Le ramage du pinson, du rossignol. "Doux, joli, agréable ramage. _ Le verbe n' a que ce dernier sens. "On entendait déja les oiseaux ramager.. "Ils ramageaient sur mille tons divers.

RAMAIGRIR


RAMAIGRIR, v. act. [Ramégri; 2e é fer.] Rendre maigre de nouveau. "Ce cheval s' étoit refait, mais un si long voyage l' a ramaigri. = V. n. Redevenir maigre. "Il avoit repris son embonpoint, mais il comence à ramaigrir.

RAMâS


RAMâS, s. m. RAMâSSE, s. f. RAMASSER, v. act. RAMâSSEUR, s. m. RAMâSSIS, s. m. [Ramâ, mâce, ceur, ci. 2e lon. 3e e muet au 2d, é fer. au 3e.] Ramâs est un assemblage de diverses choses de peu de considération. Pour les choses considérables, on dit amâs. "Faire un ramâs de toute sorte de livres, de tableaux bons ou mauvais. "On avoit fait un grand amâs d' armes, de munitions, etc.
   RAMâSSE, espèce de traineau, dans lequel les voyageurs descendent des montagnes où il y a de la neige.
   RAMâSSER, c' est, 1°. Faire un ramâs. "Il s' est apliqué à ramâsser tout ce que les Anciens ont dit de plus curieux sur cette matière. = 2°. Rejoindre, rassembler ce qui était épars. "On a ramâssé tout ce qu' on a pu trouver de soldats. _ Ramâsser ses cartes. Figurément, ramâsser ses forces. = 3°. Prendre ce qui est à terre. "Ramâsser ses gants, son chapeau, ses papiers, un livre. "Ramâsser les épis qui sont restés à terre. = * Ménage remarque qu' une Dame de la ville dit à son laquais: ramâssez ma coîfe; au lieu qu' une Dame de la Cour dira: amâssez ma coîfe. RICH. condamne avec raison cette remarque: il prétend que l' usage de la Cour y est contraire: il a pour lui l' Acad. = 4°. Maltraiter. Il est populaire. "S' il se trouve sous sa main, il le ramâssera d' une étrange sorte. = 5°. Traîner dans une ramâsse. "On le ramâssa, il se fit ramâsser.
   Ramâssé, ée, particip. et adj. "Gens ramâssés de tous côtés. Vaug. Q. C. "Vieilles équivoques ramâssées parmi les boues des halles. Mol. = Trapu et robuste. "Corps ramâssé, taille ramâssée. "Ils ont le corps plus fort et plus ramâssé que le reste des Allemands. D' Ablanc.
   RAMâSSEUR ne se dit proprement que de celui, qui conduit une ramâsse. L' Acad. ne le met pas même en ce sens. Dans le style plaisant ou critique, on peut le dire de celui, qui fait des ramâs. Le P. Daniel dit d' Escobar que: c' est un grand ramasseur peu exact et qui cite à faux de tems en tems, faûte d' y avoir pris garde.
   RAMâSSIS, Assemblage de chôses ramâssées sans choix. "Un ramâssis de papiers inutiles, d' anecdotes peu intéressantes, de vers et de prôse insipides, etc.

RAMAZAN


RAMAZAN, ou RAMADAN, s. m. [Le 2d est le plus usité.] Jeûne, qui est une espèce de carême pour les Turcs.

RAME


RAME, s. f. RAMEAU, s. m. RAMÉE, s. f. [2e e muet au 1er, é fermé au 3e, dout. au sing. du 2d Ramo, lon. au plur. rameaux.] Rame a trois significations, qui n' ont aucune analogie l' une avec l' aûtre. 1°. Petit branchage qu' on plante en terre pour soutenir les pois. Delà le verbe ramer. = 2°. Aviron, dont on se sert pour faire voguer un bateau, une chaloupe, une galère, etc. "Vaisseau qui va à voiles et à rames. = 3°. Vingt mains de papier mises ensemble. "On a employé à cette impression pres de trois mille rames de papier. La rame comprend cinq cents feuilles.
   RAMEAU, au propre, petite branche d' arbre. Il se dit figurément de bien des chôses; des veines, des artéres et des nerfs: "Ils ont plusieurs rameaux; ils se partagent en plusieurs rameaux; des mines qui ont diférentes branches; et en généalogie des diférentes parties d' une même branche d' une famille.
   RAMÉE, 2°. Assemblage de branches entrelacées naturellement, ou par artifice. "Danser sous la ramée. = 2°. Branches coupées avec leurs feuilles vertes. "Voitûre de ramée. "Tapisser une porte avec de la ramée.

RAMENDER


RAMENDER, v. n. [Ramandé: 2e lon. 3e é fer.] Baisser, diminuer de prix. "Le blé, le vin est bien ramendé. On ne peut le dire aujourd' hui. = V. act. "On a ramendé le pain. Suivant l' Acad. il est populaire, employé activement.

RAMENER


RAMENER, v. act. [2e e muet, 3e é fer. Devant la syll. féminine, la 2de se change en è moy. Il ramène, ramènera. = * On écrivait autrefois, je meine, tu meines, il ameine, rameine; il se démeine, il se promeine: quand on retrancha l' i, les uns ne mirent point d' accent sur l' e, mene, ramene, etc. D' autres y mirent l' accent aigu; méne, raméne: enfin vers le milieu de ce siècle on a comencé d' y mettre l' accent grâve, signe de l' è moyen] 1° Amener une seconde fois. "Cet homme que vous m' amenâtes un tel jour, je vous prie de me le ramener. _ Il avait amené sept; il ramena trois fois le même point. = 2°. Remettre une persone dans le lieu d' où elle était partie. "Il m' a mené et ramené. Voy. MENER. "Ramener un cheval à l' écurie, les troupeaux à la maison, etc. = 3°. Faire revenir avec soi. "Ramenez mon carrosse. "Il ramena les troupes au combat. = 4°. Il se dit pour amener, lorsqu' on parle des choses qu' on amène chez soi à son retour d' un voyage. "J' ai vendu mon cheval à la foire, et j' en ai ramené un aûtre. = 5°. Fig. Faire revenir. Il a pour 2d régime la prép. à: "Ramener les errans à la foi. "Ramener quelqu' un à la raison, à son devoir. "Le printems nous a ramené les beaux jours. * Fléchier substitûe mal-à-propôs à la prép. à la prép. dans. "D' où venoit ce soin qu' il prit de ramener les anciens ordres dans la première pureté de leur institut. Je crois qu' on doit dire à la pureté; etc.

RAMENTEVOIR


*RAMENTEVOIR, v. act. et n. faire souvenir; ou se souvenir soi-même. Molière l' a encore employé. "Ne ramentez-vous rien? Il n' est pas étonant que Malherbe s' en soit servi.
   La terreur des choses passées,
   À~ leurs yeux se ramentevant
   Faisoit prévoir à leurs pensées
   Plus de malheurs qu' auparavant.
Il y a long-tems qu' on ne le dit plus.

RAMEQUINS


RAMEQUINS, s. m pl. [Rame-Kein: 2e e muet] Espèce de pâtisserie faite avec du fromage.

RAMER


RAMER, v. act. et n. [Ramé: 2e é fer.] Actif, il signifie, soutenir des pois ou autres plantes avec de petites rames qu' on plante en terre. "Ramer des pois, des câpres, des capucines, etc. = On dit proverbialement, s' entendre à une chôse, comme à ramer des choux, n' y rien entendre. = V. n. Au propre tirer à la rame. "Il nous falut ramer toute la nuit. _ Au figuré, (st famil.) prendre bien de la peine. "Il a bien ramé pour faire sa fortune: "Il aura bien à ramer pour parvenir.

RAMEREAU


RAMEREAU, s. m. [Ramero: 2e e muet. Plur. ramereaux] Jeune ramier.

RAMEUR


RAMEUR, s. m. Celui, qui tire à la rame. "Nous avions douze bons rameurs, et nous allions fort vite.

RAMEUX


RAMEUX, EûSE, adj. [Ra-meû, meû-ze: 2e lon.] Qui jette beaucoup de branches. La Touche trouvait cette locution un peu latine, et l' Acad. ne l' avait pas dabord mise dans son Dictionaire. Fléchier a dit de l' Elan: ses cornes sont rameûses; et Fénélon: "Comme un vieux cerf dans une forêt porte son bois rameux au dessus des têtes des jeunes faons. Télém. Richelet condamne ce mot dans le premier. Dans la dern. édition, l' Académie ne le dit que des plantes, comme un terme de Botanique: "Le romarin est une plante fort rameûse = Les Poètes revendiqueront le droit de le dire du cerf et d' autres animaux, qui ont le bois ou les cornes divisés en plusieurs rameaux.

RAMIFICATION


RAMIFICATION, s. f. SE RAMIFIER, v. r. [Ramifika-cion, mifi-é.] Ils expriment l' action de se diviser en plusieurs rameaux. Ils se disent tous deux au propre des veines et des artères. Le verbe se dit aussi des arbres. Fontenelle l' a employé au figuré. Il dit de Leibnitz. "Ses idées sont... vastes. Elles partent dabord d' une grande universalité, qui en est comme le tronc, et ensuite se divisent, se subdivisent et, pour ainsi dire, se ramifient prèsque à l' infini. D' autres Ecrivains s' en sont servi sans correctif.

RAMINGUE


RAMINGUE, adj. [ra-mein-ghe] Qui résiste à l' éperon, qui se roidit, quand il est ateint, et qui refuse alors de se porter en avant: cheval, jument ramingue.

RAMOITIR


RAMOITIR, v. act. RAMOLLIR ou RAMOLIR, v. act. [ramoa-ti, moli.] Rendre moite. Rendre mou. "Le brouillard à ramoiti le linge, qui était dèjà séché. "Le soleil ramolit la cire: les pluies ramolissent la têrre.
   Rem. Quelques Auteurs ont dit au figuré, ramolir le courage, être ramoli par les plaisirs: on dit plutôt amolir. = Trév. met ramolissant, adj. l' Acad. ne le met pas.

RAMONER


RAMONER, v. act. RAMONEUR, s. m. [Ramoné, neur 3e é fer. au 1er: l' o est long devant l' e muet: il ramône, il ramônera etc.] Ramoner, c' est nétoyer le tuyau d' une cheminée, en ôter la suie. Ramoneur, celui, dont le métier est de ramoner les cheminées.

RAMPANT


RAMPANT, voy. RAMPER.

RAMPE


RAMPE, s. f. [Ranpe: 1re lon. 2e e muet.] Rampe est 1°. la partie d' un escalier, par où l' on monte d' un palier à l' aûtre. "Cette rampe a plus de degrés que l' autre. = 2°. La balustrade à hauteur d' apui, que l' on met le long de l' escalier. "Rampe de bois, de fer, de pierre, de marbre. "Tenez-vous à la rampe. = 3°. Plan incliné, qui tient lieu d' escalier dans les jardins, forts, etc. par lequel on monte et l' on descend sans degrés. "On descend dans le parterre par une rampe douce.

RAMPER


RAMPER, v. n. RAMPANT, ANTE, adj. RAMPEMENT, s. m. [Ranpé, pan, pante, peman: 1re lon. 2e é fer. au 1er, e muet au dern. lon. aux deux aûtres.] Ramper, au propre, se traîner sur le ventre, comme font les serpens, etc. = Par extension et similitude, on le dit des plantes, qui s' étendent sur terre, ou s' atachent aux arbres, comme le lierre, la coulevrée, etc. = Au figuré, être dans un état abject et humiliant: "Élevé autrefois, il rampe aujourd' hui.
   Je rampais inconnu dans la foule importune.
= Plus ordinairement encôre, s' abaisser excessivement devant les Grands. "Après avoir rampé devant ceux, qui sont au dessus de soi, l' on voudrait faire ramper devant soi ceux, au dessus de qui l' on croit être. Il faut s' humilier devant l' esclâve, pour parvenir à ramper devant le maître. = En parlant de discours et de style, ne dire, n' écrire rien que de bâs. "C' est un Auteur, qui rampe toujours: son style rampe. "Que votre discours, toujours clair et toujours coulant ne rampe jamais, Bouh.
   RAMPEMENT ne se dit qu' au propre. "Figûre du serpent, dont le rampement tortueux étoit une vive image des détours fallacieux de l' esprit malin. Boss.
   RAMPANT se dit au propre et au figuré. "Animal, insecte rampant. "Le lierre rampant, plante rampante. _ Style rampant, bâs et plat. Âme rampante, bâsse, vile et méprisable. = Cet adjectif suit ordinairement le substantif, surtout en prôse. En vers, le féminin peut précéder.
   Comment nommer la rampante vermine
   Des chifoniers de la double colline? Rouss.

RAMûRE
RAMûRE, s. f. [2e lon. 3e e muet.] 1°. Le bois d' un cerf, d' un daim. "La ramûre du cerf est ronde; celle du daim est plate. = 2°. Toutes les branches d' un arbre collectivement prises, une belle ramûre.

RANCE


RANCE, adj. RANCIR, v. n. RANCIDITÉ ou RANCISSûRE; s. f. Ils se disent de ce qui comence à se gâter et qui contracte une odeur et un goût désagréable. On le dit surtout des viandes salées et principalement du lard. "Ce lard est rance: il sent le rance: il comence à rancir, il est à moitié ranci. = Rancidité et rancissûre ont le même sens; qualité de ce qui est rance. Ils sont peu usités. = Suivant M. l' Ab. Roubaud, la rancidité est la qualité du corps rance; la rancissûre est l' éfet éprouvé par le corps ranci. Il faudrait combatre la rancidité, comme on combat la putridité, cause du mal: il faut ôter la rancissûre, comme on ôte la pourritûre, produit du mal. Nouv. Syn. Fr.
   Rem. l' Acad. disait rancir et ranci des confitûres. Richelet ne l' aprouvait pas et préférait Moisi. Dans la dern. édit. elle ne le dit que du lard et n' aplique aux confitûres que l' adjectif rance.

RANCOEUR


*RANCOEUR, voy. RANCUEUR.

RANÇON


RANÇON, s. f. RANÇONEMENT, s. m. RANÇONER, v. act. RANÇONEUR, EUSE, subst. m. et f. [Ranson, sone-man; soné, neur, neûze: 3e e muet au 2d, é fermé. au 3e, lon. au dern. = Pourquoi n' écrit-on pas ranson, etc. La cédille est un caractêre étranger à notre langue, que l' on ne devrait employer que par nécessité] Rançon est le prix que l' on done pour la délivrance d' un captif ou d' un prisonier de guerre. "Mettre, prendre à rançon. Payer rançon ou sa rançon, ou la rançon de. = Rançoner, mettre à rançon. Au propre, on ne le dit que d' un~ vaisseau de guerre ou d' un corsaire, qui relâche un batiment qu' il a pris, moyénant une certaine somme. = Au figuré [stil. famil.] Exiger plus qu' il ne faut, en se prévalant du besoin. "C' est une hôtellerie, où l' on rançone les pâssans. Scar. "Rançoner le Bourgeois. D' Abl. "Notaire, Procureur, qui rançone ceux, qui ont besoin de lui, qui~ s' adressent à lui. = Rançonement et rançoneur ne se disent que dans ce dernier sens et dans le stile critique et chagrin.

RANCUEUR


*RANCUEUR, ou RANCOEUR, s. fém. [On prononcait rankeur.] Vieux mot. Aigreur, ressentiment.
   Arrière, vaines chimères
   De haines et de rancueurs.       Malherbe.

RANCUNE


RANCUNE, s. f. RANCUNIER, IèRE, adj. [Rankune, nié, nière: 1re lon. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d, è moyen et lon. au 3e.] Rancune, haine invétérée. Rancunier, qui a de la rancune, qui garde la rancune. "Il a une rancune contre lui. "Il ne faut point garder de rancune dans le coeur. _ "Homme, esprit rancunier. Avoir l' âme rancunière. = Subst. "C' est un rancunier; une rancunière. = On dit, adverbialement, sans rancune, point de rancune, oublions le pâssé. _ Rancune à part, malgré les anciens sujets de plainte. _ Rancune tenant, sans préjudice de la rancune toujours subsistante. = Ces expressions ne sont que du st. famil. et les deux dernières du style plaisant, badin et critique.
   Remarq. Suivant l' Auteur des Réflexions (Andry) rancune n' est plus en usage que parmi le petit peuple; mais il se trompe, dit La Touche, et tous les bons Auteurs s' en servent. L' Acad. l' aproûve, et jusque dans la dernière édit. elle l' a mis sans remarque. "Il dit qu' il n' aportoit à l' Empire ni haine, ni rancune. D' Abl. Tacite; c. à. d. ni haine présente, ni~ souvenir des injûres pâssées; car c' est proprement ce que signifie rancune. Ainsi, haine et rancune ne sont pas synonimes, et leur association dans la même phrâse n' est point un pléonasme, une répétition d' idées, une exubérance de style.

RANDON


*RANDON, s. m. Vieux mot. On disait adverbialement, à grand randon, abondamment, en foule.

RANG


RANG, s. m. RANGÉE, s. f. RANGER, v. act. [Ran devant une consone; et devant une voyèle, rank: rang honorable, pron. ran-konorable. _ Rangé-e, gé: 1re lon. 2e é fer.] Rang est, en général, ordre, disposition de plusieurs chôses ou de plusieurs persones sur la même ligne. "Un rang d' hommes, d' arbres, de colonnes, de sièges, etc. "Plusieurs rangs de Soldats. Combatre aux premiers rangs. "Doubler, serrer, ouvrir, garder, tenir, quiter, rompre les rangs. = Se mettre, ou être sur les rangs se dit au propre des tournois, et au figuré, des postes, des charges: se mettre ou être parmi les prétendans = 2°. En particulier, l' ordre de la séance ou de la marche, ou dans la même compagnie, ou entre divers Corps. "Marcher, se placer en son rang, suivant son rang. "Rang d' ancièneté. Régler les rangs. = 3°. Dignité, degré d' honeur. " Rang élévé, éminent. "Garder, tenir, maintenir, soutenir son rang. = 4°. Place qu' une chôse ou une persone tient dans l' estimation des hommes. Tenir le premier rang entre les Poètes, les Orateurs, etc. Doner le premier rang au Diamant entre les pierres précieûses. = 5°. Mettre au rang, au nombre. "César doit être mis au rang des plus grands Capitaines. "Cet Auteur est mis au rang des hérétiques, etc.
   Rem. On dit à un Roi, la Majesté, la splendeur de votre rang (n° 3°.) Racine s' est servi, dans le même sens du mot de clarté.
   Dans un rang qui l' expose aux yeux de tout le monde,
   Dont je n' aî pu de loin soutenir la clarté.
       Britanicus.
Clarté du rang n' est pas un terme propre, dit Racine le Fils; mais il répond à cette nuit profonde, dont parle Junie; et il est amené si naturellement, qu' il paroît nécessaire. Il l' était du moins pour la rime, et c' est elle qui en a déterminé la préférence. = Dans les Frères Énemis, le même Poète dit, quelque rang, pour, quelque place: son fils pâsse condamnation sur cette expression.
   À~ peine en sa mémoire ai-je encor quelque rang.
= * Se placer de rang, pour, se ranger est aparemment un hellénisme. Mde Dacier l' a employé. "Ils se placent de rang sur la même ligne. Iliade.
   RANGÉE, suite de plusieurs chôses, mises sur une même ligne. "Rangée d' arbres, de maisons, de sièges, etc.
   RANGER, c' est 1°. Mettre dans un certain ordre, dans un certain rang. "Ranger des livres, des papiers, des troupes, etc. = Ranger une chambre, un cabinet, une bibliothèque; mettre chaque chôse à sa place. = 2°. Mettre au nombre, au rang de. "On range cet Auteur, ce livre, parmi les Auteurs, les livres classiques. Mettre au rang de est, en ce sens, une expression plus noble. = 3°. Mettre de côté pour rendre le passage plus libre: "Rangez cette table, cette chaise, cet enfant. Se ranger, rangez-vous! Les Gardes firent ranger le Peuple. = 4°. Il s' unit à plusieurs prépositions: ranger autour de. "Se ranger autour du feu, d' une table. = Ranger sous: soumettre: ranger des nations entières sous sa domination, sous sa puissance, sous ses lois, sous son empire. _ Se ranger sous les étendards, sous les enseignes ou les drapeaux d' un Prince. "Se ranger sous son obéissance. = Se ranger du parti de. "Cicéron s' étant rangé de son parti (de Pompée), entreprit la défense de Ligarius, son ami, acusé d' avoir porté les armes contre César. Père Rapin. = Se ranger à. "Il s' est rangé à l' avis, à l' opinion de... Racine a heureusement employé se ranger à, pour, se déterminer.
   Fais-lui valoir l' hymen je me suis rangée.
Cette expression, qui dâilleurs pourrait déplaire, a ici de la beauté, parce qu' elle fait sentir qu' Andromaque n' y a consenti que malgré elle. L. Racine. _ Gresset fait dire aussi à Sidney.
   Depuis qu' à ce parti mon esprit s' est rangé,
   Du poids de mes ennuis je me sens soulagé.
= Se ranger auprès de quelqu' un, l' aler trouver pour recevoir ses ordres. = * Quelques Provinciaux se servent beaucoup de, se ranger, pour dire, se rendre au logis, se retirer. "Monsieur n' est pas encôre rangé: Madame se rangea tard hier au soir: il faut dire, ne s' est pas encôre rendu; se rendit, ou se retira tard. _ Il en est d' aûtres qui disent ranger, pour, tenir, neutre. "Ces livres ne sauraient ranger là. Cette expression ne vaut rien. = * On dit, être rangé, pour dire, vivre d' une manière régulière; mais suivant l' Auteur de l' Ann. Litt. dont je goûte fort la remarque, on ne dit point, dans ce sens, le réciproque se ranger:
   Vous craignez des écarts: oh! ce n' est point cela.
   Bon ! je me suis rangé: mais la réforme entière.
= On dit, activement, ranger quelqu' un le ranger à la raison, à son devoir; le réduire; l' obliger à faire ce qu' il doit.
   RANGÉ, ÉE adj. Homme rangé, bien rangé, qui a beaucoup d' ordre dans ses afaires. Bataille rangée entre, deux armées rangées en ordre.

