Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI MêME


MêME, pron. relat. [1re ê ouv. et long, 2e e muet.] Qui n' est point aûtre, qui n' est point diférent. "C' est le même homme, la même persone, le même pain, la même viande, etc. = Adv. Aussi, encôre. Je vous dirai même que, etc. "Quand même cela serait, etc.
   Rem. 1°. Quand même est pronom et adj. il se décline et prend une s au pluriel. "Les mêmes raisons. "Moi-même, toi-même, lui-même; nous-mêmes, vous-mêmes; eux-mêmes, elles-mêmes, etc. Il précède toujours le nom qu' il modifie, et il est précédé par l' article. "Le même homme, la même nouvelle, les mêmes accidens, etc. * Autrefois on suprimait souvent l' article. "Il chasse par même moyen des peuples abominables. Boss. On dirait aujourd' hui, par le même moyen. _ On ne retranche l' article, dans l' usage actuel, que dans le style familier, ou en poésie.
   Le riche et l' indigent, l' imprudent et le sage,
   Sujets à même loi, subissent même sort.
       Rousseau.
= Quand même est adverbe, il s' écrit toujours sans s. On peut pourtant, et l' on doit pardoner aux Poètes, qui ont quelque--fois besoin d' une syllabe de plus, d' écrire mêmes.
   Que si mêmes un jour le lecteur gracieux,
   Amorcé par mon nom, sur vous tourne les yeux.
       Boil. Ép. X.
= 2°. L' Acad. dans les Sentimens sur le Cid, fait précéder même de l' art. indéf. de. "Ce n' est point stérilité, si l' on n' en veut accuser Homère et Virgile, qui répètent plusieurs fois de mêmes vers. Elle dirait aujourd' hui, les mêmes vers. = 3°. Généralement parlant, même, pronom, modifiant un substantif, ne soufre pas volontiers un autre adjectif, sur-tout, s' il précède le substantif. "Le Lord Bonville eut la tête tranchée... Thomas Kiriel eut le même indigne sort. Hist. d' Angl. Il semble que même, dans sa signification, désignant un raport à ce qui précède, il est inutile de le répéter par l' addition d' un adjectif, qui exprime ce qui a été déja dit. Après avoir dit que le Lord Bonville avait eu la tête tranchée, il sufisait de dire que Kiriel eut le même sort. Le même indigne sort est un anglicisme. _ Cependant, dans les vifs mouvemens de l' éloquence, cette espèce de pléonasme peut faire un bon éfet. = 4°. Dans le sens comparatif, même demande la conjonction que, et non pas la prép. de. St. Évremont dit, parlant des Romains: "Les esclaves s' animoient du même esprit de leur maître. Il faut, du même esprit que leur maître. "Les Jurisconsultes, qui étaient du même ordre des (que les) Patriciens. Le Gendre. "Catualda eu le même sort de (que) Marobode. P. Barre. Hist. d' Allem. = 5°. On a dit autrefois, le même, pour la même chôse; et le P. Bouhours lui-même a employé cette expression. "On doit dire le même de cet endroit de Ciceron, etc. P. Rapin. "On pourroit conclûre le même touchant les décisions de la Foi. Boss. "Un Auteur moderne pense le même d' une autre manière. Bouh. _ On dit encôre aujourd' hui, revenir au même, pour, à la même chôse. * L' Ab. Des Fontaines le joint au V. venir, contre l' usage. "Si cet Auteur (La Motte) ne se vengeoit pas (des critiques), on sait que quelques-uns de ses partisans savoient y supléer: ainsi cela venoit au même. = 6°. Même, placé devant un substantif, a un sens tout aûtre, que lorsqu' il est placé aprês. "Le même homme est l' idem vir des latins: l' homme dont on a déja parlé, dont il a été déja question. L' homme même, c' est homo ipse: l' homme lui-même. * Autrefois on ne marquait pas cette diférence, et on disait, en vers surtout, la même vertu, au lieu de la vertu même.
   De vos soupçons l' injuste violence,
   À~ la même vertu vient de faire une offence.
       Mol. D. Garcie
  Sais-tu que ce vieillard fut la même vertu.
      Corn. dans le Cid.
Crébillon a dit aussi: la même innocence, pour l' innocence même.
   Non, le même innocence
   N' auroit pas un maintien plus rempli d' assurance.
_ 7°. On peut dire, d' après l' Ab. Regnier, que même, dans la même phrâse, peut être regardé comme pronom, ou comme adverbe, suivant qu' il est devant ou aprês le subst. Ainsi, quand on dit: et Platon même croyait, même semble être dit pour lui-même. Au contraire, si l' on dit, et même Platon croyait, etc. même, ainsi placé, est indubitablement adverbe. _ Cependant, si le nom est au pluriel, il me parait qu' on ne doit point mettre d' s à même, quand il est seul, et qu' il n' est pas acompagné de quelque autre pronom. On doit dire, ce me semble, et les soldats même, et non pas mêmes, quoiqu' on dise fort bien, les soldats eux mêmes, avec une s. Cette remarque me fait croire que même est toujours adverbe dans ces ocasions, soit qu' il soit aprês ou devant le substantif. = 8°. Même s' emploie fréquemment à la suite, non seulement des pronoms personels, mais aussi des pronoms démonstratifs: ceci, cela même; celui-ci, celui-là même. Les pronoms personels qui prènent même à leur suite, sont moi, toi, lui, elle, vous, nous, eux, elles. "Moi-même, toi-même, etc. il suit alors le nombre dans lequel ces pronoms sont employés. Vous-mêmes, eux-mêmes, etc. Les Poètes prenaient aûtrefois la licence, tantôt de mettre une s au singulier pour gâgner une syllabe; tantôt de la retrancher au pluriel, parce qu' il y avait une syllabe de trop. Ménage aporte des exemples de l' une et l' autre licence, tirés de Marot, Malherbe, Le Moine, etc. On ne les pardoneroit pas aujourd' hui. Th. Corn. = Voltaire a dit encôre, dans ce siècle, nous-même, pour le faire rimer avec suprême. = 9°. Quand le pronom, joint à même, est aprês le verbe, il faut répéter devant, ou ce pronom, ou son correspondant. "Je l' ai fait moi-même; vous l' avez fait vous même; et ainsi des aûtres câs. Les phrâses suivantes ne sont donc pas exactes. "Vous êtes chargés de rendre la justice aux peuples; commencez par la rendre à vous-mêmes. Anon. Il falait, vous la rendre à vous-mêmes. Les compilateurs qui ont travaillé sous le nom de Harris; car on n' est redevable à lui-même que de l' Épitre Dédicatoire et de l' introduction de son Recueuil. Préf. de l' Hist. Gén. des Voy. Il falait, on ne lui est redevable à lui-même que de etc. = 10°. Soi-même, lui-même ont diférens sens. Se sauver, se perdre soi-même, c' est sauver ou perdre sa propre persone: "Il s' est sauvé lui-même; c. à. d. sans le secours d' autrui: il s' est perdu lui-même; c. à. d. par sa faûte. _ Et ainsi des autres verbes, avec lesquels on peut mêtre soi-même sans préposition. "Il se loue lui-même, c. à. d. lui se loue, et les autres peut-être ne le louent pas. "Il se loue soi-même, c. à. d. il loue sa propre persone, et non pas celle d' un aûtre. On voit que lui-même est sujet de la phrâse, ou en tient lieu; et que soi-même est employé comme régime. Extr. du P. Bouhours et de M. Beauzée. = Étre soi-même, agir suivant son génie, son caractère. "C' est alors que Thérèse est plus elle-même, plus séraphique que jamais. L' Abé Du Serre-Figon.
   De-même, adv. On doit l' écrire sans s. Th. Corneille. De la même manière. "Elle est inconstante: toutes sont de même. "Je l' ai pensé de même. = Quand il est comparatif, il régit que devant les noms et les verbes. "Il est venu de même que moi. De même que le soleil est l' âme de l' Univers, ainsi un Roi l' est de son Royaume. On peut répéter de même à la place d' ainsi; de même un Roi, etc. * La Bruyère, en l' employant, fait suivre le verbe du pronom nominatif. "Demande-t-on à des Beliers qu' ils n' aient pas de cornes? De même n' espère-t-on pas de réformer par cette peinture des naturels si durs. _ Il falait, de même l' on n' espère pas. Le pron. on est d' autant plus mal placé dans cette ocasion, qu' il done à la phrâse un ton d' interrogation qu' elle n' a pas dans le sens de l' Auteur. = De même doit être placé aprês le premier membre de la comparaison. La construction de la phrâse suivante est très-mauvaise. "Cette loi portoit de même sur les Puritains que sur les Catholiques. H. des Tudors. Il falait dire: portait sur les Puritains, de même que sur les Catholiques. = On ajoute quelquefois tout à de même. Je suis tout de même. "Il m' a ofensé tout de même que vous.
   À~ Même, adv. * On l' a dit autrefois pour en même tems. "À~ même que la prière fut faite, l' orage fut apaisé. Vaugelas trouvait cette façon de parler très-mauvaise, et elle est inusitée aujourd' hui. _ Quelquefois, dit Th. Corn., on l' emploie à un autre usage, qui n' est pas reçu par ceux qui parlent correctement, c' est quand on dit, boire à même la bouteille. _ Pluche s' est servi de cette locution. "Voilà le miel dans toute sa pûreté... mordez sans façon à même: jetez seulement la cire de côté. Spect. de la Nat. = Mettre à même et être à même de faire quelque chôse; c. à. d. mettre ou être à portée de le faire, doner ou avoir des facilités pour le faire, sont des façons de parler qui m' ont toujours paru bien bizârres, et qui certainement ne sont pas du beau style. De bons Auteurs s' en sont pourtant servi; mais je ne voudrais pas les imiter. M. L' Ab. Guénée et M. l' Ab. Grosier sont du nombre. On les troûve aussi dans l' Ann. Lit. "M. Linguet est certainement bien à même de se venger. Et dans le Mercûre. "Cette époque brillante met l' Auteur à même de rassembler... une multitude de faits et de découvertes, etc. _ Le Traducteur du Voyage d' Anson l' emploie même avec le régime des noms. "Ce n' est pas un effort commun à des Matelots que de savoir se modérer sur l' usage des liqueurs fortes, lors qu' ils s' en trouvent à même. * Marivaux dit mettre en même, qui est encôre plus mauvais; mais c' est un valet qu' il fait parler. L' Acad. dit bien être, mettre, laisser à même; mais elle les dit sans régime. "Il vouloit lire, je l' ai mené dans un cabinet, l' ai mis à même, l' ai laissé à même, etc.

MêMEMENT


*MêMEMENT, adv. Même. De même. Il a tout-à-fait vieilli. Vaug. Corn. Men.L. T. Il n' est plus usité que chez les Notaires et les Procureurs de province.

MÉMOIRE


MÉMOIRE, s. f. et m. [Mé-moâ-re: 1re é fermé, 2e longue, 3e e muet.] Il est fém. quand il signifie la faculté de se souvenir, ou le souvenir même. "Bone, grande, belle, heureûse mémoire. "J' en garderai toujours la mémoire. _ Il est masc. quand il veut dire un écrit fait, ou pour se ressouvenir de quelque chôse, ou pour en instruire un aûtre. "Faites-en, dressez-en un mémoire. "Donnez-m' en un mémoire. _ Ce n' est que dans ce sens qu' on peut le dire au pluriel. "Il a doné plusieurs Mémoires. = Relations de faits ou d' évènemens particuliers, ou pour servir à l' Histoire. "Les Mémoires de Comines. "Mémoires chronologiques, par le P. d' Avrigni, etc. = Dans le premier sens on dit toujours la mémoire, au singulier, même quand il s' agit de plusieurs. "On est bien éloigné de vouloir noircir les mémoires de, etc. Anon. Dites, noircir la mémoire, etc. = * Autrefois on faisait toujours mémoire féminin, même dans le second sens. "Elle tiendra de bonnes mémoires pour rendre compte de tout. St. Fr. de Sal. On dirait aujourd' hui de bons mémoires.
   Rem. Les pronoms possessifs, joints à mémoire, donent souvent à ce mot un sens passif. Votre mémoire n' est pas le souvenir que vous avez des aûtres; c' est le souvenir que les autres ont de vous. "Le tems effacera jusqu' à votre mémoire: on ne se souviendra plus de vous: on vous aura oublié. = On dit, en ce sens, perdre la mémoire, le souvenir de quelqu' un. Racine a dit: laisser la mémoire.
   Et sans plus me charger du soin de votre gloire,
   Je veux laisser de vous jusqu' à votre mémoire.
       Mitridate.
Laisser de vous est plus coulant que perdre de vous; mais il n' est pas aussi conforme à l' usage. Il vaut mieux en vers: il ne serait pas aussi bien en prôse. = Rafraichir la mémoire de, est du style familier. "comme il seroit très-possible que vous les eussiez oubliées, il n' y a pas beaucoup de risque à vous en rafraichir la mémoire. Ann. Lit.
   De mémoire d' homme, adv. "Le Diable est déchaîné en cette ville (Marseille) de mémoire d' homme on n' a point vu de tems si afreux. Sév. _ La Fontaine a dit, en imitation, de mémoire de singe, et cela est très joli dans une Fable.
   Thémis n' avoit point travaillé,
   De mémoire de singe, à fait plus embrouillé.
= D' heureuse mémoire est une expression qui n' est plus guère à la mode. "Le feu Roi d' heureuse mémoire. On disait aussi, d' illustre, d' éternelle, de triomphante mémoire. "Le feu Roi, de triomphante mémoire. Mascaron. _ Boileau dit en plaisantant: "Depuis Midas, d' impertinente mémoire, s' est-il trouvé persone qui ait rendu un jugement aussi absurde.
   En mémoire de, adv. "Faites ceci en mémoire de moi. "On a dressé une colone avec une inscription en mémoire de cet évènement. * Bossuet dit, à sa mémoire. "Sacrement institué à sa mémoire. (de J. C.); on dit, en sa mémoire, comme on dit en son honeur, plutôt qu' à son honeur. = On apèle poétiquement les Muses, Filles de Mémoire.
   Non, non, sans le secours des Filles de Mémoire,
   Vous vous flatez en vain, partisans de la gloire,
   D' assurer à vos noms un heureux souvenir.
       Rousseau.
= Le Temple de Mémoire, où l' on supôse que les noms des Grands Hommes sont conservés.

MÉMORABLE


MÉMORABLE, adj. MÉMORATIF, IVE, adj. [1re é fermé, 3e dout. au 1er, 4e long. au 3e.] Le premier se dit des chôses qui sont dignes de mémoire; Le 2d des persones qui ont la mémoire de quelque chose. "Action, journée, chôse, fait mémorable. "Je n' en suis pas bien mémoratif. "Elle n' en étoit pas mémorative. Le 1er est de tous les styles: le 2d n' est que du style familier, et se dit ordinairement avec la négative.

MENAÇANT


MENAÇANT, ANTE, adj. MENACE, s. f. MENACER, v. act. [1re e muet; 3e lon. aux deux premiers, e muet au 3e, é fer. au 4e.] Menance est une parole où un geste, dont on se sert pour faire craindre à quelqu' un le mal qu' on lui prépare. Menacer, faire des menaces. Menaçant, qui menace. "User de menaces. "Discours plein de menaces. "Menacer de la main, avec la canne. "Gestes menaçans, regards mençans, paroles menaçantes. "Ton rude et menaçant, lettre menaçante.
   Rem. 1°. On écrivait autrefois menassant, menasse, menasser. _ Quelques Auteurs, ou Imprimeurs écrivent à l' imparfait et au prétérit, je menaceois, il menacea, etc. Mettez la cédille sous le ç qui précède l' a et l' o. = 2°. Menace est plus en usage au pluriel qu' au singulier. On dit pourtant: il méprisa cette menace. "L' effet suivit de près la menace. Mais pour cinq ou six phrâses semblables, il y en a sans nombre où l' on dit les menaces. = 3°. Menacer a souvent pour second régime l' ablatif, qui est le seul régime du passif. Dieu nous menace de la damnation éternelle. "Nous sommes menacés d' un grand malheur. Il régit aussi de et l' infinitif. "Il le menaça de le punir sévèrement. = 4°. Menacer se dit figurément des chôses, et signifie alors pronostiquer. "L' air nous menace d' un orage. _ Le bâtiment menace ruine, est près de tomber. _ Poétiquement: ces tours, ces arbres menacent les Cieux, ils sont fort élevés. = 5°. Avec le seul régime direct (l' acusatif) menacer signifie anoncer des punitions. Avec les deux régimes, il veut dire, anoncer des malheurs. Le P. Griffet, parlant des persécutions que J. C. anonça à ses Apôtres, dit: il est vrai qu' en les menaçant il les console. Le terme est impropre en cette ocasion. Menacer, anoncer des malheurs, ne se dit que des chôses, et toujours avec les deux régimes. Au passif, il se dit des persones. "Il est menacé d' apoplexie; nous sommes menacés de guerre. = 5°. En st. plaisant et par contre vérité, il a le sens de faire espérer. "Il nous menace d' un grand repâs. de nous donner à dîner.

MÉNAGE


MÉNAGE, s. m. MÉNAGEMENT, s. m. MÉNAGER, v. act. [1re é fer. 3e e muet aux 2 1ers; é fer au 3e: en, dans le 2d a le son d' an.] Ménage a divers sens: 1°. Gouvernement domestique. "Tenir ménage. "Être dans son ménage. "Régler, bien conduire son ménage. _ Mettre une fille en ménage (st. famil.) la marier. _ Faire bon ou mauvais ménage, se disent d' un homme et d' une femme, qui vivent en bonne, ou en mauvaise intelligence. = 2°. Il se prend pour les meubles et ustensiles du ménage. Il est populaire. "Cette servante tient son ménage bien propre. = 3°. Épargne, économie. "Entendre le ménage; vivre avec un grand ménage, ou de ménage. "Nos anciens Rois vivaient de ménage, comme les particuliers. = En style plaisant, on dit d' un homme, qui vend ses meubles pour vivre, qu' il vit de ménage. C' est un jeu de mots sur le 2d et le 3e sens de ménage. = Ménage, ménagement, épargne (synon.) On se sert de ménage en fait de dépense ordinaire; de celui de ménagement dans la conduite des afaires; et de celui d' épargne à l' égard des revenus. = 4°. Ménage se prend collectivement, pour toutes les persones, dont une famille est composée. "Il y a trois ou quatre ménages, logés dans cette maison.
   Rem. On dit, entrer en ménage, se marier. Le besoin d' une syllabe de plus a fait dire à un Fabuliste, entrer dans son ménage.
   Vous le savez, jeune fille à Paris
   Grille d' entrer dans son ménage.
       La Linotte. Merc.
  MÉNAGEMENT, égards, circonspection. Voy. CIRCONSPECTION et ÉGARDS. Voy. aussi MÉNAGE, n°. 3°. "Il est d' une humeur fâcheuse: il faut avoir de grands ménagemens pour lui. "Sa santé exige beaucoup de ménagement. "Il s' est conduit dans cette afaire avec beaucoup de ménagement, ou sans ménagement. = Le ménagement des esprits, l' art de les manier. = Le ménagement des Afaires; l' art de les conduire.
   Rem. Le Traducteur de l' Hist. de M. Hume, done souvent à ce mot un sens qu' il n' a pas en français. Ex. "Cette dignité fut mise en commission, et Bellasis en eut le ménagement. c. à. d. qu' il l' exerça. C' est un anglicisme. _ Un Auteur cité par Bouhours a dit aussi. "La Sainte Vierge nous aprend le sage ménagement que nous devons faire de toutes les paroles de Dieu. On ne dit point, faire un ménagement de paroles. Dites, avec quel soin nous devons conserver toutes les paroles de Dieu.
   MÉNAGER, c' est 1°. User d' économie. "Ménager son bien, son revenu, sa bourse, ou le bien, la bourse d' autrui. = Fig. Ménager ses forces, sa santé, ses amis, son crédit. _ Ménager des troupes; ne pas les exposer mal-à-propôs. _ Ménager les intérêts de quelqu' un, avoir soin de les conserver. _ Menager quelqu' un, prendre garde de rien faire, qui le choque, qui le rebute. = Se ménager, se choyer, avoir soin de sa persone. "Ménagez-vous! "Je me ménage. = 2°. Conduire, manier avec adresse. "Ménager les esprits; les afaires. _ Se ménager bien avec tout le monde; entre deux partis. _ N' avoir rien à ménager avec quelqu' un; n' avoir plus de mesûres à garder avec lui. _ Ménager ses paroles, parler peu;les termes, parler avec une grande circonspection; le tems, en faire un bon emploi; ou, prendre son tems fort à propôs, pour quelque chôse; sa voix, la bien conduire; une étofe, un terrein, l' employer si bien, qu' il n' y ait rien de perdu. _ Ménager un escalier, un cabinet, dans un bâtiment; les y faire, sans gâter le dessein principal. _ Ménager ses chevaux, être atentif à ne pas leur faire faire de trop longues courses. _ On dit, proverbialement: qui veut aller loin ménage sa montûre, ce qui s' aplique figurément à la santé et à toute autre chôse.

MÉNAGER


MÉNAGER, ÈRE, adj. et subst. [Ménagé, gère: 1reé fer. 3e é fer. au 1er, è moy. et long au 2d, dont la 4e e muet.] Qui entend le ménage, l' économie. "Homme fort ménager; femme fort ménagère. _ Subst. "C' est un grand, ou, un mauvais ménager; une bonne ménagère. = Servante, qui a soin du ménage. "Il a chez lui une bonne, une habile ménagère. = Parmi le peuple, en certaines Provinces, un mari apelle sa femme notre ménagère. L' adjectif est beau au figuré:
   Le sage est ménager du tems et des paroles.
       La Font.
Un Roi, dit Corneille,
Est meilleur ménager du sang de ses sujets.
Mais il n' en est pas de même du substantif, (du moins dans le haut style.) "L' injustice est une mauvaise ménagère, dit Montesquieu: elle ne tient pas tout ce qu' elle promet. _ Cela me parait un peu trop familier pour un ouvrage sérieux.

MÉNAGERIE


MÉNAGERIE, s. f. [1re é fer. 3e e muet, 4e lon.] Lieu bâti auprès d' une maison de campagne, pour y engraisser des bestiaux, des volâilles, etc. = Chez les Princes, lieu où ils tiènent des animaux étrangers et râres.

MÉNAGEUR


*MÉNAGEUR, s. m. C' est un mot de Madame de Sévigné. "Si, en tournant le feuillet, ils veulent dire le contraire et ménager la chèvre et les choux, je les traiterai comme ces ménageurs politiques, etc.

MENDIANT


MENDIANT, ANTE, s. m. et f. MENDICITÉ, s. f. MENDIER, v. act. [Man-dian, dian-te, dicité, di-é: 1re lon. 2e lon: aussi dans les deux premiers, dern. du 3e et du 4e é fer. _ On voit dans des livres mandiant, etc. avec un a à la première syllabe. L' Acad. ne met point mendiante; il est dans Trév. et dans le Rich. Port.] Mendier, c' est demander l' aumône. Mendiant, ante, celui, celle qui mendie. Mendicité, état où l' on est réduit à mendier. "Il mendie son pain. "Mendier sa vie. = V. n. Il est réduit à mendier. "C' est un mendiant, une mendiante. "La troupe innombrable des mendians. "Il est réduit à la mendicité. = Les deux substantifs ne se disent qu' au propre, mais les verbe s' emploie au figuré, et même élégamment. Mendier des sufrages, des louanges, des secours; les rechercher avec empressement, et avec une sorte de bassesse.
   J' ai mendié la mort chez des peuples cruels.
       Rac. Andr.
Mais, mendier le coeur de tout le monde, est une expression, qui ne parait pas fort noble. "Comme il n' avoit point une froideur et une fierté capables de rebuter, il n' avait point aussi cet air caressant, qui semble mendier le coeur de tous le monde. MASCAR. Or. Fun. de M. de Turenne.

