Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI MONTICULE


MONTICULE, s. m. dimin. de mont. Petite montagne.

MONTOIR


MONTOIR, s. m. [Mon-toar, 1re lon.] Grôsse pierre ou grôs billot de bois, dont on se sert pour monter plus aisément à cheval. _ Le côté du montoir est le côté gauche du cheval, parce que c' est de ce côté là qu' on monte. Le côté droit s' apèle le côté hors du montoir. _ On dit d' un cheval, qu' il est dificile, rude, ou, aisé, doux, facile au montoir, suivant qu' il est inquiet ou paisible quand on veut monter dessus.

MONTRE


MONTRE, s. f. [1re lon. 2ee muet.] 1°. échantillon, morceau que l' on montre, pour faire voir de quelle natûre est le reste. "Montre de blé, d' avoine. "Cela n' est que pour la montre. = On dit proverbialement, belle montre, peu de raport; beaucoup d' aparence, peu de solidité. = 2°. Revûe d' une armée, d' un Régiment. En ce sens, il est vieux; on dit revûe. = Montre ne s' est conservé que dans cette expression: "On a fait pâsser les valets à la montre; ce qui se dit familièrement dans toutes les ocasions, où quelqu' un est admis parmi les aûtres, quoique inférieur en mérite. "Cet Académicien a pâssé à la montre. "Cette chôse peut pâsser à la montre, elle peut être reçue parmi les aûtres, quoique d' une qualité inférieure. = 3°. La paye qui se donne aux soldats tous les mois, lorsqu' on les fait pâsser en revûe, lorsqu' on leur fait faire montre. = 4°. Petite horloge de poche. "Montre à réveil, montre à répétition. "Monter une montre, en bander le ressort. = 5°. Montre, en parlant des orgues, se dit des tuyaux qui paraissent au-dehors.
   REM. Montre n' est pas du beau style. * Molière, dans son Poème, intitulé: la gloire du Val de Grâce, s' exprime ainsi:
   Conserve à nos neveux une montre fidèle
   Des exquises beautés, que tu tiens de son zèle.
L' expression n' est pas fort noble. = On dit, faire montre de, sans article: celui-ci est du bon style. "Pour faire montre de son crédit. Du Cerceau. "Le dessein de la plupart des Comentateurs n' est pas d' éclaircir leurs Auteurs; ...c' est de faire montre de leur érudition. Mallebr. _ On dit aussi, en ce sens, faire parade de... = Se mettre en montre est une expression de J. J. Rousseau: "Chez tous les anciens peuples policés, elles (les femmes) se montroient rarement en public.... elles n' avoient point la meilleure place au spectacle: elles ne s' y mettoient point en montre. _ Ailleurs, parlant des inconvéniens de la Comédie à établir à Genève, il dit, s' offrir en montre. "L' exposition des Dames et Demoiselles, parées toutes de leur mieux, et mises en étalage dans des loges, comme sur le devant d' une boutique, en atendant les acheteurs; l' afluence de la belle jeunesse, qui viendra de son côté, s' offrir en montre, etc. _ Ces locutions sont nouvelles; elles peuvent trouver place dans le style comique ou critique. = * Suivant M. Desgrouais, montre solaire, pour cadran, est un gasconisme. L' Acad. ne dit que cadran solaire.

MONTRER


MONTRER, v. a. [Montré; 1re lon. 2e é fer.] Il a divers sens: 1°. Indiquer; "Montrer le chemin à quelqu' un. "Je lui ai montré ce qu' il cherchoit. "Un cadran, qui montre l' heure. = 2°. Faire voir: "Il m' a montré son cabinet, son ouvrage, ses tableaux. = Se montrer, se faire voir. "Il se montre partout. "Il n' oseroit se montrer, ou par honte, ou par crainte. _ Se montrer homme de courage. = 3°. Faire paraître. "Montrer de l' ardeur, du zèle. "Montrer un visage gai, ou triste. = 4°. Enseigner. "Montrer le Latin, la Philosophie, les Mathématiques. "Montrer à lire, à écrire, etc. Et neutralement. "Ce maître montre fort bien. Et passivement. "Ce jeune homme a été bien ou mal montré. = Il n' est pas du style noble. Corneille dit de Louis XIV:
   Il montre à voir la mort, à la braver de près.
Enseigner, aprendre valent mieux dans le haut style. = Le même Poète fait régir à montrer des noms sans article.
   A t' elle montré joie? En paroit-elle émue?
       Pertharithe.
On doit dire, même en vers: a-t' elle montré de la joie?
   On dit figurément, montrer le chemin aux aûtres; faire quelque chôse à dessein que les aûtres le fassent. Voyez, CORDE, CUL, DOIGT, TALON.

MONTUEUX


MONTUEUX, EûSE, adj. [Montu-eû, eû-ze. 3e lon. 4ee muet.] Extrêmement inégal, et mélé d' espace en espace de plaines et de collines. "Pays montueux; terre, région montueûse. Voyez MONTAGNARD, à la fin.

MONTûRE


MONTûRE, s. f. [2e lon. 3ee muet.] 1°. Bête sur laquelle on monte, pour aler d' un lieu à un aûtre. "Bonne ou méchante montûre. "Il étoit monté sur un âne; humble montûre. "Le cheval est la meilleure de toutes les montûres. = 2°. L' éfet de l' action de monter un ouvrage, et le prix du travail de l' ouvrier qui l' a monté. "La montûre d' un fusil. "Cette montûre est fort belle. "Tant pour la montûre.

MONUMENT


MONUMENT, s. m. [Monuman.] Marque qui transmet à la Postérité le souvenir de quelque chose de mémorable. "Monument d' une victoire. "Monumens de la grandeur Romaine. "Dresser, ériger un monument à la gloire d' un Prince. = Il se dit quelque--fois pour tombeau; mais ce n' est que dans la poésie ou la belle prôse, dit La Touche. Le Rich. Port. l' admet pour le style soutenu. L' Académie l' avait d' abord traité de vieux: Dans la dern. édition, elle dit qu' il n' a guère d' usage dans le discours ordinaire. = * M. de Belloi l' a employé dans le sens de témoin.
   Voilà de notre amour les premiers monumens.
dit Couci, à l' aspect de ces lieux, témoins de ses pûres tendresses. "S' est-on jamais exprimé de la sorte, dit Fréron, en parlant des lieux où l' on aima pour la première fois?

MOQUER


MOQUER (SE) v. réc. [Moké. 2e é fer.] 1°. Se railler de.... en plaisanter. "On s' est moqué de lui, de ses propôs, de ses vers, de sa danse. = 2°. Mépriser. "Il se moque de père et de mère. = Braver, "Se moquer des périls. "Je me moque de lui et de ses menaces. = 3°. Ne dire, ne faire pas sérieûsement. "C' est se moquer que de faire une telle démarche. = 4°. Faire hors de propôs. "C' est se moquer que de soutenir une si mauvaise caûse. "Vous vous moquez de sortir par ce mauvais tems.
   Rem. Quelques Auteurs l' ont employé au passif. "La crainte d' être moqué. On dit plutôt, la crainte qu' on ne se moque de moi, de nous, de vous, etc. "Est-ce la crainte d' être moqué, qui vous retient? Et par qui le serez-vous? Mariv. "Ils furent moqués et chassés ignominieûsement. Rollin. "Les esprits forts, qui s' étoient moqués de la Fée furent moqués à leur tour. J. J. Rousseau. Reine Fantasque. Ici l' oposition fait pâsser le passif, qui n' est pas fort usité. _ On lit aussi, dans l' Année Litt. "À~ présent qu' il est non-seulement refusé, mais joué, moqué. On y emploi même le participe adjectivement, ce qui est encôre plus extraordinaire. "Le Soldat eut honte de son action, et moqué de ses camarades, il se remit à pied. = Le proverbe dit que: les moqueurs sont souvent moqués; mais le style proverbial a de grands droits, et ne doit point tirer à conséquence. _ Je ne dois pas dissimuler qu' on voit dans Trév. cet exemple. "Il fut moqué de tous ceux qui le virent; et que l' Académie remarque que moquer s' emploie avec le verbe faire: vous vous ferez moquer de tout le monde; et au participe, avec le verbe être. "Il fut moqué de tout le monde. _ Enfin Boileau a dit dans sa Xe Satire:
   Que sous ce joug moqué tout le monde s' engage.
Je doute que cela puisse se dire, même en vers.
   On dit proverbialement: se moquer de la barbouillée, ne rien craindre. "On veut lui faire peur; mais il se moque de la barbouillée. Voyez CHIEN, FOURGON.

MOQUERIE


MOQUERIE, s. f. MOQUEUR, EûSE, adj. et subst. [Mokerî-e, keur, keû-ze; 2e e muet au 1er, lon. au 3e.] Moquerie se dit des paroles ou actions, par lesquelles on se moque. "Il est l' objet des moqueries de la société où il vit. = Chôse absurde, impertinente. "C' est une moquerie de vouloir soutenir une telle proposition. Le 1er sens répond au n°. 1°. et le 2d. au n°. 4°. de moquer. Voy. PLAISANTERIE. = Moqueur, eûse: c' est, 1°. celui, celle qui se râille, qui se moque facilement et habituellement. "Il est naturellement moqueur: elle a l' air moqueur, l' humeur moqueûse. "Un ris moqueur. = 2°. Subst. Celui, celle qui ne parle pas sérieûsement. "Ne le ou la croyez pas: c' est un moqueur, une moqueûse.

MORâILLES


MORâILLES, s. f. pl. MORâILLON, s. m. [Morâglie, râglion; 2e lon. Quelques-uns écrivent Mourailles, mouraillon. Richelet préfère le 1er, sans condamner le 2d. L' Académie ne met que celui-là.] = Morâilles est un instrument composé de deux branches de fer, dont les maréchaux se servent pour serrer le nez d' un cheval. = Morâillon est une pièce de fer, atachée au couvercle d' un cofre, d' une cassette, et qui porte un aneau, qui pâsse dans la serrûre, et dans lequel entre le pêne.

MORAL


MORAL, ALE, adj. MORALEMENT, adv. [3e e muet; en, dans le 3e, a le son d' an.] Moral, 1°. qui concerne les moeurs. "Discours moral. Théologie morale. Préceptes moraux. Réflexions morales. = Vertus morales, qui n' ont pour principe que les lumières de la raison. "Dieu a récompensé quelquefois les vertus morales des Païens, par des prospérités temporelles. = 2°. Certitude, assurance morale, qui a le plus grand degré de vraisemblance. "La certitude morale est quelquefois à un tel degré qu' elle équivaut à la certitude métaphysique, et qu' elle exclut tout doute.
   MORALE, s. f. La science, la doctrine des moeurs. "La morale de l' Évangile. "On se fait aujourd' hui d' étranges systèmes de morale. = Traité de Morale. "La Morale d' Aristote, etc.~
   Rem. On dit, depuis peu, faire de la morale, comme on dit, faire de l' esprit. "Miladi feroit de la morale inutile. Ann. Lit. Je crois que cette expression s' emploie toujours indéfiniment, qu' elle ne comporte pas d' épithète, et qu' il faut dire: ferait de la morale inutilement.
   MORALEMENT a les deux sens de moral, mais l' emploi en est fort borné. "Vivre moralement bien, suivant les seules lumières de la raison; lumières très-fautives. = Moralement parlant, vraisemblablement. "On peut dire, moralement parlant, que, etc. "Cela est moralement impossible. Dans cette dernière phrâse, il est oposé à métaphysiquement, et à physiquement.

MORALISER


MORALISER, v. n. MORALISEUR, s. m. MORALISTE, s. m. [Morali-zé, li-zeur, lis-te: devant l' e muet, l' i est long: il moralîse, il moralîsera.] Moraliser, faire des réflexions morales. "Il y a bien de quoi moraliser sur ce triste accident. "Cet homme moralise sans cesse. = Moraliseur est celui qui afecte de moraliser. = Moraliste, Écrivain qui traite des moeurs. Le premier ne se dit qu' en plaisantant et en critiquant. "C' est un grand, un ennuyeux moraliseur: le second se dit en louant ou en critiquant, mais sérieusement: "C' est un bon moraliste. "Un moraliste lourd et sans grâces.

MORALITÉ


MORALITÉ, s. f. 1°. Réflexion morale. "Il y a de belles moralités à tirer de cette Histoire. Acad. = 2°. Sens moral d' une Fable. "Il faut, dans une Fable, que la moralité soit juste et sensible, et qu' on n' ait pas besoin de l' indiquer au Lecteur. = 3°. En Philosophie, qualité morale. "La moralité de nos actions. "La liberté si nécessaire à la moralité de nos actions. Leibn.

MORCEAU


MORCEAU, s. m. MORCELER, v. act. [Morso; 2e dout. au sing. long. au pluriel. Morceaux. _ Morcelé, 2e e muet, 3e é fer.] Morceau est 1°. au propre, partie d' une chôse bone à manger, et séparée de son tout. "Grôs, petit, bon morceau. "Faire les morceaux trop grôs; aimer les bons morceaux. = Fig. "Il a eu un bon morceau de cette succession. = 2°. Portion d' un corps solide et continu. Morceau de terre, d' héritage. "Tout son bien est en morceaux, en petits morceaux. = 3°. Partie séparée d' un corps continu. "Morceau de bois, d' étofe. _ Et en parlant des ouvrages d' esprit: "Il y a de beaux morceaux dans ce Poème, dans ce discours, et cependant l' on ne peut dire que ce soit un beau Poème, un bon discours. = 4°. Il se dit au figuré, dans les Arts d' agrément, pour une pièce entière, qui ne fait pas partie d' un tout. "Ce tableau est un beau morceau. "Le frontispice du Louvre est un beau morceau d' Architectûre. "Le sermon de Neuville sur l' établissement de la Rel. Chrét. est un des plus beaux morceaux d' éloquence qu' il y ait jamais eus.
   On dit, en st. prov. doubler les morceaux, ou ses morceaux, se hâter de manger; aimer les bons~ morceaux, la bone chère. Le morceau honteux, le dernier qui reste au plat. = Les premiers morceaux nuisent aux derniers: l' on ne peut plus manger à la fin du repâs, quand on a beaucoup mangé au commencement. = S' endormir le morceau au bec, ou à la bouche, s' endormir ou se coucher d' abord après le repâs. = Manger un morceau, faire un repâs fort léger. "Nous ne mangerons qu' un morceau, et nous partirons tout de suite. = Tâiller les morceaux à quelqu' un, régler sa dépense, sa nourritûre; lui tâiller les morceaux bien courts; lui faire sa part bien petite. = Morceau avalé n' a plus de goût: un service est bientôt oublié.
   MORCELER, diviser par morceaux. Il ne se dit qu' au figuré et dans ces phrâses; morceler une terre, un héritage. "Ce système insensé (de la Féodalité) avoit morcelé le Royaume en autant de parties qu' il y avoir de châteaux en état de défense. Journ. Hist. et Polit. de Gen. = On ne dit point morceler du pain, une étofe: on dit, couper en morceaux.

MORDACITÉ


MORDACITÉ, s. fém. Au propre et en termes de Physique, qualité corrosive, par laquelle un acide agit sur un corps solide et le dissout. "La mordacité de l' eau forte. = Au figuré, médisance aigre et piquante. "Dans les Épigrammes de... il y a une mordacité révoltante.

