Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI


O.



O


O, s. m. Un grand O, un petit o, un O majuscule. = C' est la quinzième lettre de l' Alphabet, et la quatrième des voyèles. = Dans la prononciation, il y a deux sortes d' o; l' un fermé et bref, l' aûtre ouvert et long; mais dans l' ortographe, il n' y a pas de caractère pour les distinguer. = Quand l' O comence le mot, il est fermé et bref, excepté dans ôs, ôser, ôsier, ôter, où il est ouvert et long, aussi bien que dans hôte quoique dans hotel et hotellerie il soit bref. = Pour faire bien conaître aux étrangers la prononciation de notre O, on peut citer aux Allemands leur mot bogen, aux Anglais so, aux Italiens morire, aux Espagnols, obrar. = Les Allemands donent à l' ô, marqué d' un accent circonflexe, le son d' un e féminin (ou muet); mais cet accent ne sert, en français, qu' à rendre l' o plus long (L. T.) et plus ouvert. = * Autrefois on prononçait l' o en ou dans beaucoup de mots: on disait Roume, houme, lioune, arrouser, choûse, coûte, froumage, maletoute, pouteaux, etc. au lieu de Rome, homme, lione, arroser, chôse, côte, fromage, maltote, poteaux, etc.

Ô


Ô, Interjection. Elle sert devant le vocatif, et dans les exclamations. Ô siècle pervers! ô fausse sagesse! ô Philosophie impûre et ténébreûse! "Ô tems! ô moeurs! ô mon Dieu! etc.

OBE


OBE, finale, dont la pénultième est longue dans glôbe et lôbe, et l' ô est ouvert: ailleurs il est bref et fermé.

OBÉDIENCE


OBÉDIENCE, s. f. [Obédi-ance: 1re é fer. 3e lon. 4e. e muet.] Il s' est dit autrefois pour obéïssance. = Il n' est resté que chez les Religieux, pour signifier l' ordre ou le congé que done un supérieur pour pâsser d' un Couvent à l' aûtre; et dans ces deux phrâses, Ambassade d' obédience, celle qui se fait au Pape de la part d' un souverain pour l' assurer de son obéissance filiale; et pays d' obédience, où le Pape a une Juridiction plus étendûe que dans les aûtres. "La Bretagne est un pays d' obédience. Acad.

OBÉDIENCIER


OBÉDIENCIER, s. m. [Obédi-an-cié: 2e et dern. é fer. 4e. lon.] Religieux, qui dessert un bénéfice, dont il n' est pas titulaire.

OBÉïR


OBÉïR, v. n. OBÉïSSANCE, s. f. OBÉïSSANT, ANTE, adj. [Obé-i-, i-sance, san, sante: 2e é fer. 4e lon. aux 3 derniers.] Obéïr, c' est se soumettre aux ordres de... et les exécuter. Obéïssance, action de celui qui obéït. Obéïssant, qui obéït. "Obéïr à Dieu, aux Lois, au Prince. "Se faire obéïr. Fig. "Il faut que les passions obéïssent à la raison. "Promte, parfaite, entière obéïssance. Rendre obéïssance à, etc. "Fils obeïssant: fille obéïssante.
   I. Rem. 1°. Obéïr est le seul verbe qui, n' ayant pas de régime simple, (n' étant pas actif) est pourtant employé au passif. "Je veux être obéï, qu' on m' obéïsse. "Vous serez obéï; on vous obéïra. "Vous serez obéïe, Madame. Marm. = 2°. Obéïr signifie aussi être sujet de... En ce sens, il ne se dit point des persones mêmes, prises distributivement; mais seulement quand elles sont prises collectivement. "Les Provinces qui obéïssent au Roi. "Que de peuples obeïssaient à l' Empire romain! = 3°. Obéïr se dit figurément, des chôses. Céder, plier. "Ce fer obéït sous le marteau. "Il obéït sans se rompre, sans se câsser. = 4°. On dit aussi, d' un cheval, qu' il obéït bien à la main, à l' éperon.
   II. Obéïssance n' a point de pluriel. On doit dire, j' irai vous assurer de mon obéïssance, et non pas de mes obéïssances, comme disent encôre quelques persones. Vaugelas traite cette locution de gasconisme. _ Le singulier même n' est guère usité en ce sens: on dit plutôt, de mon respect, et encore mieux, de mes respects. CORN. L. T. = Obéïssance a un sens actif, et non pas passif; il se dit de celui qui obéït, et non pas de celui à qui l' on obéït. Il ne faut excepter que cette phrâse, consacrée par l' usage, être, vivre, ou se ranger sous l' obéïssance d' un Prince, où obéïssance a le sens d' autorité.
   Le Proverbe dit: obéïssance vaut mieux que sacrifice; c' est une sentence de l' Écritûre: melior est obedientia quàm victim‘. _ Voiture fait allusion à ce Proverbe. Il faut obéir et croire que ce qu' on nous commande est le meilleur. "On me doit savoir gré pourtant de cette soumission, laquelle, ce me semble, est, tout à la fois, obeïssance et sacrifice.
   III. Obéïssant serviteur est une formule de politesse. = Obéïssant, comme obéïr, se dit, figurément, des chôses inanimées. "Du cuir, du bois obéïssant. Voy. OBÉïR, Rem. I. n°. 3°.

OBÉLISQUE


OBÉLISQUE, s. m. [Obéliske: 2e é fer. dernier e muet.] Pyramide étroite et longue. "Obélisque de pierre, de marbre, de granit.

OBÉRER


OBÉRER, v. act. [Obéré: 2 é fermés.] Endetter. "Il a fort obéré sa maison. = Il est sur-tout usité au participe. "Homme fort obéré. "État obéré. "Famille, succession obérée. = Quoiqu' endetté soit d' un usage plus commun qu' obéré, cependant La Touche a tort de dire, que celui-ci s' emploie rârement dans le discours ordinaire, et qu' on ne s' en sert guère qu' en matière de procês. L' Acad. n' en distingue point l' usage.

OBÉSITÉ


OBÉSITÉ, s. f. [Obézité: 2e et dern. é fermés~.] Il ne se dit que par les Médecins. Excês d' embonpoint.

OBJECTER


OBJECTER, v. act. OBJECTION, s. f. [Ob-jèkté, jèk-cion, en vers, ci-on: 2e è moy.] Objècter, c' est faire une objèction, c. à. d. oposer une dificulté à une proposition, à un raisonement: "On lui a fait une objection, on lui a objècté une dificulté à laquelle il n' a pas pu répondre. _ Et, neutralement: "On lui objecta qu' il avoit été repris de Justice.
   Rem. Un Auteur moderne dit des chôses qu' elles font objection contre, expression, qui me parait nouvelle, et avoir besoin du sceau de l' usage. "Ces faits sont vrais, mais je ne crois pas qu' ils puissent faire objection contre l' usage des conducteurs. Barbier de Tinan. = Sans objection, ou sans objections, expression adverbiale, familière à l' Ab. Prévot. Sans peine, sans dificulté. "Ayant demandé deux Pilotes, il les obtint sans objections. Hist. des Voy. Cela a tout l' air d' un anglicisme.

OBJèT


OBJèT, s. m. [Ob-jè: 2e è moyen.] 1°. Ce qui s' ofre à la vûe. "Objèt agréable ou horrible, vilain objèt~. = 2°. Ce qui émeut l' âme. "Le vrai est l' objèt de l' entendement et le bien de la volonté. = 3°. Matière d' une science, d' un art. "Chaque science a son objèt. "Le corps naturel est l' objèt de la Physique, etc. = 4°. Sujet d' une passion, d' une action. Objèt de pitié, de crainte, d' afliction. Être l' objèt de la râillerie, de la calomnie. "Lorsqu' on afecte de s' écarter, en matière de Religion, de la façon de penser des aûtres hommes, loin de pouvoir leur être agréable, on leur devient un objèt d' horreur. Marin. L' Hom. Aimable. = 5°. But, fin, qu' on se propose. "La gloire est son objèt: il n' a pour objèt que l' intérêt.

OBIT


OBIT, s. m. OBITUAIRE, adj. et subst. [Obi, tu-ère: 3e è moy. et long au 2d.] Obit est un service fondé pour le repôs de l' âme d' un mort. "Fonder, dire, chanter un obit. = Registre obituaire, qu' on tient dans une Église des obits, qui ont été fondés. = Obituaire, s. m. Celui qui est pourvu en Cour de Rome d' un bénéfice vacant par mort; per obitum.

OBLAT


OBLAT, s. m. OBLATION, s. fém. [Obla, blacion.] Le premier, se dit de celui qui est ofert; le second, de l' action d' ofrir. Mais l' emploi d' oblat est restreint à signifier un soldat invalide, qui était autrefois logé, nourri et entretenu dans une Abbaye ou un Prieuré de nomination royale. = Oblation ne se dit que de l' ofrande faite à Dieu.

OBLIGATION


OBLIGATION, s. f. OBLIGER, v. act. [Obliga-cion, obligé.] Obligation, est 1°. l' engagement qu' impôse le devoir. "Satisfaire aux obligations de son état. "Remplir ses obligations. = 2°. Celui qui fait naitre la reconnaissance. "Il vous a obligation de la vie. "Après tout ce que j' ai fait pour lui, il prétend ne m' avoir aucune obligation. = 3°. Acte public, par lequel on s' oblige de payer une certaine somme dans un tel tems. "Faire une obligation de mille écus, etc.
   Rem. Quand il signifie devoir, il n' a de pluriel que quand il est employé sans régime. "Aprenez vos obligations. Avec le régime de la prép. de et de l' infinitif, il ne s' emploie qu' au singulier. "Je ressens comme je dois, dit Voiture, les solides obligations que j' ai d' être, etc. On dirait aujourd'hui, la solide obligation. Aûtrefois on aimait beaucoup les pluriels. = * Être dans l' obligation de faire est une façon de parler qui ne vaut rien, dit La Touche: on doit dire, être obligé de faire. M. Marin pense qu' elle est reçue, et très-en usage. = D' Avrigny dit, avoir obligation à, sans article. "La République (de Venise) céda aux prières d' Alexandre VII, à qui elle avoit obligation, pour les secours qu' il lui avoit donnés contre les Turcs. Je douterais de la bonté de cette expression. On dit, lorsque obligation s' emploie sans régime, avoir de grandes obligations. Quand il régit la prépos. de, on dit avoir obligation sans article. "Il vous a obligation de la vie. "Je vous en aurai obligation. "Selon M. Marin, on dit, avoir obligation sans article, même quand obligation est sans régime.
   OBLIGER, c' est 1°. Engager par un acte. "Son contrat l' oblige à cela: Il s' est obligé pardevant Notaire, solidairement, par corps, etc. Il a obligé tous ses biens. = 2°. Imposer obligation. "Votre devoir vous oblige à cela. Obliger à restitution, à restituer. = 3°. Rendre service. "Il oblige de bone grâce. Vous m' obligerez infiniment. "Je vous serai extrêmement obligé. "Il n' est point de vertus qui soient étrangères à un galant homme; mais parmi les vertus, il y en a qui lui conviennent particulièrement. De ce nombre est le penchant à obliger. Marin, l' Homme Aimable. = 4°. Obliger un aprenti, l' engager chez un maître.
   REM. Obliger a deux régimes des verbes, de et à. "La nécessité nous oblige à bien faire. "Les Princes sont obligés de révérer la Religion. L' un et l' aûtre est bon, et il faut consulter l' oreille pour le choix. Avec le passif, de est le meilleur: avec le pronom personel, à est préférable: "Il est obligé de le faire: il s' oblige à le faire. _ Mais quel que soit le régime qu' on préfère, il faut s' y tenir: les employer tous deux dans la même phrâse, ne fait pas un bon éfet. "Il les assure qu' il ne faut pas craindre que ce second mariage l' oblige à maltraiter sa première femme, ou même de se retirer de sa compagnie. Bossuet. Il falait, de maltraiter et de se retirer; ou bien, à maltraiter et à se retirer. "Ils avoient obligé les Médecins à ne s' atacher qu' à une espèce de maladie, et d' en faire l' unique objet de leur étude. Orig. des Lois. Il falait, à en faire, etc. ou, comme à en forme une cacophonie et un hiatus désagréable, il valait mieux dire: ils avaient obligé les Médecins de ne s' attacher, etc. et d' en faire, etc. = Se sentir obligé, se dit avec la seule préposition de pour régime de la chôse. "Je me sens infiniment obligé de vos bontés: être obligé régit le datif pour 2d régime de la persone, ou de ce qui en tient lieu. "Il ne fut obligé de son salut qu' à la fuite. "Je vous suis obligé de vos soins.

OBLIQUE


OBLIQUE, adj. OBLIQUEMENT, adv. OBLIQUITÉ, s. f. [Oblike, keman, kité ou kuité. Plusieurs préfèrent la dernière manière de prononcer.] Oblique, 1°. au propre, qui est de biais. Ligne oblique. _ Au figuré, détourné, frauduleux. Moyens, voies obliques. = 2°. Indirect. Louange oblique. = 3°. En Gramaire, câs obliques; tous les câs hors du nominatif. = Oblique suit ou précède. "Voies obliques.
   J' ignôre de tout art les obliques détours.
       Gresset.
  OBLIQUEMENT, de biais. "Le zodiaque coupe obliquement l' équateur. = Frauduleûsement. "Il va toujours obliquement à ses fins. = Indirectement. "Louer, blâmer, désigner obliquement.
   OBLIQUITÉ, n' est guère en usage qu' en Mathématique et en Astronomie: l' obliquité d' une ligne; l' obliquité de l' écliptique. = Massillon l' emploie au figuré, et qui pis est, l' aplique aux persones; deux chôses qui ne sont guère conformes à l' usage. "C' est presque toujours notre propre obliquité, qui nous instuit à la défiance. _ On dirait tout au plus, l' obliquité de nos vûes, de nos intentions.

OBLONG


OBLONG, ONGUE, adj. [Ob-lon; lon--ghe: 2e lon.] Qui est beaucoup plus long que large. "Jardin oblong; figûre oblongue.

OBMETTRE


OBMETTRE. Voyez OMETTRE.

OBOLE


OBOLE, s. f. 1°. Aûtrefois três-petite monoie de cuivre, valant la moitié d' un denier tournois. = On dit encôre, proverb. je n' en donerais pas une obole. = 2°. Petit poids, qui pèse douze grains.

OBOMBRER


OBOMBRER, v. act. Cacher, couvrir. L' Acad. le met sans exemple et sans remarque. Il est vieux et n' est bon que pour le burlesque, ou le jargon des petits-maîtres.

OBREPTICE


OBREPTICE. Voyez SUBREPTICE.

OBSCèNE


OBSCèNE, adj. OBSCÉNITÉ, s. f. [L' s n' est là que pour l' étymologie: obcène, cé--nité. 2e è moy. au 1er, é fer. au 2d.] M. Andry dit que ces mots ne sont pas généralement reçus dans la langue, quoiqu' ils expriment quelque chôse qu' impur, impudique, sale, n' expriment pas assez bien. "Danses, chansons obscènes: Comédie pleine d' obscénités. = Ces mots sont aprouvés par l' Acad. L. T. et ils sont aujourd'hui généralement reçus.

OBSCUR


OBSCUR, ÛRE, adj. OBSCURÉMENT, adv. OBSCURITÉ, s. f. [Obs-kur, kûre, kuréman, kurité: 2e lon. au 2e, 3e é fer. au 3e.] Obscur, est 1°. sombre, qui n' est pas éclairé. "Lieu, antre obscur; chambre, Église, nuit, prison obscûre. = Il fait obscur; l' air est obscur. "Il fait obscur en cet endroit; on n' y vois pas bien clair. = 2°. Qui est moins clair, moins vif. "Couleur obscûre; bleu obscur. = 3°. Figurém. Qui n' est pas bien clair, bien intelligible. "Discours, livre, passage, terme obscur. "La glôse est plus obscûre que le texte. _ On le dit aussi des Auteurs, des oracles. = 4°. Peu conu. "Vie, naissance obscûre. = Cet adjectif suit ou précède au choix de l' Écrivain, guidé par l' oreille et le goût:
   Heureux qui, satisfait de son humble fortune,
   Vit dans l' état obscur, où les Dieux l' ont placé.
       Racine.
"C' est une erreur que de penser qu' une obscûre naissance vous avilisse. Massill.
   Voudrois-je de la terre, inutile fardeau,
   Attendre chez mon Pére une obscure vieillesse.
       Racine.
Rem. Comme on dit, il est clair que, etc. Pluche a cru pouvoir dire, il n' est pas obscur que, etc. Mais l' analogie trompe souvent: la première expression est admise par l' usage; l' aûtre non. "Il n' est pas obscur que le labourage doit tout atendre de l' Être supérieur, etc.
   OBSCURÉMENT, avec obscurité. Il se dit dans le propre: "On ne voyoit les objets qu' obscurément; et dans le figuré: "Nous ne voyons qu' obscurément les chôses de la Foi: "Cet homme a toujours vécu obscurément.
   REM. Obscurément prend l' accent aigu sur l' é, quoique formé du fém. Obscûre, dont l' e est muet. Ainsi le veut l' usage.
   OBSCURITÉ: 1°. Privation de la lumière. "Grande, profonde obscurité. "L' obscurité de la nuit. = 2°. Fig. L' obscurité des tems, de l' avenir. = L' obscurité des oracles. Discours plein d' obscurité. = 3°. Vie cachée. "Demeurer, vivre dans l' obscurité. J' ai toujours préféré l' obscurité~ à l' éclat. = 4°. Bassesse. "L' obscurité de sa naissance, de sa famille, etc. = 5°. Au pluriel; chôses obscûres.
   Combien d' obscurités tout-à-coup éclaircies.
       L. Racine.
= Voy. TÉNèBRES.

OBSCURCIR


OBSCURCIR, v. act. OBSCURCISSEMENT, s. m. [Obs-kurci, ciceman: 4e e muet au 2d.] Obscurcir; rendre obscur. "Les nuages ont obscurci le jour. "D' épaisses vapeurs obscurcissaient l' air. = S' obscurcir, devenir obscur. "Le Soleil s' obscurcit. "La vûe s' obscurcit dans la vieillesse. = Fig. "Les passions obscurcissent l' entendement. "Quand la raison vient à s' obscurcir, les mauvais penchans prènent encôre plus d' empire. = Voy. ÉCLIPSER.
   OBSCURCISSEMENT, afaiblissement de lumière. "L' obscurcissement du Soleil, de la vûe. = Fig. "L' obscurcissement de la raison. "Sa gloire en reçut un grand obscurcissement.

OBSCURÉMENT


OBSCURÉMENT, OBSCURITÉ, Voy. OBSCUR.

OBSÉDER


OBSÉDER, v. act. [Ob~-sédé: 2 é fermés devant l' e muet, le 1er e se change en è moy. Il l' obsède, elle l' obsèdera.] Être assidu auprês de quelqu' un, pour se rendre maître de son esprit, et quelquefois pour empêcher que d' aûtres ne l' aprochent. On voit par cette définition qu' il se prend en mauvaise part. "Ses héritiers l' obsèdent. "Il est obsédé par sa femme, par sa gouvernante. = Au passif, il régit aussi l' ablatif. "Ces pestes de cour, dont les mauvais Princes sont ordinairement obsédés. ANON. = Il se dit aussi du démon, lorsque, par la permission de Dieu, il tourmente une persone. "Il est obsédé par le Démon.

OBSèQUES


OBSèQUES, s. f. pl. [Ob-sèke: 2e è moy. 3e e muet.] Funérailles pompeûses. "Faire les obsèques; assister aux obsèques. = La Touche dit, au comencement du siècle, que ce mot paraissoit vieux à quelques persones, qui préféroient celui de funérailles; que cependant les bons Auteurs s' en servoient quelquefois, et qu' il pouvoit trouver place dans le style relevé. Il ajoute que l' Acad. ne le condamnoit pas du tout. = On continûe à le dire dans tous les styles. = Rollin ou son Imprimeur l' a fait masc. "Des obsèques magnifiques célébrés après sa mort. Il faut, célébrées. Voy. FUNÉRAILLES.

OBSÉQUIEUX


*OBSÉQUIEUX, adj. Mot forgé par J. J. Rouss. ou renouvelé de l' ancien langage. "Il se moque, quand il prétend qu' offrir une satisfaction très-obséquieuse et très-raisonable à ceux, qui se plaignent, quoique à tort, c' est leur faire la loi.

OBSERVABLE


*OBSERVABLE, adj. Qui peut être observé. "Des acroissemens observables. DE LUC. Ce mot est peu usité. Leibnitz l' avait employé. "Un tel mouvement ne produiroit aucun changement observable.

OBSERVANCE


OBSERVANCE, s. f. OBSERVATEUR, TRICE, subst. m. et f. OBSERVATION, s. f. [Ob-sêrvance, va-teur, vatrice, va-cion, en vers ci-on: 2e ê ouv. 3e lon. au 1er.] Il ne faut pas confondre observance et observation: le 1er signifie proprement, règle, statut, coutume: les observances religieuses; les observances de l' anciène Loi; le 2d dit, l' action d' observer. "L' observation des règles et des précèptes de l' art. Cependant, dans les matières de piété et de religion, plusieurs Auteurs disent observance pour observation: l' observance des comandemens de Dieu; l' observance des règles du Monastère: mais hors de là il ne faut pas s' en servir. BOUH. _ L' Acad. ne dit observance que de la règle d' un ordre religieux, et des pratiques et cérémonies de l' anciène Loi: l' observance de la Règle. Tiers-Ordre de S. François de l' étroite observance: "Les observances légales.
   OBSERVATION, a deux aûtres significations. 1°. Remarques sur les phénomènes de la Natûre: "il a fait de belles observations. = 2°. Notes sur les écrits de quelque Auteur, ou sur quelque art ou science. "Observations sur Pline, etc. "Observations gramaticales. = On apèle, Armée d' observation, une armée qui coûvre un siège, et observe les énemis, pendant que l' aûtre ataque la place.
   OBSERVATEUR, TRICE; 1°. Celui, celle, qui observe, qui acomplit ce qui lui est prescrit par quelque loi. "Fidèle observateur ou observatrice de la Loi de Dieu, de la Règle. = 2°. Celui, qui observe les phénomènes de la Natûre. Il se dit ou avec la prép. de: "Atentif observateur de la natûre, du mouvement des cieux; ou sans régime. "C' est un excellent observateur. = En ce sens, il ne se dit qu' au masculin. = 3°. Qui observe la conduite des aûtres pour la censurer. Le fameux livre anglais conu sous le nom de Spectateur aurait dû être apelé en français l' Observateur. = Dans cette acception, on peut le dire au féminin. "Combien de scandales publics ne retient pas la crainte de ces sévères observatrices. J. J. Rouss. = 4°. Dans le style moqueur ou critique, Auteur de Remarques, d' Observations. "Où l' Observateur a t' il pris cette opinion? "L' Observateur décide bien hardiment. 5°. Il s' emploie aussi adjectivement: esprit observateur,

OBSERVATOIRE


OBSERVATOIRE, s. m. [Ob-sêrva--toâ-re: 2e ê ouv. 3e lon. 4e e muet.] Édifice destiné aux observations astronomiques. "L' Observatoire de Paris, de Marseille. "Il est logé à l' Observatoire. "Mémoires redigés à l' Observatoire de Marseille, par les PP. JJ.

OBSERVER


OBSERVER, v. act. [Obsêrvé: 2e ê ouv. 3e é fer.] 1°. Acomplir ce qui est prescrit par quelque loi: "Observer les Comandemens de Dieu; sa règle; le silence, le jeûne, les statuts, etc. "Convaincu des principes de sa Religion, il en observera exactement les préceptes. On est rarement honnête homme sans cela, et un homme aimable doit être honnête homme. MARIN. L' Homme Aimable. = 2°. Considérer avec aplication. "Observer le cours des astres. = 3°. Il ne signifie quelquefois que remarquer. "J' ai observé dans un tel Auteur, que, etc. = 4°. Épier, remarquer les actions, la conduite d' une persone. "Prenez garde à vous, on vous observe. "On observe toutes vos démarches. = 5°. S' observer; être circonspect. "C' est un homme, qui s' observe.
   Rem. 1°. On dit au Bârreau, je vous observerai, pour, je vous ferai observer. Quelques Auteurs ont imité les Avocats. "Je vous observerai qu' il a falu bien de l' invention pour tirer deux Actes aussi pleins de chacun de ces deux contes. Ann. Litt. "Je me borne à vous observer ici que, etc. Je n' ai pas besoin de vous observer que, etc. Ibid. "Les inconvéniens que je viens de leur observer. L' Ab. Laugier. _ Rousseau le Poète s' en est aussi servi dans une de ses Lettres. _ Cette façon de parler n' est pas assez autorisée. Il faut la laisser au Palais, où elle est en possession de régner depuis long-tems. _ L' Acad. n' en met point d' exemple: elle en done même de tous contraires. = 2°. Observer, remarquer, régit que, et l' indicatif quand la phrâse est afirmative, et avec le subjonctif, quand elle est négative. "J' ai observé qu' il a été interdit, etc. "Je n' ai pas observé qu' il se soit troublé, etc. = 3°. S' observer, se dit de deux armées en présence. "Une partie de la campagne se pâssa, entre les Samnites et les Romains, à s' observer, sans en venir à une action décisive. Marm. = On dit, proverbialement, observer les brèves et les longues, ou, les points et les virgules; être fort exact pour tous les devoirs de la vie civile, etc.

OBSESSION


OBSESSION, s. f. [Ob-sè-cion, en vers ci-on: 2e è moy.] Etat d' une persone obsédée par le démon. Voy. OBSÉDER à la fin.

OBSTACLE


OBSTACLE, s. m. [2e dout. 3e e muet.] Ce qui empêche qu' une chôse ne se fasse, ne réussisse. "Faire ou mettre obstacle à... "Former, faire naître des obstacles. "Vaincre tous les obstacles. _ Voy. EMPêCHEMENT. Selon M. MARIN, faire obstacle ne se dit guère; on le dit dans un aûtre sens de mettre obstacle. _ Celui-ci régit les chôses. Mettre obstacle à un dessein: celui-là régit les persones, faire obstacle à quelqu' un.
   Rem On dit faire ou mettre obstacle sans article, mais ce n' est pas une conséquence pour d' aûtres verbes; et il ne faut pas imiter cet Auteur, qui dit: "Nous trouvâmes obstacle à notre bon ordre.

OBSTINATION


OBSTINATION, s. f. OBSTINÉ, ÉE, adj. OBSTINÉMENT, adv. S' OBSTINER, v. réc. [Obstina-cion, en vers ci-on, né, né-e, néman, né: 3e é fer. dans les 4 dern. _ Ménage dit qu' on prononce ostination, osti--né; et c' est ainsi que prononce le peuple à Paris et dans plusieurs Provinces; mais mal.] Opiniâtreté. Opiniâtre. Opiniâtrément. S' opiniâtrer. "Quelle obstination au mal, ou, dans le mal. "Enfant, plaideur, rhume obstiné. "Soutenir obstinément un mensonge. "S' obstiner à une chôse; dans le péché. "La fortune s' obstine à le persécuter. = Obstiné, opiniâtre. Voy. ENTêTÉ.
   REM. Obstination, comme s' obstiner, régit à devant l' infinitif. "Leur obstination à persévérer dans la désobéïssance les rendoit très-criminels. Anon.
   Je voulus m' obstiner à vous être fidèle.
"Oui, je m' obstine à dire, que l' attention opiniâtre à découvrir ce qui est mauvais, n' a pas pour principe l' idée du vrai, du beau, du parfait, mais qu' elle part d' une méchanceté naturelle. MARIN, L' homme Aimable. = Obstiné, s' emploie quelquefois substantivement. "C' est un petit obstiné: "Les obstinés sont bien à charge. = Obstiner, est quelquefois actif. Rendre opiniâtre. "N' obstinez pas cet enfant. "Pourquoi l' avez-vous tant obstiné.

OBSTRUCTIF


OBSTRUCTIF, IVE, adj. OBSTRUCTION, s. f. OBSTRUER, v. act. [Obs-truk--tif, tîve, cion, obstru-é.] Termes de médecine. Obstruction, est un engorgement, qui se forme dans les vaisseaux. Obstruer, causer de l' obstruction. Obstructif, qui obstrue.
   Rem. L' Ab. Prévot emploie obstruction pour obstacle: c' est un anglicisme. "Il ne s' y trouve ni banc de sâble, ni aucune autre obstruction. HIST. DES VOY. "La première obstruction, qui arrêta la barque, fut une petite bâsse d' un sâble fort dur. Ibid. = Obstruer, se dit au figuré dans le style médiocre. "Cette opération imprudente obstrua les canaux du comerce.

OBTEMPÉRER


OBTEMPÉRER, v. n. [Obtanpéré: 2e lon. 3e et 4e é fer.] Obéïr. Il est vieux et n' est plus en usage qu' au Palais. "Ils ont déclaré ne pouvoir obtempérer.

OBTENIR


OBTENIR, v. act. OBTENTION, s. f. [Obte--ni, tan-cion: 2e e muet au 1er, lon. au 2d.] Faire ensorte par ses prières auprês de quelqu' un qu' il acorde ce qu' on lui demande. "Obtenir sa grâce, un emploi, un bénéfice, etc. "Obtenir permission ou la permission. = Il a pour 2d régime l' ablatif, (la prép. de) j' obtiendrai cette grâce de vous. "Je n' ai jamais pu rien obtenir de cet homme-là. = Il est aussi neutre et a deux régimes, la prép. de devant l' infinitif et la conjonction que devant le subjonctif ou le futur de l' indicatif. "Vous avez obtenu de le faire, et que je le fisse, ou, que je le ferai avec vous. Le 1er régime s' emploie quand le verbe régi se raporte au sujet de la phrâse, (au nominatif d' obtenir) et le 2d, quand il ne s' y raporte pas. Fontenelle a mis l' un pour l' aûtre. "Le Comte de Halifax... obtint du Roi Guillaume de créer M. Newton, Garde des Monnoies. Il falait, qu' il créât; car ce n' était pas au Comte de Halifax à créer cette charge, mais au Roi. _ Pluche a fait la même faute: "vous n' obtiendrez point de ces corps simples de se changer, etc. Dites, qu' ils se changent.
   OBTENTION, Impétration, action d' obtenir. L' Acad. ne distingue point l' usage de ce mot: cependant je crois, avec La Touche, qu' il ne se dit qu' en termes de Pratique: l' obtention d' une sentence, d' un arrêt, d' un privilège, etc.

OBTUS


OBTUS, ÛSE, adj. [l' s se prononce au 1er: 2e lon. au 2d; obtûze.] Au propre, il se dit, en Géométrie, d' un angle plus grand qu' un angle droit. = Au figuré, esprit obtus, qui a peu de pénétration, qui a de la dificulté à concevoir.

OBVENTION


OBVENTION, s. f. [Obvan-cion: 2e lon.] Impôt éclésiastique. = C' est un terme d' Histoire.

OBVIER


OBVIER, v. n. [Obvi-é: 3e é fer. Devant l' e muet l' i est long: il obvîe. Au futur cet e muet ne se prononce pas: il obviera, obvierait: pron. obvîra, obvîrè.] Prendre des mesûres pour prévenir, pour empêcher un mal, un fâcheux accident. "On ne sauroit obvier à tous les inconvéniens.

OBUS


OBUS, ou, OBUSIER, s. m. Espèce de mortier, qui se tire horisontalement.