MENÉE


MENÉE, s. f. MENER, v. act. MENEUR, s. m. [1re e muet; 2e é fer. aux 2 premiers. Devant l' e muet la premiere se change en è moy. il mène, mènera, etc.] Menée, est une secrète et mauvaise pratique pour faire réussir un dessein. "Faire des menées: "J' ai découvert ses menées. _ Il se dit le plus souvent au pluriel.
   MENER, 1°. Conduire, guider. "Je vous y mènerai. "Menez- moi. "Mener une femme par la main, un enfant par la lisière. = Mener, emmener, amener, ramener, remener ont beaucoup de raport: l' Usage pourtant les distingue. On doit se servir de l' un de ces verbes plutôt que de l' aûtre, suivant l' endroit dont on parle. _ "Je suis logé avec un de mes amis, ou dans son quartier. S' il sort en carrosse et qu' il me demande, si je veux aler à la promenade, je dois dire, qui me ramènera? Mais si nous sommes logés en diférens quartiers, il faut dire, qui me mènera, ou, me remènera à mon logis? Que si je lui parle, étant à la promenade, je dois lui dire, me pouvez-vous remener, et non pas ramener, suposé que je fusse logé dans son quartier; car, si nous logions en diférens quartiers, il faudrait lui dire: me pouvez-vous mener à mon logis? et non pas remener. Enfin, si c' était son chemin de passer chez moi, ou qu' il ne se détournât pas beaucoup en y passant, il faudrait dire, me voulez-vous remener? = On dit, emmener, sans régime relatif, de quelqu' un, dont on veut se défaire: emmenez-moi cet homme là. Quand le régime relatif est nécessaire, il faut se servir de mener. "Voilà un homme qu' on mène en prison, et non pas, qu' on emmène en prison. Ainsi, qui dirait à quelqu' un, prêt à faire un voyage, emmenez-moi, parlerait très bien; mais qui lui dirait, emmenez-moi avec vous, parlerait très-mal: il faut dire alors, menez-moi avec vous. = Pour ce qui est d' amener, on dit, je vous amène cet homme: vous m' amenez toute sorte de gens; si celui que vous m' amenez me déplait, je vous dirai, je vous prie de le remener où vous l' avez pris. Si au contraire, il me plait, je dirai: je vous prie de le ramener. MEN. _ Mener, conduire, guider. (Synon.) Voy. CONDUIRE. = 2°. Conduire une troupe, la faire marcher et agir. "Mener des gens au combat, à l' assaut. "Cet officier mène bien sa troupe. = 3°. Conduire par force en quelque endroit. "Mener en prison. "Lorsqu' on le menait au suplice. "On le menait pendre. = 4°. Se faire acompagner. "Il mena tout son monde avec lui. = 5°. Introduire. "Menez-moi chez le Ministre. 6°. Il s' emploie élégamment au figuré. "Il y a une noble émulation, qui mène à la gloire par le devoir. Massill. "L' ambition, l' intérêt le mène. "On le mène (on le gouverne) comme on veut. = En st. famil. mener quelqu' un à baguette, le traiter avec hauteur et avec empire. _ On le mène, ou, il se laisse mener par le nez. (on ajoute quelquefois, comme un buffle.) On le gouverne comme on veut, il se laisse duper. On dit, dans le même sens mener tout seul.
   Ah! vous êtes bien fort, mais c' est loin de Florise.
   Au fond, elle vous mène en vous semblant soumise.
       Gresset, Le Méchant.
= 7°. Mener, se dit des chôses en diférens sens: "Cela ne mène à rien; on n' en saurait espérer aucun avantage. "Le jeu, la débauche, les femmes mènent bien loin, jettent dans de grandes extrémités. "Cet argent nous mènera, ou ne nous mènera pas bien loin, nous fournira, ou ne nous fournira pas un long secours. _ On dit qu' une médecine a mené doucement ou rudement quelqu' un; qu' elle l' a peu ou beaucoup tourmenté. = 8°. Amuser, entretenir de fausses espérances. "Il y a six mois que vous me menez avec de belles paroles, et je n' en vois pas l' éfet. = 9°. En parlant des animaux, les conduire; menez les bêtes aux champs; mener paître les vaches; des marchandises, les voiturer: "Mener du blé au marché, des marchandises à la foire. = 10°. Mener se dit avec vie. "Mener une vie sainte, ou scandaleûse, etc. Vivre saintement, scandaleûsement, etc. = 11°. Mener une dame, c' est ou lui doner la main et être son écuyer; ou, la prendre pour danser avec elle. _ Mener le branle, c' est au propre, être à la tête de ceux qui dansent; au figuré, (st. famil.) doner l' exemple, "C' est à vous à mener le branle. = Dans le même style, mener beau bruit, grand bruit: faire grand fracâs.
   Rem. On dit, ce me semble, assez indiféremment mener mal et mal mener; le 2d pourtant vaut mieux, ou pour mieux dire, il dit quelque chôse de plus violent. L' Acad. les mettait dabord tous deux également: il le mena mal: il l' a fort mal-mené. Dans la Nouv. Édit. il n' y a que mal-mener. = Dans les tems simples on peut pourtant dire mener mal, sur-tout quand il est joint à d' aûtres adverbes, qui en renforcent le sens: "il le mena fort mal, extrêmement mal. _ De plus mener mal, dit moins que mal-mener, et peut être utile dans des ocasions où mal-mener serait trop fort.
   MENEUR, EûSE, celui, celle qui mène. On ne les dit que dans ces phrâses. Meneur d' une Dame, qui la conduit par la main. _ Meneur d' ours, qui les fait voir au peuple, pour gâgner quelque argent. _ Meneur, meneûse, celui ou celle, qui amène des nourrices à Paris aux bureaux des Recomanderesses.
   Rem. Suivant l' Acad. dans les premieres éditions, meneur d' ours au figuré, se dit d' un homme mal bâti, et mal vétu. L' Auteur de l' Apothéose du Dictionaire croit qu' elle s' est trompée et que ce mot signifie, un homme, qui porte toujours un habit de la même couleur, comme font les meneurs d' ours pour n' en être pas méconus. _ Dans la dern. édit. l' Acad. ne le dit qu' au propre.

MÉNÉTRIER


MÉNÉTRIER, s. m. [3 é fermés.] Autrefois, joueur d' instrumens. _ Aujourd' hui, terme de mépris, mauvais joueur de violon.
   MENEUR, Voy. MENER, à la fin.

MENINS


MENINS, s. m. pl. [Me-nein: 1ree muet.] Ce mot nous vient d' Espagne. C' est le nom qu' on done à un certain nombre d' hommes de qualité, atachés particulièrement à la persone de M. le Dauphin.

MENOTTE


MENOTTE, ou MENOTE, s. f. [1re et dern. e muet.] En style badin et caressant, il se dit des mains des petits enfans. "La jolie petite menotte! _ C' est un diminutif. _ Au pluriel, anneaux de fer, qu' on met aux mains d' un criminel. "On lui mit les menottes.

MENSE


MENSE, s. f. [Quelques-uns écrivent comme on prononce, manse, le dérivant de mansus, qui signifiait autrefois une mesûre de terre, exemte d' impositions. Par la loi des Francs, chaque Église avait une manse, exemte de toute charge, mais non du service éclésiastique. _ Le grand nombre écrit mense et le dérive de mensa, table.] On apèle mense abbatiale, le revenu, qui est dans le partage de l' Abbé; mense conventuelle, celui, qui est dans le partage des Religieux; et mense comune, celui, dont les religieux et l' Abbé jouïssent en comun.

MENSONGE


MENSONGE, s. m. MENSONGER, ÈRE, adj. [Mansonge, gé, gère: 1re et 2e lon. 3ee muet au 1er, é fer. au 2d, è moy. et long au 3e.] Mensonge, est 1°. Un discours contraire à la vérité, avec dessein de tromper. Quand on n' a pas ce dessein ce n' est qu' erreur ou fausseté. "Dire, faire un mensonge. "Ce livre est plein de mensonges. On a fait un livre, intitulé: les Erreurs de Voltaire. Quelqu' un voulait qu' on l' intitulât: les Mensonges de, etc. Voy. MENTERIE. _ 2°. Erreur, illusion. "Le monde n' est qu' illusion, vanité et mensonge. = Dans le style de l' Ecritûre, l' esprit de mensonge, le Père du mensonge, le démon. = Le proverbe dit: tous songes sont mensonges; on doit mépriser les augûres, qu' on tire des songes.
   Rem. 1°. Mensonge est toujours masculin, dit Vaugelas quoique quelqu' uns de nos meilleurs Auteurs l' aient fait fém. _ Ces Auteurs ne sont pas des plus modernes. _ Le peuple lui done encôre ce genre dans plusieurs de nos Provinces. Il dit une mensonge, au lieu de, un mensonge, qu' il faut dire. = 2°. L' Éditeur des OEuvres de Bossuet emploie ce mot d' une manière, qui me parait bisârre, et c' est d' après Bossuet qu' il s' en sert. "* Le Siège de Pierre n' a pas besoin de notre mensonge, c. à. d. n' a pas besoin que nous lui atribuions de fausses prérogatives. L' expression n' est pas exacte ni pour la propriété du mot, ni pour le nombre: le pluriel aurait mieux convenu.
   MENSONGER, ÈRE, faux, faûsse, trompeur, trompeûse. C' est un mot poétique. Il ne se dit guère que des chôses. On dit bien beautés mensongères. Langue mensongère, la Grèce mensongère, et dans cette phrâse, beautés et langue sont personifiés: mais on ne dit point, un homme mensonger, une femme mensongère. _ Son usage ordinaire est avec les chôses, qui ont raport aux persones. "Les plaisirs mensongers. "Grandeurs mensongères. = La Bruyère met mensonger au nombre des mots, qu' il regrette: c' est une preûve que de son tems il était déjà vieux. Il a repris faveur depuis quelque tems et l' on s' en sert sans dificulté non-seulement dans la haute poésie, mais dans le Discours soutenu.

MENTAL


MENTAL, ALE, adj. MENTALEMENT, adv. [Mantal, tale, taleman: 1re lon. 3ee muet.] Mental n' a d' usage qu' au féminin et dans ces deux phrâses. Oraison mentale, qui se fait sans proférer aucune parole. Restriction mentale qu' on fait au dedans de soi, pour doner à ce qu' on dit un autre sens que celui, qui est porté par le sens litéral des paroles qu' on profère. "Je ne le sais pas, on sous-entend intérieurement, de manière que je puisse le dire. Exemple d' une restriction mentale.
   MENTALEMENT, d' une manière mentale; intérieurement dans son esprit. "Les lois ne punissent pas les crimes commis mentalement.

MENTERIE


MENTERIE, s. f. [Manteri-e.] Mensonge. Celui-ci est plus du style noble, et Menterie du st. familier. Suivant M. l' Abbé Roubaud, la menterie est une simple fausseté avancée dans l' intention de tromper; le mensonge est une fausseté combinée de manière à séduire, à abuser. "Les enfans préludent aux mensonges par des menteries. Le fourbe fait des mensonges: le bavard dit des menteries: celui-ci ne trompe persone; l' autre trompe les plus fins, etc. etc. Voy. Les Nouv. Syn. Fr. de M. l' Ab. Roubaud.

MENTEUR


MENTEUR, EûSE, adj. et subst.~ MENTIR, v. n. [Man-teur, teû-ze, ti: 1re et 2e lon. au 2d.] Mentir, c' est afirmer comme vrai ce qu' on sait être faux. Menteur, qui ment. "La loi de Dieu défend de mentir. "Il ou elle ment à tout propôs. "Il ment impunément, éfrontément. Acad. _ Impunément se dit par corruption d' impudemment. J' avoue que je suis étoné que l' Acad. ait cité cette façon de parler, sans la blâmer. "Il est menteur, elle est menteûse. "C' est un menteur, une menteûse. = Il se dit quelquefois des chôses: silence menteur, physionomie menteûse. "Toutes les passions sont menteûses. LA BRUY. "L' almanach est menteur, le Proverbe est menteur. TRÉV. _ Mensonger serait plus convenable avec les chôses; mais l' usage l' a borné au style poétique et relevé.
   Rem. Mentir se dit, figurément, des chôses. "J' avois... l' oeil vif, qui anonçoit un peu d' esprit, et qui ne mentoit pas totalement. = Se mentir à soi-même est une expression d' un beau sens. "On se ment si souvent à soi-même. La Beaumelle. = Sans mentir, à ne point mentir, espèce d' adverbe. Il est du style familier. "Ne voulant me doner que des paroles, vous les avez choisies si riches et si belles, que sans mentir, je suis en doute si les effets valent beaucoup mieux. Voit.
   Sans mentir, si votre ramage
   Se raporte à votre plumage,
   Vous êtes le phénix des Hôtes de ces bois.
       La Font.
Le renard ment, en disant sans mentir.
On dit, proverbialement, faire mentir le Proverbe, faire quelque chôse à laquelle on ne devait pas s' atendre, comme, par ex. de réussir dans son pays, malgré le Prov. qui dit que: nul n' est Prophète dans son pays. _ Il n' enrage pas pour mentir, il ment habituellement. _ Mentir par la gorge. Voy. GORGE et GOULE. _ À~ beau mentir, qui vient de loin; celui qui vient d' un pays éloigné en peut facilement imposer, parce qu' il parle à des gens qui ne peuvent point le démentir. _ Bon sang ne peut mentir; des persones bien nées ne~ dégénèrent point. = Tout homme est menteur, c. à. d. sujet à se tromper. Omnis homo mendax. _ Dans ce proverbe sacré, menteur n' a pas son sens ordinaire. Il ne se dit pas de celui qui trompe, mais de celui qui peut se tromper. Cela vient de ce qu' on a mal traduit ce passage du Pseaume.
   On ajoute quelquefois à mentir le pron. en: "Vous en avez menti. _ Il faut éviter de s' exprimer de la sorte: c' est le plus grand afront qu' on puisse faire à un homme d' honeur, et il a toujours des suites terribles. _ Remarquez qu' on ne le dit que dans les tems composés. On ne dit point: vous en mentez; je lui dis qu' il en mentait.

MENTION


MENTION, s. f. MENTIONER, v. act. [Man-cion, en vers ci-on, cio-né, en vers ci-oné.] Mention, commémoration, mémoire de... Faire mention de quelqu' un, de quelque chôse. "Il n' a point été fait mention de lui dans cette afaire. = Mentioner, faire mention. Il ne se dit qu' au Palais; et il n' est guère d' usage qu' au participe passif. "Ce qui a été mentioné. "Les clauses mentionées ci-dessus. = Boileau dit: il est mention de. "Il ne fut plus mention de notre opéra. On dit aujourd' hui: il ne fut plus question. "Barcoqueba se disoit le fils de cette étoile de Jacob, dont il est mention dans la prophétie de Balaam. Beraud-Bercastel. Hist. de l' Église. "Pierre Séguier, dont il sera souvent mention dans la suite de cette Histoire l' Ab. Garnier, Hist. de Fr. Dont il est fait mention. Dont il sera souvent fait mention serait, ce me semble, plus conforme à l' usage. D' Avrigni a dit aussi. "L' Université cita ceux de ses membres dont il étoit mention Là, question était le vrai~ mot.

MENTIR


MENTIR, voy. MENTEUR.

MENTON


MENTON, s. m. MENTONIèRE, s. f. [Menton, to-nière: 1re long. 3eè moyen et long au 2d.] Menton est la partie du visage qui est au-dessous de la bouche. "Menton pointu, fourchu, plat, long, court. "Avoir de la barbe au menton (st. prov.) être dans l' âge où l' on doit avoir du bon sens. _ Branler le menton, manger; lever le menton, faire le brâve, le résolu. _ Avoir deux mentons, ou double menton, être fort grâs. _ Être assis à table jusqu' au menton, c. à. d. fort bâs. = Parmi les animaux, menton ne se dit que des boucs et des chèvres; et de cette élévation de figûre ronde qui est sous la lèvre postérieure du cheval.
   MENTONIèRE, est cette partie du masque que portaient autrefois les Dames, et qui couvrait le menton. Il y a encôre des masques à mentonière, mais on ne les porte qu' au bal.

MENTOR


MENTOR, s. m. [1re lon. en n' a pas le son d' an: pron. méntor.] Nom propre, qui est devenu comun. Celui qui est de conseil, de guide et comme de gouverneur. "C' est son mentor; il lui a été doné pour mentor. Le Ment. des Enf. par M. l' Ab. Reyré.

MENU


MENU, NûE, adj. [1ree muet, 2e lon. au 2d.] Délié, qui a peu de volume. "Homme menu, femme menûe. "Bâton trop menu, corde trop menûe. = Menu, délié, mince, (synon.) Le menu n' a quelquefois raport qu' à la grosseur dont il manque, et d' autrefois il en a à la grandeur en tous sens: le délié n' est oposé qu' à la grosseur, suposant toujours une sorte de longueur: le mince n' ataque que l' épaisseur, pouvant beaucoup avoir des autres dimensions. _ Ainsi l' on dit: une jambe et une écritûre menûe; un fils délié; une planche et une étofe mince. GIR. Synon. = Menu a divers sens, suivant le nom qu' il modifie. _ Menûe monaie, les sous, les liards, etc. _ Menûes sommes, menus frais, menûes dépenses. Le menu peuple; le bâs peuple. _ Menus plaisirs, chez le Roi, dépenses qui n' entrent pas dans la dépense ordinaire de la Maison du Roi. On le dit par extension des particuliers. _ Menus grains, l' orge, l' avoine, etc. _ Menûes dixmes, celles qui se prenent sur d' aûtres fruits que le blé, les raisins, etc. _ Menus droits, les extrémités d' un animal dont on fait certains ragoûts. Menu rôt, les câilles, bécassines, ortolans, perdreaux, etc. _ Menu plomb, celui dont on se sert pour tirer aux petits oiseaux.
   MENU, s. m. Compter par le menu, ou par les menus, (le premier est le meilleur) avec un grand détail. _ Le menu d' un repâs, le mémoire de ce qui doit y entrer. "Il y a 20 ans que je n' ai lu que la liste des mes vins et le menu de mon soupé. Marm. = Adv. En fort petits morceaux. "De la pâille, de la chair hachée menu. = Dru et menu. "Il pleuvait dru et menu. "Les balles de mousquet tombaient autour de lui dru et menu. _ Marcher, troter dru et menu, marcher vite et à petits pâs. St. famil. _ Se doner du menu, se divertir.
   Rem. Par le menu, en détail, est tout au plus du style familier. L' Acad. le met sans en distinguer l' usage. Autrefois on l' employait dans tous les styles. "La discussion seroit infinie, dit Bossuet, s' il falloit examiner par le menu la foi de tous les siècles précédens. L' expression parait bâsse en cet endroit.

MENUâILLE


MENUâILLE, s. f. [1re e muet, 3e lon. mouillez les ll.] Il se dit, et d' une quantité de petites monaies, et d' une quantité de petits poissons; et par extension, de toute sorte de petites chôses qu' on met au rebut.

MENUET


MENUET, s. m. [Menu-è: 1ree muet, 3e è moy.] Il se dit d' un air à danser, et de la danse même. "Chanter, jouer, danser un menuet.

MENUISERIE


MENUISERIE, s. f. MENUISIER, s. m. [Me-nui-zerî-e, zié: 1re e muet, 2e long. au 1er; 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Menuisier est un artisan qui travaille en bois sur des ouvrages qui servent au dedans des maisons, comme portes, fenêtres, tables, armoires, lambris, parquets, etc. = Menuiserie est l' art du Menuisier: "Il entend bien la menuiserie; ou les ouvrages que fait un Menuisier. "Lambris de menuiserie. "Menuiserie bien travaillée.

MÉOTIDES


MÉOTIDES, adj. masc. plur. Il se dit avec palus, qui signifie, en latin, marais. Leibnitz dit, les palus méotiques; et ailleurs, les palus méotides et la mer méotique; Le Gendre, marais méotides. C' est palus méotides qu' il faut. Pourquoi franciser palus, et pourquoi sous-ligner méotides? Ce mot est ancien dans la langue: il ne faut donc pas le changer, du moins en prôse, ni l' imprimer en italique. Boileau dit dans sa 1re Épitre.
   On a vue mille fois des fanges méotides,
   Sortir des Conquérans, Goths, Vandales, Gépides.
Fanges méotides est plus poétiques et plus noble que palus ou marais méotides.

MÉPRENDRE


MÉPRENDRE, (SE) v. réc. MÉPRISE, s. f. [Méprandre, méprîse: 1re é fer. 2e long. 3e. e muet.] Il se conjugue comme prendre. = Se tromper; se mécompter; prendre une chôse pour une aûtre. "Vous vous méprenez. "Je me suis mépris. Prenez garde de vous méprendre. _ Il régit le datif dans cette phrâse: "Se méprendre au jugement qu' on fait, qu' on porte. = Méprise; erreur de celui qui se méprend. "Cela a été fait par méprise. "C' est une méprise grossière.

MÉPRIS


MÉPRIS, s. m. MÉPRISABLE, MÉPRISANT, ANTE, adj. MÉPRISER, v. act. [Mé--pri, zable, zan, zante, zé: 1re é fermé, 2e br. Devant l' e muet elle est lon. il méprise, méprisera, 3e dou. au 2d, lon. au 3e et 4e, é f. au dern.] Mépris, sentiment par lequel on juge une persone ou une chôse indigne d' égard, d' estime, d' atention. Mépriser, avoir du mépris. Méprisant, qui marque du mépris. "Avoir, témoigner du mépris. "Prendre quelqu' un en mépris Acad. _ "Homme, femme méprisable. "Se rendre méprisable. "Air, ton méprisant; manières méprisantes. "Il ne faut mépriser persone, surtout les paûvres et les malheureux. "Il méprise tous les conseils qu' on lui done.
   Rem. 1°. Quand on parle du sentiment, on met toujours mépris au singulier. On dit à plusieurs, comme à un seul: je ne mérite pas votre mépris, et non pas vos mépris. Le pluriel ne semploie que pour signifier les témoignages du mépris. "Je ne suis pas fait pour souffrir vos mépris. = 2°. Tomber dans le mépris, dans un état où l' on est méprisé. Dans cette expression, mépris a le sens passif. = Au mépris de, adv. "Au mépris des conseils qu' on lui a donnés. = Par mépris, autre adverbe. Il se dit, ou sans régime: "il l' a fait par mépris; ou avec la prép. pour: "il l' a dit par mépris pour nous. = 3°. Mépris et mépriser ont un beau sens, avec les chôses pour régime. "Le mépris de la vie, de la mort, des honeurs, des richesses. Mépriser les grandeurs, les dangers, la mort. = 4°. On dit: avoir du mépris pour, et non pas de: "Le souverain mépris qu' Elisabeth avoit de leurs procédés. Hist. des Tud. Dites, pour leurs procédés. = 5°. Avoir à mépris est une expression surannée. "Si le prisonnier se portoit insolemment... à l' égard de la Cour, ou témoignoit de l' avoir à mépris. Procès de Charles I. = 6°. Méprisant ne se dit point des persones, mais seulement des chôses, qui ont raport aux persones. On ne dit point, un homme méprisant, une femme méprisante, quoiqu' on dise un geste, un ton méprisant, des manières méprisantes. = 7°. Méprisant ne peut guère précéder le substantif, même au féminin; mais méprisable le précède élégamment.
   Et, vil client de la fierté,
   À~ de méprisables idoles
   Prostituer la vérité.
       Gresset.
  Leurs méprisables voeux, leurs peines dévorantes.
      Idem.

MER


MER, s. fém. [L' e est ouvert, l' r se prononce.] L' amâs des eaux qui environent la terre, et qui remplissent les abîmes que le Créateur y a creusés. "La grande mer, la mer océane, méditerranée; etc. "Aler sur mer, voyager par mer, etc. = Il se dit au figuré, mais seulement dans le style simple, ou médiocre et de dissertation, ou critique et mordant. L' Ab. Des Fontaines, parlant de l' Hist. de l' Imprimerie, dit que: "Le texte se trouve souvent noyé dans une mer de notes, quelquefois inutiles, ou du moins trop prolixes. "Mer d' amertune, mer de chagrins, est une expression consacrée, qui peut entrer dans un sermon.
   Rem. 1°. On dit plutôt sur terre, sur mer, sans article, que sur la terre, sur la mer, avec l' article. Je n' ôserais condamner celui-ci; mais l' autre vaut mieux. Fénélon et Mde de Sévigné ont préféré le 1er. "Je demandai à~ Narbal comment les Tyriens s' étoient rendus puissans sur la mer. Télém. "Il veut aller servir sur la mer: je ne sais ce que lui a fait la terre. Sév. _ L' Acad. dit: aler sur mer, monter sur mer, Prince puissant sur mer. = 2°. Mer bâsse et bâsse mer n' ont pas tout-à fait le même sens. "La mer est bâsse en cet endroit, c. à. d. il n' y a pas beaucoup d' eau. La bâsse mer, la mer vers la fin de son reflus. La pleine ou la haute mer, la mer éloignée des rivages. = 3°. On dit: l' eau de la mer, avec l' article, et le poisson de mer sans article.
   On dit, proverbialement, c' est la mer à boire; c. à. d. la chôse impossible, ou qui emporterait un tems infini. "Ma lettre est entre les mains des Facteurs, c' est-à-dire, la mer à boire. Sév.
   Si je pouvois remplir mes cofres de ducats!
   Si j' aprenois l' hébreu, les sciences, l' histoire!
   Tout cela c' est la mer à boire.
       La Font.
= Voguer en pleine mer, avoir une fortune bien établie. = Être en pleine mer; fort avancé dans une entreprise. = Porter de l' eau à la mer; porter quelque chôse en un lieu où il y en a déja en abondance. _ Et quand on ne done que de petits secours à de grands besoins, on dit que, c' est une goutte d' eau jetée dans la mer. _ Voy. Avaler, eau, éponge, goutte.

MERCANTILE


MERCANTILE, adj. MERCANTILLE, s. f. [1re ê ouvert, 2e long. mouillez les ll du second.] Style mercantile, de marchand. Il ne se dit qu' en cette phrâse. = La mercantille, négoce de peu de valeur. = Trév. met pour l' adjectif, mercantil, ille. "La profession mercantille. Il met aussi mercantillement, d' une manière mercantille. Il ne met point le substantif. L' Acad. ne met que celui-ci. Le Rich. Port. ne met point l' adverbe et écrit mercantille, et pour le substantif, et pour les deux genres de l' adjectif.

MERCENAIRE


MERCENAIRE, adj. et subst. MERCENAIREMENT, adv. [Mercenère, nèreman: 1re ê ouv. 2e et 4e e muet; 3e è moy. et lon. _ Un grand nombre d' Auteurs ou d' Imprimeurs mettent un accent aigu sur le 2d é, mercénaire, etc. On a suivi cette ortographe dans le Dict. Gram. Tous les autres Dictionaires les mettent sans accent.] Mercenaire ne se dit au propre que du travail, qui se fait pour en recevoir un salaire. "Labeur, travail mercenaire. = On dit, au figuré, esprit, âme mercenaire; Éloge mercenaire, etc. = S. m. Ouvrier, homme de journée, qui travaille pour de l' argent. "Il ne faut pas retenir le salaire du mercenaire. = Fig. "C' est un mercenaire; un homme intéressé, qui ne fait rien que pour le gain et l' argent. = En certaines Provinces, on apèle mercenaires, les religieux de N. D. de la Merci: dans d' aûtres on les nomme merçaires. Ni l' un, ni l' autre de ces mots n' est français.
   MERCENAIREMENT, d' une façon mercenaire. "Agir mercenairement.

MERCERIE


MERCERIE, s. f. [1re ê ouv. 2e et 4e e muet, 3e lon.] Marchandises dont les marchands merciers font trafic. = Le Corps des Merciers s' apelle, le Corps de la Mercerie.

MERCI


MERCI, s. f. [Il n' a point de pluriel.] Miséricorde. _ Ce mot ne se dit que dans certains phrâses, dont plusieurs ont vieilli. "Crier merci; recevoir à merci. "C' est un homme sans merci (on dit aujourd' hui sans pitié.) Le P. Ducerceau a encore employé recevoir à merci, dans son Hist. de Perse. "Ayant reçu à merci ce qui resta après la défaite, etc. = On dit encôre, dans le st. famil. je vous crie merci, pour dire, je vous demande pardon. Les Provinciaux, qui ne sont pas au fait du bon ton de Paris, trouvent de l' afectation dans cette manière de faire excuse. Elle n' est du moins que du st. famil. L' Ab. Velly dit que le Comte de Bretagne envoya crier merci. Hist. de Fr. Il dit âilleurs qu' il envoya demander grâce; et celui-ci est plus convenable dans une Histoire. = Les expressions où entre ce mot, qui se sont soutenûes sont: être à la merci de quelqu' un; à sa discrétion. "Être à la merci du vainqueur. "à la merci des flots. Elle est de tous les styles. _ Grand merci, je vous rends grâce. _ S. m. "Un grand merci, un remercîment. _ Dieu merci, grâce à Dieu. Je me porte bien, Dieu merci. _ Celles-ci sont familières. = Merci de ma vie! exclamation populaire. "Hé! merci de ma vie! je vous l' aurois dit, avant de parler, tout ainsi que je l' ai fait, ne vous déplaise. Mariv.