MORDANT


MORDANT, ANTE, adj. MORDICANT, ANTE, adj. [Mordan, dante, dikan, kante: 2e des deux premiers, et 3e des deux aûtres longues.] Mordant ne se dit adjectivement, au propre, qu' en termes de chasse et dans cette phrâse, bêtes mordantes, telles que le sanglier, le loup, l' ours, le bléreau, le renard, etc. = S. m. Chez les Doreurs, le mordant est un vernis qui sert à retenir l' or en feuilles, que l' on aplique sur de cuivre, du bronze. = Ce mot de mordant, s' emploie dans d' autres Arts. _ M. Marmontel l' emploie au figuré: "L' âme prend, à la longue une teinture des affections vertueuses dont elle se pénètre: l' intérêt qu' elles lui inspirent, leur sert comme de mordant. Cette métaphôre ne plaira peut-être pas à tout le monde. Je n' ôse, ni la condamner, ni l' aprouver. = Mordicant, en Physique et en Médecine, âcre, piquotant, corrosif. "Sel, suc mordicant; humeurs mordicantes. = Les deux adjectifs se disent au figuré. "Esprit mordant, style mordant. "Il a l' humeur mordante, ou mordicante. "Il est mordicant. "Il y a dans cet ouvrage des traits mordicans. = Mordant est plus usité dans le discours ordinaire. Mordicant est plus en usage parmi les Néologues, et plus propre au style critique.
   MORDANT, aime à suivre le substantif, sur-tout au masc. "Traits mordants, Épigrame mordante: le féminin peut quelquefois précéder, sur-tout en vers.
   La dédaigneuse et mordante Satire.
       Rouss.
"Ses mordantes censures. Journ. de Mons.

MORDRE


MORDRE, v. act. Je mords, tu mords, il mord; nous mordons, etc. Je mordois, ou mordais, je mordis, j' ai mordu, je mordrai, je mordrois ou mordrais. Mords; que je morde, je mordisse; mordant, mordu. = 1°. Au propre, serrer avec les dents. "Ce chien mord les passans. "Cet enfant a mordu sa nourrice = Par extension, on le dit des oiseaux, et même des insectes, quoiqu' ils n' aient point de dents. = 2°. Au figuré, médire, critiquer. En ce sens, il est neutre. "Il mord, il pince tout en riant. "Il cherche à mordre sur tout. "Il n' y a pas à mordre sur sa conduite.
   Esprit du dernier ordre,
   Qui, n' étant bon à rien, cherchez sur tout à mordre.
       La Font.
On dit assez élégamment, même en prôse, faire mordre la poussière à, terrasser, tuer. "Ils firent mordre la poussière à leurs énemis. L. T. = En parlant de sciences, n' y pas mordre, n' y rien comprendre. = On dit, en manière de proverbe: un aveugle y mordrait; cela est si clair, qu' un aveugle même le pourrait voir. = Il vaut autant être mordu d' un chien que d' une chienne; de quelque côté que viène le mal, on y est sensible. = Au chien qui mord, il faut jeter des pierres; tout le monde devrait se réunir contre les médisans. = Tout chien qui aboie ne mord pas, tous ceux qui menacent ne font pas toujours grand mal. = Il s' en mordra les doigts, ou les pouces; il s' en repentira. = Mordre à l' hameçon, ou à la grape, écouter avec plaisir une proposition; la recevoir volontiers.

MORDS


MORDS, Voy. MORS.

MôRE


MôRE, s. m. MORESQUE, adj. [Môre, morèske: 1re long. au premier; 2e e muet au premier, è moyen au second. = Quelques-uns écrivent encôre Maure, Mauresque: ceux-ci sont plus conformes à l' étymologie; mais ils le sont moins à l' usage présent.] More, habitant de la Mauritanie. Par extension, on le dit des Peuples d' Afrique, qui sont du côté de la Méditerranée. On apèle Nègres ceux qui sont du côté de l' Océan. On a aussi doné ce nom aux Conquérans Arabes et Turcs qui dominent dans les Indes. Les Indiens apèlent Maures de la Mecque ou des détroits, les Arabes qui comercent dans l' Inde par la Mer rouge. = Un Missionaire des Indes dit, au féminin, une Mauresse, des Mauresses. Le Rich. Port. met Moresque. L' Acad. ne le dit pas des persones. = Gris de môre, couleur grise, tirant sur le noir. = En st. prov. traiter quelqu' un de turc à môre, avec dûreté et sans aucun égard, comme les Turcs traitent les Môres. Voy. TURC à la fin; voy. aussi LAVER.
   MORESQUE, qui a raport aux coutumes des Môres. "Danse, fête, galanterie moresque. = S. f. "La moresque, la danse moresque. "La moresque ressemble à la sarabande espagnole. = En termes de Peintûre, moresque est une peintûre faite de caprice, représentant des branchages, des feuillages, qui n' ont rien de naturel. Acad. On dit aussi, et plus souvent, Arabesque.

MORFIL


MORFIL, s. m. 1°. Petites parties d' acier, qui restent au tranchant d' un couteau, d' un rasoir, etc. quand on les a passés sur la meule. "Ôter le morfil d' un rasoir, etc. = 2°. Dents de l' Éléphant, avant qu' elles soient travaillées. "On tire beaucoup de morfil des côtes de Guinée.

MORFONDRE


MORFONDRE, v. act. MORFONDûRE, s. f. [2e lon. 3e lon. aussi au 2d.] Morfondre, causer un froid incomode. "Ce vent vous morfondra. "Il ne faut pas desseller sitôt les cheveux, de peur de les morfondre. = Se morfondre, au propre, se refroidir. Au figuré, s' ennuyer, perdre du tems à atendre, à poursuivre une entreprise. "Ce Général s' est morfondu devant cette place. "Il se morfond à la Cour: il n' obtiendra rien. "Je me suis morfondu à vous atendre.
   Laisser les créanciers se morfondre à la porte.
       Boileau.
= La pâte se morfond, elle perd la chaleur qu' elle doit avoir pour faire de bon pain.
   MORFONDûRE, maladie des chevaux, qui ont été saisis de froid, après avoir eu chaud.

MORGUE


MORGUE, s. fém. MORGUER, v. act. [Morghe, ghé: 2e e muet au 1er, é fer. au 2d: l' u n' est dans ces mots que pour doner au g un son fort qu' il n' a pas devant l' e: sans cet u on prononcerait morje, Morjé.] Morgue est 1°. mine sérieûse, où il parait de l' orgueuil et de la fierté. "Avoir de la morgue. _ Tenir sa morgue, avoir une gravité afectée dans les fonctions publiques d' une charge. = Morgue se dit du style, et ce vice comun dans les faux Philosophes, a mis ce mot à la mode. "Il n' y a dans ces écrits que de grands mots, et une morgue insuportable. Anon. "Cette philosophie de M. Dorat, est douce, facile, riante, sans fiel, sans morgue et sans prétention. Ann. Lit. = 2°. Endroit à l' entrée d' une prison, où l' on tient quelque tems les prisoniers, pour que le Geolier les regarde fixement, afin de les reconaître ensuite. = 3°. Endroit où l' on expose les corps morts, dont la Justice se saisit. "On a porté ce corps à la morgue.
   MORGUER, braver avec insolence. "Il le morgue par tout où il le rencontre. "Est-ce pour me morguer que vous me regarder de la sorte?

MORIBOND


MORIBOND, ONDE, adj. Qui va mourir. "Il est moribond; elle est moribonde. _ Par exagération, qui est malade de langueur. "Il est tout moribond.

MORICAUD


MORICAUD, AUDE, adj. [Morikô, kôde: 3e lon. Ceux qui écrivent Maure, écrivent Mauricaud.] Qui a le teint de couleur brune. "Il est moricaud; elle est un peu moricaûde. = Subst. "C' est un grôs moricaud; une petite moricaûde. Il n' est que du st. famil. et il est plus d' usage comme subst. que comme adject.

MORIGÉNER


MORIGÉNER, v. act. [3e et 4eé fer.] Ceux qui disent moriginer parlent mal. Trév. = Instruire aux bones moeurs et corriger les mauvaises. "Ce père n' a pas soin de morigéner ses enfans. Quand ils manquent à leur devoir, il doit les morigéner.

MORILLE


MORILLE, s. f. [Moriglie: mouillez les ll.] Sorte de petit champignon qu' on met dans les ragoûts.

MORION


MORION, s. m. [Mori-on.] Armûre de tête plus légère que le casque.

MORNE


MORNE, adj. Triste, mélancolique. Il se dit des persones et des chôses. "Il est morne et pensif. "Il a le visage morne. _ "Un morne silence: couleur morne. "Tems triste et morne.

MORNIFLE


MORNIFLE, s. f. Terme populaire. "Coup de la main sur le visage.

MORôSE


MORôSE, adj. Morne, triste. "Pensées morôses. Il ne se dit que par les Savans. "Depuis deux ans, l' Académie de Peintûre a eu des idées morôses, bien lugubres. Ann. Lit. "Ces pères, fait dire l' Auteur des Numéros à un jeune fat, sont toujours un peu moroses; cependant il faut être juste, le mien est bon homme.

MORPION


MORPION, s. m. Vermine qui s' atache aux endroits du corps où l' on a du poil.

MORS


MORS, s. m. Autrefois on écrivait mords avec un d, parce qu' il vient de mordre. Plusieurs l' écrivent encôre de la sorte. = Pièce de la bride qui se place dans la bouche du cheval. "Mors rude ou doux. "Cheval, qui mâche son mors. = Prendre le mors aux dents se dit, au propre, d' un cheval tellement échaufé, qu' il est insensible au mors, et devient en quelque sorte furieux, de sorte que le cavalier ne peut plus le gouverner, ni le retenir. "Les chevaux prirent le mors aux dens et se précipitèrent avec tout le carrosse. = Au figuré (st. famil.) On le dit d' un homme qui se met à travailler avec une ardeur extrême, aprês avoir resté quelque tems dans l' indolence et dans l' inaction. Il se dit en mal comme en bien.

MORSûRE


MORSûRE, s. f. [2e lon. 3ee muet.] Plaie, meurtrissûre, ou marque faite en mordant. "La morsûre d' un chien, d' un cheval Morsûre de puces. = Suivant Trév. il se dit, figurément, de la médisance. "Les morsûres de la calomnie font des plaies toujours incurables. _ Cette métaphôre n' est pas du goût d' aujourd' hui; et quoiqu' on dise encôre mordre pour médire, et mordant pour médisant, on ne dit plus morsûre pour médisance.

MORT


MORT, s. f. [On ne prononce point le t final.] Mort, au propre, c' est la fin, la cessation de la vie. Mort naturelle, ou violente, tragique, subite, soudaine, précipitée, prématurée, avancée. "Le jour de sa mort; à l' heure de la mort. = Voy. TRÉPAS. = Il se dit souvent, dans le st. médiocre, de l' état où l' on meurt relativement à la conscience: "Elles y ont mené une vie fort exemplaire, et y ont fait une très-sainte mort. Marsolier. "Ce sont ces morts qui sont grandes devant Dieu. Mascar. = On apèle vulgairement, une belle mort, une mort édifiante, et qui a toutes les aparences d' une mort chrétiène. "La seule consolation dont elle fut capable, étoit la confiance religieuse que lui inspiroit une si belle mort. Marm. On a dit souvent qu' une belle mort n' était pas toujours une sainte mort. = Être à l' article de la mort; à l' agonie: entre la vie et la mort; dans le plus grand danger; avoir la mort sur les lèvres; l' air d' un mourant. Être malade à la mort, fort malade. * Quelques-uns ont dit, en ce sens, être à la mort. "Ce sont des agitations incroyables... il en est presque à la mort. BOSS. "On nous fit cette horrible opération... Nous en étions toutes à la mort. Volt. Cette expression est tout au plus du st. famil. = Mort de l' âme, l' état où l' âme tombe par le péché, qu' on apèle, à cause de cela, mortel. = Mort civile, la privation des droits et des avantages de la société. "Le bannissement à perpétuité emporte la mort civile, est une mort civile. = Depuis quelque tems on emploie volontiers le mot de mort dans le sens figuré, et apliqué aux chôses: "Il (Charles II) fuyoit sur-tout l' étiquette, qu' il regardoit comme la mort du plaisir. D' Arnaud. = On a toujours dit, par exagération, mort, pour grande douleur: je soufre mille morts; pour violent chagrin: "Ce fils dénaturé lui donne la mort. _ Il soufre mort et passion. "Ce Prédicateur nous a fait soufrir mort et passion. Celui-ci est familier.
   Le Proverbe dit: après la mort le Médecin, en parlant d' un remède, d' un secours tardif. = Il y a remède à tout fors (hors, excepté) à la mort. = Il est mort de sa belle mort, de sa mort naturelle. = La mort n' a pas faim, dit-on de quelqu' un qui est indigne de vivre. Et, populairement, d' un valet qui tarde à revenir: il serait bon à aler quérir la mort. = C' est une mort; c' est une grande peine: "C' est une mort que d' avoir afaire à un tel homme, de faire juger un procês, etc.
   À~ MORT, adv. Il fut blessé, frapé à mort. = À~ la mort, grandement. "Haïr à mort, ou à la mort: le 2d est le plus usité. "Vous vous ennuyerez à la mort. Th. d' Éduc. "C' est ce qui me contrarie à la mort. Ibid. "Cela me déplait à la mort.
   MORT AUX RATS, drogue dont on se sert pour faire mourir les rats.

MORT


MORT, MORTE, adj. et partic. du v. MOURIR. "Il est mort: elle est morte au monde: il est mort civilement. = Il s' emploie quelquefois substantivement. "Il y eut du côté des Français deux mille morts et trois mille blessés. En Poésie, on le dit au lieu de cadâvres.
   Tant de morts, dont l' Hydaspe a vu couvrir ses rives.
C. à. d. Tant d' hommes morts, dont les corps ont couvert les rives de l' Hydaspe = On dit, en ce sens, dans le discours ordinaire, enterrer, ensevelir les morts. "Il est pâle comme un mort, etc. Fontenelle a aussi employé le fém. substantivement. "Comme elle en parloit l' autre jour à de certaines mortes françoises, etc. À~ mon avis, cela n' est bon que dans un Dialogue des morts. _ Le peuple dit: le paûvre mort, la paûvre morte, pour dire, le défunt, la défunte.
   On dit d' un malade, de la guérison de qui on désespère: C' est un homme mort. = Laisser pour mort. "On bat le criminel, jusqu' à le laisser souvent pour mort. Let. Édif. = Tomber mort (fig famil.) être surpris et embarrassé. "Comme nous étions le plus en train, nous avons vu aparoître M. Le Premier avec son grand deuil. Nous sommes tous tombés morts: pour moi c' étoit de la honte que j' étoïs morte: je n' avois rien fait dire à ce Caton sur la mort de sa femme. Sév. Je crois qu' il falait dire, de honte, et non pas de la honte. Mde. de Sévigné, joint ici deux expressions familières, tomber mort et mourir de honte. = Ailleurs elle emploie tomber mort dans son sens naturel. "Je trouve que dès qu' on tombe malade à Paris, on tombe mort. Cela n' est joli que par l' oposition des deux expressions raprochées, et dans une lettre, et sous la plume de Mde. de Sévigné. Du reste, quoiqu' on dise tomber malade, ou ne dit pas, tomber mort en ce sens. = Faire quelqu' un mort, parait d' abord une expression ridicule. Mde de Sévigné la rend pourtant très-jolie. "J' ai oui dire à Brayer et à Bourdelot, qu' en voulant faire les enfans robustes, on les fait morts. _ On les tûe, on les fait mourir auraient été plus suivant l' usage; mais ils n' auraient pas été aussi agréables. L' esprit et le goût peuvent s' élever avec succês au-dessus des règles; mais souvent les bons originaux forment de mauvaises copies.
   On dit, proverbialement, fraper sur quelqu' un comme sur une bête morte; le fraper outrageûsement. = Morte la bête, mort le venin; quand un énemi est mort, il ne peut plus nuire. On dit dans le même sens, que les morts ne mordent plus. = Un chien vivant, vaut mieux qu' un lion mort; ce qui se dit figurément des hommes. = Les morts ont toujours tort; on excûse toujours les vivans aux dépens des morts.
   Mort, morte se disent des chôses inanimées. Mort bois, et bois mort. Voy. BOIS = Eau morte, eau qui ne coule point, comme celle des étangs; morte eau, les marées, quand elles sont les plus bâsses. = Argent mort: de l' argent dont on ne tire aucun profit. Voy. Main, saison, paye.

