Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI PHYSIQUE


PHYSIQUE, PHYSIQUEMENT, Voyez PHYSICIEN.

PIACULAIRE


PIACULAIRE, adj. [Pi-akulère: 4e è moy. et long, 5e e muet.] Qui a raport à l' expiation. Sacrifice piaculaire. C' est à peu prês tout l' emploi de ce mot.

PIAFE


PIAFE, s. f. PIAFER, v. a. PIAFEUR, adj. [Pia-fe, fé, feur.] Piafe, ostentation. Piafer, faire piafe. "Tout ce qu' il fait n' est que piafe; il piafait avec ses beaux habits. St. famil. et critique ou moqueur. = Piafer se dit aussi d' une action três--noble du cheval, qui consiste à passager dans la même place sans avancer ni reculer, ni se traverser. "Ce cheval piafe três--bien dans les piliers. = Piafeur, qui piafe, ne se dit que des chevaux. "Les chevaux d' Espagne sont piafeurs.
   Rem. Plusieurs disent se piafer réciproque, au lieu de piafer neutre: "Voyez comme il se piafe. Il parait qu' ils disent mal, et qu' il faut dire, comme il piafe. = Le Dict. de Trév. dit, qu' apliqué aux hommes, il est vieux. Il date du tems de Pasquier, qui l' apèle un mot moderne, et mis en usage de son tems.

PIâILLER


PIâILLER, v. n. PIâILLERIE, s. fém. PIâILLEUR, EûSE, s. m. et fém. [Piâ--glié, glie-ri-e, glieur, glieû-ze: 1re lon. 2e é fer. au 1er, e muet au 2d, lon. au dern. mouillez les ll.] Piâiller, criailler, crier continuellement. Piâillerie, crierie, criâillerie. Piâilleur, criard, qui ne fait que piâiller. Style familier. "Cet enfant piâille toujours: cette femme piâille continuellement. Dans cette maison, c' est une piâillerie continuelle. "Cet enfant est un grand piâilleur. "Cette femme est une grande piâilleûse.

PIASTRE


PIASTRE, s. f. [Pias-tre: 2e e muet.] Monaie d' argent, qui vaut un écu ou environ, dit l' Acad. et qui se fabrique en Espagne et dans les Indes occidentales. Cela n' est pas exact. Les piastres d' Espagne valent 5 livres 8 sols 11 deniers 3/10 de France. _ Celles du Levant, frapées au coin du Grand Seigneur, valent 120 aspres. C' est de celles-là seulement qu' on peut dire qu' elles valent environ un écu. Voy. Dict. du Citoyen.

PIAULER


PIAULER, v. n. [Pio-lé.] Terme populaire. Se plaindre en pleurant.

PIC


PIC, s. m. Ce mot se dit dans trois acceptions, qui n' ont aucun raport ensemble. = 1°. Instrument de fer, courbé et pointu vers le bout, qui a un manche de bois, et dont on se sert à ouvrir la terre. "Il y a beaucoup de caillous dans cette terre, il faut se servir du pic pour l' entamer. = À~ pic, adv. Perpendiculairement. "Montagne qui est à pic, coupée à pic. Avoir le soleil à pic, à plomb sur la tête. = 2°. Coup de piquet, lorsque celui qui a la main compte jusqu' à trente, en jouant les cartes, avant que celui contre qui il joûe puisse rien compter. Alors de vingt-neuf on va de plein saut à soixante. Faire pic. Voilà un beau pic. = * Boileau dit pique, en ce sens.
   Tu voyois tous tes biens au sort abandonés,
   Devenir le butin d' un pique ou d' un sonnez.
Pique, ou plutôt pic, dit Brossette, terme du jeu de piquet. = Pic se dit de ce coup de piquet, et pique de la carte, qui porte ce nom. "Faire pic et capot. "Mon point est en piques; j' ai six piques. Trév. = 3°. Pic se dit, en Géographie, de certaines montagnes três-hautes. "Le Pic du Midi dans les Pyrénées: le Pic de Ténérife.

PICORÉE


PICORÉE, s. f. *PICORER, v. n. PICOREUR, s. m. Ils expriment l' action de butiner, et celui qui butine. "Aller à la picorée: il est allé picorer: c' est un grand picoreur. Les deux derniers sont vieux. On dit encôre le premier, des soldats, au propre, et des abeilles, au figuré; et pour ceux-là, on se sert plutôt des termes de maraude, marauder, maraudeur.

PICOT


PICOT, s. m. PICOTEMENT, s. m. PICOTER, v. act. PICOTERIE, s. f. [Le t final ne se prononce point dans le 1er: 3e e muet au 2d et au 4e, é fermé au 3e; en dans le 2d a le son d' an.] Picot. est, 1°. une petite pointe qui demeure sur le bois qui n' a pas été coupé nettement. "Un picot m' a écorché la main. = 2°. Petite engrélûre au bas des dentelles.
   PICOTER, au propre, causer sur la peau ou sur les membranes, une impression douloureûse, comme si on la piquait avec des aiguilles, etc. "Des sérosités qui picotent la peau. "Une humeur âcre, qui picote la poitrine. = Il se dit aussi des petites piqûres que les oiseaux font aux fruits en becquetant. "Les oiseaux ont picoté tous ces fruits. Picoté (marqué) de petite vérole. = Au figuré, ataquer à plusieurs reprises par des traits malins qui chagrinent. "Il l' a picoté toute la soirée. "Ils se picotent toujours.
   PICOTEMENT ne se dit que dans le propre, et picoterie que dans le figuré. "Sentir des picotemens dans tout le corps. "Il m' ataque tous les jours: ce sont des picoteries continuelles.
   *PICOTE est un mot de Province. Le mot français est, petite vérole. Mén.

PICOTIN


PICOTIN, s. m. [Piko-tein.] Petite mesûre, dont on se sert pour mesurer l' avoine qu' on done aux chevaux. = Il se dit aussi de la quantité d' avoine, contenûe dans le picotin.

PIE


PIE, s. f. [Pi-e: 1re lon. 2e e muet.] Oiseau de plumage blanc et noir, de la grosseur d' un pigeon. = On dit proverbialement, larron comme une pie; causer, jaser comme une pie, comme une pie borgne. Voy. NID. = Pie, ou cheval pie, cheval blanc et noir, ou blanc et bai. La pie du Vicomte de Turenne est fameuse dans l' Histoire. = Pie, adj. OEuvre-pie = Pie-mère, s. f. La membrane qui envelope immédiatement tout le cerveau.

PIèCE


PIèCE, s. f. [1re è moy. 2e e muet.] 1°. Portion, morceau. "Pièce de boeuf: "Les pièces d' une montre: pièce de tapisserie. = 2°. Morceau de toile, d' étofe, de métal, qu' on atache à des chôses de même natûre pour les racomoder. Mettre une pièce à, etc. = 3°. Morceau d' étofe que les femmes mettent quelquefois au devant de leur corps de jupe = 4°. Pièce se dit souvent d' un tout complet. "Pièce de toile, de drap, de ruban. Juger de la pièce par l' échantillon. = 5°. Il se dit aussi avec d' aûtres mots, en diférens sens. Pièce de four, de pâtisserie. _ Pièce de vin, muid ou toneau. _ Pièce d' eau, grande quantité d' eau retenûe dans un certain espace, pour l' embélissement d' un jardin. = pièce de terre, de blé, d' avoine, etc. certaine étendûe de terre, etc.
   6°. Il signifie quelquefois chacun, chacune. "Ils coûtent tant la pièce. À~ un écu la douzaine, c' est cinq sous la pièce, etc. = 7°. Canon. "Pièce d' artillerie, pièce de canon. "Pièce de douze, de vingt-quatre, etc. on sous entend livres; qui porte des boulets de 12, de 24, etc. = 8°. Ouvrage d' esprit, en vers ou en prôse. Pièce d' éloquence, pièce de théâtre, ou absolument, pièce. _ En musique, pièce de clavecin, etc. = 9°. Au Palais, écritûre qu' on produit dans un procês. "Cet Avocat s' est chargé des pièces. "Comuniquer les pièces, etc. = 10°. Monaie. "Pièce de douze, de vingt-quatre sous. = 11°. Aux échecs, tout ce qui n' est pas pion. "La Dame est la meilleûre pièce des échecs. = 12°. Tour de malice ou de plaisanterie. Jouer ou faire une pièce à quelqu' un; lui faire pièce (sans article). La pièce est bone, plaisante, etc. = 13°. Apliqué aux persones, fine pièce, méchante pièce; et ironiquement, bone pièce, persone rusée ou malicieûse. Style familier.
   PIèCE, dans ses diverses acceptions, entre dans plusieurs expressions. = Faire pièce à quelqu' un (n°. 12°.) Vaugelas condamnait cette expression: elle s' est pourtant établie. "Il m' a fait la plus sanglante pièce du monde. = Se mettre en pièces pour, etc. (n°. 1°.) Se doner beaucoup de moûvemens. "Dites-moi un mot pour cette bonne d' Escars, qui se met si bien en pièces pour vous servir. Sév. = Acomoder un homme de toutes pièces, le maltraiter, ou en dire beaucoup de mal. = Emporter la pièce, râiller, médire d' une manière atroce. = Mettre tout le monde en pièces, médire de tout le monde. = L' armée fut tâillée en pièces, fut entièrement défaite. = Être prês de ses pièces (n°. 10°.) avoir peu d' argent, être mal dans ses afaires.
   On dit, en st. prov. d' une persone massive et lourde, que c' est une grosse pièce de chair (n°. 1°.); de la meilleûre protection qu' on ait, c' est la meilleûre pièce du sac, (n°. 9°.). "Elle fera, de ce nouvel ami, tout ce qu' on en peut faire, et ce sera, pendant quelque-tems, la meilleure pièce de son sac. Sév. = On dit encôre d' un homme roide dans les manières, ou dans le caractère, qu' il est tout d' une pièce. "Le Maréchal de Bellefonds a été trop sec, et trop d' une pièce. Sév. = Dormir toute d' une pièce; toute la nuit sans se réveiller. = Au jeu des échecs, on dit, pièce pour pièce. Mde de Sévigné emploie cette expression au figuré: "Dieu veuille que nous ne voyons pas de même la prise de Mastrich. Ce qu' on fera dit, M. le Prince, c' est que nous prendrons une autre place; et ce sera pièce pour pièce. = Par pièces, adv. peu à peu et successivement. Cette expression n' est pas assez noble pour une Oraison funèbre. Mascaron l' a employée plus d' une fois. "Il faut que nous nous voyons mourir par pièces, avant que nous avouions la vanité du monde. "Il est de la force humaine d' empêcher que le corps qui tombe par pièces n' ensevelisse l' âme dans ses débris.

PIED


PIED, ou PIÉ, s. m. [Monosyllabe, é fer. La 1re manière d' écrire est la plus comune et la plus conforme à l' étymologie, mais le d ne se prononce point, même devant une voyèle. Il faut dire, pié à terre; c' est comme parlent les honêtes gens, et non pas pié ta terre. MÉN.] Ce mot a plusieurs sens. = 1°. Au propre, la partie du corps de l' animal, qui est jointe à l' extrémité de la jambe, et qui lui sert à se soutenir et à marcher. "Se tenir sur ses pieds. Aler à pied. Mettre pied à terre. "Depuis les pieds jusqu' à la tête. = Bête à quatre pieds; les pieds de devant, les pieds de derrière, etc. = 2°. Au figuré, il se dit d' un arbre, d' une plante. "Être assis au pied d' un arbre. "Arroser une plante par le pied. = Quelquefois la plante entière; un pied d' oeuillet. = 3°. L' endroit le plus bâs d' une montagne, d' un mur, d' une tour. "Il sort une source du pied de la montagne. "Ils avancèrent jusqu' au pied des murâilles, de la tour, du bastion. = 4°. En parlant de meubles, d' ustensiles, la partie qui sert à les soutenir. "Le pied d' une table; les pieds d' une chaise, d' un lit, d' un chandelier, d' un chenet, etc. = Le pied, ou les pieds du lit, l' endroit qui est oposé au chevet. = 5°. Mesûre contenant douze pouces. "Pied de roi. Pied Géométrique. Pied cube. "La toise est de six pieds. La chambre a 18 pieds de long, sur seize de large.
   PIED entre dans un grand nombre d' expressions, presque toutes du style familier, et dont les moins bâsses ne s' élèvent pas au dessus du style médiocre. = Être en pied, être bien dans ses afaires. = Être sur un bon pied, sur un certain pied; être considéré. "Il (Cet honête Négociant) ne concevoit pas pourquoi il falloit que ce petit Seigneur (son fils) eût des laquais si élégamment vétus, et un si brillant équipage; mais Madame son épouse lui représentoit que la considération y étoit atachée, et que pour réussir dans le monde, il falloit y être sur un certain pied. Marm. = Être réduit au petit pied, être malheureux et ruiné. = Sécher sur pied: languir dans de vaines espérances. * Mde de Sévigné dit: sur le pied, contre l' usage. "On verra bientôt cette dernière (Dame) sécher sur le pied. Là, cette expression signifie perdre son crédit, par allusion aux plantes, qui sèchent et meurent sur leur tige. = Prendre pied, s' établir. * Le Président Henaut dit, en ce sens, prendre un pied: "Louis le Grôs s' aperçut trop tard de la faute qu' il avoit faite de laisser prendre un pied en France aux Anglois. _ Un est de trop dans cette locution: il vaudrait mieux qu' il n' y fût pas. = Y aler des pieds et des mains, faire tous ses éforts. * M. l' Ab. Garnier, (Hist. de Fr.) dit, travailler de pieds et de mains. "On ne doutoit pas qu' il ne travaillât de pieds et de mains à y atirer le Roi de Naverre. _ Cela est bâs, ce me semble, et peu digne du style de l' Histoire. = Prendre pied sur quelque chôse, se régler là-dessus pour l' avenir. = Perdre pied est aussi, comme prendre pied, couper pied, une de ces expressions consacrées, qui ne souffrent point de variation dans leur construction. * Édouard ayant perdu tout pied dans son propre Royaume, etc. Hist. d' Angl. Cette manière de parler est vicieûse. = Dans les expressions précédentes, pied s' emploie presque toujours sans article; mais au contraire, on doit dire, lâcher le pied (s' enfuir), et non pas lâcher pied, comme l' ont dit quelques Écrivains. "Il se trouva plus de Romains punis pour avoir combatu sans ordre, que pour avoir lâché le pied et quité leur poste. Révol Rom. C' est ainsi qu' il faut dire; et non pas comme le P. Barre (Hist. d' Allem.) Les Lucquois lâchèrent pied... Ils firent semblant de lâcher pied. _ Mde B. (Hist. d' Angl.) dit toujours lâcher pied, sans article, et M. Targe aussi; Mde Dacier dit tantôt l' un, tantôt l' autre: "Les Épéens lâchent pied, etc. Les Troyens lâcheront le pied. = On dit, mettre pied à terre, (descendre de cheval) sans article; et avec l' article, mettre le pied dans un endroit, y arriver, y aborder. "Ce fut le 12 Novembre 1701 que je mis le pied à la Chine pour la première fois. Let. Édif. = Avec la négative, on dit, mettre les piés au pluriel. Je ne mettrai plus les piés chez lui; je n' y irai plus. L' Ab. Coyer le met au singulier: "Un ami ne peut plus mettre le pied chez vous. = Mettre une chôse sous les pieds, la mépriser, des injûres, les pardoner. = * Dit-on, avoir pied, pour dire, pouvoir pâsser un gué à pied? J' ai peine à le croire. "Il indiqua un gué où il avoit pied. Hist. d' Angl. = Doner un coup de pied jusqu' à, etc. poursuivre sa route jusqu' à, etc. "Donez un coup de pied jusqu' à Paris. = Taper du pied est un signe de colère, de douleur, ou d' indignation: "Il sortit en tapant du pied. Marm.
   On dit, proverbialement, il va du pied comme un chat maigre, il marche bien. _ Chercher quelqu' un à pied et à cheval, le chercher par-tout. _ Faire le pied de grûe, être long-tems à atendre pour faire sa cour, pour solliciter. _ Faire le pied de veau, flater, faire bassement la cour; saluer servilement. = Quand on a les pieds chauds, c. à. d. quand on est content, quand on est à son aise. "J' arrive, je suis un peu fatiguée. Quand j' aurai les pieds chauds, je vous en dirai davantage. Sév. = Ne pas toucher du pied à terre se dit d' une chôse qui ne souffre point de dificulté. "Le Chevalier voudroit bien pousser la requête civile, qui ne toucheroit pas du pied à terre. Sév. = En tirer pied ou aile, en avoir quelque chôse, plus ou moins. "Je m' en vais chercher des Grignans: je ne puis vivre sans en avoir pied ou aile. Sév. Voyez Boule; Chaussure, Chercher, Danser, Gorge, Haut, Marcher, Nud.
   PIED entre aussi dans plusieurs locutions adverbiales. = À~ pied et de son pied; aller à pied. "Il est acoutumé à cela, comme un chien d' aller à pied, ou nu-piés. "Il y avoit plusieurs Magistrats qui alloient à pied (au Palais) d' aussi bonne grâce qu' Auguste alloit de son pied au capitole. La Bruyère. _ Proverbialement, on dit, de son pied mignon. = Aller à beau pied sans lance, a le même sens, en style proverbial. = À~ pieds joints, sauter à pieds joints: il se dit au propre et au figuré; mais l' expression n' est rien moins que noble. "Les chapitres qui pourroient ennuyer, on a le droit de les sauter à pieds joints. Le suivre. = De plein pié, au même étage: il a trois chambres de plein pied. De pied ferme; avec fermeté. "Ils atendirent l' énemi de pied ferme. = Au petit pied, (n°. 5°.) en racourci. "C' étoit anéantir la prétention d' être les États Généraux en racourci et au petit pied. Anon. = Sur le pied de, sur le même pied. "Payer une étofe sur le pied de tant l' aûne, etc. "J' avais pour elle ce goût qu' on apèle amour, que les hommes font valoir pour tel, et que les femmes prènent sur le même pied. = Mais on ne dit pas sur deux pieds, sur plusieurs pieds. "On propose cette fournitûre sur deux pieds (c. à. d. suivant deux prix diférens), celui de la guerre et celui de la paix. On ne peut guère excuser cette locution de barbarisme. = On dit mieux, être sur le pied de bel esprit, d' homme de qualité. Être sur le pied (en possession) de faire. Sur ce pied là, ou sur le pied où sont les chôses: cela étant ainsi. = Pié-à-pié. "Il suit son adversaire pié-à-pié. BOSS. = Au pied de la lettre, litéralement; expliquer, prendre une chôse au pied de la lettre; obéir au pied de la lettre. _ Sans exagération; au pied de la lettre, il n' a pas de pain. = Pieds et poings liés. "Il (Caton) reprocha à son fils et à ses domestiques qu' ils le vouloient livrer à César piés et poings liés. FONTEN. = D' arrache-pied, adv. Tout de suite, sans intermission, sans discontinuation. "J' ai dormi, j' ai travaillé six heures d' arrache-pied.

PIÉDESTAL


PIÉDESTAL, PIED-DROIT, PIÉDOUCHE, s. m. [1re é fer. dans les trois: 2e è moy. au 1er.] Ce sont trois termes d' Architectûre: le premier se dit d' une bâse longue sur laquelle on met une colonne, ou une statûe, etc. le second de la partie du jambage d' une porte ou d' une fenêtre, qui comprend le chambranle, le tableau, la feuillûre, l' embrasûre et l' écoinçon; le troisième d' une petite bâse longue ou cârrée en adoucissement, qui sert à porter un buste, ou quelque petite figûre en ronde bôsse.
   Rem. 1°. On doit écrire piédestal en un seul mot, sans tiret et sans apostrophe aprês le d. L. T. Anciènement on a écrit piédestail. ID. _ Présentement on dit piédestaux, et non pas piédestals, au pluriel. Th. Corn. = 2°. Comme on écrit piédestal et piédouche avec un seul d, il semble qu' on devrait écrire de même piédroit.

PIèGE


PIèGE, s. m. [1re è moy. 2e e muet.] Au propre, certain instrument dont on se sert pour atraper des animaux comme loups, renards, etc. "Tendre, dresser un piège: prendre au piège; faire doner dans le piège. = Figurément, artifice dont on se sert pour tromper quelqu' un. "On lui a tendu un piège: il a doné, il est tombé dans le piège.
   Rem. 1°. Suivant Bouhours, on doit dire tendre des pièges, et dresser des embûches. Massillon dit pourtant dresser des pièges: "Plus le démon entrevoit les premières lueurs de sa grandeur future (de J. C.) plus il se hâte de lui dresser des pièges. _ L' Acad. dit, dresser ou tendre un piège, au propre: elle ne met que tendre au figuré. = 2°. Une phrâse de M. Moreau me done ocasion de faire une remarque. "Je pourrois rappeler ici les indignes perfidies, par lesquelles nos premiers Rois cherchoient à se suplanter mutuellement, leurs pièges, leurs trahisons. _ Trahison est une action, piège n' est pas une action: le 1er peut donc s' unir avec le pronom personel leurs: le 2d ne le doit pas. Il falait donc dire: leurs trahisons, les pièges qu' ils se tendoient mutuellement. Cela aurait été un peu plus long, mais plus correct.

PIERRâILLE


PIERRâILLE, s. fém. PIERRE, s. fém. PIERRETTE, s. f. PIERREUX, EûSE, adj. [Pié-râ-glie, piê-re, pié-rète, reû, reû-ze: 1re é fer. excepté au 2d, où il est ouv. et long, r forte, 2e lon. au 1er et aux deux derniers, e muet au 2d, è moyen au 3e.] Pierre est 1°. un corps dur et solide, qui se forme dans la terre et dont on se sert pour la construction des bâtimens. "Pierre dûre ou tendre. "Pierre de tâille. "Lit, assise de pierre. "Cette ville (Jérusalem) fut entièrement ruinée, et selon la prédiction du Sauveur, on n' y laissa pas pierre sur pierre. = 2°. Caillou et autre corps solide de même natûre. "Chemin plein de pierres: se batre à coup de pierres. = 3°. Amâs de gravier, qui se forme en pierre dans les reins ou dans la vessie. "Avoir la pierre, être malade de la pierre; être tâillé de la pierre. = 4°. Dûreté, qui se trouve dans quelques fruits: "Il y a des poires qui sont pierreûses, pleines de pierres. = 5°. Pierres tout seul, ou pierres précieûses, comme les diamans, les rubis, les émraudes. On dit pierres fines, ou faûsses; pierres gravées.
   6°. On dit, en style fig. famil. "Tout le monde lui jette la pierre, le blâme. = La pierre en est jetée, le dessein en est pris. = Jeter la pierre et cacher le brâs; nuire sans paraître. = Dur comme la pierre, extrêmement dur. = On dit d' une grande douleur qu' elle est à fendre les pierres. "J' allai voir ensuite Mademoiselle de la Trousse, dont la douleur fend les pierres. _ Voy. ACHOPEMENT, COUP, CHEMIN, GELIER, JARDIN, PHILOSOPHALE, SCANDALE, TOUCHE. = Pierre fondamentale: "La Justice est la pierre fondamentale des États.
   PIERRâILLE, amâs de petites pierres: "Chemin ferré de pierrâille. = Pierrette, petite pierre: jouer à la pierrette, comme font les écoliers. C' est tout l' emploi de ce mot. = Pierreux, plein de pierres: "Champ, chemin pierreux. _ Poires pierreûses. Voy. PIERRES, n°. 4°.

PIERRÉE


PIERRÉE, s. f. [Pié-ré-e: 1re et 2e é fer. r forte: 3e e muet.] Conduit, fait en terre, à pierre sèche, pour l' écoulement et la conduite des eaux.

PIERRERIES


PIERRERIES, s. f. pl. [Piê-reri-e: 1re ê ouv. r forte: 2e et dern. e muet; 3e lon.] Terme collectif. Pierres précieûses. "Riche en pierreries; trafiquer en pierreries. _ Il se dit toujours au pluriel et de plusieurs pierres de diférente espèce.

PIERRETTE


PIERRETTE, PIERREUX, Voy. PIERRâILLE.

PIERRIER


PIERRIER, s. m. [Pié-rié: 2 é fer. r forte.] Sorte de petit canon en usage sur les vaisseaux.

PIÉTÉ


PIÉTÉ, s. f. [Pié-té: 2 é fermés: en vers pi-été, en 3 syl.
   La piété chercha les déserts et le cloître.       Boil.]
Piété, 1°. Dévotion; afection et respect pour les chôses de la Religion. "Homme de piété: avoir de la piété. Voy. RELIGION. = 2°. L' amour qu' on doit avoir pour ses parens. "Piété filiale: la piété des enfans en vers leurs pères et leurs mères. Il ne s' emploie, en ce sens, que dans le discours soutenu, et son usage n' est pas fort étendu.

PIETER


PIETER, v. n. [Pié-té: 2 é fermés. Devant l' e muet, le 1er è est moyen: il piète, piètera.] Piéter, au propre, c' est au jeu des boules et des quilles, tenir le pied à l' endroit qui est marqué pour cela. = Se piéter, au figuré (st. famil.) prendre bien ses mesûres. = M. de Bufon done à~ ce verbe le sens de marcher, en parlant des oiseaux. "Le râle de terre a déja piété plus de cent pas, lorsque le chasseur arrive à la remise. Hist. Nat.

PIÉTINER


PIÉTINER, v. n. [Pié-tiné: 1re et dern. é fer.] Remuer fréquemment les piés par vivacité ou par inquiétude. "Cet enfant ne fait que piétiner. = On dit, avec le régime; piétiner de colère, de rage, d' impatience.

PIÉTON


PIÉTON, s. m. [Pié-ton: 1re é fer.] Homme, qui va à pied. C' est un bon piéton, et au fém. une bone ou mauvaise piétone, qui marche bien et longtems~, ou qui a peine à marcher à pied. = C' est tout l' usage de ce mot. = Quelques-uns le disent d' un exprês, d' un messager, qui va à pied. "Le piéton de tel village: on a dépéché un piéton. L' usage de ce mot est douteux. On dit en certains endroits Pédon. Voy. ce mot.

PIèTRE


PIèTRE, adj. PIèTREMENT, adv. PIèTRERIE, s. f. [1re è moy. 2e e muet.] Piètre, vil, méprisable. Piètrement, d' une manière piètre. Piètrerie, chôse vile et méprisable. "Un habit, une mine piètre: des meubles piètres. "Être logé, vétu, meublé piètrement. "Ce Marchand n' a que de la piètrerie. = L' Acad. dit des deux premiers qu' ils sont familiers, et du 3e qu' il est populaire.

PIEU


PIEU, s. m. [Monos. dout. au sing. long au plur. pieux.] Pièce de bois, pointûe par un des bouts, et qu' on enfonce dans la terre ou dans l' eau. "Ficher un pieu en terre. Planter des pieux. Soutenir des terres avec des pieux.

PIEûSEMENT


PIEûSEMENT, adv. PIEUX, EûSE, adj. [Pi-eû-ze-man, pi-eû, pi-eû-ze: 2e lon. 3e e muet.] Pieux, qui est ataché et afectioné aux devoirs de la piété. "Homme, prince pieux: femme, âme pieûse. = En parlant des chôses, qui part d' un sentiment de piété. "Pieux dessein: pensée, entreprise pieûse. = Legs pieux, qui doit être employé en oeuvres-pies.
   Rem. 1°. Pieux, ne se dit plus que de la piété envers Dieu. Fénélon l' a dit encôre de la piété filiale, et même de la compassion pour les malheureux. "Il étoit conduit par l' amour pieux qu' un fils doit à son père. Télém. "Il alla lui-même retirer son corps sanglant et défiguré: il versa sur lui des larmes pieûses. Ibid. _ Madame de Sévigné l' a employé aussi, mais par allusion à une locution consacrée, et d' ailleurs le mot est en italique, soit par l' atention de l' Éditeur, soit qu' il fût sous ligné à l' original. "Je ne souhaite au monde que d' achever ma vie en vous aimant et en recevant les tendres et pieuses marques; de votre amitié; car vous me paroissez être le pieux Énée en femme. _ L' Acad. ne le dit que de la Religion, quoiqu' elle dise piété de la tendresse filiale. = 2°. Pieux suit ou précède au gré de l' Orateur et du Poète. On a déja vu larmes pieûses et pieuses marques, et plus haut: Homme pieux et pieux dessein.
   Et de là ce respect des peuples du vieil âge,
   Dont le pieux homage
   Plaça leurs bienfaiteurs au rang des immortels.
       Rouss.
Le masculin fait fort mal devant un nom de deux syllabes terminé en e muet: pieux homme, pieux prince, pieux prêtre, etc. forment une inversion désagréable. = 3°. Dévot est adjectif et substantif: pieux n' est qu' adjectif: on dit, un dévot, une dévote: on ne dit point un pieux, une pieûse. * "Je n' en dirois pas tant, d' une pieûse, dit Marivaux. "Les dévots vont à l' Église simplement pour y aller... Les pieux pour y prier Dieu. _ L' Auteur parlait des faux dévots; car pour les véritables, il n' y pas de distinction à faire d' avec les gens pieux.
   PIEûSEMENT, d' une manière pieûse. "Vivre, mourir pieûsement. = Croire pieûsement, c' est croire par principe de piété et sans y être obligé par la Foi. = Quelquefois il signifie, croire par déférence, même dans les chôses profanes.