MERCIER


MERCIER, IèRE, s. m. et f. [Mêr-cié, ciè-re: 1reê ouv. 2e é fer. au 1er, è moy. et long au 2d.] Marchand ou marchande, qui vend en grôs ou en détail toute sorte de marchandises. _ On apèle aussi de ce nom les porte balles, qui vont vendre dans les villages et à la campagne de menûes merceries. = Le Proverbe dit: à petit mercier, petit panier: quand on a peu de bien, il ne faut pas beaucoup dépenser.

MERCREDI


MERCREDI, s. m. Voy. MÉCREDI. Le 4e jour de la semaine. "C' est aujourd' hui mercredi. "Le mercredi des Cendres: le mercredi Saint.

MERCûRE


MERCûRE, s. m. [1re ê ouv. 2e lon. 3e e muet.] 1°. La planète le plus proche du soleil. = 2°. Le vif argent. = 3°. Dieu de la Fable, le Messager des Dieux, le Dieu de l' éloquence et aussi des voleurs. = On apèle figurément, (st. famil.) Mercûre, un entremetteur d' un mauvais comerce.

MERCURIALE


MERCURIALE, s. f. Assemblée du Parlement qui se tient le premier mercredi après la St. Martin et le premier Mercredi après la semaine de Pâques. C' est de là qu' elle a tiré son nom. Le premier Président, ou le Procureur Général, ou l' un des Avocats Généraux y parlent contre les abus et les désordres, qui se sont glissés, ou qui peuvent se glisser dans l' administration de la Justice. = On apèle aussi de ce nom le Discours qui se fait ce jour là sur ce sujet. = Figurément, et par extension, réprimande qu' on fait à quelqu' un. On lui a fait une bone, une rude mercuriale. Il ne se dit que du supérieur à l' égard de l' inférieur.

MERDE


MERDE, s. f. MERDEUX, EûSE, adj. Excrément. = Souillé gâté par la matière fécale. Ces mots sont très-bâs, et sont bannis du langage des honêtes gens.

MèRE


MèRE, s. f. [1re è moy. et long; 2e e muet.] 1°. Femme, qui a mis un enfant au monde. "Bone ou mauvaise mère. "Sa mère, votre mère; la mère d' un tel. = Il se dit aussi des animaux. "La mère de ce poulain, de ces chiens. = 2°. Matrice. "Mal, vapeur de mère. ACAD. On ne le dit, en ce sens qu' avec ces deux mots. = 3°. Fig. Caûse. "L' oisiveté est la mère de tous les vices. "La défiance est la mère de la sûreté. "La Grèce est la mère des beaux Arts: ils y ont pris naissance. = 4°. Adj.Mère-goutte, le vin, qui coule de la cûve, sans qu' on ait encôre foulé le raisin. Mère-laine, la laine la plus fine, qui se tond sur une brebis. _ Mère-perle; grôsse coquille de perle, qui en contient quelquefois un grand nombre. _ Dure-mère et pie-mère, les deux membranes, qui envelopent le cerveau. = Langue mère, qui n' est dérivée d' aucune aûtre, et dont quelques-unes sont dérivées.
   MèRE, entre dans quelques expressions proverbiales. _ Il n' était fils de bonne mère qui, etc. Il n' est persone qui, etc. _ Renvoyer quelqu' un à sa mère-grand; le relancer vivement. _ Vouloir aprendre à sa mère à faire des enfans; vouloir aprendre à quelqu' un ce qu' il sait mieux que nous. _ C' est la fille de sa mère, elle lui ressemble par le caractère et la conduite. _ C' est le ventre de ma mère, je n' y retourne plus, dit quelqu' un, qui ne veut plus retourner dans un lieu, ou se méler d' une afaire dont il n' a pas été satisfait. Cette façon de parler est vile et indécente.

MÉREAU


MÉREAU, s. m. [Méro: 1reé fer. 2e dout. au sing. lon. au pluriel, méreaux.] Petite pièce de métal ou de carton, qu' on done dans certaines Églises, pour marque de l' assistance à l' office ou aux autres fonctions.

MÉRELLE


MÉRELLE, s. f. [Mérèle: 1re é fer. 2e è moy. 3e e muet.] Espèce de jeu, fort conu et où il n' y a plus que les enfans qui joûent. = Quelques-uns disent marelle: mais mérelle est le vrai mot.

MÉRIDIEN


MÉRIDIEN, s. m. MÉRIDIENNE, ou MÉRIDIèNE, adj. et subst. fém. [Méri-dien, diène: 1re é fer. 3e é fer. au 1er; en n' y a pas le son d' an; è moy. au 2d; dont la 4ee muet.] Méridien, grand cercle de la sphère, qui pâsse par le pôle du monde et par le zénith du lieu. "Le méridien de Paris, de Marseille. = La méridiène, ou la ligne méridiène, ligne droite, tirée du nord au sud dans le plan du méridien. La ligne d' ombre ou le point de lumière qui passe dessus, marque l' heure de midi. _ On doit dire, j' ai mis, j' ai réglé ma montre sur la méridiène, et non pas, sur le méridien, comme on le dit sur les bords de la Garonne. Desgr.

MÉRIDIONAL


MÉRIDIONAL, ALE, adj. [Méri-dio--nal, nale, en vers, di-o-nal, etc. 1re é fer.] Qui est du côté du midi, par raport au lieu, dont on parle. "Pays méridional. "Région méridionale.

MERISE


MERISE, s. f. MERISIER, s. m. [Merize, meri-zié: 1re e muet, 2e lon. au 1er, 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Le 1er se dit d' un fruit rouge à noyau, plus petit que la cerise, et à peu près de même natûre; le 2d de l' arbre, qui le porte.

MÉRITANT


*MÉRITANT, ANTE, adj. Qui a beaucoup de mérite. _ C' est un mot de Province. "C' est un homme très-méritant; une femme fort méritante. = Ce mot n' est point dans les Dictionaires. Il serait utile; méritoire, ne se disant que des chôses = Un Auteur anonyme a mis l' un pour l' aûtre. Il dit, parlant des anciens Gaulois; "L' homicide étoit sanctifié par la religion, et devenait l' action la plus méritante (méritoire) par raport à leurs Dieux.

MÉRITE


MÉRITE, s. m. MÉRITER, v. act. MÉRITOIRE, adj. MÉRITOIREMENT, adv. [1re é fer. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d; lon. au 3e et au 4e, dont la 4e e muet; te, té, toâ--re, toâ-reman.] Mérite, est 1°. Ce qui rend digne d' estime, en parlant des persones. "Homme de mérite, qui a son mérite, qui n' est pas sans mérite; qui a peu ou beaucoup de mérite, etc. = Il se dit quelquefois absolument. "Reconaitre, considérer le mérite. "Il faut doner cela au mérite, non à la faveur. = 2°. En parlant des chôses, ce qu' elles ont de bon et d' estimable. "Le mérite d' une action, d' un ouvrage, etc. = 3°. Ce qui rend digne de récompense ou de punition, de la part de Dieu. "Dieu nous jugera selon le mérite de nos OEuvres, suivant nos mérites. = On dit, par extension, en st. famil. "Cet homme sera traité selon ses mérites: ce qui se prend en mauvaise part. Bouh. Il n' est employé au pluriel que dans le sens marqué dans ce 3e n°. Hors de là on dit à plusieurs, comme à un seul, votre mérite, et non pas vos mérites. _ Les anciens Auteurs, et sur--tout les Poètes, aimaient les pluriels plus qu' on ne les aime aujourd' hui.
   Et ses justes faveurs aux mérites données.
       Malherbe.
Ménage a remarqué que Malherbe dit plus souvent mérites que mérite. Il en cite plusieurs exemples, mais il avertit qu' on ne dit plus vos mérites, mais votre mérite. = On dit, un homme de mérite, une femme de mérite; mais ce n' est pas une conséquence pour d' aûtres mots, comme Seigneur de mérite, Prince, Princesse de mérite, etc. "C' étoit un Prince de mérite, dit le P. Barre, Hist. d' Allem. _ On dit alors, Prince, Princesse d' un grand mérite. = Se faire un mérite, régit la prép. de devant les noms et les verbes. "Il se fait un mérite d' une complaisance forcée, de la nécessité où il troûve. "Il se trouva de ces pestes de cour dont les mauvais princes sont ordinairement obsédés, qui se firent un mérite de soufler le feu. Charlev. Hist. du Japon.
   Worth, en anglais signifie prix, valeur. "He is worth ten thousand pounds: il a 100,000 liv. sterl. vaillants Dict. de Boyer. * Un Traducteur de Pope dit du fameux Hopkins, que son mérite bien calculé montoit à sa mort à près de sept millions. Traduction ridicule, comme on voit.
   MÉRITER, c' est être, ou se rendre digne de... "Mériter louange, récompense, punition, châtiment, grâce, pardon; ou avec l' article. "Il mérite les louanges, les récompenses qu' on lui acorde _ Et avec de et l' infinitif. "Il mérite d' être aimé, récompensé, ou puni, châtié, etc. ou que et le subjonctif: il mérite que vous le récompensiez. "Il est sans doute moins difficile de mourir pour un ami, que de rencontrer un ami, qui mérite qu' on meure pour lui. MARIN. = Il se dit quelquefois des chôses. "Cette action mérite récompense. "Ce crime mérite la corde. _ "Cela mérite réflexion, mérite qu' on y pense. * Mais il ne régit pas alors le datif de la persone. En Provence, au lieu de dire vous méritez cela, c. à. d. cette peine, on dit: cela vous mérite. Cela lui mérite, dit-on de quelqu' un, qui est tombé; pourquoi alait-il si vite?
   En parlant d' une nouvelle, on dit, qu' elle mérite confirmation, pour dire, qu' elle a besoin d' être confirmée.
   Bien mériter de, c' est avoir rendu de grands services à... "Il a bien mérité de l' État, de la Patrie, de la Religion. _ En cet emploi, il est neutre. _ Nous devons cette expression aux Romains, bene mereri. Elle s' écrit plus souvent qu' on ne l' emploie dans la conversation. Les Romains en faisaient un grand usage. _ La Touche dit que quelques persones n' aprouvaient pas cette façon de parler, mais qu' elle est très-bone, et qu' on peut s' en servir sans scrupule.
   MÉRITOIRE, qui mérite les récompenses éternelles. _ Il n' a donc d' usage qu' en parlant des bones oeûvres. "Cela est méritoire envers Dieu, devant Dieu. Acad. "Le jeûne, l' aumône sont des oeuvres méritoires. _ Depuis quelque tems on a étendu l' usage de ce mot. "Cela est ou n' est pas fort méritoire, très-méritoire: il y a du mérite à l' avoir fait. Cela sent le jargon de société et le néologisme.
   MÉRITOIREMENT, d' une manière méritoire. "Pour faire l' aumône méritoirement, il faut la faire pour Dieu, pour l' amour de Dieu. _ Il ne se dit que des mérites surnaturels.

MERLAN


MERLAN, s. m. [1re ê ouv. et bref.] Poisson de mer, dont la chair est extrêmement légère, et qui serait plus estimé, s' il était moins comun. On apèle populairement Merlans, les garçons perruquiers.

MERLE


MERLE, s. m. [1re ê ouv. 2e e muet.] Oiseau de moyène grosseur, qui a le plumage noir et le bec jaûne. "Sifler un merle; aprendre à parler à un merle. "Dénicher des merles. = On dit proverbialement, fin, rusé comme un merle; ou bien, c' est un fin merle. "Va, je te garantis que c' est un fin merle. Avec son air tout uni, il en sait long. Th. d' Educ. _ Et pour marquer qu' on ne croit pas qu' une chôse se puisse faire, on dit, si vous faites cela, je vous donerai un merle blanc. _ Cela n' aurait point de sens dans certains pays du Nord, où en hiver il s' en trouve de cette couleur.

MERLUCHE


MERLUCHE, s. f. [1re ê ouv. dern. e muet.] Sorte de morûe sèche.

MERRAIN


MERRAIN, s. m. [Mè-rein; 1reè moyen. r forte.] Peu de mots ont été écrits de plus de manières diférentes: Marrin, mairin, mairain; mairein, meirin, merrein, mairrain, merrain. Les deux derniers sont les meilleurs de tous. L' Acad. avait mis marrin, malgré la décision de Ménage, qui disait que mairrin seul était du bel usage. Dans la dern. édition, elle ne met que merrain. = Bois de chêne fendu en menûes planches, dont on fait des paneaux, des douves, des toneaux et autres ouvrages.

MERVEILLE


MERVEILLE, s. f. MERVEILLEUX, EûSE, adj. MERVEILLEûSEMENT, adv. [Mêrvè-glie, glieû, glieû-ze, zeman; 1reê ouv. 2e è moy. Mouillez les ll; 3e e muet au 1er, lon. aux trois autres.] Merveille, chôse qui cause de l' admiration. "Grande, râre merveille. "C' est une merveille, une grande merveille. = En style famil. et sans article; ce n' est pas merveille, ou grand' merveille. = Une jeune merveille, une jeune persone extrêmement belle.
   Rem. 1°. Il y a eu autrefois des Auteurs, qui ont fait merveille masc. et qui ont dit, un merveille, un grand merveille, ce merveille. = 2°. Merveille, miracle (synon.) On peut apeler merveille un phénomène de la natûre, dont nous ne conoissons pas la caûse: mais il est des prodiges que l' on ne peut atribuer à une caûse naturelle: ils se noment miracles. L' Abé Bergier. = 3°. C' est une merveille, régit de devant les verbes. "C' est une merveille de vous voir, ou que de vous voir: reproche amical qu' on fait à quelqu' un qu' on n' a pas vu depuis long-tems. On dit aussi, c' est merveille de. = 4°. On ne doit pas confondre faire merveille, où ce mot est employé indéfiniment et sans article, et faire des merveilles, où il s' emploie avec l' article défini. L' un signifie faire très-bien; et faire y est neutre, et il ne se dit que des chôses; l' aûtre signifie, faire des chôses merveilleûses; le v. faire y est actif, et il ne se dit que des persones. "Cette apostrophe fait merveille dans ce discours. "Cet Orateur a fait aujourd' hui des merveilles. = Dans le discours familier, on dit quelquefois, faire merveilles, dans ce dernier sens, en parlant des persones, et en suprimant l' article et mettant merveilles au plur. L' Acad. met sans remarque: "Ce Prédicateur a fait des merveilles, a fait merveilles aujourd' hui. _ Mais faire des merveilles ne se dit jamais des chôses. = Ce n' est pas merveille est suivi de que ou de si, et du subjonctif avec le 1er, comme de l' indicatif avec le 2d. "Ce n' est pas merveille que Cicéron... ait acquis une capacité bien plus grande que Démosthène. P. Rapin. "Lorsqu' on ne voit pas un ouvrage entier, lorsqu' on n' envisage que des lambeaux et des fragmens, ce n' est pas merveille si l' ordre n' y paroit pas. Leib. _ Quelques-uns pensent que cette expression a vieilli. Je la crois encôre en usage, et elle est bone à conserver. = 6°. Promettre monts et merveilles, faire de très-grandes promesses, est du style prov. = Les Anciens comptaient sept merveilles dans le monde: ou dit, dans ce style, pâsser les sept merveilles, ou être une des sept merveilles, ou être la huitième merveille; ce qui se dit quelquefois sérieusement d' une chôse excellente en son genre, et le plus souvent par dérison.
   À~ merveille ou à merveilles, adv. Parfaitement. "Il prêche, il peint à merveilles. "Il chante, il joûe, il danse à merveilles. Acad. Elle met les deux, comme Rich. et Trév. et ne done d' exemple que du 2d. Le Rich. Port. ne met que le 1er, et c' est celui que je préférerais; car pourquoi ce pluriel? Il ne peut être utile qu' aux Poètes, quand ils ont besoin d' une syllabe de plus. "Le jeune homme profitoit à merveille des leçons du Peintre. Marm. "Votre fils se porte à merveilles, et j' en ai une joie qui n' est pas tout-à-fait sur votre compte. Mde. de Coulanges à Mde. de Grignan. = Pluche dit par merveille. Celui-ci est un mot de Province. "L' oeuillet réussit par merveilles en Flandres, où la terre est limoneûse, grasse et humide.
   Pas tant que de merveille, pas beaucoup. "A-t' il beaucoup d' esprit? Pas tant que de merveille. = * On disait autrefois, en sens contraire, que merveilles; c. à. d. au-delà de tout ce qu' on peut dire. "Cet Ordre que tu vois si sublime, viendra si bâs, et sera si méprisé des hommes que merveilles. Chron.
   MERVEILLEUX, surprenant, étonant, qui est digne d' admiration. "Homme, esprit merveilleux; ouvrage merveilleux; pièce merveilleûse. "Éfet, succês merveilleux. = Excellent en son espèce. "Vin merveilleux. "Les muscats ont été merveilleux cette année. Acad. _ Il y a de l' afèterie à employer à tout propos ce mot, comme on le fait aujourd' hui. C' est un ton de faux enthousiasme pour des riens, qui caractérise ce siècle: tout y est merveilleux ou afreux. = S. m. Ce qu' il y a de merveilleux dans un Poème; comme l' intervention des Dieux, des Anges, des Démons. "Le merveilleux doit être joint au vraisemblable. "Siècle ami du faux merveilleux. "Le merveilleux est l' âme du poème épique. = Aujourd' hui on le dit substantivement des persones, dans le sens de petit-maître et petite-maîtresse.
   Nos merveilleux, nos petits-maîtres,
   Exhalent l' ambre le plus doux.
       Merc.
On le dit aussi adjectivement. "Les voilà donc, ces femmes merveilleuses, qui font tourner la tête à tout Paris! Et je retournerois dans cette ville, où les ridicules ont pris la place des moeurs! Marin, l' Amante Ingén. = On dit, familièrement et ironiquement: vous êtes un merveilleux homme, étrange, extraordinaire dans vos sentimens, dans vos manières.
   MERVEILLEUSEMENT, extrêmement; d' une manière merveilleûse. "Cela est merveilleûsement bon. "Elle est merveilleûsement belle. "Il s' aquite de son devoir merveilleûsement bien.

MÉS


MÉS: Particule, qui entre dans la composition de quelques mots. Elle signifie, mal, mauvais. Mésaise, mésalliance, mésarriver mésaventure, mésintelligence, messéant, etc. = Mes: on écrivait autrefois, mescompte, mesconnoitre, mescontenter, mesdire, mesgarde, meslange, mesler, mesme, mesnager, mesprendre, mespriser, mestayer;mestier, et leur dérivés avec une s, et on a continué long-tems de l' écrire de la sorte, quoique cette s ne s' y prononçât plus. Voyez Mécompte, Médire, Mégarde, etc. sans s.

MES


MES, pronom pluriel de mon, ma. Il est long; è ouv. mè, et devant une voyèle mèz. Il sert pour les deux genres. "Mes devoirs, mes obligations, mes malheurs, mes disgraces, etc.

MÉSAISE


MÉSAISE, s. m. [Mé-zèze; 1re é fer. 2e è moy. et long, 3e e muet.] Il signifie la même chôse que mal-aise. Voyez ce mot. = Suivant le Dict. de Trév. (en 1704) ces deux mots vieillissaient déjà; cependant ils se sont soutenus, et on les emploie encôre. Mésaise est plus propre pour ce qui regarde l' état de la santé; et mal-aise, pour ce qui concerne l' état de la fortune.

MÉSALLIANCE


MÉSALLIANCE, ou MÉSALIANCE, s. f. SE MÉSALIER, v. réc. [Mézali-ance, li-é, 1re é fer. 4e lon. au 1er, é fer. au 2d.] Ils expriment une aliance, un mariage avec une persone d' une condition inférieure. "Les mésaliances sont râres en Allemagne et fort comunes en France. "Là on craint de se mésalier, pour ne pas fermer à ses enfans l' entrée des Chapitres nobles, ou les priver même des biens de sa maison.: ici on se mésalie sans peine, parce que les mésaliances n' ont pas des suites si fâcheûses, et que le luxe les rend nécessaires. = L' Acad. met mésallier actif, et done cet exemple. "Ce tuteur refuse un parti fort riche pour ne pas mésallier sa pupille: mais elle ajoute que son plus grand usage est avec le pronom personel, se mésallier.

MÉSANGE


MÉSANGE, s. f. [Mézange: 1re é fer. 2e lon. 3e e muet.] Petit oiseau de plumage gris, rayé de noir, de blanc et de jaûne.

MÉSARRIVER


MÉSARRIVER, MÉSAVENIR, v. n. impersonel [Mézârivé; mézaveni: 1re é fer. 2e lon. au 1er, r forte; 3e e muet au 2d.] Ils se disent d' un accident fâcheux qui arrive à la suite de quelque chôse. Ils ne s' emploient qu' à l' infinitif et avec le pronom de la 3e persone. "Il a prévu tout ce qu' il peut en mésarriver, en mésavenir. "Que voulez-vous qu' il en mésarrive, qu' il en mésaviène. "S' il vous mésarrive, ne vous en prenez qu' à vous. = Le 1er est plus usité que le 2d. = Suivant La Touche ces mots se trouvent dans de bons Auteurs: mais ce ne sont pas les plus modernes. Il remarque que l' Acad. disait dabord que le 2d ne se dit que dans le style familier, et que le 1er est plus d' usage; et qu' au contraire dans les éditions suivantes, elle ne distingue point l' usage de mésarriver. _ Dans la dernière, elle les met tous deux sans remarque.

MÉSAVENTURE


MÉSAVENTURE, s. f. [Mésavantûre: 1re é fer. 3e et 4e lon. 5e e muet.] Accident malheureux. _ Ce mot est vieux. Il se dit pourtant encôre dans le style familier, mais surtout dans le style plaisant ou critique. "C' est une triste, une cruelle mésaventûre.

MÉSÉDIFIER


MÉSÉDIFIER, v. act. Mot employé par un Avocat provençal. On dit, mal-édifier.

MÉSESTIMER


MÉSESTIMER, v. act. [Mézèstimé: 1re et dern. é fer. 2e è moy.] Avoir mauvaise opinion de quelqu' un, n' avoir point d' estime pour lui. _ Il est moins rude et moins odieux que mépriser. "Les adèptes ne suportent pas patiemment qu' on paraisse les mésestimer. ANON. = Mésestimer, en parlant des chôses, se prend toujours en mauvaise part; et signifie, aprécier les choses au dessous de leur juste valeur. Mal estimer, se dit soit en bien, soit en mal, et c' est estimer ou au dessus, ou au dessous de la juste valeur. Acad.

MÉSINTELLIGENCE


MÉSINTELLIGENCE, s. f. [Mé-zein--télijance: 1re é fer. 2e et 5e lon. 3e é fer. dern. e muet.] Mauvaise intelligence, défaut d' union, de concert. Il régit la prép. entre. "La mésintelligence entre les diférens Généraux a souvent causé la perte des batâilles. "Entretenir, fomenter, causer la mésintelligence, etc.

MÉSHUI


*MÉSHUI, adv. Vaugelas le trouvait très-doux et très-agréable à l' oreille. "Il est méshui tems, il est tantôt tems. _ Ce mot est depuis long-tems banni de notre langue, dit Th. Corneille.

MÉSOFFRIR


MÉSOFFRIR, ou MÉSOFRIR, v. act. [Mézofri: 1re é fer.] Ofrir un prix, qui est au dessous de la valeur. "Vous mésofrez trop de cette étofe: je ne puis la doner à ce prix. _ La Touche dit qu' il est peu usité. Il avoûe pourtant que l' Acad. ne le dit pas de même.

MESQUIN


MESQUIN, INE, adj. MESQUINEMENT, adv. MESQUINERIE, s. f. [Mès-kein, kine, neman, nerî-e: 1re è moy. 3ee muet.] En parlant des persones, ils expriment une dépense faite avec une épargne sordide. "Cet homme est fort mesquin. "Cette femme est bien mesquine. "Il nous a doné à diner fort mesquinement. On n' avait jamais vu une telle mesquinerie. "Il fait tout avec mesquinerie. = Air mesquin, mine mesquine, air paûvre, mine bâsse. = En parlant des chôses, mesquin a ordinairement le même sens qu' en parlant des persones. "Ordinaire bien mesquin; dépense mesquine. "Habits, meubles mesquins; mener une vie mesquine. = En Peintûre, maigre, pauvre, de mauvais goût. "Ce contour est mesquin; cette figûre est mesquine. _ Fig. En parlant des ouvrages d' esprit. "Tours mesquins, pensées mesquines, etc. Et généralement dans tous les Arts où le goût entre pour quelque chôse.

MESSAGE


MESSAGE, s. m. MESSAGER, ÈRE, s. m. et f. MESSAGERIE, s. f. [Mè-sage, gé, gère, gerî-e: 1reè moy. 3e e muet au 1er et au dern. é fer. au 2d, è moy. et long au 3e.] Message, est 1°. ordinairement la charge ou comission de porter quelque chôse. "Faire un message: s' aquiter, se charger d' un message. = 2°. La chôse même qu' on a comission de porter. "Il avait dans sa chaise tous les messages. = Messager, qui fait un message. "Je lui ai envoyé Messager sur messager. "La messagère est arrivée. = Les Poètes apèlent Mercure, le messager des Dieux; Iris, la messagère de Junon; l' Aurôre, la messagère du jour, du soleil; les hirondelles, les messagères du printems. = Ils le disent même des chôses; les prodiges, les monstres sont les messagers de la colère du ciel.
   Ces globes messagers de la mort, qui les suit.
       Thom.
Le Proverbe dit, qu' il n' y a pas de meilleur messager que soi-même.
   MESSAGER, est aussi celui, qui est établi pour porter ordinairement les paquets d' une ville à l' aûtre. "Le messager de Poitiers, du Mans; de Bordeaux, etc. _ On dit au fém. la messagère.
   MESSAGERIE, la charge, la qualité, le privilège d' un messager, établi par autorité. "Les Messageries Royales. "La messagerie de telle ville. = Le bureau d' adresse du messager. "Aler à la messagerie.

