Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI PATRIE


PATRIE, s. f. [2e lon. 3e e muet.] Le Pays, l' État où l' on est né. "La France est notre Patrie: l' amour de la Patrie. = On étend quelquefois ce mot aux Provinces et aux villes où l' on est né. "La Provence est ma Patrie: Marseille est ma Patrie. M. Imbert, le P. Paulian de l' Académie de Nimes, sa patrie. Paris était la patrie de Rousseau, de Voltaire, etc. = La céleste Patrie, le Ciel, considéré comme le séjour des Bienheureux.

PATRIMOINE


PATRIMOINE, s. m. PATRIMONIAL, ALE, adj. [Patri-moa-ne, moni-al, ale.] Le bien qui vient du père et de la mère. "Biens de patrimoine; son patrimoine est considérable; il a eu cent mille écus de patrimoine. = Fig. Les biens, qui ont été donés à l' Église, sont le patrimoine des Paûvres. = Le Patrimoine de St. Pierre, partie du Domaine que le Pape possède en Italie. "Viterbe est la capitale du Patrimoine.
   PATRIMONIAL, qui est du patrimoine. Héritage patrimonial. Biens patrimoniaux.

PATRIMONIALEMENT


*PATRIMONIALEMENT, adv. PATRIMONIALITÉ, s. fém. Mots nouveaux, et qui atendent le sceau de l' usage. "Cette famille possédoit patrimonialement la Courone. Moreau. "Cette patrimonialité du Trône de Clovis fut absolument indépendante. Ann. Lit.

PATRIOTE


PATRIOTE, s. m. PATRIOTIQUE, adj. [Patri-ote, otike: dern. e muet.] Le 1er se dit des persones, le 2d des chôses qui ont raport aux persones. Qui aime sa Patrie et cherche à lui être utile. "C' est un bon patriote. "Sentimens patriotiques.

PATRIOTISME


PATRIOTISME, s. m. Caractère du patriote. "La fausse philosophie est l' énemie du patriotisme. "Le patriotisme se perd tous les jours parmi nous. Les Romains portèrent le patriotisme à l' excês.

PATROCINER


*PATROCINER, v. n. Vieux mot. Parler longuement et jusqu' à l' importunité, pour tâcher de persuader. Il n' est plus bon que pour le burlesque et le marotique.
   Préchez, patrocinez jusqu' à la Pentecôte,
   Vous serez étoné, quand vous serez au bout,
   Que vous ne m' aurez rien persuadé du tout.
       Molière.

PATRON


PATRON, s. m. PATRONAGE, s. masc. [Dern. e muet au 2d.] Patron a deux significations, qui n' ont aucun raport l' une avec l' aûtre. 1°. Modèle. Dans ce sens, il se dit fort bien des chôses qui servent de modèle à certains artisans, sur lequel ils travaillent. "Un beau patron de point, de dentelle. * On le disait autrefois~ des persones.
   Belle âme! beau patron des célestes ouvrages!
       Malherbe.
L' Acad. ne le désaprouvait pas d' abord Dans les éditions suivantes, elle le borne au style familier, et à cette phrâse: se former sur un bon, ou sur un mauvais patron, sur un bon, ou un mauvais modèle. "N' allez pas prendre patron sur mes lettres, dit Mde de Sévigné à sa fille, elles sont infinies: je n' ai que ce plaisir. = 2°. Protecteur. Il se dit du Saint dont on porte le nom, et il a pour féminin Patrone: "C' est mon Patron: c' est sa Patrone. = Par extension, Prince, Seigneur auquel on s' atache, sous la protection duquel on se met. "Un tel Prince est son patron: il a un bon patron à la Cour. = Défenseur: "Il n' y a point de sotise, ni d' extravagance, qui n' ait quelque Philosophe pour Auteur, ou pour patron. P. Rapin. = 4°. Celui qui comande dans une barque. "Le Patron de la barque. = 5°. Celui qui a droit de nomer à un bénéfice. "Patron éclésiastique. Patron laïque. "Il est le patron de ce bénéfice. "Le Pape ne prévient point les Patrons laïques, etc.
   PATRONAGE n' a que ce dernier sens: C' est le droit qu' un éclésiastique ou un laïque a de nomer à un Bénéfice: "Droit de patronage: ce Bénéfice est en patronage laïque, etc.
   On dit, proverbialement, d' un homme qui a tout pouvoir dans une maison, qu' il est le Patron de la câse; et de celui qui a le plus de crédit dans une société, dans une compagnie, dans une afaire, qu' il est le patron de la barque.

PATRONIMIQUE


PATRONIMIQUE, adj. [Patronimike: derniere e muet.] Il se dit du nom qu' on done à tous les descendans d' une race, et qui est tiré de celui qui en est le père, comme les Héraclides était le nom patronimique des descendans d' Hercule; les Séleucides de ceux de Séleucus, etc. Ainsi, en Angleterre, les Plantagénètes, les Tudors, les Stuarts; en France les Mérovingiens, les Carlovingiens, les Capétiens, les Valois, les Bourbons sont des noms patronimiques.

PATROUILLE


PATROUILLE, s. f. [Pa-trou-glie: dern. e muet.] Marche, qu' une escouade de soldats ou le guet fait pendant la nuit pour la sûreté du camp, ou des habitans: "Faire la patrouille. = Il se dit aussi de l' Escouade et du Guet qui fait la patrouille: "Nous rencontrâmes la patrouille.

PATROUILLER


PATROUILLER, v. n. et a. PATROUILLAGE, PATROUILLIS~, s. m. [Pa-trou-glié, glia-ge, gli: mouillez les ll.] Patrouiller, neut. c' est agiter, remuer de l' eau sale et bourbeuse avec les mains ou avec les piés. "Ces enfans patrouillent continuellement dans les rûes, dans les ruisseaux. = V. a. Manier mal proprement. "Les Cuisiniers patrouillent les viandes. "On gâte les fruits en les patrouillant. = Patrouillage a raport au second sens: saleté, mal-propreté qu' on fait en patrouillant. "Quel patrouillage faites-vous là? Il est populaire. Acad. = Patrouillis a raport au premier sens: bourbier où l' on patrouille. "Mettre le pied dans le patrouillis. _ Il est populaire aussi. Acad.

PATTE


PATTE, ou PATE, s. f. 1°. Pied des animaux à quatre pieds, qui ont des doigts, des ongles et des grifes, et de tous les oiseaux, hormi les oiseaux de proie. "Patte de singe, de chat, de chien, de lion, etc. "Un chien qui done la patte. = On dit aussi, patte d' une écrevisse, d' une araignée. = 2°. Les pattes d' une ancre sont les triangles recourbés qui la font mordre au fond de l' eau. = 3°. Le pied d' un verre, d' une coupe, etc. = 4°. Morceau de fer, pointu par le bout et plat par l' aûtre. Par le bout pointu, il se fiche dans du bois ou se scelle dans le plâtre; par l' aûtre bout; qui est percé de plusieurs trous, il sert à atacher un lambris. "Patte en bois, patte en plâtre. = 5°. Patte, dans le sens litéral, se dit proverbialement des hommes. "Il a une vilaine patte, de grôsses pattes: "Ne pouvoir remuer ni pied, ni patte. = Trouver quelqu' un sous sa patte, à sa portée. "Quand vous le trouverez sous votre patte, servez-vous-en. Sév. = Se tirer des pattes de quelqu' un, se soustraire à son pouvoir, ou simplement à ses persécutions, à ses importunités. "Comment vous serez-vous tirée de ses pattes et de ces inondations de paroles, où l' on se trouve noyée, abimée. Sév. = Marcher à quatre pattes; sur les mains et sur les piés. _ Graisser la patte à quelqu' un, le corrompre à prix d' argent. "Son souvenir continuel fait sur mon coeur, comme s' il me graissoit la patte. Sév. = Mettre la patte sur quelqu' un, le batre, le maltraiter. Acad. = Passer sous sa patte, en être maltraité. Id. = Mettre la patte dessus ou sur, c' est aussi se rendre maître de l' esprit de quelqu' un, prendre de l' ascendant, de l' empire sur lui. = Être entre les pattes de; être soumis à l' examen d' un homme dont on a lieu de craindre la sévérité. = Tenir sous sa patte, être en état, en pouvoir de faire déplaisir à... = Doner un coup, ou des coups de patte à quelqu' un; lâcher un trait vif et malin contre lui, sans paraitre avoir le dessein de l' ofenser, ou d' en médire. = Faire patte de velours; cacher, sous des dehors caressans, le pouvoir et le dessein de nuire. = Se servir de la patte du chat pour tirer les marrons du feu; Charger un aûtre de ce qu' il y a de dificile et de périlleux dans une afaire, pour profiter ensuite de son travail. = Bailler le chat par les pattes, présenter une afaire par l' endroit le plus dificile.

PATTE-D' OIE


PATTE-D' OIE, s. f. [Pate-doâ: 2e e muet, 3e lon.] 1°. Espèce de plante. = 2°. Plusieurs allées dans un parc, qui aboutissent à un centre, comme les rayons du cercle.

PATTU


PATTU, ou PATU, TûE, adj. Qui a des plumes jusque sur les pieds. On ne le dit que des pigeons. "Pigeon patu.

PâTURAGE


PâTURAGE, s. m. PâTûRE, s. f. PâTURER, v. n. PâTUREUR, s. m. [1re lon. sur-tout aux deux derniers: 2e lon. au 2d, 3e e muet au 2d, é fermé au 3e.] Pâtûre est, 1°. Ce qui sert à la nourritûre des bêtes, des oiseaux, des poissons. = 2°. Herbe et pâille qu' on done aux boeufs et aux vaches pour leur nourritûre. Pâturer, prendre la pâture. Pâturage, lieu où les bestiaux pâturent. "Dieu a soin de tous les animaux; il done à chacun leur pâtûre: il leur aprend à chercher leur pâtûre. Les petits poissons sont la pâtûre des grôs: "Nos corps deviendront la pâtûre des vers. Mettre de la pâtûre devant les boeufs, etc. "Bons, grâs pâturages: "Lieu où les troupeaux vont pâturer; où ils pâtûrent comodément.
   PâTUREUR n' a d' usage qu' à la guerre. Cavalier, ou valet, qui mène les chevaux à l' herbe.
   Rem. Au propre, pâtûre ne se dit que des animaux. Dans l' Ann. Lit. on le dit des hommes. "Le contraste de leurs moeurs (des anciens Gaulois) avec les nôtres, ne sera pas moins frapant que celui de leur pâture et de nos tables fastueuses. Le mot pâture y est en italique, et il est apliqué à un peuple qui se nourrissait de glands: deux raisons qui justifient l' Auteur de l' emploi qu' il en a fait. = Au figuré, il se dit élégamment. "Il ne faut pas laisser cet homme oisif: il faut doner de la pâtûre à son esprit. "La parole de Dieu est la pâtûre de l' âme. Mais il ne se dit que des Hommes. "Ils (Rousseau et Piron) fournissoient en même tems de la pâture à la crapule la plus ordurière. Linguet. _ Là crapule est mis pour les hommes crapuleux.

PATURON


PATURON, s. m. La partie du bâs de la jambe du cheval, entre le boulet et la courone. "Cheval blessé au paturon.

PAU


*PAU, s. m. [Po.] Il s' est dit aûtrefois pour pieu. Droit comme un pau est un proverbe fort usité en Bourgogne.

PAVAGE


PAVAGE, s. m. PAVÉ, s. m. PAVER, v. act. PAVEUR, s. m. [2e é fermé au 2d et au 3e.] Pavé se dit, 1°. en général de toute pierre dûre, cârreau, etc. dont on se sert pour paver. "Pavé de pierre, de grês, de cailloux, etc. = 2°. Plus particulièrement, du pavé de grês ou de cailloux. "Grôs, petit pavé. "Un pavé; un cent de pavés.
   Le fidèle émoucheur,
   Vous empoigne un pavé, le lance avec roideur;
   Casse la tête à l' homme en écrasant la mouche.
       La Font.
= 3°. Du chemin, du terrein, qui est pavé. "Entretenir le pavé. "Se promener sur le pavé de... "Le pavé est mauvais, est glissant, est rompu.
   PAVER; couvrir le sol avec du pavé, des pavés. "Paver un chemin, une rûe, une cour. = V. n. sans régime. "Chacun est obligé de paver devant sa porte; on pâve dans cette rûe. = Chemin pavé. Salle pavée de marbre, etc.
   PAVEUR, celui dont le métier est de paver des chemins, des rûes. = Pavage, ouvrage de Paveur.
   On dit, figurément, st. famil. _ Faire quiter le pavé à quelqu' un; l' obliger à ne plus paraitre. = Prendre le haut du pavé, se tenir du côté des maisons, en marchant dans les rûes: c' est la place d' honeur. De là, tenir le haut du pavé; l' emporter sur quelqu' un. = Tâter le pavé, agir avec circonspection. _ Bride en main sur le pavé, c. à. d. au propre, il est dangereux de galoper sur le pavé; au figuré, il ne faut rien précipiter dans les afaires délicates, et qui peuvent avoir des suites fâcheuses. = Être sur le pavé, ne trouver pas où loger, ou être sans emploi; et pour un domestique, sans condition. _ On l' a mis sur le pavé, on l' a forcé à déloger. _ On a mis ses meubles sur le pavé, dans la rûe. = Il est sur le pavé du Roi, dans un lieu dont persone ne peut le chasser. = Bateur de pavé, fainéant, qui n' a d' autre ocupation que de courir les rûes. = On dit aussi, pour marquer une grande abondance d' une certaine espèce de chôses, ou une grande multitude d' une certaine sorte de gens, que les rûes en sont pavées. = Avoir le gosier pavé se dit de ceux qui avalent sans peine des chôses extrêmement chaudes, comme la soupe, par exemple.

PAVANE


PAVANE, s. f. SE PAVANER, v. réc. [3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Pavane est une sorte d' anciène danse, grâve et sérieûse. = Se pavaner, marcher d' une manière fière, superbe. _ Il n' est que du style moqueur ou satirique. "J' ai vu la lettre où il s' en pavanoit. Le Marquis de... à M. d' Al. Ce régime de la prép. de et du pronom en qui la remplace, n' est pas selon l' usage. On dit se vanter, se glorifier de; s' en vanter, s' en glorifier; je ne crois pas qu' on dise se pavaner de, s' en pavaner. = Ce verbe se dit toujours absolument et sans régime. "Voyez comme il se pavane. "Pavanez-vous à présent M. C... sur l' ingénieux expédient de la Note, etc. Tart. Epist.

PAVÉ


PAVÉ, PAVER, PAVEUR: Voyez PAVAGE.

PAVESADE


PAVESADE, s. f. PAVOISER, v. act. [Pavezade, pavoazé: 2e e muet au 1er: dern. e muet aussi au 1er, é fer. au 2d.] Pavesade, ou pavois, ou, sur l' océan, paviers, toile ou drap tendu au tour du plat bord d' un vaisseau, soit dans un jour de réjouissance, soit dans un jour de combat. = Pavoiser, garnir un vaisseau de pavois. = Plusieurs disent pavier; mais pavoiser est plus usité.

PAVIE


PAVIE, s. m. [On prononce pavi. Acad.] Richelet dit pavie, pavi ou pavis: il préfère le 1er. Ménage remarque qu' en certaines Provinces on dit une pavie, au féminin; mais que le grand usage de la France est pour, un pavis. Il avoue pourtant que Mrs. de l' Académie ont décidé qu' il fallait dire, un pavie: grôs pavie, petit pavie: le pavie est le mâle du pêcher. Trév. = Pluche écrit comme on prononce, pavi. = Sorte de pêche qui ne quitte pas le noyau. Acad.

PAVIER


PAVIER. Voy. PAVESADE.

PAVILLON


PAVILLON, s. m. [Pavi-glion: mouillez les ll.] 1°. Espèce de tente, servant au campement des gens de guerre. Ce qui les distingue des tentes ordinaires, c' est que celles-ci sont plus longues que larges, et que le haut est fait en forme de toit; au lieu que le pavillon est fait en cârré ou en rond, et se termine en pointe par en haut. = 2°. Corps de bâtiment cârré, ainsi apélé à caûse de la ressemblance de sa figûre avec celle des pavillons d' armée. = 3°. L' extrémité évasée d' une trompette, d' un cor, d' un porte-voix. = 4°. Tour de lit plissé par en haut, ou ataché à un petit ciel-de lit, et qui tombe tout au tour en forme de pavillon. = 5°. Tour d' étofe, dont on coûvre le Tabernacle dans quelques Églises, ou qu' on met sur le ciboire. = 6°. Espèce d' étendard que l' on met à un des mâts d' un vaisseau. "L' Amiral porte le pavillon au grand mât. _ Arborer le pavillon. _ Mettre le pavillon bâs. _ Baisser le pavillon, ou par déférence, ou par force, et pour marquer qu' on se rend au vaisseau énemi.
   On dit, proverbialement (st. figuré famil.) mettre pavillon bâs, ou baisser pavillon, ou le pavillon devant quelqu' un, lui céder, reconaître qu' il l' emporte sur nous.
   Et sur l' art de former un nouvel embarras,
   Devant elle Rollet mettroit pavillon bas.
"Détracteurs de la vertu, âmes basses, que sa vûe offense, baissez pavillon, etc. LE MONNIER.

PAûME


PAûME, s. f. [Pôme: 1re lon. 2e e muet.] Ce mot a deux sens, qui n' ont qu' un raport bien éloigné l' un avec l' aûtre. 1°. La paûme de la main: le dedans de la main, entre le poignet et les doigts. = 2°. La pâume ou le jeu de la paûme, sorte de jeu où avec une raquette ou un batoir, les joueurs chassent et se renvoient une balle, etc. qu' on apèle aussi quelquefois paûme. Ce nom a été doné à ce jeu, parce que dans l' origine on chassoit la balle avec la paûme de la main. On y joûe encôre de cette sorte en quelques endroits. Les écoliers n' y joûent pas aûtrement. Jouer à la longue, ou, à la courte paûme: aimer la paûme, ou le jeu de la paûme. "La paûme est un exercice violent. = Jeu de paûme, lieu préparé pour jouer à la paûme. = L' Acad. remarque que quand on dit simplement jeu de paûme et jouer à la paûme, on entend toujours parler de la courte paume.

PAUMIER


PAUMIER, s. m. [Po-mié: 1re dout. 2e é fer.] Maître du jeu de paûme. "Maître paumier.

PAVOIS


PAVOIS, s. m. [Pa-voâ: 2e lon.] 1°. Anciènement, bouclier. = 2°. Pavesade. Voy. ce mot.

PAVOISER


PAVOISER, Voy. PAVESADE.

PAVOT


PAVOT, s. m. [Le t final ne se prononce pas.] Plante, dont la graine a la vertu d' assoupir. "Tête, graine, suc, jus de pavot. = Les Poètes disent, les pavots du sommeil, pour dire, le sommeil même. "Ce ne fut point le sommeil, qui lui versa ses doux pavots: ce fut la Discorde, qui l' ennivra de ses poisons. Télém.

PAUPIèRE


PAUPIèRE, s. f. [Po-piè-re: 2e è moy. et long: 3e e muet.] 1°. La peau qui coûvre l' oeuil, et qui est bordée de petits poils qu' on apèle cils. "Ouvrir, fermer, clôrre la paupière. = Figurément, fermer la paupière, dormir ou mourir. = 2°. Le poil de la paupière. "Paupière noire, blonde, etc. "De longues, de grandes paupières.

PAûSE


PAûSE, s. f. PAUSER, v. n. [Pôze, pozé: 1re lon. au 1er, dout. au 2d; mais devant l' e muet, elle est longue: il paûse, il paûsera. = Quelques-uns écrivent, comme on prononce, pose, poser, mauvaise ortographe, sur-tout pour le verbe qu' elle confond avec poser; qui a un aûtre sens.] Pause, est 1°. Suspension, cessation d' une action, d' un moûvement pendant quelque-tems. Faire une paûse, plusieurs paûses. "Les Prédicateurs font ordinairement une paûse au milieu du Sermon. = 2°. Dans le plain-chant et la musique, on apèle paûses les intervalles pendant lesquels un ou plusieurs de ceux, qui chantent, ou tout le choeur même demeurent sans chanter. = Pauser ne se dit qu' en Musique. Apuyer sur une syllabe en chantant. "Pausez sur cette syllabe.

PAûVRE


PAûVRE, adj. et subst.~ PAûVREMENT, adv. PAûVRETÉ, s. f. PAUVRET, ETTE, adj. [Pôvre, vreman, vreté: povrè, vrète: première lon. aux 3 premiers, dout. aux deux dern. 2e e muet aux 3 premiers, è moy. aux 2 dern.] Paûvre, 1°. Dans le sens litéral; qui n' a pas de bien: un paûvre homme, une paûvre femme; un paûvre paysan, artisan, etc. = Subst. "Doner l' aumône à un paûvre, aux paûvres. Fig. Langue paûvre, qui n' a pas tous les termes et toutes les phrâses nécessaires pour bien exprimer les pensées. = 2°. Il se dit quelquefois par sentiment de compassion, et signifie malheureux. "Ce paûvre homme! il a bien soufert~. "Ce paûvre Prince! il a été bien malheureux; 3°. Par mépris, chétif, mauvais dans son genre. "C' est un paûvre orateur, poète, musicien, etc. ou, qui manque d' industrie, d' esprit, de coeur, dans ses afaires. "Ne cherchez pas à l' excuser: c' est un paûvre homme.
   Rem. 1°. Pâuvre placé avant homme ou femme, signifie souvent autre chôse que lorsqu' il est placé après. Paûvre homme, paûvre femme, veut dire qu' un homme, une femme est à plaindre. Pour dire un homme, une femme, qui est dans l' indigence, il faut souvent, pour ôter l' équivoque, dire un homme, une femme paûvre, fort paûvre. Cependant, souvent aussi, la matière qu' on traite détermine le sens; et quand paûvre est joint à un, une, il peut signifier la paûvreté; et on peut dire, en ce sens, un paûvre homme, une paûvre femme. _ Quand il est précédé de l' article le, la, les: il ne signifie qu' une persone malheureûse ou sans mérite. Le paûvre homme! La paûvre femme! les pâuvres gens! = Rien ne fait mieux sentir la diférence de paûvre mis devant le substantif d' avec paûvre placé après, que le mot de Linière sur {C109a~} Chapelain et Patru. "L' un est un paûvre Auteur, et l' autre un Auteur paûvre. = On l' perçoit aussi dans un bon mot d' Henri IV. Sire, lui dit un jour un prétendu bel-esprit, avec une sote confiance. "Je fais des Anagrammes, mais je suis fort paûvre. Je le crois reprit Henri; car vous faites là un pauvre métier. = Fénélon fait dire à Télémaque: "Je suis content de ma paûvre Ithaque, quoiqu' elle soit petite et paûvre. _ J' oserai le dire: c' est ou une négligence, ou un jeu de mots peu digne d' un Poême Héroïque.
   2°. Quelques-uns disent, mais mal, pauvresse au féminin. "Ce n' est pas un paûvre, c' est une pauvresse, qui demande. Cette pauvresse est bien importune. Ce mot est un barbarisme.
   3°. On dit quelquefois le paûvre au singulier, pour, les paûvres au pluriel: "Le paûvre est toujours paûvre, et faûte de pouvoir faire des avances et acheter en grôs, il paye tout plus cher que le riche.
   PAûVRETÉ, 1°. Indigence, manque des chôses nécessaires à la vie. Voy. BESOIN. "Tomber dans une extrême paûvreté. "Il y a bien de la paûvreté dans cette Province. = Fig. La paûvreté d' une Langue. Voy. PAûVRE, n°. 1°. = Paûvreté évangélique; la renonciation volontaire aux biens temporels, telle que les vrais religieux en font profession. = Paûvreté d' esprit, le détachement entier des biens de la terre. = 2°. Il se dit de certaines chôses bâsses et méprisables qu' on dit ou qu' on fait. "Il ne dit que des paûvretés. Quelle paûvreté! C' est une grande paûvreté; cela est d' une grande paûvreté. Il n' a de pluriel que dans cette acception.
   PAûVREMENT; dans la paûvreté: vivre paûvrement. = D' une manière, qui sent la misère: être logé, vétu, nourri paûvrement.
   PAUVRET, est un terme de commisération. Le pauvret! la pauvrette! = Il n' est que du style familier. Aûtrefois on l' employait dans le beau style.
   En cette extrémité la pauvrette s' écrie:
   Alcandre, mon Alcandre, ôte-moi, je te prie
   Du malheur où je suis.
       Malherbe.
Dès le tems de Ménage, il n' étoit plus reçu dans la belle Poésie. Il a toujours été plus propre pour le style badin, et il y est encore admis.
   Il se voit pris comme au lacet, {C109b~}
   Et souffre un étrange suplice:
   Mais le pauvret est sans malice.       Voiture.
  Pardonez-moi, dit La Pauvrette.
      La Font.
  Un Milan, qui dans l' air planoit, faisoit la ronde,
  Voit d' en haut le pauvret se débattant sur l' onde. Id.

PAYABLE


PAYABLE, adj. PAYANT, ANTE, subst. PAYE, s. f. PAYEMENT, s. m. PAYER, v. act. [Pé-ia-ble, ian, iante, pé-ie, pé-ie--man, pé-ié: 1re é fer. 2e dout. au 1er, lon. au 2d et au 3e, e muet au 4e et 5e, é fer. au 6e.] L' usage est partagé sur l' ortographe et la prononciation des deux substantifs, et sur les tems du verbe où se trouve un e muet aprês l' y: les uns écrivent paie, paiement, je paie, je paierai, qu' ils prononcent, pê, pêman, je pê, je pêré. L' Acad. et le plus grand nombre écrivent la paye, le payement, je paye, je payerai, et prononcent pé-ie, pé-ieman, je pé-ie, je pé-ieré. _ L' Ab. Du Resnel fait paye de deux syllabes:
   Le style chez les uns tient toujours lieu d' esprit,
   Pourvu qu' on paye en mots, du reste ils font crédit.
   Voyez plus bâs un exemple de Rousseau. = M. l' Ab. Garnier (Hist. de Fr.) et d' aûtres Prosateurs écrivent paie, paiement. "La paie des gens de guerre; la paie des gens d' armes, etc. "Les paiemens s' en étoient faits régulièrement. M. l' Ab. De Lille, met le futur en deux syllabes seulement.
   Tels encor, si tu veux les ranger dans la plaine,
   Ces foibles rejetons paieront un jour ta peine.
Piron écrit même, paîrez, paîroit sans e.
   Oui, de sa liberté vous paîrez mes bienfaits.
       Gustave.
Son sang paîroit bientôt la comune allégresse.Ib.
Nous avons suivi l' Acad. et le torrent des Auteurs.
   PAYABLE, qui doit être payé en certains tems. "Lettre de change payable à vûe: ce billet n' est payable qu' à la foire de, etc.
   PAYANT, qui paye. "Nous étions six à ce diner, mais nous n' étions que quatre payans ou payantes. = L' usage de ce mot est fort borné.
   PAYE, est 1°. La solde qu' on done aux gens de guerre. Paye de Capitaine, de Lieutenant, de Soldat. Haute-paye, se dit et d' une solde plus forte que la solde ordinaire, et de celui qui reçoit la haute-paye. = 2°. Payeur, celui qui paye. "C' est une bone ou une mauvaise paye. "D' une mauvaise paye, il faut en tirer ce qu' on peut. Cela se dit au propre et au figuré.
   PAYEMENT, ce qui se donne pour aquitter une dette. Faire un payement. Pour payement d' une telle somme; pour son payement. = Action de payer: "Le jour du payement.
   PAYER, s' acquiter d' une dette. Il régit les chôses et les persones. "Payer une somme; payer ses créanciers. Payer les intérêts, les arrérages; payer les soldats, les troupes, etc. = Il a quelquefois les deux régimes de la chôse et de la personne: "Payer le tribut à César, les gages à ses domestiques. Je lui ai payé tout ce que je lui devais. = Au figuré, il régit de ou par: "Vous payerez de votre tête le secours, que vous lui aurez donné. Madame Dacier. "Quand notre humanité à leur égard ne seroit payée que par le plaisir de faire des heureux, en faudroit-il davantage pour un bon coeur? Massil. = Ce verbe entre dans plusieurs expressions du style simple ou familier. = Payer de hardiesse ou d' éfronterie. "Il y en a, qui, à ma place, auroient soutenu tout cela, c' est-à-dire, auroient payé d' éfronterie: mais qu' est-ce qu' on y gâgne? Rien. Ne voit-on pas bien alors qu' un homme n' est effronté que parce qu' il devroit être honteux? Mariv. = Payer pour tous, être le seul puni, n' est pas une expression plus noble que la précédente. Rousseau l' a pourtant employée dans une de ses Odes.
   En vain notre corps apelle.
   De ce décret hazardeux:
   Notre âme subordonée,
   Par les soucis dominée
   Paye assez pour tous les deux.
Je ne crois pas qu' on doive imiter en cela ce grand Poète. = N' être pas payé pour une chôse, c' est n' avoir pas de raison de la faire. CORNEILLE aurait pu dire du Cardinal de RICHELIEU: je ne suis pas payé pour le louer. "Il vous répond mille amitiés et mille folies... mais je ne suis pas payée pour m' en amuser. SÉV. C' est que ces folies n' étaient pas faites pour lui faire plaisir. = Se payer, se contenter est tout au plus du style médiocre. "Se payer de mauvaises raisons. "Il falut bien qu' ils se payassent des raisons de l' Ambassadeur, d' Avr. "On est acoutumé à se payer de mots et à en payer les aûtres. Mallebr. = Se payer par ses mains, est du même style; c' est au propre se payer soi-même et des fonds qu' on a entre ses mains; au figuré, trouver à se dédomager: un honête homme se paye par ses mains de l' aplication qu' il a à son devoir, par le plaisir qu' il sent à le faire. = On dit, d' une chôse excellente, qu' elle ne saurait se payer. = Payer de sa personne, s' exposer courageûsement, faire son devoir dans une ocasion dangereûse; et payer de belles paroles, ne satisfaire qu' en paroles, apartiènent aussi au style médiocre = Payer le tribut à la Nature, mourir; et payer d' ingratitude, manquer de reconaissance pour un bienfait reçu, sont du beau style. = On dit, dans le st. fig. famil. et prov. _ Payer en même monoie, rendre la pareille. Payer les violons, faire les frais d' une afaire, dont les aûtres ont le profit. _ Il payera pour les aûtres, il sera seul puni d' une faûte, comune à plusieurs. Voy. plus haut, payer pour tous. = Il me la payera: je saurai me venger de lui. = Il en payera les pots cassés: on fera tomber la perte sur lui; on se vengera, on se dédomagera sur lui.

PAYEN


PAYEN, Voy. PAïEN.

PAYEUR


PAYEUR, s. m. [Pé-ieur: 1re é fer.] Celui, qui paye. "Bon ou méchant payeur. Voy. PAYE. = Payeur des rentes, Payeur de gages, titres d' ofices.