PIFRE


PIFRE, PIFRESSE, s. m. et f. * Se PIFRER, v. réc. Le 1er est un terme injurieux. Rich. Port. Il est bâs, dit l' Acad. Excessivement grôs et replet. Qui est empifré. "Un grôs pifre: il est devenu bien pifre. "C' est une grosse pifresse. = * Se pifrer est un barbarisme: on dit s' empifrer; se gorger de viandes.

PIGEON


PIGEON, s. m. PIGEONEAU, s. m. PIGEONIER, s. m. [Pijon, jono, nié: 3e dout. au sing. du 2d, lon. au plur. pigeonaux; é fer. au 3e.] Pigeon, oiseau domestique, qu' on élève dans un colombier. Pigeoneau, jeune pigeon. Pigeonier, lieu où l' on élève des pigeons; aûtrement colombier.
   Rem. Pigeon, est un terme moins noble que colombe. C' est mal parler que de dire, par exemple, que le St. Esprit aparut sous la forme d' un pigeon: il faut dire d' une colombe. * M. Hume, protestant, et qui pis est philosophe, se sert du premier mot de préférence, pour mieux tourner en ridicule la Sainte Ampoule de Rheims, et le Traducteur (Mde B... = qui sans une grande infidélité pouvait corriger l' expression l' a traduite litéralement: "La cérémonie de son couronement (de Charles VII) fut faite avec l' huile qu' un pigeon aporta du ciel au Roi Clovis. Hist. d' Angl. = Quand on parle de piegeons vivans, et qui sont apariés, on dit, une paire de pigeons; mais quand on parle de pigeons pour manger, on dit, une couple de pigeons. Voy. COUPLE et PAIRE. = On dit, proverbialement, être logé comme les pigeons, au dernier étage de la maison. = Il ne faut pas laisser de semer par la crainte des pigeons: il ne faut pas abandoner une afaire avantageûse pour quelque léger inconvénient qui s' y troûve. = En st. fig. famil. on apèle pigeon, un homme, qu' on attire pour le duper. On le dit sur-tout parmi les joueurs fripons.

PIGMÉE


PIGMÉE, ou PYGMÉE, s. m. [Le Rich. Port. met le 1er, l' Acad. le 2d: 2e é fer. et long, 3e e muet.] Litéralement, haut d' une coudée; dans l' usage, três-petit homme.
   Ces légions, ces bruyantes armées
   D' esprits subtils, d' ingénieux pigmées,
   Contre le ciel burlesquement haussés.
       Rouss.

PIGNOCHER


PIGNOCHER, v. n. [Mouillez le g: dern. é fer.] Manger négligemment et sans apétit. St. famil.

PIGNON


PIGNON, s. m. [Mouillez le g.] Il a trois significations, qui n' ont aucun raport l' une avec l' aûtre. 1°. Mur d' une maison, qui est terminé en pointe, et qui porte le bout du faitage. = En st. prov. avoir pignon sur rûe, avoir une maison à soi. C' est aussi, avoir du bien en évidence. "J' étois à la veille d' avoir pignon sur rûe, et de vivre de mes rentes. Mariv. = 2°. Amande de la pomme de pin. = 3°. Petite roûe dentée, dont les dents engrènent dans celles d' une plus grande roûe.

PILASTRE


PILASTRE, s. m. Pilier cârré, auquel on done les mêmes proportions et les mêmes ornemens qu' aux colones.

PILE


PILE, s. f. 1°. Amâs de plusieurs chôses entassées avec ordre: "Une pile de bois, de cârreaux, de livres: mettre en pile, en faire une pile. = 2°. Maçonerie, qui soutient les arches d' un pont. = 3°. Un des côtés d' une pièce de monoie. C' est celle où sont les armes du prince. _ Croix ou pile, Voy. CROIX.

PILER


PILER, v. act. PILEUR, s. m. [Pilé, leur: 2 é fer. au 1er.] Piler, c' est broyer, écraser dans un mortier. "Piler des amandes, du verjus, du poivre, etc. = En st. fig. famil. il est neutre: manger. "IL ne fait que piler: il pile bien. _ L' Acad. traite cette locution de populaire.
   PILEUR, ne se dit que dans cette dernière acception. "C' est un grand pileur; un homme, qui mange beaucoup.

PILIER


PILIER, s. m. [Pi-lié: 2e é fer.] 1°. Ouvrage de maçonerie, servant à soutenir un édifice. "Piliers, qui soutiènent la voûte d' une Église. = Fig. st. famil. il se dit de celui, qui ne bouge d' un endroit. "Pilier du Palais, du cabaret, de billard, d' un tripot, etc. = 2°. Poteau de justice. Le nombre des Piliers désigne la diférence des Justices Royales ou Seigneuriales, haute ou moyène. = 3°. Il se dit des poteaux qu' on met dans les écuries pour séparer les places de chevaux; et de ceux entre lesquels on met un cheval dans un manège, pour comencer à le dresser. = En st. prov. se froter au pilier, prendre les mauvaises habitudes de ceux qu' on hante. = Grôs piliers, grosses jambes. "Cet homme a de bons gros piliers.

PILLAGE


PILLAGE, s. m. PILLARD, ARDE, adj. PILLER, v. act. PILLERIE, s. f. PILLEUR, s. m. [Pi-glia-ge, gliar, gliar-de, glié, glie-ri-e, glieur: mouillez les ll: 2e é fer. au 4e, e muet au 5e.] Piller, c' est emporter violemment les biens d' une ville, d' une maison. C' est aussi faire des extorsions, des exactions, des concussions. Pillage et pillerie, action de piller: le 1er se dit des sacagemens des villes, qui se fait avec violence; l' autre des voleries, des extorsions plus secrètes. Pilleur, qui pille. Pillard, qui aime à piller. "Piller une ville; la mettre, l' abandoner au pillage. "Piller une Province, une Comunauté. S' enrichir par ses pilleries. "Il a l' humeur pillarde: c' est un grand pillard, un grand pilleur. _ * Pillard, pour gueux, mendiant, est un gasconisme.
   PILLER, en parlant des chiens, a une signification que ses dérivés ne partagent pas. Se jeter sur les animaux ou sur les persones. "C' est un chien qui pille tous les passans. _ On crie aux chiens, pille, pille! = Populairement, on le dit des persones. "Elles se sont pillées, se sont prises de paroles, se sont dit des injûres.
   Être au pillage, se dit d' une maison, d' une Comunauté, où chacun pille. "Tout est au pillage dans cette maison, dans cet Hôtel-de-Ville. "La Nation fut au pillage, dit l' Ab. de Mably.

PILON


PILON, s. m. Instrument, dont on se sert pour piler. = Mettre un livre au pilon, c' est en déchirer tous les feuilles, de sorte qu' il ne puisse servir qu' aux cartoniers, qui les pilent pour les réduire en pâte. "M. Philandre conseillait à l' Auteur de mettre au pilon tout ce qui était déjà imprimé de son ouvrage.

PILORI


PILORI, s. m. PILORIER, v. act. [4e é fer. au 2d; pilori-é.] On apèle pilori une machine qui tourne sur un pivot, et qui sert à la punition des persones difamées, que la Justice expôse à la risée du public. = Pilorier, mettre au pilori.

PILOTAGE


PILOTAGE, s. m. PILOTE, s. m. PILOTER, v. act. et n. PILOTIS, s. m. [3e e muet au 2d, é fer. au 3e.] Pilote, est celui qui gouverne un vaisseau, qui en dirige la marche. "Bon ou mauvais Pilote. = Pilotis, gros pieu, qu' on fait entrer de force dans la terre pour asseoir les fondemens d' un ouvrage de maçonerie, lorsqu' on veut bâtir dans l' eau, ou dans quelque lieu, dont le fond n' est pas solide. Piloter, enfoncer des pilotis. "Piloter un terrein. Et neutralement: "Ce terrein n' est pas solide: il faudra piloter, avant que de bâtir.
   PILOTAGE a deux sens, dont l' un a raport à Pilote et l' aûtre à Pilotis: 1°. Science du Pilote. "Enseigner, aprendre le pilotage. = 2°. Ouvrage de pilotis: "IL en a tant coûté pour le pilotage.

PILLULE


PILLULE, ou PILULE, s. f. [Le 2d est préférable.] Composition médicinale qu' on met en petites boules. = On dit figurément, st. famil. avaler la pilule, recevoir un afront sans mot dire. _ Dorer~ la pilule, adoucir les refus ou des propositions désagréables.

PIMBêCHE


PIMBêCHE, s. f. [Pein-bêche: 2e ê ouv. et long: 3e e muet.] Terme de mépris. Femme impertinente, qui fait la précieûse. "C' est une pimbêche: une vraie, une petite pimbêche: st. famil. et critique.

PIMPANT


PIMPANT, ANTE, adj. [Pein-pan, pante: 1re et 2e lon.] Superbe et magnifique en habits (st. râilleur ou plaisant). "Vous voilà bien pimpant. "Elle était extrêmement pimpante.

PIMPESOUÉE


PIMPESOUÉE, s. f. [Pein-pe-sou-é-e: 1re et pénult. lon. 2e e muet, 4e é fer.] Femme, qui fait la délicate et la précieûse. "C' est une vraie pimpesouée. st. famil. et caustique.

PIMPRENELLE


PIMPRENELLE, ou PIMPINELLE, s. f. [Pein-prenèle, pinèle: 1re lon. 2e e muet au 1er, 3e è moy. = Le grand usage est pour le 1er, et c' est même le seul qui soit dans le Dict. de l' Acad. L. T.] Sorte d' herbe potagère. "On dit que la pimprenelle purifie le sang et nettoie les reins.
   Rem. Nicot a dit pempernelle: on dit en Anjou pimpenelle, et à Paris pimprenelle: c' est donc comme il faut parler. MÉN. _ M. Desgrouais traite pimpinelle de gasconisme.

PIN


PIN, s. m. [Pein, monos.] Grand arbre, toujours verd, dont on tire la résine. Ses feuilles ne sont que des espèces de filets fort menus et rangés en bouquets. = Le pin sauvage s' apèle aussi pinastre. "Pomme de pin: l' amande qu' elle renferme s' apèle pinon

PINACLE


PINACLE, s. m. La partie la plus élevée d' un édifice. On ne le dit au propre que de l' endroit du Temple, où le Sauveur fut transporté, quand il fut tenté par le Démon. = Au figuré, st. famil. être sur le pinacle, dans une grande élévation de fortune. = Mettre quelqu' un sur le pinacle, le louer excessivement. "La Comtesse est trop plaisante sur M. de Lausun, qu' elle vouloit mettre sur le pinacle, et qui n' a encore ni logement à Versailles, ni les entrées qu' il avoit. Sév.

PINASSE


PINASSE, s. f. [Pinace: 3e e muet.] Sorte de bâtiment de charge, qui va à voiles et à rames.

PINCE


PINCE, s. f. [Pein-ce: 1re lon. 2e e muet.] 1°. Bout du pied de certains animaux. "La pince d' un cerf, d' un cheval. _ On dit, par extension, la pince du fer de cheval. = 2°. Pinces, au pluriel, les deux dents supérieures et inférieures de devant du cheval. = 3°. Pince, bârre de fer, aplatie par un bout, dont on se sert comme d' un levier. = 4°. Pli qu' on fait à du linge ou à de l' étofe. Cette veste est trop large, il y faut faire une pince. = 5°. Populairement, cet homme est sujet à la pince, il est d' humeur à griveler. "L' argent des Comunautés est sujet à la pince, à être pris, volé, pillé. = 6°. * Pince, pour pinçon, est un gasconisme. Tirer une pince, ou un pince, des pinces. Dites, faire un pinçon.

PINCEAU


PINCEAU, s. m. PINCELIER, s. m. [Pein-so, ce-lié: 1re lon. 2e e muet au 2d, dont la 3e é fer. _ Cette 2de dout. au singulier du 1er, lon. au pluriel, pinceaux.] Pinceau, est au propre une plume garnie par un bout d' un poil délié, et dont les Peintres se servent pour apliquer et pour étendre les couleurs. "Trait, coup de pinceau. = Comme on dit d' un Auteur, qu' il n' a pas mis la dernière main à son ouvrage, on dit, d' un Peintre, qu' il n' a pas encôre doné le dernier coup de pinceau à un tableau. = Au figuré, ce mot se dit de la manière de colorier d' un Peintre. "Ce Peintre a un beau pinceau, un pinceau hardi, ou agréable, délicat, etc. = Plus figurément encôre, on le dit d' un Poète, d' un Orateur. "On en vante le docte, le savant pinceau. = En st. prov. Doner un vilain coup de pinceau à quelqu' un, lancer contre lui un trait mordant et satirique.
   PINCELIER, vâse séparé en deux parties, dans lequel les Peintres prènent l' huile, dont ils ont besoin pour méler leurs couleurs, et qui sert aussi à~ nétoyer leurs pinceaux et leurs brosses.

PINCÉE


PINCÉE, s. f. [Pein-cé-e: 1re et 2e lon. é fer. à la 2e, e muet à la 3e.] La quantité qu' on peut prendre de certaines chôses avec deux ou trois doigts. "Une pincée de sel, de tabac, etc.

PINCE-MâILLE


PINCE-MâILLE, s. m. [Pein-cemâ-glie: 1re et 3e lon. 2e et dern. e muet: mouillez les ll: La Fontaine, ou quelqu' un de ses Imprimeurs écrit pinsemaille avec une s et sans tiret: mais dès qu' on écrit pincer, et non pas pinser, on doit écrire pince-mâille, et non pas pinse-maille.] Homme, qui fait paraitre son avarice jusque dans les plus petites chôses. st. famil.
   Un pinse-maille avoit tant amassé,
   Qu' il ne savoit où loger sa finance.
       La Font.

PINCER


PINCER, v. n. et act. [Pein-sé: 1re lon. 2e é fer.] 1°. Neutre, serrer la superficie de la peau avec les doigts ou aûtrement. "Pincer fortement, jusqu' au sang. Et activement. "Pourquoi me pincez-vous? = Figurément, critiquer, râiller. "Il l' a pincé rudement, ou, doucement, adroitement, finement. Et neutralement sans régime. "Pincer sans rire, ou, en riant. Ce sont des expressions consacrées. = 2°. En Agricultûre, couper ou presser quelques bourgeons, pour empêcher qu' un arbre ne pousse trop. = 3°. En parlant d' instrumens de musique à cordes, en tirer le son en les touchant du bout des doigts au lieu de les toucher en baterie. "Pincer le luth, la harpe, la guitarre. = 4°. En termes de marine, pincer le vent, aler au plus prês du vent.
   PINCÉ, ÉE, adj. Afecté. "Air pincé, style pincé.

PINCETTES


PINCETTES, s. f. pl. [Pein-cète: 1re lon. 2 è moy. 3e e muet.] 1°. Ustensile de fer, divisé en deux branches, dont on se sert pour acomoder le feu. "Une paire de pincettes: arranger, atiser le feu avec des pincettes. "En Provence, on dit, mouchettes: en ce sens c' est un barbarisme. Ailleurs on dit, les pinces, qui ne vaut pas mieux. = Pincettes, se dit ordinairement au pluriel: mais dans cette acception, dit l' Acad. on le dit quelquefois au singulier: donnez-moi la pincette. = 2°. Instrument de fer, dont on se sert pour s' arracher le poil. = 3°. Petit instrument de fer aussi et à deux branches, dont on se sert pour prendre ou pour placer de certaines chôses, qu' on ne pourrait ni prendre, ni placer si facilement avec les doigts. * "Pinces, en ce sens est un gasconisme.

PINCHINA


PINCHINA, s. m. [Pein-china: 1re lon.] Sorte de grôs drap.

PINÇON


PINÇON, s. m. [Pein-son: 1re lon.] La marque, qui reste sur la peau, quand on a été pincé. "Faire un pinçon avec le bout des doigts.

PINDARIQUE


PINDARIQUE, adj. PINDARISER, v. n. PINDARISEUR, s. m. [Pein-darike, rizé, ri-zeur: 1re lon. 4e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Pindarique, qui est dans le goût de Pindare, Poète grec. Ode pindarique. = Pindariser, afecter, sous prétexte d' imiter Pindâre, un style enflé, des termes recherchés, des tournûres bizârres. "Cet homme ne parle pas naturellement, il veut toujours pindariser.
   Pardon, Messieurs, j' imite trop Pindâre.       Rouss.
Pindariseur, qui pindarise: "Un sot pindariseur. = Danet écrit pindarizer: ce n' est pas l' usage. = Quelques précieuses disent pindaliser: c' est une faûte grossière. DICT. D' ORT.

PINQUE


PINQUE, s. f. [Pein-ke: 1re lon. 2e e muet.] Espèce de flûte, dit l' Acad. Bâtiment de charge fort plat. _ Sur la Méditerranée on apèle de ce nom une grosse barque à trois mâts portant des voiles latines ou triangulaires. Plusieurs marins font ce mot masculin, et disent un pinque, au lieu de dire, une pinque.

PINSON


PINSON, s. m. [Pein-son: 1re lon.] Petit oiseau qui a le bec grôs et fort dur, et dont le plumage est de diverses couleurs. * Le mot provençal est quinson. Plusieurs en Provence le disent en français. = On dit, proverbialement, gai comme un pinson, fort gai.

PINTADE


PINTADE, s. f. [Pein-tade: 1re lon. 3 e muet.] Espèce de poule, dont le plumage est tacheté. L' origine de ce mot est l' espagnol pintada, qui signifie peinte.

PINTE


PINTE, s. f. PINTER, v. n. [Pein-te, té: 1re lon. 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Pinte, est 1°. une mesure des liquides qui est de diférente grandeur selon les diférens lieux. "La pinte de Paris contient 48 pouces cubes. Vendre à pot et à pinte. = 2°. La quantité de liqueur, que contient une pinte. "Boire, payer pinte. = Le proverbe dit: il n' y a que la première pinte qui coûte; dans chaque afaire, il n' y a que le comencement, qui fasse de la peine. = Pinter, est un terme populaire. Boire en débauche: "Il ne fait que pinter: il n' aime qu' à pinter.

PIOCHE


PIOCHE, s. f. PIOCHER, v. act. et n. [Pio-che, ché: 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Pioche, est une sorte d' instrument, dont on se sert pour fouir la terre. Piocher, travailler à fouir la terre avec une pioche: "Piocher une vigne; et sans régime: il faut piocher en cet endroit. = Un fameux Avocat de Paris disait figurément qu' il lui falait encore piocher une année pour réparer un vide de cent mille francs qu' il avait perdus.

PION


PION, s. m. [Monosyllabe.] Une des petites pièces du jeu des échecs. "Il y a huit pions blancs et huit pions noirs. Le pion du roi, de la dame, etc. Mener un pion à dame Doner un pion au propre, c' est faire à l' adversaire l' avantage de retrancher un pion de son jeu. _ Au figuré (st. famil.) damer le pion à quelqu' un, l' emporter sur lui: l' Acad. ajoute, avec hauteur.

PIONNIER


PIONNIER, ou PIONIER, s. m. [Pi-o-nié: 3e é fer.] Travailler, dont on se sert dans une armée pour aplanir les chemins et pour remuer la terre dans les diférentes ocasions.

PIPE


PIPE, s. f. Ce mot a deux sens, qui n' ont aucun raport ensemble. 1°. Grande futâille, qui contient un muid et demi. = 2°. Petit tuyau de terre cuite ou d' autre matière dont on se sert pour prendre du tabac en fumée. "Alumer sa pipe: fumer une pipe, deux pipes, etc.

PIPEAU


PIPEAU, s. m. [Pipo: 2e dout. au sing. lon. au plur. pipeaux.] Chalumeau, flûte champêtre. Il ne s' emploie que dans les poésies pastorales.

PIPÉE


PIPÉE, s. f. PIPER, v. act. [2e é fer. long au 1er.] Pipée, est une sorte de chasse, où l' on contrefait un certain chant pour atirer les oiseaux dans un arbre, dont les branches sont remplies de gluaux, où ils se prènent. = Piper des oiseaux, contrefaire leurs voix, pour les atirer dans le filet ou aux gluaux.
   Rem. On a dit autrefois piper, pipeur, pour tromper, trompeur. CORNEILLE a dit un mystère pipeur, un gage pipeur. MM. de Port royal emploient souvent ce mot piper, qui se troûve dans une belle pensée de Pascal, citée comme autorité dans le suplément de Trévoux. L' Auteur du suplément ne dit point si ce mot est encôre en usage. Il devrait le dire, puisqu' un Dictionaire est fait pour éclairer les étrangers. L' Acad. Franç. n' emploie ce verbe que dans cette phrâse, piper les dés, (préparer des dés pour tromper au jeu) et il n' a plus d' autre usage dans notre Langue. Rem. de L. Racine. _ Dans la dernière édition l' Acad. met piper, piperie, pipeur, sans dire à quel style ces mots apartiènent: ils sont populaires. "Ils l' ont pipé et lui ont gâgné tout son argent: "C' est un grand pipeur; un pipeur fiéfé. "Cela ne s' est pu faire sans piperie. "Il n' y a que piperie dans le monde. = Suivant l' Auteur des Réflexions (déjà un peu ancien) on dit piper dans le discours familier. "Quiconque a dessein de piper le monde est assuré de trouver des persones qui seront bien aises d' être pipées. Je crois ce mot vieux et hors d' usage, excepté dans le bâs comique, le marotique ou le burlesque. En parlant des tromperies au jeu, il est un peu plus usité. L' Acad. ne le met qu' en ce sens, excepté dans la dernière phrâse, citée plus haut, où elle dit piperie de toute sorte de tromperie, de fourberie.

PIQUANT


PIQUANT, ANTE, adj. PIQUE, s. fém. PIQUER, v. act. PIQûRE, s. fém. [Pikan, kante, ke, ké, kûre: 2e lon. aux deux premiers et au dern. e muet au 3e, é fer. au 4e.] Piquer, au propre, c' est entamer légèrement avec quelque chôse de pointu: "Une épingle l' a piqué; il s' est piqué. = Il se dit aussi de la morsûre des serpens, des insectes. "Être piqué par un serpent. l' Amour piqué par une abeille. = Au fig. fâcher, ofenser. "Cette afaire l' a piqué. "Vous l' avez piqué jusqu' au vif; il se pique de la moindre chôse. _ Piquer d' honeur, engager à faire quelque chôse, en persuadant à une persone que son honeur y est intéressé. = Piqûre ne se dit qu' au propre; petite blessûre que fait une chôse qui pique. "Piqûre d' une épingle, d' une abeille, d' un scorpion. = Pique, au contraire, ne se dit qu' au figuré: brouillerie qui est entre deux ou plusieurs persones. "Il y a de la pique dans cette afaire: il a fait cela par pique = Piquant se dit dans les deux sens. Qui pique. "Les branches de rosiers sont piquantes. = Ofensant. "Parole, réponse piquante. = Il a un 3e sens, que n' a pas son verbe, et se dit quelquefois d' une persone, et plus souvent d' un ouvrage d' esprit qui plait et qui touche extrêmement; beauté piquante, style piquant: "Il n' y a rien de piquant dans ce qu' il écrit. = Dans le Jugement de Midas, Apollon, avant de chanter à Midas la Fable où il le compare à un baudet, lui dit d' un air fin. "Je vous assure d' avance que vous trouverez ce morceau très-piquant. C' est un jeu de mots, qui roule sur les deux sens de cet adjectif, au figuré, agréable et malin.
   Rem. 1°. Piquant aime à suivre: trait piquant, parole piquante. Le fém. peut précéder en vers et dans la prôse poétique.
   Loin de vous l' aquilon fougueux
   Soufle sa piquante froidure.
       Rouss.
  Plus d' une fois, ta piquante hyperbole,
  Ã€~ tes censeurs a su doner leur fait.
      Idem.
   Au propre, il est s. m. et se dit des pointes qui viènent à certains arbres: "Les chardons sont pleins de piquans.
   2°. PIQUE a deux autres sens, qui n' ont qu' un raport éloigné avec le verbe piquer. = 1°. Sorte d' arme à long bois, dont le bout est garni d' un fer plat et pointu. = On dit, figurément, st. famil. surpasser de cent piques, de beaucoup. "Nous voulûmes la comparer à... et nous la trouvâmes cent piques au-dessous. Sév. "Elle surpasse la Desoeillets de cent mille piques. La même. = 2°. S. m. Au jeu des cartes, une des quatre couleurs qui a la figûre d' un fer de pique. Voy. PIC, n°. 2°. "Un pique; jouer du pique. "Il a écarté tout son pique.
   3°. PIQUER, dans le sens d' afecter, toucher, ne se prend plus qu' en mauvaise part, au figuré, excepté dans cette expression, piquer d' honeur. Autrefois on le disait en bien comme en mal: Les plus belles chôses, à force d' être redites, ne piquent plus et cessent presque d' être belles. Bouh. "Ce n' est pas l' intérêt public qui nous pique, c' est la jalousie. = On dit, proverbialement, dans le sens d' ofenser: on ne sait quelle mouche l' a piqué, on ne sait point le sujet de sa colère, de son dépit.
   Gardez-vous, dira l' un, de cet esprit critique,
   On ne sait bien souvent quelle mouche le pique.
       Boileau.
= On dit aussi d' un ladre, qu' il ne sent pas quand on le pique; ce qui s' aplique figurément à celui qui est insensible aux afronts = Se piquer au jeu se dit au propre, d' un joueur que le dépit de sa perte engage à jouer plus grôs jeu qu' auparavant. Être piqué au jeu se dit au figuré de la détermination de venir absolument à bout de ce qu' on a entrepris. = Se piquer, se glorifier régit la prép. de devant les noms et les verbes. "Je ne me pique, ni de fermeté, ni de philosophie: mon coeur me mène et me conduit. Sév. "Il se pique de bien chanter.
   PIQUER s' emploie encôre dans d' aûtres sens. _ Piquer de la viande, la larder prês à prês. = Afecter le goût: du vin qui pique agréablement la langue. _ Employé neutralement, il se prend en mauvaise part: c' est afecter d' une manière désagréable. "Du fromage, du poisson qui pique. Piquer une étofe, faire sur deux étofes, mises l' une sur l' aûtre, des points avec du fil et de la soie, qui les traversent et les unissent. "Piquer un bonet, une courte-pointe. = Piqûre se dit en ce sens. "La piqûre d' une jupe, d' un matelas, etc.

PIQUE-NIQUE


PIQUE-NIQUE, s. m. [Pik-nik: les deux e ne se font presque pas sentir. Quelques-uns, dit la Monnoie, écrivent pic-nic, et citent la loi de pic-nic, qui veut que chacun paye également son écot.] Un pique-nique, ou un repas à pique-nique, est un repâs où chacun paye son écot. "Faire un pique-nique; dîner, souper à pique-nique, ou en pique-nique. L' Acad. ne met que le 1er, et il est plus sûr.
   Rem. Suivant Ménage, ce mot n' est pas ancien dans la langue: il est même inconu dans la plupart des Provinces. Aujourd' hui il est usité par-tout.

PIQUER


PIQUER. Voy. PIQUANT.