MESSE


MESSE, s. f. [Mèce: 1reè moy. 2e e muet.] Le sacrifice de nos Autels. "Grand' messe, ou messe haute; petite messe, ou messe bâsse. "Dire, célébrer la messe. "Entendre, ouïr la messe. "Après la messe; au sortir de la messe, etc.
   Rem. Le peuple dit, la sainte messe, et il a plus que raison pour le fond; il n' y a rien de plus saint; mais l' usage est de dire simplement la messe: dire la messe; entendre la messe. "Je me rendrai si savant, en le voyant étudier que je vous promets de savoir quelque jour vous dire la sainte messe. Mariv. c' est un paysan qui parle.
   On demandait à Ménage s' il falait dire, ouïr la messe, ou bien, ouïr messe. Il répond dans ses Observations, que le 1er lui semblait le mieux dit, mais qu' il ne voudrait pourtant pas blâmer ceux qui disent le 2d. On ne le dit plus aujourd' hui.

MESSÉANCE


MESSÉANCE, s. f. MESSÉANT, ANTE, adj. MESSEOIR, v. n. [Mè-sé-ance;sé-an, ante, soar: 1re è moy. 2eé fer. 3e lon. aux 3 1ers.] Ils se disent de ce qui est contre la bienséance, qui n' est pas séant et convenable. "Il y a de la messéance à faire telle chôse. "Cela est messéant. "La chôse est messéante. "Cela lui messied. Voy. SEOIR pour la conjugaison. Comme ce verbe, dont il est le composé, il ne se dit point à l' infinitif, et n' a d' usage que dans les troisiemes persones des tems simples.

MESSIE


MESSIE, s. m. [Méci-e: 1reé fer. 2e lon. 3e e muet.] Le Christ promis dans l' Ancien Testament. "La venûe du Messie. = On dit, proverbialement, atendre quelqu' un comme le Messie, comme les Juifs atendent le Messie, avec la plus vive impatience.

MESSIER


MESSIER, s. m. [Mè-cié: 1reè moy. 2e é fer.] Paysan comis pour garder les fruits de la terre, quand ils comencent à mûrir.

MESSIRE


MESSIRE, s. m. [Mè-cîre: 1reè moy. 2e lon. 3e e muet.] Titre, ou qualité, que prènent les nobles et les Prêtres dans les Actes. = Il se dit quelquefois en plaisantant, et signifie la même chôse que, Monsieur ou Maître.
   Messire Ambroise ne croit rien,
   Et sa femme croit toute chôse.

MESTRE-DE-CAMP


MESTRE-DE-CAMP, s. m. et f. [Mèstre--de-kan: 1re è moy. 2e et 3e e muet.] On dit le Mestre-de-Camp, d' un Colonel de Cavalerie, et La Mestre-de-Camp, de la première Compagnie d' un pareil régiment. = Autrefois on donait ce nom à tous les Colonels soit d' infanterie, soit de Cavalerie; il n' est resté qu' à ceux-ci et à ceux de Dragons.

MESVENDRE


MESVENDRE, ou MÉVENDRE, v. act. MESVENTE, ou MÉVENTE, s. f. [Le 1er est de l' Acad. le 2d est plus conforme à l' analogie: on n' a conservé l' s dans les composés de més que devant les voyèles, més-estimer, més-ofrir, més-arriver, etc. Devant une consone on dit mé; mécompte, mégarde, mépriser, etc.] Vendre au dessous de sa valeur. "Ce marchand a mévendu sa marchandise. = Mévente; vente à vil prix.

MESURABLE


MESURABLE, adj. MESURAGE, s. m. [Mezurable, rage: 1re e muet; 3e dout. au 1er; 4e e muet dans les deux.] Mesurable, qui se peut mesurer. "L' infini n' est pas mesurable. _ Il se dit ordinairement avec la négative, et il est peu usité. = Mesurage, 1°. Action par laquelle on mesûre. _ 2°. Droit seigneurial, pris sur chaque mesûre. = 3°. Le procès-verbal de l' Arpenteur.

MESûRE


MESûRE, s. f. MESURER, v. act. MESUREUR, s. m. [Mezûre, zuré, zu-reur: 1re e muet; 2e lon. au 1er, br. aux 2 autres; 3e e muet au 1er, é fer. au 2d. _ Dans le verbe, l' u devient long devant l' e muet: il mesûre, mesûrera, etc.] Mesûre, est 1°. en général, ce qui sert de règle pour déterminer une quantité. Il se dit des chôse liquides et des solides. "Mesûre du vin, du blé, des noix, des amandes, etc. = 2°. Pour certains articles, il se dit de la chôse même contenue dans la mesûre. "Une mesûre de sel, d' avoine. = 3°. En termes de Musique, le mouvement, qui règle les tems et les intervalles, qu' il faut garder dans le chant. "Observer la mesûre. "Danser, chanter, jouer de mesûre (plusieurs disent, en mesûre) hâter, presser, ralentir la mesûre. = 4°. Dimension. "Prendre les mesûres d' une colonne. = On dit, dans le même sens prendre la mesûre d' un homme, pour lui faire un habit; du pied pour lui faire des souliers. _ Plusieurs disent prendre mesûre à. "On lui a pris mesûre. Celui-ci n' est guère bon, mais prendre sa mesûre est encôre plus mauvais. = 5°. En poésie, l' arrangement d' un certain nombre de syllabes, qui compôsent un vers. "La gêne de la rime et de la mesûre ont fait comettre beaucoup de solécismes aux Poètes. = 6°. Figurément, moyens qu' on prend pour parvenir au but qu' on se propôse. "Il avait pris ses mesûres pour cela; il avait mal pris ses mesûres; il prit de fausses mesûres. = * En anglais, measures a, dans cet emploi, une signification plus étendûe que mesures en français, sur-tout dans les matières politiques. Le Traducteur de l' Hist. d' Hume traduit toujours ce mot litéralement, et l' emploie à signifier non seulement les moyens pour parvenir aux fins qu' on se propôse, ce qui est son vrai sens, mais encôre les Traités, les négociations, les opérations militaires, etc. C' est à quoi doivent faire atention ceux qui traduisent des livres anglais.
   Rem. 1°. On dit, prendre mal ses mesûres, mais on ne dit pas, avoir ses mesûres mal prises. "Tarquin le superbe avait beaucoup d' injustice, de violence, des desseins mal formés, des mesûres mal prises. Cela n' est pas trop français. On peut même dire que le verbe avoir ne convient avec aucun des noms, qui sont dans cette phrâse. _ On pouvait dire: Tarquin le superbe était injuste, violent, formait mal ses desseins et prenait mal ses mesûres. Wailly. = 2°. Rompre les mesûres se dit, ou tout seul: il a rompu toutes mes mesûres; il a rendu inutiles tous mes projets; ou, joint à la prép. avec. "Les Vaudois n' avoient pas rompu toutes les mesûres avec l' Eglise Romaine. Boss. c. à . d. gardaient encôre des mesûres, des ménagemens avec. "J' ai des mesûres à garder. "Il ne garda point de mesure avec lui. = 3°. Être jeté hors de ses mesûres est une expression de La Bruyère, dont je crois qu' on peut se servir. "L' on est né quelquefois avec des moeurs faciles, de la complaisance et tout le desir de plaire: mais par les traitemens que l' on reçoit de ceux avec qui l' on vit, ou de qui l' on dépend, on est jeté hors de ses mesûres et même de son naturel. _ L' Acad. dit: mettre quelqu' un hors de mesûre (sans article) le déconcerter, déranger ses projets. = 4°. On dit ordinairement, lever le plan ou la carte d' une ville, d' une place, d' un pays. M. Formey dit, lever la mesûre, expression, qui ne parait pas française. "Il fut envoyé dans le Milanois, pour lever la mesûre de ce Duché.
   On dit, figurément, d' un pécheur endurci: il a comblé la mesûre. = Faire tout avec poids et mesûre; être sage et circonspect. _ Être sans règle et sans mesûre, déréglé et excessif en tout ce qu' on fait. _ Outre mesûre, ou sans mesûre, adv. avec excês.
   À~ mesûre que, conjonction. Elle régit l' indicatif. "À~ mesure qu' ils paraissaient, ils étaient acablés d' une grêle de flèches. * Le Traduct. de l' Hist. d' Angl. la redouble mal à propôs. "À~ mesûre que les Barons abusoient de leur pouvoir, à mesûre ils perdoient l' afection du Public. _ Le 2d à mesûre est inutile et contraire à l' usage.
   À~ mesûre de, adv. ou prép. À~ proportion de... Quelques Auteurs ont employé cet adverbe, dont l' usage me parait au moins douteux. "L' Allemagne est la seule puissance, qui se fortifie à mesûre de ses pertes. Montesq. "Ils (les Romains) augmentoient tous les jours leurs prétentions, à mesûre de leurs défaites. Id. "Les lois ont été obligées de changer, à mesûre du changement des moeurs et des usages. Henaut. "La Noblesse montra plus de fermeté, à mesûre de la défection des deux aûtres ordres. Anon. _ L' Acad. ne met qu' à mesûre, adv. sans régime. "Travaillez et l' on vous payera à mesûre. "Pour les articles, que j' ai puisés dans diférens écrits, j' ai indiqué les sources à mesûre. Beauzée. = Au fur et à mesûre. Voy. FUR.
   * En même mesûre; adverbe employé par Rousseau le Philosophe. "Vineus, devenant de jour en jour plus puissant, devenoit plus odieux en même mesûre. Traduct. de Tacite. Je ne me souviens pas d' avoir vu cette expression nulle autre part; mais je suis bien éloigné de la condamner. = En mesûre de, pour, en état de, est une aûtre locution particulière et nouvelle. "Nous ne sommes pas en mesûre de pouvoir comparer notre logique à la leur (des Anglais) Th. d' Éduc. _ Il est à remarquer que c' est un Fat qui parle.
   MESURER, c' est 1°. Chercher à conaître une quantité, par une mesûre. "Mesurer un champ. Mesurer à la pinte, au boisseau, à la toise, etc. = 2°. Figurément, proportioner. Il a pour 2d régime la prép. à. "Mesurer sa dépense à son revenu, ses entreprises à ses forces. = 3°. On dit, en st. famil. mesurer quelqu' un, ou le mesurer des yeux, le regarder avec atention. "L' autre Dame se contentoit par intervale de lever sourdement les yeux sur moi: je la voyois qui me mesuroit depuis les pieds jusqu' à la tête. Mariv. "Il me mesuroit des yeux, ou avec les yeux. Acad. "Mesurer des yeux une tour, la profondeur d' un précipice. Ibid. = 4°. Mesurer ses discours, ses actions, ses démarches, agir, parler avec circonspection. = 5°. Se mesurer régit avec des persones et à des chôses. Dans le 1er emploi c' est un réciproque actif, dans le 2d un réciproque passif. "Ce n' est pas à vous à vous mesurer avec lui, à vous comparer à lui, ou à luter contre lui. "Ma colère se mesûre (se proportione) à sa perfidie. = Mesurer son épée avec quelqu' un, ou avec celle de quelqu' un, se batre contre lui. = Mesuré, ée, adj. "Termes peu mesurés. (n°. 4°.) Paroles, expressions, démarches mesurées. _ Il se dit quelquefois des persones: "C' est un homme fort mesuré (circonspect) dans ses discours, etc.
   MESUREUR, Officier, qui est établi pour mesurer certaines marchandises. "Mesureur de grains, de sel, de charbon. Pour les draps on dit Auneur.

MÉSUS


*MÉSUS ou MÉSUSAGE, s. m. Mots forgés peu heureûsement. Action de mésuser.

MÉSUSER


MÉSUSER, v. n. [Mézuzé: 1re et dern. é fer. l' u est long devant l' e muet; il mésûse, mésûzera, etc.] Abuser. Faire un mauvais usage. "Il mésûsera de votre complaisance. = Suivant Andry de Bois-regard, il se dit quelquefois avec plus de grâce qu' abuser. "Adam mésusant de sa liberté, tomba dans l' abîme de la prévarication. _ La Touche dit qu' abuser est beaucoup plus d' usage et il a raison: mais comme mésuser est moins dur et moins odieux qu' abuser, il peut servir dans des ocasions, où celui-ci serait estimé trop fort et peut-être moins propre. "Un Souverain obéré est plus exposé qu' un particulier à mésuser de son crédit. Anon. "Il n' y a que lui, à qui elle paraisse capable de mésuser de ses droits. Linguet.
   Suivant M. l' Ab. Roubaud, on mésuse de la chôse qu' on emploie mal; on abuse de la chôse qu' on emploie à faire du mal. "Je mésuse de ma liberté, si je fais une sotise, qui me nuit: si je m' en sers pour nuire à autrui, j' en abuse alors, etc. "Une mauvaise tête mésuse de vos bienfaits: un mauvais coeur en abuse, etc. Extr. des Synon. de M. l' Ab. Roubaud.

MÉTAIRIE


MÉTAIRIE, s. f. [Métérî-e: 1re et 2e é fer. 3e lon. 4e e muet.] Ferme, où le fermier, apelé, en certaines Provinces, métayer, partage les fruits avec le propriétaire. On le dit aussi des bâtimens nécessaires pour la faire valoir.

MÉTAL


MÉTAL, s. m. MÉTALLIQUE, adj. [1re é fer. on pron. les 2 l dans le 2d: métal-like. _ Quelques Auteurs et Imprimeurs écrivent métail. Ménage pensait qu' on dit l' un et l' aûtre, mais que métal est beaucoup meilleur. Richelet dit, au contraire, que métail est plus usité. L' Acad.Trév. le Rich. Port. ne mettent que métal.] L' Acad. a varié sur ce mot. Dabord elle n' avait mis que métal dans son Dictionaire. Dans la seconde Édition, elle ajouta qu' on prononce plus ordinairement métail; d' où La Touche concluait, avec raison, qu' il faut donc nécessairement l' écrire ainsi. Cependant, ajoute-t' il, à cause de ses dérivés, il semble qu' il vaut mieux écrire métal; car on dit métallique, métallurgique, métallurgiste, et non pas métaillique, etc. _ Dans la dern. Édit. l' Acad. a mis métal sans remarque. = Corps minéral, qui se forme dans les entrâilles de la terre, et qui est fusible et malléable. * L' or est le premier et le plus précieux des métaux.
   MÉTALLIQUE, 1°. Qui concerne les métaux. Corps, substance, partie métallique. = S. f. "La métallique, ou métallurgie, partie de la chimie, qui s' ocupe de la manière de tirer les métaux de leurs mines. _ On apèle métallurgiste, celui qui s' ocupe de la métallurgie, ou qui a écrit sur cet art. = 2°. Qui concerne les médailles. "Science; histoire métallique.

MÉTALENT


*MÉTALENT, s. m. Défaut de talent. Ce mot est de nouvelle et mauvaise fabrique. On a dit autrefois mal-talent, mais dans un aûtre sens.

MÉTAMORPHôSE


MÉTAMORPHôSE, s. f. MÉTAMORPHOSER, v. act. [Métamorfôse, fozé: 1reé fer. 4e lon. au 1er, 5ee muet au 1er, é fer. au 2d.] Ils expriment le changement d' une forme en une aûtre. Au propre, ils ne se disent que des changemens de cette natûre, racontés par la Fable. "La métamorphôse de Daphné en laurier. "Les Métamorphôses d' Ovide. "Diane métamorphosa Actéon en cerf. "Narcisse fut métamorphosé en la fleur, qui porte son nom. = Au figuré, ils expriment un changement extraordinaire dans la fortune ou dans les moeurs. "Il était pauvre, et il est devenu riche: il était emporté, et il est devenu doux et civil: quelle métamorphôse! L' heureûse métamorphôse! "Il se métamorphôse en toute sorte de figures; il joûe toute sorte de rôles.

MÉTAPHôRE


MÉTAPHôRE, s. f. MÉTAPHORIQUE, adj. MÉTAPHORIQUEMENT, adv. [1reé fer. 3e lon. au 1er, 5ee muet aux deux derniers; métafôre, forike, rikeman.] La métaphôre est une figûre du Discours, par laquelle on transporte un mot de son sens propre et naturel dans un aûtre sens. "Les flots couroucés, les vents déchainés, les feux de l' amour, etc. sont des exemples de métaphôre. = Métaphorique, qui tient de la métaphôre. "Expression, discours métaphorique. Le sens figuré et le sens métaphorique sont la même chôse. = Métaphoriquement, d' une manière métaphorique. "Métaphoriquement parlant. "Cela est dit métaphoriquement.
   Rem. Rien n' embellit tant le discours que le bon usage des métaphôres; mais il faut pour cela quelles soient justes et naturelles, qu' elles soient sensibles au comun des lecteurs; et que, dans le discours relevé, elles soient nobles et décentes. Leurs défauts sont de manquer de justesse, d' être tirées d' Arts et de Sciences peu conus; d' être forcées et recherchées, d' être trop multipliées et entassées; d' être basses et rampantes dans le style élevé.
   1°. Métaphôres, qui manquent de justesse, par le défaut de raport entre les images, qu' elles présentent. L' Acad. critiqua aûtrefois ce vers du Cid.
   Malgré des feux si beaux, qui rompent ma colère.
L' Auteur, dit-elle, pâsse mal d' une métaphôre à une aûtre, et ce verbe rompre ne s' acomode pas avec feux. _ "La mort sourde à mes prières, et mon père sourd à mes larmes, me refusèrent également ce que je leur démandois. _ On dit, sourd aux plaintes, aux prières, aux voeux; mais on ne dit pas, sourd aux larmes: on voit les larmes, on ne les entend pas. Wailly. = On critiqua aûtrefois dans la Princesse de Clèves la phrâse suivante. "Qu' elle passion endormie se ralluma? Cela n' est pas exact. Il fallait dire, quelle passion endormie se réveilla? ou quelle passion éteinte se ralluma? Ces changemens de métaphôres passaient pour faûtes, dans le discours, dès le tems du Cardinal du Perron, et il le remarque lui-même en quelque endroit. Let. sur la Princesse de Clèves.
   2°. Métaphôres tirées de Sciences et Arts peu conus du comun des Lecteurs. C' est le défaut d' un grand nombre d' Auteurs de ce siècle, en particulier de Messieurs Thomas et Cerutti. Qu' on parcoure les Discours du premier, on y rencontrera à chaque page des masses, des calculs, des chocs, des résultats, des points, des centres, des réactions, des plans, des ressorts, etc. À~ tout propôs, c' est la chaîne des évènemens, la chaîne des devoirs, la chaîne des idées; la chaîne des corps, la chaîne des tems, la chaîne des êtres, etc. _ "N' empruntez-vous, dit M. Cerutti, le compas de la Philosophie que pour tracer un cercle de conjectûres, un labyrinte de séduction, etc. "Que sont devenus ces monceaux arides de merveilles, d' enchantemens exhaussés sur le vuide stérile de la Féerie. Ibid. "Dans une région supérieure, où l' on respire un air dégagé des exhalaisons grossières d' un vil intérêt, d' où l' on foule à ses pieds les brouillards de l' erreur et les ouragans de la passion. Ibid.
   3°. Métaphôres multipliées et entassées. "Parcourir un sujet avec une réserve d' imagination; le manier avec une finesse de tact, qui saisissent les points les plus subtils, qui démêlent les nuances les plus imperceptibles... creuser une pronfondeur là où le vulgaire ne voit qu' une surface... toucher à la racine d' une vérité, dont on se contente de goûter les fruits ou de mesurer les branches, etc. Cerutti. Tout est écrit dans ce goût là, dans le Discours sur l' Intérêt d' un ouvrage, plein d' esprit d' ailleurs et d' excellentes vûes, mais dont la lecture est rendûe fatigante par ce jargon métaphorique. = La définition d' une Armée est curieûse dans M. Thomas. "Cent mille hommes, oposés à cent mille hommes, forment des masses redoutables, qui s' étudient, s' observent, combinent avec une sage lenteur tous leurs moûvemens, et balancent avec un art terrible et profond la destinée des États. _ Des masses, qui s' étudient, qui s' observent, qui combinent, qui balancent! quel langage! Le portrait d' un Ministre est encôre plus extraordinaire. "Régir les États comme Dieu régit le monde; bien organiser l' ensemble pour que les détails roulent d' eux-mêmes... Calculer l' influence de toutes les parties les unes sur les aûtres et de chacune sur le tout... lier les intérêts particuliers à l' intérêt général, ...en comprimant chacun d' eux par les poids environans; faire concourir les divisions même à l' harmonie du tout; connoître à quel point du cercle est parvenu l' État qu' on gouverne; le fixer, s' il est heureux, le faire remonter en arrière, s' il est déchu... Reculer le plus qu' il est possible les limites du bien et retrancher sans cesse la somme inévitable des maux, qu' entraînent le tourment des afaires... le choc et le contraste éternel du possible physique et de l' impossible moral. _ Après avoir lû ce morceau, que j' ai beaucoup abrégé, on ne peut manquer de devenir un grand Homme d' État.
   4°. Métaphôres trop recherchées. L' Auteur d' un Traité du Plaisir en fournit lui seul des milliers, aussi bien que des métaphôres bâsses et rampantes. "On ne tarde pas de mettre à leur esprit un taux déshonorant. "Ceux, qui se visitent de loin en loin, sont des porteurs et des receveurs d' ennui. "Il n' est point de douceur plus solide que de s' instruire des vérités utiles, et de tirer ses idées du cahôs où elles végètent infructueûsement. _ Des idées, qui végètent, et qui végètent dans un cahôs! _ "Mes idées se digèrent, s' aprofondissent, s' incrustent, pour ainsi dire, dans ma mémoire. "Un Ami vrai... en adoucissant la coupe amère de nos peines, il nous aide à l' avaler, et en partageant le volume de notre joie, il en augmente les délices. "Ils ne craignent point le sarcasme que les Grands dôrent d' un clinquant de politesse. _ L' Auteur, parlant du funeste éfet d' une joie excessive: "Si des larmes, dit-il, avoient dilaté son âme resserrée, elle auroit conservé la voluptueûse harmonie de ses accords, etc.
   5°. Métaphôres bâsses et rampantes. "Un autre, afaissé sous le poids d' une table délicieûse fait de son ventre un égoût incomode d' alimens et de breuvages. Du Plaisir. "Souvent tant d' aprêts somptueux n' ont été affichés que pour de sensuels automates, qui remplissent gloutonement le fourreau de leur individu. Ibid. "L' esprit est un champ, qui languit, s' il n' est fumé. Ibid. "Quelle sorte de plaisir à secourir un malheureux par ostentation ou par humeur; sinon un plaisir sans délicatesse, qui n' en est que le son ou la partie grossière. Ibid. Quand on le fait par humanité, c' est donc la fleur de farine du plaisir. "Si le plaisir se vendoit, les riches en tireroient la quintessence: le marc resteroit pour le peuple. Ibid.

MÉTAPHYSICIEN


MÉTAPHYSICIEN, s. m. MÉTAPHYSIQUE, subst. et adj. MÉTAPHYSIQUEMENT, adv. [Métafizi-cien, zike, keman: 1re é fer. 5ee muet aux 2 dern. _ Richelet écrit métaphisique, etc.] La Métaphysique est une science, qui traite des premiers principes de nos conaissances. "Traité de métaphysique. = Adj. Qui apartient à la métaphysique. "Science, conaissance métaphysique. "Principes métaphysiques. = Qui est abstrait. "Cela est bien métaphysique. = Métaphysicien, qui fait son étude de la métaphysique. "Bon métaphysicien. = Métaphysiquement, d' une manière métaphysique. "Cela est traité métaphysiquement.

MÉTAYER


MÉTAYER, ÈRE, s. m. et f. [Mété-ié, ière: 1re et 2e é fer. 3e é fer. au 1er, è moy. et long au 2d.] Celui, celle, qui a soin de faire valoir une métairie. Ce mot n' est en usage qu' en certaines Provinces.

MÉTEIL


MÉTEIL, s. m. [1re é fer. mouillez l' l finale.] Froment et seigle mélés ensemble. "Semer du méteil. "Pain de méteil.

MÉTEMPSICôSE


MÉTEMPSICôSE, s. f. [Métanpsikôze: 1re é fer. 2e et 4e lon.] Passage de l' âme de son corps dans un autre corps. "Pytagôre passe pour l' Auteur de la métempsicôse. Elle est anciène dans les Indes.

MÉTÉôRE


MÉTÉôRE, s. m. [1re et 2e é fer. 3e lon. 4ee muet.] Phénomène, qui se forme et qui aparait dans l' air. "Le tonerre, les éclairs, la pluie, l' arc-en-ciel, l' aurôre boréale sont des météôres.

MÉTÉOROLOGIQUE


MÉTÉOROLOGIQUE, adj. [1re et 2e é fer. dern. e muet: mété-orologike.] Qui concerne les météôres. "Observations météorologiques.

MÉTHODE


MÉTHODE, s. f. MÉTHODIQUE, adj. MÉTHODIQUEMENT, adv. [Métode, dike, dikeman: 1re é fer. 3e du 1er et 4e des 2 aûtres, e muet.] Manière de dire ou de faire une chôse avec un certain ordre. "Bone ou mauvaise méthode. "Rien n' est aussi utile à l' enseignement que la méthode. = En parlant des persones, coutume, habitude. "C' est sa méthode; chacun a sa méthode.
   MÉTHODIQUE, apliqué aux persones, qui a de la règle, de la méthode. "Esprit méthodique; homme méthodique et compâssé. = Apliqué aux chôses, qui est fait avec méthode. "Discours, traité méthodique. = Méthodiquement, avec méthode. "Traiter une matière méthodiquement: en parler méthodiquement.

MÉTHODISTE


*MÉTHODISTE, s. m. C' est le nom que M. De Buffon done aux Auteurs, qui ont suivi diverses méthodes en Botanique. = On le dit aussi des Médecins qui suivent la méthode et les règles prescrites en médecine, par oposition aux Empiriques, qui ne suivent qu' une aveugle pratique. L' Acad. dit méthodique substantivement dans ce sens. Elle ne met méthodiste dans aucun sens.