PAYS


PAYS, s. m. [Pé-i: 1re é fer.] On écrivait autrefois Pays, et on trouve encore cette ortographe dans quelques livres modernes: mais outre que ce n' est pas l' usage actuel, l' i sur-ajouté est fort inutile; parce que l' y fait fonction de deux i, dont le 1er se joint à l' a, pour former la diphtongue ai qu' on prononce é et le 2d a son propre son. C' est comme si l' on écrivait paiïs. = 1°. Région, contrée, province: "Bon ou beau pays. "Pays grâs, riche ou maigre, méchant pays. "Courir, batre, reconaître le pays. "Aller par le pays. "Il a bien vu, bien batu du pays. L' Acad. dit aussi: il a bien fait du pays. J' ose douter que cette dernière expression soit de l' usage actuel. = 2°. Patrie, lieu de la naissance. "Pays natal: pays étranger. "De quel pays êtes-vous? Ils sont du même pays. "Aimer, défendre son pays. "Mourir, se sacrifier pour son pays. = En style familier, on dit, absolument, le pays. "Écrire au pays. Recevoir des nouvelles du pays. Retourner au pays, etc. Le P. Bouhours remarque qu' en parlant à des gens, qui sont du même pays que nous, nous pouvons dire, notre pays; mais qu' en parlant à d' autres, il faut dire, mon pays. = 3°. Quelquefois il ne signifie que lieu: "Quel pays est celui-ci, dit-on, en parlant de la Cour. "Les façons de ce pays-là (du chaufoir ou foyers de la comédie) me confondirent, etc. MARIV. = 4°. * Le peuple dit, mon pays, ma payse pour, mon, ou ma compatriote. = 5°. On dit figurément (st. famil.) Gâgner du pays ou du terrein. Faire des progrês: le 2d est moins bâs. "Ils gâgnent visiblement du pays parmi vous. Anon. = On dit au propre, gâgner pays, avancer pays sans article, pour dire avancer chemin. On le dit aussi proverbialement. * Cette expression est bâsse et peu digne du style de l' Histoire. "Ne pouvant gâgner pays qu' à la pointe de l' épée. Anon. = Faire voir du pays, beaucoup de chôses: "Ces traits insinuans, qui conduisent l' esprit du lecteur d' objet en objet, et qui lui font voir du pays sans se lasser. P. Rapin. _ L' expression n' est pas fort noble. _ Faire voir du pays à quelqu' un, c' est aussi lui susciter des afaires. = Batre du pays; traiter beaucoup de sujets diférens. = Savoir la carte du pays; conaître ceux, avec qui l' on a à vivre. _ Être en pays de conaissance, parmi des gens de sa conaissance. = Il est bien de son pays de croire que, etc. il est bien simple de croire, etc. = Pays de cocagne, Voy. COCAGNE. = Pays perdu, se dit plus souvent au figuré qu' au propre; mais il n' est pas du beau style. "La gloire des Stuarts, qui remonte par la succession des Rois d' Écosse jusqu' à l' obscurité de ces tems, qui sont les pays perdus et les terres inconûes de l' Histoire. Mascaron. Cela ne plairait pas aujourd' hui dans une Oraison Funèbre. Voy. PERDU. = On n' emploirait pas non plus dans une Tragédie, comme a fait Corneille, le mot de Pays pour celui de Patrie.
   Si mon zèle au pays vous semble criminel.
       Horace.
Il veut dire, mon zèle pour la Patrie.
  Que l' amour du pays, que le pitié vous touche.
  Votre Rome à genoux vous parle par ma bouche.
       Cinna.
Voy. le n°. 2°.
Pays-bas, c' est dans le style burlesque, le derrière. "L' étui des Pays-bâs. GRESSET. Lutrin vivant.

PAYSAGE


PAYSAGE, s. m. PAYSAGISTE, s. m. [Pei-zage, zagiste. = Suivant Richelet, les Peintres prononcent pésage, mais ceux qui ne sont pas peintres disent peisage.] Paysage se dit, 1°. D' une étendue de pays, que l' on voit d' un seul aspect. "Un beau, un riche paysage; un paysage agréable; 2°. D' un tableau qui représente un paysage. "Ce Peintre ne travaille, ne fait que des paysages; et c' est ce qu' on apèle un paysagiste.

PAYSAN


PAYSAN, ANNE ou ANE, s. m. et f. [Pei--zan, zane.] Homme, femme de campagne, de village. "Un paûvre paysan, une grôsse paysane. = On dit d' un homme mal-propre et incivil, que c' est un paysan, un grôs paysan; qu' il a l' air d' un paysan.
   Rem. Un Auteur, qui écrit payis, écrit aussi payisan: il est conséquent, mais son ortographe est vicieûse: l' i est là fort inutile. Voy. PAYS. = On dit quelquefois le paysan pour les paysans. Voy. SINGULIER, à la fin.
   À~ la paysane, adv. À~ la manière des paysans. "Être vêtu, masqué à la paysane. Danse à la paysane.

PAYSE


*PAYSE. Voy. PAYS. n°. 4°.

PÉAGE


PÉAGE, s. m. PÉAGER, s. m. [1re é fer. dern. e muet au 1er, fer. au 2d.] Péage, droit qui se lève pour un passage. "Les fermiers du péage. "Prendre, doner le péage. "Cela ne doit point de péage. = Péager, celui qui reçoit le péage.

PEAU


PEAU, s. f. PEAUSSERIE, s. f. PEAUSSIER, s. m. [Po, dout. long au pl. Peaux, pron. pô, pôcerie. 1re lon. 2e et dern. e muet. po-cié. 1re dout. dern. é fer. = Rich. écrit peaucier: ce n' est pas le bon usage.] Peau est, 1°. la partie extérieure de l' animal, qui envelope et couvre toutes les parties. "La peau de l' homme. "Avoir la peau dûre, épaisse, ou tendre, délicate; noire ou blanche; belle ou vilaine, etc. "Ce coup n' a fait qu' éfleurer la peau, etc. _ La peau d' un animal. "Les serpens ont la peau mouchetée, tavelée. = 2°. Cette partie, considérée comme séparée du corps de l' animal. "Corroyer, aprêter, pâsser, parfumer une peau. = 3°. L' envelope qui coûvre les fruits, les oignons des plantes et des fleurs, etc. La peau des pêches, des raisins, des oignons. = 4°. Espèce de croûte déliée qui se fait sur du fromage, sur de la bouillie, sur des confitûres, etc.
   On dit, proverbialement, d' un jeune homme inquiet et remuant, qu' il ne saurait durer dans sa peau; de celui qui a un grand dépit, qu' il crève dans sa peau; et d' un incorrigible, qu' il ne changera point de peau, qu' il mourra dans sa peau; par allusion aux serpens, qui changent de peau: = Être grâs à pleine peau; Extrêmement grâs. = Faire bon marché de sa peau; prodiguer sa vie. = Avoir peur de sa peau, ou craindre pour sa peau; craindre les coups. = Au contraire, vendre bien cher sa peau, se bien défendre contre ceux qui nous ataquent. _ Vendre la peau de l' ours avant de l' avoir pris; disposer des chôses avant que d' être assuré d' en être le maître. = Contes de peau d' âne, Contes inventés pour amuser les enfans. Voy. ÂNE, DÉMANGER, COûDRE, LION, ÔS.
   PEAUSSERIE, comerce, ou, marchandise de peau.
   PEAUSSIER, Artisan qui prépare les peaux, pour divers usages.

PEC


PEC, adj. m. [Pèk: è moy.] Il ne se dit qu' avec hareng, et signifie, fraîchement salé. "Manger un hareng pec.

PECCABLE


PECCABLE, adj. PECCADILLE, s. f. PECCANTE, adj. f. PECCâVI, s. m. [Pêkable, kadi-glie, kante, kâvi: 1re é fer. 2e dout. au 1er, lon. au 3e et 4e: mouill. les ll au 2d.] Peccable, qui est capable de pécher. Peccadille, péché léger. = Humeur peccante, (Méd.) Qui pèche en quantité ou en qualité. Peccâvi, terme latin, adopté dans la Langue Française. "Tous les hommes sont peccables: "Ce n' est qu' une peccadille. (st. fam.) "Il faut évacuer l' humeur peccante, les humeurs peccantes. "Il ne faut qu' un bon peccâvi, pour se réconcilier avec Dieu.
   REM. La Monnoie dit que ce terme latin, à force d' être répété par le vulgaire, étant devenu français, n' est écrit par cette raison, qu' avec un c: pécavi. Cependant les Dictionaires, par respect pour l' étymologie, l' écrivent avec deux cc. = Pécâvi ou peccâvi, ne se dit guère qu' à l' ocasion de ceux qui atendent l' extrémité pour se convertir. On dit vulgairement, qu' il ne faut qu' un bon peccâvi à l' heure de la mort, pour être sauvé; mais il faut qu' il soit bon; et c' est là la dificulté.

PÉCHÉ


PÉCHÉ, s. m. PÉCHER, v. n. PÉCHEUR, CHERESSE, s. m. et f. [Ces mots difèrent des suivans par l' accent, qui est dans ceux-ci un é fer. et dans les autres un ê ouv. 2e é fer. aux 2 prem. e muet dans le dern. dont la 3e est un è moy. Pécherèce.] Pécher, c' est transgresser la Loi divine. Péché, est la transgression de la Loi de Dieu. Pécheur, pécheresse, qui comet des péchés, ou qui est enclin au péché, ou qui est dans l' habitude du péché. "Péché originel ou actuel, mortel ou véniel; d' omission ou de comission, etc. "Pécher mortellement ou véniellement; pécher contre les Comandemens de Dieu. "Nous sommes tous pécheurs~. "Je suis un grand pécheur. "Pécheur scandaleux. La femme pécheresse de l' Évangile, etc.
   Rem. 1°. Dans les Provinces Méridionales plusieurs font de la 1re syllabe de ces mots un e muet, et prononcent peché, pecher, pe--cheur: c' est une prononciation gascone, et três-mauvaise.
   2°. Péché et Pécheur ne se disent que de l' ofense de Dieu et de la transgression de sa Loi. Pécher, au contraire, se dit aussi des faûtes contre quelque règle que ce soit, ou de morale, ou d' arts et de sciences, d' ordinaire avec la prép. contre. "Pécher contre la bienséance, contre l' honeur, contre les règles de l' art. = On le dit même des chôses. "Cet ouvrage ne pèche que par trop d' esprit, par trop d' ornemens. "Ces humeurs pèchent en quantité ou en qualité; par la qualité ou par la quantité.
   On dit proverbialement et adverbialement: pour mes péchés, pour ma punition. "Avez-vous lu ce livre? _ Helas! oui, pour mes péchés.
   Adieu! si de ma vie
   Je vous rapèle et qu' il m' en prène envie,
   Puissé-je, chez les morts, avoir, pour mes péchés,
   Deux femmes comme vous toujours à mes côtés.
       La Font.
Rechercher les vieux péchés de quelqu' un; c. à. d. sa vie pâssée. Voy. MIGNON, MISÉRICORDE, OUBLIÉ. _ Voy. aussi FAûTE.

PêCHE


PêCHE, s. f. PêCHER, s. m. [1re ê ouv. et lon. 2e e muet au 1er, é fer. au 2d: che, ché.] La pêche est un gros fruit à noyau qui a beaucoup d' eau, et qui est d' un goût excellent. = Pêcher, est l' arbre qui porte la pêche.
   Rem. Dans les Provinces Méridionales, on fait assez volontiers pêche masc. On dit: un gros pêche, un pêche excellent; c' est une grosse pêche, une pêche excellente qu' il faut dire.

PêCHE


PêCHE, s. f. PêCHER, v. act. et neut. PêCHERIE, s. f. PêCHEUR, s. m. [1re ê ouv. et long: 2e e muet au 1er et au 3e, é fer. au 2d.] Pêcher, c' est prendre du poisson avec des filets, ou aûtrement. Pêche est l' art, l' exercice, l' action de pêcher. Pêcherie, lieu où l' on a coutume de pêcher, ou qui est préparé pour pêcher. Pêcheur, celui qui fait métier de pêcher. "Pêcher du poisson au filet, à la ligne, etc. ou neutralement: pêcher à la ligne, au filet, à l' épervier, etc. "Faire une bone, une heureuse pêche. Aller à la pêche; aimer la pêche. "Établir de nouvelles Pêcheries. "Bon, habile Pêcheur. Patron Pêcheur. Barque, bateau de Pêcheur.
   PêCHE se dit aussi du poisson que l' on pêche. "Combien vendez-vous votre pêche? le poisson que vous avez pêché. = On le dit encore des perles et du corail, etc. "La pêche des perles, du corail, du débris d' un vaisseau. = On dit aussi, pêcher du corail, des perles, du bois qui est emporté par le courant.
   PêCHER se dit non-seulement du poisson, mais d' un étang où l' on pêche le poisson. "Pêcher un étang, pêcher tout le poisson qui y est enfermé. = Il ne faudrait pas, par une analogie trompeuse, étendre cette expression à d' autres amâs d' eau où il y a du poisson, et dire: pêcher une rivière, un lac: l' expression serait ridicule. = On dit, pêcher, au fig. (st. fam.) pour prendre: "Où péchez-vous cette fausse et offensante humilité? Sév. = Pècher en eau trouble, profiter des désordres pour son avantage; les faire naître à ce dessein. = Toujours pêche qui en prend un: ce n' est pas perdre tout-à-fait son tems que de faire un petit gain. = Pêcher au plat, prendre dans le plat ce qu' on veut.

PÉCHER


PÉCHER, PÉCHEUR. Voy. PÉCHÉ.

PECQUE


PECQUE ou PèQUE, s. f. [Pèke: 1re è moy. 2e e muet.] Mot burlesque et injurieux. Femme sote et impertinente, qui fait l' entendûe. "A-t-on jamais vu deux pecques provinciales faire plus les renchéries. Mol. Il n' est que du st. mordant et satirique.

PECTORAL


PECTORAL, ALE, adj. [1re è moy.] Qui est bon pour la poitrine. "Ce sirop est pectoral. "Le bon vin est pectoral. = Qui se porte sur la poitrine. "Croix pectorale.

PÉCULAT


PÉCULAT, s. m. PÉCULE, s. m. [Pé--kula, Pékule: 1re é fer.] Le 1er se dit du vol des deniers publics fait par ceux qui en ont le maniement ou l' administration. Le crime de péculat. "Le péculat est un crime capital. "Être acusé de péculat. = Le 2d se dit de ce qu' a acquis par son travail, son industrie et son épargne celui qui est en puissance d' autrui. "Les enfans de famille peuvent disposer de leur pécule. "Il est défendu à la plupart des Religieux d' avoir un pécule.

PÉCUNE


*PÉCUNE, s. f. Vieux mot, qui signifiait autrefois de l' argent. "Louis XII retira de grandes pécunes de la vente des Charges. Nicole-Gille, cité dans le Dict. de Trév.

PÉCUNIAIRE


PÉCUNIAIRE, adj. PÉCUNIEUX, EûSE, adj. [Pékuni-ère, ni-eû, eû-ze: 1re é fer. 4e è moy. et lon. au 1er, longue aussi aux deux aûtres.] Le 1er ne se dit que des chôses. Amende, peine pécuniaire, somme d' argent, à laquelle un homme est condamné par Justice. Intérêt pécuniaire, intérêt d' argent. "C' est pour un intérêt pécuniaire qu' ils se sont brouillés. = Secours pécuniaire "Se bornant à faire passer quelques secours pécuniaires en Italie. L' Ab. Garnier, Hist. de Fr. = Le 2d se dit des persones, dans le st. simp. Qui a beaucoup d' argent comptant "Il est pécunieux: il n' est pas fort pécunieux. = On ne le dit guère au fém. = Il n' est pas du beau st. et je ne saurais aprouver un Historien qui dit que: les deux Indes rendent les Rois d' Espagne les Princes les plus pécunieux de l' Europe.

PÉDAGOGUE


PÉDAGOGUE, s. m. PÉDAGOGIE, s. f. PÉDAGOGIQUE, adj. [Pédagoghe, gî-e, gike; 1re é fer. dern. e muet.] Pédagogue, celui qui enseigne des enfans, et qui a soin de leur éducation. Pédagogie, instruction des enfans. Pédagogique, qui a raport à l' éducation des enfans. = Pédagogue ne se dit que par mépris. "Il n' a plus besoin de pédagogue. Il fait le pédagogue, le censeur, le pédant. "C' est un plaisant Pédagogue. = On le disait autrefois en bone part. "St. Benoît, ce divin Pédagogue (Instituteur) de la Vie Monastique. Patru. "La raison est un Pédagogue, (un maître) qui règle et qui modère les desirs de l' âme. Bellegarde. _ Le Pédagogue Chrétien, Livre aujourd' hui entièrement oublié, et qui a été long-tems entre les mains des persones pieuses. = Pédagogie et Pédagogique se disent en bone part. On n' a pas besoin de Collège dans les petites villes: il n' y faut qu' une bone Pédagogie. "Les travaux pédagogiques sont mal-à-propos méprisés.

PÉDAIRE


PÉDAIRE, adj. et s. m. [Pédère, 1re é fer. 2e è moy. 3e e muet.] Chez les Romains, on donait ce nom aux Sénateurs, qui ne donaient leur avis qu' en pâssant du côté où prévalait l' opinion, qui leur paraissait la plus juste, ou qu' ils voulaient favoriser. C' est ce que nous apelons, parmi nous, opiner du bonet. On disait comunément qu' un avis pédaire ressemblait à une tête sans langue. Révol. Rom.

PÉDALE


PÉDALE, s. f. Gros tuyau d' orgue qu' on fait jouer avec le pied. = Les touches de ce jeu s' apèlent aussi pédales.

PÉDANÉE


PÉDANÉE, adj. m. Juge pédanée, qui juge debout, n' ayant point de siège pour tenir la Justice.

PÉDANT


PÉDANT, ANTE, adj. et subst. PÉDANTER, v. n. PÉDANTISER, v. n. PÉDANTERIE, s. f. PÉDANTISME, s. m. [1re é fer. 2e lon. 3e e muet au 2d et au 3e, é fer. au 4e.] Tous ces mots se disent de l' afectation de paraître savant, ou du défaut de parler d' un air trop décisif. "C' est un vrai, un franc pédant. "Cette femme est une pédante. "Air pédant, manières pédantes. "Cet homme ne fait que pédantiser. "Ce discours sent la pédanterie, le pédantisme. "Il y a de la pédanterie de se servir, dans le discours famil. de termes d' art, au lieu de ceux qui ont le même sens, et qui sont conus de tout le monde.
   Pédant et Pédanter, sont aussi des termes de mépris, en parlant des Régens et des Précepteurs. "Ce n' est qu' un pédant: il n' a fait toute sa vie que pédanter. = "L' usage, dit Mallebranche, et même la raison veut qu' on apelle pédants ceux qui, pour faire parade de leur fausse science, citent à tort et à travers toutes sortes d' Auteurs, qui parlent simplement pour parler et pour se faire admirer des sots, qui amâssent sans jugement et sans discernement des apophtegmes et des traits d' histoire, pour prouver ou faire semblant de prouver des chôses qui ne se peuvent prouver que par des raisons. _ D' aprês cette définition, qui est três--juste, Mallebranche ne craint pas de dire que; "Montagne, tout cavalier qu' il est, ne laisse pas d' être aussi pédant que beaucoup d' autres."

PÉDANTESQUE


PÉDANTESQUE, adj. PÉDANTèSQUEMENT, adv. [1re é fer. 2e lon. 3e è moy. 4e e muet.] Pédantèsque, qui sent le pédant. "Air, habit, discours, phrâse pédantèsque. = Pédantèsquement, d' une manière pédantesque. "Raisoner, parler, gronder, critiquer, censurer, écrire pédantèsquement.

PÉDèSTRE


PÉDèSTRE, adj. PÉDèSTREMENT, adv. [1re é fer. 2e è moy. 3e e muet: ent, dans le 2d, a le son d' an.] L' usage de ces deux mots est fort borné. Statûe pédestre, qui représente un homme debout sur ses piés. = Aller pédestrement: aler à pied, st. fam.

PÉDICULAIRE


PÉDICULAIRE, adj. [Pédikulère: 1re é fer. 4e è moy. et long, 5e e muet.] Maladie pédiculaire, dans laquelle il s' engendre une grande quantité de poux. = C' est tout l' emploi de ce mot.

PÉDICULE


PÉDICULE, s. m. Terme de Botanique; la partie qui atache la fleur à la tige.

PÉDON


PÉDON, s. m. Courrier à pied. "Le Pédon d' Avignon, de Rome. = On leur conserve ce nom, quoiqu' ils aillent à cheval, pour les distinguer des courriers qui vont en poste.

PÉGâSE


PÉGâSE, s. m. [Pégâze: 1re é fer. 2e lon. 3e e muet.] Cheval fabuleux, auquel les anciens Poètes ont doné des ailes, et qui leur servait de montûre pour aler sur le Parnasse. Il n' y a plus guère que les Poètes de Province qui parlent du Parnasse et de Pégase. Voy. PARNASSE.

PEIGNE


PEIGNE, s. f. PEIGNER, v. act. PEIGNIER, PEIGNOIR, s. m. PEIGNûRES, s. f. pl. [Pèg-ne, pég-né, nié, noar, nûre: 1re è moy. au 1er, é fer. aux aûtres: mouillez le g: 2e e muet au 1er, é fer. au 2d et au 3e, lon. au dern.] Peigne est un instrument de buis, de corne, d' ivoire, etc. tâillé en forme de dents, et qui sert à déméler les cheveux et à décrasser la tête. = Il se dit aussi d' un instrument dont on se sert pour aprêter la laine, le chanvre, le lin. = Peigner, déméler les cheveux, ou aprêter le lin avec un peigne. "Peigner les cheveux, une perruque; se peigner. = Peigner du lin, du chanvre, etc. = Peignier, Ouvrier qui fait, ou Marchand qui vend des peignes. = Peignoir, linge fait en forme de manteau ou de casaque, qu' on met sur ses épaules quand on se peigne. = Peignûres, cheveux qui tombent de la tête, en se peignant.
   Rem. 1°. En certaines Provinces, on fait peigne fém. On dit; une peigne, la peigne, au lieu de un peigne, le peigne, qu' on doit dire. = Peigné se dit au figuré. = Ouvrage bien peigné, poli, travaillé avec soin, exact et châtié. = Un lieu, un jardin bien peigné, ajusté, soigné.

PEINDRE


PEINDRE, v. act et n. PEINTRE, s. m. PEINTûRE, s. f. [1re lon. dern. e muet, 3e lon. au dern.] Peindre, c' est représenter un objet par les traits et les couleurs. Peintre, celui qui fait profession de peindre. = Peintûre, l' art de peindre, ou l' ouvrage du Peintre. "Peindre sur toile, sur bois, sur cuivre. Peindre en huile, à l' huile, à fresque, en détrempe, en pastel, en miniatûre, etc. Peindre une batâille, un morceau d' architectûre. Peindre un homme, faire son portrait. = Bon, grand, excellent ou mauvais Peintre. Peintre en émail, en miniature, sur verre, etc. _ "Il s' adone à la peintûre: il excelle dans la peintûre. _ "Il y a de belles peintûres dans ce palais. Remarquez que peintûre ne se dit guère que de ce qui est peint sur les murailles ou sur un ouvrage de menuiserie. Tableau se dit de ce qui est peint sur toile, bois ou cuivre, et qui peut être transporté: "Les peintûres de ce salon, de cette galerie sont admirables: il y a aussi de très-bons tableaux.
   Rem. Ces mots se disent élégamment au figuré d' une vive description et représentation faite par le discours en vers, ou en prôse. "Fontenelle plaisoit, amusoit, au lieu de toucher et d' instruire: il décrivoit, au lieu de peindre. ANN. LITT. "Homère est un grand peintre. "Ce Poète, cet Orateur excelle dans la peintûre des passions. = Se peindre, se représenter. "Jamais les délices de l' ÃŽle (frivole) ne se peignirent à nos marins si vivement. Coyer. = Se montrer sensiblement: "Une joie calme se peint sur son front. Jér. Dél. = Les objets se peignent sur la glace d' un miroir, sur la surface de l' eau, ils y sont représentés au naturel. _ Se peindre dans ses ouvrages, y doner à conaître son caractère, ses inclinations. = Fait à peindre (st. famil.) parlant d' un homme, bien fait, parlant d' un habit, qui est bien fait, qui sied bien.
   PEINTRE est de deux genres. "Mlle. de... peintre en miniatûre. Journ. de Paris.
   En peintûre, adv. En aparence, en idée, non en réalité. "Roi, riche en peintûre. l' expression n' est pas~ fort noble.
   J' y régnerai, Madame, et sans lui faire injure,
   Puisque le Roi veut bien n' être Roi qu' en peinture.
       Corn. Nicom.

PEINE


PEINE, s. f. PEINER, v. act. et neut. [Pène, péné: dans le premier, la 1re è moy. la 2e e muet: dans le 2d, 2 é fer.] Peine est, 1°. sentiment de quelque mal dans le corps ou dans l' esprit. "Les peines du corps sont plus aisées à suporter que les peines de l' esprit. = 2°. Châtiment, punition. "La peine surpassait le crime. = 3°. Travail, fatigue. "Je n' en suis pas venu à bout sans peine. "Je le ferai, ou je mourrai à la peine. _ Homme de peine, qui gâgne sa vie par un travail pénible de corps. = 4°. Dificulté, obstacle. "Vous aurez beaucoup de peine à gâgner ce procês. = 5°. Répugnance qu' on a à dire, ou à faire quelque chôse. "J' ai eu bien de la peine à me charger d' une telle comission. = Suivant M. l' Ab. Roubaud, vous avez peine à faire la chose à laquelle vous répugnez naturellement: vous avez de la peine à faire ce que vous ne faites qu' avec plus ou moins de dificulté. _ On a peine à croire ce que l' esprit rejette de lui-même: on a de la peine à croire ce qu' on ne se persuade pas aisément. Dans le premier câs, il y a une répugnance ou un préjugé à vaincre: dans le second, vous trouvez des dificultés ou des embarras à lever, etc. Nouveau Synon. Franç.
= 6°. Inquiétude d' esprit. "Être en peine. "Je suis en peine de savoir ce qu' il deviendra, à quoi cela aboutira.
   Rem. 1°. Ménage veut qu' on dise sur peine de la vie, et non pas sous peine. L' Acad. dit l' un et l' aûtre, et aussi à peine. "On lui a ordoné cela sur peine, sous peine, à peine de la vie. _ Bossuet, qui emploie indiféremment les deux premiers, dit aussi à peine de mort, qu' on ne dit pas aujourd' hui; et dans un aûtre endroit, à peine d' être convaincu d' une obscurité afectée. _ Les Auteurs sont partagés: les uns disent sous peine, les aûtres sur peine de la vie: je ne me souviens pas d' avoir vu dans aucun, à peine de la vie. = Remarquez au reste, que quoiqu' il y ait plusieurs peines exprimées, on dit toujours sous peine, au singulier, et non pas sous peines au pluriel. "Il fut enjoint aux Membres du Clergé, de prêter le nouveau serment... sous peines d' être suspens pour six mois, et d' être totalement privés de leurs places, etc. TARGE, Traducteur de Smollet.
   2°. À~ peine est tantôt adverbe, tantôt conjonction. "Télémaque suivoit à peine, regardant toujours derrière lui. Fénél.
   Et des vents du midi, la dévorante haleine,
   N' a consumé qu' à peine
   Leurs ossemens blanchis dans les champs d' Arcalon.
       Rousseau.
En prôse, il vaut mieux d' ordinaire dire, avec peine. "Il soufre avec peine une injustice, mais il la pardone. Fléchier. _ Cependant à peine, et avec peine ont quelquefois des sens diférens. "Il est à peine arrivé, il ne fait que d' arriver: il est arrivé avec peine, il a eu toutes les peines du monde pour arriver. _ Dans ce dernier sens, on dit aussi, à grand' peine. Acad. = À~ peine est plus souvent employé comme conjonction. Il est suivi de que, et régit l' indicatif. "À~ peine suis-je arrivé qu' on m' a apris que, etc. Il se met quelquefois à la tête de la phrâse, soit comme adverbe, soit comme conjonction, et alors on doit mettre le pronom nominatif aprês le verbe. "À~ peine trouvoit-on un morceau de biscuit, qui ne fût pas rempli de vers. Miss. du Paraguai. "À~ peine la fièvre l' eut-elle quité qu' il se remit en marche. Charlev. Hist. du Japon. Mais quand à peine est dans le cours de la phrâse, le pronom personel précède le verbe; et si le sujet est un nom, on ne met point de pronom. "On trouvait à peine, etc. "La fièvre l' eut à peine quité, que, etc. = Quelques Auteurs, et des plus hupés, le P. Bouhours, par exemple, n' ont pas fait cette distinction qu' ordone l' usage. "Il se retiroit la nuit dans quelque masûre, où à peine pouvoit-il se mettre à couvert. Vie de St. Ign. Je crois qu' il falait dire: où il pouvait à peine. _ J. J. Rousseau. "Il fit citer tous les donataires, leur redemandant les neuf dixièmes de ce qu' ils avoient reçu, dont à peine leur restoit-il l' autre dixième partie. Trad. de Tacite. _ Dont il leur restait à peine, etc. "Quoi, vous voulez que pendant que l' attaque dûre, et qu' à peine avons-nous le tems de respirer, nous mettions à l' eau nos navires. Mde Dacier, Iliade. Dites, qu' à peine nous avons, etc. "Cette grotte n' étoit qu' un creux, où un homme à peine pouvoit-il être debout. Let. Édif. Retranchez il: où un homme pouvait à peine, etc. = 3°. Il est essentiel de bien placer cet adverbe; et il faut qu' il se raproche du terme qu' il afecte. Racine n' a pas eu cette atention.
   Du fruit de tant de soins, à peine jouissant,
   En avez-vous six mois paru reconoissant.
       Britanicus.
Qui ne croiroit, dit M. l' Ab. D' Olivet qu' à peine doit se lier avec jouissant, comme si Néron (dont il s' agit) ne faisoit que commencer à jouir; et cependant à peine doit se lier avec le vers suivant: à peine en avez-vous, etc. Rien n' excûse cette inversion. = À~ peine se place aprês le verbe dans les tems simples, et dans les tems composés, entre l' auxiliaire et le participe: "On trouvait à peine de l' eau pour boire. "On eut à peine trouvé, etc. Quand il est à la tête de la phrâse, il est tout simple qu' il précède le verbe: à peine trouvait-on, etc. = 4°. On dit assez indiféremment avoir peine, ou avoir de la peine à faire. L' Acad. ne done d' exemple que du second. "J' aurois peine moi-même à bien danser en votre absence. Voit. "J' aurois beaucoup de peine à m' en pâsser. = Fléchier met de au lieu d' à devant l' infinitif. "Il a d' autant plus de peine de se réconcilier avec ceux qui l' ont fâché, qu' il prend plus de précaution pour ne fâcher persone. _ De n' est pas si usité que à, avec avoir de la peine; mais il se joint fort bien avec se mettre en peine, prendre la peine et se doner la peine: "Ne vous mettez pas en peine de ce qui pourra arriver. "Aucun d' eux ne s' est mis en peine d' entendre ce que signifie l' ancienne écriture. Pluche. "Les filles ne se reposoient pas sur leurs gardiens du soin de leur vertu; elles se donoient la peine (ou elles prenoient la peine) d' être sages elles-mêmes. Marm. = Être en peine a le même régime des noms et des verbes. "J' étois fort en peine de vous et de votre mari. Sév. Je fus en peine qui la pouvoit avoir faite, dit Voiture. Il sous--entend de savoir. = Tirer de peine régit l' acusatif, et porter la peine le génitif. "Je vous suplie de me tirer de peine. VOIT. "L' Auteur est embarrassé: il ne faut pas qu' un Saint Évêque en porte la peine. BOSS. = Perdre sa peine, travailler inutilement. = La chôse en vaut bien la peine, ou n' en vaut pas la peine, est, ou, n' est pas assez considérable. * De retrancher en dans ces façons de parler, c' est un gasconisme. Desgr. C' en est un aussi de dire éviter pour, épargner la peine. "Évitez-vous, ou, je voudrois vous éviter la peine de venir. ID. = Prenez la peine de me venir voir, je vous prie de, etc.
   PEINER, actif, se dit des chôses. Faire de la peine. "Votre situation me peine extrêmement. "Cette nouvelle m' a beaucoup peiné. "Ce travail vous peinera trop. Acad. = Il me semble qu' il se dit plus souvent des peines de l' esprit que de celles du corps. = Suivant l' Acad. Il signifie aussi travailler beaucoup et dificilement ce qu' on fait: "Ce Poète, ce Peintre peine beaucoup ses ouvrages. = Neutre, il se dit des persones, des animaux et des choses inanimées. Avoir de la peine, travailler avec efort. "Ces bateliers, ces chevaux peinent beaucoup à remonter la rivière. Le fameux Chapelain peinoit beaucoup lorsqu' il faisoit des vers. = Cette poutre peine beaucoup; peine trop: elle est chargée d' un trop grand fardeau.
   PEINÉ, ÉE, partic. et adj. "Je suis vraiment peiné d' avoir doné de fausses espérances à, etc. Th. d' Éduc. = Ouvrage peiné, travaillé avec éfort et pesamment. On dit dans le même sens, style peiné, écriture peinée, mais on ne dit pas un homme peiné, DICT. NÉOL. excepté chez les Ascétiques, qui parlent beaucoup des persones peinées et scrupuleuses.
   *PEINEUX, s' est dit autrefois pour peiné, qui a de la peine. La Bruyère le regrette. "Valeur, dit-il, devoit nous conserver valeureux, peine, peineux, etc. Voy. PENAUD. = On ne dit plus que chez le peuple, la semaine peineuse, la Semaine Sainte.

PEINTRE


PEINTRE, PEINTURE, Voy. PEINDRE.

PELADE


PELADE, s. f. PELAGE, s. m. PELARD, adj. m. [1re e muet: le d ne se prononce point dans le 3e.] Le 1er se dit d' une certaine maladie, qui fait tomber le poil et les cheveux; le 2d, de la couleur du poil de certains animaux, comme des chevaux, des vaches, des cerfs; le 3e, du bois, dont on ôte l' écorce pour faire le tan: bois pelard.