PIQUET


PIQUET, s. m. [Pikè: 2e è moy.] 1°. Petit pieu qu' on fiche en terre pour tenir une tente, un pavillon en état. = 2°. En termes de guerre, certain nombre de soldats toujours prêts à marcher aux ordres des Oficiers. "Prendre les piquèts de l' armée pour une expédition: ce jour là ils étaient de piquèt. _ Lever le piquèt, décamper. = En style prov. planter le piquèt en un lieu, s' y établir:
   Elle prend l' autre lot, y plante le piquet.
       La Font.
= 3°. Long bâton ou perche qu' on plante d' espace en espace pour prendre un alignement. "Planter des piquèts. = 4°. Sorte de jeu de cartes fort conu. "Jouer au piquèt.

PIQUETTE


PIQUETTE, s. f. [Pikète: 2e è moy. 3e e muet.] C' est proprement une boisson faite avec de l' eau mise dans un tonneau où il y a du marc de raisin. = Par extension, on le dit d' un vin faible. = Figurément, st. famil. de toute liqueur inférieure. On a dit des eaux de Greoux, en Provence, que c' est la piquette des eaux de Barège; qu' elles ont les mêmes qualités, mais dans un degré inférieur.

PIQUEUR


PIQUEUR, s. m. [Pi-keur.] 1°. En termes de Vènerie, homme de cheval, dont la fonction est de suivre une meute de chiens, et de les faire bien chasser. = 2°. Dans les Manèges, celui qui s' ocupe à débourrer les chevaux. = 3°. Celui qui monte les chevaux, que les maquignons mettent en vente. = 4°. Dans les bâtisses un peu considérables et aûtres ouvrages, celui qui tient le rôle des ouvriers, et qui veille sur l' ouvrage. = 5°. Chez les Rôtisseurs, et dans les grandes cuisines, celui qui pique, qui larde les viandes.

PIQUIER


PIQUIER, s. m. [Pi-kié, 2e é fermé.] Soldat armé d' une pique. "Il y avait aûtrefois, dans l' Infanterie, des compagnies de Piquiers.

PIQûRE


PIQûRE, s. f. C' est ainsi que Rollin, M. de Bufon et l' Acad. écrivent ce mot: Pluche écrit picûre avec un c: Trév. met piqueure, ou piquûre: le 1er est vieux, le 2d est dans l' analogie de la langue; car le q ne marche jamais seul et sans être acompagné de l' u: s' il exprime tout seul le son que nous rendons par qu, il faut donc écrire piqant, piqé, répliqe, etc. si qu au contraire n' est qu' une seule consone, qui exprime le son du k, il faut écrire piqûre. Serait-ce parce que la voyèle qui suit est un u; mais cet u se troûve dans quelqu' un, et l' on a souvent critiqué ceux qui écrivent quelqun. = Dans le journal de Paris, on remarque qu' il n' y a pas 50 ans qu' on écrivait piqueure; qu' on a suprimé le premier e; mais que pour éviter la rencontre inutile des deux u on a écrit piqûre. Pour l' objection tirée de quelqu' un, on répond que ce n' est pas un seul mot, mais l' union de deux. = Voy. PIQUANT. Voy. aussi PIQUER, Rem n°. 2°. à la fin.

PIRATE


PIRATE, s. m. *PIRATIQUE, adj. PIRATER, v. n. PIRATERIE, s. f. [3e e muet au 1er et au dern. é fer. au 3e.] Pirate est celui qui, sans comission d' aucun Prince, court les mers pour piller. = On le dit par extension, des corsaires des Barbaresques, quoiqu' ils aient comission de ceux qui comandent dans ces républiques barbâres. "* Piratique, qui tient du pirate. C' est un anglicisme; piratical: "Cette entreprise est traitée de perfide et de piratique. Hist. des Stuarts. = Pirater, faire le métier de pirate. "Plusieurs vaisseaux pirataient sur ces mers. = Piraterie, métier, action de pirate. "Exercer la piraterie: Plusieurs corsaires infestaient ces mers par d' horribles pirateries.

PîRE


PîRE, adj. et subst. PIS, adv. et subst. [1re lon. au 1er, 2e e muet: l' s du second ne se prononce pas devant une consone: elle se prononce comme un z devant une voyèle: pi: piz.] Pire est le comparatif de mauvais: au superlatif, on dit, le pire, et non pas le plus pire, comme dit souvent le peuple. Il est suivi, quand il est comparatif, de la conjonction que; ce vin là est pire que le premier; et quand il est superlatif de la prép. de. C' est le pire de tous ceux que nous avons bus. Cette préposition se met quelquefois à la tête de la phrâse: "De deux maux, il faut éviter le pire. = Il est substantif dans cette phrâse: avoir du pire dans une afaire; et dans ce Proverbe: souvent qui choisit prend le pire.
   PIS est le comparatif de l' adv. mal: on dit, au superl. le pis. Il est pis (plus mal) que jamais. "Il n' y a rien qui soit pis que cela: "Le pis qui puisse arriver, c' est que, etc. = Faire du pis qu' on peut, faire mal quelque chôse de dessein formé, ou nuire à quelqu' un en tout ce qu' on peut. = Prendre ou mettre les chôses au pis, les envisager dans le pire état où elles peuvent être. = Mettre quelqu' un au pis, se dit par manière de défi. Dans ces dernières phrâses, il est substantif.
   Rem. Des Auteurs ont mis pire pour pis, et d' aûtres, pis pour pire. "C' est bien pire, dit l' Historien du Droit Écl. Fr. et aussi le P. d' Avrigni ou son Imprimeur. "Les chôses allerent de mal en pire. Anon. Dites, de mal en pis. Ce remède contre les dégoûts et l' ennui devient pis que le mal. Anon. Là, il falait pire. _ M. Desgrouais a mis cette faûte grossière parmi les gasconismes. "Mon mal est pis (pire) que vous ne pensez. = Suivant La Touche, de mal en pis et de bien en mieux sont des expressions bâsses, et qui ne sont bones que pour le peuple. Il veut qu' on dise, de pis en pis, et de mieux en mieux. Il avoûe cependant que l' Acad. ne rejette point ces premières expressions. = Dans la dern. édit. l' Acad. met les deux: de mal en pis et de pis en pis. Pour, de bien en mieux, il est peu usité: on dit, de mieux en mieux. = On dit, substantivement, (st. famil.) le pis du pis: "Le pis du pis seroit d' avoir travaillé inutilement durant quelques jours. Voy. d' Anson. = Quelques-uns disent, le sanglant pis; expression barroque, et qui sent le Petit-maître. = Qui pis est, façon de parler, qui signifie ce qu' il y a de pire, de plus fâcheux.
   PIS-ALER, s. m. Il n' est pas du beau style. "Leur situation présente étoit leur pis aller. Charlev. "Le pis aller sera de la publier moi-même (cette aventûre) Marm. "Le pis aller étoit que j' échouasse, et ce pis-aller étoit contre moi, et non contre la chôse. Moreau. = On dit, adverbialement, au pis aller. "Au pis aller nous reviendrons sur nos pâs.
   *PIREMENT, adv. L' usage n' a point autorisé ce mot. Dict. d' Ort. Il a été employé par Le Maître: Ils sont traités pirement que des esclaves. Pirement ne vaut rien du tout, dit Andry.

PIS


PIS, adv. Voy. PIRE. = Pis, s. m. La partie de la fémelle qui contient le lait. "Le pis d' une vache.

PISCINE


PISCINE, s. f. [On ne pron. point l' s.] Vivier, réservoir d' eau. On ne le dit qu' en parlant du lieu où l' Évangile dit que l' Ange descendait une fois tous les ans pour troubler l' eau. On l' apelait piscine probatique. = Dans les Sacristies, on done ce nom à un lieu, où l' on jète l' eau qui a servi à nétoyer les vases sacrés, à laver les pales, corporaux, purificatoires, etc.

PISSAT


PISSAT, s. m. PISSEMENT, s. m. PISSER, v. n. et act. PISSOIR, s. m. [Pi-sa, ceman, cé, soar: 2e e muet au 2d, é fer. au 3e.] Pissat, en parlant de l' Homme, Urine corrompûe: Cela sent le pissat. En parlant des animaux; on ne dit pas urine, on dit pissat. "Du pissat de cheval: le pissat du chat est três-puant. = Pisser, uriner. "Pisser à plein canal: il a beaucoup pissé: il ne pisse qu' avec peine. = Uriner est un mot plus honête. = V. act. "Pisser du sang, du pus. Avec ce régime, on ne se sert point d' uriner. = Pissement ne se dit que d' une évacuation du sang par la voie des urines. "Pissement de sang. Hors de là, on ne le dit point, excepté dans le bâs comique. "Voilà un bien long pissement, fait-on dire à un Suisse. = Pissoir, lieu destiné dans quelques endroits publics pour y aller pisser.

PISSENLIT


PISSENLIT, s. m. PISSEUR, EûSE, s. m. et fém. [Pi-sanli, pi-seur, seû-ze: 2e lon. au 1er et au dern.] Pissenlit est le nom d' une plante. On le dit burlesquement d' un enfant qui pisse au lit. = PISSEUR, qui pisse souvent: "C' est un grand pisseur, une grande pisseûse, st. famil.

PISSOTER


PISSOTER, v. n. PISSOTIèRE, s. fém. [Pi-soté, tiè-re: 3e é fermé au 1er, è moy. et long au 2d.] Pissoter, c' est uriner fréquemment et en petite quantité. = Pissotière, se dit, par mépris, d' un jèt d' eau ou d' une fontaine qui jète peu d' eau.

PISTACHE


PISTACHE, s. f. [Quelques-uns font ce mot masculin, mais mal: ils disent, ces pistaches sont bons, sont vieux; il faut dire, sont bones, sont vieilles.] Espèce de noisette de la forme d' une olive, dont l' envelope est rousse et l' amande verte. "On trouve sur les montagnes de grosses pistaches de plusieurs espèces. Let. Édif.

PISTACHIER


PISTACHIER, s. m. [Pista-chié: 3e é fer.] L' arbre qui porte les pistaches.

PISTE


PISTE, s. fém. [2e e muet.] Trace, vestige. Il se dit, au propre, des animaux, et au figuré, des hommes. "On a perdu la piste de la bête; la suivre à la piste. Fontenelle dit de M. Viviani, que: "Regrettant la perte d' un grand nombre d' ouvrages des anciens Géomètres, il entreprit, à l' âge de 24 ans, de la réparer, du moins en partie, en se remettant... sur leurs pistes, et en tâchant de deviner ce qu' ils avoient dû nous dire. La Bruyère. dit aussi, en parlant des Grands Seigneurs simples et modestes: "Ceux qui suivent leur piste, observent par émulation cette simplicité et cette modestie. _ L' Acad. en parlant des hommes, ne dit que suivre à la piste. "On a suivi ces voleurs à la piste. = Je ne blâme pas l' expression, dont se sont servi Fontenelle et La Bruyère; mais ordinairement, on dit leurs traces, plutôt que leurs pistes.

PISTOLE


PISTOLE, s. fém. 1°. Monaie d' or étrangère. = 2°. Monaie de compte: dix francs. "Il a perdu au jeu mille pistoles.

PISTOLèT


PISTOLèT, s. m. [Pistolè: 3e è moy.] Petite arme à feu, qu' on porte à l' arçon de la selle, et quelquefois à la ceintûre. "Charger, décharger un pistolèt: tirer un coup de pistolèt. À~ la portée du pistolèt: il n' y a d' ici là, qu' une portée de pistolèt, etc...

PISTON


PISTON, s. m. Cylindre de bois, de fer ou de cuivre, qui entre dans le corps d' une pompe, d' une seringue, etc. pour servir à élever et à pousser l' eau ou toute aûtre liqueur, à pomper l' air, etc.

PITANCE


PITANCE, s. f. [2e lon. 3e e muet.] La portion de pain, vin, viande, qu' on done à chaque repâs, dans les Communautés. "Régler, retrancher, doubler la pitance. St. famil. = Plusieurs distinguent la pitance du pain, et disent: tant de pain ou de bled, et tant d' argent pour la pitance. L' Acad. ne fait pas cette distinction.

PITAUD


PITAUD, AUDE, s. m. et f. [Pitô, tôde: 2e lon.] Terme de mépris; paysan lourd et grossier; grosse paysane. On le dit moins des paysans et des paysanes, que de ceux qui en ont l' air et les manières. "C' est un vrai pitaud, une franche pitaude. _ Mde de Sévigné dit, en badinant, à sa fille: "En vérité, vous êtes une vraie pitaude, quand je pense avec quelle simplicité vous êtes malade.

PITE


PITE, s. f. Aûtrefois, petite monaie de cuivre, valant la moitié d' une obole, et le quart d' un denier.

PITEûSEMENT


PITEûSEMENT, adv. PITEUX, EûSE, adj. [Pi-teû-zeman, teû, teû-ze: 2e lon. 3e e muet.] Piteux, digne de pitié, de compassion. Il ne se dit que des chôses, et n' est plus bon que pour le style familier. Aûtrefois on l' employait dans le haut style. En ce piteux état, il n' a rien de fidèle. Malherbe. = On dit, en st. prov. faire piteûse mine, une mine rechignée: faire piteûse chère, mauvaise chère. _ Il fait le piteux, il se lamente sans en avoir autant de sujet qu' il voudrait le faire croire.
   PITEûSEMENT, d' une manière à faire pitié. "Il se lamentait, il criait piteûsement, st. famil. et moqueur.

PITIÉ


PITIÉ, s. f. [2e é fer.] Compassion; sentiment de douleur qu' excitent dans nous les maux, les misères d' aûtrui. "Avoir pitié de (sans article) être touché de pitié. "La Tragédie doit exciter la terreur et la pitié. "Coeur sans pitié, etc. = Prendre pitié régit de:
   Prends pitié de l' état où tu me vois réduit.
       Crébil.
Rem. On dit grand' pitié, et non pas grande pitié: cette Princesse fait grand pitié. Sév. "Ce serait grand' pitié, si ou que, etc. "Le présent n' est qu' un instant, et ce seroit grand' pitié que les hommes fussent réduits à borner là leurs espérances. Fonten. = À~ faire pitié, espèce d' adjectif: "Idoménée tomba dans une tristesse mortelle, et une désolation à faire pitié. Télém. = Faire pitié signifie aussi et plus souvent, se faire mépriser: "Cet Auteur, cet ouvrage fait pitié: il écrit, il chante à faire pitié. = On dit, dans le même sens, que c' est pitié, ou une pitié: "Il chante, il fait des vers que c' est pitié, ou que c' est une pitié. = Regarder en pitié emporte maintenant mépris et fierté autant (et bien plus) que compassion. "Il est fort entêté de son mérite, et il regarde tout le reste du monde en pitié.
   Et les deux bras croisés, du haut de son esprit,
   Il regarde en pitié tout ce que chacun dit.
       Mol. Misantr.
Quand il s' agit de témoigner de la compassion, il ne faut donc pas dire, regarder en pitié, mais d' un oeil, ou avec un oeil de pitié. L. T. = Le Proverbe dit: il vaut mieux faire envie que pitié.

PITON


PITON, s. m. Clou dont la tête est percée en anneau.

PITOYABLE


PITOYABLE, adj. PITOYABLEMENT, adv. [Pi-to-ia-ble, ableman; 3e dout. au 1er, 4e e muet.] L' adjectif a deux sens; 1°. en parlant des persones, qui est enclin à la pitié. "Homme bon et pitoyable. _ En parlant des chôses, qui excite la pitié: "Voix, récit, accent pitoyable: cris pitoyables. = 2°. Qui fait pitié, qui mérite le mépris, ou qui l' excite. "Orateur, discours, poème pitoyable. * Voiture s' est servi de ce mot dans un sens qui ne vaut rien. "Si j' osois vous écrire des lettres pitoyables, je dirois des choses qui vous feroient fendre le coeur. Aujourd' hui, des lettres pitoyables ne pourraient signifier que de méchantes lettres; et ce n' est certainement pas ce que Voiture voulait dire. = L' adverbe ne se dit guère que pour marquer du mépris: il chante, il écrit, il raisone pitoyablement. LA TOUCHE remarque que l' ACAD. le dit aussi de ce qui excite la compassion; et qu' on peut dire, par exemple: il vit pitoyablement: il est traité pitoyablement. L' Acad. admet en éfet ce sens, mais elle n' en done point d' exemple.

PITTORESQUE


PITTORESQUE, ou PITORESQUE, adj. PITORESQUEMENT, adv. [Pitorèske, ke--man; 3e è moy. 4e e muet.] Pitoresque se dit, au propre, de ce qui prête à une peintûre vive ou gracieûse: site, atitude pitoresque. = Au figuré, on le dit de tout ce qui peint à l' esprit. "Description, balet pitoresque: terme, expression énergique et pitoresque. = Pitoresquement, d' une manière pitoresque.

PITUITAIRE


PITUITAIRE, adj. PITUITE, s. f. PITUITEUX, EûSE, adj. [Pitui-tère, ite, iteû, teû-ze: 3e è moy. et long au 1er, e muet au 2d, lon. aux 2 dern.] Pituite, flegme: l' une des humeurs du corps humain. "La pituite l' étoufe. Pituitaire (Anatomie) qui a raport à la pituite. "Sinus, membrane pituitaire. = Pituiteux, qui abonde en pituite. "Homme pituiteux. Humeur pituiteûse.

PIVERT


PIVERT, s. m. Oiseau, dont le plumage est jaunâtre et vert, et qui a un bec pointu, avec lequel il creûse les arbres.

PIVOINE


PIVOINE, s. m. et f. [Pi-voa-ne: dern. e muet.] Il est masc. quand il signifie une sorte de petit oiseau, qui a la gorge rougeâtre et le chant fort agréable. = Il est féminin, quand on parle d' une plante, qu' on cultive dans les jardins pour la beauté de ses fleurs. = L' Acad. l' avoit dabord marqué féminin dans le 1er sens; la pivoine est un bel oiseau. Dans la dern. édit. elle le marque masculin, et ne met point cette phrâse.

PIVOT


PIVOT, s. m. PIVOTER, v. n. [Pivo, voté.] Pivot, est 1°. Morceau de métal, qui soutient un corps solide et qui sert à le faire tourner. "Machine, qui tourne sur son pivot. = Figurément, on le dit d' un homme, qui a la principale part dans une afaire. "C' est le pivot sur lequel toute cette afaire tourne. = Il ne parait pas être un terme fort noble. Cependant Massillon l' a employé noblement: "Esprits vastes, mais inquiets et turbulens, capables de tout soutenir, hors le repôs, qui tournent sans cesse autour du pivot même, qui les fixe et les attache. = Comunément on ne l' emploie au figuré que dans le style simple, ou tout au plus dans le médiocre.
   La sotte vanité, jointe avec que l' envie,
   Deux pivots sur qui roule aujourd' hui notre vie.
       La Font.
= 2°. Grôsse racine d' arbre, qui s' enfonce perpendiculairement en terre. = Pivoter, ne se dit que dans ce dernier sens des plantes et des arbres, qui jètent leur principale racine perpendiculairement en terre. "Le chêne pivote.

PLACAGE


PLACAGE, s. m. Ouvrage de menuiserie, fait de bois scié en feuilles, qui sont apliquées sur du bois d' un moindre prix. "Table, cabinet, bureau de placage.

PLACARD


PLACARD, s. m. [On ne prononce point le d.] 1°. Écrit ou imprimé, qu' on afiche dans les carrefours, pour informer le public de quelque chôse. = 2°. Écrit injurieux, qu' on rend public, ou en l' afichant au coin des rûes, ou en le semant parmi le peuple. "Placards injurieux ou séditieux. Aficher, semer des placards.

PLACARDER


PLACARDER, v. act. Mettre, aficher un placard. "Placarder un Avis au Public. = Placarder une persone; aficher ou semer des placards injurieux contre cette persone.

PLACE


PLACE, s. f. PLACER, v. act. [2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Place, est 1°. Lieu, endroit, espace qu' ocupe ou peut ocuper une persone ou une chôse. "Céder, doner sa place à quelqu' un. "Afecter une place: ce n' est pas là votre place. Garder des places au sermon. Retenir des places au coche, à la diligence. "Il ne saurait durer, demeurer, se tenir en place. _ "Mettre chaque chôse à sa place, ou, en sa place. Acad. "Changer des livres, des meubles de place. "Il n' y a pas de place en mon cabinet pour tous mes livres. "Voilà une belle place pour bâtir. Acheter des places. = Place marchande, comode pour vendre de la marchandise. = Faire place nette, vider le logement qu' on ocupait dans une maison, en ôter tous les meubles. _ Voy. LIEU.
   Rem. Faire, doner, et avoir place, se disent sans article avec le datif pour régime. Faire place à quelqu' un, se ranger, afin qu' il pâsse et qu' il s' aille mettre à sa place; ou bien, lui céder, lui quiter sa place; ou encôre, lui doner une place auprès de soi. "Tout fait place à ce comerce. Sév. c. à. d. tout lui cède. "Il a doné place aux Sociniens dans l' Église Universelle. Boss. = L' Acad. par analogie, dit aussi sans article, refuser place. "Auroit il été raisonable de refuser place à des mots, qui sont aujourd' hui d' un usage universel. Préface du Dict. Au mot PLACE, elle ne dit que faire place, et avoir place sans article. "Nous vous ferons place: faites place aux aûtres: avoir place dans l' Histoire, ou, tenir sa place dans, etc. * M. Necker dit aussi sans article, il y a place assez, pour il y a assez de place. "Il y a place assez pour les exercer tous (ces devoirs de justice et de bienfaisance) dans le vaste champ des misères humaines. = Quoique quiter avec le régime du datif, ne soit pas trop régulier à mon avis, l' usage autorise à dire quiter pour céder, la place à... non seulement au propre, mais au figuré. "M. d' Aix doit être bien content que M. d' Arles lui quitte la place. SÉV. Il s' agissait de la Présidence de l' Assemblée des États de Provence. = Avec mettre et les pronoms, on dit indiféremment, à sa place ou en sa place; mais avec être, ou avec la prép. de, le 2d a quelque chose de dur et de sauvage. "Ainsi vous servirez Télémaque, tandis qu' il sera en votre place avec les Alliés. Fénél. "Mettez-le en la place de celui-là: il est en la place d' un tel. Dites, à la place. "On fait un crime au reste des Hommes de l' impuissance où l' on est d' être aussi criminel qu' eux... et l' on met l' humeur à la place des plaisirs. Massill. C' est ainsi qu' il faut dire, et non pas, en la place. = On dit, des chôses, qu' elles sont à leur place, pour dire, qu' elles sont convenables, raisonables. "La tendresse, que j' ai pour vous, est toute naturelle: elle est à sa place: elle est fondée sur mille bonnes raisons. Sév. Être dans, ou, en sa place, se dit des mots, des pensées, des réflexions: "Ce mot n' est pas dans sa place, il ne convient pas à l' endroit où on l' a mis. "Cette réflexion n' est pas en sa place: elle n' est pas convenable dans cette ocasion. * Quelques-uns disent, est en place, n' est pas en place: je ne voudrais pas le dire de la sorte. = Se mettre en, ou à la place de quelqu' un se dit fort bien pour dire, se regarder comme si l' on était dans la situation où il est. "Mettez-vous en ma place, que feriez-vous? Si vous étiez à ma place, vous seriez fort embarrassé. "Je le plains, je ne voudrais pas être à sa place. = Place! place! Façon de parler, espèce d' interjection, dont on se sert pour faire ranger ceux qui empêchent de pâsser, ou, pour faire retirer ceux, qui ocupent des places, destinées à d' aûtres. = Sur la place, adv. Il signifie tantôt sur le champ, tout d' un coup, sur le lieu même. "Il a été tué, il est tombé mort sur la place; ou, à terre, par terre. "Cela est tombé sur la place, ou, au milieu de la place. = 2°. Figurément, charge, dignité, emploi. "Bone place; place importante; place de confiance; il a perdu sa place, on l' a ôté de sa place: il est hors de place: il est encôre en place. = 3°. Lieu public découvert et environé de bâtimens. "La place Royale, la place Maubert, etc. à Paris. = 4°. Lieu où les Banquiers, les Négocians traitent de leurs afaires: c' était autrefois sur une place. (n°. 3°.) De là ces façons de parler: Négocier un billet sur la place: avoir crédit sur la place: faire des remises de place en place, c. à. d. d' une ville de comerce à l' aûtre. = 5°. Ville de guerre, forteresse. "Place forte, imprenable, régulière, ou irrégulière, frontière, maritime, etc. Fortifier, assiéger, investir, bloquer; insulter, forcer, prendre, emporter une place. Rendre, évacuer une place. "Le corps, les dehors, la garnison d' une place, etc. etc.
   PLACER: on écrivait autrefois, nous placeons, je placeois, il placeoit, je placeai, il placea. Aujourd' hui au lieu de cet e, on met une cédille, ou un c renversé; nous plaçons, je plaçois, etc. = Placer, situer, mettre dans un lieu. "Placer un bâtiment: sa maison est bien placée, mal placée. "On les plaça comme on put: nous étions mal placés. "Le coeur est placé un peu plus du côté gauche que du côté droit. = Fig. Placer bien ce qu' on dit, le dire fort à propôs et dans l' endroit où il faut: placer bien une citation. = Placer bien ses charités, ses aumônes, ses grâces, ses faveurs, ses bienfaits, ses libéralités, les faire, les apliquer avec choix et discernement. = Placer de l' argent (voy. Place, n°. 4°.) le faire profiter, l' employer à un capital, à une charge. * Plusieurs, dans les villes de comerce sur-tout, disent en ce sens, faire un placement: c' est un bon, un mauvais placement. Ce mot n' est pas dans les Dictionaires. = Placer une persone, lui procurer un emploi, une place, (n°. 2°.) un établissement. "On l' a placé dans un bon poste: il n' est point placé: je cherche à le bien placer. "Il avait trois enfans: il les a placés avantageûsement. = Avoir le coeur bien placé, avoir de l' honeur, de la vertu, les sentimens d' un honête homme. Le coeur mal placé dit tout le contraire.
   *PLACEMENT. Voy. l' Article précédent.

PLACèT


PLACèT, s. m. [2e è moy.] Il a deux sens, qui n' ont point de raport ensemble. = 1°. Demande succinte par écrit pour obtenir justice, ou grâce et faveur. Dresser, présenter, répondre un placèt. Ce mot vient du latin. Il a pris son origine de ce qu' au bas des supliques ou mettait placèt (il me plait) je l' acorde. = 2°. Sorte de siège, qui n' a ni dôs, ni brâs: un placet de velours, de damas.

PLAFOND


PLAFOND, s. m. PLAFONNER, ou PLAFONER, v. act. [Plafon: le d ne se prononce jamais: on le conserve pour l' étymologie: il faudrait donc écrire plat-fond. _ Plafoné, 3e é fer.] Plafoner, c' est couvrir le dessous d' un plancher à plat ou en le cintrant, et le garnir de plâtre ou de menuiserie. Plafond, est l' éfet, le résultat de ce travail. "Il a fait plafoner son apartement; chambre plafonée: riche plafond: plafond peint, doré, etc. = En Peintûre, on dit neutralement qu' une figûre plafone, lorsque dans une voûte, ou dans un plafond, elle parait telle qu' on voulait la représenter, lorsque, par exemple, elle parait debout, quoique peinte sur un plan, ou plat, ou incliné.

PLAGE


PLAGE, s. f. [2e e muet.] Ce mot est fort bon, en termes de marine, pour signifier, un rivage de basse mer (le long de la plage: la plage est bonne, est mauvaise) mais quand il veut dire, contrée, climat, il n' est usité qu' en poésie. L. T.
   Est-il dans l' Univers de plage si lointaine~,
   Où ta valeur, grand roi, ne te puisse porter.
       Boil.

PLAGIAIRE


PLAGIAIRE, adj. et subst. PLAGIAT, s. m. [Plagi-ère, gi-a: 3e è moy. et long au 1er; le t final ne se prononce point dans le 2d.] Plagiaire, est celui, qui s' aproprie ce qu' il a pillé dans les ouvrages d' autrui. Plagiat, est l' action du plagiaire. "Auteur plagiaire. "C' est un plagiaire: il est acusé de plagiat. = Le plus grand usage de plagiaire est au substantif. Acad. * L' Ab. de Houteville et Le Gendre ont dit plagiarisme aparemment comme plus analogue à plagiaire que le mot plagiat: mais l' usage n' a pas admis cette innovation.

