Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI


N



N


N, s. f. [Ène, 1re è moy. 2e e muet, suivant l' anciène apellation; ou s. m. Prononc. ne, e muet, suivant la nouvelle: une ène, un ne.] La quatorzième lettre de l' Alphabet et la onzième des consones. Les Gramairiens l' apèlent nazale. Elle a deux sons diférens, qu' il est três-important de remarquer. _ Au comencement de la syllabe, elle est consone: à la fin, elle forme une voyèle nazale avec la voyèle qui la précède. Dans na, ne, ni, no, nu, l' n est consone; mais dans an, en, in on, un, c' est une voyèle, un son simple, quoiqu' il soit exprimé par deux caractêres. = Les Allemands doivent prononcer l' n consone, comme celles de nen nen; les Anglais, comme la première de name; les Italiens, comme no; les Espagnols, comme nonas = Pour les voyèles nazales, an, en, in, on, un, les Anglais et les Espagnols ne les conaissent pas; les Allemands ont la 1re dans begangen; et les aûtres dans les syllabes eng, ing, ong, ung; les Italiens ne conaissent que les quatre premières, andare, tentare, ingrato, rispondere, etc.
   Rem. 1°. Quand l' n comence le mot, il n' y a point de dificulté, et il est bien clair qu' elle est consone; mais quand elle est au milieu du mot, ou qu' étant à la fin, elle est devant un aûtre mot, qui comence par une voyèle, il est important de savoir quand l' n est consone, quand elle est voyèle = 2° Au milieu du mot elle est consone, quand elle est suivie d' une voyèle ou d' une h muette: elle est voyèle, quand elle est suivie d' une consone ou d' une h aspirée. Ainsi, anathème, enigme, honorer, unir, doivent se prononcer, a--natème, é-nigme, ho-noré, u-ni; et l' n doit se lier avec la voyèle suivante, et non pas avec la précédente. Au contraire, ancêtres, entendre, indigne, honteux, se prononcent, an-cêtre, an-tandre, in-digne, hon-teû. * Dans le Languedoc plusieurs insèrent un e muet après l' n, et prononcent, ane-cêtre, ane-tandre, hone-teû, et rendent ainsi l' n consone, de voyèle nazale qu' elle est dans ces mots et dans les aûtres semblables. = L' n est aussi consone, quand elle est redoublée, annoncer, ennoblir, honneur, innocent, etc. C' est qu' alors on n' en prononce qu' une: a--noncé, a-nobli, ho-neur, i-no-san; exceptez annexe, annal, annuel, annotation, annuler, inné, innover et leurs dérivés, où l' on doit prononcer les deux n: la 1re comme une voyèle nazale; la 2d, comme une consone: an-nèkce, an-nal, an-nuèl, an-nota-cion, an-nulé, in-né, in-nové. = D' après ces principes, c' est un fort mauvais usage d' écrire ennemi avec 2 n, et enivrer, enorgueillir, avec une seule n: il est raisonable d' écrire énemi, comme énigme; et ennivrer, ennorgueillir, comme on écrit ennoblir, puisque la 1re syllabe a la même prononciation dans ces diférens mots.
   3°. À~ la fin du mot, l' n est ordinairement voyèle, même quand le mot suivant commence par une voyèle ou une h muette. C' est une prononciation normale, de la lier avec la voyèle suivante, et de prononcer ambition insuportable, comme ambition-ninsuportable. = 4°. À~ la fin des pronoms mon, ton, son, un, et des adjectifs finissant par une n et suivis de leurs substantifs, començans par une voyèle, elle est consone. "Mon âme, ton épée, son honeur; un arbre: bon homme; un certain aventurier, etc. se prononcent, mo-nâ--me; to-né-pée, so-no-neur; u-nar-bre, bo-nome; un cer-té-na-vanturié, etc. = 5°. Dans les particules on et en, l' n est consone: "On assûre; il en a pris dix: pron. o-na-sûre; ila-na-pris dix, etc. Cependant dans les interrogations plusieurs estiment que ce serait une faûte de lier ainsi l' n d' on avec la voyèle suivante. "A t' on appris? Pron. a-' t' on apri; et non pas, a-to-na-pri. = 6°. Bien, quand il n' est pas dans la composition, a l' n voyèle: il est bien; mais dans les composés, elle est consone. "Bienheureux: pron. bié-neu-reû, et non pas bien-neû-reû, comme on prononce en Normandie. = Peut-être, dit l' Abé Regnier, devroit-on toujours faire soner de même devant une voyèle l' n de bien, quand il ne finit pas le sens. Cependant, en plusieurs phrâses comme celles-ci; "Savoir bien écrire; être bien avancé; avoir bien envie, bien à soufrir, etc. L' usage de la prononciation familière ne done souvent qu' un son obtus à l' n finale (c. à. d. la fait prononcer comme voyèle nazale), bien écrire, en détachant bien d' écrire, et non pas bié-nécrire. = 7°. Rien se prononce indiféremment dans la conversation d' une ou d' aûtre manière. Je n' ai rien apris: pron. je n' ai rien apri: ou rié-napri; mais dans le discours soutenu, l' n est consone, et la 2de manière de prononcer est la seule bone. = 8°. Dans ces trois mots, hymen, examen, amen, l' n est consone, même quand ces mots terminent la phrâse; et elle se détache de l' e, qui précède: on prononce comme s' il y avait à la fin un e muet: himè-ne, exa--mè-ne, amè-ne: mais cet e muet ne doit presque pas se faire sentir.
   9°. Il faut conclure de tout ceci, que la rencontre de ces voyèles nazales; an, en, in, on, un, avec d' aûtres voyèles, fait des bâillemens, des hiatus, que doivent éviter les Poétes, sur-tout ceux qui travaillent pour les Musiciens. = C' est M. l' Abé Dangeau qui a fait le premier cette remarque; et il l' acompagne de si bones raisons, qu' on ne peut s' y refuser. L' Abé Regnier est du même sentiment, l' Acad. entière s' est expliquée plus d' une fois de manière à l' adopter. Cependant M. l' Abé d' Olivet fait une réflexion qui pourrait bien ramener les esprits, diminuer le nombre des entrâves poétiques, et guérir cette délicatesse, peut-être excessive, qui nous fait voir des hiatus, où Malherbe, où Racine, où Despreaux et Quinaut n' en ont point vu. "Je reconnois, dit cet illustre Académicien, les voyèles nazales pour des sons vraiment simples et indivisibles: mais de là s' ensuit-il que ce soient de pures et de franches voyèles? Pas plus, ce me semble, que si l' on atribuoit cette dénomination aux voyèles aspirées. Toute la diférence que j' y vois, c' est que dans les aspirées, la consone H les précède, au lieu que dans les nazales, la consone N les suit. = Or, si l' aspiration empêche l' hiatus, pourquoi la nazalité, si l' on peut parler ainsi, ne l' empêcheroit-elle pas? Quand je récite à haute voix:
   Souvent de tous nos maux la raison est le pire.
Ou
   Jeune et vaillant Héros.....
je ne trouve pas plus de rudesse entre zon-é, qu' entre an-hé; d' où je conclus que l' aspiration et la nazalité opèrent le même effet. Et je me persuade que les voyèles aspirées et les nazales, étant les unes comme les aûtres, non des voyèles pures et franches, mais des voyelles modifiées, elles peuvent, les unes comme les aûtres, empêcher l' hiatus. = Tel est le raisonement de M. l' Ab. d' Olivet, auquel je ne vois pas qu' on puisse trouver de bone réponse. Car si l' on dit que les bâillemens devant les aspirées sont autorisés par un usage constant, on peut dire aussi que la pratique des plus grands Poètes a autorisé le bâillement ocasioné par la rencontre des voyelles nazales avec les voyèles simples; et que, malgré l' autorité des Gramairiens et de l' Académie, le monde poli, et les Litérateurs eux mêmes n' y trouvent un hiatus que par réflexion. Dans le conflit de ces observations oposées, il est à croire que les Poètes choisiront celle qui les gênera le moins, et que le Public ne leur en fera pas un crime.
   10°. L' n aprês le g fait mouiller ce g dans les mots purement français. Voyez G. = 11°. On ne redouble point l' n entre deux o: ainsi on écrit par une seule n, honorable, sonore, quoiqu' on écrive par deux nn, honneur, sonner. = C' est une pratique assez constante, de la redoubler dans les dérivés, lorsque le primitif finit par cette consone, précédée des voyèles a, e, o: ban, bannir; an, année; mien, mienne; ocasion; ocasionner; lion, lionne, etc. Il n' en est pas ainsi quand cette consone finale est précédée d' i ou d' u, ou de quelque diphtongue: car alors on ne la redouble pas dans les dérivés: badin, badiner; brun, bru-ne; sain, saine; plein, plei-ne; soin, soigner, etc. Quand on aura retranché ces réduplications inutiles, ces règles ne serviront plus de rien. On écrira indiféremment anoncer, honeur, soner, ocasioner, miène, lione, banir,; comme badine, brunette, etc. = 12°. L' n finale ne se prononce point dans les tems des verbes terminés en ent: ils aiment, ils aimèrent: pron. ème, èmère. = Plusieurs ne la prononcent pas dans non, ce qui doit s' entendre de la conversation: non, monsieur; pron. no monsieu. Mais dans le discours soutenu, ou quand non termine la phrâse, ou quand il est redoublé, on doit prononcer l' n final. "Je dis que non. "Non, non, vous ne me tromperez pas. = 13°. Devant le b, l' m ou le p, l' n se change en m, et il n' est point de mot où elle soit suivie d' une de ces trois lettres. Ainsi la prép. in se change en im, dans les mots où elle est suivie de ces consones; imbiber, immoler, impossible.

NABOT


NABOT, OTE, subst. Terme de mépris. Qui est de petite tâille. "C' est un nabot, une petite nabote. Style familier.

NACARAT


NACARAT, ATE, adj. Qui est d' un rouge clair, tirant sur l' orange. "Satin nacarat: panne nacarate. = S. m. Le nacarat.

NACELLE


NACELLE, s. f. [Nacèle: 2eè moy. 3e e muet.] Petit bateau. Il est vieux en prôse: il est encore bon en vers.
   Fais donc si bien la guerre à l' oeuil;
   Et conduis si bien ta nacelle,
   Que tu ne m' âilles pas faire prendre le deuil.
       L' Ab. Reyre.
L' Acad. le met sans remarque. "Nacelle de pêcheur. "Il pâssa l' eau dans une nacelle. = Elle ajoute qu' on dit figurément la nacelle de Saint Pierre, pour l' Église Romaine. Il me parait encore plus surané au figuré qu' au propre.

NACRE


NACRE, s. f. Coquille argentée, qui renferme les perles. "Un couteau de nacre.

NAFFE


NAFFE ou NAFE, s. f. Eau de nafe; certaine eau de senteur à laquelle on a doné ce nom. C' est tout l' emploi de ce mot.

NAGE


NAGE, s. f. NAGEOIRE, s. f. NAGER, v. n. NAGEUR, GEûSE, s. m. et f. [Naje, joâ-re, jé, jeur, jeû-ze: 2e e muet au 1er, é fer. au 3e, lon. au 2d et au dern.] Nage, ne se dit qu' adverbialement, à la nage, en nageant. "Pâsser la rivière à la nage; se jeter à la nage, se sauver à la nage. = Le P. Bouhours remarque que l' on dit aussi à nage, mais qu' à la nage est plus usité; et La Touche observe que l' Acad. les dit tous deux également. Ils ont tous deux français sans doute, mais ils ont aujourd' hui des sens diférens. "Il traverse la rivière à la nage, c. à. d. en nageant. "Je suis tout à nage, ou plutôt en nage, c. à. d. tout trempé de sueur. L' Acad. ne dit plus à nage dans le 1er sens, et elle dit en nage, pour le 2d. = * Fontenelle a encôre dit à nage, pour à la nage. "Il pâssa une rivière à nage sous le feu des énemis pendant l' assaut. Él. de M. de Vauban. Corneille avait dit auparavant, en parlant du fameux passage du Rhin.
   François, ce n' est qu' un fleuve, il faut pâsser à nage.
La Fontaine dit Nagée; espace d' eau qu' on parcourt en nageant.
   Car, au bout de quelques nagées
   Tout son sel se fondit si bien,
   Que le baudet ne sentit rien
   Sur ses épaules soulagées.
L' Acad. ne met pas ce mot. Le Rich. Port. cite Trévoux.
   NAGEOIRE, partie du poisson, faite en forme d' aileron, qui lui sert à nager. "Les nageoires d' un poisson. * Un Auteur moderne a dit nageoir et le fait masc. * Pomey apèle nageoir le lieu où l' on nage. Ce mot a l' air d' être de sa fabrique. Le Rich. Port. le cite comme étant dans Trév. preûve qu' il ne le garantit pas. = On apèle aussi nageoires ce qu' on se met sous les brâs pour se soutenir sur l' eau, quand on veut s' aprendre à nager.
   NAGER, 1°. Se soutenir sur l' eau par un certain mouvement du corps. "Il nage bien, il nage comme un poisson. = Par extension, il se dit des corps qui n' enfoncent point dans l' eau, qui y flotent. "Bois, qui nage sur l' eau. = Fig. nager dans la joie, dans les plaisirs. = La Bruyère l' emploie singulièrement dans ce style figuré. "L' on voit peu d' esprits entièrement lourds et stupides: l' on en voit encôre moins de sublimes et transcendans. Le commun nage dans ces deux extrémités. = Nager en grande eau, être dans une grande fortune; ou du moins, en pâsse de la faire. = Nager entre deux eaux, se ménager entre deux partis. = On dit, par exagération, dans un sens, qui tient du propre, nager dans son sang. = 2°. Nager, se dit par les Bateliers pour ramer.
   NAGEUR, qui nage, qui sait nager. "Bon, grand nageur. On pourrait dire, d' une femme qui sait nager, bonne nageûse. = Batelier, qui rame. "Nous avions quatre nageurs. = Sur mer on dit plutôt rameurs.

NAGUèRE


NAGUèRE, ou NAGUèRES, adv. [Na--ghère; 2e è moy. et long; 3e e muet; l' u n' est là que pour doner au g un son fort qu' il n' a pas devant l' e.] Il n' y a pas long tems. "Cet homme, qui étoit naguères les délices de la cour. Acad. = On dit naguère ou naguères suivant qu' on écrit guère ou guères. = Il y a déjà du tems que l' Acad. a remarqué qu' il vieillit, et qu' il n' a d' usage que dans la Poésie et dans le style soutenu. M. Marmontel l' emploie dans un conte. "Elle ne laissoit pas que d' avoir de la douleur dans l' âme, en voyant... qu' on la chercherait vainement des yeux dans ces fêtes où naguère elle s' était vûe adorée. = Ce mot est bon à conserver et on fera bien de ne pas le laisser perdre. = * De naguères, ne se dit plus dans aucun style.

NAïADE


NAïADE, s. f. [On a écrit nayade, et quelques-uns l' écrivent encôre de même; mais, avec cette ortographe, il faudrait prononcer né-ia-de, contre l' usage. Voy. A au comencement.] Nymphe des Eaux. "Les Naïades: une Naïade.

NAïF


NAïF, NAïVE, adj. [Il faut employer l' ï trema, pour ne pas prononcer nèf, nève, mais na-if, na-ïve: 2e lon. au 2d; 3e e muet.] 1°. Naturel, sans fard, sans artifice. "Beauté naïve, grâces naïves. _ En ce sens, il ne se dit qu' en poésie. = 2°. Qui représente bien la vérité; qui imite bien la natûre. "Description, relation, peintûre naïve. = 3°. Qui n' est pas afecté, étudié. "Air, esprit naïf; humeur, manières naïves. = 4°. En parlant des persones, ingénu, naturel; c' est l' homme du monde le plus naïf. Il signifie quelquefois, simple et trop ingénu; et alors ce n' est plus un éloge. = Cet adjectif peut suivre ou précèder le substantif. "Trait naïf, réponse naïve.
   De mille traits badins le naïf assemblage.       Anon.
Par sa naïve ardeur elle auroit su me plaire.
Voy. NATUREL.

NAIN


NAIN, NAINE, subst. et adj. [Nein, nène, et non pas na-ine.] Qui est d' une tâille beaucoup au dessous de la médiocre. "Un nain, un vilain nain: une naine, une jolie naine. = Adj. Arbres nains, qu' on élève en buisson. _ OEuf nain, oeuf de poule, qui ne contient point de jaûne, et qui est par conséquent stérile.

NAISSANCE


NAISSANCE, s. f. NAISSANT, ANTE, adj. NAîTRE, v. n. [Nè-sance, san, sante; nêtre: 1re è moy. aux 3 premiers, é ouv. et long au dern.] Naître; je nais, tu nais, il nait, nous naissons, etc. je naissois ou naissais; je naquis; je suis né; je naîtrai, etc. Né, naissant. = 1°. Venir au monde, sortir du sein de la mère. "Enfant, agneau, poulain qui vient de naitre. "Ce Prince naquit un tel jour. "J. C. est né d' une Vierge. "Il lui est né un fils. = 2°. En parlant des végétaux, comencer à pousser. "Les fleurs naissent au printems; l' herbe comence à naître. = Poétiquement; le jour comence à naître, à paraître. = Fig. on a vu naître la fortune de cet homme. "Je l' ai vu naître; j' ai vu le commencement de sa fortune. Il ne fait encôre que de naître; sa fortune ne fait encôre que de comencer. = 3°. Figurément aussi, prendre origine de... "Ce ruisseau nait à deux lieûes d' ici. "Les afaires naissent les unes des aûtres.
   L' ennui naquit un jour de l' uniformité.
       La Motte.
= "Cela m' en a fait naître la pensée. "Cela peut faire naître de grands soupçons, de grands scrupules. = 4°. Être né pour... Avoir un grand talent, une grande disposition naturelle pour... "Il est né pour la guerre, pour les armes. "Il est né pour régner. "Il étoit fils d' Achille et n' étoit pas né pour tromper... Il n' étoit point né pour la fraude. Télém. Il régit des substantifs sans article, et des adjectifs. "Il est né Poète, peintre, musicien, etc. Il est né courageux, timide, etc.
   REM. Naître, régit souvent, sur-tout au figuré, l' ablatif (la prép. de.) "L' afabilité est un sentiment, qui nait de la tendresse et de la bonté du coeur. Masill. "Les troubles, les dessensions, les atentats, l' impunité naissent bientôt de l' indépendance. Id. = Il est à naître que; c. à. d. il n' est point encore arrivé que, etc. expression, qui est tout au plus du style familier; je doute même qu' elle soit bien française. L' Acad. ne la met pas: le Dict. de Trév. la met sans citer d' Auteur. Le Rich. Port. la borne au discours familier. _ Elle est déplacée dans le haut style. "Il est encôre à naître que la Loi de Dieu ait fait un seul malheureux. L' Ab. de Cambacérès.
   NAISSANCE, 1°. Au propre, sortie de l' enfant du sein de sa mère. "La naissance d' un Prince. "À~ sa naissance; au jour de sa naissance. "L' an de la naissance de Notre-Seigneur 1787. = 2°. Extraction. "Être de grande, d' illustre naissance. = Mis absolument, noblesse. "Homme de naissance, qui a de la naissance; ou, sans naissance, qui n' a point de naissance. = 3°. En parlant des végétaux, le tems où ils comencent à pousser. "La naissance des fleurs. = La naissance du jour; lorsqu' il comence d' éclôre. = 4°. Fig. Comencement. "La naissance du monde, d' une Ville, d' un État, etc. "Prévenir la naissance des passions. "Étoufer un désordre dès ou dans sa naissance. = 5°. * On l' a dit autrefois pour talent. "Outre la naissance heureûse pour la parole, l' assemblage des seules qualités naturelles, requises pour réussir, est extrêmement râre. P. Rapin. _ Andry de Bois regard l' aproûve. "Une si heureûse naissance le rendit d' abord la passion de tout ce qu' il y avoit de vertueux à la cour. Dans l' Ann. Litt. on critique cette expression dans M. de Reganhac. "Une heureûse naissance, ne signifie pas un heureux naturel. _ L' Acad. l' admet dans cette phrâse. "La plus heureûse naissance a besoin encôre d' une bonne éducation. Mais on peut croire que c' est une vieille phrâse conservée des anciènes éditions.
   Rem. On dit bien, homme de naissance; mais je ne crois pas qu' on puisse dire; être de naissance. "Ceux, qui y sont de naissance, y étudient la langue latine. Let. Édif. _ L' Acad. ne met pas cette expression. La Touche l' aproûve et en done un exemple. "Quand on est de naissance, on doit éviter toutes les bassesses avec soin. = Prendre et doner naissance se disent sans article. M. de L. H. ayant besoin d' une syllabe de plus pour faire un vers, dit, prendre la naissance:
   Quel chemin, de la fange, où je pris la naissance.
       Menzicoff.
Cette faûte a été justement relevée dans le Journ. de Mons. "Je pris naissance, aurait suffi, y dit on, si la mesûre l' avait permis. _ Le Gendre dit, doner la naissance. "La gloire d' avoir donné la naissance à la Philosophie. Retranchez la. = Pour la même raison de l' usage, naissance ne doit point s' associer aux pronoms possessifs, qui font fonction d' article. "L' Église y avoit pris sa naissance, dit Bossuet. Je crois qu' il faut dire: y avoit pris naissance. = * Rousseau par analogie dit, recevoir naissance.
   Quoi! dans les lieux où j' ai reçu naissance...
   Une étrangère, au mépris de mes droits,
   Viendra régner et m' imposer des lois.
Avec ce verbe, j' ai crois qu' il faut mettre l' article: j' ai recû la naissance. = Prendre naissance régit les prép. dans ou de, doner naissance la prép. à (le datif). "Cette hérésie prit naissance dans la Flandre. Anon. "C' est de là que les troubles prirent naissance. Acad. "Chaque secte porte jusque dans ses opinions, le caractère de l' humeur qui lui a doné naissance: et les dogmes de l' hérésie anoncent le génie de l' hérésiarque. Neuville.
   NAISSANT, ANTE, qui nait, qui comence à venir, à paraître. Il ne se dit qu' au figuré. "Jour naissant. "Fleur naissante. "Amour naissant: passion naissante. "État naissant, république, compagnie naissante. = Ordinairement, il se place après le substantif: en poésie, on peut le placer devant. "Le naissant ouvrage. Rouss. "Votre naissante gloire. Corn. Sur ce naissant herbage. De Lille. Sur ce naissant gazon. Gresset. "À~ ses naissantes pièces. Boileau. Dans ce dernier, l' inversion est dûre. = On dit (st. famil.) d' un homme qui cesse de porter la perruque, et qui n' a encôre que des cheveux très-courts, qu' il est en tête naissante. _ Remarquez qu' il n' est adjectif et déclinable que quand il est employé sans régime; mais qu' avec le régime, il est participe, et l' on ne doit point le décliner. "Des idées naissantes les unes des aûtres. Regnault. Dites, naissant, etc.

NAïVEMENT


NAïVEMENT, adv. NAïVETÉ, s. fém. [L' ï trema est nécessaire à ces deux mots, pour ne pas prononcer nèveman, nèveté; mais, na-iveman, na-iveté: 2e long. 3ee muet: on écrivait aûtrefois, naifvement, naifveté.] Naïveté est, 1°. Ingénuité, simplicité d' une persone qui n' use point de déguisement. "La naïveté d' un jeune enfant, d' une jeune paisane. Voyez SINCÉRITÉ = 2°. Cette grâce, cette simplicité naturelle avec laquelle une chôse est exprimée ou représentée avec vérité, ou vraisemblance; la naïveté du style, "Cela est dépeint avec une naïveté et une vérité admirables. = 3°. Simplicité niaise. "Voilà une grande naïveté. = En ce sens, il se dit quelquefois au pl. "Il dit de grandes naïvetés.
   NAïVEMENT, avec naïveté. "Parler, avouer naïvement. "Exprimer, représenter naïvement.

NANTIR


NANTIR, v. act. NANTISSEMENT, s. m. [Nanti, ticeman: 1re lon. 3ee muet au 2d.] ils expriment l' action de doner des gages pour l' assurance d' une dette. "Il ne prête point qu' on ne le nantisse, qu' il ne soit nanti. = Se nantir (st. famil.) se pourvoir. "Je me suis nanti d' un bon manteau contre la pluie;d' un bon déjeûner avant de partir. = "Il a un bon nantissement. "On lui a doné des bijous pour son nantissement, ou en nantissement.

NAPHTE


NAPHTE, s. f. [Nafte.] Espèce de bitume très-subtil et très-ardent.

NAPÉE


NAPÉE, s. f. Nymphe, qui présidait aux bois et aux montagnes.

NAPPE


NAPPE, ou NAPE, s. f. Au propre, linge dont on couvre la table pour prendre ses repâs. "Mettre la nape; lever, ôter la nape. = On dit, par extension, nape d' autel, de comunion. = En st. famil. mettre la nape, recevoir compagnie chez soi à diner, ou à souper. "La nape est toujours mise dans cette maison: on y trouve à boire et à manger à quelque heure qu' on viène. Il a trouvé la nape mise: il a fait un bon mariage, qui le rend maitre d' une maison riche et meublée. = Au figuré, on dit, nape d' eau; chute d' eau qui tombe en manière de nape.

NAQUETER


NAQUETER, v. neut. [Naketé: 2ee muet, 3e é fer.] Atendre servilement à la porte de quelqu' un. "Il a naqueté long--tems. = Il est bâs: l' Acad. le met sans remarque.

NARCISSE


NARCISSE, s. m. [Narcice.] 1°. Plante dont il y a plusieurs espèces, et beaucoup de variétés. "Narcisse blanc, jaûne, simple, double. = S. m. Homme amoureux de sa figûre. Allusion à la Fable de Narcisse, qui étant devenu amoureux de lui-même, en se regardant dans l' eau, fut changé en la fleur qui porte son nom.

NARCOTIQUE


NARCOTIQUE, adj. [Narkotike.] Qui assoupit. "Remède narcotique. = S. m. "Un narcotique. "L' éfet des narcotiques peut être dangereux. Au figuré, discours, poésie, style narcotique.

NARD


NARD, s. m. [On ne pron. point le d final.] 1°. Plante odoriférante. "La Lavande est une espèce de nard. = 2°. Le parfum que les Anciens tiraient~ du nard.

NARGUE


NARGUE, s. f. [Narghe: 2e e muet.] Il s' emploie sans article et en termes de râillerie et de mépris, pour marquer le~ peu de cas que l' on fait d' une persone ou d' une chôse. "Nargue de lui, nargue de l' amour.
   Nargue du Parnasse et des Muses.
   Dire nargue de. "Il dit nargue des cérémonies. = Faire nargue à; l' emporter de beaucoup sur; ou le croire de même. "Les vins de champagne font nargue à tous les aûtres vins.
   Et faire nargue au cigne de Mantoue.
       Rouss.
L' Acad. dit qu' il est familier. = Il est sur-tout bon pour le marotique, le burlesque et le bâs comique.

NARGUER


NARGUER, v. act. [Narghé: 2eé fer.] Faire nargue à; braver avec mépris. "Narguer ses énemis. St. famil.

NARINE


NARINE, s. f. L' une des deux ouvertûres du nez. "Narine droite ou gauche. "La colère lui enfle les narines, et non pas enfle ses narines. = Par extension et similitude, on le dit des taureaux et des chevaux.
   Rem. M. Clément, critiquant ce vers de Mr. De Lille, où, parlant du cheval, il dit:
   Superbe, l' oeil en feu, les narines fumantes.
trouve que c' est une expression ignoble; que les narines ne s' emploient que dans le style bâs ou burlesque, et que les naseaux sont du style noble. On parait aprouver cette critique dans le Journ. de Mons. M. Marin n' est pas de cet avis: narines lui parait plus noble que naseaux, qui n' est point poétique. Voy. NASEAU.

NARQUOIS


NARQUOIS, OISE, s. [Nar-koâ, koâ--ze, 2e lon.] Fin, rusé, qui se plait à tromper. "C' est un narquois; un fin narquois; une narquoise.
   Maint vieux chat, fin subtil et narquois.
Il parait bas et populaire. Suivant l' Acad. il est du discours familier. = Ces Narquois s' étoient fait un langage particulier, qu' on apeloit l' argot, ou le narquois. Villon nous a laissé six Ballades en ce langage. La Monn. _ Parler narquois. Acad.

NâRRATEUR


NâRRATEUR, s. m. NâRRATIF, IVE. adj. NâRRATION, s. fem. NâRRÉ, s. m. NâRRER, v. act. [Nâra-teur, tif, tîve, cion:nâré pour les deux dern. 1re lon. r forte: 3e lon. au 3e, 2e é fer. aux deux dern.] Nârrer, raconter. Nârrateur, celui qui nârre, qui raconte. Nârré, discours par lequel on nârre, on raconte. Nârration, nârré, récit. Nârratif, qui apartient à la nârration. "Nârrer bien un fait; et, neutralement, nârrer agréablement. "Cette histoire est bien nârrée. "Nârrateur ennuyeux. "Nârrer fastidieux. "Faire le nârré d' une chôse. "Nârration historique, poétique, oratoire. "Cicéron et Démosthène excellent dans la nârration. "Style, discours nârratif. Et avec la prép. de: procês verbal, nârratif du fait. "Mémoire nârratif de ce qui s' est pâssé, etc.
   Rem. 1°. Nârrer, raconter, conter (synon.) Le premier est le moins usité des trois; le 2d est le plus propre à tous les styles: le 3e est plus convenable pour les petites historiettes. = Selon Mr. l' Ab. Roubaud, (Syn. Fr.) nârrer est de la Rhétorique et d' aparat: on ne regarde proprement qu' à la manière; raconter est de l' instruction, et en tout genre de chôse: on regarde sur--tout à la vérité et à la fidélité; conter est de la conversation: on regarde au fond et à la forme. On nârre avec étude et avec art: on raconte avec exactitude: on conte avec agrément, etc.~ = 2°. Nârration, nârré, (synon.) Le second se dit d' un conte court et peu important, renfermant un seul fait. "Pour cette partie de son nârré, (du raport qu' il nous faisoit) nous n' avions qu' à nous en raporter à nos propres yeux. Voy. d' Anson. _ Le premier se dit d' un nârré plus long et plus considérable. "Pour ce qui est des erreurs qui me sont échapées, j' ôse me flater qu' elles ne porteront aucune ateinte à mon nârré. Préf. dud. Ouvrage. _ Là il falait Nârration, puisque c' est la relation entière de tout le voyage. Voy. RELATION.
   3°. Dans la Nârration historique, on met souvent le prés. pour le prét. "Le Soldat, aprenti dans les fortunes de la mer, trouble l' art des matelots par un service inutile; les vaisseaux, abandonés du Pilote, flotent à la merci de l' orage; tout cède enfin à la violence du vent, etc. _ Trouble, flotent, cède, valent mieux là que troubla, flotèrent, céda, etc. Mais il ne faut pas pourtant employer toujours, en racontant, cette figure vive et animée: il faut la ménager.