PÉLAMIDE


PÉLAMIDE, s. f. [L' Acad. ne met point d' accent sur le 1er e: pelamide. Trév. met l' accent: il me semble que l' e est fermé, et que cet e muet ne fait pas fort bien à la tête de ce mot.] Trév. et le Rich. Port. disent: jeune thon d' un an: mais la pélamide est une autre espèce de poisson. L' Acad. dit, poisson de mer, dont la figûre aproche de celle d' un maquereau. Il faut ajouter, mais qui est incomparablement plus grôs.

PêLE


PêLE, Voy. PELLE.
   PêLE-MêLE, adv. [1re et 3e ê ouv. et long; 2e et 4e e muet.] Confusément. "Ils étoient tous pêle-mêle. "Ils entrèrent pêle-mêle dans la ville avec les énemis. "Je suis assez juste pour rendre au vrai mérite ce qui lui apartient, quoique je le trouve pêle-mêle avec quelques désagrémens. Sév. Dans cette phrâse, il signifie simplement mélé avec.

PELER


PELER, v. act. [1re e muet, pelé; mais devant l' e muet, ce 1er e devient moyen: il pèle, pèlera, etc.] 1°. Ôter le poil. "Peler un cochon. = Vieux pelé, vieille pelée. Terme injurieux. On dit, d' une assemblée, dont on ne fait pas grand câs: il n' y avoit que trois tondus (ou teigneux) et un pelé. = 2°. Ôter la peau; peler une poire, une pomme; des amandes pelées, etc. ou l' écorce; les lapins durant la neige pèlent les jeunes arbres. = Peler la terre, en enlever du gazon.

PÉLERIN


PÉLERIN, INE, subst. m. et f. PÉLERINAGE, s. m. [1re é fer. 2e e muet. = On voit dans des livres Pellerin avec deux ll: que cette ortographe soit des Auteurs ou des Imprimeurs, elle ne vaut rien.] Pélerin, pélerine, celui ou celle, qui par piété fait un voyage à un lieu de dévotion. Pélerinage, voyage que fait un pélerin.
   Rem. 1°. Pélerin, se dit en plaisantant des voyageurs. La Fontaine dit des deux ânes, dont l' un était chargé d' éponges et l' autre de sel.
   Nos gaillards pélerins
   Par monts, par vaux et par chemins,
   Au gué d' une rivière à la fin arrivèrent.
= 2°. Dans le st. fig. famil. persone adroite, fine et dissimulée. "J' ai reconu là le pélerin. "vous ne conaissez pas la pélerine. "C' est un étrange pélerin, une dangereuse pélerine. = 3°. C' est un abus du terme pélerinage que de l' apliquer aux Idolâtres, comme a fait Rollin. "Ce Pélerinage (au Temple d' Ammon) n' étoit qu' un prétexte.

PELISSE


PELISSE, s. f. [Pelice: 1re et dern. e muet. = On a écrit aussi Pélisse et Pellisse, mais ces deux manières d' écrire ce mot sont contre le bon usage et la prononciation.] Robe, manteau, ou mantelet, doublé de fourrûre.

PELLE


PELLE, ou PèLE, s. f. PELLÉE, ou PELLERÉE, ou PELLETÉE, s. f. [Pèle, pélée, pèleré-e, pèletée: 1re è moy. au 1er, 3e et 4e, é fer. au 2d: la 2e e muet, au 1er, 3e et 4e, é fer. et long au 2d.] Pelle, est un instrument de fer ou de bois, large et plat, qui a un long manche, et dont on se sert pour divers usages. Pelle de feu, de four, de jardin, d' écurie. = Pellée et les deux suivans ont le même sens et se disent indiféremment: "Une pellée de plâtre: une pellerée de grain: une pelletée de terre. = En st. fig. famil. pour signifier qu' il y a de grandes richesses dans une maison, on dit que: l' argent s' y remûe à pellerées. = De ces trois mots pellerée parait le plus usité.
   Rem. Suivant La Touche on dit Palle ou Pelle, mais celui-ci est incomparablement meilleur. Ce n' est pas assez dire: il est le seul bon. Le 1er est un mot de Province. Il est du patois des Provinces méridionales.

PELLETERIE


PELLETERIE, s. f. PELLETIER, IèRE, s. m. et f. [Pèleterie, le-tié, tiè-re: 1re è moy. 2e e muet, 3e e muet au 1er, é fer. au 2d, è moy. et long au 3e.] Le 1er se dit de l' art d' acomoder les peaux et d' en faire des fourrûres; et des peaux même, dont on les fait. "Il entend bien la pelleterie. "Faire venir, aporter des pelleteries de Canada, de Moscovie. = Le 2d se dit de celui, qui acomode et qui vend ces sortes de peaux. "Marchand pelletier. Le Corps des Pelletiers.

PELLICULE


PELLICULE, s. f. [On prononce les deux ll.] Peau extrêmement mince dans le corps humain, et au dedans de la coque d' un oeuf, ou de quelques fruits. = C' est tout l' emploi de ce mot.

PELOTE


PELOTE, s. f. PELOTER, v. n. et act. PELOTON, s. m. PELOTONER, v. act. [l' e est tellement muet dans ces mots et les deux suivans, qu' on ne le fait presque pas sentir: plote, té, ton, toné.] Pelote, est 1°. Petite boule, qu' on forme en dévidant du fil, de la soie, etc. = 2°. * Aûtrefois, petite balle dont on joûe à la paûme. = 3°. Pelote de neige, boule que l' on fait avec la neige pressée. = 4°. On apèle aussi pelote la marque blanche, qui est sur le front d' un grand nombre de chevaux. = Peloter, neutre, jouer à la paûme par amûsement, sans que ce soit une partie réglée. = V. act. Maltraiter de coups ou de paroles. "On l' a bien peloté. st. famil. = Peloton, petite pelote. n°. 1°. = Petite pelote couverte d' étofe, où l' on fiche des épingles. Plusieurs les apelent pelotes. = Fig. Persones ramassées et jointes ensemble. "Ils entrèrent par pelotons. = Petit corps de troupe: chaque peloton est composé de deux compagnies de fusiliers. = Balle à jouer à la paûme, qui n' est point garnie de cette serge, dont on a coutume de la couvrir. = Pelotoner, mettre en pelotons. "Pelotoner du fil, de la soie, etc.
   On dit, en style proverbial, peloter en atendant partie, s' ocuper ou s' amuser à de petites choses, en atendant mieux. "Cette expédition de Nice n' est que peloter en atendant partie. SÉV. Voy. BALLOTER. _ Voy. aussi NEIGE. = On dit d' un petit oiseau extrêmement grâs que ce n' est qu' un peloton de graisse.

PELUCHE


PELUCHE, s. f. PELUCHÉ, ÉE, adj. [Pron. pluche, pluché, ché-e: 2e e muet au 1er, é fer. aux deux aûtres, long au 3e.] Peluche, est une sorte de panne, dont le poil est plus long que celui de la panne ordinaire. Peluché, se dit de quelques étofes et de quelques plantes, qui sont velûes.

PELûRE


PELûRE, s. f. [1re et dern. e muet, 2e lon.] La peau, qu' on a ôtée de dessus les chôses, qui se pèlent. "Pelûre de poire, de pomme, d' oignon, etc.

PENâILLON


PENâILLON, s. m. [Penâ-glion: 1re e muet, 2e lon. mouillez les ll.] Hâillon. "Que voulez-vous faire de ce penâillon. "Il n' était couvert que de penâillons: son habit est en penâillons, st. famil.

PÉNAL


PÉNAL, ALE, adj. Il ne se dit qu' au féminin et avec Loi. "Loi pénale, qui assujétit à quelque peine.

PENARD


PENARD, s. m. [Penar: 1re e muet: le d final ne se prononce pas.] Vieux penard: terme de mépris. C' est tout l' emploi de ce mot.

PÉNATES


PÉNATES, s. m. pl. [1re é fer. dern. e muet.] Les Dieux domestiques. = On dit, les Pénates, ou, les Dieux Pénates. = Il ne se dit qu' en poésie et en plaisantant pour signifier la maison.
   Il renonce aux courses ingrates,
   Revient en son pays, voit de loin ses pénates,
   Pleure de joie et dit: heureux qui vit chez soi!
       La Font.

PENAUD


PENAUD, AUDE, adj. [Peno, nôde: 1re e muet; 2e dout. au 1er, lon. au 2d.] Embârrassé, honteux, interdit. "Il fut bien penaud: elle demeura bien penaude. Style familier. = Ce mot, qui n' est conu que depuis cent-vingt ou trente ans, a succédé à peneux, qu' on disait dans le même sens: il a été bien peneux: il est demeuré tout peneux~. Le 1er e était muet, pour le distinguer de péneux, pénible. On apelait alors la Semaine Sainte, la semaine péneuse. La Monn. Le peuple en certaines Provinces et même à Paris lui done encore ce nom. Voy. PEINEUX, à la fin du mot PEINE.

PENCHANT


PENCHANT, ANTE, adj. PENCHANT, s. m. PENCHEMENT, s. m. PENCHER, v. act. et n. [Panchan, chante, chan, cheman, ché: 1re lon. 2e lon. aux 3 premiers, e muet au 4e, é fer. au 5e.] Danet, Richelet et Joubert écrivent comme on prononce panchant, etc. Ce n' est pas l' usage le plus autorisé. = Pencher, incliner, baisser de quelque côté, mettre hors de l' aplomb. Penchement, l' action d' une persone, qui se penche, ou l' état d' un corps, qui est penché. Penchant, adj. qui est incliné. Penchant, subst. Pente. Terrein, qui va en penchant. "Pencher la tête, le corps, se pencher sur le bord d' une fontaine. "Penchement de tête, du corps: "Murâille penchante. "Le penchant d' une montagne, d' un précipice.
   PENCHER, neutre, se joint à plusieurs prépositions: pencher vers, pour, du côté de, etc. "Aller en penchant.
   Rem. 1°. Il se dit au figuré, incliner, être porté à... mais il ne s' emploie que neutralement: "Pour qui, de quel côté penchez-vous? "La plupart des Juges penchoient à le renvoyer absous. = L' Acad. reprit autrefois Corneille de l' avoir employé activement, et d' avoir dit.
   Non qu' une folle ardeur de son côté me penche.
Il falloit dire me fasse pencher: ce verbe n' est point actif, mais neutre (au figuré). Sentim. sur le Cid. = Quelques Auteurs l' ont employé aussi comme actif, à l' exemple de Corneille. "Il n' y a aucune raison qui nous penche d' un côté plus que de l' aûtre. Boss. C' est le régime d' incliner, et si ce verbe était plus usité, il faudrait dire, qui nous incline d' un côté plus que de l' aûtre; mais, qui nous fasse pencher est plus conforme à l' usage. _ Cet illustre Auteur l' emploie ailleurs au passif. "La foiblesse humaine trop penchée au relâchement (c' est encore le régime d' incliné.) Dans un autre endroit il done le même régime (le datif) à pencher neutre: "Cette Princesse (Zénobie) penchoit au judaïsme. = Madame de B... a dit aussi: "Ces dissentions intestines, auxquelles ils penchoient si naturellement. Hist. d' Angl. Il falait, pour lesquelles ils avoient naturellement tant de penchant. = Mais il n' est point d' Écrivain, qui fasse un plus grand usage~ de pencher, actif, passif, réciproque, que le P. De Neuville. "Afin que la douceur passagère de ces amitiés... penche le coeur à rechercher les délices durables de cet amour céleste. "Cette séduction fatale de passions inquiètes, qui nous penche à n' estimer que ce que nous ne sommes pas et à dédaigner tout ce que nous sommes. "Un coeur afligé se penche de lui-même à recevoir les espérances d' une meilleure vie. "Être penché à contredire l' Évangile. = On voit encore dans le Journ. de Lit. le verbe pencher employé activement dans un sens moitié propre, moitié figuré. "Le Duc de Maïène et les États de la Ligue penchent la Courone sur la tête de ce Prince (Charles Emmanuël Duc de Savoie) Cette phrâse figurerait bien dans le Dict. Néologique.
   2°. Penchant au figuré ne s' emploie au pluriel que quand il se dit absolument et sans régime. "Il faut combattre ses coupables penchans. Quand il régit à ou pour, il se met toujours au singulier. "Il y a des persones, qui ont de grands penchans à la vanité. Marsolier. Pourquoi plusieurs penchans à une seule passion? = Voy. INCLINATION. = On dit, adverbialement, sur le penchant de, au propre et au figuré: sur le penchant du précipice; sur le penchant de sa ruine: sa fortune est sur son penchant, sur le déclin. "Le penchant (le déclin) de l' âge.
   3°. PENCHANT, adjectif, se dit au figuré, mais rârement: une fortune penchante. = Penchement, ne se dit qu' au propre. = Penché, adjectif, s' emploie d' une manière, qui tient du propre et du figuré. Des airs penchés, des mouvemens afectés de la tête ou du corps, pour tâcher de plaire. "Avoir, prendre des airs penchés. Style plaisant et moqueur.

PENDABLE


PENDABLE, adj. PENDAISON, s. f. PENDARD, ARDE, subst. [Pandable, dèzon, dar, darde: 1re lon. 2e dout. au 1er, è moy. au 2d.] Pendable, qui mérite d' être pendu. "Cet homme est pendable. = Câs pendable, qui est tel que celui qui le comet mérite la potence. Tour pendable, tour méchant et qu' on a peine à pardoner. "Je conviens que cette race dangereuse vous a joué un tour pendable: vous ne devez pas le leur pardoner. Tart. Épist. = Pendaison, Action de pendre au gibet: il craint la pendaison. Il est populaire, dit l' Acad. = Pendard; vaurien, fripon. "C' est un grand pendard; une vraie pendarde; style critique et chagrin.

PENDANT


PENDANT, ANTE, adj. PENDANT, prép. [Pandan, dante, dan: 1re et 2e lon.] Pendant, adj. Qui pend. "Les fruits pendans. _ Oreilles pendantes, en parlant des chiens. _ Procês pendant au Parlement, dont il est saisi.
   Depuis tantôt six mois que la cause est pendante,
   Nous voici comme aux premiers jours.
       La Font.
= Couteau pendant, (st. fig. famil.) entièrement dévoué à... prêt à tout faire pour... Il est le couteau pendant de cet homme. L' Acad. dit qu' il est peu en usage. = S. m. On apèle pendans de baudrier ou de ceinturon, la partie d' en bas, au travers de laquelle on pâsse l' épée. = Pendans d' oreilles; les pierreries atachées aux boucles, que les femmes portent à leurs oreilles. = Le pendant d' un tableau, est un aûtre tableau, qui est en regard ou en symétrie avec le premier. L' Acad. dit qu' on apelle pendans d' oreilles, ou absolument pendans, deux tableaux d' égale grandeur et peints à peu près dans le même goût. Je doute que la première de ces deux locutions soit de l' usage actuel. = Pendant, en ce sens, se dit au figuré: "Le Marquis de Saluces, dit, qu' il n' avoit point envie de faire le pendant du Prince de Melphe, alors simple officier au service de France. L' Ab. Garnier. Hist. de Fr. c. à. d. d' être dépouillé comme lui de ses États.
   PENDANT, prép. régit l' acusatif: pendant le jour. = Pendant que, conjonction, gouverne l' indicatif: pendant qu' ils parlementoient, les soldats entrèrent par la brèche, etc. = Pendant et durant se ressemblent fort et on les emploie assez indiféremment l' un pour l' aûtre. Il semble pourtant, dit l' Ab. Regnier que pendant est mieux pour exprimer un temps périodique, et durant pour exprimer un tems, dont les bornes sont incertaines: pendant le carême; durant la guerre. = Pendant, ne régit que les noms, qui expriment le tems. La Fontaine a dit: pendant l' emploi de ma mûse; et le P. Rapin: "Pendant le bruit que faisoit celle (la doctrine) de Platon. _ L' emploi de pendant ne vaut rien là.

PENDARD


PENDARD, voy. PENDABLE.

PENDELOQUE


PENDELOQUE, s. f. [Pandeloke: 1re lon. 2e et dern. e muet.] Il se dit 1°. D' une parûre de pierreries ajoutée à des boucles d' oreilles: des pendeloques de diamans. = 2°. D' un pendant d' oreille, qui n' est que d' une pièce.

PENDILLER


PENDILLER, v. n. PENDRE, v. act. et n. [Pandi-glié: mouillez les ll: 1re lon. dern. é fer. pandre: 1re lon. 2e e muet.] Pendiller, être suspendu en l' air et agité par le vent; en parlant de choses viles et comunes: "Des hardes, des linges, qui pendillent aux fenêtres. = Pendre, atacher une chôse en haut par une de ses parties, de manière qu' elle ne touche pas en bâs. Pendre de la viande au croc, des raisins au plancher; du linge à une corde pour le faire sécher. = Pendre des voleurs; les atacher par une corde à une potence, à un arbre, pour les étrangler. "Il est condamné à être pendu. = v. n. Être ataché. "Une enseigne, qui pend à la porte d' une auberge, d' une boutique, etc. Fig. les joues lui pendent, cette robe pend trop (descend trop) de ce côté.
   PENDU, s. m. Homme, qui est ataché à une potence. = On ne le dit point au féminin. "Il a l' air d' un pendu.
   On dit, proverbialement, d' une chôse qui fâche beaucoup, qu' il y a de quoi se pendre: "Je prends part aux bontés de la Providence, qui vient précisément à votre secours dans le tems que vous étiez sur le point de vous pendre, et que j' y consentois quasi. Sév. "Vous savez présentement avec quelle facilité le Roi vous a acordé ce que vous demandiez pour Avignon. Ainsi, ma três-chère, il faut remettre à une autrefois la partie que vous aviez faite de vous pendre. La Même. = Dire de quelqu' un, pis que pendre, ou lui dire à lui-même, pis que pendre; dire de lui toute sorte de mal: lui dire à lui-même toute sorte d' injûres: "Je viens de dire pis que pendre de l' avarice à Madame de... Sév. "Je vis l' autre jour Du Chêne, qui me parla de votre santé, et me dit encôre pis que pendre de cette chienne d' écriture. La Même. Mde de Grignan écrivait trop, et cela l' incomodait. _ Voy. CROC et OREILLES.
   Le Proverbe dit, qu' il ne faut pas parler de corde dans la maison d' un pendu, c. à. d. qu' il ne faut pas dire des chôses qu' on peut apliquer à ceux devant qui l' on parle, et leur doner de la confusion. = Aussi-tôt pris, aussi-tôt pendu. Aussi-tôt dit, aussi-tôt fait. = Sec comme un pendu d' été: homme extrêmement maigre et sec. Voy. CORDE.

PENDULE


PENDULE, s. m. et f. [Pandule: 1re lon. dern. e muet.] Il est féminin, quand il signifie une horloge à poids ou à ressorts; et masculin, quand il ne signifie que le poids suspendu à une verge de fer, qui règle l' horloge. "Une belle pendule. "Une pendule à répétition. "Il faut acourcir ou alonger le pendule: on l' acourcit, quand l' horloge retarde pour rendre les vibrations plus promtes: on l' alonge quand l' horloge avance pour rendre les vibrations plus lentes.

PêNE


PêNE, s. m. [1re ê ouv. et long, 2e e muet.] Morceau de fer long et cârré, qui par le moyen d' une clef, qui le fait aler, sort de la serrûre et entre dans la gâche pour fermer une porte, une armoire; ou sort de la gâche et rentre dans la serrûre pour ouvrir. "Le pêne de cette serrûre est rompu, rouillé, etc. "Le pêne ne va point.

PÉNÉTRABLE


PÉNÉTRABLE, adj. PÉNÉTRABILITÉ, s. f. PÉNÉTRANT, ANTE, adj. PÉNÉTRATION, s. f. PÉNÉTRER, v. act. et n. [1re et 2e é fer. 3e dout. au 1er, lon. au 3e et 4e, é fer. au dern. tion dans le 5e a le son de cion: pénétra-cion, en vers ci-on.] Pénétrer, c' est au propre, percer, pâsser à travers. Pénétration, vertu et action de pénétrer. Pénétrant, qui pénètre. Pénétrable, qu' on peut pénétrer, où l' on peut pénétrer. Pénétrabilité, qualité qui rend pénétrable. "La lumière pénètre le verre: l' eau forte pénètre le fer et l' acier. "l' activité et la pénétration du mercûre. "Le sel est pénétrant. Rien de si pénétrant que le mercûre. "Ce bois est si épais qu' il n' est pas pénétrable. "La pénétrabilité de l' espace.
   PÉNÉTRER, est aussi neutre. "Le coup pénètre dans les chairs. Alexandre pénétra bien avant dans les Indes, etc.
   Rem. 1°. Pénétrable et pénétrabilité, ne se disent qu' au propre, et seulement parmi les savans: leur emploi est peu étendu. Pénétrer, pénétrant et pénétration, se disent aussi au figuré. Il pénètre, il perce les sombres voiles de l' avenir, ou, dans les sombres voiles de, etc. "Esprit pénétrant. "Grande pénétration d' esprit, pour les afaires; pour les Sciences; et absolument, il a de la pénétration, de la sagacité, de la facilité à pénétrer dans la conaissance des chôses. = 2°. En parlant des lieux où l' on parvient, pénétrer est neutre. * Bossuet le fait actif. "Les Sarrasins pénétrèrent l' Empire. "On vit la Perse pénétrée par les Romains. On doit dire, pénétrèrent dans l' Empire: on vit les Romains pénétrer dans la Perse. = 3°. Se pénétrer et être pénétré, se disent au figuré avec la prép. de: "Elle se pénétroit du plaisir de me considérer. "Pénétré de douleur, de joie, de l' amour de Dieu, des vérités de la Religion. = On dit au propre, pénétré de sueur. = 4°. Pénétrant, n' aime pas à suivre le substantif. Bayle, parlant de Pascal, dit: Les libertins ne pourront plus dire qu' il n' y a que de petits esprits qui aient de la piété; car on leur en fait voir de la mieux poussée dans un des plus grands Géomètres, des plus subtils Métaphysiciens et des plus pénétrans esprits, qui aient jamais été au monde. Cette inversion est dûre.

PENEUX


PENEUX, Voy. PENAUD.

PÉNIBLE


PÉNIBLE, adj. PÉNIBLEMENT, adv. [1re é fer. 3e e muet: en, dans le 2d, a le son d' an.] Qui done de la peine. "Travail, ouvrage, chemin, entreprise pénible. = Avec peine: "Écrire, travailler péniblement. "Cet Auteur compose péniblement.
   Rem. 1°. Pénible, se plait à précéder le substantif, en vers du moins et dans le discours soutenu.
   Dans le hardi projet de mon pénible ouvrage.
       L. Rac.
"Que l' amour de Dieu et du devoir vous anime dans ce pénible travail. = 2°. Pénible, ne se dit point des persones. Homme pénible, c. à. d. laborieux, est un gasconisme; persone pénible, qui a pour des riens des peines d' esprit, en est un aûtre. = 3°. Quelques Auteurs ont fait régir à pénible la prép. à devant l' infinitif. "Ce bois est pénible à travailler. = M. Racine le Fils désaprouve ce régime dans ces vers de son Père.
   Un trône est plus pénible à quitter que la vie.
On ne dit point une chose pénible à quitter. L. RAC. L' Acad. ne done point d' exemple de ce régime. = Avec le v. être impersonel, il régit régulièrement la prép. de. "Il est plus pénible de quitter un trône que la vie.

PÉNINSULE


PÉNINSULE, s. f. [Pé-nein-sule: 1re é fer. dern. e muet.] Presqu' Île. Portion de terre, environée de la mer, excepté d' un côté: "La Morée est une péninsule.

PÉNITENCE


PÉNITENCE, s. f. PÉNITENT, ENTE, adj. et subst. PÉNITENCERIE, s. f. PÉNITENCIER, s. m. PÉNITENCIAUX, adj. m. plur. PÉNITENCIEL, s. m. [Pénitance, tan, tante, tancerie, tan-cié, ciô, cièl: 1re é fer. 2e lon. 3e e muet au 1er, au 3e et au 4e, é fer. au 5e, è moyen au dernier.] Pénitence, est le repentir, le regret d' avoir ofensé Dieu, et la peine qu' on nous impôse ou que nous nous imposons nous-mêmes en expiation de nos péchés: "La pénitence est une vertu chrétiène: le repentir est un sentiment moral. La vertu de pénitence a toujours été indispensable; le sacrement de pénitence ne l' est que depuis l' institution de Notre-Seigneur. "Il faut recevoir avec respect la pénitence, qui est ordonée par le Prêtre. "Faire pénitence de ses péchés. Il faut faire pénitence, si l' on veut être sauvé. = On dit, proverbialement, faire pénitence, faire mauvaise chère. "Voulez-vous faire pénitence avec nous, dîner avec nous à l' aventure du pot. = Faire pénitence de... en faire pénitence: porter la peine de ses débauches, de sa mauvaise conduite par les infirmités ou les disgraces qu' elles nous ont atirées. On dit aussi, en plaisantant, pour pénitence, ou en pénitence de cela vous ferez telle chôse. = Mettre en pénitence, imposer une peine. Il se dit proprement des Religieux et des Religieûses; et figurément, (st. famil.) de toute sorte de persones. "Il venoit souvent dîner avec nous: il nous a manqué, et nous l' avons mis en pénitence: nous ne le prions plus.
   PÉNITENT, adj. Qui a regret d' avoir ofensé Dieu, et qui s' en punit. Qui est dans les pratiques de la pénitence. "Homme pénitent, femme pénitente. = Subst. Celui, celle qui confesse ses péchés au Prêtre. Interroger, absoûdre un pénitent. Ce Prêtre a beaucoup de pénitens et de pénitentes. = Membre d' une Confrérie, où les Confrères sont revétus de sacs. "Pénitens blancs, bleus, noirs, gris, etc.
   PèNITENCIER, Prêtre comis par l' Évêque pour absoûdre des câs réservés. Pénitencerie, charge, ofice, dignité de Pénitencier. = À~ Rome il y a une grande Pénitencerie; espèce de Tribunal ou de Bureau, où l' on done, au nom du Pape, des dispenses pour les câs ocultes.
   PÉNITENCIAUX ne se dit qu' en parlant des Pseaumes de la pénitence, vulgairement apelés les Sept Pseaumes. On devrait dire, selon la Gramaire, les Pseaumes pénitentiels; mais l' usage a autorisé pénitenciaux, disent Vaugelas et Th. Corneille. J' avoue que je ne vois pas ce que fait la Gramaire en cette ocasion, excepté qu' on n' entende par là les opinions des Gramairiens. = On écrit, ou pénitentiaux, par respect pour l' étymologie latine, ou pénitenciaux par respect pour la Française. L' Acad. met le 1er, nous nous sommes décidés pour le 2d. Je ne vois pas pourquoi on écrirait pénitencier avec un c, et pénitentiaux, pénitentiel avec un t? Ils dérivent tous trois de pénitence.
   PÉNITENCIEL, rituel de la pénitence. Livre qui contient la natûre et la durée des pénitences, qui devaient être imposées dans le tems où la pénitence publique était en vigueur.

PENSANT


PENSANT, ANTE, adj. PENSÉE, s. f. PENSER, v. n. et act. [Pansan, sante, sé--e, sé: 1re lon. 2e lon. aux deux premiers, é fer. aux deux aûtres.] Penser, c' est former dans son esprit l' idée, l' image de quelque chôse. Pensant, qui pense. Pensée, l' opération de l' âme qui pense. "La matière est incapable de penser, de devenir un être pensant. "Il n' y a que les esprits qui soient capables de la pensée. = Pensant n' a que ce sens et cet emploi, excepté dans la phrâse suivante: Mal pensant, mal pensante, qui juge désavantageûsement de son prochain. Penser et pensée, au contraire, ont diférens sens.
   I. PENSER c' est, 1°. Faire réflexion. Il régit alors le datif: penser à ses afaires, à son salut. = 2°. On dit pourtant, ce que je pense, ce que vous pensez, le faisant actif, et lui donant pour régime l' acusatif. Alors, il signifie l' opinion et le sentiment. Si on disait, ce à quoi je pense, on n' exprimerait que la simple pensée. C' est pourquoi il ne faut pas user indiféremment de ces deux régimes. Voy. plus bâs Rem. n°. 2°. = 3°. Raisoner: il est neutre: "L' art de penser; il pense bien ou mal. = 4°. Prendre garde. "Pensez à vous: il se perdra, s' il ne pense à lui. = 5°. Avoir une chôse en vûe: "Cette charge, ce parti vous conviendrait: vous devriez y penser. "Il ne pense plus à cette maison: il la troûve trop chère. = 6°. Avoir dans l' esprit: "Vous le dites, mais vous ne le pensez pas. = 7°. Imaginer.: il est actif: J' ai pensé une chôse qui vous tirera d' afaire. = 8°. Croire, juger: "Que pensez-vous de cela? _ Et neutralement: "Il pense mal de tout le monde. = 9°. Être sur le point de... j' ai pensé mourir.
   Rem. 1re. Penser, songer, réver ont beaucoup de raport dans leur signification: voici leurs diférences. On pense tranquillement et avec ordre: on songe avec plus d' inquiétude et sans suite, pour obtenir ce qu' on souhaite. On rêve d' une manière abstraite et profonde, pour s' ocuper agréablement. "Le Philosophe pense à l' arrangement de son systême: l' homme, embarrasé d' afaires, songe aux expédiens pour en sortir: l' amant solitaire rêve à ses amours. GIR. Syn. = 2e. Penser régit tantôt le datif: à quoi pensez-vous? tantôt l' accusatif: je ne puis dire ce que je pense; tantôt l' accusatif et l' ablatif: que peut-on penser d' une telle conduite? Avec les deux derniers régimes, il exprime l' opinion: avec le premier il n' exprime~ que la simple atention de l' esprit. * Mascaron, dans ce dernier sens, emploie, dans la même phrâse, deux régimes diférens. "Vous qui êtes obligés de penser à ce que vous n' avez jamais pensé. Il falait: à ce à quoi, etc. = Dans la Princesse de Clèves, on dit toujours, pensez ce que vous vous devez à vous-même, pour pensez à ce que, etc. Il en est de même de songer. Voy. ce mot. = * Racine dit dans Bérénice:
   Un bonheur où peut-être îl n' ôse plus penser.
Son fils, toujours porté à l' excuser, n' a pu s' empêcher de condamner ce régime. "Un bonheur où j' aspire est exact; mais un bonheur où je pense ne l' est pas: il faudrait auquel, en prôse. L. Rac. = 3e. Ce verbe régit l' infinitif avec de ou à, ou sans préposition; le premier, quand il signifie croire; le second, quand il a le sens d' avoir en vûe ou dans l' idée, le troisième, quand il veut dire être sur le point de. "Il pensait de me surprendre; il pensait à me surprendre; il pensa me surprendre, sont des expressions bien diférentes, et qu' il ne faut pas confondre. * Malherbe met de dans le second sens: "Pensez de vous resoudre. Remarquez penser de pour penser à, dit Ménage en le critiquant. * Dans cette même acception, Mde de Sévigné met l' infinitif sans préposition, ce qui est une aûtre irrégularité. "Vous pensez m' écrire de grandes lettres, sans dire un mot de votre santé. Il falait à m' écrire. = 4e Penser, croire, régit comme ce verbe la conjonction~ que, et de la même manière, c. à. d. avec l' indicatif dans la phrâse afirmative, et avec le subjonctif, dans la phrâse négative ou interrogative. "Je pense qu' il peut arriver aujourd' hui: il ne pense pas que cela puisse réussir: pensez-vous que j' obéisse aveuglément à vos caprices~? * Dans la phrâse suivante, quoique le pronom nominatif soit aprês le verbe, la phrâse n' est point interrogative: aussi le subjonctif y a quelque chôse de sauvage. "Peut-être (Antiochus) pensoit-il qu' en assistant à ces combats (de gladiateurs) on conçût le mépris de la vie. Le pronom il, qui est aprês pensait, n' y est qu' à cause de l' adverbe peut-être: le sens n' est donc point interrogatif: le subjonctif conçut n' est donc pas suivant l' usage. Il fallait dire: peut-être pensait-il qu' on concevrait le mépris, etc. _ Au contraire le subjonctif était nécessaire dans la phrâse qui suit, parce que le sens est négatif, quoique la particule négative n' afecte pas immédiatement le verbe penser. "L' Homme digne et jaloux de l' estime universelle, ne s' acoutume point à penser que quelqu' un dans la société se croit en droit de lui refuser la sienne. Linguet. Je pense qu' il falait dire se croie, et non pas se croit; et je ne doute pas que ce ne soit une faûte d' impression. = Si le verbe régi par penser se raporte au sujet de la phrâse, il doit se mettre à l' infinitif: "Vous pensez faire des merveilles; comme on dit, vous croyez faire, etc. = 5e. Quoique penser signifie souvent croire; il n' a pas pourtant tous les régimes de ce verbe: celui-ci, par exemple, régit des adjectifs, que penser ne régit pas. * "Me pensiez-vous (croyiez-vous) capable de recevoir dans ma famille la fille d' un homme déshonoré? Th. d' Éduc. "Penseriez-vous possible qu' un ambitieux hypocrite pût feindre pendant dix ans la sincérité, la modération et le désintéressement? Ibid. Ce dernier exemple est encôre plus inusité. À~ vouloir se servir du verbe penser, il faudrait dire: penseriez-vous que je fusse capable, qu' il fût possible, etc. = 6e Penser, imaginer, est actif. En certaines Provinces, on le fait réciproque. On dit: je me pense une chôse qui pourra être utile; et dans le sens de croire, juger: je me suis pensé que vous feriez bien, au lieu de dire, je pense une chôse qui; j' ai pensé que, etc. = Corneille a dit, il y a long-tems:
   Perfide, tu n' est pas encor où tu te penses.
       Pulchérie.
On dirait aujourd' hui, où tu penses. = 7e. Le P. Bouhours a fait une remarque sur la diférence de penser en vous et penser à vous: il dit que le premier emporte amitié et tendresse, et le second simple honêteté; que l' un vient plus du coeur que de l' esprit, et l' aûtre plus de l' esprit que du coeur. Je ne sais si cette distinction a jamais eu quelque fondement dans l' usage; mais elle est inutile aujourd' hui, puisque penser en vous ne se dit plus. = 8e. Je pense est quelquefois employé en parenthèse. Pluche dit, je le pense, le pronom le est superflu. "Il sera, je le pense, évident que les unes sont la cause des autres. Spect. de la Nat. Il faut dire, il sera, je pense, évident que, comme on dit, il est, je crois, certain que, etc. = 9°. On dit, dans le style simple, je sais qu' en penser, pour dire, je sais ce que je dois en penser.
   *PENSER, s. m. Vieux mot. Pensée. l' Auteur des Réflexions dit qu' il n' était déjà de son tems plus usité qu' en vers. L' Acad. avait dit aussi d' abord qu' il n' était d' usage qu' en poésie: elle ajoute dans les dernières Éditions, qu' il est même vieux. Le Richelet Portatif se contente de dire qu' il vieillit. Corneille l' emploie souvent.
   Qu' à des pensers si bâs mon âme se ravale.
       Polieucte.
Je tremble au seul penser du sort qui me menace, etc.
Mde Dacier et Rousseau s' en sont encôre servis. "Il roule dans sa tête diférens pensers. Iliade.
   Leur bouche ne vomit qu' injures et blasphèmes,
   Et leur coeur ne nourrit que pensers vicieux.
       Rousseau.
Ce mot était comode pour les Poètes, parce qu' il peut entrer dans le cours du vers, ce que pensée ne peut faire devant un mot qui commence par une consone. Ils ont eu tort de laisser perdre le privilège qu' ils avaient de l' employer.
   II. Pensée s' emploie sur-tout en parlant de l' acte particulier de l' esprit. "Pensée vive, agréable, spirituelle, fine ou comune, triviale. Pensée douce, flateûse, ou triste, fâcheûse, funeste. Ouvrage plein de belles pensées. "Entrer dans la pensée de... comprendre sa pensée. "Il n' est pas bien entré dans la pensée de cet Auteur: il n' a pas bien compris sa pensée, etc. Il signifie aussi opinion; ce qu' on croit. "Votre pensée est fort bone: ce n' est pas là ma pensée. "Sa pensée était qu' il falait tout risquer, plutôt que de consentir à un traité déshonorant. = Dessein. "Je n' ai jamais eu cette pensée. "On n' a jamais eu la pensée de l' arrêter, etc. = Venir en pensée, dans l' esprit: il m' est venu en pensée que, etc. Cela ne m' est jamais venu en pensée. = Entretenir ses pensées, ou s' entretenir avec ses pensées, s' ocuper de ses rêveries. Le second est le meilleur. = Pensée, dans les Arts fondés sur le dessein, c' est la première idée, l' esquisse. "On conait les grands maîtres dans leurs simples pensées.
   PENSÉE est aussi le nom d' une petite fleur à cinq feuilles, nuées de violet et de jaûne. Bouquet de pensées. = Couleur de pensée, violet brun, tel que celui des pensées.