MÉTIER


MÉTIER, s. m. [Métié, 2 é fermés. _ On écrivait autrefois mestier, on a écrit ensuite mêtier avec l' acc. circonflexe, pour marquer la supression de l' s; mais cet accent n' est convenable que pour marquer l' ê ouvert.] 1°. C' est proprement la profession d' un Art mécanique. "Bon ou mauvais métier. "Le métier de Cordonier, de Serrurier, de Tisserand, etc. "Homme, gens de métier. "Les Corps des Arts et Métiers. = 2°. Il se dit figurément des professions les plus nobles; et ce mot, qui est bâs dans le propre, est élégant dans le figuré. Selon Balzac, les Peintres s' en ofensent, et les Généraux d' armée s' en font honeur; et les uns et les autres ont raison: telle est la bisârrerie de l' usage. On dit: "Le métier des armes; le métier de la guerre. "Cet Oficier aime son métier; il a le coeur au métier. "Cet Avocat, ce Médecin sait son métier. "Le métier de ceux qui comandent est le plus dificile de tous. On dit aussi, en parlant des ouvrages: "Il n' y a que les gens du métier qui en soient bons juges, Bouh. = Quelquefois pourtant métier, au figuré, se prend en mauvaise part. "Le devoir des Juges, dit la Bruyère, est de rendre la justice; et leur métier est de la diférer: quelques-uns savent leur devoir, et font leur métier. _ On fait ordinairement mal ce qu' on ne fait que par métier. = Gâter le métier, c' est, figurément, faire au delà de son devoir. Mde de Sévigné écrit à sa fille. "Votre frère a fort bien fait: on l' admireroit, si vous ne gâtiez pas le métier: mais vos sentimens sont d' une perfection qui efface tout. = Servir un plat, ou jouer un tour de son métier; faire quelque tour d' adresse ou de fourberie; ou, en bonne part, présenter quelque chôse de relatif à sa profession, comme un Poète, des vers. = Avoir le coeur au métier; s' afectioner à ce qu' on a entrepris. "La lettre de votre enfant... est d' un homme satisfait, et qui a le coeur au métier. SÉV. = Faire d' une chôse métier et marchandise; la faire habituellement.
   Qu' un honnête homme, une fois en sa vie,
   Fasse un Sonnet, une Ode, une Elégie,
   Je le crois bien:
   Mais que l' on ait la tête bien rassise,
   Quand on en fait métier et marchandise,
   Je n' en crois rien.
= Jalousie de métier. "Sa Lettre (de Pline le Jeune sur Silius Italicus) anonce de l' humeur, et un peu de ce qu' on apelle jalousie de métier. Ann. Lit. = * On disait autrefois métier pour besoin. "Si métier est, pour, si besoin est.
   3°. MÉTIER, machine qui sert à certains Artisans. "Métiers de Tisserand, de Passementier, etc. = Sa toile est sur le métier. "Monter un métier. "Des bâs faits au métier. = Figurément (st. famil.) quel ouvrage avez-vous sur le métier?

MÉTIS


MÉTIS, ISSE, adj. [Métis, tice, 1re é fer.] On apèle de ce nom, celui, celle qui est né ou née d' un Européen et d' une Indiène, ou d' un Indien et d' une Européenne dans les Indes Occidentales. "Un Espagnol métis, une Indiène métisse. = On le dit aussi des chiens engendrés de deux espèces. "Chien métis, chiène métisse.

MÉTONYMIE


MÉTONYMIE, s. f. [1re é fer. 4e long. 5e e muet.] Figûre du discours par laquelle on met la caûse pour l' éfet, le sujet pour l' atribut, le contenant pour le contenu; comme par exemple: Il vit de son travail, c. à. d. du fruit de son travail. "L' armée navale étoit de cent voiles; c. à. d. de cent vaisseaux. "Toute la ville est allée au devant de lui; c. à. d. tous les habitans, etc.

MèTRE


MèTRE, s. m. [1re è moy. 2e e muet.] Autrefois, vers, poésie. On l' emploie encore dans le marotique.
   Maître Vincent, le grand faiseur de lettres,
   Si bien que vous n' eût su prosaïser.
   Maitre Clément, le grand forgeur de mètres,
   Si doucement n' eût su poétiser.
       Rousseau.

MÉTROMANE


MÉTROMANE, s. m. MÉTROMANIE, s. f. Ils expriment la manie de faire des vers. Nous devons ces deux mots à la fameûse Comédie de Piron. Il mit en vogue le second, qu' il dona pour titre à sa Pièce, et celui-ci est né le premier. "Un jeune Auteur, homme d' esprit, mais un peu singulier, et qui plus est, métromane. Journ. Hist. de Gen. _ L' Acad. ne met que métromanie.

MÉTROPOLE


MÉTROPOLE, s. f. MÉTROPOLITAIN, AINE, adj. MÉTROPOLITE, s. m. [1re é fer. 5e è moy. au 3e, li-tein, tène.] Métropole s' est dit anciènement de la Ville capitale d' une Province: aujourd' hui ville avec Siège archiépiscopal. "Rouen est la métropole de la Normandie. Paris, Toulouse, Aix, Arles, etc. sont des métropoles. = adj. "Église métropole, ou métropolitaine. _ Quelques-uns le disent substantivement; la métropole, comme ils disent la cathédrale pour les Évêchés. = Métropolitain, archiépiscopal. "Siège métropolitain. "Église métropolitaine. = S. M. Archevêque, relativement à sa Province. "Apeler de la Sentence de l' Évêque au Métropolitain. = Métropolite. On le dit dans le Rit grec pour Métropolitain. "Le Métropolite de Rezan. Volt. "On vit venir chez eux une afluence extraordinaire de Prêtres, d' Évêques, de Métropolites, de sorte que les Missionaires ne pouvoient suffire au travail. d' Avrigni.
   Rem. Depuis quelque tems on apèle Métropole les États d' Europe, relativement à leurs Colonies du nouveau Monde. "On sacrifie les Colonies aux intérêts de la Métropole. "Les Colonies des Grecs étoient toujours dans une espèce de dépendance de leur Métropole. Note sur Télém. = Dans le sens de ville capitale, on le dit encore dans le style élevé, et en parlant des anciens peuples. "Antioche était la métropole de la Syrie. Dans le discours ordinaire, on dirait était la capitale, etc.

METTABLE


METTABLE, adj. METTEUR, s. m. METTRE, v. act. [Métable, mèteur, Mè--tre: 1re è moy. _ Richelet écrit métable; mais de son tems on ne conaissait que l' é fermé et l' ê fort ouvert, on n' avait pas encore apris à distinguer par le caractère l' è moyen qui tient le milieu entre ces deux e. _ Dans le Dict. Gram. on dit que l' e n' est moyen que devant la syllabe féminine, et qu' il est muet devant la syllabe masculine; de sorte qu' on conseille d' écrire metable, meteur, je metois, metrai, metant, etc. L' ortographe et la prononciation seraient également mauvaises; l' è est moyen dans tous ces mots: il faut donc les écrire avec deux t. Je mets, nous mettons; je mettais; je mis; j' ai mis; je mettrai, mettrais, mets; que je mette; je misse; mettant.] = Placer quelqu' un ou quelque chôse en certain lieu. "Mettre une chemise, un habit; mettre son chapeau. "Mettre le pot au feu; les viandes sur la table. "Mettre l' épée à la main. "Mettre le pied à l' étrier, etc. etc. etc. = Ce verbe se combine avec un grand nombre de noms. On trouvera l' explication de ces expressions composées, en cherchant les noms avec lesquels il s' associe. = Il s' unit à toute sorte de prépositions; dans sur, avec, auprès, dedans, dehors, etc. Avec certains noms il régit à et l' infinitif. "Mettre sa gloire à obéir; son plaisir à faire du bien, etc. = Se mettre a plusieurs sens: 1°. Le sens propre: se placer; mettez-vous à côté de moi: il s' est mis à la première place. = 2°. Comencer. "Il se mit à pleurer: "Il s' est mis à travailler, "Ils se mirent tous à crier. _ Cette expression n' est pas fort noble, et n' est bone que pour le st. familier. "Les Athéniens pensèrent qu' il y avoit peut-être quelque Dieu plus puissant que ceux qu' ils croyoient conoître, qui les délivreroit de ce fléau terrible, s' ils se mettoient à l' invoquer. P. Griffet. An. Chrét. L' expression parait un peu bâsse pour une Histoire sérieûse. = 3°. Se mettre, s' habiller. "Il se met bien; elle se met mal. "Il est mal mis; elle est bien mise. "Elles (les dévotes) ont presque par-tout la même façon de se mettre: c' est leur uniforme. Marivaux.
   Rem. * Le Peuple, en certaines Provinces, fait mettre neutre, et lui done le sens de tarder. "Allez chez un tel, et ne mettez guère. "Vous avez mis beaucoup à revenir. Cela est bâs et populaire. Vaug.Corn. L. T.
   METTABLE, qu' on peut mettre. Il ne se dit guère qu' avec la négative, et son emploi est fort borné. "Cet habit, ce linge, ce manteau, cette robe, n' est pas mettable, n' est plus mettable; il est mal fait, ou il est trop vieux et hors de mode. Il est du st. famil.
   L' esprit n' y sera point pédant,
   Le savoir n' y sera mettable
   Que sous les traits de l' agrément.
       Gress.
  METTEUR ne se dit que dans cette phrâse: metteur en oeuvre, ouvrier qui monte des pierreries.

MEUBLE


MEUBLE, s. m. MEUBLER, v. act. [meu--ble, blé: 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Meuble est proprement ce qui sert à garnir une maison sans en faire partie. Meubler, garnir de meubles. Il a de beaux meubles. "On a saisi ses meubles. "Il a richement meublé sa maison. "Il est bien en meubles; il est bien meublé. = Meuble s' emploie aussi adjectivement. "Terre meuble, légère, aisée à labourer. _ Au Palais, biens meubles, qui ne tiènent point lieu de fonds, qui se peuvent transporter. "Obliger tous ses biens meubles et immeubles.
   Rem. 1°. Il ne faut pas confondre meuble et ustensile: on les distingue bien dans une cuisine. "Les tables, chaises, etc. sont des meubles (en termes de Pratique, on les apèle meubles meublans) les casseroles, poilons, etc. sont des ustensiles. Un Auteur moderne a confondu ces deux mots. "Pourquoi, dit-il, ne pas substituer le fer au cuivre dans les meubles servant à la préparation des alimens et des remèdes. Le mot est très impropre. = 2°. Meuble et meubler, au figuré, sont tout au plus du style médiocre. On dit d' un homme aimable et jovial, c' est un bon meuble de société; d' un savant, qu' il a la tête meublée de beaucoup de conaissances. "Il avoit la téte meublée de toutes les conaissances que peut réunir un mortel dans son cerveau. Anon. On dit aussi d' une persone qui a les dents belles, qu' elle a la bouche bien meublée. = 3°. Meuble se prend quelquefois collectivement pour toute la garnitûre d' un apartement, tapisseries, lits, sièges, etc. "Il a fait faire un meuble magnifique.

MÉVENDRE


MÉVENDRE, v. act. MÉVENTE, s. f. [Mévandre, mévante: 1re é fer. 2e lon. 3e e muet.] L' Acad. met aussi MESVENDRE à sa place. Voy. ce mot. Elle ne met point Mesvente. = Ils expriment une vente à trop bâs prix. "Mévendre des marchandises. "Il se plaint de la mévente de ses meubles.

MEUGLEMENT


MEUGLEMENT, MEUGLER. V. BEUGLEMENT, BEUGLER.

MEULE


MEULE, s. f. MEULIèRE, s. f. [Meu-le, liè-re: 2e e muet au 1er, è moyen et long au 2d.] Meule est, 1°. un corps solide, rond et plat, qui sert à broyer. "Meule de moulin. "Batre, piquer la meule. = 2°. Roûe de grès, dont on se sert pour aiguiser. "Pâsser, aiguiser sur la meule. = 3°. Meule, ou mule de foin, monceau, pile de foin qu' on fait dans les prés. _ L' Acad. ne met que le 1er; cependant, au dire de La Touche, plusieurs préfèrent le 2d. = Meulière ne se dit qu' avec pierre. On apèle pierre de meulière, 1°. La pierre dont on fait les meules de moulin; 2°. une sorte de moilon de roche, plein de trous et fort dur; 3°. La carrière, d' où l' on tire ces sortes de pierres.

MEUNIER


MEUNIER, s. m. [Meu-nié: 2eé fer.] Celui qui gouverne un moulin à blé. _ On apèle Meunière, la femme d' un Meunier. _ Voy. ÉVêQUE.

MEURTRE


MEURTRE, s. m. MEURTRIER, IèRE, adj. et subst. [Meur-tre, trié, triè-re: 2e e muet au 1er, é fer. au second, è moy. au 3e.] Meurtre et meurtrier signifient tous deux homicide, l' un en parlant du crime, l' aûtre du criminel. "Faire, cometre un meurtre. "On a pris le meurtrier. = Celui-ci est adjectif dans les phrâses suivantes. "Ce siège a été meurtrier; il y a péri bien du monde. "Les armes à feu sont meurtrières; elles tuent bien du monde. On dit poétiquement, l' épée meurtrière; la dent meurtrière du sanglier. = Meurtrière, s. f. Ouvertûre pratiquée dans les murs d' une fortification, par laquelle on peut tirer à couvert sur les assiégeans.
   Rem. 1°. Meurtre s' emploie quelquefois au figuré: "Le meurtre des réputations. Sabat. de Castres. = On dit aussi, fig. (st. famil.) crier au meurtre, se plaindre hautement de quelque injustice, de quelque domage qu' on a reçu. = C' est un meurtre, c' est grand domage. "Vos lettres sont admirables, et c' est un meurtre de n' en pouvoir faire aucune part au Public. Mde. de Coulanges à Mde. de Grignan. "C' est un meurtre de cueillir des fruits si verts. Acad. "C' est un meurtre d' enterrer une si jolie persone dans la Province: elle feroit les délices de Paris. MARIN, l' Amante Ingénûe.
   2°. Meurtrier est de trois syllabes en vers.
   J' apelerai vertu guerrière
   Une vaillance meurtrière.
       Rouss.
  Concevez Socrate à la place
  Du fier meurtrier de Clitus.Id.
  Evitez du belier la corne meurtrière.
       Gress.
Brébeuf a fait meurtrière de trois syllabes seulement, au lieu de quatre qu' il doit avoir en vers, y compris l' e muet.
   Sa main, en même tems officieûse et fière,
   Arrache l' oeil sanglant, et la flèche meurtrière.
Il n' est pas étonant que ce Poète l' ait pratiqué de la sorte, puisque l' Acad. sur ce vers de Corn.
   Qu' un meurtrier périsse.
"Ce mot de meurtrier, qu' il répète souvent, le faisant de trois syllabes, n' est que de deux. Certainement elle ne le dirait pas aujourd' hui. = Meurtrier se plait à suivre. "Ses meurtriers systêmes (de Voltaire) comme dit M. Moreau, forme une inversion un peu dûre.

MEURTRIR


MEURTRIR, v. act. MEURTRISSûRE, s. f. [Meur-tri, tri-sûre: 3e lon. au 2d.] Meurtrissûre, contusion. Meurtrir, faire une contusion. "La balle ne fit que le meurtrir. "Il est tout meurtri de coups. "En tombant, il s' est meurtri le visage, et non pas il a meurtri son visage. "Les meurtrissûres en paroissent encore.
   Rem. On donait autrefois à meurtrir les sens de tuer, égorger. Racine a encôre dit dans Athalie.
   Allez, sacrés vengeurs de nos Princes meurtris.
   Voy. OCCULTEMENT.

MEUTE


MEUTE, s. f. [Meu-te: 2e e muet. Terme collectif. Nombre de chiens courans, dressés pour la grande chasse. = On apèle clefs de meute, les meilleurs chiens et les mieux dressés d' une meute. _ Figurément, Homme qui a beaucoup de crédit dans le parti dont il est. "C' est une clef de meute. _ Dans l' Ann. Lit. on dit chef de meute. C' est peut-être une faûte d' impression. "Ce n' est point un ouvrage composé par un chef de meute, revu et corrigé dans les bureaux d' esprit.

MEXIQUE


MEXIQUE, s. m. On l' a fait autrefois des deux genres. On disait le Mexique, ou la Mexique; et Ménage se contente de dire que le premier est le plus usité. On peut dire aujourd' hui qu' il est le seul qui soit en usage.
MI


MI. Particule indéclinable, qui entre dans la composition de plusieurs mots, et qui signifie demi. "Mi-côte, minuit, mi-chemin, mi-jambe, mi-sucre, etc. Il est féminin quand il est joint à un nom de mois; la mi-mai, la mi-août. Hors de là il est du même genre que le mot auquel il est joint, excepté minuit, qui est masculin, quoique nuit soit féminin, et mi-carême, qui est féminin, quoique carême soit masculin. La mi-carême. _ Il s' emploie quelquefois adverbialement; à mi-côte, à mi-chemin, à mi-jambe, etc.

MIAULEMENT


MIAULEMENT, s. m. MIAULER, v. n. [Miô-leman, mio-lé: 1re lon. au 1er, dout. au 2d, 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Ils expriment le cri du chat. "Le miaulement d' un chat. "J' entends un chat qui miaûle.

MICHE


MICHE, s. f. [2e e muet.] Pain d' une grôsseur médiocre. = On dit proverbialement: c' est lui qui done les miches; qui distribûe les grâces.

MICHEL-ANGE


MICHEL-ANGE, s. m. Nom d' un fameux Peintre. Il faut prononcer mikel-ange, et non pas avec le ch. français, michélange.

MICMAC


MICMAC, s. m. [mikmak.] Pratique secrette, faite à mauvais dessein. "Il y a bien du micmac dans cette afaire. St. famil.

MICROMèTRE


MICROMèTRE, MICROSCOPE, s. m. Le premier, se dit d' un instrument qu' on aplique aux lunettes d' aproche, et qui sert à mesurer le diamètre des astres, etc. Le second, d' un instrument qui grossit extraordinairement les objets. = Le dernier se dit au figuré.
   L' un d' eux étoit de ces conteurs
   Qui n' ont jamais rien vu qu' avec un microscope.
   Tout est géant chez eux, etc.
       La Font.

MIDI


MIDI, s. m. Le milieu du jour. Il se dit presque toujours sans article. On dit sur le midi; mais plus souvent à midi; à l' heure de midi. Midi est soné. "Avant, après midi. = En plein jour, publiquement. = Il s' emploie au figuré. "Le midi de nos jours, l' âge viril.
   Au midi de mes années
   Je touchois à mon couchant.
       Rouss.
On dit, en stile proverbial, chercher midi à quatorze heures; faire des dificultés ridicules; ou alonger inutilement ce qu' on pourrait dire d' une manière plus courte.

MIE


MIE, s. f. MIETTE, s. f. [Mî-e, Miète: dans le premier, ie est de deux syllabes; dans le second, il n' en fait qu' une: 1reè moy. au 2d.] Il y a de la diférence entre ces deux mots, qui ont tous deux raport au pain. La mie du pain, c' est tout ce qui n' est pas la croûte. Miette est une petite partie de la croûte. L. T. = Mie, amie. Autrefois les enfans apelaient leur gouvernante ma mie, sa mie: aujourd' hui ils disent ma bonne, sa bonne. = Mamie pour mon amie, se dit souvent par dérision. "Doucement, mamie; j' ai vingt-quatre heures devant moi pour vous répondre, et je ne dirai ma pensée qu' à la dernière minute. Mariv.
   * Mie s' est dit autrefois au lieu de point, adverbe, avec la particule ne.
   Beaux sires loups n' écoutez mie
   Mere tançant son fils qui crie.
       La Font.
On le dit encôre en Picardie.
Miette se dit par extension, d' un petit morceau d' une chôse à manger. "Vous ne lui en avez donné qu' une miette. "On a bien servi des plats sur cette table; mais il n' en est pas resté une miette.

MIEL


MIEL, s. m. MIELLEUX, EûSE, adj. [Mièl, monos. mièleu, leû-ze: 1re è moy. 2e lon.] Mièl est ce suc doux que les abeilles tirent des fleurs ou des plantes. = Mielleux, qui tient du miel. "Goût mielleux. _ Figurément: "Ton mielleux. La Font. dit miellé, pour la rime.
   Tircis eut beau prêcher, ces paroles miellées
   S' en étant aux vents envolées.
   On dit figurément (St. famil.) il est tout sucre et tout miel: il a une douceur afectée.

MIELLEUSEMENT


MIELLEUSEMENT, adv. D' une manière mielleuse. "C' est, dit-il, mielleûsement; c' est avec un regret bien sincère que, etc. L' ab. Royou. L' Acad. ne met pas cet adverbe. Il peut être utile.

MIEN


MIEN, MIENNE, pron. possess. et relat. [Mièn, monos. miène; en dans le 1er n' a pas le son d' an: 1re è moy. 2e e muet au 2d.] Il est toujours relatif à un nom qui a précédé. "Ce n' est pas votre avis, c' est le mien, c. à. d. mon avis. "Voilà votre canne, voici la mienne. = Mien, tien sien, ne doivent jamais se mettre devant le substantif. On disait autrefois, et l' on dit encôre en certaines Provinces, un mien frère, une siène soeur. Il faut dire: un de mes frères, une de mes soeurs; ou, s' il n' y en a qu' un, mon frère, ma~ soeur. = Mien est aussi substantif; et au singulier: "Je ne demande que le mien, c. à. d. mon bien. "Le tien et le mien (et non pas le mien et le tien, comme dit un Auteur) est la source de tous les procês, et de toutes les guerres; et au pluriel: les miens, mes proches, mes aliés. "Il est plein d' égards pour moi et pour les miens.

MIETTE


MIETTE, Voy. MIE.

MIèVRE


MIèVRE, adj. MIèVRERIE, ou MIèVRETÉ, s. f. [1re è moy. 2e e muet.] Ils ne se disent que des enfans vifs et remuans. Acad. éveillés, remuans et malins. Trév. "Cet enfant est bien mièvre: il est d' une mièvrerie singulière. Trév. traite l' adjectif de populaire, et le substantif de familier. Pourquoi cette distinction? L' Acad. done cette dernière qualification à tous les deux. "Si c' est une mièvreté des Ministres (anglais) pour mettre la nation en joie... c' est une petite ressource. Linguet.

MIEUX


MIEUX, adv. [Mieû, monos. long.] C' est le comparatif de bien, adverbe: le mieux en est le superlatif. "Celui-là est bien fait, celui ci l' est encôre mieux. "Il est le mieux du monde. = Mieux, 1°. Dans les tems simples, se met après le verbe: il est mieux; il se porte mieux: mais, dans les tems composés, il vaut mieux le mettre entre l' auxiliaire et le participe. "Il a mieux chanté aujourd' hui qu' hier; et non pas, il a chanté mieux. "J' ai mieux aimé et non pas j' ai aimé mieux. Il est mieux placé aussi devant qu' après l' infinitif. "Il faut mieux faire à l' avenir. Pour mieux dire, et non pas pour dire mieux, comme dit l' Ab. Du Bos. _ On peut pâsser aux Poètes de le mettre après.
   Leur fourbe conducteur, pour les séduire mieux,
   Prenoit à chaque instant cent formes à leurs yeux.
       P. Marion, Cromvel.
On dit aussi, en prôse. "Il est plus aisé de trouver à redire que de faire mieux. Mais ce n' est pas une conséquence pour les aûtres phrâses. = 2°. Le mieux se décline comme les noms. Le mieux, de mon mieux. "Je le ferai de mon mieux. _ À~ mieux. "Je ne m' atendois pas à mieux. Mariv. _ Du mieux qu' il m' est possible. "Je fais tout du mieux que je puis. Sév. On dit, dans le même sens, le mieux que j' ai pu, le mieux que je saurai. Mais avec les pronoms possessifs, il faut toujours se servir du génitif. De mon mieux, de son mieux, de votre mieux. "Il a fait tout de son mieux. * Et non pas de tout son mieux, comme dit un Auteur. On ne dit guère de ton mieux, ni de leur mieux. Cependant ils peuvent se dire. = On dit, aler au mieux, c. à. d. aussi bien qu' il est possible. Cette expression n' est pourtant que du style familier. = 3°. Avec mieux, comme avec autant, on met de devant le 2d infinitif, quoique le 1er soit sans de. "Il vaut mieux s' exposer à faire des ingrats, que de manquer aux misérables. Il aime autant souffrir que de se plaindre. Wailly. = 4°. Mieux s' emploie substantivement dans quelques phrâses. "Le mieux seroit de n' en rien dire. "C' est un mieux, qui ne vaut pas grand' chôse. "Hier il étoit sans fièvre... Ces sortes de mieux sont presque toujours traîtres. Sév. = 5°. En mieux, adv. "Il n' est point arrivé dans moi de changement, qui ne soit en mieux. = De bien en mieux. Voy. PIRE et PIS. _ De mieux en mieux. = * Des mieux. "Il chante, il danse des mieux: expression bâsse et nullement correcte. Vaugelas ne pouvait la soufrir. À~ qui mieux mieux ne lui plaisait pas davantage: il voulait qu' on dit, à l' envi. L' Acad. l' avait d' abord condamnée et assurait qu' elle était bâsse, et ne se disait plus. Elle s' est ravisée, et dans la dern. édit. elle l' admet pour le style familier. "Ce sera un trésor à nous deux (que cet enfant) nous l' aimerons à qui mieux mieux. MARM. Voy. À~ L' ENVI. _ * Mieux, pour plus est un gasconisme. "Il a mieux de 40,000 livres de rente. "Vous dites qu' elle a 70 ans: elle a mieux. _ Dites, il a plus de, etc. elle en a davantage. Desgr.

MIEUX-ÊTRE


*MIEUX-ÊTRE, s. m. Forgé d' après bien-ˆtre et mal-être. "À~ cet état déplorable succédoit un mieux-être, qui faisoit espérer que le mal ne seroit pas sans ressource. M... Médecin provençal. "Je suis enchantée de cette occasion de pourvoir au mieux-être de mes chères petites filles. Richardson. "Le Gouvernement porté à l' agrandissement du commerce et au mieux-être de l' État. Anon. Dans l' Ann. Litt. où l' on cite cette phrâse on met le mot en italique; critique indirecte.