PLAID


PLAID, s. m. PLAIDANT~, ANTE, adj. PLAIDER, v. n. et act. PLAIDEUR, EûSE, s. m. et f. [Plé, plédan, dante, plédé, deur, deû-ze: 1re è moy. dans le 1er, é fer. dans les aûtres: 2e é aussi fermé au 4e, lon. au 2d et 3e et au dern.] Plaid, ne se dit au singulier que dans cette phrâse proverbiale: peu de chôse, peu de plaid: il ne faut pas un long discours pour une petite afaire, ou bien, la chôse ne vaut pas la peine d' être contestée. Plaids au pluriel, se dit dans les Provinces et dans les Justices inférieures. "Tenir les plaids, l' Audience: les plaids tenans, à l' Audience. = En st. prov. être sage au retour des plaids, perdre l' envie de plaider, aprês avoir soutenu, et sur-tout aprês avoir perdu quelque procês.
   PLAIDER, se dit de ceux, qui contestent quelque chôse en Justice et des Avocats, qui les défendent. "Ils plaident l' un contre l' autre. "Il aime à plaider: il s' est ruiné à plaider. L' Avocat, qui plaide pour vous a fort bien plaidé. "Cet Avocat plaide avec action, avec véhémence. = V. act. "Cet Avocat a bien plaidé cette caûse: il l' a bien défendûe. "Je n' ai point trouvé d' Avocat, qui voulût plaider pour moi: j' ai été obligé de plaider moi-même ma caûse. = Plaider sa caûse se dit aussi dans la conversation familière. Apuyer de bones raisons son sentiment ou sa demande. "Il plaide fort bien sa caûse. Je vous prie de plaider ma caûse auprês de cet homme. = Plaider quelqu' un, lui faire un procês: "Si vous ne me satisfaites pas, je serai obligé de vous plaider. "Elle l' a plaidé et a perdu son procès. Madame de la Fayette. "C' est tout de bon que je vais la rendre, (ma tutelle) mais je crains vos chicanes... et M. de Grignan ne songe à l' heure qu' il est qu' à me plaider, dit en plaisantant Madame de Sévigné.
   Rem. Quoique caûse, dans une certaine acception; et procês soient synonimes pour le sens, ils ne le sont pas pour l' emploi; et quoiqu' on dise plaider une caûse, plaider sa caûse, on ne dit point, plaider un procês, ni plaider son procês.
   Plaidant et plaideur, qui plaide. Le 1er ne se dit qu' au Palais. Avocat plaidant, qui s' est ataché à la plaidoirie. Les parties plaidantes. _ Le 2d est du langage comun. "Les plaideurs sont à plaindre. "La triste condition que celle d' un plaideur! = Il signifie aussi, qui aime à plaider; et en ce sens, il se dit aussi au féminin: c' est un plaideur fiéfé; une franche plaideûse.

PLAIDOIRIE


PLAIDOIRIE, s. f. PLAIDOYABLE, adj. PLAIDOYER, ou PLAIDOYÉ, s. m. [Plé--doa-rie, doa-ia-ble, doa-ié.] Le Diction. d' Ortogr. écrit plaidoierie, MOLIèRE dit, plaiderie: d' aûtres écrivent plaidoyerie. Pour le 1er, l' e du milieu est inutile: le 2d ne vaut rien: selon l' ortographe du 3e, il faudrait prononcer plé-doa-ierie, l' y faisant fonction de deux i. = On écrit Plaidoyer ou Plaidoyé, et ils se prononcent de la même manière. Le premier parait le plus usité; et c' est le seul, qu' ait admis l' Acad. dans son Dict. L. T. _ Richelet écrit Plaidoié ou Plaidoier, mais cette ortographe n' indique pas la prononciation de ce mot. Elle induirait à prononcer ou plédoa-é, ou plédo-ié: ni l' un ni l' autre ne vaut rien.
   PLAIDOIRIE, est l' art de plaider une caûse: il excelle dans la plaidoirie; et aussi la profession et l' exercice qu' on en fait. "Il s' adone à la plaidoirie: il a quité la plaidoirie.
   PLAIDOYABLE, ne se dit qu' au Palais, des jours d' Audience, où l' on peut plaider. "Jour plaidoyable.
   PLAIDOYER, Discours prononcé à l' Audience par un Avocat, pour défendre sa partie. = On dit figurément, style familier, plaisant ou chagrin, à celui, qui avance témérairement une chôse, corrigez, ou, réformez votre plaidoyer.

PLAIE


PLAIE, s. f. [Plê, monos. ê ouv. et long. = On écrivait aûtrefois playe, mais avec cette manière d' écrire, il faudrait prononcer plé-ie contre l' usage.] 1°. Solution de continuité faite aux parties molles du corps, par quelque accident, par quelque blessûre, ou par la corruption des humeurs. Panser, guérir une plaie. "On a trop tôt fermé cette plaie. = 2°. Cicatrice: "Ce guerrier montre sans cesse ses plaies pour faire preûve de sa valeur. = 3°. Figurément, il se dit dans tous les styles. "La mort de Turenne fut une grande plaie pour l' État. "Les plaies de l' âme peuvent devenir mortelles, si on les envenime. Nic. = On dit, proverbialement, ne demander que plaies et bosses, souhaiter des malheurs pour en faire son profit. Voy. BOSSE.

PLAIGNANT


PLAIGNANT, ANTE, adj. [Plégnan, nante: 1re é fer. mouillez le g: 2 lon.] Celui, qui se plaint en Justice du tort qu' on lui a fait. La partie plaignante; et substantivement: le dit plaignant, la dite plaignante. = On ne l' emploie qu' au Palais.

PLAIN


PLAIN, AINE, adj. [Plein, plène: le 1er est monos. 1re è moy. 2e e muet au 2d.] Litéralement; uni, plat, sans inégalités. Voy. UNI: mais il reçoit divers sens, suivant les divers substantifs, auxquels il se joint. En plain champ, au milieu des champs. "Maison située en plain champ. L' Acad. dit aussi, en ce sens, en plaine campagne. = Plain pied, se dit des chambres, qui sont au même étage et du même niveau. On dit, chambres de plain pied; aler de plain-pied d' un apartement à un aûtre: entrer de plain pied du rez-de-chaussée dans le jardin. On y dit aussi absolument: il y a beaucoup de plain-pied dans cette maison, pour dire, beaucoup de chambres de plain-pied. = Plain, en parlant d' étofes et de linge, signifie uni, où il n' y a nulle figure, nulle façon. = Plain-chant, le chant ordinaire de l' Église. "Le plain-chant est moins dificile à aprendre et à chanter que la musique.
   Rem. Non seulement les ignorans, mais des Auteurs, ou leurs Imprimeurs confondent plein avec plain, faûte d' atention à l' origine et aux differens sens de ces deux mots. L' un vient de plenus; l' autre de planus: l' un a raport à rempli, l' aûtre à uni. "Il aprit à plusieurs d' entre eux à chanter en plein-chant le gloria in excelsis, etc. Let. Edif. _ Chanter en plein-chant, signifierait plutôt chanter à pleine voix.

PLAINE


PLAINE, s. f. [Plène: 1re è moy. 2e e muet.] Grande étendûe de terre, dans un pays uni. "Grande, vaste plaine. "Pays de plaines. = La plaine liquide (en poésie) la mer. = Cette locution est devenûe triviale. On a dit aussi l' humide plaine; et Malherbe d' après Ronsard, la plaine salée.

PLAINDRE


PLAINDRE, v. act. PLAINTE, s. f. PLAINTIF, IVE, adj. PLAINTIVEMENT, adv. [Plein-dre, plein-te, tif, tive, tive--man: 1re lon. 2e e muet aux deux premiers, lon. aux deux derniers dont la 3e e muet.] Plaindre, actif, avoir pitié de... "Je vous plains: on ne le plaint pas lui: on plaint sa famille. = Se plaindre, réciproque, sans régime, gémir, lamenter. "Soufrir sans se plaindre. = Avec la prép. de, témoigner du mécontentement, du déplaisir: "J' ai bien lieu de me plaindre de vous. On dit, en st. famil. plaindre sa peine, ses soins, ses pâs, son temps; les employer avec répugnance et à regret. Ne point plaindre l' argent, la dépense, dépenser volontiers, ne pas regarder à ce qu' il en coûte pour se satisfaire. "On n' a point plaint l' argent à ce batiment: on n' y a rien épargné. "Il ne se plaint non plus toute sorte de parûre qu' un jeune homme, qui a épousé une riche veûve. La Bruy. "Ce Maître ne leur avoit pas plaint une éducation, qui tournoit à son profit. Du Bos. Plaindre le pain à ses enfans; l' avoine à ses chevaux, etc. ne pas leur en doner sufisamment. On dit aussi plaindre le pain, l' avoine qu' ils mangent, etc. Avoir regret aux dépenses les plus nécessaires. Se plaindre toutes chôses, se pâsser des chôses, dont on a le plus besoin. Avec ce régime direct, le pronom se est au datif: se plaindre à soi-même: dans se plaindre, sans régime, ce pronom est l' acusatif: se plaindre soi-même.
   Rem. 1°. Brébeuf a écrit pleindre. Autrefois on écrivait, je plainds, tu plainds, il plaind. Aujourd' hui l' on retranche le d aux deux premieres persones, et l' on termine la 3e par un t: au pluriel du présent et aux deux nombres de l' imparfait et de l' aoriste, et au subjonctif et au participe actif on met un g devant l' n: nous plaignons, etc. je plaignois ou plaignais, etc. je plaignis, que je plaigne, je plaignisse, plaignant. = La Fontaine a encôre écrit, je vous plainds. = 2°. On faisait aussi ce verbe neutre, et l' on disait plaindre, sans régime, comme nous disons gémir.
   J' ai beau plaindre et beau soupirer,
   Le seul remède en ma disgrâce,
   C' est qu' il n' en faut point espérer.
       Malherbe.
  Aimant mieux plaindre par coutume,
  Que vous consoler par raison. Id.
  Autre coeur que le mien auroit-il la constance
  De soufrir tant de mal sans plaindre et soupirer.
       Bertaud.
On le dit encôre dans les Provinces méridionales. "Il plaint beaucoup: il a plaint toute la nuit. C' est un vrai gasconisme. = 3°. Plaindre régit la prép. de devant l' infinitif. "Ne me plaignez que de n' avoir point ma chère fille. Sév. "Il se plaint d' avoir été mal reçu. Se plaindre régit aussi la conjonction que avec le subjonctif. "Il se plaint que son éducation ait été négligée. Ann. Litt. = 4°. On se plaint du mal et non pas du bien. L' Ab. Prévot parlant de l' arrivée des Portugais chez des sauvages, dit que: "On n' eut pas à se plaindre de leur civilité: ils troquèrent des perroquets contre du papier. Il me semble qu' il falait dire qu' on n' eut pas à se plaindre de leur incivilité, ou qu' on n' eut qu' à se louer de leur civilité.
   PLAINTE, est 1°. Gémissement, lamentation. Il correspond à se plaindre sans régime. "Il s' abandone aux cris et aux plaintes. "Les plaintes d' un homme, qui soufre. Voy. LAMENTATION. _ 2°. Mécontentement qu' on témoigne de vive voix ou par écrit. Il a raport à se plaindre de. "Doner des sujets de plainte. Former des plaintes contre. "Porter ou faire ses plaintes à quelqu' un contre un aûtre de quelque tort qu' on croit avoir reçu. = Au Palais; rendre sa plainte au Juge, au Comissaire, exposer le sujet qu' on a de se plaindre. = Hors du Palais, on le dit rârement au singulier, excepté dans sujet de plainte et dans le sens de lamentation, pris indéterminément: "Il faut que je m' acoutume à ce chagrin, puisque la plainte est inutile. Sév. Avec les pronoms possessifs, on l' emploie ordinairement au pluriel: je suis lâs de vos plaintes continuelles. Les Poètes ont droit de l' employer dans l' un et l' aûtre nombre suivant le besoin de la mesûre ou de la rime.
   Claude même, lassé de ma plainte éternelle.
       Racine.
  PLAINTIF, qui se plaint. Il se dit ordinairement des chôses qui ont raport à la persone: ton plaintif, voix plaintive. = On ne le dit guère des persones. On dit seulement qu' un homme est plaintif, pour dire qu' il se plaint à tout propôs, et on ne le dit que dans le style familier. "Toujours chagrin, toujours plaintif. = Les Poètes le disent des Manes et des Ombres.
   PLAINTIVEMENT, d' une manière plaintive. On l' emploie d' ordinaire en critiquant et en se moquant. Réciter un discours plaintivement: c' est le défaut de plusieurs Prédicateurs. "Il chante plaintivement les airs les plus gais.

PLAIRE


PLAIRE, v. n. [Plère: 1re è moy. et long, 2e e muet.] Neutre, il signifie agréer à... être au gré de... Il se dit ou avec le datif: il faut chercher à plaire à Dieu plutôt qu' aux hommes: elle plait aux uns et déplait aux aûtres: cela ne lui plait pas; ou sans régime en parlant des persones, sur-tout des femmes. "Elle plait fort: elle n' a qu' à se montrer pour plaire. Cet Auteur plait, charme, enchante. = 2°. V. impers. trouver bon, vouloir, avoir pour agréable. Il régit le datif des persones, et la prép. de devant les verbes à l' infinitif ou que avec le subjonctif; le 1er quand le verbe régi se raporte au nom, qui est au datif, le 2d quand il ne s' y raporte pas. "Vous plait il de le faire? Vous plait-il que je le fasse? = Quelques Écrivains ont employé l' infinitif sans préposition.
   Et nos jours criminels ne pourront pas durer,
   Qu' autant qu' à sa clémence il plaira l' endurer.
       Corn.
"Afin qu' il plaise à Dieu bénir nos travaux. Let. Édif. = Vaugelas aprouve ce régime dans quelques phrâses: "Quelquefois, dit-il, on retranche le de, et on met l' infinitif sans préposition: s' il lui plaisoit m' honorer de ses commandemens: la faveur qu' il vous a plu me faire. L' Acad. ne met aucun exemple sans la préposition de. Je crois qu' en prôse il vaut mieux l' employer: permis aux Poètes de la suprimer, quand cela les acomode.
   Rem. Il y a de la diférence entre ce qui te plait, et ce qu' il te plait: le premier signifie ce qui t' est agréable, et le second ce que tu veux. Racine, dans les Plaideurs a mis l' un pour l' aûtre.
   Tu prétends faire ici de moi ce qui te plait.
Il est visible qu' il auroit falu dire ce qu' il te plait, c. à. d. ce que tu veux. D' OLIV. Plusieurs Auteurs ou leurs Imprimeurs ont fait la même faûte; car c' en est une. "L' éloquence nous rend maîtres du coeur et de l' esprit des aûtres, et fait que nous leur inspirons, ou que nous leur persuadons tout ce qui nous plait. LA BRUY. Il faut dire, tout ce qu' il nous plait; on sous-entend, leur inspirer, leur persuader. = J. J. Rousseau dit toujours ce qui pour ce qu' il: "Ils le veulent forcer à croire tout ce qui leur plait. Dites, tout ce qu' il leur plait (de croire). J' ai souvent entendu ce dialogue à table: Que voulez-vous que je vous serve, du grâs ou du maigre? _ Ce qu' il vous plaira. _ Ce qui me plait je le garde pour moi. = La réponse, même en plaisanterie, n' est pas juste; car en disant ce qu' il vous plaira, on sous-entend, me doner. Si l' on disait, ce qui vous plaira, on dirait toute aûtre chôse que ce qu' on veut dire. = À~ dieu ne plaise est aussi impersonel, mais il ne régit que la conjonct. que et le subjonctif. "À~ Dieu ne plaise que je lui fasse ce tort. On dit quelquefois en parenthèse, ce qu' à Dieu ne plaise, sans régime: "Si ce Royaume perdoit la Foi, ce qu' à Dieu ne plaise, les promesses de J. C. ne seroient pas pour cela trompeuses. Boss. On l' emploie même quelquefois à la fin de la phrâse. "Je vous acuse donc d' être un menteur: à Dieu ne plaise! Mais je crois que vous vous êtes trompé. = Plut à Dieu, régit que et le subjonctif, et plaise à Dieu l' infinitif avec de. "Plut à Dieu qu' ils conussent de bone fois que tous les Grands ne sont que les vassaux de Dieu. Mascaron. "Plaise à Dieu de conserver dans ces sentimens les Missionaires. Let. Édif. _ Plut à Dieu se met aussi à la fin de la phrâse, en réponse à ce qui précède: "Votre ami sera peut-être de la partie. Plut à Dieu! c. à. d. je le souhaite fort: cela me ferait beaucoup de plaisir.
   3°. Se plaire, réciproque: prendre plaisir à... Il régit à et l' infinitif: il se plait à mal faire; à faire du mal. Les Poètes, que cet à embarrasse devant les verbes començant par une voyèle, mettent à la place la préposition de.
   Et son âme se plait dans leur plus rude effort,
   D' exercer sa fortune et d' éprouver son sort.
       Brébeuf.
Racine dit aussi dans le dernier choeur d' Esther.
....Relevez les superbes portiques
   Du Temple où notre Dieu se plait d' être adoré.
M. d' Olivet se contente de remarquer qu' on auroit dit, se plait à être adoré, si l' hiatus l' avoit permis. En prôse, il faut toujours dire, se plait à: l' Acad. ne le dit point aûtrement. = Pour les noms, se plaire régit à ou dans; le premier, quand le nom exprime une action; le second, quand il ne l' exprime pas: se plaire à l' écriture, au dessein, à la peintûre: Se plaire dans la solitude, dans les larmes. On a critiqué, avec raison, dans l' An. Litt. ces vers du Dithyrambe sur la mort de Voltaire.
   Semble aimer sa douleur et se plaire à ses larmes.
Il falloit dire, se plaire dans ses larmes. = Voy. COMPLAIRE. = Se plaire, se dit quelquefois des animaux et des plantes. "Le gibier se plait dans les tâillis: les truites se plaisent dans l' eau vive: la vigne se plait dans les terres pierreuses.

PLAISANCE


PLAISANCE, s. f. [Plèzance: 1re è moy. 2e lon. 3e e muet.] Il ne se dit que dans ces phrâses, lieu de plaisance, maison de plaisance; maison de campagne où l' on va prendre l' air quelquefois, et qui est pour le plaisir et non pas pour le revenu. = Quelques-uns disent, en ce sens, maison, lieu de plaisir: ils parlent mal.

PLAISAMMENT


PLAISAMMENT, adv. PLAISANT, ANTE, adj. PLAISANTER, v. n. et act. PLAISANTERIE, s. f. [Plèzaman, zan, zante, zanté, zanteri-e: 1re è moy. 2e lon. excepté au 1er, 3e e muet au 3e et au 5e, é fer. au 4e.] Plaisant, qui récrée, qui divertit, qui fait rire. "Conte, récit plaisant: chôse fort plaisante. = Il se dit même des persones: c' est l' homme du monde le plus plaisant. "C' est une femme fort plaisante et fort amusante. = Quand il est mis devant le nom, il se prend d' ordinaire en mauvaise part, et signifie ridicule, impertinent. C' est un plaisant homme, un plaisant personage, un plaisant visage.
   Du respect! du respect! ah! le plaisant visage!
       Regn.
"Je vous trouve bien plaisant, de vouloir. = Avec la négative, il signifie déplaisant. "Je ne troûve pas plaisant que vous me mettiez dans vos discours; il n' est pas plaisant d' avoir afaire à des gens de chicane.
   Rem. Aûtrefois on lui donait le sens d' agréable.
   On peut être à la fois et pompeux et plaisant.
   Qu' en savantes leçons votre Muse fertile,
   Par-tout joigne au plaisant le solide et l' utile.
       Boil.
"Dans cette saison, la campagne est assez plaisante, dit le Traducteur d' un Livre Anglais (Miss. Bidulph.) "Il y a un jardin fort plaisant, ID. ibid. C' est anglicisme. Leibnitz a dit aussi, rejeter ce qui est plaisant et agréable: il faut dire, ce qui plait. = Dans son vrai sens, plaisant est quelquefois subst. masc. "L' on marche sur les mauvais plaisans, dit La Bruyère; et il pleut par.tout pays de ces sortes d' insectes. Il se dit d' ordinaire avec mauvais; et ce n' est guère que dans les phrâses suivantes, qu' il peut être suportable sans cet acompagnement.
   De râiller d' un plaisant, qui ne sait pas nous plaire;
   C' est ce que tout Lecteur eut toujours droit de faire.
       Boil.
Faire le plaisant. "C' est le plaisant de son quartier: c' est un méchant caractère, que celui de plaisant.
   PLAISAMMENT a les deux sens de plaisant: d' une manière plaisante, agréable: il fait plaisamment un conte. = Ridiculement. "Elle étoit plaisamment habillée, coifée, etc.
   PLAISANTER, dire ou faire quelque chose pour réjouir: il aime à plaisanter; il plaisante sur tout. = Ne pas parler sérieusement. "Je crois que vous plaisantez. "Parlez-vous sérieusement, ou pour plaisanter?
   PLAISANTERIE, chose dite ou faite pour réjouir, pour divertir, pour faire rire. "Plaisanterie ingénieuse ou fade, froide, mauvaise. "Tourner une chôse en plaisanterie, au lieu de s' en ofenser. Prendre la chôse en plaisanterie. = Plaisanterie, moquerie, râillerie (synon.) La moquerie se prend en mauvaise part: la râillerie peut être prise en bone ou en mauvaise part, suivant les circonstances: la plaisanterie en soi ne peut être prise qu' en bone part. La moquerie est outrageuse; la râillerie peut être inocente, obligeante, ou piquante: la plaisanterie est agréable, si elle est ingénieuse; et fade, si elle manque de sel. Beauzée, synon.
   On dit, adverbialement: plaisanterie à part; parlant sérieusement. Il se met ordinairement à la tête de la phrâse, aprês qu' on a paru plaisanter. "Plaisanterie à part, je crois que vous avez raison.

PLAISIR


PLAISIR, s. m. [Plèzir, è moy.] 1°. Sentiment ou sensation agréable, excités dans l' âme par la présence ou l' image d' un bien. "Plaisirs de l' âme, de l' esprit, des sens, du corps. _ Faire plaisir, ou doner du plaisir à voir, se dit des chôses: prendre ou avoir du plaisir à voir, à entendre, etc. se dit des persones. _ Se faire un plaisir de, etc. Voy. CONTENTEMENT. = 2°. Ce qui caûse ce sentiment ou cette sensation agréable. Divertissement. "Le plaisir de la chasse, de la musique, de la comédie, etc. Chercher, aimer le plaisir. Être adoné ou sujet, ou donant tout à son plaisir. Homme de plaisir. Se faire un plaisir de son devoir, de l' étude, etc. "En faire son plaisir. = Au pluriel, les plaisirs, les divertissemens de la vie. "Il est continuellement dans les plaisirs: il a renoncé aux plaisirs. = Les plaisirs du Roi, toute l' étendue du pays, où la chasse est réservée pour le Roi. = Menus plaisirs, petites dépenses qu' on fait pour son divertissement. Voy. MENU. = 3°. Volonté, consentement. Si c' est votre plaisir, si vous le trouvez bon. = Sous le bon plaisir de, avec l' agrément de, etc. = Car tel est notre~ bon plaisir, notre volonté, dit le Roi dans ses Édits, Ordonances, etc. = 4°. Grâce, bon ofice. "Faites-moi ce plaisir, un plaisir: il m' a fait un grand plaisir. Il aime à faire plaisir, etc.
   Rem. Avec le v. être on met aprês plaisir la prép. de et la prép. à avec le v. avoir. "Le plaisir d' une âme bien née est de faire du bien. "Mon plaisir est de secourir la vertu malheureuse. Télém. * J' eus l' autre jour beaucoup de plaisir de causer avec le Coadjuteur. SÉV. _ À~ causer aurait été bien mieux, et c' est ainsi qu' il faut dire. = Il y a plaisir, régit à ou de; le premier, quand le verbe régi comence par une consone; le second, quand il comence par une voyelle. "Il y a plaisir à s' aquiter de ses devoirs. "Il y a plaisir, dit PASCAL, d' être dans un vaisseau batu de l' orage, lorsqu' on est assuré qu' il ne périra point. Bouh. Wailli. _ Il y a plaisir à être, ne serait pas un solécisme, mais il ocasionerait un hiatus, un bâillement peu agréable. = Prendre plaisir ne régit que la prép. à
   Ta haine a pris plaisir à former ma misère.
       Racine.
Se faire un plaisir, au contraire, régit de. On met dans cette expression, toujours plaisir au singulier. Racine met le pluriel.
   Je sais que votre coeur se fait quelques plaisirs,
   De me prouver sa foi dans ses derniers soupirs.
   On ne doutera pas que ce ne soit uniquement la rime qui amène ici ce pluriel. D' OLIV.
   À~ PLAISIR, adv. Avec soin. "Lauterbourg, que les Allemands avoient fortifié à plaisir. D' AVR. = Fort à l' aise. "J' ai parcouru tout le Palais et j' ai tout vu à plaisir. _ Contes faits à plaisir, faits exprês pour divertir. "Ces Aventures d' Égypte, qu' Ulysse raconte à Eumée son porcher, sont de vrais contes faits à plaisir, dont il l' amuse. P. Rapin. = À~ son, à mon plaisir, à sa ou à ma volonté. "Il croyait que c' était un privilège de l' espèce humaine, comme de l' espèce animale, de se servir de ses jambes à son plaisir. VOLT. = Par plaisir, par divertissement: il ne peint que par plaisir. _ Pour un peu voir, pour essayer, éprouver, voir si, etc. "Goûtez par plaisir ce vin; lisons par plaisir ce livre.
   Jouer pour le plaisir, pour son plaisir; se dit, quand on ne joue point d' argent, mais quand on joûe seulement par divertissement, et pour voir qui gâgnera la partie.
   Le Proverbe dit: nul plaisir sans peine; et, la peine pâsse le plaisir. = Pour un plaisir mille douleurs: ordinairement les plaisirs de la débaûche ont des suites fâcheûses.

PLAN


PLAN, s. m. 1°. En mathématiques, surface plane. "Plan horisontal, ou vertical, ou incliné. = En termes de Peintûre, la dégradation des plans, la diférente diminution des objets, selon qu' ils sont représentés comme plus ou moins éloignés. = 2°. Le dessein d' un ouvrage d' Architectûre tracé sur le papier. "Faire, tracer, prendre un plan. Lever le plan: prendre les mesûres, les dimensions, pour les tracer ensuite sur le papier . = 3°. Le dessein, le projet d' un ouvrage. "Le plan est bon, l' exécution ne vaut rien. = Figurément, il se dit de tout aûtre projet. "Le plan d' une campagne militaire, d' une négociation. J' ai fait mon plan là-dessus, je me suis arrangé en conséquence.
   Rem. Lever un plan et faire un plan sont deux opérations diférentes. On lève un plan, en prenant sur le terrein des angles, et en mesurant des lignes, dont on écrit les dimensions dans un registre, afin de s' en ressouvenir. Faire un plan, c' est raporter en petit sur du papier, ou du carton, etc. les angles et les lignes déterminés sur le terrein dont on a levé le plan. Extrait de l' Encyclopédie.

PLANCHE


PLANCHE, s. fém. PLANCHETTE, s. f. PLANCHÉïER, v. act. PLANCHER, s. m. [Planche, chète, ché-ié, ché: 1re long. 2e e muet au 1er, è moyen au 2d, é fer. aux deux dern.] Planche est, 1°. un ais, un morceau de bois scié en long. "Planche de chêne, de sapin, etc. = On dit, en ce sens, planchette, petite planche, et planchéïer, garnir de planches le bâs d' un apartement. = 2°. Morceau de bois plat, ou plaque de cuivre, où l' on a gravé des figûres pour en tirer des estampes. = 3°. L' estampe tirée sur la planche. Voy. ESTAMPE. = 4°. En terme de jardinage, petit espace de terre plus long que large, que l' on cultive avec soin, pour y faire mieux venir des fleurs, des légumes et des herbages.
   Rem. Dans le style familier, on dit, faire la planche, doner l' exemple aux aûtres; être le premier à faire une chôse. "La planche étant une fois faite, et le Public instruit que, moyennant mille louis, on peut... avoir place dans votre sanctuaire, il y a en France des gens assez capricieux pour vouloir de cette gloire, et assez riches pour la payer. Linguet. = S' apuyer sur une planche pourrie, s' assurer sur une persone qui peut manquer, ou à qui l' on ne peut guère se fier. St. proverbial.
   PLANCHER, se dit, et de la partie bâsse d' une chambre: "plancher parqueté, cârrelé, etc. et de la partie haute: plancher plafoné; pendre quelque chôse au plancher. = C' est dans le premier sens qu' en style proverbial, on apèle la terre ferme, le plancher des vaches: "Il n' est rien tel que d' aler ou de marcher sur le plancher des vaches. _ Et quand il y a trop de monde dans une chambre, et qu' il faut que quelqu' un sorte, on dit, qu' il faut décharger le plancher.
   *PLANCHER, v. act. pour planchéïer est un vrai gasconisme. Desgr.