PENSEMENT


*PENSEMENT, s. m. Souci, inquiétude. Vieux mot, qui se dit encôre en certaines Provinces. "Un Père de famille a beaucoup de pensemens.
   J' ai vécu sans nul pensement.
       Regn.
Montagne, qui était gascon, dit pensement pour pensée. Il done aux araignées même pensement, délibération, conclusion. Le mot est surané, et l' opinion extravagante.

PENSEUR


PENSEUR, s. m. PENSIF, IVE, adj. [Pan-ceur, cif, cive: 1re lon.] Le 1er, se dit de celui qui est acoutumé à penser, à réfléchir: c' est un penseur; le 2d, de celui qui est ocupé d' une pensée chagrinante. "Je le trouve tout pensif depuis quelque tems: elle paraissait inquiète et pensive.
   Rem. Penseur a été long-tems peu usité, et on peut le regarder comme un mot nouveau: les uns l' emploient pour louer, les aûtres pour se moquer. "L' Auteur (M. G..) qui marche sur les traces de Montesquieu, semble aspirer à la gloire d' un penseur profond, plutôt qu' à celle d' un Orateur. Ann. Litt. "M. Th. est moins éloquent que boursouflé, plus compilateur et copiste que penseur et original. Sabat. Trois Siècles, etc. "Ces Poètes seront plus profonds, plus penseurs que ceux des autres nations. De Lille.
   Penseurs célèbres, pauvres gens,
   Qui, sur le systême du monde,
   Balbutiez vos argumens.
       Dorat.
"Tous ces Philosophes, ces penseurs, comme ils s' apellent, sont de rudes gens. Th. d' Éduc.

PENSION


PENSION, s. f. PENSIONAIRE, subst. PENSIONER, v. act. [Pan-cion, cio-nère, cio-né, en vers ci-on: etc. 1re lon. 3e è moy. et long au 2d, é fer. au 3e.] Pension est 1°. Une somme d' argent que l' on done pour être logé et nourri. Payer pension. Doner une forte, ou une médiocre pension. = 2°. Le lieu où l' on est logé et nourri pour un certain prix: "Être, se mettre en pension. = 3°. Maison où de jeunes enfans sont logés, nourris et instruits, moyénant une certaine somme, qui se paye par quartier. "Maître de pension. Tenir pension: on l' a mis, ou il est en pension chez les... "On est bien, ou mal dans cette pension. * Quelques-uns disent en ce sens Pensionat. "L'~ instruction de la Jeunesse, par M. Gobinet, le meilleur livre en ce genre, et le plus répandu dans les pensionats, et les collèges~. Ann. Litt. On voit aussi ce mot dans le Journ. de Bruxelles, ou de Genève. = Pensionat n' est point dans les Dictionaires. Ce mot vient des bords de la Garone. = 4°. Certaine portion à prendre chaque année sur les fruits des Bénéfices. "Il a obtenu trois mille écus de pension sur un tel Évêché. = 5°. Ce qu' un Prince ou un Grand Seigneur done annuellement à quelqu' un, ou pour le récompenser, ou pour se l' atacher. "Le Roi lui a doné mille écus de pension. "Il a deux mille francs de pension d' un tel Seigneur, etc.
   PENSIONAIRE se dit dans tous ces sens là, mais il a deux significations. Celui qui paye pension (n°. 1°. et 3°.); celui qui retire une pension de... (n°. 4°. et 5°.) = * Rollin dit (Hist. Anc.) "Il (Philipe) avoit dans toutes les Villes des pensionaires à gages, qui lui donoient avis de tout. C' est un vrai pléonasme. Car, si les émissaires du Roi Philipe étaient ses pensionaires, il leur donait donc des gages; et s' il leur donait des gages, ils étaient donc ses pensionaires.
   PENSIONER n' a que le dernier sens de pension. Doner, ou faire une pension à quelqu' un. "Un tel Seigneur le pensione. "Il est pensioné par le Roi, etc. Ce mot n' est que du style simple.

PENSUM


PENSUM, s. m. [Pron. penson: en n' a pas le son d' an. On dit dans le Dict. de l' Acad. qu' on prononce painson: il me semble pourtant que la diphtongue ain ne rend pas le son d' en, tel qu' il se trouve par exemple dans moyen.] Surcroit de travail, qu' on exige d' un écolier pour le punir. "On lui a doné pour pensum de transcrire tant de vers de Virgile.

PENTACORDE


PENTACORDE, s. m. PENTAGôNE, adj. et subst. PENTAMèTRE, adj. PENTAPOLE, s. f. PENTATEUQUE, s. m. [Tous ces mots sont tirés du grec, où pente signifie cinq: en n' y a pas le son d' an. = Pour le dernier, les uns prononcent pen--tatéuque, pour respect pour l' étymologie, à ce qu' ils disent, les aûtres pentateuque, parce qu' ils disent que c' est l' usage. Aucun Dictionaire ne met l' accent sur le 1er é de ce mot: C' est une preûve, ou du moins un préjugé qu' on ne doit pas le prononcer.] Le premier se dit d' une lyre à cinq cordes; le second, d' une figûre à cinq angles et cinq côtés; le troisième, d' une espèce de vers de cinq pieds, chez les grecs et les latins; le quatrième, d' une contrée où il y a cinq villes; le dernier, des cinq premiers livres de la Bible, dont Moïse est l' Auteur.

PENTE


PENTE, s. f. [Pan-te: 1re long. 2e e muet.] Dans le siècle pâssé, on écrivait pante, panchant, etc. = 1°. Au propre, terrain qui va en penchant, en descendant. "La pente d' une colline, d' un coteau. "Il y a une pente douce de là à la rivière. = 2°. Au figuré, inclination. "Il a beaucoup de pente au jeu, ou pour le jeu, peu de pente à l' étude.
   De tous les animaux l' homme a le plus de pente
   À~ se porter dedans l' excès.
       La Font.
= 3°. Bande qui pend autour du ciel de lit. "Les pentes du dehors sont plus grandes: les pentes du dedans s' apellent aûtrement, les petites pentes. = 4°. Bandes d' étofe, qui, dans les bibliothèques, sont atachées aux planches des tablettes.
   Rem. Quoique pente signifie quelquefois inclination, je doute qu' il se dise des persones avec le régime du génitif (de la prép. de) on dit qu' un homme a de la pente à faire quelque chôse; mais je ne crois pas qu' on dise, la pente de cet homme est de faire telle chôse. Bossuet dit de l' Ab. Du Pin: c' est la pente de cet Auteur de doner des idées suspectes des meilleures choses. Ce régime ne me parait pas usité.

PENTECôTE


PENTECôTE, s. f. [Pantekôte: 1re et 3e lon. 2e et dern. e muet. = On disait aûtrefois Pentecouste, et de là le Proverbe, de Pâques à Pantecouste le dessert est une crouste. = On dit ensuite Pentecoste, et Voiture voulait qu' on le dît de la sorte.] Fête que l' Église célèbre en mémoire de la descente du Saint-Esprit, le cinquantième jour aprês Pâques. La Pentecôte, où les fêtes de la Pentecôte.

PENTûRE


PENTûRE, s. f. [Pantûre: 1re et 2e lon. 3e e muet.] Bande de fer, qui sert à soutenir les portes ou les fenêtres.

PÉNULTIèME


PÉNULTIèME, adj. [1re é fer. 3e è moyen, derniere e muet.] Avant dernier, qui précède immédiatement le dernier. "Le pénultième jour, la pénultième syllabe; ou substantivement le pénultième, la pénultième. "Dans ce mot, la pénultième est douteûse, est longue.

PÉNURIE


PÉNURIE, s. f. [1re é fer. 3e lon. 4e e muet.] Grande disette des chôses les plus nécessaires. Extrême paûvreté. = Ce mot n' est ni aussi français, ni aussi usité que disette, paûvreté, mais il se dit dans des ocasions où il est plus énergique que ces deux mots. M. Linguet. dit de Mde Corn. qu' elle se présenta à M. d' A... "Dans tous les désordres d' une pénurie, parvenûe à son dernier excès. _ Et M. Necker. "Je n' ai pas été obligé de faire le moindre sacrifice à des pénuries momentanées. Il signifie là, besoin d' argent, de fonds, etc.

PÉPIE


PÉPIE, s. f. [1re é fer. 2e lon. 3e e muet.] Pellicule qui vient quelquefois au bout de la langue des oiseaux, et qui les empêche de boire et de faire leur cri ordinaire. "Cette poule a la pépie. Il faut lui ôter, lui arracher la pépie. = On dit, proverbialement, d' un homme qui boit volontiers, qu' il a la pépie; et d' une persone babillarde, qu' elle n' a pas la pépie.

PÉPIER


PÉPIER, v. n. Ce verbe exprime le cri naturel des moineaux.

PEPIN


PEPIN, s. m. PÉPINIèRE, s. f. [Pepein, pépi-niè-re: 1re e muet au 1er, é fer. au 2d, 3e è moy. et long au 2d, dont la 4e e muet.] Pepin, semence couverte d' une enveloppe assez dure, qui se troûve au dedans de certains fruits, comme pommes, poires, etc. qu' on apèle pour cela, fruits, arbres à pepin, pour les distinguer des fruits, des arbres à noyau. = L' Acad. remarque que c' est improprement que l' on done le nom de pepin aux grains qui sont dans le raisin.
   PÉPINIèRE est un plant de petits arbres, sur une ou sur plusieurs lignes, pour les lever et les transplanter au besoin. = Suivant La Touche, ce mot est beau au figuré. Il cite de son chef cette phrâse: "La Sorbone est une pépinière de Savans; et celle-ci, de Vaugelas, dans l' Épit. Dédic. de ses Remarques: "L' Académie est devenue comme une pépinière d' où le Barreau, la Chaire et l' Etat ne tirent pas moins d' hommes que le Parnasse. Le goût a changé, et cette expression figurée est tout au plus du style médiocre. "La France est une pépinière de soldats.; abonde en soldats. Rich. Port. "Les Séminaires sont des pépinières d' Éclésiastiques.

PÉPINIÉRISTE


PÉPINIÉRISTE, s. m. Jardinier qui élève des pépinières.

PERÇANT


PERÇANT, ANTE, adj. EN PERCE, adv. PERCEMENT, s. m. PERCER, v. act. et neut. [Pêr-san, sante, ce, ceman, cé: 1re ê ouv. 2e lon. aux deux premiers, e muet au 3e et au 4e, é fermé au dern.] Percer, act. 1°. Faire une ouvertûre de part en part. "Percer un ais, un mur. "On perce la langue aux blasphémateurs. "On l' a percé de coups. "Les ôs lui percent la peau, et non pas, percent sa peau. = Fig. "De quels traits lui avez-vous percé le coeur? = 2°. Pénétrer. "La pluie a percé la terre d' un pied: elle a percé tous ses habits. On dit, par exagération: il a été tout percé, percé jusqu' aux ôs. = 3°. Percer une croisée dans un mur, en faire l' ouvertûre. _ Percer les buissons, les forêts. Pâsser à travers. _ Percer un bataillon, un escadron, se faire un passage à travers, les armes à la main. _ Le Soleil perce un nuage, les rayons du Soleil pâssent à travers un nuage. = 4°. Fig. "La vérité a percé les ténèbres de l' idolatrie. = Percer l' avenir, le prévoir. Percer une afaire, en pénétrer le fond. "Cela me perce le coeur, m' afflige extrêmement. _ Percer la nuit à jouer, à étudier, les pâsser entièrement au jeu, à l' étude Acad. Je ne crois pas que l' usage admette cette façon de parler. Marin.
   PERCER, neut. Se faire ouvertûre. "Cet abcês a percé de lui-même. "Les dents comencent à percer à cet enfant; les cornes à ce chevreau. * C' est un provençalisme de dire qu' un enfant perce les dents: il faut dire, qu' elles lui percent. = Avoir une issûe: "Cette maison perce dans deux rûes. = Pénétrer, percer dans l' avenir, dans le fond d' une afaire. = Se découvrir, se montrer. M. Sabatier dit des ouvrages de Belleforêt: "Le talent y perce néanmoins, malgré la précipitation avec laquelle il travailloit. Trois Siècles.
   La noirceur masque en vain les poisons qu' elle verse;
   Tôt ou tard tout se sait, et la vérité perce.
       Gresset.
Rem. Quoique percer signifie quelquefois pénétrer; voy. n°. 4°. il ne régit pourtant pas toute sorte de noms. On dit, par exemple: pénétrer les motifs; mais je doute qu' on puisse dire avec un des Auteurs des Lettres Edif. "Il perça le motif de cette demande. _ On dit, fig. Se percer de ses propres traits; faire des démarches ou des raisonemens, dont l' éfet ou la conclusion retombe sur nous, et nuit à nos desseins. "La comparaison de Bayle tourne toute entière contre ce qu' il veut établir; et il se perce de ses propres traits. ANON.
   PERCÉ, ÉE, adj. "Maison bien percée, qui a de grandes fenêtres, arrangées avec symétrie. _ En st. proverb. panier percé, qui dépense tout ce qu' il a, et ne saurait garder d' argent. Bâs-percé; voy. BâS, adj. à la fin.
   PERÇANT, qui perce, qui pénètre. Il est peu usité au propre. "Poinçon perçant, alène qui n' est pas assez perçante. = On dit, au figuré, froid, vent perçant; voix perçante, claire et aigûe; des yeux perçans, vifs et brillans: avoir l' esprit perçant, beaucoup de pénétration d' esprit.
   EN PERCE, ne se dit qu' avec, mettre, être, laisser, en parlant des pièces de vin, ou aûtre boisson, où l' on fait une ouvertûre pour en tirer la liqueur.
   PERCEMENT n' a pas un sens actif, et n' exprime pas l' action de percer: il a le sens passif, et se dit d' une ouverture faite, d' un chemin percé, pratiqué au pied d' une montagne.

PERCEPTIBLE


PERCEPTIBLE, adj. PERCEPTION, s. f. PERCEVOIR, v. act. [Pêrcèptible, cèp-cion, ce-voar: 1re ê ouv. 2e è moy. aux 2 prem. e muet au dern.] Les 2 prem. sont des termes de Philosophie, qui ne sont guère employés dans le discours ordinaire. _ Perceptible, qui peut être aperçu. "La coopération du coeur qui reçoit la grâce, est souvent peu perceptible aux élus mêmes. L' Abé de Houteville. "Des phénomenes perceptibles aux sens. Le Gendre. _ L' Acad. remarque qu' il ne s' emploie guère qu' avec la négative. = Perception, le sentiment produit dans l' âme par l' impression d' un objet. "Perception distincte ou confûse, imparfaite.
   PERCEPTION se dit dans une autre acception, comme PERCEVOIR, de l' action de recevoir, de recueuillir~ certaines chôses, comme revenus, droits, dixmes, redevances, etc. "Percevoir les droits du Roi. "Les fruits qu' il a perçus: la perception des fruits, des droits.

PERCER


PERCER: voy. PERÇANT.

PERCHE


PERCHE, s. f. PERCHER, v. n. PERCHOIR, s. m. [Pêrche, ché, choar; 1re ê ouv. 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Perche est, 1°. sorte de poisson d' eau douce. = 2°. Mesure de 18, 20 ou 22 piés de Roi, selon les diférens pays. = 3°. Brin de bois, long de dix ou douze piés et de la grôsseur du brâs, ou environ. _ Fig. et par râillerie, grande perche, femme, dont la tâille est grande et tout d' une venûe.
   Percher et se percher, au propre, c' est se mettre sur une perche ou sur une branche d' arbre. Le 1er se dit de la volâille, et de la manière de se reposer et de dormir; le 2d des autres oiseaux, et signifie, se reposer à la fin de leur vol. L' Acad. dit aussi percher dans cette 2de acception. = Au fig. (st. fam.) Il se dit des persones. Se mettre sur quelque endroit élevé pour mieux voir ou mieux entendre. "Où vous êtes-vous perché?
   PERCHOIR: le lieu où l' on met percher les volâilles. On dit aussi, et plus ordinairement, juchoir.

PERCLUS


PERCLUS, ÛSE, adj. [1re ê ouv. 2e lon. Pêrklû, klû-ze.] Impotent de tout le corps, ou d' une partie. Il s' emploie, ou sans régime: il est tout perclus; cette paralysie l' a rendu perclus; ou avec la prép. de; Il est perclus de tous ses membres: elle est perclûse d' un brâs, d' une jambe, de la moitié du corps.

PERÇOIR


PERÇOIR, s. m. [Pêr-soar: 1re ê ouv.] Sorte de forèt pour percer les toneaux.

PERCUSSION


PERCUSSION, s. f. [Pêrcu-cion; 1re ê ouv.] Action par laquelle un corps en frape un aûtre. "Violente, soudaine percussion. = Ce mot ne se dit que par les Savans. Il n' est point du langage ordinaire.

PERDANT


PERDANT, ANTE, adj. et subst. PERDITION, s. f. PERDRE, v. act. [Pêrdan, dante, di-cion: en vers, ci-on: pêrdre; 1re ê ouv. 2e lon. aux 2 prem. e muet au dern.] Perdant, qui perd. "Il se troûve perdant: elle est perdante dans cette afaire. = Il est douteux dans cet emploi. Il se dit ordinairement comme substantif pluriel, en parlant des joueurs: "J' étois du nombre des perdans: il pariait pour les perdans.
   PERDITION, est 1°. mauvais emploi de son bien. "Tout son bien s' en va en perdition. Il ne se dit en ce sens, que dans cette phrâse du discours familier. = 2°. État d' une persone qui est hors de la voie du salut. "Voie, chemin de perdition: maison de perdition; oeuvre de perdition.
   PERDRE: je perds, nous perdons: je perdois ou perdais; je perdis, j' ai perdu, je perdrai, je perdrois ou perdrais; perds, que je perde, je perdisse, perdant, perdu. = Dans le dern. siècle plusieurs écrivaient, il pert, entre aûtres, Corneille, Bossuet, le P. Rapin; mais le d est la caractéristique de ce verbe; et puisqu' on a toujours écrit et prononcé, nous perdons, je perdois, perdu, etc. et non pas pertons, pertois, pertu, il a toujours été naturel et raisonable d' écrire, il perd, et non pas, il pert.
   PERDRE, c' est 1°. être privé de quelque chôse qu' on possédait. "Perdre son bien. "Il perdit la Courone avec la vie: Il a perdu tous ses enfans. = 2°. Être privé de quelque avantage naturel ou moral. "Perdre la santé, la vie; les yeux, à force de lire, de pleurer. Perdre la raison, l' esprit, la mémoire. Perdre la grâce de Dieu; l' amitié, l' estime de quelqu' un. = 3°. Cesser d' avoir. "Les arbres ont perdu leurs feuilles. "Cette étofe a perdu son lustre. "J' ai perdu l' envie, l' espérance de, etc. Perdre l' usage, l' habitude. Perdre la bone opinion, l' amitié qu' on avait pour quelqu' un. = 4°. Manquer à profiter de.. Perdre le tems, ou son tems. Perdre l' ocasion, sa peine, ses soins, ses pâs. = 5°. Avoir du désavantage contre quelqu' un. Perdre une gageure, la partie, la bataille, son procês. = 6°. Ruiner, décréditer. "Cet homme vous perdra: c' est lui-même qui se perd. = 7°. Corrompre, débaucher. "Que de persones V... n' a~ t~-il pas perdûes par ses ouvrages licencieux? "Les mauvais livres, les mauvaises compagnies l' ont perdûe. = 8°. Gâter, endomager. "La nielle a perdu les blés, etc. Causer du domage. Il régit quelquefois l' ablatif. Perdre quelqu' un de réputation et d' honeur; mais cela ne s' étend pas à tout, et: vous m' avez perdu de bonheur et de repôs, est três-mal dit. = 9°. Se perdre, a diférens sens. = Faire naufrage, en parlant des vaisseaux et de ceux qui sont dedans. = S' évaporer, en parlant des liqueurs. = S' égarer, se fourvoyer. = Disparaître, en parlant d' une rivière. = Cesser d' être frayé, en parlant d' un chemin, etc.
   Rem. 1°. Fléchier voulait qu' on dît, perdé-je, et Vaugelas, perds-je; l' usage a décidé pour le dern. et cette décision est raisonable et suivant l' analogie. On ne peut même imaginer sur quoi Fléchier apuyait son opinion. = 2°. Perdre, au figuré, dans le sens de gâter, corrompre, régit quelquefois le datif, outre l' acusatif. "La conversation des nourrices et souvent des mères, achève de leur perdre, (aux enfans) entièrement l' esprit. Mallebr. "Elle acheva de lui perdre les moeurs. L' Abé de Fontenai. Mais, au propre, il ne se dit point en ce sens, des persones, comme sujet de la phrâse. * Il a perdu (fripé, gâté) tous ses habits, est un gasconisme. = 3°. Perdre, neut. régit quelquefois la prép. à devant les verbes: il perd à n' être pas conu; et la prép. de devant les noms: "Ceux-ci perdirent de plus en plus de leur crédit auprês de S. A. R. Anon. "L' Empire avoit perdu de sa puissance. = 4°. Se perdre, s' égarer, s' évanouïr, se dit au propre et au figuré. "Il s' est perdu dans les bois; des montagnes qui se perdent dans les nûes: il se perd dans ses vagues discours, ou en vagues discours. L' esprit s' y perd, en parlant des Mystères. Ils sont au-dessus de la portée de l' esprit humain.
   Loin de rien décider sur cet Etre suprême,
   Gardons en l' adorant un silence profond.
   Notre raison s' y perd, notre esprit s' y confond.
   Pour dire ce qu' il est, il faut être lui-même.
       La Visclède, de l' Acad. de Marseille.
Je m' y perds: cela me surprend, et je n' en puis trouver la caûse, ou bien, à travers tant de récits diférens, je ne puis démêler la vérité. = 5°. Perdre de vûe, employé au passif, a un air sauvage, et l' usage parait lui être contraire. On ne dit pas, ce me semble, je suis perdu de vûe, mais on dit, en se servant de l' actif: On m' a perdu de vûe. "L' insolence de Gaveston une fois perdûe de vûe, échaufa moins l' indignation générale. Hist. d' Angl. Le Traducteur devait dire, que cette insolence, dès qu' une fois on l' eut perdûe de vûe, échaufa moins, etc.
   PERDU, ÛE, partic. et adj. entre dans plusieurs expressions, et se dit des choses et des persones. _ Puits perdu, dont le fond est de sâble, et où les eaux se perdent. = Pays perdu, désert, inhabité ou fort éloigné. = Tirer à coups perdus, ou à coup perdu, au hazard. = Mettre de l' argent à fonds perdu, à rentes viagères. = Se jeter à corps perdu sur quelqu' un, avec impétuosité. = À~ vos heures perdûes, adv. Quand vous serez de loisir. = Perdu, apliqué aux persones, signifie ordinairement corrompu, débauché; mais en ce sens, il se dit toujours avec le régime de quelque nom: perdu d' honeur, de débauches, de dettes. * Marivaux dit, perdu de vanité: les Gascons disent, je suis perdu de froid. _ Bossuet dit, perdu tout seul, parlant de débauche: "l' Empire fut délivré du plus violent et du plus perdu de tous les hommes. Mais perdu, employé absolument et sans régime, n' a ce sens qu' en parlant des femmes: c' est une femme perdûe, ou substantivement, c' est une perdûe. Il signifie aûtre chose, quand on l' aplique aux hommes. C' est un homme perdu; c. à. d. un homme sans espoir, sans ressource. On dit, d' un homme qui a fait une faûte grave, qui a mérité la disgrace du Prince, ou qui s' est ruiné: c' est un homme perdu: il est perdu: il ne s' en retirera pas. MARIN. = Enfans perdus, se dit à la guerre, de ceux qu' on détache à la tête des troupes, pour essuyer le premier feu. On le dit au figuré, mais seulement dans le style simple, ou plaisant ou critique. "Je n' ai pas voulu entrer en lice avec des enfans perdus, qu' il (M. Newton) avoit détachés contre moi. Leibnitz. "En conséquence, vous avez risqué à la fin de la vie (de Clément XIV) ces enfans perdus (les 4 lettr.) Tart. Épist. _ * Un Prédicateur disait à Dieu: * Seigneur, nous sommes des enfans perdus, n' achevez pas de nous perdre. _ Cette expression est ridicule en cet endroit, à cause de l' allusion à la manière de parler triviale et consacrée à un aûtre sens, dont nous venons de parler.

PERDREAU


PERDREAU, s. m. PERDRIX, s. f. [Pêr--dro, dri, et devant une voyèle, driz: 1re ê ouv. 2e dout. au sing. du 1er, lon. au plur. perdreaux.] Perdrix est une sorte d' oiseau et de gibier de plumage gris et de la grôsseur à-peu-prês d' un grôs pigeon. = Perdreau est une perdrix de l' année, qui n' a pas encore sa juste grôsseur.

PERDU


PERDU, voy. PERDRE à la fin.

PERDURABLE


*PERDURABLE, adj. (Vieux mot) éternel. Perdurable bénédiction. S. Fr. de Sales.

PèRE


PèRE, s. m. [1re è moy. et long, 2e e muet.] Au propre, celui qui a un ou plusieurs enfans. "Être père de plusieurs enfans. "Il faut honorer son père et sa mère. = Père de famille, qui a femme et enfans, ou seulement des enfans. = Nos pères, nos aïeux, nos ancêtres. = Au figuré, homme bienfaisant à qui nous avons de grandes obligations. "Vous êtes mon bienfaiteur et mon père: je vous regarde comme mon père. "Cicéron fut apelé le Père de la Patrie; Louis XII, le Père du Peuple. On apèle père des paûvres, un homme qui fait habituellement de grandes charités; Père des Soldats, un Général, qui a un très-grand soin de leur subsistance, et ne les expôse pas sans nécessité. = Démosthène et Cicéron sont apelés les Pères de l' Éloquence, Hérodote par les uns, le Père de l' Histoire; par les aûtres, le père du mensonge. François I, pour la protection qu' il donait aux gens de lettres, a été nomé, le Père des Lettres. Poétiquement, le Père du jour, le Soleil. En style de l' Écritûre, le père du mensonge, le Démon. = Pères de l' Église, ou absolument les Pères, les Saints Docteurs, dont l' Église a reçu et aprouvé la Doctrine. St. Bernard est le dernier des Pères de l' Eglise. On n' apèle que Saints Docteurs ceux qui sont venus après lui, comme St. Thomas, St. Bonaventure, etc. = Pères du Concile, les Évêques, qui assistent à un Concile. = Pères du désert, les anciens Anachorètes. = En parlant du Pape, on l' apèle le Saint Père, ou, notre Saint Père le Pape. L' Acad. ajoute, notre Saint Père, notre très-Saint Père; mais ces derniers sont peu usités aujourd' hui. = Pères conscripts, est une façon de s' exprimer d' après les Latins, pour désigner les Senateurs de Rome. Il est aujourd' hui peu usité.
   PèRE, est aussi un titre qu' on done aux Religieux Prêtres et aûtres. Le Père Gardien, le Père Prieur; les Pères Capucins, les Pères de l' Oratoire, etc. Père Spirituel, Confesseur ou Directeur.
   On dit, populairement, d' un homme, qui aime extrêmement à prendre ses comodités, que c' est un père douillet; et d' un bourgeois fort riche, que c' est le père aux écus. Renvoyer quelqu' un chez son grand' père, le relancer.
   Rem. Les enfans disaient autrefois, mon cher père, en parlant à leur père, ou en parlant de lui. Fénélon le fait dire à Télémaque dans son admirable poème. Mais cette expression est devenûe, dans ce siècle, une façon de parler bourgeoise, triviale, et, peu s' en faut, ridicule. = On dit ordinairement de père en fils. BOSSUET dit d' après St. Athanase que: "La foi de la Divinité de J. C. a passé de père en père (de l' Église) jusqu' à nous. = Père au figuré, signifie Auteur. "Cette absurdité, dit. M. Linguet, justifie ce que dit Cicéron, qu' il n' y a pas d' extravagance, qui n' ait eu un Philosophe ou pour père, ou pour apologiste. = L' Acad. trouve de la diférence entre ces deux phrâses: c' est un père heureux en enfans, dont les enfans sont bien nés, et heureux dans ses enfans, dont les enfans sont bien pourvus.