NASAL


NASAL, ALE, adj. [Nazal, nazale.] Terme de Gramaire. Il se dit d' un son, modifié par le nez. Son nasal, prononciation nasale. = Voyèles nasales: ce sont an, en, in, on, un. Voy. M et N.

NASARD


NASARD, s. m. Jeu dans les orgues, qui imite la voix d' un homme, qui chante du nez.

NASARDE


NASARDE, s. f. [Nazarde.] Chiquenaûde sur le nez. "Doner une nazarde; des nasardes. = On dit, en st. plaisant, nasarder. = Homme à nasardes, qui mérite des nasardes, et qui les soufre sans s' en ressentir: homme vil et méprisable.

NASEAU


NASEAU, s. m. Il est dans les animaux ce que narine est dans les hommes. Voy. NARINE. = On dit d' un fanfaron, d' un bravache (st. comique.), que c' est un fendeur de naseaux.

NASILLARD


NASILLARD, ARDE, adj. NASILLER, v. neut. [Nazi-gliar, gliarde, glié: mouillez les ll.] Qui nasille, c. à. d. qui parle du nez. "Parler d' un ton nasillard. "C' est un nasillard. "Il ne fait que nasiller.

NASSE


NASSE, s. f. [Nace.] Instrument d' osier, servant à prendre du poisson. = Figur. être dans la nasse, dans une afaire fâcheuse, dont on ne peut plus se tirer.

NATAL


NATAL, ALE, adj. [Le masc. n' a point de pluriel: on ne dit, ni natals, ni nataux.] Il se dit du pays, du lieu où l' on a pris naissance. "Son pays, son lieu natal. Respirer l' air natal. = Quoiqu' en dise l' Auteur des Réflexions (Andry), ce mot est usité au fém. "Sa terre natale. L. T. "Sa ville natale. Acad. Desmarets dit: votre natale terre: l' inversion est dûre.

NATATION


NATATION, s. f. L' exercice ou l' art de nager. Mot nouveau, qui s' établit toujours mieux. "L' Auteur s' étend sur l' utilité de la natation pour tous les états. Ann. Litt.

NATIF


NATIF, IVE, adj. [2e. lon. au 2d.] Il se dit des persones, par raport à la ville où l' on est né. "Natif de Paris, de Lyon, de Marseille, etc. Voy. NÉ, NÉE. = Natif ne se dit pas tout seul et sans régime. "Quelques natifs en sortent (de Paris) dit Voltaire. Siècle de Louis XIV. Cela n' est pas à imiter. = Suivant Bouhours, ce mot n' est pas fort noble: cependant il y a des endroits où il est nécessaire, à moins qu' on ne prenne un aûtre tour, comme: "Demarate... quitta Corinthe, dont il étoit natif. _ Dont il était, tout seul, ne serait pas assez soutenu, ni assez clair; et natif après, fait un bon éfet. On pourrait dire (et ce serait mieux), Corinthe, qui étoit le lieu de sa naissance.

NATION


NATION, s. f. [Na-cion, en vers, ci-on.] Terme colectif. Tous les habitans d' un même État. "Chaque Nation a ses lois, ses coutumes, ses moeurs. "La Nation française, etc. "Il est Espagnol de Nation, etc. = Dans le langage de l' Écriture, les nations, signifie les peuples infidèles et idolâtres.
   Rem. Les noms de peuple et de nation, joints à un nom propre de Royaume ou d' État, ne prènent pas la même espèce d' article. On dit, indiféremment, les Peuples de l' Asie, ou d' Asie, de la France, ou de France. Mais on dit toujours les Nations de l' Asie, de l' Europe.

NATIONAL


NATIONAL, ALE, adj. [Na-cional, ale. Plur. masc. Nationaux; pron. na-cio-nô.] Qui est de toute une nation. "Concile national. "L' Église nationale des Français à Rome. = Troupes nationales se dit par oposition aux troupes étrangères, qui sont au service d' une nation.
   Rem. Dans le Dict. Gram. on critique un Auteur moderne, qui emploie national substantivement: un National, les Nationaux. Il est vrai que le singulier ne se dit point; mais depuis quelque tems on emploie le pluriel. "Cet établissement n' est peut-être pas assez connu des Étrangers, et même des Nationaux. L' Ab. Grosier. "Elle rappelle Jean de Hainaut, et quelque Cavalerie, dont la discipline et les armes étoient préférables à celles des Nationaux. Hist. d' Angl. _ L' Acad. ne met ce subst. ni au sing. ni au plur. = * Le P. d' Orléans dit national pour partial. "Il proteste qu' on ne le trouvera point national dans son Histoire. (des Révol. d' Angl.) Il veut dire, point prévenu en faveur de sa Nation, et contre l' Angleterre, si long-tems rivale de la France. _ Ce mot n' est pas d' usage en ce sens.

NATIVITÉ


NATIVITÉ, s. f. NAISSANCE. Il ne se dit que de celle de Notre-Seigneur, de la Ste. Vierge et de St. Jean-Baptiste, et c' est un terme consacré. = La Fontaine l' emploie pour naissance, parce que ce mot lui était favorable pour la rime.
   L' ingrate, pour le jour de sa nativité,
   Joignoit, aux fleurs de sa beauté,
   Les trésors des jardins et des vertes campagnes.
Cela peut être bon dans une Fable. Hors de là, on dit, le jour de sa naissance. _ L' Auteur de Rome Moderne dit, de St. François de Paule. "Sa nativité, son baptême, etc. Dites, sa naissance.

NATTE


NATTE, ou NATE, s. fém. NATER, v. act. NATIER, s. m. [2e e muet au 1er, é fermé au 2d et au 3e.] Nate est un tissu de pâille ou de jonc, servant, ou à revétir les murâilles, ou à couvrir les planchers. _ On dit, par imitation, nate d' or, d' argent; et des cheveux tressés en nate, qui imitent le tissu de la nate. = Nater, couvrir de nate les murâilles ou le plancher. = Natier, celui qui fait et qui vend de la nate.

NATURALISATION


NATURALISATION, s. f. NATURALISER, v. act. NATURALITÉ, s. f. [Natu--raliza-cion, lizé, lité.] Naturaliser, c' est doner à un étranger les mêmes droits et les mêmes privilèges dont jouïssent les naturels du pays. Droit de naturalité se dit de ceux-ci; et lettres de naturalité de ceux-là. "Je suis né Français, j' ai droit de naturalité en France. "Vous êtes étranger, vous avez besoin de lettres de naturalité. = Naturalisation est l' action de naturaliser, ou l' éfet des lettres de naturalité. "Depuis sa naturalisation, il a fait des aquisitions, parce qu' il pourra en disposer
   Naturaliser se dit figurément des mots et des phrâses que l' on transporte d' une langue en une aûtre. Costume, mot Italien; bill, mot Anglais, etc. ont été naturalisés en France.
   Raynal dit, se naturaliser avec. "Engager les Princes à envoyer leurs enfans à Goa, pour s' y naturaliser, en quelque manière, avec ses moeurs et ses principes (de la Cour de Lisbone) cette expression est hazardée, et elle a besoin du sceau de l' usage.

NATURALISME


NATURALISME, s. m. NATURALISTE, s. m. Le 1er, se dit du caractère de ce qui est naturel. "Plusieurs défendent le naturalisme du magnétisme: d' aûtres, en plus grand nombre, n' y voient que du charlatanisme. = Le second, se dit d' un Savant, qui s' aplique à l' étude de l' Histoire Naturelle. "Il a paru dans ce siècle de grands naturalistes.

NATûRE


NATûRE, s. fém. NATUREL, ELLE, adj. NATURELLEMENT, adv. [2e lon. au 1er, è moy. aux trois dern. 4e. e muet; rèl, rèle, rèleman.] Natûre se prend en divers sens: on entend par ce mot, 1°. toutes les chôses créées. "Dieu est l' Auteur et le maître de la natûre: l' ordre, qui règne dans la natûre. "Toute la natûre nous enseigne qu' il y a un Dieu. = 2°. L' ordre, qui est répandu dans les chôses créées. "La natûre est admirable, jusque dans les moindres chôses. "La natûre ne fait rien en vain. "Ce sont des jeux de la natûre. = On abuse beaucoup de ce mot, pris dans ce sens, et dans beaucoup de phrâse, où l' on emploie ce mot, si l' on n' entend pas l' Auteur de la Natûre, on ne sait ce qu' on dit, ou l' on ne dit que des absurdités. = 3°. Propriété de chaque être particulier. "La natûre du feu est de, etc. = 4°. Complexion, tempérament. "Il est bilieux de sa natûre, ou de natûre. Acad. = 5°. Disposition et inclination de l' âme. "Il est enclin de sa natûre à un tel vice. = 6°. Ce qui distingue les principales espèces des êtres. "La natûre divine, la natûre angélique, la natûre humaine. On dit aussi celui-ci, pour le genre humain. = 7°. L' état naturel de l' Homme oposé à l' état où il est élevé par la grâce. "La natûre corrompûe; la natûre est fragile; l' état de natûre et l' état de grâce. = 8°. Il se dit des productions de la natûre oposées à celles de l' art. "L' art perfectione la natûre. = 9°. Sorte, espèce. "Je n' ai point vu de plantes, de fleurs de cette natûre. "J' aimerois mieux une autre natûre de biens. "A-t' on jamais vu d' afaires, de procédés, etc. de cette natûre? = Des meubles, des marchandises en natûre, qui n' ont pas été aliénés, vendus, etc. = 10°. Dans le moral, il se dit et de la conscience; la natûre nous enseigne à honorer père et mère, etc. et du mouvement par lequel l' homme est porté à ce qui peut contribuer à sa conservation. "La natûre demande du relâche, du repôs, etc.
   Le Proverbe dit: nourriture pâsse natûre; l' éducation a plus de force sur nous que la natûre même. = L' habitude est une aûtre, ou, une seconde natûre; elle a autant (et souvent plus) de pouvoir sur nous que les inclinations de la natûre.
   Rem. Aûtrefois, on employait natûre sans article.
   C' est un oeuvre, où Natûre a fait tous ses efforts.
       Malherbe.
  Henri, ce grand Henri, que les soins de Nature.
  Avoient fait un miracle aux yeux de l' Univers.Id.
Aujourd' hui, on dit, en vers, comme en prôse, la Natûre les soins de la Natûre; excepté dans le marotique, qui imite le vieux langage. = On ne dit natûre sans article que dans quelques expressions; comme, crime contre natûre. "Peindre, représenter d' après natûre:
   L' un, simple, franc, plein de droitûre.
   S' aplique à copier tous les traits du vieillard,
   Et met en oeuvre tout son art,
   Pour le peindre d' après nature.
       L' Ab. Reyre.
* Le Traducteur de l' Hist. d' Angl. d' Hume, dit, hors natûre. "Une telle sagesse paroitroit hors natûre. Il faut dire, hors de la natûre.
   NATUREL, est 1°. Qui apartient à la Natûre, qui est conforme à l' ordre, au cours ordinaire de la Natûre. "Le cours, l' ordre naturel des chôses. La loi naturelle, les lumières naturelles. = 2°. Qui n' est point déguisé, altéré, fardé, mais tel que la natûre l' a fait. "Ce vin, ce baûme est naturel. "Beauté naturelle. = Prendre une chôse dans son sens naturel, selon son véritable sens. = 3°. Facile, sans contrainte. "Air naturel. "Esprit, style naturel; qui n' est pas naturel. "Pensée naturelle. = 4°. En parlant des persones, aisé et franc. "C' est un homme naturel: elle est naturelle. "Soyons naturels, (sincères) avouons que nous ne comprenons rien à cet ouvrage. Pluche.
   Quoi donc! parce qu' il sait saisir le ridicule,
   Et qu' il dit tout le mal, qu' un flateur dissimule,
   On le prétend méchant: c' est qu' il est naturel.
       Gresset.
= Naïf, naturel, (synon.) Ce qui est naïf naît du sujet, et en sort sans efforts; c' est l' oposé du réfléchi; et c' est le sentiment seul, qui l' inspire aux bons esprits. Ce qui est naturel apartient aussi au sujet, mais il n' éclot que par la réflexion: il n' est oposé qu' au recherché; et c' est à la finesse de l' esprit qu' il est doné d' en reconnoître les bornes. "Toute pensée naïve est naturelle; mais toute pensée naturelle n' est pas naïve. BEAUZ. synon. Ajoutons que le naïf n' est propre que des petits sujets, et que le naturel s' étend jusqu' aux Grands.
   REM. 1°. Naturel, aime à suivre le substantif. Plusieurs Auteurs l' ont fait précéder mal-à-propôs, à mon avis. "Sa naturelle curiosité. Boss. "Sa naturelle paresse à soutenir la conversation. Mol. "Sa naturelle éloquence. Sév. On dirait aujourd' hui, sa curiosité naturelle, etc. = 2°. Naturel, régit le datif des noms; et, quand il est joint au v. être impersonel, la prép. de devant les verbes. "L' inconstance est naturelle à l' Homme. "La curiosité naturelle à l' Homme lui inspire l' envie d' aprendre. "Il est naturel de se plaindre quand on soufre. = 3°. Naturel, adjectif est employé substantivement dans cette phrâse, les naturels du pays. "Par-tout où les Européens ont porté leurs armes, ils ont subjugué les naturels du pays. L' Ab. Du Bos. Mais cela n' a lieu que pour le pluriel masculin: il serait ridicule de dire: c' est un naturel, ou, une naturelle du pays. = On ne le dit pas tout seul, même au pluriel. "On écrit de Gorée... que le navire a été brûlé par les naturels. Journ. de Gen. On ne parle pas de la sorte. = Enfin, on ne le dit point avec les noms des nations particulières. On ne dit point, les naturels de France, d' Espagne, etc. = L' Acad. dit bien, les naturels françois; les espagnols naturels: mais là il est adjectif; et dans la 1re phrâse, il précède mal le substantif, à mon avis. = 4°. Bossuet done à cet adjectif un sens, qui n' étoit pas comun de son tems, et qui est certainement inusité aujourd' hui. "Les Juifs, gens simples et naturels. Il veut dire, en cet endroit, qui n' étoient point recherchés dans leurs amûsemens.
   NATUREL, s. m. 1°. Propriété naturelle. Le naturel de l' Homme est d' être sociable. = 2°. Tempérament. "Naturel robuste, vigoureux. Naturel, tempérament, constitution, complexion. (syn.) Le naturel est formé de l' assemblage des qualités naturelles; le tempérament, du mélange des humeurs; la constitution, du système entier des parties constitutives du corps; la complexion des habitudes dominantes, que le corps a contractées. _ Le naturel, fait le caractère; le tempérament, l' humeur; la constitution, la santé; la complexion, la disposition habituelle du corps. Extr. des Syn. Fr. de M. l' Ab. Roubaud. = 3°. Inclination, humeur. "Bon, ou mauvais, méchant naturel. "Il est jaloux, colère de son naturel. = 4°. Amour naturel; "mère ou enfant qui a beaucoup, ou qui n' a point de naturel; qui est sans naturel. = On le dit, en ce sens, de l' humanité et de la compassion. = 5°. Disposition et facilité naturelle. "Il a beaucoup de naturel pour la musique, pour la peintûre. "Il y a beaucoup d' art et d' étude dans ses ouvrages; mais point de naturel. = 6°. N' avoir point de naturel, se dit d' une persone gênée dans ses manières, et d' un Écrivain contraint et dur ou afecté, et recherché dans son style. = 7°. En termes de Dessin, Peintûre, Sculptûre, etc. il est synonyme de natûre. "Dessiner d' après le naturel. L' Acad. remarque, qu' il est d' usage sur-tout dans les atteliers.
   REM. Ménage fait régir à naturel (n°. 5°.) la prép. à, au lieu de pour. Il dit de lui-même, dans ses Observations sur Malherbe, que: "Il n' avoit point de naturel à la Poésie, et qu' il ne faisoit des vers qu' en dépit des Mûses. Le P. Rapin, qui emploie souvent ce mot, dit toujours pour. "Jamais peut-être persone n' a eu un plus grand naturel pour la parole. "Le premier fonds de l' Éloquence est un naturel heureux pour la parole. = Il me semble qu' aujourd' hui on dit plus volontiers, en se servant de l' adjectif, talent naturel, disposition naturelle.
   Au naturel, adv. "Peint, représenté au naturel. = De mon naturel, adv. naturellement. "De mon naturel, j' aimois à parler. "Je ne suis pas plaisant de mon naturel. Th. d' Éduc.
   NATURELLEMENT, adv. 1°. Par une impulsion naturelle: "Tout retourne naturellement à son principe. "Tous les animaux aiment naturellement la conservation de leur être. = 2°. Par les seules forces de la natûre. "Cela ne peut se faire naturellement. Cela se dit quelquefois, ou pour signifier qu' une chôse n' arrive pas ordinairement, ou pour faire entendre qu' on soupçone quelque supercherie. = 3°. D' une manière naïve et naturelle. "Contrefaire, dépeindre fort naturellement. "Écrire naturellement, d' un style aisé. = 4°. Aisément. "Cela s' explique naturellement. = 5°. Avec franchise: parlez-moi naturellement.
   Rem. Souvent il s' associe avec tout adverbe. "L' ambition les porte tout naturellement à, etc.

NAVAL


NAVAL, ALE, adj. [Il n' a point de pluriel masc. On ne dit ni navals, ni encôre moins, navaux.] Qui concerne les vaisseaux de guerre. "Combat naval. Armée, batâille navale. = L' Acad. dit aussi troupes navales, victoire navale. Ceux-ci se disent moins souvent.

NAVÉE


NAVÉE, s. f. Charge d' un bateau. "Il est arrivé deux navées de tuile.

NAVET


NAVET, s. m. [Navè: 2eè moy.] Espèce de racine bone à manger. = L' Acad. avait dit d' abord navet ou naveau. Dans les éditions suivantes, elle se contente de dire, quelques-uns disent naveau. Dans la dernière, elle ne fait plus mention de celui-ci.

NAVETTE


NAVETTE ou NAVèTE, s. f. [2e è moy. 3e e muet.] 1°. Espèce de navet sauvage; de la semence duquel on tire une huile à brûler. "Huile de navette. = On done aussi ce nom à la semence. = 2°. Petit vâse d' argent, de cuivre, ou de fer-blanc, fait en forme de petit navire, où l' on met de l' encens, pour en garnir les encensoirs, quand il est nécessaire. = 3°. Instrument de tisserand, avec lequel on fait courir le fil, la soie, la laine sur le métier. = C' est dans cette acception, qu' on dit (st. fig. famil.) faire la navette, faire beaucoup d' allées et de venûes; et faire faire la navette, en faire faire à d' aûtres.

NAUFRAGANT


*NAUFRAGANT, s. m. Ce mot a été employé par le P. La Rue: "Les voeux empressés des naufragans, que le vent emporte avec l' orage. = Ce mot n' a pas pâssé.

NAUFRAGE


NAUFRAGE, s. m. NAUFRAGÉ, ÉE, adj. [Nofrage, gé, gé-e: 3e e muet au 1er, é fer. aux aûtres.] Naufrage, perte d' un vaisseau sur mer: faire naufrage. "On ne put rien sauver du naufrage. = Fig. il se dit de toute sorte de revers, de disgrâces. = Faire naufrage au port, voir ses desseins ruinés au moment où il y avoit le plus d' espoir d' un heureux succês. "Son honeur a fait naufrage. "Voilà tout ce que j' ai pu sauver du naufrage. = Naufragé, ne se dit qu' au propre des éfets, qui ont péri dans un naufrage, soit qu' on les en retire, soit qu' on ne puisse les en retirer. On ne le dit point des persones. = * Quelques-uns disent naufrager, faire naufrage. Ce mot n' est point dans les Dictionaires; et je ne me souviens point de l' avoir vu dans aucun Auteur. Il serait utile, et il est à souhaiter que l' usage l' admette. Il est d' usage au participe, vaisseau naufragé.

NAVIGABLE


NAVIGABLE, adj. NAVIGATEUR, s. m. NAVIGATION, s. f. NAVIGUER, v. n. [l' u est nécessaire dans le dernier, pour doner au g un son fort qu' il n' a pas devant l' e: il est inutile aux aûtres, parce que le g a naturellement ce son devant l' a.] Naviguer, aler sur mer, ou sur les grandes rivières. Navigation, voyage sur mer, etc. Navigateur, qui a fait de grands voyages sur mer. Navigable, où l' on peut naviguer, en parlant des mers ou des rivières. "Naviguer en pleine mer. "Longue navigation. "Grand, hardi navigateur. "Mer, qui n' est pas navigable. Rivière navigable dès sa source.
   Rem. 1°. Suivant Vaugelas, les Marins disent naviguer, mais les bons Auteurs et les gens de la cour, naviger. L' Acad. n' avait d' abord adopté que celui-ci, et se contentait de dire, quelques-uns disent naviguer. _ On lit dans Rousseau.
   Qui navïgeoient sur cette mer profonde.
Et dans Boileau, Sat. X.
   Puis bientôt, en grande eau, sur le fleuve de Tendre,
   Naviguer~ à souhait, tout voir et tout entendre.
Presque tous les Auteurs des Let. Édif. disent aussi naviger. Dans la dern. Édit. l' Acad. ne dit plus que naviguer, et celui-ci a prévalu. = 2°. Navigation, se prend quelquefois pour l' art de naviguer. "Les peuples, qui s' adonent à la navigation. = 3°. Naviguer, se dit aussi et de la manoeuvre que fait faire le Pilote à un vaisseau. "Mer, où il est mal--aisé de bien naviguer; et de la manière, dont un vaisseau va sur mer. "Ce vaisseau navigue bien. = 4°. * Plusieurs, dans les Ports de mer, disent navigant, pour marin. "Quel est votre état? Celui de navigant. "Un chirurgien navigant, qui sert sur les vaisseaux marchands. Ce mot n' est pas du bon usage.

NAVIRE


NAVIRE, s. m. [2e lon. 3ee muet.] Vaisseau, bâtiment, qui va sur mer. "Navire marchand. "Capitaine, Patron de navire. "Bâtir, construire, armer, mâter, charger, décharger un navire. = En parlant des vaisseaux de guerre; on dit vaisseau plutôt que navire, et en parlant de vaisseaux marchands, navire est plus usité dans les ports de l' Océan, et vaisseau dans ceux de la Méditerranée.
   Rem. Autrefois on faisait navire féminin: la navire.
   Car aux flots de la peur sa navire, qui tremble.
   Ne trouve point de port.
       Malherbe.
Ménage pensait qu' en haute poésie la navire valait mieux que le navire. _ Aujourd' hui on ne dit que celui-ci, en vers comme en prôse. Le féminin ne s' est conservé qu' en parlant du vaisseau des Argonautes. "La navire argo. Madame Dacier. M. Goguet. Rich. Port. Acad. etc.

NAULAGE


NAULAGE, s .m. [Nolage.] Prix que les Passagers payent au maître du vaisseau pour leur passage. = Ce qu' on done aux bateliers pour pâsser la rivière = Trév. et le Rich. Port. mettent naulage ou naulis; mais ces deux mots ont des sens diférens. Voy. NOLIS.

NAUMACHIE


NAUMACHIE, s. f. [Nomachî-e, 3e lon. 4e e muet.] On lit Naumachine dans la Descr. de l' Italie par M. l' Ab. Richard. C' est sans doute une faûte d' impression. = Il signifie, combat de vaisseaux. C' est le nom d' un spectâcle qu' on donait souvent au Peuple de l' anciène Rome.

NAVRANT


NAVRANT, ANTE, adj. Qui nâvre. C' est un mot nouveau et qui a bien besoin du sceau de l' Usage. "Une multitude incroyable de familles affamées, couverte de lambeaux hideux, présente le spectâcle le plus navrant. BRIATTE

NAVRER


NAVRER, v. act. [Navré: devant l' e muet, l' â est long: il nâvre, nâvrera, etc.] Autrefois blesser. "Navrer mortellement. "Il a été navré pour les péchés des hommes. Abadie. Qui a le coeur navré, amoureux. Joubert. = Aujourd' hui, il ne se dit qu' au figuré. "Cela me nâvre le coeur. L' Acad. ne le dit qu' au participe: j' en ai le coeur navré. = On ne le dit qu' avec coeur:
   O barbarie! ô douleur, qui me nâvre.       DE C...
Dans le Journ. de Paris, on marque ce mot du caractère italique; critique indirecte.

NAUSÉABONDE


*NAUSÉABONDE, adj. Mot employé dans le Journ. de Litt. les Auteurs de ce Journal étaient de grands Néologues. "Pourquoi le cuivre froté un peu fortement, rend-il une odeur nauséabonde? Ce mot est reçu en médecine. MARIN.

NAUSÉE


NAUSÉE, s. f. [Nozé-e: 2eé fer. et long, 3e e muet.] Envie de vomir. "Exciter des nausées: il a de grandes nausées.

NAUTILE


NAUTILE, s. m. [Notile: Dans le Dict. Gram. On le marque fém. On l' écrit avec 2 ll, et qui pis est on avertit de les mouiller. L' Acad. le marque masc. et n' y met qu' une seule l.] Coquillage de mer univalve, ainsi apelé parce que l' animal, qui y est renfermé conduit sa coquille comme une barque, à l' aide d' une membrane, qui lui sert de voile.

NAUTIQUE


NAUTIQUE, adj. [Notike: 3e e muet.] Qui apartient à la navigation. "Astronomie nautique. "Cartes nautiques.

NAZARD


NAZARD, etc. NAZEAU, NAZILLARD, etc. Voy. NASARD, NASEAU, NASILLER, etc.

NE


NE, partic. négat. [e muet.] 1°. Elle est ordinairement jointe à une aûtre négation, comme pas ou point: alors elle est devant le verbe, et pas aprês. "Il ne veut pas venir. "Je n' en veux point. Dans les tems composés, pas ou point doit se mettre entre l' auxiliaire et le participe. Il n' est pas venu, et non pas, il n' est venu pas. Il se met assez indiféremment devant ou aprês l' infinitif. Je crains de ne pas pouvoir, ou de ne pouvoir pas aler, etc. ordinairement pourtant la 1re manière est meilleûre. = Quand elle est jointe à rien ou à ni, on retranche pas. "Cela ne vaut rien; cela n' est ni beau, ni honête: je ne l' aime, ni ne l' estime. = Il est d' autres négatives, qui tiènent lieu de pas ou point, comme, goutte, mot, plus, jamais, aucun, nul, persone, etc. "On n' y voit goutte; il ne dit mot; il ne se plaint jamais; je ne conais nul d' entr' eux; je n' en vois aucun; il n' aime persone, etc. Remarquez que goutte ne se joint qu' avec voir, et mot qu' avec dire: les autres se joignent avec toute sorte de verbes. = 2°. Ne se pâsse souvent de la compagnie de pas: mais pas ne va jamais sans ne:
   Sais je pas que Taxile est une âme incertaine?
       Alex.
  Sais-je pas que mon sang, par ses mains répandu?
      Mithrid.
  Les yeux peuvent-il pas aisément se méprendre.
       Ibid.
Quelque exact qu' ait été ce grand Poète (Racine) je ne crois pas qu' en cela son exemple puisse autoriser ses imitateurs. = Molière fait souvent la même faûte:
   Pour dresser un contrat m' a-t' on pas fait venir?
       Éc. des Fem.
"Pouvez-vous pas y supléer. Impromptu~ de Vers.
   Je ne daigne à~ présent répondre.
Dans ce dernier exemple pas est retranché contre l' usage. = Vaugelas avait dit, que ces manières de parler étaient bonnes; mais l' Académie, dans ses Observations, traite de négligence et même de faûte, la supression d' une des négatives pour la prôse: cela est incontestable. Pour les vers, c' est une licence, dont aujourd' hui les oreilles délicates sont blessées. Thomas Corneille faisoit des vers, dit M. l' Ab. D' OLIVET; nous avons ses notes sur Vaugelas; écoutons-le dans sa propre caûse. "D' ôter ici la négative, ce peut être une commodité pour les Poètes: mais ils doivent doner un tour aisé à leurs vers, sans que ce soit aux dépens de la construction. = 3°. Après craindre, avoir peur que, de peur que, etc. le ne a fort bonne grâce. "Je crains qu' il ne viène nous troubler: j' ai bien peur qu' il n' en meure: doutez-vous qu' il ne réussisse: de peur que vous ne l' oubliez, etc. M. Andry remarque que notre Langue aime cette négative, et qu' on la met souvent avec élégance dans des endroits où on ne la mettroit pas en latin; comme il s' en faut beaucoup qu' il ne soit si (aussi) grand que vous, et non pas, qu' il soit. "Je ne nie pas que je ne l' aie dit, ce qui est mieux que de dire, que je l' aie dit. "Il est tout aûtre qu' il n' étoit, plutôt que, qu' il étoit. _ Aujourd' hui, non-seulement c' est une élégance, mais une nécessité d' employer la négative dans de pareilles ocasions. Mais aprês, avant cette négative, est superflûe. Avant qu' il ne viène, est un solécisme. Il faut dire avant qu' il viène. Voy. CRAINDRE, DOUTER, NIER, etc. AVANT. = 4°. Après si et excepté que, on se contente souvent de la particule ne. "Je m' en serais alé sur le champ, si je n' avais craint qu' il ne s' en formalisât. "Je le ferai excepté que vous n' aimiez mieux le faire. = * Bossuet retranche pas avec non plus, et c' était l' usage aûtrefois. "Bucer ne se servit non plus, au comencement, du mot de substance, etc. Il dit ailleurs. "Il n' y en avoit non plus aucun aûtre. Mais ici pas est retranché à caûse d' aucun, et non pas à caûse de non plus. = On dit encôre, n' en tenir compte, sans y joindre pas ni point. On le dit de même avec les verbes pouvoir et savoir: je ne puis le faire, je ne saurais le dire, etc. Avec pouvoir on pourrait absolument mettre pas ou point; je ne puis pas, ou je ne puis point le faire: mais avec je ne saurais; pas ou point font un sens différent. "Je ne saurais le faire, signifie je ne puis pas; je ne saurais pas le faire, veut dire, je n' aurais pas le talent, l' adresse de le faire. = Quand ne est suivi de que dans le sens de seulement, il se dit aussi tout seul, sans être acompagné de pas ou de point: je n' ai que cent francs: il ne doit que dix louis; et non pas, je n' ai pas que, etc. * Que les soeurs ne sortent pas qu' accompagnées. Retranchez pas. _ 5°. Dans le style marotique on emploie ne tout seul.
   À~ sa vertu je n' ai plus grande foi.
   Qu' à son esprit.      Rouss.
Ce métier-ci n' est ce que vous pensez.Id.
Minerve à tous ne départ ses largesses.Id.
Et croyez-moi je n' en parle à travers.
Dans le discours ordinaire, on dirait, je n' ai pas plus grande foi, etc. Ce metier-ci n' est pas, etc. = 6°. Au que, qui est joint à un comparatif, doit toujours être jointe la particule ne, plus grand que vous ne le disiez; mieux qu' il ne pensoit, etc. Il y a des Auteurs, qui ont manqué à cette règle, et beaucoup de persones y manquent journellement en conversation. * Ils disent, plus grand que vous disiez; mieux qu' ils pensait, etc.
   7°. Une des propriétés de la négative, c' est que, jointe au verbe régissant, elle change quelquefois les tems et les modes des verbes régis. Ainsi l' on dira, en afirmant, je crois qu' il viendra; et en niant, je ne crois pas qu' il viène. "J' étais convaincu qu' il devait venir; et je n' étais pas convaincu qu' il dût venir. Dans le 1er exemple, le prés. du subjonctif viène est à la place du futur de l' indicatif, viendra. Dans le 2d exemple, l' imparfait de l' indic. devait, est changé en imparf. du subj. dût. = Ces changemens arrivent avec les négatives ne et pas pour tous les verbes exprimant l' opinion, la persuasion.
   8°. La place que la négative ocupe dans la phrâse n' est indiférente, ni selon l' usage et la Gramaire, ni suivant la raison et le sens du discours. Par exemple, il y a bien de la diférence entre ces deux propositions: ne pas paroître être conforme à la raison, et paroître n' être pas conforme à la raison. Aussi Bayle raisone-t' il fort mal, quand il dit: "Les plus orthodoxes avouent que nous ne connoissons pas la conformité des mystères aux maximes de la Philosophie. Il nous semble donc qu' ils ne sont pas conformes à la raison. Il conclut mal. Il devait dire: il ne nous semble donc pas qu' ils soient conformes à la raison. Anon.
   9°. Ne plus ne moins était du vieux style, dès le tems de Ménage. Il croyait pourtant qu' on pouvoit s' en servir. Il est aujourd' hui entiérement hors d' usage. Molière avait achevé de rendre cette locution ridicule, en la mettant dans la bouche de Thomas Diafoirus. "Ne plus ne moins que la Statue de Memnon, etc.