RANIMER


RANIMER, v. act. 1°. Rendre, redoner la vie. "Dieu seul peut ranimer les morts. = 2°. Redoner de la vigueur. "Ce remède l' a ranimé. "Le printems ranime toute la natûre: cette pluye a ranimé les plantes. "La joie ranima son teint, ou mieux, lui ranima le teint. = 3°. Réveiller les esprits assoupis. "Il est tout languissant; le jeu, la musique le ranimera. = 4°. Redoner du courage. "Cet heureux succês ranima les troupes découragées. = 5°. Ranimer le courage, l' ardeur, la colère, la fureur, l' amour; les réveiller, les renouveller.

RAPACE


RAPACE, adj. RAPACITÉ, s. fém. Ils se disent au propre des animaux avides et ardens à la proie; et figurément des hommes. "Le vautour est fort rapace; un homme rapace. "La rapacité d' un oiseau de proie. "La rapacité des Soldats. = Ces mots ont eu de la peine à s' établir. On a trouvé long-tems qu' ils sentaient le terroir du pays latin. Aujourd' hui, on peut les employer sans scrupule. "Nulle statûe, pour peu qu' elle fût précieuse, n' échapoit à ses mains rapaces (de Verrès) Rollin. "Femme prodigue, rapace, dissolûe, violente et vindicative. Hist. des Stuarts. "L' industrie rapace de la finance est souvent déconcertée par l' industrie paisible du commerce. Linguet. "Nous avons été jusqu' à présent à l' abri de la rapacité des Nations de l' Europe. Volt. "On attribue à l' habileté des Ministres, ce qui n' est dû qu' à la rapacité des agens subalternes. Ling.

RAPATRIAGE


RAPATRIAGE, ou RAPATRIEMENT, s. m. RAPATRIER, v. act. Réconciliation. Réconcilier. Ceux-ci sont de tous les styles: les aûtres ne sont que du style familier. "Depuis leur rapatriement, ils vivent fort bien ensemble. "C' est lui qui a fait ce rapatriage. "On les a rapatriés: ils se sont rapatriés. = L' Acad. met les deux substantifs indiféremment~: il parait pourtant que rapatriement est plus usité dans le~ style~ simple, et rapatriage dans le style badin ou comique. = * Quelques-uns disent, se repatrier: celui-ci est un barbarisme. S' il était reçu, il signifierait, retourner dans sa patrie, aprês une longue absence. Il n' est point dans les Dictionaires: il semble qu' il serait utile pour éviter une périphrâse.

RâPE


RâPE, s. fém. RâPER, v. act. [1re lon. 2e e muet au 1er, é fermé au 2d.] Râpe est 1°. une feuille de fer blanc ou un ustensile de ménage, percé de plusieurs trous, avec quoi on met en poûdre du tabac, du sucre, de la muscade, etc. "Râpe de fer blanc, d' argent, etc. = 2°. Espèce de lime, dont se servent les Sculpteurs pour mettre leurs ouvrages en état d' être finis. "La râpe sert à plusieurs autres ouvriers, comme à Menuisiers, Plombiers, etc. = 3°. Grape de raisin, de laquelle tous les grains sont ôtés. V. RAFLE. = 4°. Grapes de raisins avec leurs grains, qu' on met dans un toneau pour en racomoder le vin quand il est gâté.
   RâPER ne se dit que dans le premier sens: mettre en poûdre avec la râpe. "Râper du sucre, de la muscade, de la croûte de pain, du tabac, etc.

RAPEL


RAPEL, RAPELER, voy. RAPPEL, etc. avec deux p.

RAPETASSER


RAPETASSER, v. act. [Rapetacé: 2e e muet, dern. é fermé.] Racomoder grossièrement de vieilles hardes: y mettre des pièces. "Rapetasser un vieil habit, de vieux meubles. = Il ne peut être bon au figuré, que dans le style comique ou satirique.
   Ces chifoniers de la double colline...
   Vont ramassant l' ordure la plus sale,
   Pour en lever boutique de scandale
   Contre tous ceux qui sont assez sensés
   Pour mépriser leurs vers rapetassés.
       Rousseau.

RAPETISSER


RAPETISSER, v. act. [Rapeticé: 2e e muet, dern. é fermé.] Rendre plus petit. "Rapetisser un manteau. = V. n. Devenir plus petit. "Les jours rapetissent. = V. réc. "Cette etofe se rapetisse dans l' eau. = L' emploi de ce verbe n' est pas fort étendu.

RAPIDE


RAPIDE, adj. RAPIDEMENT, adv. RAPIDITÉ, s. fém. [3e e muet aux deux premiers, dern. é fermé au 3e: en dans le 2d a le son d' an.] Ils se disent, et d' un mouvement extrêmement vite, et de tout ce qui se meut avec cette vitesse. "Le cours rapide d' un fleûve; le vol rapide des aigles. "Moûvement rapide et accéléré. "Torrent rapide. "le Rhône est extrêmement rapide. = Fig. Conquêtes rapides; style rapide; déclamation rapide. = Il est oposé à lent. = La rapidité du moûvement, du vol d' un oiseau, d' un torrent, d' un fleuve. "Le tems fuit avec rapidité. "Ce Prédicateur déclame avec une rapidité fatigante pour les Auditeurs. = Fig. La rapidité des conquêtes, du style. = "Rivière qui coule rapidement. "Nos jours s' écoulent rapidement. = "Prononcer, déclamer rapidement. = Ils sont les oposés de lenteur, lentement.

RAPIÉCER


RAPIÉCER, ou RAPIèCETER, v. act. RAPIèCETAGE, s. m. [2e é fer. au 1er è moy. aux deux aûtres, 3e é fer. au 1er, e muet aux deux aûtres.] Les deux verbes sont synonymes: mettre des pièces; mais le 1er se dit plutôt du linge et des habits, et le 2d des meubles. Richelet dit que l' on devrait dire rapiécer, mais que l' usage est pour rapiéceter. Danet, au contraire, préfère rapiécer; et il parait aussi que~ l' usage actuel lui donne la préférence. L' Acad. met entre les deux la distinction que nous avons raportée. Ne pourrait-on pas dire aussi que rapiécer est plus du style simple et sérieux, et rapièceter du style plaisant, ou moqueur et méprisant. = Rapiècetage est, ou l' action de rapièceter et le travail qu' on y fait: "Ce rapiècetage coûte plus qu' il ne vaut; ou l' éfet de cette action, de ce travail: "Ces meubles ne sont que du rapiècetage. = Suivant M. l' Ab. Roubaud, on dit rapiécer, pour dire, mettre des pièces: ou remettre une pièce, sans modification: rapièceter, c' est remettre sans cesse de nouvelles pièces, ou mettre beaucoup de petites pièces: rapetasser, c' est mettre grossièrement de grosses pièces et les entasser. Nouv. Synon. Fr.

RAPIERE


RAPIERE, s. fém.[Ra-piè-re: 2e è moy. et long, 3e e muet.] Vieille et longue épée. "Il traînait après lui une longue rapière. = Il signifie quelquefois simplement épée, mais alors il ne se dit que par mépris. "C' est un traîneur de rapière. "Il a quité le Palais et a pris la rapière.

RAPINE


RAPINE, s. f. RAPINER, v. n. et act. [3e e muet au premier, é fermé au second.] Rapine se dit proprement, en parlant des animaux, et de l' action de ravir par la violence: animal né pour la rapine; et de ce qui est ravi de la sorte, oiseau qui vit de rapine. = En parlant des hommes, pillage, volerie, concussion. "Il s' est enrichi par ses rapines. "Il ne vit que de rapine.
   RAPINER se dit dans ce dernier sens, et seulement des hommes qui pillent et volent dans les emplois dont ils sont chargés. "Ce valet rapine sur tout ce qu' il achète. "Il rapine toujours quelque chose. "Ce... est un concussionaire: il a rapiné sur toute la Province. = Rapine est de tous les styles: rapiner n' est que du style familier.

RAPPEL


RAPPEL, ou RAPEL, s. m. RAPPELER, ou RAPELER, v. act. [2e è moyen au 1er, e muet au 2d, dont la 3e é fer. Devant l' e muet, la seconde se change en è moyen: il rapelle ou rapèle; rapellera ou rapèlera, etc.] Rapel est, 1°. en général, l' action par laquelle on rapèle. (n°. 3°. et 5°.) On le dit sur-tout de ceux qui ont été disgraciés ou exilés. "Il a obtenu son rapel à la Cour. = 2°. Terme militaire. Manière de batre le tambour pour faire revenir les soldats au drapeau: "Batre le rapel. = 3°. En termes de Droit; disposition d' un testateur, par laquelle il apelle à sa succession ceux qui en étaient nécessairement exclus; par exemple, de petits neveux et petites nièces, enfans d' un neveu prédécédé, qui en auraient été exclus par des neveux et nièces.
   RAPELER est, 1°. apeler de nouveau. "Je l' ai apelé et rapelé, sans qu' il ait répondu. Il me semble qu' en ce sens réapeler vaudrait mieux. Il n' est pas dans les Dictionaires. = 2°. Plus ordinairement, dit l' Acad. Faire revenir la persone qui s' en va, encôre qu' on ne l' ait point déja apelée. "Je m' en alais et il m' a rapelé; il m' a fait rapeler. = 3°. Faire revenir quelqu' un d' un lieu où on l' avait envoyé pour y exercer de certaines fonctions. "Rapeler un Ambassadeur, le rapeler de son Ambassade. = 4°. Révoquer. "Sa mauvaise conduite est caûse qu' on l' a rapelé. = 5°. Faire revenir ceux qui sont disgraciés ou exilés. "On l' a rapelé de l' exil: il a été rapelé à la Cour. = Dans le 4e sens, c' est une punition, dans le 5e. une faveur. = 6°. Se représenter les idées des chôses passées. Il est, en ce sens, actif et réciproque. "Rapeler le tems pâssé, le souvenir d' une anciène amitié. Rapeler dans sa mémoire, ou se rapeler dans la mémoire, ou simplement se rapeler ce qu' on a fait, ce qu' on a dit. _ Il est à remarquer que dans les deux premières phrâses on anonce un éfort pour se ressouvenir, et que dans la 3e se rapeler, on désigne un souvenir qui vient de lui-même, de sorte que pour signifier l' éfort que l' on fait pour cela, on doit dire tâcher de se rapeler. = Se rapeler régit que avec l' indicatif, ou de avec l' infinitif. Le 1er s' emploie quand le verbe régi ne se raporte pas au sujet de la phrâse. (au nominatif de rapeler). Le second quand il s' y raporte. Je me rapèle fort bien que vous me l' avez dit: je ne me rapèle pas de vous en avoir donné la comission. Avec le régime de que, on met le verbe au subjonctif dans la phrâse négative. "Il ne se rapelait pas, disait-il, que je lui eusse fait ce reproche. = 7°. Rapeler en terme Militaire et de Droit, voy. RAPPEL, n°. 2°. et 3°.
   Rem. Rapeler est beau au figuré: rapeler ses esprits, ses sens, reprendre, etc. _ Rapeler à la vie, faire revenir à la vie. Rapeler un homme à son devoir, le faire rentrer dans son devoir. "C' étoit un homme naturellement vain, qui exagéroit ses services, méprisoit ceux des autres, et rapeloit à lui seul toute la gloire des bons succès. Révol. Rom. "Il aproche, il la rapelle à la lumiere, il la rassure avec bonté. Marm.
   La voix de l' Univers à ce Dieu me rapelle.
       L. Rac.
M. l' Ab. Sabatier n' emploie que le datif (la prép. à). "Tout ce qui a été une occasion de rapeler aux vrais principes, etc. "Il a l' atention de rapeler aux règles qu' il faut suivre. "Un livre dont le but est de rapeler aux lois de la raison et du goût. Trois Siècles, etc. on sous-entend le régime direct; de rapeler le Lecteur, etc. = Rapeler peut avoir un 3e régime, l' ablatif (la prép. de). "Ce Médecin l' a rapelé de la mort à la vie. = Se rapeler régit l' acusatif de la chôse, se pronom personel étant au datif: se rapeler (à soi-même) ce qu' on a fait, ce qu' on a dit, etc.~ = Se rapeler de est un gasconisme. "Puisses-tu, puissent tes compagnons se rapeler de Tibulle. Trad. de Tibulle. "Si cette faûte, qui n' est point corrigée dans l' errata, n' est pas une faûte d' impression, c' est un gasconisme bien fort, dit-on dans le Mercûre.
   En style fig. famil. on dit, d' un vin qu' il rapelle son buveur, pour dire qu' il est excellent et qu' il excite à boire.

RAPPORT


RAPPORT ou RAPORT, s. m. RAPPORTER ou RAPORTER, v. act. RAPORTEUR, EûSE, s. m. et f. [Le t final ne se prononce pas dans le premier; 3e é fer. au 2d, lon. au dern. por, porté, teur, teû-ze.] Raport a plusieurs sens: 1°. Revenu, produit. "Terre, champ, vigne, pré, d' un grand raport; de meilleur raport que, etc. "Être ou n' être pas encore en raport. = Ferme, comission de grand raport, de bon raport. = 2°. Récit, témoignage. "Fidèle ou faux raport. "Au raport de. "La chôse est ainsi, au raport, même des énemis, de ceux qui sont intéressés à soutenir le contraire. = Faire raport, rendre compte. "Je n' ai pas manqué d' en faire raport à S. A. S. = 3°. Relation faite par indiscrétion, ou par malignité de ce qu' on a vu ou entendu. "Aimer à faire des raports, de faux raports, de mauvais raports. Ajouter foi aux raports. = 4°. Exposition qu' un Juge fait d' un procês, devant les aûtres Juges du même Tribunal. "Faire le raport d' une afaire, d' un procês. "L' afaire a été jugée au raport d' un tel Conseiller. "C' est une afaire de raport, de manière à être jugée par raport. = 5°. Témoignage rendu en Justice par les Experts, les Médecins, les Chirurgiens, en certains câs. "Suivant le raport ou sur le raport des, etc. = 6°. Convenance, conformité, analogie. La Langue Italiène a un grand raport avec la Latine. "Il y a un grand raport d' humeurs entre eux. = 7°. Liaison et relation que certaines chôses ont entre elles. "Ces deux afaires ont beaucoup de raport l' une avec l' aûtre. "Ce que vous dites là n' a point de raport à ou avec le sujet dont nous parlons. "La Physique et la Médecine ont un grand raport ou de grands raports entre elles. = 8°. Relation des chôses à leur fin. "Les actions humaines sont bones ou mauvaises, suivant le raport qu' elles ont à une bone, ou à une mauvaise fin. = On dit, en ce sens, part raport à; pour l' amour de, par atention pour. "J' ai fait cela par raport à vous. "Cet homme ne fait rien que par raport à lui, à ses intérêts. = Par raport à, signifie aussi quant à... Pour ce qui regarde.. "Voilà tout ce que j' avais à dire de ma fille. Par raport à mon fils, je vous prie de veiller avec encôre plus de soin, etc. _ Par comparaison. "La terre est bien petite par raport au soleil. = * Par raport que, pour parce que, est un gasconisme. "Je ne suis pas venu, par raport que j' étois malade. Gasc. corr. = 9°. Au Palais, action de raporter à la masse. "Ces cohéritiers ont été obligés au raport de ces sommes. = 10°. Terres de raport, qui ont été aportées. _ Pièces de raport, ouvrage de raport, composé de plusieurs pièces unies ensemble avec art. "Table, cabinet de pièces de raport.
   RAPORTER, c' est 1°. Aporter une chôse du lieu où elle a été portée, au lieu où elle était auparavant. "Raporter ce qu' on nous a prêté. "Les Marchands sont de retour de la foire: ils ont raporté presque toutes leurs marchandises. = 2°. Il se dit de ce qu' on aporte d' un lieu, à son retour, quoiqu' on ne l' y eût pas porté. "Il a raporté d' Italie des antiques, des tableaux. "Les Soldats raportèrent à leur Capitaine tout le butin. = 3°. Retirer. "Il a raporté beaucoup de gloire de cette journée. Il n' en a raporté que de la honte, des coups. = 4°. V. n. En parlant d' un chien, aporter le gibier, ou ce qu' on lui jette. "Ce chien raporte bien, il sait raporter. = 5°. Faire le récit de ce qu' on a vu ou entendu. "Raporter fidèlement les faits. "Vous ne raporter point la chôse au vrai. = 6°. Faire des raports. Redire par légèreté ou par malice ce qu' on a entendu dire. "On n' ôseroit rien dire devant lui, il raporte tout. = 7°. Citer, alléguer. "Les autorités, les exemples qu' il a raportés ne prouvent rien. = 8°. Diriger, référer. "Il faut tout raporter à une bone fin. "Les louanges que nous donons aux aûtres se raportent toujours par quelque endroit, à nous-mêmes. Mass. _ Voy. EMPORTER. = On dit, à peu prês dans le même sens, raporter son origine à un tel; ce qui se dit des villes, comme des hommes. Raporter un évènement à un tel tems; raporter un éfet à une telle cause. = 9°. Produire: "Terre qui raporte beaucoup, qui raporte tant par an: charge, emploi, qui ne raporte ni profit, ni honeur. "Cette mauvaise action ne lui raportera que de la honte, du déshoneur. = 10°. Au Palais, exposer l' état d' un procês par écrit. "Raporter un procês, une afaire. Et neutralement, Juge qui raporte bien: on sous-entend, les procês, dont il est chargé. = 11°. Se raporter, en parlant des chôses, avoir de la convenance, de la conformité. "Leurs humeurs se raportent en tout. "Ces deux couleurs se raportent bien. "La déposition de ce témoin ne se raporte point avec celle du précédent. = En termes de Gramaire, avoir relation à... "On ne doit point séparer le pronom relatif du substantif, auquel il se raporte. = En parlant des persones, renvoyer à... Je m' en raporte à ma dernière lettre. = Se raporter à quelqu' un, se remettre à sa décision. "Ils se sont raportés du prix à un tel. En ce sens, les uns disent, se raporter, les autres, s' en raporter à... de. "J' aime mieux me raporter au Public de l' opinion qu' on doit avoir de leur mérite. Le Père Rapin. Il dit ailleurs, je m' en raporte; mais il le dit absolument et sans régime. "Plutarque excuse Homère de la liberté qu' il se done de faire parler Antiloque et Hector à leurs chevaux, par son opinion de la Métempsycose... Mais je m' en raporte, si cette philosophie rend les hommes moins bêtes et plus capables d' entendre raison. Il sous-entend, aux habiles gens, aux Philosophes. La Fontaine dit aussi, se raporter, sans en.
   Ou bien, sans crier davantage,
   Raportons-nous, dit-elle, à Rominagrobis.
Le pronom en était ici d' autant plus nécessaire, que le régime de la chôse n' y est pas exprimé. _ La Touche trouvait s' en raporter le meilleur des deux: je l' ai toujours regardé comme le seul bon. L' Académie n' avait dabord mis que celui-là: dans la dernière édit. elle se contente de dire, se raporter à quelqu' un de quelque chôse, et plus comunément, s' en raporter. "À~ qui voulez-vous que nous nous en raportions? Je m' en raporte à vous-même. "Je m' en raporte aux Maîtres de l' Art. = Elle ajoute que dans le discours familier, on dit; Je m' en raporte à ce qui en est; et quelquefois simplement, je m' en raporte, pour faire entendre qu' on n' est pas tout-à-fait persuadé de ce qu' on entend dire.
   RAPORTEUR, s. m. Celui qui fait le raport d' un procês. "Avoir un bon, un habile Raporteur. "Instruire son Raporteur de son afaire.
   RAPORTEUR, EûSE, s. m. et f. Celui, celle qui est acoutumé de faire des raports, de raporter ce qu' il a vu ou entendu. "Les enfans sont raporteurs ou des raporteurs. "Cette petite fille est une raporteuse. "Les raporteurs sont gens odieux. Défiez-vous de lui, c' est un raporteur. Voy. RAPORT, n°. 3°. et RAPORTER, n°. 6°.

RAPPROCHEMENT


RAPPROCHEMENT, ou RAPROCHEMENT, s. m. RAPPROCHER, ou RAPROCHER, v. act. [Raprocheman, ché; 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Raprocher, est 1°. Aprocher de nouveau. "Raprochez-vous, j' ai encôre un mot à vous dire. = 2°. Aprocher de plus prês. "Il s' est raproché du Palais. En parlant des persones, il s' emploie ordinairement comme réciproque. On peut pourtant s' en servir activement. "Cette nouvelle habitation me raproche de vous, de l' Église, etc. = Figurément, Réconcilier, disposer à un acomodement. "On travaille à les raprocher. = Avec les chôses, on l' emploie toujours activement. "Les lunettes raprochent les objets. "Raprochez les~ sièges, les flambeaux.
   RAPROCHEMENT, action de raprocher, ou l' éfet de cette action: il ne se dit point au physique: on ne l' emploie que dans le moral et dans la litératûre. "Le raprochement des circonstances comence à éclaircir cette afaire. "Cet Auteur a jeté un grand jour sur cette matière, par d' heureux raprochemens. = On le dit aussi des persones en régime. "Travailler au raprochement de deux familles brouillées ensemble.
   REM. Sarrasin s' était servi de ce mot, mais il n' avait pas pâssé. Dans les Additions au Richelet, on dit que de bons Auteurs s' en sont servi, mais qu' il ne se trouve dans aucun Dictionaire. Aujourd' hui on l' emploie sans dificulté. L' Acad. l' a mis dans les dern. édit. Beaucoup de bons Ecrivains l' ont employé et il est plus que jamais à la mode. "Le seul point essentiel, c' est le raprochement de sa condamnation et du délit qui a semblé la motiver. Ling. "Voilà encore un raprochement, qui n' est pas fondé en raison. Merc. On l' emploie même au plur. "On a dénaturé le sens de ces propositions, par des retranchemens insidieux et des raprochemens perfides. Anon.