OCCASION


OCCASION, ou OCASION, s. f. OCASIONELLE, adj. fém. OCASIONELLEMENT, adv. OCASIONER, v. act. [Oka-zion, zio--nèle, nèleman, né: 4e è moy. au 2d et au 3e, é fer. au dern. 5e e muet.] Ocasion, est 1°. La conjonctûre des tems, des lieux, propre pour quelque chôse. "Atendre, ménager, manquer l' ocasion. "Se servir, se prévaloir, profiter de l' ocasion. = Il régit quelquefois de devant l' infinitif. "Je suis ravi d' avoir trouvé cette ocasion de vous témoigner mon atachement. "Saisissez avec avidité toutes les occasions d' exercer votre bienfaisance. MARIN, l' Homme Aimable.
   Rem. 1°. On dit, prendre ocasion sans article. "Les Tribuns prirent ocasion de l' indulgence du Dictateur de se déchaîner contre lui. Révol. Rem. Dans cet endroit, j' aurais mieux aimé dire, pour se déchaîner. Ces deux de du nom et du verbe ne font pas bien. * Leibnitz par analogie a dit chercher ocasion, aussi sans article. "Rufin, qui cherchoit ocasion de contredire. St. Jérôme. _ On doit dire, qui cherchoit l' ocasion, etc. = 2°. On emploie quelquefois ce mot au singulier, lorsque le sens sembleroit demander le pluriel: on dit l' ocasion, pour les ocasions: "Ceux, qui s' étoient distingués dans l' occasion. ROLLIN. = 3°. * Anciènement, on l' employait dans le sens de besoin. "Pour s' en servir partout où elle en auroit ocasion. Procês de Charles I.
   On dit, adverbialement, par ocasion; à la première ocasion. À~, ou, en toute ocasion. = En style proverbial. Prendre l' ocasion aux cheveux, la saisir et en profiter dès qu' elle se présente. = L' ocasion fait le lârron: elle fait faire des chôses, auxquelles on n' aurait jamais songé sans cela.
   2°. OCASION; combat, rencontre de guerre. "Une ocasion bien chaude: il se porte hardiment ou gaiment aux ocasions. = 3°. Ce qui done lieu à... "À~ l' ocasion de la guerre. "Cela a été l' ocasion de sa perte.
   OCASIONELLE, ne se dit qu' avec caûse. Qui done ocasion. "Caûse ocasionelle. C' est un terme de Philosophie. "Il y a cinq causes ocasionelles de nos erreurs. Mallebr.
   OCASIONELLEMENT, par ocasion. "Je suis venu ocasionellement.
   OCASIONER, doner ocasion. "C' est ce qui ocasiona sa conversion.

OCCÉAN


OCCÉAN, Voy. OCÉAN.

OCCIDENT


OCCIDENT, s. m. OCCIDENTAL, ALE, adj. [Okcidan, dantal, tale.] L' Occident, est celui des quatre points cardinaux du monde, qui est du côté où le soleil se couche. On dit aussi le couchant, et celui-ci est plus du style simple. = Occidental, qui est à l' occident. "Les Régions d' occident ou occidentales. "Peuples occidentaux. Nations occidentales. Les Indes occidentales. = Avec les mots Empire, et Église, on dit, d' occident, et non pas occidental, ou occidentale.

OCCIPUT


OCCIPUT, s. m. OCCIPITAL, ALE, adj. [Okciput, pital, ale.] Ils se disent du derrière de la tête, en Anatomie. "L' occiput: l' ôs occipital.

OCCIRE


*OCCIRE, v. act. OCCIS, ISE, adj. OCCISION, s. f. Tuer. Tué. Tuerie. = Ils sont vieux et ne sont plus bons que pour le burlesque.

OCCULTATION


OCCULTATION, s. f. OCCULTE, ou, OCULTE, adj. [Okulta-cion; okulte.] Le 1er ne se dit qu' en Astronomie, de la disparition d' une étoile. = Oculte, caché: "Caûse, vertu, faculté, qualité, propriété, maladie oculte. "Les sciences ocultes. = C' est tout l' emploi de ce mot.

OCCULTEMENT


*OCCULTEMENT, adv. OCCULTER, v. act. Vieux mots. D' une manière oculte, cachée. "Avenant le temps de leur part et délivrance de leur fruit, occultement le délivrent, puis le suffoquent, etc. = Cacher: "Elles occultent et cachent leur grossesse. Édit. d' Henri II.

OCCUPANT


OCCUPANT, s. m. OCCUPATION, ou, OCUPATION, s. f. OCCUPER, ou OCUPER, v. act. [Okupan, pa-cion, en vers ci-on; okupé.] Ocuper, c' est 1°. Tenir, remplir, en parlant d' un espace de lieu ou de tems. Cela ocupe trop d' espace; ocupe toute ma chambre. "Ocuper une maison, y habiter; ocuper la place de quelqu' un, exercer son emploi. _ "Ce raport a ocupé toute la séance. "Cet emploi ocupe tout mon tems, tout mon loisir. = 2°. En termes de guerre, se saisir, s' emparer: "Ocuper un poste: "ils ocupèrent les hauteurs. = 3°. Avec le régime des persones, employer, doner à travailler. Il faut ocuper les jeunes gens. "Vos afaires m' ocupent. "Il y a là de quoi ocuper plusieurs ouvriers et pendant long-tems. = 4°. S' ocuper, s' apliquer à... S' ocuper à l' étude, au jeu; à lire, à dessiner. = Il régit aussi de, mais alors il a un aûtre sens: je m' ocupe de votre afaire; c. à. d. j' y pense, je ne la néglige point. Dans ce dernier sens, il me semble qu' il ne régit point les verbes. "On ne paroit pas s' ocuper de lui faire son procès. Linguet. "On s' ocupe de les remplacer. MERCûRE. "À~ peine (Henri IV) fut-il paisible possesseur du trône qu' il s' ocupa de rapeler les Lettres et les Sciences fugitives. Ann. Litt. Je crois qu' on doit dire, s' ocuper du soin, du projet de faire, et non pas s' ocuper de faire. = Être ocupé régit de devant les noms. "Il est râre de rencontrer des persones, qui portent la délicatesse de sentiment au point d' être occupées de la félicité des autres, tandis qu' elles sont elles mêmes dans la peine. MARIN. L' Homme Aimable. = Il régit plutôt à que de devant les verbes. "Votre pauvre frater n' est ocupé que de me divertir. SÉV. "Il n' était pas fâché de voir ces deux hommes ocupés de se détruire réciproquement. Anon. Je crois qu' à me divertir, à se détruire seraient plus réguliers et plus conformes à l' usage. _ Voltaire dit aussi, ocupé d' abaisser la Maison d' Autriche; ocupé de dominer et de s' enrichir. C' est une ellipse, ocupé du soin d' abaisser~, de s' enrichir, etc. = * Le P. Rapin et Madame de B. (Hist. d' Angl.) font régit à l' actif la prép. à devant l' infinitif. "L' ambition de Philipe... ocupoit l' esprit de Démosthène à le suivre et à l' étudier. "Ils l' ocupèrent à se précautioner contre les conséquences. _ Ce régime est inusité. 5°. Ocuper, en termes de Pratique est neutre: être chargé d' une afaire en Justice. "Quel est le Procureur, qui ocupe pour vous.
   OCUPÉ, ÉE. adj. Qui a beaucoup d' ocupation. "Je suis fort ocupé. "C' est une femme fort ocupée.
   OCUPANT, dans le discours ordinaire ne se dit qu' en cette phrâse; premier ocupant; qui ocupe, qui se met en possession le premier.
   La Dame au nez pointu répondit que la Terre
   Étoit au premier ocupant.
       La Fontaine.
Au Palais, on le dit d' un Procureur, qui ocupe pour une partie dans un procês. Voy. plus haut, n°. 5°.
   OCUPATION, afaire à laquelle on est ocupé. "Avoir de l' ocupation. Manquer d' ocupation. Être sans ocupation: Quelles sont à présent vos ocupations? = Doner de l' ocupation; de la peine, de l' embârras. "Alez, alez, je vous donerai de l' ocupation.
   Rem. Quoique substantif verbal, il ne s' emploie pas par-tout où l' on peut employer le verbe ocuper. On dit, par exemple; cet établissement m' ocupe beaucoup; mais en disant (comme dans l' Origine des Lois) l' ocupation de mon établissement m' empêche de cultiver les terres, on ne parlerait pas bien. On dit, ocuper un poste, une Province, mais on n' a guère dit jusqu' à présent que dans les gazettes, l' ocupation d' une Province: Dans le Journ. Polit. de Gen. où l' on emploie ce mot dans la traduction d' un Mémoire étranger, on le met en italique. "On a réclamé fortement contre l' ocupation de ces Provinces. D' Avrigni s' est servi de cette locution. "Prévenir l' ocupation du Duché de Milan. Le Dict. de Trév. et le Rich. Port. le mettent pour l' action de s' emparer d' un poste. L' Acad. ne l' admet qu' en termes de Droit, pour l' habitation d' une maison. "Payer les loyers des lieux à proportion de l' ocupation qu' on a faite.

OCCURRENCE


OCCURRENCE, ou OCURRENCE, s. f. OCURRENT, ENTE, adj. [Okûrance, ran, rante: 2e et 3e lon. r forte: 4e e muet.] Ocurrence, évènement fortuit, rencontre, ocasion. "Favorable, ou fâcheûse ocurrence: agir suivant les ocurrences. = Ocurrent, qui survient. "Les câs ocurrens, les afaires ocurrentes.

OCÉAN


OCÉAN, s. m. [2e é fer.] La grande mer, qui environe toute la terre. Au milieu de l' Océan; les Îles de l' Océan. = On dit adjectivement; la mer Océane.

OCRE


OCRE, s. f. [Okre: 2e e muet. Trév. écrit Ochre.] Terre, dont on fait une couleur jaûne. "Quand l' ocre est calcinée on en fait une couleur rouge.

OCTANT


OCTANT, s. m. [Oktan.] Instrument, qui contient la huitième partie du cercle, c. à. d. quarante cinq degrés. C' est la moitié d' un quart de cercle. On se sert beaucoup d' octans sur les vaisseaux. Dans les Mémoires rédigés à l' Observatoire de Marseille par les PP. JJ. il y en a d' excellens sur les octans.

OCTANTE


*OCTANTE, OCTANTIèME. Quatre-vingt, quatre-vingt-dixième. = Vaugelas les condamnait; Ménage et Th. Corneille étaient du sentiment que dans le discours familier, il faut dire quatre-vingt, mais qu' en termes d' Arithmétique et d' Astronomie, on dit fort bien octante. Cela pouvait être vrai de leur tems: mais il ne l' est plus aujourd'hui. _ Quelques-uns en calculant disent huitante, huitantième: ceux-ci sont vieux aussi, mais du moins ils ont pour eux l' origine française.

OCTâVE


OCTâVE, s. f. [2e long. 3e e muet.] 1°. Il se dit des huit jours, pendant lesquels on célèbre certaines Fêtes. "L' Octâve du Saint Sacrement. "Fête avec octâve. "Prêcher l' octâve, une octâve. = 2°. En Musique, ton éloigné d' un aûtre de huit degrés, les deux extrémités comprises; l' octâve d' en haut, l' octâve d' en bâs. "Les voix des femmes, des enfans sont à l' octâve de celles des Hommes. = C' est aussi la consonance des deux tons éloignés de huit degrés. "L' octâve ne difère guère de l' unisson. = 3°. Nom qu' on done aux stances de huit vers, en parlant de la Poésie italiène. "Les grands Poèmes italiens sont divisés par octâves.

OCTOBRE


OCTOBRE, s. m. Le dixième mois de l' année. "Au mois d' Octobre. En Octobre.

OCTOGÉNAIRE


OCTOGÉNAIRE, adj. et subst. [Okto--génère. 3e é fer. 4e è moy. et long.] Qui a quatre-vingts ans. "Il ou Elle est octogénaire: c' est un octogénaire, une octogénaire.

OCTOGONE


OCTOGONE, adj. Qui a huit angles et huit côtés. "Figûre, table, etc. octogone. = S. m. "Un octogone parfait, ou régulier: un octogone irrégulier.

OCTROI


OCTROI, s. m. OCTROYER, v. act. [Ok-troa, ok-troa-ié. Devant l' e muet l' y se change en i: j' octroie, ils octroient; pron. ok-troâ. Au futur cet e muet ne se fait point sentir: il octroiera, octroierait, pron. ok--troâ-ra, ok-troâ-rè. À~ l' imparfait et au prés. du subjonctif, il convient d' écrire, nous octroyions, vous octroyiez, pour les distinguer, d' octroyons, octroyez, présent de l' indicatif.] Concession. Concéder. Ils ne sont d' usage que dans les Lettres de Chancellerie et les afaires de Finance. "Lettres d' octroi. "Cet octroi a été révoqué. "L' octroi d' un privilège. - "Le Roi a octroyé à cette ville deux sols pour livre sur l' entrée de telle marchandise. = M. Racine le Fils troûve que l' Acad. a trop borné l' emploi de ce mot. Il aurait voulu qu' elle ajoutât et en vers. Il pense que, quand il y est placé à propôs, comme dans le vers suivant, il a une grâce, que n' aurait pas un aûtre mot.
   Que vient chercher ici le Roi, qui vous envoie,
   Quel est ce grand secours, que son brâs nous octroie.
       Racine, Alexandre.
Anciènement on l' employait dans la prôse. "Il faut rendre par la mort (à la Nature) comme une victime, ce qu' elle a octroyé comme un présent. Mascar.

OCTUPLE


OCTUPLE, adj. Qui contient huit fois. "Quarante est octuple de cinq.

OCULAIRE


OCULAIRE, adj. OCULAIREMENT, adv. [Okulère, reman: 3e è moyen et long, 4e e muet.] Oculaire a un emploi fort borné. Témoin oculaire, qui rend témoignage de ce qu' il a vu. "Je parle comme témoin oculaire. _ Verre oculaire, dans une lunette d' aproche, celui qui est destiné à être placé du côté de l' oeuil. = S. m. L' Oculaire de cette lunette est fort trouble. = Oculairement, visiblement, d' une manière sensible. Il est peu usité.

OCULISTE


OCULISTE, s. m. Celui, qui fait profession de traiter les maladies de l' oeuil. "C' est un habile Oculiste. - Adj. "Médecin, Chirurgien oculiste.

OCULTE


OCULTE, OCUPER, OCURRENCE, etc. Voy. OCCULTE, etc. avec deux c.

ODE


ODE, pénult. longue dans je rôde, brève par tout âilleurs, mode, antipode, comode, etc.

ODE


ODE, s. f. Poème lyrique, divisé en strophes ou stances. Faire, composer une Ode. "Les Odes d' Horace, de Malherbe, de Rousseau, etc. = Ronsard a été le premier, qui ait employé ce mot en notre langue, comme il s' en vante lui-même: "Et osai, le premier des nôtres enrichir ma langue de ce nom, Ode... afin que nul ne s' atribuë ce que la vérité commande être à moi. Ménage. _ Stances ne se dit guère avec Ode. Une Ode n' a que des strophes, qui sont toujours de la même mesure et du même nombre de vers, au lieu que les stances peuvent être régulières ou libres. Marin.

ODEUR


ODEUR, s. f. [O-deur.] Sensation produite par l' impression que certains corps font sur l' odorat. C' est aussi le pouvoir qu' ont les corps odorans d' exciter en nous cette sensation. "Bone ou mauvaise odeur. "Cette odeur est trop forte. "Cela n' a point d' odeur. = Quand ce mot est employé au pluriel, seul et sans épithète, il se dit toujours des bones odeurs: "Il aime ou il craint les odeurs. Il en est de même de senteurs. Voy. ce mot. L. T. = On dit, figurément, odeur pour réputation. "Il est mort en odeur de sainteté: "Elle est en bone odeur dans le monde: "Ce Marchand est en mauvaise odeur. Trév. "Sa conduite est de mauvaise odeur dans la Communauté; la Communauté en est mal édifiée. Rich. Port.

ODIEUX


ODIEUX, EûSE, adj. ODIEûSEMENT, adv. [Odi-eû, eû-ze, eûzeman: 3e lon. 4e e muet.] Odieux, qui excite la haine, l' indignation. "Devenir, se rendre odieux, odieûse. = Haïssable. "La vie lui est devenûe odieûse. = Odieûsement, d' une manière odieûse. "Il s' est comporté odieûsement dans cette afaire. _ L' usage de l' adv. est moins comun que celui de l' adj.
   ODIEUX, haïssable, (synon.) Le premier dit plus que le second: l' objet haïssable est digne de haine; l' objet odieux est digne de toute votre haine. "Avec certains défauts, on est haïssable: avec certains vices, on est odieux. Un homme méchant devient odieux: une persone incomode, fâcheuse, contrariante, devient haïssable, etc. "Montrez-moi une société où la franchise ne soit pas haïssable: montrez-moi un homme à qui la flaterie soit odieûse, etc. Extr. des Syn. Franç. de M. l' Ab. Roubaud. _ Haïssable ne se dit guère que des persones ou de leurs manières, et dans le style modéré. Odieux se dit, dans tous les styles, des persones et des choses. Ibid.
   ODIEUX régit le datif, (la prép. à). "Odieux à Dieu et aux hommes. = Employé sans régime, il peut suivre ou précéder le substantif qu' il modifie. "Démarche odieûse: odieûse entreprise. Crime odieux; odieux atentat. _ Il est, en ce genre, des inversions qui choquent l' oreille; odieux crime sonerait~ mal; cet odieux Prince, et sur-tout cet odieux homme encôre plus mal.

ODORAT


ODORAT, s. m. ODORANT, ODORIFÉRANT, adj. [On ne prononce point le t dans le 1er.] Odorat est le sens, qui a pour objet les odeurs. "Il n' a point d' odorat. "Cela flate ou blesse l' odorat. = Odorant et odoriférant ont le même sens; (qui répand une bone odeur) mais le premier n' est guère usité qu' en poésie; et le second est plus propre de la prôse. "Bois odorans, fleurs odorantes, parfums odoriférans, drogues odoriférantes.

OE


OE Les Flamands prononcent ces deux lettres comme nous prononçons ou: ils doivent donc prendre garde à ne point leur doner cette prononciation en français, mais à le prononcer comme un é accentué, quand il comence le mot oecuménique, oedémateux, etc. et comme oa dans boete, coeffe, moelle, poele. = Oe ne fait qu' une syllabe en ces quatre mots: il ne faut donc point y mettre le tréma ou les deux points sur l' e, boëte, poële, etc. Dans poëme, poëte, poëtique, poësie, oe fait deux syllabes, poème, etc. Il est mieux de les écrire, poème, poète, poétique, poésie.

OECONOMAT


OECONOMAT, OECONOME et leurs dérivés. Voy. sous la lettre E, ÉCONOMAT, ÉCONOME, etc.

OECUMÉNICITÉ


OECUMÉNICITÉ, s. f. OECUMÉNIQUE, adj. OECUMÉNIQUEMENT, adv. [Pron. Ékumé--nicité, nike, nikeman: 1re et 3e é fer.] OEcuménique, universel. Il ne se dit que dans ces phrâses: Concile oecuménique. "Les Patriarches de Constantinople se qualifiaient mal-à-propôs du titre de Patriarche oecuménique. = OEcuménicité, qualité de ce qui est oecuménique. "L' oecuménicité d' un Concile. C' est tout l' emploi de ce mot. = OEcuméniquement, d' une manière oecuménique. "Concile oecuméniquement assemblé.

OEDIPE


OEDIPE, s. m. [Édipe.] Nom propre, devenu comun et apellatif, pour signifier un Devin. Il n' est bon que pour le style badin ou critique.
   Sur cette règle, ami, le moindre OEdipe
   Peut deviner la source et le principe
   De ce succès, qui, pour toi, parmi nous,
   Acorde, unit et fixe tous les goûts.
"Les travaux d' Hercule, très-brillans dans la Fable et dans la Poésie, mais tristes et ennuyeux dans les nouvelles explications de nos oedipes modernes. L' Ab. De Fontenai.

OEIL


OEIL, ou OEUIL, s. m. [Euil: la 2de manière d' écrire ce mot serait la plus convenable et la plus conforme à la prononciation. On ne serait plus tenté de prononcer eil, comme prononcent certains. = Nos Anciens écrivaient eul, et prononçaient euil. Ils écrivaient de même deul, cerceul~, orgueul, quoiqu' ils prononçassent deuil, cercueuil, orgueuil. Et c' est de là que le fameux Poète Santeuil signait toujours Santeul, parce que sa famille n' avait jamais signé aûtrement. = Le pluriel est yeux: pron. ieû, monos. et devant une voyèle, ieûz. = Dans oeil de boeuf, on dit, au pluriel, oeils de boeuf, et non pas yeux de boeuf.] 1°. Au propre, l' organe de la vûe. "Le glôbe, le fond, la cavité, le blanc, la prunelle, le coin de l' oeuil. "Avoir la larme à l' oeuil: Les yeux lui pleurent. "Fermer, ouvrir, baisser, hausser, ciller les yeux, etc. = 2°. Il se dit par quelque sorte de ressemblance de diverses chôses. _ OEil de boeuf, petite lucarne, faite en rond ou en ovale _ L' OEil d' un marteau, d' une meule, etc. ouvertûre qui s' y troûve. _ L' OEil du mors, le trou qui est au haut de la branche du mors. _ Yeux, certains trous qui se trouvent dans la mie du pain et dans certains fromages. = 3°. Bouton; petite excroissance qui se voit sur une branche d' arbre, et qui anonce une feuille, un fruit, ou une branche. = 4°. Figurém. Lustre des étofes, ou éclat des pierreries et aûtres chôses semblables. "Ces étofes, ces perles ont, ou n' ont pas un bel oeuil. = 5°. En termes d' Imprimerie, il se dit des intervales que laissent entre elles les parties d' une lettre. "Cicero, nompareille, etc. grôs oeil.
   Rem. Dans son sens propre et naturel, oeil entre dans plusieurs expressions. _ Avoir l' oeil sur quelqu' un, le suivre de l' oeil, se disent plus au figuré qu' au propre; et ils se disent sans changement et sans addition. On dit, j' avais l' oeil sur lui, je le suivais de l' oeil; mais on ne dit pas, j' avais sur lui un oeil sévère, je le suivais d' un oeil atentif. Je dis qu' on ne le dit pas en prôse. Voltaire l' a dit en vers.
   Vous vous perdez: songez qu' un Maître impitoyable
   Nous obsède, nous suit d' un oeil inévitable.
= Avec voir et regarder l' épithète ou le régime a lieu: "Je ne le vois pas du même oeil que vous. "Sesostris continuoit à me regarder d' un oeil de compassion. Télém. "Il n' y avoit pas de maison de Ministre, ou de Seigneur du premier ordre, où on ne le vit de très-bon oeil. Ducerc. Hist. de Perse. = Pour exprimer le sens contraire, on ne doit pas dire, comme Richelet, voir de mauvais oeil: il faut dire, ne pas voir de bon oeil. Suivant M. MARIN, voir de mauvais oeil se dit cependant quelquefois; et l' Acad. le dit au mot Voir. = Regarder du coin de l' oeil est du style familier. "Sa fille me regardoit du coin de l' oeil et ne témoignoit que la moitié du goût qu' elle prenoit à ce que je disois. Mariv. = Avoir l' oeil à ou sur, veiller: "Il a l' oeil à tout. "Avoir~ l' oeil sur les actions de, etc. On dit, à peu prês dans le même sens, avoir l' oeil au guet, faire la guerre à l' oeil. = * On dit, doner dans les yeux à quelqu' un, lui plaire extrêmement. Mde. de Genlis, faisant parler une fille de boutique, dit, doner dans l' oeil. "Un jeune Seigneur est venu dans la boutique. _ Eh bien! Isabelle lui a doné dans l' oeil, je voyois ça moi. Th. d' Éduc. Remarquez qu' on dit, elle lui a doné dans l' oeil ou plutôt dans les yeux, et non pas, elle a doné dans son oeil, dans ses yeux. = * On dit aussi, mettre sous les yeux de quelqu' un: Massillon met au singulier, mettre sous l' oeil. Il dit du Prince. "Tout lui met sans cesse sous l' oeil sa gloire, tout lui parle de sa puissance. Mettre sous l' oeil n' est pas admis par l' usage. J' observe que dans cette expression, on pourrait dire aussi, tout met sous ses yeux; mais, tout lui met sous les yeux est bien mieux et bien plus conforme au goût et au génie de la langue. = En un clin d' oeil, dans un moment. À~ vûe d' oeil. Voy. VûE. - Et pour les expressions où oeil est employé au pluriel, Voy. YEUX.

OEILLADE


OEILLADE, ou OEUILLADE, s. f. [Eu--glia-de: mouillez les ll.] Regard, coup d' oeil. "Jeter une oeillade, des oeillades. = Richelet a mis oeillader; mais ce mot n' a pas fait fortune.

OEILLèRE


OEILLèRE, adj. et s. f. [Eu-gliè-re: 2e è moy. et long; 3e muet.] Adj. Dents oeillères, dont la racine répond à l' oeuil. = Subst. Petite pièce de cuir que l' on atache à la têtière d' un cheval de carrosse, pour lui couvrir l' oeuil.

OEILLET


OEILLET, ou OEUILLET, s. m. OEILLETERIE, s. f. OEILLETON, s. m. [Eu--gliè, glie-te-ri-e, glie-ton: 2e è moy. au 1er, e muet aux deux aûtres: 3e e aussi muet au second.] OEuillet, sorte de fleur odoriférante, dont il y a diverses espèces. _ Plante qui porte des oeuillets. = OEilleterie, lieu planté d' oeuillets. = OEilleton se dit, non-seulement des marcotes d' oeuillets, mais encôre des rejetons d' artichauts.

OESOPHAGE


OESOPHAGE, s. m. [Ézofage: 1re é fer. dern. e muet.] Canal membraneux, qui s' étend depuis le fond de la bouche jusqu' à l' orifice supérieur de l' estomac. Conduit des alimens.

OEUF


OEUF, s. m. [Euf: au pluriel, on ne prononce pas l' f: des oeufs; pron. dè-zeû.] Proprement, ce que pond la poule et l' oiseau femelle, et qu' ils coûvent. _ Par extension, il se dit des poissons, des fourmis, des tortûes, etc. "OEuf de poule, de perdrix, de pigeon, de tortûe, de poisson, etc. "Jaûne, moyeu, blanc d' oeuf, etc. "Manger des oeufs, faire cuire des oeufs. "OEufs à la coque, au miroir, au plat, etc. = On dit, proverbialement, d' un homme fort avâre, qu' il tondrait sur un oeuf; de celui qui fait un petit présent pour en avoir un grand, qu' il done un oeuf pour avoir un boeuf; d' un homme qui jouit tranquillement de son bien, qu' il pond sur ses oeufs. = Je ne lui ai dit, ni oeuf, ni boeuf, ni petite, ni grôsse injûre. = Plein comme un oeuf, extrêmement plein.

OEUVÉ


OEUVÉ, ÉE, adj. [Eu-vé, vé-e: 2e é fer. long au 2d.] Qui a des oeufs, en parlant des poissons. Hareng oeuvé, carpe, sole oeuvée.

OEûVRE


OEûVRE, s. f. [Eû-vre: 1re lon. 2e e muet.] 1°. Ce qui est produit par quelque agent. "Les oeûvres de Dieu. "L' oeûvre de la création. "Travailler à l' oeûvre de son salut. _ Ce dernier est un peu vieux: on dit plutôt afaire. = 2°. Fabrique et entretien d' une Église parroissiale. L' oeuvre de cette parroisse est fort riche. = Banc destiné pour les Marguilliers: "Être assis, entendre le sermon dans l' oeûvre. = 3°. Production d' esprit. Il ne se dit qu' au pluriel. "OEûvres de Corneille, de Racine, de Boileau, etc. Le Recueuil de leurs ouvrages. = 4°. Action morale et chrétiène. "Bone oeûvre: c' est une oeûvre méritoire. La Foi, sans les oeûvres, est une foi morte. = OEûvre pie, oeûvre de charité. = OEûvre de surérogation, qu' on fait sans y être obligé.
   5°. OEuvre, s. m. Les Alchimistes apèlent grand oeûvre, la pierre philosophale, le secret prétendu de la transmutation des métaux. = En parlant des Graveurs en estampes, on dit aussi oeûvre au masculin; le recueuil de toutes les estampes d' un Graveur. "Avoir toute l' oeûvre de Calot, de Duret, etc. = On dit aussi, le premier, le second oeûvre d' un Musicien. = Sur quoi Mr. Fréron remarque fort à propos, qu' on ne doit pas dire, Catalogue de l' oeûvre de M. Cochin le Fils, mais qu' il faut mettre pour plus d' exactitude, Catalogue des Dessins et des Estampes, qui composent l' OEuvre de, etc. _ * Aûtrefois on disait, un bel oeuvre, pour, un bel ouvrage. Boileau a encôre dit dans le Lutrin:
   Donons à ce grand oeuvre une heure d' abstinence.
Suivant l' Acad. il est masculin au singulier dans le style soutenu: "Un si grand oeûvre. _ Richelet remarque qu' il est des deux genres au singulier; Vaugelas, qu' il est masculin au singulier et féminin au pluriel. Neuville dit, l' OEûvre de l' Évangile au masculin; l' Ab. Laugier, le grand OEûvre de la Rédemption, ce qui fait penser au grand oeûvre que les Chimistes ont rendu ridicule. _ On peut douter, je crois, que cela soit de l' usage actuel.
   Mettre en oeûvre, c' est employer. Il se dit au propre et au figuré. "Mettre du bois en oeûvre. "La nature fait le mérite, et la fortune le met en oeuvre. La Rochef. "L' intérêt met en oeuvre toute sorte de vertus. Id. N' y faire oeûvre, ne pas égaler, est une expression moins noble: elle n' est propre que du style badin et ironique. "Trois traits de bienfaisance par demie heure (on les atribuait à M. d' Al...) Eh! feu Titus, d' obligeante mémoire, n' y faisoit oeuvre auprès du Titus de Paris. Linguet.
   Rem. On entend par bones oeûvres, les oeûvres, ou de piété, ou de charité. L' Ab. Prévot dit, que les Bramines persuadèrent au Samorin... d' apaiser le Ciel par de bones oeûvres de religion. C' est un pléonasme. Il faut retrancher, ou bones, ou de religion, et plutôt celui-ci.

OFFENSANT


OFFENSANT, ou OFENSANT, ANTE, adj. OFENSE, s. fém. OFENSER, v. act. OFENSEUR, s. m. [Ofansan, sante, se, sé, seur: 2e lon. 3e lon. aussi aux deux premiers, e muet au 3e, é fermé au 4e.] Ofense est une injûre de fait ou en parole. Ofenser, faire une ofense. Ofensant, qui ofense. Ofenseur, celui qui ofense. "Faire une ofense à, ou ofenser quelqu' un. "Ofenser Dieu. "Il s' ofense de tout. "Discours ofensant, parole ofensante. "L' ofenseur est souvent plus implacable que l' ofensé. C' est le Proverbe Italien: chi offende, non perdona. J. J. Rousseau l' a dit en Français. "Quelquefois l' ofensé pardone, mais l' ofenseur ne pardone jamais. = Ofensé et ofenseur ne se disent que par oposition l' un à l' aûtre. Acad.
   Dom Diegue est l' ofensé,
   Et l' ofenseur, le père de Chimène.
       Le Cid.
Il y a un exemple de Racine, contraire à cette remarque.
   Plus l' offenseur est cher, plus je ressens l' injure.
   Rem. 1°. Quelques Auteurs ou Imprimeurs écrivent ofence, ofencer, ofençant avec un c. L' Acad. dans ses Sentimens sur le Cid, Bréfeuf, Mde Dacier, Pluche, etc. ont employé cette ortographe. Elle est contre l' étymologie et contre l' usage le plus autorisé. = 2°. Ofense n' est pas synonyme de crime, et il ne se dit avec les pronoms possessifs que dans cette phrâse du Pater. "Pardonez-nous nos ofenses. _ Voltaire dit, dans Sémiramis.
   Les Dieux, dit-on, sur elle ont étendu leur bras:
   J' ignore son offense.
Ce mot peut-être beau en vers; mais en prôse, on dirait: j' ignore son crime. = 3°. Dans le sens même, où il est usité, il se dit dans un sens actif, et non pas dans un sens passif; il se dit de celui qui ofense, et non pas de celui qui est ofensé. "Il est notre père, et dans nos péchés oubliant ses ofenses, il ne considère que nos malheurs. Perrin. Il falait dire, oubliant nos ofenses. = 4°. On dit, faire un crime à... de... * L' Ab. Prévot dit, dans le même sens, faire une ofense: "Il est surprenant qu' il prétende leur en faire une ofense (de cet excès de zèle). Hist. des Voy. Ou c' est un anglicisme, ou un barbarisme. = 5°. Ofense ne régit pas le datif (la prép. à) par lui-même: il ne le régit que par le moyen des verbes auxquels il est joint: "Les deux nations s' acusent réciproquement de cette ofense au droit des gens. Du Pan. Je crois qu' il falait dire, de cette ofense faite au droit des gens.
   6°. OFENSER se dit, au figuré, des chôses, dans le sens de blesser: "Ce coup lui a ofensé le cerveau. "Un son trop aigre ofense les oreilles. = Plus figurément encôre; des discours libres ofensent les oreilles chastes.