NÉ


NÉ, NÉE, adj. et participe du V. NAîTRE. Il régit la prép. pour: "Il est né pour la guerre, pour les armes, pour la joie.
   Esprit, né pour servir d' exemple
   Aux coeurs de la vertu frapés.
       Rouss.
Voiture Boileau et le P. Rapin lui font régir la prép. à: "Arrêter les âmes les moins nées à la vertu. Voit. "Un Orateur, véritablement né au sublime. Boil. "Les Espagnols, nés aux réflexions. P. Rapin. = Né natif, est une locution populaire. Il faut dire: il est né à Paris; ou, il est natif de Paris; ou, encore mieux, il est de Paris. = L' Acad. avait d' abord dit, né natif. Elle ne l' a plus mis, ni sous natif, ni sous Naître. = Bien né, d' un bon naturel. "C' est bien domage qu' on gâte ce jeune homme. Il étoit bien né: il pouvoit réussir. Marm. Dans le Rich. Port. on dit, fille mal née, qui a de mauvaises inclinations, et dans le Dict. Acad. "Enfant mal né, fille mal née. Mais il s' en faute beaucoup que mal né soit aussi usité que bien né. = Né, exprime quelquefois quelque chôse, qui est à demeure, ou qui est ataché à une charge. "M. L' Arch. de Paris et M. l' Ab. de Cluni sont Conseillers d' honeur nés au Parlement de Paris. "L' Archevêque de Narbone est Président né des États de Languedoc. _ Ordinairement né se met après le mot qu' il modifie. L' Acad. dit pourtant, il est né prié, il n' a pas besoin d' être invité. Le plus grand nombre dit: Il est prié né; et cela est plus régulier, à mon avis. _ Né devant le substantif a un autre sens; il est né Poète, Peintre, etc. Il a porté en naissant de grandes dispositions à la Poésie, à la Peintûre. * Il faut être coloriste né, dit un Auteur. Il devait dire: il faut être né coloriste. = Mort-né: mort avant que de naître. = Nouveau-né, qui vient de naître. = Premier-né, s. m. Terme de l' Écritûre. "Sous la Loi de Moïse on ofrait à Dieu les premiers nés. L' Acad. le met aussi comme adjectif: les enfans premiers nés. Il me semble qu' on ne l' emploie guère que substantivement.

NÉANMOINS


NÉANMOINS, adv. [Néan-moein; devant une voyèle moeinz: aûtrefois on écrivait néantmoins avec un t, et plusieurs l' écrivent encôre de même.] Toutefois, pourtant, cependant. = Il s' emploie, soit au comencement de la période, soit après la conjonction et, ou aûtres conjonctions, soit même au milieu d' un membre de phrâse. "Néanmoins je le verrai: et néanmoins, je le ferai: Si néanmoins on peut le croire: je ne laisserai pas néanmoins de le dire: il convient néanmoins que vous le lui ofriez, etc. = Avec quoique, bien que, parce que, NÉANMOINS ne se met jamais qu' après. Voyez TOUTEFOIS. = Cet adverbe marque oposition à ce qui précède: il est donc mal apliqué dans la phrâse suivante. "Le Cardinal Polet fit bâtir cette Chapelle... néanmoins le Cardinal Tolet l' a fit rebâtir. Rome moderne.

NÉANT


NÉANT, s. m. [Néant: le t final ne se prononce pas: 1re é fer. 2e lon.] Rien: ce qui n' existe pas. "Dieu a tiré toutes choses du néant: il peut les faire rentrer dans le néant. "Le néant n' a point de propriété. = Il est beau au figuré, dans le moral. "Le néant du monde. Nicole. "Le néant des biens faux et trompeurs. Mallebr. "Le néant inévitable de toutes les grandeurs humaines. Boss. Afaires de néant, méprisables. = Dans un st. plus simple: chôse de néant; homme de néant. "On l' a fait rentrer dans son néant. = On dit au Palais: mettre néant sur la requête, sur un article de compte, refuser de l' admettre. En st. famil. Néant à la requête: Je n' en ferai rien. = Mettre une apellation au néant, débouter de l' apel. = Néant est aussi une espèce d' interjection. "S' il y avoit (chez nous) une fille, qui eût été femme-de-chambre d' un Monsieur, il faudroit qu' elle se contentât d' avoir un amant; mais pour de mari, néant. Mariv. C. à. d. elle n' en aurait point.

NÉBULEUX


NÉBULEUX, EûSE, adj. Obscurci par les nuages. "Tems, ciel nébuleux. = Étoiles nébuleûses, moins brillantes que les aûtres, et dont la lumière est faible et terne. "Un faux ami ressemble à l' ombre d' un cadran: elle se montre lorsque le tems est serein: elle disparoit; dès qu' il est nébuleux. Marin. = Quelques Auteurs l' on employé au fig. "Métaphysique nébuleûse, qui ne sert qu' à brouiller l' esprit. Ann. Litt. M. l' Abé Sabatier (Trois siècles) le dit des Écrivains; ce qui ne paraît pas aussi juste. "Prosateurs décousus et nébuleux. Ces deux épithètes se disent plutôt des écrits que des Écrivains.

NÉCESSAIRE


NÉCESSAIRE, adj. NÉCESSAIREMENT, adv. [Nécècère, cèreman: 1reé fer. 2e et 3e è moy. long à la 3e, 4e e muet.] Dont on ne peut se pâsser. "La respiration est nécessaire à la vie. La foi est absolument nécessaire pour le salut. L' Acad. dit aussi à salut; mais celle-ci est une vieille locution. Elle s' est conservée dans cette phrâse. "Cela n' est pas nécessaire à salut, n' est pas de précepte, d' obligation: ce qui se dit aussi, proverbialement d' une chôse peu importante. = Il est nécessaire régit de et l' infinitif, ou que et le subj. Il est nécessaire de le lui dire: Il est nécessaire que vous y soyiez. Ferrière lui fait régir le datif d' un nom et l' infinitif d' un verbe. "Il ne lui est pas nécessaire de se faire restituer contre. _ Ce régime est inusité. Il faut se servir, dans des ocasions pareilles de que et du subj. Il n' est pas nécessaire qu' il se fasse restituer contre.
   Dans le discours famil. on dit qu' un homme s' est rendu nécessaire dans une maison, pour dire, qu' il s' y est rendu si utile, qu' on ne peut que dificilement se pâsser de ses conseils et de son ministère; et qu' il y fait le nécessaire, qu' il se mêle de tout, comme si l' on ne pouvait se pâsser de lui.
   NÉCESSAIRE, s. m. Tout ce dont on a besoin pour la subsistance et l' entretien. "Avoir ou n' avoir pas le nécessaire. = C' est aussi le nom qu' on done à une boîte ou à un grand étui, où l' on renferme diverses chôses nécessaires ou comodes en voyage.
   NÉCESSAIREMENT, 1°. par un besoin absolu. = Il faut nécessairement manger pour vivre. = 2°. Infailliblement. "Il faut nécessairement qu' un tel éfet arrive.

NÉCESSITANTE


NÉCESSITANTE, adj. fém. NÉCESSITER, v. act. [Nécècitante, cité: 1reé fer. 2e è moy. 4e lon. au 1er, é fer. au 2d.] Nécessiter, réduire à la nécessité de faire. Vous l' avez nécessité à se défendre. = On dit, dans le Dict. Gram. qu' il régit à ou de, mais que le 1er est le plus usité. "Il m' a nécessité à faire cette démarche. "Je suis nécessité à lui intenter un procès. = On dit, en Théologie, et c' est une vérité qu' il faut croire, que; "la grâce ne nécessite point la volonté. = Nécessitante se dit de la grâce. "Le systême de la grâce nécessitante est une hérésie. = Dans le discours familier, on dit adverbialement, de nécessité nécessitante, de nécessité absolue et indispensable.
   NÉCESSITÉ, ÉE, participe passif, régit la prép. par. "de courts succês et de longs désastres, toujours nécessités par des faûtes. Ling.

NÉCESSITATION


*NÉCESSITATION, s. f. Mot forgé par Leibnitz. "La détermination dont il s' agit ici, n' est pas une nécessitation.

NÉCESSITÉ


NÉCESSITÉ, s. f. NÉCESSITEUX, EûSE, adj. [Nécècité, ci-teû, teû-ze; 1re é fer. 2e è moy. 4e é fer. au 1er, lon. aux 2 aûtres.] Nécessité se dit de ce qui est nécessaire et indispensable. "C' est une nécessité de mourir. "Si vous voulez que Dieu vous pardone, c' est une nécessité que vous pardoniez. = 2°. Contrainte. "Ne me réduisez pas à la nécessité de vous dire des chôses désagréables. = 3°. Besoin pressant. "C' est une nécessité que je parte à l' heure même. "La nécessité de mes afaires m' y oblige. = 4°. Indigence. "Être réduit à la dernière nécessité, à une grande, une extrême nécessité. _ L' Académie dit aussi, tomber dans la nécessité, ou en nécessité. Je crois qu' on peut douter que le 2d soit du bel usage. = 5°. Au pluriel: les chôses nécessaires à la vie. "Il n' a pas toutes ses nécessités. = Nécessités de la natûre; les besoins auxquels la Natûre nous assujétit, comme boire, manger, dormir. = Aler à ses nécessités, aler se décharger le ventre. = 6°. De nécessité, adv. Nécessairement. "De nécessité, il faut, ou il faut de nécessité que cela soit. On dit, pour apuyer plus fortement: De toute nécessité;de nécessité absolûe. = Avec le verbe être, on ne le dit point sans article. "L' étude est de nécessité absolûe à ceux dont la main n' est jamais tendue au salaire. Du Plaisir. Je voudrais dire, est d' une nécessité absolûe. = On dit aussi ordinairement: c' est une nécessité que avec le subj. et l' on en a vu plus haut des exemples. * M. l' Abé de Cambacérès dit, en ce sens: c' est nécessité que, sans article. "C' est donc nécessité pour l' homme, et sagesse à Dieu, qu' il y ait plus dans la Religion à adorer qu' à comprendre. = Quand le verbe régi se raporte au nom, on met de et l' infinitif. "C' est une nécessité pour une Dame d' avoir un carrosse. "C' est une nécessité de mourir, d' aimer Dieu; on sous-entend, pour tous les hommes. "Excités au carnage par l' habitude d' ataquer, et la nécessité de se défendre. = On dit: les denrées de première nécessité; les plus nécessaires à la vie. M. Raymond, Académicien de Marseille, dit, en imitation, les arts de première nécessité. Cette expression, qui n' est pas anciène, exprime bien ce qu' on veut dire, et épargne une périphrâse.
   Par nécessité, adv. Fénélon dit pour la nécessité, ce qui est moins conforme à l' usage. "Elle ne parle que pour la nécessité. Télémaque.
   Quelle nécessité, (On sous-entend, y a-t-il?) régit que et le sujonctif. "Quelle nécessité que tu vinsses ici montrer ton peu de courage?
   On dit, en style familier: faire de nécessité vertu, se faire un mérite de ce qu' on ne peut éviter. Vertot, en changeant quelques mots, a adapté au style noble cette expression proverbiale. "On fit ensuite, une vertu d' un pur effet de la nécessité. Révol. Rom.
   NÉCESSITEUX, qui est dans la nécessité, (n°. 4°.) dans l' indigence. "Il étoit fort riche: il est à présent nécessiteux. = Il s' emploie sur-tout substantivement. "Les pauvres, les nécessiteux. = L' Acad. ne le met pas comme substantif. Je pense que c' est un oubli.

NÉCROLOGE


NÉCROLOGE, s. m. Livre où l' on marque la date de la mort des persones illustres.

NÉCROMANCE


NÉCROMANCE, s. f. NÉCROMANCIEN, CIENNE ou CIèNE, s. m. et f. Le 1er, se dit du prétendu art d' évoquer les morts; le 2d, de celui ou de celle qui se mêle de cet art chimérique. = Quelques-uns disent nécromancie. Voiture dit négromant. Dans l' Année Litt. (1785, n°. 35, pag. 332) on lit nécromancier: C' est sans doute une faûte d' impression. = Il y en a qui prononcent négromance: ce n' est pas l' usage.

NECTAR


NECTAR, s. m. [Nèktar: 1reè moy.] Le breuvage des Dieux. Figurém. Vin excellent. "C' est du nectar.

NEF


NEF, s. m. [è moy. l' f se prononce.] En Poésie, navire: encôre est-il vieux, et ne se dit-il plus que dans le marotique.
   Cependant la nef vagabonde....
   Vogue d' un cours précipité.      Rousseau.
  * Les plus forts galions et les nefs les plus belles.
      Brébeuf.
  La même nef légère et vagabonde,
    Qui voituroit le saint Oiseau sur l' onde. Ververt.
  NEF, la partie de l' Église qui est depuis le portail jusqu' au choeur. = Nef, vâse de vermeil en forme de navire. = Moulin à nef, construit sur un bateau.

NèFLE


NèFLE, s. f. NèFLIER, s. m. [1re è moy. au 1er, é fer. au 2d; la 2e est un e muet au 1er, un é aussi fer. au 2d.] Le 1er se dit d' une sorte de fruit qui n' est bon à manger que quand il est amolli par le tems, après avoir été cueuilli. le 2d est le nom de l' arbre qui porte ce fruit.

NÉGATIF


NÉGATIF, IVE, adj. NÉGATION, s. f. NÉGATIVEMENT, adv. [1re é fer. 3e lon. au 2d et au 4e, dont la 4e e muet: tîve, tîve--man; tion, dans le 3e, a le son de cion; en vers ci-on.] Ils se disent de l' action de nier. "Argument négatif; terme négatif, proposition négative. "Répondre négativement. "Toute proposition contient afirmation ou négation.
   NÉGATIVE, s. f. Proposition qui nie. "Il soutenoit l' afirmative, et je persistois dans la négative. = 2°. Refus: (st. famil.) Cet homme est fort sur la négative, il est acoutumé à refuser ce qu' on lui demande. = 3°. Particule négative. Voy. NE et PAS.

NÉGLIGEMMENT


NÉGLIGEMMENT, adv. NÉGLIGENCE, s. f. NÉGLIGENT, ENTE, adj. NÉGLIGER, v. act. [Néglijaman, jance, jan, jante, jé; 1reé fer. 3e br. au 1er, lon. aux trois suiv. é fer. au dern.] Négliger, c' est n' avoir pas soin de... Négligence, faûte de soin et d' aplication. Négligemment, avec négligence. Négligent, qui n' a pas le soin qu' il devrait avoir. "Négliger son salut, ses afaires, sa santé. "Il a négligé de me faire avertir. "Il y a en cela de la négligence de votre part; et une négligence punissable. "Agir, s' habiller négligemment. "Faut-il être si négligent, si négligente?
   Rem. 1°. Négliger l' ocasion, c' est la laisser échaper sans en profiter. = Négliger quelqu' un, c' est n' avoir pas soin de lui rendre fréquemment les devoirs de la vie civile. = Se négliger a deux sens; n' avoir pas soin de se tenir propre; et avoir moins de soin de son devoir, de son travail, etc. qu' à son ordinaire. "Cet Auteur, ce Journaliste, ce Peintre, cet Ouvrier se néglige.
   = 2°. Style négligé, qui n' est pas châtié. On dit aussi négligences de style. On les distingue des faûtes contre la pûreté et la netteté du langage. Celles-ci sont des solécismes ou des barbarismes. Les aûtres sont plutôt contre les agrémens que contre les règles. Elles consistent entre aûtres, à répéter sans nécessité une même phrâse dans la même page; à répéter dans la même phrâse les mêmes conjonctions et les mêmes adverbes. "Ne traitez point avec moi, avec ces soumissions et avec ces prières. "Quelles mesûres prendrez-vous aûtres que celles que celui que je défends à prises? "J' ai été ravi de la délicatesse des pensées de l' Auteur du discours que j' ai entendu, etc. etc. Ces trois avec de la 1re phrâse, les trois que de la 2de, et les quatre génitifs de la, des, de, du, de la troisième sont des négligences. = C' en est une aussi et bien désagréable, de répéter trop souvent le même mot sans user de synonimes. = Tout ce qui est contre l' harmonie et la mélodie du discours dans le cours et dans la chûte des phrâses, est encôre une négligence de style. = Enfin, c' en est une très-grande, de se servir, dans le genre noble et élevé, d' expressions bâsses et familières ou proverbiales. = En général, tout ce qui choque l' oreille, sans choquer les règles de la gramaire, peut être apelé négligence de style.
   3°. Négligé s' emploie substantivement, en parlant de l' état où est une femme, quand elle n' est point parée. "Elle étoit dans son négligé. "Elle afectoit un négligé plus recherché que la parûre la plus étudiée. = M. Moreau l' emploie au figuré. "L' apareil de la dignité, l' éclat de la publicité, avertissent l' âme de se roidir, et l' aident à se posséder: le négligé de la familiarité, l' ombre de la domesticité, l' invitent à se détendre, et l' acoutument à s' oublier.
   * 4°. Le Dict. de Trév. met, à la négligence, pour négligemment. "Les femmes sont vêtues à la négligence, quand elles sont à l' Église: elles se parent pour aller au bal. _ Cette locution est un barbarisme.

NÉGOCE


NÉGOCE, s. m. NÉGOCIABLE, adject. NÉGOCIANT, s. m. [1re é fer. ia dans le 2d, est de deux syll. ci-able: dans le 3e il n' en forme qu' une seule, cian. Richelet met Négotiant en ligne, et Négociant dans l' exemple.] Négoce, comerce, trafic de marchandise. Il ne se dit guère que du comerce en grôs. Le négoce, dit l' Abé Girard, regarde les afaires de banque et de marchandise; le comerce et le trafic ne regardent que celles des marchandises; avec cette diférence que le comerce se fait plus par vente et par achat, et le trafic par échanges. = On ne dit pas le négoce, mais le comerce d' un État, d' un peuple. On doit donc dire, le comerce, et non pas le négoce de la France. Acad. = Figurément, (st. famil.) Intrigue, afaire. "Il fait un vilain négoce. Il se mêle d' un dangereux négoce; de plusieurs négoces, de bien des négoces.
   NÉGOCIABLE se dit des éfets de comerce, de banque, d' agiotage, qui peuvent être négociés. "Ce billet n' est pas négociable. On ne le dit point des marchandises.
   NÉGOCIANT, celui qui fait négoce, qui négocie: grôs, riche, habile Négociant. = Négociant se dit de celui qui achète et vend en grôs: Marchand~, de celui qui vend en détail. = Quelques Auteurs ont employé adjectivement ce substantif. "Peuple négociant, Nation négociante. "La partie négociante de la Nation jugeoit que son comerce seroit chargé de lourds impots. Targe, Traduct. de Smollet. On dit comerçant.

NÉGOCIATEUR


NÉGOCIATEUR, s. m. NÉGOCIATION, s. f. NÉGOCIER, v. n. et act. [Négoci-a-teur, ci-a-cion, ci-é.] Négocier, c' est 1°. Faire négoce. "Négocier au Levant, en Espagne; en draperie, en soie, etc. Et activement, négocier des billets, des lettres de change. Il n' est actif, en ce sens, que pour ces sortes d' éfets de comerce, de banque. = 2°. traiter une afaire avec. "Négocier un Traité, une ligue, la paix entre deux Princes. _ Et par extension, négocier un mariage, une réconciliation, un acomodement. "Il se négocie quelque chose de considérable.
   NÉGOCIATEUR est celui qui négocie quelque afaire considérable auprês d' un Prince, d' un État. "Sage, habile Négociateur. = Par extension, il se dit des persones qui négocient une afaire entre des particuliers. "C' est lui que a été le négociateur de cette afaire, de ce mariage. = Négociant, n' a raport qu' au 1er sens de négocier: et Négociateur, au 2d sens; l' un ne se dit que du comerce; l' aûtre, proprement des afaires d' État, et par imitation, des afaires particulières, aûtres que celles du comerce.
   NÉGOCIATION a les deux emplois de négocier. Il se dit, et de l' action de négocier les afaires: il a été employé dans la négociation de la paix: il a été chargé de la négociation de ce mariage; et de la chôse même, qu' on traite, qu' on négocie. "C' est une négociation délicate, dificile. = En termes de comerce, on ne le dit que des billets, des lettres de change, et autres pareils éfets de comerce, de banque.

NèGRE


NèGRE, ESSE, s. m. et f. NèGRERIE, s. f. NÉGRILLON, ONE, s. m. et f. [1re è moy. aux trois prem. é fer. aux deux dern. Mouillez les ll dans ceux-ci.] On apèle Mores les Peuples de l' Afrique du côté de la Méditerranée: et Nègres, ceux qui sont du côté de l' Océan, et sur-tout, ceux qu' on transporte dans les Colonies Européennes, et qui y servent comme esclâves. "Il a dans son habitation deux cens nègres et cinquante nègresses. = Nègrerie, lieu où l' on enferme les Nègres, dont on fait comerce. = Négrillon, one, petit nègre: petite nègresse.
   On dit (st. famil.) Traiter quelqu' un comme un nègre; le traiter fort mal, le traiter comme un esclâve.

NEIGE


NEIGE, s. f. NEIGER, v. n. NEIGEUX, EûSE, adj. [Nège, nègé, né-geû, geû-ze; 1re è moy. au 1er, é fer. aux aûtres. 2e e muet au 1er, é fer. au 2d, lon. aux 2 dern. _ Pluche écrit comme on prononce, nège: le Dict. de Trév. met neige ou nège: l' Acad. ne met que le 1er. Cet i est bien inutile dans tous ces mots: on devrait le suprimer.] Pluie qui s' étant gelée en l' air, tombe en flocons blancs sur la terre. "Il tombe de la neige. "Il y avoit deux pieds de neige dans le chemin. Boire à la neige. Blanc comme neige, plus blanc que la neige. = Il se dit au figuré: la neige et les glaces de la vieillesse. La neige de ses cheveux blancs. "les antres ténébreux, les solitudes les plus profondes, la cendre, le cilice, la neige et les glaces de la vieillesse n' ont pas toujours pu garantir les Anges du désert. Neuville. "Le feu infernal, que vous cachez sous la neige de vos cheveux blancs, vous brûle encôre et vous consume avec autant d' ardeur que jamais. Id. = On dit proverbialement, des chôses, qui augmentent par succession de tems, comme des intérêts, qui s' acumulent, des bruits qui courent et grossissent d' un moment à l' aûtre, que c' est la pelote, le peloton, ou la boule de neige, que c' est une pelote de neige qui grossit; que cela grossit comme une pelote, comme une boule de neige. = On dit aussi: homme de neige, de quelqu' un qu' on veut mépriser.
   Voyez le beau Héros de neige,
   Pour avoir un tel privilège.
       Scarron.
"Un bel homme de neige; un beau Docteur de neige. Cette locution est populaire. = Et pour témoigner le peu de cas qu' on fait d' une chôse: je m' en soucie aussi peu, dit-on, que des neiges d' antan: c. à. d. de l' an passé.
   NEIGER est neutre impersonel. Il se dit de la neige qui tombe. "Il neige bien fort. "Il a neigé hier: Il y a aparence qu' il neigera demain. = Fig. (st. famil.) On dit d' un homme qui a les cheveux blancs, qu' il a neigé sur sa tête.
   NEIGEUX, chargé de neiges. Il ne se dit qu' en ces phrâses. "Tems neigeux, saison neigeûse.

NENNI


NENNI, adv. [nani] Non. Il n' est que du st. fam "Voulez-vous venir? Nenni. "C' est un homme complaisant: avec lui il n' y a point de nenni. On le dit aussi d' un marchand, chez qui on trouve tout ce qu' on demande.

NÉOLOGIE


NÉOLOGIE, s. f. NÉOLOGIQUE, adj. NÉOLOGISME, s. m. NÉOLOGUE, s. m. Ils se disent de l' invention et de l' emploi de termes nouveaux. Ces mots sont assez nouveaux eux-mêmes, parce que la chôse qu' ils expriment est nouvelle, du moins dans l' excês et dans l' abus qu' on en fait. Ils se disent ordinairement, en mauvaise part, d' une afectation vicieûse et fréquente en ce genre. Néologie est l' invention des mots nouveaux. Néologisme se dit des mots nouveaux eux-mêmes, et aussi de l' habitude d' en inventer; Néologique, de ce qui regarde le néologisme;Néologue, de celui qui fait un fréquent usage des mots nouveaux. "Un Traité de Néologie bien fait, seroit un ouvrage excellent, et qui nous manque. Acad. "Les ouvrages modernes sont presque tous remplis de néologismes. "Le néologisme est une des manies du siècle. "Les Néologues se multiplient tous les jours. "Le langage néologique, soit dans les mots, soit dans les expressions, soit dans les tours de phrâse, rend plusieurs ouvrages pénibles à lire et dificiles à entendre. = Suivant M. Linguet, l' on ne doit traiter de néologie que ce qui est absolument inutile. C' est une maxime intéressée dans sa bouche, ou sous sa plume; car il est grand et hardi néologue. "Le père de Julie, dit-il âilleurs. (J. J. Rousseau) est certainement au nombre des génies, qui ont le droit de créer des mots. Il ajoute, moi je n' en suis pas: il a tort. _ Pour créer des mots, il faut être deux, celui qui les crée, et l' usage, qui les adopte. Or, l' usage adoptera quelquefois le mot inventé ou hazardé par un sot, et proscrira les créations de l' homme de génie. Qu' on ne parle donc pas de droit sur cet article! les plus grands génies n' en sauraient avoir. Voy. MOT: Création des mots. = Mde. de Genlis peint fort bien le Néologisme. "Monsieur est beaucoup trop "merveilleux pour moi. Son esprit est si fort au dessus du mien, que je ne comprends pas plus ses longs discours, que s' il parloit allemand. Son langage est composé d' une quantité de mots, qui me sont absolument inconnus, et il place ceux que je conois déja de manière à me dérouter totalement sur leur signification."

NÉOMÉNIE


NÉOMÉNIE, s. f. [1re et 3e é fer. 4e lon.] En termes d' Astronomie, nouvelle Lune. = Chez les Romains, Fête qui se célèbrait à chaque renouvellement de Lune.

NÉOPHYTE


NÉOPHYTE, s. m. et f. [Né-ofite: 1re é fer. dern. e muet.] Celui, celle qui a quité une fausse Religion, pour embrasser la Religion Chrétiène, et qui est nouvellement baptisé. "C' est un Néophyte, une Néophyte. Les Néophytes. Voy. CATÉCHUMèNE et PROSÉLITE.

NÉPHRÉTIQUE


NÉPHRÉTIQUE, adj. [Néfrétike: 1re et 2e é fer. dern. e muet.] Colique néphrétique, est celle qui est causée par le gravier qui se détache des reins, et qui fait de grandes douleurs en pâssant par les urétères. = S. f. "Il est tourmenté de la néphrétique. "Il a eu une ataque de néphrétique. = S. m. C' est un néphrétique; il est néphrétique; il est afligé de la colique néphrétique. = On le dit aussi des remèdes propres aux maladies des reins. User de remèdes néphrétiques, ou, substantivement, de néphrétiques.

NÉPOTISME


NÉPOTISME, s. masc. Autorité que les Neveux des Papes ont eu quelquefois dans l' administration des afaires, pendant le Pontificat de leur Oncle. "C' est un grand éloge pour un Pape d' avoir été exempt de Nepotisme.

NÉRÉïDES


NÉRÉïDES, s. f. pl. Nymphes qui, selon la Fable, habitaient dans la mer.