RAPORT


RAPORT, RAPORTER, etc. Voy. RAPPORT, RAPPORTER, avec 2 p.

RAPSODE


RAPSODE, RAPSODEUR, ou RAPSODISTE, s. m. RAPSODIE, s. f. [Quelques Auteurs, et Le Gendre entre autres, ont écrit rhapsodie, par respect, sans doute, pour l' étymologie.] Ces mots, dans leur origine, qui est grecque, n' ont pas le même sens que le mot français, qui en est dérivé. Rapsodie, en grec, ne signifie autre chôse que petit poème, ou morceau de poésie, et ne fait pas naître l' idée odieûse que les Français y ont atachée. C' est donc bien mal à propôs que M. de Villette a intitulé une espèce de traduction en prôse du XVIe Livre de l' Iliade: "Traduction littérale de la Rapsodie de l' Iliade, intitulée Patroclée. _ Il paroit, dit Boileau, que ceux qui, dans la suite firent de ces Parodies, qu' on apela Centons d' Homère, nommèrent aussi ces centons, rapsodies; et c' est peut être ce qui a rendu le mot rapsodie, odieux en français, où il veut dire, un amâs de méchantes pièces recousûes. = On apelait rapsodes, ceux qui chantaient les vers d' Homère. Mde. Dacier écrit rhapsode. L' Académie avait dabord mis rapsodeur; dans les dern. édit. elle a mis rapsodiste, celui qui ne fait que des rapsodies. Ce mot n' est bon que dans le style comique ou critique. Mde. de Sévigné emploie rapsoder, pour signifier, racomoder tant bien que mal. "Enfin, on a tout rapsodé: mais ce qui est dit est dit. Ce mot est en italique comme de raison.

RAPT


RAPT, s. m. [Rat: on fait soner le t final: le p ne se prononce pas.] Enlèvement d' une fille ou d' un fils de famille à marier, fait par celui, qui n' a pas d' autorité légitime. "Rapt de violence, rapt de séduction. = Dans le discours ordinaire, on dit plutôt enlèvement.

RAPûRE


RAPûRE, s. f. [2e lon. 3e e muet.] Ce que l' on enlève avec la rape, ou en gratant~. "Rapûre de buis, d' ivoire, d' ongle.

RAQUÉTIER


RAQUÉTIER, s. m. RAQUETTE, s. f. [Raké-tié, kète? 2e é fer. au 1er, è moyen au 2d. 3e é aussi fermé au 1er, e muet au 2d. _ L' ancien Trév. écrit raquetier, raqueton, 2e e muet; le nouveau, raquetier, raquetton. L' ACAD. ne met ni raquetton, ni raquéton.] Raquette, instrument dont on se sert pour jouer à la paûme et au volant. Raquétier, ouvrier qui fait des raquettes.
   RAQUETTE est aussi le nom qu' on a doné à une machine, que les Sauvages du Canada atachent à leurs pieds pour marcher plus comodément sur la neige; et qui est faite à peu prês en forme de raquette.

RAQUITER


RAQUITER. Voy. RACQUITTER.

RâRE


RâRE, adj. RâREMENT, adv. RâRETÉ, s. f. [1re lon. 2e e muet; 3e é fer. au dern. en, dans le 2e, a le son d' an: râreman.] Râre, qui n' est pas comun. Rârement, peu souvent. Râreté, disette. "Chose râre: oiseau, médaille, livre râre. "L' argent est à présent fort râre: "Homme d' un râre savoir, d' un râre mérite. "Un homme râre, qui a un mérite extraordinaire. "Cela arrive ou se rencontre rârement. "Il paroit rârement aux promenades publiques. _ "Il y a une grande râreté de vin cette année. "Cette étofe est chère, à cause de sa râreté. "La râreté augmente le prix des chôses: il n' y a pas toujours du bon sens à cela.
   Rem. 1°. Avec le verbe être impersonel, râre régit la conjonction que et le subjonct. Il est râre qu' on excelle, qu' on réussisse avec de modiques éforts. Et quand le régime est employé négativement, on retranche pas. "Comme l' étendue~ en est fort vaste (de cet Empire) il est râre qu' il ne s' y élève souvent des persécutions. Lett. Édif. _ Souvent est là de trop, et joint à râre, il forme un pléonasme; car, il est râre qu' il ne s' y élève souvent, équivaut à, il n' est pas râre qu' il s' y élève souvent, ce qui est ridicule. = Fontenelle met, à la place de ce régime, la prép. de et l' infinitif, et J. J. Rousseau y ajoute le datif. "Delà vient aussi qu' il est si râre d' exceller dans cette science (la Botanique). "Loin que le chef ait un intérêt naturel au bonheur des particuliers, il ne lui est pas rare de chercher le sien dans leur misère. Ce datif est un régime inusité: cependant, dans cette phrâse il est nécessaire, à cause de l' infinitif. Il serait plus conforme à l' usage et à l' analogie, de dire, en suprimant lui, il n' est pas râre qu' il cherche le sien, etc. = 2°. Râre, en Physique, se dit d' un corps, dont les parties sont lâches et peu serrées. Il est oposé à dense ou compacte. _ En Médecine, il se dit du pouls, lorsque les batemens se font de loin à loin. Il est oposé à fréquent. = 3°. Rârement mis à la tête de la phrâse, fait marcher le pronom nominatif aprês le verbe. "Rârement réussit-on, quand on se porte mollement à ce que l' on entreprend. = 4°. Râreté signifie quelquefois singularité. "C' est une râreté que de vous voir. = On dit, familièrement, pour la râreté du fait, pour la singularité de la chôse. "Je voudrois bien, pour la râreté du fait, voir cet homme se mettre en colère. = Au pluriel, il signifie des chôses râres, singulières, curieûses. "Un cabinet de râretés, plein de râretés.

RARÉFACTIF


RARÉFACTIF, IVE, adject. RARÉFACTION, s. f. RARÉFIER, v. act. [Raréfaktif, tive, fak-cion, fi-é; 2e é fer.] Ils ont raport au sens qu' a râre en physique. Ils sont presque synonymes de dilatation, dilater, et sont oposés à condenser, condensation. "La raréfaction de l' air "La chaleur raréfie l' air, cela raréfie le sang. "Raréfactif, se dit de ce qui a la propriété de raréfier; de causer la raréfaction.

RâREMENT


RâREMENT, RâRETÉ. Voyez RâRE.

RARISSIME


RARISSIME, adj. Três-râre. C' est un mot de conversation. Dans un discours grâve on ne l' emploirait pas Le Rich. Port. dit qu' il est familier. L' Acad. ne le met pas.

RàS


RàS, RâSE, adj. RâSANT, ANTE, adj. RâSEMENT, s. m. RâSER, v. a. RâSOIR, s. m. [Râs, râze, zan, zante, zeman, , zoar; 1re lon. 2e lon. au 3e et 4e, e muet au 1er et au 5e, é fer. au 6e.] Râs est, aussi bien que rais, qui ne se dit plus qu' en proverbe, un participe du vieux verbe raire, qui signifiait, couper, râser. _ En parlant des hommes, qui a le poil coupé jusqu' à la peau. "Le menton râs, la tête, la barbe râse. = En parlant des animaux et des étofes; qui a le poil fort court. "Cette espèce de chien a le poil râs: du velours râs, de la serge fort râse. = En parlant des mesures des grains; qui n' est pas comble, qui n' excède pas la hauteur de la mesure. Boisseau râs, mesure râse. = En termes de Marine, bâtiment râs, qui n' est pas ponté. = Table râse, où il n' y a encôre rien de gravé. On dit d' un jeune homme qui n' a reçu encôre aucune instruction, que c' est une table râse où l' on grâvera tout ce qu' on voudra. Style fig. famil.
   Rem. On dit, en râse campagne, en parlant de batâille, de combat. "Henri IV dit hautement qu' on ne pouvoit pas regarder le Comte Maurice comme un grand Capitaine, puisqu' il se couvroit toujours par des digues, des marais et des rivières, sans vouloir jamais en venir à un engagement en râse campagne. D' AVR. _ Hors delà, il me semble que râse campagne n' est guère de l' usage actuel. "Le lieu où il campoit, étoit une campagne râse et unie, três-propre à mettre en bataille un corps nombreux de gens à pied, pesamment armés. Rollin. J' aimerais mieux dire plate et unie. L' ACAD. met rase campagne en ce sens. "Au pied de cette montagne est une râse campagne: au sortir de ce parc, on trouve la râse campagne. Ceux qui veulent le dire ainsi, ont pour s' apuyer, une grande autorité.
   RâS, s. m. est un nom comun à plusieurs étofes croisées, dont le poil ne parait point. "Râs de Ségovie, râs de St. Maur, râs de St. Cyr, etc.
   RâSER, c' est 1°. Tondre, couper le poil tout prês de la peau. Il se dit particulièrement de la barbe, sur-tout quand il est sans régime. Se faire râser la tête: un Barbier qui râse bien, qui râse mal; un rasoir qui râse mal: être râsé de frais. Se râser soi-même. = Se râser signifie aussi, se faire râser. "Il se râse rarement: quand voulez-vous vous râser? c. à. d. quand voulez-vous que je vous râse? = 2°. En parlant d' un édifice; démolir, abatre rez pied, rez terre. "Râser une place, en râser les fortifications. "Ces places ont été râsées avant que d' être rendûes. = 3°. Figurément, pâsser tout auprês avec rapidité. "Une balle lui râsa le visage; lui râsa les bords de son chapeau; et non pas râsa son visage. "Un vaisseau qui râse la côte: la galère râsa un écueuil. = V. n. Cheval qui râse, qui comence à râser, qui ne marque presque plus.
   RâSANT, ANTE, ne se dit qu' en termes de fortifications. Flanc râsant, feu râsant, ligne râsante. L' Abé Laugier dit aussi, vûe râsante. "À~ Choisi, le château élevé en terrasse sur la rivière, est dans une position assez avantageûse: mais une vûe rasante, et un petit nombre d' objets aperçus confusément sur des côteaux trop éloignés, rendent les aspects du château médiocrement intéressans.
   RâSEMENT, action de râser, n' a que le 2d sens du verbe. Démolition d' une place.
   RâSOIR, Instrument d' acier, qui a le tranchant fort fin, et dont on se sert pour râser. "Aiguiser, pâsser, repâsser un rasoir. Le morfil d' un râsoir. "Ce râsoir est doux, est rude, etc. = On dit de tout ce qui coupe bien, qu' il coupe comme un râsoir.

RASADE


RASADE, s. f. RASIBUS, prép. [Razade, zibus.] Le 1er est familier. Verre de vin ou d' autre liqueur, plein jusqu' aux bords. Boire rasade, ou des rasades.
   Je suis impatient de vous verser rasade.
dit Lisimon au Glorieux. = Le 2d est populaire. Tout contre, tout prês. "On lui a coupé les cheveux rasibus de l' oreille.

RâSER


RâSER, RâSOIR. Voyez RâS.

RASSASIANT


RASSASIANT, ANTE, adj. RASSASIEMENT, s. m. RASSASIER, v. act. [Ra--sazi-an, zi-ante, ziman, zi-é; 4e lon. aux 2 prem. é fer. au dern. l' e du 3e ne se fait pas sentir.] Rassasier, apaiser la faim, satisfaire l' apétit. Rassasiant, qui rassasie. Rassasiement, état de celui qui est rassasié. Le verbe et le substantif s' emploient au propre et au figuré; l' adjectif ne se dit qu' au propre. Mets rassasiant, viande rassasiante. "Il est de si grand apétit qu' on ne peut le rassasier. "Il ne peut se rassasier des plaisirs. "Il devroit être rassasié de gloire, d' honeurs, de richesses, et il en est toujours plus afamé. "Je suis las, je suis rassasié de censures et de louanges. Je cherche un désert impénétrable aux méchans. L. F. Vie de St. Grég. de Naz. "Il faut se plier au goût d' une Nation, d' autant plus dificile, qu' elle est depuis long-tems rassasiée de chefs-d' oeuvre. Voltaire "Le rassasiement caûse souvent le dégoût. "Le rassasiement des plaisirs.
   Rem. Poétiquement on dit, des flèches, des traits, qu' ils se rassasient du sang des combatans. "Déja huit flèches mortelles sont parties de ma main, et se sont rassasiées du sang des plus braves de nos énemis. Mde. Dacier, Iliade. = * Le Traducteur de l' Histoire d' Hume fait régir au réciproque la prép. à et l' infinitif. "Sa cupidité (de Henri VIII) se rassasioit à piller l' Eglise, et son hypocrite orgueuil, à persécuter les Hérétiques. _ Ce régime est inusité en français, et a l' air d' un anglicisme.

RASSEMBLER


RASSEMBLER, v. act. [Ra-sanblé; 2e lon. 3e é fer.] 1°. Mettre ensemble. Faire amâs de.... "Il a rassemblé quantité de tableaux, d' estampes, de curiosités. "Rassembler des faits pour en composer une histoire; des matériaux, pour un ouvrage, des preuves, etc. _ Rassembler des Troupes. "On rassembla toutes les troupes, et on marcha aux énemis. "Rassembler les débris d' une Armée, etc. = 2°. Réunir. "Le miroir ardent rassemble les rayons du Soleil, etc. _ "Rassembler des pièces de menuiserie, ou de charpente, qui ont été démontées. = Se rassembler. "Tous les Soldats dispersés se rassemblèrent autour du drapeau. "Le Parlement ne se rassemble qu' aprês la Saint-Martin.

RASSEOIR


RASSEOIR ou RASSOIR, v. réc. actif et neut. RASSIS, ISE, adj. [Ra-soar, ci, cî--ze; 2e lon. au dern.] Le verbe se conjugue comme asseoir. = 1°. S' asseoir une seconde fois. "Rasséyez-vous: je ne veux pas me rassoir; il s' est rassis. = 2°. V. n. S' épurer en se reposant. "Il faut laisser rassoir ce vin; sa bile, ses esprits: il faut faire rassoir ces liqueurs. = Fig. Il est trop ému: laissez rassoir son esprit; et activement, donez-lui le tems de rassoir ses esprits, ou son esprit.
   Ses discours insolens m' ont mis l' esprit en feu;
   Et je vais prendre l' air, pour me rasseoir un peu.
       Mol.
= 3°. V. act. Remettre, ratacher ce qui s' est détaché. "Rassoir une pierre, un fer au pied d' un cheval.
   RASSIS, adj. Pain rassis, qui n' est plus tendre ou frais. = Esprit rassis, posé, réfléchi. = De sang rassis, ou, de sens rassis, adv. sans être ému, sans être troublé. "Il est toujours en colère; il n' est jamais de sang rassis. "Il n' étoit pas de sens rassis, quand il l' a dit: il ne l' a pas fait de sens rassis. _ L' Acad. a adopté le premier; Trév. a préféré le 2d; et il me parait aussi préférable. On pourrait dire les deux en diverses ocasions. L' un quand il s' agit d' une émotion qui est dans le sang, comme dans le 1er exemple; l' aûtre quand il s' agit d' un trouble qui est dans l' esprit, comme dans les deux derniers. = Rassis ne se dit pas tout seul des persones. "J' allai l' autre jour aux petites maisons pour entendre un fou... Il m' amusa beaucoup en me prouvant qu' il existoit seul. Je ne crois pas qu' il eût fait des Sectateurs rassis. Le Phil. du Valais. On dit, de sens rassis.

RASSÉRÉNER


RASSÉRÉNER, v. act. [Racéréné: 3 é fermés, Trév. écrit rasseréner sans accent sur le 1er e. L' Acad. le Rich. Port. le Traité d' Ortogr. y mettent l' accent.] Il se dit au propre et au figuré. Rendre serein. "Le soleil parut et rasséréna le tems. "Le tems s' est rasséréné: cette nouvelle lui a rasséréné le visage. "Quand il entendit ces mots, son front, son visage se rassérèna.
   Monarque Souverain, dont la force inconûe
   Rasséréne les cieux, ou fait grossir la nûe.
       Bréb.
_ L' Acad. dit au propre; qu' il vieillit~, et au figuré qu' il est de peu d' usage. On ne devrait pas laisser perdre ce mot.

RASSIS


RASSIS, RASSOIR, voy. RASSEOIR.

RASSOTÉ


RASSOTÉ, ÉE, adj. C' est le participe du V. Rassoter, qui n' est plus en usage. Infatué, entêté. "Il est rassoté de sa nouvelle maison. "Elle rassotée de son fils. St. famil. et même populaire. Acad. = On disait autrefois rassoter dans le même sens que rabêtir; rendre sot, rendre hébété: ne grondez pas si rudement cet enfant: vous le rassoterez.

RASSURANT


*RASSURANT, ANTE, adj. Qui rassûre, qui est capable de rassurer. C' est un néologisme heureux à mon avis. M. Portalis, célèbre Avocat au Parlement d' Aix, l' a employé dans un Mémoire. "Il peut couvrir les conduits des eaux et prendre des précautions rassurantes. "La persuasion que Dieu est trop bon, trop bienfaisant pour punir le vice par des peines éternelles, n' est pas une idée moins rassurante et moins favorable à la dépravation. Mde. de Sillery.

RASSURER


RASSURER, v. act. [ra-suré: 3e é fer. devant l' e muet, l' u est long: il rassûre, rassûrera, etc.] 1°. En parlant des chôses en régime, afermir. "Il faut rassurer cette murâille. "L' arche de ce pont a besoin d' être rassurée. = 2°. En parlant des persones, redoner l' assurance, rendre la confiance. "L' air, la contenance du Capitaine rassura les Soldats. "Vos bontés me Rassûrent. "Se rassurer: "rassurez-vous, il n' y a rien à craindre. = Rafermir. "Rassurer un homme dans la foi: Rassurer sa foi chancelante. = 3°. En parlant du tems, se rassurer, c' est se remettre au beau: "Il faut atendre que le tems se rassûre.
   Rem. Voiture a dit: "Rassurez-moi de ma crainte; Sarrasin: "ils eurent tout le loisir de se rassurer de leur effroi. Et M. de Wailly: "Rassurer d' une alarme. L' Acad. ne met point d' exemple de ce régime. Il parait que l' usage ne l' a pas admis; et il est peu nécessaire: rassurer sufit et rassurer d' une crainte, d' un effroi frisent le Pléonasme. Regnard a employé le même régime.
   Je veux la rassurer de ses soupçons jaloux.
       Le Distrait.
On dit guérir les soupçons de quelqu' un: on ne dit point, rassurer quelqu' un de ses soupçons.

RAT


RAT, s. m. [Il n' a point de féminin: on ne dit point une rate: pour les grôs rats, on dit toujours un rat, soit qu' il soit mâle ou femelle: pour les petits on dit ordinairement une souris. Voy. plus bas, RATE, à la fin.] Petit animal auquel les chats donent la chasse. "Grôs rat, petit rat. = Mort aux rats, composition, où il entre de l' arsenic, et dont on se sert pour faire mourir les rats. = On dit, proverbialement, gueux comme un rat. (On ajoute quelquefois d' Eglise.) Extrêmement gueux.
   Chacun d' eux sans façon se nantit à sa guise;
   Et je me trouve moi gueux comme un rat d' Eglise.
       Du CERC.
Il pûe comme un rat mort: il sent mauvais. _ Il paye en chats et en rats, en mauvais éfets. Voy. CHAT, Nid. Pâille. _ À~ bon chat bon rat: bien ataqué, bien défendu. "Voilà notre bourru, qui brusque tout le monde: mais à bon chat, bon rat, DEST. = On dit, figurément, qu' une arme à feu a pris un rat, quand l' amorce n' a pas pris, ou que l' arme ne tire pas; ce qui se dit aussi d' un homme, qui a manqué son coup, son dessein.
   RATS (St. fig. fam.) Caprices, fantaisies. "Il ou elle a des rats dans la tête, ou simplement des rats. "Il lui a pris un nouveau rat. Il (Sidney)
   Étoit prêt à signer lorsqu' il lui prend un rat.
       GRESSET.
  On est fort malheureux avec de pareils rats. ID.

RATATINER


RATATINER, (Se) V. réc. Se racourcir, se resserrer. "Le parchemin se ratatine au feu. Pomme ratatinée, ridée flétrie. = Fig. Il se dit des persones. Rapetissé par l' âge ou par la maladie. "Vieillard ratatiné; vieille ratatinée. "Visage ratatiné. = Il n' est bon que pour le discours três-familier; et Mde Dacier pouvait se dispenser de l' employer dans la traducion de l' Odissée qu' elle a remplie d' expressions bâsses et proverbiales. "Voilà un gueux, qui a la langue bien pendue: il ressemble tout-à-fait à une vieille ratatinée.

RATE


RATE, s. f. [2e e muet] Partie molasse, située dans l' hypocondre gauche entre l' estomac et les fausses côtes. "Avoir mal à la rate. Avoir la rate enflée. Désopiler la rate. = On dit, proverbialement, épanouir la rate à... Divertir et faire rire; s' épanouir la rate, rire beaucoup, se réjouir. = RATE, femelle du rat.
   Quelques rates, dit-on, répandirent des larmes.
       La Font.