MIGNARD


MIGNARD, ARDE, adj. MIGNARDEMENT, adv. MIGNARDER, v. act. MIGNARDISE, s. f. [Mig-nard, narde, deman, dé, dîze: mouillez le g, 3e e muet au 2d et au 3e, é fer. au 4e, lon. au dern.] Mignard, délicat, gracieux. Mignardement, délicatement. Mignarder, délicater, dorloter. Mignardise, délicatesse. "Visage mignard, traits mignards. _ Cet ouvrage est mignard. Ce jeune homme fait le mignard, fait le beau. "Cet enfant est traité trop mignardement; cet ouvrage est mignardement travaillé. "Il ne faut pas tant mignarder les enfans. "Cette femme se mignarde trop. "On admire la mignardise de ses traits. Il ne se dit au singulier que dans cette phrâse. _ Au pluriel, petits moyens employés pour plaire. Il ne se dit guère que des femmes. "Il s' est laissé prendre aux mignardises de cette femme.
   Rem. L' adjectif et l' adverbe étaient plus usités aûtrefois qu' aujourd' hui. On dit pourtant encôre, un parler mignard, un air mignard, un visage mignard. _ Le substantif est le plus usité des trois. Bouh. _ La Touche remarque que l' Acad. ne désaprouve point ces mots et qu' elle les dit même des ouvrages de peintûre et d' Architectûre. Dans la dernière édition elle ne parle que des petits ouvrages travaillés avec une extrême délicatesse. = Tous ces mots ne sont que du st. famil.
   MIGNARDISE, se dit aussi d' une espèce de petits oeillets de couleur gris de lin.

MIGNATURE


MIGNATURE. Voy. MINIATURE.

MIGNON


MIGNON, ONE, adj. et subst. MIGNONEMENT, adv. MIGNONETTE, s. f. MIGNOTER, v. act. [Mig-non, none, noneman, nonète, noté: mouillez le g; 3e e muet au 2d et au 3e, è moy. au 4e, é fer. au dernier.] Mignon, adjectif, et apliqué aux chôses, délicat, gentil. "Visage mignon; souliers mignons; bouche, beauté mignone. = Subst. et apliqué aux persones; bien-aimé. "C' est le mignon de la mère; c' est son mignon. _ En parlant aux enfans, ou des enfans; terme de flaterie. "Mon mignon, mon petit mignon; ma mignone, ma petite mignone. "Voilà un joli mignon, une jolie mignone. = On dit aussi les mignons d' Henri III, ses favoris. = En st. famil. avoir l' argent mignon, c' est en avoir beaucoup. Argent mignon est aussi un argent mis en réserve pour quelque dépense superflûe. _ Péché mignon, auquel on est le plus ataché. = On dit, par dérision à quelqu' un; vous êtes un joli mignon, quand il a dit quelque impertinence, ou qu' il a fait quelque sotise.
   MIGNONE, s. f. est un caractère d' imprimerie, qui est entre la nompareille et le petit texte.
   MIGNONEMENT, avec délicatesse. "Cela est mignonement fait.
   MIGNONETTE, est 1°. Sorte de dentelle légère; 2°. Petits oeuillets, dont on garnit les plates bandes d' un parterre; 3°. Poivre concassé en morceaux plus petits qu' à l' ordinaire.
   MIGNOTER, est populaire. C' est la même chôse que mignarder. Délicater, dorloter, caresser. "Vous mignotez trop cet enfant.

MIGRAINE


MIGRAINE, s. f. [Migrène: 2eè moy. 3e e met.] Douleur, qui ocupe une moitié de la tête et qui est souvent périodique. "Il ou elle a la migraine. "Il est tourmenté d' une violente migraine.

MIGRATION


MIGRATION, s. f. [Migra-cion, en vers ci-on.] Action de pâsser d' un pays dans un aûtre pour s' y établir. Il ne se dit que d' une quantité considérable de peuple.

MIJAURÉE


MIJAURÉE, s. f. [mijoré-e.] En st. plaisant et moqueur, fille ou femme dont les manières sont ridicules et pleines d' afèterie. "Voilà une belle mijaurée. MOL. Bourg. Gent.

MIL


MIL, nom de nombre. Voy. MILLE.

MIL


MIL, ou MILLET, s. m. [Mouillez l' l finale du 1er et les 2 ll du 2d; la 2e est un è moyen; suivant Richelet, il faut prononcer milet; mais assurément il se trompe, dit La Touche; et quoiqu' habile homme il se ressentait de la prononciation du peuple de Paris. Les L sont mouillées en ce mot comme en celui de fille. L. T.] Sorte de grain fort petit. "Semer du mil. "Un grain de millet. = En st. prov. on dit de ce qui est de beaucoup insufisant pour le besoins, c' est un grain de millet dans la gueule d' un âne.

MILAN


MILAN, s. m. Espèce d' oiseau de proie. _ Ville capitale du Milanès, que plusieurs écrivent Milanois et d' autres Milanais.

MILIAIRE


MILIAIRE, adj. [Mili-è-re: 3eè moy. et long, 4e e muet.] Qui ressemble à des grains de mil. "Glande miliaire: fièvre miliaire. Il ne se dit que dans ces deux phrâses.

MILICE


MILICE, s. f. MILICIEN, s. m. [3e e muet au 1er; dans le 2d, ien n' a pas le son d' ian.] Milice, est 1°. L' art et l' exercice de la guerre. Il ne se dit guère en ce sens qu' en parlant des Anciens. "La milice des Grecs étoit bien diférente de celle des Perses. = Fig. La vie de l' homme est une milice continuelle; c. à. d. un état de guerre continuel: c' est une phrâse de l' Écriture Sainte. = 2°. Troupe de gens de guerre. "Toute la milice de la ville se souleva. = 3°. Troupes composées de bourgeois et de paysans à qui l' on fait prendre les armes en certaines ocasions. Il se dit alors par oposition à troupes réglées. "Lever des milices; tirer au sort pour la milice, etc. = Milicien, ne se dit que dans ce 3e sens. Soldat de milice.

MILIEU


MILIEU, s. m. [Mi-lieu.] 1°. Le centre, le lieu, qui est également distant des extrémités. "Le milieu de la place. "Couper quelque chôse par le milieu. = Adj. "Le point milieu, du milieu. "Le points milieux sont ceux auxquels nous raportons le cours ordinaire de la Natûre. Buffon. = 2°. Dans une signification moins exacte, il se dit de ce qui est éloigné des extrémités, quoiqu' il ne soit pas également éloigné de toutes. "Le tonerre tomba au milieu de l' Église, de la Cour. "Cette Ville est située au milieu, ou dans le milieu de la France. _ Au milieu de la mer, au milieu des terres. "Au milieu d' un livre, des énemis. "Vers le milieu de la nuit, sur le milieu du jour. "Il demeura court au milieu de sa harangue, etc. = Fig. "Dans; parmi: au milieu des grandeurs, des afaires, des plaisirs. En st. famil. "Au milieu de tout cela, parmi tout cela. = 3°. Dans les chôses morales, ce qui est également éloigné des deux extrémités. "La vertu consiste dans un juste milieu. "La libéralité tient le milieu entre la prodigalité et l' avarice. = Tempérament qu' on prend dans les afaires pour les acomoder. C' est ce que les Italiens apèlent un mezzo termine. "Il faut que les Arbitres cherchent un milieu, pour porter les parties à un acomodement. _ On dit, en ce sens là, il n' y a point de milieu, il en faut pâsser par-là, il n' y a pas d' autre parti à prendre.

MILITAIRE


MILITAIRE, adj. et subst. MILITAIREMENT, adv. [Militère, reman: 3e è moy. et long, 4e e muet.] Militaire, adj. Qui concerne la guerre; l' art, la discipline militaire; exploits militaires. _ Exécution militaire, dégât qu' on fait dans un pays pour contraindre les habitans à faire ce qu' on exige d' eux. C' est aussi une exécution faite sans les formalités requises. = Architectûre militaire; l' art de fortifier les places. = S. m. Un homme de guerre. "Un bon militaire; les vieux militaires. M. Moreau l' emploie comme terme collectif. "Il ne suffit pas pour être le premier Prince de l' Europe d' être à la tête d' un militaire immense, commandé par les plus habiles généraux. = Militairement d' une manière militaire. "Agir, juger militairement.

MILITANTE


MILITANTE, adj. MILITER, v. n. Combatante. Combatre. _ L' adj. ne se dit qu' avec Église: l' assemblée des fidèles sur la terre. = Militer, n' est que du style polémique ou de dissertation. "Cette raison milite pour moi, ne milite point contre moi. "Des raisons, qui militent autant pour moi que contre lui. Anon.

MILLE


MILLE, adj. numér. MILLÉNAIRE, adj. MILLÉSIME, s. m. [les 2 ll se prononcent dans le 2d et le 3e, mais sans être mouillées: mile, millénère, millézime: 2ee muet au 1er, é fer. au 2d et au 3e; la 3e est un è moy. et long dans le 2d.] Mille, dix fois cent. Millénaire, qui contient mille. "Nombre millénaire. = S. m. Dix siècles. "Le 1er, le 2d, le 3emillénaire. Millésime, l' année, qui est marquée sur une médaille, sur une pièce de monaie. "Le millésime est éfacé.
   Rem. 1°. Dans le millésime, on dit mil, et non pas mille; et cent, au lieu de cens. "L' an mil sept cent quatre-vingt-six. = 2°. Mille signifie quelquefois beaucoup. Les latins disaient sexcenti.
   Mille et mille lauriers, dont sa tête est couverte.
       Corneille.
Mille l' ont déjà fait, mille pourroient le faire.Id.
"Il y a environ mille ans que je n' ai reçu de vos lettres. Sév. "J' ai été mille fois chez vous. = 3°. Quoique millésime ne dût se dire que des années qui passent mille; on le dit pourtant des médailles frapées avant l' an mille.
   MILLE, chemin, contenant mille pâs géométriques. La troisième partie d' une grande lieûe. En Angleterre et en Italie on compte par milles. "Le mille est plus long ou plus court suivant les divers pays.

MILLIAIRE


MILLIAIRE, adj. [Mi-li-ère: 3eè moy. et long, 4e e muet.] Colonne milliaire, ou pierre milliaire, que les Romains plaçaient de distance en distance sur les grands chemins, pour marquer la distance des lieux, en comptant par milles.

MILLIAR


MILLIAR, s. m. MILLIASSE, s. f. MILLIER, s. m. MILLION, s. m. [Mi-liar, lia--ce, lié, lion.] Quelques-uns écrivent milliard, Trév. met milliart. L' Acad. l' écrit sans d et t final. = Millier, nom collectif qui contient mille. Million, dix fois cent mille. Milliar, mille millions. "Un millier d' épingles. "Un million d' hommes. "L' Angleterre est endettée de plusieurs milliars. = Milliasse, se dit par mépris pour exprimer un fort grand nombre. "Dans cette maison il y a une milliasse de rats, de fourmis. Sur le bord de cet étang, il y des milliasses de moucherons.
   2°. MILLIER, mille livres pesant, dix quintaux. "Un millier de fer, de café. "Cette charrette porte deux milliers. _ Un millier de foin, de pâille, un millier de bottes de foin, de pâille, etc.

MILLIèME


MILLIèME, MILLIONIèME, adj. MILLIONAIRE, s. m. [Mi-liè-me, lio-niè-me; lio-nère: 2e du 1er, et 3e du 2d et du 3e è moy. dern. e muet.] Les deux premiers sont des nombres ordinaux, qui achèvent l' un le nombre de mille, l' aûtre le nombre d' un million. "Il est le millième, le millionième. = Millième, est aussi une des parties d' un tout, composé de mille parties. "Je serais riche avec la millième partie de son bien. "De tout ce qu' il dit, il n' y en a pas la millième partie de vrai. On le dit par exagération. = Millionaire, c' est proprement, qui est riche d' un million. On le dit des persones extrêmement riches. "C' est un millionaire. "Il y a dans cette ville plusieurs millionaires.

MINAUDER


MINAUDER, v. n. MINAûDERIE, s. f. MINAUDIER, IèRE, adj. et subst. [Minodé, nôderî-e, no-dié, dière: 2e lon. au 2d, dout. aux aûtres. Devant l' e muet, l' au est long; il minaûde, elle minaûdera: 3e é fer. au 1er et au 3e, e muet au 2d, è moy. et long au 4e.] Minauder, c' est afecter des mines, des façons pour plaire. Minauderie, mines et façons de faire afectées. Minaudier, qui minaûde, qui est dans l' habitude de minauder. "Cette femme ne fait que minauder. "Elle est trop minaudière; c' est une minaudière, un minaudier. "Je n' aime point toutes ces minauderies. Ces mots ne sont que du style familier. Minauderie est le plus usité de tous: il se dit ordinairement au pluriel. _ Ils ne se disent guère que des femmes sur tout le verbe.

MINCE


MINCE, adj. [Mein-ce: 1re lon. 2e e muet.] 1°. Au propre, qui n' a pas beaucoup d' épaisseur. "Étofe, doublûre, lame de métal mince, trop mince, fort mince. _ Proverbialement, mince comme la langue d' un chat. = 2°. Fig. revenu bien mince, fort modique. Raison mince, faible. _ Mérite, esprit, savoir bien mince, au dessous du médiocre. Noblesse mince, qui n' est pas considérable. Mine bien mince, qui a l' air de peu de chôse. _ Tout cela n' est que du style familier. = Voy. MENU.

MINE


MINE, s. f. Ce mot a plusieurs sens, qui n' ont aucun raport l' un avec l' aûtre: 1°. L' air du visage. "Bone ou mauvaise, méchante mine. "Grande ou petite mine. "Mine fière, haute, noble, ou bâsse. "La mine d' un honête homme ou d' un vaurien. = Il se dit aussi, dans un sens aprochant, de la contenance que l' ont tient pour quelque dessein. Faire bone mine. _ Voy. JEU. = 2°. Lieu, où se forment les métaux. "Mine d' or, d' argent, de cuivre, de plomb, etc. _ En ce sens, il se dit des métaux encôre mélés avec la pierre de la mine. = 3°. Vaisseau qui sert à mesurer, et ce qui y est contenu. = 4°. Monaie anciène, valant cent drachmes. = 5°. Cavité souterraine, pratiquée sous un bastion, sous un rempart, sous un roc, pour le faire sauter en l' air par le moyen de la poudre à canon.
   Rem. Au premier et au dernier sens, mine entre dans quelques expressions figurées. = I. Faire mine, semblant de: "Voilà les beaux jours, qui font mine de revenir. SÉV. "Il fit mine d' en être content. _ Il se dit aussi sans régime. "Quelques mines qu' ils fissent, ils étaient honteux de ne pouvoir convenir. Anon. "Quelque mine qu' il fasse, il ne le faut pas tant craindre. Voit. "Molière l' emploie au pluriel et avec l' article.
   Pour peu que d' y songer vous nous fassiez les mines.
= Faire la mine et faire des mines ont diférentes significations. Le 1er signifie, témoigner qu' on est mécontent. "Qu' a-t' il donc à nous faire la mine. _ On dit, sans article, faire bone mine à quelqu' un, lui faire bon acueuil; lui faire triste ou grise mine, lui faire mauvais visage, mauvais acueuil. Le 2d signifie faire des grimaces. "Cette femme fait bien des mines, ou, des façons; "À~ quoi bon toutes ces mines? Faut-il faire tant de mines et de façons; ou des minauderies, des agaceries; "Avez-vous vu les mines qu' elle lui a faites? = Avoir la mine (l' air) de: "J' ai bien la mine d' en être pour mon argent. = II. Éventer la mine. (n°. 5°.) Découvrir un dessein et empêcher par là qu' il ne réussisse. "Soit que les Ministres de Charles eussent éventé la mine, etc. Moreau. = Cette expression figurée est tout au plus du style médiocre; et ne parait pas digne de la gravité et de la noblesse de l' Histoire.

MINER


MINER, v. act. 1°. Faire une mine (n°. 5°.) Miner un bastion. "Tous les dehors sont minés. = 2°. Creuser, caver: "l' eau mine la pierre. "Cette rivière mine peu-à-peu ses bords. = 3°. Consumer, détruire peu-à-peu. Cette maladie le mine. "Ses dettes le minent insensiblement.

MINÉRAL


MINÉRAL, ALE, adj. MINÉRAL, s. m. [2e é fer.] Minéral, subst. Corps solide, qu' on tire des mines, (n°. 2°.) L' or, l' argent, etc. Le vitriol, le sel-gemme, etc. "Il y a des remèdes qu' on tire des minéraux. = Il se dit plus proprement des corps qui se tirent des mines, et qui ne sont ni pierres, ni métaux, comme le vitriol, le soufre, l' antimoine. = Minéral, adj. Qui tient des minéraux. "Sel minéral. "Eaux minérales.

MINET


MINET, ETTE, subst. [Minè, nète: 2e. è moy.] Petit chat; petite chate. "Le minet est fort éveillé. "Une jolie petite minette, st. famil.~

MINEUR


MINEUR, s. m. 1°. Celui qui fouille la mine (n°. 2°.) pour en tirer la matière minérale. = 2°. Celui qui travaille à une mine (n°. 5°.) pour faire sauter quelque fortification. = Remarquez que, dans ce dernier sens, quoiqu' on comande plusieurs Mineurs pour cette opération, l' usage veut qu' on dise, atacher le Mineur à un bastion, et non pas Les Mineurs.

MINEUR


MINEUR, EûRE, adj. Il se dit de celui, celle qui n' a pas ateint l' âge, prescrit par les Lois, pour disposer de sa persone et de ses biens. "Enfant mineur; fille mineure. = S. m. Un mineur; faire le profit d' un mineur, du mineur = Mineur, plus petit. Les quatre Ordres mineurs; ou, absolument et substantivement, les quatre Mineurs; les quatre petits Ordres. Les Frères mineurs, les Cordeliers. "L' Asie mineure. "Excomunication mineure. = S. f. En Logique, la mineure est la 2de proposition d' un syllogisme.

MINIATûRE


MINIATûRE, s. f. [On pron. migna-tûre: mouillez le gn, 3e lon. 4e e muet.] Suivant l' Acad. sorte de peintûre, dans laquelle le Peintre emploie des couleurs délayées avec de l' eau: mais cette définition confond la miniatûre avec la détrempe. Suivant le Dict. de Trév. Sorte de peintûre délicate, qui se fait à petits points. On ajoute que la miniatûre se fait de simples couleurs très-fines, détrempées avec de l' eau et de la gomme sans huile. Suivant le Rich. Port. peintûre dont les couleurs se détrempent avec de l' eau gommée; qu' on fait en petit, qui veut être regardée de près, et qui est plus délicate que les autres peintûres. Cette définition vaut mieux que celle de l' Acad. mais celle de Trév. est encôre meilleure.

MINIèRE


MINIèRE, s. f. [Mi-niè-re: 2e è moy. 3e e muet.] Mine (n°. 2°.) lieu d' où se tirent les métaux et les minéraux. "Sur-Intendant des mines et minières de France. "Cela sort de la minière. _ On dit plus ordinairement mine.

MINIME


MINIME, adj. Qui est de couleur tannée, fort obscûre, telle que la couleur dont était autrefois l' habit des religieux Minimes. "Drap, serge minime. = Très-petit, (st. famil.) c' est un superlatif: il ne doit donc pas être employé avec des adverbes de comparaison. "Ce droit est, en général, si minime que, etc. Necker. C' est comme si l' on disait, si meilleur, si pire, etc. _ Les Dictionaires ne mettent pas minime en ce sens, et l' usage de ce mot est douteux.

MINISTèRE


MINISTèRE, s. masc. MINISTÉRIEL, ELLE, adj. MINISTRE, s. m. [3eè moy. et long. au 1er, é fermé aux deux suivans, e muet au dernier, 5e è moy. au 2d et au 3e èl, èle.] Ministre est celui dont on se sert dans l' exécution de quelque chôse. Il ne se dit que dans les chôses morales. "Il s' est fait le ministre des passions de ce Grand. "Les démons sont les ministres des vengences divines. "La guerre, la peste, la famine, ministres du courroux du Ciel. = Ministres d' État, ou simplement Ministres, ceux qui sont chargés par le choix du Prince des afaires principales du gouvernement, et qui ont entrée dans les Conseils. "Premier Ministre; principal Ministre. "Ministre et Secrétaire d' État. = Les Prédicans, chez les Calvinistes, et les Luthériens, s' apèlent Ministres. "Mr. le Ministre. La femme, la fille du Ministre. "Grand nombre de Ministres se convertirent dans cette occasion.
   MINISTèRE, 1°. emploi, charge, fonction. "Se bien aquiter de son ministère. "Cela n' est pas de mon ministère. = 2°. Le Gouvernement d' un Ministre d' État. "Le ministère du Cardinal de Richelieu a été illustre. "Sous le ministère du Cardinal de Fleuri. = 3°. Terme collectif: les Ministres. "Le Ministère, ou tout le Ministère étoit oposé à ce projet. = 4°. Le Ministère Public se dit, et des fonctions des Gens du Roi. "Cette afaire demande l' intervention du Ministère Public; et des Gens du Roi eux-mêmes. "La vengence des crimes est réservée au Ministère Public.
   MINISTÉRIEL, se dit avec chef, en parlant du Pape. Il est qualifié de chef ministériel de l' Église, dont J. C. est le chef essentiel. = On dit dans d' autres occasions, et dogmatiquement, pouvoir ministériel, puissance ministérielle.
   Rem. 1°. Ministre est toujours masculin, même quand il modifie un nom du genre féminin.
   Dois-je prendre pour juge une troupe insolente,
   D' un fier usurpateur ministre violente.
       Rac. Fr. Én.
J' aime à croire que Racine aurait changé ce vers, s' il eût retouché dans un âge plus mûr, cette pièce, composée dans sa jeunesse. Quoiqu' il en soit, je pense qu' on doit dire ministre violent, quoiqu' il se raporte à troupe. = 2°. Ministre est beau au figuré, et apliqué aux chôses inanimées.
   Ministre cependant de nos derniers suplices,
   La mort, sous un ciel pur, sembloit nous respecter.
       L. Rac.

MINOIS


MINOIS, s. m. [Mi-noâ: 2e lon.] Autrefois visage. Aujourd' hui il ne se dit que des femmes, et du visage d' une jeune persone plus jolie que belle. "Elle a un joli minois.
   C' est un de ces minois que l' on trouve par tout.
       Gresset.

MINORITÉ


MINORITÉ, s. fém. État d' une persone mineure, ou le tems pendant lequel elle est mineure. "Pendant sa minorité. Durant la minorité de Louis XIV. = On le dit quelquefois absolument et sans régime, en parlant de la minorité des Souverains. "Durant la dernière minorité. "Les minorités sont ordinairement des tems de troubles.

MINOT


MINOT, s. m. [On ne prononce point le t final.] Vaisseau qui contient la moitié d' une mine. (n°. 3°.) "Le minot de Paris contient un pied cube. = Ce qui est contenu dans le minot. "Un minot de sel, de blé, d' avoine, de charbon, de chaux, etc.

MINUIT


MINUIT, s. m. [On ne pron. point le t final.] Le milieu de la nuit. "Il est minuit. "Minuit est soné. "Sur le minuit; en plein minuit. "La Messe de minuit.

MINUTE


MINUTE, s. f. MINUTER, v. act. et n. [3e e muet au 1er, é fermé au second.] Minute est 1°. la 60e partie d' une heure, comme la seconde est la 60e partie d' une minute. "Il est trois heures et vingt minutes. = Petit espace de tems. "Il n' y a qu' une minute qu' il est sorti. = Comme on dit à tout instant, un Auteur moderne a cru pouvoir dire, à toute minute. "Leur nombre croissoit à toute minute. Hist. d' Ang. C' est aparemment une traduction trop litérale de l' Anglais. On voit aussi dans le Th. d' Éduc. "Les envieux se trahissent eux-mêmes à toute minute. _ Cette locution a l' air encôre précieux. = 2°. Brouillon d' un écrit. "Faire la minute d' une lettre. = 3°. L' original des actes, qui demeure chez les Notaires. Délivrer une grôsse en parchemin sur la minute. = C' est aussi l' original des Sentences, des Arrêts, des comptes qui demeurent au Greffe.
   MINUTER, au propre, faire la minute d' un écrit (n°. 2°.). "Minuter une lettre, un mémoire, une dépêche. = Au figuré, projeter. "Il minute son départ, sa retraite. = V. n. "Depuis long-tems il minutait de partir, de se retirer.

MINUTIE


MINUTIE, ou MINUCIE, s. f. MINUTIEUX, ou MINUCIEUX, EûSE, adj. [l' Anc. Trév. mettait les deux. L' Acad. ne met que le premier: il est plus conforme à l' usage, comme le second l' est davantage à la prononciation: minucî-e, cieû, cieû-ze, en vers, ci-eû, etc.] Minucie, bagatelle, chôse frivole et de peu de conséquence. "Il ne faut pas s' arrêter à des minucies. "Ce que vous relevez n' est qu' une minucie. = Minucieux, qui s' atache à des minucies, qui s' en ocupe, s' en afecte. "Cet homme est fort minucieux. "Les femmes sont minucieûses.
   Minutie, babiole, bagatelle, vétille, misère. (synon.) Le premier, désigne proprement le peu de conséquence d' une chôse; le 2d, le peu d' intérêt; le 3e, le peu de valeur; le 4e, la futilité; le dernier, la nullité d' une chôse qu' on doit compter pour rien. "Les petits esprits s' ocupent de minucies, les meilleurs esprits s' amusent quelquefois à des babioles; la frivolité de l' esprit done un grand prix aux bagatelles. Un esprit borné est fort en vétilles: un coeur trop sensible s' afecte des plus petites misères. Ext. des Synon. de M. l' Ab. Roubaud.

MI-PARTI


MI-PARTI, IE, adj. [C' est le participe du V. mi-partir, qui n' est pas en usage.] Composé de deux parties égales, ou à peu prês, mais diférentes. "Robe mi-partie d' écarlate et de velours noir. = Partagé par moitié. "Les avis sont mi-partis.

MIQUELETS


MIQUELETS, s. m. Bandits qui vivent dans les Pyrenées.

MIQUEMAC


MIQUEMAC. Voyez MICMAC. Suivant Richelet, le 2d est plus de la prôse, et le 1er de la poésie. On ne dit plus que le 2d.