NERF


NERF, s. m. NERVER, v. act. NERVEUX, EûSE, adj. NERVûRE, s. f. [Nêrf, nêrvé, veû, veû-ze, vû-re: 1re ê ouv. 2 é fermé au 1er, lon. aux trois aûtres.] Nerf, 1°. se dit proprement de cordons blanchâtres du corps humain, de diférente grôsseur, qui tirent leur origine du cerveau. "Les nerfs sont regardés comme les organes des sensations. = 2°. Moins proprement, on le dit des tendons des muscules. "Il s' est foulé le nerf. = 3°. On dit, figurément, que l' argent est le nerf de la guerre; et plus élégamment, d' un discours faible, d' un style languissant, qu' il est sans nerf, qu' il n' y a point de nerf; et dans le sens contraire, qu' il est plein de nerf. On le dit aussi du gouvernement, mais on dit du nerf, et non pas un nerf. * "Tant de coups d' autorité, qu' on auroit jugé anoncer un (du) nerf dans le Ministère. Anon. = 4°. Les Relieurs apèlent nerfs les cordelettes qui sont au dôs du livre, et sur lesquelles les caïers sont cousus.
   Rem. On ne prononce point l' f dans le pluriel. Souvent même, au singulier, on le suprime dans la conversation. "Un nerf de beuf.
   NERVER, c' est garnir du bois avec des nerfs que l' on colle dessus. "Nerver un batoir, les arçons d' une selle. "Batoir bien nervé.
   NERVEUX, qui a de bons nerfs, fort, vigoureux. "Le pied est la partie du corps la plus nerveûse. = Figurément, plein de force et de solidité; style, discours nerveux. = En Médecine, genre nerveux, les nerfs du corps humain, pris collectivement. "Le genre nerveux est ataqué chez lui.
   NERVûRES, nerfs. (n°. 4°.) Cette partie d' un livre qui est formée par les cordes qui servent à relier. = En Architectûre, moulûres des consoles, des arcs doubleaux et des croisées d' ogives.

NET


NET, NETTE, adj. NETTEMENT, adv. NETTETÉ, s. f. [Nèt, nète, nèteman, nèteté: 1re è moy. 2 e muet.] Net, I°. Au propre, qui est sans ordûre. "Habit net; place, vaisselle, nette. "Ce blé n' est pas net; cette eau n' est pas nette. Net, propre (synon.) La propreté ajoute à la netteté, l' idée d' un arrangement convenable à la destination. Ainsi, la netteté n' est que le premier élément de la propreté. "Des souliers sont nets, quand on les a bien décrotés; mais, quoique nets, ils ne sont pas propres, s' ils se trouvent déformés, etc. "Quoique nette et vétûe d' habits nets, une persone n' est pas propre, si elle a sa chevelûre en désordre, etc. _ Extr. des Syn. Fr. de M. l' Ab. Roubaud. = 2°. Vide. "On alait pour saisir les meubles, on trouva maison nette, ou la place nette. = Faire maison nette, chasser tous les domestiques. = 3°. Uni, poli, sans tache. "Cette femme a le teint net; diamant qui n' est pas net; glace de miroir bien nette; perle qui est d' une eau bien nette. = 4°. Distinct. "Écritûre, impression bien nette; caractère fort net. 5°. Fig. Clair, pur, aisé. "Discours net et poli; style net et facile; expression nette. = 7°. Qui est sans embârrâs, sans ambiguité. "Cela est clair et net:
   En termes clairs et nets cette lettre s' explique.
       Regn.
Réponse nette; rendre un compte net. = 7°. Liquide, quitte de dettes. "Son revenu est clair et net. "Il a dix mille livres de rente bien nettes. "Il lui reste de quite et de net cent mille écus. = 8°. Franc, loyal. "Son procédé est net: il n' y a rien à reprendre. = 9°. Figurément, st. famil. Avoir le coeur net d' une chôse; l' éclaircir, l' aprofondir. "J' en veux avoir le coeur net. = Avoir les mains nettes, n' avoir pas de rapine, d' injustice à se reprocher. "Il me semble que j' entends les voix confûses de tous les François qui crient, grâces, miséricorde au Protecteur des Pauvres, dont les mains sont si nettes de tous les présens. Or. Fun. de M. Séguier. _ Cette expression n' est pas du style noble. _ Être net d' un crime; en être inocent. St. famil. "Quelques persones le soupçonoient de n' être pas bien net de toutes les liaisons avec les inventeurs du système. Targe Trad. de Smolett. L' expression n' est pas assez noble, ce me semble, pour une Histoire.
   NET, adv. Tout d' un coup. "Cela s' est cassé net; net comme un verre. = Tout net, franchement, librement. "Je l' ai refusé tout net. = On dit aussi net sans tout. "Je lui ai parlé net. Acad. "Le Visir refuse net. Ann. Litt. = Bossuet dit trancher net, qui n' est pas de l' usage actuel. "Il n' y a rien de tel que de trancher net (d' être tranchant), cela donne un air de savant. = Au net, adv. Mettre au net, copier, transcrire. Marivaux dit avoir au net, locution, qui me parait au moins douteûse. "J' ai envie de vous doner à copier quelque chôse que je souhaiterois avoir au net.
   NETTEMENT, au propre, avec netteté. "Il faut se tenir blanchement et nettement. = Au figuré, d' une manière claire, intelligible. "Écrire, s' expliquer nettement. = Franchement et sans rien déguiser. "Je lui ai parlé nettement.
   NETTETÉ, qualité de ce qui est net. "Il aime la netteté. "La netteté d' une glace de miroir, etc. = Fig. netteté de voix, d' esprit, de style. Voy. NET, n°. 1°. et 5°.
   Rem. La netteté du sens dans le discours est une des qualités qu' il faut le plus rechercher. Souvent elle décide de l' arrangement de la phrâse; et entre deux constructions également bones selon les règles, il faut choisir celle où le sens est le plus net, et éviter sur-tout celle qui pourrait former quelque équivoque. Il est indiférent de dire: j' ai envoyé son livre à un tel, ou j' ai envoyé à un tel son livre; mais il ne serait pas indiférent de dire: j' ai envoyé à la poste les lettres que j' ai écrites, ou, j' ai envoyé les lettres, que j' ai écrites, à la poste. La seconde manière forme une équivoque ridicule. Il faut l' éviter; et préférer la première construction. = Il y a aussi de l' équivoque dans ces vers de Racine. Bajazet, Acte I, Sc. 4.
   Cruel, pouvez-vous croire
   Que je sois, moins que vous, jalouse de ma gloire.
Suivant le sens que présentent les mots, il semble qu' Atalide dit à Bajazet: pouvez-vous croire que ma gloire me touche moins qu' elle ne vous touche. Mais ce n' est pas là ce qu' Atalide entend. "Pouvez-vous croire. veut-elle dire, que je sois moins jalouse de ma gloire que vous n' êtes jaloux de la vôtre. = Les vices contre la netteté du style sont, 1°. les barbarismes, ou les mots inusités, et par là souvent inintelligibles. 2°. Le Galimathias. 3°. Les équivoques. 4°. Les parenthèses. 5°. Les mauvaises constructions, ou arrangemens~ des mots. 6°. Les longues périodes. Voy. ces mots.
   La pûreté et la netteté du style sont deux chôses diférentes. L' une regarde le choix des mots, l' autre leur arrangement. On peut écrire pûrement, sans écrire nettement; et on peut faire l' un et l' aûtre sans écrire agréablement. Aujourd' hui, on sacrifie tout à l' agrément, vrai ou prétendu: on se met peu en peine de la pûreté et de la netteté du discours. Le néologisme, les métaphores hardies ou forcées, ou même inintelligibles, une chaleur factice, un enthousiasme de comande, un style précieux ou boursouflé, et toujours plein de prétention: voilà le goût du siècle: mauvais goût, sans contredit, et dernière preûve de la décadence des lettres et de la corruption du vrai goût.

NETTOIEMENT


NETTOIEMENT, s. m. NETTOYER, v. act. [Né-toâ-man, toa-ié: 1reè moyen: dans le 1er l' e muet ne se prononce pas, et l' on prononce comme si l' on écrivait nétoiment; 3e é fer. au second. L' Ab. Regnier et Ménage voulaient qu' on prononçât, nétéié. Quelques persones l' admettent pour la conversation. C' était l' opinion de Richelet, qui dit que nettoyer n' était employé que par les Poètes.] L' action de nettoyer, de rendre net. "Le nettoiement des rûes, d' un port. Nettoyer un habit, des bottes. "Se nettoyer les dents; et non pas nettoyer ses dents. = Figurément, nettoyer la tranchée, en chasser les assiégeans. Nettoyer la mer, de corsaires; les exterminer. Nettoyer le bien, les afaires d' une maison, en aquitter les dettes. = En Peintûre, nettoyer les contours, les rendre plus purs et plus corrects. = Hors de là, il ne se dit guère au figuré. Bossuet dit que: "Le péché est nettoyé par la foi et par l' aumône. Ailleurs, il dit que: "L' aumône délivre de la mort et lave les péchés. Laver est là plus propre que nettoyer. On disait plus régulièrement, autrefois, que Dieu nettoie une âme par sa grâce; mais on se sert aujourd' hui plus volontiers de purifier. = M. Moreau a dit plus récemment et plus d' une fois: "Il faut, une fois pour toutes, simplifier et nettoyer nos idées. Je doute que cette expression figurée soit du goût de tout le monde.
   Rem. À~ la 1re et à la 2e pers. du plur. de l' imparfait de l' indicatif et du présent du subjonctif, il convient d' ajouter un i à l' y: nous nettoyions, vous nettoyiez, pour les distinguer du présent de l' indicatif, nous nettoyons, vous nettoyez. _ Au futur simple et au conditionel, l' e muet ne se prononce pas: il nettoiera, il nettoieroit: pron. nè-toâ-ra, nè-toâ-rè.

NEVEU


NEVEU, s. m. [1re e muet, 2e dout. au sing. lon. au pluriel. Neveux.] Fils du frère ou de la soeur. "C' est mon neveu. = Neveu à la mode de Bretagne. (st. famil.) Fils du cousin germain, ou de la cousine germaine. = Petit neveu, le fils du neveu. = Poétiquement, nos neveux, la postérité, ceux qui viendront après nous: jusqu' à nos derniers neveux. = * Corneille apèle Cinna un neveu de Pompée. Il était son petit-fils. On ne se servirait pas aujourd' hui de cette locution, qui est un latinisme.

NEUF


NEUF: Nom de nombre, qui suit immédiatement le nombre huit. En chifre arabe, 9; en chifre romain, IX. = L' f finale ne se prononce que quand neuf se troûve devant un nom qui commence par une voyèle ou une h muette; neuf amis, neuf hommes: alors l' f se change en v: neu-vami, neu-vome. Devant un nom, començant par une consone, cette f est muette; neuf jours, neuf coups; pron. neu jour, neu cou. Aprês le nom, ou à la fin de la phrâse, l' f a son propre son. Charles neuf, il y en a neuf.
   NEUF est quelquefois employé comme nombre d' ordre (ordinal). Louis neuf, pour Louis neuvième. = S. m. "Un neuf de chifre; un neuf de coeur, de carreau. Alors aussi l' f se prononce; tout comme quand on dit d' une femme grôsse qu' elle entre dans le neuf, dans son neuf, c. à. d. dans le neuvième mois de sa grossesse.

NEUF


NEUF, NEUVE, adj. [L' f se pron. au masc. 1re lon. au fém. 2ee muet.] Qui est fait depuis peu: maison neûve. Qui n' a pas encôre servi, ou qui ne sert depuis que peu de tems. "Habit neuf, souliers neufs, robe neûve. = Le peuple dit tout batant neuf. = Il est quelquefois relatif à des chôses de la même espèce, qui sont plus anciènes. Ainsi l' on dit à Paris le Pont-neuf, quoiqu' il ait été construit depuis plus d' un siècle et demi. = Neuf, nouveau, récent, (synon.) Ce qui n' a point servi, (ou a peu servi) est neuf: ce qui n' avait pas encôre paru est nouveau: ce qui vient d' arriver est récent. _ On dit, d' un habit, qu' il est neuf; d' une mode, qu' elle est nouvelle; d' un fait qu' il est récent. "Une pensée est neûve par le tour qu' on lui done; nouvelle, par le sens qu' elle exprime;récente par le tems de sa production. "Celui qui n' a pas encôre l' expérience et l' usage du monde est un homme neuf; celui qui ne comence que d' y entrer, ou qui est le premier de sa race, est un homme nouveau: l' on est moins touché des anciènes histoires que des récentes. GIR. Synon. = Gresset dit du Perroquet.
   À~ chaque instant de nouvelles finesses,
   Des charmes neufs varioient son débit.
En prôse on dirait de nouveaux charmes: mais il ne faut pas chicaner les Poètes, si gênés par la mesûre et par la rime. = M. L' Ab. Grosier, parlant des Tragédies de Voltaire, qui a amené sur la scène tant de Nations diférentes, dit: "Tous ces personages diversement habillés, ne finissent-ils pas par se ressembler tous? C' est cette uniformité, qu' il a tâché en vain de déguiser par la diversité des coifures et des just' au corps, qui a fait dire ingénieûsement de Mr. de Voltaire, qu' il étoit toujours nouveau, sans être jamais neuf. Voy. NOUVEAU.
   NEUF, apliqué aux persones, signifie, entrepris, embârrassé, étoné par défaut d' usage: neuf; populairement, neuf comme un fifre. "Il est neuf, il dûrera long-tems; jeu de mots ou calembourg.
   La femme neuve sur ce câs,
   Ainsi que sur mainte autre afaire,
   Crut la chôse et promit ses grands Dieux de se taire.
       La Fontaine.
"Vous a-t' elle dit au moins quelque chôse d' obligeant? Cela est si neuf. MARIN, l' Amante Ingénuë.
   NEUF, s. m. "Il s' est détaché de cette idée, pour ne doner que du neuf. COYER. Le neuf est si râre: tout a été dit. = À~ neuf, adv. "Refaire un bâtiment à neuf. = De neuf, adv. "Il a fait habiller tous ses gens de neuf.
   On dit, proverbialement, faire un corps neuf, rétablir sa santé, après avoir été bien médicamenté. Voy. BALAI.

NEUTRALEMENT


NEUTRALEMENT, adv. NEUTRALITÉ, s. f. NEUTRE, adj. [Neutraleman, lité, neûtre: 1re lon. au dern. 3e e muet au 1er.] Neûtre, est 1°. Qui ne prend point de parti entre des persones, qui ont des intérêts oposés. "Être, demeurer neûtre. = 2°. En Gramaire, dans plusieurs langues, il se dit des noms, qui ne sont ni du genre masculin, ni du genre féminin, comme Templum, Tempus en latin. _ Dans la langue Française on ne le dit que des verbes, qui n' expriment point d' action, comme exceller, languir, croître, ou, dont l' action ne passe pas hors du sujet, comme aler, venir, etc. = On conait qu' un verbe est neûtre, quand on ne peut pas y joindre quelqu' un ou quelque chôse. Ainsi l' on ne peut pas dire, dormir quelqu' un, aler, venir quelque chôse: ces verbes sont donc neûtres. Ce qui revient à dire que les verbes neûtres sont ceux, qui ne peuvent avoir un régime direct, ou autrement régir l' acusatif. = M. de Wailly n' a voulu doner ce nom qu' à ceux, qui expriment seulement l' état de la persone, comme dormir, languir, reposer, etc. Et il regarde comme actifs tous ceux, qui expriment une action, soit qu' ils aient le régime direct, ou le régime relatif, ou qu' ils n' aient point de régime. Ainsi, selon lui, aller, sortir, venir, tomber, descendre sont des verbes actifs. Cette dénomination est trop oposée aux idées comunes, pour être adoptée. Il n' est pas question de ce qu' expriment les noms des verbes physiquement, mais de ce qu' ils énoncent gramaticalement. Nous nous en sommes tenus aux idées reçûes et à l' anciène dénomination.
   REM. Ménage observe que les Poètes changeaient volontiers le neutre en actif.
   Devoit sous ta merci les rebelles ployer.
       Malherbe.
pour faire ployer.
  De son bel oeil, dont la force me pâme.
Ronsard.
pour, me fait pâmer. = L' Observateur ajoute que par ces exemples, et par plusieurs aûtres qu' il pourrait alléguer, on pourrait excuser Corneille de ce qu' il a dit, dans Le Cid: de son côté me panche, pour, me fasse pancher, dont il a été repris par Messieurs de l' Académie. = Quels qu' aient été aûtre fois les droits des Poètes sur cet article, ils n' existent plus, et l' on n' excuserait pas, aujourd' hui, l' actif employé pour le neûtre
   NEUTRALEMENT, ne se dit qu' en Gramaire, dans le 2d sens de Neûtre. "Employer un verbe neutralement. "Le verbe actif s' emploie quelquefois neutralement, comme verbe neûtre et sans régime. Voy. ACTIF.
   NEUTRALITÉ, au contraire, ne se dit que dans le 1er sens de neûtre État de celui, qui se tient, qui demeure neûtre entre deux partis. "Garder, observer la neutralité. "Demeurer dans la neutralité.

NEUVAINE


NEUVAINE, s. f. [Neuvène: 2eè moy. 3e e muet.] L' espace de neuf jours consécutifs, pendant lesquels on fait quelque dévotion, quelque prière en l' honeur d' un saint. "Faire une neuvaine à un tel saint. = Ce mot ne s' emploie point comme nom de nombre collectif: on ne dit point une neuvaine d' oeufs, comme on dit, une dixaine, une douzaine d' oeufs: il ne se dit que pour signifier un acte de dévotion, qui dûre neuf jours. = M. de Wailly dit qu' en poésie, la docte neuvaine signifie les neuf Muses. Je crois que c' est de la vieille poésie; et qu' aujourd' hui cela ne serait bon que dans le burlesque ou le marotique.

NEUVIèME


NEUVIèME, adj. NEUVIèMEMENT, adv. [Neu-viè-me, meman: 2e è moy. 3e e muet.] Neuvième, est un nombre d' ordre ou ordinal; et c' est celui qui suit immédiatement le huitième. "Le neuvième jour du mois. Dans le neuvième chapitre, ou le chapitre neuvième. = Subst. "Vous êtes le neuvième ou la neuvième: il arrivera le neuvième de ce mois. "Il est intéressé pour un neuvième dans cette afaire; il a un neuvième dans cette entreprise.
   NEUVIèMEMENT, en neuvième lieu. "Neuvièmement, je dis que, etc.

NÉYER


NÉYER, Voy. NOYER.

NEZ


NEZ, s. m. [Né, é fer. le z ne se prononce pas.] 1°. Cette partie éminente du visage, qui est entre le front et la bouche, et qui sert à l' odorat. "Grand ou petit nez. "Nez aquilin, ou, retroussé; écrasé, épaté, etc. "Il s' est cassé le nez. "Il saigne du nez. = 2°. Il se prend quelquefois pour tout le visage. "Doner sur le nez à... Mettre le nez à la fenêtre. "Regarder quelqu' un au nez, ou, sous le nez. "Il m' a ri au nez; il l' a fait à mon nez. Toutes expressions familières. = 3°. Odorat. "Il a bon nez: elle a le nez fin.
   On dit, proverbialement, avoir le nez tourné vers un endroit; avoir envie ou être sur le point d' y aller. "J' ai le nez tourné vers Paris. Sév. = Saigner du nez, se décourager. = Regarder sous le nez, morguer. = Tirer les vers du nez, c. à. d. le secret de quelqu' un. * Cette expression se troûve dans la Préface de l' Histoire d' un Concile: à peine serait-elle suportable dans une pièce comique. Wailly. = Tordre le nez à, est aussi une expression bâsse: "Tordre le nez à la Poétique d' Aristote. Id. = Avoir bon nez, prévoir les évènemens; ou, avoir une bone pensée de faire une chôse. = Mener quelqu' un par le nez, lui faire faire tout ce qu' on veut. = Avoir un pied de nez; être étoné. = Doner sur le nez, soufleter. = Faire un pied de nez; se moquer. = Doner du nez en terre, ou, se casser le nez; sucomber, échouer. = Brider le nez; tromper. "Vouloir me brider le nez, venir me bercer avec des contes à dormir debout! Mariv. = Mettre, ou fourrer son nez dans une afaire; s' en méler. "Je suis à une belle distance pour mettre mon nez dans tout cela. Sév. "Loin les gens, qui veulent mettre le nez, ou, leur nez par tout. = Avoir toujours le nez sur une chôse; y être fort apliqué. = Ne voir pas plus loin que son nez; être borné par la vûe, ou, par l' intelligence.
   Capitaine Renard alloit de compagnie
   Avec son ami Bouc des plus hauts encornés.
   Celui-ci ne voyoit pas plus loin que son nez.       La Fo.
M. de Mably dit de Voltaire: "C' est un homme, pardonez-moi cette expression, qui ne voyoit pas au bout de son nez; et ce qu' il y a de singulier, c' est qu' il le prouve. Voy. Manière d' écrire l' histoire, et Ann. Litt. 1783, n°. 2, p. 110. On dit encôre: cela parait comme le nez au visage, c. à. d. est clair et évident. = Ce n' est pas pour votre nez, ou, cela vous pâssera loin du nez: vous n' en aurez pas. = Lever le nez: Voy. LEVER. n°. 6°.

NI


NI: particule négative. On écrivait aûtrefois ny. = 1°. Cette particule doit toujours être accompagnée de la négative ne. L' Acad. critiqua autrefois ce vers du Cid.
   Elle n' ôte à pas un, ni donne d' espérance.
Il falloit, dit-elle, ni ne donne, et l' omission de ce ne, avec la transposition de pas un, qui devrait être à la fin, font que la phrâse n' est pas française. _ Corneille a fait cette faûte dans plusieurs de ses Tragédies.
   Qu' avant que je l' ordone, aucun n' entre ni sorte.
       Pertharite.
Il faut, ni ne sorte.
  Il me fait à présent la grâce
  De ne m' en dire bien ni mal.
En prôse il faudrait dire, ni bien ni mal. En vers on peut pâsser le retranchement du premier ni. = Les prosateurs sont encôre plus répréhensibles que les Poètes, quand ils emploient ni sans l' acompagner de la négative ne. "Description géographique de la Grèce assez ample, mais ni assez méthodique, ni assez lumineûse. L' Ab. de F... Il falait, mais qui n' est ni assez, etc. = 2°. Ce serait une autre faûte d' y ajouter la deuxième négative pas, et de dire: je ne veux pas ni l' un, ni l' aûtre. = 3°. Ni demande au 2d membre le même ordre, le même tour, les mêmes conjonctions que dans le premier. "De ne point se fier, ni s' enorgueillir. D' Abl. Il falait répéter le de, et dire, ni de s' ennorgueuillir. = 4°. Ni ne doit être employé que quand le sens est négatif. J' avais remarqué que Voiture et Bossuet l' avaient employé, sans raison, dans des phrâses afirmatives, ou interrogatives. "Vous ne vous serviez de l' un ni de l' aûtre que pour, etc. Voit. Malgré la particule ne la phrâse est afirmative: vous ne vous serviez que pour, etc. signifie; vous vous serviez seulement pour, etc. Il falait donc dire: vous ne vous serviez de l' un et de l' autre que pour, etc. "Qu' y a-t' il de plus beau, ni de plus saint que, etc. Il falait et de plus saint. On disait avec la négation: il n' y a rien de plus beau, ni de plus saint. Bossuet, dans la chaleur de la composition, a vu ce sens négatif, dans le que interrogatif. = Depuis, j' ai vu que M. D' Acarq. avait repris la même faûte dans Boileau, qui dit, en parlant du sonnet, qu' Apollon
   Défendit qu' un vers foible y pût jamais entrer,
   Ni qu' un mot déjà mis osât s' y remontrer.
Il fallait, et qu' un mot, etc. = 5°. On a agité la question, si l' on doit toujours mettre ni, quand la phrâse est négative. Doit-on dire, par exemple; "Il n' est point de mémoire d' un plus rude et d' un plus furieux combat, ou bien, ni d' un plus furieux combat. Vaugelas est pour la première manière, sous prétexte que le second adjectif est synonyme du premier. Mais les Observations de l' Acad. sur cet article préfèrent la seconde; et la raison qu' en done M. de Wailly, c' est que nous n' avons point dans notre langue de synonymes parfaits. Pour moi je serais de l' opinion de Vaugelas; non pas pour la raison qu' il done, qui ne me parait point de recette; mais parce que je pense que ni n' afecte que les substantifs et les verbes, et non pas les adjectifs servant d' épithètes, soit que ceux-ci soient synonymes~ ou non. "Je n' ai point entendu de plus solide et de plus brillant discours; et en mettant les adjectifs après: je n' ai point entendu de discours plus solide et plus brillant tout-à-la fois. Quand les adjectifs précèdent, ni peut être employé; mais aprês il ne ferait pas bien, à mon avis. = 6°. Ni redoublé, modifiant deux substantifs, exige que le verbe soit au pluriel. "Ce n' est ni le mérite, ni la fidélité de Mde de Valentinois, qui a fait naître la passion du Roi, ni qui l' a conservée. Il fallait, qui ont fait naître; qui l' ont conservé. Let. sur la Princesse de Clèves. = 7°. Quand ni modifie les verbes, on ne le met qu' une fois; il ne mange ni ne dort: mais, quand il afecte les noms, on doit le redoubler, il n' est ni beau, ni laid. Les Poètes retranchent le premier ni, quand il les incomode.
   Il ne faudra cesser de régner ni de vivre.
   Tu ne garde pour moi respect ni complaisance.
Dans le 1er exemple, ni afecte un infinitif, mais les infinitifs ainsi employés doivent être regardés comme des noms. On dirait donc en prôse; ni de régner, ni de vivre; ni respect, ni complaisance. = Voltaire a aussi dit, dans Ciceron: je ne veux l' un ni l' aûtre; il faut ni l' un, ni l' aûtre; et Rousseau:
   N' épargnons contre lui mensonge ni parjure.
   Aussi notre Uranie
   N' est, grâce au ciel, triste, ni rembrunie.
Il faudrait dire, du moins en prôse, ni mensonge, ni parjûre; ni triste, ni rembrunie. = 8°. Avec ni, il est bon de retrancher la prép. de, régie ordinairement par la particule négative. "Quels seront nos transports à la vûe de cet immense océan, qui ne conait ni de fonds, ni de termes, ni de rivages. P. Du Rivet. Il serait mieux de dire; qui ne conait ni fond, ni terme, ni rivage, sans de et au singulier. = 9°. Ni liant deux régimes diférens, l' un des verbes, l' aûtre des noms, offre une construction sauvage et choquante. "L' âme, émûe de quelque passion, ne pense seulement pas qu' il y ait dans son corps des esprits animaux, des muscles et des nerfs, ni à leur usage. Mallebr. Il fallait, ou ne pense pas qu' il y ait, ni quel est leur usage; ou bien, ni aux esprits animaux, ni à leur usage, etc. _ 10°. Ni se met quelque--fois à la tête de la phrâse. "Ni ils ne l' ont flaté, ni ils ne l' ont enrichi. _ Plus comunément, il se place après le verbe (je ne veux ni l' un, ni l' aûtre) quand il afecte un nom ou un infinitif: (voy. n°. 7°.) et quand il afecte les verbes mêmes, il marche devant le 2d: il ne l' aime, ni ne l' estime. _ On le met enfin entre l' auxiliaire et le participe: "Ils ne l' ont ni reçu, ni aprouvé. *Vertot le place fort mal dans la phrâse suivante: "Il ne faut jamais se trop fier, ni à ses amis, ni mépriser le moindre de ses énemis. Il fallait, ni se trop fier à, etc. ni mépriser, etc.

NIABLE


NIABLE, adj. [Nia-ble: 2e dout. 3e e muet.] Qui peut être nié: cette proposition est niable, três-niable.

NIAIS


NIAIS, AISE, adj. NIAISEMENT, adv. NIAISER, v. n. NIAISERIE, s. f. [Niè, Niè-ze, zeman; zeri-e: nié-zé: 1re è moy. et long, excepté dans le verbe, où il est fermé devant la syll. masculine, il niaisait, niaisant. Devant l' e muet, il se change en è moy. il niaise, niaisera, etc.] Niais, au propre, se dit des oiseaux qui ne sont pas encôre sortis du nid. = Au figuré, simple, qui n' a encôre aucun usage du monde. "Il est encôre tout niais. "Elle est toute niaise. _ Il se dit sur-tout de l' air, du ton, de la mine, de la contenance. = Subst. "Un franc niais; une grande niaise. Faire ou contrefaire le niais. = Niaisement, d' une manière niaise. = Niaiser, s' amuser à des chôses de rien. Le peuple le dit pour baguenauder, béer aux corneilles. "J' étois dans la salle-basse à niaiser; voilà qu' un cabriolet s' arrête à la porte, et puis je vois entrer le beau Monsieur. Th. d' Éd. = Niaiserie, caractère de celui qui est niais. "Il est d' une grande niaiserie. = Bagatelle, chôse frivole. "Ce que vous dites là est une niaiserie. "Ne nous arrêtons pas à des niaiseries.

NICHE


NICHE, s. f. NICHÉE, s. f. NICHER, v. neut. et act. NICHET, s. m. [2e e muet au 1er, é fer. au 2d et au 3e, è moyen au 4e, che, ché-e, ché, chè.] Niche est, 1°. enfoncement pratiqué dans l' épaisseur d' un mur, pour y placer une statûe. = Par extension, réduit pratiqué dans un apartement pour y mettre un lit, ou dans un jardin, pour s' y retirer en particulier. = 2°. Tour de malice ou d' espièglerie qu' on fait à quelqu' un. "Faire une niche à... "Est-il permis de faire de pareilles niches? St. famil. = Nicher, actif vient de niche; placer en quelque endroit. "Où s' est-il allé nicher? = Neutre, il dérive de nid, et ne se dit que des oiseaux. Faire son nid. "Les petits oiseaux nichent dans les arbres, dans les buissons. Figurément, se placer: "Il s' est niché dans une bonne maison. st. famil. = Nichée est un terme collectif. Tous les oiseaux d' une même couvée. = Nichée se dit des oiseaux, et couvée de la volaille. = Figurément: "Il a chassé toute la nichée; toutes les persones de mauvaise vie, rassemblées en ce lieu. St. famil. = Nichet, oeuf qu' on met dans le nid, qu' on prépâre pour que les poules âillent pondre.

NID


NID, s. m. [On ne prononce point le d.] Petit logement que se font les oiseaux, pour y pondre et y faire éclôre leurs petits, et pour les y élever. = Le Proverbe dit: à chaque oiseau son nid est beau, chacun trouve sa maison, sa demeure belle. = Petit à petit l' oiseau fait son nid; on fait sa fortune peu à peu. = Il a trouvé un bon nid; un bon établissement. = Il croit avoir trouvé la pie au nid, avoir fait quelque découverte considérable. = On était alé chez cet homme pour l' arrêter: on n' a plus trouvé que le nid. = Nid à rats, méchante petite chambre.

NIDOREUX


NIDOREUX, EûSE, adj. Terme de Médecine. Qui a une odeur et un goût comme d' oeufs couvis.

NIèCE


NIèCE, s. f. [1re è moy. 2e e muet. Autrefois on écrivait niepce.] Fille du frère ou de la soeur. "La nièce d' un tel. "Ma nièce, votre nièce. = Nièce à la mode de Bretagne; la fille du cousin germain, ou de la cousine germaine. = Petite nièce, fille du neveu ou de la nièce.