RâTEAU


RâTEAU, s. m. RâTELÉE, s. f. RâTELER, v. act. RâTELEUR, s. m. [Râto, plur. râteaux, pron. râtô, l' ô est long; râtelé-e , leur: 1re lon 2e e muet aux 3 dern. 3e é fer. au 2d et au 3e.] Râteau est un instrument d' Agricultûre, avec lequel on ramâsse, dans les prés, du foin; dans les champs, de l' orge, de l' avoine; et l' on nettoye des allées dans les jardins. = Râtelée est ce que l' on peut ramâsser en un coup de râteau. = Râteler, c' est amâsser avec le râteau; ou pâsser le râteau dans les allées. = Râteleur, homme de journée, qu' on a loué pour râteler des foins, etc.
   RâTELÉE est le seul de ces mots, qu' on emploie dans le style fig. famil. "Il nous a débité toute sa râtelée, tout ce qu' il savait. "Il lui a dit une râtelée d' injûres. "J' en dirai ma râtelée; je dirai librement ce que j' en pense. L' Acad. dit qu' il est familier et même populaire. Il me semble que la dernière qualification est de trop.

RATELEUX


*RATELEUX, EUSE, adj. [1re br. 2e e muet, 3e lon. leû, leû-ze.] Qui est sujet au mal de rate. Il est vieux.

RâTELIER


RâTELIER, s. m. [Râte-lié: 1re lon. 2e e muet, 3e é fer.] 1°. Deux pièces de bois, traversées par plusieurs petits barreaux, en forme d' échelle couchée, où l' on met le foin et la pâille qu' on donne à manger aux chevaux, boeufs, mulets, etc. = On dit fig. st famil. Mettre le râtelier bien haut à quelqu' un, lui rendre une chose bien dificile _ Manger à plus d' un râtelier, tirer du profit de plusieurs emplois.
   2°. RâTELIER, pièces de bois garnies de plusieurs chevilles attachées droites contre la muraille où l' on pôse des mousquets, des hallebardes. _ Fig. st. prov. Mettre les armes au râtelier, ne plus porter les armes, ne plus faire la guerre. = C' est aussi une pièce de bois, aussi garnie de chevilles et atachée en travers, pour y pendre des robes, des manteaux, des surplis, etc.
   3°. Râtelier se dit figurément (St. famil.) des deux rangées de dents. "Un beau, un vilain râtelier.

RATER


RATER, v. n. Il se dit d' une arme à feu, qui manque à tirer. Son fusil rata. _ V. act. Il a raté son énemi. = Fig. (St. prov.) Cet homme a raté, il a manqué son coup: il n' a pas réussi: il a raté cette charge, cet emploi: il n' a pu l' obtenir.

RATIER


RATIER, IèRE, adj. et subst. RATIèRE, s. f. [Ra-tié, tière: 2e é fer. au 1er, è moy. au 2d et au 3e] Ratier, qui a des rats, de caprices. Voy. RAT, à la fin. "Il est ratier; elle est ratière: c' est un ratier, une ratière. Suivant l' Acad. il est populaire.
   RATIèRE, petite machine à prendre des rats. "Tendre une ratière. = En st. famil. "Il a été pris comme dans une ratière.

RATIFICATION


RATIFICATION, s. f. RATIFIER, v. act. [Ratifika-cion, fi-é] Ratifier, c' est confirmer ce qui a été fait ou promis. "Ratifier un contrat, un traité. "Je ratifie tout ce qu' on vous a dit et promis de ma part. "Vous allez ratifier le sacrifice que vous avez fait à Dieu de vos persones. Bourdal. = Ratification est l' action de ratifier; signer la ratification d' un contrat, d' un traité; et l' instrument public, dans lequel la ratification est contenûe; de là l' expression d' usage, échanger, ou faire l' échange des ratifications. Voy. CONSENTEMENT.

RATINE


RATINE, s. f. Sorte d' étofe de laine.

RATION


RATION, s. f. [Ra-cion, en~ vers ci-on] Portion de pain, de vivres ou de fourrage qu' on distribûe à chaque soldat, cavalier, ou matelot.

RATIONAL


RATIONAL, s. m. [Ra-cio-nal] Morceau d' étofe carré, de la grandeur de la main, sur lequel étaient douze pierres précieuses, et que le Grand Prêtre des Juifs portait sur la poitrine.

RATIONEL


RATIONEL, ELLE, adjectif. [Ra-cio--nèl, nèle: 3e è moy. 4e e muet] On ne le dit qu' en Astronomie et en Géométrie. On apèle horison rationel, le grand cercle, qui coupe le ciel et la terre en deux hémisphères; et racine rationelle toute quantité comensurable, qui est la racine d' un plus grand nombre. * J. J. Rouss. s' est servi de ce mot à la place de raisonable. "Ils (les Poètes) renversent l' ordre de nos facultés, flatent la partie sensible de l' âme et négligent la rationelle. Il a voulu sans doute distinguer ce qui raisone, rationel, de ce qui est capable de raison, raisonable _ Diderot opôse aussi la Philosophie rationelle, à la philosophie expérimentale. _ Un Médecin de Province apelle rationelle la médecine théorique, pour la distinguer de la pratique. "Qui sait mieux que les Médecins dans quels égaremens la Médecine rationelle a précipité de tout tems ceux qui l' ont suivie. Mouret. _ Il est peut-être à souhaiter que l' usage étende l' emploi de cet adjectif.

RATISSER


RATISSER, v. act. RATISSOIRE, s. f. RATISSûRE, s. f. [raticé, soâ-re, sûre: 3e é fer. au 1er, lon. aux deux autres.] Ratisser c' est ôter, emporter en raclant la superficie de quelque chôse, ou l' ordûre, qui est atachée dessus. "Ratisser des peaux, du parchemin, des navets, les alées d' un jardin. = Ratissoire, instrument de fer avec lequel on ratisse des alées, des degrés, une cour, etc. = Ratissûre; ce qu' on ôte en ratissant. Il se dit comunément au pluriel. "Jeter les ratissûres.

RATOIRE


*RATOIRE, s. f. on l' a dit anciènement pour ratière, souricière. Il n' est pourtant ni dans Nicot, ni dans Monet; mais il se trouve dans le Dictionaire des rimes de la Noue et dans les Dictionaires d' Oudin. LA MONN.

RATTACHER


RATTACHER, ou RATACHER, v. act. Atacher de nouveau. = Il s' emploie quelquefois pour le simple atacher. "Le manteau royal étoit rataché d' une agraphe de diamans. = Suivant Trév. Il se dit figurément en chôses morales. "Il s' est rataché à l' étude, au service de cette Dame: Aujourd' hui, on dit s' atacher.

RATTEINDRE


RATTEINDRE ou RATEINDRE; RATTRAPER ou RATRAPER, v. act. Ils ont à peu près le même sens, et l' Acad. les traduit et les interprète l' un par l' autre. Il y a pourtant quelque diférence. Dabord le 1er est plus noble. "On n' a pu rateindre ce prisonier: on l' a ratrapé. "Allez toujours devant, je vous aurai bientôt ratrapé, j' espère vous rateindre bientôt. = Ensuite ratraper se dit des chôses en régime; recouvrer ce qu' on avait perdu. Rateindre n' a ni ce sens, ni cet emploi. "Il avait perdu au jeu cent pistole: il les a ratrapées. = Ratraper signifie encôre atraper de nouveau: en ce sens, il est réduplicatif; rateindre ne l' est pâs. "Quand un renard s' est échapé d' un piège, il est bien râre qu' on l' y ratrape. = St. famil. "On ne m' y ratrapera plus; ou, bien fin qui m' y ratrapera: je ne m' exposerai plus à semblable aventûre.

RATûRE


RATûRE, s. f. RATURER, v. act. [L' u est long dans le substantif: dans le verbe, il est bref, devant la syll. masculine, nous raturons, je raturai, raturé, etc. Long devant l' e muet: il ratûre, ratûrera, etc.] Ils expriment l' action d' éfacer ce qui est écrit, en pâssant quelque trait de plume sur ce qu' on a écrit. "Écrit plein de ratûres. "Le Notaire et les Parties ont aprouvé les ratûres. "Il est dificile de composer correctement sans raturer beaucoup. Acad. Voy. BIFFER.

RAVAGE


RAVAGE, s. m. RAVAGEANT, ANTE, adj. RAVAGEMENT, s. m. RAVAGER, v. act. RAVAGEUR, s. m. [ravage, jan, jante, geman, , geur: 3e e muet au 1er et au 4e é fer. au 5e, lon. au 2d et au 3e.] Ravage est en général domage et dégât fait avec violence et rapidité, tels que ceux que causent les gens de guerre, les bêtes féroces, les orages, les pluies, les vents, les maladies. = Il se dit figurément du désordre des passions. "Les passions font de grands ravages dans le coeur des jeunes gens. "Le luxe fait de grands ravages dans les États. = Dans le st. famil. faire ravage (sans article) ou faire du ravage dans une maison; y faire beaucoup de bruit, de fracâs, de désordre.
   RAVAGER, faire du ravage, ne se dit qu' au propre. "Les énemis ravagèrent toute la Province. "Le débordement des eaux a ravagé la campagne. = Ravager, désoler, dévaster~, sacager (syn.) L' idée rigoureûse de ravager est d' enlever, renverser, emporter, entraîner; celle de désoler est de dissiper, chasser, exterminer; celle de dévaster est de tout moissoner, détruire; celle de sacager est de livrer au carnage, etc. Les torrens, les flammes, les tempêtes ravageront les campagnes. La guerre, la peste, la famine désoleront un pays. Des inondations de Barbares dévasteront un Empire. Des soldats éfrénés, des vainqueurs féroces sacageront une Ville prise d' assaut. Extr. des Synon. Fr. de M. l' Ab. Roubaud. = Quelques Auteurs ont fait ravager neutre; et l' Auteur des remarques sur Vaugelas l' aprouve. "L' énemi est venu ravager sur nos terres. Trév. Voy. plus bâs, Rem.
   * Ravagement, action de ravager: le ravagement de la terre Sainte. Anon. Ravageant, qui ravage. "La petite vérole est quelquefois aussi ravageante que la peste. Tissot. = Ravageur, celui qui ravage. "Ce fut peu après le Déluge que parurent ces ravageurs de Provinces, que l' on a nommés conquérans. Boss. Hist. Univ. "Ces ravageurs dispersés regagnèrent chacun leur pays comme ils purent. Hist. d' Angl. "Ces ravageurs enhardis par la pussillanimité de leurs adversaires, etc. Ib. Le traducteur, en cet endroit, a mis le mot en italique. Ravageur ne fait bien que dans la phrâse de Bossuet. M. l' Ab. Boulogne l' a employé tout récemment. "Les ravageurs des Provinces. "Je ne dis rien de ravageurs, dit un des Auteurs de l' Ann. Litt. C' est au public, c' est à l' usage à décider. Nous en disons autant de ravagement et de ravageant, mais il est permis, je crois, de souhaiter que la décision du public et de l' usage leur soit favorable, ces~ mots~ seraient utiles. Ravagement dit plus que dégât et domage: dailleurs, ceux-ci ayant le sens passif ne sauraient exprimer la même chôse que celui-là qui a le sens actif. Ravageur se dirait des personnes, et ravageant des chôses. Cependant en vers et dans la prôse poétique, on pourrait dire: les orages, les torrens, etc. ravageurs.
   Rem. M. Moreau et le P. Barre font ravager neutre. "À~ la tête d' une armée, il étoit venu piller et ravager jusqu' aux bords du Rhin. "Les Normands ne vouloient que ravager: ils le firent impunément, Moreau. "Toute la Nation prit les armes et vint ravager sur les frontières des Gaules. "Ils recommencèrent à ravager plus que jamais. P. Barre. Ce dernier Auteur dit, dans le même sens, faire le ravage, pour faire le dégât. "Il fit le ravage par-tout où il pâssa. Cette dernière expression me parait mauvaise; pour ravager neutre, il faut en apeler à l' usage.

RAVALEMENT


RAVALEMENT, s. m. RAVALER, v. act. [Ravaleman, lé: 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Ravaler, c' est 1°. retirer en dedans du gosier. Ravaler sa salive. _ Fig. st. famil. retenir ce qu' on était sur le point de dire. "Il a bien fait de ravaler ce qu' il vouloit dire. = 2°. En maçonerie, ravaler un mur, c' est le crépir de haut en bâs. = 3°. Fig. en parlant des personnes en régime, avilir, déprimer. C' est un de ces vieux mots, que la poésie conserve.
   Quoi! tu ne vois donc pas jusqu' où l' on me ravale....
   Seulement pour l' argent un peu trop de foiblesse,
   De ces vertus en lui ravalait la noblesse.
       Boileau.
Le réciproque, même en prôse, est plus usité: se ravaler, s' avalir, ou, s' humilier. "C' est bien; c' est trop se ravaler. L' actif se dit plutôt des chôses, qui touchent les persones que des persones mêmes. "Ravaler la gloire, le mérite de, etc. = Le neutre est entièrement hors d' usage, du moins au figuré.
   Avecque ce défaut, si digne de mépris,
   Votre beauté s' efface et ravale de prix.
       Trévoux.
= 4° Ravaler, c' est remettre plus bâs. "Ravaler des bâs, la genouillère d' une botte, un capuchon sur les épaules. Acad.
   RAVALEMENT a signifié aûtrefois, abaissement: "Il est tombé dans le ravalement. _ Beaucoup de gens croient établir leur réputation par le ravalement et le mépris de leurs rivaux. Trév. _ Aujourd' hui, il ne se dit plus qu' en maçonerie: faire le ravalement d' un mur. Voy. n°. 2°.

RAVAUDAGE


RAVAUDAGE, s. m. RAVAUDER, v. n. RAVAûDERIE, s. f. RAVAUDEUR, EûSE, s. m. et f [Ravodage, , de-ri-e, deur, deû--ze: 2e du 3e, et 3e du dern. lon. 3e e muet au 3e, é fer. au 2d: dans le verbe au est long devant l' e muet: il ravaûde, ravaûdera, etc.] Ravauder, au propre, c' est racommoder de méchantes hardes à l' aiguille; au figuré il a trois significations: 1°. V. n. Tracasser dans une maison, s' ocuper à ranger des hardes, des meubles, etc. "Elle n' a fait que ravauder tout aujourd' hui = 2°. V. act. Maltraiter de paroles: je le ravauderai bien: on l' a bien ravaudé. = 3°. Incomoder par des discours hors de propôs. "Qu' est-ce que vous venez me ravauder. "Il m' a ravaudé mille impertinences. _ Dans ces trois acceptions, il n' est que du style familier.
   RAVAUDAGE ne se dit qu' au propre du racomodage à l' aiguille: tant pour le ravaudage de ces bâs: et aussi d' une besogne faite grossièrement. "Vous n' avez fait là que du ravaudage, ce qui se dit quelquefois des ouvrages d' esprit. = Ravauderie, au contraire, ne s' emploie qu' au figuré famil. Discours de niaiseries. "Quelles ravauderies nous vient-il conter? = Ravaudeur à l' un et l' autre emploi. "Envoyez chez le ravaudeur; payez la ravaudeûse. = "C' est un ravaudeur, une ravaudeûse; qui importune par ses ravauderies, qui ne dit que des balivernes.

RAUCITÉ


RAUCITÉ, s. f. [Rocité] Qualité de la voix, qui est rauque. Ce mot n' est guère usité dans le discours ordinaire.

RAVE


RAVE, s. f. Plante, dont la racine est une sorte de gros navet. = On apèle plus communément de ce nom cette plante potagère dont la racine est d' un rouge foncé et qui est tendre, cassante et bone à manger. "Une assiette de raves, de petites raves.

RAVELIN


RAVELIN, s. m. [Rave-lein: 2e e muet.] Ouvrage de fortification extérieure, composé de deux faces qui font un angle saillant; et qui sert ordinairement à couvrir une courtine, un pont. _ On l' apèle aussi demi-lune.

RAVIGOTER


RAVIGOTER, v. act. Terme populaire. Remettre en force une persone, un animal, qui semblait faible et aténué. "On lui a fait prendre un doigt de vin, qui l' a un peu ravigoté. = On disait aûtrefois dans tous les styles, ravigoter, remettre en vigueur; et ce mot serait bon à faire renaitre. _ Ravigoter vient de ravigote, s. f. Sauce verte avec de l' échalote et d' autres ingrédiens. = * On a dit aûtrefois ravigourer et revigourer.

RAVILIR


RAVILIR, v. act. Rabaisser, rendre vil et méprisable. Actif, il régit les chôses, qui ont raport à la persone. Il ne faut pas ravilir sa dignité. _ Réciproque, il se dit des persones même: en s' humiliant, on ne se ravilit pas. = Bossuet faisait un grand usage de ce verbe. "Il se sont ravilis. "Les Vaudois ravilissoient l' Église et le Sacerdoce.

RAVIN


RAVIN, s. m. RAVINE, s. f. [Ra-vein, vine.] Suivant l' Ab. des Fontaines, le 2d. ne se dit que des pluies d' orage, et le 1er. des chemins creux, qu' elles forment. Plusieurs Auteurs ignôrent ou méprisent cette distinction, et emploient indiféremment l' un ou l' aûtre de ces deux mots. Il me parait pourtant qu' il serait bon de les distinguer. L' Acad. met ravine dans les deux sens. Elle dit de ravin, qu' on apelle aussi de ce nom les chemins creux, quoique ce ne soit pas les ravines, qui les aient creusés.

RAVIR


RAVIR, v. act. 1°. Enlever de force. "Ravir une femme, une fille, des enfans. = Fig. Ravir l' honneur à une fille: à un général la gloire d' une action. "On m' a ravi mon plus cher espoir. Racine. = 2°. Au figuré, charmer, exciter, l' admiration, la joie etc. "Ce Prédicateur, cet Avocat a ravi tout son auditoire.
   Rem. Être ravi pour être aise se dit par exagération dans le style familier. Il régit de devant les noms et les verbes: je suis ravi de ce succès, de pouvoir vous rendre ce service: ou que avec le subjonctif: "Je suis ravi que mes vers ne vous aient pas déplu.
   Ma foi! Je suis ravi que nous logions ensemble.
       Dest. Le Glorieux.
* Leibnitz, qui, quoique allemand, écrivait souvent en Français, écrit à M. l' Ab. Conti: "Je suis ravi que vous êtes en Angleterre. Il falait, que vous soyiez, etc. Remarquez qu' on emploie l' infinitif, quand le verbe régi se raporte au sujet de la phrâse; et que, avec le subjonctif, quand il ne s' y raporte pas: je suis ravi de pouvoir, et que vous puissiez, etc. Il régit aussi de ce que avec l' indicatif. L' Ab. de Mongault met les deux régimes dans la même phrâse. "Je suis ravi que vous conoissiez de quelle manière je pense sur votre sujet, et je le suis encore davantage de ce que vous avez fait paroître tant de modération. Let. de Cic. à Atticus. = Être ravi signifie aussi, être charmé, transporté. "Être ravi d' admiration, d' étonement. BOUHOURS admet ravir en admiration, et condamne être ravi en admiration; l' Acad. le dit sans restriction. L. T. Tout ce qu' on peut dire, c' est que ravi d' admiration est plus sûr et plus autorisé. = À~ ravir, adv. Parfaitement. "Il écrit, il parle, il chante à ravir. Il n' est que du stile familier.

RAVISER


RAVISER (se) v. réc. [Ravizé: 3e é fer.] Changer d' avis. Il s' emploie sans régime. "Il vouloit y aler lui-même, mais il s' est ravisé. = Proverbialement: il s' est ravisé en mangeant sa soupe: il s' est dédit de ce qu' il avoit promis. Trévoux.

RAVISSANT


RAVISSANT, ANTE, adj. RAVISSEMENT, s. m. RAVISSEUR, s. m. [Ravi-san, sante, ceman, ceur: 3e lon. aux 2 1ers, e muet au 3e] Ravissant a les deux significations de ravir. _ Qui ravit par force. Il ne se dit que des bêtes féroces: loup ravissant, bête ravissante. = Merveilleux, qui charme l' esprit et les sens. "Discours ravissant, beauté ravissante. Il ne se dit guère que des chôses, qui ont raport à la persone: on ne le dit point, ce même semble, des persones mêmes. L' Acad. dit (st. famil.) C' est un homme ravissant, d' une humeur ravissante. Cela me parait sentir un peu trop le jargon précieux; et homme ravissant, apartient à mon avis, au même style que, homme délicieux.
   RAVISSEMENT ne se dit au propre et pour enlèvement que dans ces phrâses consacrées par un ancien usage: le ravissement d' Hélène, de Proserpine. = Son emploi ordinaire est de signifier, l' état de l' esprit transporté de joie, d' admiration. "Etre dans le ravissement, dans ou en des ravissemens incroyables, inéfables. "Ravissement de joie, d' admiration.
   RAVISSEUR, au contraire, ne se dit qu' au propre. Celui, qui ravit, qui enlève avec violence. Il se dit sur-tout de celui, qui enlève une femme, une fille. "On poursuivit le ravisseur. "Les ravisseurs sont punis de mort. = Dans cette expression, le ravisseur du bien d' autrui, il se dit de celui qui s' aproprie le bien d' autrui, de quelque manière que ce soit, par violence ou par artifice.

RAVITâILLEMENT


RAVITâILLEMENT, s. m. RAVITâILLER, v. act. [Ravitâ-glie-man, glié: 3e lon. mouillez les ll: 4e e muet au 1er, é fer. au 2d. Quelques uns disent mal-à-propôs ravituâiller.] Ils expriment l' action de remettre des vivres et des munitions dans une place. "On tenta vainement le ravitâillement de cette place: mais on vint à bout de ravitâiller l' autre.