OFFENSIF


OFFENSIF, ou OFENSIF~, IVE, adj. OFENSIVEMENT, adv. [Ofansif, cîve, cîveman: 2e lon. 3e lon. aussi au 2d et au 3e, 4e e muet.] L' adjectif ne s' emploie qu' au fém. et en terme le guerre, il se joint ordinairement avec défensive. "Ligue ofensive et défensive, par laquelle deux États se liguent pour ataquer leurs énemis comuns, ou pour se défendre réciproquement contre leurs ataques. _ Armes ofensives et défensives, propres pour l' ataque et pour la défense.. On peut pourtant dire, ligue ofensive, armes ofensives, sans y ajouter défensive. "Il ne se contente pas de se tenir sur la défensive, il va jusqu' à l' ofensive. = En ce sens et dans cet emploi, défensive substantif, est plus usité qu' ofensive.
   OFFENSIVEMENT, d' une manière ofensive. En ataquant. "Agir ofensivement contre un énemi. Il ne se dit guère que de la guerre et des procês.

OFFERTE


OFFERTE, s. f. OFFERTOIRE, s. m. [ou Oferte, Ofertoire: pron. ofêrte, toâ-re; 2e ê ouv. 3e e muet au 1er, lon. au 2d.] Le 1er se dit de la partie de la Messe dans laquelle le Prêtre ofre à Dieu le pain et le vin; le 2d, de l' antiène qui précède cette cérémonie. "Le Prêtre a dit l' ofertoire; il est à l' oferte. = Autrefois on disait aussi oferte pour ofrande. "Aller à l' offerte. "Quand on dit la Messe en cérémonie, on encense les offertes. Trév. L. T.

OFFICE


OFFICE, s. m. [On pourrait écrire comme on prononce, OFICE.] 1°. Devoir. "Il est de l' ofice d' un Magistrat, d' un Père, etc. "Les ofices de la vie civile. En ce sens, il est vieux: l' Acad. le met pourtant sans remarque. _ Il me semble qu' on ne le dit plus qu' en parlant du livre des Ofices de Cicéron, ou de St. Ambroise; et dans cette locution adverbial d' ofice. "Faire quelque chôse d' ofice, de son propre mouvement et sans en être requis. "Ce Juge a informé d' ofice. Des Experts només d' ofice par le Juge; à la diférence de ceux, dont les parties conviènent. = 2°. Assistance, service. _ En ce sens, il ne se dit pas tout seul: On ne le dit qu' au pluriel, avec bon ou mauvais., ou au singulier, avec la préposition de. "Acordez-moi vos bons ofices auprês d' un tel. "Il m' a rendu de mauvais ofices. "C' est un ofice d' ami que vous lui avez rendu. _ L' Acad. le dit au singulier avec bon. "Je vous demande un bon ofice pour un tel. Il me semble qu' il est moins d' usage dans ce nombre. "Ô homme important, dit la Bruyère, et qui, à votre tour avez besoin de mes ofices. Je dirais là services: car lorsqu' on parle de soi, bons ofices a un air de supériorité. On demande à un aûtre ses bons ofices, et on lui promet ses services. Voyez SERVICE. = 3°. Prières publiques, et les cérémonies qu' on y fait. "Dire, entendre l' ofice: assister à l' ofice. _ L' ofice de la Sainte Vierge; l' ofice des Morts. = Bréviaire, ou cette partie que doivent dire tous les jours ceux qui en sont tenus. "Dire son ofice. "Où en êtes-vous de votre ofice? "Comencer ou achever son ofice. = 4°. Charge. Ofice de Judicatûre, etc. = Ofice, charge, (synon.) Tout ofice est une charge, mais toute charge n' est pas un ofice, dit un Encyclopédiste. Il cite en preûve les charges dans le Parlement, qui sont de véritables ofices, et les charges Municipales, qui ne sont pas des ofices, parce qu' on ne les tient que pour un tems, sans aûtre titre que l' élection. _ Mais d' aûtre part, les ofices des Notaires, des Procureurs, des Huissiers, ne sont pas des charges. Il y a donc des charges qui ne sont pas des ofices; des ofices qui ne sont pas des charges; et des ofices qui sont en même tems des charges. _ L' ofice ne désigne que le titre de l' érection par l' autorité du Souverain, qui l' acorde à perpétuité: la charge ajoute à cette idée la juridiction ou l' administration.
   5°. OFICE, s. f. Lieu, dans une grande maison, où l' on prépare tout ce qu' on sert sur table pour le fruit, où l' on garde le linge, la vaisselle, etc. Dans les maisons bourgeoises, on dit dépense. Voyez ce mot. = Ofices, au pluriel, se dit de la cuisine comme de la dépense: c' est un nom collectif, qui comprend tous les lieux où l' on prépare et où l' on garde tout ce qui est nécessaire pour le service de la table. "De grandes, de belles ofices. "Des ofices bien éclairées. = 6°. Ofice, dans ce sens, se dit aussi de l' art de préparer ce qu' on sert sur table pour le fruit: et l' on apèle oficier le domestique qui possède et qui exerce cet art dans les maisons. "Il sait, il entend bien l' ofice; c' est un bon oficier.

OFFICIAL


OFFICIAL ou OFICIAL, s. m. OFICIALITÉ, s. f. [Ofi-cial, cia-lité.] Oficial, Juge de Cour d' Église. Oficialité, Juridiction de l' Oficial; et lieu où l' Oficial rend la Justice.

OFFICIANT


OFFICIANT, ou OFICIANT, subst. et adj. [Ofi-cian.] Qui oficie à l' Église. "L' oficiant, le Prêtre oficiant. = Dans les couvens de filles, on dit l' oficiante, la Religieuse qui est de semaine au choeur.

OFFICIER


OFFICIER, v. n. OFFICIER, s. m. [ou Oficier. = La diférence de ces deux mots pour la prononciation, c' est que dans le verbe, ié est de deux syllabes, et qu' il n' en fait qu' une seule dans le substantif: ofi-ci-é, ofi-cié: dernier é fer.] Oficier, faire l' ofice divin à l' Église. "On oficie bien dans cette Église. = Dans un sens plus restreint, célébrer une Grand' Messe,ou présider à l' ofice divin. "C' étoit un tel Évêque qui oficioit à cette cérémonie. = On dit en st. plaisant, d' un homme qui fait son devoir à table, qui y mange et y boit bien: qu' il oficie bien. "Vous n' avez pas mal oficié aujourd'hui.
   OFICIER, qui a un ofice, une charge. "Oficier du Parlement, de l' Évêque, de Ville, de Justice, de guerre. "Les grands Oficiers de la Courone, etc. = Quand on dit, Oficier, absolument et sans addition, on l' entend des Militaires. "Il y avoit à cette assemblée un grand nombre d' Oficiers.

OFFICIEUX


OFFICIEUX ou OFICIEUX, EûSE, adj. OFICIEûSEMENT, adv. [Ofi-cieû, cieû-ze, cieû-zeman; 3e lon. 4e e muet; en vers ci--eû, etc.] Oficieux, qui est porté à rendre service. Oficieûsement, d' une manière oficieûse. "Homme civil et oficieux; persone fort oficieûse. "Il s' est ofert à moi fort oficieûsement. = On apèle mensonge oficieux, un mensonge fait uniquement pour faire plaisir à quelqu' un, sans préjudice de persone. = On ne dit guère mentir oficieûsement.
   REM. Fléchier fait régir à oficieux le datif, (la prép. à) "Il est facile, populaire, oficieux à ceux qui sont au-dessus de lui, commode à ses égaux. = À~ employer un régime, envers vaudrait mieux.

OFFRANDE


OFFRANDE, s. f. OFFRANT, s. m. OFFRE, s. f. OFFRIR, v. act. ou OFRANDE, etc. [Ofrande, fran; ofre, ofri: 2e lon. aux deux prem. e muet au 3e.] Ofrir: j' ofre, j' ofrois ou j' ofrais; j' ofris, j' ai ofert; j' ofrirai, j' ofrirois ou j' ofrirais; ofre, ofrez, que j' ofre, j' ofrisse; ofrant, ofert, erte.
   OFRIR, proposer quelque chôse à quelqu' un, afin qu' il l' accepte. _ Ofre, action d' ofrir, ou ce que l' on ofre. _ Ofrant, celui qui ofre. Ofrande, don qu' on ofre à Dieu. "Il lui a ofert de l' argent: Il m' ofrit sa maison. "Faire, recevoir une ofre, une ofre de service. "J' accepte votre ofre, vos ofres. "On a adjugé les meubles au plus ofrant et dernier enchérisseur. "Ofrande agréable à Dieu.
   I. OFRIR, a quelquefois trois régimes, l' acusatif~ de~ la chôse, le datif de la persone et la prép. à devant l' infinitif. "Je lui ofris une bonne oeuvre à faire.
   Et de justes conquêtes
   Vous ofrent à cueillir de plus nobles lauriers.
       Rousseau.
La construction naturelle est: vous ofrent de plus nobles lauriers à cueuillir = Neutre, il n' a que les deux derniers régimes; mais au lieu de la prép. à on emploie de devant les verbes. "Il m' ofroit de le reprendre. = S' ofrir régit à. "Il s' ofre à me dédomager. "Le premier objet qui s' ofrit à moi, à mes yeux. = Dans le sens de proposer un prix, un secours, une aide, il régit l' acusatif et l' ablatif. "Il ofrit cent mille écus de cette terre: on lui répondit qu' on en avoir refusé bien plus que ce qu' il en ofroit. = Impersonel, il régit le nominatif. "Il s' ofre une ocasion favorable; une ocasion favorable se présente.
   II. OFRANT ne se dit qu' au Palais. Il n' a point de féminin. On ne dit pas la plus ofrante.
   III. OFRE était aûtrefois masc.
   L' ofre de mon hymen l' eût-il tant éffrayé?
       Racine.
On dit aujourd'hui: l' eût-elle tant éfrayé. "Ils acceptèrent un ofre si avantageux. Vie de St. Jean de la Croix. Dites: une ofre si avantageûse. = * Joint au verbe faire, il régit le datif: "Il lui fit de grandes ofres; mais quand il est seul, il s' emploie sans régime. Le Protecteur joignit à ces raisons les ofres les plus séduisantes au Duc de Buckingham. Hist. d' Angl. Le Traducteur aurait dû s' arrêter à séduisantes: on l' aurait tout aussi bien compris, et sa phrâse aurait été plus régulière.
   IV. OFRANDE se dit de la cérémonie où le Prêtre, avant et après l' oferte, reçoit les ofrandes des Fidèles. Aler à l' ofrande. Pendant l' ofrande. = On dit proverbialement: à l' ofrande, qui a dévotion, ou bien, l' ofrande est à dévotion; ce qui s' aplique à tout ce qu' il est libre de faire ou de ne pas faire. _ À~ chaque Saint son ofrande: il faut rendre des devoirs à tous ceux qui ont quelque pouvoir dans une afaire.
   Rem. Les Poètes et les Orateurs étendent l' emploi de ce mot, et ils le disent dans les chôses profanes. "Recevez l' ofrande de mes voeux.

OFFUSQUER


OFFUSQUER ou OFUSQUER, v. act. [Ofuské: 3e é fer.] 1°. Empêcher de voir: Otez-vous de devant moi, vous m' ofusquez la vûe. = 2°. Empêcher d' être vu. "Ces arbres ofusquent votre maison. = C' est aussi empêcher de voir en éblouissant: "Le soleil m' ofusque les yeux, et non pas, ofusque mes yeux. Et neutralement sans régime, une trop grande clarté ofusque. = 4°. Figurément, surpasser quelqu' un, en sorte que sa gloire soit diminuée. "Quand ce Poète, ce Peintre, ce Prédicateur parut, il ofusqua tous les aûtres.

OGE


OGE, pénult. lon. dans Dôge, brève hors delà: Il déroge, horloge, etc.

OGRE


OGRE, s. m. Espèce de monstre imaginaire, qu' on supôse manger de la chair humaine. De là cette expression proverbiale: manger comme un ogre, excessivement.

OH


OH, ou HO, interj. Elle marque la surprise, ou l' admiration, ou l' afirmation. "Oh! Oh! "Oh! que cela est beau! "Oh! pour cela, non.

OI


OI, diphtongue, qui se prononce de deux manières; car tantôt elle a le son d' un ê ouvert, comme dans conoître, paroître, françois, Anglois (qu' on prononce conêtre, pa--rêtre, Francê, Anglê.) Tantôt le son d' oa, (a fermé) comme dans Roi, emploi, Danois, Suédois (qu' on prononce, roa, enploa. da--noa, suedoa.) Dans certaines Provinces, on prononce oué, le roué, la loué, les da-noué. Voy. ÊTRE, au comencement, Rem. 2°.
   1°. Les monosyllabes se prononcent en oa: loi, bois, je dois; quoi, moi, toi, soi, etc. Il y en a fort peu d' exceptés. Soit et soient se prononcent en conversation, sê, et dans le discours soutenu, soa. Plusieurs veulent que froid et je crois aient les deux prononciations froa et frê; je croa ou je crê: tout le monde n' en convient pas. Regnier veut que droit, substantif, se prononce droa; et droit, droite, adjectif, drè, drète. Quelques-uns admettent cette distinction dans le discours familier: d' autres, en plus grand nombre, n' en veulent pas entendre parler. = 2°. Dans tous les mots terminés en oir, oire, oile, oine, oie, oise, oi a le son d' oa: devoir, gloire, moine, joie, toise: (Prononc. de-voar, gloâ-re, moa--ne, voale, joâ, toâ-ze.) = 3°. Les tems des verbes qui se terminent en çois ou çoit, ont la même prononciation: je conçois, il reçoit; pron. con-soa, re-soa. = 4°. Dans les verbes terminés en oître, oi a le son d' ê; conoître, paroître; pron. conêtre, parêtre. Plusieurs veulent que croître ait les deux prononciations; croâ-tre et crêtre. = 5°.Ois varie. Dans tous les imparfaits et les futurs conditionels, il a le son de l' ê ouvert, et cette règle n' a point d' exception: Je faisois, je chanterois, si, etc. pron. je fézê, je chan--terê, etc. Pour le présent, dans les verbes terminés en~ oir, il sone comme oa; je vois, je dois; pron. voa, doa: dans les verbes terminés en oître, il a le son d' ê; je conois, je parois; prononc. co-nê, pa-rê, et ainsi de la 3e persone, respectivement, il voit, il conoit; pron. voâ, conê. = Les noms des peuples en ois varient aussi: on dit François, Anglois, Hollandois, Polonois, Japonois, etc. comme francê, anglê, etc. On prononce, au contraire, Génois, Danois, Suédois, Hongrois, Liégois, Chinois, etc. comme Gé-noâ, Da-noâ, etc. = Les noms apellatifs, ou comuns en ois et en oit ont le son d' oa: bourgeois, carquois, exploit, détroit, etc. pron. bour-joa, ex--ploa, etc. = * Pour distinguer ces deux prononciations, il serait à souhaiter qu' on adoptât l' ortographe de Voltaire, et qu' on exprimât par la diphtongue ai les mots qui se prononcent en ê, Français, Anglais, je voudrais, je conais, il parait, il faisait; et par la diphtongue oi ceux qui se prononcent en oa; Danois, carquois, je conçois.
   Rem. Ce qui parait encôre plus nécessaire, c' est qu' en conservant l' anciène ortographe, les Poètes du moins ne fassent plus rimer ensemble des mots qui ont une prononciation si diférente, car la rime est pour l' oreille et non pas pour les yeux. En récitant ces deux vers du Flateur de Rousseau.
   Je ne fais que recueillir les voix,
   Et dirois vos défauts, si je vous en savois.
Ou l' on prononcera savê, comme il faut prononcer; et alors il n' y aura plus de rime; ou l' on prononcera savoa, pour faire sentir la rime, ce qui est une prononciation vieille et barbâre.
   OI est douteux à la fin des mots, Roi, moi, emploi, etc. = De tous les noms en oi, loi est le seul qui, suivant l' ancien usage, prène une x au pluriel: loix. Le plus grand nombre des Auteurs et des Imprimeurs l' écrivent aujourd'hui avec une s: lois.
   OIE: long; joie, qu' il voie, il emploie, etc. pron. joâ, voâ, an-ploâ, etc. Il n' y a d' excepté que monoie, qu' on prononce aujourd'hui monê, et non pas mo-noâ, comme on prononçait aûtrefois. = Plusieurs écrivent cette terminaison avec un y: oye, et prononcent oa-ie; joye, que je voye; jo-aie, voa-ie. Cette prononciation est certainement contraire à l' usage; et c' est pour ne pas prononcer de la sorte, qu' on doit substituer l' i à l' y.
   Rem. Dans les mots terminés en aie et oie, l' e est totalement muet; de sorte que ces mots ont une terminaison masculine dans la prononciation. Plaie se prononce comme paix; et j' emploie, comme l' emploi: la syllabe est seulement un peu plus longue. Il semble donc que les Poètes ne devraient pas employer ces sortes de rimes, qui ne sont féminines qu' à l' oeil, et ne le sont pas à l' oreille. Qu' on récite cette strophe de Rousseau:
   Qui marchera dans cette voie,
   Comblé d' un éternel bonheur,
   Un jour, des Elus du Seigneur,
   Partagera la sainte joie.
On croit réciter quatre vers masculins, à moins qu' on ne prononce voa-ie et joa-ie, ce qui n' est point de l' usage actuel. = C' est pis encôre, quand on mêle les rimes en oie avec celle qui se terminent en oi.
   Mais, hélas! à quel prix mon destin m' y renvoie?
   Et quel acablement empoisone ma joie?
   D' un malheureux himen qui me glace d' éfroi,
   Le bruit, depuis une heure, arrivé jusqu' à moi.
       Rouss. Ayeux chimér.
À~ consulter l' oreille, voilà quatre rimes du même son. = On ne devrait pas, non plus employer ces mots, ainsi terminés en oie ou en aie, au milieu du vers, ni devant une consone, cela est déjà défendu; ni même devant un voyèle, puisque l' e muet n' étant nullement sensible, la diphtongue qui le précède fait un hiatus avec la voyèle qui comence le mot suivant.
   Reviens de ta patrie, en proie à la tristesse,
   Calmer les déplaisirs.
       Rousseau.
  Qu' on l' entrevoie à travers des rameaux.
      De Lille.
On est forcé de prononcer, an proa a; an--trevoa a; hiatus bien désagréable, formé par la rencontre de deux a.

OIE


OIE, s. f. [Pron. oâ, monos. long.] Oiseau aquatique, plus grôs qu' une cane. "Oie sauvage ou domestique. = On apèle contes de ma mère l' oie, des contes dont on amûse les enfans; ce qui s' aplique à des chôses où il n' y a nulle aparence de vérité, ni de raison. "Ce que vous dites-là sont des contes de ma mère l' oie. = Envoyer quelqu' un paître les oies; l' envoyer promener. Mde de Sévigné y fait joliment allusion. "Vous me faites peur de cette vieille veuve, qui se marie à un jeune homme... c' est un grand bonheur de n' être pas sujette à se coifer de ces oisons là: il vaut mieux les envoyer paître que de les y mener.
   PETITE OIE, c' est le cou, les ailerons et ce qu' on retranche d' une volâille pour la faire cuire. = Fig. bâs, chapeau, gants et les aûtres ajustements nécessaires pour rendre un habillement complet. = Plus figurément encôre, ce qu' il y a de moins considérable dans bien des chôses. "J' avois déjà de la petite oie de ce qu' on apèle l' usage du monde. Mariv. c. à. d. les premiers principes de la politesse, tels que peuvent les avoir des laquais déja un peu dégourdis.

OIGNEMENT


*OIGNEMENT, s. m. Action d' oindre. Le Dict. de Trév. met ce mot sans citer, ni Auteur, ni Lexicographe: "Le lavement et l' oignement des piés. Si ce mot a été en usage autrefois, il n' est plus usité aujourd'hui.

OIGNON


OIGNON, ou OGNON, s. m. [Le 2d serait préférable, puisqu' on ne prononce pas l' i. L' Acad. dit qu' il sert à mouiller le g: cette raison ne me paraît pas fort bone. On mouille le g dans besogne, rogne, rogné, rognon etc. sans i. Pron. o-gnon, et non pas oa-gnon: celui-ci est un gasconisme. Desgr.] C' est le nom générique doné à cette partie de la racine de quelques plantes, qui est d' une forme à peu prês sphérique. = On le dit, plus particulièrement, de la racine bulbeûse d' une plante potagère. "Tête d' ognon, soupe à l' ognon. = Quand on dit ognon tout seul, c' est dans le dernier sens qu' on l' entend. = Chapelets d' ognons, certains nombre d' ognons atachés l' un à l' aûtre par leurs queûes. = On dit, proverbialement, vétu comme un ognon, qui est fort couvert de vêtemens; parce que l' ognon a plusieurs tuniques, qui s' envelopent l' une dans l' aûtre. Marchands d' ognons se conaissent en ciboules, dit-on à quelqu' un qui reproche aux aûtres des chôses qu' il sait par expérience personelle. = Se mettre ou se placer en rangs d' ognons; se placer en cercle avec des gens de distinction; vouloir tenir son coin avec eux. "M. de Saint-Brieu, dans son Diocèse, est transporté à Poitiers, qu' il souhaitoit: d' autres, en rang d' oignons, tous les jours à la Messe du Roi, n' ont rien. Sév. L' Acad. met, en rang d' oignon, au singulier.
   OGNON; dûreté douloureûse, qui vient aux piés.

OIGNONIèRE


OIGNONIèRE, ou OGNONIèRE, s. f. OGNONèT, s. m. [O-gno-niè-re, o-gnonè: mouillez le g: 3e è moy. long au 1er.] Le premier, se dit d' une terre semée d' ognons; le second, d' une sorte de poire d' été. _ On ne le dit pas serieûsement d' un petit ognon.

OILLE


OILLE, s. f. [L' i ne se prononce pas: il n' est-là que pour faire mouiller les ll: o--glie: 2e e muet.] Mot emprunté de l' Espagnol. Espèce de potage, où il entre plusieurs racines et viandes diférentes. "Pot à oille. "On servit une excellente oille.

OINDRE


OINDRE, v. act. OING, s. m. [Oein--dre, oein.] J' oins, nous oignons; j' oignois ou j' oignais; j' oignis; j' ai oint; j' oindrai, j' oindrois, ou j' oindrais; que j' oigne, j' oignisse, oignant; oint, ointe. = Froter d' huile ou de quelque aûtre chôse de semblable. Suivant Regnier, on ne le dit qu' en parlant de l' extrême-onction~ et des cérémonies dans lesquelles l' usage de huile est nécessaire. L' Acad. n' en borne pas l' usage. Elle dit: oindre une tumeur avec de l' onguent. "Les Anciens se faisoient oindre au sortir du bain. = Il est peu usité, et il vieillit.
   OINT, OINTE, participe. Il se dit substantivement dans cette phrâse: l' oint du Seigneur, qui se dit, par excellence, du Messie. "Les Rois sont les oints du Seigneur.
   OING n' a d' usage que dans cette locution, vieux oing, graisse de porc, dont on se sert pour graisser les roûes des carrosses.

OIR


OIR, OIRE: le 1er est douteux, espoir, terroir: la pénult. du 2d est longue, gloire, histoire: pron. gloâ-re, is-toâ-re.

OISE


OISE: la pénult. est longue; noise, framboise, etc. noâ-ze, fran-boâ-ze, etc.

OISEAU


OISEAU, s. m. OISELEUR, OISELIER, s. m. OISELLERIE, s. f. [Oa-zo, ze-leur, lié, zèlerie: 2e dout. au singulier du 1er, long. au plur. oiseaux; e muet au second et au 3e, è moyen au 4e, dont la 3e et la dern. e muet.] Oiseau, animal à deux piés, ayant des plumes et des ailes. Oiseleur, se dit de celui dont le métier est de prendre des oiseaux à la pipée, aux filets. Voy. COMPAGNE. _ Oiselier se dit de celui dont le métier est d' élever et de vendre de petits oiseaux. Oisellerie est l' art de les prendre et de les élever.
   OISEAU entre dans plusieurs expressions figurées du style familier. _ Être batu de l' oiseau; être rebuté des traverses qu' on a essuyées. "Vous n' êtes pas en état d' envisager votre retour: vous êtes encôre trop batus de l' oiseau, comme disait l' Abbé au reversis. Sév. Voy. BRANCHE, BUISSON, ENVOLER. _ Ce n' est pas viande pour vos oiseaux; cela est trop bon pour vous, ou bien, cela pâsse votre capacité. _ La belle plume fait le bel oiseau; les beaux habits servent à relever la bone mine. _ La belle cage ne nourrit pas l' oiseau: quelquefois on fait mauvaise chère dans une belle maison. = Populairement et bâssement, l' oiseau de Saint Luc, le boeuf.
   À~ vol d' oiseau, adv. En ligne droite. D' ici à un tel endroit, il n' y a que quatre lieûes, à vol d' oiseau: on en compte pourtant six.
   OISEAU se dit aussi d' une petite caisse, ouverte par le haut, dont les manoeuvres se servent pour porter le mortier sur les épaules.

OISEUX


OISEUX, EûSE; OISIF, ÎVE, adj. OISIVEMENT, adv. [Oa-zeû, zeû-ze, zif, zîve, zîveman: 2e lon. aux deux premiers et aux deux derniers, 3e e muet au 2d, 4e et 5e.] Tous ces mots expriment l' état d' une persone qui ne fait rien, qui demeure sans rien faire. "Gens oiseux et fainéans: homme oisif: mener une vie oiseûse ou oisîve. "Oisivement, d' une manière oisive. = À~ y regarder de prês, dit le P. BOUHOURS, oisif va plus à la persone qu' à la chôse. On dit, un homme oisif, des gens oisifs; mais on ne dit pas, des discours oisifs, des paroles oisives, quoiqu' on dise, une vie oisîve. _ Oiseux, au contraire, se dit plutôt des chôses que des persones. De plus, oiseux est un mot consacré, quand on parle des paroles dont on rendra compte: on dit, paroles oiseûses, et non pas, paroles oisîves. = M. de Saint Marc, sur deux vers de Boil. où le Poète parle de lit oiseux, de plume oiseûse, dit que le mot oiseux, malgré l' usage que beaucoup d' Écrivains en ont fait aûtrefois, n' a pu parvenir à s' établir dans notre langue, à côté du mot oisif; que Boileau s' est servi d' un mot déja vieilli de son tems, et qui même aujourd'hui n' est susceptible d' aucune signification précise. _ L' Académie a continué de dire, gens oiseux, vie oiseûse. Dans la seconde édition de son Dictionaire, elle avait dit que oiseux, en parlant des persones et de la vie, començait à vieillir, et que paroles oiseûses s' emploie plus ordinairement en matière de dévotion. Dans la dernière, elle a suprimé la première remarque. = M. le Comte d' Albon, répondant à un Critique, lui dit: "Vous ne connoissez rien de plus oiseux que la question qui fait l' objet de mon discours. Vous avez sans doute voulu dire, inutile. = Les Poètes emploient volontiers oisif, apliqué aux chôses, et lui font précéder le substantif: "L' oisive nonchalance. Rouss. "L' oisive indolence. Gresset. "Amuser les oisives oreilles. L. Rac. = Oisivement n' était pas d' abord dans le Dict. de l' Acad. Elle l' a mis dans la dern. édit. sans remarque et sans exemple.

OISILLON


OISILLON, s. m. [Oa-zi-glion: mouillez les ll.] Diminutif. Petit oiseau. Style familier.

OISIVETÉ


OISIVETÉ, s. f. [Oa-zîveté: 2e long. 3e e muet, dern. é fer.] État de celui qui est oisif. Demeurer, languir, croupir dans l' oisiveté. Vivre dans une molle oisiveté. = Le Proverbe dit: l' oisiveté est mère de tous vices. De là l' épitaphe satirique, mise sur la tombe d' une Princesse, mère d' un fils vicieux: Ci-gît l' oisiveté. = Voyez LOISIR.

OISON


OISON, s. m. [Oa-zon.] Le petit d' une oie. Figurément, Idiot: C' est un oison, un oison bridé; il se laisse mener comme un oison. St. famil. Voy. OIE.
   OîTRE, OîVRE: pénult. longue: croître, poîvre.
   OLE: l' o est bref, excepté dans drôle, geôle, môle, rôle, contrôle, il enjôle, il enrôle, il vôle (dérobe). Dans il vole en l' air, il est bref.

OLÉAGINEUX


OLÉAGINEUX, EûSE, adj. Huileux. Il ne se dit que parmi les Savans.

OLFACTOIRE


OLFACTOIRE, adj. [Olfak-toâ-re: 3e lon. 4e e muet.] Terme d' Anatomie. "Les nerfs olfactoires, qui ont raport à l' odorat.

OLIGARCHIE


OLIGARCHIE, s. f. OLIGARCHIQUE, adj. [Oligarchi-e, chike.] Ils se disent d' un Gouvernement où l' autorité souveraine est entre les mains d' un petit nombre de persones.

OLIVâTRE


OLIVâTRE, adj. OLIVAISON, s. fém. OLIVE, s. f. OLIVIER, s. m. [Olivâ--tre, vèzon, ve, vié: 2e long. au 1er, è moyen au 2d, e muet au 3e, é fermé au dern.] Olive est un fruit à noyau, dont on tire de l' huile, et qui est bon à manger, quand il est préparé d' une certaine façon. Olivier, arbre qui porte les olives. Olivaison, saison où l' on cueuille les olives. Olivâtre; qui est de couleur d' olive.
   Rem. suivant l' Acad. on dit quelquefois olive pour olivier. "Rameau d' olives. Le Jardin des Olives. "L' olive est le simbole de la paix. Dans le Dict. Néol. on critique un Auteur qui avait dit: "Dans la guerre, un simple rameau d' olive qu' on porte à la main, ouvre une entrée libre par-tout. L' Auteur, dit-on, s' est ressouvenu du Jardin des Olives, que ceux qui parlent bien, apellent pourtant le Jardin des Oliviers. _ Je crois que la remarque est juste, et qu' olive pour olivier est vieux et inexact. On dit, un rameau de poirier, et non de poires. On pourrait peut-être tolérer Jardin des Olives, comme locution consacrée. Ce qui l' a introduite c' est qu' oliva et olea en latin, signifient tout à la fois, et l' arbre, et le fruit.

OLOGRAPHE


OLOGRAPHE, adj. m. Terme de Pratique. Il se dit d' un testament écrit tout entier de la main du Testateur.

OMBILIC


OMBILIC, s. m. OMBILICAL, ALE, adj. [Onbilik, likal, kale.] Ombilic est synonyme de Nombril. Celui-ci est le mot ordinaire: l' aûtre a un air plus savant. C' est un pédantisme aux Médecins eux-mêmes de s' en servir en conversation. Ombilical, qui apartient, ou qui a raport au nombril. "Cordon ombilical.