MIRABELLE


MIRABELLE, s. f. [mirabèle: 3eè moy. dern. e muet.] Espèce de petite prune.

MIRACLE


MIRACLE, s. m. MIRACULEUX, EûSE, adj. MIRACULEûSEMENT, adv. [mirakle, ku-leû, leû-ze, leû-zeman: 4e lon. 5e e muet.] Miracle est un évènement surnaturel, éfet de la puissance divine. = Par exagération, chôse râre et extraordinaire. "C' est un miracle qu' il en ait réchapé. _ Ce qui est digne d' admiration: "C' est un miracle de l' art. _ En st. famil. "C' est un miracle de vous voir. _ Il faut crier au miracle, dit-on, quand quelqu' un a fait quelque chôse de fort oposé à son caractère. _ Il a fait des miracles ou des prodiges dans cette afaire, il s' y est signalé. "= À~ miracle, adv. (st. famil.) à merveille. "Cela est fait à miracle. "Il sait notre langue à miracle La Font. = On dit, d' une chôse três-aisée. "Cela se peut sans miracle.
   MIRACULEUX, qui s' est fait par miracle, qui tient du miracle. "Éfet miraculeux. "Chôse miraculeûse. = Par exagération, surprenant, merveilleux. "Ouvrage miraculeux; action miraculeûse. = Cet adj. est à la mode; mais il est souvent ridiculement placé à propôs de rien. "D' une chose qui est comune, vous dites simplement, elle est bonne: une Importante diroit: c' est miraculeux. COYER "Des bijous de toute espèce, des cabinets élégans, des équipages miraculeux. ID. Le même Auteur, imitant par dérision le langage précieux des petites-maîtresses, emploie miraculeûse substantivement. "L' une des deux (femmes de chambre) vous la tenez de la main de votre mari, après avoir renvoyé cette miraculeuse, qui fut formée à la Cour.
   MIRACULEûSEMENT, d' une manière miraculeûse, ou surprenante. "St. Pierre fut délivré miraculeûsement de ses liens. "Cet homme échapa miraculeûsement du naufrage.

MIRAUDER


MIRAUDER, v. act. [Mirodé.] Regarder avec atention. Elle (la Brinvilliers) monta seule et nus pieds sur l' échafaut, et fut un quart d' heure miraudée, dressée et redressée par le bourreau. Sév. _ L' Acad. ne met pas ce mot. Il est dans Trév. et dans le Rich. Port.

MIRE


MIRE, subst. fém. MIRER, verb. act. [1re lon. au 1er, et au 2d. devant l' e muet: il mire: il mirera, etc.] Mirer, viser. Mire, l' endroit du fusil ou du canon qui sert à mirer. "Mirer le but, le gibier. _ V. n.. "Il mire long-tems, et manque toujours. = Se mirer, se regarder dans quelque chose qui rend l' image. "Se mirer dans l' eau. "On se miroit dans l' émail des vâses de terre destinés au laitage. Marm. "On se mire dans cette vaisselle. = En st. prov. se mirer dans ses plumes, faire paraître une grande complaisance pour sa parûre ou pour sa beauté.

MIRMIDON


MIRMIDON, s. m. (st. famil. et plais. ou critique). Jeune homme de petite tâille et de peu de considération; ou, homme qui s' oublie, et qui veut le disputer à des persones qui sont au-dessus de lui. "Voilà un plaisant mirmidon.

MIROIR


MIROIR, s. m. [Mi-roar.] Glace de verre où l' on se mire. "Se regarder dans un miroir. S' ajuster au miroir. = Il y a aussi des miroirs de métal, concâves, convexes, etc. = Miroir ardent, miroir de verre ou de métal, d' une ou de plusieurs pièces, qui, étant exposé au soleil, en rassemble les rayons dans un point apelé foyer, de sorte qu' il brûle presqu' en un moment ce qui lui est présenté.
   MIROIR se dit au figuré. "Les yeux sont le miroir de l' âme; ses diverses afections se manifestent dans les yeux.
   Un discours trop sincère aisément nous outrage;
   Chacun, dans ce miroir, pense voir son visage.
       Boil.
On disait autrefois, c' est un miroir (un exemple) de vertu, depatience. Cette expression est hors de mode.

MIROITERIE


MIROITERIE, s. f. MIROITIER, s. m. [Mi-roa-teri-e, mi-roa-tié; 3e e muet au 1er, é fer. au 2e.] Miroiterie est le comerce des miroirs; Miroitier, le Marchand qui les acomode, les vend et en fait comerce.

MIS


MIS, MISE, adj. Voyez METTRE. "Elle étoit mise (habillée) simplement, mais avec noblesse. Créb. = Bien mis, mal mis. "Cette femme est toujours bien mise. Ces deux adverbes se mettent devant; les aûtres doivent marcher après. "Mis proprement.

MISANTHROPE


MISANTHROPE, s. m. MISANTHROPIE, s. f. [Mizan-trope; tropî-e; 2e lon.] Ils expriment, le 2d la haine des hommes; le 1er, celui qui les hait; et dans un sens moins odieux, ils se disent d' un homme bourru, chagrin et peu sociable. "C' est un misanthrope. "On n' a guere vu de misanthropie pareille à la sienne.
   Rem. M. Corbinelli disait misanthropisme; Mde. de Sévigné, tantôt misanthropie, tantôt misanthroperie. "J' oubliois de vous dire, que le titre de mon livre est le misanthropisme; mais Mde. votre mère soutient qu' il faut, la misanthropie. Corbin. "Dites-moi s' il (M. de Vardes) est bien désolé de la longueur de son exil, ou si la philosophie et un peu de misanthroperie soutiènent son coeur contre les coups de l' amour et de la fortune. Sév. = Misanthropie a prévalu.

MISCELLANÉE


MISCELLANÉE, s. m. Latinisme, qui vieillit. On dit plutôt mélanges. Recueuil de diférens ouvrages de science, de littératûre~. _ L' Acad. met miscellanée sans remarque.

MISCIBLE


MISCIBLE, adj. Terme de Physique. Qui a la propriété de se méler avec... "L' huile n' est pas miscible avec l' eau. "Plus les fluides sont miscibles par analogie, moins ils montrent d' irritation et de fracâs, en s' unissant. L' Abé Nollet.

MISE


MISE, s. f. [Mîze; 1re lon. 2e e muet.] 1°. Ce qu' on met au jeu ou dans une société de comerce. "Sa mise est de cinquante louis, de cent mille francs. = 2°. Enchère. "La dernière mise est à tant. "Ma mise a couvert la siène. = 3°. Au Palais, mise en possession, formalités pour mettre en possession. = 4°. Être ou n' être pas de mise; avoir, ou n' avoir pas cours. "Argent de mise; ces espèces ne sont plus de mise. = Fig "Cet homme est de mise, il est présentable, recevable. "Cette raison, cette preûve, cette excûse n' est pas de mise, n' est pas admissible ou valable et recevable.

MISÉRABLE


MISÉRABLE, adj. MISÉRABLEMENT, adv. MISèRE, s. f. [Mizérable, rableman, mizère; 2e é fer. aux deux prem. è moy. et long au 3e.] Misère, exprime un état mal--heureux, une indigence extrême. Misérable, qui est dans la misère, dans le malheur. Misérablement, d' une manière misérable. "Il ou elle est au comble la misère, dans de la dernière misère. "Il est mort de faim et de misère; de pûre misère. "Cette famille est bien misérable. = S. m. Un pauvre misérable. "Assister, secourir les misérables. "Il vit; il est mort misérablement.
   I. Misère, outre son sens propre, a d' autres significations. 1°. Peine, dificulté. "C' est une misère d' avoir afaire à cet Avocat, il est trop employé. "C' est une grande misère que les procês. = 2°. Faiblesse et imperfection de l' homme. "C' est une étrange misère que de se laisser emporter à ses passions. "La misère de l' homme est bien grande. "Seigneur, ayez pitié de notre misère. "Dans le monde, tout n' est que misère et vanité. = 3°. En style proverb. Collier de misère, travail assidu. "Cette charge est pour lui le collier de misère. "Après un repôs de quelques jours, je vais reprendre le collier de misère.
   II. Misérable signifie quelquefois, 1°. Funeste. "Il a fait une fin misérable, il est mort en impie, en libertin endurci. = 2°. Méchant. "Il faut être bien misérable, pour faire une action si honteûse. = 3°. Mauvais en son genre. "Discours, pièce, livre, Auteur misérable. = 4°. Misérable suit ou précède le substantif, au choix de l' Orateur ou du Poète. "Misérables jouets de l' erreur, nous nous livrons en aveugles au moindre espoir, qui nous abûse et nous flate. Jérus. Délivrée.
   C' est moi qui brise ses faux Dieux,
   Misérables jouets des vents et des années.       Rouss.
= Misérable. Voyez Malheureux.

MISÉRICORDE


MISÉRICORDE, s. f. MISÉRICORDIEUX, EûSE, adj. MISÉRICORDIEûSEMENT, adv. [Mizéricorde, di-eû, eûze, eûzeman: 2eé fer. 6e lon. 7e e muet.] Miséricorde, est 1°. en parlant des hommes, vertu qui porte à avoir compassion des misères d' autrui et à les soulager. "Pratiquer les oeuvres de miséricorde. "Exercer la miséricorde envers les paûvres. "Homme sans miséricorde. = 2°. En parlant de Dieu, bonté par laquelle Dieu pardonne aux pécheurs repentans. "La miséricorde divine. "Les entrâilles de la divine miséricorde; expression consacrée, et tirée du Cantique de Zacharie. Per viscera misercordi‘ Die nostri. "Il faut espérer que Dieu nous fera miséricorde. = 3°. Grâce, pardon. "Crier, demander, faire miséricorde, (sans article.) Implorer la miséricorde du Prince. "Il ne leur a fait aucune miséricorde. = 4°. En style famil. "Être à la miséricorde de quelqu' un, dépendre entièrement de lui. _ Se remettre, s' abandonner à sa miséricorde, à sa merci, à sa discrétion.
   Miséricorde! Interjection qui marque une extrême surprise.
   Miséricorde! où fuir, où vous sauver?
       Rouss.
Crier miséricorde, se dit d' un homme qui souffre et qui crie les hauts cris. _ * En Provence on dit, crier Seigneur Dieu miséricorde. _ On crie à l' aide, miséricorde, quand on est batu et outragé et qu' on demande du secours.
   Le Proverbe dit; à tout péché miséricorde; et c' est ce qu' on dit sur-tout à ceux qu' on veut porter à pardoner.
   5°. Miséricorde, petite saillie de bois atachée sous le siège d' une stale, sur laquelle on est à demi assis, lorsque le siège est levé.
   Miséricordieux, qui est enclin à faire miséricorde. "Dieu est tout miséricordieux. "Heureux sont les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde. Dans cette dernière phrâse, tirée de l' Évangile, il est employé substantivement. Hors de là, il est toujours adjectif, et ne s' emploie absolument et sans régime, qu' en parlant de Dieu, de J. C. _ On ne dit pas d' un homme, il est miséricordieux, et d' une femme, elle est miséricordieûse; c' est un homme fort miséricordieux, une femme très-miséricordieûse: c. à. d. charitable. Il faut dire, miséricordieux envers les paûvres, miséricordieûse envers les malheureux. _ Bossuet dit de J. C. secourable aux malades... miséricordieux envers les pécheurs. Hist. Univ.
   Miséricordieûsement, avec miséricorde. "Dieu reçoit miséricordieûsement le pécheur qui revient sincèrement à lui.

MISSEL


MISSEL, s. m. [2e è moy.] Livre, qui contient les prières, le canon et les cérémonies de la Messe. = Quelques-uns écrivent et prononcent messel: l' étymologie est pour eux, mais l' usage leur est contraire.

MISSION


MISSION, s. f. [Mi-cion; en vers ci-on.] Envoi et pouvoir qu' on done à quelqu' un de faire quelque chose. "Il a reçu sa mission: "Il parle sans mission. = 2°. Il se dit sur--tout des chôses qui regardent la Religion. "La mission des Apôtres vient de J. C. même. "Ils ont prouvé leur mission par de grands et nombreux miracles. = 3°. Mission se dit d' un nombre de Prêtres, employés pour la conversion des infidèles, ou l' instruction des fidèles. "On envoya une mission dans les Indes. "On fait des missions en France, en Italie, etc. "La mission a fait de grands fruits dans cette ville. "Il a fait la mission; on l' a envoyé en mission. = Mission, Envoi. Voyez ENVOI.

MISSIONAIRE


MISSIONAIRE, s. m. [Mi-cio-nère; 3e è moy. et long, 4e e muet.] Celui qui est employé aux missions. (n°. 2°. et 3°.) "Les Missionaires ont fait de grands fruits dans les Indes.

MISSIVE


MISSIVE, adj. et subst. f. [Micîve; 2e lon. 3e e muet.] Lettre missive, qui est écrite pour être envoyée à quelqu' un. = Subst. "Il m' a écrit une longue missive. _ On ne l' emploie que dans le style plaisant ou râilleur.

MITAINE


MITAINE, s. f. MITON, s. m. [Mitène, Miton; 2e è moy. au 1er, 3e e muet.] Mitaine, au singulier, grôs gant, où la main entre toute entière, sans qu' il y ait de séparation pour les doigts, excepté pour le pouce. On dit d' un homme dificile à manier, qu' il faut le prendre avec des mitaines. = Mitaines au plur. petits gants de femmes, qui ne coûvrent que le dessus des doigts. = Miton, gant qui ne couvre que l' avant-brâs jusqu' au poignet. = On dit, proverbialement: on ne prend pas des chats comme nous sans mitaine, on ne nous ataque pas impunément. = Onguent miton mitaine; remède qui n' a ni force ni vertu; moyen qui ne remédie à rien.

MITE


MITE, s. f. Petit insecte qui est presque imperceptible.

MITIGATION


MITIGATION, s. f. MITIGER, v. act. [Mitiga-cion, gé; 3e é fer. au 2d.] Ils se disent des adoucissemens aportés à une règle trop austère. "Cet Ordre auroit besoin de mitigation. "Cela a besoin d' être mitigé, étant d' une pratique trop dificile.

MITON


MITON: voyez MITAINE.

MITONER


MITONER, v. neutre et act. Au propre, v. neutre. Il se dit du pain qu' on fait tremper dans du bouillon. "Le potage mitone. "Faire ou laisser mitoner la soupe. _ V. réc. "La soupe se mitone. = V. act. Au fig. Dorloter. "Il aime à se mitoner et qu' on le mitone. = Cajoler, ménager. "Elle mitone son oncle, pour qu' il la fasse son héritière. = Mitoner une afaire, en préparer doucement le succês. "Je cache cette pensée, je la mitone. Sév. _ Tout cela est du style familier.

MITOYEN


MITOYEN, ENNE ou ÈNE, adj. [Mi--toa-ien, iène; 3e è moyen au 2d: ien n' a pas le son d' ian au 1er. _ Richelet écrit mitoien, mais cette ortographe est contraire à la prononciation.] Au propre, il ne se dit qu' avec mur. Un mur mitoyen est celui qui sépare deux héritages, deux maisons. = Au figur. avis mitoyen, qui s' éloigne des extrémités de deux avis oposés, et qui tient un peu de l' un et de l' aûtre. _ Parti mitoyen a à peu près le même sens. _ Dents mitoyènes d' un cheval, celles qui sont entre les pinces et les coins.

MITRâILLE


MITRâILLE, s. f. [Mitrâ-glie, et non pas mitréglie: ai n' y a pas le son de l' é, mais l' a y conserve son propre son; 2e lon. mouillez les ll; 3e e muet.] 1°. Toute sorte de petite marchandise de clincâillerie. = 2°. Toute sorte de vieux morceaux de cuivre, de ferrâilles, dont on charge quelquefois le canon, sur-tout sur les vaisseaux. "Canon chargé de mitrâille ou à mitrâille: le 2d est le plus usité.

MITRE


MITRE, s. f. MITRÉ, ÉE, adj. [2e e muet au 1er, é fer. au 2d et 3e.] En termes d' Antiquaire, mitre est une espèce de coifure des Dames Romaines, qui l' avaient empruntée des Grecques. = Parmi nous, ornement de tête, que les Évêques, les Abés Réguliers, et dans quelques Chapitres, ou les Chefs, ou tous les Chanoines portent à l' Église quand ils oficient. "Oficier avec la mitre et la crôsse; ou simplement, avec la mitre. = Mitré se dit des Abés et des Abayes. Abé crossé et mitré. Abaye crossée et mitrée.

MITRON


MITRON, s. m. Terme populaire et de mépris. Garçon Boulanger.

MIXTE


MIXTE, adj. MIXTION, s. f. MIXTIONER, v. act. [Mikste, miks-tion, et non pas cion, miks-tio-né.] Mixte, qui est mélangé et composé de chôses de diférente natûre; corps mixte. = S. m. "Les parties d' un mixte. "Réduire les mixtes à leurs principes. = En Droit, causes mixtes, qui sont en même tems de la compétence de Juge Royal et du Juge Éclésiatique, ou qui sont en partie personelles et en partie réelles. = Mixtion, mélange de plusieurs drogues dans un liquide, pour la composition d' un remède. Mixtioner, méler, faire une mixtion. "Mixtioner du vin, le frelater. Mixtioner un breuvage. _ Il se prend ordinairement en mauvaise part.

MOBILE


MOBILE, adj. et subst. MOBILITÉ, s. f. [Dern. e muet au 1er, e fer. au dern.] Mobile, adj. Au propre, qui se meut, ou qui peut être mu. "Il y a des corps plus mobiles les uns que les aûtres. Mobilité, facilité à être mu: "La moblité des corps sphériques. Fig. "L' inconstance, ou pour parler plus exactement, l' extrême mobilité de son caractère empêchoit qu' on ne fût tenté de s' atacher à lui, et gâtoit seule les excellentes qualités qu' il avoit reçues de la natûre. L' Abé Garnier, (Hist. de Fr.) parlant du Roi de Navarre, père d' Henri IV. = Mobile, s. m. En méchanique, le corps qui est mu. "Quand un mobile est en moûvement. _ En Astronomie, dans les vieux systêmes, ce qui meut; le premier mobile. = Fig. Homme qui done le branle à une afaire. "Il étoit le premier mobile de cette conjuration. "L' intérêt est le mobile de la plupart des hommes.
   Fêtes Mobiles sont celles qui, fixées à un même jour de la semaine, ne le sont pas à un même jour du mois, comme Pâques, l' Ascension, la Pentecôte, etc.
   REM. Mobilité se dit fig. de la physionomie, en parlant sur-tout des Acteurs. "Sa physionomie a de la mobilité, de l' expression. Mercure. C' est un néologisme heureux.

MOBILIER


MOBILIER, adj. et subst. masc. [Mobi--lié; 3e é fer.] En termes de Pratique, ce qui tient de la natûre des meubles. "Biens, éfets mobiliers. = S. m. Terme collectif, qui comprend tous les meubles. "Il a hérité d' un grôs mobilier.

MODE


MODE, s. m. et f. Il est masc. en Philosophie; manière d' être. "Les modes d' un corps, ce qui le modifie; et en Musique, le ton dans lequel une pièce de musique est composée: le mode majeur, le mode mineur, etc.; en Gramaire, moeuf ou manière de conjuguer les verbes: le mode indicatif, subjonctif ou conjonctif, etc. = Il est fém. quand il signifie usage, à l' égard des chôses sur-tout qui dépendent du goût et du caprice des hommes. "Tout est soumis à l' empire de la mode. "Mode ridicule, extravagante. "Inventeur des modes. "Se mettre à la mode, fort à la mode. "La mode en est pâssée; cela est hors de mode, est pâssé de mode. "Insensiblement ces exercices, devenus moins nécessaires, passèrent de mode. Hénaut.
   REM. Mode régit de devant les noms et les verbes. "Les persones raisonnables ne se trouvent nulle part en assez grande quantité, pour y faire une mode de vertu et de droitûre. Font. "Les péchés mêmes des Grands, deviènent les modes des peuples. Fléchier. "On est ignorant dans un siècle, mais la mode d' être savant peut venir. On est intéressé, mais la mode d' être désintéressé ne viendra point. Fonten. "C' est domage que la mode ne soit pas encôre venue d' être en deux endroits: vous seriez bien utile ici à votre famille. Sév.
   Être à la mode, en crédit, en vogue.
   Un Poète à la cour fut jadis à la mode,
   Mais des foux d' aujourd' hui c' est le plus incomode.
       Boileau.
* Le Traducteur du Voy. d' Anson dit mal-à-propos en mode. "Rien n' est plus en mode dans ce pays (la Chine) que des prohibitions de toute espèce. = À~ ma mode, à sa mode, adv. À~ ma manière, suivant son goût. "Vous êtes né comme les enfans des Rois, qui veulent que tout se fasse à leur mode. Télém.
   Je sais vivre à ma mode, et rien ne m' importune.
       Boileau.
= * On a dit anciènement, de mode, pour de sorte que.

MODèLE


MODèLE, s. m. MODÉLER, v. act. [2e è moy. au 1er, é fer. au 2d.] Modèle est, au propre, l' exemplaire ou patron, d' aprês lequel les Sculpteurs et autres Ouvriers exécutent leurs ouvrages. = Dans un sens plus général, il se dit de tous les objets d' imitation. "La Natûre est le modèle des Arts. = En particulier, un homme d' aprês lequel les Artistes dessinent ou peignent. Poser le modèle, c' est le mettre dans l' atitude qu' on veut représenter. = Au figuré, exemplaire qu' il faut suivre. "Les Anciens sont nos modèles. "Formez-vous sur ces modèles... "Ils doivent vous servir de modèles. _ "La vie de cet homme est un modèle de vertu. "Cette femme est un modèle de chasteté, etc. _ Voyez COPIE et RèGLE.
   MODÉLER ne se dit qu' en sculptûre: c' est imiter quelque objet en terre molle, en plâtre ou en cire; ou, faire la représentation d' un grand ouvrage qu' on projète = Se modéler sur est une expression nouvelle. Elle n' a dabord été employée que par les enfans perdus de la litérature. Mais depuis peu, de grands écrivains s' en sont servi. "La matière qui sert à son acroissement, se modèle et s' assimile au total. Bufon. "En France, toutes les classes se modèlent sur la première. Linguet. "Ce fut sur cette erreur de fait, que la législation se modéla. Id. "Le gouvernement d' un seul, modélé sur celui du père de famille, fut le premier dont les hommes se formèrent une idée. Mor. "On a vu les plus grands Maîtres avouer, avec ingénuité, qu' ils n' aprochaient de la perfection qu' autant qu' ils se modéloient sur les ouvrages des Grecs. Ling. = L' Acad. ne l' a pas encôre admis dans son Diction. Elle ne dit, en ce sens, que, se mouler.

MODÉRATEUR


MODÉRATEUR, TRICE, s. m. et fém. MODÉRATION, s. f. MODÉRÉMENT, adv. MODÉRER, v. act. [Modéra-teur, trice, ration, réman, ré: 2eé fer. 3e é fer. aussi au 4e et 5e.] = Modérateur, trice; qui a la direction de. "Modérateur de la jeunesse. Acad. "Dieu est le modérateur de l' Univers. = Il ne se dit que dans le discours soutenu; et il y aurait de la pédanterie à s' en servir habituellement dans la conversation.
   MODÉRATION, 1°. vertu qui porte à garder une sage mesûre en toutes chôses. "Se conduire avec modération. "User de modération envers... "User des alimens avec modération, etc. = 2°. C' est aussi, diminution du prix fixé; rabais. "la modération d' une taxe. "On n' a voulu lui acorder aucune modération.
   MODÉRÉMENT, sans excês, avec modération (n°. 1°.) "Il s' est comporté modérément dans cette conjonctûre. "Boire, manger modérément. "Le vin peut être salutaire; mais il faut en user modérément.
   MODÉRER, adoucir, tempérer. "Modérer sa colère, ses passions, ses desirs, son ambition, son ardeur, etc. _ "Cette taxe est trop forte, il la faut modérer. = Se modérer, s' adoucir: "Le tems s' est modéré; le chaud comence à se modérer. _ En parlant des persones, se posséder, se contenir. "Peu de gens savent se modérer dans la bone fortune.
   MODÉRÉ, ÉE, adj. Sage, retenu. "Esprit modéré; humeur modérée. "Jeune homme bien modéré. _ Et en parlant des chôses, éloigné de tout excês. "Feu modéré, chaleur modérée; exercice modéré.

MODERNE


MODERNE, adj. [2e ê ouv. 3e e muet] Nouveau, récent. Il est oposé à Ancien et Antique. Voy. ANCIEN. "Auteurs, Philosophes, Peintres, Architectes modernes. "Ouvrages, médailles modernes. = À~ la moderne, adv. "Bâtir à la moderne. = S. m. "Les Anciens et les modernes: les Auteurs anciens et les modernes.

MODERNER


*MODERNER, v. act. Mot hazardé par l' Auteur des Trois Siècles de la Litératûre. "L' Andrienne de Baron, l' Esprit follet d' Auteroche, le Menteur de Corneille, doivent à sa plume (de M. Collet) une touche qui les a réparés et modernés, si l' on peut se servir de ce terme. _ Le correctif était nécessaire; et il ne sufira peut-être pas dans l' opinion de plusieurs. J' aimerais assez ce mot; mais il faut atendre ce que l' usage en décidera.

MODèSTE


MODèSTE, adj. MODèSTEMENT, adv. MODèSTIE, s. fém. [2eè moy. 3e e muet aux 2 premiers.] Ils expriment une certaine retenûe dans la manière de se conduire et de parler de soi. "Homme, femme, modeste. "Parler, marcher, s' habiller modestement, avec modestie. "Se tenir dans la modestie. "Se comporter avec modestie. "On n' ose le louer en face, pour ne pas blesser sa modestie. = Il se prend quelquefois pour pudeur. "La modestie, dans les femmes, est l' anonce de toutes les vertus: l' immodestie semble suposer tous les vices. Marin. "La modestie est l' ornement et la plus belle parûre d' une jeune persone. "Paroles qui blessent, qui choquent la modestie. _ Voy HONTE.
   Rem. 1°. Modestie n' a pas ordinairement de pluriel; et quoiqu' on parle à plusieurs persones, on dit, votre modestie, et non pas vos modesties. _ Le pluriel fait pourtant fort bien dans la phrâse suivante. "C' étoit là de ces modesties que la crainte inspire. Boss. Il n' est pas si bon dans cette aûtre phrâse du même Auteur. "Au milieu de ces modesties de Luther, c. à. d. de ces discours modestes. _ Modestie, dans ce dernier sens, et dans ce nombre, n' est pas autorisé par l' usage. = 2°. Modeste suit ou précède le substantif. "Air, visage modeste. Maintien, habit modeste. Manières modestes, etc. "Ses modestes desirs. Rouss. _ On pourrait aussi dire, modeste maintien, modeste contenance; mais modeste air, modeste habit ne seraient pas suportables.