RAVIVER


RAVIVER, v. act. Rendre plus vif. On le dit du feu, des esprits, d' un tableau, des couleurs, de la dorûre, d' une plaie. "Raviver le feu, les esprits, etc. = Au figuré, faire revivre. Il est plus énergique qu' usité. Il serait utile qu' on en fit un plus fréquent usage. "On ravive toujours des calomnies anciènes cent fois réfutées. Linguet. _ L' Acad. ne met pas d' exemple de raviver, employé au figuré.

RAVOIR


RAVOIR, v. act. [Ra-voar.] Il n' est d' usage qu' à l' infinitif: je me raurai, je le raurai, comme on le dit en certaines Provinces, est un barbarisme. = Avoir de nouveau. "Je veux tâcher de le ravoir. = Retirer des mains de quelqu' un. "Il plaide pour ravoir son bien. = Se ravoir est du style familier. Reprendre ses forces. "Il comence à se ravoir.
   Allons, Monsieur, tâchez un peu de vous ravoir.       Rousseau.

RAûQUE


RAûQUE, adj. [Rôke: 1re lon. 2e e muet.] Rude et comme enroué, en parlant du son de la voix. "Il a une grande voix, mais c' est une voix raûque, le son en est raûque: il a quelque chôse de raûque dans sa voix, dit l' Acad. Je crois que c' est une faûte d' impression et qu' il faut dire, dans la voix; car il a, détermine le sens et désigne assez que c' est de sa voix qu' il s' agit, et non pas de la voix d' un aûtre. C' est comme ceux, qui disent j' ai mal à mon pied, il garde son lit, au lieu de dire, j' ai mal au pied, il garde le lit.

RAYER


RAYER, v. act. RAYûRE, s. f. [Ré-ié, iû-re: 1re é fer. 2e é fer. au 1er, lon. au 2d, dont la 3e e muet.] Rayer, c' est 1°. faire des raies. "Rayer la vaisselle en la nétoyant, une glace en la polissant. "Vaisselle rayée, diamant rayé. = 2°. Éfacer, raturer. Voy. Biffer. "Il faut rayer cet article. = On dit, proverbialement, rayez cela de vos papiers, ou de dessus vos registres; ne comptez pas là-dessus.
   RAYÉ, ÉE, adj. Qui a des raies. Drap, satin, tafetas rayé, étofe rayée, arquebûse rayée, dont le canon a de petites canelûres en dedans.
   RAYûRE, se dit dans le sens de l' adjectif. Manière, dont une étofe est rayée. "La rayûre de cette étofe est agréable. _ On dit aussi: la rayûre d' une arquebûse.

RAYON


RAYON, s. m. RAYONANT, ANTE, adj. RAYONEMENT, s. m. RAYONER, v. n. [Ré--ion, io-nan, nante, neman, né: 1re é fer. 3e lon. au 2d et au 3e, e muet au 4e, é fer. au dern.] Rayon, est 1°. trait de lumière. On ne le dit guère que du soleil. "Le soleil darde ses rayons. = Fig. "Il y a dans l' homme un rayon de la divinité. = Il ne faut qu' un rayon de la grâce pour l' éclairer.
   Dans un nuage épais le Seigneur renfermé,
   Fit luire aux yeux mortels, un rayon de sa gloire.       Athalie.
_ 2°. En Géométrie, le demi-diamètre d' un cercle. = 3°. Rais qui vont du moyeu de la roûe jusqu' aux jantes. = 4°. Le sillon qu' on trace en labourant. = 5°. Les tablettes d' une Bibliothèque: "Ce livre doit être indispensablement placé sur un rayon de votre Bibliothèque. Ann. Litt. "Il aperçut des rayons chargés de livres Ânglais. Anon. L' Acad. ne le met que comme un mot de Marchands, qui donent ce nom aux séparations qui sont dans les armoires, et dans lesquelles ils arrangent les diférentes espèces de marchandises. = 6°. Rayon de miel, morceau de gâteau de cire, que font les abeilles.
   Les trois aûtres mots n' ont raport qu' au 1er sens de rayon. _ Rayoner, jeter des rayons. Rayonant, qui rayone. Rayonement, action de rayoner. "Le soleil commençait à rayoner sur les cimes des montagnes. "Ce saint lui aparut tout rayonant de lumière. "Le rayonement des astres. = Le substantif ne se dit qu' au propre, et il est peu usité. Le verbe et l' adjectif s' emploient au figuré. "Il crut devoir doner la vie de ce Pontife: ce~ sujet rayona à son imagination. Anon. "Son visage devint tout-à-coup rayonant de joie. Marm. "Quand le grand Condé, rayonant de la gloire d' un nouveau succès parut à l' opéra. Linguet. "De là les erreurs et les schismes; de là, la chute de ces génies rayonans de lumière, qu' on vit, comme le premier des Anges, précipités du haut des cieux. l' Ab. Du-Serre-Figon, Panég. de ste Thérèse. "La serénité, la joie, peintes, rayonantes sur ces visages pâles et défigurés par les jeûne. Id. Ibid.

RAYûRE


RAYûRE, Voy. Rayer.

RE


RE ou , particule, qui ne signifie rien par elle-même, mais qui entre dans la composition de plusieurs mots. Elle signifie ordinairement réduplication comme dans recomencer, rebatre, reblanchir, etc. Quelquefois elle ne fait que rendre le sens plus fort, comme dans reluire, etc. D' aûtres fois, elle fait partie d' un mot, qui sans elle ne signifierait rien, comme dans rebeller, répondre, etc. = 1°. Quand cette particule est devant une consone, elle conserve l' e muet ou fermé, rebondir, reboucher, récalcitrer, révision, etc. Mais devant une voyèle, ordinairement elle s' élide, comme, rabatre, ramâsser, etc. Quelquefois aussi, elle ne s' élide point, comme dans réagraver, réhabiliter. Il y a enfin des mots, qui se disent des deux façons, comme r' imprimer, ou réimprimer, r' assiéger, ou réassiéger: la 2de manière est la meilleure. = 2°. L' e de re est tantôt muet, tantôt fermé. La seule règle générale, que l' on puisse doner à ce sujet, est que l' e est ordinairement muet dans la syllabe re, quand elle est la première d' un mot, qui signifie réduplication, ou redoublement d' action, comme dans redire, refaire, etc. c. à. d. dire, faire une seconde fois ou plusieurs fois. Il est même muet, quoique suivi de deux ss, comme dans ressembler, ressentir, etc. excepté dans ressuciter, ou il et fermé. = Il y a pourtant deux ocasions, où la syllabe re, quoique préposition réduplicative se prononce avec l' é fer. et c' est premièrement quand elle est ajoutée à un mot qui comence par un é fermé, ou par une aûtre voyèle, comme dans réchaufer, récrier, réchaper, réagraver, dont les simples sont échaufer, écrier, échaper, agraver. 2ment Quand le mot, auquel elle est ajoutée ne signifierait rien tout seul, comme dans récidiver, récoler, rédimer; car on ne dirait par diver, dimer, coler, en ce sens. Excepté en réconfronter et réformer, dont l' é est fermé, quoiqu' on dise confronter, et former.
   Après tout, ces règles sont sujètes à tant d' exceptions, qu' il faut, sur cet article, uniquement consulter l' usage.
   3°. Devant les verbes qui comencent par une s, on ne doit redoubler cette consone que dans resserrer, ressentir, ressuyer, ressouvenir, ressortir à (être du ressort de) ressusciter. Dans les autres on ne met qu' une s: resacrer, resaigner, resaisir, resauter, resortir, (sortit de nouveau).
   Rem. L' Acad. avertit qu' elle n' a pas mis dans son Dictionaire tous les mots où cette particule est purement réduplicative; et qu' elle n' a mis que ceux dont la conaissance est la plus nécessaire. Mais alors on ne peut distinguer ceux de ces mots qui ont été admis par l' usage, de ceux que l' on forge tous les jours, et quelquefois peu heureusement. Notre plan exigeait que nous les missions tous, autant qu' il était possible; et nous l' avons fait.

RÉACTION


RÉACTION. s. fém. RÉAGIR, v. neut.[Ré-ak-cion, en vers, ci-on, ré-agi. = L' Acad. ne met que le subst.] Ils expriment la résistance du corps frapé à l' action du corps qui le frape. "La réaction est toujours égale à l' action. "Le corps frapé réagit contre celui qui le frape. = Ces mots, dabord employés en Physique seulement, sont devenus à la mode, et sont employés dans des écrits sur toutes sorte de matières. La plupart des Écrits modernes ne sont remplis que de sommes, de masse, de calculs, de combinaisons, et de réactions. ""La Pologne a souvent éprouvé les pertes qu' elle essuye aujourd' hui, et autant de fois elle a recouvré tout, en réagissant avec courage contre la violence étrangère. Anon.

RÉAGRâVE


RÉAGRâVE, s. m. RÉAGRAVER, v. act. [1re é fer. 3e lon. au 1er; 4e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Ils se disent du dernier monitoire que l' on publie aprês trois monitions et aprês l' agrâve.

RÉAJOURNEMENT


RÉAJOURNEMENT, s. m. RÉAJOURNER, v. act. [Ré-a-jour-neman, : 1re é fer. 4e e muet au 1er, é fer. au second.] Ajournement réitéré. _ Ajourner une seconde fois.

RÉAL


RÉAL, ALE, adj. et subst. [1re é fer.] Comme adjectif, il ne se dit que de la principale des Galères de France. "La Galère réale, ou, la réale. Pavillon, Patron, Médecin réal. = Réal, s. m. ou Réale, s. f. Pièce de monaie, qui a cours en Espagne. "Cent réaux, mille réales.

RÉALISATION


RÉALISATION, s. fém. RÉALISER, v. act. RÉALITÉ, s. fém. [Ré-aliza-cion, lizé, lité: 1re é fer. dern. é aussi fermé aux deux derniers.] "Réalité, existence éfective. "La réalité d' un paiement. "La réalité du Corps de N. S. dans le Saint Sacrement, c. à. d. le dogme de la présence réelle, etc. On dit, absolument, croire la réalité. = Il est oposé à fiction. "Ce n' est pas une fiction, c' est une réalité. = Plur. Chôses réelles. "Ce ne sont pas des chôses en l' air, des chimères qu' on vous ofre, ce sont des réalités. = Réaliser, rendre réel et éfectif. Réalisation, action de réaliser. "Réalisez vos promesses. Réaliser des ofres: la réalisation de ses ofres. = Le substantif ne se dit guère qu' au Palais. = Réaliser, éfectuer, exécuter, (synon.) Le premier signifie acomplir ce que des aparences ont doné lieu d' espérer: éfectuer, c' est acomplir ce que des promesses formelles ont~ doné droit d' atendre: exécuter, c' est acomplir une chôse conformément au plan que l' on s' est formé auparavant. Ainsi réaliser a raport aux aparences, éfectuer à quelque engagement, exécuter à un dessein. BEAUZ. Synon. "Réaliser des espérances, éfectuer des promesses, exécuter un dessein. = L' Acad. dit aussi réaliser des promesses, des ofres; mais pour le premier, quoiqu' on puisse le dire, il est moins propre qu' éfectuer; et pour le second, c' est une expression usitée au Palais.

RÉAPOSER


RÉAPOSER, RÉASSIGNER, RÉATELER, v. act. Aposer, assigner, ateler de nouveau. Voy. les simples, APOSER, etc.

RÉASSIGNATION


RÉASSIGNATION, s. fém. Assignation réitérée.

RÉATU


RÉATU (IN), adv. expression empruntée du latin. Être in réatu, acusé et prévenu d' un crime.

REBAILLER


REBAILLER, v. act. Comme on disait anciènement bailler pour doner, on disait aussi rebailler pour redoner.
   Rebailler aux muets la parole perdue.
       Malherbe.

RÉBARBATIF


RÉBARBATIF, IVE, adj. [1re é fermé. Trév. ne met point d' accent sur l' e; l' Acad. le Rich. Port. et le Traité d' Ortogr. y mettent l' accent aigu.] Rude et rebutant. "Visage rébarbatif; mine, humeur rébarbative. St. famil. = * Quelques-uns disent rebarbaratif: c' est un grossier barbarisme. Danet le met.

REBâTER


REBâTER, v. act. [1re e muet.] Bâter de nouveau.

REBâTIR


REBâTIR, v. act. *REBâTISSE, s. fém. [1re e muet. = Le verbe est reçu; le substantif ne l' est pas.] Bâtir de nouveau. "Les Juifs rebâtirent le temple de Jérusalem. _ "Il leur dona ordre de contribuer à la rebatisse d' un Miao (Temple d' idoles). Let. Édif. = On dit, reconstruction; et rabâtisse est un barbarisme.

REBATTRE


REBATRE, ou REBATRE, v. act. [1re et dern. e muet.] Dans le propre, il est peu usité. Batre de nouveau et en réitérant. "Il l' a batu et rebatu. = On dit rebatre (refaire) un matelâs. = Au figuré, répéter inutilement et d' une manière ennuyeuse. "Il rebat sans cesse les mêmes chôses; et neutralement: il ne fait que rebatre. On sous-entend ce qu' il a dit plusieurs fois. "C' est une matière rebatûe. BOSS. "Un discours, un conte rebatu; une phrâse, une pensée rebatûe. "Des pensées mille fois rebatûes, mais rajeunies, ou par un tour épigramatique et de mauvais goût, fort à la mode aujourd' hui, ou par un ton d' audace bien propre à séduire les simples. Palissot.

REBELLE


REBELLE, adj. SE REBELLER, v. réc. REBELLION, s. f. [L' usage est partagé sur la première syllabe re: les uns n' y mettent point d' accent, les autres écrivent avec l' accent aigu, rébelle, etc. D' autres enfin ne le mettent point à l' adjectif et le mettent au verbe et au substantif, comme Trév. par ex. Il semble que l' analogie exige l' accent; ces mots n' étant pas réduplicatifs; mais l' usage le plus autorisé ne permet pas de le mettre; l' e est muet. Rebèle, se rebéler, rebélion: 2e è moy. au 1er, é fer. au 2d et au 3e. = Quelques Auteurs, déjà un peu anciens, ont écrit au masculin, rebel.] Rebelle, qui se révolte. Il s' emploie, ou sans régime: esprit rebelle; et substantivement: un rebelle, les rebelles; ou avec le datif (la prép. à) rebelle au Roi, à ses supérieurs, à la Justice, aux volontés du Prince. Dans le Journ. de Mons. on lui fait régir à devant l' infinitif. "Il a cru qu' il falloit forcer les suffrages du Public, rebelle à l' admirer. _ Ce régime est une nouveauté. = Figurément, il se dit des chôses. Qui ne cède point: fièvre, humeur, maladie, rebelle aux remèdes.
   Rem. Rebelle, substantif, s' emploie sans régime; adjectif, il régit le datif (la prép. à.) Maimbourg fait toujours régir au substantif le génitif (la prép. de.) "Les Visconti et les aûtres rébelles de l' Église: c' est une double faûte.
   SE REBELLER, se révolter. Il est ordinairement suivi de la préposition contre. "Il s' est rebellé contre son Souverain. Et fig. Les sens, les passions se rebellent contre la raison. On l' emploie quelquefois sans régime. "Plusieurs villes se rebellèrent. = Il est moins usité que se révolter, mais il parait plus énergique: et c' est un mot qu' il ne faut pas laisser perdre. Nous avons trop peu de synonymes; il ne faut pas nous priver de ceux qui nous restent. = Se révolter est de tous les styles; se rebeller n' est, ce me semble, que du style soutenu, et de la poésie.
   Si contre cet arrêt le siècle se rebelle,
   À~ la postérité dabord il en apelle.
       Boil.
REBELLION, révolte, soulèvement. Dompter la rebellion. _ Figurément, la rebellion des sens contre la raison. Rebellion, Révolte (synon.) Le premier marque la désobéissance et le soulèvement; le 2d, la défection et la perfidie. Le rebelle s' élève contre l' autorité qui le presse: le révolté s' est tourné contre la société à laquelle il étoit voué... La rebellion secoue le joug; la révolte l' a brisé. Extrait des Synon. Fr. de M. l' Abé Roubaud.

REBÉNIR


REBÉNIR, REBLANCHIR, v. act. [1re e muet.] Bénir, Blanchir de nouveau.

REBÉQUER


REBÉQUER, (SE) v. réc. [Rebéké; un e muet et deux é fer.] Répondre avec fierté et mutinerie à une persone à qui l' on doit du respect. "Il s' est rebéqué contre son maître. = Richelet le fait neutre. "Comment! vous osez rebéquer! "Elle lui a rebéqué comme il faut. = On ne croit pas qu' il soit vrai que ce verbe ne se dise qu' avec le pronom personel: on doute même si rebéquer à son père, n' est pas plus usité que se rebéquer contre son père. Trév. J' aimerais mieux celui-là. L' Acad. ne le met que réciproque. _ Il n' est que du st. fam.

REBONDI


REBONDI, IE, adj. REBONDIR, v. n. REBONDISSEMENT, s. m. [Rebondi, dî-e, di, diceman; 1re e muet, 2e lon. 3e lon. au 2d, 4e e muet au dern.] Rebondi ne se dit qu' au figuré (st. fam.) de certaines parties du corps, arrondies par embonpoint. "Des joûes rebondies. = L' Académie le dit des persones mêmes: "Cette femme est grâsse et rebondie.
   Rebondir et Rebondissement se disent de l' action d' un corps qui fait un ou plusieurs bonds. "On vit tomber le boulet; et, un moment aprês, on le vit rebondir. "Le rebondissement d' une balle, d' un boulet.

REBORD


REBORD, s. m. [Rebor; 1re e muet: le d ne se prononce pas.] 1°. Bord élevé et ajouté: le rebord d' une table. = 2°. Bord replié: le rebord d' un manteau. = 3°. Bord en saillie: le rebord d' une cheminée.

REBORDER


REBORDER, v. act. [1re e muet, dern. é fer.] Mettre un nouveau bord. "Reborder une jupe, une robe.

REBOTTER


REBOTTER, ou REBOTER, v. actif. [1re e muet, dern. é fer.] Boter de nouveau. Remettre des botes qu' on vient de quiter.

REBOUCHER


REBOUCHER, v. act. [re-bou-ché, 1re e muet, dern. é fer.] 1°. Act. Boucher de nouveau. Boucher une seconde fois. "Reboucher un trou, une bouteille. = 2°. V. réc. Se reboucher, se fausser, se replier. "La pointe de cette épée ne vaut rien: elle se rebouche. "L' épée se reboucha contre le bouclier.

REBOURS


REBOURS, adj. subst. et adverbe. [Re--bour, et devant une voyèle rebourz: 1re e muet.] L' adj. devrait avoir au fém. rebourse, mais il n' est pas usité. Trév. Il est dans le Dict. de l' Acad. sans aucune note ni de bâs ni de vieux. La Monn. Dans la dern. édit. elle avertit qu' il est du style familier. = Revèche, peu traitable. "Il est si rebours, que etc. "Esprit rebours. = S. m. Le contrepoil. "Prendre le rebours d' une étofe, pour la nétoyer. _ Figurément (st. fam.) le contrepried, le contraire de.... "Vous vous trompez; c' est le rebours de ce que vous dites. "Il faut prendre le rebours de ce qu' il dit. Et plus familièrement encôre: tout ce qu' il fait est le rebours du bien. = À~ rebours, au rebours, adv. À~ contrepoil, à contre sens. Le 1er s' emploie sans régime; vergeter du drap à rebours, à rebrousse poil. Et figurément, il prend, il fait tout à rebours. On dit aussi à rebours de poil; et alors il a un régime. Le 2d se dit avec la prép. de. "Il fait tout au rebours de ce qu' on lui dit. _ Il s' emploie plus ordinairement au fig., et quelquefois sans régime. Rousseau dit de ses ouvrages et de ceux de ses Censeurs.
   Vous vous tuez à chercher dans les nôtres
   De quoi blâmer, et le trouvez fort bien:
   Nous, au rebours, nous cherchons dans les vôtres
   De quoi louer, et nous n' y trouvons rien.

REBOUTONER


REBOUTONER, v. a. Boutoner de nouveau.

REBRASSER


*REBRASSER, v. act. Retrousser. "Rebrasser ses manches, son chapeau. Il est vieux.

REBRIDER


REBRIDER, v. act. Brider de nouveau.

REBRODER


REBRODER, v. a. [1re e muet, dern. é fer.] Broder sur ce qui est déjà brodé. "Rebroder du point de Venise. = Mde. de Sév. l' emploie au fig. "Je ne vois, dans cette confusion de sentimens, que beaucoup d' amitié, sur un fond d' inclination rebrodé de passion. Cela est du style badin ou critique.

REBROUILLER


REBROUILLER, v. a. Brouiller de nouveau.

REBROUSSER


REBROUSSER, v. a. [Re-brou-cé, 1re e muet, 3e é fer.] Au prop. relever dans un sens contraire, en parlant des cheveux ou du poil. "Rebrousser le poil, les cheveux, la moustache. = Au figuré, retourner subitement en arrière. "Il reçut une nouvelle, qui le fit rebrousser. "Il rebroussa chemin (sans article ni pronom), et non pas, il rebroussa le chemin ou son chemin. = On dit énergiquement, les rivières rebrousseroient contre ou vers leur source, avant que, etc. Un Poète le fait actif en ce sens.
   Les ans, non plus que les rivières,
   Ne rebroussent jamais leur cours.
       Rec. de Poés.
L' usage n' admet pas cet emploi de ce verbe.
À~ rebrousse-poil, adv. À~ rebours, à contreoil. "Nétoyer un chapeau à rebrousse-poil. _ Et figurément, st. fam. À~ contre-sens. Prendre une afaire à rebrousse-poil. _ À~ rebours est d' un plus grand usage; mais à rebrousse-poil a plus d' énergie.