OMBRAGE


OMBRAGE, s. m. OMBRAGER, v. act. OMBRAGEUX, EûSE, adj. OMBRE, s. f. [Onbrage, gé, geû, geû-ze, onbre; 1re lon. 2e e muet au dern. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d, lon. au 3e et 4e.] Ombre est l' obscurité causée par un corps oposé à la lumière. Ombrage est l' ombre que font les arbres. Figurément. Défiance, soupçon. Ombrager, faire, doner de l' ombre. "L' ombre de la terre caûse l' éclipse de la lune. "L' ombre de St. Pierre guérissait les malades. "Ces arbres font un bel ombrage: ils ombragent tous les environs. Doner de l' ombrage à... Prendre de l' ombrage de... Tout lui fait ombrage. "Vos fréquentes visites lui causent de l' ombrage. = Ombrageux se dit, au propre, des chevaux, mulets, etc. sujets à avoir peur de leur ombre, ou de quelque objet qui les surprend. Au fig. soupçoneux, qui prend aisément des ombrages.
   Rem. 1°. On dit, au figuré, faire ombrage, sans article, et causer, doner de l' ombrage avec l' article. "Au lieu de l' envoyer dans sa Patrie... pour qu' il ne fît plus aucun ombrage, il le noma son Lieutenant en Irlande. Hist. d' Angl. Il falait mettre, pour qu' il ne fît plus d' ombrage à persone; ou bien, pour qu' il ne causât plus aucun ombrage. = 2°. Ombrager, ombrer: Le premier se dit des corps qui font de l' ombre. "Une infinité d' arbres ombragent la campagne. Ombrer ne se dit qu' en Peintûre: "Ce Peintre ombre bien; c. à. d. met bien les ombres dans un tableau. "Un tableau bien ombré. L. T. = * Un Poète moderne a dit, s' ombrager pour, prendre de l' ombrage: c' est un néologisme, qui ne parait pas heureux.
   Quiconque est sans génie est sûr de ton sufrage:
   Mais, malheur à celui dont ton orgueil s' ombrage.
       Ép. de Boil. à Volt. par M. Clém.
M. de St. Marc dit qu' ombrager a toujours été de peu d' usage en notre langue, et que nous n' en avons conservé que le participe passif, qui régit l' ablatif:
   Et son feutre, à grand poil, ombragé d' un panache.
       Boileau.
Il ajoute que Boileau a été repris d' avoir fait ce verbe actif, et de lui avoir doné le sens de cacher.
   Je le vois ce dragon tout prêt à m' ombrager.
Dans cette acception, ce verbe n' est pas usité, il est vrai, mais dans le sens de, faire ombre, il est en usage, et l' Académie l' admet. "Cet arbre ombrageoit tous les environs. = 3°. Ombrageux, ombragé, ombreux: le premier ne se dit point dans le propre: on ne dit point des lieux ombrageux, mais ombragés. Il ne se dit qu' au fig. des animaux qui ont peur de leur ombre, et des hommes soupçoneux et défians. Ombreux, qui fait de l' ombre, ne se dit qu' en Poésie. "Les ombreûses forêts. _ Ce mot n' est point dans le Dict. de l' Acad. L. T. _ Le Rich. Port. dit qu' il vieillit. = 4°. * On dit, prendre ombrage, ou de l' ombrage, etc. Marsolier dit, dans le même sens, prendre de l' ombre: "Il s' étoit aperçu que le Duc avoit pris de l' ombre de son premier voyage en France. Vie de St. Fr. de Sales. _ Mde de Sévigné dit aussi faire ombre, pour, faire ombrage: "On l' a voulu chasser de l' Hôtel de Condé, parce qu' il faisoit ombre aux autres. = Faire ombre a un aûtre sens; c' est obscurcir le mérite, le crédit de quelqu' un par un plus grand.
   En style proverbial, avoir peur de son ombre; être extrêmement peureux ou soupçoneux et défiant: "Il a peur de son ombre: il ne dort ni nuit ni jour. Télém. Cela est un peu trop familier pour un Poème héroïque. = C' est l' ombre et le corps se dit de deux persones inséparables. "Mde de Coulanges est toujours obsédée de notre cousin: il ne paroit plus qu' elle l' aime; et cependant c' est l' ombre et le corps. Sév. _ D' aûtres disent: il ne la quitte pas plus que son ombre; il la suit comme l' ombre fait le corps. = On dit, poétiquement, les ombres (les ténèbres) de la nuit. Les ombres de la mort, du tombeau. Et figurément, dans le haut style: les grandeurs du monde ne sont qu' ombre et fumée.
   OMBRE, au figuré: 1°. Protection. "L' ombre d' un Maître si puissant le met à couvert. "Cet homme, quoique hors d' état d' agir, est une bone ombre dans sa maison: il en impôse par sa présence. Il se dit sur--tout adverbialement, à l' ombre d' une protection si puissante. 2°. Avec la prép. sous, Prétexte. "Sous ombre d' amitié, de lui vouloir du bien. "Sous ombre qu' il avoit des afaires pressantes. = 3°. Aparence: "La Reine n' avoit joui que d' une ombre de crédit. "La République Romaine n' étoit plus que l' ombre de ce qu' elle avoit été. = Prendre l' ombre pour le corps, l' aparence pour la réalité. = Pas l' ombre, point du tout. "Il a de la vivacité, de la gentillesse dans l' esprit, mais pas l' ombre du sens commun. Marm.
   OMBRE, Mânes. "Leur sang sera agréable à l' ombre de ce Héros. Télém.
   OMBRE, en Peintûre, couleur obscûre, qu' on emploie dans un tableau, pour représenter les parties des objets les moins éclairées, et aussi pour doner du relief aux objets éclairés. = On dit, figurément, d' un léger défaut dans une persone vertueûse, dans un bon ouvrage: c' est une ombre au tableau.

OMBRER


OMBRER, v. act. Mettre les ombres dans un tableau. Voy. Ombrage. Rem. 2°.

OMBREUX


OMBREUX. Voy. OMBRAGE, Rem. 3°.

OMELETTE


OMELETTE, s. f. [Omelète: 2e et 4e e muet, 3e è moy.] OEufs batus ensemble, et cuits dans la poèle avec du beurre, de l' huile, ou du lard.

OMETTRE


OMETTRE, v. act. [Omètre: 2e è moy. 3e e muet.] Il se conjugue comme Mettre. _ Manquer à faire ou à dire quelque chôse qui est d' obligation et d' usage, ou qu' on s' était proposé de faire ou de dire. "Il a omis ce qu' il y avoit de plus important. "Je n' omettrai rien pour vous satisfaire. "Il n' omet rien pour parvenir à ses fins, etc.
   Rem. Dans le dernier siècle, on écrivait et l' on prononçait obmettre, obmission. Au comencement de celui-ci, La Touche remarquait encôre qu' on prononce le b dans obmettre, obmis, et qu' on ne le retranche que dans omision. L' Acad. écrivait obmettre, et se contentait de dire que quelques-uns prononcent et écrivent omettre. Aujourd'hui le b a disparu de la prononciation, et même de l' ortographe.

OMISSION


OMISSION, s. f. [Omi-cion, en vers, ci-on: _ Anciènement on écrivait obmission. Voy. OMETTRE, Rem.] Manquement à une chôse de devoir et d' usage. "Faire une omission. "C' est une légère omission, une omission considérable. = Péché d' omission; qui consiste à ne pas faire ce qui est comandé, comme le péché de comission à faire ce qui est défendu.
   Rem. Omission ne s' emploie guère au pl. mais en ce nombre, il signifie, non l' action d' omettre, mais les chôses omises; comme on dit la charité, vertu, et les charités, les actes de cette vertu. "Ne vous paraissoient-ils pas véritablement coupables par leurs omissions et leur paresse.

OMME


OMME, pénult. brève: pomme, somme, etc. D' Oliv.

OMOPLATE


OMOPLATE, s. f. Ôs de l' épaûle, plat et large.

ON


ON, à la fin des mots, est bref: au milieu il est long, soit devant une consone, ou devant l' e muet: conte, monde, songe; matrône, aumône, trône, etc. Si l' n est redoublée, l' o est bref: couronne. D' Oliv.

ON


ON pron. général, qui marque une espèce de 3e persone générale et indéterminée, comme quand je dis, on étudie, on joûe, on mange, je parle en général des persones qui étudient, qui joûent, qui mangent. = C' était une faûte assez comune, même à la Cour, du tems de Vaug. de prononcer un z aprês on, suivi d' une voyèle: on disait, on za fait, on zoûvre. Aujourd'hui il n' y a plus que le peuple qui fasse cette faûte en certaines Provinces. = Plus anciènement, on disait, l' homme dit, pour l' on dit; d' où vient que dans les anciens livres vous trouverez écrit, l' hom dit, l' hom fait, au lieu de l' on dit, l' on fait; et dans d' anciens actes, hom fait savoir, pour, on fait savoir. _ Malherbe a encôre dit: "L' homme est d' autant plus travaillé, etc. pour l' on est, etc. Mén.
   1°. Quelquefois on reçoit l' article, et l' on dit l' on au lieu d' on. On se sert de l' on pour rendre le discours plus coulant, et dans le ocasions où on, avec le mot précédent, aurait une prononciation trop rûde, ou donerait lieu à quelque équivoque; sur quoi il faut consulter l' oreille; mais, en général, on vaut mieux que l' on. = Il parait à l' Ab. Girard qu' on doit se servir de l' on aprês et, si, ou, et même aprês que, lorsque le mot qui suit comence par la syllabe com. "On promet souvent, et plus souvent l' on manque de parole. "Si l' on veut. "On vous l' enverra, ou l' on vous l' aportera. "On a promis que l' on comenceroit bientôt. Remarquez pourtant que si les pronoms la, le, lui, leur suivent immédiatement, il vaut mieux se servir de on: "Si l' on l' a fait, et l' on le lui donera sont bien durs. "L' on l' avoit volé. La Font. "L' on lui mit par écrit. Id. "Les lieux d' où l' on les tire. Pluche. J' aimerais mieux on dans ces ocasions. = 2°. Quoique on soit de la 3e persone, il est quelquefois employé à la place du pronom de la 1re, je et nous. Ainsi, un homme qui aura été long-tems sans en voir un aûtre, lui dira fort bien: "Il y a long-tems qu' on ne vous a vu, c' est-à-dire, que je ne vous ai vu, ou que nous ne vous avons vu. Mais il ne doit s' employer ainsi que dans le style badin, et il marque un grand air de familiarité, qu' il n' est pas toujours à propôs de prendre. = Les Auteurs, dans leurs Avertissemens, emploient souvent on au lieu de je. C' est aparemment par modestie, pour éviter de nomer trop souvent leur persone. Buf. = 3°. Il est aussi quelquefois élégant de mettre la seconde persone au lieu d' on: "C' est quelque chose de bien terrible qu' une tempête: il est bien dificile de ne pas craindre quand vous voyez les flots soulevés, qui viènent fondre sur vous. _ Ce vous intéresse davantage que si vous disiez, on voit les flots, etc. Mais ce serait abuser de ce tour, que de dire à quelqu' un: "Quand vous volez sur les grands chemins, et que vous êtes pris, on vous pend dans les 24 heures; au lieu de dire, quand on vole, etc. on est pendu, etc. Wailly. = 4°. On est aussi quelquefois un terme collectif: "On se batait en désespérés; c. à. d. les deux partis se bataient comme des gens désespérés. "On se méfiait les uns des aûtres; c. à. d. les deux partis se méfiaient les uns des aûtres. _ Mais quoique collectif, il veut le v. au singulier, et comme collectif, il régit les noms adjectifs au pluriel, comme on le voit dans les deux exemples. = Hors de ces ocasions, ces noms adjectifs doivent être au singulier. * Un Auteur moderne a dit: "Il (J. J. Rousseau) prétend qu' on seroit plus vertueux, si l' on étoit moins savants. Il faut moins savant, au singulier. = On met quelquefois le réciproque à la place du pronom on: "Ces chôses là se sentent, au lieu de, on sent ces chôses là. Mais ce changement ne peut pas avoir lieu pour tous les verbes. = 5°. On est-il déclinable suivant les genres? Une femme doit-elle dire: on n' aime pas être méprisée, ou méprisé? C' est aux Dames à décider cette question. Mde de Sévigné leur a doné l' exemple de mettre le féminin. Un malheur continuel pique et ofense: on hait d' être houspillée par la fortune. "Ayez soin de me mander si vous les avez reçues (ces lettres); quand on est fort éloignée, on ne se moque plus des lettres qui commencent par: j' ai reçu la vôtre, etc. "Dans l' absence on est libérale des jours, on les jette à qui en veut. = Dans une critique de la Princesse de Clèves, on dit, que quand on parle en général, il faut se servir du masculin, (singulier) encôre que ce qu' on dit se raporte à une femme, ou même à plusieurs: on blâme donc cette phrâse: "Il étoit dificile de n' être pas surprise, quand on ne l' avoit jamais vu. = 6°. On, comme tous les nominatifs, précède ordinairement le verbe: on dit, on fait. Dans les interrogations, on le met aprês: que dit-on? Dans les tems composés, on le place entre le verbe auxiliaire et le participe: qu' a-t' on fait? Remarquez que quand on suit le verbe et que ce verbe finit par une voyèle, on ajoute un t avec l' apostrophe. "Aime-t' on mieux, et non pas aime on mieux. Il a cela de comun avec les pronoms il et elle. Que si le verbe finit par un d, ce d se prononce comme un t: prend-on, pron. pran-ton. = 7°. Ce n' est pas écrire correctement que de mettre dans la même phrâse deux on qui ne se raportent pas à la même persone, comme, par exemple, on peut lire un livre qu' on a fait: le 1er on se raporte au Lecteur, et le 2d à l' Auteur. Pour éviter cet embârras, dans le sens, il falait mettre, qui a été fait, ou qu' un tel Auteur a fait. "Il n' est point de remède si amer qu' on ne se résolve de prendre, quand on a l' adresse d' en corriger l' amertume. Marsolier. Il y a le même défaut dans cette phrâse: le 1er on se raporte à celui, qui prend le remède, et le 2d on à celui, qui le prépâre.

ONC


*ONC, ou ONQUES, ou ONCQUES, adv. Vieux mot. Jamais. On l' emploie encôre dans le marotique.
   Jamais du mal il n' avoit eu l' idée
   Ne disoit onc un immodeste mot.
       Ververt.
  On ne voit là que pâle effigies,
  Qui du champagne onc ne furent rougies.
      Gresset.
   Et cherchez bien de Paris jusqu' à Rome:
   Onc ne verrez sot, qui soit honête homme.
       Rousseau.
  Monsieur l' Abbé, vous n' ignorez de rien,
  Et ne vis onc mémoire plus féconde. Id.

ONCE


ONCE, s. f. [1re lon. 2e e muet.] Sorte de poids pesant huit grôs. "La livre de Paris est de seize onces: la livre romaine est de douze onces seulement. "Il y a huit onces au marc, et huit grôs ou dragmes à l' once. = On dit, proverbialement, n' avoir pas une once de bon sens, de jugement, etc. en avoir bien peu.

ONCLE


ONCLE, s. m. [Onkle: 1re long. 2e e muet.] Le frère du père ou de la mère. = Grand oncle, le frère du Grand Père, ou de la Grand' Mère. = Oncle à la mode de Bretagne, le cousin germain du père ou de la mère.
   REM. Oncle, n' est pas un terme noble. Dans le haut style, il faut l' exprimer par une périphrâse. "Je n' ai pas voulu sans nécessité m' oposer au Dieu de la Mer, qui est mon oncle. Madame Dacier, Odyssée. C' est Minerve, qui parle. Elle devoit dire: c' est le frère du grand Dieu de qui j' ai reçu le jour.

ONCTION


ONCTION, s. f. ONCTUEUX, EûSE, adj. ONCTUOSITÉ, s. f. [Onk-cion, en vers ci-on; onktu-eû, eû-ze, ozité: 1re lon. 3e lon. au 2d et au 3e.] Onction, est l' action d' oindre. Il ne se dit qu' en parlant des Sacremens et de certaines cérémonies de l' Église. = Fig. On le dit des chôses, qui touchent le coeur et le portent à la piété: "L' onction intérieure; l' onction de la grâce, du St. Esprit. "Il y a de l' onction dans ce sermon. = Quelques-uns disent, ce Prédicateur a de l' onction; mais mal: onction se dit du Discours et non de l' Orateur. = Onctueux et onctuosité ne se disent, au contraire, que des chôses matérielles, pour exprimer ce qui est d' une substance grâsse et huileûse. "Ce bois est onctueux: l' onctuosité du bois fait qu' il brûle plus aisément. On ne dit point d' un Prédicateur qu' il est onctueux, ni de ses sermons qu' ils ont de l' onctuosité. = Onctueux et onctuosité sont des termes de didactiques: on ne s' en sert guère dans le discours ordinaire.

ONDE


ONDE, s. f. ONDÉ, ÉE, adj. ONDÉE, s. f. [1re lon. 2e e muet au 1er, é fer. aux trois aûtres, lon. au 3e et au 4e.] Onde, est le soulêvement de l' eau agitée. "Le vent fait des ondes, élève des ondes. = En Poésie, on le dit pour l' eau en général et principalement pour la mer. "Sur la terre et sur l' onde. "L' onde amère. "Voguer sur les ondes, à la merci des ondes; au gré de l' onde, l' onde noire: le Styx, le Cocyte. "Pâsser l' onde noire. = Au pluriel, il se dit de ce qui est en figûre d' onde. "Les ondes d' une moire, d' un camelot. "Les ondes d' un bois véné.
   ONDÉ, ÉE, façoné en ondes. "Bois, camelot ondé: moire ondée.
   ONDÉE, grôsse pluie, qui vient tout-à-coup, et qui ne dûre pas long-tems. "Il faut laisser pâsser l' ondée: "Il pleut par ondées.

ONDOIEMENT


ONDOIEMENT, s. m. ONDOYER, v. n. [On-doa-man: on-doa-ié: 1re lon. 3e é fer. au 2d.] Ondoyer, neutre. Floter par ondes. Il ne s' emploie qu' au figuré. "On voyait la fumée ondoyer. "Ses cheveux ondoyaient au gré des vents: les étendards ondoient dans la plaine. = Le participe actif se dit adjectivement: "Fumée ondoyante, cheveux, drapeaux ondoyans; vagues, flâmes ondoyantes. On dit même les plaines ondoyantes, quoique ce ne soient pas les plaines, qui ondoient, mais les épis, dont elles sont couvertes. = Il ne se dit qu' en Poésie.
   ONDOYER, actif, Baptiser sans cérémonies. "On l' a ondoyé. Il a été ondoyé à la maison.
   ONDOIEMENT, ne se dit que dans ce dernier sens. Baptême où l' on n' observe que l' essentiel du Sacrement: les cérémonies se supléent ensuite.

ONDULATION


ONDULATION, s. f. [Ondula-cion.] Terme de Physique. Moûvement par ondes: "Une pierre jetée dans l' eau y caûse des ondulations.

ONDULEUX


*ONDULEUX, EûSE, adj. Mot nouveau. Qui ondoie.
   Sa noble écharpe à replis onduleux,
   Ceint la Déesse et retombe avec grâce.
       Imbert.

ONE


ONE: l' o est long, aumône, amazône, matrône, etc.

ONÉRAIRE


ONÉRAIRE, ONÉREUX, EûSE, adj. [Onérère, reû, reû-ze, 2e é fer. 3e è moy. au 1er, lon. à tous les trois.] Onéraire, se dit des persones, et onéreux des chôses. "La charge de Tuteur onéraire est onéreûse à ceux, qui ont de la probité. Le 1er est un terme de Pratique. Son emploi est peu étendu. Tuteur onéraire, qui, sous un Tuteur honoraire, administre les biens d' un pupille. Syndic onéraire, qui, étant plus particulièrement chargé d' une afaire comune à plusieurs, en devient comptable.
   ONÉREUX, incomode, qui est à charge. "Cela lui est onéreux. "Le voisinage de ces gens là est fort onéreux. "Charge, condition onéreûse. "On lui a doné cela à titre onéreux, et non pas gratuitement.

ONGLE


ONGLE, s. m. ONGLÉE, s. f. ONGLèT, s. m. [1re lon. 2e e muet au 1er, é fer. au 2d, è moy. au 3e.] Le genre masculin est à remarquer dans ongle: plusieurs le font mal à propôs fém. et disent des ongles longues: c' est ongles longs qu' il faut dire. = Ongle, partie dûre et ferme, qui coûvre le bout de dessus des doigts. "Les ongles des mains, des piés. "Arracher un ongle. "Se couper, se ronger les ongles est mieux que couper, ronger ses ongles. = En style proverbial avoir bec et ongles, savoir se défendre. _ Rogner les ongles à quelqu' un, le réprimer, le réduire. "Si vous continuez vos entreprises, je vous rognerai les ongles de si près qu' il vous en cuira. Louis XIII. _ Avoir du sang aux ongles, du coeur, de l' honeur. _ Il a de l' esprit jusqu' au bout des ongles, il en a beaucoup. L' Acad. ne le dit que des enfans.
   ONGLÉE, engourdissement douloureux au bout des doigts, causé par un grand froid.
   ONGLèT, bande de papier, ou de parchemin, que l' on cout au dôs d' un livre, en le reliant, pour y coller des planches, des cartes, etc.

ONGUENT


ONGUENT, s. m. [Ongan: 2 longues.] Médicament de consistance plus molle que dûre, qu' on étend sur du papier ou sur du linge, et que l' on aplique sur des plaies, des tumeurs, etc. = On dit, proverbialement, d' une afaire désespérée, qu' il n' y a point d' onguent, qui la puisse guérir. Et pour flater une persone de petite tâille, on dit que. "Dans les petites boîtes sont les bons onguens. Voy. MITAINE. = Autrefois on disait onguent pour parfum, et Chapelain croyait qu' on pouvait s' en servir avec quelque épithète, comme, exquis, précieux, en parlant des parfums, dont l' Écriture-Sainte faite mention. _ Il n' est plus d' usage en ce sens. Acad. L. T.

ONYX


ONYX, s. m. [Onikce, l' e extrêmement muet.] Espèce d' agathe très-fine, de couleur blanche et brune.

ONZE


ONZE, adjectif numéral. ONZIèME, adj. ONZIèMEMENT, adv. Nombre qui contient dix et un. En chifres arabes, 11: en chifres romains, XI. "Onze chevaux: onze francs. "Il est entre dix et onze; entre onze et douze. = S. m. Le onze du mois. "Dans ce caran le onze n' est pas bien marqué. "L' onzième ou la onzième page. = S. m. "Il a un onzième dans cette afaire.
   Rem. 1°. On écrivait anciènement unze; et Corneille a encôre écrit l' unzième. = 2°. Faut-il dire l' onze, l' onzième, ou le onze, le onzième? les opinions sont partagées. Vaugelas et Th. Corneille n' aprouvaient que le 1er, et le P. Bouhours, en disant que Vaugelas avait raison, ajoute que, comme depuis ses Remarques plusieurs disent le onzième, il ne voudrait pas les condamner. Ceux, qui sont pour le onzième, dit-il encôre, défendent leur opinion par l' usage, qui fait dire du onze: j' ai reçu des lettres du onze, et non pas de l' onze. _ M. Brossette dit que Boileau, en récitant ce vers:
   Se vienne, en nombre pair, joindre à ses onze soeurs.
aspiroit le mot onze, ne l' unissant pas à l' s de ses. L' Acad. dit aussi qu' on ne prononce pas plus devant onze la consone finale (du mot précédent) que s' il y avoit une aspiration. = Pour onzième, elle remarque qu' on écrit également le onzième et l' onzième, et ne décide rien.

OPACITÉ


OPACITÉ, s. f. OPAQUE, adj. Ce sont termes didactiques. Opaque, qui n' est point transparent. Opacité, qualité de ce qui est opaque. "Corps, matière opaque: "L' opacité de ce corps. = L' adjectif est plus usité que le substantif.

OPALE


OPALE, s. f. Espèce de pierre précieûse.

OPÉRA


OPÉRA, s. m. [1re é fer. Il n' a point d' s au pluriel. On trouve dans de bons livres, des opéras comiques, des opéras à ariettes, des opéras en vaudevilles, etc. C' est peut-être la faûte des Imprimeurs.] Pièce de théâtre en musique, ordinairement acompagnée de machines et de danses. = C' est aussi le lieu, où l' on représente ordinairement ces sortes de pièces. = On dit, proverbialement, d' une chôse dificile que, c' est un opéra. _ Suivant Bouhours, on le dit aussi d' un bel ouvrage d' esprit, du moins en badinant. On ne le dit plus en ce sens.

OPÉRANT


*OPÉRANT, ANTE, adj. Verbal. Ce mot a été employé et probablement forgé par Pluche. Il lui done le sens de fécond, fertile: "La main des Alchimistes n' est pas plus opérante en productions de métaux, que Saturne, ou Jupiter, ou le Soleil même, dont les foibles talens, à cet égard, sont à présent plus que jamais conus.

OPÉRATEUR


OPÉRATEUR, s. m. OPÉRATION, s. f. OPÉRER, v. act. et neut. [2e é fer. tion dans le 2d a le son de cion, en vers ci-on.] Opérer, c' est 1°. Faire produire quelque chôse. "La mort de J. C. a opéré notre rédemption. "Opérer des miracles. "Qu' avez-vous opéré dans cette afaire. _ V. n. "Cet apareil étoit artificiellement combiné... pour opérer avec force sur l' esprit du peuple. Hist. d' Angl. _ On le dit sans régime des remèdes: "Cette médecine a bien opéré: elle comence à opérer. = On dit, par ironie qu' un, homme a bien opéré, pour dire qu' il n' a rien fait qui vâille. = 2°. En parlant des chimistes et des chirurgiens, travailler de la main. Dans ces arts là, il ne sufit pas de savoir et de raisoner: il faut opérer. _ On le dit aussi des Algébristes et des Arithméticiens.
   OPÉRATEUR, celui qui fait des opérations de chirurgie. "Habile opérateur. _ On le dit plus souvent d' un charlatan, d' un vendeur d' orviétan et arracheur de dents.
   OPÉRATION, est 1°. L' action de ce qui opère. "Les opérations de Dieu, de la natûre. = 2°. L' action du St. Esprit, de la grâce sur la volonté. = 3°. En Philosophie, les opérations de l' entendement; la simple idée (dans la vieille école la simple apréhension) le jugement qu' on fait des chôses, et le raisonement. = 4°. Action méthodique du chirurgien sur quelque partie du corps humain. "La saignée est plus qu' on ne pense une opération délicate et critique. "C' est une opération dangereûse que de trépaner. "Ce chirurgien a fait plusieurs belles opérations. = On dit aussi des opérations d' arithmétique, de chimie. = 5°. Action d' un remède. "La médecine comence à faire son opération. "Son opération est lente. = On dit plus ordinairement: elle comence d' opérer; elle opère lentement. = 6°. On dit, en termes de guerre, les opérations de la campagne. = 7°. En style proverbial, on dit ironiquement à quelqu' un, qui a fait tout de travers, qui n' a rien fait qui vâille: voilà une belle opération! ou, vous avez fait là une belle opération.

OPIAT


OPIAT, s. m. ou OPIATE, s. f. [Plusieurs et La Touche entre aûtres, préféraient le second. L' Acad. n' avait d' abord mis que le premier. Ensuite elle mit l' un et l' aûtre, ne le marquant pourtant que masculin. Dans la dern. édit. elle ne met qu' opiat, et elle avertit que le t se prononce.] Sorte d' électuaire, d' une consistance un peu molle, et dans lequel il entre divers ingrédiens. = Pâte ou poudre rouge, dont on se sert pour nétoyer les dents.

OPILATION


OPILATION, s. f. OPILER, v. act. Termes de Médecine. Obstruction. Obstruer. "Ces viandes opilent la rate; caûsent des opilations.

OPINANT


OPINANT, s. m. OPINER, v. n. OPINION, s. f. [Opinan, né, nion, en vers ni-on: 3e lon. au 1er, é fer. au 2d.] Opiner, dire son avis dans une compagnie sur une chôse, qui a été mise en délibération. Opinant, celui qui opine. Opinion, sentiment de celui, qui opine. Voy. SENTIMENT. "Les Juges opinèrent à la mort. "Ils ont opiné à recomencer la procédûre. "Le premier opinant dit, etc. "Tous furent de l' avis du premier opinant. "Tous les opinans furent du même avis. "Prendre les opinions; aler aux opinions. "Les Juges sont aux opinions. "Chacun motiva son opinion.
   OPINION, est aussi 1°. Croyance probable. "La démonstration engendre la science et l' argument probable n' engendre que l' opinion. = 2°. Sentiment: "C' est votre opinion, ce n' est pas la miène: je ne suis pas de cette opinion. = 3°. Jugement que l' on porte de... "Cet homme a bone opinion de lui-même. "J' ai mauvaise opinion, ou une bien mauvaise opinion de cette femme, de cette afaire. "Les hommes n' ont jamais une meilleure opinion de nous, que lorsque nous les aidons à avoir une bonne opinion d' eux-mêmes. MARIN, l' Homme Aimable. = Dit-on, être d' opinion que? La chôse me parait douteûse: je n' en ai guère vu d' exemples. "Je suis d' opinion que non-seulement l' étendûe, mais le corps ne peut être conçu indépendamment d' aûtres chôses. Leibnitz.

OPINIâTRE


OPINIâTRE, adj. OPINIâTRÉMENT, adv. OPINIâTRER, v. act. OPINIâTRETÉ, s. f. [Opi-niâ-tre, treman, tré, treté: 3e lon. 4e e muet au 1er et au dern. é fer. au 2d et au 3e, en vers opini-âtre, etc.] Opiniâtre, obstiné, entêté, qui est trop fortement ataché à son opinion, ou à sa volonté. Il se dit des persones et des chôses, qui ont raport à la persone. Un enfant, un homme, un esprit opiniâtre. "Esprit opiniâtre; travail, silence, combat opiniâtre. "Mal, fièvre, rhume opiniâtre. = Substantif, il ne se dit que des persones. "C' est un opiniâtre. "Les opiniâtres sont bien haïssables.
   REM Opiniâtre se dit du mal, et ferme du bien. "Les dévots ne sont donc pas opiniâtres, dit Mallebranche; ils sont seulement fermes, comme ils doivent être; et les libertins sont toujours opiniâtres, quand ils ne demeureroient qu' une heure dans leur sentiment; parce qu' on est seulement opiniâtre, lorsqu' on défend une faûsse opinion, quand même on ne la défendroit que peu de tems. Voy. ENTêTÉ. = Opiniâtre, aime à suivre le substantif qu' il modifie. Madame de Sévigné le fait précéder. "Cette opiniâtre aversion est une chôse extraordinaire; et Corneille; l' opiniâtre zèle. _ L' inversion est un peu dûre. On dit, proverbialement, opiniâtre comme une mule.
   Le grec, opiniâtre en mule
   Afin de mieux sauter recule.
       Scarron.
  OPINIâTRÉMENT, avec opiniâtreté. "Soutenir une erreur opiniâtrément. = Avec fermeté et constance. "Il a défendu opiniâtrément cette place avec une petite garnison, et contre une armée nombreûse.
   REM. Opiniâtrément, prend l' accent aigu sur l' é, quoique formé d' un adjectif terminé en e muet.
   OPINIâTRER, soutenir un fait, une proposition avec obstination. "N' opiniâtrez pas une chôse qui n' est pas et qui ne saurait être. = Opiniâtrer un enfant, le rendre opiniâtre. = Il se dit sur-tout avec le pronom personel, s' opiniâtrer. Il régit à devant les noms et les verbes. "Il s' opiniâtre à la poursuite de ce procès, à poursuivre cette entreprise. _ Il régit aussi la préposition dans ou contre: "Il ne faut pas trop s' opiniâtrer dans ses desseins, contre les obstacles.
   OPINIâTRETÉ, obstination, trop grand atachement à son opinion, ou à sa volonté. "Voilà une grande, une furieuse opiniâtreté: "Soutenir son sentiment, poursuivre une entreprise avec opiniâtreté.