NIELLE


NIELLE, s. f. [Niè-le: 1reè moy. 2e e muet.] 1°. C' est le nom de plusieurs plantes. = 2°. Maladie des grains, dont l' éfet est que l' épi se convertit en une poussière noire. Lorsqu' il conserve encôre sa forme et sa pellicule, on l' appelle charbon ou carie.

NIELLER


NIELLER, v. act. [Nié-lé: deux é ferm.] Gâter par la nielle. "La pluie et le soleil ont niellé le blé. "Les blés sont niellés.

NIER


NIER, v. act. et neut. [Ni-é: 2eé fer. devant l' e muet, l' i est long: il nîe. Au futur, cet e muet ne se prononce pas: il niera, il nieroit; pron. nîra, nîrè.] Dire qu' une chôse n' est pas vraie. "Nier un fait: il nie le fait. = V. n. Il régit que et le subjonctif: il nîe que cela soit.
   Rem. 1°. Dans la phrâse négative, il est mieux de mettre la particule ne devant le verbe régi. Vaug. "Je ne nie pas que je ne l' aie dit, est mieux que je ne nie pas que je l' ai dit. Celui-ci est français, mais l' autre est bien meilleur. * Mallebranche, dans la même phrâse, retranche la négative à un membre et la met à l' autre. "Ils ne nient pas que la douleur soit un mal, et qu' il n' y ait de la peine dans la désunion des chôses auxquelles nous sommes unis par la Nature. = Le P. Bouchet a fait la même faûte. "Il n' est donc pas possible de nier que le Démon n' ait un véritable pouvoir sur les gentils, et que ce pouvoir cesse aussitôt qu' ils ont fait quelque démarche pour renoncer à l' Idolâtrie. _ Il falait, dans le 2d membre, ne cesse, comme il y a n' ait dans le 1er. = J. J. Rousseau retranche aussi la négative. "Je ne nie pas qu' il ait raison. "Je ne nie pas qu' il y ait de Grands Hommes qui, etc. _ Qu' il n' ait raison, et qu' il n' y ait de Grands Hommes, etc. irait mieux. = Il faut apliquer cette règle au sens interrogatif, qui a souvent le même éfet que le négatif. "Peut-on nier que cette partie du monde doive suffire à M. Simon. Boss. _ Ne doive sufire serait plus régulier. = Au contraire, quand nier est employé dans le sens afirmatif, il ne faut point de négation au verbe qu' il régit. Nier que la puissance divine ne s' étende pas à une telle production... me parait une des plus hardies témérités. Crouzas, Réflex. sur Pope. Il falait, nier qu' elles s' étende; ou bien, assurer qu' elle ne s' étend pas. _ C' est comme ceux qui disent: je vous défends de ne pas faire; au lieu de dire: je vous défends de faire. = 2°. Nier régit que et le subjonctif, quand le verbe qui est régi ne se raporte pas au sujet de la phrâse (au nominatif) de nier: je ne nie pas que vous ne soyiez fondé, etc. * "Ils ont nié que Dieu veut (veuille) le péché en tant que péché. Leibnitz. Quand il s' y raporte, on met de et l' infinitif. "Il a nié d' avoir prétendu deux voix dans le consistoire. J. J. Rouss. = 3°. Nier n' a pas le sens de refuser; et Molière n' est pas à imiter, quand il dit:
   Et je n' ai pu nier au tourment qui le tue,
   Quelques momens secrets d' une si chère vue.
On dit, dans le Dict. de Trév. que dans ce sens, il n' est ni dans le Dict. de l' Acad. ni dans aucun Auteur qu' on ait pu consulter, (ces vers de Molière avaient échapés aux recherches) qu' il parait venir du pays latin, et qu' il n' est pas du bel usage.

NIGAUD


NIGAUD, AûDE adj. et subst. NIGAUDER, v. neut. NIGAûDERIE, s. f. [Nigô, gôde, godé, gôderî-e: 2e lon. aux deux 1ers, et au 4e, dout. au 3e; la 3e e muet au 2d et au dern. é fer. au 3e.] Nigaud, sot et niais. Nigauderie, action de nigaud, niaiserie. Nigauder, faire des nigauderies. "Il est bien nigaud, elle est bien nigaûde. "C' est un nigaud, un franc; un grand nigaud; une vraie nigaûde. "Il ne fait que nigauder. "C' est une grande nigauderie.
   Rem. Nigauder se dit quelquefois dans le sens de s' amuser à des chôses de rien, pour éviter la contention d' esprit. "Après le repâs, il ne fait que nigauder.

NIPPE


NIPPE, ou NIPE, s. f. NIPPER, ou NIPER, v. act. [2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Nipes se dit, tant des habits que des meubles; et s' emploie ordinairement au pluriel. Niper, fournir de nipes. "De belles nipes. "On l' a bien nipé ou nipée en le ou en la mariant. "Il s' est bien nipé.

NIQUE


NIQUE, s. f. [Nike: 2e e muet.] Il ne se dit qu' en cette locution du style familier, faire la nique à... Mépriser; se moquer, ne pas se soucier de... Il croit que j' ai besoin de lui; mais je lui fais la nique. "Philosophe, tu fais la nique à la Fortune; mais autant en faisoit le renard aux mûres.

NITOUCHE


NITOUCHE, s. fém. Hypocrite; qui ne parait pas y toucher. "C' est une sainte nitouche: il ou elle fait la sainte nitouche. Il est familier. L' Acad. ne le met pas.

NITRE


NITRE, s. m. NITREUX, EûSE, adj. [2e e muet au 1er, lon. aux deux autres; treû, treû-ze.] Nitre est la même chôse que le salpètre: celui-ci est un mot plus vulgaire: l' autre est plus savant. Nitreux, qui tient du nitre. Terre, eau nitreûse. Acide nitreux.

NIVEAU


NIVEAU, s.m. NIVELER, v. act. NIVELEUR, s. m. NIVELLEMENT, ou NIVèLEMENT, s. m. [Nivo, 2e dout au sing. lon. au plur. niveaux: nivelé, ve-leur, ni--vèleman; 2e e muet au 2d et au 3e, è moy. au 4e. Dans le verbe l' e est muet devant la syllabe masc. nous nivelons; il nivelait, nivela, nivelant, il est moyen devant l' e muet, il nivelle ou nivèle, il nivellera, ou nivèlera:] Niveau est un instrument qui sert à faire reconaître si un plan est horisontal. "Les Maçons se servent du niveau pour dresser leurs ouvrages, les Jardiniers pour dresser et aplanir les allées, etc. "Prendre le niveau. "Dresser au niveau, ou avec le niveau. = De niveau. Au niveau, adv. Mettre de niveau; être de niveau avec; ou au niveau de, etc.
   NIVELER, mesurer avec le niveau: niveler une allée. = Niveleur, celui qui fait profession de niveler. = Nivèlement, action de niveler. "Ce nivèlement a été fait avec soin, avec exactitude.
   Rem. Depuis quelque tems on emploie beaucoup niveau au figuré. "Les mistères sont au dessus de la raison: ils pâssent sa portée, et elle ne saurait, ni les abaisser au niveau de ses regards, ni élever ses regards au niveau de leur hauteur. "Il se met au niveau de tout le monde. MARIN, Homme Aimable. "Je ne puis, dit l' envieux, atteindre à la gloire de mon rival: je vais, en le déprimant, le mettre à mon niveau. Id. Ibid. "L' âme des sujets s' élève insensiblement au niveau de celle des Rois. Thom. "Les vastes projets sont au niveau de son génie. L' Ab. Du Serre-Figon. Panég. de Ste. Thérèse. "Il étoit simple, afable, toujours de niveau avec tout le monde. Fonten. = L' Acad. aprouve cette expression, qui, au dire de Bouhours étoit nouvelle de son tems et suspecte aux habiles gens. "Il est au niveau des, ou, de niveau avec les plus grands Seigneurs. Acad.

NOBILIAIRE


NOBILIAIRE, s. m. [Nobili-ère: 4eè moy. et long.] Catalogue des maisons nobles. "Nobiliaire de Provence, etc.

NOBLE


NOBLE, adj. et subst. NOBLEMENT, adv. NOBLESSE, s. f. [2e e muet aux deux premiers, è moyen au 3e: noble, bleman, blèce.] Noble, en parlant des persones, se dit de celui qui, par le droit de sa naissance ou les lettres du Prince, est d' un rang au-dessus du tiers-état. "Noble de naissance, d' extraction. "Il est devenu noble par lettres du Prince. = Subst. "Nouveau noble. "Les nobles et le peuple, etc. = On restreint quelquefois le nom de noble à ceux qui le sont par lettres, et non de race. "Le Prince peut faire des nobles; mais le sang seul fait des Gentilshommes. = En parlant des chôses qui ont raport à la persone, illustre, distingué, relevé au-dessus des aûtres chôses de ce genre: "Air noble: style noble. "Sentimens nobles; une âme noble. "Un noble orgueuil. = Dans le corps humain, on apèle parties nobles, le coeur, le cerveau, le foie, comme absolument nécessaires à la vie.
   Rem. Noble peut et doit même quelquefois précéder le substantif. "Nobles délassemens. Rouss. "Un noble loisir. Gress. Délassemens nobles, et loisir noble ne vaudraient rien du tout: mais, d' aûtre part, noble air, noble âme, noble style choqueraient l' oreille. Nobles parties la choquerait encôre davantage, parce que parties nobles est un terme consacré, et que ces sortes de termes et d' expressions ne veulent point être dérangés dans leur construction.
   NOBLEMENT, d' une manière noble; avec noblesse. "Faire les chôses noblement. = En Gentilhomme. "Ses Ancêtres ont toujours vécu noblement. Tenir noblement une terre; la tenir en fief.
   NOBLESSE, 1°. Qualité par laquelle on est noble. "Bone, anciène noblesse. "Noblesse d' épée ou de robe. Faire preûve de noblesse, etc. = Soutenir noblesse (fig. famil.) vivre noblement. = 2°. Tout le Corps des Nobles. "Le Corps de la Noblesse. "Assemblée de la Noblesse, et non pas de Noblesse, à moins qu' on ne parle d' une assemblée particulière de Gentils--hommes. = 3°. Figurément. "Noblesse d' âme, de coeur, de sentimens. "La noblesse des pensées. "Noblesse de style, d' expression. "Il y a beaucoup de noblesse dans sa conduite: il a montré beaucoup de noblesse dans ses procédés.
   Rem. 1°. Quand on veut parler de la qualité ou de la vertu, exprimée par ce mot, il n' a point de pluriel. On dit à plusieurs, comme à un seul, la noblesse de vos Ancêtres; la noblesse de vos sentimens, et non pas les noblesses. _ Quand Fontenelle a dit, les grandes Noblesses, il voulait parler des grandes Maisons; encôre est-ce une locution de son invention, qui fait bien dans sa phrâse, et qui demande du goût, pour être bien placée. "S' il y a du fabuleux dans l' origine des grandes Noblesses, du moins il y a une sorte de fabuleux, qui n' apartient qu' à elles, et qui devient lui-même un titre. 2°. Noblesse, joint à un nom propre de Royaume, régit l' un ou l' aûtre article, selon le sens qu' il a. Quand on entend par ce mot le Corps des Nobles, il prend l' article indéfini de: La Noblesse de France, d' Italie, etc. Mais quand on entend par là les avantages, les prérogatives du pays, on met l' art. déf. de la: La noblesse de la France, de l' Italie. REGN. = 3°. Un Auteur anonyme traite noblesse comme un de ces termes collectifs qui exigent le pluriel dans le verbe qui les acompagne, quoiqu' ils soient eux-mêmes au singulier. "L' indépendance que la Noblesse s' efforçoit d' usurper à la faveur de leurs privilèges. Il falait, de ses privilèges. = L' usage n' admet point ce pluriel. = 4°. Entretenir noblesse est du style familier, et se dit au figuré, de toute autre chôse que la noblesse. "Et l' Italien, l' oublierez-vous? J' en lis toujours un peu pour entretenir noblesse. Sév.

NOCE


NOCE, s. fém. [On écrivait aûtrefois nopce, à caûse de l' étymologie latine, nupti‘.] Mariage. _ Il se dit tantôt au sing. tantôt au plur. Aller à la noce, ou aux noces. Ils ont fait de belles noces: le jour de ses noces. Toute la noce y alla, c. à. d. toute la compagnie qui s' étoit trouvée à la noce. = Ce mot fournit à quelques expressions proverbiales. "Tant qu' à des noces, abondamment. _ Comme à la noce, gaîment. "Il va à l' assaut comme à la noce. _ Arriver comme tambourin à noces, fort à propos. _ Il n' a jamais été, ou il ne s' est jamais trouvé à telles noces, ou à de pareilles noces, à telle aventûre. Cela se dit ordinairement en mauvaise part.

NOCHER


NOCHER, s. m. [Noché; 2eé fer.] Celui qui conduit le vaisseau. _ On ne le dit qu' en Poésie, pour Pilote. Sur la mer méditerranée, c' est le nom qu' on done, sur les vaisseaux marchands, au Maître du navire.

NOCTAMBULE


NOCTAMBULE, s. m. [Noktanbule.] Celui qui marche la nuit en dormant. On dit plus ordinairement somnambule.

NOCTURNE


NOCTURNE, adj. Qui arrive durant la nuit. "Vision nocturne; assemblée nocturne. = Il aime à suivre le substantif. En vers, il peut absolument le précéder.
   Quand chaque soir, le jeune anachorète,
   Avoit fixé sa nocturne retraite.
       Ververt.
Mais en prôse, cette construction est peu agréable. "Ces nocturnes expéditions prouveraient tout au plus qu' il fut dans sa jeunesse un libertin téméraire et intrépide. Anon.
   NOCTURNE, est s. m. En parlant d' une partie de l' Ofice de Matines, composée d' un certain nombre de Psaumes et de Leçons. On lui done ce nom, parce qu' on le chantoit autrefois la nuit, en latin nox.

NOEL


NOEL, s. m. [No-èl: 2eè moy. _ Ménage dit que Nouel est plus usité que Noël. On ne dit plus que celui-ci aujourd' hui.] 1°. Fête de la Nativité de Notre-Seigneur. "Les fêtes de Noël. Les trois Messes de Noël. "Noël est une des quatre grandes fêtes de l' année. = Dans cet emploi, ce mot ne prend pas d' article, et c' est un gasconisme que de dire: à la Noël, les fêtes de la Noël. DESGR. = 2°. Cantique Spirituel sur la Naissance du Sauveur. = Il est ainsi apelé parce que dans la plupart des cantiques sur ce sujet le mot de Noël est souvent employé. = Dans ce sens, il prend l' article. "Le Noël que vous venez de chanter est fort beau: un Noël: ce Noël. = On dit fig. (st. famil.) On a tant chanté, ou tant crié Noël, qu' à la fin il est venu: enfin ce qu' on désirait depuis si long-tems est arrivé.

NOEUD


NOEUD, s. m. [Neu, monos. Le d final ne se prononce jamais: l' o ne se prononce pas non plus: il n' est mis là que pour l' étymologie latine, nodus. Quelque jour, on le suprimera.] 1°. C' est l' enlâcement de quelque chôse, qui se plie, comme ruban, corde, ficelle, etc. "Noeud simple, ou, double. "Faire, ou, défaire un noeud. = Noeud coulant, qui se serre ou se desserre, sans se dénouer. = Par extension on apèle noeud un ouvrage, en relief, qui représente un noeud: noeud de perles, de diamans, de rubis. = 2°. Fig. Dificulté, ou, point essentiel d' une afaire. "Voilà le noeud de cette afaire. "Trancher le noeud de la question, de la dificulté. = 3°. Lien. "les noeuds de l' amitié, de l' himen. = 4°. Il se dit et de l' excroissance, qui vient aux parties extérieures des arbres; et d' une partie plus dûre qui s' y troûve dans le coeur; et des jointures, qui sont aux vignes, aux cannes, au fenouil, aux tuyaux de blé, et au gosier de l' Homme. "Le noeud de la gorge. Voy. GORGE.
   Rem. Anciènement, on écrivait noeu sans d. C' est l' ortographe de Malherbe et de l' Acad. dans ses Sentimens sur le Cid.

NOIR


NOIR, NOIRE, adj. NOIRâTRE, adj. NOIRAUD, RAûDE, adj. [Noar, monos. Noâ-re; noa-râtre, noa-rô, rôde: 1re lon. au 2d; 2e lon. aux 3 dern.] Noir, est 1°. Ce qui est de la couleur la plus obscûre et la plus oposée au blanc. "Drap, satin noir. "Robe noire; encre noire, qui n' est pas assez noire. = Par exagération; qui aproche de la couleur noire. "Du pain noir. "Un teint noir. "Elle a la peau noire. = 2°. Livide, meurtri: "Il est noir des coups qu' il a reçus. = 3°. obscur. "Noir cachot.
   Jamais la nuit ne fut si noire.
"Le tems est noir: une nuée noire. = 4°. Sale, crasseux, en parlant du linge et des mains. = 5°. Fig. triste, mélancolique: Noir chagrin, humeur noire. = 6°. Qui supôse beaucoup de méchanceté. "Crime bien noir: une noire trahison, un noir attentat: une malice noire. "Avoir l' âme noire. = 7°. S. m. Couleur noire. "Un beau noir. Teint en noir: chambre tendûe de noir. "Porter le noir: être habillé de noir. = Noir à noircir: noir de fumée. = Nègre. "Il a vingt noirs et trois blancs dans son Habitation.
   REM. Noir, au propre et dans le discours ordinaire, se met aprês le substantif: habir noir, robe noire; et non pas noir habit, noire robe. En vers; et au figuré, même en prôse, dans le discours soutenu, il aime à marcher devant: "Le noir limon; De Lille: les noirs soucis. Fénél. "Les noirs artifices. Rousseau.
   * N' importe, qu' englouti sous ses abîmes noirs
   Je ne reçoive pas les suprêmes devoirs.
       Brébeuf.
Noirs abîmes aurait mieux valu: mais la rime exigeait abîmes noirs, ce qui n' est pourtant pas une excûse. = Noir, se dit quelquefois des persones, pour méchant. "Je sais que j' ai des énemis: mais je ne les crois, ni aussi noirs, ni aussi dangereux que vous me les dépeignez. Th. d' Éduc. = Voir les chôses en noir: sous un aspect triste et funeste. "Je tremble, et je vois tout en noir. Ibid. = Rendre noir, difamer. On l' a rendu bien noir dans cette afaire. = On dit proverbialement, il n' est pas si diable qu' il est noir, aussi méchant qu' il le paraît.
   NOIRâTRE, se dit des chôses; qui tire sur le noir. "Teint, couleur, eau noirâtre. = Noiraud, se dit des persones; qui a le teint brun: l' Acad. ajoute et les cheveux noirs, ce qui n' entre pas nécessairement dans l' idée, que présente ce mot. "Il est un peu noiraud: elle est fort noiraude. = Subst. "C' est un noiraud, une noiraude. = L' Acad. ne le marque qu' adjectif, et ne done d' exemple que du substantif. = Elle avoit mis noiraut dans la première Édition: mais l' analogie ne s' y trouvait pas; car on dit au fém. noiraude et non pas noiraute. Dans les Éditions suivantes elle a mis Noiraud. = On dit, au pluriel, noirauds et non pas noiraux, comme écrit Le Gendre.

NOIRCEUR


NOIRCEUR, s. f. NOIRCIR, v. act. NOIRCISSûRE, s. f. [Noar-ceur, ci, ci-sûre: 3e lon. au dern.] Noirceur, qualité, par laquelle les chôses sont noires. Noircir, rendre noir. = V. n. ou réc. Devenir noir. Noircissûre, tache de noir. "La noirceur des cheveux, des sourcils. "Noircir une murâille: se noircir la barbe, les sourcils; et non pas, noircir sa barbe, ses sourcils. "Le teint noircit au soleil. "Cela s' est noirci à la fumée. "Je ne sais d' où vient cette noircissûre.
   REM. Noircissûre, ne se dit qu' au propre: noirceur et noircir se disent aussi au figuré; le 1er, de l' atrocité d' une méchante action; le 2d, dans le sens de difamer. "La noirceur de ce crime, de cet atentat. "C' est un grand péché, que de noircir la réputation, l' honeur du prochain. = Noircir, Dénigrer. (synon.) Le 1er dit quelque chôse de plus fort et de plus odieux. Ils ont les mêmes raports que difamer et décrier. _ Dénigrer, c' est décrier indignement: noircir, c' est difamer odieusement. _ Celui, qui vous dénigre, ne veut que vous nuire: celui, qui vous noircit, veut vous perdre. L' action de noircir ne tombe que sur l' inocence et la vertu: l' action de dénigrer roule sur tous les genres de réputation et de mérite. "Les savans, non-seulement se dénigrent, mais quelquefois ils se noircissent. Extr. des Syn. Fr. de M. l' Ab. Roubaud.

NOISE


NOISE, s. f. [Noâ-ze: 1re lon. 2e e muet.] Querelle, dispute. Il nÞest que du style familier. "Chercher, éviter noise, sans article. "Émouvoir, exciter une noise. Acad. "Il est l' auteur, la caûse de la noise. = Autrefois, on l' employait dans le beau style.
   Impudens boute-feux de noise et de querelle.
       Malherbe.
"Pour empêcher de nouvelles noises et de nouvelles chicanes. Bossuet. = Dès le tems de Ménage, il n' était plus du bel usage.

NOISETTE


NOISETTE, s. f. [Noa-zète: 2eè moy. 3e e muet.] Espèce de petite noix, que porte le coudrier. = En style proverbial présenter des noisettes à qui n' a pas de dents, c' est ofrir à quelqu' un des chôses, dont il n' est pas en état de se servir.

NOIX


NOIX, s. f. [No-â, monos. long.] Espèce de fruit, qui a une coque dûre et ligneûse, couverte d' une écale verte. "Écale; coquille; zeste; cuisse de noix. "Huile de noix, etc. = On le dit par extension de quelques aûtres fruits, qui ont quelque ressemblance avec la noix. "Noix de gale, d' Inde; muscade; vomique; etc. = C' est aussi le nom qu' on a doné à l' os, qui fait l' emboitûre de la cuisse avec la jambe; et à cette petite glande, qui se troûve dans une épaule de veau, proche la jointûre des deux ôs.

NOLIS


NOLIS, NOLISSEMENT, s. m. NOLISER. v. act. [Noli, liceman, lizé.] C' est la même chôse que Fret, Fréter. C' est le louage d' un vaisseau, d' une barque, etc. Les premiers de ces mots sont plus usités sur la méditerranée et les aûtres sur l' océan.

NOM


NOM, s. m. [Non.] 1°. Le terme, dont on est convenu, pour désigner une persone ou une chôse. "Le saint nom de Dieu. Louis XVI, est le nom du Prince bienfaisant qui gouverne la France. "Doner, imposer le nom ou un nom. "Déguiser son nom, changer de nom, etc. etc. = 2°. En gramaire, il se dit, dans une acception plus resserrée, des termes, qui sont susceptibles de genre et de câs. Nom substantif, ou, adjectif. Nom propre; nom comun ou apellatif. = 3°. Réputation. "Il s' est acquis, il s' est fait, il a un grand nom dans les Lettres, à la Guerre. "Il a déjà quelque nom. "Il a éternisé, immortalisé son nom.
   Au nom de, adv. De la part de. "Au nom de son maitre. En son nom, en mon nom. = Il s' emploie aussi dans les Prières. "Au nom de Dieu, je vous en suplie. "Au nom de notre anicène amitié, etc.
   Rem. 1°. Quoique Nom, signifie renomée. (n°. 3°.) Il n' en est pas tellement le synonyme qu' il puisse s' employer à sa place, et il y a beaucoup de phrâses où il ne fait pas bien, dans cette acception.
   * Vous avez tant de nom, que tous les Rois voisins
   Vous veulent, comme Orode, unir à leurs destins.
       CORN. Surena.
  * Nuit et jour un Auteur médite, écrit, corrige,
  Et dans l' espoir d' un nom travaille incessamment.
       Du Resnel.
Avoir beaucoup de nom et l' espoir d' un nom ne sont pas des expressions reçues, quoiqu' on dise, avoir un grand nom, et même avoir quelque nom. = * GRESSET dit, le lien du nom, et M. LE SUIRRE, gâgner un nom.
   Je fuis du nom le dangereux lien.
   Dois-je enfin pour gâgner un nom
   Risquer d' empoisoner ma vie.
       Le Suirre.
On critique cette dernière expression dans l' Ann. Litt. celle de Gresset ne mérite pas moins de blâme. Nom, Renom, Renomée. (Synon.) Ils vont par gradation et enchérissent l' un sur l' aûtre. Ce que le nom comence, le renom, l' avance, la renomée le consomme. "Le nom vous tire de l' obscurité; le renom vous done de l' éclat; la renomée vous courone de toute sa gloire. Extr. des Syn. Fr. de M. l' Ab. Roubaud. = 2°. On disait aûtrefois, avoir nom, pour dire, se nomer. "J' ai nom Eliacin. Racine. "Il avoit un aîné, qui avoit nom Eustache. Hénaut. On le dit encôre en plusieurs Provinces et à Paris même. Les bons Auteurs ne s' en servent plus, et il n' est plus bon que dans le style plaisant. = On dit encôre, familièrement, décliner son nom, déclarer soi-même, qui l' on est pour se faire conaître. Voy. DÉCLINER. Nomer les chôses par leur nom; leur doner, sans ménagement, les noms odieux qu' elles méritent.
   J' apelle un chat un chat, et Rolet un fripon.
       Boileau.
= Et Proverbialement; je ne lui ai jamais dit pis que son nom, je ne lui ai rien dit d' ofensant.

NOMADE


NOMADE, adj. et subst. Errant, qui n' a point d' habitation fixe. "Peuple, Nation nomades. "Un peuple de Nomades. "Les Tartares sont des peuples nomades.

NOMBRABLE


*NOMBRABLE, adj. [Nonbrable.] Mot forgé par M. Linguet. Il dit, non nombrable pour inombrable. "Ce fameux dépôt des connoissances humaines, où les Hommes les plus distingués dans les Lettres consignent leurs illustres, et non nombrables découvertes. _ L' Auteur, prenant le ton de l' ironie, a cru que nom nombrable serait plus plaisant qu' inombrable.

NOMBRE


NOMBRE, s. m. NOMBRER, v. act. NOMBREUX, EûSE, adj. [Nonbre, bré, breû, breû-ze: 1re lon. 2e e muet au 1er, é fer. au 2d, lon. aux deux derniers.] I. Nombre, se dit de plusieurs unités considérées ensemble. "Un ne fait pas nombre: deux font nombre. "Le nombre de dix, de vingt. Nombre pair, ou impair, etc. = On divise les noms de nombre, en absolus, ou cardinaux, un, deux, trois, quatre, etc. en ordinaux ou d' ordre; premier, second, troisième, etc. en collectifs; dixaine, douzaine, centaine, etc. en distributifs, le tiers, le quart, etc. en augmentatifs; le double, le triple, etc. Voy. Absolu, Cardinal, Ordinal. = De ces cinq sortes de noms de nombre, les trois derniers sont toujours substantifs. Les deux aûtres sont d' eux-mêmes adjectifs: mais il y a diverses ocasions, où ils sont employés substantivement: on dit: un deux, un trois, un quatre, etc. Le premier, le second, etc. La première, la seconde, pour la première ou la seconde classe, ou, Chambre, du Parlement. On dit aussi avoir un cinquième, un dixième dans une afaire, etc. = Les nombres absolus ou cardinaux se mettent quelquefois à la place des ordinaux. Ainsi l' on dit, Charles six, Louis seize, pour Charles sixième, Louis seizième; le dix, le vingt du mois pour, le dixième, le vingtième.
   Rem. En additionant les noms de nombre absolus, faut-il se servir du verbe faire ou du verbe être? Faut-il dire, par exemple, cinq et quatre font neuf ou sont neuf. M. Brossette décide que la première manière est la seule bone: Mr. de Saint Marc dit au contraire, que la seconde est aussi bien selon l' usage, et peut-être mieux selon la règle. Le premier loûe Boileau d' avoir changé sont en font: l' aûtre assûre que rien n' était moins nécessaire que ce changement. L' usage est partagé là dessus comme l' opinion.
   II. NOMBRE, signifie aussi, quantité, multitude. En ce sens, il régit d' aûtres noms au génitif avec l' article indéfini, de: "Un grand nombre de soldats. Sur quoi, il est à remarquer. 1°. Que les noms collectifs ne peuvent être ainsi régis, qu' autant qu' ils peuvent se diviser par un, deux, trois, etc. On dit un grand nombre de royaumes; parce qu' on peut dire, un royaume, deux, trois royaumes: mais on ne doit pas dire, un grand nombre de troupes; un grand nombre de cavalerie; parce qu' on ne dit pas, dans cette acception, une troupe, deux troupes; une cavalerie, deux cavaleries, etc. Il faut se servir alors de l' adjectif nombreux. "Des troupes nombreûses; une nombreûse cavalerie. _ De bons Auteurs fournissent des exemples contraires à cette observation. Je ne crois pas pourtant qu' ils doivent être imités en cela. "Un nombre infini de peuple. VERTOT. Je voudrais dire, de Plébéïens. "Ce fut en présence des Princes, des Prélats et d' un nombre infini de peuple qu' il fit cet excellent discours. Marsolier. Je dirais, et d' un nombre infini de persones de tout rang, ou de toute condition. "Il n' y a point de secte, qui par son nombre, par sa durée, etc. méritât mieux d' être prédite. Boss. On ne dit pas plus le nombre d' une secte, que le nombre d' une armée, d' une ville. On doit dire, le nombre des sectateurs, des combatans, des habitans. "C' est le nombre du peuple et l' abondance des alimens, qui fait la vraie force et la vraie richesse du Royaume. Télém. Je crois qu' il faut aussi, en cet endroit, le nombre des sujets. = 2°. Nombre, quoiqu' au singulier, exige le pluriel du verbe: "Un petit nombre s' échapèrent et se sauvèrent dans les marais. J. J. Rousseau. Tacite. "Le grand nombre n' envisageoient que leur propre intérêt. Rollin. = 3°. Nombre s' emploie quelquefois sans article. "Il est, ou, il y a nombre de persones. "Nombre de parens et Instituteurs. Anon. Il falait et d' Instituteurs. "Il a nombre d' amis: nous étions nombre de gens. _ Mais je ne crois pas qu' on dise: il en est nombre, comme dit l' Ab. Coyer. "S' il en est nombre, qui marchent encôre. En, pronom, suplée pour de; mais pas toujours. = On dit aussi, avoir nombre ou grand nombre (sans article) de, pour, avoir un grand nombre de. "Le propriétaire, qui a nombre de vignes. Pluche. Là, nombre peut être regardé comme un adverbe de quantité, comme beaucoup, par exemple; et il a le même régime. "J' ai vu nombre de sots, qui ne connoissoient point d' autre mérite dans le monde que celui d' être né noble, ou dans un rang distingué. Mariv.
   Il n' est ma foi rien tel que la richesse,
   Pour avoir grand nombre d' amis.
       L' Ab. Reyre.
= 3°. Un grand nombre ne modifie pas les adjectifs. * "La Traduction d' Horace de M. Dacier n' est guères estimable que par les Remarques, qui l' acompagnent: parmi un grand nombre de curieûses et d' instructives, on en trouve plusieurs d' inutiles et de difuses. _ Dans cette phrâse, plusieurs est régulièrement placé, parce qu' il est régi par en, le supléant et le représentant de remarques; mais les adjectifs curieûses et instructives ne sont pas régis par en, et sont mal régis par un grand nombre. Pour rendre la phrâses régulière, il aurait falu dire: il y en a un grand nombre de curieuses, etc. mais il y en a aussi plusieurs d' inutiles, etc. = 4°. Au nombre, ou, du nombre de, expressions adverbiales. "Il fut mis au nombre, ou, il était du nombre des Avocats, qu' on avait choisis. Mais les pronoms relatifs ou possessifs ne font pas bien dans cette expression. "* Il en était du nombre; on choisit des Avocats, dont il fut du nombre. "Non seulement par l' espérance de revivre dans ses enfans, mais encôre par celle d' avoir en leur nombre le Désiré des Nations. Bossuet. Le pronom leur ne fait pas mieux dans cette phrâse que dont et en dans les précédentes; c' est une nouvelle preûve qu' ils ne peuvent pas toujours remplacer la prép. de. = De qui, desquels peuvent être admis dans cette expression, parce que cette prép. de y est exprimée. Le pronom ce n' y fait pas mal non plus. "On choisit quelques Avocats, au nombre de qui ou desquels il se trouva. "Il fut de ce nombre. = 5°. Faire nombre, se dit aussi sans article. "Il n' est pas d' une grande utilité, mais il fait nombre. _ Bossuet met devant nombre l' article indéfini (la prép. de.) Les Sociniens ne font point de nombre dans le monde L' article de est de trop. On pourrait peut-être dire que l' Auteur l' a mis à cause de la négative point. Mais on dit fort bien: ne lui donez point place parmi les bons Auteurs; vous ne lui rendez pas justice; vous n' avez pas raison, etc. et non pas, ne lui donez pas de place; vous ne lui rendez pas de justice; vous n' avez pas de raison, etc. Il faut donc dire aussi: ils ne font point nombre, et non pas de nombre. = 6°. Le même Auteur (Bossuet) dit âilleurs: "Benjamin, petit en nombre, y demeure mélé avec eux. On pourrait donc dire, ce peuple est grand en nombre, médiocre en nombre, moindre en nombre que l' aûtre. Tout cela est contre l' usage; on dit peu nombreux, fort nombreux, moins nombreux, etc. = 7°. Sans nombre, adv. "Il y a des faûtes sans nombre: il y a une grande quantité de faûtes.
   III. NOMBRE, en parlant du style. Arrangement mélodieux des paroles dans les vers, ou dans la prôse. "Il y du nombre dans ces vers, dans cette période.
   NOMBRER, compter; suputer combien il y a d' unités dans un nombre. "On ne saurait nombrer les désordres et les malheurs que caûsent les guerres civiles. Il est plus usité dans le moral que dans le physique. Pour les sommes, on dit plutôt compter ou suputer.
   NOMBREUX, qui est en grand nombre. "Peuple nombreux; assemblée nombreûse. = Harmonieux. (n°. III.) "Vers nombreux, période nombreûse.