PÉRÉGRINATION


*PÉRÉGRINATION, s. f. [1re et 2e é fer. tion a le son de cion.] Vieux mot. Voyage fait dans des pays éloignés. "Il est revenu de ses longues pérégrinations. = Le Père Bouhours condamne ce mot dans ses Doutes; M. Andry l' aprouve dans ses Réflexions. Il ne se trouve pas dans la 1re édition du Dict. de l' Acad. Dans les suivantes, elle dit qu' il n' est guère en usage que pour plaisanter. Dans la dernière, elle se borne à dire, qu' il est vieux.

PÉRÉGRINITÉ


*PÉRÉGRINITÉ, s. f. Qualité d' étranger. "Il demeure étranger à la France... sans que la tache de pérégrinité soit effacé. Causes Célèbres. = Ce mot ne se dit qu' au Palais.

PÉREMPTION


PÉREMPTION, s. f. PÉREMPTOIRE, adj. [Péranp-cion, péranptoâre: 1re é fer. 2e lon. 3e lon. au 2d.] Le 1er ne se dit qu' au Palais. "Il y a péremption d' instance, c. à. d. l' instance est périmée, est périe, n' a plus lieu, faûte d' avoir été suivie pendant un certain tems limité. = Le 2d se dit au Palais dans cette phrâse, exception péremptoire, qui se dit des défenses, qui ne consistent que dans l' allégation de la péremption. = Dans le discours ordinaire, il signifie décisif, contre quoi il n' y a rien à répliquer. "Raison, réponse péremptoire: cela est péremptoire.

PÉREMPTOIREMENT


PÉREMPTOIREMENT, adv. [Péranp--toâ-reman: 1re é fer. 2e et 3e lon. 4e e muet.] D' une manière péremptoire. Voy. l' article précédent.

PERFECTEUR


*PERFECTEUR, s. m. [Pêrfèk-teur: 1re ê ouv. 2e è moy.] Mot nouveau. Qui perfectione. "Le tems, qui est le destructeur de toute législation humaine en est aussi le perfecteur. Il décoûvre les défauts et amène des ressources. Cerutti. _ Ce mot a besoin du sceau de l' usage.

PERFECTIBILITÉ


*PERFECTIBILITÉ, s. f. PERFECTIBLE, adj. [1re ê ouv. 2 è moy.] Aûtres mots nouveaux: mais ceux-ci sont utiles: on peut en bien augurer. = Perfectible, qui peut être perfectioné. Perfectibilité, qualité de ce qui est perfectible. "Dans un art (la Médecine) qui n' est perfectible que par l' observation, rien n' est à négliger, rien n' est indiférent. Voullonne. "On revient insensiblement à l' anciène méthode (d' Éducation) qui s' améliore de jour en jour... sur-tout dans les Écoles de l' Université de Paris, dont la constitution me paroit susceptible de la plus grande perfectibilité~. l' Ab. Grosier.

PERFECTION


PERFECTION, s. f. PERFECTIONEMENT, s. m. PERFECTIONER, v. act. [Pêr--fèk-cion, cio-neman, cio-né: 1re ê ouv. 2e è moy. 4e e muet au 2d, é fer. au dern.] Perfection, est 1°. Qualité de ce qui est parfait en son genre. "Travailler à la perfection de la Langue, d' un systême, d' une méthode; ou absolument et sans régime; tendre, aspirer à la perfection. "Il est dificile d' ateindre, d' arriver à la perfection. = En ce sens, il ne se dit qu' au singulier. = 2°. Au pluriel, qualités excellentes, soit de l' âme, soit du corps. "Être doné de toute sorte de perfections, de grandes perfections. _ En théologie, les perfections divines, les qualités qui sont en Dieu.
   Rem. On dit, adverbialement, en perfection, ou dans la perfection, parfaitement. L' Acad. ne met que le 1er: "On ne peut rien savoir en perfection dans les Belles-Lettres que par le commerce des Anciens. P. Rapin. "Je ne vous écris aujourd' hui qu' afin que vous n' ajoutiez point à vos autres inquiétudes celle de ma santé, qui est dans la perfection. SÉV.
   3°. PERFECTION, achèvement. "Porter un bâtiment à sa perfection, l' achever.
   PERFECTIONER, rendre plus parfait. Perfectionement, action de perfectioner, ou état de ce qui est perfectioné. "Perfectioner un ouvrage. "Les bons livres perfectionent l' esprit, les mauvais le gâtent. "La Langue se perfectione tous les jours. "Les arts se sont bien perfectionés. _ "Les recherches grammaticales contribuent beaucoup au perfectionement de la Langue. Acad.

PERFIDE


PERFIDE, adj. PERFIDEMENT, adv. PERFIDIE, s. f. [1re ê ouv. 3e e muet aux 2 premiers: dans le 2d, en a le son d' an.] Perfide~, traître, qui manque à sa foi, à sa parole. Perfidie, manquement de foi. Perfidement, avec perfidie. "Ami, nation perfide. "Insigne perfidie. Faire une perfidie. "Il le livra perfidement entre les mains de ses énemis.
   Rem. Perfide, se dit des chôses qui ont raport aux persones. "Tour, action, serment perfide. = Il suit ou précède le substantif, au gré du Poète ou de l' Orateur. Sermens perfides; perfides sermens. "Ses présens (de la volupté) ne sont que de trompeuses amorces, feux brillans, dont la perfide lueur nous égare. L' Ab. Henn.
   Crains-tu d' être séduit
   Par le perfide éclat d' une brillante nuit?
       De Lille.
"Un coeur endormi dans les brâs perfides de la volupté. Du Plaisir. _ Les perfides brâs sonerait mal. = Apliqué aux persones, il s' emploie substantivement. "C' est un perfide: "Le perfide s' était imaginé que, etc. "Punir les perfides.

PERFORATION


PERFORATION, s. f. [Pêrfora-cion: 1re ê ouv.] Action de percer quelque chôse. = Ce mot ne se dit guère que parmi les savans.

PÉRICLITER


PÉRICLITER, v. n. [1re et dern. é fer.] Être en péril. "Cette afaire périclite. = L' Acad. remarque qu' il se dit plus comunément des chôses que des persones. Je crois qu' on peut dire qu' il ne se dit que des chôses. = La Touche disait au comencement du siècle que ce mot n' était pas aprouvé par quelques persones. "Je crois, ajoute-t' il, qu' il y a bien peu de femmes, qui s' en servent. Aujourd' hui il est aprouvé de tout le monde et les femmes l' emploient comme les savans.

PÉRIL


PÉRIL, s. m. PÉRILLEUX, EûSE, adj. PÉRILLEûSEMENT, adv. [1re é fer. 3e lon. 4e e muet: mouillez l' l finale du 1er et les ll des aûtres: péri-glieû, glieû-ze, glieû-ze--man.] Péril, danger, risque; état, où il y a quelque chôse de fâcheux à craindre. Périlleux, où il y a du péril. Périlleûsement, avec péril. "Afronter, braver, ou, craindre, éviter, fuir le péril. " Être en péril, hors de péril, ou, du péril. = "Poste, périlleux, ocasion, afaire, entreprise périlleûse. = L' Acad. dit aussi, maladie périlleûse. Je crois qu' on ne dit que dangereûse, tout comme on dit, en danger, et non pas en péril de mort, quand il s' agit de maladies. Saut périlleux, saut dificile et dangereux, que font les danseurs de corde. = Marcher périlleusement entre des précipices. = Péril. Voy. DANGER.
   Rem. Péril, régit de et l' infinitif. "Il faut se résoudre au péril de les chercher (les Plantes, les simples) et de les ramasser. FONTEN. Él. de M. de Tournefort. "Tout sera en péril d' être altéré au gré des Rois, si on les fait entrer dans les questions, qui regardent les chôses sacrées. Télém. _ Quand il ne s' agit pas de la vie, on dit plutôt en danger. = Être, ou se mettre en péril, est une expression souvent employée par Bossuet. "Moïse se mit en péril pour les soulager. = Montesquieu a dit aussi: "De tous les Rois, que les Romains attaquèrent, Mithridate seul se défendit avec courage et les mit en péril. = L' Acad. dit bien être en péril; ce malade est en péril de mort, mais elle ne dit point, se mettre en péril; et, à mon avis, quand il est question de maladie, on dit plutôt être en danger, qu' en péril de mort. Voy. plus haut, périlleux.
   Au péril de, adv. "Au péril de ma vie. "Aux risques, périls et fortunes de... terme de Pratique. Prendre une afaire à ses risques, périls et fortunes, se charger du bon ou du mauvais succês. _ Le Rich. Port. met fortune au singulier; et je crois qu' en éfet le singulier vaut mieux. L' Acad. met fortunes au pluriel. "Une Loi d' Égypte défendoit de purger avant le quatrième jour de la maladie, à moins qu' ils ne voulussent le faire à leurs périls et fortunes. Le Gendre. _ Cet Auteur retranche risques contre l' usage.

PÉRIMER


PÉRIMER, v. n. Terme de Pratique. Périr. "Laisser périmer l' instance. "L' instance est périmée, et non pas a périmé. Ce verbe prend, dans ses tems composés, l' auxiliaire être.

PÉRIODE


PÉRIODE, s. f. et m. [Péri-ode: 1re é fer. dern. e muet.] Ce substantif est fém. 1°. Quand il signifie révolution, cours que fait un astre pour parvenir au même point: "La période solaire, lunaire. "La période du Soleil, de la Lune, de Saturne, etc. La période julienne: espace de tems, qui renferme 7980 ans. Joseph Scaliger en est l' inventeur. = 2°. Phrâse composée de plusieurs membres. On l' apelle période carrée, quand elle est composée de quatre membres, et par extension, quand elle est nombreûse et conçue en termes bien arrangés. = 3°. Révolution d' une fièvre, qui revient en certains tems réglés. "Les fièvres intermittentes ont leurs périodes réglées.
   PÉRIODE est masc. quand il signifie le plus haut point où une chose puisse arriver. "Monté au dernier période de sa gloire. _ Dans le dernier période de sa vie; à la fin de sa vie.
   Rem. * Le Traducteur de l' Hist. d' Angl. d' Hume emploie période dans le sens d' époque, évènement, et le fait masculin. "Ce Période (de l' introduction des Représentans des Bourgs au Parlement) qui se trouve à la 23e année de son règne (d' Édouard I,) paroit être l' époque réelle et véritable de la Chambre des Communes. _ Ailleurs il l' emploie pour espace. "Pendant ce période de tems. _ Ce sont évidemment deux anglicismes.

PÉRIODIQUE


PÉRIODIQUE, adj. PÉRIODIQUEMENT, adv. [Péri-odike, dikeman: 1re é fer. 5e e muet.] Périodique, qui a ses périodes. "Moûvement, révolution périodique. "Fièvre périodique: "Le retour des accês, qui dans le plus grand nombre des fièvres intermittentes est périodique a sans doute, insensiblement amené la confusion entre la fièvre périodique et la fièvre intermittente. Voulonne. _ Style, discours périodique, composé de périodes nombreûses. = Ouvrage périodique, qui parait dans des tems fixes et réglés, comme le Mercure, l' Année Littéraire, le Journal de Paris, le Journal Général de France, etc.
   PÉRIODIQUEMENT, d' une manière périodique: "Les astres se meûvent périodiquement. = L' Acad. dit aussi parler périodiquement, par périodes nombreuses; mais elle avertit que cela ne se dit qu' en raillerie et en mauvaise part.

PÉRIODISTE


*PÉRIODISTE, s. m. Faiseur de feuilles périodiques. M. Linguet et M. l' Ab. Grosier se sont servi de ce mot.

PÉRIOSTE


PÉRIOSTE, s. m. Terme d' Anatomie. Membrane fine et três-sensible, qui couvre presque tous les ôs.

PÉRIPATÉTICIEN


PÉRIPATÉTICIEN, CIèNE, adj. PÉRIPATÉTISME, s. m. Ils se disent de la Philosophie d' Aristote et de ceux qui la suivent. "Péripatétisme, ou, philosophie péripatéticiène. = S. m. "Un péripatéticien: les péripatéticiens.

PÉRIPÉTIE


PÉRIPÉTIE, s. f. [Péripécî-e: 1re et 3e é fer. 4e lon. 5e e muet.] Terme de Poétique. "Changement subit et imprévu d' une fortune bonne ou mauvaise en une toute contraire. "La péripétie est bien amenée dans cette Tragédie, dans ce Poème, dans ce Roman.

PÉRIPHRâSE


PÉRIPHRâSE, s. f. PÉRIPHRASER, v. n. [Périfrâze, frazé: 1re é fer. 3e lon. au 1er, br. au 2d, mais devant l' e muet elle est longue: il périphrâse, périphrâsera.] Périphrâse, est une circonlocution, un circuit de paroles, qu' on emploie, quand on ne veut, ou l' on ne peut pas se servir des termes propres, parce qu' il ne convient pas de s' en servir, ou qu' il n' y en a point de tels. "Il ne faut pas user de périphrâses sans nécessité. = Périphraser, parler par périphrâses. "Il périphrâse toujours: il ne parle que par périphrâses. = Le verbe se prend en mauvaise part. C' est un vice du discours. L' Acad. le met sans remarque, mais les exemples qu' elle aporte le font assez entendre.

PÉRIPNEUMONIE


PÉRIPNEUMONIE, s. f. Inflamation du poumon avec fièvre aigûe, opression et souvent crachement de sang.

PÉRIR


PÉRIR, v. n. PÉRISSABLE, adj. [1re é fer. pénult. dout. au 2d.] Je péris, nous périssons, je périssois, ou, périssais; je péris, j' ai péri, ou je suis péri; je périrai, je périrois, ou périrais; péris; que je périsse (pour le présent et pour l' imparfait du subjonctif) périssant. _ Dans le Dict. Gr. on condamne, que vous fussiez péri, et l' on décide que périr prend toujours l' auxiliaire avoir: mais il y a un grand nombre d' exemples pour l' auxiliaire être. "Il étoit péri dans ce naufrage. Télém. "Sirius n' étoit péri que par leur ordre. Vertot. "Quand il ne seroit péri que, etc. Linguet. "Les écrits impies des Leucippes et des Diagoras sont péris avec eux. J. J. Rouss. "Nous ne doutâmes plus ou qu' ils ne fussent péris sur mer, ou qu' ils n' eussent été dévorés par des Crocodiles. Let. Édif. = Suivant l' Acad. (d' aûtre fois) ont péri est plus régulier; mais sont péris n' est pas sans usage. Dans la dern. édit. elle dit indiféremment a péri, ont péri et est péri, sont péris sans remarque.
   PÉRIR, est 1°. En parlant des chôses. Prendre fin. "Tout périra, tout doit périr un jour. = 2°. Tomber en ruine. "Cette maison va périr, périra bientôt si on ne la répâre. = 3°. En parlant des persones, faire une fin malheureûse. "Les combats firent périr une partie de l' armée, le reste périt de froid, de faim et de misère. "Il aimerait mieux périr que de manquer à sa parole. = 4°. Faire naufrage, il se dit des vaisseaux et de l' équipage. "Il a péri un grand nombre de vaisseaux. "Ils périrent presque tous: il ne se sauva que deux matelots. = 5°. En termes de Pratique, on dit, laisser périr une instance, négliger de la poursuivre pendant un certain tems. = Il est même plus usité que laisser périmer. ACAD.
   Rem. Périr, est un de ces verbes, où la 3e persone de l' impératif s' emploie sans la conjonction que: BOSSUET fait dire aux Hérétiques: "Et puisqu' il nous faut périr, périssent avec nous les plus Saints de tous les Pères! Alors le verbe précède le nominatif. Cela est plus vif et plus animé que si l' on disait: "Que les plus Saints de tous les Pères périssent avec nous. = * Périr, actif, est un gasconisme. "Le Soleil et la poussière périssent tous les meubles: Dites, gâtent, ûsent, etc. "J' ai péri mes habits, mes bâs. "Ce misérable petit chien croté m' a péri ma~ robe. Mes meubles se périssent pour, se gâtent. DESGR. Gasc. Corr.
   PÉRISSABLE, qui est sujet à périr. "Biens du monde, biens périssables.
   Le bien de la fortune est un bien pérïssable;
   Quand on bâtit sur elle, on bâtit sur le sâble.
       Racan.

PÉRISTILE


PÉRISTILE, s. m. Terme d' Architectûre. Galerie couverte, soutenûe par des colonnes.

PERLE


PERLE, s. f. PERLÉ, ÉE, adj. [1re ê ouv. 2e e muet au 1er, é fer. aux deux aûtres.] Perle, est une substance dûre, blanche et ordinairement ronde, qui se forme dans le coquillage apelé nacre de perle et dans d' autres coquillages. "Collier, bracelet, garnitûre de perles. = On apèle perles fines les véritables perles; et perles faûsses des perles contrefaites. _ Gris de perle, gris aprochant de la couleur des perles. = On dit en style familier, c' est la perle des hommes, le meilleur homme du monde, le plus estimable, ou le plus aimable.
   Sa gravité, ses gestes, son visage,
   Tout marque en lui la perle des Catons.
       Rouss.
En style proverbial, enfiler des perles, c' est ne rien faire; baguenauder: "Je ne suis pas venu pour enfiler des perles. = Jeter des perles devant les pourceaux, montrer de belles chôses à des gens sans conaissance et sans goût. Cette expression est tirée de l' Évangile.
   PERLÉ, ÉE, se dit en divers sens. _ En termes de Blason, courone perlée, croix perlée, ornée de perles. = Julep perlé dans la composition duquel il entre de la semence de perles. = Bouillon perlé, bien fait, et au dessus duquel paraissent des ronds, qui ressemblent à des perles. = En musique, jeu perlé, cadence perlée, jeu brillant, cadence brillante.

PERMANENCE


PERMANENCE, s. f. PERMANENT, ENTE, adj. [Pêrmanance, nan, nante: 1re ê ouv. 3e lon.] Permanent, stable, immuable, qui dure toujours. "Tout change dans le monde, il n' y a que DIEU de permanent. "Il n' y a point ici bâs de félicité permanente. = Permanence, ne se dit que du Corps de Notre Seigneur, qui continûe de demeurer réellement dans l' Eucharistie aprês la consécration. "Les Luthériens ont tort de n' admettre la permanence du Corps de J. C. dans l' Eucharistie que dans l' actuelle manducation.

PERMÉABLE


PERMÉABLE, adj. Terme de Physique. Qui peut être traversé par, etc. "Matière condensée et non perméable. Le Gendre. "Il n' existe aucun corps perméable à la matière magnétique, qui n' offre aussi un libre passage aux émanations électriques. Él. Hist. du P. Béraud Jésuite, par le P. Le Febvre de l' Oratoire.

PERMESSE


PERMESSE, s. m. [Pêrmèce: 1re ê ouv. 2e è moy. 3e e muet.] Petite rivière, qui a sa source dans le Mont-Hélicon, et qui était consacrée à Apollon et aux Mûses. Le permesse est fort célèbre parmi les Poètes.
   Fuyez ces lieux charmans, qu' arrôse le Permesse.
       Boileau.
* Un Auteur Gascon en fait une montagne: il l' a cru synonyme de Parnasse.
   Et souvent au haut du Permesse.
M. Desgrouais en a fait la remarque.

PERMETTRE


PERMETTRE, v. act. PERMISSION, s. f. [Pêrmètre, micion: 1re ê ouv. 2e è moy. au 1er, 3e e muet.] Quelques-uns écrivent et prononcent nous permetons, je permetois, je permetrai, permetant, etc. avec un seul t faisant l' e muet: il faut écrire nous permettons, etc. avec 2 t: l' é est fermé: perméton: devant l' e muet cet e devient moyen: ils permettent, pron. permète, etc. _ Il se conjugue comme mettre.
   PERMETTRE, c' est 1°. Doner pouvoir de faire, de dire. Il régit l' acusatif et le datif. "Les Lois ne permettent pas le port des armes à toute sorte de persones. = Neutre, il régit de devant l' infinitif, ou que devant le subjonctif; le 1er, lorsqu' il y a un nom régi au datif; le 2d, lorsqu' il n' y a pas de régime des noms. "Il m' a permis de le voir: il permit à son fils d' épouser qui il voudrait. "Permettez que je vous dise. "Il ne voulut pas permettre qu' on entrât. = 2°. Quelquefois il ne signifie que tolérer. "Dieu permet le mal, pour en tirer un bien: il permet que les méchans prospèrent. "Il faut bien permettre ce qu' on ne peut empêcher. Voy. TOLERER. = 3°. Avec les chôses pour sujet, doner le moyen, la comodité, le loisir de faire etc. "Ma santé ne me le permet pas. "Le tems ne me l' a pas permis. "J' irai vous trouver, si mes afaires me le permettent.
   Rem. Se permettre et il lui est permis, l' un réciproque et l' aûtre impersonel, régissent, comme l' actif, de et l' infinitif. "Qui se permet de tout dire, done le droit de tout répondre. La Baumelle. "Il ne lui est plus permis d' espérer. = Dans le style familier, on dit: à lui permis, à vous permis, au lieu de dire, il lui est, il vous est permis. "Pourvu que le coupable ait de l' argent, on lui fait bon quartier. Du reste, à lui permis de se dédomager par de nouvelles vexations, dont il acable le paûvre peuple. Il se met quelquefois à la tête de la phrâse: "À~ eux permis, ou permis à eux de s' écarter du sentiment, qui leur paroit le moins juste; mais non pas de le noter d' une manière injurieûse. D' Avr. = Permettez! expression polie: on sous-entend que je vous dise, que je m' excûse. "Mais, permettez, Madame! Je n' ai point dit cela. Mde. de G... = On dit d' un homme qui se done la liberté de faire beaucoup de chôses, qu' il ne devrait pas faire, qu' il se permet beaucoup de chôses.
   PERMISSION: pouvoir, liberté de faire, de dire, etc. "Avoir, obtenir une permission pour, ou la permission de, etc. "Je vous demande la permission d' aller vous voir. "Cela ne se peut sans permission. "Le Roi lui en a acordé la permission. = Avec votre permission, avec la permission de; formule de politesse. = On dit, proverbialement, abuser de la permission, quand quelqu' un est outré en quelque chôse, soit qu' il y ait de sa faûte ou non. "Quatre éditions M. C... comme vous y allez! vous abusez de la permission. Tart. Épist. "Guilleragues disoit que Pellisson abusoit de la permission qu' ont les hommes d' être laids. Sév. "Aménophis, (Tragédie de M. Saurin) Roman des plus bizârres, et si bizârre même, que le Parterre trouva qu' il abusoit de la permission. Ann. Litt.

PERMUTANT


PERMUTANT, s. m. PERMUTATION, s. f. PERMUTER, v. act. [Pêrmutan, ta--cion, té: 1re ê ouvert, 3e long. au 1er, é fermé au dern.] Permuter c' est échanger; mais ce dernier verbe se dit de beaucoup de chôses, et permuter ne se dit que des bénéfices, ainsi que permutation, échange, et permutant, qui échange, qui permute. "Permuter une Cûre contre un Bénéfice simple. "Permutation de Bénéfice: "Les permutans ont pâssé un acte, etc. * Sur les bords de la Garone, on dit permute pour permutation. = Permuter. Voyez TROQUER.

PERNICIEUX


PERNICIEUX, EûSE, adj. PERNICIEûSEMENT, adv. [Pêrni-cieû, cieû-ze, cieû--zeman: en vers, ci-eû, etc. 1re ê ouv. 3e lon. 4e e muet.] Pernicieux, qui peut nuire. Pernicieûsement, d' une manière pernicieûse. "Remède, ragoût pernicieux; cela est pernicieux à la santé, ou pour la santé. = Il se dit sur-tout dans le moral. "Conseil, dessein, exemple pernicieux. "Maxime pernicieûse. _ Il se dit même quelquefois des persones. C' est un homme pernicieux. On dit plus ordinairement, sa compagnie est pernicieûse. = "Cela est pernicieûsement imaginé.
   Rem. Cet adjectif peut précéder ou suivre: mais c' est à l' oreille et au goût à lui assigner sa place.
   J' ignorois la trame invisible
   De leurs pernicieux forfaits.
       Rouss.
"Ô malheureux Amour! je ne veux plus écouter tes pernicieux conseils. Télém. * "Le pernicieux goût de la Natûre. Rollin. Ce pernicieux goût sonne fort mal. C' est que, come nous l' avons dit au mot adjectif, les adjectifs de plusieurs syllabes ne précèdent pas bien les substantifs monosyllabes.

PÉRONELLE


PÉRONELLE, s. f. Terme de mépris et d' injûre, dont on se sert à l' égard d' une femme de bâsse condition. "Taisez-vous péronelle! C' est une plaisante péronelle.

PÉRORAISON


PÉRORAISON, s. f. *PÉRORER, v. n. [Pérorèzon, ré: 1re é fer. 3e è moy. au 1er, é fer. au 2d: l' o est long devant l' e muet; il pérôre, il pérôrera, etc.] Péroraison est la conclusion d' un discours d' éloquence. "La péroraison doit être pleine de moûvemens. "Les péroraisons de Cicéron sont admirables. = * Pérorer, discourir avec faste et apareil, est du style plaisant et critique.
   Vous pérorez toujours, et toujours bien,
   Sans qu' on vous prie et sans qu' on vous réponde.
       Rouss.
L' Acad. n' a pas mis ce verbe.

PERPENDICULAIRE


PERPENDICULAIRE, adj. PERPENDICULAIREMENT, adv. PERPENDICULARITÉ, s. f. PERPENDICULE, s. m. [Pêrpandikulère, lèreman, larité, le: 1re ê ouv. 5e è moyen aux deux premiers, e muet au dern.] Perpendiculaire, qui pend; qui tombe à plomb. Perpendiculairement, en ligne perpendiculaire. _ Perpendicularité, état de ce qui est perpendiculaire. Perpendicule, ce qui tombe à plomb. "Le perpendicule d' une montagne, d' un niveau, d' un instrument de Mathématique. = Les deux derniers ne sont en usage que parmi les Savans: les deux premiers sont quelquefois employés dans le discours ordinaire. "Ozanam disait qu' un Mathématicien doit aller au ciel par la ligne perpendiculaire: il en est peu qui suivent cette maxime. "Une pierre lui tomba perpendiculairement sur la tête.

PERPÉTRER


*PERPÉTRER, v. act. Comettre: perpétrer un crime. = C' est un vieux mot, un latinisme, encôre usité en style de Pratique. M. Garnier l' a employé dans sa Continuation de l' Hist. de Fr. = L' Acad. avait mis aûtrefois la phrâse~ suivante dans son Dictionaire. "Ce scélérat a été tué pour avoir commis et perpétré plusieurs assassinats. Elle l' a retranchée dans les éditions suivantes; et a mis simplement perpétrer un crime. Style de Pratique.

PERPÉTUEL


PERPÉTUEL, ELLE, adj. PERPÉTUELLEMENT, adv. PERPÉTUER, v. act. PERPÉTUITÉ, s. f. [Pêrpétu-èl, èle, èleman, é, ité; 1re ê ouv. 2e é fermé, 4e è moy. aux trois premiers, é fermé au quatrième, la 5e e muet au 2d et au 3e.] Perpétuel, qui dure toujours. Perpétuellement, sans cesse. Perpétuer, rendre perpétuel. Perpétuité, durée sans interruption. "Bruit, moûvement, monument perpétuel. "Pratique perpétuelle de la vertu. Rente perpétuelle, et non rachetable. "On entend perpétuellement du bruit dans cette maison. "Perpétuer sa gloire, son nom. "Se perpétuer dans une charge. "Cette tradition~ s' est perpétuée jusqu' à nous. "L' ancièneté et la perpétuité de la possession est un grand titre. "La perpétuité de la Foi catholique est prouvée par des argumens invincibles. = À~ perpétuité, adv. Pour toujours. "Fonder un service à perpétuité. "Rente rachetable à perpétuité.
   Rem. Perpétuel aime à suivre le subst. Le P. d' Avrigni le fait précéder, mais mal. "Que Sa Majesté auroit eu perpétuel droit de tenir garnison dans la forteresse de Philisbourg. Cet Écrivain, assez correct dailleurs, a voulu raprocher droit de son régime; mais il est tombé dans un aûtre inconvénient, dans une construction dûre et sauvage: In vitium ducit culp‘ fuga.

PERPLEXE


PERPLEXE, adj. PERPLEXITÉ, s. fém. [Pêrplèkce~, cité: 1re ê ouv. 2e è moyen au 2d, 3e e muet. _ Trév. écrit perplex au masc. L' Acad. met perplexe pour les deux genres.] Irrésolu, irrésolution.
   Deux Avocats, qui ne s' accordoient pas,
   Rendoient perplex un Juge de Province.       La Font.
"Il étoit dans une si grande perplexité, que plusieurs fois il fut prêt à se doner la mort. = L' Acad. avait d' abord dit que perplexe était vieux: ensuite elle l' a mis sans remarque et sans exemple: il est peu usité: mais perplexité est un bon mot, comme dit M. Andry. Tous les bons Auteurs s' en sont servi. Voy. IRRÉSOLUTION.

PERQUISITION


PERQUISITION, s. f. [Pêrkizi-cion; 1re ê ouv.] Il se dit ordinairement des chôses en régime. Recherche exacte. "Aprês une longue perquisition, j' ai trouvé ce titre, ce papier, etc. = Dans la Pratique, on le dit des persones. "Faire perquisition d' un homme et de sa demeure. Verbal de perquisition.

PERRON


PERRON, s. m. [Pêron: ê ouv. r for.] Ouvrage de maçonerie, ataché par dehors à un corps de logis, et servant d' escalier à l' étage d' en bâs, à un rez-de-chaussée un peu élevé.

PERROQUET


PERROQUET, s. m. PERRUCHE, s. f. [Pérokè, ruche: 1re é fermé, r forte; 3e è moyen au 1er, e muet au 2d.] Ils se disent d' un oiseau de l' Amérique, qui aprend facilement à parler, et imite la voix humaine. "Perroquet verd, gris, de diverses couleurs. Perruche, petit perroquet. = On apèle proverbialement, soupe à perroquet, du pain trempé dans du vin. "Parler comme un perroquet, parler de mémoire; répéter ce qu' on a ouï dire.

PERRUQUE


PERRUQUE, s. fém. PERRUQUIER, s. m. [Péruke, kié; 1re é fer. r forte: dern. e muet au 1er, é fer. au second.] Perruque est une coifûre de faux cheveux. Perruquier, faiseur de perruques. Perruquière, femme de Perruquier. = En style proverbial, on apèle, tête à perruque, un homme de peu d' esprit, un sot, un ignorant.

PERS


*PERS, PERSE, adj. Vieux mot. Bleu ou tirant sur le bleu. "Minerve aux yeux pers. "Chaperon de couleur perse.

PERSAN


PERSAN, PERSE, adj. et subst. Le 2d se dit des anciens peuples de l' Empire de Perse, et le 1er de ceux d' aujourd' hui. Dict. Gram. = Racine a pourtant employé le 1er dans Esther.
   À~ l' égard des Persans, je veux qu' on les honore.
Son fils le justifie à sa manière acoutumée. "Ce Poète si exact, dit-il, n' ignoroit pas l' usage, mais il trouvoit le mot de persan plus harmonieux. Il dit, au contraire, dans Alexandre.
   Ne vois-je pas le Scythe et le Perse abatus.
Ce mot contribuoit alors à la beauté du vers. L. Racine. Pour moi, je crois que dans l' un et dans l' aûtre le Poète n' a cherché que sa comodité, et qu' il ne faut pas lui en faire un crime. = L' Ab. Du Resnel, parlant d' Alexandre, l' apèle le vainqueur des Persans: il l' a employé au lieu de Perses, à caûse de la rime. V. PERSIEN.
   En parlant des anciens Rois, on dit, Roi des Perses, ou Roi de Perse; mais pour les modernes, la seconde manière est la seule bonne. Bouh.
   PERSE, s. f. Belle toile peinte, qu' on aporte de Perse.