PLANÇON


PLANÇON, s. m. [Planson: 1re lon.] On apèle plançons ou plantards les branches de saules, figuiers, aûnes et aûtres arbres, qui viennent de boutûres, lorsqu' on les a coupés pour les planter. "Mettre des plançons en terre. Voy. PLANTARD.

PLANE


PLANE, s. m. et fém. PLANER, v. act. et n. [2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Plane est masc. quand on parle d' une sorte d' arbre; et fém. quand il se dit d' un instrument qui sert aux charrons et aux toneliers, etc. à polir les bois qu' ils emploient. = Planer, actif, et Planer, neutre, ont des sens bien diférens, et qui n' ont point de raport l' un avec l' aûtre. Le premier signifie unir, polir. "Planer de la vaisselle, un morceau de bois, une doûve. _ Le second, se dit des oiseaux qui se soutiènent en l' air sur leurs ailes étendûes, sans qu' ils paraissent les remuer. Un oiseau qui plane en l' air; ou absolument, qui plane. = Dans ce dernier sens, on le dit, depuis quelque-tems, au figuré; et c' est une locution à la mode. M. Thomas n' avait garde de l' oublier. "S' il y avoit un homme qui pût s' élever au-dessus de la terre, et planer sur les Empires, voir de la hauteur de l' aigle tous les lieux et tous les tems... ce seroit à lui à parler d' un Ministre et d' un Homme d' État. _ Quelle boufissûre!
   Mais déja mon esprit plane au sein de l' espace.
       Anon.
  Sortis de l' univers, planant en liberté,
  Nous le pesons au poids de la postérité,
      Le Prieur.

PLANÉTAIRE


PLANÉTAIRE, adj. PLANèTE, s. fém. [Planétère, planète: 2e é fer. au premier, dont la 3e è moy. et long; cette 2e syll. est dans le 2d un è moy. dern. des deux e muet.] L' Acad. avait dabord dit que Planète était masculin chez les Astronomes, et âilleurs féminin. Aujourd' hui que les Astronomes mêmes lui donent ce dernier genre, l' Acad. a suprimé cette remarque.
   PLANèTE, astre qui n' a point de lumière propre, mais qui luit en réfléchissant la lumière du soleil; qui a d' âilleurs un mouvement périodique. Ces deux circonstances le distinguent des étoiles. "Observer le cours des planètes. La planète de Saturne, de Jupiter, de Mars, de Vénus, de Mercûre. = On dit, proverbialement, d' un homme extrêmement heureux, qu' il est né sous une bonne planète. = On doit cette expression proverbiale aux anciens préjugés des Astrologues.
   PLANÉTAIRE, qui concerne les planètes; la région, le système planétaire. = Subst. masc. Représentation du système des planètes.

PLANISPHèRE


PLANISPHèRE, s. m. [Planisfère: 3e è moyen et long, 4e e muet. = Quoique ce mot soit un composé de sphère, qui est du féminin, l' usage l' a fait masculin.] Carte, où les deux moitiés ou hémisphères du Globe céleste sont représentées sur une surface plane, et où les constellations sont marquées.

PLANT


PLANT, s. m. [On ne prononce point le t.] Un Auteur moderne écrit toujours plan, même au singulier. Pluche dit, au pluriel, les plans d' Olivier. Ailleurs, il dit plant, et c' est ainsi qu' il faut écrire dans les deux nombres. Cette variation vient, ou des Imprimeurs, ou de ce que l' Auteur a voulu retrancher au pluriel le t, ce qu' il pratique en beaucoup d' aûtres mots, à l' exemple de quelques Écrivains; abondans, puissans, etc. mais cette supression choque beaucoup plus dans les monosyllabes.
   PLANT est le scion qu' on tire de certains arbres, pour les planter. "Plant de vigne: élever du plant. "Je voudrais bien avoir du plant de cet arbre là. = Jeune plant, nouveau plant; vignes nouvellement plantées. * En Provence, on dit, plantier; c' est un barbarisme en français. = Jeune plant se dit aussi d' un verger de jeunes arbres, et d' un jeune bois jusqu' à 20 et 30 ans.

PLANTAGE


PLANTAGE, s. m. C' est le nom qu' on done dans nos isles de l' Amérique, aux plantes de cannes de sucre, de tabac, etc.

PLANTAIN


PLANTAIN, s. m. [Plan-tein: 1re lon.] Plante fort comune, qui croit dans les lieux herbeux. "Il y en a une espèce qu' on apèle plantain aquatique.

PLANTARD


PLANTARD, s. m. [On ne prononce point le d.] Plançon. La diférence de ces deux mots, c' est que celui-ci se dit des branches des arbres qui viènent de boutûre, quand on les a coupées pour les planter, et celui-là de ces mêmes branches déjà plantées, jusqu' à ce qu' elles aient poussé des branches elles-mêmes.

PLANTATION


PLANTATION, s. fém. [Planta-cion; 1re lon.] Suivant l' Acad. on apèle ainsi, dans l' Amérique, les établissemens que les Colonies envoyées d' Europe font dans les terres qu' elles défrichent et qu' elles plantent. = Quand ces établissemens sont faits, les Anglais continuent de les apeler plantations, les Français les apèlent habitations. Voyez HABITATION.

PLANTE


PLANTE, s. fém. PLANTER, v. act. PLANTEUR, s. m. PLANTOIR, s. masc. [Plan-te, té, teur, toar: 1re lon. 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Plante se dit 1°. en général, d' un corps organisé, qui produit ordinairement des feuilles et des fleurs. On comprend sous ce nom, les arbres et toute sorte de végétaux. "La graine, les racines d' une plante. "Il vient dans ce pays là, toute sorte de plantes. = 2°. Dans un sens plus resserré, on le dit de celles qui ne poussent point de bois. "Le tabac est une belle plante. "Plante râre, aromatique, médicinale. "Élever, cultiver des plantes. = 3°. Plante se dit quelquefois pour plante médicinale. "Le jardin des plantes. "Un Médecin doit conaitre les plantes, etc. = 4°. En parlant d' une jeune vigne, on dit, du vin de plante, de jeune, de nouvelle plante.
   5°. La plante des pieds, le dessous des pieds de l' Homme. Avoir mal à la plante des pieds.
   PLANTER se dit, au propre, des plantes qu' on met en terre: "Planter un arbre, un bois, une alée, une avenûe. Planter des choux, de la laitûe. On le dit même des noyaux, des oignons, des fleurs, de toutes les graines qu' on met en terre l' une aprês l' aûtre, au lieu de les semer confusément. = Par extension et par similitude, on le dit de certaines chôses qu' on enfonce en terre pour y demeurer, de manière pourtant qu' il en paraisse une partie en dehors. "Planter des bornes, un poteau, une Croix. Planter un piquet, des jalons, etc. = Au fig. st. famil. il se dit pour placer, ou laisser, abandoner. "Me voici plantée au coin de mon feu. Sév. _ Planter là quelqu' un, le quiter. "Pensez-vous qu' il n' y ait qu' à nous donner un premier tome... aussi joli que celui que nous avons vu, et puis nous planter là. Sév. Planter quelque chôse au nez de quelqu' un: lui dire en face des chôses désagréables. = Me voilà bien planté pour reverdir, c. à. d. dans une triste situation. = Se planter bien, se tenir de bone grâce. = Cheveux bien plantés, bien placés. Statûe, figûre en pied bien plantée, représentée debout dans une belle atitude. _ Voy. Chou, Piquet.
   PLANTEUR, qui plante des arbres: c' est un grand planteur, st. famil. "Un planteur de choux, un Noble, qui vit à la campagne. St. prov. et moqueur. = * Propriétaire d' une plantation en Amérique. C' est un mot que nous devons aux Anglais, mais que l' usage n' a pas encôre adopté en France. "Vos matelots captifs, vos planteurs ruinés. Linguet. Ann. Polit.
   PLANTOIR, outil de bois, ordinairement ferré par le bout, qui est aigu, dont les Jardiniers se servent pour faire des trous en terre dans les endroits où ils veulent planter des buis, des laitûes, etc. etc.

PLANTUREûSEMENT


PLANTUREûSEMENT, adv. PLANTUREUX, EûSE, adj. [Plantu-reû-zeman, reû, reû-ze: 1re et 3e lon. 4e e muet.] Plantureux, copieux, abondant. "Pays plantureux. Soupe plantureûse. Le 1er exemple est du style simple; le second, du style familier. = Plusieurs abûsent de ce terme, et l' emploient à tout propôs. "Ineptie plantureûse, s' il en fût jamais. Tart. Épist.
   PLANTUREûSEMENT, copieûsement. Avoir de quelque chôse plantureûsement. Il n' est plus que du style familier. Acad.

PLANûRE


PLANûRE, s. f. pl. [2e lon. 3e e muet.] Bois que l' on retranche des pièces que l' on plane. "Se chaufer avec des planûres

PLAQUE


PLAQUE, s. fém. PLAQUER, v. act. [Plake, ké: 2e e muet au 1er, é fermé au 2d.] Plaque se dit d' une table de métal. "Plaque de fer, de fonte, de cuivre, d' argent. = Plaque de feu ou de cheminée, grande plaque de fer qu' on aplique au fond d' une cheminée. = Plaque d' argent ou de cuivre, se dit des plaques garnies de petits chandeliers à branches. = On dit aussi, dans les deux dernières phrâses, plaque, tout seul; et l' ocasion où l' on emploie ce mot fait comprendre de quelles plaques on veut parler.
   PLAQUER, apliquer une chôse plate sur une aûtre. "Plaquer de l' or, de l' argent sur du bois, du plâtre sur une murâille. = Plaquer un souflet sur la joûe; plaquer quelque chôse au nez de quelqu' un, lui faire en face quelque reproche piquant; expressions bâsses et populaires.

PLASTRON


PLASTRON, s. m. Pièce de devant de la cuirasse. = Figurément, (st. famil. être le plastron des râilleries d' une compagnie, en être l' objet.

PLASTRONER


PLASTRONER (SE), v. réc. Se garnir d' un plastron.

PLAT


PLAT, PLATE, adj. PLAT, s. masc. [Pla, plate, pla.] Plat, adj. Dont les parties ne sont pas plus élevées les unes que les aûtres. "Un terrein plat. = Plat pays se dit, ou par oposition aux Villes, aux Places fortes; ou par oposition aux Pays de montagnes. = Vaisseau, ou bâtiment plat, de bâs bord. = Visage plat, qui est moins relevé qu' il ne faut. Cheveux plats, qui ne sont pas frisés naturellement. = Avoir le ventre plat, n' avoir pas mangé depuis long-tems. = Vaisselle plate, qui est d' une seule pièce, sans soudûre. Il se dit par oposition à vaisselle montée. = Vers à rimes plates, qui se suivent de deux en deux; savoir, deux rimes masculines, puis deux rimes féminines; par oposition aux rimes croisées, qui sont entremélées. = Au figuré, en parlant des ouvrages de l' esprit. "Cette épigramme est bien plate, sans sel, sans agrément. "Ne vous avois-je pas promis que cette lettre seroit bien plate? Sév. = Avoir la physionomie plate, bâsse et qui ne dit rien.
   À~ plate terre, adverbe. Sur le pavé, sur le plancher. = Tout à plat, adv. Entièrement, tout-à-fait. Il l' a refusé tout à plat. = La Fontaine dit, tout plat.
   Je vous dis tout net et tout plat,
   Je ne veux point changer d' état.
   On dit, des pièces de Théâtre, qu' elles tombent tout à plat; quand elles ne réussissent pas. "Qui est-ce qui doute que sur nos théâtres, la meilleure pièce de Sophocle ne tombât tout à plat. J. J. Rouss. "Cinq Tragédies, dont trois tombées tout à plat: les deux aûtres absolument éfacées de la mémoire des Hommes. Ann. Lit.
   PLAT, subst. Il se dit, 1°. dans le sens de l' adjectif; des coups de plat d' épée; et proverbialement, faire merveille du plat de la langue, doner de belles paroles, qu' on n' exécute point. Doner du plat de la langue; chercher à imposer par de belles promesses. = 2°. Et plus ordinairement, vaisselle creûse, servant à l' usage de la table. "Plat d' argent, d' étain, de faïance. Grand plat; plat moyen, petit plat. = Ce qui est contenu dans le plat: "Plat d' asperges, de crème, de fruits, etc. Plat d' entrée, de rôti, d' entremets, etc. = On dit proverbialement, doner un plat de son métier, quelque chôse de ce qu' on fait, ou de ce qu' on sait. = Servir à plats couverts. Voy. COUVERT, adj.

PLATANE


PLATANE, ou PLANE, s. m. Sorte d' arbre. * Un Auteur le fait fém. "Nous y vîmes un arbre nomé chenard, et qu' on dit être la platane. On dit, le platane, un platane, de beaux platanes.

PLAT-BORD


PLAT-BORD, s. m. [On ne prononce, ni le t ni le d.] Terme de Marine. Apui qui règne à l' entour du pont.

PLATEAU


PLATEAU, s. m. [Plato, 2e dout. au sing. lon. au plur. plateaux.] 1°. Le fond de bois des grôsses balances, dont on se sert pour peser les lourds fardeaux. = 2°. En termes de guerre, terrein élevé, mais plat et uni, sur lequel on dresse des bateries.

PLATE-BANDE


PLATE-BANDE, PLATE-FORME, s. f. Le premier se dit d' un espace de terre de quelque largeur, qui règne autour d' un parterre; et qui est ordinairement garni de fleurs, d' arbustes; et en Architectûre, d' un ornement simple, plat et uni, et qui a peu de largeur. = Le 2d est, 1°. couvert d' une maison, plat et uni. "Le toit des maisons du Levant est en plate-forme. "On prend l' air de dessus ces plates formes. = 2°. Ouvrage de terre, élevé et uni par le haut, sur lequel on met une baterie. = 3°. C' est aussi un assemblage de solives et de grôs ais, sur lesquels on met du canon en baterie.

PLATEMENT


PLATEMENT, adv. [Plateman: 2e e muet.] D' une manière plate. Il ne se dit qu' au figuré. "Cela est bien platement dit ou écrit. = Ce mot n' est pas dans les Dictionaires. Il est du style familier et critique.
   *PLATEUR, s. m. Mot employé et peut-être forgé par Mde de Sévigné. "Je ne suis plus une grôsse crévée: j' ai le dôs d' une plateur qui me ravit. Le mot est en italique. Il n' a pas pâssé, mais il manque à la langue. Platitude ne le remplace pas: celui-ci n' est pas usité au propre.

PLAT-FOND


PLAT-FOND. Richelet. Voy. PLAFOND.

PLATINE


PLATINE, s. f. 1°. Ustensile de ménage, consistant en un grand rond de cuivre jaûne, un peu convexe, monté sur des pieds de fer, et dont on se sert pour sécher et pour repâsser du linge. = 2°. Pièce à laquelle sont atachées toutes celles qui servent au ressort d' une arme à feu. = 3°. Plaque qui sert à soutenir tous les mouvemens d' une montre. Il y en a deux, l' une en dessous, l' aûtre en dessus. = 4°. Chez les Imprimeurs, la partie de la presse qui foule sur le tympan. = 5°. La plaque de fer qui est atachée, ou à une porte, ou au devant de la serrûre, pour y passer la clef.

PLATITUDE


PLATITUDE, s. fém. Qualité de ce qui est plat. Il ne se dit qu' au figuré, des écrits, du style, de la conversation. "Tout ce qu' il dit est d' une grande platitude. = Au pluriel, chôses plates. "Il n' ouvre la bouche que pour dire des platitudes. Voyez PLATEUR.

PLATONIQUE


PLATONIQUE, adj. PLATONISME, s. m. [Platonike, nisme; dern. e muet.] Platonique, qui a raport à la doctrine de Platon. _ Amour platonique, amour épuré entre deux persones de diférent sexe, qui n' a pour objet que le mérite, sans aucun égard aux sens. "Les libertins regardent l' amour platonique comme une chimère. = Année platonique, rêvolution, à la fin de laquelle tous les corps célestes seront dans le même lieu où ils étaient à la création. = Cet adjectif ne s' emploie que dans ces deux phrâses. On ne dit pas la doctrine platonique, le système platonique, excepté en plaisantant: on dit, la doctrine, le système de Platon. = Platonisme, système philosophique de Platon.

PLATRAGE


PLATRAGE, s. m. PLATRâS, s. masc. PLâTRE, s. m. PLATRER, v. act. [1re lon. au 3e, 2e e muet au 3e, é fermé au 4e.] Plâtre, sorte de pierre cuite au four, qui, mise en poûdre, sert à bâtir, à enduire, à crépir, etc. Enduit de plâtre; doner un crépi de plâtre, etc. = Platrer, couvrir ou enduire de plâtre. "Platrer une cloison, un plafond. = Se platrer, style plaisant et critique: se farder. Une~ femme qui se plâtre. = Platrage, ouvrage fait de plâtre: "Ce n' est pas de la maçonerie; c' est du platrage. = Platrâs, morceau de plâtre, qui a déjà été mis en oeuvre. "Il tombe tous les jours de grôs platrâs de cette murâille. Elle n' a été bâtie que de platrâs.
   On dit, proverbialement, batre comme plâtre, violemment. Et d' une femme qui a mis beaucoup de blanc, qu' elle a deux doigts~ de plâtre sur le visage. = En style médiocre, paix ou réconciliation plâtrée, qui n' est pas solide. "Une paix plâtrée comme celle là ne pouvoit être de longue durée.

PLATREUX


PLATREUX, EûSE, adj. [Pla-treû, treû-ze; 2e lon.] Il se dit d' un terrein, mélé d' une espèce de craie rouge. "Terrein platreux, terre platreûse.

PLATRIER


PLATRIER, s. m. PLATRIèRE, s. fém. [2° é fer. au 1er, è moyen et long au 2d, trié, triè-re.] Le premier se dit de l' ouvrier qui fait le plâtre et du Marchand qui le vend; le second du lieu d' où l' on tire la pierre dont on fait le plâtre.

PLAUSIBLE


PLAUSIBLE, adj. PLAUSIBLEMENT, adverbe. [Plozible, bleman: 3e e muet.] Plausible se dit de ce qui a une aparence spécieûse. Plausiblement, d' une manière plausible. Raison, prétexte plausible. "Ce qu' il dit est fort plausible. "Il a expliqué la chôse assez plausiblement.
   Rem. Bossuet fait régir le datif à plausible. "Ils tournent l' Écriture en mille manières plausibles au sens humain. = l' Usage n' admet pas ce régime, et plausible s' emploie toujours seul.

PLAYE


PLAYE. Voy. PLAIE.

PLÉBÉE


*PLÉBÉE, adj. Qui est du peuple. Populaire. Malherbe a employé ce mot, et Balzac et St. Évremont l' ont répété d' aprês lui. "Malherbe a condamné lui-même les locutions plébées, dit Balzac, je ne me sers de ce terme qu' aprês lui. "Fuyons ces expressions que Malherbe apelle plébées ST. ÉVR. Le Dict. de Trév. met ce mot sans le condamner. Rich. dit qu' il n' est en usage qu' au féminin. L' Acad. ne le met pas. Ce mot était trop latin: l' usage l' a rejeté; on dit populaire.

PLÉBÉIEN


PLÉBÉIEN, ENNE ou ÈNE, adj. et subst. [1re et 2e é fer. en, au premier, n' a pas le son d' an; 3e è moyen au second.] Nom doné, parmi les Romains, à ceux qui étaient de l' ordre du peuple. "Il était plébéïen, d' une famille plébéïenne. "Clodius se fit adopter par un plébéïen, pour pouvoir être élu tribun du peuple: Les plébéïens seuls pouvoient prétendre à cette charge. = Ce mot n' est pas ancien dans la langue, s' il faut en juger par la précaution qu' à pris Vertot de le faire imprimer en italique dans la Préface des Révolutions Romaines.

PLÉBISCITE


PLÉBISCITE, s. m. [et non pas Plébéscite, comme je l' ai lu dans quelques Livres.] Décret émané du Peuple romain, convoqué par un Tribun.

PLEIGE


*PLEIGE, s. m. Terme de Pratique. Celui, qui sert de caution. Il vieillit même au Palais. = On le disait anciènement dans le discours comun. Un vieux conte est intitulé, de l' Hermite, qui mit son âme en plège, pour celle d' un orfevre. On écrivait plège ou pleige. = On disait aussi pleiger pour cautioner.

PLEIN


PLEIN, EINE, adj. PLEINEMENT, adv. PLÉNITUDE, s. f. [Plein, monos. plène, neman, plénitude: 1re è moy. au 2d et au 3e é fer. au dern.] Plein a plusieurs sens. 1°. Au propre, qui contient tout ce qu' il est capable de contenir. Il est oposé à vide. "Verre plein, bouteille pleine. "Cela n' est pas plein. En st. prov. plein comme un oeuf. = 2°. Par exagération; il se dit pour beaucoup. "Greniers pleins de bled; salle pleine de monde, etc. = 3°. Copieux et abondant. "Jardin plein de fruits; rivière pleine de poissons. = 4°. En parlant d' une bête qui porte des petits, on dit pleine et non pas grôsse ni enceinte. "La chate, la chiène, la jument est pleine. = 5°. Il se dit des ouvrages d' esprit et des chôses morales. "Livre plein d' érudition: homme plein d' esprit, de bonté, de courage, de probité, etc. "La Ste Vierge fut saluée par l' Ange comme pleine de grâce: cette vie est pleine de misère. = Homme plein de dificultés, fort dificultueux; plein d' expédiens, qui en troûve sur tout; plein de lui-même, qui a une haute opinion de sa persone. _ Être plein d' une chôse, en avoir encôre l' imagination toute ocupée. Madame de Sévigné réunit le propre et le figuré dans la même phrâse. "Je ne devrois point vous parler de cette grande nouvelle; les gazettes en sont pleines; mais comme nous le sommes aussi, et qu' on ne parle d' autre chose, cela se trouve naturellement au bout de la plume. Elle dit âilleurs: "Je vous rebats un peu cet article: c' est qu' en vérité j' en suis pleine. _ Être plein de loisir; maitre de son tems et sans afaires. = 6°. Entier, absolu. "Avoir pleine autorité, ou, puissance de disposer de, ou, pleine liberté de faire. Remporter une pleine victoire. = Plein pouvoir. "Avoir plein pouvoir de: doner plein pouvoir à: les Ambassadeurs se comuniquent leurs pleins pouvoirs. = 7°. Avec la prép. en, il forme plusieurs expressions adverbiales: en plein jour, en pleine rûe, en plein marché; en plein Sénat, en plein Parlement; en pleine mer; arbre en plein vent; être en plein champ; armée en pleine marche, etc. et avec les prép. à et de: crier à pleine tête, à pleine gorge; voler à pleines voiles: uriner à plein canal; de l' eau, qui vient à plein tuyau: cheval grâs à pleine peau; ce vin sent la framboise à pleine bouche; doner à pleine main ou à pleines mains, etc. etc. "De plein droit; franchir un fôssé de plein saut; ce qui se dit au figuré de celui, qui s' élève tout d' un coup d' une petite charge à une grande.
   Rem. 1°. Plein, comme les adverbes de quantité régit le génitif avec l' article indéfini: "Muid plein de vin, grenier plein de bled, bourse pleine d' or; livre plein de recherches; et non pas du vin, du bled, de l' or, des recherches; comme parlent plusieurs dans les Provinces méridionales. L' Acad. critiqua aûtrefois ce vers du Cid:
   Et mes plus doux souhaits sont pleins d' un repentir.
Il falloit mettre plutôt, sont pleins de repentir. Sent. sur Le Cid. = 2°. Plein mis devant le substantif sert à doner quelque sorte d' énergie à ce qu' on veut dire: un plein panier de fruits; un plein boisseau de noix. Acad. = 3°. Pleine, se dit des fémelles des animaux et grôsse des femmes. Le peuple dit: je suis plein, pour dire j' ai beaucoup mangé. Les femmes et encore plus les filles, qui le disent, outre qu' elles se servent d' une expression vicieûse, prêtent à une mauvaise équivoque. Elles ne doivent dire ni, je suis chaûde, ni je suis pleine.
   PLEIN, s. m. Le plein et le vide. = En termes d' Écritûre, le plein de la plume est oposé au délié: c' est une certaine largeur dans le trait. _ Quand on tire au but; on dit, mettre dans le plein, ou en plein. = Au jeu de Trictrac, faire, conserver, tenir, rompre son plein.
   PLEIN, adv. Autant que la chôse peut en contenir; avoir du vin plein sa câve; de l' argent plein ses poches, etc. = Tout plein, beaucoup. "Tout plein de gens: avoir tout plein d' argent; en avoir tout plein. "Il y a tout plein de fruits au marché: il y en a tout plein. _ Je le crois bâs et populaire. L' Acad. ne le traite que de familier. "Vous avez dans la tête tout plein de belles choses, et je ne sais combien de livres: il y a de la diférence de vous à moi, et une bien grande. Th. d' Éduc. C' est une fille du Peuple, qui parle. = À~ plein: tout-à-fait, entièrement. "Il a traité à plein cette question: il a été absous à pur et à plein.
   PLEINEMENT, entièrement, tout-à-fait. "J' en suis pleinement convaincu; il s' en est pleinement justifié. Il ne se dit point dans le sens propre de plein.
   PLÉNITUDE; n' a d' usage au propre que dans cette phrâse, plénitude d' humeurs, ou simplement, plénitude. "Cela marque une grande plénitude d' humeurs: "Il n' est malade que de plénitude. = Il se dit au figuré de la puissance des Souverains, et en style de Chancellerie. "Par plénitude de puissance, les Rois, les Papes acordent certaines grâces; et en style de l' Ecritûre; plénitude de grâce: "La plénitude de la Divinité habitoit en lui corporellement. St. Paul parlant de J. C. Ce sont phrâses consacrées, comme aussi quand on dit: N. S. est venu au monde dans la plénitude des tems. = * L' Ab. Prévot done à plénitude le sens d' étendûe. "Cette collection (des voyages) représente avec autant d' ordre que de plénitude l' état présent de toutes les Nations. Préf. de l' Hist. Gén. des Voyages. Le mot est impropre et a tout l' air d' un anglicisme.

PLÉNIèRE


PLÉNIèRE, adj. fém. [1re é fer. 2e è moy. 3e e muet.] Il ne se dit qu' avec cour et indulgence. On apelait aûtrefois cour plénière les assemblées solennelles, que les grands Princes tenaient ou le jour de quelque grande fête; ou, lorsqu' ils voulaient faire quelque magnifique tournoi. = Indulgence plénière; rémission pleine et entière de toutes les peines dûes aux péchés. = * M. Dubois a dit, un concile plénier, et l' Auteur des Réflexions ne le désaproûve pas. Un satirique a dit aussi, un visage plénier, pour dire grôs et grâs. Trév. Cela n' est bon que dans le burlesque.

PLÉNIPOTENTIAIRE


PLÉNIPOTENTIAIRE, s. m. [Plénipo--tanci-ère: 1re é fer. pénult. è moy. et long.] Ministre d' un Souverain, qui a plein pouvoir de traiter quelque afaire d' importance. "Les plénipotentiaires de France, d' Espagne, etc. = Il est aussi adjectif. "Ministre plénipotentiaire.

PLÉNITUDE


PLÉNITUDE, Voy. PLEIN.