MORTADELLE


MORTADELLE, subst. fém. [Morta--dèle: 3e è moy. 4e e muet.] Grôs saucisson, qui vient d' Italie.

MORTAISE


MORTAISE: Voy. MORTOISE.

MORTALITÉ


MORTALITÉ, s. f. MORTEL, ELLE, adj. MORTELLEMENT, adv. [2e è moy. aux 3 dern. tèl, tèle, tèleman.] Mortalité, est 1°. Condition, de ce qui est sujet à la mort. _ Il ne se dit en ce sens que dans le dogmatique. "Les libertins s' éforcent de croire à la mortalité de l' âme, pour vivre tranquilles dans leurs désordres. "Le Fils de Dieu s' est revêtu de notre mortalité. = 2°. Quantité d' hommes ou d' animaux, qui meurent d' une même maladie. "Il y eut une grande mortalité. On ne le dit point d' une batâille.
   MORTEL, est un de ces adjectifs, qui ont des sens diférens suivant qu' ils sont placés devant ou après le substantif, qu' ils modifient. Quand il précède le substantif, il signifie, grand, excessif. "Despréaux étoit le mortel énemi du faux. "Il y a trois mortelles lieûes de là ici. Quand il signifie, qui est sujet à la mort, il ne peut se mettre qu' après le substantif. Racine n' a pas fait atention à cette règle, quand il a dit dans Esther.
   Le succès est certain,
   Si ce succès dépend d' une mortelle main.
Au lieu d' une main mortelle. = Ainsi l' on dit; un coup, un poison mortel; une plaie, une maladie mortelle, et par exagération, pour dire extrême; une haine, une douleur mortelle; un déplaisir mortel. _ Avec éfroi, il semble que l' usage mette une exception. On dit, un mortel éfroi, plutôt qu' un éfroi mortel.
   MORTEL, sujet à la mort. "Tous les hommes sont mortels; le corps est mortel; l' âme n' est pas mortelle. = Il a quité sa dépouille mortelle: il est mort: cette expression n' est que du haut style. = S. m. "C' est un heureux mortel. "Les paûvres, les misérables mortels. Et par exagération: elle n' a pas l' air d' une mortelle. = Parmi les jeunes gens, qui aiment les mots poétiques, plusieurs disent toujours mortel pour homme. "Il est peu de mortels, dit un Auteur, qui doivent leurs crimes à leur seule iniquité. Il aurait été mieux de dire: il est peu d' hommes. Pourquoi emboucher la trompette dans le discours simple et ordinaire? = Ce merveilleux mortel. Hist. des Stuarts. J' aimerais mieux dire, cet homme merveilleux. = On dit, être mortel, être un homme mortel, et non pas, être un mortel, comme dit le P. Griffet. "Tout ce que je puis dire; c' est que je suis un mortel, et que tôt ou tard mes jours auront une fin. Ann. Chrét.
   REM. Racine, dans les Frères Énemis, done à mortel le sens et le régime de funeste.
   Plus qu' à mes énemis la guerre m' est mortelle.
Si cela peut être bon en vers, il ne vaudrait rien en prôse.
   MORTELLEMENT: à mort. "Blessé mortellement. = Grièvement: "Pécher mortellement; ofenser quelqu' un mortellement. = Excessivement: haïr mortellement.

MORTIER


MORTIER, s. m. [mor-tié: 2eé fer.] Il a plusieurs sens, qui n' ont qu' un raport éloigné l' un avec l' aûtre. = 1°. Mélange de sâble, de terre, ou de ciment, avec de l' eau, ou avec de la chaux: "Faire du mortier. "Du mortier de terre. Mortier à chaux et à sâble; à chaux et à ciment. = 2°. Sorte de vâse de métal, de pierre, ou de bois, etc. dans lequel on pile certaines chôses. = 3°. Bonet rond de velours noir, orné d' un ou de deux galons d' or, que portent le Chancelier, et les Présidens au Parlement, pour marque de leur dignité. "Président à mortier. = 4°. Pièce de fonte, dont la bouche est fort large, et dont on se sert pour jeter des bombes.

MORT-IVRE


MORT-IVRE, adj. Je crois que les deux mots doivent se décliner, et qu' on doit dire d' une femme: elle est morte-ivre; et au pluriel, ils sont morts-ivres, et non pas, comme dit l' Ab. Prévot: ils en buvoient jusqu' à tomber mort-ivres. H. DES VOY.

MORTIFIANT


MORTIFIANT, ANTE, adj. MORTIFIER, v. act. MORTIFICATION, s. f. [Mor--tifi-an, ante, fi-é, fikation: 4e lon. aux 2 premiers, é fer. au 3e.] Mortifier, est 1°. Au propre, faire que la viande deviène plus tendre. "Le grand air mortifie la viande: elle a peine à se mortifier par le froid. "Ces perdrix ne sont pas assez mortifiées. = 2°. Au figuré, afliger son corps par des macérations. "Mortifier sa chair; se mortifier. = Par extension, mortifier ses sens, ses passions, les réprimer. = 3°. Causer du chagrin par des réprimandes, ou des procédés durs et fâcheux. "On lui a dit des chôses, qui l' ont mortifé. "On l' a extrêmement mortifié en lui refusant cette charge. = Être mortifié, être fâché. "Je suis mortifié de ne pouvoir faire ce que vous me demandez.
   MORTIFIANT, n' a que le 3e sens: "Cela est bien mortifiant.
   MORTIFICATION, n' a le sens propre qu' en chirurgie; la mortification des chairs, qui sont prês de se gangréner. = Il se dit au fig. dans le 2e et 3e sens. "La mortification de la chair, des sens, des passions. = Au pluriel, austérités: pratiquer de grandes mortifications. = Dans la 3e acception, il se dit dans les deux nombres. "Il a reçu une grande mortification: on lui a doné de grandes mortifications. = Cette expression date du milieu du siècle passé. "Il y a déjà quelque tems, dit le P. Bouhours, qu' on se sert de ces mots dans le sens de chagrin, chagriner. "Ce Courtisan a été mortifié. "Il a reçu une grande mortification. "Il y a bien des mortifications à essuyer à la Cour.

MORTOISE


MORTOISE, s. f. [Plusieurs disent mortaise. L' Acad. les disait d' abord tous deux. Ensuite elle suprima mortoise. Enfin, elle l' a remis dans la dern. Édit. et elle ne fait plus mention de mortaise. Le Rich. Port. renvoie de mortoise à mortaise. J' estime que celui-ci est le meilleur.] Entâillûre, faite dans une pièce de bois de menuiserie ou de charpenterie, pour y recevoir le tenon d' une autre pièce, quand on les veut assembler. "Ouvrage assemblé, ou bâti à tenons et à mortoises.

MORTUAIRE


MORTUAIRE, adj. [Mortu-ère: 3eè moy. et long; 4e e muet.] Il ne se dit qu' avec drap, registre et extrait. = Drap mortuaire, grande pièce de drap ou de velours, noire avec la croix blanche, ou blanche avec la croix noire, qui sert dans les funérâilles, dans les services funèbres, etc. Voy. POELE. = Registre mortuaire, qui se tient dans chaque Paroisse, et où l' on inscrit ceux qui meurent. On apèle extrait mortuaire, les extraits qu' on tire de ces sortes de registres. * Pluche dit, cérémonies mortuaires; assemblée mortuaire, et M. Linguet, panégyriste mortuaire; mais l' usage n' a pas admis ceux-ci, ou ne les admet que dans le style plaisant ou critique.

MORûE


MORûE, s. f. [2e lon. 3ee muet.] Quelques-uns disent moluë, mais mal. Poisson de mer, dont la plus grande pêche se fait au banc de Terre-Neuve, dans l' Amérique Méridionale. Morûe fraiche, ou Morûe verte. "Morûe salée: aler à la pêche des morûes. = Une poignée de morûes: deux morûes jointes ensemble.

MORVE


MORVE, s. f. MORVEAU, s. m. MORVEUX; EûSE, adj. et subst. [2e e muet au 1er, dout. au 2d, lon. aux 2 dern. Morve, vo, veû, veû-ze.] Morve, est 1°. Excrément visqueux, qui sort des narines. "La morve lui sort du nez. = 2°. Maladie contagieûse à laquelle les chevaux sont sujets. = Morveau, morve plus épaisse et plus recuite. L' Acad. remarque fort bien que ce mot est désagréable à entendre et qu' on doit éviter de s' en servir. = Morveux, qui a de la morve. "Enfant morveux: nez morveux. = Cheval morveux. = Subst. Terme de mépris, en parlant des enfans. "Petit morveux, petite morveûse. "Voilà un beau morveux, un plaisant morveux pour faire l' entendu. = Voy. GALEUX.
   On dit, proverbialement, qu' il vaut mieux laisser son enfant morveux, que de lui arracher le nez; pour dire, qu' il vaut mieux tolérer un petit mal, un léger défaut que de se servir d' un remède, d' un moyen violent, qui aurait de plus grands inconvéniens.

MOSAïQUE


MOSAïQUE, s. f. [Moza-ike.] Ouvrage de raport, où par le moyen de petites pierres, ou de petits morceaux de verres, diféremment colorés, on représente des figûres, on copie même des tableaux. On dit: une mosaïque; un ouvrage, une peintûre de mosaïque, ou en mosaïque. = On apèle encore mosaïque des ouvrages faits par petits compartimens. "Ouvrage à la mosaïque (le Dictionaire de Bayle) qui, dans son bisârre assortiment de citations et de réflexions curieuses et comiques, fournit de quoi former le plus monstrueux assemblage d' obscénité, d' hérésies et d' athéisme. Abus de la Critique.

MOSQUÉE


MOSQUÉE, s. f. [Moské-e: 2e é fer. et long, 3e e muet.] Lieu où les Mahométans s' assemblent pour faire leurs prières.