PERSÉCUTANT


PERSÉCUTANT, ANTE, adj. PERSÉCUTER, v. act. PERSÉCUTEUR, TRICE, s. m. et fém. PERSÉCUTION, s. f. [Pêr--sékutan, tante, té, teur, trice, cion: 1re ê ouv. 2e é fer. 4e lon. aux deux premiers, é fermé au 3e.] Persécuter, c' est proprement vexer, inquiéter par des poursuites injustes et violentes. "Les Empéreurs païens ont presque tous persécuté les chrétiens. = Par exagération, importuner, presser avec importunité. "Les créanciers le persécutent, depuis long-tems. Depuis six mois, il me persécute pour m' arracher ce consentement. = Persécution a ces deux significations. Poursuite injuste et violente. "Les persécutions ont acru le christianisme au lieu de le détruire. = Il régit de devant les noms des persécuteurs fameux. La persécution de Néron, de Dioclétien. = Importunité continuelle et fatigante. "Je ne puis me défaire de ses persécutions. = Persécuteur se prend aussi dans les deux acceptions. _ Qui persécute: "Néron a été un des plus grands persécuteurs des chrétiens. "Persécuteur de l' inocence, persécutrice des gens de bien. = Persécuteur fâcheux; homme importun et incomode. "Il ne me quite point: c' est mon persécuteur. St. famil. = Persécutant n' a que ce dernier sens: "C' est l' homme du monde le plus persécutant; c' est une femme bien persécutante.
   Rem. 1°. Plusieurs prononcent perzécuter, etc. Cette prononciation est contre l' usage et la Gramaire: l' s n' a le son du z que lorsqu' elle est entre deux voyèles. = 2°. L' Ab. d' Olivet avait critiqué ce vers de Racine.
   Oui, les grecs sur le fils persécutent le père.
       Androm.
Son Fils répond qu' il était aisé de mettre dans le fils, que l' expression serait plus exacte et le vers moins beau. Il n' est pas trop certain que sur fasse beauté plutôt que dans; mais du moins la remarque Gramaticale est juste; et en prôse on ne doit pas dire persécuter un père sur un fils. = 3°. Le même Poète, dans un aûtre endroit, fait régir à ce verbe l' ablatif.
   Cette persévérance.
   Dont le sort s' atachoit à les persécuter.
       Bérénice.
Crébillon a dit aussi:
Toujours persécuté d' un souvenir afreux.
Les Poètes aiment les ablatifs, parce qu' ils les troûvent comodes. En prôse, on dirait: cette persévérance, avec laquelle le sort s' atachait à les persécuter. "Toujours persécuté par un afreux souvenir. = 4°. Persécution, avec le régime de la prép. de a un sens actif et non pas passif: il se dit de celui qui persécute~, et non pas de ceux qui sont persécutés. On dit, la persécution de Néron, et non pas, la persécution des chrétiens sous Néron. Le Traducteur de l' Hist. d' Angl. (Mde B...) s' est donc mal exprimé quand il a dit: "Une des caûses principales de la persécution violente du Duc de Clarence fut une prédiction, etc. Il falait dire, de la persécution qu' on fit au Duc, etc. ou que le Duc essuya, etc. = 5°. Persécutrice est un mot dur à prononcer, comme tous les noms en trice. BOSSUET l' a employé. Rome (païène) persécutrice des saints. "Les sectes persécutrices. Bayle, cité par d' Avrigny. "Les lois persécutrices d' Élisabeth. Hist. des Tud. M. Fréron s' est aussi servi de ce mot.

PERSÉVÉRANCE


PERSÉVÉRANCE, s. f. PERSÉVÉRANT, ANTE, adj. PERSÉVÉRER, v. n. [Pêrsévé--rance, ran, rante, ré, et non pas perzé--vérance, comme prononcent certains, fort mal à propôs; 1re ê ouv. 2e et 3e é fer.] Persévérer; c' est persister, demeurer ferme et constant dans la même résolution ou la même conduite. Persévérant, qui persévère. Persévérance, qualité de celui qui persévère. Persévérer dans un dessein, dans le travail, dans la foi, dans le bien, dans l' endurcissement. "Persévérer à soutenir ce qu' on a avancé. _ Et sans régime: "Ce n' est pas tout que de bien comencer, il faut persévérer; être persévérant dans le bien. "Persévérance dans le travail. "Il en est venu à bout par sa persévérance.
   Rem. Persévérer, continuer, persister, ont beaucoup de raport pour le sens; mais il y a entre eux quelque diférence. Continuer c' est simplement faire comme on a fait jusque là: persévérer, c' est continuer sans vouloir changer: persister, c' est persévérer avec constance et opiniâtreté. Ainsi persister dit plus que persévérer, et persévérer plus que continuer. "On continûe par habitude: on persévère par réflexion: on persiste par attachement. Beauzée, Synon. = Suivant M. l' Ab. ROUBAUD, persévérer se dit proprement des actions et de la conduite; persister des opinions et de la volonté. C' est dans la pratique ou l' exercice d' une chôse, dans le bien ou dans le mal qu' on persévère; c' est dans son sentiment ou dans son dire, dans sa manière de penser ou de vouloir qu' on persiste... On persévère par l' habitude de faire: on persiste par la force de la résolution. L' un demande une longue constance: l' aûtre anonce de la fermeté, etc. Nouv. Syn. Fr.

PERSIEN


PERSIEN, SIENNE ou SIèNE, adj. et subst. Il ne se dit que des habillemens et du langage ancien: une persienne, une robe à la persienne; le persien, ou la langue persienne. Pour la langue nouvelle, on dit, le persan, la langue persane. = On dit toujours à la persienne, pour dire, à la manière des Perses; et M. de Vaugelas (dans son Quinte-curce) ne parle point autrement: vétu à la persienne; cimeterre fait à la persienne. Bouh. _ * Bossuet le dit des persones. "Artaxerce persien, rétablit l' Empire des Perses. Suivant Bouhours, il faudrait dire Persan, parce qu' on le dit ainsi quand il s' agit d' un seul, même en parlant des anciens: on ne dit, ni un perse, ni un persien, on dit un persan. _ Bossuet dit âilleurs, l' Empire persien. Voy. PERSAN. = Un Missionaire de Perse, dit, Sa Majesté persienne. Cet adjectif n' est pas là plus convenable que le substantif qu' il acompagne; et le titre de Majesté n' est pas plus selon le costume, que le mot persien pour le Roi de la Perse moderne. = L' Acad. ne met que Persienne, s. f. pour signifier ces jalousies, composées de lates ou lames de bois fort minces, disposées en abat-jour, qu' on met aux fenêtres et aux voitûres.

PERSIFLAGE


PERSIFLAGE, s. m. PERSIFLER, v. act. PERSIFLEUR, s. m. Mots nouveaux et fort à la mode. Ils expriment l' action de rendre quelqu' un victime de la plaisanterie, par les chôses qu' on lui fait dire ingénument. "Il est souvent plus honteux de persifler, que d' être persiflé. "C' est un persifleur. "Cet éloge n' est qu' un gorssier persiflage.
   De la joie et du coeur on perd l' heureux langage,
   Pour l' absurde talent du triste persiflage.
       Gress. Le Méch.
Il est mis en italique: le mot était alors dans sa nouveauté. "Les esprits foibles et légers se laissent aisément ébranler par le persiflage. L' Ab. Sabatier de Castres. _ Voltaire ne pouvait souffrir ces mots. Dites-moi, écrit-il à l' Ab. d' Olivet, si Racine a persiflé Boileau, si Bossuet a persiflé Pascal; si l' un et l' autre ont mistifié La Fontaine, en abusant de sa simplicité. = "Apollon (dans le Jugement de Midas) fait le rôle de ce que nous apelons un roué: Apollon persifle. Ce n' est pas ainsi que Molière fait parler les Dieux, quand il les met en scène avec des mortelles. Ann. Lit. "Le caractère du persifleur est une nuance de ceux du railleur et du Méchant, et tient à tous les deux. La définition en est assez dificile. Ce qui semble le constituer, c' est l' art de tourner les gens en ridicule, sans qu' ils s' en aperçoivent. Ibid. = Persiflage, persifler et persifleur, dit l' Acad. sont des termes modernes, que la dépravation des moeurs et du goût n' ont mis que trop à la mode.

PERSIL


PERSIL, s. m. PERSILLADE, s. fem. PERSILLÉ, adj. masc. [Pêrsi, si-glia-de, glié: 1re ê ouv. on ne pron. point l' l finale dans le premier, on mouille les ll dans les deux aûtres.] Le persil est une plante potagère, dont on se sert à divers usages pour la table. = On dit, proverbialement, gréler sur le persil, exercer son autorité contre des gens faibles, ou dans des chôses de nulle conséquence. = Persillade, tranches de boeuf avec du persil. = Persillé se dit d' un fromage qui a en dedans de petites taches verdâtres, comme si on y avait haché du persil.

PERSISTER


PERSISTER, v. n. [Pêrcisté: 1re ê ouv. dern. é fer.] Demeurer ferme dans ce qu' on a dit, dans ce qu' on a résolu. Il régit dans ou en pour les noms, et à devant les verb. "Il persiste dans son sentiment; je persiste en cette opinion. "Il persiste à demander cet emploi, malgré des refus réitérés, "Je persiste à croire que je ne me suis pas trompé. Voy. PERSÉVÉRER.

PERSONNAGE


PERSONNAGE, ou PERSONAGE, s. m. Persone. Il ne se dit ordinairement que des Hommes illustres. On ne le dit point des femmes. On ne l' emploie qu' en prôse, et dans le style relevé. "Cet illustre personage. Les grands personages de l' antiquité. Il n' est pas bon en vers dans ce sens. On ne l' y emploie que quand il a raport au Théâtre.
   D' un nouveau personnage inventez-vous l' idée.
       Boileau.
Hors de là, on ne dit point, en vers, de grands personages. L. Racine. = Quand ce mot est seul, ou avec une épithète peu honorable, il ne se dit que dans le style familier et moqueur, ou comique. Avez-vous vu le personage? ou ce personage. "C' est, un sot, un plaisant personage. "Le ridicule personage!
   Se croire un personage est fort comun en France.
       La Fontaine.
= Au figuré, on le dit dans le sens de rôle, et par allusion au Théâtre: Jouer bien son personage; jouer dans une afaire, un beau, ou un mauvais, un étrange personage. Mais il ne se dit point tout seul et sans quelque verbe qui le régisse. "Lorsque le traître Curson eut tiré, par son personage, tous les éclaircissemens, etc. Hist. d' Angl. Il falait, par le personage qu' il avait entrepris de jouer, etc.
   Personage, rôle, (synon.) Le premier terme est plus relatif au caractère de l' objet représenté; celui de rôle à l' art qu' exige la représentation. On dit d' un personage, qu' il est noble ou bâs, principal ou subordoné, intéressant ou froid, etc. et d' un rôle, qu' il est aisé ou dificile, soutenu ou démenti, rendu avec intelligence, avec feu, ou estropié, exécuté mal adroitement, froidement, etc. _ C' est au Poète à décider les personages, et à les caractériser: c' est à l' Acteur à choisir son rôle, à l' étudier, à le rendre. Beauzée, Synon.

PERSONNALITÉ


PERSONNALITÉ, ou, PERSONALITÉ, s. f. 1°. Qualité de ce qui est personel. "Dans cette afaire, dépouillons toute personalité pour en juger sainement. = 2°. Trait piquant, injurieux et personel contre quelqu' un. "Même en combatant les erreurs, il faut éviter les personalités, toute personalité.

PERSONNAT


PERSONNAT, ou PERSONAT, s. m. Bénéfice dans une Cathédrale ou Collégiale, qui n' est pas une dignité, mais qui done presséance sur les simples Chanoines.

PERSONNE


PERSONNE, ou, PERSONE, s. f. Ce mot a deux significations et deux genres diférens: 1°. Il signifie l' homme et la femme tout ensemble, comme fait homo en latin, et alors il est féminin, et a persones au pluriel: j' ai vu la persone que vous savez: c' est une belle persone, etc. Persones constituées en dignité, etc. _ En ce sens, après l' avoir fait féminin, on done élégamment le genre masculin au pronom relatif qui suit. "Une infinité de persones qualifiées ont pris la peine de me témoigner le déplaisir qu' ils ont eu. Vaug. Mais s' il s' agit des femmes, on conserve le féminin (qu' elles ont eu), non pas à cause de persones, mais à cause de ce qui est signifié par ce mot. Enfin, si l' on parle d' une compagnie d' hommes et de femmes, le genre le plus noble l' emporte, et l' on se sert du masculin. = 2°. Il signifie le nemo des Latins, le nadie des Espagnols; le nissuno des Italiens, le no body des Anglais, et peut être rendu en français, par nul, qui que ce soit. En ce sens, il est indéclinable et n' a point proprement de genre, ni de pluriel; mais il se sert du genre masculin par la règle, qui veut que les mots indéclinables s' associent un adjectif masculin. "Persone n' est venu, et non pas venûe. Que si on parle à un seul ou d' un seul, il faut avoir égard à la diférence des sexes. On dira donc si c' est un homme, "Je n' ai vu persone si heureux; et si c' est une femme si heureûse que vous. C' est l' opinion de Vaugelas. M. Regnier est d' un autre sentiment: mais il me parait qu' il a tort. = Persone, dans ce 2d sens, ne s' emploie qu' avec des verbes acompagnés d' une négative ou d' une expression exclusive comme sans: "Persone ne l' avait dit avant vous. "Il a proféré cette horrible blasphême, sans que persone l' ait repris. = Dans l' interrogation, il s' emploie quelquefois sans négation; et alors il signifie quelqu' un. "Persone peut-il dire que, etc. y a-t' il persone qui puisse en douter? = Mais quand il ne peut se rendre que par aucun, qui que ce soit, il demande absolument une négative, même dans l' interrogation. "Persone ne sait-il où il va? etc.
   3°. Les persones des verbes se règlent par les pronoms personels. Voy. PERSONEL.
   Rem. I. On disait anciènement, honnête persone, comme on dit aujourd' hui persone comme il faut: cette 1re locution est suranée, et l' autre n' est que du style familier. "L' extrême honneur, que vous me faites recevoir de tant d' honêtes persones, dit Voiture. = M. Marin pense que cette expression n' est point surannée, et qu' on dit très-bien: c' est une honnête persone dans ce sens. = Payer de sa persone, combatre avec courage, est tout au plus du style familier. Il se dit toujours au singulier, et l' on ne dit pas de leurs persones, en parlant de plusieurs. "Ils étoient obligés de payer de leur persone à tout instant. Montesq. = On dit aussi, mais plus noblement en prôse, exposer sa persone, pour exposer sa vie: mais on ne dirait point en vers.
   Ce Hérôs a cent fois exposé sa persone.
On ne dit point non plus en vers, sa persone si chère, son aimable persone. L. RACINE. = En persone, adv. Se dit toujours également au singulier. Quelques Auteurs l' ont employé mal-à-propos au pluriel. "Il pria les Princes d' Allemagne de s' y trouver en persones. P. BARRE, Hist. d' Allem. "Ils députèrent deux d' entre eux pour aller en persones déclarer cet ordre à la ligue. ROLLIN, Hist. Anc. _ Il faut toujours dire en persone, même quand il s' agit de plusieurs. = De persone à persone, corps à corps. Celui ci est plus usité, mais l' aûtre est plus noble. "Il (François I) chercha à cette journée (de Renti) l' ocasion de combattre Charles-Quint de persone à persone. Le Prés. Hénaut. = S' assurer de la persone de quelqu' un, l' arrêter, ou, lui doner des gardes; est une expression de tous les styles. = Dans le st. famil. on dit qu' un homme est bien fait de sa persone, pour dire qu' il est d' une belle figûre: il aime sa persone, il a un grand soin de sa santé; il aime ses aises, etc. Il est content de sa persone: il est fort satisfait de lui-même.
   II. PERSONE, pronom, ne se dit point des animaux. Si la vieille, (araignée) dit Pluche, ne trouve personne, qui de gré ou de force lui abandone ses filets, il faut qu' elle périsse, faute de gâgne pain. _ Il devait dire, ne trouve aucune araignée qui, etc. = Persone, en ce sens est du genre masculin. (voy. n°. 2°.) Il y a long-tems qu' on en a fait la remarque: cependant il y a toujours des écrivains, qui emploient le féminin. "Il n' y a persone qui ne se sente intéressée en faveur de la belle Susanne de Mr. Ménageot, etc. _ On ne peut pas dire que ce soit une faute d' impression. Car l' Auteur ou le Rédacteur corrige âilleurs M. Pey, qui avait dit: "Il est en effet telles persones à qui vous ne persuaderiez jamais qu' ils ont changé d' âme. Le critique met en parenthèse (qu' elles) Journ. de Litt. Il done par là un souflet à Vaugelas et à l' Acad. sur la joûe de M. Pey. Voy. plus haut, n°. 1°. L' Ac. dans les exemples qu' elle done ne met que le masculin. = Avec persone, pronom, la négative est nécessaire.
   Tant j' ai peu d' assurance à la foi de persone.
a dit Malherbe. Il faut, en la foi de qui que ce soit. = Voiture a bien dit: "C' est un secret trop important, pour le confier à persone: mais ce mot de trop, comme l' a remarqué Th. Corneille, envelope une négative et fait entendre aucune persone. Ainsi l' on pourrait dire: il est trop hardi, pour craindre persone. = * M. Linguet, dans une distraction, a aussi employé persone sans négative. "La crainte de prolonger la séance a empêché persone de marquer sa répugnance. Il falait, a empêché tout le monde de marquer, ou bien, a fait que persone n' a marqué sa répugnance. = Le P. Rapin fait régir à persone la conjonction que, comme si c' était un adverbe de comparaison. "Jamais persone n' a réuni toute la beauté et toute la véhémence du Discours que lui: (Tite-Live) En disant, n' a aussi-bien réuni que lui, le que, se raportant à aussi, aurait été régulièrement employé; ou il falait dire: persone n' a réuni comme lui, etc.

PERSONNEL


PERSONNEL, ou, PERSONEL, ELLE, adj. [1re ê ouv. 3e è moy. personèl, nèle.] Qui est propre et particulier à chaque persone. "Mérite personel: qualité personelle. = Les faûtes sont personelles: on n' est pas responsable des faûtes d' autrui. = Droit personel, tellement ataché à la persone, qu' il ne peut être transporté à un aûtre. = En Jurisprudence, action personelle, dirigée contre une personne, qui est redevable, ou obligée en son propre nom. = Homme personel. Voy. ÉGOïSTE. L' Homme Personel est le titre d' une Comédie de feu M. Barthe de Marseille. _ Ce mot est nouveau et assez à la mode. On dit même personel tout seul.
   On se dit philosophe, on n' est que personel.
       Le persifleur par M. de Sauvigny.
"Il a toutes les qualités, qui peuvent rendre ma fille heureûse, et je la lui refuserois!... pourriez-vous me croire personelle à un excès si coupable? TH. D' ÉDUC. La bonne Mère.
   En Gramaire, pronoms personels, qui marquent la persone, comme je, nous, tu, vous, il, elle, etc. = I. Le qui relatif n' est d' aucune persone, mais il est toujours de la même persone que l' antécédent; moi, qui écris; vous, qui me conaissez; eux, qui savent coment je pense; cet homme qui m' avait promis. = II. Dans l' interrogation, les pronoms personels se mettent aprês le verbe. "Suis-je selon votre goût? "Finiras-tu bientôt? "Vous rend-il ses devoirs? "Reçoit-elle du monde? = Sur quoi il est à remarquer. 1°. Pour la 1re persone, que si le verbe finit par un e muet, cet e se change en é fermé: aimé-jé~, et non pas aime-je? = Plusieurs n' observent pas cette règle et font l' e muet. D' autres donent en cette ocasion au présent la terminaison de l' imparfait ou de l' aoriste, et écrivent oubliois-je, ou oubliai-je, au lieu de, oublié-je. Ce sont des fautes grossières, oubliai-je, n' est que contre l' ortographe usitée: mais oubliois-je est de plus contre la prononciation, puisque oi représente un ê ouvert; et que dans oublié-je l' é est fermé. = Si je, après le verbe, fait un son dur, ou équivoque, l' usage le condamne: il ne faut point dire cours-je, perds-je, mens-je, dors-je, sors-je, ni courré-je, perdé-je, menté-je, dormé-je, sorté-je; mais il faut prendre un autre tour, et dire: est-ce que je cours, est-ce que je perds? = De tous ceux là perds-je est le moins mauvais, et Vaugelas ne le désaprouve pas; mais perdé-je est tout-à-fait mauvais. Voy. PERDRE. = 2°. Pour la 3e personne, quand le nominatif est un substantif on y ajoute dans l' interrogation le pronom personel il, ou elle: Pierre vient-il? Cette femme aportera-t' elle? _ Et remarquez que quand le verbe se termine par une voyèle, comme dans le dernier exemple, il et elle prenent devant eux un t; et s' il finit en d, ce d dans la prononciation se change en t: aime-t' il, viendra-t' elle, descend-il? Voy. INTERROGATIF. = Remarquez aussi que hors des interrogations, il et elle ne suivent le verbe que quand le nom substantif a précédé. * Le P. Sicard a mal parlé en disant: "En quel endroit de la mer pâsserent-ils les Israélites? Il falait dire: en quel endroit les Israélites passèrent-ils? = 3°. On met aussi les pronoms personels aprês les impératifs des verbes, lorsqu' il n' y a point de négation. "Fiez-vous-y: ne vous y fiez pas. Donez-lui, ne lui donez pas. = On peut les mettre devant, même quand il n' y a point de négation, pourvu que cet impératif en suive un aûtre, et s' y trouve uni par la conjonction et, ou par la conjonction ou. On peut dire: voyez-le et le consolez; prenez-les, ou les laissez; quoiqu' on puisse dire aussi: et consolez-le; ou laissez-les. BUF. = 4°. On met encore les pronoms personels aprês les verbes, quand ils sont précédés de ces mots, aussi, peut-être, du moins, au moins, envain; à peine, etc. Aussi fut-il bien châtié: peut-être serez-vous plus sage: du moins aurai-je de quoi vivre: en vain voudrions-nous nous plaindre: à peine était-il venu que, etc. = III. Dans les énumérations, on ne met souvent qu' une seule fois le pronom personel: "Troublé, furieux, livré à son désespoir, il s' arrache les cheveux, se roule sur le sâble, reproche aux Dieux leur rigueur, apelle en vain à son secours la cruelle mort. Télém. = Mais: 1°. Il est nécessaire de le répéter quand le second verbe en est séparé par des membres de phrâses qui coupent le discours.
   Soyez reine, dit-il, et dès ce moment même
   De sa main sur mon front posa le diadême.
       Esther.
La clarté et la netteté du discours exigeaient la répétition d' il: et dès ce moment même il posa. = 2°. On doit le répéter aussi quand les verbes sont en diférens tems. Je dis, et je dirai toujours. "Il (l' Amour) pleuroit de dépit, et alla trouver Calypso errante dans les sombres forêts. Télém. _ Et il alla aurait été plus régulier. = Il est pourtant quelques phrâses où l' on peut ne pas répéter le pronom personel de la 3e persone, parce que dans ces phrâses, les deux verbes, quoiqu' en diférens tems sont si fort raprochés qu' ils se touchent. On peut donc dire indiféremment: il le dit et il le fera; ou bien, il le dit et le fera. = Que si l' on pâsse de l' afirmative à la négative, tous ces pronoms se répètent: il le croyait, mais il ne le croit plus. = 3°. Il faut toujours les répéter quand ils sont en des câs obliques (aûtres que le nominatif) il me prie et me conjûre: je vous dis et vous déclâre, etc. = 4°. On doit toujours répéter le pronom on: "On parle et on agit. = IV. Dans le style marotique, on suprime souvent les pronoms personels nominatifs.
   Bien le savez, Clément, mon ami cher.
       Rouss.
pour, vous le savez bien.
  Et fites mal de les égratigner. Id.
  Et ne me chaut. Id.
Pour, vous fites mal: il ne me chaut.
  Là trouverez en tout genre d' écrits,
  De quoi former vos goûts et vos esprits.
au lieu de, vous trouverez, etc.
   V. On ne se sert de tu pour marquer la seconde persone du singulier, qu' à l' égard des persones, que la familiarité, ou une extrême supériorité autorise à tutoyer, excepté dans la Poésie et les grands mouvemens de l' éloquence. Hors de là, il faut se servir du pronom vous, avec le pluriel du verbe: mais on ne laisse pas de mettre au singulier le mot suivant, soit substantif, soit adjectif, qui se raporte à vous. On dit: vous êtes habile; vous êtes le maître, et non pas habiles, les maîtres. REST.
   VI. Règles pour la construction des pronoms personels. = 1°. Le nominatif doit ordinairement précéder le câs. Je leur donne, vous le blâmez. = 2°. Tous les datifs, excepté celui de la 3e persone, précédent l' acusatif. "Je vous l' ai renvoyé: vous le lui avez doné, etc. Voy. LE, LUI. = 3°. Ne suit immédiatement le pronom nominatif (vous ne dites pas, etc. Je ne parle point de, etc.) excepté dans les impératifs, dans les interrogatifs et dans les ocasions, où les pronoms sont mis après les verbes: "Ne vous fâchez pas: ne lui avez-vous pas parlé? Au moins ne devriez-vous pas, etc. = 4°. Y et en se mettent immédiatement aprês tous les pronoms et devant le verbe. "Je vous les y montrerai: il ne vous en parle pas, etc. BUF. Voy. Y = 5°. Les pronoms personels sont d' ordinaire mieux placés devant l' infinitif que devant le verbe régissant: "Il veut me faire périr: je veux te doner: elle veut se satisfaire, sont mieux que: il me veut faire périr, je te veux doner; elle se veut satisfaire. Autrefois on préférait cette dernière construction, et on ne peut pas même la condamner aujourd' hui, quoique l' aûtre soit meilleure, comme plus conforme au génie de la Langue et à la clarté du discours. = Quand le pronom en est joint au pronom personel, il forme une construction dûre et sauvage, lorsqu' il précède le verbe régissant. "On ne s' en sauroit pâsser, dit Molière. Il était plus doux de dire: on ne saurait s' en pâsser.
   VII. Dans le style familier, on emploie quelquefois sans nécessité et comme particule explétive les pronoms personels au datif. Celui de la seconde persone est le plus souvent employé. "Vous me l' avez gâté: (en parlant d' un jeune homme) cet homme vous mangerait un agneau tout entier, etc. _ L' Intimé, dans les Plaideurs, dit de son paûvre père:
   Il vous eût arrêté le carrosse d' un Prince:
   Il vous l' eût pris lui-même, etc.
Ce vous, quoique inutile, semble ajouter plus de force à ce qu' on dit. "Mon fils m' a l' obligation de lui avoir écarté beaucoup de mauvaises compagnies. Sév.

PERSONELLEMENT


PERSONELLEMENT, adv. [Pêrsonèle--man: 1re ê ouv. 3e è moy. 4e e muet.] En propre persone. "Il m' a ofensé personellement: il vous a ataqué personellement, etc. = Remarquez qu' il se raporte au régime du verbe (me, vous,) et non pas au sujet, au nominatif. = On ne dit qu' en style de Pratique, personellement établi: là il se raporte au sujet de la phrâse: mais on ne dirait pas, dans le discours ordinaire: il y a assisté personellement: il faudrait dire, en persone.

PERSONIFIER


PERSONIFIER, v. act. Atribuer à une chôse la figûre, les sentimens, le langage d' une persone. "Personifier la Justice, la Prudence. "Les Poètes et les Peintres personifient tout. "Nous personifions l' Usage, quand nous disons: l' usage aprouve, condamne, adopte, rejette: ce mot a besoin du sceau de l' usage. "L' usage est bizarre, inconséquent, etc.

PERSPECTIVE


PERSPECTIVE, s. f. [Pêrs-pèktive: 1re ê ouv. 2e è moy.] 1°. Cette partie de l' Optique, qui enseigne à représenter les objets selon la diférence, que la position et l' éloignement y aportent, soit pour la figûre, soit pour la couleur. "Ce Peintre entend bien la perspective, les règles de la perspective. "La perspective n' est pas bien observée dans ce tableau. = 2°. Peintûre, qui représente des jardins, des bâtimens, etc. en éloignement, de manière à tromper agréablement la vûe. "Au fond de cette galerie, de ce jardin est une perspective d' une vérité étonante et qui fait illusion. = 3°. Aspect de divers objets, vus de loin. "De ce coteau on voit Paris en perspective. 4°. Figurément: "Il a une belle ou une vilaine perspective: il a de grands avantages à espérer ou de grands malheurs à craindre. "Il n' est encore riche, heureux qu' en perspective.

PERSPICACE


*PERSPICACE, adj. PERSPICACITÉ, s. f. La perspicacité est une pénétration d' esprit, qui fait apercevoir promtement les chôses dificiles à conaître. "Cet homme a beaucoup de perspicacité: il est d' une grande perspicacité. = Ce mot est né à la fin du siècle pâssé: il plaisait au P. Bouhours: il trouvait qu' il signifiait beaucoup, et que nous n' avions point de mot, qui y répondit. Il souhaitait qu' il fût bien établi. Ses souhaits ont été acomplis. L' Acad. aprouve ce mot, et de bons Auteurs s' en servent. On peut l' employer sans scrupule. * Il n' en est pas de même de Perspicace: il sent encore trop le pays latin et l' on ne sait qu' en augurer. Ce serait pourtant un mot utile: il épargnerait une périphrâse. Il serait plus court de dire: cet homme est fort perspicace, que de dire: il a beaucoup de perspicacité. "Plus il y a d' yeux perspicaces réunis sur un vieux manuscrit; et plus on peut en porter un jugement solide. Anon.

PERSPICUITÉ


PERSPICUITÉ, s. f. [Pêrs-piku-ité: 1re ê ouv. dern. é fer.] Clarté, netteté. Il ne se dit que du discours, du style, et n' est en usage que parmi les savans. "La perspicuité du style.

PERSUADER


PERSUADER, v. act. et n. PERSUASIBLE, adj. PERSUASIF, IVE, adj. PERSUASION, s. f. [Pêrsu-adé, zible, zif, zive, zion, en vers zi-on.] Persuader, c' est porter, déterminer quelqu' un à croire ou à faire. 1°. Actif, il régit ou l' acusatif de la persone, et l' ablatif de la chôse, ou l' acusatif de la chôse et le datif de la persone: "Je l' ai persuadé de cette vérité: je lui ai persuadé cette vérité. = Il s' emploie aussi avec le seul régime direct (l' acusatif) de la persone, dans le sens de convaincre: "Je l' ai enfin persuadé. = Remarquez que persuader dit plus que convaincre: on peut convaincre sans persuader: celui-là ne triomphe que de l' esprit: celui-ci gâgne encore le coeur. "Pourvu que je convainque mes adversaires, dit J. J. Rousseau, je me soucie peu de les persuader. _ Sur bien des points, il ne les a ni persuadés, ni même convaincus. = 2°. Neutre, il régit le datif de la persone et la prép. de devant les verbes: "Il lui a persuadé de venir. = * Quelques Auteurs avec ce régime des verbes mettent le nom de la persone à l' acusatif, contre l' usage le plus autorisé. "Il travaille à les persuader de les suivre. MOREAU. Je crois que, à leur persuader vaut mieux. L' Acad. ne met d' exemple que du datif. = Ce régime de l' acusatif des noms est encore plus mauvais, à mon avis, quand persuader régit la conjonct. que: "Ces deux traités ne firent que persuader les deux Rois que la guerre étoit indispensable. Id. Je voudrais dire, persuader aux deux rois que, etc. = 3°. Se persuader, régit les noms à l' acusatif, le pronom se étant au datif: il se persuade (à soi-même) tout ce qu' il desire; et l' infinitif sans prép. ou la conjonct. que avec l' indicatif. De ces deux régimes, on emploie le premier, quand le verbe régi se raporte au sujet de la phrâse, et le second, quand il ne s' y raporte pas. "Il se persuade pouvoir le faire: il s' est persuadé que vous lui rendrez ce service. Dans le premier exemple, on pourrait dire aussi: il se persuade qu' il pourra, et ce régime est toujours plus sûr; car l' infinitif n' est guère bon qu' avec les verbes pouvoir, vouloir, et un petit nombre d' aûtres. Il ne fait pas trop bien dans la phrâse suivante. "Vous vous étiez persuadés travailler pour le bien général. Commerce Vengé. Je voudrais dire: vous vous étiez persuadé que vous travailliez, etc. = Quand il y a négation ou interrogation, le que qui suit, régit le verbe au subjonctif. "Il ne se persuade pas, ou, peut-il se persuader qu' on puisse, etc. * Anciènement on mettait toujours le subjonctif, même dans les phrâses afirmatives: "Considérant l' importance des actions des Princes, nous nous persuadons qu' elles soient (sont) produites par quelques caûses aussi pesantes et importantes. Montaigne.
   Rem. Plusieurs Auteurs font régir à se persuader l' ablatif, au lieu de l' acusatif, suposant que le pronom se est lui-même à l' acusatif. "On se persuade facilement (soi-même) de ceci. Mallebr. "Les Grands se persuadoient de plus en plus de l' impuissance de celui qui portoit encore le titre de Souverain. Moreau. On ne peut condamner ce régime dans le réciproque, puisque l' usage l' admet dans l' actif. (Voy. n°. 1°.) Cependant l' acusatif des noms est plus usité avec se persuader. (Voy. n°. 3°.) L' ablatif est le régime du passif et du participe. "Il est persuadé de la vérité de ce que vous dites. "Un homme bien persuadé des vérités de la Religion.
   PERSUASIBLE, qui peut être démontré, dont on peut persuader quelqu' un. Persuasif, qui a la force, le pouvoir de persuader. "Vérité persuasible. "Orateur éloquent et persuasif. Raison convaincante et persuasive. _ Le 1er de ces deux adjectifs se dit des chôses; le 2d des persones, et des chôses qui ont raport aux persones. = Dans le Diction. de Trév. on dit qu' on doute un peu de l' usage de persuasible. Pour moi j' en doute beaucoup, quoique l' Acad. le mette sans remarque. Elle n' en done point d' exemple. = Persuasif, au masc. suit toujours le substantif: au fém. il peut quelquefois précéder. "La persuasive douceur de vos leçons. J. J. Rousseau.
   PERSUASION, 1°. Action de persuader. "Ce Prédicateur a le don, le talent de la persuasion. = 2°. L' état de celui qui est persuadé. Ferme croyance. Dans ce 2d. sens, il a pour les verbes les mêmes régimes que se persuader ou être persuadé. Le Traduct. du Voyage d' Anson lui fait régir la prép. de et l' infinitif. "Nous passâmes plusieurs heures dans la ferme persuasion de périr. Il falait, dans la persuasion que nous péririons immanquablement, ou bien, que nous ne pouvions manquer de périr. = Ce régime employé par le Traducteur, a tout l' air d' un anglicisme.
   REM. Bourdaloue distingue fort bien persuasion, d' entêtement: "Mais, dit-on, les Hérétiques sont persuadés de la vérité de leur doctrine, et ils agissent suivant cette persuasion. Ce n' est pas bien parler, que de dire qu' ils en sont persuadés: il faut dire, qu' ils en sont entêtés. À~ prendre les termes dans toute leur justesse, il y a une grande diférence entre la persuasion et l' entêtement~. La persuasion est dans l' esprit, qui raisone et qui juge, sans être préocupé ni passioné: l' entêtement est dans l' imagination~, qui se frape, qui s' échauffe, et ne suit que l' opiniâtreté du naturel, ou que le mouvement de quelque passion du coeur."