PLÉONASME


PLÉONASME, s. m. Abondance de paroles, qui ne signifient que la même chôse. En voici quelques exemples. "Les conquêtes d' Alexandre donèrent lieu à ses Capitaines de s' entregorger les uns les aûtres. Il falait dire: de s' entrégorger tout seul, ou de s' égorger les uns les autres. "Cet entretien se termine à des plaintes réciproques de part et d' autre. Puisque les plaintes étaient réciproques, elles étaient donc faites de part et d' autre: ces derniers mots sont donc inutiles.
   Et ce siècle inocent, sans guerre, sans procès
   Goûtoit les doux loisirs d' une éternelle paix.
Puisqu' on était sans guerre, il est bien clair qu' on était en paix. C' est là du La Palisse tout pur: hélas! s' il n' était pas mort, il serait encôre en vie. _ Au point du jour naissant du même Auteur est un pléonasme aussi heureux que si l' on disait, au déclin du jour tombant.
   Comme on voit s' alumer les stériles débris
   D' un chaûme pétillant, reste de blonds épis.
Des débris qui sont des restes, cela est tout naturel. Ann. Litt. Et par l' être trop, cela est niais et ridicule.
   Des arbres enlacés les épais boulevards,
   Aux fougueux ouragans opôsent des remparts.
       Poème sur l' Éloquence.
Que signifient des boulevards, qui opôsent des remparts aux ouragans? C' est comme si l' on disait que des remparts opôsent des remparts. = Même défaut dans les vers suivans:
   Éludant les rayons de l' ardente écliptique,
   Ou de ses feux brûlans tempérant la chaleur.
Car, éluder les rayons de l' écliptique, ou tempérer la chaleur de ses feux, c' est précisément la même chôse, dite en termes diférens. Ann. Litt.
   Moment doux! doux moment! que ta douceur est douce!
Vers fameux, que les Écrivains doivent se rapeler, pour éviter la répétition d' idées et de mots. Ibid. = Dans le cours du Dictionaire, nous avons relevé un grand nombre de pléonasmes.

PLÉTHôRE


PLÉTHôRE, s. f. [l' h est muette: 1re é fer. 2e lon. 3e e muet.] Terme de Medecine. Abondance, plénitude de sang et d' humeurs.

PLèVRE


PLèVRE, s. f. PLEURÉSIE, s. f. [1re è moy. et long au 1er; 2e e muet. au 1er, é fer. au 2d Pleurézie = Il semble qu' on devrait dire pleure par analogie, puisqu' on dit pleurésie, et plusieurs le disent ainsi: mais les Médecins disent plèvre, et l' Acad. l' a préféré.] Membrane, qui garnit intérieurement les côtes et les muscles intercostaux. = Pleurésie, douleur de côté piquante et três-violente, causée par l' inflamation de la plèvre, et souvent de la partie externe du poûmon. = Faûsse pleurésie est une douleur de côté, causée par une lymphe ou une sérosité âcre, engagée dans la plèvre et dans les muscles intercostaux.

PLEURER


PLEURER, v. n. et act. PLEUREUR, EûSE, s. m. et f. PLEUREUX, EûSE, adj. [Pleu--ré, reur, reû-ze, reû, reû-ze: 2e é fer. au 1er, lon. aux trois dern.] Pleurer, répandre des larmes. "Pleurer amèrement. "Elle ne fait que pleurer. "On pleure de joie comme de tristesse. On pleure de colère, de dépit. "La fumée fait pleurer, etc. = Pleurer, actif, régit ordinairement les chôses: on dit, pleurer ses péchés, la mort de son père, de sa mère; la perte de ses amis, les malheurs de l' État; et quelquefois les persones: on dit pleurer son père, sa mère; en pleurer la perte. On pleure une épouse, un fils qu' on a perdu. = Se pleurer a un beau sens dans la phrâse suivante: "On songe à ce que l' on perd, et l' on se pleure. Mde. de Coulanges. "On se pleure soi-même, en pleurant les aûtres.
   Pleurer, neutre, régit le datif. Les yeux lui pleurent, se dit d' un homme qui a quelque sérosité qui lui distile des yeux de tems en tems. = Fig. on dit que la vigne pleure, quand elle est fraîchement tâillée, et qu' il en dégoute de l' eau.
   On dit, proverbialement, d' un avâre, qu' il pleure le pain qu' il mange. _ Et, populairement, quand quelqu' un a un chapeau, ou quelque chôse de pareil, qui est trop grand, qu' il a pleuré pour l' avoir. = Pleurer comme une vache, ou comme un veau, se dit aussi en style prov. par reproche à quelqu' un, qui pleure pour une chôse qui n' en vaut pas la peine.
   Pleureur et Pleureux ont le même sens, l' un comme substantif, l' autre comme adjectif. Qui pleure facilement, et pour peu de chôse: c' est un grand pleureur, une grande pleureûse. Avoir l' air, le ton, les yeux pleureux; la mine pleureûse. Le 1er se dit des persones mêmes; le 2d, des chôses qui ont raport à la persone. = Quelques-uns disent, pleurard, pleurarde. BOILEAU a dit pleurant: trop pleurant Artamène. Il emploie ce mot pour se moquer du style de Cyrus, Roman de Mlle. Scuderi. _ Trév. dit, des yeux pleurans, d' un oeil pleurant; et au fig. des arbres pleurans.
   PLEUREûSES, étaient, chez les Romains, des femmes qu' on louait pour pleurer aux funérailles, ou en avoir l' air. Les Mahométans et les Indiens idolâtres pratiquent encôre la même chôse dans les obsèques. = Parmi nous, on done le nom de pleureûses à de larges manchettes de batiste, qu' on met sur le revers de la manche d' un just' au-corps, dans les 1ers tems d' un grand deuil.

PLEURS


PLEURS, s. m. pl. [Monos. long. = Racan a fait ce mot fém. Ce n' était pas même l' usage de son tems.] Larmes. "Verser des pleurs. Fondre en pleurs. Avoir le visage tout mouillé, les yeux tout baignés de pleurs. = Les Poètes apèlent la rosée, les pleurs de l' Aurôre. = Pleurs de terre, les eaux de pluie qui coulent, qui distillent entre les terres.
   Rem. Quoiqu' on dise, pleurer de joie, on ne dit pas pleurs de joie, mais larmes de joie. Trév. = Faire des pleurs, se dit-il pour pleurer? J' en doute. Mde. de G... l' a dit: "Elle a fait des pleurs en quitant son père et sa mère. Th. d' Éduc. C' est une Dame qui parle. Peut-être est-ce une locution à la mode. Je ne me souviens pas de l' avoir lûe autre part. = On dit adverbialement, en pleurs. "Nanette vint prendre congé de moi, toute en pleurs. Marm.

PLEUVOIR


PLEUVOIR, v. n. impersonel. [Pleu-voar.] Il pleut, il pleuvait, il plut, il a plu, il pleuvra, pleuvrait, qu' il pleûve, qu' il plût. = 1°. Au propre, il se dit de l' eau qui tombe du ciel. "Il comence à pleuvoir: il a plu toute la nuit, etc. = 2°. Il se dit par similitude, des chôses qui tombent, ou semblent tomber, comme l' eau du ciel. "On lit dans les anciens Historiens, qu' en certains endroits il avoit plu du sang, des pierres. = 3°. Fig. Il se dit neutralement, mais toujours à la 3e persone. "L' argent y pleut; les coups de mousquet y pleuvaient. "Les chansons, les vaudevilles pleuvent, ou il pleut des chansons contre lui. "Les biens, les honeurs pleûvent dans cette maison. = On dit aussi, figurément, faire pleuvoir, pour faire tomber. "Les Barbâres firent pleuvoir des flèches sur les radeaux. Vaug. Quinte-Curce.
   En style proverb. on dit de quelqu' un qui a eu une riche succession, etc. qu' il a bien plu dans son écuelle: d' un homme~ dont la santé ou la fortune ne sont plus florissantes comme auparavant, qu' il a bien plu sur sa friperie, sur sa mercerie. = Et pour montrer la ferme résolution qu' on a prise d' aler quelque part: j' irai, dit-on, quand il pleuvrait des hallebardes, quelques-uns ajoutent même, la pointe en bâs.

PLÉION


PLÉION, s. m. [1re é fer. Plé-ion. = L' Acad. écrit pléyon; mais il me semble que l' y est là inutile, puisqu' on ne prononce qu' un i.] Petit brin d' osier, qui sert à plier la vigne.

PLI


PLI, s. m. PLIABLE, adj. PLIAGE, s. m. PLIANT, ANTE, adj. PLIER, v. act. et n. [2e dout. au 2d, lon. au 4e et 5e, é fer. au dern.] Pli, est 1°. un ou plusieurs doubles qu' on fait à une étofe ou à du linge. Faire un pli, plusieurs plis à, etc. = 2°. La marque, qui reste à une étofe, pour avoir été pliée. "Cet habit fait de faux, de mauvais plis. = 3°. Figurément, habitude. "Il a pris son pli; l' habitude est formée. "Il a pris un bon ou un mauvais pli. = Tournûre. "Doner un bon pli à une afaire. = En style famil. on dit qu' un habit ne fait pas un pli, pour dire qu' il est juste à la tâille; ce qui se dit figurément, d' aûtre chose que des habits.
   PLIABLE et Pliant, ont à-peu-près le même sens. Qui est aisé à plier. "L' osier est extrêmement pliant. "Cette sorte de bois n' est guère pliable. = Au fig. Souple, docile. "Esprit pliable ou pliant; humeur pliante ou pliable. = Siège pliant, ou plus comunément, un pliant, (s. m.) Siège qui se plie en deux, et qui n' a ni brâs ni dôssier. = On ne dit point pliable, en ce sens.
   PLIAGE, action de plier, ou l' éfet de cette action. "Le pliage de étofes.
   PLIER, actif, 1°. Mettre en un ou en plusieurs plis, et avec quelque arrangement. "Plier du linge, des étofes, du papier. Plier une lettre, une feuille en quatre. = 2°. Courber, fléchir. "Plier les genoux, le brâs, les épaules. Se plier en deux. _ C' est en ce sens, à-peu-prês tout l' emploi de ce mot au propre. = Il est beau au figuré: Plier son esprit, son humeur, les captiver, les assujétir. Plier sous l' autorité, sous les ordres de, etc. S' y soumettre. "Jamais je ne plierai sous la tyrannie des passions. Jérus. Délivr. "Que le sort soit ou propice, ou contraire à mes voeux, jamais je ne plierai sous ses caprices. Ibid. * Mde. de B... dit en ce sens, se plier, contre l' usage. "Un Souverain devant lequel tout se plie. Hist. d' Angl. Dites: devant qui tout plie. _ Se plier signifie plutôt, se faire, s' acoutumer, s' acomoder à, etc. "Il faut se plier aux usages, aux volontés d' autrui. = 3°. V. n. Devenir courbé. "Roseau, bâton, baguette qui plie. = * Vaugelas blâme ceux qui disent plier sous le faix: il veut qu' on dise ployer: mais depuis sa remarque, on a employé plier, dans ce sens, et il se trouve dans tant de bons Auteurs, qu' on ne doit plus faire dificulté de s' en servir. L' Acad. met ces deux phrâses: "La planche plioit sous lui: le plancher plioit sous le faix. = 4°. Neutre aussi, mais au figuré, reculer, en parlant des troupes. "L' infanterie plia: l' aile droite fut la première à plier.
   On dit, au propre, plier bagage, décamper, en parlant d' une armée; et dans le fig. familier, mourir. On dit aussi, plier son paquet. "Il a plié bagage, ou son paquet. = Plier la toilette, voler, emporter les hardes de quelqu' un. Il se dit sur-tout d' un valet, à l' égard de son maître.
   REM. La Bruyère done à plier le sens et le régime de porter, engager à. "Il n' y a ni crédit, ni autorité, ni faveur, qui aient pu vous plier à faire ce choix. L' usage n' admet point cet emploi de ce verbe.

PLIEUR


PLIEUR, EûSE, s. m. et f. PLIOIR, s. m. [Pli-eur, eû-ze, pli-oar: 2e lon. au 2d.] Celui, celle qui plie: "Plieur de draps, plieûse de livres. = Instrument dont on se sert pour plier et pour couper du papier.

PLINTE


PLINTE ou PLINTHE, s. m. ou f. [L' Académie met le 2d, le marque fém. en avertissant que quelques uns le font masc. Le fém. parait être le plus usité. Pron. plein-te: 1re lon. 2e e muet.] Membre d' architectûre qui a la forme d' une petite table cârrée. "La plinthe de cette bâse n' est pas bien proportionée. = On done aussi ce nom aux plate-bandes, qui règnent dans les ouvrages de maçonerie et de menuiserie. "Cette plinthe est trop étroite; elle n' a pas assez de saillie. _ Dans ce dernier sens, tout le monde fait ce mot fém.

PLIOIR


PLIOIR; voy. PLIEUR.

PLISSER


PLISSER, v. act. PLISSûRE, s. f. [Plicé, sûre: 2e é fer. au 1er, lon. au 2d.] Plisser, c' est faire des plis à des habits, à du linge. Il se dit des tâilleurs et des ouvrières en linge. "Plisser les basques d' un habit, une jupe, une chemise, des manchettes. = V. neut. Cette étofe plisse: il s' y fait plusieurs plis. "Ces rideaux plissent trop. = Plissûre se dit et de la manière de faire des plis, et de l' assemblage de plusieur plis. "Cette plissûre est bien, ou mal faite.

PLOMB


PLOMB, s. m. PLOMBER, v. act. PLOMBERIE, s. f. PLOMBIER, s. m. [On ne prononce point le b dans le 1er: plon, plonbé, beri-e, bié: 1re lon. 2e é fer. au 2d et au dern. e muet au 3e.] Plomb est, 1°. un métal d' un blanc bleuâtre, três-mou, et le plus pesant pourtant aprês l' or. "Table, tuyaux, gouttières de plomb. Balles de plomb; cercueuil de plomb. = 2°. Plomb se dit absolument pour balles de plomb, dont on charge les armes à feu. "Charger un fusil de menu plomb. "Il n' a pu chasser, faûte de poûdre et de plomb. Et poétiquement:
   Le plomb vole à l' instant et pleut de toutes parts.
       Boil.
= 3°. Instrument, dont les Maçons et les Charpentiers se servent pour élever perpendiculairement leurs ouvrages. Ils donent même ce nom à un autre corps pesant comme une pierre, ataché à la ficelle, à la place du plomb.
   À~ PLOMB, adv. Perpendiculairement: Mettre une murâille à plomb: la dresser à plomb. = Le Soleil done à plomb sur cet endroit, c. à. d. directement. = Aplomb, s. m. ne fait qu' un seul mot. Prendre l' aplomb, ou les aplombs d' une murâille; voir avec le plomb, si elle est en ligne perpendiculaire.
   On dit, dans le style familier, d' un homme sage, qu' il a du plomb dans sa tête; et d' un homme frivole, léger, étourdi, qu' il aurait besoin d' une calote de plomb, (n°. 1°.); et de celui qui n' a point de crédit, qu' il n' a ni poudre ni plomb, (n°. 2°.) = Cul de plomb: homme sédentaire. Voy. DAGUE. = Jeter son plomb sur quelque chose, (n°. 3°.) Former un dessein pour y parvenir. "Il a jeté son plomb sur cette charge: il y prétend.
   PLOMBER, c' est 1°. vernir la vaisselle de terre avec la mine de plomb. = 2°. Dans les Douanes, apliquer un petit sceau de plomb sur des balots, des cofres, pour marquer qu' ils ont payé les droits, etc. = 3°. Chez les Dentistes, remplir de plomb en feuilles minces, une dent creûse. = 4°. On dit aussi, dans un sens bien éloigné du sens propre, plomber les terres raportées, les batre, afin qu' elles s' afaissent moins.
   5°. Teint, visage plombé, livide et de couleur de plomb. On disait anciènement, se plomber, pour se meurtrir.
   Se plombant la poitrine, outrageant son visage.
       Bréb.
  PLOMBERIE, art de fondre et de travailler le plomb.
  PLOMBIER, ouvrier qui travaille en plomb, qui en fait des tuyaux, des goutières et d' aûtres ouvrages.

PLONGEON


PLONGEON, s. m. PLONGER, v. act. et n. PLONGEUR, s. m. [Plonjon et non pas gé-on: l' e est muet, et il n' est mis là que pour doner au g un son doux qu' il n' a pas devant l' o: plongé, plon-geur: 1re lon. 2e é fer. au 2d.] Plonger, actif; c' est au propre, enfoncer quelque chose dans l' eau, pour l' en retirer. "Plonger une cruche dans une rivière, un homme dans la mer. = Figurément, enfoncer. "Plonger un poignard dans le sein; ce qui se dit plus figurément encôre, pour, causer un grand chagrin par quelque nouvelle fâcheûse. = On dit, dans ce même st. fig. Plonger dans la douleur, dans l' afliction, dans la misère, dans un abîme de maux. "Qui vous plonge ainsi dans cette profonde tristesse?
   Ensévelis dans un repôs stupide,
   Ou plongés presque tous dans de frivoles soins,
   Leur plus grand intérêt les ocupe le moins.
       L. Racine.
= Se plonger dans la douleur, dans la débauche, dans le vice, dans les plaisirs; s' y abandoner entièrement. = Plonger, neut. s' enfoncer dans l' eau, en sorte qu' elle pâsse par dessus la tête. "Il plonge dans l' eau comme un canard. = On dit d' un coup d' épée, qui va de haut en bâs, qu' il va en plongeant: et d' un coup de mousquet ou de canon tiré de haut en bâs, qu' il est tiré en plongeant.
   PLONGÉE, adj. fém. se dit de la chandelle qui n' a pas été jetée en moule. = S. f. La plongée du parapet est, en termes de fortification, la partie du parapet, qui va en glacis du côté de la campagne.
   REM. Plonger, neutre, et se Plonger, réciproque, n' ont pas le même sens. Le 1er signifie s' enfoncer entièrement sous l' eau; le 2d, s' y baigner. M de Lille dit du cheval:
   Soit que dans le courant du fleuve acoutumé,
   En frissonant il plonge.
       Jardins.
Il n' est pas naturel au cheval de plonger: "Il se plonge était l' expression convenable. Journ. de Mons. = M. de St. Lambert a parlé plus correctement dans le Poème des Saisons:
   Là, le bélier docile à la voix qui le guide,
   Se plonge, en frissonant dans le cristal liquide.
   PLONGEON est une sorte d' oiseau aquatique, qui plonge souvent dans l' eau, d' où lui est venu son nom. = De là aussi l' expression, faire le plongeon, qui se dit, au propre, d' un homme qui plonge; et au figuré, d' un homme qui baisse la tête, quand il entend tirer; ou qui s' esquive par crainte; ou qui se relâche par faiblesse de ce qu' il a dit. "S' ils sont découverts, ils en sont quites pour faire le plongeon. Anon.
   PLONGEUR, celui qui a coutume de plonger dans la mer pour pêcher ou pour retirer ce qui est au fond de l' eau. "C' est un excellent plongeur.

PLOYER


PLOYER, v. act. et neut. [Ploa-ié: 2e é fer. Devant l' e muet, l' y se change en i: il ploie: pron. ploâ, monos. long. Au futur et au conditionel, cet e ne se prononce pas: il ploiera, ploierait: pron. ploara, ploarè, en 2 syll.] Fléchir, courber. = Suivant Vaugelas, il ne faudrait dire plier, que pour faire des plis, mettre par plis; et ployer devrait se dire pour, céder, obéir, et en quelque façon succomber, comme ployer sous le faix; une planche qui ploye à force d' être chargée. Ménage se déclare nettement contre cette remarque; il veut qu' on dise toujours plier, en quelque signification que ce soit. L' usage a confirmé l' opinion de Ménage, et a réprouvé celle de Vaugelas, qui paraissait juste et raisonable. L' Acad. se contente de dire que ployer n' est plus guère d' usage que dans la Poésie et dans le haut style, et que hors de là on dit plier. Voy. PLIER. = On trouve dans MALHERBE, ployer les genoux; et dans Boileau.
   Le vendangeur ravi de ployer sous le faix.
M. Marmontel a dit plus récemment: "Mes genoux ployèrent sous moi, et je tombai sans conaissance.

PLUIE


PLUIE, s. f. [Plu-ie: 2e e muet. = Aûtrefois on écrivait pluye, et plusieurs l' écrivent encore de même; mais l' y est inutile dans ce mot, puisqu' on n' y prononce qu' un i.] L' eau qui tombe du ciel. "Grosse ou petite pluie: il tombe de la pluie, et non pas, il fait de la pluie. = On dit, en st. prov. se mettre ou se cacher dans l' eau, de peur de la pluie; pour éviter un inconvénient, se jeter dans un plus grand. "Je me trouve mieux dans ces bois, que toute seule dans ma chambre; c' est ce qu' on apèle, se metre dans l' eau de peur de la pluie. Sév. = On dit aussi, d' un homme qui a une grande fortune, qu' il est à couvert de la pluie. = Aprês la pluie, le beau tems; souvent la joie succède à la tristese. = Faire la pluie et le beau tems quelque part: y être en grand crédit. = Petite pluie abat grand vent, se dit au propre et au fig.

PLUMAGE


PLUMAGE, s. m. PLUMASSEAU, s. m. PLUMASSIER, s. m. PLUME, s. f. PLUMÉE, s. f. PLUMER, v. act. PLUMèT, s. masc. [Plumage, ma-so, ma-cié, me, mée, mé, mè: 2e e muet au 4e, é fer. au 5e et 6e, è moy. au dern.] Plume est, 1°. ce qui coûvre les oiseaux, et sert à les soutenir en l' air. = 2°. Il se dit plus particulièrement des plumes d' autruche préparées. = 3°. Des gros tuyaux de plumes dont on se sert pour écrire. = 4°. Figurément, du style et de la manière d' écrire d' un Auteur; il a une excellente plume; et de l' Auteur lui-même: "C' est une des meilleures plumes de France, du Barreau, de l' Académie. = M. Le Suirre apèle les minces Litérateurs, des gens de plume, comme on dit, gens de lettres. L' expression est burlesque. = On dit, en st. prov. (n°. 1°.) pâsser la plume par le bec; atraper: "Sera-t-il doux? on lui passera la plume par le bec. Sév. = On dit aussi de celui à qui l' on a gâgné de l' argent au jeu, qu' on a eu de ses plumes, qu' il y a laissé de ses plumes; de celui qui a perdu une place honorable, ou un protecteur, ou un beau droit, qu' il a perdu la plus belle plume de son aile; de celui qui est habile dans des genres diférens, qu' il est au poil et à la plume, comme un bon chien de chasse: in utroque C‘sar. = N°. 3°. Pour signifier qu' on a oublié d' écrire quelque chôse, on dit que cela est demeuré au bout de la plume. = À~ course de plume, sans méditer ce qu' on écrit; et comme on dit en latin, currente calamo. "Ceci est un billet à course de plume. Sév. Mde de G... dit d' un trait de plume. Th. d' Éduc. = Faire tomber la plume des mains, dégoûter d' écrire. = Prendre la plume, ou mettre la main à la plume, écrire une lettre, composer un ouvrage. "Je prends la plume, ou je mets la main à la plume, pour vous aprendre, etc. = Quelques uns disent, mettre la plume à la main, comme on dit mettre l' épée à la main. "Cela ne vaut pas la peine de mettre la plume à la main LET. ÉDIF. Si ce n' est pas un barbarisme d' expression, c' est du moins une façon de parler peu autorisée.
   PLUMER n' a raport qu' au 1er sens de plume, aussi bien que plumage et plumasseau; on dit plumet et plumassier dans le 2d sens, et plumée dans le 3e.
   PLUMER, au propre, arracher les plumes d' un oiseau. On dit, proverbialement, plumer la poule sans la faire crier, lever les impôts, ou faire des exactions, sans exciter des plaintes. = Au figuré, tirer de l' argent de quelqu' un, le dépouiller. Il se dit sur-tout du jeu. "Ils le plumèrent et ne lui laissèrent pas le sou.
   PLUMAGE, terme collectif. Toute la plume qui est sur le corps de l' oiseau. "Beau plumage. Ce sont des oiseaux de même plumage.
   Sans mentir, si votre langage
   S' accorde avec votre plumage,
   Vous êtes le phénix des hôtes de ces bois.
Dit le Renard au Corbeau. Fâble de La Font.
   PLUMASSEAU se dit des petits bouts de plume, dont on se sert pour emplumer des clavecins et des flèches; d' un balai de plumes que les Maréchaux~ introduisent par la barbe dans les naseaux des chevaux, à l' éfet d' exciter un flux abondant de l' humeur qui est filtrée par les glandes de la membrane pituitaire; et d' un tampon de charpie aplati, qu' on met sur les plaies quand on les panse.
   PLUMèT, plume d' autruche, préparée et mise autour du chapeau. = Jeune homme qui porte un plumet. "Elle n' aime que les plumèts.
   PLUMASSIER, Marchand qui prépare et qui vend des plumes d' autruche préparées, des plumèts, etc.
   PLUMÉE, ce qu' il entre dans une plume pour écrire. "Une plumée~ d' encre.

PLUMEUX


*PLUMEUX, EûSE, adj. Vaugelas atribûe l' invention de ce mot à un Auteur qu' il désigne, en disant que c' est un des plus beaux et des plus ingénieux esprits de son siècle, à qui il devrait être permis d' inventer au moins quelques mots, puisqu' il est si fertile et si heureux à inventer tant de belles chôses en toute sorte de sujets. Il cite ces vers:
   Dédale n' avoit pas, de ses rames plumeuses,
   Encore traversé les ondes écumeuses.
Suivant le P. Bouhours, ce mot est de Desmarets; mais le public ne l' a pas aprouvé. Le Rich. Port. le met sans remarque, comme Trév. L' Acad. ne l' a pas mis.

PLUPART


PLUPART, Voy. PLUSPART.

PLURALITÉ


PLURALITÉ, s. f. [dern. é fer.] Plus grand nombre, plus grande quantité. La pluralité des sufrages, des voix, des avis, des opinions. = Multiplicité. Pluralité des bénéfices. Le système de la pluralité des Mondes.