MOT


MOT, s. m. [Le t final ne se prononce que devant une voyèle ou quelquefois à la fin de la phrâse.] 1°. Terme, expression (Synon.) Le mot est de la langue; le terme est du sujet; l' expression est de la pensée. L' usage décide du 1er, la convenance fait la bonté du 2d; le tour fait le mérite du dernier. "La pureté du langage dépend des mots, sa précision dépend des termes; et son brillant dépend des expressions. _ Tout discours travaillé demande que les mots soient français, que les termes soient propres, et que les expressions soient nobles. _ Un mot hazardé choque moins qu' un mot, qui a vieilli. Les termes d' Arts sont aujourd' hui moins ignorés dans le grand monde: il en est pourtant, qui n' ont de grâce que dans la bouche de ceux, qui font profession de ces arts. Les expressions guindées et trop recherchées font à l' égard du discours ce que le fard fait à l' égard de la beauté du sexe: employées pour embellir, elles enlaidissent. GIR. Synon.
   2°. Mot, se prend pour ce qu' on dit, ou qu' on écrit à quelqu' un en peu de paroles. "Il lui dit un mot à l' oreille. "Dites-lui en un mot. "Je lui en écrirai un mot. "Je vous expliquerai cela en un mot, en deux, ou trois, ou quatre mots. L' Acad. remarque que l' usage ne va pas plus loin, et qu' on ne dit pas en cinq mots. = En un mot, adv. se place à la tête de la phrâse. Bossuet dit; il n' y a qu' à demander en un mot à ces Messieurs, etc. Là il falait dire: en un mot, il n' y a qu' à demander, etc. _ Cependant quand en un mot n' est précédé que de peu de paroles, il peut leur céder la première place. "Je vous dis en un mot, etc. Je soutiens en un mot que, etc. = Cet adverbe exprime une récapitulation abrégée de ce qu' on a dit. Quand on veut aporter une dernière raison, une dernière preûve, on doit se servir d' enfin. J' ai vu des Orateurs et des Écrivains ne pas distinguer le sens et l' emploi de ces deux adverbes: je n' en citerai qu' un seul exemple. "La Langue, qui se forma dans les Gaules, ne conserva que des mots, dérivés du latin. La syntaxe de cette langue se forma diférente de la syntaxe latine. En un mot, la langue naissante se vit asservie à rimer ses vers. L' Ab. Du Bos. Voilà trois chôses diférentes exprimées dans ces trois phrâses. En un mot est donc déplacé dans la 3e: il falait dire, enfin. = On dit, sans article: ne dire mot, ne répondre mot; ne pas parler, ne pas répondre. Et le proverbe dit: qui ne dit mot consent. _ Ne soner mot, ne rien dire; est plus familier. = On dit d' un homme qui parle peu, s' il ne dit mot, il ne pense pas moins; ce qui se dit quelquefois par dérision. = On dit, traduire mot à mot. Plusieurs disent mot pour mot, comme Boileau, Fontenelle, Fréron, M. l' Ab. de Lille, etc. Bossuet disait de mot à mot. Le P. Paulian, dit mot par mot. Celui-ci doit probablement être mis sur le compte de l' Imprimeur. _ Le Rich. Port. ne met que mot à mot, et mot pour mot: l' Acad. done plusieurs exemples du 1er et un seul du 2d. = Bossuet dit de Luther: il faut que tout pâsse à son mot, c. à. d. que tout se fasse suivant son goût et par ses ordres. Je ne crois pas que cette expression soit usitée aujourd' hui, du moins hors du discours familier. L' Acad. dit: il veut être payé à son mot.
   À~ demi mot, adv. Un Auteur moderne a dit au pluriel, à demi-mots: ce n' est pas l' usage. "Il est des chôses, qu' il faut entendre à demi-mots. On dit toujours à demi-mot, au singulier. = À~ ces mots, adv. Quand il eut dit cela. "À~ ces mots, Idoménée embrassa Télémaque. Fénél. _ Il se met à la tête de la phrâse. = Sans dire mot, adv. Sans parler, sans rien dire. "Il se retira sans dire mot. On peut pâsser aux Poètes qui ont besoin d' une syllabe de plus de dire sans dire le mot.
   Monsieur part sans dire le mot.
       L' Ab. Reyre.
L' Acad. met, sans dire mot, sans mot dire. = N' avoir pas le plus petit mot à dire à une chôse; n' avoir rien à répliquer: "Cela est vrai, je n' ai pas le plus petit mot à dire à cela. Th. d' Éduc. = Prendre quelqu' un au mot, accepter sur le champ les ofres qu' il fait. = Doner le mot à quelqu' un; convenir de ce qu' on doit dire ou faire en présence d' autres persones. "Cette demoiselle se tournoit souvent de mon côté d' un air amical et familier; et moi je m' y conformois, comme si elle m' avoit doné le mot. MARIV. _ Avoir le mot, être averti, être d' intelligence avec quelqu' un. "Cet homme, qui avoit le mot, ne fit semblant de rien. Les deux derniers ont raport au n°. 4°. Voy. à la fin. = Avoir le mot pour rire, être plaisant. "Je ne vois pas où est le mot pour rire à tout cela. = Trancher le mot, dire nettement sa pensée. = Traîner ses mots, parler très-lentement. = Compter ses mots, parler avec lenteur et avec afectation.
   Création des mots. VOLTAIRE a dit:
   Si vous ne pensez pas, créez de nouveaux mots.
On pourrait dire peut-être encore mieux, en renversant le sens du vers:
   Si vous pensez beaucoup, créez de nouveaux mots
Horace en seroit le garant:
   Dixeris egregiè notum si callida verbum,
   Reddiderit janctûra novum.
Mais il faut que ce soit, licentia sumpta pudenter. FRÉRON.
   À~ ce compte, on pourrait dire qu' il y a peu de pudeur parmi le plus grand nombre des Auteurs modernes. Jamais les licences poétiques n' ont été aussi loin que celles que se donent aujourd' hui les prosateurs. Il n' est si petit Auteur, qui ne se croie en droit de créer des mots, et jamais le néologisme n' a fait de si grands ravages. Si de créer des nouveaux mots était une preûve qu' on pense beaucoup, jamais la France n' aurait eu un si grand nombre de penseurs profonds et vigoureux. Mais tous ces Néologues ne sont pas des Rousseau de Genève et des Linguet. Il en est beaucoup, dont tout le mérite consiste dans l' afectation de ces locutions éphémères; je dis mérite aux yeux des sots. Dans le droit, Fréron, qui a corrigé le vers de Voltaire, avait raison. Dans le fait, c' est Voltaire, qui a le mieux dit:
   Si vous ne pensez pas, créez de nouveaux mots.
J. J. Rousseau exprime, dans la phrâse suivante, les conditions que doit avoir la création des mots nouveaux: "Quand j' ai hazardé le mot investigation, j' ai voulu rendre un service à la Langue, en y introduisant un terme doux et harmonieux, dont le sens est déjà connu, et qui n' a point de synonyme en français. C' est, je crois, toutes les conditions qu' on exige, pour autoriser cette liberté salutaire.
   Fortune des Mots. "Qui pourroit rendre raison, dit La Bruyère, de la fortune de certains mots, et de la proscription de quelques aûtres? Ains a péri: la voyèle qui le comence et qui est si propre à l' élison, n' a pu le sauver: il a cédé à un autre monosyllabe (mais) qui n' est au plus que son anagramme. Maint est un mot, qu' on ne devoit jamais abandoner, et par la facilité qu' il y avait à le couler dans le style, et par son origine, qui est toute française. Moult, quoique latin, était dans son tems d' un même mérite, et je ne vois pas par où beaucoup l' emporte sur lui, etc. etc. Horace l' a dit:
   Multa renascentur qu‘ jam cecidere, cadentque.
   Qu‘ munc sunt in honore vocabula, si volet usus,
   Quem penes arbitrium est et jus et norma loquendi.
L' usage est le souverain arbitre des langues. Mais on peut lui faire quelquefois de très--humbles remontrances, ou apeler même de ses Arrêts.
   Mots consacrés. On apèle ainsi des mots particuliers, qui ne s' emploient que dans certaines ocasions: tels sont Trinité, Incarnation, Nativité, Anonciation, Cénacle, Cène, etc. Les mots propres des Sciences et des Arts sont dans le même cas, tels que groupe, attitude, clair-obscur, etc. dans la Peintûre, raréfaction, condensation dans la Physique, etc. Mais ceux-ci ne sont mots consacrés que dans le propre; ils ne le sont pas dans le figuré, quand ils peuvent y être employés. = Quand le sujet l' exige, on doit employer ces mots consacrés, et non pas leurs synonymes. Celui, qui, au lieu de la Nativité de N. S. la Visitation de la S. V. voudrait dire, la Fête de la Naissance de N. S. la Fête de la Visite de la S. V. ne dirait rien qui vaille. _ Cependant on dira bien: la Naissance de N. S. est bien diférente de celle des Princes: "La Visite que rendit la Ste Vierge à~ sa Cousine n' avait rien des visites profanes du monde. C' est ainsi qu' il faut s' exprimer dans ces phrâses, à caûse de celle et de Visites, qui sont dans le second membre. BOUH. Nativité et Visitation ne vaudroient rien là. Mais ceux, qui ont dit une chambre haute pour le cénacle, devaient dire aussi le souper pour la scène. L' un n' est pas plus ridicule que l' aûtre, et tous deux sont contre l' usage.
   Jeux de mots, pointes, quolibets. On dit aujourd' hui calembourg. Ils ont toujours été une preuve de mauvais goût; et les bons esprits leur ont toujours fait la guerre. Molière et Boileau sur-tout les ont combatus avec succês. Nous aurions besoin aujourd' hui de plusieurs Boileau et de plusieurs Molière.
   Bons mots: ils ne le sont pas pour tout le monde: il en est même peu, qui soient universellement goûtés. Il est impossible de les traduire d' une langue à l' aûtre. "Il expliquait les bons mots du Roi à son Maitre, et quoique traduits, ils paraissaient toujours des bons mots. De tout ce qui étonait Candide, ce n' était pas ce qui l' étona le moins. Volt. = Remarquez qu' on dit des bons mots, et non pas de bons mots; comme on dit des petits-maîtres, des petites maisons; et non pas de petits-maîtres, de petites maisons. _ On dit aussi des grôs mots, et non pas de gros mots, des paroles obscènes.
   Ce n' étoit plus ces pieux entretiens,
   Qu' il entendoit chez nos douces vestales,
   Mais des gros mots, et non des plus chrétiens.
       Ververt.
Des gros mots sont aussi des injures grossières.
M. Moreau dit mauvais mot, pour dire, un bon mot, qui n' est qu' une mauvaise plaisanterie. On dit toujours des bons mots, même quand ils sont mauvais. On peut dire en plaisantant, un mauvais ou un méchant bon mot.
   3°. Mot, se dit pour sentence, apophtègme, dit remarquable. "Ce Philosophe a dit un beau, un excellent mot. = 4°. Parmi les gens de guerre, le mot que le Comandant done à ceux qui sont sous ces ordres, pour que ceux du même parti se puissent reconaître. "Le mot du guet, le mot de ralliement. "Doner le mot: aler prendre le mot. = 5°. Le mot d' une énigme, d' un logogriphe, est le mot qui exprime le nom de la chôse décrite. = Dans une devise, ce sont les paroles de la devise. Voyez DEVISE.

MOTET


MOTET, s. m. [Motè; 2eè moyen.] Pseaume ou paroles de dévotion mises ne musique pour être chantées dans l' Église.

MOTEUR


MOTEUR, TRICE, subst. et adj. Celui, celle qui done le moûvement. "Dieu est le premier, le souverain moteur de l' univers. "Cet homme fut le principal moteur de cette entreprise. = Suivant l' Acad. le féminin ne s' emploie qu' adjectivement: vertu, faculté, puissance motrice. = J' ajoute, qu' en parlant d' une femme qui aurait doné le branle à une afaire, on pourrait et l' on devrait dire, qu' elle a été le moteur, et non pas la motrice de cette afaire.

MOTIF


MOTIF. Voy. plus bâs.

MOTION


MOTION, s. f. [Mo-cion, en vers ci-on.] 1°. Terme didactique. Action de mouvoir. = 2°. Proposition faite avec zèle dans une assemblée pour y faire décider quelque chôse. "Faire une motion. = Cette 2de acception nous vient des Anglais, qui en font un grand usage dans leur Parlement. _ L' Académie ne le met pas dans ce sens: mais il s' établit parmi nous; et c' est un néologisme dont on peut bien augurer.

MOTIF


MOTIF, s. f. MOTIVER, v. act. [L' f finale se prononce au 1er; dans le 2d, l' i est long devant l' e muet: il motîve, motîvera, etc.] Motif est ce qui meut, qui porte à faire quelque chôse. "Bon ou mauvais motif. "Agir par le motif de la gloire de Dieu. "L' intérêt est presque le seul motif, qui fait agir les hommes. = Motifs de crédibilité, raisons qui font croire les mystères; telles que sont celles, qui démontrent la divinité de la Religion et de son Auteur. = Motiver, c' est raporter les raisons, les motifs d' un avis, d' un arrêt. "Tous les Conseillers motivèrent leur avis. L' usage de ce verbe est borné.
   REM. Motif se dit de la cause finale, qui engage, qui détermine. M. Linguet, par distraction, lui done le sens de caûse éficiente, qui produit. Après avoir parlé de la manière de vivre des Turcs, qui devrait éloigner d' eux la peste: "Quel motif, demande-t-il, a donc pu rendre leurs demeures plus susceptibles de recéler ce venin? Quelle cause, était là, ce me semble, le terme propre.

MOTTE


MOTTE, ou MOTE, s. f. SE MOTER, v. réc. [2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Mote est, 1°. un petit morceau de terre détaché du reste du champ par la charrûe, ou la bêche. "Rompre, casser les motes. = 2°. La terre qui est atachée aux racines des arbres, quand on les lève pour les transplanter. "Lever, replanter un arbre en mote ou avec sa mote. = 3°. Mote: (et non pas moute) tan, que les Taneurs acomodent en petit pain rond, et qu' on brûle en certains endroits. = On le dit aussi du marc d' olives, acomodé de cette manière. = 4°. Bute, éminence, faite par la natûre, ou de main d' homme. "Raser, aplanir une mote. "Maison bâtie sur une mote.
   SE MOTER, en parlant des perdrix, c' est se cacher derrière des motes de terre. N°. 1°.

MOTUS


MOTUS! Interjection. Ne dites mot. "Motus! Il ne faut pas dire que vous m' avez vu sortir de-là. Mol. _ Il n' est bon que dans le style famil. "Motus sur cette afaire: n' en parlez pas.

MOU


MOU, s. m. [Monosyllabe.] Poumon de veau, d' agneau, etc. "Bouillon, fricassée de mou de veau, d' agneau, etc.

MOU


MOU, MOLLE, adj. [Mou, monosyll. Mole; 2e e muet. Voyez MOL.] 1°. Qui reçoit facilement l' impression des aûtres corps. "Lit mou, ou qui n' est pas mou. Cire molle. On apèle corps mous, ceux que le choc et la compression font changer de figûre, et qui, après le choc et la compression, ne tendent pas à reprendre la figûre qu' ils viennent de perdre. Paulian, Dict. de Phys. = 2°. Figurément, qui a peu de vigueur. "Cheval mou: homme mou au travail. "Les hommes mous et abandonés aux plaisirs, manquent de courage dans les dangers. Télém. = Mou, indolent (synon.) Un homme mou ne soutient pas ses entreprises: un indolent ne veut rien entreprendre. Le premier manque de courage et de fermeté: le second manque de volonté et d' émulation. "L' homme mou ne vaut rien à la tête d' un parti: l' homme indolent n' est pas propre à le former. GIR. Syn. = 3°. Efféminé et gâté par les délices. L' Ac. le dit des persones. "Un homme mou et efféminé; une âme molle. Il me semble qu' on ne le dit guère que des chôse qui ont quelque raport aux persones: vie molle: vivre, languir dans une molle oisiveté. = 4°. On dit du tems, qu' il est mou, pour dire, qu' il est relâché; et du vent, qu' il est mou, pour dire, qu' il est chaud et humide.
   Rem. 1°. Mou fait au plur. mous, et non pas moux, comme écrit Rollin, ou son Imprimeur. = 2°. Le masc. ne doit jamais précéder le substantif: le mou cheval; le mou Général, formeraient une inversion gauloise et barbâre. Le fém. peut quelquefois, et quelquefois même il doit marcher devant. "Molle oisiveté, et non pas oisiveté molle. "Sa molle langueur se dissipe: il sort de l' ivresse et de l' assoupissement du plaisir. Jér. Délivr. = 3°. M. Necker fait régir à mou la prép. à et l' infinitif. "Les vérités utiles échapent à la pensée, qui est molle à les chercher et à les saisir. _ Ce régime est dans l' analogie de la langue: mais il y en a peu d' exemples dans les Auteurs.

MOUCHARD


MOUCHARD, s. m. [Le d final ne se prononce pas.] Espion de Police. = On dit aussi mouche; et celui-ci est moins méprisant. Voyez MOUCHE, n°. 2°.

MOUCHE


MOUCHE, s. f. MOUCHERON, s. m. [2e e muet.] Mouche est, au propre, le nom d' un petit insecte ailé. "Le Taon, le Frélon sont des espèces de mouches. = Ce mot fournit à plusieurs expressions du style familier. = Prendre la mouche; se fâcher pour des riens. "Pourquoi prendre la mouche? Je vous conseille, dans votre première édition, de vous rapatrier avec les règles de la Gramaire. Anon. = Disputer sur des piés de mouche, sur des chôses de néant. = Quelle mouche vous pique? Quel sujet avez-vous de vous mettre en colère?
   Je voudrois bien savoir...
   Quelle mouche a piqué ce colère vieillard...
   On ne sait bien souvent quelle mouche le pique.
       Boileau.
"C' est ainsi que Coulanges vous nomme dans ses lettres, tout sérieusement, sans hésiter, ni sans dire quelle mouche l' a piqué. SÉV. Dans cet endroit, cela se dit en riant, et se prend en bone part; car il y est question d' un titre très-flateur pour Mde. de Grignan. = Fine mouche, femme adroite et rusée. On le dit aussi d' un homme. = Pieds de mouches, écriture dont le caractère est fort petit et mal formé.
   2°. MOUCHE, celui ou celle que des Oficiers de Justice détachent, pour suivre la marche de ceux qu' ils ont ordre d' arrêter. = 3°. Petit morceau de tafetas noir, préparé, que les Dames se mettent sur le visage. "La mode des mouches est un peu pâssée. Voyez un exemple au mot JUPE.
   MOUCHERON, sorte de petite mouche.

MOUCHER


MOUCHER, v. act. [Mouché; 2eé fer.] Il n' est actif, et n' a le régime simple, qu' en parlant des enfans et des persones, qui ne peuvent se moucher elles-mêmes. Presser les narines pour en faire sortir les excrémens qui tombent dans le nez. "Mouchez cet enfant. "Je ne puis agir: il faut qu' on me mouche. = Il s' emploie presque toujours comme réciproque, avec le pronom personel; se moucher: "Mouchez-vous? "Dites-lui qu' il se mouche. = * Plusieurs le font neutre, et l' emploient au lieu du réciproque. "J' ai beaucoup mouché aujourd' hui, disent-ils; au lieu de dire: je me suis mouché souvent. L' Abé Grosier le dit de même. "Ils commencent et continuent de concert à tousser, cracher, moucher avec des éclats, qui couvrent sans peine la voix foible et timide du modeste Directeur. _ Tousser et cracher sont neutres; moucher ne l' est pas. M. Desgrouais le met au nombre des gasconismes; mais je l' ai oui dire à d' aûtres qu' à des Gascons; ainsi que purger, pour se purger. Voyez PURGER.
   On dit proverbialement: ne pas se moucher du pied (d' autres disent, du coude.) C' est un homme qui ne se mouche pas du pied; il est habile, et il n' est pas aisé de lui en faire acroire. _ Suivant l' Académie, il est populaire.
   Certes, monsieur Tartufe, à bien prendre la chose,
   N' est pas un homme, non, qui se mouche du pied.
       Mol.
= Du tems qu' on se mouchait sur la manche; au bon vieux tems. Voyez GALEUX.

MOUCHETER


MOUCHETER, v. act. MOUCHETûRE, s. f. [2e e muet, 3e é fer. au 1er, lon. au 2d.] Moucheter, c' est faire de petites marques rondes sur une étofe de soie. = En parlant de l' hermine, c' est y méler de petits brins de fourrure noire.
   MOUCHETÉ, adj. Se dit de certains animaux; et signifie la même chôse que TACHETÉ
   MOUCHETûRE, ornement qu' on done à une étofe ou à une hermine, en les mouchetant.

MOUCHETTES


MOUCHETTES, s. f. pl. [Mou-chète; 2e è moy. Il n' a point de singulier.] Instrument avec lequel on mouche les chandelles, les bougies. Plusieurs, parmi les Gascons et les Provençaux, disent mouchettes pour pincettes.

MOUCHEUR


MOUCHEUR, s. m. Il ne se dit que de celui qui mouche les chandelles au Théâtre.