PERTE


PERTE, s. f. [1re ê ouv. 2e e muet.] 1°. Privation de quelque avantage, agrément ou comodité, dont on jouïssait auparavant. "La perte des biens, de la vie, de l' honeur. "Perte de la parole, de la vûe, de la grâce (de Dieu), des bones grâces du Prince, etc. = Faire une perte, une grande perte, etc. = 2°. Domage. "Il a soufert de grandes pertes. "Quand il mourrait, il n' y aurait pas grande perte. = 3°. Ruine dans les afaires publiques, dans la fortune des particuliers, etc. "Il fut la cause de la perte de l' État. "C' est delà que vint la perte de sa fortune. "Ce qu' il a entrepris sera sa perte, la perte de sa famille. = La perte de l' âme, la damnation éternelle. = 4°. Mauvais succês. "La perte d' une batâille, d' un procês, d' une gageure, etc. = 5°. Perte entre dans quelques expressions adverbiales. = Être en perte, se dit au jeu, ou tout seul: "En jouant, on ne gâgne pas toujours, on perd quelquefois; et quand on est une fois en perte, tout y va. Marivaux. Ou avec la prép. de: "Il est en perte de dix louis. = En pure perte, sans en tirer le moindre avantage. "Il y a de certaines philosophies qui sont en pure perte, et dont persone ne nous sait gré. Sév. "Les hommes n' aiment pas à doner en pure perte, des louanges qui humilient. Massillon. * Un Auteur moderne dit, à pure perte, contre l' usage. "Si je vous disois que non, je blesserois la vérité à pure perte; vous ne me croiriez pas. Anon. = À~ perte se dit dans ces phrâses, à perte de vûe. (Voy. VûE:) à perte d' haleine, jusqu' à perdre la respiration: courir à perte d' haleine. = On dit aussi, absolument et sans régime: vendre à perte, doner la marchandise à perte. = Avec perte, quand il est seul et sans régime, doit se raporter au sujet de la phrâse. * Sylla repoussa les assiégés avec perte. ROLLIN. Suivant la construction, il semble que la perte fut du côté de Sylla. Suivant le sens que l' Auteur avoit en vûe, elle fut du côté des assiégés. Il y a donc ou un contre-sens, ou du moins un louche dans cette phrâse.
   REM. Perte se dit pour mort, mais dans un sens actif, de celui qui a perdu, et non pas du mort qu' on a perdu. "Je prends beaucoup de part à la perte que vous avez faite, ou simplement, à votre perte.
   Il n' est plus de beaux jours, Berger, depuis ta perte.
       Gresset.
Je ne sais si cela est bon en vers, mais en prôse, je crois que cela ne vaut rien, et que l' on ne dit point, votre perte ou sa perte, pour dire, votre mort ou sa mort. = M. Linguet a dit: "Ceux qui le haïssoient le plus (Vitellius) ne lui firent pas seulement l' honeur de se réjouir de sa perte. Révol. de l' Empire Romain. J' ôse ne pas aprouver cette expression, quoique employée par un si grand Écrivain.

PERTINEMMENT


PERTINEMMENT, adv. PERTINENT, ENTE, adj. [Pêrtinaman; nan, nante; 1re ê ouv. 3e lon. aux deux dern.] Pertinent, qui est tel qu' il convient. "Raisons, excuses pertinentes; et au Palais, moyens, faits, articles pertinens. _ C' est tout l' emploi de ce mot. = Pertinemment, comme il faut, avec jugement, avec discrétion. "Il en parle, il en a discouru pertinemment. "Il a répondu, il a harangué três-pertinemment. = Il se dit des discours et non des actions. Acad.

PERTUIS


PERTUIS, s. m. [Pêr-tui; 1re ê ouv.] 1°. Trou, ouvertûre pratiquée en certaines rivières, pour laisser passer les bateaux. = 2°. Passage étroit dans des montagnes = 3°. En Geographie, détroit entre une île et la terre-ferme.

PERTUISANE


PERTUISANE, s. f. [Pêr-tui-zane; 1re ê ouv. dern. e muet.] Espèce d' anciène hallebarde.

PERTURBATEUR


PERTURBATEUR, TRICE, s. m. et f. PERTURBATION, s. f. [Pêrturba-teur, trice, ba-cion.] Le 1er ne se dit que dans cette phrâse, Perturbateur du repôs public. Acad. = Le P. Bouhours y ajoute, perturbateur de l' État, de l' Église: mais on ne dit point, un perturbateur du peuple; parce qu' on dit, troubler le repôs public, troubler l' État, troubler l' Église, et qu' on ne dit point troubler le peuple, quoiqu' on dise, exciter des troubles parmi le peuple. Rem. Nouv. = Maucroix a dit, au féminin; Perturbatrice. L' Acad. le met sans en doner d' exemple: il est peu usité. = Perturbation ne se dit que parmi les Savans et les Ascétiques. Trouble, émotion de l' âme.

PERVERS


PERVERS, ERSE, adj. PERVERSION, s. f. PERVERSITÉ, s. f. PERVERTIR, v. actif. [pêrvêr, vêrse, vêr-sion: en vers, si-on; versité, vêrti: 1re et 2e ê ouv.] Pervers, méchant, dépravé. Perversité, méchanceté, dépravation. "Homme pervers: monde pervers et trompeur. Sentimens pervers, doctrine, opinion perverse; moeurs perverses et corrompûes. "La perversité du siècle, des moeurs, de la doctrine, du naturel. = Pervertir, perversion, se disent d' un changement de bien en mal; comme convertir, conversion, d' un changement de mal en bien, en fait de religion ou de moeurs. Pervertir un Chrétien, un Catholique, en lui faisant quiter sa Religion. Pervertir un jeune homme en le jetant dans le vice. Pervertir un bon naturel. "Le luxe conduit à la perversion des moeurs. "La perversion de ses moeurs a causé sa perversion sur le fait de la Religion. = On dit pervertir simplement pour changer dans cette phrâse: pervertir l' ordre des chôses; et pour altérer ou mal interpréter: pervertir le sens d' un passage de l' Écriture Sainte, etc.
   Rem. 1°. Pervers, suit assez volontiers le nom, qu' il modifie. Cependant en vers et dans le discours relevé, il le précède élégamment au féminin. "Craignez les perverses insinuasions de l' Impie et du Libertin.
   Telle est du coeur la perverse nature.
       Rousseau.
Rarement le masculin pourrait-il marcher avant le substantif. = Il s' emploie lui-même substantivement. Mais plutôt au pluriel qu' au singulier, avait~ dit dabord l' Acad. On peut dire, toujours au pluriel. Aussi dans la dern. édit. elle avertit qu' il ne s' emploie qu' au masculin et dans l' exemple qu' elle done, elle le met au pluriel. "Dieu chatiera les pervers. * Même dans ce nombre, il est peu usité et il fait un mauvais éfet comme sujet de la phrâse. "Les pervers, qui l' entouraient, l' éblouïrent par des spéculations d' un bénéfice immense. Anon. Je voudrais dire: les hommes pervers, etc. = 2°. Perversion et perversité ont l' un et l' aûtre un sens passif, et se disent non pas de ce qui pervertit, mais de ce qui se pervertit, ou est perverti. Le 1er dit moins que le 2d: celui-là a raport au verbe réciproque se pervertir. "Le luxe contribûe à la perversion des moeurs, et le 2d au passif être perverti.
   Trop de perversité règne au siècle où nous sommes.

PESAMMENT


PESAMMENT, adv. PESANT, ANTE, adj. PESANTEUR, s. f. [Pezaman, zan, zan--te, zan-teur: 1re e muet, 2e lon. aux 3 dern.] Pesant, au propre, qui pèse, qui est lourd. "Corps, fardeau pesant, charge pesante. = Homme, cheval, qui devient pesant, que l' âge rend moins dispôs, moins léger; qui a l' esprit pesant, la conversation pesante; qui a l' esprit lent, la conversation ennuyeuse. = Au figuré, en parlant des chôses; onéreux, fâcheux: "C' est une charge pesante que d' avoir une nombreûse famille. _ Joug pesant, domination dûre. _ Tête pesante, chargée d' humeurs, de vapeurs. = Pesant, adv. "Deux mille livres d' argent pesant: une livre pesant d' or.
   Rem. Pesant, suit ou précède le substantif, mais non pas indiféremment: il faut que l' oreille et le goût lui assignent sa place. "Style pesant, charge pesante, machoire pesante. "Il se chargeoit d' un fardeau pesant. Hist. d' Angl. pesant fardeau irait mieux, pesant style ne vaudrait rien. _ Voy. LOURD. = * Comme on dit des caûses grâves, considérables, Montagne a dit des caûses pesantes: "Considérant l' importance des actions des Princes, nous nous persuadons qu' elles sont produites par des caûses aussi pesantes et importantes: nous nous trompons. _ Je doute que de son tems on employât pesant dans ce sens, et je crois qu' on peut regarder l' emploi de ce mot comme un barbarisme dans Montagne, ou, si l' on veut, comme un gasconisme. = Pesant est subst. masc. dans cette expression proverbiale, valoir son pesant d' or. "Il faut avouer que les femmes valent leur pesant d' or, dit ironiquement Mde. de Sévigné. "Il croit tout cela quand il écrit, et s' en moque un moment après. Je vous dit qu' il vaut son pesant d' or. La même.
   PESAMMENT, d' une manière pesante. "Marcher, être vétu, armé, pesamment. "Parler, écrire pesamment.
   PESANTEUR, 1°. qualité de ce qui est pesant. Il se dit au propre et au figuré. "La pesanteur des corps, de l' air, d' un fardeau. Pesanteur d' esprit; pesanteur du style. = 2°. Il se dit aussi de la violence d' un coup que done un corps pesant, ou un homme fort et robuste, et du brâs, de la main qui le done. "Il fut étourdi de la pesanteur du coup. "Je conais, j' ai senti la pesanteur de ses coups, de son brâs, de sa main. = 3°. Indisposition qui survient à quelque partie du corps, et qui fait qu' on y ressent comme un poids. "Pesanteur de tête, d' estomac, dans le bras, par tout le corps, etc.

PESÉE


PESÉE, s. f. PESER, v. act. et n. PESON, s. m. [1re e muet, 2e é fer. aux deux premiers: dans le verbe, l' e est muet devant la syllabe masculine, nous pesons, je pesais; pesant, etc. mais il devient moyen devant la syllabe féminine (devant l' e muet): il pèse, pèsera, etc. Prononcez pezon, pezé, pezan, pèze, pèzera. = Boileau et un Traducteur de Pope écrivent pezer avec un z: ce n' est pas l' usage.] Pesée est l' action de peser: faire la pesée des espèces; ou la quantité de ce qui a été pesé une fois. La première pesée est de tant de livres, la 2de de tant, etc.
   Peser, actif, examiner, juger avec des poids combien une chôse est lourde. "Peser de la viande, du pain, etc. = Figurém. examiner atentivement. "Peser mûrement les chôses, les conséquences d' une afaire. "Dans les Délibérations, on compte les voix: on ne les pèse pas. = Neutre: avoir un certain poids. "Peser beaucoup; le tout pèse cinquante livres. = Figurément, être à charge. Il régit le datif: "Un secret lui pèse.
   Dans l' état où je suis, on pèse à l' amitié.
       Sidney.
Et figurément (style familier.): "Il lui pèse sur les épaules, sur les brâs. = S' apesantir sur: "Combien, dans certains momens, le crime pèse sur la tête du coupable. Moreau. = Peser sur le coeur, causer beaucoup de chagrin. "Cela lui pesait sur le coeur, et non pas pesait sur son coeur. = Peser sur l' estomac, être dificile à digérer, en parlant d' une viande, et en style figuré familier, d' un afront, d' une chôse désagréable. = Apuyer sur. "Peser sur une note (de musique) sur une syllabe, sur un levier, sur une bascule.
   On dit, proverbialement, d' une chôse très-légère, qu' elle ne pèse pas plus qu' une plume; et familiérement, d' un homme qui parle avec lenteur, ou avec circonspection, qu' il pèse sur ses paroles.
   PESON, balances, autrement apelées Romaine. Il consiste en une verge de fer, qui a des crochets de fer à un bout, et à l' aûtre un poids ataché à un anneau, qu' on fait aler et venir suivant la pesanteur des chôses qu' on veut peser.

PESTE


PESTE, s. f. PESTIFèRE, adj. PESTIFÉRÉ, ÉE, adj. [1re è moy. 3e è moy. et long au 2d, é fermé au 3e et 4e: 2e du 1er et 4e du second e muet; 4e é fermé aux deux dern.] Peste, au propre, se dit d' une maladie épidémique et contagieûse, qui a des caractères particuliers, et qui caûse une grande mortalité. Pestifère, qui comunique la peste. Pestiféré, qui est infecté de peste. "La peste est un des fléaux de Dieu. "Avoir la peste. Être frapé de peste, ou de la peste: "Air, odeur, vapeur pestifère. "Il a été mis en quarantaine, parce qu' il venait d' un lieu pestiféré. En parlant des persones, il est subst. masc. "Sequestrer les pestiférés.
   PESTE se dit au~ figuré~, des persones et des chôses capables de corrompre l' esprit et le coeur. "Les flateurs, peste fatale, qui renverse plus d' États que les armes des ennemis. Vaugelas. (Quinte-Curce). "Ce furieux, cette peste publique, qui fait tant de maux à tous les mortels. Mde. Dacier: "Il se trouve de ces pestes de Cour, dont les mauvais Princes sont ordinairement obsédés. Charlev.
   Mainte peste de cour fit tant, par maint ressort,
   Que la candeur du Juge, ainsi que son mérite,
   Furent suspects au Prince.
       La Fontaine.
En style fig. famil. "Cet homme est une peste, une méchante peste. On le dit sur--tout d' un méchant petit garçon, d' une jeune fille vive et malicieûse. = Adj. "Il est un peu peste, un peu malin. = Interjection. "Peste, ou la peste de l' ignorant! "La peste soit du fou! = Par exclamation et par admiration: "Peste! que cela est beau! Peste! qu' il fait froid, etc.
   Pestifère ne se dit que parmi les Savans. Pestiferé est du discours ordinaire. = On dit, d' un homme, dont on évite le comerce, ou parce qu' il est dangereux, ou parce qu' il est incomode, qu' on le fuit come un pestiféré.

PESTER


PESTER, v. n. [1re è moy. 2e é fer.] Murmurer avec vivacité; exhaler sa mauvaise humeur contre. C' est comme qui dirait: S' écrier par imprécation, peste! "Pester contre le Gouvernement. "Tout le monde peste contre lui. _ Et sans régime: il ne fait que pester; il peste continuellement. = * St. Amant dit, en ce sens, pesterie, mot burlesque.
   Tu ne pouvois mieux rencontrer
   Dans ton humeur de pesterie.

PESTILENCE


PESTILENCE, s. f. PESTILENT, ENTE, adj. PESTILENCIEL, ELLE, ou PESTILENCIEUX, EûSE, adj. [Pèstilance, lan, lan--te, lanci-èl, ci-èle, ci-eû, ci-eû-ze; 1re è moyen, 3e lon. 5e è moyen au 4e et 5e, lon. aux deux derniers.] Pestilence, corruption dans l' air. Peste répandûe dans un pays. "Dans un tems de pestilence. "Il ne se dit guère au propre, que dans cette phrâse. = Au figuré, on ne le dit que dans cette expression tirée de l' Écritûre, et aujourd' hui moins usitée qu' aûtrefois: être assis dans la chaire de pestilence, enseigner une mauvaise Doctrine. = Les trois adjectifs ont le même sens. Qui tient de la peste. "Cadâvre pestilent: air pestilenciel, maladie pestilencielle. "Discours, sentimens pestilencieux.
   Rem. De ces trois adjectifs, pestilenciel est le plus en usage, et pestilencieux est celui qui l' est le moins au propre, et le plus au figuré. = Pestiféré se dit des persones et des lieux; pestilent et pestilenciel, des maladies, de l' air. = L' Acad. écrit pestilentiel et pestilentieux avec un t devant le 3e e, aparemment par respect pour l' étymologie latine: mais la française, pestilence, doit, ce semble, faire préférer pestilenciel et pestilencieux, avec un c.

PET


PET, s. m. PETER, v. n. PETEUR, EûSE, s. m. et fém. [1re è moy. au 1er, e muet aux aûtres. Le Dict. d' Ortogr. met un accent aigu: péter, péteur: l' Acad. ne met point d' accent.] Pet, vent qui sort du corps, par derrière, avec bruit. Peter, faire un pet. Peteur, qui pète. = On dit, proverbialement et bâssement, glorieux comme un pet, extrêmement glorieux. = Peter plus haut que le cul, entreprendre des chôses au dessus de ses forces, ou prendre des manières au dessus de son état. = Peter dans la main, en parlant des persones, manquer au besoin. "Ne vous fiez pas aux promesses de cet homme: il vous pètera dans la main, et non pas, il pètera dans votre main. _ En parlant des billets, des lettres de change, n' être pas payé. "J' avais tant de mille francs en lettres de change, qui m' ont peté dans la main. = Figurément, style famil. "du bois qui pète dans le feu; un fusil, un pistolet, qui pètent bien. Faire peter le salpêtre: faire une grande décharge de mousqueterie, d' artillerie. = La gueule du Juge en pètera, dit-on, quand on ne veut point d' acomodement dans une afaire, et qu' on veut qu' elle se juge. = On l' a chassé comme un peteur d' Église, honteûsement.

PETARADE


PETARADE, ou PÉTARADE, s. fém. [Le Dict. d' Orth. met un accent aigu sur le premier e, et le Rich. Port. aussi. Dans le Dict. de l' Acad. in-4°. on a mis petarade, sans accent, en ligne, et pétarade dans les exemples: l' analogie et l' étymologie semblent demander l' e muet, ce mot venant de peter.] Plusieurs pets de suite. Il se dit proprement des chevaux, ânes, mulets, etc. = Fig. st. famil. Bruit qu' on fait de la bouche par mépris. "Il lui a fait une petarade.

PETARD


PETARD, s. m. PETARDER, v. act. PETARDIER, s. m. [1re e muet, 3e é fer. le d final ne se prononce point au 1er. Le Dict. d' Ortogr. et le Rich. Port. écrivent Pétard, etc. avec l' accent aigu: l' Acad. ne met point d' accent. Si on a égard à l' étymologie, il n' en faut point, ces mots venant de peter.] Petard est une machine de fer ou de fonte, qui, étant chargée de poûdre et couverte avec un madrier, sert à enfoncer les portes d' une Ville qu' on veut surprendre. "Atacher le petard à une porte. = C' est aussi une sorte de feu d' artifice, fait avec de la poudre à canon, enfermée dans du papier ou du parchemin, mis en plusieurs doubles, et extrêmement batu et serré. = Petarder, faire jouer un petard contre. "Petarder une porte, une ville. = Petardier, celui qui fait les petards, ou qui les aplique.

PETAUD


PETAUD, s. m. PETAUDIèRE, s. fém. [Petô; todiè-re: 1re e muet, 3e è moyen et long au 2d.] Le premier n' est d' usage qu' en cette phrâse, la Cour du Roi Petaud, c. à. d. un lieu de confusion et de désordre, où tout le monde comande, et persone n' obéit.
   Chacun y contredit, chacun y parle haut.
   Et c' est tout justement la Cour du Roi Petaud.
       Molière.
PETAUDIèRE a le même sens, à peu prês. Il se dit, en plaisantant, d' une assemblée où il n' y a point d' ordre. "Cette maison, cette coterie est une vraie petaudière.

PèTE-EN-L' AIR


*PèTE-EN-L' AIR, s. m. Déshabillé. C' est un mot de Province. "Elle vint en pète-en-l' air, couleur de rôse. Rétif.

PETER


PETER, PETEUR. Voy. PET.

PETILLANT


PETILLANT, ANTE, adj. PETILLEMENT, s. m. PETILLER, v. n. [Peti-glian, glian-te, glie-man, glié; 1re e muet: mouillez les ll: 3e lon. aux deux premiers, e muet au 3e, é fermé au dern. = Le Dict. d' Ortog. et le Rich. Port. mettent un accent aigu sur la première syllabe, pétillant, etc. L' Acad. ne met point d' accent: ces mots sont dérivés de peter, qui n' en a point.] Petiller, c' est éclater en faisant du bruit à plusieurs reprises. "Le sel, les feuilles de laurier petillent dans le feu. "Du feu, du bois qui petille. = Briller avec éclat. "Du vin, des yeux qui petillent. "Le sang lui petille (lui bout) dans les veines. = Il régit quelquefois de devant les noms et les verbes. "Il petille d' esprit. "J' en petillais d' avance (de joie). "Il petille (il grille) de le faire
   PETILLANT, qui petille: "Vin, sang petillant. "Des yeux petillans.
   PETILLEMENT, action de petiller. "Le petillement du sel, du salpêtre dans le feu, etc.

PETIT


PETIT, ITE, adj. PETITEMENT, adv. PETITESSE, s. fém. [Peti, tite, teman, tèce: 1re e muet: 3e e muet au 2d et 3e, è moyen au dernier.] Qui a peu d' étendûe ou de volûme dans son genre. "Petit homme; petit chien, cheval, etc. "Une petite ville. "Le petit doigt de la main, du pied. = "Un petit nombre, une petite somme, etc.
   Rem. 1°. Petit, joint à homme, ou à femme, ne signifie ordinairement que la tâille; mais, joint à d' aûtres noms, il signifie souvent, dans le figuré, peu de chôse, peu de mérite. "Petit Prince, petit génie, petites gens. = 2°. Petit, quand il est seul et sans adv. de quantité, se met devant le substantif: joint à un adverbe, il se met indiféremment devant ou après: un petit homme; une petite femme: un homme fort petit, une femme bien petite, ou un fort petit homme, une bien petite femme. = 3°. Le peuple, en certaines provinces, dit, un petit, pour un peu. = 4°. En parlant des enfans, on l' emploie substantivement: "Savez-vous que je l' aime, cette petite, quand je songe de qui elle vient. Sév. "Les paûvres petites n' ôsent aprocher. Th. d' Éd. "La pauvre petite! Elle en a les larmes aux yeux. Ibid. On dit aussi, du petit au grand, par comparaison des petites chôses aux grandes. Les petits, le peuple. "Les petits pâtissent pour les faûtes des Grands. _ Les grands et les petits, les vieux et les jeunes. = 5°. Petit, adverbe. Peindre en petit; un modèle en petit, en racourci. = Petit à petit, peu à peu. "Il a fait sa fortune petit à petit. = Cet adverbe ne plaisait point à l' Auteur des Réflexions: il trouvait cette locution un peu bâsse, et voulait qu' on dît toujours peu à peu. L' Acad. pourtant ne la condamne point. L. T. Elle la met même sans remarque. = On peut dire que, sans être bâsse, elle est peu élégante, et peu convenable dans le haut style. "Il (Guillaume III) n' eut pas de peine à liguer, petit-à-petit, l' Europe contre la France. Volt.
   PETIT entre dans la composition de plusieurs mots. Petit-Maître, petite-maison, etc. etc. Voy. Maître, Maison, etc.
   PETITEMENT, en petite quantité. "Il a du bien, mais petitement. = À~ l' étroit. Vivre, être logé petitement. = L' emploi de cet adverbe n' est pas fort étendu.
   PETITESSE, peu d' étendûe ou de volume. "La petitesse d' un vâse; la petitesse de la tâille, etc. = Il ne se dit pas des persones mêmes: On ne dit point la petitesse d' un homme, d' une femme. On dit, au fig. petitesse d' esprit, de coeur, d' âme. "Il y a de la petitesse à se formaliser de tout, à s' ofenser de la moindre chôse. "Il est plein de petitesses, il a l' esprit minucieux.

PÉTITION


PÉTITION, s. f. PÉTITOIRE, adj. et subst. [Péti-cion, ti-toâ-re: 1re é fer. 3e lon. au 2d.] Le prem. ne se dit qu' en Philosophie, et le second au Palais. Pétition de principe se dit lorsqu' on allègue pour preuve la chôse même qui est en question. = Action pétitoire, demande au pétitoire, demande faite en Justice, pour obtenir la propriété d' un héritage, la jouissance d' un Bénéfice, etc.

PETON


PETON, s. m. En style badin ou plaisant: Petit pied. "Voilà de jolis petons. On le dit d' ordinaire, des enfans.

PÉTRIFICATION


PÉTRIFICATION, s. f. PÉTRIFIER, v. act. [Pétrifika-cion, pétrifié; 1re é fermé.] Pétrifier, c' est faire devenir de natûre de pierre. "Il y a des eaux qui pétrifient peu à peu tout ce qu' on y jette. "Bois, ôs pétrifié. Coquilles pétrifiées. = Au figuré, étoner, interdire. "Nous les pétrifiâmes. Ils furent si déroutés, si étourdis, qu' il ne leur resta pas même assez de présence d' esprit pour nous faire la moûe. Mariv. "Allons, après avoir pétrifié le fils, il faut subjuguer le père. Th. d' Éduc. = L' Acad. a oublié de parler de ce sens figuré, qui est fort usité dans le style familier. Le Rich. Port. L' interprète par endurcir, rendre immobile, il n' est pas d' usage dans ce 1er sens; il faut ajouter, à l' aûtre, d' étonement.
   PÉTRIFICATION ne se dit qu' au propre, et bien moins de l' action de pétrifier que des chôses pétrifiées. "Il a de belles pétrifications dans son cabinet.

PÉTRIN


PÉTRIN, s. m. PÉTRIR, v. act. [Pé--trein, pétri: 1re é fer. = Plusieurs écrivent pêtrein, pêtrir, avec l' accent circonflexe, pour marquer la supression de l' s: on écrivait pestrein, pestrir; mais cet accent ne doit être employé que pour désigner l' e ouvert, et cet e est fermé dans ces deux mots.] Pétrin, aûtrement huche; cofre où l' on pétrit, et où l' on serre le pain. Pétrir, c' est détremper de la farine avec de l' eau, la remuer et en faire de la pâte. Pétrir du pain, un gâteau, etc. = Pétri se dit au figuré. "Il se croit pétri d' un autre limon que le reste des hommes.
   Monstres pétris et de boue et de sang.
       Rousseau.
Il est tout au plus du style médiocre.

PETTO


PETTO (in), adv. Expression empruntée de l' Italien. Dans l' intérieur du coeur, en secret. "Le Pape a fait deux Cardinaux, et en a réservé un in petto.

PÉTULAMMENT


PÉTULAMMENT, adv. PÉTULANCE, s. f. PÉTULANT, ANTE, adj. [Pétulaman, lance, lan, lante: 1re é fer. 3e lon. excepté au 1er.] Pétulance, qualité de celui qui est pétulant, c. à. d. vif, brusque, impétueux, qui a peine à se contenir. Pétulamment, d' une manière pétulante. "Il est fort pétulant: il a beaucoup de pétulance. Il a parlé fort pétulamment, avec une grande pétulance. "Les passions les plus pétulantes sont tôt ou tard obligées de céder à la raison. Moreau.
   Rem. Mde de B... (Hist. d' Angl.) écrit pétulence, pétulent: mauvaise ortographe. = Richelet trouvait que ces mots sentaient le latin. Ils sont aujourd' hui très-français.

PETUN


PETUN, s. m. PETUNER, v. n. [Pe--teun, pétuné: 1re e muet.] Tabac. Prendre du tabac en fumée. On ne se sert de ces mots que pour plaisanter ou pour critiquer. "C' est un preneur de petun; il petune toute la journée.