REBUFFADE


REBUFFADE, ou REBUFADE, s. f. REBUT, s. m. REBUTANT, ANTE, adj. REBUTER, v. act. [Dans ces mots, la particule re n' étant pas réduplicative, devrait être accentuée, mais l' usage y veut un e muet.] Rebufade, mauvais acueuil. Recevoir une rebufade. Essuyer, soufrir des rebufades. Il a eu bien des rebufades. On lui fit une facheûse rebufade. St. fam.
   REBUT. Action par laquelle on rebute, on rejète avec dureté, avec rudesse. Il a essuyé beaucoup de rebuts.
   Si je perds de la Cour les brillans avantages,
   Je n' ai point à soufrir mille rebuts cruels.       Mol.
= C' est aussi ce qui a été rebuté. "Ce Marchand n' a plus que du rebut. Marchandise, chôse de rebut. = Il régit quelquefois la prépos. de. "Vous n' aurez que le rebut de tout le monde.
   Le rebut de Madame est une marchandise,
   Dont on auroit grand tort d' être si fort éprise.
       Misant.
  Et ce seroit pour vous un homage trop bâs,
  Que le rebut d' un coeur qui ne vous valoit pas. Ibid.
"C' est l' homme le plus méprisable; c' est le rebut du genre humain. "En se convertissant sur le retour de l' âge, on n' ofre plus à Dieu que le rebut du monde et des passions.
   Et moi, triste rebut de la nature entière,
   La mort est le seul bien que j' ôsois implorer.       Rac.
Rebuter, c' est, 1°. en parlant des persones en régime, rejeter avec dûreté, avec rudesse. "Il vouloit entrer, mais on le rebuta à la porte. "Quand je lui parlai de cette afaire, il me rebuta. On le dit aussi dans ce sens, des chôses qui ont raport à la persone. "Rebuter des propositions, des excuses qu' on nous fait. "Il rebute tout ce qu' on lui propose. = 2°. En parlant des chôses, refuser avec dédain, ou simplement refuser. "il a rebuté ces marchandises, quoique belles et bones. = 3°. Avec les chôses pour sujet, et les persones pour régime, décourager, dégoûter. "La moindre chôses le rebute.
   Mon coeur n' est pas de ceux que le péril rebute.
       Volt. Sémiramis.
Il se rebute aisément. "Il est rebuté des chicanes qu' on lui fait; j' en suis aussi rebuté que lui. _ Par extension, on le dit d' un cheval. "Ne gourmandez pas ce cheval, vous le rebuterez. "Prenez garde qu' il ne se rebute. = 4°. Choquer, déplaire. "Il a un air, une mine qui rebute, des manières, qui rebutent tous ceux qui ont afaire à lui.
   Être rebuté régit de devant les noms et les verbes. "Ils est rebuté de ce mauvais succês. "Les Soldats rebutés de se voir si souvent repoussés. Maimbourg.
   REBUTANT se dit dans les deux derniers sens. _ Qui décourage, qui dégoûte. "Travail, remède rebutant; viande, étude rebutante. _ Choquant, déplaisant. "Homme, air rebutant; mine, physionomie rebutante, etc. Manières rebutantes.

RÉBUS


RÉBUS, s. m. [1re é fer. On prononce l' s finale.] Jeu d' esprit, qui consiste à expliquer quelque chôse par des mots et des figures, prises en un aûtre sens que celui qui leur est naturel. "Les rébus sont de mauvais goût. _ Par extension, on le dit des mauvais jeux de mots: de ce qu' on apèle aujourd' hui des calembourgs, des mauvaises plaisanteries. "Cet homme ne dit que des rébus.

REBUT


REBUT et ses dérivés. Voyez REBUFFADE.

RECACHETER


RECACHETER, v. act. Cacheter une seconde fois, aprês avoir décacheté.

RÉCALCITRANT


RÉCALCITRANT, ANTE, adj. [1re é fer. 4e lon.] Participe du verbe récalcitrer, qui n' est plus en usage. Qui résiste avec humeur et avec opiniâtreté. "Il est récalcitrant à tout ce qu' on lui dit; il est d' humeur récalcitrante. = Ce mot apartient au st. badin ou critique. "Avez-vous donc cru que les... étoient ici moins récalcitrans à l' autorité suprême? Anon.
   Puisqu' aujourd' hui votre humeur pétulante
   Vous rend l' âme aux leçons un peu récalcitrante.
   Je reviendrai demain.
       Regn. le Joueur.

RÉCAPITULATION


RÉCAPITULATION, s. f. RÉCAPITULER, v. act. [Rékapitula-cion, . 1re é fer. dern. é aussi fer. au 2d.] Ils expriment l' action de résumer, de redire somairement ce qu' on a déjà dit. "Récapitulation d' un discours. "Récapituler les principaux points, etc.

RECÉLÉ


RECÉLÉ, s. m. RECÉLER, v. act. RECèLEMENT, s. m. RECÉLEUR, EûSE, s. m. et f. [1re e muet, 2e et 3e é fer. au 1er et au 2d, 3e è moy. au 3e, dont la 4e e muet; la 3e est lon. au dern. , , leman, leur, leû-ze. TRÉV. ne met point d' accent au 2d e; il écrit receler, etc.] Recéler, c' est, 1°. Garder et cacher le vol de quelqu' un: on a pris la femme, qui recélait tout ce que les voleurs dérobaient. = 2°. Doner retraite chez soi aux coupables. "Recéler un larron, un meurtrier. "Elle recéloit les vols et les voleurs. = 3°. Détourner, cacher les éfets d' une succession. "La veuve avoit recélé des éfets considérables. = 4°. Recéler un corps mort, cacher la mort d' un homme, afin de faire valoir la résignation d' un ofice, d' un bénéfice. = 5°. Il se dit figurément, des chôses, et il est du beau style. Renfermer. "La terre recèle en ses entrâilles une infinité de trésors. _ L' Académie a oublié de le mettre en ce sens. = Recèlement et recélé expriment tous deux l' action de recéler; mais le 1er se dit dans le 1er, 2d et 4e sens: le recèlement est aussi punissable que le larcin: le recèlement d' un corps mort: le 2d ne se dit qu' en Pratique, et dans le 3e sens: "On fait informer du recélé. = Recéleur, eûse, celui, celle qui recèle. "S' il n' y avoit point de recéleurs, il n' y auroit point de voleurs. "C' est une recéleûse.

RÉCEMMENT


RÉCEMMENT, adv. RÉCENT, ENTE, adj. [Ré-saman, san, sante; 1re é fer. 2e lon. aux deux dern. = Richelet écrit récenment: c' est qu' il voulait qu' on prononçât ré-san-man. Et l' ortographe et la prononciation sont également mauvaises.] Récent, nouveau, nouvellement fait ou arrivé. "Fait récent. Nouvelle récente. Une plaie encore récente. "Écritûre toute récente. "Cette afaire est encôre toute récente. _ On dit d' une chôse arrivée depuis peu, que la mémoire en est encôre toute récente: et d' une chôse anciène, dont on se souvient três--bien, qu' on en a la mémoire récente. = Récemment, depuis peu. "Cela est arrivé récemment, tout récemment. Fleurs récemment cueuillies.

RECENSEMENT


RECENSEMENT, s. m. RECENSER, v. actif. [Re-sanceman, cé: 1re e muet, 2e lon. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Ce sont termes de Droit. Recensement, est 1°. audition des témoins qui ont révélé, en vertu d' un monitoire. = 2°. Nouvelle vérification de marchandises. = Recenser, faire le recensement.

RÉCENT


RÉCENT. Voy. RÉCEMMENT.

RÉCÉPISSÉ

, s. m. Écrit par lequel on reconait avoir reçu des papiers, etc. Doner un ou son récépissé.

RÉCEPTACLE


RÉCEPTACLE, s. m. Lieu où se rassemblent plusieurs chôses ou persones. Il se prend en mauvaise part. "C' est le réceptacle de toutes les immondices; des gueux, des filous, des voleurs.

RECEPTE


*RECEPTE. Vieux mot. On dit recette. Je ne suis pas étoné de voir cette ortographe dans Abbadie, qui est déjà vieux; mais j' ai été surpris de la trouver dans Rollin. Il y a long-tems qu' on écrit recette. _ Plusieurs, dans les Provinces, écrivent encôre recepte, et quelques-uns même y prononcent le p; ce qui est encôre plus mauvais.

RECETTE


RECETTE, s. f. [Recète, 1re et dern. e muet.] 1°. Ce qui est reçu en argent ou autrement. "La dépense, la mise, excède la recette. Article de recette. Pâsser en recette. = 2°. Action de recouvrer ce qui est dû. "Faire la recette d' une terre. La recette générale d' une ville, d' une élection. "La récette fut simplifiée autant qu' il était possible; et par une économie, qui tient du prodige, il (Colbert) augmenta le revenu du Roi, en diminuant les tailles. Volt. = 3°. Lieu et Bureau où l' on reçoit les deniers. = 4°. Composition de certaines drogues pour guérir un mal. "Enseigner, doner une recette. = C' est aussi l' écrit qui enseigne cette composition.

RECEVABLE


RECEVABLE, adj. RECEVEUR, s. m. RECEVOIR, v. act. RÉCEPTION, s. f. [Re--cevable, veur, voar, récèp-cion; les deux prem. e muet au 3 prem. 1re é fer. 2e è moy. au 4e.] Recevoir, c' est 1°. Accepter ou prendre ce qui est doné, présenté ou ofert, sans qu' il soit dû. "Recevoir des présens, un don, ou quelque chôse en don. = Et neutralement, aimer à recevoir. "Il vaut mieux doner que recevoir. = Recevoir, accepter (syn.) "Nous recevons ce qu' on nous done, ou qu' on nous envoie: nous acceptons ce qu' on nous ofre. "On reçoit les grâces: on accepte les services. Recevoir exclut simplement le refus: accepter semble marquer un consentement plus exprês. "Il faut toujours être reconnoissant des bienfaits qu' on a reçus. Il ne faut jamais rejeter ce qu' on a accepté. Gir. Synon. = 2°. Être payé de ce qui est dû. "Recevoir de l' argent, une rente, un payement, un remboursement. = 3°. Il se dit de ce qu' on nous envoie et qui nous est remis entre les mains. "Recevoir des lettres, un paquet, une requête. = 4°. Comencer d' avoir, de ressentir. "Recevoir des grâces, des bienfaits: recevoir un coup, une blessûre, un grand domage, du chagrin ou du plaisir. = 5°. Il se dit des grâces de Dieu. "Recevoir la foi, le don de la perséverance. "Les Apôtres reçurent le Saint-Esprit: des Sacremens: recevoir le Batême, la confirmation, les Ordres, l' Absolution, la bénédiction nuptiale, etc. Il a reçu tous ses Sacremens, se dit d' un malade à qui l' on a administré le Viatique et l' Extrême-Onction. = 6°. En parlant des persones, acueuillir. "On l' ala recevoir au bas de l' escalier: le Roi l' a três-bien reçu. "J' ai été fort mal reçu. "Il reçoit fort bien son monde. "Les énemis ont été reçus à grands coups de canon. = 7°. En parlant des chôses, agréer, accepter. "Recevoir les ofres, les propositions, les excuses. "Cela a été bien ou mal reçu; aprouvé ou désaprouvé. = 8°. Doner retraite. "Je l' ai reçu chez moi, lorsqu' il était sans azile. "On a fait défenses à qui que ce soit de le recevoir. = 9°. Admettre. Recevoir, ou être reçu dans un corps, dans une compagnie, dans un régiment. = Recevoir un Concile, une Bulle, de nouvelles lois. "C' est un principe généralement reçu. = 10°. Être susceptible de... "La cire reçoit toutes les figûres; et cet homme, toutes les impressions qu' on veut lui doner. = 11°. On dit qu' une proposition reçoit de la dificulté, ou ne reçoit pas de dificulté, pour dire, qu' il y a beaucoup ou qu' il n' y a rien à objecter; et qu' un passage peut recevoir divers sens, diverses interprétations, pour dire, qu' il en est susceptible.
   REM. De Saci emploie recevoir avec un nom sans article. "Ne recevoir consolation d' aucune créature. Cela est contre l' usage actuel. On dit, ne recevoir de consolation, de secours d' aucun endroit. Et sans négative, recevoir de la consolation, du secours, etc. = Recevoir a souvent pour 2d régime l' ablatif. "Il a reçu de grandes grâces du Roi. "Il fut bien reçu de son père.
   RÉCEPTION, action par laquelle on reçoit des lettres, des papiers, des ballots, etc. "La réception d' une lettre, d' un paquet, d' une lettre de change. Acuser la réception d' un paquet, etc. = Acueuil, manière de recevoir les persones. Faire une bone ou une mauvaise réception à quelqu' un. = Action par laquelle on est reçu dans une charge. "Le jour de sa réception au Parlement. "Prendre rang selon l' ordre de sa réception. = Dans les deux prem. acceptions, ce mot a le sens actif; dans la 3e, le sens passif.
   Rem. Les autres dérivés de recevoir, ont le 1er e muet: celui de réception est fermé: telle est la bisarrerie de l' usage.
   RECEVABLE, qui doit être admis, reçu. "Des ofres recevables, ou non recevables. "Aprês l' an, on n' est pas recevable à faire un retrait. Non recevable. Voyez IRRECEVABLE.
   RECEVEUR, qui a charge de faire une recette. "Le receveur d' une terre, des tâilles, des amendes. Receveur général, provincial, particulier, etc. Receveur du Clergé. = La femme d' un Receveur s' apèle en certains endroits, Mde la Receveûse.
   REÇU, s. m. Quitance sous seing privé, ainsi apelée parce qu' elle comence par ces mots: j' ai reçu de Mr. un tel, etc. "Je vous en donerai un reçu: j' en ai votre reçu.

RÉCHAFAUDER


RÉCHAFAUDER, v. a. [1re et dern. é fer.] Échafauder une seconde fois. Il est peu usité.

RECHANGE


RECHANGE, s. m. [1re et dern. e muet: 2e lon.] En termes de Banque, droit d' un nouveau change, qu' on fait payer par celui, qui tire une lettre de change, lorsqu' elle a été protestée. "Payer le change et le rechange. = Hors de là, il n' a d' usage qu' avec la prép. de. "Des mâts, des voiles, des cordages de rechange, qu' on réserve pour s' en servir au besoin et pour remplacer ceux, qui seront hors de service.

RECHANGER


RECHANGER, v. n. et act. [1re e muet, 2e lon. 3e é fer.] Changer une autre fois; plusieurs fois. "Il change et rechange d' avis à tout moment. "Il n' a pas une chemise, un habit à rechanger.

RECHANTER


RECHANTER, v. act. Redire souvent la même chanson. "Il a chanté et rechanté dix fois le même couplet.

RÉCHAPER


RÉCHAPER, v. n. [1re et dern. é fer.] Se tirer d' un péril, dit l' Acad. Quelques Gramairiens et faiseurs d' observations pensent pourtant qu' on dit réchaper d' une maladie, de la prison, et échaper d' un danger. Voy. Échaper. = Réchapé. s. m. "C' est un réchapé de la potence: il a risqué ou il a mérité d' être pendu. Il est famil. _ Il y a des Auteurs, qui font réchaper act. "Ce Médecin l' a réchapé d' une grande maladie. "Je t' ai réchapé des galères, dit Voltaire, j' ai payé ta rançon. _ L' Acad. ne met ce verbe~ que~ neutre.

RECHARGE


RECHARGE, s. f. [1re et dern. e muet.] Il se dit adverbialement, venir à la recharge, en recharge. Le 1er se dit des persones, et le 2d. des chôses. "Il est venu à la recharge, ou, il est revenu à la charge. Voy. CHARGE, Rem. 3e alinéa. "L' afaire de Sirven survint en recharge de celle de Calas. Linguet. c. à. d. vint fortifier les impressions que celle-ci avait déjà faites.

RECHARGER


RECHARGER, v. act. [1re e muet, dern. é fer.] 1°. Imposer de nouveau quelque charge, quelque fardeau. "On avait déchargé les mulets: il falut les recharger. = 2°.. Charger de nouveau une arme à feu. "Recharger le fusil, le canon; et neutralement, recharger, sans régime. = 3°. Faire une nouvelle charge ou ataque. "Après avoir chargé plusieurs fois les énemis, il les rechargea encore, et les mit en déroute. = 4°. Doner un ordre encôre plus pressant. "Je vous avais chargé et rechargé de lui dire que, etc. = 5°. Recharger un aissieu, en fortifier les brâs usés par le frotement.
   Rem. Le P. Charlevoix emploie recharger neutralement dans les sens de revenir à la charge. "Ils rechargèrent, c. à. d. ils firent de nouvelles instances. _ Ce Verbe n' est pas usité en ce sens.

RECHASSER


RECHASSER, v. act. [Rechacé: 1re e muet, 3e é fer.] Repousser d' un lieu dans un aûtre. "Rechassez ces bêtes dans l' étable. "Le vent nous rechassa dans le port. "Ce Prince rechassa les Barbâres; et la terreur de son nom les contint. = V. n. Chasser de nouveau. "C' est un bois, où j' ai chassé et rechassé.

RÉCHAUD


RÉCHAUD, s. m. [Récho: 1re é fer. 2e lon. = Richelet écrit réchaut.] Ustensile, dans lequel on met du charbon, pour chaufer les viandes et pour d' aûtres usages.

RÉCHAûFEMENT


RÉCHAûFEMENT, s. m. RÉCHAUFER, v. act., RÉCHAUFOIR, s. m. [Réchôfeman, , foar: 1re é fer. 2e lon. au 1er, dout. aux 2 aûtres; 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Réchaufer, chaufer, échaufer ce qui était refroidi. "Faites réchaufer ce potage. "Il s' est réchaufé à courir. Fig. "Ils s' étaient fort refroidis; mais cet évènement les a réchaufés. = V. réc. "Le tems se réchaufe. "Son zèle s' est réchaufé. = Se ranimer, au figuré, est plus usité, mais se réchaufer est plus énergique.
   RÉCHAUFÉ, ÉE, adj. Bouillon réchaufé, viande réchaufée se dit des contes, qui ont déjà été dits plusieurs fois. Rich. = S. m. Il se dit au propre et au figuré (St. famil.) "Ce Diner n' est que du réchaufé. "Cet ouvrage n' est qu' un rechaufé; du réchaufé.
   Rem. Plusieurs veulent qu' on distingue rechaufer composé de chaufer; "Rechaufer le four, le chaufer de nouveau; et réchaufer, composé d' échaufer, échaufer de nouveau; se réchaufer en jouant à la paûme. Cette distinction parait juste. L' Acad. ne l' a point aprouvée, et elle dit réchaufer dans les deux sens.
   RÉCHAûFEMENT ne se dit qu' en terme de jardinage, du fumier neuf, dont on se sert pour réchaufer les couches refroidies.
   RÉCHAUFOIR, fourneau, qui sert à réchaufer les plats qu' on aporte d' une cuisine éloignée.

RECHAUSSER


RECHAUSSER, v. act. [1re e muet, dern. é fer.] En parlant des persones, les chausser de nouveau, après qu' elles se sont déchaussées. "Il faut continuellement rechausser cet enfant. "En parlant des arbres, remettre de la terre au pied. "Il faut rechausser ces poiriers, ces oliviers.

RECHERCHABLE


RECHERCHABLE, adj. RECHERCHE, s. f. RECHERCHER, v. act. [1re e muet, 2e ê ouv. 3e dout. au 1er, e muet, au 2d, é fer. au 3e.] Rechercher, c' est 1°. chercher de nouveau. "Je l' ai cherché et recherché partout. = 2°. Chercher curieûsement. "Rechercher ce qu' on peut dire sur un sujet. Rechercher les secrêts de la Natûre. = 3°. Faire enquête de la vie et des actions de. "On recherche sa vie. "Ne faites pas cela: vous seriez recherché. = Punir:
   Il ne recherche point, aveugle en sa colère,
   Sur le fils, qui le craint, l' impiété du père,
       Athalie.
4°. Tâcher d' obtenir. "Rechercher la faveur, l' amitié, les bones grâces, l' alliance de quelqu' un. Rechercher une persone de paix, Vaug. d' acord. d' Abl. = 5°. En parlant des ouvrages de Peintûre, Gravûre, Sculptûre, en réparer avec soin les moindres défauts; polir, perfectioner. "Rechercher une figûre de plâtre, de bronze; des ornemens de menuiserie. "Voilà dans ce tableau, dans cette estampe, des endroits, qui n' ont pas été recherchés. = On le dit, au participe, par extension et par similitude, des ouvrages d' esprit: "On troûve dans ce livre des chôses bien recherchées, des passages bien recherchés, des questions curieuses, des citations peu comunes. = Le plus souvent, il exprime un blâme, et il est oposé à naturel; pensée, expression recherchée; trop recherchée; "Je n' aime pas un exorde si recherché. BOUH. Voltaire l' a employé substantivement. Il dit que Bouhours a apris aux jeunes gens à éviter l' enflure, l' obscurité, le recherché et le faux. Et de même; ornemens trop recherchés, ajustement recherché, parûre recherchée. "Recherché dans son ajustement. La Bruy.
   6°. Rechercher une persone, s' empresser de le voir, de l' entendre, le courir.
   On recherche un esprit, dont on hait le talent.
   On aplaudit aux traits du méchant qu' on abhorre.
       Le Méchant.
"Il est recherché, couru, fété.
  RECHERCHE a tous les sens de son verbe. = Action de rechercher. Perquisition; "Recherche exacte, la recherche de la vérité. _ Il se dit plus au figuré qu' au propre. = Chôse curieusement recherchée. "Ce livre est plein de belles recherches. = Examen, perquisition de la vie et des actions de quelqu' un: Faire la recherche de la vie d' un homme. "La recherche des Financiers, des faux Nobles. = Poursuite que l' on fait pour avoir une fille en mariage. = Soin avec lequel un Artiste finit son ouvrage.
   *RECHERCHABLE, qui peut être recherché (dans le 3e sens). "Le Marquis de... reste recherchable des malversations envers la Courone, ou des exactions envers les particuliers. Du Pan. Et le mot et le régime sont des néologismes, sur lesquels il faut atendre les décisions de l' Usage.
   Rem. 1°. Recherche et rechercher ne se disent que dans le figuré. On ne dit pas la recherche d' une chose égarée, d' une montre, etc. ni rechercher des perles, rechercher les trésors cachés dans les entrâilles de la terre: mais on dit, la recherche de la vérité, rechercher les secrets de la natûre. = Rechercher, ne se dit dans le propre, que quand il est joint à chercher. "Je l' ai cherché, et recherché. = 2°. Rechercher n' a guère de 2d régime qu' avec acomodement. "On rechercha cet exilé d' acomodement, à quoi il ne voulut pas entendre. P. Rapin. Mais on ne doit pas dire avec un Auteur moderne: je ne rechercherai jamais rien de vous. = 3°. Il ne régit que les noms: pour les verbes, il faut se servir de chercher. "En recherchant à contenter notre vanité. P. Grifet. Dites, en cherchant, etc.