MOUCHOIR


MOUCHOIR, s. m. [Mou-choar.] Linge dont on se sert pour se moucher. C' est sa signification, quand on le dit tout seul. _ Mouchoir de cou; linge dont les femmes se couvrent le cou et la gorge.

MOûDRE


MOûDRE, v. act. [1re lon. 2ee muet.] Je mouds, tu mouds, il moud; nous moulons; je moulois ou moulais; j' ai moulu; je moulus; je moudrai; je moudrois ou moudrais;mouds; que je moule, je moulusse; moulant, moulu. = Broyer, mettre en poûdre par le moyen de la meule. "Moûdre du blé, du riz, etc. Par extension: moûdre du café. = Il se dit, neutralement, du moulin: "ce moulin ne peut moûdre que six mois de l' année, faûte d' eau. Il ne moud pas assez menu. "Les moulins à vent ne moulent ni quand le vent est foible, ni quand il est trop fort.
   MOULU, part. et adj. "Il a le corps tout moulu, il est tout moulu; il sent des douleurs par tout le corps; on l' a tout moulu de coups; on l' a batu outrageûsement. = Or moulu, réduit en petites parties, pour dorer les métaux. "Cuivre doré en or moulu.

MOûE


MOûE, s. f. [1re lon. 2ee muet.] Grimace faite par dérision ou par mécontentement. Dans le 1er sens, il régit le datif. "Faire la moûe à quelqu' un. Dans le 2d sens, il se dit sans régime. "Il est fâché ou chagrin; il fait la moûe. = On dit, populairement, d' un pendu: qu' il fait une vilaine moûe aux passans.

MOUELLE


MOUELLE, MOUELLEUX. Voy. MOELLE, MOELLEUX.

MOUFETTE


MOUFETTE ou MOFETTE, s. f. [Mofète, 2e è moy. 3ee muet.] Le 2d est le plus usité aujourd' hui. Exhalaison pernicieûse, qui s' élève des souterrains des mines, de certains puits, des fôsses d' aisance et latrines.

MOUFLARD


MOUFLARD, ARDE, subst. MOUFLE, s. f. Le 2d se dit, 1°. d' un gros gant de cuir ou de laine, où il n' y a que le pouce de séparé, et où tout le reste de la main est tout d' une pièce. Il est vieux en ce sens: on dit aujourd' hui mitaine, au singulier. = 2°. De plusieurs poulies liées l' une avec l' aûtre, par le moyen desquelles on multiplie la force mouvante. = 3°. Bâssement et par mépris, d' un grôs visage rebondi. = C' est dans ce dernier sens qu' on dit: voyez ce grôs mouflard, cette mouflarde.

MOUILLAGE


MOUILLAGE, s. m. MOUILLER, v. act. et neut. MOUILLûRE, s. f. [Mou-glia-je, glié, gliû-re; mouillez les ll. 2eé fer. au 2d, lon. au 3e.] Mouiller, c' est 1°. tremper, humecter, rendre moite et humide. "Mouiller un linge. "La pluie a mouillé les prés. = Et neutralement: "Ce brouillard mouille comme de la pluie. "Il craint de se mouiller les pieds, et non pas, de mouiller ses pieds. = 2°. Mouiller l' ancre, ou mieux encôre, et plus ordinairement, mouiller, tout seul; jeter l' ancre, pour arrêter le vaisseau. "Nous mouillâmes l' ancre, ou absolument, nous mouillâmes dans la baie. = 3°. En termes de Gramaire, il se dit d' une prononciation particulière de l' L et du G. Voy. G et L.
   MOUILLAGE ne se dit que dans le 2d sens: Fond propre pour jeter l' ancre. "Bon ou mauvais mouillage. "On dit que ce mouillage n' est pas sûr.
   Rem. Comme on dit, il fait froid, il fait chaud, Mde. de Sévigné a dit: il fait mouillé, il fait brouillard. "Quand il fait beau, je me promène, quand il fait mouillé, quand il fait brouillard, je ne sors point. = Se mouiller, pour se baigner, est un provençalisme. = On apèle poule mouillée une persone timide et poltrone, qui craint tout. "Je me serois bien promenée, si je n' étois point encôre une sote poule mouillée: c' est mouillée, au pied de la lettre; car je sûe tout le jour. Sév. Cette aimable Auteur joint le propre au figuré; ce qui est très-joli. = Se couvrir d' un drap mouillé, c' est, dans ce même style proverbial, alléguer une mauvaise excûse, qui agrâve la faûte, au lieu de la diminuer.

MOUILLETTE


MOUILLETTE, s. f. MOUILLOIR, s. m. MOUILLûRE, s. f. [Mou-gliè-te, glioar, (une seule syllabe) gliû-re: 2eè moy. au 1er, lon. au 2d.] Le 1er, se dit des aprêtes ou tranches de pain fort minces, qu' on fait pour manger les oeufs à la coque; le 2d, d' un petit vâse où les femmes mouillent les doigts en filant; le 3e, de l' action de mouiller, ou de l' état de ce qui est mouillé. "La mouillûre du papier avant l' impression.

MOUîSE


*MOUîSE, s. m. Le peuple de Paris le dit, au lieu de Moïse; et le sentiment de Ménage est qu' il faudrait ainsi parler dans le discours familier. La Monn. _ Ménage ne dit pas pourquoi; et son sentiment n' a pas prévalu.

MOULE


MOULE, subst. masc. et fém. Il est masc. quand il signifie une matière creusée de manière à doner une forme précise à la cire, au plomb, au bronze, etc. Il est fém. quand il se dit d' une espèce de coquillage de forme oblongue. Le Traducteur du Voyage à la Mer du Sud, dit, de bons moules, des moules excellens. Il faut dire, de bones, d' excellentes moules.
   MOULE, dans le premier sens, s' emploie au figuré, mais non pas dans le haut style. "Si votre raisonement est bon, le mien l' est aussi; car il est jeté dans le même moule. Anon. Il règne dans nos moeurs une ennuyeuse uniformité, et tous les esprits semblent avoir été jetés dans un même moule. J. J. Rouss. "La raison humaine prend plus facilement le moule de nos opinions, que celui de la vérité. Id.
   On dit, proverbialement, des chôses qui demandent du tems, qu' elles ne se jètent pas au moule; (l' Acad. dit, en moule) et de celles qui sont râres et précieûses, que le moule en est rompu. "Il n' y a plus d' esprits ni de coeurs sur ce moule. Sév. = Se former sur le moule de quelqu' un; l' imiter. _ Dans le style relevé, on dit, sur le modèle. = Conserver le moule du pourpoint, se conserver, se ménager dans les périls. Celui-ci est populaire.

MOULER


MOULER, v. act. [Mou-lé: 2eé fer.] Jeter en moule. "Mouler une figûre, des médailles, des chandelles, etc. "Figûre, médaille, chandelle moulée. = Lettre moulée, imprimée. "Sa lettre est aussi lisible que si elle étoit moulée. C' est aussi une écriture à la main, où l' on imite les caractère des livres imprimés. = On dit, en plaisantant; il faut bien que cela soit vrai, puisqu' il est moulé; et d' un homme qui défère à l' autorité de quelque livre que ce soit; il croit tout ce qui est moulé. = Le bâs peuple dit, lire le moulé, dans le moulé.
   Rem. Suivant La Touche, se mouler sur n' est pas une expression fort noble. Le Dict. de Trév. dit qu' elle n' est pas du beau style. L' Acad. la met sans remarque, et sans dire à quel style elle apartient. Depuis quelque tems, certains Auteurs on dit, se modéler. = Les bons Auteurs n' emploient pas se mouler sur, sans correctif. "Les courtisans se mouloient, si j' ose me servir de cette expression, sur leur maître. L' Ab. Grosier.

MOULIN


MOULIN, s. m. MOULINAGE, s. masc. MOULINET, adj. [Moulein, linage, linè: 3e è moy. au 3e.] Moulin est, 1°. Une machine à moûdre du grain. Il y en a de plusieurs espèces: moulin à vent, à eau, à brâs. = 2°. On done ce nom à plusieurs autres machines, qui servent à divers usages. "Moulin à foulon, à papier, à tan, à poûdre. _ Moulin à café, petit moulin à moûdre du café.
   MOULINET, aûtrefois petit moulin. _ Aujourd' hui, tourniquet dont on se sert pour enlever ou pour tirer des fardeaux. = Machine dont on se sert pour travailler à la monnoie. = Faire le moulinet, c' est se servir d' une épée ou d' un bâton, etc. en les maniant autour de soi avec tant de vitesse, qu' on pâre les coups qui sont portés en même tems par plusieurs persones.
   MOULINAGE ne se dit que de la soie qu' on fait passer au moulin.
   Rem. Moulin, n°. 1°. fournit à quelques expressions proverbiales. = On apèle un grand parleur, ou une grande parleûse, un moulin à paroles. = Envoyer au moulin, traiter d' âne, d' ignorant. = Se batre contre des moulins à vent, (allusion à Dom Quichotte) se forger des chimères pour les combatre. = Faire venir l' eau au moulin; atirer les présens. Il se prend en mauvaise part, et se dit par mépris. = On dit aussi d' un homme dont on n' est pas content; il viendra moûdre à notre moulin: il aura afaire à moi à son tour.

MOULINÉ


MOULINÉ, ÉE, adj. Gâté par les vers, en parlant du bois.

MOULT


*MOULT. Vieux mot. Beaucoup. Il n' est plus en usage que dans le style marotique. = La Bruyère regrettait ce mot, et ne voyait pas par où beaucoup l' emportait sur lui.

MOULU


MOULU, ÛE: Voy. MOûDRE. = Tout frais moulu, pour émoulu, est un gasconisme. V. ÉMOULU.

MOULûRE


MOULûRE, s. f. Ornement d' architectûre, comme astragale, quart de rond, etc. "Les corniches sont composées de plusieurs moulûres. "Architrâve orné de moulûres.

MOURANT


MOURANT, ANTE, adj. MOURIR, v. neut. [2e lon. aux deux premiers.] Mourant, au propre, qui se meurt. "Il est mourant, elle est mourante. = S. m. pl. "Les morts et les mourans. = Au figuré, des yeux mourans, languissans.
   Rem. L' adj. masc. doit toujours suivre le substantif. Le fém. peut quelquefois le précéder.
   Enfin, son oeuil mourant fixé sur ces guerriers.
       Thom.
  Ne lançoient qu' un feu pâle et des rayons mourans.
Gresset.
  Depuis ce tems je traîne une mourante vie.
       MARIN, Fédéric.
MOURIR: Je meurs, tu meurs, il meurt, nous mourons, vous mourez, ils meurent: je mourois ou mourais; je mourus; je suis mort; je mourrai; je mourrois, ou mourrais; meurs; que je meure; nous mourions, vous mouriez, ils meurent; je mourusse; mourant, mort, morte. = 1°. Cesser de vivre. "Mourir de maladie; de vieillesse, de mort violente. "Mourir en bon Chrétien, en Philosophe. = 2°. par exagération: soufrir une grande incomodité: "Mourir de chaud, de froid, de faim, de soif, d' impatience, etc. "Mourir d' amour pour... Mourir d' envie de, avec l' infinitif: je meurs d' envie de vous voir. = 3°. Fig. mourir au monde, au péché, au vice, à ses passions. = 4°. Avec la négative, durer long-tems. "Son nom, sa mémoire, ses ouvrages ne mourront jamais. = 5°. Il se dit des arbres et des plantes, qui ont une espèce de vie. "Ces arbres sont tous morts. "Le froid les a fait mourir. = 6°. On le dit même des chôse inanimées, dont le mouvement finit peu à peu: la lampe, le flambeau se meurt. "Le boulet de canon vint mourir à ses piés. = 7°. Se mourir; être sur le point de mourir. "Je me meurs, il se mourait. L' Académie remarque qu' il ne se dit qu' au présent et à l' imparfait de l' indicatif.
   Rem. Mourir se dit élégamment au figuré: "Les dissolutions des grands ne meurent point: leurs exemples prêcheront encôre le vice ou la vertu à nos plus reculés neveux. Massill. "Les Villes, les Royaumes, tout meurt: tout a son tombeau... Et l' homme s' indigne d' être mortel! Jér. Dél. = Faire mourir ne se dit point au passif. Il fut fait mourir, pour, il fut exécuté à mort, est une expression condamnée par Vaugelas. Elle est commune le long de la rivière de Loire, et dans les Provinces voisines. On doit dire: on le fit mourir. Th. Corn. Cette expression est fort commune à Paris. Marin. _ Pour, se faire mourir, il est tout au moins douteux. "Il se fit mourir ayant refusé de prendre aucune nourritûre. Le Gendre. Il dit plus bâs: ils se laissent mourir de faim. Celui-ci est plus sûr. = Racine a dit mourir d' un poignard.
   Et du même poignard dont est morte la Reine,
   Cette fière Princesse a percé son beau sein.
       Fr. Én.
On ne dit point mourir d' un poignard, ni d' une épée, ni d' un boulet de canon, etc. mais d' un coup de poignard, d' épée, etc. = À~ mourir, espèce d' adverbe. "Je suis lâsse à mourir de la fadeur des nouvelles. Sév. _ Cet adverbe est fort à la mode parmi les Petites-Maîtresses.
   Ce manteau de vertu dont il se sait couvrir,
   Ne recèle qu' un fat, odieux à mourir.
       Palissot.
Remarquez qu' à mourir doit se raporter à l' adjectif qu' il modifie. Ici c' est le fat qui est odieux, et c' est la petite-maîtresse qui en est excédée à mourir. Ces irrégularités arrivent toujours, quand on adopte de certains mots, qu' on répète à tout instant. = Faire mourir à petit feu (fig. famil.) faire languir quelqu' un dans l' espérance, dans l' inquiétude. "Il n' y a point encôre des nouvelles d' Allemagne: c' est mourir à petit feu. Sév. = Il est mort, il a été tué ne se disent pas indiféremment: le premier, se dit quand on n' a pas été tué sur le champ; le second, quand on est resté sur le coup. "Il est mort de ses blessûres; il a été tué dans le combat. _ On peut pourtant quelquefois se servir de mourir, en parlant d' un brave tué sur la place: "Il mourut, ce jeune Prince, si digne de vivre et de régner: il mourut malheureûsement, après avoir pâssé le Rhin, etc. Bouh. On dit aussi, en parlant de ceux qui ont été tués dans une afaire: la liste des morts; on l' a trouvé parmi les morts. Idem. = Se mourir se dit absolument et sans régime, excepté avec le pron. en: "Une glace lui coupe son corps de jupe; et entre dans son corps si avant qu' elle s' en meurt. Sév. * Mais, se mourir de faim, de soif, d' inanition; il se meurt d' envie de jouer; je me mourrois d' ennui, sont autant de gasconismes. Desg. = Je veux mourir si est du style très-familier. "Celle-ci vous sera rendûe par M. de... Je veux mourir si je sais son nom. Sév. = Mourir de rire se dit à l' actif et non au passif. Dites, nous mourions de rire; et non pas: * nous étions morts de rire, comme on dit en certaine Province. = Quelques-uns ont dit au mourir, pour à mourir. "Il a eu tel déplaisir de sa faute, qu' il en est au mourir. Le Diction. de Trév. raportant cette phrâse, ajoute que l' Acad. ne conait pas ce substantif. _ On dit malade à mourir.
   MORT, MORTE, participe de Mourir. Voyez-le à sa place.