PEU


PEU, adv. de quantité. C' est le contraire de beaucoup. 1°. Il régit le génitif et exige l' article indéfini: peu d' argent, peu de bois, peu d' hommes, peu de soldats; et non pas peu de l' argent, peu du bois, des hommes, des soldats, comme le disent plusieurs dans les Provinces méridionales. = 2°. Il se met devant les adjectifs qu' il modifie: peu aimable. Pour les adverbes, il précède ceux qu' il modifie, et suit ceux dont il est modifié. Peu agréablement, fort peu, bien peu, etc. = Joint aux verbes, il se met aprês le tems simples; et dans les tems composés, il se place entre l' auxiliaire et le participe: il mange peu, il a peu mangé. Que s' il est modifié par quelque aûtre adverbe, il se met indiféremment, ou devant, ou aprês le participe: il m' a fort peu couté, ou il m' a couté fort peu. = Quand il modifie des substantifs, il se met toujours aprês le verbe même dans les tems composés. "J' ai vu peu de gens qui, etc. "Il est arrivé à peu de persones ce qu' il m' arrive aujourd' hui. = 3°. Peu comme beaucoup, prend élégamment devant soi la préposition de: "Il est de beaucoup plus grand. "Il le surpasse de peu. = Comme les aûtres adverbes de quantité, assez, trop, beaucoup, il se décline en quelque sorte, et prend devant soi l' article des noms qu' il modifie. "C' est l' opinion de peu de gens; je l' ai ouï dire à peu de persones. Cela dépend de peu, de trop, d' assez, de beaucoup de circonstances, etc. = 4°. Peu s' emploie quelquefois substantivement. "Le peu que je vaux. "Il faut bien profiter du peu qui me reste. Alors, il est toujours suivi du pronom relatif, qui, que; et lorsqu' il régit un nom au singulier, le participe suivant s' acorde avec peu, et non pas avec ce nom. "Le peu d' afection qu' il m' a témoigné, et non pas témoignée. Que si le nom régi par peu, est au pluriel, le participe s' acorde avec ce nom, et non pas avec peu. "Le peu de visites que j' ai reçues, et non pas reçu. = Mais il n' est point adjectif; et l' on ne doit point dire, comme a dit Corneille:
   Ils sont peu, mais vaillans.
Et comme a dit un des Auteurs des Let. Édif.~ "Ils sont peu, sans chef, etc. Il faut dire: ils sont en petit nombre.
   Rem. * Le peuple se sert de, un peu, comme d' une particule explétive: laissez-moi un peu pâsser. Cet un peu est de trop, et même il est ridicule. = Un peu bien ne le serait pas moins aujourd' hui. On le disait beaucoup aûtrefois, et Corneille l' a souvent employé. Dans OEdipe.
   Th.   C' est pour un grand Monarque un peu bien du scrupule.
   OEd.   C' est en votre faveur être un peu bien crédule~.
On dirait aujourd' hui, un peu trop. = En certaines Provinces, on dit, un petit peu, pour un peu. = Peu ne doit point s' associer avec point; parce qu' il s' emploie sans négative, et que point ne peut s' en pâsser. Cependant de bons Auteurs les font aller de compagnie. "Il avoit peu ou point d' expérience dans les armes. D' Avr. "Elle (la Langue Italienne) a peu ou point de voyelles nazales. J. J. Rouss. "On s' intéresse peu ou point du tout à l' Auteur qu' on n' a jamais vu. Linguet. M. Targe dit mieux: on n' eut que peu ou point d' égards à leurs remontrances. Dans cette phrâse par le moyen de la conjonction que la négative afecte peu comme point. _ Mais il est une aûtre manière encôre meilleure de réformer les phrâses précédentes: c' est de séparer peu de point en deux membres de phrâse: "Il avoit peu d' expérience, ou plutôt il n' en avait point. "Elle a peu de voyelles nazales, ou, pour mieux dire, elle n' en a point, etc. = Quelque peu est vieux, "Il est nécessaire de descendre quelque peu dans le particulier, dit Mallebranche. On dirait aujourd' hui un peu plus. = "Quelque peu plus loin. Pluche.
   Un Païen, qui sentoit quelque peu le fagot.
       La Font.
Tant soit peu est plus usité, et quelque peu est un mot de Province.
   PEU, forme avec d' autres adverbes des expressions adverbiales et des conjonctions. = Peu à peu, lentement par des progrês successifs. Voy. Petit à petit, au mot Petit. = Dans peu, on sous-entend, de tems. Quelques Auteurs ont dit en peu, mais mal. "En peu, le nombre des Réfractaires fut réduit à quatre. Confér. d' Ang. "Ce comencement de navigation ressuscita en peu le comerce maritime. Raynal. = Quelques Écrivains ont dit, avant peu, qui a le même sens, mais qui n' est bon qu' avec le futur. Fréron, l' Ab. Massieu Mde B... (Hist. des Tud.) ont employé cette expression. Elle est familière à M. Linguet. = À~ peu-prês, à peu de chose prês, presque, environ. "Ils sont à peu prês du même âge: "Ces deux livres sont du même prix, à peu de chose prês. = Peu aprês, peu de tems aprês. Plusieurs disent un peu aprês. "Son grand mérite et son grand savoir l' élevèrent un peu aprês à la dignité d' Archevêque d' Avignon. Boss. "Un peu aprês le milieu du 16e siècle. Rayn. _ Un est de trop. = Un peu se dit tout seul adverbialement. "Atendez un peu. "Ayez un peu de patience, etc.
   C' est peu, conjonction, régit de devant les verbes. "C' est peu de reconaître la nécessité de mourir, l' importance même de bien mourir, si l' on n' en tire des motifs et des conséquences pour bien vivre. Fléchier. "Pour bien connoitre la beauté des ouvrages de Démosthène, c' est peu de posséder les préceptes des Rhéteurs, etc. Ann. Litt. = Il régit aussi la conjonction que, et le subjonctif. "C' est peu qu' il veuille être le premier: il voudrait être le seul.
   Pour peu que, régit aussi le subjonctif: "Pour peu que vous lui en parliez, il le fera. = Quelques-uns ont dit pour le peu que: "On en est bientôt revenu, pour le peu que l' on examine cette Nation. L' Ab. Richard.
   Car pour le peu que quelque trait saillant
   Vienne éblouïr votre débile vûe.
       Rouss.
M. de Moncrif a dit, pour un peu que, qui est encôre plus mauvais: BOSSUET ET FÉNÉLON, si peu que. "Si peu que nous entrions dans ce secret. Disc. sur l' Hist. Univ. "Philoctète étoit prompt, et si peu qu' on excitât sa vivacité, on lui faisoit dire ce qu' il avoit résolu de faire. Télém. "Si peu qu' on parût douter de ses moyens, il se hâtoit de les expliquer inconsidérément. Ibid. = Si peu que, se dit, mais comme adverbe, et non pas comme conjonction. "Vous y serez si peu, ou, aussi peu que vous voudrez. "Vous en donerez si peu qu' il vous plaira. Acad. = Aussi peu vaut mieux quand il y a comparaison. Voy. AUSSI. = * Bossuet done à pour peu que, la vertu de faire marcher le verbe avant le nominatif. "Pour peu que tarde la Prophétie. = Il emploie aussi pour peu que ce soit adverbialement. "On peut l' ignorer, sans que la Religion en soufre pour peu que ce soit. On dirait aujourd' hui, le moins du monde.

PEUPLADE


PEUPLADE, s. f. PEUPLE, s. m. PEUPLER, v. act. [Peu-plade, peu-ple, peu-plé, 2e e muet au 2d, é fer. au 3e.] Peuple, est un terme collectif. 1°. Multitude d' hommes, qui habitent un même pays et vivent sous les mêmes lois. "Le Peuple Hébreu, le Peuple Romain, etc. = 2°. Multitude d' habitans. "Il y a beaucoup de peuple dans Paris. Acad. = On dit mieux ce me semble, il y a beaucoup de monde. = 3°. Peuple, est plus usité pour signifier la partie la moins considérable d' entre les habitans d' un même pays. "Il y eut quelque émotion parmi le peuple. "Il n' y avait que du peuple à la promenade. = Pour mieux dépriser, on dit, le menu peuple, le petit peuple: un homme de la lie du peuple. = 4°. Peuple, se dit pour sujet dans les monarchies: le père du peuple. Soulager la misère du peuple. "Ce Roi est adoré de ses peuples. = Dans les Démocraties, c' est le peuple, qui est Souverain de l' État. Le Peuple Romain, les Tribuns du peuple, etc.
   Rem. Peuple, ne s' emploie au pluriel que quand on parle de plusieurs Nations, ou des Sujets d' un Roi. "Les Peuples de l' Asie. "Notre Roi a le coeur, l' afection de ses peuples. Mais lorsqu' on veut parler des individus d' une même Nation, il faut se servir au pluriel du mot d' Habitans. Je ne dissimulerai pas que de grands Écrivains donent des exemples contraires: mais je ne sais si on doit les imiter en cela. "À~ la porte du Temple est sans cesse une foule de peuples, qui viennent faire leur ofrande. Télém. "Le nombre des peuples y est (en Russie) trente-trois fois plus petit qu' en France, et en Allemagne, proportion gardée avec l' étendûe du pays. Volt. _ On dirait dans le même sens et plus régulièrement, le peuple y est trente-trois fois moins nombreux, ou, mieux encore, cet empire est trente-trois fois moins peuplé. Voy. FOULE. = Peuple, n' est pas susceptible d' être afecté par les adverbes de comparaison. "Il y eut beaucoup de peuple, qui rentra dans l' obéissance des Pasteurs légitimes. Hist. d' Angl. Dites en pareil câs, beaucoup de gens du peuple. "L' Angleterre a au moins cinq fois plus d' industrie et trois fois plus de peuple qu' elle n' en avoit au tems de la conquête. Ibid. Je voudrais dire, et elle est trois fois plus peuplée, ou bien, et la population y est trois fois plus grande. = Le P. Martin dit mieux, ce me semble, en disant, un grand peuple. "Il donoit la comunion à un grand peuple, qui se présentoit en foule au Saint Autel. Let. Édif. = Quoique peuple soit un nom collectif, on ne doit pas mettre le verbe au pluriel, comme a fait un Auteur moderne: "Le commun peuple de cette secte ne peuvent (ne peut) s' imaginer que deux hommes si célèbres aient été capables de se tromper. Miss. du Lev. Voy. COMMUN et COLLECTIF. = Peuple, se dit quelquefois d' un nombre d' hommes considérés sous certains raports, qui leur sont comuns. "Le peuple des Auteurs. "Le peuple des Spectateurs, blasé sur les ouvrages raisonables, a besoin pour être ému, de rencontrer des situations violentes, des tableaux bien douloureux, bien cruels. Mercure. = M. l' Ab. de Lille l' emploie figurément et poétiquement. Il dit, parlant des touffes des arbres:
   De loin l' oeil aime à voir tout ce peuple de frères.
On le dit, au propre, du petit poisson, qu' on met dans un étang pour le peupler. "Il y a peu de poisson dans cet étang, il y faut mettre du peuple. = Peuple, dans le sens de populace, s' emploie quelquefois adjectivement: "Ces têtes si fortes et si habiles, ces femmes si polies et si spirituelles, tous méprisent le peuple, et ils sont peuple. LA BRUYèRE. "C' est être bien peuple de s' inquiéter de ses dettes, dit ironiquement l' Ab. Coyer. "Il (Molière) ne pouvoit ignorer que parmi ceux, qui assistoient à ses pièces, le plus grand nombre étoit peuple. "La nation française était plongée dans l' ignorance, sans excepter ceux, qui croient n' être point peuple. VOLTAIRE. "Il y a quantité de gens polis, qui sont peuple par raport au raisonement. Leibnitz. = L' Acad. ne done point d' exemple de peuple en ce sens là. Bouhours trouvait l' expression un peu précieuse; et il conseille de ne pas s' en servir souvent. Elle est devenûe plus comune depuis sa remarque.
   PEUPLER, c' est 1°. Remplir d' un certain nombre d' habitans un lieu où il n' y en avait pas: peupler un pays abandoné, une île déserte. = 2°. Augmenter le nombre des habitans par la voie de la génération. "Adam et ÈVE ont peuplé toute la terre. "Les premiers hommes qui peuplèrent l' Asie, l' Europe, etc. = Il est neutre en ce sens. "Toutes les Nations ne peuplent pas également. = On le dit par extension des animaux, et activement, peupler un étang de poissons, un colombier de pigeons, un pays de gibier: peupler une garenne; et neutralement. "Il n' y a point de poisson, qui peuple autant que la carpe; point d' animaux, qui peuplent (qui multiplient) autant que les lapins.
   PEUPLADE, multitude d' habitans, qui pâssent d' un pays dans un aûtre pour le peupler. "Envoyer une peuplade dans un pays. "Les Espagnols ont fait de grandes peuplades dans les Indes.

PEUPLIER


PEUPLIER, s. m. [Peu-plié: 2e é fer.] Arbre fort haut, qui croît dans les lieux humides et marécageux. "Le peuplier blanc, le peuplier noir. "Le tremble est une espèce de peuplier.

PEUR


PEUR, s. f. PEUREUX, EûSE, adj. [Peur, monos. Peureû; reûze: 2e lon.] Crainte, frayeur, passion de l' âme, qui la porte à éviter ce qui lui parait nuisible. = Peur, frayeur, terreur. Ces trois mots ont cela de comun, qu' ils expriment un état de l' âme plus ou moins troublée par la vûe de quelque danger. Si cette vûe est vive et subite, elle caûse la peur; si elle est plus réfléchie, elle produit la frayeur. Si elle abat notre esprit, c' est la terreur. ENCYCL. Beauzée, synon. = On dit, avoir peur, grand peur, belle peur. Trembler, mourir de peur: Faire peur à quelqu' un. "Lui en faire, lui en doner la peur, etc.
   Rem. Avoir peur, régit de devant les noms et les verbes. "Il a peur de tout, de lui, etc. J' ai peur de m' engager, de m' atraper, de vous faire de la peine, etc. Avec le régime des verbes, il ne signifie que craindre. Il régit aussi comme ce verbe la conjonction que, et le subjonctif, et dans la phrâse afirmative la négative ne. "Avez-vous peur qu' il vienne; je n' ai pas peur qu' il s' en aille; j' ai peur qu' il ne me suplante. = De peur que, se met aussi avec le subjonctif, et de peur de avec l' infinitif. Le 2d se met, quand le verbe régi se raporte au sujet de la phrâse, et le 1er, quand il ne s' y raporte pas. Je l' ai fait de peur de vous fâcher; de peur que vous ne le fissiez le premier. = Quelques-uns ajoutent mal-à-propôs la négative ne devant l' infinitif, et disent: de peur de ne vous fâcher, d' autres la retranchent devant le subjonctif, de peur qu' on me contraigne. CORN. Il faut, du moins en prôse, de peur qu' on ne me contraigne.
   On dit, en style familier, avoir plus de peur que de mal.
   Je n' en eus toutefois que la peur sans le mal.
       La Font.
Et dans le même sens, en être quite pour la peur. "Il y eut une nouvelle alarme, parce que le feu couvoit sous la cendre: mais on en fut quite pour la peur. Journ. Polit. = À~ faire peur, espèce d' adjectif ou d' adverbe. "Figûre à faire peur. "Vous vous placez, sans avoir dit aux glaces, que vous êtes à faire peur. L' Ab. Coyer. "On leur a répété à chaque instant les premiers jours qu' elles étoient laides à faire peur. TH. D' ÉDUC. = Avoir peur de son ombre, être excessivement peureux. = Le Proverbe dit: on peut bien guérir du mal, mais on ne guérit pas de la peur.
   PEUREUX, qui est sujet à la peur: "Il est extrêmement peureux. "Les femmes sont naturellement peureûses.

PEUT-ÊTRE


PEUT-ÊTRE, adv. [peu-têtre: 2e ê ouv. et long, 3e e muet.] Il peut se faire que. = Il peut se placer devant ou aprês le verbe, et dans les tems composés, ou aprês l' auxiliaire, ou aprês le participe. "Peut-être le fera-t' il. Il le fera peut-être. "Il l' a peut-être fait: il l' a fait peut-être. = Quand il est à la tête de la phrâse, le pronom nominatif doit se mettre aprês le verbe; "Peut-être le troûverez-vous ocupé. Mais, au contraire, quand il est au milieu de la phrâse, il est contre l' usage de mettre le verbe avant le nominatif pronom. Plusieurs Auteurs, d' ailleurs estimables, l' ont pourtant pratiqué ainsi, mal-à-propôs, à mon avis. "Un chagrin, dont il n' étoit pas maître, et auquel peut-être sommes-nous redevables de ses ingénieuses compositions. Valincour, Él. de Boileau. Je crois qu' il falait dire, auquel peut-être nous sommes, etc. "Ils me dirent que ces barbâres avoient retenu le troisième Indien, et que peut-être l' avoient-ils (ils l' avoient) déjà massacré. Let. Édif. "Rigueur, dont nous ne chercherons pas les motifs, parce que peut-être seroit-il (il serait peut-être) trop chagrinant de les trouver. Mercure. = Quelques Écrivains font suivre peut-être de la conjonction que: "Peut-être qu' on pourroit parler ainsi, dit La Bruyère. "Peut-être que votre père y sera aussi-tôt que vous. Télém. "Peut-être qu' on y auroit désiré (dans l' Esprit de Leibnitz) un peu moins d' extraits métaphysiques. Ann. Litt. _ L' Acad. met les deux manières: peut-être viendra-t' il: peut-être qu' il viendra. = Sur ces vers du Coriolan de M. D. L. H.
   Peut-être, satisfait que ce grand coeur fléchisse
   Le peuple, s' il vous voit soumis à son pouvoir,
   Peut en votre faveur se laisser émouvoir.
On dit dans l' Ann. Litt. que peut-être, et peut ne sont pas faits pour aller ensemble. La remarque est três-juste.
   PEUT-ÊTRE, est quelquefois s. m. "Vous vous fondez sur un peut-être. ACAD. "C' est un décret dans l' esprit de Dieu... à mon égard c' est un peut-être. "Or se former d' un peut-être une règle; en faire le fondement de notre fortune éternelle, c' est une conduite qui fait pitié. La Rue.

PHAÉTON


PHAÉTON, s. m. [Faé-ton: 2e é fer.] Petite calèche à deux roûes; autrement cabriolet.

PHAISAN


PHAISAN, et ses dérivés. Voy. FAISAN.

PHALANGE


PHALANGE, s. f. [Falange: 2e lon.] C' était chez les anciens un corps de piquiers, qui combataient sur quatre, huit, douze et même seize de hauteur. _ On apelait phalangistes les soldats de la phalange. = Aujourd' hui on n' emploie phalange qu' en poésie pour signifier un bataillon d' Infanterie.

PHANTAISIE


PHANTAISIE, PHANTôME, Voy. FANTAISIE, FANTôME.

PHâRE


PHâRE, s. m. [Fâre: 1re lon. 2e e muet.] Grand fanal placé sur une haute tour, pour éclairer les vaisseaux, qui sont en mer. Acad. ou plutôt pour leur indiquer, par la clarté qu' il done, l' endroit où est la côte, où ils doivent aborder, ou qu' ils doivent éviter pendant la nuit. = Il se dit aussi de la tour, où est placé le fanal. = Aûtrefois on le disait beaucoup au figuré. Aujourd' hui il est surané dans la prôse et la haute poésie. "L' exemple de sa conversion fut comme un phâre, qui avertit les hérétiques du chemin qu' il falloit tenir pour éviter les écueils. Mascar. _ Rousseau l' a encore employé, mais dans un style demi-marotique.
   Cherchez donc vos modèles
   Chez des amis éclairés et fidèles,
   De qui le nom, l' exemple et les conseils
   Puissent servir de phâre à vos pareils.

PHARISAïQUE


PHARISAïQUE, adj. PHARISAïSME, s. m. PHARISIEN, s. m. [Fariza-ike, isme, zien: ien n' a pas le son d' ian.] Pharisien, est le nom d' une Secte parmi les Juifs. Ils afectaient de se distinguer par l' austérité des maximes, et par la sainteté extérieure de la vie. L' orgueil pharisaïque et le pharisaïsme sont pâssés en proverbe, et on les aplique aux faux dévots et aux rigoristes outrés.

PHARMACIE


PHARMACIE, s. f. PHARMACIEN, s. m. PHARMACOPÉE, s. f. [Farmaci-e, cien, kopé-e.] La Pharmacie est l' art de préparer et de composer les remèdes. Pharmacien, celui qui exerce la pharmacie. Pharmacopée, traité, qui enseigne la manière dont les remèdes doivent être préparés. "C' est un bon pharmacien: il entend bien la pharmacie. "On se tromperait bien souvent, si l' on suivait trop litéralement les anciènes Pharmacopées.
   Rem. Pharmacie et Pharmacien sont des termes plus nobles qu' Apothicairerie et Apothicaire.

PHâSE


PHâSE, s. f. [Fâze: 1re lon. 2e e muet.] Il se dit, en Astronomie, des diverses aparences de quelques Planètes, qui présentent tantôt avec plus, tantôt avec moins d' étendûe, leur partie éclairée. "Les phâses de la Lune, de Vénus.

PHÉBUS


PHÉBUS, ou PHOEBUS, s. m. [Le 1er vaut mieux: é fer. on prononce l' s finale.] Poétiquement, Apollon ou le Soleil. "Phébus l' a inspiré: le blond Phébus. = Phébus se dit en st. critiq. d' un langage, d' un discours, d' un style, guindé, trop figuré. "Tout son style est un Phébus continuel. = Parler Phébus, doner dans le Phébus, employer le phébus. L' Acad. met les trois: le plus usité, c' est le second: on peut douter que le 1er soit de l' usage actuel.

PHÉNIX


PHÉNIX, s. m. [Féniks; 1re é fer.] Oiseau fabuleux, qu' on croyait unique en son espèce, et renaître de ses cendres. = Figurément, qui est supérieur à tous ceux de son genre. "C' est le Phénix des beaux esprits.
   Vous êtes le phénix des hôtes de ces bois.
Dit le Renard au Corbeau. = Il n' est que du st. fam. et le plus souvent, du st. plaisant, ou même moqueur.

PHÉNOMèNE


PHÉNOMèNE, s. m. [Fénomène: 1re é fer. 3e è moy. 4e e muet.] Au propre, il se dit de tout ce qui paraît de nouveau dans l' air, dans le ciel. "Les Comètes, les Aurôres Boréales sont des phénomènes. = Par extension, on le dit des diférens éfets qu' on remarque dans la natûre. "L' électricité est un admirable phénomène. "Le Magnétisme animal serait un singulier phénomène, s' il avait quelque chose de réel. = Fig. Ce qui surprend par sa nouveauté ou sa râreté. "C' est un phénomène que de vous voir ici. "Un Provençal, qui a entrepris de doner des remarques sur la Langue, a paru à plusieurs un phénomène; et ce phénomène a paru encore plus surprenant à ceux qui pensent qu' il a réussi.

PHILANTHROPE


PHILANTHROPE, s. m. PHILANTHROPIE, s. f. [Filantrope, pî-e; 2e lon. dern. e muet. l' Acad. écrit Philantrope, etc.] Le Philantrope est l' ami des hommes. La philantropie est le caractère du Philantrope. = Ces deux mots ne sont pas du discours ordinaire. "L"Émile (de Rousseau) est un assemblage continuel.... de raison et d' extravagances, d' esprit et de puérilité, de philantropie et de causticité. Sabat. Trois Siècles, etc.

PHILOLOGIE


PHILOLOGIE, s. f. PHILOLOGIQUE, adj. PHILOLOGUE, s. m. [Filologie, gike, Filologhe.] On apèle Philologie, l' érudition qui embrasse diverses parties des Belles-Lettres, particulièrement la Critique. Philologique, qui concerne la philologie. Philologue, érudit, qui s' atache à la philologie.

PHILOSOPHALE


PHILOSOPHALE, adject. fém. [Filozo--fale.] Il ne se dit qu' avec pierre; on apèle pierre philosophale, la prétendûe transmutation des métaux. "Il s' est ruiné à chercher la pierre philosophale. = On dit proverb. d' une chose dificile à trouver, que c' est la pierre philosophale, et d' une chose facile, que ce n' est pas la pierre philosophale: d' un homme dont on ignore les ressources, et qui fait une grande dépense: il faut qu' il ait trouvé la pierre philosophale; et de celui qui a l' esprit fort borné, qu' il ne trouvera pas, ou qu' il n' a pas trouvé la pierre philosophale; comme on dit, qu' il n' a pas inventé l' Algèbre ou la poûdre.

PHILOSOPHâILLE


*PHILOSOPHâILLE, s. f. [Filozofâ--glie: 4e lon. Mouillez les ll. dern. e muet.] Terme de mépris, employé depuis peu en parlant de la tourbe des prétendus Philosophes modernes. "C' est ici un de ces articles, (la Tolérance) sur lequel M. de Voltaire et toute la Philosophâille du jour ne cessent de dire et d' écrire jusqu' à la satiété, des mensonges. Ann. Litt. "Cette erreur se prépétûe par l' opiniâtreté séditieuse, ignorante et mensongêre de notre Philosophâille. LINGUET.

PHILOSOPHE


PHILOSOPHE, s. m. PHILOSOPHER, v. n. PHILOSOPHIE. s. f. PHILOSOPHIQUE, adj. PHILOSOPHIQUEMENT, adv. [Filozofe, fé, fi-e, fike, fike-man: 4e e muet au 1er, é fer. au 2d, lon. au 3e: 5e e muet aux 2 dern.] La Philosophie, en général, est la Science qui consiste à conaître les chôses par leurs causes et leurs éfets. Suivant son étymologie, qui est grecque, ce mot signifie l' amour de la sagesse. "Savoir, étudier, enseigner la Philosophie. "La Philosophie comprend la Logique, la Métaphysique, la Morale, la Physique. = On prend le mot de Philosophie en particulier, tantôt pour la Métaphysique, tantôt pour la Morale. = On l' emploie souvent aussi pour signifier une certaine élévation et fermeté d' esprit par laquelle on se met au-dessus des accidens de la vie et des préjugés, des fausses opinions du monde. "On a souvent démontré que la Religion est la vraie Philosophie; et que la Philosophie humaine toute seule est une faible ressource dans les grandes adversités.
   PHILOSOPHIE, en termes d' Imprimerie, est un caractère qui est entre le Cicéro et le Petit-Romain.
   PHILOSOPHE est 1°. celui qui s' aplique à la Philosophie. = 2°. Homme sage, qui se met au-dessus de l' ambition, de la cupidité, et mène une vie tranquile et retirée. = 3°. Abusivement, incrédule, libertin d' esprit, qui, sous prétexte de s' afranchir des préjugés, se met au-dessus des devoirs de la Religion et des bienséances, s' élève même, quand il le peut sans danger, contre les lois divines et humaines et contre le Gouvernement. Cette espèce de Philosophes s' est extrêmement acrûe. = 4°. Ècolier qui étudie en Philosophie. = Il s' emploie quelquefois adjectivement. "Des âmes Philosophes: le peuple philosophe. L' Abé Sabat. de Castres. "Un ton philosophe, sans pédanterie. J. J. Rousseau. Ce mot est aujourd' hui presque toujours pris en mauvaise part. Marin.
   PHILOSOPHER signifie tantôt traiter des matières de philosophie, tantôt raisoner conformément aux principes de la Philosophie; tantôt parler, converser sur diverses choses de Morale et de Physique; tantôt raisoner trop subtilement sur quelque chôse. "Il ne faut pas tant philosopher.
   PHILOSOPHIQUE, qui apartient à la Philosophie. Raisonement, discours philosophique. = Philosophiquement, d' une manière philosophique: Parler d' une chôse philosophiquement. = En philosophe: "Vivre philosophiquement.

PHILOSOPHERIE


*PHILOSOPHERIE, s. f. PHILOSOPHESQUE, adj. PHILOSOPHISER, v. n. PHILOSOPHISME, s. m. PHILOSOPHISTE, s. m. Mots nouveaux, et qui comencent à s' acréditer. L' indignation, qu' ont excitée dans les bons esprits les horribles écarts de certains faux Philosophes modernes, a fait inventer ces mots assez singuliers. Ils ne sont bons que dans le st. critiq. et moqueur, ou polémique et mordant. = Philosophesque: "La tourbe philosophesque. J. J. Rousseau et Linguet. = Ce mot est dans l' analogie de la langue, burlesque, grotesque, pédantesque. = Philosopherie, se dit en plaisantant pour philosophie. "Cette philosopherie començait alors à n' être plus si fort à la mode. Linguet. M. l' Abé de Fontenai s' est aussi servi de ce mot. = Philosophiser, a le même sens que philosopher, pris en mauvaise part. "Cette Secte peuploit tous les emplois de parvenus philosophisans. Ling. = Philosophiste et Philosophisme, ont été heureusement inventés pour caractériser les faux Philosophes et la faûsse philosophie. Le terme de philosophe et de philosophie ne seront plus si souvent profanés. "Voilà par quels secrets le philosophisme avoit acquis son ascendant, et par quels moyens il le conservoit. Ling. "L' Anglois (Young) laisse sur la terre ces Dissertateurs philosophistes, et prend son vol dans les cieux. Ann. Litt. = Ces mots ont été employés par plusieurs aûtres Écrivains.

PHILTRE


PHILTRE: voy. FILTRE.

PHIOLE


PHIOLE: voy. FIOLE.

PHISIQUE


PHISIQUE: voy. PHYSIQUE.

PHLÉBOTOMISER


PHLÉBOTOMISER, v. n. [Flébotomizé: 1re et dern. é fer.] Saigner. Il ne se dit plus qu' en plaisantant et en se moquant.
   Bessière vient: on le phlébotomise.
       Rousseau.

PHOEBUS


PHOEBUS, PHOENIX. Trévoux. Voyez, PHÉBUS, PHÉNIX.

PHOSPHôRE


PHOSPHôRE, s. m. [Fosfôre; 2e long. 3e e muet.] Substance qui a la propriété de luire comme du feu. Il y a des phosphôres naturels; il y en a d' artificiels. "Le ver luisant est un phosphôre naturel.

PHRâSE


PHRâSE, s. f. *PHRASÉ, adj. m. [Frâze, Frazé: 1re lon. au 1er, 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Phrâse est la réunion de plusieurs mots, qui forment un sens complet, comme: L' étude forme le coeur et l' esprit. = La période est l' assemblage de plusieurs phrâses tellement liées, qu' elles dépendent l' une de l' autre. Il y a des périodes en vers comme en prôse.
   Autant qu' il faut de soins, d' égards et de prudence
   Pour ne pas diffamer l' honeur et l' inocence,
   Autant il faut d' ardeur, d' inflexibilité,
   Pour déférer un traître à la société.       Gress.
Dans les phrâses et les périodes, il faut remarquer les expressions incidentes. On apèle ainsi les expressions, qui servent à déveloper quelque partie de la phrâse, à doner plus de force et de nombre au discours. Exemple: "Nous ne devons jamais, en quelque circonstance que nous nous trouvions, agir contre le témoignage de notre conscience. Wailli.
   On dit proverbialement, qu' il faut un peu varier la phrâse; c. à. d. qu' il ne faut pas toujours vivre de la même manière. = Ne parler que par phrâses, avoir une façon de parler afectée. "C' est un diseur, un faiseur de phrâses. Quelques Auteurs ont~ dit phrasier, en ce sens.
   On y proscrira l' étalage
   Des phrasiers, des rhéteurs boufis.
       Gresset.
"Le phrasier, le sec, l' amphigourique Sénèque. Linguet. _ M. Mallet du Pan dit, phraseur. Si l' usage admet l' un des deux, il est probable que ce sera le premier. = Phrasé, est un mot nouveau. Il se dit du style du discours, de vers, dont les phrâses sont liées les unes avec les aûtres. Il se dit par oposition au style coupé. "Un style phrasé, de l' harmonie et des tableaux pleins de force. L' Abé de Fontenai. "Les vers (de M. de Maisonneuve) ne se traînent pas de deux en deux: ils sont phrasés avec harmonie. Ann. Litt.

PHTHISIE


PHTHISIE, s. f. PHTHISIQUE, adj. [Fti--zi-e, zique.] Ils expriment une maladie, qui consiste dans une grande maigreur et consomption du corps. On l' apèle aussi marasme et consomption. = Phthisique, qui est malade de phthisie. Il n' y a guère que les Médecins qui se servent de ce mot. Dans le langage comun, on dit étique.

PHYSICIEN


PHYSICIEN, s. m. PHYSIQUE, subst. et adj. [Fizi-cien, Fizike. = Richelet écrit phisique, phisicien; cette ortographe n' a pas pris.] Physique est la Science qui a pour objet les choses naturelles. "Physique générale ou particulière. Physique Expérimentale. Leçons, Professeur de Physique: Dictionaire de Physique par le P. Paulian, Jésuite. = Il se dit dans les Collèges, de la Classe où l' on enseigne la Physique. "Il est, il va en Physique: il fait sa Physique. = Adj. Il signifie naturel. "Mouvement physique. _ Impossibilité, certitude physique, se disent par oposition à impossibilité, certitude morale. = Physiquement, d' une manière réelle et physique.
   PHYSICIEN; qui sait la Physique. "Bon, grand, habile Physicien.

PHISIOLOGIE


PHISIOLOGIE, s. f. [Fizi-ologi-e.] Cette partie de la Médecine qui traite des parties du corps humain, dans l' état de santé.

PHYSIONOMIE


PHYSIONOMIE, s. f. PHYSIONOMISTE, s. m. [Fi-zio-nomi-e, miste.] Suivant Ménage, nous abusons du mot physionomie, en disant d' une persone, qu' elle a une bone ou une mauvaise physionomie; parce que ce mot signifie la Science de juger de la persone par le visage, et non pas le visage même. Cependant l' usage a prévalu de doner à ce terme ces deux significations. = On dit même phisionomie tout seul et sans adjectif. "Cette femme a de la phisionomie: elle a moins de beauté que de phisionomie. = Au figuré, c' est un néologisme assez heureux. "L' art du dialogue est banni de notre Scène, depuis que nos Auteurs nous offrent des Hérôs manqués, sans physionomie et sans caractère. Ann. Lit. "L' âme, comme le corps a sa physionomie, dont il faut exprimer les divers traits, et l' entreprise n' est pas aisée, sur-tout lorsqu' il s' agit de peindre une âme aussi céleste que le fut celle de Thérèse. L' Abé Du-Serre-Figon.
   PHYSIONOMISTE, celui qui prétend juger par l' inspection du visage, quelles sont les inclinations d' une persone. "Grand, bon physionomiste.
   Rem. On écrivait aûtrefois physiognomie, et Le Gendre emploie encore cette ortographe, en parlant de cette science oculte, qui, sur les traits du visage, prétend non seulement pouvoir juger quelles sont les inclinations d' une persone, mais, prédire ce qui lui doit arriver d' heureux ou de malheureux.