NOMBRIL


NOMBRIL, s. m. [Nonbri: on ne pron. point l' l finale.] Cette partie, qui est au milieu du ventre. "Lier le nombril aux enfans nouveaux-nés.

NOMENCLATEUR


NOMENCLATEUR, s. m. NOMENCLATûRE, s. f. [Nomankla-teur, tûre: 2e lon. 4e lon. au 2d.] Nomenclateur, chez les Romains, était celui, qui nomait les citoyens à ceux, qui avaient intérêt de les conaitre. "Les nomenclateurs étaient des esclaves, qui faisaient leur étude des noms des citoyens. = Parmi nous, celui, qui s' aplique à la nomenclatûre, c. à. d. proprement à la conaissance des noms des plantes. C' est un terme de botanique, qu' on dit, par extension d' autres sciences et sur-tout de la Gramaire.

NOMIE


NOMIE, s. f. Règle, Loi. Il ne se dit pas tout seul; mais il sert à former d' autres noms; Astronomie, Physionomie, Économie, etc.

NOMINALES


NOMINALES, adj. f. pl. "Les Patrons et Hauts-Justiciers ont le droit des prières nominales, c. à. d. d' être només aux prières du Prône.

NOMINATAIRE


NOMINATAIRE, s. m. NOMINATEUR, s. m. [Nominatère, nomina-teur: 4e è moy. et long au 1er.] Le 2d, se dit de celui qui nome, ou, qui a droit de nomer à un bénéfice; Le 1er, de celui qui a été nomé.

NOMINATIF


NOMINATIF, s. m. Le sujet de la phrâse; le nom ou le pronom auquel se raporte l' action ou l' état exprimé par le verbe. Sujet a raport à la phrâse et nominatif au verbe. On dit, le sujet de la phrâse et le nominatif du verbe. Quand je dis: Nous devons aimer Dieu de tout notre coeur. Nous est le sujet de cette phrâse et le nominatif du verbe devons. = I. Le nominatif doit comunément précéder le verbe: mais on s' en dispense, 1°. Dans le discours narratif. "Sur cela parut le Prince, pour le Prince parut. 2°. Après le pronom que suivi d' un verbe: les lettres que m' aporta mon frère est aussi bien que s' il y avait, que mon frère m' aporta. Voy. plus bâs, n°. 8°. 3°. Dans les phrâses interrogatives les pronoms nominatifs se mettent aussi aprês le verbe. "Que dis-je? que fais-tu? que veut-il? Voy. plus bâs, n°. 7°. 4°. Après ainsi, le verbe précéde élégamment le nominatif. "Ainsi devoient disparoître et s' éfacer peu à peu les restes de la première institution. Boss. "Ainsi parla ce sage Prince, etc. Cette transposition ne ferait pourtant pas bien avec toute sorte de verbes. = Un Auteur moderne fait aussi cette transposition aprês plus redoublé. "Plus les houpes sont déliées et serrées, plus augmente la délicatesse du tact. Du Plaisir. L' Usage n' admet pas cette construction. = Elle est mieux placée aprês là, adverbe: "Là avoient droit d' être jugés tous les Magistrats immédiats. Moreau; aprês alors: "Alors commençoit donc cette lutte terrible de la puissance armée contre la liberté, qui ne l' étoit pas. Id.; aprês tel, començant la phrâse. "Tel étoit son avis. = 5°. Les pronoms personels nominatifs suivent le verbe, quand la phrâse comence par ainsi, au moins, à peine, en vain, peut-être: "Il est apliqué aux devoirs de son état: aussi est-il estimé de tout le monde: "Au moins devez-vous en doner la moitié: "À~ peine daigna-t' il nous honorer d' un regard. "En vain me priez-vous de ce que l' honeur me défend de faire: "Peut-être vous écrirai-je de Paris. "Peut-être sera-ce demain. = 6°. Après un subjonctif, qui marque un souhait, ou, qui est mis pour quand même, le verbe précède le nominatif:
   Puissent vos jours sereins ignorer la tristesse!
Est mieux que de dire: que vos jours sereins puissent, etc.
   J' ai pour la vanité des mépris furieux;
   Fut-elle dans l' esprit des Dieux.
Fut-elle; c. à. d. quand même elle seroit. = 7°. Dans les phrâses interrogatives, le verbe précède le pronom nominatif.
   Peut-on des cieux voir la magnificence,
   Et s' endurcir à ne pas croire en Dieu?
"Pouvez-vous soutenir si hardiment une pareille faûsseté? _ Mais, quand ce pronom est précédé d' un substantif, qui désigne la même chôse; ce substantif nominatif se place ordinairement devant le verbe: "L' homme aura-t' il toujours plus de soin d' orner son corps que de former son esprit et son coeur? _ Depuis quelque tems, on met le pronom devant et le substantif nominatif aprês: "Aura-t' il toujours tant de soin d' orner un corps mortel, l' Homme, dont l' âme est immortelle? = 8°. Le nominatif se met élégamment aprês le verbe, quand il doit être suivi de plusieurs mots, qui en dépendent. "Nous écoutons avec docilité les conseils que nous, donent ceux qui savent flater nos passions. La R. F. Cette remarque est de M. de Wailli, et l' exemple qu' il cite la justifie. Mais il me semble que c' est moins à cause des mots qui dépendent du nominatif qu' à cause du pronom relatif que, qui le précède, que ce nominatif se met aprês le verbe. Car on dit fort bien, par exemple: "Nous devons écouter, avec docilité, les conseils que nous donent nos amis, quoiqu' il n' y ait aucun mot après le nominatif amis. Il en est de même des autres relatifs, comme dont, où etc. "Les égards dont nous préviènent nos parens: le lieu où se vend cette denrée, etc. = L' exemple suivant est mieux choisi, pour justifier la remarque de M. de Wailli. "Là coulent des ruisseaux qui distribuent par-tout une eau claire. Cette phrâse, et aûtres semblables, seraient insuportables, si le nominatif y était placé devant le verbe. Voy. VERBE, n°. 2°. = 9°. Dans un discours animé, pour doner de la vivacité au style, on met aussi le nominatif aprês le verbe. "Déja, pour l' honeur de la France, étoit entré dans l' administration des afaires, un homme plus grand par son esprit... que par ses dignités. Fléchier. = L' oreille et le goût doivent guider l' Écrivain dans cette construction.
   II. Aûtrefois les Poètes, dans les verbes passifs, plaçaient le nominatif entre le verbe auxiliaire être et le participe.
   Sur qui sera d' abord sa vengeance exercée?
       Esther.
  Quand sera le voïle arraché? etc.
Aujourd' hui nos Poètes n' ôsent plus employer ces transpositions, qui cependant ne peuvent que faire un bon éfet... Il serait à souhaiter que, du moins en ce qui regarde l' arrangement des mots, notre Poésie fût atentive à maintenir ses privilèges. Elle en a perdu quelques-uns depuis moins d' un siècle, puisqu' autrefois on se permettait l' inversion du participe, non-seulement avec l' auxiliaire être, mais encôre avec l' auxiliaire avoir.
   O Dieu! dont les bontés, de nos larmes touchées,
   Ont, aux vaines fureurs, les armes arrachées.
Pour dire, ont arraché les armes. Cette inversion était d' une grande comodité pour la rime, parce qu' elle rend le participe déclinable. L' Historien de l' Académie (Pellisson) nous aprend qu' elle ne censura nullement cette transposition dans l' examen qu' elle fit des Stances de Malherbe, qui commencent par les deux vers qu' on vient de citer. D' Olivet.
   III. On répète quelquefois le nominatif, pour doner plus de nombre à la phrâse, ou pour la rendre plus claire. "Les honeurs du triomphe lui furent acordés; honeurs dont persone n' avait encôre joui avant lui. "Le moment de son trépas arrivé; moment heureux pour lui et funeste pour nous. Wailly. = On peut dire en ces ocasions, que ce nominatif est employé la seconde fois en quelque sorte adjectivement.
   IV. Plusieurs nominatifs d' un même verbe demandent que le verbe soit au pluriel: "Lui et nous sommes d' acord. Au reste, le verbe, qui a ainsi deux ou plusieurs nominatifs doit s' acorder avec la pers. la plus noble. Or, la 1re est censée plus noble que la seconde, et celle-ci plus que la troisième. Ainsi l' on dit: vous et moi sommes d' acord, et non pas êtes d' acord: vous et lui savez la chôse, et non pas savent, etc. _ De plus, la persone qui parle se nomme toujours la dernière en Français, et on nome toujours la première celle à qui l' on parle. "Vous et moi, et non pas moi et vous; vous et lui, et non pas lui et vous, etc. = 1°. Si plusieurs nominatifs d' un même verbe sont liés par une autre conjonction que et, le verbe doit être mis plutôt au singulier qu' au pluriel. "Gassendi, aussi bien que Descartes, a réformé la Philosophie: a réformé est mieux que ont réformé. = 2°. S' il y a plusieurs nominatifs au singulier, de même persone, liés par ou, on met l' adjectif, le pronom et le verbe au singulier. "La crainte ou l' impuissance les empêcha de remuer. Bouh. On met le pluriel, quand les nominatifs sont de diférentes persones: "Ou vous ou moi nous irons. Acad. Wailli. = 3°. Quand ni répété lie deux nominatifs, ou il n' y a qu' un des deux qui reçoive l' action, et alors on met le verbe au singulier: ce ne sera ni M. le Duc, ni M. le Comte, qui sera nomé Ambassadeur, et non pas, qui seront només; ou les deux substantifs nominatifs font ou reçoivent en même tems l' action, et alors il faut le pluriel. "Ni la douceur, ni la force n' y peuvent rien. Acad. Wailli. = 4°. Si les nominatifs, liés par une conjonction, sont aprês le verbe, il peut être, ce semble, mis indiféremment au singulier ou au plur. "Le Prince, que demandoit également le Sénat et le Peuple, ou que demandoient. = 5°. Si un des nominatifs est au pluriel, le verbe doit toujours y être. "Le Prince, autant que les Peuples aspirent à la paix. = 6°. Après l' un et l' aûtre, et ni l' un ni l' aûtre, Th. Corneille pensait que le singulier étoit préférable: l' un et l' aûtre le veut, ni l' un ni l' aûtre ne prétend. L' Ab. Girard et M. de Wailli aiment mieux le pluriel, veulent, prétendent. VAUGELAS était du sentiment qu' on mettait indiféremment le singul. ou le plur. = On peut apliquer à ni l' un ni l' aûtre la distinction établie ci-dessus (n°. 3°.) Pour l' un et l' autre, ou il précède, et alors le singulier peut aller. "L' un et l' aûtre me l' a promis; ou il est après le verbe, et alors le pluriel est indispensable: "Ils ont pu l' un et l' aûtre se tromper; mais ils ne se sont trompés ni l' un ni l' autre. Cet usage est fondé en raison; car l' un et l' aûtre, et ni l' un ni l' aûtre ne peuvent être après le verbe sans être précédés de ils, elles, vous, nous, etc. qui sont au pluriel. = 7°. Si le dernier nominatif est précédé de mais ou de tout, le verbe sera du même nombre que ce nominatif. "Non seulement ses richesses, mais aussi son repôs fut sacrifié. "Mes biens, mes avantages et tout mon repôs fut sacrifié, et non pas furent. Buf. M. de Wailly pense que si au lieu de mais on mettait et, on devrait mettre le pluriel. "Toutes ses richesses et tout son repos furent sacrifiés. Le P. Bufier est d' un aûtre sentiment, comme on le voit par le 2d exemple. = Quand tout est employé substantivement aprês une énumération, il est encore plus nécessaire de mettre le verbe au singulier. M. de Vailli reprend le Père Berruyer d' avoir dit: les reptiles, les oiseaux, les bêtes de la campagne, les animaux domestiques, tout ce qui respiroit sur la terre et dans les airs périrent sans exception. il fallait, périt. _ Rien a le même usage. "Jeux, conversations, spectacles, rien ne la tira de sa solitude. Fléchier.
   V. On ne doit point changer de persones (servant de nominatif) dans une~ même phrâse. "Une des chôses que je comprends le moins, c' est la licence qu' on se done de censurer dans les autres les mêmes défauts où nous tombons nous-mêmes. L' Auteur (M. de Bellegarde) ayant employé on dans le premier membre, devait l' employer aussi dans le second, et dire: où l' on tombe soi-même; ou bien, mettre nous dans les deux membres: la licence que nous nous donons, etc. Les défauts où nous tombons, etc.
   VI. Une faûte qu' on fait quelquefois sans s' en apercevoir, c' est d' employer le verbe sans nominatif, comme: "En quoi Ignace réussit le plus, fut de réformer les moeurs des Éclésiastiques. Fut est ici sans nominatif: En quoi ne peut pas l' être. Il faut: la chôse en quoi fut, etc. ou bien, en quoi il réussit, ce fut, etc.~ Wailly. = 1°. Mais plusieurs nominatifs sans verbe, font quelque--fois une beauté, quoique contraires en aparence aux règles de la Gramaire. Dans Andromaque, Hermione dit à sa Confidente, en parlant de Pyrrhus.
   Ma famille vengée, et les Grecs dans la joie,
   Nos vaisseaux tout chargés des dépouilles de Troie.
   Les exploits de son père effacés par les siens;
   Ses feux, que je croyois plus ardens que les miens:
   Mon coeur, toi-même enfin de ma gloire éblouie,
   Avant qu' il me trahit, vous m' avez tous trahie.
Une construction exacte n' aurait pas cette beauté. Ce style est celui de la passion, et la passion ne consulte pas la syntaxe. L. Racine. = Mde. de Sévigné, écrivant à sa fille, après le départ de celle-ci, lui dit: "Ne blâmez point, mon enfant, ce que je sentis en rentrant chez moi. Quelle diférence! Quelle solitude! Quelle tristesse! Votre chambre, votre cabinet, votre portrait; ne plus trouver cette aimable persone! M. de Grignan comprend bien ce que je veux dire, et ce que je sentis. _ Voilà encôre des nominatifs sans verbes: mais la vîve éloquence se met au-dessus des règles et de l' usage. = Le P. De Neuville fournit un aûtre exemple de plusieurs phrâses de suite où le sujet principal n' a point de verbe qui s' y raporte. "Vous vous autorisez de certaines situations délicates, où l' on se trouve quelquefois dans le monde, partagé entre Dieu et César, entre la conscience et la fortune, entre ce qu' on doit et ce qu' on aime. Mais la mère des Machabées, conduite à l' autel, pour y renoncer à son Dieu, ou sacrifier ses enfans; mais Joseph, qui ne peut se refuser au crime, sans pâsser pour criminel; mais Moïse, placé entre les délices de l' Égipte et les oprobres d' Israël; mais Susanne, dans la nécessité de vivre coupable ou de périr inoncente: vous trouvez-vous dans des conjonctûres plus critiques? _ Pour parler régulièrement, il aurait falu dire: Joseph, Moïse, Susanne, etc. ne se trouvèrent-ils pas dans des conjonctûres aussi critiques? Mais le tour qu' à employé Neuville, quoique irrégulier, est préférable, parce qu' il est plus vif et plus éloquent. _ Ce grand Orateur dit encôre dans son sermon pour la Fête de Tous les Sains: "Je dis des Saints, qui sont Saints pour avoir rempli les devoirs de leur condition dans le monde. Des amis perfides; des sujets rebelles; des maîtres durs et hautains; des pères indolens et dissipateurs; des enfans capricieux et indociles; des Magistrats foibles et inapliqués; des génies inquiets et turbulens, des âmes molles et énemies du travail. Ah! vous le voyez, ce n' est point pour des noms, si justement flétris dans le monde, pour des noms funestes à la paix et au bonheur du monde que l' encens fume dans nos sanctuaires. = Citons encôre une fois Mde de Sévigné. "En un moment, j' ai changé d' avis... Ainsi, ma Fille, coffres qu' on raporte; mulets qu' on dételle; filles et laquais qui se sèchent, pour avoir seulement traversé la cour, et messager, qu' on vous envoie. = 2°. Dans les constructions ordinaires même, on emploie des nominatifs sans verbe. _ Avec tout: "Capitaines, Pilotes, tout le monde conclut que cet air pernicieux régnoit continuellement dans ces mers. Hist. des Voy. "Atention, promptitude, sécurité, tout a été le fruit de cette institution. Necker. Devant chacun: "Centurions et soldats, chacun murmuroit, etc. Révol. Rom. _ Devant voilà: "Liaisons mondaines; amitiés trop naturelles; complaisances molles et faciles, etc. "Voilà ce qui, dans tous les tems a perdu les âmes, d' âilleurs les plus droites, etc. Neuville. _ Devant cela: "Humeur trop délicate et trop sensible. Une inatention, une faûte légère, une parole peu mesurée, une bagatelle, un rien: Cela sufit pour faire une blessûre profonde, qui ne se fermera point. Id. _ Aprês de là: "De là les clameurs dont retentit le Bârreau; les invectives; les plaintes; le bruit, le tumulte qui troublent le repôs, l' union des familles. Id. _ On sous-entend le verbe: de là naissent, etc. _ Aprês combien: "Combien d' hommes adroits à contrefaire la probité... Combien de pêcheurs, fameux par l' excès de leurs égaremens... Combien de vertus simulées, etc. Id. _ Avec point: "Point d' homme assez instruit pour savoir tout: point d' homme assez naïf, pour ne dissimuler rien: point d' esprit, si pénétrant, qu' il n' y ait encôre des mystères qu' il ne perce point: point de coeur si ouvert qu' il ne recèle encôre dans ses profondeurs des détours où le jour n' entre point. Id. On sous-entend, il n' y a. _ Avec nul, le nominatif s' emploie aussi sans verbe: "Nul homme, quelque entêté qu' il soit de son mérite, qui n' aimât mieux être entièrement ignoré, que d' être parfaitement conu. Id. On sous-entend aussi, il n' y a. "On sait en quel état étoit alors cette ville... Nul repôs, nulle espérance de paix et de tranquillité: la république renversée et presque anéantie; les Nations barbâres déchaînées contre elle: l' empire Romain en proie à ses énemis. Saci. = 3°. Les substantifs, employés adjectivement, s' emploient aussi sans verbe. M. Saci dit de Pline le Jeune: "De retour à Rome, il reprit ses afaire, ses emplois; Juge, quand les lois l' y engageoient, Avocat, quand l' intérêt public, le besoin de ses amis, ou l' honeur le demandoient. = 4°. Il y a encôre des nominatifs, qui paraissent sans verbe: ce sont des mots de la phrâse précédente, qu' on répète dans la phrâse suivante; mais ils tiènent au régime de la phrâse qui précède: "Les distinctions de gloire et d' honeur vous quitent: elles pâssent à mes saints: d' autres distinctions vous sont réservées. Distinctions, prééminences de gloire et d' honeur pour les vertus les plus humiliées; distinctions, prééminences d' oprobre et d' ignominie pour cet orgueil, qui fut l' auteur de leurs humiliations. Neuville, Jugement Univ. = 5°. Enfin, c' est encôre un tour d' éloquence d' employer plusieurs nominatifs avec un seul verbe, placé au premier membre de la période. "Tout s' empoisone entre les mains de cette funeste passion (la jalousie) la piété la plus avérée n' est plus qu' une hypocrisie mieux conduite; la valeur la plus éclatante, une pure ostentation; la réputation la mieux établie, une erreur publique; le zèle pour la Patrie, un art de se faire valoir et de se rendre nécessaire, etc. Massillon. _ Le verbe est, sert pour tous ces nominatifs. Si on le répétait à chaque membre de la phrâse, le style en deviendrait~ lourd et languissant.
   VII. Quand un nominatif de la 3e persone est à la tête de la phrâse, et que le verbe en est fort éloigné, plusieurs mettent le pronom personel il ou elle devant ce verbe, qui se trouve alors avoir deux nominatifs. C' est une faûte qu' on ne pardone pas même aux Poètes. On l' a reprise dans Boileau.
   Qui sait bien ce que c' est qu' un prodigue, un avare,
   Un honête homme, un fat, un jaloux, un bizarre,
   Sur une scène heureûse il peut les étaler.
       Art Poét.
Et Satire X.
  Encore, est-ce beaucoup, si ce guide imposteur,
  Par les chemins fleuris d' un charmant quiétisme,
  Tout-à-coup l' amenant au vrai molinosisme,
  Il ne lui fait bientôt, etc.
Molière a fait la même faûte:
  Iris charme mon âme;
  Et qui pour elle aura le moindre brin de flâme,
  Il s' en repentira.
   La faûte est plus grossière, quand le verbe n' est pas éloigné de son nominatif. "Votre frère le cadet, il m' a dit. Cette faûte est comune dans les Provinces méridionales. Le peuple y fait pis; car il met il après un nominatif féminin: votre soeur l' ainée il m' a envoyé ici. etc.
   VIII. Il y a dans nos Poètes Français, des exemples de phrâses isolées, composées de nominatifs, qui ne se raportent à rien. Boil. dans le Lutrin, dit de Girot:
   La porte dans le Choeur à sa garde commise,
   Valet souple au logis, fier huissier à l' Eglise.
Pour que la phrâse fût construire régulièrement, il faudrait dire: "Valet souple au logis, fier huissier à l' Église; il gardoit la porte du Choeur. Alors on peut mettre il après un substantif, qui est au nominatif, parce que le véritable sujet de la phrâse est il, et que valet et huissier, quoique substantifs, sont employés en cet endroit adjectivement. = Crébillon emploie le même tour.
   Fils de Deucalion, petit-fils de Minos,
   Vos vertus ont passé celles de ce Héros.
Fils et petit-fils, dans cette phrâse, ne régissent rien, et n' ont raport à rien. = Voltaire, dans Brutus, fournit un aûtre exemple, mais sous un tour diférent, d' un nominatif en l' air, et que rien ne soutient.
   C' est agir en tyrans, nous qui les punissons.
Pour parler exactement, il faudrait dire: nous agirions en tyrans, nous qui les punissons; mais le tour employé par le Poète, quoique irrégulier; est plus fort et plus énergique, et je me garderais bien de le blâmer. = Ces nominatifs isolés sont selon l' usage dans les exclamations. Malheur imprévu! Sort déplorable! etc.

NOMINATION


NOMINATION, s. f. [Nomina-cion, en vers, ci-on.] 1°. Action par laquelle on nome à quelque charge, à quelque bénéfice. "Avoir la nomination de... Pourvoir ou être pourvu sur la nomination de etc. = 2°. Droit de nomer. "Le Roi a la nomination de tous les bénéfices consistoriaux. "Ce bénéfice est à la nomination d' un tel Patron. = 3°. Avec les pronoms possessifs, il a le sens passif, et se dit de celui qui est nomé. "Depuis sa nomination à ce bénéfice, il est tout changé à mon égard.

NOMMÉMENT


NOMMÉMENT, ou NOMÉMENT, adv. [Noméman: 2e é fer.] Spécialement. "On accuse de ce crime plusieurs persones, et, nomément, tels et tels

NOMMER


NOMMER, ou NOMER, v. act. 1°. Doner, imposer un nom. = L' Ab. Girard trouve entre apeler et nomer cette diférence, qu' on nome pour distinguer dans le discours, et qu' on apelle pour faire venir dans le besoin. "Le Seigneur apela tous les animaux, et les noma devant Adam pour l' instruire de leurs noms: "Il ne faut pas toujours nomer les chôses par leur nom, ni apeler toute sorte de gens à son secours. Synon. _ Cette distinction est três-juste, et il est bon de l' observer. Cependant avec le pronom personel, on dit plutôt s' apeler que se nomer, quoiqu' on puisse dire aussi celui-ci. "Comment s' apelle-t-il? Quel est son nom? Comment vous apelez-vous? Je m' apelle comme je m' apelle.. "Des deux célèbres Rousseaux, le Poète s' apelait ou se nomait Jean- Baptiste, et le Philosophe Jean-Jaques. = Nomer et apeler régissent les noms sans article. Rousseau dit dans son Ode à la Fortune:
   Le peuple, dans ton moindre ouvrage,
   Admirant la prospérité,
   Te nomme grandeur de courage,
   Valeur, prudence, fermeté.
Le Poète aurait pu dire aussi t' apelle; mais te nomme était plus propre, plus coulant et plus poétique. _ Louis a été nomé le Père du Peuple. Là l' article est nécessaire, parce qu' il fait partie du nom.
   2°. Nomer, choisir quelqu' un pour une charge, un emploi. Il a pour second régime le datif. "Nomer à un bénéfice un indigne.
   À~ point nommé, adv. Au tems qu' il faut. "Vous venez à point nomé. = À~ jour nomé, au jour, dont on était convenu. "Il se trouva au rendez-vous à jour nomé.

NOMPAREIL


NOMPAREIL, EILLE, adj. [Nonpa-rèil, mouillez l' l final: nonparè-glie: 2e è moy. mouillez les 2 ll. _ Il semble qu' on devrait écrire nonpareil, mais suivant le génie de la Langue française, l' n devant le p se change en m.] Sans pareil, sans égal. Du tems de Malherbe, on disait plus souvent nompareille que sans pareille. Du tems de Ménage, on disait plus souvent sans pareille que nompareille. Aujourd' hui on ne dit guère ni l' un ni l' aûtre; et ils sont tous deux du vieux style. "Le nompareil St. Augustin, dit S. Fr. de Sales. = L' Acad. met nompareil sans remarque. "Un mérite nompareil: une vertu nompareille: sa grâce nompareille. = S. f. Il se dit d' un petit ruban, d' une petite dragée, d' une petite lettre, qui est entre le petit texte et la Sédanoise ou la Parisienne.