MOUSQUET


MOUSQUET, s. m. MOUSQUETAIRE, s. m. MOUSQUETERIE, s. f. MOUSQUETON, s. m. [Mous-kè, ketère, keterî-e, keton: 2e è moyen au 1er, e muet aux trois aûtres; 3e è moyen et long au 2d, e muet au 3e.] Mousquet est une anciène arme à feu, qui n' est plus en usage depuis long-tems. On le tirait par le moyen d' une mèche. _ Ce mot ne s' est conservé que dans ces locutions du st. famil. "Porter le mousquet, être simple soldat. "Il crèvera, ou il a crevé comme un vieux mousquet; les débauches le tueront, ou l' ont tué. = Mousquetaire; autrefois Soldat à pied, qui portait le mousquet. Aujourd' hui, il se dit de ceux qui sont dans les compagnies à cheval des Mousquetaires du Roi. "Les Mousquetaires gris, les Mousquetaires noirs, ainsi només de la couleur de leurs chevaux. "Entrer dans les Mousquetaires. = Mousqueterie, décharge de plusieurs fusils. = Mousqueton, fusil dont le canon est plus court que celui des fusils ordinaires.

MOUSSE


MOUSSE, s. m. et fém. [Mou-ce: 2ee muet.] Il est masc. quand il signifie un jeune Matelot; fém. quand il se dit d' une herbe fort épaisse et fort courte, qui s' engendre sur les terres sabloneûses, sur les pierres, etc. ou d' une écume qui se forme sur quelques liqueurs. "En versant de haut, le vin fait de la mousse. = * Mousse s' est dit aûtrefois adjectivement, pour émoussé: "Ce fer, cette coignée est mousse.

MOUSSELINE


MOUSSELINE, s. f. [Mou-celine: 2e et dern. e muet.] Toile de coton fort claire. L' Acad. ajoute, fort fine; mais il y en a de grossières.

MOUSSER


MOUSSER, v. neut. MOUSSEUX, EûSE, adj. [Mou-cé, ceû, ceû-ze: 2e é fermé au 1er, lon. aux deux aûtres.] Mousser se dit des liqueurs sur lesquelles il se fait de la mousse. Le vin de champagne mousse beaucoup: il est bien mousseux: la bière est fort mousseûse.

MOUSSERON


MOUSSERON, s. m. [Mou-ceron: 2ee muet.] Espèce de petit champignon qui vient sous la mousse, d' où il tire son nom.

MOUSSON


MOUSSON, s. f. [Mou-son.] Saison pendant laquelle souflent certains vents dans les Indes. "Il falut atendre la mousson. "Il falloit arriver à Canton avant le changement de mousson. Let. Édif. "En ce pays là, le vent soufle pendant six mois de l' ouest à l' est, et pendant six autres mois de l' est à l' ouest, et c' est ce qu' on appelle la mousson. Ibid.

MOUSSU


MOUSSU, ÛE, adj. [2e lon. au 2d.] Qui est couvert de mousse. "Arbre moussu, pierre moussûe. _ Quelques-uns le disent du vin, de la bière, mais mal; c' est mousseux qu' il faut dire.

MOUSTACHE


MOUSTACHE, s. f. Barbe qu' on laisse au-dessus de la lèvre d' en haut. = On dit adverbialement (style familier) sur ma moustache, en ma présence, à ma barbe. Du Cerceau dit, sous.
   Il l' a fait enlever, Monsieur, sous ma moustache.
Et, populairement, doner sur la moustache à quelqu' un, le fraper au visage.

MOUSTIQUE


MOUSTIQUE, s. m. Petit insecte d' Afrique et d' Amérique, du genre de ceux que nous apelons cousin en France. Dans les Îles Françaises, on apèle moustiquière ce que nous apelons cousinière.

MOUT


MOUT, s. m. [Monos. le t ne se pron. pas.] Vin nouvellement fait, et qui est encôre doux.

MOUTARDE


MOUTARDE, s. fém. Composition de graine de Senevé, broyée avec du mout, ou avec du vinaigre, etc. "La moutarde de Dijon est fameûse. = On apèle aussi moutarde la graine de Senevé, parcequ' elle sert à faire de la moutarde. = On dit, en style proverbial, s' amuser à la moutarde, soigner les petites afaires et négliger les grandes. = Sucrer la moutarde, dorer la pilule; adoucir les refus, les remontrances, par des paroles douces et flateûses. = La moutarde lui monte au nez; il comence à s' impatienter, à se fâcher. = Tout le monde va à la moutarde, les enfans même en vont à la moutarde: la chôse est devenu publique. * Quelques-uns disent, par corruption, tout le monde en bat la moutarde. V. DîNÉ.

MOUTARDIER


MOUTARDIER, s. m. [Mou-tar-dié: 3e é fer.] 1°. Petit vâse à mettre la moutarde. = 2°. Celui qui fait et vend la moutarde.

MOUTIER


MOUTIER, ou MONSTIER. Vieux mot. Monastère, Église. On dit encôre le premier dans ces deux phrâses proverbiales. Mener une fille au moutier, la mener à l' Église pour la marier. Il faut laisser le moutier où il est; ne rien changer aux usages reçus.

MOUTON


MOUTON, s. m. MOUTONER, v. act. MOUTONIER, IèRE, adj. [3e é fermé au 2d, et 3e, è moyen et long au dernier: né, nié, niè-re.] Mouton, belier châtré, qu' on engraisse. "Tête, langue, pieds, gigot de mouton. = Quand on dit troupeau de moutons, on y comprend les beliers et les agneaux. "Garder les moutons. = Moutonier, qui est du caractère des moutons. "Le peuple est moutonier, il fait comme les moutons, qui pâssent tous où ils voient qu' un autre mouton a pâssé. "Toute cette race moutonière marche pêle-mêle sans savoir où on la mène. = Moutoner, rendre frisé et annelé comme la laine d' un mouton. On ne le dit guère qu' au participe. "Cheveux moutonés; tête, péruque, coifure moutonée.
   On dit, figurément, (st. famil.) d' un homme fort doux; C' est un mouton, doux comme un mouton. "C' est la plus douce petite moutone de son sexe. Retif; et proverbialement, revenons à nos moutons, reprenons le discours qui a été interrompu. Cette expression proverbiale doit son origine à la Farce de l' Avocat Patelin.

MOUTûRE


MOUTûRE, s. f. [2e lon. 3ee muet.] 1°. L' action de moûdre le bled et le salaire que prend le Meunier. = Tirer d' un sac deux moutûres, (st. famil.) se faire payer deux fois d' une même chôse. = 2°. mélange de froment, de seigle et d' orge par tiers. "Du blé moutûre. "La bone moutûre vaut seigle.

MOUVANCE


MOUVANCE, s. f. Dépendance d' un fief qui relève d' un aûtre.

MOUVANT


MOUVANT, ANTE, adj. MOûVEMENT, s. m. MOUVOIR, v. act. [Mou-van, vante, veman, voar: 1re lon. au 2d, 2e lon. aux deux premiers, e muet au 3e.] Mouvant est 1°, qui a la puissance de mouvoir. Il ne se dit qu' au féminin: force mouvante. = 2°. Qui se déplace et où l' on s' enfonce. Sâble mouvant, terre mouvante. = 3°. Qui relève de...
   Fief mouvant d' un autre fief. = 4°. Tableau mouvant; où il y a des figûres qui se meuvent par une mécanique cachée.
   MOûVEMENT: I. En général, transport d' un corps d' un lieu à un aûtre. "Moûvement lent ou rapide; violent, convulsif; droit, circulaire, etc. "Être en moûvement; doner le moûvement à, etc. = Se doner du moûvement; agir, intriguer. "Il s' est bien doné du moûvement pour cette afaire. = II. Changemens de postes, marches et contre-marches d' une armée. "Il fit faire divers moûvemens à l' armée. = III. Passion ou afection de l' âme. Moûvement volontaire ou involontaire. "L' excuse de beaucoup de gens est de dire qu' on n' est pas maître des premiers moûvemens. = IV. En Musique, la manière de batre la mesûre. "Presser ou ralentir le moûvement. = Air de moûvement, dont la mesûre est bien marquée. = V. Dans l' Art Oratoire, ou poétique, figûres pathétiques. "Il y de grands moûvemens dans ce Discours, dans cette Pièce. = VI. Ressort d' une horloge, d' une montre. "Le moûvement de cette montre est bon, ou, ne vaut rien. = On le dit même au pluriel. "Les moûvemens ne valent rien.
   REM. Moûvement a un sens tantôt actif, tantôt passif. Il signifie tantôt la cause, tantôt l' éfet, l' action de ce qui meut et l' état de ce qui est mu. "Ce corps a comuniqué de son moûvement à un aûtre. "Ce corps est dans un grand moûvement; en moûvement.
   MOUVOIR; Je meus, tu meus, il meut; nous mouvons, vous mouvez, ils meûvent; je mouvois ou mouvais, je mus; j' ai mu; je mouvrai, je mouvrois ou mouvrais, que je meûve, nous mouvions, vous mouviez, ils meûvent; je musse; mouvant, mu. _ Plusieurs des tems de ce verbe ne sont en usage que dans le style didactique. "Ces deux corps après le choc se mouvront ensemble avec 12 degrés de force. Paulian. Dict. de Phys. = Hors de l' infinitif, on est si peu acoutumé aux modes et aux tems de ce verbe, que quand on les rencontre, on y troûve un air sauvage, comme dans cette phrâse de Bossuet. "Les premières afaires, qui se mûrent dans l' Église. = Avec le pronom personel, le présent de l' indicatif fait assez bien. "Un corps, qui se meut en pousse un aûtre. "Comment les atomes se meuvent-ils dans le vide? Voy. ÉMOUVOIR = Mouvoir, c' est faire changer de place. "Ils ne peuvent mouvoir cette pierre. "Un ressort, qui meut, qui fait mouvoir une machine. "Il est si malade qu' il ne peut se mouvoir. = Dans les choses morales, exciter, faire agir. "La grâce meut la volonté, sans la nécessiter~. "C' est la colère, qui l' a mu à en user de la sorte. Acad.

MOYEN


MOYEN, ENNE, ou ÈNE, adj. MOYEN, s. m. MOYENNER, ou MOYÉNER, v. act. [Moa--ien, iè-ne, ien, ié-né: 2e è moy. au 2d, é fer. au dern.] Moyen, adj. MÉDIOCRE; "Il est de moyène grandeur, grôsseur, tâille, etc. = De moyen âge; ni jeune, ni vieux. = La moyène région de l' air, qui est entre la plus haûte et la plus bâsse. = Moyen, subst. Ce qui sert pour parvenir à quelque fin. "Chercher, trouver un moyen, des moyens. = Il régit souvent de et l' infinitif. "Je cherche les moyens de vous plaire; et je n' y réussis pas. = Voy. VOIE. = Quelquefois moyen s' emploie sans article: "Je troûverai bien moyen de le ranger; il n' y a pas moyen de le soufrir, et non pas, il n' y a pas de moyen, etc. * Mais tâcher moyen est un provençalisme: "Tâchez moyen de le voir. = Le moyen est une espèce d' interjection, qui régit de et l' infinitif, ou que avec le subjonctif. "Le moyen de réussir, ou, qu' on réussisse, quand on est traversé de tout côté! "Le moyen que le Tribunal supérieur le forçât de punir celui, qu' il avoit intérêt de sauver! Moreau. "Le moyen que cette erreur n' allât pas toujours en croissant! = Au moyen de, adverbe. Il n' est que de la Pratique et du style familier. "Au moyen de ces mesûres on en viendra à bout. = Moyens, au pluriel, richesses, facultés. "Je ne conais pas ses moyens. Son usage est fort borné dans cet emploi.
   Moyenner, ou Moyéner (devant l' e muet, la 2e devient un è moy. il moyène, moyènera.) Procurer par son entremise. "Moyéner une entrevûe, un acomodement. L' Acad. dit qu' il vieillit. Il parait pourtant encôre usité dans le style simple.

MOYENNANT


MOYENNANT, ou MOYÉNANT, prép. [Moa-iénan: 2e é fer. Quelques-uns prononcent moa-nan, mais mal.] Au moyen de... "J' en viendrai à bout moyénant la grâce de Dieu. "Vous aurez ce que vous désirez moyénant la somme de tant. = Moyénant que, pourvu que, est vieux; l' Acad. ne le met pas. "Je le lui acorderai, moyénant qu' il viène le demander.

MOYENNEMENT


MOYENNEMENT, ou MOYèNEMENT, adv. MOYENNEUR, ou MOYÉNEUR, s. m. Médiocrement. = Celui, qui moyène; Médiateur. = L' Acad. avait d' abord inséré le 1er tout simplement dans son Dictionaire. Dans les Éditions suivantes, elle dit qu' il est de peu d' usage: dans la dernière, elle remarque qu' il est vieux. = Le 2d començait à vieillir au comencement du siècle. Aujourd' hui il est vieux et entièrement hors d' usage. L' Acad. ne le met point.

MOYEU


MOYEU, s. m. [Moa-ieu; au pluriel moyeux.] Ce mot a trois significations, qui n' ont aucun raport l' une avec l' aûtre: = 1°. Le jaûne d' un oeuf: "Il y a des oeufs, qui ont deux moyeux. Il vieillit, en ce sens; on dit plus comunément jaûne d' oeuf. = 2°. Espèce de prune: des moyeux confits. _ 3°. Et c' est son usage le plus ordinaire; cette partie du milieu de la roûe, où l' on emboite les rais, et dans le creux de laquelle entre l' essieu.

MOZAMBIQUE


MOZAMBIQUE. Plusieurs disent, le Mozambique, aller au Mozambique. L' Ab. Prévot. (Hist. des Voy.) ne met point d' article. Il dit toujours à Mozambique. Les cartes de M. Belin confirment cet usage; mais on y lit Mosambique avec une s: canal de Mosambique; baie de Mosambique.

MUABLE


MUABLE, adj. Inconstant, sujet au changement. "Tout est muable dans ce monde. La volonté de l' Homme est muable. = Il est bien moins usité que son oposé immuable. "Dieu seul est immuable.

MUCILAGE


MUCILAGE, s. m. MUCILAGINEUX, EûSE, adj. [5e lon. au 2d et au 3e, neû, neû-ze.] Mucilage, est une matière crasse et visqueûse, qui sort de certaines plantes ou herbes. = Mucilagineux, qui contient du mucilage.

MUCOSITÉ


MUCOSITÉ, s. f. Humeur épaisse de la natûre de la morve.

MûE


MûE, s. f. MUER, v. n. [Mû-e, mu-é: 1re lon. au 1er, br. au 2d; 2e e muet au 1er, é fer. au 2d. Dans le verbe l' u est long devant l' e muet: il mûe, ils mûent. Au futur et au conditionel, cet e muet ne se fait pas sentir; il muera; il mueroit; pron. mûra, murè.] Mûe est le changement, qui arrive aux oiseaux, quand ils mûent, c. à. d. quand le plumage leur tombe. Le Subst. ne se dit que des oiseaux, des vers à soie, et des serpens. Le verbe se dit de certains animaux, à qui le poil tombe. = Muer se dit aussi des jeunes garçons, quand la voix leur change. = Mûe est encôre un lieu obscur et serré, où l' on tient la volâille pour l' engraisser.

MUET


MUET, ETTE, ou ÈTE, adj. [2e è moy. 3e e muet.] Qui ne peut parler. "La plupart des muets ne le sont que parce qu' ils sont sourds. "Il est sourd et muet: "Elle est muette de naissance. "Muet comme un poisson, st. prov. = Fig. Qui ne parle point par malice, ou par honte, ou par crainte. "On fait le procês aux muets volontaires. "Il demeura muet d' étonnement. "Cette réponse le rendit muet. Elle n' est pas muette; elle parle hardiment, ou beaucoup. st. famil.
   Rem. Il se dit des chôses, et se place ordinairement après le substantif. "Jeu muet, scène muette. En vers et dans la prôse poétique, le fém. peut précéder.
   Une muette horreur semble les glacer tous.
       Thomas.
  Et sur ces sombres lieux, muettes régions
  Où le trépas conduit ses pâles Légions.
      Gresset.
Racine fait régir à muet la prép. à:
  Muet à mes soupirs, tranquille à mes alarmes.
Ce régime n' est bon que dans le haut style.
   Muet, se dit en Gramaire. Voy. E et H.