RECHIGNEMENT


RECHIGNEMENT, s. m. Action de rechigner. L' Acad. ne le met pas. = Suivant M. l' Ab. Roubaud, le rechignement est plutôt un acte fait à dessein que le renfrognement. Lorsqu' on fait une chôse à contre-coeur, on réchigne pour manifester sa répugnance: lors même qu' on veut cacher la peine qu' on éprouve, on se renfrogne. _ La vieillesse est assez renfrognée et laide par elle-même, sans être encore rechignée et dégoûtante, selon la pensée de Molière. Extr. des Syon. Fr.

RECHIGNER


RECHIGNER, v. n. [1re e muet: mouillez le g: 3e é fer.] Témoigner par son air ou par quelque grimace, sa mauvaise humeur, sa répugnance. "Qu' avez vous à rechigner: il réchigne toujours: il fait tout en rechignant: visage rechigné; mine rechignée: une petite vieille rechignée. St. famil. et critique.
   Sied-il bien de montrer, un premier jour de noce,
   Un air si rechigné, si sombre et si féroce?
       Rouss.

RECHOIR


RECHOIR, v. n. RECHUTE, s. f. [1re e muet.] Le verbe est vieux: rechoir dans une maladie; y retomber. Le substantif est toujours fort en usage. Nouvelle chute. Mais il ne se dit qu' au figuré, en parlant du retour d' une maladie, ou du retour dans le péché. "La rechute est à craindre. "Les rechutes sont dangereuses dans le moral, comme dans le phisique. "Les fréquentes rechutes mènent à l' endurcissement. = * Sur les bords de la Garone et âilleurs, on dit, tomber en rechute et rechuter: ce sont deux barbarismes. Desgr.

RÉCIDIVE


RÉCIDIVE, s. f. RÉCIDIVER, v. n. [1re é fer. dern. e muet au 1er, é fer. au 2d.] Ils expriment l' action de retomber dans une faûte. "On ne pardone pas les récidives. En câs de récidive. "À~ la première récidive, ou, si vous récidivez, vous serez puni. Prenez garde à la récidive, à récidiver. "Il a récidivé: il sera mulcté.
   Rem. * Le tracucteur de l' Hist. d' Angl. d' Hume, fait de récidivé un adjectif: des perfidies récidivées: des infortunes récidivées. Il erre conséquemment, puisqu' il fait récidiver actif. "C' étoit une coutume des Rois d' Angleterre de récidiver leur couronnement trois fois dans l' année. Dans cette phrâse, outre l' irrégularité du régime, il y a l' impropriété du mot; car récidiver, ne se dit que des faûtes, des crimes; et ainsi il se prend toujours en mauvaise part: récidiver, c' est retomber: qu' est-ce qu' un couronement que l' on retombe. = * On troûve aussi cet avis dans le Journal de Paris. "Les comédiens (François) prennent le parti de récidiver le même avis. _ Si cela était venu de la Province, ou en aurait bien ri dans la Capitale.

RÉCIPÉ


RÉCIPÉ, s. m. Ordonance d' un Médecin pour quelque malade. On lui done ce nom, parce qu' elle comence par ce mot latin, recipe, prenez. "les Apothicaires gardent les récipés des Médecins. Acad.
   ...Ce mal, qui m' afflige au mourir,
   S' obstine aux récipés, et ne se peut guérir.
       Regn.
En bone règle, il ne doit point prendre d' s au pluriel, comme mot étranger. Je dirais: les récipé.

RÉCIPIENDAIRE


RÉCIPIENDAIRE, s. m. [Récipi-andère: 1re é fer. 4e lon. 5e è moy. et long.] Celui, qui se présente pour être reçu dans une compagnie.

RÉCIPIENT


RÉCIPIENT, s. m. [Rècipi-an: 1re é fer.] 1°. Vâse, dont les Chimistes se servent pour recevoir les substances produites par la distillation. = 2°. Le vaisseau, qui sert, dans la machine pneumatique, à renfermer les corps, que l' on veut mettre dans le vide. "Pomper l' air du récipient.

RÉCIPROCITÉ


RÉCIPROCITÉ, s. f. RÉCIPROQUE, adj. et subst. RÉCIPROQUEMENT, adv. *RÉCIPROQUER, v. act. [Réciprocité, ke, keman, ké: 1re é fer. 4e e muet au 2d et au 3e, é fer. au dern.] Réciproque, mutuel. Le 1er se dit proprement de deux; et le 2d de plusieurs. "Le mari et la femme doivent s' aimer d' un amour réciproque; et les chrétiens d' une afection mutuelle. Ce dernier pourrait se dire de deux; mais réciproque ne peut se dire de plusieurs. On dit, don mutuel, en parlant de deux personnes; et réciproque, en cette ocasion, ne serait pas si bien. Vaug. = Voy. Mutuel. Il est substantif, dans cette phrâse: je vous rendrai le réciproque, la pareille.
   La confiance exige et veut du réciproque.       La Ch.
= Réciprocité, état et caractère de ce qui est réciproque. "La réciprocité de l' amitié, des sentimens, des services. = Réciproquement, mutuellement, d' une manière réciproque. "S' aimer réciproquement: s' obliger, se rendre service réciproquement. = La remarque de Vaugelas est aplicable à l' adverbe comme à l' adjectif. = * Réciproquer, rendre la réciproque. C' est un mot de Province. Mde de Sévigné s' en moque, tout en l' employant. "Vous pouvez m' aimer tant qu' il vous plaira; mais je ne puis vous réciproquer _ Le Rich. Port. le met sans remarque: l' Acad. ne le met pas.
   RÉCIPROQUE, Terme de Gramaire. On apèle verbes réciproques, ceux, qui se conjuguent avec le pronom personel me, te, se, nous, vous, etc. "Je me félicite~, il se chaufe; "Je m' ennuye, tu t' ennuyes, il s' ennuye; nous nous ennuyons; vous vous ennuyez; ils s' ennuyent etc.~ = On distingue des verbes réciproques actifs et des passifs. Les premiers expriment une action, qui se pâsse dans le sujet (ou le nom, qui et au nominatif,) les aûtres une action, qui se pâsse hors du sujet. "Je me félicite, il s' est blessé sont des verbes réciproques actifs: "cette histoire se répand dans le ville, est un exemple d' un verbe réciproque passif. On peut dire, dans les premiers, je me félicite moi-même; il s' est blessé lui-même; et pour le second, cette histoire est répandûe, etc. = Il y a des verbes, qui, sans exprimer aucune action, se conjuguent avec le pronom personel, comme, je me repens, je me meurs, je m' aperçois de mon erreur. Ceux-là ne sont réciproques que par l' expression.
   1°. M. de Wailly, d' aprês M. Dangeau, apèle ces verbes pronominaux, et ne conait pour réciproques que ceux qui expriment l' action de plusieurs sujets, qui agissent les uns sur les autres. "Il faut que deux frères s' aiment. Il remarque judicieusement sur ces verbes, que, pour qu' ils soient réciproques, sans équivoque, il est souvent nécessaire d' y ajouter ces mots, l' un l' aûtre, ou réciproquement ou entre, ou mutuellement. Cette phrâse: Cicéron et Antoine se louoient continuellement, peut signifier, ou que Cicéron avait la vanité de se louer, et qu' Antoine avait le même défaut; ou bien, que Cicéron louait Antoine et qu' Antoine louait Cicéron à son tour. Si la vérité permettait d' exprimer ce dernier sens, il faudrait dire, pour ôter l' équivoque; "Antoine et Cicéron se louaient l' un l' aûtre, ou, réciproquement, ou mutuellement, ou bien s' entre-louaient. = 2°. Les verbes réciproques ou pronominaux, prènent l' auxiliaire être dans leurs tems composés. "Je me suis félicité; il s' était répandu un bruit. Je me fusse repenti; tu te serais aperçu etc. * D' Ablancourt dit dans Lucien: ils se les ont partagés, pour se les sont: c' est aparemment une faûte d' impression. On voit la même faûte dans l' Esprit des Croizades, et chez M. Moreau. "Les Turcs se les ayant partagés. "Il se les avoit atachés. C' est une distraction des Auteurs ou des Imprimeurs. Il faut dire, se les étant partagés; il se les était atachés. = 3°. C' est une erreur de croire que tous les verbes actifs puissent être employés comme réciproques en toute ocasion. On dit, par exemple, tempérer la doctrine, pousser les choses à l' excês: mais Bossuet a eu tort de dire; la Théologie se tempéroit: cela se pousse à de tels excês, etc. La raison en est que tels verbes expriment l' action du sujet sur un aûtre, qui ne peuvent exprimer cette même action du sujet sur lui-même; ce qui est le caractère du verbe réciproque proprement dit, du verbe réciproque actif. Que si l' on dit que du moins ces verbes peuvent être réciproques passifs, et qu' ainsi se tempérer, se pousser, veulent dire, être tempéré, être poussé, je repondrai que les réciproques passifs, ne sont tels que par l' usage, et qu' on ne peut doner ce nom et cet éfet qu' à ceux, qui sont usités. Voy. Paroître et suspendre. = 4°. Remarquez aussi que, quand le verbe réciproque est actif, l' on ne doit point unir au pronom personel, qui est son régime, d' aûtres régimes directs. "Pour s' amuser, et les personnes avec lesquelles il étoit en société. Il faut alors répéter le verbe et le pronom, ou mettre un autre verbe; pour s' amuser lui-même et pour amuser les personnes, ou bien, pour s' amuser et divertir les persones, etc. = 5°. Quand il y a deux verbes réciproques de suite, il faut répéter le pronom personel. "Elles se refroidissent et altèrent. Marsol. Dites, et s' altèrent. = 6°. Ces pronoms personels sont, tantôt en régime simple (à l' acusatif.) "Je me suis blessé (moi-même), tantôt en régime composé, (au datif) nous nous sommes prescrits des règles (à nous-mêmes:) cette distinction est nécessaire; et elle décide seule de la déclinaison du Participe. On dira: Ils se sont blessés, avec l' s, marque du pluriel; et ils se sont prescrit, sans s. Voy. PARTICIPE. = Il est des verbes, qui au réciproque sont tantôt actifs, tantôt neutres, et avec lesquels, tantôt on décline le participe, tantôt on ne le décline pas. Le verbe proposer est dans ce câs: on dira d' une femme, en déclinant: elle s' est proposée pour modèle; et elle s' est proposé de partir dès demain. Dans la 1re phrâse, se est en régime simple, elle s' est proposée elle-même. Dans la 2de il est en régime composé: elle s' est proposé à elle-même de partir etc. = 7°. * Autrefois, quand le verbe était à l' infinitif régi par un aûtre verbe, on transportait souvent le pronom personel de cet infinitif régi au verbe régissant. Ex. "Ils faisoient tant de bruit, que ces chefs de bande ne se pouvoient faire entendre. L' Ab. Vertot; au lieu de, ne pouvaient se faire entendre. "Il leur rendit compte de ce qui se venoit de pâsser dans le Sénat, Id. pour de ce qui venoit de se pâsser. Cette construction est en elle-même bizârre et sauvage: mais elle est encôre plus mauvaise, quand l' infinitif est précédé d' une préposition, comme dans le 2d exemple. = Il est des Auteurs, qui font pis encôre, et qui dans cet arrangement peu régulier, changent le v. auxil. avoir au v. auxil. être. "Tous ceux qui s' en étoient pu sauver, revenoient dans les chaloupes. Voy. d' Anson: "Elle ne s' étoit pu résoûdre à y consentir. Mars. Xim. La source de cette faûte, c' est qu' on fait afecter par le pronom se, non l' infinitif, qui est réciproque, mais le v. pouvoir, qui ne l' est pas. Il faut changer la construction, et dire, qui avoient pu s' en sauver: elle n' avoit pu se résoûdre. = * 8°. Plus anciènement encôre, on mettait quelquefois le verbe réciproque devant le nominatif. "Aux jours de Dimanches et de Fêtes se gardera le même ordre qu' aux aûtres jours. S. Fr. de Sales. On dirait aujourd' hui; le même ordre se gardera, ou mieux, on gardera le même ordre, etc.

RÉCIT


RÉCIT, s. m. RÉCITATEUR, s. m RÉCITATIF, s. m. RÉCITATION, s. f. RÉCITER, v. act. [Réci: on ne prononce point le t: récitateur, tatif, ta-cion, : 1re é fer. La dern. du dern. est aussi un é fer.] Récit est, dans son sens ordinaire, la narration d' une chôse, qui s' est pâssée. "Faites-nous le récit de cette aventûre, de ce qui s' est pâssé. Il fait un récit agréablement, etc. "Ce n' est que par des récits que j' ai rempli mon sujèt (le Dissipateur, Dest.) = Faire un grand récit, ou, de grands récits de quelqu' un, en parler fort avantageusement. = En termes de Musique, on apèle récit, ce qui est chanté par une voix seule; et récitatif, une sorte de chant, qui n' est point assujéti rigoureûsement à la mesûre, et qui doit être plutôt débité que chanté.
   RÉCITER, c' est 1°. prononcer quelque discours qu' on sait par coeur. "Réciter sa leçon, des vers, un Sermon. "Ce Prédicateur récite bien. = 2°. Raconter, faire un récit. "Réciter une histoire. "Il nous a récité ses avantûres.
   RÉCITATEUR, qui récite, et récitation, action de réciter, n' ont raport qu' au 1er sens de réciter: "Un bon, ou mauvais récitateur; "Malherbe étoit le plus mauvais récitateur de son tems. Bals. C' est tout l' emploi de ce mot. "Sa récitation en impôse. = Ce mot désigne un ton moins élevé que celui de la déclamation, et plus élevé que le ton de la simple~ lectûre.
   Rem. Réciter, en quelque sens qu' on l' emploie, se dit d' une suite de paroles, de phrâses: * Bossuet le fait synonyme de dire, citer: Il prétend, comme le récite, (le dit, le raporte) M. Simon, etc.

RÉCITEUR


RÉCITEUR, s. m. Faiseur de récits. C' est un mot de Scudéri et de Saint-Evremont. = Il ne peut être bon que pour le style comique ou critique.

RÉCLAMANT


*RÉCLAMANT, ANTE, adj. verbal. RÉCLAMATION, s. f. RÉCLAME, s. m. et f. RÉCLAMER, v. act. et n. [Réklaman, mante, ma-cion, me, mé: 1re é fer. 3e lon. au 1er et au 2d, e muet au pénult. é fer. au dern.] Réclamer est 1° Implorer. "Réclamer le secours de Dieu, l' autorité du Roi, la protection, le témoignage de, etc. Il ne régit ordinairement que les chôses. On dit pourtant, réclamer les Saints, implorer leur secours. = 2°. Revendiquer "Réclamer son domestique, son soldat, son cheval, des meubles qu' on a loués, des pierreries, qu' on a prêtées.
   O Mélanide, hélas! quel moment prenez-vous,
   Pour venir réclamer le coeur de votre époux?
       La Chaussée.
Que n' avez-vous plutôt réclamé votre empire?Id.~
= 3°. Neutre, S' oposer, s' élever contre. "Deuis long-tems, il réclame vainement contre l' opression. = 4°. Neutre aussi, revenir contre quelque acte. "Réclamer contre ses voeux. "Un majeur, qui réclame contre les actes faits en sa minorité. = 5°. Se réclamer de quelqu' un, déclarer qu' on lui apartient par quelque endroit: il s' est réclamé de l' Ambassadeur.
   * Réclamant, qui réclame contre, est un néologisme. M. Linguet l' a employé: "On ordone que le sourd et muet réclamant et la jeune demoiselle y seront conduits. = Un aûtre Auteur l' emploie substantivement au pluriel. "Les réclamans s' absentèrent du conseil ce jour là. Anon.
   RÉCLAMATION, c' est l' action de réclamer, de revendiquer. "On procèdera à la vente des meubles, nonobstant la réclamation des Marchands, qui les ont loués. _ L' Acad. ne l' admet que dans ce sens, et comme un terme de Pratique. Il me semble pourtant usité dans le discours ordinaire, pour exprimer l' action de réclamer contre. (n° 3°.) "On pâssa outre, malgré sa réclamation.
   RÉCLAME, est s. m. quand il signifie le cri ou le signe pour faire revenir l' oiseau au leurre (terme de Fauconerie;) et fém. pour signifier ce mot ou demi-mot, mis au dessous de la dernière ligne d' une feuille d' impression, pour marquer le comencement de la feuille suivante. C' est un terme d' Imprimerie.

RECLOUER


RECLOUER, v. act. [Re-klou-é: 1re e muet, 3e é fer.] Clouer de nouveau.

RECLûRE


RECLûRE, v. act. [1re et dern. e muet, 2e lon. Trév. écrit Reclurre.] Renfermer dans une clôtûre étroite et rigoureûse. "Reclûre un pénitent, un Religieux. "Il est allé se reclûre dans une cellule. = Ce verbe n' a d' usage qu' à l' infinitif et aux tems composés. "On l' a reclus; il s' était reclus. = Reclus, ûse, adj. "Il est, ou il demeure reclus dans sa maison tout le long de l' hiver. "Elle est depuis trois mois reclûse dans sa chambre. = S. m. C' est un reclus. Vivre comme un reclus. "Il y avait aûtrefois des reclûses qui menaient la même vie que les reclus. = Fleuri a dit reclusion pour, demeure d' un Reclus. * On a dit anciènement~ reclusage.

RECOIFER


RECOIFER, v. act. [1re e muet, 3e é fer.] Coifer de nouveau. "Cet enfant est si vif, qu' il faut à tout instant le recoifer.

RECOGNER


RECOGNER, v. act. [1re e muet, 3e é fer.] Repousser. "Les énemis furent bien recognés. "Il a voulu faire cette tentative, mais il a été récogné, on l' a recogné. _ Il est populaire. Acad.

RÉCOGNITION


*RÉCOGNITION, s. f. [Rékog-ni-cion, 1re é fer. mouillez le g] Action de reconaître. "La récognition de l' autorité oecuménique du Concile de Trente. Let. de Leibnitz à Bossuet. = Ce mot est vieux et hors d' usage. Il serait pourtant bon à rétablir, d' autant plus que l' usage ne done pas ce sens à Reconaissance.

RECOI


*RECOI (à) adv. [Re-koa: 1re e muet] Tranquilement. "Il vit doucement et à recoi à la campagne. "Cette maison est à recoi et loin du bruit. Il est vieux.

RECOIN


RECOIN, s. m. [Re-koein: 1re e muet] Coin plus caché et moins en vûe. "Il était dans un recoin. "Il n' y a ni coin, ni recoin où l' on n' ait cherché. = Figurément, les recoins du coeur. Replis est un terme plus noble.

RÉCOLEMENT


RÉCOLEMENT, s. m. RÉCOLER, v. a. RECOLLER, ou RECOLER, v. a. [Les 2 prem. ont l' é fer. le 3e a l' e muet à la 1re syllabe: Ré--coleman, récolé, recolé; 3e e muet au 1er, é f. aux 2 aûtres.] Récoler, c' est lire aux témoins leurs dépositions, pour voir s' ils y persistent. "Récoler et confronter des témoins. "Les témoins ont été récolés et confrontés. = Récolement, action de récoler. Faire le récolement des témoins. On dit aussi, le récolement d' un inventaire, d' un procês verbal de visite.
   RECOLER, coler de nouveau ce qui s' est décolé.

RÉCOLLECTION


RÉCOLLECTION, s. f. SE RÉCOLLIGER, v. réc. [Rékolèk-cion, récoligé: 1re é fer. 3e è moy. au 1er, 4e é fer. au 2d. Richelet écrit recollection sans accent.] Recueillement, se recueillir. = Le Verbe est vieux, même chez les Ascétiques: le substantif se dit encore en style de dévotion. Jour de récollection. * On disait autrefois, il faut se récolliger, pour bien faire son examen. On dit aujourd' hui, il faut se recueuillir.