OPINION


OPINION, Voy. OPINANT, OPINER.

OPPORTUN


OPPORTUN, ou OPORTUN, UNE, adj. OPORTUNITÉ, s. f. [Oporteun, tune, tu--nité.] Ils se disent de ce qui est à propôs selon les tems et les lieux. "Dans un tems plus oportun. "L' ocasion est oportune. "Se prévaloir de l' oportunité. = La Touche d' aprês Andri les trouvait vieillis et les regrettait, l' adjectif sur-tout. Quelques Auteurs les emploient encôre. Ils seraient bons~ à conserver. L' Acad. dit qu' ils vieillissent.

OPPOSANT


OPPOSANT, ou OPOSANT, ANTE, adj. OPOSER, v. act. À~ l' OPOSITE, adv. OPOSITION, s. f. [Opozan, zante, zé, zite, zi-cion, en vers ci-on: 3e lon. aux 2 premiers, é fer. au 3e: l' o est long devant l' e muet: il opôse, opôsera, etc.] Oposer, c' est 1°. Mettre une chôse pour faire obstacle à une aûtre chôse ou à une persone. "Oposer une digue à l' impétuosité d' un fleûve, de la mer, des flots. "On leur oposa des troupes fraîches. "Il m' opose toujours quelque nouvelle dificulté. Oposer la force à la force. "Il s' opôse à toutes mes demandes. = 2°. Mettre vis-à-vis. "Opôser un trumeau à une cheminée. = 3°. Mettre en parallèle: "Nous n' avons point d' orateur, qu' on puisse oposer à Démosthène et à Cicéron.
   OPOSÉ, ÉE, participe et adjectif. "Deux rivages oposés; deux armées oposées l' une à l' aûtre. = Contraire: caractères directement oposés. = S. m. "Cet homme est l' oposé de l' aûtre.
   OPOSANT, ne se dit qu' au Palais. Qui s' opôse. "Se rendre oposant à l' exécution d' un arrêt. "Elle a été reçue oposante. = Subst. "Il y a un nouvel oposant, une aûtre oposante; plusieurs oposans. "Les oposans aux saisies.
   OPOSITE: l' Acad. l' avait dabord mis comme adjectif: "Le rivage oposite. Elle a ôté cet exemple dans les Éditions suivantes, où elle dit qu' on n' emploie plus ce mot que substantivement et dans le discours familier. "C' est l' oposite de ce que vous disiez: c' est tout l' oposite de l' aûtre. Dans la dern. Édit. elle dit qu' il vieillit. = À~ l' oposite; vis-à-vis. Il se dit ou sans régime: sur la hauteur est un château et à l' oposite un grand bois, ou avec la prép. de: à l' oposite du camp. "Ces deux maisons sont à l' oposite l' une de l' aûtre.
   OPOSITION, est 1°. Empêchement, obstacle. Mettre, aporter, faire, former oposition à: "On a mis oposition à l' exécution des arrêts. "Je n' y aporterai aucune oposition. = 2°. Contrariété: oposition d' humeur, de sentimens.

OPPRESSÉ


*OPPRESSÉ, s. m. Il ne se dit plus; on dit oprimé. "Le Sénat étoit regardé comme l' azyle des oppressés. BOSS. "Les Évêques doivent prêter leur voix aux infirmes (aux foibles) leur force aux oppressés. ID.

OPPRESSER


OPPRESSER ou OPRESSER, v. act. OPPRESSEUR, ou OPRESSEUR, s. m. OPRESSION, s. f. OPRIMER, v. act. [Oprècé, ceur, cion, en vers ci-on: oprimé: 2e è moy. aux 3 premiers, dern. é fer. au premier et au dernier.] Opresser, ne se dit plus qu' au propre; presser fortement: je sens quelque chôse, qui m' opresse et qui m' ôte la respiration. "Je me sens tout opressé. = Aûtrefois on le disait pour oprimer, acabler par violence, par autorité. Il redonera le coeur à la foible inocence, dit Malherbe:
   À~ ceux, qui l' opressoient, il ôtera l' audace.
"Les bons Princes n' oppressent point leurs sujets. Acad. citée dans Trév. en 1704. On dit aujourd'hui, oprimoient, opriment. M Necker s' est encore servi d' opresser dans ce sens: "C' est elle (la guerre) qui substitûe à tous les sentimens doux et bienfaisans... le besoin d' opresser (d' oprimer) et l' ardeur de détruire.
   OPRESSEUR, qui oprime. "L' opresseur du peuple.
   OPRESSION a les deux significations d' opresser et d' oprimer, mais dans l' une et dans l' aûtre, il a le sens passif et se dit de ce qui est opressé ou oprimé. "Opression de poitrine: "Le peuple est dans une grande opression.

OPRESSIF


*OPRESSIF, IVE, adj. OPRIMANT, ANTE, adj. Qui oprime, qui opresse. "Moyens très-opressifs au peuple. Hist. d' Angl. Il falait du moins dire, opressifs pour le peuple. _ "La saignée soulage la natûre dans son oppression, mais elle ne détruit que bien rarement le principe oprimant. VOULLONE. = Les Dictionaires ne mettent point ces deux mots: ils seraient utiles. = Ce qu' ils ont de singulier, c' est qu' opressif a raport au verbe oprimer et oprimant au verbe opresser.

OPPROBRE


OPPROBRE, ou OPROBRE, s. m. Ignominie, honte, afront. "Soufrir, endurer un oprobre, des oprobres. "Vivre dans l' oprobre: être couvert d' oprobres. = Être l' oprobre de, faire honte à. "Il est l' oprobre de sa nation, de sa famille; l' oprobre du genre humain. = Racine le fils dit des Juifs.
   Vaincus, proscrits, errans, l' oprobre des mortels.
Dans ce dernier emploi, oprobre se dit du sujet de l' oprobre, comme terreur s' emploie pour l' objet de la terreur. "Mithridate, Annibal furent la terreur des Romains.

OPTATIF


OPTATIF, s. m. Terme de Gramaire. C' est un mode des verbes, qui sert à faire quelque souhait. Ce mot se dit sur-tout de la langue grecque. Dans notre langue nous n' avons point d' optatif, et c' est le subjonctif qui sert à exprimer les voeux et les souhaits. "Puisse ce triste évènement vous faire rentrer en vous-même.

OPTER


OPTER, v. act. OPTION, s. f. [Opté, op-cion, en vers ci-on: 2e é fer. au 1er.] Choisir entre deux ou plusieurs chôses qu' on ne peut avoir ensemble. "De ces deux charges incompatibles il a opté celle, qui l' acomodait mieux. "On a un an pour opter entre deux bénéfices incompatibles.
   OPTION, pouvoir ou action d' opter. "cela est ou n' est pas à votre option. "Doner l' option de... à... Faire son option.

OPTICIEN


OPTICIEN, s. m. OPTIQUE, s. f. [Opti--cien, en n' a pas le son d' an: optike.] L' Optique est cette partie des mathématiques, qui traite de la lumière et des lois de la vision. Opticien, qui est versé dans l' optique. "Il est habile opticien; il entend bien l' optique.

OPTIMISME


OPTIMISME, OPTIMISTE, s. m. Le 1er se dit d' un système de Philosophie où l' on soutient que, tous les raports du monde combinés, l' état présent a été choisi de Dieu comme le mieux possible, comme l' optimum. Le 2d se dit de celui qui a embrassé ce système.
   OPTION, Voy. OPTER.
   OPTIQUE, Voy. OPTICIEN.

OPULEMMENT


OPULEMMENT, adv. OPULENCE, s. f. OPULENT, ENTE, adj. [Opulaman, lan--ce, lan, lante: 3e lon. excepté au 1er.] Opulence, richesse, abondance de biens. Opulemment, avec opulence. Opulent, Riche. "Vivre opulemment, dans l' opulence. "Il est devenu opulent. "Le comerce rend les villes opulentes. = Bourdaloue a fait opulent substantif: "N' est-ce pas là l' état d' une infinité de Grands et d' opulens, qui semblent, à les voir agir, n' avoir été faits que pour cette vie et y avoir établi leur dernière fin. = * On dit, vivre, mourir dans l' opulence. LA BRUYèRE dit, en l' opulence, qui n' est pas de l' usage actuel.

OPUSCULE


OPUSCULE, s. m. Petit ouvrage. Il ne se dit qu' en matière de science et de litératûre. Les opuscules de M. Fréron.

OR


OR, est très-bref ordinairement et l' o tout-à-fait fermé. Castor, butor, encor, etc. un peu moins fermé, mais très bref dans essor, or, trésor, soner du cor; et de même, quand il est suivi d' un d ou d' un t; bord, éfort, etc. Mais suivi d' une s, il est long: hors, alors, trésors, le corps, etc. D' OLIV.
   OR, conjonction. C' est une conjonction illative, qu' on emploie ordinairement aprês une proposition générale. "On ne doit compter pour vrais biens que ceux, qui ne peuvent se perdre: or les biens de la fortune peuvent se perdre aisément: donc ce ne sont pas de vrais biens. = Quelquefois, au lieu de la simple conjonction or, on dit, or est-il que; mais ce n' est guère que dans des disputes vives où l' on veut apuyer plus fortement sur ce que l' on dit.
   Rem. La Touche dit (au comencement du siècle) que cette conjonction avait un peu vieilli, mais que tous les bons Auteurs l' employaient sans scrupule. = On a dit aûtrefois, ores pour or, et le P. Sicard l' a encôre employé au comencement du siècle.
   Or, est aussi interjection: on s' en sert pour exhorter et convier. "Or, dites-nous! Or sus, començons! Or çà! Ordinairement on dit, o çà, et il vaudrait mieux l' écrire de la sorte, en ajoutant pourtant une h à l' o: oh! çà.

OR


OR, s. m. Métal jaûne, le plus précieux, le plus ductile et le plus pesant de tous: "Grain, paillette, poûdre, mine d' or. Or pur, or fin, etc. etc. = Ce mot fournit à plusieurs façons de parler adverbiales. = Parler d' or, pertinemment. = Faire un pont d' or à quelqu' un; lui céder beaucoup pour se débarrasser d' une fâcheûse afaire. _ Acheter au poids de l' or, fort cher. _ Il vaut son pesant d' or; il vaut beaucoup. _ Cousu d' or, fort riche.
   Son voisin, au contraire, étant tout cousu d' or,
   Chantoit peu, dormoit moins encor.
       La Font.
On dit, dans le même sens, avoir des monceaux d' or. = Je ne ferai cela ni pour or, ni pour argent, pas pour tout l' or du monde; pour quelque avantage que ce puisse être. = Saint Jean bouche d' or, homme qui dit toujours sa pensée franchement et sans égards. = Le proverbe dit: tout ce qui reluit n' est pas or; tout ce qui a l' aparence d' être bon, ne l' est pas. Voy. BâRRE, MONT, VEAU.
   OR se dit poétiquement de certaines chôses jaûnes et brillantes. L' or de ses cheveux: l' or de moissons. = Àge d' or, siècle d' or: les premiers tems du monde, où les hommes vivaient en paix et dans l' inocence. "L' âge d' or est une fâble. = Des jours filés d' or et de soie; des jours heureux.

ORACLE


ORACLE, s. m. 1°. Réponse que les Payens s' imaginaient recevoir de leurs Dieux. "Rendre des oracles. Expliquer un oracle. "Les oracles étoient ordinairement ambigus. = 2°. Figurément, les vérités énoncées dans l' Écritûre, ou déclarées par l' Église. "Les divins oracles: "les oracles des Prophètes. "L' Église a prononcé ses oracles; il faut se soumettre. = 3°. Décisions donées par des persones d' autorité et de savoir. "Ses discours sont des oracles. = En ce sens, il se dit des persones. C' est mon oracle: il est l' oracle du Barreau. "Vaugelas est un des oracles de notre langue.

ORAGE


ORAGE, s. m. ORAGEUX, EûSE, adj. [3e e muet au 1er, lon. aux 2 aûtres: geû, geû-ze.] Tempête, Vent impétueux, souvent acompagné de pluie, de tonerre, etc. "Nous aurons de l' orage. "Le tems est à l' orage. "Nous essuyâmes un furieux, un grand orage. = Figurément, Malheurs dont on est menacé. "Conjurer, dissiper, laisser pâsser l' orage. "Je vois fondre sur moi un orage soudain d' impétueûses réprimandes. Mol.
   Rem. Th. Corneille remarque que la plupart des femmes de son tems faisaient orage féminin, et disaient, voilà une grande orage. Il y en a moins aujourd'hui qui fassent cette faûte. Celles qui parlent bien disent: "Il y a eu cette nuit un grand orage.
   ORAGEUX: 1°. Qui caûse de l' orage: vent orageux. = 2°. Qui est sujet aux orages; mer orageûse. = 3°. Où il arrive ordinairement des orages: tems orageux, saison orageûse. = Figurément, cour orageûse; où les intrigues caûsent des révolutions fréquentes.
   ORAGEUX suit ou précède, au gré de l' Orateur ou du Poète.
   Seul traverse à la nage une orageûse mer.
       De Lille.
En prôse on dirait mieux, une mer orageûse. Et généralement parlant, dans le discours ordinaire, cet adjectif doit suivre le nom qu' il modifie.

ORAISON


ORAISON, s. f. ORATEUR, s. m. ORATOIRE, adj. et subst. ORATOIREMENT, adv. [Orèzon, ra-teur, toâ' re, toâ-reman; 2e è moy. au 1er, 3e lon. aux 2 dern. 4e e muet.] Oraison est, 1°. Discours d' éloquence, destiné à être prononcé en public. On ne le dit plus en ce sens, que des discours des anciens Orateurs; les Oraisons de Démosthène, de Cicéron, etc. et des discours qu' on prononce à la louange des morts: Oraison Funèbre. = 2°. Prière adressée à Dieu et aux Saints. On ne le dit guère, dans cette acception, que des prières particulières de l' ofice divin. Ailleurs on se sert ordinairement du mot de prière. On dit encôre l' Oraison Dominicale. = 3°. Méditation. Faire l' oraison, ou oraison (sans article.) Une heure, une demi heure d' oraison. "Oraison mentale. "Être en oraison, aler à l' oraison.
   ORATEUR a le 1er sens d' oraison, mais il a un emploi plus étendu. Il se dit de celui qui compôse et prononce des discours d' éloquence. "Grand, célèbre Orateur."Orateur froid ou véhément. _ L' Orateur Romain, le Prince des Orateurs; Cicéron.
   ORATOIRE, adj. Qui apartient à l' Orateur. "L' Art Oratoire: figûre, style oratoire. = Oratoirement, d' une manière oratoire. "Cet Historien a traité ce morceau oratoirement. "Cela se dit oratoirement. _ Il se prend en mauvaise part.
   ORATOIRE, subst. masc. Petit lieu, dans une maison, destiné pour prier Dieu. "Il est retiré dans son oratoire.
   REM. Ménage penchait à le faire féminin, malgré la décision de Vaugelas. Th. Corneille disait que ce mot ne lui paraissait pas avoir encôre de genre fixe: aujourd'hui il est certainement masc. on dit: un petit oratoire, et non pas une petite oratoire.

ORALE


ORALE, adj. fém. Qui pâsse de bouche en bouche, sans être écrit: loi, tradition orale. C' est tout l' emploi de ce mot.

ORANGE


ORANGE, s. f. ORANGÉ, GÉE, adj. ORANGEADE, s. f. ORANGEAT, s. masc. ORANGER, s. m. ORANGERIE, s. f. [2e lon. 3e e muet au 1er et dern., é fer. au 2e, 3e et 6e: ge, gé, gé-e; jade; ja, gé, gerie.] Orange est un fruit à pepin, fort rond, de couleur jaûne-doré, d' odeur agréable, et qui a beaucoup de jus. _ Orangé, qui est de couleur d' orange. = Orangeade, boisson qui se fait avec du jus d' orange, du sucre et de l' eau. = Orangeat, confitûre sèche, faite de petits morceaux d' écorce d' orange. _ Dragées faites d' écorce d' orange. = Oranger, arbre qui porte des oranges. Il est toujours verd, et ses fleurs ont une odeur forte, mais agréable. = Orangerie, lieu destiné à mettre à couvert des orangers en caisse, dans la froide saison.
   Rem. 1°. Plusieurs écrivent ces mots avec un e, orenge, orenger, etc. Il vaut mieux les écrire avec un a: orange, etc. = 2°. Dans les provinces méridionales, on fait assez volontiers orange masculin. On dit, un gros orange: c' est une grosse orange qu' il faut dire.

ORATEUR


ORATEUR, ORATOIRE, ORATOIREMENT. Voy. ORAISON.

ORBICULAIRE


ORBICULAIRE, adj. ORBICULAIREMENT, adv. [Orbiculère, lèreman: 4e è moy. et long, 5e e muet.] Orbiculaire, qui est rond. Orbiculairement, en rond. Ces mots ne se disent que parmi les Savans. La Fontaine a pourtant employé l' adjectif.
   Le Renard un soir aperçut
   La Lune au fond d' un puits: l' orbiculaire image
   Lui parut un ample fromage.
   Rem. Il se dit de la figûre et du mouvement. "Regardant de près tourner la meule d' un moulin, plus le mouvement orbiculaire aura de rapidité, plus la vue en sera éblouie. L' Abé Henn.

ORCHESTRE


ORCHESTRE, s. m. [Orkèstre; 2e è moy. 3e e muet.] 1°. Dans le Théâtre des Grecs, lieu où l' on dansait. = 2°. Dans celui des Romains, lieu du Théâtre où se plaçaient les Sénateurs. = 3°. Parmi nous, lieu où l' on place la symphonie, et qui sépare le théâtre du parterre.

ORD


*ORD, ORDE, adj. Vieux mot. Vilain, sale. Patru s' en est encôre servi. _ Ordûre en vient, et s' est conservé.

ORDINAIRE


ORDINAIRE, adj. et subst. ORDINAIREMENT, adv. [Ordinère, nèreman: 3e è moy. et lon. 4e e muet.] Ordinaire est, 1°. Ce qui a coutume d' être, de se faire; qui arrive souvent. "L' état ordinaire des chôses. Le cours ordinaire de la natûre. "C' est sa vie, sa conduite ordinaire. = 2°. Comun, vulgaire. "C' est un homme, un esprit, une pensée fort ordinaire. = 3°. Il se dit de beaucoup d' emplois, et en ce sens il est oposé à extraordinaire, ou, à qui ne sert que par quartier, par semestre. Ambassadeur ordinaire, Juge ordinaire; Maître d' Hôtel, Médecin, Gentilhomme, etc. ordinaire chez le Roi. = 4°. S. m. Il a plusieurs significations. _ Ce qu' on a acoutumé de servir pour le repâs. "Un petit ordinaire, un ordinaire bourgeois. Se contenter de l' ordinaire. Retrancher, diminuer son ordinaire. = La mesûre de vin qu' on done chaque repâs aux valets. = Ce qu' on a coutume de faire. "L' ordinaire des Princes est d' en user ainsi: c' est leur ou son ordinaire. = Le courrier, qui part à certains jours précis, et le jour où part ce courrier. Je vous écrirai par le premier ordinaire; au premier ordinaire.
   ORDINAIRE, aussi s. m. L' Évêque Diocésain. "Se pourvoir pardevant l' Ordinaire.
   À~ L' ORDINAIRE, adv. Suivant la manière acoutumée. "Acomodez cela à l' ordinaire. = D' ordinaire, pour l' ordinaire, ordinairement signifient la même chôse. Le plus souvent ils peuvent se placer devant ou aprês le verbe; mais il vaut mieux les mettre à la tête de la phrâse. "Cela arrive ordinairement. Pour l' ordinaire ou d' ordinaire, il étudie sept heures par jour.
   REM. Ordinaire, adjectif, n' aime pas à précéder le substantif.
   Ce récit pâsse un peu l' ordinaire mesure.
       Boileau.
L' inversion est un peu dûre, même en vers. En prôse du moins, on doit toujours dire, la mesûre ordinaire. = Quelques-uns lui font régir le datif: "Cette faûte lui est ordinaire. Ce régime est douteux. = Avec le v. être impersonel, il régit, ou que avec le subjonctif, ou de avec l' infinitif. "Il est ordinaire qu' on réussisse. "Il n' est pas ordinaire de réussir. "Il est ordinaire, dans cette Mission (de Carnate) de voir les Prédicateurs de l' Évangile emprisonnés et maltraités par l' avidité des Mahométans. Lett. Édif.

ORDINAL


ORDINAL, adj. m. Nombre ordinal, ou nombre d' ordre, qui marque l' ordre des chôses par raport au nombre. Le premier, le deuxième, le troisième, etc. = 1°. Les nombres ordinaux prènent l' article défini, et se mettent ordinairement devant le substant. Le premier jour, la seconde fête. Molière a péché contre l' usage, quand il a dit: "Nous avons matière d' en faire l' épreuve première; au lieu de la première épreûve. Cela n' est pas suportable, même en vers. = Avec certains noms propres, le nombre ordinal se met aprês le substantif. François premier, Henri second. On dit aussi, dans les citations; "Livre second, chapitre troisième. = 2°. Les nombres ordinaux sont ordinairement adjectifs. Cependant on les emploie quelque--fois substantivement. On dit: il est en Seconde, en Troisième, pour dire, dans la seconde ou la troisième Classe. "Président ou Conseiller de la Seconde; c. à. d. de la seconde Chambre du Parlement. "Servir de second; le premier qui avancera; n' avoir pas le dernier, etc. On dit encôre, avoir un dixième, un cinquième dans une afaire, pour dire, la dixième ou la cinquième partie. = 3°. Les nombres ordinaux forment chacun leur adverbe, en ajoutant ment à ceux qui finissent par un e muet, et ement à ceux qui se terminent par une consone: premier, second, premièrement, secondement; troisième, quatrième, troisièmement, quatrièmement, etc.

ORDINAND


ORDINAND, ORDINANT, s. m. Le 1er se dit de celui qui doit recevoir les ordres; le 2d de l' Évêque qui les confère. "C' est à l' Ordinant à examiner les Ordinands.

ORDINATEUR


*ORDINATEUR, s. m. On troûve ce mot dans l' Hist. d' Angl. pour signifier, qui fait des Ordonances. Il est vrai que le Trad. l' a mis en italique, pour faire voir qu' il le risquait. "Le Roi permettoit que ces Ordinateurs s' unissent entre eux et leurs amis, etc. _ Ce mot, forgé peu heureûsement, a l' air d' être long-tems barbâre. _ Il se dirait plutôt d' un Évêque qui ordone, qui fait des ordinations; mais l' usage est pour ordinant.

ORDINER


*ORDINER, v. act. On l' a dit aûtrefois pour ordoner, conférer les Ordres. Mais quoiqu' on dise ordination et non pas ordonation, on dit ordoner, et non pas ordiner.

ORDINATION


ORDINATION, s. f. [Ordina-cion.] Action d' ordoner, de conférer les Ordres de l' Église. "Faire l' Ordination, se dit de l' Évêque. "Se présenter à l' ordination, se dit des Ordinands.

ORDONNANCE


ORDONNANCE, ou ORDONANCE, s. f. ORDONATEUR, s. m. ORDONER, v. act. [3e lon. au 1er, é fer. au dern.] Ordoner, c' est, 1°. disposer, mettre en ordre. "Dieu a bien ordoné toutes chôses. "Ordoner un festin; et en parlant d' un Architecte, ordoner un bâtiment. = 2°. Comander, prescrire. "Mon devoir me l' ordone. "Le Médecin a ordoné une médecine, etc. Voy. plus bâs. Rem. 1°. = 3°. V. n. Disposer de... "Jusqu' à ce qu' il en ait été aûtrement ordoné. "Il faut que les Souverains en ordonent sur les règles invariables de la sagesse. Bérault-Bercastel. = 4°. Conférer les Ordres. "C' est un tel Évêque qui l' a ordoné Prêtre. "Il a été ordoné Diacre par Mgr. l' Évêque de... = Il se dit quelquefois neutralement. "Il n' est pas permis à un Évêque d' ordoner dans le Diocèse d' un aûtre, sans sa permission.
   REM. Ordoner, prescrire. (n°. 2°.) régit de et l' infinit. quand il régit un nom au dat.: et la conjonct. que avec le subj. quand il n' a point de noms en régime. "On vous ordone de le faire. Votre père a ordoné que vous le fissiez.
   * Il règne, et c' est assez: et le ciel nous ordone,
   Que, sans peser ses droits, nous respections son Trône.
       Volt. Oreste.
Je ne sais si l' on peut pâsser en vers ce régime, mais en prôse il faudrait dire: le ciel nous ordone de respecter, ou ordone que nous respections. = 2°. L' Académie critiqua aûtrefois, ordoner une armée, expression dont Corneille s' était servi dans le Cid. "Ce n' est pas bien parler françois, dit-elle, quelque sens qu' on lui veuille donner. Il ne signifie, ni mettre une armée en bataille, ni établir dans une armée l' ordre qui y est nécessaire. Sentimens sur le Cid. L' Acad. done pourtant à ordoner le sens de ranger, mettre en ordre. (Voy. n°. 1°.) mais il ne s' étend pas à toute sorte de mots. Elle dit aussi, l' ordonance d' une bataille; et l' on ne dirait pas, de son aveu, ordoner une bataille, un combat.
   ORDONANCE, 1°. Disposition, arrangement. "L' ordonance d' un tableau, d' un poème, d' un balet, d' un bâtiment, etc. "Ce tableau, ce bâtiment est d' une belle ordonance. "L' ordonance d' un festin. = 2°. Règlement fait par autorité. "Ordonance du Roi, du Magistrat, de l' Évêque, de l' Intendant. = Loi et constitution du Souverain. "Les Ordonances de Louis XIV. "L' Ordonance de Blois. "Contrevenir aux Ordonances. = Collectivement et mettant le singulier pour le pluriel. "Juger suivant l' Ordonance; cela est contraire à l' Ordonance. = 3°. En termes de Finance, mandement à un Trésorier de payer certaine somme. = 4°. Ce que prescrit le Médecin: il a fait cela par l' ordonance du Médecin. _ C' est aussi l' écrit par lequel le Médecin ordone. = 5°. D' ordonance: on le dit avec compagnie et habit. "Compagnie d' ordonance, qui ne fait partie d' aucun Régiment. "Habit d' ordonance, l' uniforme des Oficiers et des soldats.
   On dit proverbialement, d' un homme qui n' a que les meubles absolument nécessaires, et que l' Ordonance défend d' exécuter, qu' il est meublé selon ou suivant l' Ordonance; ce qui se dit par extension de tous ceux qui sont mal meublés.
   ORDONATEUR, celui qui ordone, qui dispôse. (Voy. Ordoner et Ordonance, n°. 1°.) Ordonateur d' un bâtiment, d' un balet, d' une fête. = Comissaire Ordonateur, en termes de guerre et de marine, le plus ancien Comissaire, qui fait fonction d' Intendant. = M. Linguet a dit, ordonatrice. "Jusqu' au mois de... elle a été l' arbitre, l' ordonatrice souveraine de la dépense. _ Ce sont de ces mots que l' on forge dans l' ocasion.

ORDRE


ORDRE, s. m. 1°. Arrangement, disposition. "Mettre, garder, maintenir l' ordre: changer l' ordre. "Parler, écrire avec ordre. "L' ordre des pensées, des mots, etc. = L' ordre (la conduite) de la Providence, de la natûre, de la grâce. = Ordre de bataille; l' état suivant lequel les troupes doivent être rangées le jour de la bataille. "L' armée marcha en ordre de bataille. = 2°. État, situation, par raport à la fortune, aux afaires. "Être en bon ou en mauvais ordre; bien ou mal en ordre. "Homme d' ordre, qui aime l' ordre. = Doner ou aporter ou mettre ordre; pourvoir. "Mettez-y, donez-y ordre. "Quel ordre y pouvez-vous aporter? = 3°. Corps qui compôsent un État. "Il y avoit à Rome l' ordre des Sénateurs, l' ordre des Chevaliers, l' ordre des Plébéiens. Parmi nous, l' ordre de l' Église, de la Noblesse. Les Avocats apèlent leur Compagnie, l' Ordre. "L' ordre des Avocats. = Dans l' Église on dit, l' Ordre Hiérarchique; le Clergé du second ordre, les Éclésiastiques; du premier ordre, les Évêques. = 3°. Comandement d' un Superieur. "Doner, suivre les ordres. "J' atends vos ordres. "Être soumis aux ordres de la Providence. "On lui a envoyé ordre de combattre, etc. = 5°. Le mot du guet. Doner, envoyer, porter, prendre l' ordre: Aller à l' ordre. = 6°. Compagnie de Religieux. "L' Ordre de St. Benoit, de St. François, etc. Voy. CONGRÉGATION. _ Ordre de Chevalerie. "L' Ordre de Saint Michel, du Saint-Esprit, de Saint-Louis, de la Toison. Quand on dit l' Ordre du Roi, c' est celui de Saint Michel. Les Cordons-Bleus sont Chevaliers des Ordres du Roi, du st. Esprit et de St. Michel. = C' est aussi le colier ou le ruban, ou autre marque d' un Ordre de Chevalerie. "Il porte l' Ordre de.... Le Roi a envoyé, a doné l' Ordre à un tel, etc. = 7°. Le 6e Sacrement de l' Église: l' Ordre de Diacre; l' Ordre de Prêtrise. Doner, conférer les Ordres; prendre les Ordres; aler aux Ordres. = 8°. En termes d' Architectûre, il se dit de certaines proportions et de certains ornemens, sur lesquels on règle la colonne et l' entablement. Il y a cinq ordres d' Architectûre: le Toscan, le Dorique, l' Ionique, le Corinthien, et le Composite.
   Rem. 1°. On disait anciènement, les saintes Ordres (n°. 7°.) et Vaugelas, ainsi que Th. Corneille, le regardaient comme une expression reçue et qu' un vieil usage avait consacrée. On ne le dit plus aujourd'hui; on dit: les saints Ordres; et plus comunément, les Ordres sacrés. = 2°. * On dit: aler avec ordre, et non pas: aler d' ordre, comme dit le P. d' Orléans: "Dom Pèdre aloit d' ordre, pour aller plus sûrement. Révol. d' Esp. = Fontenelle dit aussi d' ordre, pour, avec ordre ou dans l' ordre. "Nous n' en sommes pas encôre là, parce que toute la terre n' est pas encôre découverte, et qu' aparemment il faut que tout se fasse d' ordre. "En vérité, dit la Marquise, tout cela est d' un grand ordre. = 3°. Mettre ou doner ordre, régissent le 1er le datif des noms, le 2d l' infinitif du verbe avec de. Avoir ordre a ce dernier régime. "Mettez ordre à vos afaires. On avait doné ordre au domestique de partir: j' ai ordre de vous acompagner. _ Remarquez que dans mettre ordre, ce nom est indéclinable. "Il mit à l' armée quelques ordres nécessaires, est une phrâse vicieûse. _ 4°. Il est dans l' ordre que régit le subjonctif. "Tous aspirent au titre de galant homme; tous voudroient avoir en partage les qualités, qui lui sont essentielles; et il seroit dans l' ordre qu' ils s' efforçassent de les acquérir. MARIN, l' Homme Aimable. = 5°. De l' ordre de, se dit à présent plus comunément que, par l' ordre de: "Il en falut passer par là et de l' ordre exprès de sa Majesté, ils comencèrent, etc. = En sous-ordre, subordonément. "Il travaille en sous-ordre. = 6°. * On a dit autrefois, en son ordre, pour en son rang: "Comme il sera dit ci-dessous en son ordre. CHRON.