MUFLE


MUFLE, s. m. L' extrémité du museau de certains animaux. "Mufle de taureau, de lion, de tigre, de léopard. = En sculptûre, ornement, qui représente un mufle. = Les ignorans confondent mufle avec moufle: ils disent mufle d' un assemblage de poulies, et moufle d' un animal.

MUFTI


MUFTI, s. m. Le chef de la Religion mahométane. Quelques uns écrivent Muphti, mais pourquoi ce ph dans un mot, qui n' est pas d' origine grecque? D' autres écrivent et prononcent Mouphti, mais mal. Selon M. Marin, l' un et l' autre se dit.

MUGE


MUGE, s. m. Poisson de mer, dont une des espèces est le mulet. On apèle celui-ci muge en Provence.

MUGIR


MUGIR, v. n. MUGISSEMENT, s. m. MUGISSANT, ANTE, adj. [Mugi, giceman, gi-san, sante: 3e e muet au 2d, lon. aux 2 dern.] Ils expriment le cri des taureaux, des boeufs et des vaches. "On entendait mugir les taureaux. "Des boeufs mugissans, les vaches mugissantes; le mugissement des taureaux. = Ils se disent, figurément, des vents et des flots. "Les vents déchaînés mugissoient avec fureur dans les voiles. Télém.
   La chicane en fureur mugit dans la Grand' Salle.
       Boileau.
"Le mugissement de la mer, des vagues, des flots. "La mer mugissante, les flots mugissans.

MUGUET


MUGUET, s. m. MUGUETER, v. act. [Mughè, gheté: 2e è moy. au 1er, e muet au 2d: l' u est muet: il n' est là que pour doner au g un son fort, qu' il n' a pas devant l' e.] Muguet, est 1°. Une sorte de Plante, dont la fleur sent fort bon. = 2°. En style famil. et plaisant, galant auprês des Dames; recherché dans sa parûre. "Un muguet, il fait le muguet. = Mugueter, faire le muguet, le galant. "Il muguette toutes les Dames. = Fig. (style famil.) Épier l' ocasion d' obtenir ce qu' on souhaite. "Mugueter une charge. En ce sens il vieillit Acad.

MUID


MUID, s. m. [Le d ne se prononce pas.] 1°. Mesûre des liquides et des solides, qui est de diférente grandeur, selon les diférens pays. "Muid de blé, d' avoine, d' orge, de vin, de sel, de charbon, de chaux, de plâtre. = 2°. Plus particulièrement, futâille, qui contient un muid de vin, ou de quelque aûtre liqueur. "Percer, défoncer un muid.

MULAT


MULAT, ou MULâTRE, adj. et subst. [Le 2d est le plus usité: on peut même dire que c' est le seul en usage. Le Rich. Port. les met tous deux; l' Acad. ne met que le 2d.] Qui est né ou née d' un nègre et d' une blanche (ce qui est assez râre) ou d' un blanc et d' une négresse; ce qui est très-comun. "Il ou elle est mulâtre; un valet mulâtre, une fille mulâtre. "C' est un mulâtre, une mulâtre. Plusieurs au fém. disent mulatresse.

MULCTER


MULCTER, v. act. [Mulkté.] Punir. _ C' est un mot du Palais. "On l' a mulcté, il a été mulcté. _ Quelques Auteurs ont employé ce mot; et ceux, qui aiment à ne pas parler comme tout le monde, le disent en conversation. Il peut être utile dans le style plaisant ou critique, par ceux, qui se plaisent à employer des mots particuliers. "C' est un latinisme: mulctare.

MULE


MULE, s. f. MULET, s. m. MULETIER, s. m. [2e e muet au 1er et au 3e, è moy. au 2d; 3e é fer. au dern.] Mule. 1°. Pantoufle. On ne le dit plus de celles des hommes, excepté en parlant du Pape. On le dit encôre des pantoufles des femmes. = 2°. Femelle non pas du mulet, qui n' en a point, mais de la même natûre que le mulet, animal engendré d' un âne et d' une jument, ou d' un cheval et d' une ânesse. = 3°. Mules, au plur. sorte d' engelûres, qui viènent aux talons.
   On dit, proverbialement, d' une femme, qui aime à se parer; à vieille mule fer doré. = Fantasque comme une mule. Voy. FERRER et PANTOUFLE. = D' un homme, qui est chargé d' un grand fardeau, on dit, qu' il est chargé comme un mulet. Voy. GARDER, à la fin.
   MULET, sorte de poisson de mer. Voy. MUGE.
   MULETIER, celui, qui fait métier de conduire des mulets.

MULOT


MULOT, s. m. Souris, qui fait son trou sous terre. = Endormir le mulot, (style familier) amuser pour tromper.

MULTIFORME


*MULTIFORME, adj. Qui a plusieurs formes (Néol.) "Quel est le moyen de constater ce caractère national, espèce de prothée multiforme. De Sigrais.

MULTIPLICATION


MULTIPLICATION, s. f. MULTIPLIER, v. act. et n. MULTIPLICITÉ, s. f. MULTITUDE, s. f. [Dans le 1er, tion a le son de cion, en vers ci-on.] Multiplier, augmenter en quantité, en nombre. "Il ne faut pas multiplier les êtres sans nécessité. "Miroirs, qui multiplient les objets. _ Et neutralement. "Les enfans d' Israël multiplièrent prodigieûsement en Égypte. "Les lapins multiplient extrêmement. = Multiplier un nombre par l' aûtre, en termes d' Arithmétique, c' est le répéter autant de fois qu' il y a d' unités dans l' autre nombre; trois fois quatre font douze. Le 1er s' apèle multiplicateur, qui multiplie, l' aûtre multiplicande, qui doit être multiplié. Dans l' exemple cité, trois est le multiplicateur, et quatre le multiplicande. = Multiplication, est 1°. Augmentation en nombre: "La multiplication des espèces, des êtres, des hommes. "La multiplication des pains faite par J. C. = 2°. Règle d' Arithmétique par laquelle on multiplie un nombre par l' aûtre. = Multiplicité, grand nombre de chôses diverses. Multitude, grand nombre de persones ou de chôses. "Multiplicité d' objets, d' actes, d' opinions. "Multitude inombrable d' hommes, d' animaux, de livres. = Multitude employé absolument et sans régime, le peuple, le vulgaire. "Les opinions, les caprices de la multitude.
   Rem. 1°. Quand même multitude régit le génitif pluriel, on doit faire acorder le verbe avec multitude et non pas avec ce génitif. "Une multitude de dangers nous environe, et non pas nous environent. Voy. COLLECTIF. _ Il est des Auteurs, qui n' ont pas goûté cette règle ou cette opinion. "Une multitude d' hommes, tirés des colonies... aportoient dans le Sénat ce goût d' épargne, etc. Dotteville, Trad. de Tacite. = M. De Bérault de Bercastel, met le pluriel même avec multitude, employé tout seul et sans régime. "Si une multitude indocile font (fait) bande à part. _ Cela me parait encôre plus irrégulier. = 2°. Il me semble que multitude, comme foule, nombre se dit toujours de plusieurs, et exige le pluriel. Cependant l' Académie dit: une multitude de peuple. Malgré le respect que je lui dois, je ne puis être de son sentiment. Voy. FOULE = 3°. Quand multitude est acompagné de l' article indéfini, il faut mettre le même article devant le régime; mais, au contraire, quand multitude est sans article, ou avec l' article indéfini, on doit mettre devant le régime la prép. de, qui est l' article indéfini: on doit dire, la multitude des lois, et cette multitude de lois. Voy. ARTICLE, vers la fin de n°. II et 1°. Règle assez générale. "Cette multitude prodigieûse des lois, etc. Il falait, de lois, etc. = 4°. Multitude et populace ont tant de raport, que, les joindre ensemble, c' est doner dans le pléonasme. "Cette multitude de populace se dissipa. Hist. d' Angl. Il sufisait de dire: cette populace etc.

MUMIE


MUMIE, Voy. MOMIE.

MUNICIPAL


MUNICIPAL, ALE, adj. MUNICIPE, s. m. On donait chez les Romains le nom de municipe aux villes du Latium et de l' Italie, qui participaient aux droits de bourgeoisie romaine. = Municipal, qui apartient à la coutume, au droit coutumier d' un pays particulier. "Le droit municipal; les lois municipales. = Ville municipale, ou municipe. = Juges ou Oficiers municipaux: les Oficiers d' un Corps de ville.

MUNIFICENCE


MUNIFICENCE, s. f. [Munifi-sance: 4e lon.] Vertu qui porte à faire de grandes libéralités. "Il le récompensa avec une munificence vraiment royale. Ce mot n' est pas du discours ordinaire; il ne s' emploie que dans le discours soutenu.

MUNIR


MUNIR, v. act. MUNITION, s. fém. MUNITIONAIRE, s. m. [Muni, ni-cion, cio-nère: 4e lon. au dern. è moy.] Munir, c' est garnir, pourvoir des chôses nécessaires pour la défense, ou pour la nourritûre. On l' emploie ordinairement avec deux régimes, l' acusatif et l' ablatif. "On a muni cette ville de toute sorte de provisions. _ Quelquefois on ne met que le seul régime direct. "Gand tombe avant qu' on pense à le munir. BOSS. = Se munir régit de. "Se munir d' argent, de chevaux pour un voyage; d' un bon manteau contre le froid, etc. = Fig. se munir de patience, de courage, de résolution, etc.
   MUNITION, provision de chôses nécessaires dans une armée, ou dans une place de guerre. Il ne se dit, en ce sens, qu' au pluriel. "Munitions de guerre, de bouche. = On dit, au sing. pain de munition, que le peuple apèle pain d' amunition; pain qu' on distribûe tous les jours aux soldats.
   MUNITIONAIRE, celui qui a soin des munitions.

MUPHTI


MUPHTI, Voy. MUFTI.

MUQUEUX


MUQUEUX, EûSE, adj. [Mu-keû, keû--ze: 2e lon.] Qui a de la mucosité. "Ligamens muqueux, glandes muqueûses.

MUR


MUR, s. m. [Les Gascons prononcent meur et tumur; ils doivent restituer au 2d l' e qu' ils mettent mal-à-propôs au premier.] Ouvrage de maçonerie. "Mur de pierre, de moellon, de brique, etc. = On dit absolument, hors des murs, hors de la ville. = Mur de clotûre, qui ne sert qu' à enfermer les cours, les jardins, les parcs, etc. = Mur d' apui, qui n' est élevé que de trois pieds, ou environ.
   Mur, muraille, (synon.) Le mur est un ouvrage de maçonerie: la muraille est une sorte d' édifice. Le mur est susceptible de diférentes dimensions: la muraille est un mur étendu dans ses diférentes dimensions. Le propre du mur est d' arrêter, de retenir, de séparer, de fermer. L' idée particulière de muraille est de couvrir, de défendre, de servir de boulevart. On dit les murs d' un jardin, et les murailles d' une ville. Extr. des Syn. Fr. de M. l' Ab. Roubaud.
   Le Proverbe dit: les murs ont des oreilles: les murâilles parlent; on a beau tenir les chôses secrettes, elles se décoûvrent tôt ou tard. = Mettre quelqu' un au pied du mur; l' obliger à se décider; lui ôter toute échapatoire.
   Madame, je prétends le mettre au pied du mur:
   Il faut le contenter sur l' objet qu' il demande.
       Le Persifleur.
"Vouloir le persuader, c' est se doner de la tête contre un mur; prendre une peine inutile. = On tirerait aussitôt de l' huile d' un mur, que de l' argent d' un avâre. = Il tirerait de l' huile d' un mur; il tirerait de l' argent, des secours d' où les aûtres ne pourraient rien tirer.

MûR


MûR, MûRE, adj. [1re lon. Il faut mettre à ces mots l' acc. circ. On écrivait autrefois, meur, meure.] Qui est en saison d' être cueuilli ou mangé. "Blés, épis, fruits, raisins mûrs; poires, pêches, mûres. "Ce melon n' est pas mûr, est trop mûr. = Fig. "Cet apostème est mûr, prês de crever. _ Âge mûr, celui qui suit la jeunesse. = Homme, jugement, esprit mûr, sage. _ Mûre délibération, où tout a été examiné avec beaucoup d' atention. Fille qui est mûre, (st. plais.) en âge d' être mariée, et déja depuis quelque tems. _ Afaire qui est mûre, qui n' est pas encôre mûre; à laquelle il est tems, ou il n' est pas encôre tems de travailler.

MURâILLE


MURâILLE, s. f. [Murâ-glie: 2e lon. mouillez les ll; 3e e muet.] C' est la même chôse que mur; mais l' emploi en est plus étendu. "Pan de murâille. "Les murâilles d' une ville. "Fermer un jardin de murâilles. "Étayer, saper, abatre, renverser une murâille, etc.
   On dit, (st. prov.) d' une maison où il n' y a point de meubles, qu' il n' y a que les quatre murâilles. = Être enfermé entre quatre murâilles, en prison. = Les murâilles parlent, ont des oreilles. Voy. MUR.

MURALE


MURALE, adj. fém. La Courone murale était, chez les Romains, celle qu' on donait à celui qui, dans un assaut, était monté le premier sur les murs d' une Ville assiégée.

MûRE


MûRE, s. fém. MûRIER, s. m. [1re lon. 2e e muet au premier, é fermé au second. _ On a écrit long-tems, meure, meurier.] Mûre est une sorte de fruit, formé de petits grains réunis. "Mûres noires, mûres blanches. "Un panier de mûres; du sirop de mûres. = On dit, proverbialement, il fait comme le renard des mûres, il méprise cela, parce qu' il ne peut pas l' avoir. _ Il ne faut pas aler aux mûres sans crochet; s' engager dans une afaire sans se pourvoir de ce qui est nécessaire.
   MûRIER, arbre qui porte des mûres. "Mûrier blanc; Mûrier noir. = On nourrit les vers à soie de feuilles de Mûrier.

MûREMENT


MûREMENT, adv. [Mûreman: 1re lon. 2e e muet.] Il ne se dit qu' au figuré. Avec beaucoup d' atention, de réflexion. "Considérer, délibérer mûrement.

MURèNE


MURèNE, s. f. [2e è moy. 3e e muet.] Poisson de mer, qui ressemble beaucoup à l' anguille.

MURER


MURER, v. act. Boucher avec de la maçonerie. "Murer une porte, une fenêtre. = Ville murée, entourée de murs.

MûRIER


MûRIER, voy. MûRE.

MûRIR


MûRIR, v. act. et neut. [1re lon. On écrivait autrefois meurir.] Rendre mûr. "Le Soleil mûrit les fruits. = Devenir mûr. "Chaque chose mûrit en sa saison. "Le Soleil fait tout mûrir. "Les nèfles mûrissent sur la pâille. "Laissez mûrir ces fruits avant de les cueuillir. = Il est élégant au figuré. "Cela lui a fort mûri le jugement. "C' est un esprit qui mûrira avec le tems. "Y eut-il jamais homme qui laissât mûrir ses entreprises avec tant de patience? Fléchier, Or. Fun. de M. de Turenne. = On dit, figurément (st. famil.) avec le tems et la pâille, les nèfles mûrissent: il ne faut pas précipiter les afaires: il faut atendre qu' elles soient mûres.