NON


NON, particule négative. "Le voulez-vous? Non. "Il ne dit jamais non: dites, oui ou non. Je gage que non. = S. m. "Dites un oui, ou, un non. "Il m' a répondu un non bien sec.
   1°. En répondant, on dit ordinairement non tout seul, en y ajoutant pourtant le titre d' honeur dû à la persone, à qui l' on répond. Non, Monsieur, non Madame. Mais dans le discours familier et quand on veut nier plus fortement, on peut dire, non pas. "Non pas, Madame, non pas, le rivage est changé aussi. Fonten. On dit aussi, oh! non. "Il dona en présence des Magistrats (de Genève) le désaveu le plus formel de sa Pucelle: il promit de ne rien écrire contre la Religion, ni contre l' État. A-t' il tenu parole? oh! non. Gr. Hom. Vengés. = 2°. Non se met quelquefois à la tête de la phrâse et dans les grands mouvemens de l' éloquence il se redouble. "Non, le vice ne peut rendre heureux l' homme, qui s' y livre. "Ne croyez pas, ô Crétois, que je méprise les Hommes. Non, non, je sais combien il est grand de travailler à les rendre bons et heureux. Télém. = 3°. Massillon met souvent non à la tête des phrâses afirmatives. "Non, Sire, le trône, où vous êtes assis, a autour de lui autant de remparts, qui le défendent contre la volupté, que d' atraits, qui l' y engagent. "Non, Sire, la piété véritable élève l' esprit, ennoblit le coeur, raffermit le courage, etc. _ Il me semble que oui irait mieux avec le sens afirmatif. = 4°. Dans le style familier, on emploie quelquefois non sans nécessité.
   Certes, Monsieur Tartufe, à bien prendre la chose
   N' est pas un homme, non, qui se mouche du pié.
       Molière.
= 5°. Dans le cours de la phrâse, non s' emploie quelquefois tout seul, quelquefois avec pas, jamais avec point. "Ils ont soutenu cette doctrine, non par de doctes écrits, mais par de sanglantes batâilles. Bossuet. On pourrait dire aussi non pas par de doctes~ écrits, etc. Mais non tout seul vaut mieux dans des ocasions pareilles. "Elle croyoit aussi que je l' aimois beaucoup, non sans se plaindre pourtant de je ne sais quelle indolence. Mariv. "Je le tiens non d' elle-même, mais de sa confidente. "Je le lui dirai, non comme parent, mais comme ami. = Avec les adverbes et les adjectifs, on met non pas quand il y a quelque comparaison. "Il écrit non pas supérieurement, mais agréablement. "Il a un style non pas brillant, mais pur et correct. = Pour les purs adjectifs, on met quelquefois non tout seul. "Tous les gens non intéressés; non préocupés; des acheteurs non solvables; des témoins non-recevables.
   Le Père, vieux routier, non des plus complaisans.
       L' Ab. Reyre.
= 6°. * Anciènement, on disait non, pour ne pas: "Le Roi Jean défendait de non doner pour Dieu à gens puissans de (qui peuvent) gâgner leur vie; et de non les héberger.
   Non que, et non pas que régissent le subjonctif: le 1er est le plus usité. "Non que, ou non pas que je veuille, que je prétende, etc. "Ils consacrent leurs talens et leur philosophie à détruire et à avilir tout ce qu' il y a de sacré parmi les Hommes. Non qu' au fond ils haïssent ni la vertu, ni nos dogmes; c' est de l' opinion publique qu' ils sont énemis, et pour les ramener aux piés des autels, il suffiroit de les réléguer parmi les Athées. J. J. Rouss. = Remarquez qu' après non que on ne doit point mettre une seconde négative, quand le sens est d' âilleurs afirmatif. "La Religion Patriarcale, qu' on apelle aussi la Loi de Natûre, non qu' elle n' ajoutât rien à la Loi Naturelle, mais pour la distinguer de la Loi Écrite. L' Ab. Du Voisin. Il falait, non qu' elle ajoutât rien, etc. Peut-être l' Auteur a mis cette seconde négative à caûse de rien, mais elle n' était pas nécessaire, même à ce titre, et non que sufisait. Là rien signifie quoi que ce soit. Non qu' elle ajoutât quoi que ce soit à la Loi Naturelle, etc. = Mais, quand le sens est négatif, la particule ne est nécessaire. "La Poésie Latine peint les objets bien aûtrement que ne peut faire notre Langue vulgaire. Non que la versification française n' ait ses grâces et ses charmes; mais il faut avouer qu' elle n' aproche pas de la versification des anciens Romains, non plus que de celle des Grecs, qui lui a servi de modèle. L' Ab. des Fontaines.
   Non plus, adv. Il se dit ou tout seul: "vous ne l' aimez pas, ni moi non plus; ou comme adverbe de comparaison. "Il ne lui plait pas non plus qu' à moi. * Mais il ne régit pas les verbes. "Il n' en fut non plus averti que s' il n' y avait pas été intéressé. "Ses sens n' agissoient non plus que s' il en eût été entièrement privé. Vie de S. P. d' Alc. Il est vieux, en ce sens, du moins pour le beau style. On devrait le rajeunir. L' Acad. en done un exemple, sans dire à quel style il apartient. "On n' en parle non plus que s' il n' avoit jamais été. = Non seulement. Voy. SEULEMENT.
   NON, entre dans la composition de quelques mots, et suit le genre des noms auxquels il est joint. Non-jouïssance, Non-valeur sont du genre féminin. Non-prix, et Non-usage, du genre masculin.

NONAGÉNAIRE


NONAGÉNAIRE, adj. [Nonagénère, 3e é fer. 4e è moy. et long.] Il se dit d' une persone, qui a quatre-vingt-dix-ans: "Il est nonagénaire: femme nonagénaire.

NONAIN


NONAIN, NONE, s. f. [L' Acad. les met avec 2 n.] Religieûse. On n' emploie ces mots qu' en plaisantant.
   Tel fut l' adieu d' une Nonain poupine.
       Ververt.
  Desir de fille est un feu, qui dévôre:
  Desir de None est cent fois pis encôre. Ibid.

NONANTE


*NONANTE, NONANTIèME, adj. Quatre-vingt-dix. Quatre-vingt-dixième. _ Nonante, ne se dit plus que dans cette expression, quart de nonante, quart de cercle de 90 degrés. Il est étonant qu' il y ait encôre des Auteurs (comme p. ex. M. l' Ab. Bullet) qui disent nonante et septante.

NONCE


NONCE, s. m. Il ne se dit que des Ambassadeurs du Pape, et des Députés des Provinces aux Diètes de Pologne.

NONCHALAMMENT


NONCHALAMMENT, adv. NONCHALANCE, s. f. NONCHALANT, ANTE, adj. [Richelet écrit Nonchalanment, mais mal, puisqu' on prononce nonchalaman.] Négligemment. Négligence. Négligent. "Agir nonchalamment. "Il manque toutes les bones afaires par sa nonchalance. "Il est bien nonchalant: c' est une femme nonchalante: elle est d' une humeur nonchalante.
   REM. Vaugelas dit que Nonchalamment est vieux, mais depuis qu' il a fait cette observation, on l' a rajeuni et il est fort usité. = Suivant Bouhours, il se dit en quelques endroits avec plus de grâce que négligemment. "Il étoit couché nonchalamment. = Il faut que ces trois mots ne fussent pas anciens dans la Langue, puisque Mr Andry observe comme une chôse digne de remarque qu' on peut s' en servir sans scrupule, et que La Touche avertit que l' Acad. les aproûve. L' Observation de M. Andry parait contradictoire avec celle de Vaugelas, du moins quant à l' adverbe que celui-ci traite de vieux.

NONCIATûRE


NONCIATûRE, s. f. L' emploi, la charge de Nonce. Il fut nomé à la Nonciatûre de France.

NONE


NONE, s. f. NONES, s. f. pl. Le 1er se dit de la 4e des petites heures de l' Ofice Divin; le 2d était chez les Romains le cinquième jour de certains mois et le septième de certains aûtres.

NON-JOUïSSANCE


NON-JOUïSSANCE, s. f. Terme de Pratique. Privation de jouïssance.

NONNAIN


NONNAIN, NONNE. Voy. NONAIN.

NONOBSTANT


NONOBSTANT, prép. Malgré; sans avoir égard à... Il se place toujours aprês le le nom, qu' il régit. Aûtrefois, on le mettait quelquefois aprês. "Cela nonobstant, pour nonobstant cela. * M. Du Pan dit, ce nonobstant; les Marchands et les Praticiens disent nonobstant ce. = * en Bourgogne et dans d' autres Provinces on prononce nonostan, on doit prononcer le b.

NON-PLUS-ULTRA


NON-PLUS-ULTRA, s. m. Le terme qu' on ne saurait pâsser. "C' est le non-plus-ultra de sa science. = Ce sont termes latins, qui ont pâssé, en français, dans le st. familier.

NON-SENS


*NON-SENS, s. m. Déraison (Anglicisme.) Opéra-comiques Italiens, dont les paroles sont à-peu-près le comble du non-sens et du ridicule. L' Ab. de Fontenai. L' Auteur a imprimé ce mot en italique. "Quel débordement de non-sens dans tout ce long détail sur la Henriade. Linguet.

NON-VALEUR


NON-VALEUR, s. f. Manque de valeur. Il se dit d' une terre, qui ne raporte pas ce qu' elle devrait raporter; et des impositions qu' on ne peut lever.

NON-USAGE


NON-USAGE, s. m. Cessation d' usage. "Les lois s' abolissent souvent par le non-usage. On dit plus volontiers aujourd' hui désuétude.

NOPCE


NOPCE, Voy. NOCE.

NORD


NORD, s. m. Septentrion. "Les Pays, les peuples du Nord. "Le vent du Nord, et non pas de Nord. "Maison exposé au Nord. = Nord-est, la partie du monde, qui est entre le septentrion et le levant. Nord-ouest, (les Marins prononcent et écrivent Nor-ouêt) celle, qui est entre le Nord et le couchant.

NORMAND


NORMAND, ANDE, adj. et subst. Qui est de la Province de Normandie. = On dit, proverbialement, répondre en Normand, avec plus de finesse que de vérité. Cette expression proverbiale est le fruit d' une prévention populaire.
   Ne soyez à la Cour, si vous voulez y plaire,
   Ni fade adulateur, ni parleur trop sincère,
   Et tâchez quelquefois de répondre en Normand.
       La Fontaine.

NOTA


NOTA. Terme emprunté du latin, qui signifie, remarquez.

NOTABLE


NOTABLE, adj. et subst. NOTABLEMENT, adv. [2e dout. au 1er, 3e e muet: en, dans le 2d, a le son d' an.] Notable, remarquable, considérable. "Parole, Arrêt, somme notable. = En parlant des persones, il ne se dit adjectivement que dans cette phrâse. "Un notable bourgeois. Hors de là il est s. m. pl. "Les Notables d' une Province, d' une ville, etc. Les principaux et les plus considérables de etc. "Assemblée de Notables. M. le Comte de M... dit quelque part: il y va de la perpétuité de deux familles notables. _ Là cet adjectif est aussi impropre que le subst. perpétuité.
   NOTABLEMENT, grandement, extrêmement. "Il est notablement lésé ou avantagé dans cette afaire. "Il a perdu notablement.

NOTAIRE


NOTAIRE, s. m. NOTARIAT, s. m. NOTARIÉ, adj. m. [Notère, taria, ri-é: 2e è moy. et long au 1er.] Notaire, est un oficier public, qui reçoit et qui pâsse les contrats et autres actes volontaires. Notariat, charge, fonction de Notaire. _ Acte notarié~, pâssé devant Notaire. = On dit, en style proverbial, de la parole d' un Homme d' honeur, que cela est aussi sûr que si tous les Notaires y avaient pâssé.

NOTAMMENT


NOTAMMENT, adv. [Notaman.] Spécialement, nomément. "Il a cité plusieurs Pères de l' Église, notamment S. Augustin. = Vaugelas voulait qu' on dit plutôt nommément mais Chapelain a fort bien remarqué que ces deux mots ne sont pas synonymes, l' un correspondant au nominatim et l' aûtre au pr‘sertim des Latins. Il me parait à moi que nomémemt vaut mieux en parlant des persones, et notamment en parlant des chôses. _ Th. Corneille dit que ni l' un ni l' aûtre n' est du beau style, et qu' il faut dire plutôt principalement, particulièrement, sur tout; mais quand on parle de citations, d' acusation, ces derniers adverbes ne sont pas fort propres. _ Notamment, est rélégué au Palais. Le Rich. Port. le met sans remarque. L' Acad. cite des phrâses de Pratique, et dit que ce mot n' a guère d' usage que dans ces sortes de phrâses.

NOTE


NOTE, s. f. NOTER, v. act. NOTEUR, s. m. [2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Note, est 1°. Remarque, Observation, Réflexion. (Synon.) Les notes disent quelque chôse de court et de précis; les remarques anoncent un choix et une distinction. Les Observations désignent quelque chôse de critique et de recherché. Les Réflexions expriment quelque chôse d' ajouté aux pensées de l' Auteur. "Le changement des moeurs et des usages font que la plûpart des Auteurs ont besoin de notes. Il y aurait peut être d' aussi bones remarques à faire sur les Modernes que sur les Anciens. Les Observations historiques qu' on a faites, rendent l' Antiquité plus connuë. Les Réflexions ne servent souvent qu' à faire perdre de vûe la première pensée. GIR. Synon. Suivant M. l' Ab. Roubaud, les notes servent proprement à éclaircir ou expliquer un texte; les remarques à relever, ou dans un ouvrage, ou dans un sujet, ce qui mérite particulièrement de l' atention; les observations à découvrir des chôses nouvelles; les considérations à déveloper les diférens raports d' un objet; les réflexions à creuser les idées, et à tirer de nouvelles pensées du fond des chôses. "Les notes doivent être claires, courtes, précises; les remarques doivent être nouvelles, utiles, critiques; les observations doivent être lumineuses, curieuses, savantes, etc. Extr. des Nouv. Syn. François. = 2°. Marque. Note d' infamie, ou infamante, ou, absolument, note. = 3°. Caractère de Musique. "Il conait toutes les notes: il chante sur la note. = En style proverbial changer de note, de façon de parler ou d' agir. On dit aussi chanter sur une autre note.
   NOTER, a les trois significations de Note. _ Remarquer: "J' ai noté ce passage dans mon livre. = Marquer en mal. Noter d' infamie. "Il est déjà noté: c' est un homme noté, qui a mauvaise réputation. Livre noté, censuré. = Noter un air, un chant: l' exprimer sur le papier par des notes de Musique. = Noteur, n' a que ce dernier sens. Copiste de Musique. "Le Noteur de l' Opéra.

NOTICE


NOTICE, s. f. Extrait raisoné d' un Livre. On le dit sur-tout des Manuscrits. = C' est aussi le titre de quelques livres, et en ce sens, il signifie description géographique. "La Notice de l' Empire; La Notice des Gaules.

NOTIFICATION


NOTIFICATION, s. f. NOTIFIER, v. act. [Notifika-cion, notifié.] Notifier, c' est faire savoir dans les formes reçues. Notification, est l' acte par lequel on notifie. "On leur a notifié cet acte: on leur en a fait la notification.

NOTION


NOTION, s. f. NOTOIRE, adj. NOTOIREMENT, adv. NOTORIÉTÉ, s. f. [No-cion, toâ-re, toâ-reman, tori-été: 2e lon. au 2d et au 3e, dont la 3e e muet: 3e et 4e é fer. au dern.] Notion, est l' idée, la conaissance qu' on a d' une chôse. "Notion claire et distincte, ou faible, confûse, imparfaite. = Notoire, qui est manifeste. Notoirement, manifestement. Notoriété, évidence d' une chôse de fait généralement reconûe. "Le fait est notoire. "Il est notoirement vrai ou faux: il est de toute notoriété. "Cela est de notoriété publique. "Il est de notoriété que nos jeunes gens ne sont que des pendules, où les femmes marquent les heures; celle du jeu, du spectacle, de la promenade, des grands et des petits soupés.
   Rem. Il y a une notoriété de droit et une notoriété de fait. Ordinairement la première est plus certaine que la seconde: mais celle-ci peut quelquefois l' être plus que celle là. En examinant les gradations de ces quatre adjectifs, notoire, public, juridique, constant, on peut trouver qu' ils enchérissent l' un sur l' autre. Une insolvabilité publique, par exemple, est plus notoire: une insolvabilité juridique est plus que notoire, plus que publique. Une insolvabilité constante est plus certaine que celle qui est notoire, que celle qui est publique, que celle qui est juridique, parce que celles-ci peuvent être faussement constatées: tel homme est juridiquement, publiquement, notoirement insolvable, qui a mis ses biens à l' abri de la poursuite de ses créanciers. = On peut douter d' un fait notoire: il est permis de ne pas ajouter foi à une chôse, qui court dans le public: on ne peut ordinairement se refuser à la certitude d' un fait juridique: mais ce qui est véritablement constant tient à la certitude morale. Extr. d' un Mém. de M. Jaubert, Avocat au Parlement de Provence.

NOTRE


NOTRE, pron. possessif plur. de la 1re persone. [l' o est douteux; car il est bref, si notre précède le substantif: voilà notre maison, (alors il est possessif absolu) et il est long, quand notre suit l' article: c' est le nôtre, voilà la nôtre: donez-nous les nôtres (alors il est possessif relatif, et l' on doit mettre un acc. circ. sur l' ô.) Il fait au pluriel nos, dans le 1er emploi; nos biens, nos maisons, nos frères, nos soeurs; et dans le 2d nôtres: ce sont les nôtres.] Th. Corneille a fort bien remarqué qu' on prononce notre, votre, sans presque faire sentir l' r, quand ils sont devant les substantifs; note dessein, note résolution. Et le P. Bufier observe que c' est sur--tout devant les substantifs, qui comencent par une consone, qu' on prononce ainsi. La Monn. Mais quand nôtre et vôtre prènent l' article: c' est le nôtre, le vôtre, on prononce l' r.
   Rem. 1°. Notre et votre, ainsi que les aûtres pronoms possessifs, signifient quelque--fois non ce qui nous apartient, mais ce qui nous intéresse. "Que dites-vous de notre nouvel Académicien? "Astarbé vous défend de découvrir au Roi quel est votre étranger. Télém. "Laisse Calypso inconsolable, couverte de honte, désespérée avec ton orgueilleuse Eucharis. Ibid. "Notre France, Notre grande Reine. Masc. = Les Panégyristes disaient autrefois cent fois dans un discours, nôtre Saint, nôtre Hérôs; mon Hérôs; mon Saint. À~ force d' avoir été répété, cela est pâssé de mode, et l' on regarde aujourd' hui cette expression comme pédantesque. = Chez les Religieux et Religieûses, chez lesquels les airs et le ton du monde n' ont point pénétré, on dit, notre chambre, notre habit, etc. Les Bourgeois disent, notre quartier, les gens du bon ton, mon quartier. Les domestiques disent notre maître, et les gens du peuple, notre père, notre mère.
   Vous êtes factotum de Monsieur notre Maître.
       Destouches.
"Telle étoit notre maîtresse, etc. Mariv. "Afin que je l' écrive à notre père. ID. = Serez-vous des nôtres; de notre partie. "Les nôtres ont bien combatu, c. à. d. ceux de notre nation, de notre parti. = 2°. Les Italiens associent le pronom démonstratif avec les pronoms possessifs; ils disent questo mio fratello. (ce mien frère.) Anciènement on le disait en français de même. "Ofrir à N. S. cette conversation nôtre. S. F. de Sales. _ Dans les Provinces méridionales on dit encôre: "Que dites-vous de ce nôtre oncle, qui, etc. Ah! voyez cette ma Tante, ce qu' elle a dit là, etc.

NOVATEUR


NOVATEUR, s. m. Celui, qui innove. Long-tems on ne l' a dit qu' en matière de Religion. "Les Novateurs sont dangereux. Depuis le comencement du siècle on a comencé à l' employer pour les matières profanes. "Dérangé, signifie désorienté suivant les Novateurs. L. T. "Qui peut douter (quoiqu' en disent quelques modernes Novateurs) qu' il n' existe un art pour toutes les formes du langage. Querlon.

NOûE


NOûE, s. f. [1re lon. 2ee muet.] 1°. Tuile faite en canal pour l' égoût des eaux: "Les noûes d' une lucarne. = 2°. Terre grâsse et humide, qui est une espèce de pré, servant à la pâtûre des bestiaux.

NOVEMBRE


NOVEMBRE, s. m. [Novanbre: 2e lon. 3e e muet.] L' onzième mois de l' année.

NOUEMENT


NOUEMENT, s. m. NOUER, v. act. NOUET, s. m. NOUEUX, EûSE, adj. [Noû-man, nou-é, nou-è; nou-eû, eû-ze: 1re lon. au 1er; 2eé fer. au 2d, è moy. au 3e, lon. aux deux dern.] Nouer, c' est lier en faisant un noeud. "Nouer un ruban, des jarretières. = Fig. Lier: nouer amitié. Nouer une partie. = Se nouer, en parlant des arbres; pâsser de fleur en fruit. "Les poires, les pommes comencent à se nouer. "Les abricots ne sont pas encôre noués. = Il se dit aussi neutralement: "Les fruits comencent dejà à nouer. = Noué, ée, adj. "Cet enfant est noué; rachitique. "Cet homme est tout noué de goutte, l' humeur de la goutte s' est fixée dans les jointûres. = Pièce de Théâtre bien ou mal nouée; dont le noeud est bien ou mal fait.
   NOUEMENT, action de nouer. Il n' est d' usage qu' en cette phrâse populaire, nouement d' aiguillette, prétendu maléfice.
   NOUET a aussi un usage borné. Il ne se dit que d' un noeud fait avec un linge, dans lequel on a mis quelque drogue, pour la faire tremper ou bouillir. "Un nouet de fines herbes dans une sausse. "Un nouet de rhubarbe, de séné.
   NOUEUX, qui a des noeuds. Il ne se dit que du bois. "Bâton noueux: "Une puissante et noueuse massue. Vaug.

NOUGAT


NOUGAT, s. m. [En Provence on dit Nogat en français, et nougat en provençal] Gâteau fait d' amandes au caramel.

NOVICE


NOVICE, s. m. NOVICIAT, s. m. Ils se disent proprement d' une persone qui a pris nouvellement l' habit de Religion pour s' éprouver pendant un certain tems, avant que de faire profession. "Il ou elle est encôre novice, il ou elle est encôre au noviciat. "Elle n' a que six mois de noviciat. = Au figuré, aprenti; encôre nouveau et peu exercé. "Il est encôre fort novice dans son métier. "Une main, une plume novice. "Il faut être bien novice au métier de la guerre, pour doner dans une embuscade si grossière. "Il a fait un rude noviciat dans sa première campagne. = Ferveur de novice, c' est, figurément, (style famil.) l' ardeur qu' inspire la nouveauté. "Il a une ferveur de novice pour toutes les petites pratiques de cour. La Bruy.

NOVISSIMÉ


NOVISSIMÉ, adv. Mot Italien, naturalisé en France, pour le style famil. Tout récemment. "Cela est arrivé novissimé.

NOURRAIN


NOURRAIN, subst. masc. [Noû-rein: 1re long. r forte.] Petit poisson qu' on met dans un étang pour le peupler. Il est synonyme d' alevin.

NOURRICE


NOURRICE, s. f. NOURRICIER, s. m. et adj. NOURRIÇON ou NOURRISSON, s. m. [Le second est le plus usité. Pluche écrit Nourice, nourir, avec une seule r, et Nourissier avec deux s, au lieu du c. M. de Bougainville, dans l' Anti-Lucrèce, met 2 r et 2 s: Nourrissier. Cette ortographe n' est pas comune.] Nourrice, femme qui alaite un enfant qui n' est pas le sien. Nourricier, le mari de la Nourrice. Nourrisson, enfant qui est en nourrice. "C' est sa nourrice; sa mère nourrice; son nourricier; son père nourricier. "C' est une bone nourrice: elle ne manquera pas de nourrissons.
   Nourrice est beau au figuré.
   Cette auguste cité, souveraine du Monde,
   Mère des conquérans, nourrice des héros.
       Bréb.
On dit qu'~ un enfant a été changé en nourrice, pour dire que chez la Nourrice, il a été mis à la place du véritable enfant qu' on lui avait confié. De là l' expression proverbiale: il a été changé en nourrice; Ses moeurs ne répondent pas à sa naissance: il n' a pas été changé en nourrice; il ressemble à son père pour la figûre et pour le caractère. = On dit, d' une Province, qu' elle est la nourrice d' une Ville, d' un Royaume, lorsqu' elle lui fournit des denrées pour sa subsistance. "L' Égypte, la Sicile étoient les nourrices de Rome. _ Batre sa nourrice; être ingrat envers son bienfaiteur. (St. fig. famil.) "Voilà les obligations que nous avons à Descartes. Reconoissons-les, de peur qu' on ne nous acuse de battre notre nourrice. Gr. Hom. Veng.
   Nourricier, au figuré, se dit de celui qui fait d' abondantes aumônes. "C' est le père nourricier des Pauvres. = Il s' emploie adjectivement, apliqué aux chôses. Le suc nourricier, dont les plantes se nourrissent. On le dit aussi de la partie des alimens qui nourrissent les animaux. Voy. Nourrissant
   Nourrisson, en style poétique, élève. Les Poètes sont apelés les nourrissons des Mûses. Et Fénélon nome Télémaque, le jeune nourrisson de Minerve.

NOURRIR


NOURRIR, verb. act. NOURRISSANT, ANTE, adj. NOURRITûRE, s. f. [Nour-ri, r forte, ri-san, sante, nou-ritûre: 3e. lon. aux trois dern.] Nourrir, 1°. en parlant des chôses, servir d' aliment. "Quels sont les alimens les plus propres à nourrir l' homme? = V. n. "Le pain nourrit beaucoup. "Il y a des alimens qui nourrissent trop. = 2°. En parlant des plantes, leur fournir des sucs pour la végétation. "La bone terre nourrit les plante. = 3°. Se nourrir, prendre de la nourritûre. Il régit la prép. de: "L' homme se nourrit de pain, de viandes, de fruits, de légumes; ou il s' emploie sans régime: "Cet homme se nourrit bien; cet arbre n' a pas de quoi se nourrir. = 4°. Entretenir d' alimens. "Les enfans sont obligés de nourrir leurs pères et leurs mères dans le besoin. = 5°. En parlant des femmes, doner à teter à un enfant. "Elle a nourri tous ses enfans. = 6°. Figurément, élever, instruire. Il ne se dit pas seul et sans régime. "Il faut avoir soin de nourrir les enfans dans des sentimens de piété et d' honeur. = On disait aûtrefois, il a été bien nourri, mal nourri, pour, bien ou mal élevé. = 6°. En parlant des chôses, former, façoner l' esprit: "Les bones lectûres nourrissent l' esprit. "Se nourrir de la parole de Dieu; de la lectûre des bons livres.
   NOURRI, IE, adj. Homme bien nourri, grôs et grâs. _ Blé, grain bien nourri, bien rempli. _ Style nourri, plein, riche, abondant. = Lettre bien nourrie, dont les traits sont bien formés; qui n' est pas bien nourrie, qui est plus déliée qu' il ne faut.
   Rem. Nourrir s' emploie élégamment au figuré. "Il (d' Aguesseau) cherche par tout de quoi nourrir ce feu inconu (du génie) qui le dévore. Thomas. "Il nourrit ce peuple farouche dans l' esprit de tout entreprendre par la force. Boss. = Être nourri, au figuré, mène souvent à sa suite la prép. dans: "Il a été nourri dans la chicane. _ Les Poètes substituent, quand cela les acomode, la prép. à.
   Moi, nourri dans la guerre aux horreurs du carnage.
       Athalie.
= Se nourrir s' emploie aussi au figuré: "Ils ne se nourrissent que d' idées tristes. Volt. "On ne s' étonne pas que s' étant nourri de Romans dans son enfance, il ait soutenu dans l' âge mûr tant de paradoxes et de systêmes romanesques. Ann. Litt. _ Il se dit au propre aussi avec la prép. de: "Il ne se nourrissoit que d' herbes et de racines. Mais il ne se dit point sans régime. "La belle Niobé, dans une situation pareille à la vôtre, consentit enfin à se nourrir. Mde. Dacier, Iliade. Il falait, à mon avis, consentit à prendre de la nourritûre.
   NOURRISSANT, qui nourrit beaucoup, qui sustente. "Cela n' est pas assez nourrissant. "Cette viande est fort nourrisante.
   Nourrisant, Nutritif, Nourricier (syn.) Nourrissant se dit de ce qui nourrit beaucoup; il marque l' éfet: nutritif, qui a la faculté de nourrir; il marque la puissance, la vertu: Nourricier, qui opère la nutrition; il marque l' action. "Les mets nourrissans abondent en parties nutritives, dont l' estomac extrait une grande quantité de suc nourricier. Extr. des Syn. Fr. de Mr. l' Abé Roubaud.
   NOURRITûRE, aliment; ce qui nourrit. "Bone, ou mauvaise nourritûre. "Prendre de la nourritûre. "Mourir faûte de nourritûre. _ Figurément: "L' esprit a besoin de nourritûre.
   Rem. Il s' est dit anciènement pour éducation. "Ce fut, dit Brantome, le Maréchal de Retz qui le pervertit (Charles IX) et lui fit oublier et laisser toute la belle nourriture que lui avoit donée le brave de Cipierre. _ Richelet le met encôre en ce sens. "Il n' a point de nourritûre, d' éducation. Corneille, parlant d' Attale, qui avait été élevé à Rome, dit:
   Si vous faites état de cette nourriture.
   Donez ordre qu' il règne, elle vous en conjure.
       Nicomède.
_ Il ne s' est conservé que dans le Proverbe; nourritûre pâsse natûre: la bone éducation peut corriger un mauvais naturel. _ Et en parlant d' un enfant mal élevé, on dit, en plaisanterie, à celui qui en a pris soin: vous avez fait là une belle nourritûre.
   NOURRISSON. Voy. NOURRICE.

NOUS


NOUS, pron. pers. plur. de la 1re pers. Il sert pour le nominatif: nous voulons; pour l' acusatif: il nous aime; pour le datif: elle nous a doné, etc. Il a un aûtre datif, qui est, à nous; mais celui-ci ne se met qu' à la suite de l' aûtre: il nous a dit à nous et à vous des injûres. = On le répète aussi au nominatif et à l' acusatif, quand il est suivi de la conjonction et d' un autre nom et au même câs: nous avons acheté nous et nos associés: on nous a volé nous et nos compagnons. = Nous suit les règles de son singulier moi. Voy. MOI.
   Dans le style familier, on emploie quelquefois nous pour il, elle, le. Mde de Sévigné, parlant de son fils, qui était revenu malade de l' armée sans congé, dit: "Il clopine, il fait des remèdes; et quoiqu' on nous (le) menace de toutes les sévérités de l' ancienne discipline, nous vivons (il vit) en paix dans l' espérance que nous ne serons point pendus: nous causons, nous lisons. = On dit, proverbialement, à celui qui dit, je veux: vous dites, je veux, et le Roi dit, nous voulons. C' est en éfet le style des Ordonnances: "Nous voulons, Nous ordonons. _ Les Auteurs emploient aussi quelque--fois ce style dans les Préfaces et les Avertissemens, par une raison toute contraire, pour éviter l' égologie.