ORDûRE


ORDûRE, s. f. ORDURIER, IèRE, adj. et subst. [2e lon. au 1er, 3e e muet au 1er, é fer. au 2d, è moy. et long au 3e, re, rié, riè-re.] Ordûre, se dit proprement des excrémens et aûtres impûretés du corps. = Par extension, on le dit de toutes les chôses mal propres, qui s' atachent aux habits, aux meubles. _ Jeter quelque chose aux ordûres; parmi les ordûres, les balayûres. = Il se dit au figuré, mais il ne fait pas toujours un bon éfet. Bossuet dit: il laisse dans l' ordûre et le mépris St. Justin, St. Irénée, etc. Je ne crois pas que cette expression fut aprouvée aujourd'hui. _ L' Acad. met aussi quelques phrâses, qui ne me paraissent pas du goût et de l' usage actuel. "La Justice, en ce pays-là, est fort corrompûe: ce n' est qu' ordûre et infamie. "Ne parlez point de cela: il ne faut pas remuer cette ordûre. "Il y a de l' ordûre dans son fait; il n' est pas tout-à-fait inocent de ce dont on l' acuse. Cette dernière phrâse se dit encôre dans le style familier. = Ordûres, au pluriel, et au figuré, signifie des paroles et des actions sales et honteûses. "Cette comédie est pleine d' ordûres. "Que d' ordûres dans la vie de cet homme là. L. T. Il se dit plutôt des paroles que des actions. "Il est impoli de dire des ordûres devant les femmes; mais il est criminel d' en dire devant les enfans. Acad. "Il aime les ordûres, il ne se plait qu' à dire des ordûres. Ibid.
   ORDURIER, se dit en ce dernier sens: "Il est bien ordurier: c' est un ordurier. "Elle est fort ordurière.

OREILLARD


OREILLARD, ARDE, adj. OREILLE, s. f. OREILLER, s. m. [Orè-gliar, gliar-de, glie, glié: 2e è moy. 3e e muet au 3e, é fer. au 4e, mouillez les ll.] Oreille, est l' organe de l' ouïe. Il se dit, et de tout ce qui contribûë à l' ouïe au dedans, et du cartilage du dehors. = Prêter l' oreille est du beau style.
   Alors vous eussiez vu les fleuves et les bois
   Prêter l' oreille au son de sa touchante voix.
MARIN, 6e Écl. de Virgile. = Oreillard, se dit d' un cheval, dont les oreilles sont longues, bâsses, pendantes, ou mal plantées. = Oreiller, coussin, servant à soutenir la tête, quand on est couché.
   OREILLE, entre dans plusieurs expressions du style proverbial. _ Les oreilles bâsses, ou baissées: adv. "Il s' en revient les oreilles bâsses ou baissées, c. à. d. triste et honteux de n' avoir pas réussi. _ Les chiens hargneux ont les oreilles déchirées: ceux, qui ataquent tout le monde, souvent s' en troûvent mal. _ On dit, que les oreilles tintent ou cornent aux gens, quand on parle d' eux: "Si les oreilles vous tintent, ne croyez pas que c' est une vapeur: c' est que nous parlons fort de vous. Sév. "Je ne doute pas que les oreilles ne vous aient corné. C' est à vous à savoir laquelle; car nous en avons dit de toutes les façons. La Même. _ Avoir les oreilles délicates, se fâcher aisément. _ Avoir les oreilles chastes, ne pouvoir soufrir les paroles déshonêtes. _ Se faire tirer l' oreille, se faire beaucoup prier; ne céder qu' avec peine. _ Rompre les oreilles à quelqu' un, l' importuner. "Vous me rompez les oreilles, et non pas, vous rompez mes oreilles. _ Avoir les oreilles batûes et rebatûes d' une chôse, en avoir souvent entendu parler. _ Être pendu aux oreilles de quelqu' un, le suivre par tout, pour lui parler. _ Secouer les oreilles, désaprouver ce qu' on dit. _ Se grater l' oreille, avoir du chagrin. _ Prêter l' oreille à, écouter, aprouver. _ Avoir la puce à l' oreille, voy. PUCE. _ Entendre de ses oreilles, de ses deux oreilles, est un pléonasme reçu, comme voir de ses yeux, voler en l' air, etc. "Vous avez entendu celà? _ Oui de mes deux oreilles. _ Th. d' Éducat. = Ce Discours flate, charme, chatouille l' oreillle; il fait plaisir à entendre; il blesse, ofense, choque, écorche l' oreille; c' est tout le contraire. _ Échaufer les oreilles à quelqu' un; l' irriter par ses discours. _ Lui doner sur les oreilles, ou lui froter les oreilles, le batre. _ Avoir l' oreille d' un Prince, d' un Ministre, en être écouté favorablement. _ Il n' a point d' oreille pour ce que vous demandez; il ne veut pas le faire. _ Si cela vient à ses oreilles, etc. S' il vient à le savoir, etc. _ Être ou se mettre dans une afaire jusqu' aux oreilles, ou par dessus les oreilles, s' y engager bien avant. _ Il sera bien heureux s' il en raporte ses oreilles; s' il revient sain et sauf. = * L' Ab. Coyer dit rire jusqu' aux oreilles, faire de grands éclats de rire. Cette expression n' est pas fort usitée, même dans le style proverbial. _ Madame de Genlis dit, rougir jusqu' aux oreilles, et celui-ci vaut mieux. "Nous avons regardé Mademoiselle Aline, qui a rougi jusqu' aux oreilles. = Avoir de l' oreille, a trois sens diférens suivant les diférens raports où on l' emploie. Avoir l' oreille sensible ou, à la mesûre des vers, ou à l' harmonie dans la musique, ou à la mesûre dans la danse. = Le Proverbe dit: ventre afamé n' a point d' oreilles: on ne peut apaiser par de beaux discours ceux, qui ont grande faim. Madamde Dacier a employé ce proverbe dans le Traduction de l' Odyssée, qu' elle a farcie d' expressions bâsses et triviales.
   OREILLE, se dit fig. de plusieurs chôses, qui ont quelque ressemblance avec la figûre de l' oreille. L' oreille d' un soulier, d' une écuelle, d' une charrûe. _ Pli qu' on fait au feuillet d' un livre au haut ou au bâs de la page, pour marquer l' endroit où l' on en est resté dans la lectûre, ou un passage qu' on veut revoir. "C' est une sote chôse que de faire des oreilles aux livres.

OREILLONS


OREILLONS, ou ORILLONS, s. m. pl. [Orè-glion, ori-glion: mouillez les ll.] C' est le nom vulgaire, doné aux tumeurs des parotides, parce que ces glandes sont voisines des oreilles.

ORFèVRE


ORFèVRE, s. m. ORFèVRERIE, s. f. [2e è moy. 3e e muet: l' Acad. met un accent aigu sur la 2de: mais devant l' e muet, l' è est moyen: l' accent grâve est donc plus convenable.] L' Ab. Richard, dans sa Description d' Italie dit toujours orfévrie: on l' a dit anciènement; mais depuis long-tems on ne le dit plus.
   ORFèVRE, ouvrier ou Marchand, qui fait et qui vend des ouvrages d' or et d' argent. Orfèvrerie, est l' art des orfèvres. "Il entend bien l' orfèvrerie: chef d' oeûvre d' orfèvrerie, ou l' ouvrage fait par l' orfèvre: boutons d' orfèvrerie. "Il a dans son magasin pour vingt mille écus d' orfèvrerie.

ORFRAIE


ORFRAIE, s. f. ORFROI, s. m. [Orfrê, froa: 2e ê ouv. au 1er.] Le 1er se dit d' une espèce d' oiseau nocturne: le 2d s' est dit aûtrefois des étofes tissûes d' or: il ne se dit plus que des pâremens d' une chape, d' une chasuble.

ORGANE


ORGANE, s. m. ORGANIQUE, adj. ORGANISATION, s. f. ORGANISER, v. act. [dern. e muet aux deux premiers, é fer. au dern. l' s a le son du z; tion, dans le 3e se prononce cion.] Organe, au propre, se dit de ce qui sert aux sensations et aux opérations de l' animal. "L' organe de la vûe, de l' ouïe, de la voix. "Avoir les organes bien ou mal disposés. = Il se dit en particulier de la voix. "Cet Orateur a un bel, un bon organe. = Au figuré, celui, dont le Prince se sert pour déclarer ses volontés, etc. Par extension, on le dit des particuliers. "Le Chancelier est l' organe du Roi. "Cet homme ne fait rien que par l' organe d' un tel.
   ORGANIQUE, ne se dit qu' en physique. Corps organique, qui agit par le moyen des organes.
   ORGANISER, 1°. Former les organes. "La Natûre impuissante ne saurait organiser un corps: Dieu seul a pu le faire. = 2°. Joindre une petite orgue à un clavecin, à une vielle. = Organisation, ne se dit que dans le 1er sens d' organiser: la manière, dont un corps est organisé. "L' organisation des animaux, des plantes.
   Rem. On dit figurément et dans le moral, tête bien organisée, mal organisée. Cette expression est à la mode. Madame de Genlis fait dire à un petit maître: "C' est en Suisse et en Angleterre qu' il faut chercher des êtres pensans et des têtes bien organisées. = Réglé. "Cette Ville étoit devenûe le chef-lieu d' une République bien organisée. L' Ab. Garnier. Hist. de Fr.

ORGANISTE


ORGANISTE, s. m. et f. Celui ou celle dont la profession ou l' emploi est de jouer de l' orgue. "Bon, savant organiste. "Il y a une bone organiste chez les Dames de...

ORGE


ORGE, s. f. et m. Richelet et Danet font ce mot masculin, et un assez grand nombre d' Auteurs les ont suivis, l' Acad. le marque féminin, et son autorité en a entraîné un grand nombre d' aûtres. Elle n' excepte que, orge mondé, où il est du genre masculin. Hors de là, on dit, de belle orge; de belles orges; de l' orge bien levée, etc. = On dit, proverbialement, faire ses orges, ou faire bien ses orges, faire un grand profit, faire bien ses afaires. _ Être entre l' orge et l' avoine, dans l' embârrâs de savoir que choisir. "Le voilà entre l' orge et l' avoine, mais la plus mauvaise orge et la plus mauvaise avoine qu' il pût jamais trouver. Sév.

ORGEADE


*ORGEADE, s. f. ou ORGEAT, s. m. [Orjade, ja.] le 1er est de Richelet, le 2d, de l' Académie, et celui-ci a prévalu. Sorte de boisson rafraichissante.

ORGIES


ORGIES, s. f. pl. Fêtes consacrées à Bacchus. = Fig. Il se dit au sing. et au plur. Débaûches de table. "Faire une orgie; ce sont des orgies continuelles.

ORGUE


ORGUE, s. m. ou fém. [Orghe: 2e e muet: l' u ne se prononce pas: il n' est là que pour doner au g un son fort qu' il n' a pas devant l' e.] Le P. Bufier est du sentiment qu' orgue est, au singulier, plutôt masculin que féminin, et il n' est pas le seul à penser de la sorte. Ménage l' avait dit avant lui. Richelet le fait des deux genres au singulier. L' Acad. l' avait d' abord marqué féminin dans les deux nombres. Ensuite elle a averti qu' il était masculin au singulier et fém. au pluriel. On dit: un grand orgue et de belles orgues.
   ORGUE, se dit 1°. Du plus grand des instrument de musique à vent, qui est composé de plusieurs tuyaux de diférente grandeur, d' un ou de plusieurs claviers, et de souflets, qui fournissent le vent. = 2°. Il se dit du lieu où les orgues sont placées dans l' Église. "Il était dans l' orgue, aux orgues, sous les orgues. = On dit, proverbialement des persones d' une grandeur inégale, qu' ils sont comme des tuyaux d' orgue. = 3°. Herse avec laquelle on ferme les portes d' une ville ataquée.

ORGUEIL


ORGUEIL, ou ORGUEUIL, s. m. ORGUEILLEUX, ou ORGUEUILLEUX, EûSE, adj. et subst. ORGUEUILLEûSEMENT, adv. [pron. Or-gheuil, gheu-glieû, glieû-ze, glieû-zeman: mouillez l' l finale du 1er, et les deux ll des aûtres.] L' Ab. Du Resnel écrit orgueuil, et c' est ainsi qu' il faudrait écrire pour conformer l' ortographe à la prononciation. En prononçant ce mot et ses dérivés, on exprime le son de la diphtongue eu, qui n' est pas indiqué par la terminaison ueil. Un étranger voyant ces caractères, et suivant l' analogie de la Langue, croirait devoir prononcer orgheil, et non pas orgheuil. = L' u devant l' e n' est là que pour doner au g un son fort, qu' il n' a pas devant cette voyèle: il faut donc un autre u aprês l' e, pour exprimer la diphtongue euil.
   ORGUEUIL, est l' opinion trop avantageûse de soi-même. Orgueuil, vanité, (Synon.) L' orgueuil fait que nous nous estimons; la vanité fait que nous voulons être estimés. GIR. Synon. = Orgueuil, se prend quelquefois en bone part; mais alors il est toujours acompagné de quelque épithète avantageûse comme un noble orgueuil.
   ORGUEUILLEUX, qui a de l' orgueuil. "Il est orgueuilleux. "Esprit orgueuilleux. = Subst. "C' est un orgueuilleux. Dieu se plait à abaisser les orgueuilleux = Qui est l' éfet de l' orgueuil. "Réponse, entreprise orgueuilleûse. "Il lui répondit d' une manière orgueilleûse. Voy. SUPERBE et GLORIEUX.
   Rem. 1°. Dans le haut style, orgueuilleux aime à précéder le substantif. "Les orgueuilleux transports; l' orgueilleûse colère. = 2°. Il se dit élégamment au figuré des chôses inanimées. "Les flots orgueuilleux; l' orgueilleux Apennin. "Les cimes orgueuilleûses des montagnes.
   Superbes monumens, qui portez jusqu' aux cieux
   Du néant des humains l' orgueuilleux témoignage.
       L. Rac.
= 3°. Orgueuilleux, régit quelquefois la prép. de devant les noms et les verbes. "Rome toute orgueuilleûse encôre de la gloire de son premier Empereur. L' Ab. De Cambacérès.
   Tout orgueuilleux d' avoir par son ramage,
   Du poulaillier mérité le suffrage.
       Rousseau.
Dans le Dict. Gram. on traite de latinisme cette phrâse: orgueuilleux d' un commandement universel; mais c' est un latinisme admis par l' usage. = 4°. Quoiqu' on dise substantivement, c' est un orgueuilleux, les orgueilleux, il n' en faut pas conclûre qu' on puisse dire, cet orgueilleux, comme a dit Brébeuf.
   De là cet orgueilleux plus fier que les torrens, etc.
   ORGUEILLEUX, s. m. Petit bouton qui vient sur la paupière de l' oeuil.
   ORGUEUILLEûSEMENT, d' une manière orgueuilleûse. Répondre orgueuilleûsement.

ORIENT


ORIENT, s. m. ORIENTAL, ALE, adj. ORIENTER, v. act. [Ori-an, antal, tale, anté: 3e lon. 4e é fer. au dern.] Orient est, 1°. le point du ciel où le soleil se lève sur l' horison. "L' orient d' été; l' orient d' hiver. = 2°. Plus précisément, celui des quatre points cardinaux où le soleil se lève à l' équinoxe. De l' orient à l' occident. Entre l' orient et le midi. = 3°. Il se prend pour les États de l' Asie orientale. "Les régions, les peuples de l' Orient. Voy. LEVANT. = On apèle comerce d' Orient, celui qui se fait dans l' Asie orientale par l' océan; et comerce de Levant, celui qui se fait dans l' Asie occidentale par la Méditerranée.
   ORIENTAL, qui est du côté de l' orient. "Pays oriental. Peuples orientaux. "Régions orientales. Les Indes orientales, ou les grandes Indes. = Langues orientales, l' Hébreu, le Syriaque, le Caldéen, l' Arabe, le Persan. = Qui croît en orient, qui vient d' orient. "Plantes, perles orientales. = S. m. pl. Les Orientaux. Les peuples de l' orient. Il ne se dit guère que des peuples de l' Asie occidentale, qui sont à notre orient, comme les Turcs, les Persans, les Arabes. "Les coutumes des Orientaux. "Le style des Orientaux.
   ORIENTER, c' est disposer une chôse selon la situation qu' elle doit avoir par raport aux quatre parties du monde. Orienter un cadran, un globe, une carte. = En termes de Marine, orienter les voiles, les disposer de manière qu' elles reçoivent le vent, relativement à la route qu' on veut faire. = S' orienter, au propre, c' est reconaître l' orient et les aûtres points cardinaux du lieu où l' on se troûve. Au figuré, tâcher de reconaître ce dont il s' agit, ou les persones avec qui l' on doit traiter.
   ORIENTÉ, ÉE, partic. et adj. "Plan bien orienté, carte mal orientée. = Maison bien ou mal orientée: qui est d' une bone ou mauvaise position, à l' égard de l' orient et des aûtres points cardinaux.

ORIFICE


ORIFICE, s. m. Il se dit proprement de l' ouvertûre, qui sert comme d' entrée et de sortie à certaines parties intérieûres du corps de l' animal. "L' orifice de l' estomac, de la vessie. = Par extension, on le dit de l' entrée étroite de certains vaisseaux de terre, de verre, etc. "L' orifice d' un matrâs, d' une retorte, etc.

ORIFLAMME


ORIFLAMME, ou mieux, ORIFLâME, s. m. Étendard que les anciens Rois de France faisaient porter quand ils alaient à la guerre. "Le Roi ala prendre l' oriflâme à St. Denis.

ORIGINAIRE


ORIGINAIRE, adj. ORIGINAIREMENT, adv. [Originère, nèreman: 4e è moy. et long, 5e e muet.] Originaire, qui tire son origine de quelque pays. "Il est originaire de Languedoc. "Elle est originaire d' Espagne. "Les Francs étoient originaires de Germanie. = Originairement, primitivement, dans l' origine. "Ce mot vient originairement du Grec. "Il avoit originairement beaucoup de bien. _ L' Acad. dit aussi: "Cet homme, cette famille est originairement d' Allemagne. Je crois qu' on doit dire, est originaire, et vient originairement de, etc.

ORIGINAL


ORIGINAL, ALE, adj. ORIGINALITÉ, s. f. ORIGINE, s. f. ORIGINEL, ELLE, adj. ORIGINELLEMENT, adv. [4e e muet au 4e, è moyen aux trois derniers: nèl, nèle, nèleman.] Origine est, 1°. principe, source de... "L' origine du Monde. Dês sa première origine. L' origine d' une coutume, d' une cérémonie, d' un proverbe, etc. Remonter à l' origine de, etc. _ L' intempérance est l' origine d' un grand nombre de maladies. = 2°. Extraction d' une persone, d' une race. "Tirer son origine de... On conait son origine. "Il est de noble, ou de bâsse origine. "Il est Français d' origine. = 3°. Étymologie: l' origine d' un mot: les origines d' une langue.
   ORIGINAL et ORIGINEL ont dans le fond le même sens, mais ils n' ont pas le même emploi: ils ont tous deux raport à origine;~ mais le premier se dit par oposition à ce qui n' est qu' une copie. Ainsi l' on dit, titre original, pièce originale, langue originale, pensée originale: là originel ne vaudrait rien. Originel n' est employé que dans le langage de la Religion: péché originel, grâce ou justice originelle. Avec ces mots, original formerait des barbarismes.
   On dit, proverbialement, de quelqu' un, qu' il a le péché originel, quand il a quelque défaut, ou quelque titre et qualité qui l' empêche de parvenir, d' être reçu dans une société. "Les Familles de race Juive, quoique souvent três-nobles, ont le péché originel par raport à l' ordre de Malthe.
   ORIGINAL, s. m. Se dit des chôses qui sont premières en leur genre, et qui ne sont point des copies. "L' original d' un traité, d' un contrat. "Collationé sur l' original. "Ce tableau est un original. "Tous les tableaux qu' il a sont des originaux.
   Rem. 1°. Original a cessé d' être un terme noble, et propre pour le haut style. Les originaux de la vanité payenne. Mascar. Ce divin original (J. C.) Massill. ne plairaient pas aujourd'hui. = 2°. On ne le dit guère substantivement des persones qu' en mauvaise part, et pour louer on se sert plutôt de l' adjectif. Un Auteur original est un homme de génie; mais un original est un homme bizârre et singulier. L' Acad. dit: les anciens sont d' excellens originaux; et d' un Auteur qui excelle en quelque genre, sans avoir eu de modèle: c' est un original. Je voudrais dire plutôt: les Anciens sont d' excellens modèles. "Cet Auteur est original, ou c' est un Auteur original. * Aûtrefois on donait un bon sens au substantif, en le déterminant par un aûtre nom, qu' il régissait au génitif. On disait, par exemple: Socrate est un original de sagesse. Cette expression est aujourd'hui hors d' usage; ou, du moins, elle n' est pas du beau style.
   ORIGINALITÉ, caractère de ce qui est original. L' Acad. se contente de dire qu' il se dit des persones et des chôses: elle n' en done point d' exemple. = Dans le Dict. de Trév. au comencement du siècle, on remarque que ce mot ne se troûve point encôre dans les Dictionaires, et que c' est de Piles, qui l' emploie dans un ouvrage, qui regarde les Peintres et la Peintûre, où il dit, qu' il est dificile de conaitre l' originalité d' un tableau. = Peut-il se prendre en bone part, en parlant des persones? On peut répondre que non. Quand on parle de l' originalité, ou des originalités d' un homme, on ne prétend pas le louer. _ Un Auteur moderne a dit des divines Écritûres, que: "Elles surpassent en beauté, en simplicité, en originalité, les ouvrages les plus vantés de l' antiquité profane. Cela me parait plus vrai que bien dit.
   ORIGINELLEMENT, dês l' origine. Il ne se dit qu' en parlant du péché originel et de la grâce, ou justice originelle. "Tous les hommes sont originellement pécheurs. Marie seule à été originellement sainte.

ORIGNAL


ORIGNAL, ou ORIGNAC, s. m. [Richelet les met tous deux: l' Académie ne met que le premier: mouillez le g: on ne prononce pas le c final dans le second.] Les Canadiens donent ce nom à l' élan.

ORILLARD


ORILLARD, ARDE, adj. [Ori-gliar; gliar-de: mouillez les ll.] Qui a de grandes oreilles et les remûe souvent. Il ne se dit que des chevaux. "Cheval orillard. Jument orillarde. Plusieurs disent oreillard; mais il y a quelque diférence entre ces deux mots. Voy. OREILLARD.

ORILLON


ORILLON, s. m. [Ori-glion: mouillez les ll.] 1°. Petite oreille. Il n' est usité que dans ces deux phrâses: écuelle à orillons. = 2°. Tumeur dans les glandes qui sont derrière les oreilles: les enfans y sont sujets. On le dit, au pluriel, les orillons.

ORIPEAU


ORIPEAU, s. m. [Oripo.] Lame de cuivre, três-mince et brillante. On dit, au propre, de toute étofe en broderie, qui est de faux or ou de faux argent; et au figuré, de ce qui n' a que de faux brillans: ce n' est que de l' oripeau.

ORLER


ORLER, ORLET. Voyez OURLER, OURLET.

ORME


ORME, ORMEAU, s. m. L' orme est une espèce de grand arbre fort conu. Ormeau: jeune orme. Son plus grand usage est en Poésie, où on l' emploie au lieu d' orme. _ En prôse c' est un gasconisme, dit M. Des Grouais, de dire ormeau pour orme. On dit ormille, nom collectif, pour signifier des plants de petits ormes; et ormoie, pour un lieu planté d' ormes. = On dit. proverbialement, attendez-moi sous l' orme, pour signifier qu' on ne doit pas s' atendre à ce que quelqu' un nous a promis.

ORNE


ORNE, s. m. Frène sauvage.

ORNEMENT


ORNEMENT, s. m. ORNER, v. act. [Orneman, orné: 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Orner, parer, embélir. "Orner une Chapelle. "Les beaux meubles ornent bien un apartement. = Et dans les chôses spirituelles. "Orner son esprit de conaissances agréables et utiles. "Orner son langage, son discours. "Les figûres, les métaphôres servent beaucoup à orner un discours. "Joignez aux qualités brillantes qui ornent votre persone, les qualités du coeur, des sentimens généreux et compatissans. MARIN, l' Homme Aimable.
   ORNEMENT, 1°. parûre, embellissement. "Ouvrage dépourvu, ou trop chargé d' ornemens." "Servir d' ornement à, ou à l' ornement de... = Figurément. La science est un bel ornement. "La vertu et le savoir sont de plus beaux ornemens que la beauté. = On le dit quelquefois des persones: "Il fut l' ornement de son siècle: cette Dame est l' ornement de la Cour; et de ce qui embélit un discours. "Il y a des ornemens ambitieux, qui apauvrissent un discours, au lieu de l' enrichir. S. Évr. "Rejetez les ornemens trop recherchés. = 2°. Habits sacerdotaux. "Le Prêtre revétu de ses ornemens. "Les ornemens pontificaux. = Au singulier, assortiment de chasubles, dalmatiques, chapes, devant d' autel. "Ornement complet. "Ornement blanc, rouge, etc.

ORNIèRE


ORNIèRE, s. f. [2e è moyen et long, 3e e muet.] Trace profonde que les roûes d' une voitûre font dans les chemins. "Tomber dans une ornière. "Quand il a plu, la plupart des chemins sont remplis d' ornières.

ORPAILLEUR


ORPAILLEUR, s. m. [Orpa-glieur: mouillez les ll.] Celui qui s' ocupe à tirer les paillettes d' or qui se troûvent dans le sâble de quelques rivières.

ORPHELIN


ORPHELIN, INE, subst. masc. et fém. [Orfelein, line: 2e e muet.] Enfant en bâs âge, qui a perdu son père et sa mère, ou l' un des deux, sur-tout le père; car on ne le dit guère de celui qui n' a perdu que sa mère. "C' est un pauvre orphelin; une orpheline délaissée. "La veûve et les orphelins. "Il est orphelin de père et de mère.

ORPIMENT


ORPIMENT, ou ORPIN, s. m. [Orpi--man, or-pein.] Arcenic jaûne. = Orpin est aussi le nom d' une plante.

ÔRR


ÔRR: cette syllabe est longue, soit devant l' e muet, éclôrre, soit devant la syll. masc. j' éclôrrai, j' éclôrrais.

ORT


ORT, adv. Terme de Marchand. Peser ort, avec l' embalage. L' Acad. marque ce mot subst. fém. mais dans la locution où il est employé, il n' y a pas vestige de nom substantif.

ORTEIL


ORTEIL, s. m. [Or-teil: mouillez l' l finale. On a dit aussi arteil, mais on ne le dit plus.] Doigt du pied. On ne le dit plus que du grôs doigt. Avoir la goutte à l' orteil, ou au grôs orteil.

ORTHODOXE


ORTHODOXE, adj. ORTHODOXIE, s. f. [Richelet retranche l' h: pron. ortodokce, cî-e.] Ils se disent de ce qui est conforme à la saine opinion, en matière de religion. "Auteur, doctrine, proposition ortodoxe. = S. m. pl. Les Ortodoxes. = On ne le dit point substantivement au singulier. * "Un ortodoxe disputant avec un hérétique. Anon. On dit, un hérétique, on ne dit pas un ortodoxe: l' usage a admis l' un et réprouve l' aûtre. = L' ortodoxie d' une proposition, sa conformité avec la saine doctrine.
   Rem. Ces mots ne doivent pas être employés hors des matières de religion. * Quelques Auteurs les ont pourtant apliqués à des matières profanes. Rousseau dit:
   C' est bien avant pousser le paradoxe:
   Et ce discours seroit plus orthodoxe,
   Je l' avouerai, si mes réflexions
   Se renfermoient dans les professions.
Il s' agit là de rivalités et de rivaux; mais quoique le style soit marotique, c' est un abus du terme. M. Fréron dit de M. Cailhava: "Il est toujours dans les bons principes, et, si j' ose parler ainsi, dans l' orthodoxie comique. Le correctif, employé par cet habile critique, n' empêche pas que l' emploi de ce mot, dans cette occasion, ne soit aussi ridicule qu' indécent.

ORTHOGRAPHE


ORTHOGRAPHE, ou ORTOGRAPHE, s. fém. ORTOGRAPHIE, s. f. ORTOGRAPHIER, v. act. et neut. ORTOGRAPHIQUE, adj. [Ortografe, fi-e, fi-é, fike.] Quelques-uns, dit Vaugelas, écrivent orthografe, mais orthographe vaut mieux. = Quoiqu' on dise orthographe, et non pas orthographie (en ce sens), on doit dire orthographier, et non pas orthographer. Vaug. Mén. = Ortographe est la manière d' écrire les mots d' une langue. "Bone ou mauvaise ortographe. "L' anciène ou la nouvelle ortographe. "Ortographe correcte ou vicieûse. Savoir bien l' ortographe; enseigner l' ortographe. = Ortografier, écrire les mots correctement. "Coment ortographiez-vous ce mot là? _ V. n. "Il ortographie bien; elle ortographie mal.
   ORTOGRAPHIE est un terme d' Architectûre: c' est la représentation de l' élévation d' un bâtiment. _ Il signifie, plus particulièrement, le profil ou la coupe perpendiculaire d' une fortification.
   ORTOGRAPHIQUE a raport à ortographe et à ortographie: "Dictionaire ortographique. Dessein ortographique.
   Rem. Nous avons mis au comencement de chaque Lettre les règles d' ortographe qui la concernent; et dans le cours du Dictionaire, nous avons placé diférentes remarques sur ce sujet. Voici quelques règles générales qui pourront guider, en partie, les étrangers, et le comun même des Français, dans la manière d' écrire les mots de notre langue. = 1°. Le plus grand embârras de l' ortographe française roule sur la manière d' exprimer par les caractères ces quatre sons; l' e ouvert, l' e fermé, l' i et l' o. Car le premier peut être représenté de six manières, par e sans accent, fer; par è marqué de l' accent grâve, accès; par ê marqué de l' accent circonflexe, tête, et par l' une ou l' aûtre de ces diphtongues, ai, ei, oi; haine, peine; je ferois ou je ferais, etc. Le second le peut être par un e non accentué, aimer; par é, afecté de l' accent aigu, recherché; et par la diphtongue ai, je ferai, etc. Le 3e l' est de deux manières par i, inocent; et par y, yeux. Enfin, le quatrième l' est de trois façons; par o orange; par au, auditoire; et par eau, rameau, etc. = 1re RèGLE: le son ouvert se peint par oi, dans l' anciène ortographe, et par ai dans la nouvelle, à l' imparfait et au conditionel des verbes: je faisois, ou je faisais; je ferois, je ferais, etc. = 2e RèGLE : lorsque le son de l' e ouvert moyen précède l' l mouillée, c' est toujours la diphtongue ei, qui sert à le peindre; sommeil, corbeille. = 3e RèGLE, qui n' est pourtant pas générale. Dans les aûtres ocasions, on conais qu' il faut représenter l' e ouvert par ai ou par oi, selon qu' on peut découvrir un a ou un o dans quelque aûtre mot analogue au sens de celui qui caûse le doute et l' embârras. Ainsi j' écris naître, comparaison, parce que ces mots ont du raport avec nativité et comparable, comparatif, etc. où se troûve un a aprês l' n et l' r. J' écris au contraire, conoître, paroître, parce que ces mots ont un sens analogue à celui de notion, aparoir, où se troûve un o. = On s' ôtera tout embârras, et l' on aura une règle vraiment générale, si l' on adopte la nouvelle ortographe, et qu' on écrive par ai tous ces diférens mots, conaître, paraître, français, anglais, etc. je disais, je le dirais si, etc. = 4e RèGLE: Quand il se troûve un é aigu dans le mot analogue, alors le son moyen de celui, dont on cherche l' ortographe, se représente par e, ou par ei: gérer, gèstion; pénible, peine, etc. Quant au choix entre l' e et l' ei, l' usage seul peut l' aprendre. = 5e RèGLE: Le son de l' é fermé est toujours représenté, dans les aoristes et les futurs des verbes, par la diphtongue ai: je donai, je ferai; prononcé doné, feré. Il l' est par la voyèle e, non accentuée, mais suivie d' une r, dans les infinitifs des verbes, aimer, enseigner; pron. émé, ancègné. Il l' est par la lettre z, dans les secondes persones des verbes: vous logez, vous viendrez, vous alliez, etc. Enfin, il est le plus souvent marqué par un é, afecté d' un accent aigu, suivi d' une s, au pluriel: sociétés, vérités, révérés; charités, amitiés, etc. = 6e RèGLE: Le son i s' écrit par y, quand il fait seul le mot, comme dans l' adverbe y; ou qu' il est à la tête de la syllabe, suivi immédiatement d' une voyèle, comme dans yeux, yorck, Voyez les remarques sur la lettre Y. = 7e RèGLE: L' o est représenté par la diphtongue au, lorsque dans quelque mot analogue il se trouve un a; chaleur, chaud; valeur, vaut. Que s' il se trouve un e, on se sert d' eau, qui a le même son: jumelle, jumeau: belle, beau, etc.
   2°. Un aûtre embârras c' est de choisir dans les voyèles nazales entre l' m et l' n; de savoir quand il faut écrire am ou an, em ou en, im ou in, om ou on, um ou un; de savoir aussi, quand dans les terminaisons il faut employer an ou en, qui ont souvent le même son. Sur cela, voici deux règles générales, et qui ne soufrent presque aucune exception. = 1re Règle: Devant le b, le p et l' m, on met l' m, et on emploie l' n devant les aûtres consones. On écrit ambassade, emploi, immolé, imbibé, impossible; combat, comparaison, commode, etc. Humble, etc. On écrit au contraire, ancêtre, antiène; encenser, endormi, enseigner, entrer, etc. inconu, indiquer; instruire, interroger, etc. concevoir, condition, confesser; construire, contrition, convention, etc. = 2e. Règle: Les adverbes finissent en ent, les participes actifs en ant: finement, constamment, etc. venant, trompant, etc. Pour les adjectifs, les uns finissent en ent, les aûtres en ant: éloquent, excellent; puissant, constant, etc. Il serait à souhaiter qu' on fît revivre l' ortographe de Malherbe et de plusieurs de ses contemporains, qui terminaient tous ces adjectifs en ant: il n' y aurait plus d' embarras: éloquant, excellant, etc.
   Pour les aûtres doutes, il faut consulter en détail ce Dictionaire. Voy. aussi la Préface.