PLURIEL


PLURIEL, ELLE, adj. [Plu-rièl, riè-le: 2e è moy.] Terme de Gramaire. Il se dit de plusieurs chôses ou persones. On dit adjectivement, le nombre pluriel, nominatif pluriel, substantif, adjectif pluriel, terminaison plurielle; et substantivement, le pluriel, mettre des noms au pluriel.
   Rem. 1°. Les sentimens ont été long-tems partagé entre pluriel et plurier. Vaugelas était pour le premier, Ménage, Andry, La Touche pour le second. Celui-ci ne se troûve point, même dans les premières édit. du Dict. de l' Acad. Elle a toujours dit le premier. Il a pour lui l' étymologie. Presque persone aujourd' hui n' écrit plurier. = 2°. On dit, au pluriel, au nombre pluriel, et non pas, en pluriel, comme dit Bossuet: "St. Jacques a dit qu' il falloit apeler les Prêtres en pluriel. Dans cette phrâse, au pluriel même ne vaudrait rien. On devrait dire que, dans cette ocasion, St. Jacques s' est servi du pluriel. = 3°. Plusieurs ajoutent un z au pluriel des noms terminés en é fermé, au lieu d' y mettre une s: amitiez, véritez, etc. c' était l' usage ancien. Il vaut mieux, et c' est l' usage actuel, y mettre une s, et accentuer l' e d' un aigu: vérités, amitiés. = 4°. Dans les noms terminés en ant ou ent, quelques-uns retranchent le t au pluriel: enfans, sentimens. La plupart écrivent deux cens, au lieu de deux cents. BUF. = 5°. Les noms composés de mon, ou de ma, changent ces mots en mes au pluriel: Monseigneur, Messeigneurs, Monsieur, Messieurs. Madame, Mademoiselle; Mesdames, Mesdemoiselles. = 6°. Les noms étrangers, transportés dans notre langue, sans changement dans leur terminaison, ne prènent point d' s au pluriel. On dit, des alléluia, les opéra, des pater, des avé. = 7°. Dans les noms composés d' une préposition ou d' un verbe et d' un nom, le nom seul prend la marque du pluriel: "Avant-coureur, entre-sol, abat-vent, garde-fou, etc. ont au pluriel, avant-coureurs, entre-sols, etc. = Remarquez que le mot garde, dans garde-fou, vient du verbe garder: c' est pourquoi on écrit, garde fous, et non pas gardes-fous; mais on écrit, des Gardes-Suisses, des Gardes-Françaises, parce qu' alors le mot garde est un nom. Voy. GARDE et PORTE. = 8°. Dans les noms composés de deux noms, l' un adjectif, l' aûtre substantif, les deux noms prènent la marque du pluriel. "Un bout-rimé, un arc-boutant, des bouts-rimés, des arcs-boutans. _ Mais quand un mot est formé de deux noms unis par une préposition, le premier seul prend l' s, marque du pluriel. Un arc-en-ciel, des arcs-en-ciel, et non pas des arcs-en-ciels. Un chef d' oeuvre, des chefs-d' oeuvre, et non pas d' oeuvres; un cul-de-lampe, un coq-à-l' âne; des culs-de-lampe, et non pas de lampes; des coqs-à-l' âne, et non pas à l' ânes. WAILLI. L' Académie dit au pluriel, des coq-à-l' âne, et avertit que ce mot est indéclinable. = 9°. Les noms propres, quand ils sont employés au plur. ne prènent point d' s. On dit: les Alexandre, les Scipion, les deux Corneille. Que si l' on dit les Césars, c' est que César est là un nom apellatif, et signifie Empereur. = La pratique d' un grand nombre d' Auteurs ou Imprimeurs est contraire à cette remarque. M. de Wailli pense aussi qu' on doit mettre l' s: les Démostènes, les Cicérons, les Homères, les Virgiles seront toujours râres. C' est comme si l' on disait, les grands Orateurs, les grands Poètes seront toujours râres. = 10°. Les infinitifs, employés comme substantifs, prènent la marque du pluriel, quand on peut y joindre un adjectif. "Des petits soupers, des rires inocens. Hors de là, les infinitifs n' ont point de pluriel. On dit le lever, le coucher, le boire, le dormir. On ne dit pas un grand dormir, un petit boire. On ne dira donc pas, les dormirs, les boires. Wailli. = 11°. Les adjectifs, employés substantivement, n' ont pas ordinairement de pluriel: le beau, le vrai, le blanc, le noir, etc. Quand on y joint un adjectif, on les emploie quelquefois au pluriel. "Les diférens noirs, les divers blancs, etc. Idem. = 12°. Il y a des noms substantifs, qui n' ont que le singulier, comme les noms des métaux et des vertus; car on ne dit pas les ors, les prudences, etc. Il y en a d' aûtres, au contraire, qui n' ont que le pluriel, comme Matines, Vêpres, Laudes, etc. etc.
   Les pluriels sont toujours longs dans leur terminaison masculine, quoique le singulier soit bref ou douteux. Sac, vrai, air, atrait ont la dernière brève: sacs, vrais, airs, atraits, etc. sont longs.

PLUS


PLUS, adv. de comparaison. Davantage. [Plu, devant une consone, et pluz devant une voyèle.] = 1°. Quand il est seul, il marque le comparatif, et il est ordinairement suivi de que; et si un verbe vient aprês, de la particule ne: plus aimable que sage; plus savant que lui; plus heureux que vous ne pensez. = Cette particule ne est indispensable, et les Poètes mêmes ne doivent pas la retrancher. Il y a une faûte de Gramaire dans ces vers de l' Oreste de Voltaire, où Électre dit aux Furies:
   Acourez de l' enfer en ces horribles lieux,
   En ces lieux plus cruels et plus remplis de crimes
   Que vos goufres profonds regorgent de victimes.
   Il falait, ne regorgent. = Il y a aussi faûte de raport d' un membre de la phrâse à l' aûtre, regorgent, verbe, ne répondant pas bien à cruels et remplis, adjectifs. = * Du tems de Vaugelas, quelques-uns disaient, que non pas, au lieu de dire simplement que. "Ils tiènent plus du maçon que non pas de l' Orateur. Sur quoi Vaugelas dit que ce non pas a fort bone grâce. L' Acad. n' en done point d' exemple. = 2°. Plus régit le génitif avec l' article indéfini de. "Il a plus d' argent, de bien, de sagesse que, etc. Il y a plus d' ouvriers, de savans dans cette Ville, etc. et non pas plus de l' argent, du bien, des ouvriers, etc. Cette dernière façon de parler est un gasconisme. = On dit de même plus long d' un quart, plus grand de toute la tête. Mais on demande s' il faut dire: la bataille fut plus qu' à demi perdûe, ou plus d' à demi perdûe. L' Ab. Girard se déclâre pour la seconde manière, et done de fort bones raisons de son choix. = 3°. Quand plus est adv. de comparaison, il se met toujours aprês le verbe, dans les tems simples. Pour les tems composés, on le met indiféremment devant ou aprês le participe. Dites-en de même de l' infinitif. "Il m' en coûte plus qu' à vous: il m' en a plus coûté, ou il m' en a coûté plus qu' à vous. Il devrait vous en plus coûter, ou vous en coûter plus qu' à moi. = 4°. Plus, afectant deux adjectifs, est mieux placé devant qu' aprês le premier: plus agréable que profônd M. Linguet intervertit cet ordre de construction. Platon se piqua d' être agréable plus que profond. Siècle d' Alexandre. Il n' y a que les grands maîtres comme lui, qui puissent s' écarter avec succês de la route batûe. = 5°. Il y a des ocasions où plus doit être répété. La phrâse suivante pèche par le défaut de cette répétition. "Le diamètre du Soleil est plus de cent fois grand que celui de la terre. M. Mentelle, traité de la Sphère. Si l' Auteur a voulu dire précisément cent fois, il devait dire, cent fois plus grand que, etc. S' il a voulu dire, plus de cent fois, il devait répéter plus, et dire, est plus de cent fois plus grand que, etc. = 6°. Plusieurs confondent plus et davantage: il est bon de les distinguer. Plus est ordinairement suivi de que; et davantage en est rârement suivi. On dit, il est plus habile que vous, et l' on ne dit pas: il est davantage habile que vous. Cependant, quand davantage est éloigné de que, il a bonne grâce au milieu du discours; par exemple: il n' y a rien qu' on doive davantage éviter, en écrivant, que les équivoques. On peut ajouter que plus s' associe avec des adjectifs, comme avec des verbes, et que davantage, avec que, n' est bien qu' avec les verbes. = Plus ne doit jamais se mettre à la fin: davantage, au contraire s' y met ordinairement. "Vous avez du courage: j' en ai davantage. On ne dirait pas, j' en ai plus. On pourrait seulement dire: j' en ai encôre plus; mais alors même davantage vaudrait mieux. Plusieurs Auteurs, et des plus estimables, ont employé plus pour davantage. "Ils prostituoient leurs sufrages à qui plus leur donoit. Vertot. "Il n' étoit pas tems d' en dire plus sur un si vaste sujet. Pluche. "Mon inconue ne m' en ocupoit que plus. Créb. F. = Au reste c' est de plus, adverbe de comparaison, qu' il s' agit ici; car plus, adverbe, qui correspond à l' amplius des latins, se met fort bien à la fin. "Il ne vient plus: il n' en veut plus. Voy. plus bâs, n°. 9°. = 7°. Si plus est précédé des articles le, la, les, du, des, il marque le superlatif. "Le plus heureux des hommes; la plus sage des femmes; c' est la part du plus vaillant: c' est un homme des plus vertueux, etc. = Quelquefois l' adjectif, régi par plus, est au même câs que le substantif. Alors il faut redoubler l' article, et le placer, et devant le nom, et devant plus. "L' homme le plus vertueux, et non pas l' homme plus vertueux. Racine n' a pas observé cette règle.
   Déjà sur un vaisseau, dans le port préparé,
   Chargeant de mon débris les reliques plus chères,
   Je méditois ma fuite, etc.
       Bajazet.
Il falait, les reliques les plus chères. Cette règle est indispensable, et elle fait loi pour les Poètes comme pour les aûtres. D' Olivet. Quand l' adjectif est devant le substantif, on ne met qu' une fois l' article: les plus chères reliques. Voy. plus bâs Rem. = 8°. Quelquefois plus est redoulé: "Plus il boit, plus il a soif. * Aûtrefois on disait, et on le dit encôre en certaines Provinces: "Tant plus il boit, tant plus il a soif. = P. Corneille a employé ce tour, mais il ne redouble pas plus.
   Mais, malgré ma bonté, qui croît, plus on l' irrite.
Le tour naturel serait: plus tu irrites ma bonté, plus elle croît. Celui du vers est forcé, et les licences poétiques ne l' excûsent pas. = Quand plus est ainsi redoublé, ordinairement le premier est à la tête de la phrâse. "Plus les spectacles sont agréables, et plus ils sont dangereux. Fontenelle dérange cette construction. "Le sentiment de la liberté, est plus vif, plus il y entre de la malignité. Avec ce tour, il faut dire dans le 2d membre, à mesure qu' il y entre plus, etc. = Plusieurs Auteurs employant ce plus redoublé, mettent le pronom nominatif aprês le verbe dans le second membre de la phrâse: "Plus on a d' habileté, et plus a-t-on aussi de disposition à conoître l' excellence de cet endroit (l' épisode de Didon dans Virgile) P. Rapin. "Plus le génie est grand, plus l' imagination a-t' elle de force et de vivacité pour former ces idées que fournit la poésie. Id. "Plus nos plaies sont profondes et nos maladies dangereûses, plus devons-nous avoir d' ardeur pour aprocher du Médecin, dont nous attendons notre guérison. Anon. "Plus on remonte dans l' Histoire, plus trouve-t-on de peuples qui honoroient un seul Dieu. Pluche, Hist. du Ciel. "Plus la constitution lui parut nette et précise, plus la jugea-t-il pernicieûse. D' Avr. "Plus nous aprochions du Caire, plus découvrions-nous de nouvelles pyramides. Miss. du Lev. "Plus il y a de lumières, plus fait-il d' éforts, plus est-il ingénieux pour justifier les plus coupables passions. Le P. Le Capelain. = Cet usage n' est pas le plus autorisé: le torrent des Auteurs met le pronom aprês le verbe; plus il fait d' éforts, plus nous découvrions, etc. Quelquesfois moins est à un membre et plus à l' aûtre: "Moins elle se rétablit où elle est, plus elle devroit se presser de changer d' air. Mde. de Coul. "Plus il avance en âge, moins il montre de la raison.
   9°. PLUS est aussi employé comme adv. sans qu' il y ait comparaison. "Je n' en veux plus; il ne reviendra plus. Il s' emploie toujours avec la négative, et se place toujours aprês le verbe, dans les tems simples, excepté dans le style marotique, où il peut marcher devant.
   Mon odorat, par vos vers éveillé,
   Des autres vers plus ne fut chatouillé.
       Rouss. à Marot.
Dans le discours ordinaire, on dirait, ne fut plus, etc. = Corneille le fait aussi précédér.
   Rien plus ne le retarde; et déja ses trompettes,
   Aux confins de l' Artois, lui servent d' interprètes.
   Cette construction est suranée dans le style sérieux, et on ne la pardonerait pas aux Poètes d' aujourd' hui. = Dans les tems composés, plus adverbe, se met entre l' auxiliaire et le participe. Je ne l' ai plus revu. Il est mieux devant qu' aprês l' infinitif. "Je ne puis plus le taire. Cependant il fait quelquefois bien aprês, comme dans la phrâse suivante. "Je ne puis m' acoutumer à ne vous voir plus. Sév. = Voy. AUSSI et SANS. = Plus, en ce sens, régit de devant les noms; mais il ne doit pas être trop éloigné du nom qu' il régit. "Il n' a plus auprês de lui, ni d' amis, ni de compatriotes. Guys, Voy. Litt. de la Grèce. Il serait mieux de dire: il n' a plus d' amis ni de compatriotes auprês de lui; ou bien, il n' a plus auprês de lui, ni amis, ni compatriotes; ou, enfin, avec un seul ni: il n' a plus auprês de lui d' amis ni de compatriotes. = Ainsi l' on ne dira pas, je n' ai plus depuis fort long-tems, ni de pain, ni de vin; mais on dira, depuis long-tems je n' ai plus de pain ni de vin; ou, encôre mieux, je n' ai plus depuis long-tems, ni pain, ni vin, en retranchant de. = Plus se met quelquefois à la tête de la phrâse, sans qu' il y ait de verbe exprimé: Plus de lois qui les continssent, plus de puissance qui les réprimât. Moreau. On sous-entend, il n' y avait.
   Rem. Plus précédé de l' article, marque le superlatif (n°. 7°.) et quand on veut l' exprimer, cet article parait nécessaire.
   Et c' est aux plus saints lieux que leurs mains sacrilèges
   Font plus d' impiétés.
       Malherbe.
Nous dirions aujourd' hui, dit Ménage, font le plus d' impiétés. On peut pourtant, ajoute-t' il, dire, plus d' impiétés, même en prose. "Le Nil est de tous les fleuves, celui qui a une plus longue course, et qui traverse plus de royaumes. La Chambre. Plus est là pour le plus. MÉNAGE ne le désaproûve point, ni moi non plus. = Pour se décider à mettre plus ou le plus devant l' adjectif, il faut souvent observer quel est l' article qui afecte le nom substantif. Leibnitz, par ex. a dit: "La Providence s' en est servi comme du moyen plus propre à garantir la pureté de la religion. Il devait dire, comme d' un moyen plus propre, ou bien, comme du moyen le plus propre, etc. Ainsi, plus se met aprês l' article indéfini, et le plus, aprês le défini. = Pluche ajoute tout à le plus: "Ils sont charmés d' en faire part à tout le plus de persones qu' il leur est possible. Spect. de la Nat. Ce tout le plus a quelque chôse de sauvage: le plus tout seul, serait encôre plus mauvais: on ne pourrait dire, ni à le plus de persones, ni au plus de persones: il faut donc prendre un aûtre tour. = Bossuet emploie ce superlatif avec l' art. des devant l' adverbe avant: "Il avoit été des plus avant dans la secte; c. à. d. de ceux qui avaient été le plus avant, etc. si c' est une ellipse, elle est un peu forte. = Le plus, modifiant les adverbes, est indéclinable. = Il y a donc faûte dans la phrâse suivante: "Les taxes les plus préjudiciables au commerce, les plus à charge aux manufactures. Targe, Traduct. de Smollet. Le premier, les plus est bien, parce qu' il est devant un adjectif; le 2d ne vaut rien, il faut le plus, parce qu' il est devant l' adverbe composé à charge. = N' avoir plus que régit la prép à et l' infinitif: "Toutes les fois qu' il émane de ce Tribunal un diplôme muni de cette imposante souscription, cet article est de M. D. L. H. La critique n' a plus qu' à se taire. Sabat.
   PLUS est quelquefois substantif. "Le plus et le moins; du plus au moins. "Le plus que je puis faire: le plus que vous en pouvez prétendre, etc.
   DE PLUS, adv. outre cela. Voy. Dailleurs, au mot Ailleurs. = De plus en plus. "Il se rend habile; il devient méchant; il s' afaiblit de plus en plus; c. à. d. chaque jour davantage. "Vos Lettres me font toujours voir de plus en plus votre amitié. Sév. = Au plus, ou, plus ordinairement, tout au plus. "Cela ne vous coûtera que dix pistoles au plus, tout au plus. "Ce combat ne pouvoit lui servir, au plus, qu' à lui faire obtenir l' abolition de la mort du Comte. Acad. Sentim. sur le Cid. = Remarquez que quand tout au plus est à la tête de la phrâse, il fait marcher le pronom nominatif aprês le verbe. "On ne doit pas séparer ces deux mots: tout au plus peut-on mettre entre deux un adverbe ou un nom. Voy. TANDIS. = Qui plus est, vous saurez que, etc.~ = Plus ou moins, à peu-prês: "Cela vous coutera dix pistoles, plus ou moins. = Ni plus ni moins, tout de même: "Il n' en sera ni plus ni moins. * On disait autrefois, ne plus, ne moins que pour comme. = Non plus que régit le même câs que celui qui est devant. "On n' exige rien de vous, non plus que de votre camarade. Il se met à la queûe de la phrâse, quand il est seul et sans régime. "Vous n' êtes pas venu ce matin, ni votre frère non plus: vous ne le ferez pas, dites-vous; ni moi non plus. * Ânciènement, on fesait un grand usage de non plus, dans le sens et l' emploi de pas plus: "Je ne suis non plus content de vous que de lui. "Je crains que les Espagnols ne vous veuillent non plus rendre que la Valteline. Voiture. "Je ne puis non plus résister à cette inclination, qu' à celle que j' ai pour vous. Id. Arioste fait entendre qu' Homère n' en était non plus l' Auteur (des Cypriaques) que de la petite Iliade.

PLUSIEURS


PLUSIEURS, adj. et subst. pl. [Plu--zieûr, et devant une voyèle, zieurz.] Il exprime un nombre considérable. Plusieurs chôses, persones, avantages, dificultés. En plusieurs ocasions. "De toutes ces chôses, il y en a plusieurs à rejeter, etc. = Il se dit des persones et des chôses, et précède toujours les noms substantifs. Il s' emploie sans article, comme les pronoms: plusieurs Historiens ont raconté: on le lit ainsi dans plusieurs Gazettes: il a trompé la crédulité de plusieurs persones: cela est sujet à plusieurs inconvéniens. = Il régit souvent des noms ou des pronoms au génitif. "On a gâté plusieurs de vos livres, plusieurs des miens, plusieurs de ceux de vos frères, etc. Voy. BEAUCOUP. = Il s'~ emploie~ aussi substantivement; mais il n' a pas tous les droits de substantifs et ne peut être modifié par des adjectifs: "Pour une seule chose nécessaire, vous vous en figurez plusieurs; et pour ces plusieurs superflues, vous abandonnez la seule nécessaire. Bourdaloue. Il falait répéter chôses; et pour ces plusieurs chôses superflues. Alors il aurait été adjectif. Plusieurs, subst. s' emploie toujours absolument, et ne se dit que des persones. Plusieurs pensent, disent, écrivent, ont cru, ont écrit, etc.

PLUSPART


PLUSPART, ou PLUPART. [On écrit comunément le dernier, dit l' Acad.] La plus grande partie. C' est une espèce d' adjectif et de substantif tout ensemble; mais il tient plus du second que du premier. Il a la vertu d' un pluriel, quand le génitif qui suit est au pluriel: la plupart des hommes font, disent, etc. Que si le génitif est au singulier, le verbe se met aussi au singulier. "La plupart du monde, dit, fait, etc. Quand il se dit sans régime, il exige le pluriel. "La plupart vouloient; la plupart furent d' avis que, etc. Vaug. Acad. * De três bons Auteurs n' ont pas suivi cette règle. "La plupart des Hommes ne se conoit pas plus en poésie qu' en peinture. L' Ab. Des Font. etc. etc. * M. Du Pan met le singulier aussi, et pour le verbe et pour l' adjectif; ce qui est encôre plus étrange. "Les bleds, dont la plupart n' étoit pas encore mûre. Journ. de Gen. Il faut dire, dont la plupart n' étoient pas encôre mûrs; ou se servir de la plus grande partie: dont la plus grande partie n' étoit pas encore mûre.

PLUS-QUE-PARFAIT


PLUS-QUE-PARFAIT, s. m. [Pluske--parfè: 2e e muet, dern. è moy.] C' est de ce nom qu' on apèle, en Gramaire, un tems des verbes, qui marque une chôse non-seulement pâssée en soi, mais aussi pâssée à l' égard d' une autre chôse, qui est aussi pâssée. "J' avais fini ma lettre, lorsque vous l' avez envoyé chercher. = Tous nos Poètes se donent la liberté d' employer, selon leur comodité, le passé défini (l' aoriste) pour le plus que parfait. BOILEAU dit, dans le Lutrin, que le redouté Brontin
   Sort à l' instant chargé d' une triple bouteîlle,
   D' un vin dont Gilotin eut soin de le pourvoir.
Au lieu de avoit eu soin. c' est une faûte. St. Marc. = Le P. Charlevoix fait pis encôre: il emploie, au lieu du plus que parfait, le prétérit indéfini ou composé. "Selon les Chinois et les Japonois, ce prétendu sauveur des hommes comença par ôter la vie à celle, qui lui a doné le jour. Il falait, qui lui avait doné, etc. = Sur cet exemple défectueux, on peut établir la règle générale de mettre le second verbe au plus que parfait, quand le premier est à l' imparfait, ou au prétérit simple; et de ne mettre le second au prétérit, que quand le premier est au présent ou au prétérit composé. Ex. du 1er: j' arrivais ou j' arrivai en même tems que votre frère, qui était parti deux jours avant moi. Ex. du 2d: j' arrive ou je suis arrivé en même tems que cet homme, qui est parti 24 heures avant moi.
   Outre le plusque-parfait ordinaire, il y en a un qu' on peut apeler surcomposé. Ex. Si j' avois eu plutôt dîné, j' aurais été vous voir. Il est composé du plusque-parfait du v. avoir, et du participe du verbe.

PLUTôT


PLUTôT, adv. [L' Acad. écrit plustôt, en avertissant qu' on écrit comunément plutôt. Pron. plutô. 2e lon. Il ne faut mettre le circonflexe que sur l' o, l' u étant bref.] Il est adverbe de tems ou de préférence: le jour arrive plutôt en été qu' en hiver; on mange plutôt d' une perdrix que d' un gigot. Wailly. "Plutôt mourir que d' offenser Dieu. Remarquez, 1°. que lorsqu' il suit un infinitif aprês la conjonction que, il faut mettre de devant: il mourrait plutôt que d' avouer son tort, et non pas, plutôt qu' avouer. "Plutôt mourir que de vous voir partir sans moi. = On peut pardoner aux Poètes de retrancher le de.
   Et plutôt que subir une telle aventure.
       Molière.
= 2°. Plutôt que joint à aimer mieux, est un pléonasme: "Il aime mieux mourir plutôt que d' y consentir. Dites, il aime mieux mourir que d' y consentir; ou il mourrait plutôt que d' y consentir.
   PLUTôT, adv. de tems, doit se placer aprês les tems simples des verbes et l' infinitif. "Il arrivera plutôt qu' on ne pense. "Il n' arrivera probablement que dans trois jours; mais il peut arriver plutôt; et non pas, plutôt arriver. = Pour les tems composés, il peut se placer devant ou aprês le participe; mais il est ordinairement mieux placé aprês. "Il est arrivé plutôt, ou il est plutôt arrivé que je ne le croyais. = Quand il est employé absolument et sans la conjonction que, il se met aprês le participe. "Vous n' êtes arrivé qu' à midi: il est arrivé plutôt. = Quand il est redoublé, il se place devant le verbe. "Plutôt il arrivera, et plutôt il jouira des honeurs qui lui sont préparés. = Plutôt est souvent suivi de la conjonction que: (nous en avons doné des exemples) mais il n' exige point la particule ne: * On le fesait suivre autrefois de non pas: ils vous citeront plutôt des livres fort anciens, fort obscurs, que non pas d' aûtres livres plus comuns et plus intelligibles. Mallebr. = Plutôt est quelquefois substantif. "Le plutôt sera le mieux. = Quelquefois aussi précédé de l' article, il est simplement adverbe au superlatif. "Je partirai le plutôt ou tout le plutôt que je pourrai.
   Rem. On dit au plutôt, quand il est employé absolument et sans régime; et le plutôt, quand il régit le verbe pouvoir ou l' adj. possible. "Je partirai au plutôt, ou le plutôt que je pourrai, ou le plutôt possible; et non pas au plutôt possible, comme le dit le Traducteur du Voyage d' Anson. "Il le prioit de lui faire fournir au plutôt possible les vivres, etc. Il falait, ou fournir au plutôt, ou bien, fournir le plutôt possible. = Vaugelas a remarqué que de son tems quelques-uns se servaient de plutôt au lieu d' auparavant. "Je vous conterai l' afaire; mais plutôt je veux m' asseoir. Il faut, mais auparavant. = M. Desgrouais met cette façon de parler au nombre des gasconismes.

PLUVIAL


PLUVIAL, s. m. PLUVIALE, adj. fém. Le 1er se dit de la chape, dont les Évêques et les Prêtres se servent dans certaines fonctions. "L' Évêque revétu de son pluvial. = Chape est le mot ordinaire. Le nom de pluvial lui a été doné de ce qu' elle représente le manteau que les Évêques et les Prêtres portaient en ville et en voyage pour se garantir de la pluie, et qu' on apelait pluvial, du latin pluvia. = Pluviale ne se dit qu' avec eau: les eaux pluviales; les eaux de la pluie.

PLUVIER


PLUVIER, s. m. [Plu-vié: 2e é fer.] Oiseau qui est à peu prês de la grosseur d' un pigeon, et qui est fort bon à manger. On distingue surtout les pluviers dorés.

PLUVIEUX


PLUVIEUX, EûSE, adj. [Pluvi-eû, eû--ze: 3e lon.] Abondant en pluie. Il se dit du tems et de la saison. "Tems, jour, hiver, etc. pluvieux. Saison, automne pluvieûse. _ Qui amène la pluie. "Vent, signe pluvieux: constellation pluvieuse.

PNEUMATIQUE


PNEUMATIQUE, adj. PNEUMONIQUE, adj. [Pe-neu-mati-ke, monike: l' e ajouté au p extrêmement muet.] Le 1er se dit d' une machine, avec laquelle on pompe l' air d' un récipient, pour faire plusieurs expériences de physique; le 2d, des remèdes propres aux maladies du poumon.

POCHE


POCHE, s. f. POCHETER, v. act., POCHETTE, s. f. [2e e muet au 1er et au 2d, è moy. au 3e: poche, cheté, chète.] Poche est, 1°. petit sac de peau, (l' Acad. dit de cuir) de toile, d' étofe, de soie, etc. ataché par dedans à une culotte, à un habit, à une jupe, etc. pour y mettre ce qu' on veut ordinairement porter sur soi. = 2°. Grand sac de toile, où l' on met du blé, de l' avoine. = 3°. Filet à prendre des lapins au furet. = 4°. Petit Violon de maître à danser. = 5°. Jabot, en parlant des oiseaux.
   On dit, proverbialement, tenir une chôse dans sa poche, s' en croire bien assuré. = Avoir ses poches pleines, se dit au fig. comme au propre. "J' ai mes poches pleines de complimens pour vous Sév. = Il n' a pas toujours eu les mains dans ses poches; il n' a pas toujours été sans rien faire. On le dit quelque--fois en mauvaise part. = Manger son pain dans sa poche, manger seul. = Mettre en poche, convertir à son usage particulier ce qu' on a reçu pour plusieurs. = Populairement: Jouer de la poche, débourser, dépenser. Voy. Chat.
   POCHETER, se dit de certaines chôses bones à manger, qu' on croit qui deviènent meilleures en les portant quelque-tems dans la poche. "Pocheter des olives, des trufes, des mârrons. On l' emploie sur-tout au participe. "Des mârrons pochetés, des olives pochetées. = * Des fruits pochés pour pochetés, est un gasc. Desgr.
   POCHETTE, suivant La Touche, c' est la même chôse que poche: mais celui-ci est plus usité. L' Acad. avait dabord dit que pochette n' était guère plus en usage: dans la dern. édit. elle dit qu' il vieillit: elle l' admet comme diminutif de poche, dans le sens de filet: tendre des pochettes.

POCHER


POCHER, v. act. C' est, en parlant des yeux, faire une meurtrissure avec enflûre.
   POCHÉ, ÉE, adj. Écritûre pochée, où les lettres sont mal formées et pleines de taches d' encre. = OEufs pochés, cuits sans être batus ensemble: pochés à l' eau, au beurre noir. = Populairement, avoir les yeux pochés au beurre noir, meurtris et livides.

PODAGRE


PODAGRE, adj. Il se dit de celui qui a la goutte aux piés; et c' est ce que signifie les deux mots grecs dont il est composé. = Plusieurs le font subst. masc. en parlant du gouteux, c' est un podagre; et subst. fém. en parlant de la goutte aux piés: "Il a la podagre. L' Acad. ne le marque qu' adjectif. "Le pauvre homme est tout podagre. = Il parait qu' il n' y a que les Médecins qui le disent sérieusement: les aûtres ne le disent qu' en plaisantant. L' Acad. l' admet pour le style fam.