MURMURATEUR


MURMURATEUR, s. m. MURMûRE, s. m. MURMURER, v. n. [2e lon. au 2d. 3ee muet au 2d, é fermé au 3e.] Le 2d et le dernier se disent, 1°. d' un bruit sourd de plusieurs persones qui parlent en même tems. "Il s' éleva dans l' Auditoire un murmûre flateur. "Cette nouvelle n' est pas bien assurée; mais on en murmûre. = 2°. Des plaintes que font des persones mécontentes. "Les murmûres du peuple. "Il murmûre contre ses supérieurs. = Tout le monde murmûre contre sa conduite. = 3°. D' un bruit sourd et léger des eaux et des vents. "Le doux murmûre des ruisseaux, des zéphirs. "Ruisseau qui murmûre sur les câilloux. "Vent qui murmûre dans les feuillages. = Murmurateur ne se dit que dans le second sens; celui qui murmûre contre ses supérieurs. = C' est un mot de MM. de Port-Royal. Bouhours dit qu' il n' y a que ces Écrivains qui s' en soient servi. Il n' est point dans le Dict. de l' Acad. Le Rich. Port. le met sans remarque. Je crois qu' on peut s' en servir sans scrupule, et que, dans des Exhortations à des Religieûses, on peut dire murmuratrice. = * On a dit autrefois, murmuration. "Qu' elles servent de bon coeur sans murmuration à leurs soeurs. S. Fr. de S.

MUSARD


MUSARD, ARDE, adj. [Muzar, zarde.] Qui s' arrête, qui s' amûse par tout (disc. famil.) "Il est musard: elle est muzarde _ Subst. "C' est un musard, une muzarde.

MUSC


MUSC, s. m. [Musk: Richelet écrit musque ou musc, et préfère le premier: on ne dit plus que le second.] 1°. Sorte d' animal de la grandeur d' un chevreuil. = 2°. La liqueur qui sort de cet animal. "Grain de musc. Cela sent le musc. "Le musc est mal sain et incomode. = Couleur de musc, espèce de couleur brune.

MUSCADIN


MUSCADIN, s. m. [Musca-dein.] Petite dragée ou pastille, où il entre du musc. = On a dit aûtrefois muscardin, et on le dit encôre en quelques Provinces. Voit. dit, en plaisantant.
   Au temps des vieux Paladins,
   On disoit toujours muscardins.

MUSCAT


MUSCAT, MUSCADE, adj. [On ne prononce point le t au premier.] Qui a une sorte de parfum. "Raisin, vin muscat; rôse, noix muscade. = S. m. Manger du muscat, boire du muscat. = S. fém. La muscade.
   Aimez-vous la muscade, on en a mis par-tout.
   Impertinence que Boileau fait dire au doneur du ridicule repâs, qu' il décrit si bien.

MUSCLE


MUSCLE, s. m. MUSCLÉ, ÉE, adj. MUSCULAIRE, adj. MUSCULEUX, EûSE, adj. [Mus-kle, klé, klé-e, kulère, kuleû, leû-ze: 2e e muet au 1er, é fermé au 2d et au 3e, 3e è moyen au 4e, lon. aux 3 dern.] Muscle, partie charnûe et fibreûse qui est l' organe des mouvemens de l' animal. "Le tendon; les fibres d' un muscle. "Les muscles des brâs, des jambes, du visage. = Les trois adjectifs, quoique dérivés de muscle, ont des sens et des emplois diférens. Le premier, se dit des persones et des animaux. "Ils ne sont ni trop grands, ni trop petits, mais bien musclés. Bufon. Les Dictionaires ne mettent point ce mot. _ Le second, se dit des artères qui s' insèrent dans diférens muscles, et des veines qui en sortent. "Artères, veines musculaires. _ Le troisième, se dit des parties du corps où il y a beaucoup de muscles. "Partie musculeûse.

MûSE


MûSE, s. f. [1re lon. 2ee muet.] 1°. Au pluriel, suivant la Fable, les neuf Déesses qui présidaient aux Arts libéraux. "Être inspiré par les Mûses, favorisé des Mûses. ""Les nourrissons, les favoris des Mûses, les Poètes. = 2°. Les Belles-Lettres: cultiver les Mûses. = 3°. Au singulier, il ne se dit que de la poésie, et seulement avec les pronoms possessifs, ou la prép. de pour régime. "Sa mûse est enjouée, triste, tragique; la mûse de l' Histoire.
   Je hais ces vains Auteurs, dont la mûse forcée
   M' entretient de ses feux, toujours froide et glacée.
       Boileau.
La gêne de la mesûre a fait mettre à Boil. tantôt le pluriel pour le singulier.
   À~ quoi bon réveiller mes mûses endormies?
Tantôt le singulier pour le pluriel.
   Du Roi, la bonté secourable,
   Jette enfin sur la mûse un regard favorable.

MUSEAU


MUSEAU, s. m. [Muzo, 2e dout. au sing. lon. au plur. museaux.] Cette partie de la tête du chien, et de quelques aûtres animaux, qui comprend la gueule et le nez. "Le museau d' un chien. = Par mépris ou par plaisanterie, on le dit des persones. "Elle est venûe montrer son museau. "On lui a doné sur le museau, sur son museau.
   J' ai reçu deux coups de ciseau
   Dans un lieu bien loin du museau.
Cela est burlesque et polisson. On dit, dans un style moins bâs, d' une jeune et jolie persone, qu' elle a un joli museau, que c' est un joli museau: il ne se dit qu' en badinant.

MûSELER


MûSELER, voy. EMMûSELER.

MûSELIèRE


MûSELIèRE, MûSEROLE, s. f. [1re lon. 2e e muet, 3e è moyen et long au premier: mûzelière, mûzerole.] Ils dérivent tous deux de museau. Le premier, se dit de ce qu' on met à quelques animaux, pour les empêcher de mordre ou de paître; le second, de la partie de la bride, qui se place au dessus du nez du cheval.

MUSETTE


MUSETTE, s. f. [Muzète: 2eè moyen, 3e e muet.] Instrument de Musique champêtre, auquel on done le vent avec un souflet qu' on tient sous l' aisselle, et qui se haûsse ou se baisse par le mouvement du brâs. "Jouer de la musette. "Danser au son de la musette.

MUSICAL


MUSICAL, ALE, adj. MUSICALEMENT, adv. MUSICIEN, ENNE, ou ÈNE, s. m. et fém. MUSIQUE, s. fém. [Muzikal, kale, ka--leman, cien, ciè-ne, muzike.] Musique est 1°. La science du raport et de l' acord des sons. "Savoir la musique: montrer, enseigner la musique. "Composer en musique. "Mettre des vers, un Pseaume, de paroles, etc. en musique. = 2°. Le chant. "Musique agréable. "Musique vocale ou instrumentale. "Exécuter de la musique. = 3°. Compagnie de Musiciens atachés au service d' un Prince, d' une Compagnie, d' une Église. "La Musique du Roi, du Concert, de la Cathédrale. = On dit, proverbialement, d' un homme qui est extrêmement réglé, qu' il est réglé comme un papier de musique. = Pays de musique; où il y a du haut et du bâs. = Faire de la musique, ce n' est pas en composer, c' est l' exécuter par amûsement. L' expression~ n' est pas anciène. "Nous avons fait de la musique tout le jour. "Je portai l' autre jour des fraises à une Dame de qualité, on lui faisoit de la musique. Ah! Lubin! quel bruit terrible! Marm. Je doute qu' une jeune païsane comme Annette conût cette locution de Petite-Maitresse. Le costume n' est pas gardé.
   MUSICAL, qui apartient à la musique. Science musicale. = Musicalement, d' une manière musicale. "Ce morceau est traité bien musicalement.
   MUSICIEN, ÈNE, celui ou celle qui sait la musique. "C' est un excellent musicien; une savante musiciène. = Plus ordinairement, celui qui fait profession de composer ou d' exécuter de la musique. "Les Musiciens du Roi, du Concert; les Musiciens et les Musiciènes. Pour les femmes de cette profession, on ne se sert guère de ce mot. On dit plutôt, les Chanteûses.

MUSQUER


MUSQUER, v. act. [Muské: 2eé fer.] Parfumer avec du musc. "Musquer des gants; peau musquée. = Par extension, fruits musqués; poire musquée. = Fig. paroles musquées, obligeantes et flateûses. = Fantaisies musquées, les caprices des gens riches.

MUTABILITÉ


MUTABILITÉ, s. fém. Qualité de ce qui est muable. On ne dit pas mutable; mais muable, et l' on dit mutabilité, et non pas muabilité: telle est la bizârrerie de l' usage. "La mutabilité des chôses de ce monde.

MUTATION


MUTATION, s. f. [Muta-cion, en vers ci-on.] Changement. Terme de Jurisprudence. "Cette terre doit des droits de lods à chaque mutation par vente. = Il se dit au pluriel, dans le sens de révolutions, et avec plus de grâce que changemens. Andry. "Chercher dans l' Histoire les caûses des grandes mutations. Boss. "Les grandes mutations des États ont été causées, ou par la {B706a~} foiblesse; ou par la violence des Princes. Fléchier. Il me semble qu' il vieillit, mais il serait bon à conserver. L' Acad. l' admet pour le style soutenu.

MUTILATION


MUTILATION, s. f. MUTILER, v. act. [Mutila-cion, mutilé.] Retranchement, retrancher, en parlant de quelque membre du corps humain, ou de quelque partie d' une statûe. "Mutilation d' une jambe: mutiler un brâs. "Qui l' a ainsi mutilé? "Que de belles statûes les barbâres ont indignement mutilées!

MUTIN


MUTIN, INE, adj. et subst. SE MUTINER, v. réc. MUTINERIE, s. f. [Mu-tein, tine, tiné, tinerî-e; 3e e muet au 2d et au 4e, é fer. au 3e.] En parlant des enfans, ils expriment un entêtement, une obstination opiniâtre. "Cet enfant est mutin, il se mutine aisément. "Il se rend insuportable par sa mutinerie. = En parlant des peuples, ils dénotent un penchant à la révolte, ou la révolte même. "Ce peuple est mutin. "Il se mutine d' abord. "La mutinerie des troupes, du peuple.
   MUTINÉ, ÉE, adj. des troupes mutinées: un peuple mutiné. Fig. il se dit, en Poésie, des vents et des flots.
   * Corneille, dans Héraclius, apèle l' Amour, ce dangereux mutin. C' est le style de Scudéri et de la Calprenède.

MUTUEL


MUTUEL, ELLE, adj. MUTUELLEMENT, adv. [Mutu-èl, èle, èleman: 3eè moy. 4e e muet.] Réciproque. Réciproquement. "Amour mutuel; haine mutuelle; donation mutuelle. "Ils s' aiment, ils se haïssent mutuellement. "Ils se sont assuré leur bien mutuellement. = Suivant Vaugelas, on dit réciproque de deux, et mutuel de plusieurs. "Le mari et la femme doivent s' aimer d' un amour réciproque: les Chrétiens doivent s' aimer d' un amour mutuel. Suivant Th. Corneille on ne met que peu ou point de diférence entre ces deux mots. L' Acad. dit mutuel, de deux comme de plusieurs, et elle done réciproque, comme synonime de mutuel. = Selon M. l' Abé Roubaud, le mot mutuel signifie l' échange; le mot réciproque, le retour. On donne en échange, et cette action est mutuelle: on paye de retour, et cette action est réciproque. "Des amis se rendent l' un à l' aûtre des services mutuels: les maîtres et les domestiques s' aquitent les uns envers les aûtres par des services réciproques. "Nous nous donnons des secours mutuels.: nous nous devons des secours réciproques. Extr. des Synon. Fr. de {B706b~} M. l' Abé Roubaud.

MYOPE


MYOPE, s. masc. et fém. MYOPIE, s. f. [Mi-ope, pî-e; 3e e muet au 1er, lon. au 2d.] Myope, est celui, ou celle qui a la vûe fort courte. Myopie, est l' état du myope.

MYRRHE


MYRRHE, s. f. [Mîre; r forte; 1re lon. 2e e muet.] Gomme odorante, qui distille d' un arbre qui croît dans l' Arabie Heureûse.

MYRTE


MYRTE, s. m. Arbrisseau toujours verd, qui porte des fleurs blanches, d' une odeur agréable. Le myrte était consacré à Vénus: aussi est-il célébré par les Poètes Érotiques.

MYSTèRE


MYSTèRE, s. m. MYSTÉRIEUX, EûSE, adj. MYSTÉRIEUSEMENT, adv. [Mis-tère, te-ri-eû, eû-ze, eû-zeman; 2e è moy. et lon. au 1er, é fer. aux aûtres; 4e lon. 5ee muet aux 3 dern.] Mystère, dans son sens propre, chôse secrète. Il se dit particulièrement des chôses de la Religion, tant des faûsse, que de la véritable. "Les mystères de Cérès; de la Bonne Déesse, d' Isis et d' Osiris. _ Les principaux mystères de la Foi: le mystère de la Trinité, etc. = Par extension, il se dit des afaires importantes suivant l' opinion des hommes. "Les mystères de la politique. "C' est un mystère qu' on ne sauroit pénétrer. = Mystère d' iniquité, expression qu' on a souvent ocasion d' employer.
   On dit, dans le discours ordinaire, faire mystère d' une chôse, la tenir secrète. "Je lui demandai l' explication de ce mot, mais il m' en fit un mystère. Pasc. _ Et quand une chôse est aisée à faire, à trouver: "Il n' y a pas, dit-on, grand mystère à cela.
   MYSTÉRIEUX, apliqué aux chôses, qui contient quelque mystère. "Le sens mystérieux de la Bible. = Cet homme a une conduite toute mystérieûse. = Apliqué aux persones; qui fait mystère de chôses, qui n' en valent pas la peine. "C' est un homme fort mystérieux, tout mystérieux; il est mystérieux en toutes chôses.
   MYSTÉRIEûSEMENT, d' une façon mystérieûse. "Les Prophètes ont parlé mystérieûsement. _ "Cet homme se conduit fort mystérieûsement.

MYSTICITÉ


MYSTICITÉ, s. f. MYSTIQUE, adj. MYSTIQUEMENT, adv. [Mis-ticité, tike, keman, 3e e muet aux 2 dern. 4eé fer. au 1er.] Mysticité, recherche profonde dans la spiritualité. "La vraie mysticité conduit à la perfection; la fausse mysticité conduit à l' erreur et à l' illusion. = Mystique, figuré, allégorique, en parlant des chôses de la Religion. "Le sens mystique de l' Écriture Sainte. "L' Église est le corps mystique de J. C. = Mystique, apliqué aux persones; qui rafine sur la spiritualité. "Auteur, Livre mystique. = S. m. "C' est un grand mystique. "Les vrais mystiques; les faux mystiques. = Mystiquement, selon les sens mystiques. "Ce texte doit s' entendre, s' expliquer mystiquement.

MYSTIFICATION


*MYSTIFICATION, s. f. MYSTIFIER, v. act. Mots inventés et mis à la mode, à l' ocasion des tours joués à Poinsinet. "On doit entendre par mystifications, les pièges dans lesquels on fait tomber un homme ignorant, vain, peureux et crédule Fréron. = On a doné depuis plus d' étendue à cette locution bizârre. "Quoi, Signor Marchese, parce que je vous ai mystifié sur ce qu' en Italien vous parliez françois, voulez-vous donc ne nous plus parler qu' allemand? Tart. Epist. = Ces mots n' ont garde d' être dans le Dict. de l' Acad.

MYTHOLOGIE


MYTHOLOGIE, s. f. MYTHOLOGIQUE, adj. MYTHOLOGISTE ou MYTHOLOGUE, s. m. [Mitologi-e, gike, giste, mitologhe; dern. e muet.] Le 1er se dit de la science ou explication de la Fable; le 2d de ce qui apartient à cette science; les deux aûtres, de celui qui traite de la Fable et en explique les allégories. "Il sait très-bien la Mythologie: "Discours, livre mythologique. "Les Mythologistes ne s' acordent point entre eux. "Ce mythologue est savant, mais peu judicieux.