ORTIE


ORTIE, s. f. [2e lon. 3e e muet.: tie n' a pas le son de ci-e, mais t y a son propre son] Plante sauvage, dont la tige et les feuilles sont piquantes. = On dit, proverbialement: jeter le froc aux orties, renoncer à la profession religieûse ou éclésiastique qu' on avait embrassée; ce qui se dit par extension, de toute profession à laquelle on renonce, pour être en liberté. L' Acad. traite cette expression de populaire. C' est trop dire, ce me semble: elle est familière. Mde. de Sévigné l' a employée. "J' assûre qu' un compère qui avoit jeté le froc aux orties, ne devoit pas être de bones moeurs.

ORTOLAN


ORTOLAN, s. m. [On a écrit aussi hortolan: mais ortolan a prévalu.] Petit oiseau de passage, d' un goût exquis et délicat. = On dit, grâs comme un ortolan.

ORVIÉTAN


ORVIÉTAN, s. m. [Or-vié-tan: 2e é fer.] Espèce de thériaque, de contrepoison. Il a été ainsi nomé d' Orviète, ville d' Italie, d' où était celui qui en fut l' inventeur. L. T. L' Académie dit que c' est que le premier orviétan fut fait à Orviète. = Quelques-uns disent, orviatan, mais mal. = On apèle les Charlatans qui vendent des drogues sur des tréteaux en place publique, des vendeurs d' orviétan.

ÔS


ÔS, s. m. [Prononc. au sing. ôs, et devant une voy. ôz: au plur. les ôs: souvent on ne prononce pas l' s finale: l' o est long: il est bon de le marquer d' un acc. circonfl.] Partie du corps de l' animal, laquelle est dûre, solide, destituée de sentiment, et qui sert à atacher, à soutenir les aûtres parties. "L' ôs de la jambe: les ôs de la tête, du bras, etc. = On dit aussi, ôs de sèche, de baleine; quoiqu' on se serve du mot arrête pour les autres poissons.
   ÔS entre dans plusieurs expressions du st. fig. famil. On dit d' une persone extrêmement maigre, que les ôs lui percent la peau, ou qu' il n' a que la peau sur les ôs; ou qu' il a la peau collée sur les ôs. _ Il y a trop de chiens aprês un ôs: trop de gens se mêlent de ce comerce. _ Jamais à un bon chien il ne vient un bon ôs: les plus habiles et les plus laborieux sont souvent les plus mal partagés ou récompensés. _ Jeter un ôs à un chien, pour le faire taire: faire des présens à quelqu' un, pour l' empêcher de parler. _ Doner un ôs à ronger à quelqu' un: lui susciter une afaire qui lui done de l' embârrâs. L' Acad. dit laisser en ce sens; et doner, pour dire, lui faire quelque légère grâce pour l' amuser et se délivrer de ses importunités. = * En avoir une, qui tient à l' ôs: expression provençale: être vivement piqué ou fâché de quelque chôse qui nous a déplu ou ofensé. C' est un vrai barbarisme d' expression.

OSE


OSE, pénult. lon. Dôse, chôse, il propôse, etc.

OSEILLE


OSEILLE, s. f. [O-zè-glie: 2e è moy. 3e e muet.] Plante potagère, d' un goût aigrelet. "Des oeufs à l' oseille. Richelet remarque que les badauds disent oiseille.

ÔSER


ÔSER, v. n. [1re lon. sur-tout devant l' e muet: il ôze, ôzera, etc.] Avoir la hardiesse de faire, de dire, etc. Il régit l' infinitif sans préposition. "Il a ôsé lui dire, etc. "Ôserez-vous l' ataquer? = Actif, il signifie entreprendre hardiment: Il peut tout ôser: il n' y a rien qu' il n' ôse. = Ne pas ôser, signifie craindre de faire, de dire, par circonspection, par ménagement. "Je n' ai pas ôsé vous déranger. "Il n' a pas ôsé leur anoncer cette triste nouvelle.
   Rem. Dans le sens négatif, on suprime souvent pas. "Je n' ôse, je n' ôsais vous le dire: je n' oserais le faire: mais quand il est actif, il faut mettre ne et pas. "Il a fait ce que l' autre n' avoit ôsé. Boss. Je crois qu' il falait dire, n' avait pas ôsé. "Vous avez raison de ne l' ôser, est encôre plus mauvais. Il faut dire de ne pas l' ôser.

ÔSÉ


ÔSÉ, ÉE, adj. Audacieux, téméraire. "Il n' est pas si ôsé que de désobéir aux ordres du Roi. Trév. "Ils furent si ôsés que de la destituer. Patru. "C' est être bien ôsé que de... Acad. "Il a été assez ôsé pour, etc. Ibid.

ÔSERAIE


ÔSERAIE, s. f. ÔSIER, s. m [Richelet écrit ozeraie, ozier: ce sont des faûtes. Dict. d' Ortogr. _ Prononc. ôzerè, ô-zié: 1re lon. 2e e muet au 1er, é fer. au 2d; 3e ê ouvert et long au 1er.] Ôsier, arbrisseau dont les jets sont fort pliants et propres à lier, etc.
   D' un osier recourbé la vigueur expirante,
   Soutenoit sur un arbre une tasse pesante.
       Marin, 6e Écl. de Virg.
= Ôseraie, lieu planté d' ôsiers. = On dit proverbialement, d' un homme souple, acomodant, pliant comme l' ôsier; et de celui qui est sans dissimulation: franc comme l' ôsier.

OSSE


OSSE: l' o est long dans grôsse, fôsse, endôsse, il désôsse, il engrôsse, et devant la syllabe masc. même, grôsseur, grôssesse, fôssé, endôsser, désôsser.

OSSELET


OSSELET, s. m. OSSEMENS, s. m. pl. OSSEUX, EûSE, adj. [Ocelè, oceman, o--ceû, ceûze: 2e e muet aux 2 prem. lon. aux 2 dern. 3e è moy. au 1er.] Osselet, petit ôs. "Les osselets de l' oreille. "Jouer aux osselets. = Sorte de tortûre: Doner les osselets. = Ossemens, ôs décharnés des animaux morts. "Les cimétières sont pleins d' ossemens. = Osseux, qui est de natûre d' ôs. "Partie osseûse.

OSSIFICATION


OSSIFICATION, s. f. OSSIFIER (s' ) v. réc. [Ocifika-cion, ocifi-é.] Ils expriment le changement insensible des membranes et des cartilages en ôs.

OSSU


*OSSU, ÛE, adj. Qui a de gros ôs. "Cet homme est fort ossu. _ Ce mot est dans Trév. et dans le Rich. Port. _ L' Acad. ne le met pas.

OST


*OST, s. m. Armée. Vieux mot, employé par La Fontaine, dans la Fable du Loup et du Renard.
   L' Ost du peuple bélant crut voir cinquante Loups.

OSTENSIBLE


OSTENSIBLE, adj. [Os-tancible: 2e lon. dern. e muet.] Qui peut être montré. "Lettre, instruction ostensible.

OSTENTATEUR


*OSTENTATEUR, s. m. Superbe, orgueuilleux. C' est un mot de St. Évremont: "L' art ostentateur. Le Dict. de Trév. remarquait (au comencement du siècle) que ce mot ne se disait guère, et ne se trouvait point dans les Dictionaires; que cependant il pouvait être d' usage, et avoir même bone grâce en certaines ocasions. _ Il n' a pas été reçu. On peut dire que c' est domage.

OSTENTATION


OSTENTATION, s. f. [Ostanta-cion, en vers ci-on: 2e lon.] Montre afectée de ce dont on tire vanité. "Vaine ostentation. "Cet homme est plein d' ostentation. "Il y a en tout cela plus d' ostentation que de vraie générosité.

OSTROGOT


OSTROGOT, s. m. Got Oriental. = On dit proverbialement: vous me prenez pour un ostrogot; pour un homme qui ignôre les usages, les bienséances.

OT


OT, terminaison longue dans impôt, tôt, dépôt, entrepôt, suppôt, rôt, prévôt. Dans roti, l' o est bref: dans prévôté, il est long.

OTAGE


OTAGE, s. m. [Plusieurs écrivent ôtage: mais l' o n' étant pas long, cet accent circonfl. peut induire en erreur. On a mis long-tems cet acc. pour marquer la suppression de l' s, ostage.] La persone qu' on remet à un Général avec qui l' on traite, pour assurer l' exécution d' un traité, etc. "Doner, livrer des otages. "Les otages furent renvoyés~.

OTE


OTE: pénultième longue dans hôte, côte, maltôte; j' ôte; et la quantité des trois dern. est la même devant la syllabe masc. côté, maltôtier, ôter. Dans les dérivés du 1er, hotel, hotellerie, l' o est bref. Il ne faut donc pas le marquer d' un acc. circ.

ÔTER


ÔTER, v. act. [1re lon. 2e é fer. Ôté.] 1°. Tirer une chôse de la place où elle est. "Ôtez cela: ôtez la nape: ôtez cet enfant du chemin: ôtez-lui ce couteau. = 2°. Faire cesser, faire pâsser. "Ce doigt de vin vous ôtera votre mal de coeur. "Ôtez les taches, les empêchemens, les obstacles. "Ôtez-moi de peine, d' inquiétude, etc. "Ôter quelque chôse de l' esprit, de la tête, de la fantaisie à quelqu' un. = 3°. retrancher. "Ôter un pouce, un pied d' un morceau de bois. "Qui de six ôte deux, reste quatre. = 4°. Enlever par force, ou par autorité, ou par artifice. "On lui a ôté tout son bien: on veut lui ôter sa charge. "Vous lui avez ôté l' honeur par vos calomnies.

ÔTÉ


ÔTÉ, adv. Excepté, hormis. Quelques-uns le traitent comme indéclinable. "Ôté cela, j' accepte, j' aprouve tout le reste. Ôté deux ou trois endroits, cet ouvrage est excellent. _ L' Acad. en le qualifiant d' adverbe, l' ortographie et l' emploie comme impératif. "Ôtez cela: ôtez ces deux ou trois endroits, etc. = Je préférerais la 1re manière; et moi la seconde, dit M. Marin.

OTRE


OTRE; il n' y a dans la Langue que trois mots ainsi terminés: Apôtre, nôtre et vôtre: le 1er a toujours la pénultième longue: les deux autres sont brefs, quand ils précèdent le substantif: votre serviteur, notre salut: on ne doit pas alors accentuer l' o: ils sont longs, quand ils sont substantifs eux-mêmes: c' est le nôtre, le vôtre.
   OU, diphtongue qui correspond à l' u, tel que le prononcent les autres peuples de l' Europe. Mutter en allemand; upon en anglais; puro en italien; ulcerar en espagnol, etc. = Les noms en ou prènent un x au pluriel, caillou, cailloux, etc. Exceptez trou et matou, qui prènent une s: trous, matous.

OU


OU, conjonction: (vel) Où, adv. (ubi.) Le 1er est sans accent; l' autre doit porter sur l' u l' acc. grave. C' est par là qu' on les distingue.
   OU, est une conjonction alternative: ou l' un ou l' aûtre. = 1°. On peut le répéter devant chacun des mots conjoints, ou bien ne le mettre que devant le second: ou vous, ou lui, ou moi. "Vous, ou lui, ou moi. = 2°. Ou bien est de même nature que ou: mais on ne s' en sert guère que dans le discours familier, ou lorsque ou employé tout seul, pourrait être pris pour l' adverbe de lieu où. Hors delà, il faut éviter de s' en servir. = 3°. Aprês ou, il faut répéter l' article, le pronom ou la préposition dont on s' est servi auparavant. P. Corneille dit:
   Réduit à te déplaire, ou soufrir un afront...
   D' achever de César, ou troubler la victoire.
L' exactitude demande qu' on dise, ou à soufrir, ou de troubler. = 4°. Dans le soit redoublé, ou se met élégamment au lieu du second soit: soit que vous ayiez fait cela, ou que vous ne l' ayiez pas fait; au lieu de, soit que vous ne l' ayiez pas fait. = 5°. Ou n' est bon que dans le sens afirmatif; dans le négatif, il faut se servir de ni.
   Ce n' est pas que Chimène écoute leurs soupirs,
   Ou d' un regard propice anime leurs desirs.
Il falait dire, à mon avis, dit Scuderi: ni que d' un regard propice elle anime leurs desirs. La critique est juste, non-seulement pour ou à la place de ni; mais pour que, qu' il falait répéter, et pour elle, qu' il falait mettre au second membre. Voy. n°. 3°. = 6°. Suivant Vaugelas, quand ou ne se trouve que deux fois dans la phrâse, il faut mettre le verbe au singulier: ou la douceur ou la force le fera, et non pas le feront: mais quand il y est plus de deux fois, le verbe est mieux au pluriel, qu' au singulier: "ou la honte, ou l' ocasion ou l' exemple les détromperont, est mieux que les détrompera. = 7°. Il faut éviter soigneusement de joindre par la conjonction ou, deux membres de phrâse, dont l' un exige la négative, et l' aûtre ne l' exige pas. "Des pays qui ont été ou point, ou mal décrits. Voy. d' Ans. Il falait, qui n' ont point été décrits, ou qui l' ont été fort mal. "On y trouve peu ou point d' eau douce. Ibid. Dites: on n' y troûve point d' eau douce, ou du moins, on y en troûve fort peu.= * 8°. Plusieurs joignent ou et soit, dans le 2d membre; c' est un pléonasme. Au lieu de dire, par exemple: vous m' enverrez des sucres ou des cafés: ils disent, des sucres, ou soit des cafés; le soit est de trop. Vaugelas en avait fait autrefois la remarque pour, ou soit que: et Th. Corneille le trouvait aussi condamnable en vers qu' en prôse. = 9°. On dit quelquefois à pour ou; deux à trois, pour deux ou trois: ou vaut toujours mieux. _ 10°. Deux ou trois millions, deux ou trois cens mille livres, a quelque chôse de ridicule, à caûse de la trop grande disproportion des deux membres conjoints par ou. "Cet homme a deux ou trois millions de bien. Il y a trop de distance de l' un à l' autre, pour qu' il puisse y avoir de l' incertitude. "Le Sultan Osman, à la tête de deux ou trois cens mille hommes, ataqua les Polonois et les Cosaques. D' Avrig. Il faut dire alors: à la tête de deux, ou, comme disent d' autre Historiens, de trois cens mille hommes, ataqua, etc.
   Où~, adv. de lieu. "Où est-il? où va-t-il? etc. 1°. C' est le seul adv. de lieu qui aime à précéder le verbe. "Où alez-vous? Je ne sais où il est alé. = Ordinairement donc, il suit le verbe qui le régit, et précède le verbe qui le modifie. "Pourquoi chercher sa colère, où son amour éclate. En vers pourtant et dans le st. relevé, on peut changer cette construction.
   Où son amour éclate y chercher sa colère.
       L. Racine.
Avec la construction ordinaire, y serait superflu. = 2°. Où se combine avec les prépositions de et par: d' où il est venu; par où il a pâssé: mais il ne s' associe pas si bien avec la prép. vers. "Il se rendit à un tel lieu, vers où l' armée s' avança. Il faut dire: vers lequel. Vaugelas, Corneille, Ménage contre Chapelain, qui prétendait que, non-seulement ce n' est pas un barbarisme, mais que c' était même une élégance. = 3°. Où s' emploie quelquefois élégamment au lieu de, dans lequel, laquelle, lesquels: "Le mauvais état où vous m' avez laissé, pour dans lequel vous m' avez laissé. Alors il est employé relativement, et il marque tems, lieu, situation, état, disposition, dessein; et il sert tant pour les deux genres, que pour les deux nombres. "La peine où je suis; les embarras où je me troûve: c. à. d. dans laquelle, etc. Dans lesquels, etc. = 4°. On s' en sert aussi au lieu du datif auquel, à laquelle, pronom que les Poètes n' oseraient employer. Mais peut-on s' en servir dans toutes les ocasions, où, en prôse on employerait auquel? Peut-on dire, comme Racine dans Bérénice;
   Faites qu' en ce moment je lui puisse anoncer
   Un bonheur où peut-être il n' ôse plus penser.
D' Olivet pense que non. Il lui semble qu' un bonheur où je pense, ne se dit point. Pourquoi ne se dit-il point? vous le demanderez à l' usage. D' OLIV. _ Le même Poète si correct, si exact, a dit dans Esther:
   Je romps le joug funeste où les Juifs sont soumis.
Pour, auquel les Juifs sont soumis. En prôse ce serait une faûte: on peut ne pas la regarder comme telle en vers. = St. Évremont a dit aussi: "Son inocence négligea les formes où sont assujettis les innocens ordinaires. _ Il s' en sert âilleurs pour, auprès de qui: "Il (Mécénas) espérait de sa délicatesse avec un Empereur délicat, ce qu' il ne pouvait atendre du peuple romain, où il eut fallu se pousser par ses propres moyens. Il falait, dans le 1er exemple, auxquelles, et dans le 2d, auprès de qui. = Rollin lui done aussi ce dernier sens, et l' aplique de même aux persones: "Ils allèrent trouver Seleucus où ils se joignirent à Lysandra. Hist. Anc. l' Auteur avait dit plus haut que Lysandra se sauva à la cour de Seleucus. = 5°. Quelquefois où pour auquel, à laquelle ferait une équivoque: c' est alors une nouvelle raison d' employer celui-ci de préférence à celui-là. Ex. Un des Traducteurs de l' Imitation a dit: "Prenez une ferme résolution de porter cette croix où J. C. votre Divin Maître a bien voulu mourir pour l' amour de vous. Dans cette phrâse, où aprês porter fait une équivoque. Il semble qu' on veuille dire qu' il faut porter la croix dans l' endroit, où J. C. a bien voulu, etc. Dans ce câs, dites, sur laquelle, etc. = 6°. D' où est plus usité à la place de dont, duquel, de laquelle. "Henri IV. regardoit la bonne éducation de la jeunesse, comme une chôse d' où dépend la félicité des royaumes et des peuples. _ Il y a des ocasions, où ce seroit une faûte d' employer d' où pour dont, et d' aûtres où l' on feroit mal de se servir de dont, au lieu de d' où. Ex. Quand maison signifie logis, on doit dire, la maison, d' où il est sorti: quand il signifie race, on dira, la maison, dont il est sorti. _ Suivant ce principe, il ma paroit, dit M. de Wailli qu' il y a une faûte dans cette phrâse d' un Historien moderne: "Les alliés de Rome, indignés et honteux tout-à-la fois de reconoître pour maitresse une ville, dont la liberté paroissoit bannie pour toujours, etc. Au lieu de dont j' aurais mis d' où. WAILLI. Le mot Ville désigne en éfet le lieu; et d' où est plus propre que dont, pour marquer le lieu. = 7°. * Quelques-uns mettent où et y dans la même phrâse, et les font raporter au même objet. C' est un pléonasme; une répétition vicieûse. "À~ Lacédémone il y avoit un Temple dédié à Morpho, où Vénus et le Déesse y étoit voilée. Voy. Litt. de la Grèce. _ Où signifiant dans lequel, aussi bien qu' y, l' un des deux est inutile.
   Où qu' il porte les yeux, il y porte la mort.
       Brebeuf.
L' inversion de la construction rend ce pléonasme excusable dans ce vers. C' est le même tour que celui du vers de Racine le Fils. Voy. n°. 1°. = 8°. On ne doit pas trop éloigner où du nom, auquel il se raporte. "Elle (Ste Nymphe) étoit née à Palerme en Sicile, d' où elle fut obligée de se retirer sur la côte de Toscane, durant la persécution avec Maximilien, Évêque de Palerme, où l' on croit qu' elle mourut en paix. P. Griffet, Ann. Chrét. _ Suivant l' intention de l' Auteur, où se raporte à la côte de Toscane, dont il est trop éloigné. Suivant la construction, on croirait qu' il se raporte à Palerme, qui précède immédiatement. Il falait dire: "Elle étoit née à Palerme, d' où elle fut obligée, pendant la persécution, de se retirer, avec l' Évêque Maximilien, sur la côte de Toscane, où l' on croit qu' elle mourut en paix. = 9°. Où s' emploie aussi absolument, mais seulement par interrogation, ou avec des verbes et des façons de parler, qui désignent conaissance ou ignorance; et alors il signifie, en quel lieu. "Où va-t' il? "Il ne sait où il va. On dit, dans le même sens absolument ou relativement d' où et par où, qui signifient de quel lieu ou de quoi; par quel lieu, ou, par quel moyen. "D' où est-il venu, par où a-t' il pâssé? D' où ou par où a-t' il su? etc. = 10°. Dans les interrogations, on répète quelquefois où, sans répéter le verbe: "Où sont, diront-ils, les promesses de J. C.? Où la fermeté de son Église? Où la pureté tant vantée du christianisme? Boss. _ Mais dans ce tour oratoire, il faut exprimer, au moins une fois, le verbe. La Fontaine le suprime entièrement:
   Au quel cas, où l' honeur d' une telle aventûre?
Il sous-entend est: où est l' honeur? Mais cela ne vaut rien, même dans une Fâble. = * 11°. Là où, pour, au lieu que, est une manière de parler entièrement vicieûse. VAUG. CORN. = * Où que, pour, quelque par que, n' est pas non plus une expression agréable, dit Ménage, et je la tiens provinciale. Vaugelas et Th. Corneille la désaprouvaient aussi. Cependant beaucoup de Poètes s' en étaient servis.
   Où que tes banières âillent.
       Malherbe.
  Où que tu sois, quoiqu' on y fasse,
  Tu mets en jeu les Bisaïeux.
      Maynard.
   Où qu' il porte les yeux, il y porte la mort.
       Brébeuf.
  L' Homme n' a point ici de cité permanente:
  Où qu' il soit, quoiqu' il tente
  Il est un malheureux passant.
       P. Corneille, Imitat. de J. C.
Cette locution est entièrement hors d' usage.
   D' où vient que, se prend ordinairement dans la même signification que pourquoi, et que les aûtres conjonctions interrogatives; et, dans le discours familier, on le peut fort bien employer à leur place; mais toujours avec cette diférence que d' où vient que ne s' emploie jamais avec un verbe, que ce verbe ne soit précédé du pronom personel, qui en est le nominatif; au lieu que, avec pourquoi et les aûtres conjonctions interrogatives, ce pronom nominatif ne se met jamais qu' aprês le verbe: "Pourquoi se mêle-t' il? "D' où vient qu' il se mêle? _ * Quelques-uns disent, d' où vient se mêle-t' il? mais ils parlent mal.

OUâILLE


OUâILLE, s. f. [Ou-â-glie: 2e lon. 3e e muet.] Brebis. Il ne s' emploie plus qu' au figuré. Un curé dit à son paroissien: vous êtes mon ouâille. = Son plus grand usage est au pluriel. Acad. "Un bon Pasteur a soin de ses ouâilles.

OUAIS


OUAIS! interj. [Oûe, monos. long: ê ouvert.] Il marque de la surprise: ouais! cet homme là fait bien le fier. _ Il est familier.

OVALE


OVALE, adj. OVALAIRE, adj. [3e è moy. et long au 2d; lère.] Ovale, qui est de figûre ronde et oblongue: table ovale. = S. m. "Un grand ovale: un ovale régulier. = Ovalaire, qui est de forme ovale. Il ne se dit qu' en Anatomie, du trou, dont est percé l' ischion.
   Rem. Le P. Bârre et M. Mercier écrivent oval. "Visage long ou oval. Cela est contre l' usage.

OUATE


OUATE, s. f. OUATER, v. act. [L' Acad. remarque qu' on écrit et qu' on prononce de la ouate: ainsi l' o est aspiré. Boileau n' était pas de cet avis, à en juger par ce vers.
   Où sur l' ouate molle éclate le tabis.
M. de St. Marc, un de ses Comentateurs, prétend qu' à Paris on prononce ouette bien plus comunément qu' ouate, et que l' on y dit toujours d' une robe qu' elle est ouettée, et non pas ouatée. Cette prononciation est aparemment de ceux qui prononcent moué, toué et le roué nous sommes troué. Madame de Sévigné écrit ouatée: j' ai une robe de chambre ouatée.] Ouate est une espèce de coton plus fin et plus soyeux que le coton ordinaire, et que l' on met entre deux étofes. "Camisole, jupe, couvertûre d' ouate. = Ouater, mettre de la ouate entre une étofe et la doublûre.

OVATION


OVATION, s. f. [Ova-cion, en vers ci-on.] Espèce de triomphe parmi les Romains, où le Triomphateur entrait dans la Ville à pied ou à cheval et sacrifiait une brebis; à la diférence du grand triomphe, où le Triomphateur était sur un char et sacrifiait un taureau.

OUBLI


OUBLI, s. m. OUBLIER, v. act. et n. OUBLIEUX, EûSE, adj. [3e. é fer. au 2d, lon. aux 2 dern. ou-bli, bli-é, eû, eû-ze.] Oubli: manque de souvenir. Oublier, perdre le souvenir de... Oublieux, sujet à oublier facilement. "Long, profond, éternel oubli. Mettre en oubli. Tirer de l' oubli. "Vous êtes bien oublieux: elle est fort oublieûse. "Oublier sa leçon. = V. n. sans régime: il aprend aisément et oublie de même: ou avec les prép. de ou à et l' infinitif. Il y a quelque distinction à faire entre ces deux régimes. Oublier à, c' est perdre la facilité, que l' exercice et l' usage donait: en ne chantant, en ne dansant point, on oublie à chanter, à danser. Le second manque un défaut d' exactitude de mémoire: j' ai oublié de vous dire que, etc. = L' Acad. ne fait pas cette distinction, qui parait juste: elle dit indiféremment: j' avois oublié de vous dire, ou à vous dire que... Quelques Auteurs, ou par goût, ou par habitude, préfèrent à: "J' oubliois à vous dire que les Libraires me pressent fort de donner une nouvelle édition de mes ouvrages. BOIL. "J' oublois à vous dire que, etc. PLUCHE. "Il ne faut pas oublier à instruire le jeune curieux. Sc. des Méd. = Oublier, régit aussi que et l' indicatif. "Vous avez oublié que vous aviez promis de venir hier.
   OUBLIER, a plusieurs aûtres sens suivant les noms avec lesquels il s' associe. Oublier, laisser par inadvertance. "J' ai oublié mes gants, ma montre, etc. _ Oublier ses parens, ses amis, négliger de leur rendre les devoirs de la parenté, de l' amitié. "Vous nous avez oubliés. = Oublier une injûre, une ofense; n' en conserver aucun ressentiment. _ On dit aussi, l' oubli des ofenses, des injûres. = Oublier son devoir, le respect qu' on doit; y manquer. = S' oublier, ou oublier qui l' on est, se méconaitre. "Vous vous oubliez: la prospérité est caûse que l' on s' oublie. = S' oublier a deux aûtres sens: 1°. Oublier son devoir: il s' est oublié dans cette ocasion: 2°. Négliger ses intérêts: il s' oublie pour penser aux aûtres. "Il ne s' oubliera pas. Le Proverbe dit: bien fou, qui s' oublie. = * S' oublier de faire, pour oublier de faire, est un gasconisme. "Je me suis oublié de le faire. Dites: j' ai oublié, etc. = On dit, proverbialement, qu' une chôse, qu' une persone est mise au rang des péchés oubliés, pour dire qu' on n' y songe plus.
   Rem. 1°. Oubli n' a point de pluriel, même en vers: on dit, votre oubli, et non pas vos oublis, même en parlant à plusieurs persones. = 2°. Au futur et au conditionel, oublier est de trois syllabes seulement: les Poètes même retranchent souvent l' e muet dans l' ortographe de ce mot:
   Sans les remords afreux, qui déchirent mon coeur,
   Hiéron, j' oublirois qu' il est un ciel vengeur.
       Crébillon.
  Ah! Roxane jamais n' en oublira l' horreur.
      Follard.
= 3°. N' oublier rien pour, est une expression usitée et élégante: "N' oubliez rien pour le rendre juste, bienfaisant, sincère et fidèle à garder le secret. Télém. "Il n' oublie rien pour réussir. = 4°. * Autrefois on disait, s' oublier de, avec le regime des noms. "Il s' est oublié de son devoir. Charlev. "Dans leur malheur, elles ne s' étoient pas oubliées d' elles et de leur vertu. P. Rapin. "Cet ingrat, enivré des douceurs de sa nouvelle prospérité, s' oublie du bienfait et de son Auteur. La Ruë. "Le Nonce se mit dans une colère si forte, qu' il s' oublia même de la gravité de son caractère. Ce tour de phrâse est un peu vieux. Il étoit pourtant bon à conserver: on dit, il est vrai, dans ce sens, s' oublier tout seul et sans régime: mais le sens en est trop vague et avec le régime il est mieux marqué, outre que s' oublier ayant plusieurs sens, est quelque--fois équivoque.

OUBLIE


OUBLIE, s. f. OUBLIEUR, s. m. [Ou--blî-e, bli-eû: 2e lon. au 1er, 3e e muet: on ne prononce point l' r finale du 2d.] Oublie, est une sorte de pâtisserie, fort mince et roulée. "Mince comme une oublie. "Crier, jouer des oublies. = Oublieur, qui vend des oublies par les rûes. L' Acad. avait d' abord écrit oublieux: ensuite elle a écrit oublieur, en avertissant qu' on prononce oublieux.

OUBLIETTES


OUBLIETTES, s. f. pl. Cachot couvert d' une faûsse trape, dans lequel, à ce qu' on dit, on faisait tomber ceux, dont on voulait se défaire secrètement. _ De là l' expression proverbiale, on l' a mis aux oubliettes: on l' a fait pâsser par les oubliettes.

OUBLIEUR


OUBLIEUR, Voy. OUBLIE.

OUBLIEUX


OUBLIEUX, Voy. OUBLI.

OûE


OûE: l' ou est long: moûe, boûe; il avoûe, il loûe. Quand la syll. devient masculine, l' ou devient bref: avouer: louer, etc.