RÉCOLTE


RÉCOLTE, s. f. RÉCOLTER, verbe act. [1re é fer. dern. e muet au 1er, é fer. au 2d.] Récolte est la dépouille des biens de la terre. Les fruits qu' on recueuille. "Faire sa récolte. "Aprês la récolte. "La récolte des blés. "La récolte a été bone. "On a eu cette année, une bone, une grande, une pleine récolte, ou une mauvaise, une pauvre récolte. = C' est aussi l' action de recueuillir. "Dans le tems de la récolte. = Dans la première acception, ce mot a le sens passif: dans la 2de, il a le sens actif.
   RÉCOLTER, faire la récolte de..... "Les Suisses ne récoltent pas assez de blé. "La quantité de grain récolté. Académie des Sciences, 1742, Trév. = Un Auteur anonyme l' emploie au figuré. "Jaloux de récolter d' autres fruits que quelques distinctions frivoles. _ Pourquoi ne pas dire recueuillir, qui est plus usité dans ce style? = Ce verbe, qui n' est pas ancien dans la Langue, a produit Récoltable, qui est plus nouveau encôre, et qui a besoin du sceau de l' usage.

RECOMMANDABLE


RECOMMANDABLE, ou RECOMANDABLE, adj. RECOMANDARESSE, s. f. RECOMANDATION, s. f. RECOMANDER, v. act. [1re e muet, 3e lon. 5e è moy. au 2d. 4e é fer. au dern.] Plusieurs écrivent recommendable, recommendation, recommender, etc. avec un e au lieu de l' a. Voyez COMMENDATAIRE. = RECOMANDER, c' est, 1°. Charger de faire, en ordonant. "J' ai recomandé à mes gens de vous obéir. = 2°. Exhorter. "On lui a recomandé d' être sage. "Recomander à ses enfans d' aimer la vertu, de fuir le vice. Recomander le secret, ordoner, ou prier de le garder. = 3°. Prier d' être favorable à.... de prendre soin de.... "Il lui recomanda son fils. "Je recomanderai votre afaire à vos Juges. = Recomander quelqu' un aux prières, aux aumônes des Fidèles. = Se recomander à Dieu, lui recomander son âme; prier Dieu d' avoir pitié de nous. = Et populairement, se recomander à tous les Saints et Saintes du Paradis; implorer la protection de tout le monde. = * On disait aûtrefois, se recomander à quelqu' un, en termes de compliment. = 4°. Recomander un prisonier, le recharger par un nouvel écrou. = Recomander des chôses perdûes ou volées, doner avis aux marchands de les arrêter, si on les leur présente.
   RECOMANDATION, action de recomander. Il se dit surtout dans le 2e sens du n°. 3°. "Je ne puis rien refuser à sa recomandation: et du n°. 4°. la recomandation d' un prisonier. = On apèle, prière de la recomandation de l' âme, la prière que l' Église faite à Dieu pour les agonisans. = * Autrefois on disait beaucoup, avoir en recommendation, pour estimer. "M. de Balsac, M. Chapelain et beaucoup d' aûtres..... l' ont estimé vivant (Voiture) et ont encôre sa mémoire en singulière recommendation. = * On disait aussi recommendations, au pluriel, pour complimens. "N' ayant reçu des recommendations que de deux ou trois persones, je me plaignois en général de toutes les aûtres, de qui je n' avois pas ouï un mot depuis que je suis ici. Voiture. "Vous m' avez mis en une pareille peine, dans une aûtre lettre, en me disant que votre serviteur m' a fait ses recommendations. Id.
   RECOMANDARESSE, femme qui tient une manière de Bureau d' adresse, où l' on va chercher des Nourrices qui sont venûes s' y recomander.
   RECOMANDABLE n' a qu' un raport éloigné au 3e sens de recomander. = Estimable, qui mérite d' être considéré. Il se dit des persones. "Sa vertu le rend recomandable: Il s' est rendu recomandable au Prince par ses grands services. "Il est recomandable par toutes ses bones qualités.

RECOMMENCER


RECOMMENCER, ou RECOMENCER, v. act. et neut. RECOMENCEMENT, s. m. [Recomancé, ceman; 1re e muet, 3e lon. 4e é fer. au 1er, e muet au 2d.] Comencer de nouveau. "Recomencer la guerre. "Il recomence ses violences. = V. n. ou sans régime: "La pluie recomence. "La guerre a recomencé. "Ils se trouvoient toujours à recomencer. MAIMB. Et dans le style fam. recomencer de plus belle, ou sur nouveaux frais; ou bien avec la prép. à et l' infinitif. "Il recomence à bâtir. = C' est là son régime ordinaire~: cependant pour éviter la cacophonie, que produit la rencontre de plusieurs à, on peut mettre de à la place; et au lieu de dire, par exemple, il recomença à alléguer, dire, il recomença d' alléguer.
   RECOMENCEMENT, est peu usité; et il ne l' est que dans le style familier. "Je vous épargne mes éternels recomencemens sur ce pont d' Avignon. Sév. = Le Rich. Port. le met sans remarque: l' Académie ne le met pas. = M. de Bussi s' est servi de Recomenceur. "L' Amour est un vrai recomenceur.

RÉCOMPENSE


RÉCOMPENSE, s. f. RÉCOMPENSER, v. act. [Rékonpanse, : 1re é fer, 2e et 3e lon. 4e e muet au 1er, é fer. au 2d.] 1°. ils expriment l' action de reconaître les services rendus. Les bones actions, par le bien qu' on fait, les distinctions qu' on acorde à celui qui les a rendus, qui les a faites. "Récompenser quelqu' un; récompenser ses services, une bone action, la vertu, le mérite. Et neutralement: "Comme on sait prévenir les fautes (à St. Cyr), la vigilance et le zèle sont bien plus ocupés à récompenser qu' à punir. L' Ab. Du-Serre-Figon. "Promettre, doner, refuser une récompense. "On lui a doné une telle somme, un tel emploi, pour récompense de ses services. = 2°. Récompenser signifie quelquefois punir. "Il a été justement récompensé de ses perfidies. On dit aussi récompense pour punition. "Le gibet sera sa récompense, la récompense de ses crimes. = 3°. Dédomagement, compensation. Dédomager, compenser. "Vous avez perdu cette fois: une autre fois vous serez récompensé. "Donez-moi tant, dès à présent, pour récompense des pertes que j' ai soufertes. "Il s' est bien récompensé de ses pertes. "Nous avons mal dîné: nous nous récompenserons à souper. = En récompense, adv. En revanche. "Il (M. Ozanam) a eu plus de réputation parmi les étrangers, que parmi nous, qui sur certains points, sommes trop peu prévenus en faveur de notre Nation, et trop, en récompense, sur d' aûtres. Fonten. "Vous ne sauriez haïr vivement si long-tems: c' est fort bien fait. Je suis assez comme vous; mais devinez ce que je fais fort bien en récompense, c' est d' aimer vivement et três-long-tems qui vous savez. Sév.
   REM. Récompenser se dit au figuré, mais dans le style élevé seulement, des chôses inanimées. "Les fruits dorés, dont l' automne récompense les travaux des laboureurs. Télémaque.
   Sur les bords que le Tibre arrose de ses eaux,
   Vivoit jadis un Laboureur habile,
   Dont le champ, quoiqu' il fût, de son fonds, peu fertile,
   Récompensoit toujours les pénibles travaux.
       L' Abé Reyre.
= Récompenser le tems perdu: réparer la perte du tems. Voy. n°. 3°.

RECOMPOSER


RECOMPOSER, v. act. RECOMPOSITION, s. f. [Rekonposé, zi-cion: 1re e muet, 2e lon. 4e é fer. au 1er.] Recomposer, en général, c' est composer une seconde fois. = Il se dit, en particulier, dans la Chimie, pour, réunir les parties d' un corps, qui avaient été séparées par quelque opération. = Recomposition se dit dans cette seconde acception. Action de recomposer un corps, ou l' éfet de cette action.

RÉCONCILIABLE


RÉCONCILIABLE, adj. RÉCONCILIATEUR, TRICE, s. m. et f. RÉCONCILIATION, s. f. RÉCONCILIER, v. act. [1re é fer. 2e lon.] Réconcilier, c' est remettre bien ensemble des persones, qui étaient brouillées l' une avec l' aûtre. Réconciliateur, qui réconcilie, etc. Réconciliation, acomodement. "On les a réconciliés: il s' est réconcilié avec son père: le frère a été le réconciliateur: la tante a été la réconciliatrice. "Ce n' est pas une réconciliation feinte ou platrée; c' est une sincère, une véritable réconciliation. "Ils ont travailé long-tems à leur réconciliation.
   Rem. On dit, se réconcilier avec quelqu' un, et non pas à quelqu' un, comme a dit un Auteur assez moderne. = Réconcilier se dit figurément des chôses en régime. "L' Auteur d' Andromaque et de Phèdre fut choisi pour réconcilier la scène avec les bones moeurs. Esther parut, et l' on crut voir la piété même: on crut entendre ses accens. L' Abé Du-Serre-Figon.
   Réconcilier et Réconciliation, se disent, outre cela, de l' acte solennel par lequel un hérétique est réuni à l' Église; et de l' action de retourner à confesse, peu de tems aprês y avoir été, avant que d' aller communier. "Réconcilier un hérétique; se réconcilier. = On dit aussi réconcilier une Église, la rebénir avec certaines cérémonies, aprês qu' elle a été profanée.
   RÉCONCILIABLE, qui peut être réconcilié. "Ces deux persones, ces deux familles ne sont pas réconciliables. = Il est peu usité, et il ne s' emploie guère qu' avec la négative. = On ne le dit que des persones. Leibnitz l' aplique aux chôses. "Ces ouvertures pourroient être réconciliables avec les anciens principes. _ Conciliables serait~ un terme plus propre. Il est nouveau, mais il comence à être en usage. Réconciliable, est au contraire tout à la fois, et contre l' usage et contre l' analogie.

RÉCONDUCTION


RÉCONDUCTION, s. f. [Rékonduk--cion: la 1re est un é fer. suivant le Dict. Acad. Trévoux et Ferrière écrivent reconduction sans accent, ce qui est plus naturel, la particule re étant dans ce mot réduplicative.] Ocuper une maison par tacite reconduction, c. à. d. par renouvellement de bail, non pas exprês, mais tacite.

RECONDUIRE


RECONDUIRE, v. act. [1re et dern. e muet. 2e et 3e lon.] Acompagner par civilité quelqu' un dont on a reçu visite. = C' est aussi, en style plaisant, faire sortir quelqu' un de chez soi, en le maltraitant. "Reconduire un insolent à coups de bâton.
   REM. Reconduire se dit en parlant d' une visite; et conduire, dans les aûtres ocasions. "Je suis allé le voir: il m' a reconduit jusqu' à mon carrosse. "Aprês m' être promené quelque tems avec lui, il m' a conduit à son carrosse. Bouh. Acad. _ Ménage veut qu' on dise conduire, même dans le 1er sens. Je ne crois pas qu' il eût, même de son tems, l' usage pour lui.

RECONFORT


RECONFORT, s. m. RECONFORTER, v. act. [1re e muet; l' Académie met un accent sur l' é, réconfort, réconforter: mais re étant dans ces deux mots réduplicatif, il est plus convenable de n' y mettre point d' accent. Si l' usage contraire est constant, il n' y a rien à dire; mais s' il est douteux, il faut, ce me semble, se décider en faveur de la règle et de l' analogie.] Reconfort, consolation, secours dans l' afliction. Reconforter, fortifier, conforter. _ Consoler. "Dieu sera notre reconfort. Il est le reconfort des afligés.
   Ainsi fut sourde au reconfort
   Celle qui, etc.
       Malh.
Ménage ne dit rien sur ces mots. L' ancien Trévoux les met sans remarque. La Touche dit qu' il ne sont pas du beau style, mais que le substantif pouvait encôre trouver place dans la poésie. Il observe que l' Académie ne les désaprouvait point. Dans la dern. édition, elle dit du substantif, qu' il commence à vieillir; et du verbe, dans le sens de consoler, qu' il vieillit. = Il est plus usité pour signifier fortifier, au propre. "Ce doigt de vin l' a un peu reconforté.

RECONNOISSABLE


RECONNOISSABLE, ou RECONAISSABLE, adj. RECONNOISSANCE, ou RECONAISSANCE, s. f. RECONNOISSANT, ANTE, ou RECONAISSANT, ANTE, adject. RECONNOîTRE, ou RECONAîTRE, v. act. [Reconè-sable, san, sante, sance; reco--nêtre; 1re e muet, 3e è moyen, excepté au verbe, où il est ouvert et long. 4e dout. au 1er, lon. aux 3 suiv.] Reconaître, c' est 1°. se remettre dans l' esprit l' idée d' une chôse, d' une persone, quand on vient à les revoir. "Je l' ai reconu tout de suite; j' ai eu peine à le reconaître. = On reconaît quelquefois ce qu' on n' a jamais conu, à quelque signe dont on a entendu parler. "Je l' ai reconu à ce grand nez, à cette loupe qu' il a au front. "Reconoissez celui qui vous a doné le jour. _ Ah! je devois vous reconoître à la tendresse que j' avois pour vous, et à celle dont vous m' avez toujours honorée. Dest.
   Ne le conaissant pas, vous alliez l' égorger;
   Et si son arrivée est ici découverte,
   En le reconaissant, vous assurez sa perte.
       Mérope.
= 2°. Découvrir. "On a reconu son inocence. = 3°. Observer. "Reconaître les dispositions de... Et figurément, reconaître le terrain. = Reconaître une place, les énemis, leur contenance, leur nombre. "Il voulut reconoître leur camp avant que de l' ataquer. = En termes de Marine, on dit reconaître un vaisseau, une terre, etc. = 4°. Avouer. "Il a reconu sa faûte. = Il régit l' infinitif sans prép. "Je reconais avoir eu tort en cette ocasion; ou que et l' indicatif. "Il reconoît qu' il a eu tort de le dire. Que si le verbe régi ne se raporte pas au nominatif de reconaître, il est indispensable d' employer la conjonction que: je reconais que vous avez raison, et que vous n' auriez pu faire aûtrement, quand vous l' auriez voulu. = Reconaître son seing, une écriture, une promesse, les avouer. = Reconaître une redevance: en pâsser un aveu, une reconaissance. = 5°. Avouer pour: "Il l' a reconu pour son parent. "Il ne reconoit d' autre loi que son caprice. = Être reconu régit la prép. de (l' ablatif.) "La primauté du St. Siège étoit reconûe et révérée de tous les peuples. Maimb. Quelquefois il a pour 2d régime la prép. pour. "Il fut reconu de tous pour vrai Pape. Id. = 6°. Avoir de la gratitude. "Reconoître les bienfaits qu' on a reçus. = Récompenser: reconaître les services. "Il a fort mal reconu les bons ofices qu' on lui a rendus. = 7°. Se reconaître, a plusieurs sens. = S' avouer: il se reconait coupable. = Se repentir: "Dieu lui a fait la grace de se reconaître plusieurs jours avant sa mort. = Se rapeler le lieu, ou le pays où l' on est: "Je comence à me reconaître. = Reprendre ses esprits, se rassurer. "Sans doner le tems au peuple de se reconoître, il marcha contre lui.
   RECONU, ÛE, adj. Il est du petit nombre des adjectifs verbaux, qui régissent d' aûtres adjectifs. "N' y a-t' il pas plus que de l' extravagance à vouloir faire envisager les liens politiques et religieux, reconus si nécessaires par toutes les Nations, comme autant de préjugés, etc. M. Seguier.
   Reconaissable, Reconaissant; le 1er a raport au 1er sens de reconaître, et il a le sens passif. Qui peut être reconu facilement. "Il est reconaissable entre mille. "La maladie l' a changé au point, qu' il n' est pas reconaissable. On le dit aussi du caractère, des moeurs. "Il faut convenir que les malheurs de Cicéron avoient fait une terrible impression sur lui; et qu' il n' étoit presque pas reconoissable. MONGAULT. = Le 2d a raport au n°. 6°. Qui reconaît les bienfaits, qui a de la gratitude, de la reconaissance. Il a le sens actif. "Avoir le coeur reconaissant, l' âme reconaissante. "Il n' y a point d' homes plus reconaissans, que ceux qui ne se laissent pas obliger par tout le monde: ils savent les engagemens qu' ils prènent, et ne veulent s' y soumettre qu' à l' égard de ceux qu' ils estiment. Duclos. = On dit, avoir de la reconaissance pour, et être reconaissant de, etc.
   RECONAISSANCE n' a qu' au Théâtre le 1er sens de reconaître. "La reconaissance d' Iphigénie et d' Oreste. "Le dénoument se fait par la reconaissance, etc. Un Auteur moderne dit; "L' oeil reconoîtra la persone, dont l' oreille n' aura pu discerner la voix; et au défaut de la reconoissance par la vûe, l' ouïe y suplééra. Du Plaisir. Un autre Auteur a dit: "Ses faûtes, dont il faisoit une si sincère reconoissance. ANON. Quoiqu' on dise reconaître une persone, reconaître, (avouer) ses faûtes; on ne dit point, la reconaissance d' une persone; faire la reconaissance de ses faûtes. L' Académie met un exemple aprochant du 2d. "Cette prompte reconoissance de sa faûte, lui en a mérité le pardon. Mais cela n' autorise point à dire, faire la reconaissance de ses faûtes, comme on dit, en faire l' aveu. = Ce substantif n' a proprement de raport qu' au n°. 6°. Gratitude, ressentiment des bienfaits reçus. "Comptez sur ma reconaissance. "Avoir de la reconaissance; témoigner sa reconaissance; ou récompense: "Vous en recevrez une honête reconaissance: et au n°. 4°. Acte par lequel on reconait avoir reçu quelque chôse: je vous en ai doné, ou je vous en ferai ma reconaissance. "Pâsser une reconaissance au Seigneur, du cens qu' on lui doit, etc. = Reconaissance, gratitude, (synon.) La 1re est le souvenir, l' aveu d' un service, d' un bienfait reçu: la 2de est le sentiment, le retour inspiré par un bienfait, un service. L' une est l' animus memor des Latins; l' autre est leur gratus animus. Publier un bienfait, est un acte de reconaissance: chérir son bienfaiteur, est l' acte propre de la gratitude. Extr. des Synonymes Fr. de M. l' Abé Roubaud. "Un aveu public de l' obligation est quelquefois l' acte le plus noble de la reconoissance. Duclos.
   REM. 1°. Reconaissance, dans sa signification la plus ordinaire, n' a point de plur. On dit a plusieurs, comme à un seul, votre reconaissance, et non pas vos reconaissances. * Autrefois on l' employait dans ce nombre. "Il n' y a plus que des cris de joie, qui puissent exprimer nos reconaissances. BOSSUET. "L' intérêt d' une Maison, à qui je dois tant de respects et de reconoissances. Mascaron. Respects est là aussi mal au plur. que reconaissance.
   Nous devons le punir de nos reconoissances.
       Breb.
Il n' est bon au pluriel qu' en termes de Théatre. "Il y a dans cette Tragédie plusieurs reconaissances. = 2°. On dit: avoir de la reconaissance pour, et non pas à. "La reconoissance qu' ils avoient à leurs alliés. L' Abé Prév. Hist. des Stuarts. C' est un anglicisme, et en français un solécisme. = 3°. Reconaissant se plait à suivre. Le masculin sur-tout fait, même en vers, une inversion dure et choquante, quand il marche devant le substantif.
   L' amour propre en secret s' opôse
   À~ de reconoissans bienfaits.
       Gresset.
* Un Auteur moderne lui fait régir le datif. "Il nous dispense de lui être reconoissans. Let. d' un Citoyen de Bordeaux. L' Auteur est Gascon. On dit, reconaissant envers, pour les persones, et de pour les chôses. = M. l' Abé Delille done à cet adjectif le même régime. "M. Le Batteux a doné sur la Poésie et sur l' Éloquence des préceptes, dont les étrangers lui sont reconoissans. "Je vous suis reconaissant, ne me paraît pas français: Ann. Litt. ni à moi non plus. = 4°. Un Auteur cité par M. de Bufon, done à reconaître le sens et le régime de distinguer: "Il est aisé de reconaître un Espagnol de toutes les aûtres Nations Européennes. Fontenelle a dit aussi: le style de la tendresse est bien aisé à reconoître de celui de la vanité. Le vrai régime est parmi ou entre dans la 1re phrâse; et pour la 2de, il faut, distinguer de. = Cet ablatif est le régime du passif: pour n' être pas reconus des énemis. Télem. = Quand il signifie, être reçu comme, ou en qualité de, il régit les noms sans article. "Il se vit donc universellement reconu Gouverneur. Du Cerc. 5°. Reconaître, avouer, régit l' infinitif sans prép. Quelques Écrivains ont employé devant la prép. de. "Reconnoissant de l' avoir ruiné. SÉV. "Nous reconoissons sur-tout d' avoir beaucoup profité des vûes de, etc. Bernard. _ L' Acad. met, je reconnois avoir reçu. = 6°. Reconaître, témoigner de la reconaissance, de la gratitude, récompenser, régit, suivant La Touche, les chôses et les persones. "Je reconoitrai cette faveur, je vous reconoitrai. Il avoûe pourtant que l' Académie ne dit point reconoître avec la persone pour régime. En éfet, il n' est pas en usage de cette manière. Ainsi, au lieu de dire, je vous reconaitrai, on doit dire, je reconaitrai le service, que vous m' avez rendu, etc.

RECONQUÉRIR

, v. act. [1re e muet, 2e. lon. 3e é fer.] Remettre sous sa domination. "Henri IV reconquit tout son Royaume.

RECONSTITUTION


RECONSTITUTION, RECONVENTION, s. f. Termes de Palais. L' Acad. met un accent aigu sur l' é. Ferrière, dans le Dict. de Droit ne met point d' accent. Re dans ces mots est réduplicatif: l' accent parait donc ne pas y convenir.

RECONSTRUCTION


RECONSTRUCTION, s. f. RECONSTRUIRE, v. act. [1re e muet.] Ils expriment l' action de construire de nouveau. "Reconstruire une Église, la reconstruction d' un Palais. Réédification, réédifier sont des termes plus nobles et plus propres du haut style.