PODESTAT


PODESTAT, s. m. [Podèsta: 2e è moy.] Titre d' un Oficier de Justice et de Police, dans plusieurs villes d' Italie. = Quelques-uns ont écrit Potestat, mais mal.

POêLE


POêLE, s. m. et f. [Poâ-le.] Ce mot est féminin, quand il signifie un ustensile de cuisine; et masculin, quand il se dit d' une sorte de fourneau; d' un dais portatif, et d' un drap mortuaire. L' Acad. dans le 2d sens, met poèle ou poile.
   I. Poêle, s. f. Ustensile de cuisine qui sert pour frire, pour fricasser. Poêle à frire, poêle à fricasser. = En st. prov. tenir la queue de la poêle, se dit de celui qui est à la tête des afaires, et qui en a la direction. Le Proverbe dit, qu' il n' y en a pas de plus empêché, que celui qui tient la queue de la poêle. On répond quelquefois, que celui qui est dedans, l' est bien davantage. = Tomber de la poêle dans la braise, de mal en pis.
   II. Poêle, s. m. est, 1°. Drap mortuaire, qu' on met à l' Église sur le cercueuil. = 2°. Voile qu' on tient sur la tête des mariés, durant cette partie de la Messe qui se dit pour la bénédiction nuptiale. = 3°. Dais sous lequel on porte le St. Sacrement aux malades et dans les Processions; et qu' on présente au Roi, aux Princes et aux Gouverneurs, lorsqu' ils font leur entrée dans une Ville.
   III. Poêle ou Poile, s. m. Fourneau de terre ou de fonte, par le moyen duquel on chaûfe en peu de tems toute une chambre. "Alumer le poêle, mettre le feu au poêle. = On le dit aussi de la chambre où est le poile. "Toute la famille se tient dans le poile.

POêLIER


POêLIER, s. m. POêLON, s. m. POêLONÉE, s. f. [Poa-lié, lon, lonée: 1re lon. 2e du 1er et 3e du dern. é fer.] Le 1er se dit d' un artisan qui fait des poêles; le 2d, d' une petite poêle, ordinairement de cuivre étamé, et plus profonde que la poêle; le 3e, de ce qu' un poêlon peut tenir. "Une poêlonée de bouillie.

POèME


POèME, s. m. POÉSIE, s. f. POèTE, s. m. POèTEREAU, s. m. POÉTIQUE, adj. et subst. POÉTIQUEMENT, adv. POÉTISER, v. n. [Po-ème, po-ézie, po-ète, ètero, po--étike, tikeman, tizé: 2e è moy. au 1er, 3e et 4e, é fer. aux aûtres. Anciènement on mettait le trema ou les deux points sur le 1er e de tous ces mots, Poëte, poësie, etc. et plusieurs conservent encôre cette ortographe.] Autrefois on prononçait pou-a-te en trois syllabes, ou poua-te, en deux. Ménage veut qu' on prononce pouete: on ne pron. plus cet u, et poète est de trois syllab. Corneille l' a fait souvent de deux seulement.
   Ce trait est un peu vain, Ariste, je l' avoûe,
   Mais faut-il s' étoner d' un Poète qui se loue.
       Ép. à Ariste.
  Les Poètes au parterre en font tant de leçons.
      Suite du Menteur.
  Poètes Picards, et Poètes de Champagne.
       Épit. à M. de Turenne.
Ce mot, dit La Monnoie, que Regnier, en divers endroits de ses satires ne fait que de deux syllab. doit toujours être de trois.
   POèME, ouvrage en vers, d' une certaine étendûe. Poème Épique, Héroïque, Dramatique, Lyrique, etc.
   POÉSIE est 1°. l' art de faire des ouvrages en vers. "Le feu, l' enthousiasme de la Poésie. "Aimer la Poésie; avoir du génie, du talent pour la poésie. = 2°. Il se prend pour le feu, pour les images de la Poésie. "Il n' y a point de poésie dans ces vers. = 3°. Dans un sens plus resserré, on le dit de la versification. "Poésie douce, naturelle, nombreûse, harmonieûse, etc. = 4°. Manière d' écrire, pleine de figûres et de fictions, ou chargée d' images, de descriptions poétiques. "Il y a de la poésie, ou trop de poésie dans ce discours, dans ce panégyrique. = 5°. Ouvrage en vers. "Les Poésies de Malherbe, de Racan, de Mainard, etc. L' Acad. remarque qu' on ne le dit que des Poètes modernes. Ainsi l' on ne dira pas, les Poésies de Virgile, d' Horace, d' Ovide. On peut ajouter qu' on ne le dit pas de tous les modernes, et qu' on ne parle guère des Poésies de Boileau, de Rousseau, etc. on dit les OEuvres; qu' on ne le dit point des Poètes Dramatiques; et qu' il serait ridicule de dire, les Poésies de Corneille, de Racine, de Molière; et qu' enfin, on ne le dit guère plus que des petites Pièces. Les Poésies de Mde. Deshoulières, de Chaulieu, de Gresset, etc.
   POèTE, celui qui s' adone à la poésie, qui fait des vers. "De bons vers seuls ne font pas le Poète: il faut encôre le génie, l' invention, les images. Autrement celui qu' on apèle Poète n' est qu' un versificateur: nous avons à présent beaucoup de versificateurs, et bien peu de Poètes. = Il s' emploie quelquefois adjectivement: il est Poète, il a du talent pour la poésie. On le dit des femmes: elle est poète. = Quelques-uns ont voulu introduire poétesse; mais ils n' ont pas réussi. On dit, même en parlant des femmes: un Poète. "Mde. de... est un Poète sans talent. Mais on ne dirait pas, avec l' article, le poète, ni la poète, ni la poètesse Deshoulières. = On apèle un mauvais poète, un poète croté.
   POèTEREAU est un terme de mépris: mauvais poète. On lit dans quelques livres, poétriau. "M. Dorat désespère tous les petits poétriaux ses contemporains. Ann. Litt. Dans le même Journal, on dit ailleurs poètereau; et c' est ainsi que le met l' Acad.
   POÉTIQUE, qui concerne la poésie. "Ouvrage, style, terme, expression poétique. = S. f. Traité de l' art de la poésie. "La Poétique d' Aristote, la Poétique de M. Marmontel.
   Rem. 1°. Poétique ne se dit point des persones. On peut, dit Ramsay, faire des vers sans poésie; et l' on peut être poétique sans faire des vers. Il devait dire, être poète. On dit d' une prôse figurée et cadencée, qu' elle est poétique: on ne le dit point d' un prosateur. = 2°. Poétique n' aime pas à précéder le substantif.
   Élever assez haut mes poétiques ailes.
Cette inversion est dure, même en vers.
   POÉTIQUEMENT, d' une manière poétique. "Cela est dit, raconté, traité poétiquement.
   POÉTISER, versifier. On ne le dit sérieusement que dans le marotique.
   Maitre Clément, le grand faiseur de mêtres,
   Si doucement n' eut su poétiser.
       Rousseau.
Hors delà on ne le dit qu' en râillant et en critiquant. "Au lieu de songer à ses afaires, il ne fait que poétiser.

POÉTIQUEUR


*POÉTIQUEUR, s. m. Poète. Style marotique.
   Et s' avez los de bon poétiqueur,
   Aussi l' avez de bon harmoniqueur.

POIDS


POIDS, s. m. [Poâ, et devant une voyèle poâz, monos. long. Le d ne se prononce jamais: il n' est là que pour l' étymologie, et pour le distinguer de pois légume, et de poix résine: ces trois mots, avec une ortographe diférente, ont la même prononciation.] 1°. Pesanteur. Qualité de ce qui est pesant. "Un fardeau d' un grand poids. = Au figuré, Importance, considération. "Homme, gens, Auteurs de poids; raisons d' un grand poids. = Pesanteur, charge. Le poids des afaires. "Notre raison gémit sous le poids des dificultés. Fléchier. _ Le poids de la chaleur et du jour: un grand travail: expression consacrée et tirée de l' Évangile: pondus diei et oestûs. = 2°. Morceaux de cuivre, de fer ou de plomb, dont on se sert pour peser. Poids de marc: il est de huit onces. Monaie, qui est de poids, qui a la pesanteur qu' elle doit avoir suivant les ordonances. = Acheter au poids de l' or, excessivement cher. _ Examiner une chôse au poids du Sanctuaire, selon les règles exactes de la conscience: autre expression consacrée. _ Avec poids et mesure. Voy. MESûRE. = 3°. Morceaux de cuivre, de fer, de plomb ou de pierre qu' on atache aux cordes d' une horloge, d' un tournebroche, pour lui doner du mouvement.

POIGNANT


*POIGNANT, ANTE, adj. [Poag-nan, nante: mouillez le g: 2e lon.] Piquant, qui point, qui fait soufrir. "Douleur vive et poignante. = Il vieillit. Acad. Il est peu usité au propre, et ne l' est guère plus au figuré. C' est un mot à demi gaulois. J. J. Rousseau l' a trouvé à son gré. "Bonheur, plaisir, transports, que vos traits sont poignans!

POIGNARD


POIGNARD, s. m. POIGNARDER, v. a. [Poag-nar, nardé: mouillez le g. On ne prononce point le d final du 1er.] Sorte d' arme pour fraper de la pointe, et qui est beaucoup plus courte qu' une épée. "Il lui dona un coup de poignard; il lui enfonça le poignard dans le sein. = Il est três-élégant au figuré, pour signifier un grand outrage, ou une profonde douleur. "On aiguise contre toi le poignard de la trahison. Jér. Dél.
   Voilà jouer d' adresse, et médire avec art,
   Et c' est avec respect enfoncer le poignard.
       Boil.
  C' est lui mettre moi-même un poignard dans le sein.
      Racine, Andromaque.
"Son mari s' en ira à son Régiment... La mère à Besançon, avec le poignard dans le sein. Sév.
   POIGNARDER, fraper, tuer avec un poignard. "César fut poignardé en plein Sénat. Il le poignarda: il le fit poignarder: il se poignarda lui-même. = Il se dit au fig. mais moins élégamment que poignard. "Lui faire ce reproche, lui dire cette fâcheuse nouvelle, ce seroit le poignarder.
   Quand de ses vers un grimaud nous poignarde,
   Chacun pourra lui doner sa nazarde.
       Rouss.

POIGNÉE


POIGNÉE, s. f. POIGNèT, s. m. [Poa--gnée, nè: 2e é fer. au 1er, è moy. au 2d.] Poignée est, 1°. autant que la main fermée peut contenir. "Une poignée de blé, de son, de dragées, etc. = 2°. Ce qu' on empoigne avec la main: une poignée d' herbes. = 3°. Fig. st. fam. Une poignée de gens, un petit nombre. = À~ poignée signifie, au contraire, en abondance, en grande quantité. "Jeter des fleurs à poignée.
   4°. POIGNÉE, la partie d' une chôse par où on la prend pour la tenir à la main. "La poignée d' un sceptre, d' une épée.
   POIGNèT, l' endroit par où le bras se joint à la main. Il a le poignèt fort, une grande force de poignèt. = C' est aussi le bord de la manche d' une chemise.

POIL


POIL, s. m. [Poal, monos.] 1°. En général, ce qui croît sur la peau de l' animal, en forme de filets déliés. = 2°. En parlant de certains animaux, et sur-tout des chevaux, il signifie couleur: "De quel poil est ce cheval? = 3°. La barbe de l' homme. "Il n' a pas encore un poil de barbe. Se faire le poil, se raser. "Barbier, qui fait bien le poil. S' arracher le poil.
   On dit, en style proverbial, d' un homme bien ajusté, que: un poil n' y passe pas l' autre; d' un poltron, qu' il se laisserait arracher la barbe poil à poil; d' un homme bon à plusieurs chôses, qu' il est au poil et à la plume (allusion aux chiens de chasse. Voy. PLUME.) D' un fanfaron (ironiquement) brave à trois poils; d' une afaire où l' on a eu du désavantage, qu' on y a laissé de son poil. = Avoir le poil de, ou le poil à quelqu' un, le châtier comme il le mérite. = Prendre du poil de la bête; boire encôre le lendemain d' une débauche. Voy. BêTE.

POILOUX


POILOUX, s. m. [Poa-loû.] Terme de mépris. Homme de néant: "C' est un poiloux. Il est bâs et populaire.

POINÇON


POINÇON, s. m. [Poein-son: deux syll.] Il a deux sens, qui n' ont aucun raport l' un à l' aûtre. = Instrument de métal, qui a une pointe pour percer, pour poindre. Il en est de diférentes formes, et l' on s' en sert à divers usages. Poinçon, avec lequel on marque la vaisselle d' argent. Poinçon, dont on se sert pour l' empreinte des monaies et des médailles. Poinçon, avec lequel on frape les matrices, qui servent à fondre les caractères d' Imprimerie. = Aiguille de tête, au haut de laquelle il y a quelque pierre enchâssée, et qui sert à la coîfure des Femmes.
   2°. POINÇON, sorte de toneau, qui tient à peu prês les deux tiers d' un muid.

POINDRE


POINDRE, v. act. et n. [Poein-dre: 1re lon. 2e e muet.] Piquer. En ce sens, il est peu usité. Il ne se dit guère que dans cette phrâse proverbiale: oignez vilain, il vous poindra; poignez vilain, il vous oindra: caressez un mal-honête homme, il vous fera du mal; faites-lui du mal: il vous caressera. = Anciènement, on fesait un grand usage de ce mot. On disait, au présent, il poinct.
   Un gros sot en rithmes compôse
   Des vers par lesquels il me poinct.
       Marot.
Il n' est plus bon que pour le marotique ou le burlesque.
   Et moi chétif, de vos suivans le moindre,
   Combien de fois, las! me suis-je vu poindre
   De traits pareils.
       Rousseau, Ép. à Marot.
POINDRE, neut. paraitre, ne se dit qu' à l' infinitif. "Le jour, le soleil comence à poindre. "Les herbes comencent à poindre au printems. "La barbe comence à poindre à ce jeune homme. = Benserade a dit, au figuré:
   De tous les maux on vit poindre l' engeance.
= * Ablancourt l' a employé au présent. "Sortons, voilà le jour qui poind. = On dirait aujourd' hui, qui comence à poindre.

POING


POING, s. m. [Poein: monos. Le g est muet et oisif: il ne se prononce jamais.] Main fermée. "Coup de poing: se batre à coups de poing. = Flambeau de poing, qu' on porte à la main. = Mener une Dame sur le poing par la main. (st. badin.) = Pieds et poings liés. * Bossuet emploie cette expression dans une ocasion, où l' on en desirerait une plus noble. "Il m' acuse d' avoir livré la Religion Chrétiène pieds et poings liés aux Infidèles. = Faire le coup de poing, se batre comme les crocheteurs. * Le P. Rapin dit, faire à coups de poing. "Tout Roi qu' il est (Ulysse) s' abaisser à faire à coups de poing avec un gueux, nommé Irus! = On dit, proverbialement et bassement: il a la tête plus grôsse que le poing, et si elle n' est pas enflée. _ On dit aussi, en un st. moins bâs: avoir les yeux gros comme le poing, fort grôs, fort enflés à force de pleurer. "Cécile a bien la mine d' avoir passé la nuit à pleurer: elle a les yeux gros comme le poing. Th. d' Éduc.

POINT


POINT, s. m. [Poein, monos. long.] 1°. Piqûre faite dans l' étofe avec une aiguille enfilée de soie, de laine, de fil, etc. "Il n' y a qu' un point ou deux à faire (et non pas à mettre: celui-ci parait être un gasconisme) pour achever de coûdre ou de recoûdre cet habit, etc. = Il se dit absolument des ouvrages de tapisserie à l' aiguille: on dit, le point en est beau ou laid, vilain. On distingue aussi par ce mot les diférentes manières d' y travailler. "Grôs point: point carré; point à la turque, petit point; point de Hongrie, d' Angleterre: ouvrage de point; ouvrière en point. = 2°. Petite marque ronde qui se fait sur le papier avec la plume et l' encre. "Mettre un point sur l' i; à la fin d' une phrâse. Voy. PONCTUATION. = 3°. Aux jeux de cartes, nombre qu' on atribue à chaque carte, selon les diférens jeux où l' on joûe: "L' âs, au piquet, vaut onze points, les figûres dix points. = C' est aussi collectivement, la réunion de tous ces points. "Quel est votre point? Mon point est plus fort que le vôtre. = Presque à tous les jeux, c' est le nombre que l' on marque à chaque coup de jeu. "J' ai dix points: vous n' en avez que six. Il me faut encore tant de points, pour gâgner la partie. = 4°. douleur piquante, qui se fait sentir en divers endroits du corps. On le dit particulièrement de la douleur au côté. "Avoir un point au dôs, à l' épaule, au côté (et non pas, un point de côté, comme je l' ai souvent ouï dire.) = 5°. Question. "Éclaircir un point de Chronologie, discuter un point de Droit, etc. = 6°. Ce qu' il y a de principal dans une afaire. "C' est-là le point essenciel, capital, décisif de cette afaire. "C' est là le point de la dificulté: vous ne touchez pas le point de la question. = 7°. Il se dit des parties qui font la division d' un sermon. L' Académie le dit d' un discours en général, d' un plaidoyer, d' une harangue en particulier. Il me paraît que ce n' est plus l' usage, et qu' on dit partie. Je n' ai vu le mot de point, en ce sens, que dans un discours présenté à l' Académie de Marseille pour le concours, premier point, second point. Dans tous les aûtres discours académiques, j' ai toujours vu, première, seconde, troisième partie. On ne dit, point, que des Discours sacrés, Sermons, Méditations, Panégyriques, Oraisons funèbres. = 8°. État, situation, soit par raport à la santé, soit eu égard à la fortune. "Ce malade est toujours au même point. "Cet~ homme est en bon ou en mauvais point. "Ses afaires sont en mauvais point. = 9°. Degré, période dans les chôses morales. "On peut plaisanter, râiller, mais jusqu' à un certain point. "Au plus haut point de la gloire. "Les sciences ont été portées à un haut point de perfection. = Au dernier point, adverbe. Extrêmement. "Brâve, poltron, heureux, malheureux au dernier point.
   10°. Point fournit à plusieurs aûtres expressions adverbiales du style familier, ou tout au plus médiocre. _ À~ point, à tems, à propôs.
   Rien ne sert de courir, il faut partir à point.
       La Fontaine.
"Par ce moyen, les vaisseaux se trouvoient équipés à point. ROLLIN. "Il leur envoya des rafraîchissemens, qui leur vinrent bien à point. Voy. d' ANS. = À~ point nommé. "J' atends de l' argent et des hommes qui viènent par mer; ce sont deux chôses qui ne viènent pas toujours à point nommé. VOIT. "Vous étiez au milieu de mille chôses, qui empêchent qu' on ne puisse trouver sa tendresse à point nommé. SÉV. "Mon imagination sait où vous prendre à point nommé. ID. = De tout point, entièrement, parfaitement. "La démonstration est complète de tout point. BOSS. Il n' est pas du beau style, et il est peu digne du ton de l' Histoire. "Pour consomer l' afaire de tout point. VELLY. Hist. de Fr. = De point en point. Sans rien omettre. "Il a tout exécuté de point en point. = * Mal en point est vieux. "Aprenez de cela combien vous êtes mal en point ès saintes habitudes intérieures. St. Fr. de S. = Au plus haut point, au suprême degré. "Elle réunissoit au plus haut point la modestie et la fierté, les grâces nobles et touchantes, etc. MARM. = Sur le point, au moment, régit de et l' infinitif. "Sur le point d' arriver. = Au point que s' emploie tantôt pour autant que: "Est-il possible que mes lettres vous soient agréables au point que vous le dites. Sév. tantôt pour tellement que. "J' en fus indigné au point que je ne pûs m' empêcher de le témoigner. En ce sens, on dit aussi à un point, à un tel point que; et non pas en un point, en tel point. "Les maladies augmentèrent à un point qu' il me seroit impossible de vous rendre la triste situation où fut réduit l' équipage. Let. Édif.
   On dit, proverbialement, mettre les points sur les i; être minucieux et scrupuleux dans les afaires. Faire venir quelqu' un à son point: l' engager à faire ce qu' on veut. = Ils chaûssent, ou ne chaûssent pas à même point; leurs humeurs conviènent ou ne conviènent pas. Cette expression est tirée de la cordonerie, où l' on apèle points, des marques faites d' espace en espace, sur une espèce de règle, dont les Cordoniers se servent pour prendre la mesûre d' un soulier, sur le pied de ceux qu' ils ont à chausser. = Pour un point, Martin perdit son âne; peu de chôse fait manquer une afaire, ou, faûte d' un point je perds la partie. = Équiper un homme de tout point, de tout ce qui lui est nécessaire. L' acomoder de tout point, le traiter extrêmement mal. Le premier se dit dans le propre, et le second, dans le figuré familier. = À~ son point et aisement, adv. (et non pas aisément, comme on le lit dans une édition du Dict. Acad. par la faûte de l' Imprimeur); à sa comodité, à son aise, à son loisir. "Vous ferez cela à votre point et aisément.

POINT


POINT, particule négat. Pas, nullement. Voy. PAS. = 1°. Cette particule exige devant elle la négative ne. * Quelques Auteurs l' en ont privée en l' associant avec peu. "Le public peu ou point instruit. Rain. Stathoud. "Elle favorisoit peu ou point le dessein, etc. Hist. d' Angl. = Pluche ne retranche pas la négative ne, mais il l' emploie d' une manière qui est aussi peu convenable à point. "Il n' y avoit que peu, ou point du tout d' or préexistant. Hist. du Ciel. Qu' on ôte peu, et l'~ on~ verra combien la construction est irrégulière. Voy. PEU. = Point, sans négative, ne fait point mal dans les vers suivant.
   Souvenez-vous enfin, qu' un généreux courage
   Pardone à qui le hait, mais point à qui l' outrage.
       Crébillon.
C' est que le verbe est sous-entendu, ne pardone; mais, s' il était exprimé sans être acompagné de la particule ne, l' oreille serait choquée. = 2°. Point n' aime pas à s' associer avec plus. "Il n' y a point plus de réalité dans les aûtres destructions, etc. Pluche. Dites, il n' y a pas plus. = 3°. Point s' emploie quelquefois de manière qu' il ne parait régi par rien. "Point de récompense pour le sage que la vertu. Millot. "Sans la connoissance de soi-même, point de solide vertu. Id. On sous-entend, il n' y a. = L' usage le met aussi seul devant des adjectifs. "Homme bienfaisant, indulgent, point aigre, point soupçoneux. Griffet. Mais cela n' est bon que dans le style familier. = Enfin, point se peut mettre tout seul, en répondant à une interrogation. "En voulez-vous? Point, c. à. d. je n' en veux point. _ Ce sont là trois diférences de pas d' avec point; car pas ne saurait être employé d' aucune de ces trois manières. = 4°. Hors de là, point se met aprês le verbe. Dans le style marotique, il peut se placer devant.
   Le raton, point ne s' en défie.
   Eh! qui s' en seroit défié,
   À~ voir son air de modestie,
   À~ voir son air sanctifié.
       Reyre.

POINTAGE


POINTAGE, s. m. Terme de Marine. Désignation qu' un Pilote fait sur une carte du lieu où se trouve le vaisseau.

POINTE


POINTE, s. f. POINTER, v. act. POINTEUR, s. m. [Poein-te, té, teur: 1re lon. 2e e muet au 1er, é fer. au second. Pointe est 1°. bout piquant et aigu. "La pointe d' une épine, d' une arête, d' une aiguille, d' une épée, etc. = 2°. Extrémité des chôses qui vont en diminuant. "La pointe d' un clocher, d' une montagne. = 3°. En parlant du vin, saveur piquante et agréable. "Vin qui n' a pas de pointe. "Vin vieux, qui a encôre beaucoup de pointe. On le dit aussi d' une saûce. = 4°. Petit clou, sans tête, ou avec une fort petite tête. = 5°. Pointe, au figuré, dessein. "Suivre, poursuivre sa pointe. "Ainsi, il suivit sa pointe. D' Avr. c. à. d. il persista dans son dessein. = La pointe de l' esprit, ce qu' il y a de plus pénétrant dans l' esprit. = 6°. Pointe d' esprit, ou, absolument, pointe: pensée qui surprend par quelque subtilité d' imagination, ou quelque jeu de mots. = Pointe d' Épigramme, la pensée fine ou brillante qui la termine.
   Rem. Les Pointes, jeux de mots (autrefois apelés quolibets, et aujourd' hui calambourgs) ne sont pas du génie de notre langue, qui est grâve et sérieûse. N' imitons pas ce Prédicateur, qui, parlant de St. Bonaventure, entreprit de prouver qu' il avait été le Docteur des séraphins, et le séraphin des Docteurs; (ni cet aûtre, qui disait d' un Saint, grand thaumaturge, qu' il avait été l' homme de Dieu, et le Dieu de l' homme); ni le P. Caussin, qui dit que: les hommes ont bâti la tour de Babel, et les femmes la tour de babil, etc. etc. etc. On doit éviter soigneûsement tous ces faux brillans, qui ne sauraient plaire qu' à ceux qui prènent les verres et les caillous pour des diamans. Andry, La Touche, De Wailly.
   7°. Ménage aimait mieux dire le point du jour, que la pointe du jour. L' Acad. les dit également. Mde de Chaulnes, qui est la vigilance même, partira à la pointe du jour. Sév. = L' Ab. Prévot dit, dans le même sens (Hist. des Voy.) Au premier rayon du jour. Est-ce que le jour a des rayons? Cela a tout l' air d' un anglicisme et d' une traduction trop litérale.
   EN POINTE, adv. En forme de pointe. "Tailler en pointe. "S' élever, se terminer, finir en pointe.
   On dit, en st. famil. être en pointe de vin, avoir de la gaîté, pour avoir bu un peu plus qu' à l' ordinaire. = À~ la pointe de l' épée. Voy. Épée, Aiguille. "Résolvez-vous, ma Belle, à me voir soutenir toute ma vie, à la pointe de mon éloquence, que je vous aime plus que vous ne m' aimez. Mde de la Fayette à Mde de Sévigné.
   POINTER, c' est, 1°. Porter des coups de la pointe de l' épée. "Pendant qu' il haussoit le brâs, son énemi le pointa. = 2°. Diriger vers un point. "Pointer le canon, une lunette, etc. = 3°. V. n. Faire à petits points, en parlant des miniatûres. "On les fait en pointant.
   POINTEUR, Oficier d' artillerie, qui pointe le Canon. = Chanoine, ou autre éclésiastique, qui pique sur une feuille ceux qui sont présens au Choeur, etc.

POINTILLAGE


POINTILLAGE, s. m. POINTILLER, v. n. et act. POINTILLERIE, s. f. POINTILLEUX, EûSE, adj. [Poein-ti-glia-ge, glié, glie-ri-e, glieû, glieû-ze: 1re lon. mouillez les ll: 3e lon. aux 2 dern. é fer. au 2d, e muet au 3e.] Pointiller, neutre; au propre, c' est faire des points avec la plume, le burin, le pinceau, le crayon. Au figuré, contester sur les moindres chôses. "Il pointille sans cesse: il ne fait que pointiller. = Il est quelquefois actif, en ce dernier sens, et il régit les persones. Piquer: dire des chôses désobligeantes. "Il le pointille à tout propôs. "Ils se pointillent l' un l' aûtre.
   POINTILLAGE a raport au sens propre: petits points qu' on fait dans les ouvrages de miniatûre. = Pointillerie et pointilleur se disent dans le sens figuré. _ Picoterie, contestation sur des bagatelles. _ Qui aime à pointiller, à contester, à contrarier. "Il y a entre eux des pointilleries continuelles. Il est pointilleux; elle est pointilleûse. "Cet homme est fort pointilleux sur le cérémonial.
   Rem. On a dit autrefois pointille, pour, pointillerie. Le Dict. de Trév. cite Patru pour le premier. = Ces mots étaient plus usités aûtrefois qu' ils ne le sont aujourd' hui. Bossuet s' en sert souvent. = Pointilleux est le plus usité des trois. Fléchier, St. Évremont, de Villiers l' ont employé.
   Moins délicat ami, que censeur pointilleux.
       Villiers.
Il n' est que du style médiocre, tout au plus, et les aûtres du st. famil. L' Acad. les met sans remarque.