OUEST


OUEST, s. m. La partie du monde, qui est au soleil couchant. = Le vent, qui soufle de ce côté.

OUETTE


OUETTE, OUETTÉ, Voy OUATE.

OUï


OUï, adv. ou particule d' afirmation. [Il se prononce ordinairement, comme s' il était écrit hou-i avec une h consone ou aspirée. Ainsi l' on doit écrire et prononcer ce ouï, et non pas cet ouï. VAUG. CORN. comme on écrit, et l' on prononce ce hérôs et non pas cet hérôs. _ On dit le ouï et le non, et non pas l' ouï. "Un nombre de courtisant vieillissent sur le ouï et sur le non (de rester à la cour ou de s' en retirer) et meurent dans le doute. La Bruy. "Sachez, Monsieur, que le ouï et le non d' un honête homme valent tous les sermens du monde. Th. d' Éduc. = Par la même raison, on peut dire oui, oui, en vers, sans craindre l' hiatus. Racine l' a fait deux fois.
   Oui, oui, cette vertu sera récompensée.
       Fr. Én.
  Oui, oui, vous me suivrez, n' en doutez nullement.
      Andromaque.
Il ne l' employa plus dans ses aûtres pièces: il le trouva aparemment trop dur; et il l' est en éfet. = On dit pourtant sans aspiration, je crois, il dit qu' oui et non pas que oui. = Dans le discours ordinaire, il est monosyllabe oui. Dans le discours soutenu, il est~ dissyllabe, ou-i. Les Poètes lui en donent deux, ou une seule, suivant que cela les acomode.] Oui est souvent réponse à une interrogation. "Avez-vous fait cela? oui, ou bien, oui, Monsieur, suivant qu' on est familier avec les persones, ou qu' on leur doit du respect. = Il est souvent joint à non. Dites oui ou non: répondre, opiner par oui ou par non. = Il se dit aussi absolument et à la tête de la phrâse. "Oui, je veux que tout le monde sache ce que j' en pense. Et substantivement: "Dites un oui ou un non. "Il a dit ce ouï là de bon coeur. = Il se joint quelquefois aux adverbes, certes, vraiment, certainement, sans doute: "Ouï certes, etc. et à la particule dà: "Ouï-dà je le veux bien, volontiers.

OUï-DIRE


OUï-DIRE, s. m. Ce qu' on ne sait que sur le dire d' autrui. "Ce n' est qu' un ouï-dire: je ne le sais que par ouï-dire. Au pluriel, il est indéclinable et ne prend point d' s: il ne faut point s' arrêter aux oui-dire. On pron. ô-oui-dire, et non pas ôzoui-dire. Voy. OUï.

OUïE


OUïE, s. f. OUïR, v. act. [Ou-î-e: ou-i, 1e lon. 3e e muet au 1er.] Ouïe, est celui des cinq sens, par lequel on reçoit les sons. "Avoir l' ouïe bone, fine, subtile, délicate, ou mauvaise, dûre, etc. = Ouïes, au pluriel, ne se dit que des poissons et dans un autre sens qu' ouïe au singulier, de certaines parties de la tête, qui leur servent pour la respiration. = On dit, en style fig. famil. d' un homme, qui est abatu de maladie, ou, qui a reçu quelque mortification, qu' il a les ouïes pâles.
   OUïR a perdu presque tous les tems simples. On ne l' emploie jamais ni au présent, ni à l' imparfait, ni au futur, ni à l' impératif. Anciènement il avait tous ces tems-là. Au présent, Vaugelas a encôre dit, on oit pour on entend; Scudéri a dit, nous oyons: à l' imparfait on disait, j' oyois, il oyoit; au futur, j' ôrrai, tu ôrras, il ôrra, ou j' oïrai, il oïra.
   Je ne veux point d' excuse à mon impiété,
   Si la beauté des cieux n' est l' unique beauté,
   Dont on m' orra jamais les merveilles écrire.
       Malherbe.
  Là d' une musique fournie
  Nous orrons la douce harmonie.
      Du Bellai.
"Nous disons à présent, dit Ménage, on m' oïra, nous oïrons, vous oïrez. _ Aujourd'hui, on ne dit plus ni l' un ni l' aûtre _ Enfin, on disait à l' impératif, oyez, oyons;
   Oyez, dit-il ensuite, oyez peuple, oyez tous.
       Polieucte.
= Il n' est plus en usage que dans l' aoriste j' ouïs, dans l' imparfait du subjonctif, que j' ouïsse, et aux tems composés, j' ai ouï, ayant ouï, etc.
   OUïR a une signification moins étendûe qu' entendre; on se sert d' entendre par-tout où l' on se sert d' ouïr; mais on ne se sert pas d' ouïr par-tout où l' on se sert d' entendre. _ Ouïr, ne se dit proprement que d' un son passager, et qu' on entend par hazard et sans dessein. On ne doit pas s' en servir, quand il est question d' un Prédicateur, d' un Avocat, d' un discours public. On dit, pourtant, ouïr la Messe; condamner les gens sans les ouïr: mais entendre est toujours meilleur. Voy. ENTENDRE. = Ouïr, comme entendre, régit l' infinitif sans préposition. "J' ai ouï dire, raconter, etc.
   OUïR, c' est aussi doner audience. "Le Prince n' a pas voulu les ouïr. "Un juge doit ouïr les deux parties. _ Entendre est plus ustié, même en ce sens. = Écouter favorablement: "Seigneur, daignez ouïr mes humbles prières. = Au Palais, on dit, ouïr et faire ouïr les témoins: "Être assigné pour être ouï: "Ouï le raport de... Jugement rendu les parties ouïes.
   OUILLE, f. [pron. ou-glie] L' ou est long dans rouille, il débrouille, il embrouille, il dérouille: il est bref devant la syll. masc. rouiller, brouillon, etc.

OVIPâRE


OVIPâRE, adj. [3e lon. 4e e muet.] Il se dit des animaux, qui se multiplient par le moyen des oeufs.
   OUïR, Voy. OUïE.

OULE


OULE; pénult. longue dans moûle, elle est soûle; il se soûle, il foûle, la foûle, il roûle, écroûle; brève âilleurs.

OURAGAN


OURAGAN, s. m. [Richelet écrit aussi houragan: mais cette ortographe n' a point de fondement.] L' Acad. dit que ce mot est emprunté de l' Indien. Tempête violente, acompagnée de tourbillons.

OURDIR


OURDIR, v. act. [Our-di. _ M. Dandré Bardon écrit hourdir avec h: mauvaise ortographe.] Disposer les fils, pour faire la toile. "Ourdir une toile, la trame d' un drap, etc. = Fig. Ourdir une trahison; prendre des mesûres pour trahir. = Ourdir et tramer ne se confondent point dans le propre; mais au figuré, on les dit assez indiféremment. Cependant le 2d dit plus que le 1er. Ourdir, c' est comencer; tramer, c' est avancer l' ouvrage. On ourdit même une trame: on trame une trahison. Roub. = Le Proverbe dit: à toile ourdie Dieu envoie le fil: la Providence fournit des moyens pour achever l' ouvrage qu' on a comencé. = M. Andry dit que ce mot a beaucoup de grâce dans le figuré. "Peut-être, dit M. Patru, la verrons-nous un jour rompre de ses propres mains la trame qu' elle a ourdie. _ Ménage se plaignait que, déjà de son tems, nos Poètes ne voulussent plus se servir de ce mot, qu' il trouvait três-beau et três-poétique.

OûRE


OûRE: d' Olivet dit que cette pénult. est douteûse: l' analogie la ferait croire longue; car l' r entre une voyèle et l' e muet rend cette voyèle longue: voyez les terminaisons en âre, ère, îre, ôre, ûre. _ Bravoûre, ils coûrent; oû long.

OURLER


OURLER, v. act. OURLET, s. m. [Our--lé, our-lè: 2e é fer. au 1er, è moy. au 2d. _ On a dit autrefois orler, orlet et même orle.] Ourlet est le repli, qu' on fait à du linge, à une étofe, etc. soit pour ornement, soit pour empêcher qu' ils ne s' éfilent. Ourler, faire un ourlet.

OûRRE


OûRRE: l' ou est long dans cette terminaison: de la boûrre, il boûrre, il foûrre, etc. mais devant la syll. masc. l' ou est bref. Bourrade, rembourré, fourrer, etc.

OURS


OURS, s. m. Animal féroce et fort velu, qui habite ordinairement les pays froids, et se retire dans les montagnes et les forêts. "On dit que les ours sont quarante jours à lécher leurs petits. = On dit, proverbialement, d' un enfant, qui n' a point de peur, qu' il a monté sur l' ours; d' un enfant mal fait, ou d' un homme brutal, rustre et mal élevé, c' est un ours mal léché; d' un homme fort velu, ou farouche, qui fuit la société: c' est un ours; de celui, qui est mal vétu et mal bâti; il est fait comme un meneur d' ours; de celui, qui se laisse gouverner par un aûtre, qui abûse de sa facilité: il se laisse mener par le nez comme un ours. _ Le Proverbe dit: il ne faut pas vendre la peau de l' ours, avant qu' il soit pris, il ne faut pas se flater trop légèrement d' un succês favorable dans une entreprise hazardeûse.

OURSE


OURSE, s. f. La femelle de l' ours. = La grande ourse, la petite ourse, deux constellations, qui sont proche du pôle arctique: dans la seconde se troûve l' étoile polaire. = Poétiquement, l' ourse, le septentrion. "Du midi jusqu' à l' ourse.

OURSIN


OURSIN, s. m. OURSON, s. m. [Our--sein, our-son.] Le 1er est le nom d' un coquillage de mer, dont la coquille est tout autour hérissée de pointes. Le 2d se dit du petit d' un ours. "Manger des oursins: "On a pris deux oursons.

OûSE


OûSE: l' ou est toujours long: époûse, jaloûse, qu' elle coûse, etc.

OûSSE


OûSSE: la pénult. n' est longue que dans je poûsse; elle est brève dans tout le reste: mousse, je tousse, etc.

OûT


OûT, long dans Août (qu' on prononce oû), dans coût, goût et ses dérivés, goûter, etc.

OUTARDE


OUTARDE, s. f. Grôs oiseau, de beau plumage. "Une jeune outarde: pâté d' outarde.

OUTE


OUTE: l' ou est long dans absoûte, joûte, croûte, voûte, j' ajoûte, il coûte, il goûte; mais bref devant la syllabe masc. ajouter, coûter.

OUTIL


OUTIL, s. masc. [Ou-ti: on ne pron. point l' l finale.] Tout instrument, dont les Artisans, les Laboureurs, les Jardiniers, etc. se servent pour leur travail. "Outils de Menuisier, de Charpentier, de labourage. "Cet outil est fort bon; celui-ci ne vaut rien. = Le proverbe dit: "Un méchant ouvrier ne saurait trouver de bons outils: un bon ouvrier se sert de toute sorte d' outils. = On dit, familièrement: il est bien ou mal outillé; il a de bons ou de mauvais outils, ou, il a beaucoup ou peu d' outils.
   Outil, instrument, machine, engin (syn.) L' outil est une invention utile, usuelle; l' instrument, une invention adroite, ingénieûse. Si la chôse est plus compliquée, c' est une machine. L' engin (suivant l' étymologie) anonce une sorte de génie; mais ce n' est pas un terme noble. On dit, les outils d' un Menuisier, d' un charron; des instrumens, de Chirurgie, de Mathématiques; la machine pneumatique, électrique. _ Le Luthier fait avec des outils, des instrumens de Musique. L' instrument est en lui-même un ouvrage supérieur à l' outil. Extrait en partie des Syn. Fr. de M. l' Ab. Roubaud.

OUTRAGE


OUTRAGE, s. masc. OUTRAGEANT, ANTE, adj. OUTRAGER, v. act. [3e e muet au 1er, é fer. au dern. long. au second et au 3e: jan, jante; dans ceux-ci l' e ne se fait pas sentir: il n' est mis là que pour doner au g un son doux qu' il n' a pas devant l' a.] Outrage est une injûre atroce. Outrager, faire outrage. Outrageant, qui outrage. Il ne se dit que des chôses. Faire outrage, ou un outrage; un cruel, un sanglant outrage à... "Recevoir, soufrir un outrage. "Procédé outrageant; paroles outrageantes. "Il ne l' a pas seulement ofensé; il l' a outragé. "On l' a outragé en sa persone: il a été outragé en son honeur.
   Rem. I. Outrage a un sens actif: mon outrage est l' outrage que je fais, et non pas celui que je reçois.
   Le tems acrut ainsi mes maux et mon outrage.
       La Harpe, Philoct.
Qu' est ce qu' acroitre un outrage, demande M. Geofroi. Les outrages dont se plaint Philoctète, ce ne sont pas les siens, mais ceux qu' il avait reçus d' Ulysse et des Atrides. _ Voy. AFFRONT. _ On lit aussi, dans le Journ. de Mons. "D' Olmelle croit y lire l' évidence de son outrage. L' Auteur veut dire, de l' outrage qu' il a reçu: c' est la même faûte. _ Il y en a une toute pareille sur le mot offense dans une phrâse du P. Perrin. Voy. ce mot.
   II. Outrageant, outrageux. Suivant La Touche, ces deux mots sont également bons, mais le premier ne se dit que des chôses: le second se dit des chôses et des persones. "Un procédé outrageant; des paroles outrageûses. "Il est outrageux en paroles. _ "M. l' Avocat Général a requis la radiation de l' Avocat outrageux. Ling.
   III. Outrager n' a pas proprement de régime relatif. On dit, à la vérité, outrager quelqu' un de paroles, mais ce n' est pas une conséquence pour d' aûtres noms. On ne dirait pas, par exemple, il l' a outragé des termes les plus injurieux: je suis piqué au vif, des termes, dont vous m' avez outragé. Tout cela n' est pas suportable en prôse; mais dans des vers harmonieux, tout cela pâsse sans qu' on y fasse atention.
   Croyez qu' il faut aimer autant que je vous aime,
   Pour avoir pu souffrir tous les noms odieux
   Dont votre amour le vient d' outrager à mes yeux.
       Iphigénie.

OUTRAGEUX


OUTRAGEUX, EûSE, adj. OUTRAGEûSEMENT, adv. [Ou-tra-geû, geû-ze, geû--zeman: 3e long. 4e e muet.] Outrageux, qui fait outrage. Voy. OUTRAGEANT, au mot OUTRAGE, Rem. II. = Outrageûsement, avec outrage, d' une manière outrageûse. "Traiter quelqu' un outrageûsement. = Avec excès, à outrance. "Batre outrageûsement.

OUTRANCE


OUTRANCE (à), adv. [Ou-tran-ce: 2e lon. 3e e muet.] Jusqu' à l' excês. "Ils convinrent entre eux de lui déclarer la guerre et de le poursuivre à outrance. Velly, Hist. de France. "Brave à outrance. "Plaider, chicaner, disputer, poursuivre, persécuter à outrance. "Il est Newtonien à outrance. = Il s' emploie quelquefois avec le mot toute: "Soutenir une opinion à toute outrance. = Combat à outrance se disait d' un duel qui ne devait se terminer que par la mort d' un des combatans. "Les deux concurrens, ainsi armés, (du ceste) se livroient à toute outrance, un combat qui ne devoit pas durer long-tems. Linguet.

OUTRE


OUTRE: l' ou est long dans poûtre et coûtre; bref par-tout ailleurs.

OUTRE


OUTRE, s. f. [Ou-tre: 2e e muet.] Peau de bouc, acomodée de manière qu' on y puisse mettre des chôses liquides. "Une outre de vin.

OUTRE


OUTRE, prép. Au delà. Il n' est préposition de lieu que dans certaines locutions. Outre-mer, outre-meuse: "Les guerres, les voyages d' outremer. "Les pays d' outre meuse. Hors de là, on doit dire, au-delà de:
   * Soit que le Rhône, outre ses bords,
   Lui vit faire éclater sa gloire.
       Malherbe.
On dirait aujourd'hui, au delà de ses bords. = Outre, adv. se dit du lieu. "Pâsser outre; il n' alla pas plus outre. = Il se dit sur-tout au figuré. "On pâssa outre au jugement. = D' outre en outre se dit avec percer. "Il le perça d' outre en outre.
   OUTRE, par dessus. "Outre cela: outre la somme promise: outre ce que je viens de dire. = On a dit anciènement, outre plus et outre ce, pour outre cela. Pour celui-ci. V. D' AILLEURS, au mot AILLEURS. = Outre et par dessus n' est en usage que chez les Praticiens, les Financiers et les Négocians.
   EN OUTRE, de plus, outre cela. Il vieillit, dit l' Acad. Quelques Auteurs l' emploient encôre. "Son orgueil est, en outre, piqué de, etc. Merc. _ Un Auteur anonyme d' une Histoire, d' ailleurs assez bien écrite, dit souvent, en outre; ce qui dépâre un peu le ton du reste de l' ouvrage. _ * Un aûtre écrivain moderne dit, le non plus outre, pour le non plus ultra. Cette locution, ainsi francisée, est un barbarisme.

OUTRECUIDANCE


*OUTRECUIDANCE, s. fém. OUTRECUIDÉ, ÉE, adj. Vieux mots. Présomption, témérité. Présomptueux~, téméraire. "Si le mot d' outrecuidance n' étoit pas suranné, il exprimerait avec énergie l' audace de ce Protée littéraire. Anon.

OUTRÉMENT


OUTRÉMENT, adv. [Ou-tréman: 2e é fer.] D' une manière outrée. "Batre, se fatiguer outrément. Cet adverbe n' est pas fort usité.

OUTREMER


OUTREMER, s. m. [Ou-tremer: 2e e muet.] Couleur bleûe, faite avec le lapis pulvérisé.

OUTRE-MESûRE


OUTRE-MESûRE, adv. [Ou-tre-mezûre: 2e, 3e et dern. e muet.] Déraisonablement; avec excês.

OUTRE-PâSSER


OUTRE-PâSSER, v. act. [Ou-trepâcé: 2e e muet: 3e lon. sur-tout devant l' e muet: il outrepâsse, outrepâssera, etc.] Aller au-delà de. "Outrepâsser les ordres qu' on a reçus.

OUTRER


OUTRER, v. act. [Ou-tré: 2e é fer.] 1°. En parlant des animaux sur-tout, acabler, surcharger de travail. "Outrer des ouvriers, un cheval: "Il s' est outré à travailler, à courir la poste. = 2°. En parlant des persones; pousser la patience à bout par des reproches, des réprimandes, des insultes. "Vous l' avez outré. = 3°. En parlant des chôses, les porter au delà de la juste raison. _ C' est l' usage le plus comun de ce verbe. "Les Stoïciens ont outré la morale. "C' est un homme qui outre tout. = Il se dit sur-tout au participe, adjectivement: pensée outrée, sentimens outrés, morale outrée: "Le caractère de ce personage est outré = Avec la prép. de, il se dit des persones, dans le sens de pénétré, transporté: "Outré de douleur, de dépit, de colère, etc. "Outré de l' afront~ qu' il avait reçu. "Outré d' avoir manqué tant de fois son coup. = Sans régime, il se dit des persones, dans le sens d' excessif. "Cet homme est outré; il est outré en tout; en toutes chôses, il pâsse les limites de la raison.
   Rem. L' Ab. Des Fontaines condamne le réciproque s' outrer, comme un néologisme. Ce mot est plutôt vieux que nouveau. "Ménagez votre poitrine, écrit Mde de Sév. à sa Fille: ne vous outrez pas sur l' écritûre.
   Combien fait-il de voeux, combien perd-il de pas?
   S' outrant pour aquérir des biens ou de la gloire.
       La Font.

OUVERTEMENT


OUVERTEMENT, adv. [Ou-verteman: 2e ê ouvert, 3e e muet.] Franchement, sans déguisément. "Parler, agir, se déclarer ouvertement.

OUVERTûRE


OUVERTûRE, s. f. [Ou-vêrtûre: 2e ê ouv. 3e lon. 4e e muet.] Au propre, c' est 1°. Fente, trou. espace vide dans le corps continu. "Grande, large ou petite ouvertûre. = Cette porte, cette fênêtre a trop ou trop peu d' ouvertûre: la baie en est trop grande, ou trop petite. = 2°. Action par laquelle on oûvre. "L' ouvertûre d' un cofre, d' un pâté, d' un corps, d' une fôsse. "L' ouvertûre de la veine. "L' ouvertûre d' un testament. _ À~ l' ouvertûre du livre: en ouvrant le livre au hasard. = 3°. Figurément, comencement. "L' ouvertûre d' un Concile, des États, du Parlement, etc. En parlant des Opéra, la symphonie par où commence le spectacle. = 4°. Proposition qu' on fait, expédient qu' on suggère. Faire une ouvertûre. "Voilà une bone ouvertûre. "Je ne vois aucune ouvertûre pour parvenir à mon but. = 5°. Ocasion, conjonctûre favorable. "Je parlerai pour vous, si je troûve quelque ouvertûre à le faire prudemment. = 5°. Ouvertûre de coeur: franchise, sincérité. = Ouvertûre d' esprit, facilité de comprendre, d' imaginer. = Ouvertûre pour les Sciences; disposition et facilité pour les aprendre.
   Rem. Dans le sens figuré d' expédiens, moyens, le verbe doner vaut mieux que le verbe faire. "Combien de projets a-t-il faits ou réformés? Combien d' ouvertûres a-t-il donées. Fléchier. _ Dans le sens d' avis, proposition, on dit faire, et non pas doner. "Il fit une ouvertûre qui charma autant qu' elle surprit. = Doner ouvertûre (commencement, ocasion), à, est un terme de Palais: "Sa succession va doner ouvertûre à des problèmes délicats, etc. Ling. = On peut le dire aussi hors du Palais: mais il n' est pas du style élevé.

OUVRABLE


OUVRABLE, adj. [Ou-vrable: 2e dout. 3e e muet.] Il ne se dit que des jours où l' Église permet de travailler. "Jour ouvrable. "En suprimant quelques fêtes, on a multiplié les jours ouvrables. "On ne connoît pas à Londres cette distinction de jours ouvrables, déshonorés par des haillons, et de jours de fête, où il faut s' épuiser par une magnificence onéreuse. Linguet. = Le {C049a~} peuple aime mieux dire jours ouvriers, que jours ouvrables.

OUVRAGE


OUVRAGE, s. masc. OUVRER, v. act. OUVRIER, ÈRE, s. m. et f. [Ou-vrage, vré, vrié, vriè-re: 2e é fermé au 2d et au 3e, è moy. et long au dern.] Ouvrage est 1°. ce qui est produit par l' ouvrier, par celui qui travaille de la main. "Ouvrage de menuiserie, de marqueterie, etc. "Grand, beau, merveilleux ouvrage. "Travailler à un ouvrage. "Faire, entreprendre, avancer, finir, achever un ouvrage. = Le ciel est l' ouvrage de Dieu, l' ouvrage de ses mains, de sa toute-puissance, etc. = 2°. La façon, le travail qu' on emploie à faire un ouvrage. "Il y a de l' ouvrage pour trois mois au moins, etc. = 3°. Il se dit des productions de l' esprit. "Bel ouvrage: ouvrage, utile, intéressant, etc. Et dans les chôses morales: "Tâchons donc de nous former. Loin d' avoir la vanité de croire que rien ne nous manque, ne rougissons pas de reconnoître nos besoins. L' ouvrage en sera plus parfait, si l' art vient au secours de la belle nature. MARIN, l' Homme Aimable. = 4°. En termes de fortification, il se dit des travaux avancés au dehors d' une place. "Ouvrages extérieurs: ouvrage à corne, à courone, etc.
   OUVRER est vieux, et il ne se dit plus que dans cette locution: ouvrer la monaie, fabriquer des espèces. = Au participe passé, il a un emploi plus étendu. _ Linge ouvré, linge de table façoné: napes, serviètes ouvrées. = Fer, cuivre ouvré, façoné, travaillé; pour le distinguer du fer en bârres, du cuivre en lames.
   OUVRIER, celui qui travaille de la main et fait quelque ouvrage (n°. 1°.) Habile ouvrier; excellente ouvrière. "Cette chôse est du bon ouvrier, de la bone ouvrière. Adj. "Jour ouvrier. Voy. OUVRABLE. Cheville ouvrière. Voy. CHEVILLE.
   Rem. 1°. Ouvrier est de trois syllabes en vers.
   Soyez plutôt maçon, si c' est votre talent,
   Ouvrier estimé dans un art nécessaire,
   Qu' Ecrivain du commun, et Poète vulgaire.
       Boileau.
  O parfait Ouvrier! l' homme est-il ton ouvrage?
  Ã€~ l' oeuvre enfin, l' ouvrier se déclare.
       Rousseau.
La Fontaine, citant ce Proverbe, dit artisan, ce qui n' est pas si bien. {C049b~}
   À~ l' oeuvre, on connoit l' artisan.
On dit, à l' oeuvre on conait l' ouvrier. = On dit, dans le même sens, figuré famil. la marque de l' ouvrier, ce qui fait voir d' où l' on sort, de qui l' on tient: "ces soeurs là ont d' étranges têtes: quoique la Guittaut soit pleine de mille bonnes choses, il y a toujours la marque de l' ouvrier. Sév. = On dit aussi, d' un ouvrage qu' on veut louer, qu' il est fait de main de maître. * LA BRUYèRE dit, dans le même sens, de main d' ouvrier. "L' ouvrage est bon, et fait de main d' ouvrier. _ Les expressions consacrées ne doivent point être changées. D' ailleurs, La Bruyère ne dit pas bien ce qu' il veut dire. Tout ouvrage est fait de main d' ouvrier; et quand on dit de main de maître, on entend distinguer les maîtres, comme suposés plus habiles, des simples ouvriers. = 2°. On ne dirait pas aujourd'hui ouvrier d' un Poète, comme Vaugelas l' a dit aûtrefois de Malherbe. "Cet excellent ouvrier. = 3°. Ouvrier, comme artisan, bâs dans le propre, est três-noble dans le figuré. De plus, ouvrier, comme artisan, se dit dans le propre, tout seul et sans régime; mais, dans le figuré, il s' unit élégamment à des noms qu' il régit au génitif. On ne dit point d' un Cordonier, qu' il est l' artisan d' un soulier, ni d' un menuisier, qu' il est l' ouvrier d' une porte; mais on dit d' un homme, pour le louer, qu' il est l' artisan de sa fortune, qu' il a été l' ouvrier d' une révolution si étonante, etc. Voy. ARTISAN.

OUVRANT


OUVRANT, ANTE, adj. OUVREUR, EûSE, s. m. et fém. OUVRIR, v. act. [Ou--vran, vrante, vreur, vreû-ze, vri: 2e lon. aux deux premiers et au 4e.] Les deux premiers ont un emploi fort borné: l' adjectif ne se dit que dans ces deux phrâses: à jour ouvrant, dès que le jour comence à paraitre; à porte ouvrante, Acad. ou, à portes ouvrantes. Trév. Au tems où l' on ouvre les portes d' une ville. = Le substantif ne se dit que des persones comises pour ouvrir les loges à la Comédie et à l' Opéra. "L' Ouvreur, l' Ouvreûse des loges.
   OUVRIR: j' oûvre, nous ouvrons, etc. j' ouvrois ou j' ouvrais; j' ouvris; j' ai ouvert; j' ouvrirai; j' ouvrirois, ou j' ouvrirais; ouvre, ouvrez; que j' oûvre; j' ouvrisse; ouvrant, ouvert. = 1°. Dans son sens le plus naturel et le plus ordinaire, faire que ce qui était fermé ne le soit plus: "Ouvrir une porte, une fenêtre, une armoire, une chambre, un jardin, etc. = Neutre, sans régime: ouvrir la porte. "Ouvrez! On a ouvert. "On ne veut pas ouvrir. = 2°. Faire une incision, percer. "Ouvrir un abcês, un corps mort. Ouvrir la veine. = 3°. Comencer à creuser. Ouvrir la terre, la tranchée, une mine, une carrière. = 4°. Figurément, comencer. "Ouvrir la campagne, les États, le Parlement, le Jubilé, la dispute, la scène, la lice, etc. = Ouvrir un avis, être le premier à le proposer dans une délibération. = 5°. V. n. ou réc. "Cette porte n' ouvre, ou ne s' ouvre pas aisément. = Figurément, Comencer. "Ce recueuil ouvre par des traits du célèbre Géomètre Euler. L' Ab. de Fontenai. "La scène ouvre par un monologue. Ann. Lit. = S' ouvrir, au fig. et en parlant des persones, régit à et de: (le datif et l' ablatif). "Je ne m' en ouvre qu' à vous: appliqué~ aux chôses, il régit l' acusatif seul. "La basse flaterie, dit Rousseau aux Rois,
   Par cent detours obscurs, s' ouvre avec industrie
   La porte de vos coeurs.
Avec les premiers régimes se est à l' acusatif, s' ouvrir soi-même: avec l' aûtre, se est au datif; s' ouvrir à soi-même. _ Ou enfin le datif seul (se étant à l' acusatif). "Son coeur s' ouvre aux douces consolations. "Il s' est ouvert à moi.
   Rem. OUVRIR s' unit à plusieurs noms et en divers sens. Un remède ouvre le ventre, le lâche. _ Un aliment ouvre l' apetit, done de l' apetit. _ Ouvrir les brâs, les jambes, les écarter. _ Ouvrir les yeux, au propre: il comence à ouvrir les yeux: au figuré, se détromper. "Il a enfin ouvert les yeux. _ Ouvrir les yeux à quelqu' un, le détromper de son erreur. = Ouvrir les oreilles, ou de grandes oreilles, écouter avec grande atention. = Ouvrir sa bourse à un ami, lui ofrir de l' argent; lui ouvrir son coeur, lui confier ses plus secrets sentimens. = Ouvrir l' esprit, rendre capable de mieux comprendre.
   OUVERT, ERTE, participe et adj. "Livre ouvert, porte ouverte. "Recevoir quelqu' un à brâs ouverts. Parler à coeur ouvert. "Avoir l' âme ouverte à la joie. Avoir l' apétit ouvert de grand matin. = À~ livre ouvert. Voy. LIVRE. _ Tenir table ouverte, avoir une table à recevoir ceux qui se présentent, même sans être priés. _ Sa porte est ouverte à tous les étrangers. "Sa maison, sa porte est ouverte à tous les honêtes gens: ils y sont reçus. _ Le pari est ouvert; chacun est reçu à parier. _ Ville ouverte, toute ouverte, qui n' est pas fortifiée. = Visage ouvert, phisionomie ouverte, air franc et sincère. = Succession qui est ouverte, qu' on est en état de recueuillir = Compte ouvert, qui n' est point arrêté, et auquel on ajoute journellement de nouveaux articles. = Guerre ouverte, déclarée. = À~ force ouverte; les armes à la main. = Tranchée ouverte. "La place ne capitula qu' après trois mois de tranchée ouverte.

OUVROIR


OUVROIR, s. m. [Ou-vroar.] Lieu où quelques ouvriers travaillent. = Dans certains Couvens, lieu où les Religieûses travaillent à diférens ouvrages.

OXYCRAT


OXYCRAT, OXYMEL, s. m. [Okcikra, okcimèl, 3e è moyen au 2d.] Le 1er, se dit d' un mélange d' eau et de vinaigre; le 2d, d' un mélange de vinaigre et de miel.

OYE


OYE, voy OIE.

OYER


OYER: terminaison de l' infinitif de certains verbes; comme employer, envoyer, etc. On dit, au présent de l' indicatif, nous employons, vous employez, etc. Et à l' imparfait de l' indicatif, comme au présent du subjonctif, nous employions, vous employiez. Peu d' Auteurs et d' Imprimeurs font cette distinction, qui est raisonable. L' Acad. elle-même ne la suit pas.

OZEILLE


OZEILLE. Voy. OSEILLE. En certaines Provinces, on dit vinette, en d' aûtres, aigrette; mais, oseille est le seul mot du bel usage.

OZERAIE


OZERAIE, OZIER. Voy. OSERAIE, OSIER.