NOUVEAU


NOUVEAU, ou NOUVEL, ELLE, adj. NOUVEAUTÉ, s. f. NOUVELLE, s. f. NOUVELLEMENT, adv. NOUVELLISTE, ou NOUVÉLISTE, s. m. [Nou-vo, voté, vèl, vèle, vèleman, véliste: 2e è moy. au 3e, 4e et 5e, é fer. au dern.] Nouveau se met devant les noms qui comencent par une consone, et nouvel devant ceux qui comencent par une voyelle. "Un nouveau chef, un nouveau malheur, etc. Le nouvel an, un nouvel Ambassadeur.
   NOUVEAU, qui comence d' être ou de paraitre. "Vin, fruit nouveau. "Nouveau dessein. "Ne savez-vous rien de nouveau. Nouvelle invention, découverte, édition, etc.
   Rem. Nouveau et neuf ne sont pas synonymes. Nouveau, c' est ce qui parait depuis peu: il est oposé à ancien: Neuf est ce qui est frais, ou qui n' a pas encôre paru. Un livre nouveau peut n' être pas neuf, ou par la reliûre, qui peut être gâtée, ou par ce qu' il contient, qui n' est qu' une répétition de ce qui a été plusieurs fois écrit, et qui se trouve par tout. Ainsi M. Fréron a dit fort sensément d' un plan d' éducation publique: "Je dis nouveau, et non pas neuf; car toutes les idées qu' il renferme se trouvent dans une infinité de livres. = On met toujours nouvel devant le substantif, excepté peut-être dans le style marotique. Nouveau peut se placer devant ou après.
   De ces nouveaux bienfaits sont nés des soins nouveaux.
       De Lille.
Il aime pourtant à précéder.
  Ã€~ chaque instant de nouvelles finesses.
       Ververt.
  Nouvelle langue et nouvelles leçons.
      Ibid.
Quelquefois placé devant, il a un sens diférent de celui qu' il présente, quand il est placé aprês. De nouveaux livres, ce sont d' aûtres livres: des livres nouveaux, ce sont des livres imprimés depuis peu. = On dit d' un homme, qu' il est nouveau dans son métier, dans sa charge; qu' il n' y est guère expérimenté~. Homme nouveau, le premier de sa race. C' est le novus homo des Latins. = Nouveau se dit aussi comme adverbe, pour nouvellement. "Nouveau né, nouveau venu; de la crème nouvelle faite. = * Le P. Rapin emploie le masculin substantivement. "Il y a donc du tempérament à garder entre les Anciens et les Nouveaux: on doit avoir du respect pour les uns, sans avoir du mépris pour les aûtres. On dit, en ce sens, les Modernes. = Bossuet lui fait régir la prép. à (le datif). "Une chôse si nouvelle aux Chrétiens. On emploie aujourd' hui la prép. pour: "Cela est nouveau pour moi. Aûtrefois on était prodigue d' ablatifs et de datifs, et les prépositions de et à reparaissaient à tout instant.
   NOUVEAUTÉ, 1°. Qualité de ce qui est nouveau. "La nouveauté d' une opinion, d' une découverte. "Les atraits, les charmes de la nouveauté, etc. = 2°. Chôse nouvelle: "Ce Marchand, ce Libraire a toujours quelque nouveauté. "Des pois au comencement du printems, c' est de la nouveauté. = Il se dit sur-tout au plur. "Les nouveautés sont dangereûses en matières de religion. "Le peuple est amateur de nouveautés, il court aprês les nouveautés.
   NOUVELLE, le premier avis qu' on reçoit d' une chôse arrivée récemment. "Bone ou mauvaise, fâcheûse nouvelle. "Faire courir, semer, répandre une nouvelle, etc. = Il ne faut pas confondre avoir nouvelles, et avoir des nouvelles: le premier, signifie simplement qu' on aprend un évènement; l' aûtre dit de plus, qu' on en sait des particularités. "J' ai nouvelle du siège, c' est-à-dire, j' aprends que le siège a été mis. "J' ai des nouvelles du siège, c' est-à-dire, on me mande ce qui s' est pâssé au siège depuis une telle date. De plus, avoir nouvelles régit quelquefois le que: "Alexandre, dit Vaugelas, avoit nouvelles que Darius devoit arriver dans cinq jours. Mais, avoir des nouvelles, ne régit que les noms au génitif. Bouh. _ Cet Auteur, qui savait si bien sa langue, dit, dans la Vie de Saint Ignace, recevoir et avoir nouvelle que sans article et au singulier. = Je puis en dire des nouvelles; je le sais très-bien: Mesdemoiselles S... qui étoient dans notre loge, pourroient vous en dire des nouvelles. Ann. Litt. = On dit, par menace, vous aurez, ou vous entendrez de mes nouvelles; vous recevrez bientôt de ma part quelque déplaisir. _ Je sais de vos nouvelles; ce que vous avez fait et dit. = Point de nouvelles, adv. Cela est inutile: n' y comptez pas.
   Je vous rends, leur dit-il, mille graces, mes belles,
   Qui m' avez si bien tondu:
   J' ai plus gagné que perdu;
   Car, d' himen, point de nouvelles.
       La Font.
Le Proverbe dit: point de nouvelles, bones nouvelles; c' est une preûve qu' il n' est point arrivé de malheur, puisqu' on ne le sait point.
   Nouvelle se dit quelquefois pour Conte.   "Nouvelle historique; nouvelle espagnole. "Les nouvelles de Cervantes, de Scarron, etc.
   NOUVELLEMENT; depuis peu. "Maison nouvellement bâtie. "Livre nouvellement, imprimé, etc.
   NOUVELLISTE; qui est curieux de savoir des nouvelles, et qui aime à en débiter. "C' est un nouvelliste.

NOYAU


NOYAU, s. m. [Noa-io. Plur. noyaux.] 1°. Cette partie dûre et ligneûse, qui est renfermée au milieu de certains fruits. "Noyau de pêche, d' abricot, de prune, etc. "Fruits à noyau. = Le Proverbe dit: il faut casser le noyau pour en avoir l' amande; il faut prendre de la peine pour une chôse, quand on veut en avoir le profit. 2°. La vis où s' assemblent toutes les marches d' un escalier en limaçon.

NOYER


NOYER, s. m. [Noa-ié: 2eé fer.] Arbre qui porte des noix.

NOYER


NOYER, v. act. [Noa-ié.] Devant l' e muet on ne met pas l' y grec, mais l' i: il noie, et non pas il noye: pron. noâ, et non pas noa-ie. Au futur, cet e muet ne se fait nullement sentir. Il noiera, noieroit; pron. noâra, noârè, etc. = Nous prononçons nayé, dit Ménage: ce n' est pas aujourd' hui le bel usage. Richelet écrit néïer, et soutient que c' est le mot d' usage, et qu' il n' y a que les Poètes qui se servent de noyer, y étant contraints par la rime.
   Pour peu qu' on s' en écarte, aussitôt on se noie:
   La raison, pour marcher, n' a souvent qu' une voie.
       Boileau.
Cet exemple parait apuyer l' assertion de {B751a~} Richelet. Mais quand La Fontaine dit:
   Aux noces d' un Tyran, tout le peuple en liesse
   Noyoit son souci dans les pots.
Ce n' est ni la rime, ni la mesûre qui lui fait écrire noyoit, puisque néyoit ou néioit aurait produit le même éfet. L' opinion de Richelet est donc faûsse, ainsi que la raison dont il l' apuye. Plusieurs pensent que néyer est de la conversation, et noyer du style soutenu. Voy. plus bas NOYON.
   NOYER, faire mourir dans l' eau ou dans quelque aûtre liqueur. "Noyer un chien, un homme. = Se noyer: Il s' est noyé dans la rivière. "Beaucoup de soldats se noyèrent en passant le fleuve. = Inonder: "Les pluies ont noyé la campagne. = On dit figurément, (st. famil.) d' un homme dont les afaires sont en mauvais état, que c' est un homme noyé. "Sans cet éfort de courage, j' étois une femme noyée.
   Pour couronner l' afaire,
   Achevons de brouiller et de noyer Valere.
       Le Méchant.
= Noyer sa raison dans le vin: Se noyer dans la débauche, dans les plaisirs. = On dit, en st. prov. d' un homme, ou mal--heureux, ou mal habile: qu' il se noierait dans un verre d' eau, ou dans un crachat; d' un méchant homme, qu' il n' est bon qu' à noyer. Et pour dire qu' on ne manque pas de prétexte pour perdre les gens, ou pour se brouiller avec eux: quand on veut noyer son chien, dit-on, on l' acuse d' avoir la rage.
   NOYÉ, ÉE, adj. Noyé de dettes, qui doit plus qu' il n' a de bien. "Des yeux noyés de larmes, pleins de larmes. _ Dans ce discours le sens est noyé dans les paroles. "Examinons de plus près les raisonnemens de M. de V... quoiqu' ils soient noyés dans un déluge d' injures. L' Ab. Nonotte.

NOYON


NOYON, s. m. [On prononce populairement néyon, dit l' Acad. c' est une preûve qu' on doit prononcer noa-ion, comme noa--ié.] Ligne qui borde le jeu, et au delà de laquelle la boule est noyée.

NU


NU, ou NUD, NûE, adj. Qui n' est point vétu. "Il étoit tout nu. "Il avoit la tête nûe. "Il alait les pieds nus, etc. = Par extension, on le dit des chôses. Épée nûe, qui est hors du fourreau. Murâille nûe, qui n' est point couverte de tapisserie ni de tableaux. "Cet habit est trop nu, il est sans {B751b~} ornement. = Au figuré, sans déguisement. "C' est la vérité toute nûe. "Je vous montre mon âme toute nûe. On ne s' en sert qu' au féminin, avec toute, et dans des phrâses pareilles. = S. m. En Peintûre, le nu, ce sont les parties d' une figûre, qui ne sont pas drapées. _ En Architectûre, le nu du mur, l' endroit où il n' y a point d' ornement en saillie. = Â nu, adv. à découvert.
   Rem. On a écrit long-tems nud, aparemment à caûse de Nudité. = * On l' employait beaucoup anciènement dans le sens et avec le régime de dénué.
   Dieu, notre Dieu, n' est pas un Dieu nud de puissance.
       Du Bartas.
  Un homme qui, tout nud de glaive et de courage,
  Voit de ses énemis la menace et la rage.
      Malherbe.
  Mes ouvrages sont trop vulgaires
  Et trop nuds de science et d' art.
      Meynard.
On ne le dit plus, même en vers, dans ce sens, et avec ce régime. = Nu est indéclinable dans les locutions suivantes: nu-pieds, nu-jambes, nu-tête. Il ne prend, ni le genre, ni le nombre des mots qu' on lui associe. Ces locutions ne sont pas du beau style. Les bons Auteurs disent, les piés nus, la tête nûe, etc. Nu-pieds, nu-tête, n' est que du style familier, dit Vaugelas. L' Académie met les deux manières indiféremment et sans remarque. L' Ab. Velly dit de St. Louis, qu' il porta la courone d' épines nuds pieds, nuë tête, au lieu de nu-tête. Cet ë doit peut-être pâsser sur le compte de l' Imprimeur. = À~ nud a été employé au figuré, par des bons Auteurs. La nouvelle du combat découvrit à nud la disposition des esprits. Rollin. "Le Gouvernement anglais est forcé de montrer à nud toutes ses ressources. Linguet. _ On dit plus comunément, montrer à découvert; mais, à nud est plus énergique et plus pitoresque: il fait image.

NUAGE


NUAGE, s. m. Amâs de vapeurs élevées en lair, et qui, réunies, se rendent visibles. "Le Ciel est couvert de nuages. Le soleil et le vent dissipent les nuages. = Figurément, ce qui ofusque la vûe. "Un nuage de poussière. "J' ai les yeux couverts d' un nuage. = Plus figurément encôre, les doutes, les incertitudes, les ignorances de l' esprit. "La vérité dissipe les nuages de l' erreur. "Les passions assemblent sur notre âme d' épais nuages. Des Écrivains distingués ont cherché à dissiper les nuages, dont son Histoire (de Zoroastre) est couverte. PASTORET.

NUANCE


NUANCE, s. f. NUANCER, v. act. [2e lon. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Nuance, est 1°. Les divers degrés d' une même couleur. "Les nuances du verd sont variées à l' infini. FIG. Les nuances des caractères, des passions, des styles. = 2°. Assortiment de plusieurs couleurs, qui vont bien ou mal ensemble. ""Les nuances de cette garnitûre ne sont pas bien entendûes.
   NUANCER, assortir des couleurs. "Nuancer les couleurs. = Fig. Nuancer les caractères dans un ouvrage d' esprit.

NUBILE


NUBILE, adj. fém. Qui a ateint l' âge de se marier, en parlant des filles. "Elle est nubile. = Age nubile, auquel les filles comencent d' être en état de se marier.

NUD


NUD, Voy. NU

NUDITÉ


NUDITÉ, s. f. État d' une persone, qui est sans vêtement. "Couvrir la nudité du paûvre. = Les parties du corps humain que la pudeur oblige de cacher. "Couvrir sa nudité. "Étaler avec impudence des nudités dangereuses. Anon.

NûE


NûE, NUÉE, s. f. [1re lon. au 1er, 2e e muet au 1er, é fer. et long au 2d: Nû-e, nu-é-e.] Nuage. = Suivant le Dict. de Trév.Nûe est plus vague que Nuée, et en diffère à peu près comme le genre de l' espèce. Dailleurs nûe se dit plus souvent dans le propre que dans le figuré, et nuée plus souvent dans le figuré que dans propre: mais on ne peut distinguer cela que par un long usage. Nûe est plus poétique que nuage.
   La nûe en se formant s' abreuve dans les mers;
   Et sur l' aile des vens s' élève dans les airs.
MARIN, 6e Écl. de Virgile. = Suivant M. BEAUZÉE, l' idée de Nûe fait penser à l' élévation, celle de nuée à l' orage, celle de nuage à l' obscurité. _ On dit donc, d' un oiseau, qui s' élève fort haut dans la région de l' air, qu' il se perd dans les nûes; qu' une nuée s' étend vers la droite, pour marquer ce qui est exposé aux accidens, dont elle menace; et qu' un nuage ne tardera pas à crever, pour indiquer qu' il est extrêmement condensé et noir. _ Ces idées accessoires, ajoute-t' il, deviènent presque les principales dans le sens figuré. Élever jusqu' aux nûes, louer excessivement, tomber des nûes, sauter aux nûes, etc. (Voy. plus bâs.) "Une nuée se forme, dit-on, en parlant d' une conspiration: elle ne tardera pas d' éclater. "Nuage de poussière; avoir un nuage devant les yeux: les doutes, les incertitudes s' apellent des nuages.
   NûE, fournit à quelques expressions figurées du style familier. _ Sauter aux nûes; montrer de l' impatience et de l' indignation de ce qu' on nous dit. _ Être au dessus des nûes, bien dans ses afaires, ou, dans une grande faveur. _ Tomber des nûes, être dans l' étonement, dans l' afliction. "Ce qui s' apelle tomber des nûes, c' est ce qui arriva hier au soir aux Thuileries. Sév. "Madame de la Fayette est tombée des nues: elle s' aperçoit à tous momens de la perte qu' elle a faite. Ibid. _ On dit aussi qu' une chôse nous tombe des nûes, quand on ne sait d' où elle nous vient. "Il m' est tombé des nues le plus beau chapelet du monde. Sév. "Les deux Muses sont étonées de trouver là Molière, qui tombe en éfet comme des nûes. Ann. Litt. _ Se perdre dans les nûes, perdre de vûe le sujet, que l' on traite.
   NUÉE, se dit figurément pour multitude. "Une nuée de corbeaux, de sauterelles. "Une nuée de Barbâres.

NUEMENT


NUEMENT, adv. [nûman: 2 longues.] Sans déguisement. "Dire nûment la vérité. = Immédiatement: "Fief, qui relève nuement de la Courone, etc.

NUER


NUER, v. act. Nuancer, en parlant des ouvrages de laine et de soie. "Nuer les couleurs. Et neutralement, savoir bien nuer.

NUIRE


NUIRE, v. n. [1re lon. 2ee muet.] Je nuis, nous nuisons; je nuisois ou nuisais; je nuisis, j' ai nui; je nuirai, je nuirois ou nuirais; nuis; que je nuise; je nuisisse; nuisant, nui. = Faire tort, porter domage, empêcher, incomoder. Il régit le datif, la prép. à. "Cette demarche nuirait à votre dessein. "Cet homme peut vous nuire: il cherche à me nuire. "Le froid nuit à la santé. = Il est aussi réciproque, se nuire, mais il ne se dit que des persones. "Le nombre des chefs se nuisit par le défaut de subordination. Dict. Hist. C' était le câs de dire, nuisit à l' entreprise. = Ne pas nuire, se dit quelquefois pour, servir, être utile. "Je ne lui nuirai pas à obtenir cette grâce. "Il ne nuit pas d' avoir voyagé. Il n' est que du style familier.

NUISANCE


*NUISANCE, s. f. Vieux mot, qu' il est fâcheux qu' on ait laissé perdre. "Et en câs que la faûte... pour le scandale, conséquence et nuisance, qu' elle tire après soi, semblât devoir être promptement manifestée, etc. S. Fr. de Sales.

NUISIBLE


NUISIBLE, adj. [Nui-zible.] Qui nuit. Il régit le datif: "Les grands forfaits, toujours râres, sont peut-être moins nuisibles à la Société, que cette habitude invétérée de tous les vices, qui trop souvent la trouble et la déshonore. Pastoret; Zoroastre, etc.

NUIT


NUIT, s. f. [Nui, monos.] L' espace du tems, que le soleil est sous notre horison. "Nuit obscûre ou claire. "Belle nuit. "Jamais la nuit ne fut si noire. "Au comencement, à l' entrée de la nuit. "Travailler nuit et jour. "Bonet, chemise de nuit. Bon soir et bone nuit. "Je vous souhaite une bone nuit. _ Voy. TÉNèBRES.
   Rem. On dit indiféremment nuit et jour, ou jour et nuit. "Ces hautes tours, qui étaient nuit et jour entourées de Gardes. Télém. "Le Roi, que sa défiance tourmente jour et nuit. Ibid. _ L' Acad. ne met d' exemple que du 1er, mais ce n' est pas une preûve qu' elle condamne l' aûtre. = On dit aussi ni nuit, ni jour, et celui-ci vaut mieux que ni jour ni nuit. "Il ne dort, ni nuit ni jour. TÉLÉM. Doit-on dire, il est nuit, ou il fait nuit? Je crois que le 1er est le seul bon. M. de Florian a préféré le 2d. "Viane avoit bien observé les lieux: il les reconut, quoiqu' il fît nuit. Vie de Cervantes. En cet endroit je ne dirais pas même, quoiqu' il fût nuit: je voudrais dire, quoique la nuit fût fort obscûre. = On apèle poétiquement la lune, l' astre des nuits. = La nuit du tombeau, l' éternelle nuit, la mort. La nuit des tems, expression figurée fort à la mode. = Nuit, ombrage, aûtre expression du style figuré, mais plus anciène. "Ce bois sembloit couroner ces belles prairies, et formoit une nuit que les rayons du Soleil ne pouvoient percer. Télém.
   De nuit, adv. Pendant la nuit. "Aler, marcher, partir de nuit. = À~ nuit fermante, à l' entrée de la nuit. Rich. Port. L' Acad. dit à jour fermant, ce qui est plus naturel; ROLLIN, à nuit fermée, pour exprimer aparemment que le jour avait fini depuis long--tems. "Il se déterminent à retourner vers le camp, où ils arrivent à nuit fermée. Voy. FERMANTE

NUITAMMENT


NUITAMMENT, adv. [Nuitaman.] De nuit, en parlant d' un vol ou de quelque aûtre mauvaise action. "Vol, assassinat~ commis nuitamment. _ L' Acad. ne le done que comme un terme de Palais. Il est aussi du st. famil.

NUITÉE


*NUITÉE, s. f. [Nui-té-e; 2e é fer. 3e e muet.] 1°. L' espace d' une nuit. "On fait tant payer dans cette hôtellerie pour la nuitée~. = 2°. L' ouvrage, le travail d' une nuit. "On a tant payé aux ouvriers pour leur nuitée. = Dans les deux sens il est populaire. Acad.

NUL


NUL, NULLE, adj. NULLEMENT, adv. NULLITÉ, s. f. [Nul, nule, leman, lité.] Nul, aucun, pas un. "Nul homme; nulle femme n' en sera excepté, ou. exceptée "Nul de tous ceux, qui y est allé n' en est revenu. "Il n' a nulle exactitude.
   Rem. 1°. Nul est une espèce de pronom, qui ne se dit que des persones. Il n' a point de pluriel: il prend l' article indéfini; de nul, à nul: il signifie nulle personne, et demande toujours une négation: nul n' est inocent devant Dieu. = 2°. On se sert assez indiféremment de nul et d' aucun: mais quand la phrâse comence par une négation, nul est un peu dur à l' oreille. "Il n' y a nul qui sache. J' aimerais mieux dire; il n' y en a aucun, qui sache. = 3°. Nul et aucun pris absolument ne s' emploient guère qu' au nominatif. Dans les aûtres câs on se sert des pronoms négatifs persone, qui que ce soit. On ne dit point, ce n' est le sentiment de nul ou d' aucun; je ne l' ai dit à nul, ou à aucun; mais on doit dire, ce n' est le sentiment de persone, ou de qui que ce soit; je ne l' ai dit à personne, ou à qui ce soit. Cette règle n' est pas aussi rigoureûse pour aucun que pour nul. Voy. plus bâs, n°. 5°. Quand nul ou aucun s' emploie avec le régime de la prép. de, il peut être employé dans les câs obliques. "Ce n' est l' opinion de nul d' entre eux; je ne l' ai comuniqué à nul de ceux, qui pouvaient en abuser, etc. = 4°. Il semble à M. de Wailli, que nul, même quand il est joint au substantif, ne se dit pas bien en régime simple (à l' acusatif.) Au lieu de dire: les injures ne firent sur lui nulle impression, je dirais, dit-il, ne firent sur lui aucune impression. Il avoûe pourtant que plusieurs bons Auteurs emploient nul de cette manière; et l' Acad. done plusieurs exemples de phrâses pareilles. Pour moi sans condamner Nul employé dans ce régime, j' aimerais mieux me servir d' aucun, comme plus doux. Nul me parait un peu dur à l' oreille dans cet emploi. = 5°. Au féminin, Nulle et Aucune ne se disent jamais absolument, mais toujours avec le régime et avec relation à quelque terme, qui désigne une femme. On ne dit point: nulle ne l' a fait, aucune ne l' a dit: on doit dire, nulle de vous, aucune d' elles, etc. Et il est à remarquer que Nulle ne se dit jamais sans cette addition. Aucun au contraire s' emploie sans ce régime, lorsque les noms, auxquels il se raporte, le précèdent dans la construction. "Je conais plusieurs de vos juges; mais je ne suis ami particulier d' aucun; on ne dirait pas de nul. "Voir des femmes et ne s' atacher à aucune. Il serait ridicule de dire, à nulle. = 6°. Nul ne doit point s' employer au pluriel: sans nul égard, et non pas, sans nuls égards. * M. Moreau emploie le pluriel et le singulier dans la même phrâse. "Nulles propriétés n' avoient donc pu être garanties: Nulle concession n' avoit paru irrévocable. = "Ils ne gardèrent nulles mesûres. LET. ÉDIF. Dites, nulle propriété, nulle mesûre. Voy. AUCUN, n°. 3°. = 7°. Nul ne fait pas bien à la fin de la phrâse. "On ne se détermine point aux grands crimes, sans de grandes espérances; et ici il n' y en a nulle. D' AVR. "Il comença par rétablir la discipline parmi les troupes, qui n' en gardoient nulle. ID. Il falait dire, aucune. = 8°. Nul, apliqué aux chôses ne s' emploie point comme pronom; il ne peut être qu' adjectif, modifiant un nom. "Vous n' avez nul droit sur sa vie, ni sur ses biens: vous n' en avez donc nul sur ses moeurs, ni sur ses pensées. La Rûe. Dites, aucun. = 9°. Nul doit être toujours acompagné de la négative ne. "Ne voulant du bien qu' à lui seul, il veut persuader qu' il en veut à tous, afin que tous lui en fassent, ou que nul du moins lui soit contraire. La Bruy. Il faut dire, ne lui soit contraire. "On sait qu' étant de nulle naissance, il (Virgile) s' atira l' estime d' Auguste. P. Rapin. Ici la négative ne peut avoir lieu, et n' étant de nulle naissance ne vaudrait guère mieux. Il faut donc dire, n' ayant point de naissance, ou, étant de bâsse extraction. = 10°. * À~ nulle autre pareille, à nulle aûtre seconde, étaient des expressions usées dès le tems de Ménage: elles pâssaient dès lors pour chevilles dans les vers. Il conseille de ne s' en servir que rârement. On peut conseiller aujourd' hui de ne s' en servir jamais qu' en style burlesque, ou pour s' en moquer.
   II. Nul: qui n' est de nulle valeur; en parlant des actes, des contrats, etc. "Ce testament est nul: on l' a déclaré nul, de nul éfet. "Le mariage a été déclaré nul. "Ces procédûres ont été déclarées nulles. = Dans le jargon des petits maîtres, on le dit des persones, pour, anéanti: je suis nul, je deviens nul. = On le dit même substantivement pour dire, un homme nul, inutile, sans mérite. "Il a obtenu des courones... Voilà plus de titres qu' il ne faut pour exciter la fureur des Nuls et des médiocres. Merc. _ Médiocre, n' est point substantif, selon l' Usage, et Nul encôre moins.
   NULLEMENT, en nulle manière: je ne le soufrirai nullement: voulez-vous telle chôse? Nullement. = Dans la réponse à une interrogation, il se pâsse de la négative; mais par tout âilleurs, il ne peut s' en pâsser. Quelques Auteurs l' on employé sans cet acompagnement: ils ne sont pas à imiter. "Des travaux grossiers, nullement aidés par la science. Le Gendre. Il faut, qui n' étaient nullement aidés, etc. "Un savant, nullement versé dans les Humanités latines et françoises, n' est qu' un pesant érudit. L' Ab. Des Font. "J' ai à louer des vertus nullement fastueuses. L' Ab. Du-Serre-Figon. Panég. de Ste Thérèse. = Je pense que nullement ne peut modifier les participes et les adjectifs que par le moyen de la négative et du v. être.
   NULLITÉ, est un terme de Pratique. Il ne se dit que dans le 2d sens de NUL, n°. II°. Défaut, qui rend un acte nul, de nulle valeur. "Nullité d' un acte. "Il y a plusieurs nullités dans ce Testament, dans ce Mariage, dans cet Arrêt. = * Nullité, apliqué aux persones, est devenu, comme Nul, un mot à la mode. "Je suis dans une grande nullité, dans un grand anéantissement. Je ne suis bon à rien. Un Auteur moderne, parlant des persones d' un esprit aussi solide que brillant, qui ne prétendent point à la qualité d' Auteur: "Pourquoi, dit-il, ne pas atribuer à la modestie... la nullité de leurs prétentions. Jusqu' à présent, pour exprimer qu' on n' avait nulle prétention, on ne s' était point avisé de dire, qu' on avait une nullité de prétention. Cette expression signifierait autre chôse: elle voudrait dire qu' on a des prétentions, mais qu' elles sont inutiles, et n' aboutiront à rien. = M. de Chamfort lui fait signifier, le défaut de talens, la stérilité des Auteurs. "La comédie, changée en simple pantomime, dont il ne restera rien à la Postérité que le nom des Acteurs, qui par leurs talens auront caché la misère et la nullité des Poètes. = M. Linguet dit nullité des persones, dans le sens d' inaction ou d' impuissance. "L' indécision de l' Espagne, la nullité de la Hollande, l' indifférence de la Suède... doivent se placer au rang des singularités, qui distingueront à jamais ce siècle de tous les aûtres. _ Nullité, en ce sens, est une nouveauté.

NUMÉRAIRE


NUMÉRAIRE, adj. Se dit de la valeur fictive des espèces. Il est oposé à valeur intrinsèque. = S. m. Argent comptant. Depuis quelque tems, on fait un grand usage de ce mot dans les écrits politiques. "Les avantages, qui résultent d' un numéraire abondant. Linguet. "Une circulation aussi rapide, un numéraire aussi nombreux. Id. "Le prix des objets de luxe est une espèce de thermomètre, sinon de la prospérité réelle d' un État, au moins de l' abondance du numéraire. "Tout cela avoit considérablement grossi la masse du numéraire dans le royaume. L' Ab. Garnier.Hist. de Fr.

NUMÉRAL


NUMÉRAL, ALE, adj. NUMÉRIQUE, adj. Le 1er se dit de ce qui désigne un nombre; adjectif numéral, lettre numérale; le 2d de ce qui apartient aux nombres; opération numérique.

NUMÉRO


NUMÉRO, s. m. NUMÉROTER, v. act. [Le subst. ne prend point d' s au pluriel. Les Numéros est le titre d' un ouvrage assez récent: l' s est de trop.] Numéro, est le nombre du chifre. On l' exprime en abrégé par ce caractêre, N°. 1°. 2°. etc. Le numéro d' une page, d' un ballot. = En st. prov. entendre le numéro, c' est avoir de l' intelligence, de la finesse.
   NUMÉROTER, mettre le numéro; coter. On n' a pas numéroté ces pièces. Il est sur-tout en usage chez les Praticiens et les Marchands.

NUMISMATIQUE


NUMISMATIQUE, adj. Qui apartient aux médailles antiques. Science numismatique.

NUNCUPATIF


NUNCUPATIF, adj. m. Il se dit d' un testament fait verbalement et de vive voix. Ferrière.

NUPTIAL


NUPTIAL, ALE, adj. [Nupci-al, ci-ale.] Qui apartient aux noces, au mariage. "Habit nuptial. "Robe, bénédiction nuptiale. "Lit nuptial, couche nuptiale.

NUQUE


NUQUE, s. f. [Nuke: 2e e muet.] Le creux, qui est entre la tête et le chignon. "La nuque du Cou, ou simplement la nuque.

NUTRITIF


NUTRITIF, IVE, adj. NUTRITION, s. f. [Nutritif, tive, tri-cion.] Il se disent de la fonction naturelle par laquelle le suc nourricier est converti en notre propre substance. Ces termes ne sont en usage que parmi les savans. "Remède nutritif; faculté nutritive. "Cela sert à la nutrition.

NYCTALOPE


NYCTALOPE, s. m. et f. NYCTALOPIE, s. f. Ils se disent, le 1er, de celui, ou de celle qui y voit mieux la nuit que le jour; le 2d de cette espêce de maladie.

NYMPHE


NYMPHE, s. f. [Nein-fe: 1re lon. 2e e muet.] Divinité fabuleuse, habitante des fleuves, des ruisseaux, des fontaines. = En Poésie, jeune fille, ou jeune femme belle et bien faite. = Il se prend quelquefois en mauvaise part, ou se dit par dérision.
   La même nef légère et vagabonde
   Portoit aussi deux nymphes, trois dragons.
       Ververt.
"Pour avoir dit à Madame, qu' elle se soutenoit bien à l' âge qu' a ma soeur, voilà que j' ai perdu ses bonnes grâces. Qui est-ce qui devineroit qu' on est encôre une nymphe, à cinquante ans. Marivaux.




Fin du Second Volume.