MODICITÉ


MODICITÉ, s. f. MODIQUE, adj. MODIQUEMENT, adv. [3e e muet au 2d et au 3e; modike, keman.] Modicité, petite quantité. Modique, qui est de peu de valeur. Modiquement, avec modicité. "Modicité du prix, du revenu, de la dépense. "Somme, taxe, pension modique. "Payer modiquement. _ L' usage de ces mots est borné à de pareils objets.
   Rem. Modicité ne doit pas être ancien dans la langue, puisque La Touche observe, comme une chose digne de remarque, que ce mot se trouve dans le Dict. de l' Acad. "La modicité du revenu.

MODIFICATION


MODIFICATION, s. f. MODIFIER, v. act. [Modifika-cion, fié: dern. é fer. au 2d.] Ils expriment, 1°. l' action d' adoucir, de modérer, de restreindre, en parlant des dispositions d' un Édit, des clauses d' un contrat. "Modifier des articles: y aporter quelque modification. = 2°. En termes didactiques, l' action de doner un mode, une manière d' être à une substance. "Les corps sont susceptibles de diverses modifications; d' être modifiés de bien des manières.
   On apèle, en Gramaire, modificatifs; des noms qui ne servent ordinairement qu' à modifier le nom et le verbe: "Les adverbes sont des modificatifs.

MODIQUE


MODIQUE, voy. MODICITÉ

MODULATION


MODULATION, s. f. [Tion a le son de cion, en vers ci-on.] Suite de tons, qui forment un chant, suivant les règles du Mode, dans lequel ce chant est composé. "La modulation de cet air est agréable, ou bizârre. M. Linguet a employé moduler. "Ce n' est pas un Rhéteur qui module des phrâses et des mensonges; c' est, etc. C' est un néologisme. = Moduler est une expression reçûe en Musique.

MOELLE


MOELLE, s. f. MOELLEUX, EûSE, adj. [Moa-le, leû, leû-ze: 2ee muet au 1er, lon. aux aûtres.] La Monnoie a fort bien remarqué qu' on avait tort d' écrire moëlle, moëlleux avec deux points sur l' e, comme si c' étaient des mots de trois syllabes. _ Quelques-uns écrivent et d' autres prononcent mouelle, mouelleux, ce qui ne vaut rien non plus. = Moelle se dit, et de cette substance molle et grâsse, qui est contenûe dans la concavité des ôs: "sucer la moelle d' un ôs. "Le froid m' a pénétré jusqu' à la moelle des ôs; et du dedans de certains arbres, comme le figuier, le sureau; et d' un bâton de câsse. "Moelle de sureau, de câsse. = Moelleux; rempli de moelle. "Un ôs moelleux; de la câsse bien moelleûse.
   Rem. On dit, figurément, la moelle des ôs, pour, le fond de l' âme. "Les hommes, à un certain âge, ne peuvent presque plus se plier eux-mêmes contre certaines habitudes qui ont vieilli avec eux, et qui sont entrées jusque dans la moelle de leurs ôs. Télém. _ Cette expression ne parait pas fort noble, et elle semble peu digne d' un poème, même en prôse. = La moelle d' un livre; ce qu' il y a de meilleur. = Moelleux se dit aussi au figuré. Discours moelleux, plein de sens et de chôses. Étofe moelleûse, qui a du corps, et qui est douce quand on la manie. Vin moelleux, qui flate agréablement le goût, et qui a pourtant du corps. Voix moelleûse, pleine et douce. = En Peintûre, s. m. "le moelleux dans le dessin, c' est la douceur dans les contours: le moelleux dans la couleur; coloris agréable: le moelleux dans la touche; touche fondue. _ L' Ab. Coyer dit, en imitation: "L' Amiral mit du moelleux dans son ton. ÃŽle Frivole. Cela ne peut être bon que dans le style badin ou critique. Il y aurait du précieux à le dire sérieûsement.

MOELLON


MOELLON, ou MOELON, ou MOILON, s. m. [Moa-lon = Le troisième serait celui qui me plairait le plus. On écrit aujourd' hui coife, boîte, au lieu de coeffe, boete. Pourquoi ne pas écrire aussi moilon au lieu de moellon.] Sorte de pierre dont on bâtit les murs de clôtûre, et dont on fait un remplage aux murs de pierre de tâille.

MOEURS


MOEURS, s. f. pl. [Meûrs, monos. long: l' o n' est dans ce mot que pour l' étymologie, mores.] Il se prend, 1°. pour les habitudes du bien ou du mal. "Bonnes ou mauvaises moeurs. "La science, la doctrine des moeurs. "Former les moeurs des jeunes gens. "Régler ses moeurs. "Rien ne corromt plus les moeurs que la mauvaise compagnie. = Il se prend pour les inclinations, les coutumes, les lois particulières d' une Nation. "Chaque Peuple a ses moeurs. "Cette Nation a des moeurs bien diférentes des nôtres. = 3°. En Poésie et en Peintûre, on apèle les moeurs, ce qui regarde les coutumes des Peuples, et les caractères des personages. Ainsi l' on dit, que les moeurs sont ou ne sont pas bien gardées, ou observées dans un Poème, dans un tableau.

MOGOL


MOGOL, s. m. On dit, le Grand Mogol pour l' Emper. du Mogol. Du tems de Voit. on disait Mogor. "La vigne du Grand Mogor seroit payée de la moindre de vos paroles.

MOI


MOI, pron. [Moa, monos.] Il n' est d' usage qu' au génitif et au datif; de moi, à moi. Au nominatif, on dit je; à l' acusat. me, et au datif aussi, quand il précède le verbe. "Il m' a doné; il m' est resté; il me fit présent. = 1°. Moi sert quelquefois pour le nominatif et pour l' acusatif, comme dans ces phrâses: nous sommes venus moi et mon frère: on nous a renvoyés moi et mon ami. (Voy. NOUS) Mais, hors de là, ce serait une faûte de se servir de moi; plus grande encôre de le joindre à je, et de dire, moi je ne veux pas; comme disent les enfans, à qui l' on répond, moi et je sont deux bêtes. _ Cependant, quand moi est après le verbe, ou qu' il est joint à même, il peut acompagner je: "Je vous dis moi: "Moi-même je l' ai vu: "J' y veux aller moi-même. = Après la conjoncion et, il peut aussi être le sujet (nominatif) d' un membre de phrâse. "Votre pauvre frère m' écrit, et moi à lui. Sév. On sous-entend, je lui écris. Cette conjonction et fait que moi je n' est pas ridicule, comme il l' est ordinairement. "Ils sont partis; et moi je n' ai pu le faire. = Moi se met quelquefois même dans le discours familier, à la fin de la phrâse, quand on se défend de quelque chôse qu' on nous reproche, ou qu' on nous atribûe: "Vous prétendez donc que, etc. je ne prétends pas cela moi. J' aime à rire moi; et toutes ces mines alongées m' afligent. MARIN, Jul. _ Dans ces ocasions, il peut aussi marcher à la tête. "Qui résistera à ce penchant, si l' on nous ôte le frein des moeurs? Moi, je n' ôte rien, dit Verglan; mais je veux que chacun puisse vivre à sa guise. Marm. = 2°. On a depuis long-tems agité la question, s' il faut dire: si c' était moi qui eusse fait, ou qui eût fait. La règle et Vaug. étaient pour le premier; l' usage et Th. Corn. paraissaient être pour le second. Il semble, à la vérité, qu' avec moi le verbe doit être à la première persone; mais l' usage ayant prévalu pour faire ce solécisme, il doit l' emporter sur la règle. On est acoutumé d' entendre dire, si c' était moi, qui l' eût fait; si c' étoit moi qui préchât, et non pas qui l' eusse fait, qui préchasse. Cette dernière manière choque par défaut d' habitude. _ Cet usage n' est pas si général, et beaucoup de persones qui se piquent de bien parler disent: qui eusse fait, qui eusse dit. MARIN = 3°. Le génitif de moi n' est guère usité qu' acompagné d' un autre génitif: "C' est le sentiment de mon frère et de moi; d' elle comme de moi. L' avis de Mr. et de moi, est, etc.
   Il peut, avec raison, implacable, irrité,
   De l' Empire et de moi combler l' adversité.
       Tibère par M. Fallet.
L' adversité de moi ne vaudrait rien en prôse; mais en vers, par l' inversion et l' association du substantif, de l' Empire, on y fait moins d' atention. = Hors de là, on se sert du pron. possessif, mon, ma, mes. On dit, ma maison, et non pas la maison de moi. Le logis d' un tel et le mien, et non pas de moi. Dans les phrâses mêmes, citées plus haut, le mien vaut mieux que de moi. "C' est le sentiment de mon frère et le mien, etc. = Les exceptions de cette règle sont les phrâses suivantes: pour l' amour de moi; à cause de moi, en dépit de moi, au dedans de moi, au devant de moi, etc. Ce serait mal parler que de dire, pour mon amour, pour ma caûse; à mon dedans, à mon devant, etc. = 4°. Outre me et à moi, il a un troisième datif, qui est moi; mais celui-ci suit toujours le verbe, au lieu que me le précède toujours. "Donez-moi; il me dona. De plus, ce moi n' a d' usage qu' à l' impératif: dites-moi, répondez-moi, etc. = À~ moi se met toujours aussi aprês le verbe: pensez à moi, adressez-vous à moi; ce livre est à moi. Il se met avec tous les modes et dans tous les tems. = Quand un verbe, qui régit le datif, est acompagné de la négative ne, et suivi d' un que, on se sert d' à moi, et non de me. Ainsi, quoiqu' on dise, cela me convient, il faut pourtant dire, cela ne convient qu' à moi. = Aprês les verbes réciproques, on met aussi à moi. "Il m' a adressé un paquet: il s' est adressé à moi. = 5°. Outre l' acusatif me, ce pronom a aussi moi; mais me se met toujours devant le verbe, et il s' étend à tous les modes et à tous les tems, excepté l' impératif: il m' aime, il m' a aimé, il m' aimera. Au contraire, moi suit toujours le verbe, ou immédiatement, quand ce verbe est à l' impératif: instruisez-moi; ou à la suite d' un aûtre substantif, lorsque le verbe est à un aûtre mode: "Il est venu me voir, mon frère et moi. _ Il y a des ocasions où me se met après le verbe et se joint à l' impératif, comme quand on dit: acusez m' en, si vous l' osez; délivrez m' en, etc. = 5°. L' ablatif de ce pronom est entièrement semblable au génitif; mais au lieu que de moi est très-peu d' usage au second câs; il en a, au contraire, un très-grand au dernier. "Il tient cela de moi; il est éloigné de moi; il a eu soin de moi, etc. etc. Regn. = Ces règles sont comunes à tous les pronoms personels tu, il, elle, nous, vous ils, elles.
   De moi, pour moi, quant à moi, adv. Le 1er était fort usité aûtrefois: Malherbe s' en sert souvent et Ménage le croyait plus propre à la Poésie; et pour moi à la prôse. Aujourd' hui, et depuis long-tems, de moi ne se dit plus, et l' on se sert toujours de pour moi, aussi bien dans les vers comme dans la prôse. Corneille l' a employé dans Cinna.
   Pour moi, soit que le ciel me soit dur ou propice.
Voyez DE, Rem. * = Quant à moi a essuyé bien des condamnations de Vaugelas, du P. Bouhours, de Ménage, de Th. Corneille. Il n' avait pour lui que le Poète Chapelain, meilleur Gramairien que Poète. Cependant il s' est maintenu dans le discours familier. Pour moi est de tous les styles. = Se mettre sur son quant à moi, prendre un air fier, est du style critique et moqueur. = À~ moi! exclamation pour faire venir promptement quelqu' un auprès de soi. À~ moi, soldats! = De vous à moi, façon de parler, qui équivaut à celle-ci, je vous le dis en confiance. "De vous à moi, je ne crois pas que la chôse réussisse.

MOIGNON


MOIGNON, s. m. [Moag-non: mouillez le g.] Petite partie qui reste d' un brâs, d' une jambe, de la cuisse, quand elle a été coupée.

MOINDRE


MOINDRE, adj. [Moein-dre: 1re lon. 2e e muet.] 1°. C' est le comparatif de petit, et il signifie plus petit. "Cette somme est moindre que l' aûtre. = Il s' emploie quelquefois absolument sans la conjonction que. "Votre douleur en sera moindre. = 2°. Le moindre en est le superlatif. "C' est la moindre satisfaction qu' on lui doive. "Au moindre bruit il s' éveille. = 3°. Avec la négative, il signifie aucun. "Je n' en ai pas la moindre apréhension.

MOINE


MOINE, s. m. [Moa-ne.] C' est, proprement un Religieux qui vit entièrement séparé du monde, comme les Chartreux, les anciens Bénédictins et Bernardins. On l' a dit ensuite par mépris, des Religieux mendians et même des Clercs et des Chanoines Réguliers. Car ce nom respectable, et autrefois si respecté, est devenu, peu s' en faut, une injûre; et c' est insulter les Religieux que de le leur doner. = Moine bourru, prétendu fantôme, dont les nourrices et les bones gens font peur aux petits enfans. De-là on apèle moine bourru (style fam.) un homme de mauvaise humeur. Voyez ABBÉ et HABIT.
   MOINE est aussi le nom qu' on a doné à une petite caisse, doublée de fer blanc, ouverte excepté par-dessus et par-dessous, où l' on met un réchaud pour chauffer le lit. Ce nom lui vient de ce que les Moines, qui n' ont pas de domestiques, ou ont inventé ce meuble, ou ont été les premiers à s' en servir.
   MOINERIE, esprit et humeur des Moines. Moinillon, petit Moine; et Moinesse, Religieuse, sont également des termes de mépris.

MOINEAU


MOINEAU, s. m. [Moa-no: pluriel, Moi--neaux.] Petit oiseau fort comun et à la ville et à la campagne, où il étourdit par ses cris continuels; et qui multiplie prodigieûsement. Il y en a quelquefois des milliers sur un seul arbre. "Il n' y a pas de petit enfant, qui n' ait un moineau pour s' amuser. = Adj. "Cheval moineau, auquel on a coupé les oreilles.
   On dit, proverbialement, jeter sa poûdre aux moineaux, faire de la dépense pour une chôse qui n' en vaut pas la peine.

MOINILLON


MOINILLON, s. m. Terme de mépris. Petit Moine. Quelques-uns disent Moinichon.

MOINS


MOINS, adv. [Moein, et devant une voyèle, moeinz, monos. long.] C' est le comparatif de peu. Le superlatif est le moins. "Parlez moins et moins haut. "Il a en cela moins d' intérêt que vous. "C' est bien le moins que vous puissiez faire pour lui. = 1°. Moins régit le génitif, avec l' article indéfini de "Moins d' argent, de soldats, de viande, de pain, etc. et non pas moins du bien, de l' argent, des soldats, de la viande, du pain, comme disent, en certaines Provinces, des gens mal instruits. = Il a ce même régime, lorsqu' il est employé substantivement. On dit absolument et sans régime: "Il y a du plus ou du moins dans ce qu' il dit; mais on dit aussi: "Suivant le plus ou le moins de munitions; faites le moins de dépenses que vous pourrez. = S' il est suivi de la prép. de dans ces ocasions, il en a d' aûtres où il faut que cette préposition le précède. "Persée, âgé de trente ans, et Démétrius, qui avoit cinq années moins. ROLLIN. Il falait de moins. = 2°. Moins se place aprês les tems simples des verbes; et quand il est seul, et qu' il n' est pas suivi de que, il se met dans les tems composés entre l' auxiliaire et le participe. On peut pâsser aux Poètes de le mettre aprês. "Si je l' eusse aimé moins, dit Voltaire dans son OEdipe. En prôse, on dirait, si je l' eusse moins aimé. = Que si moins est suivi de que, on le met indiféremment devant ou aprês le participe dans les tems composés. "Si je l' eusse moins aimé que vous; si je l' eusse aimé moins que vous. Enfin, si moins est suivi d' un autre adverbe, il doit être mis aprês le participe. "Ils ont combatu moins courageusement. = Il suit les mêmes règles avec l' infinitif. "Vous ne pouvez moins faire ou faire moins pour l' un que pour l' aûtre. "On l' a vu combattre moins courageûsement. = 3°. À~ moins régit le génitif. "À~ moins d' un promt secours, il est perdu. Autrefois on disait à moins que, devant les~ noms comme devant les verbes. Malherbe l'~ a dit souvent de même.
   Certes, ces miracles visibles,
   Excédant le penser humain,
   Ne sont point ouvrages possibles,
   À~ moins qu' une immortelle main.
On dirait aujourd' hui, à moins d' une immortelle main. * D' aûtres disaient, à moins que de. "Le Tage, qu' il étoit impossible, à moins que d' un miracle, de traverser sans barque. Vie de St. P. d' Alc. Dites, à moins d' un mirâcle. = 4°. À~ moins que régit le subjonctif, et il exige toujours la particule négative ne. "À~ moins que vous ne changiez de baterie. Les Poètes ont peut-être droit de retrancher la négative, quand elle les embarrasse.
   À~ moins que pour régner le destin les sépare.
       Corn. OEdipe.
  Et vous n' obtiendrez rien, à moins qu' il soit content.
      Agésilas.
  Ã€~ moins que vous ayez l' aveu de Lysander.
       Ibid.
  Ã€~ moins que la suivante en fasse autant pour vous.
      Molière.
Je ne dois pas dissimuler que l' Acad. met en exemples deux phrâses, dont l' une a cette particule négative, et l' aûtre ne l' a pas; mais j' avoûe que je ne devine pas la raison de cette diférence. = À~ moins que de, avec l' infinitif, rebute au contraire cette particule négative. "À~ moins que de l' avoir vu, je ne pourrois le croire. * Un Avocat Provençal retranche le que et met la négative ne. "À~ moins de ne fermer volontairement les yeux à la lumière, etc. C' est un provençalisme, comme, je crains de ne faire, j' ai peur de ne dire. = Le retranchement de la conjonction que serait moins irrégulier. Plusieurs, en dépit des Gramairiens, disent, avant de faire, à moins de dire. _ Molière, au contraire, conservait le que, et retranchait de: "à moins qu' être un vrai sot; à moins que l' avoir vu; comme plusieurs disaient, avant qu' être, plutôt que avant d' être ou avant que d' être. Voy. AVANT, n°. 3°. = À~ moins s' emploie quelquefois adverbialement et sans régime. "On se fâcheroit à moins, c. à. d. pour un moindre sujet. = Au moins, du moins, tout au moins, pour le moins, tout du moins, à tout le moins, adverbes sans régime. Ils signifient tous la même chôse. Les deux premiers sont les plus usités; les deux suivans sont plus du st. fam. Je ne sais si le cinquième a jamais été en usage: du moins je le crois vieux, quoique l' Acad. l' ait conservé dans la dern. édit. "Tout du moins, pour le moins. Le dernier ne se dit plus que dans cette phrâse, à tout le moins une fois l' an, consacrée dans les Comandemens de l' Église. Marsolier s' en est encôre servi. "Il s' attendoit qu' il lui demanderoit quelque grâce pour lui-même, ou à tout le moins (tout au moins) d' être remboursé de ce qu' il avoit avancé. _ Richelet met, à tout le moins sans remarque; l' Académie ne le met pas.
   REM. I. Au moins et du moins, à la tête de la phrâse, font marcher le pronom nominatif aprês le verbe. "En cela au moins êtes-vous bien juste. Voit. "Les troubles sortirent de Rome avec Novatien. Au moins, le plus grand scandale y cessa-t' il bientôt. Berault, Hist. de l' Égl. "Du moins ce Prince fut-il le maître des conditions. Moreau. "On le soupçonoit d' être le chef de la conspiration. Du moins est-il certain qu' il étoit instruit du complot. Lett. Édif. = II. Au moins doit être placé le plus près possible du nom qu' il modifie. "Quinze cents soldats, ou gens de nouvelle levée prisoniers, au moins. Anon. Il falait, ce me semble, au moins quinze cens soldats, etc. Au moins et du moins se disent assez indiféremment pour le sens: mais le 2d vaut mieux, quand le mot précédent finit par une voyèle: ou au moins forme une consonance désagréable. Il vaut mieux dire, ou du moins. = III. Non moins a le sens d' aussi. Il est à remarquer que de deux chôses que du moins et aussi compârent, il faut placer la première celle qui est la moins conûe. Ainsi, suposé que celui dont on parle fût plus conu par ses vertus, que par ses amabilités, il faudrait dire, non moins aimable, qu' estimable. Il est peu d' Auteurs qui aient senti la justesse de cette observation. On a dit de M. Thomas: "Non moins estimable par ses talens que par ses vertus. Il falait dire, au contraire, non moins estimable par ses vertus, que par ses talens; parce que ses vertus étaient moins généralement conûes que ses talens. = IV. Pas moins sans négative, dans le sens de cependant, est une locution populaire. "Elle travailloit en linge pour les gens du comun, mais pas moins elle gâgnoit sa vie, etc. Th. d' Éduc. "Je vois bien que vous faites une bonne action; mais pas moins le secret de ça me tarabuste. Ibid. = V. Doit-on dire: il ne fut rien moins que, ou rien de moins que? Je crois que le premier est plus autorisé. Le P. Berruyer et M. Berault, et autres Auteurs emploient le 2d. L' Acad. met plusieurs exemples sans de. = VI. En moins de rien, adv. Très-promptement, en peu de tems. "Il a mangé son bien en moins de rien. _ Il est tout au plus du style médiocre. = VII. Sur et tant moins; en déduction de, est un terme de Pratique. "Il lui a doné cinq cents francs, sur et tant moins de ce qu' il lui devoit.

MOIRE


MOIRE, s. f. MOIRÉ, RÉE, adj. [Moâ--re, ré, rée; 1re lon. au 1er, 2ee muet au 1er, é fer. aux deux aûtres.] Moire, étofe, ordinairement de soie, et qui a le grain fort serré. Acad. = La moire tabisée est pâssée à la calandre, ce qui y fait paraitre des ondes comme au tabis. = Moiré, qui a l' oeuil de la moire, qui est ondé comme la moire. "Ruban moiré, étofe moirée.

MOIS


MOIS, s. m. [Moâ, et devant une voyèle, moâz, monos. long.] Une des douze parties de l' année. Les mois d' Avril, de Juin, de Septembre, de Novembre sont de trente jours. Février en a vingt-huit, les années ordinaires, et vingt-neuf, les années bissextiles: les sept aûtres sont de trente-un jours. "Le mois de Janvier est le 1er, et le mois de Décembre le douzième et le dernier de l' année.
   Rem. 1°. Les noms de mois, précédés des noms de nombre cardinaux, s' emploient sans préposition: le trois Janvier, le six Mai, le quinze Avril; mais avec les noms de nombre ordinaux, la prép. de doit les précéder; le troisième jour de Janvier; le sixième de Mai, ou du mois de Mai, etc. La 1re manière est plus du style familier; la 2de, du style relevé. = 2°. Doit-on dire, aprês six mois de tems écoulés, en faisant raporter le participe à mois; ou écoulé, en le raportant à tems? Vaugelas était pour la dernière manière; et Th. Corneille pour la première. Je crois que l' opinion de celui-ci est préférable.

MOISIR


MOISIR, v. act. MOISISSûRE, s. f. [Moa--zi, zi-sûre; 3e lon. au 2d.] Moisir, c' est chancir, couvrir d' une certaine mousse blanche ou verte, qui marque un comencement de corruption. "L' humidité a moisi ce pâté, ce pain. = Il se dit ordinairement, ou comme neutre, ou comme réciproque. "Ce pâté comence à moisir; à se moisir. "Tout se moisit dans les lieux humides. = Adj. "Pain, fromage moisi. "Confitûres moisies. = S. m. "Il en faut ôter le moisi. = Moisissûre, est 1°. l' altération d' une chose moisie. "Si la moisissûre s' y met; ou, ce qui en est l' éfet. "Ôtez la moisissûre, le moisi.
   REM. Moisir difère de chancir, en ce que celui-ci se dit des premiers signes de cette espèce de corruption, et que celui-là se dit de sa consommation. "Un pâté, un jambon qui se chancissent, doivent être mangés promptement: quand ils sont moisis, ils ne sont plus mangeables. Extr. de M. Beauzée.
   Rem. Un pieux Biographe, qui écrivait en 1670, écrit moisif. "Un morceau de pain dur, noir et très-souvent moisif. Je ne crois pas qu' en aucun tems cette ortographe ait été d' usage.

MOISSINE


MOISSINE, s. f. [Moacine.] Faisceau de branches de vigne, avec les grapes qui y pendent. "Les paysans pendent des moissines au plancher.

MOISSON


MOISSON, s. f. MOISSONER, v. a. MOISSONEUR, EûSE, adj. [Moa-son, soné, neur, neû-ze; 3e é fer. au 2d, lon. au dern.] Moisson est la récolte des blés et aûtres grains. "Faire la moisson. _ C' est aussi le tems où l' on moissone. "La moisson aproche: pendant la moisson. Poétiquement, année. "Il a vu cinquante moissons. = Fig. "Moisson de lauriers, de gloire, beaucoup de gloire, d' heureux succês. = Moissoner, c' est faire la moisson. "Moissoner les fromens, les avoines. _ Moissoner un champ. _ V. n. "On a déja moissoné: on ne moissone point encôre. = Moissoneur, eûze, celui, celle qui moissone. "Il a vingt moissoneurs et autant de moissoneûses.
   REM. Moissoneur ne se dit qu' au propre; mais moisson et moissoner se disent élégament au figuré. "Moisson de laurier, de gloire.
   Que deviendront ces biens, où votre esprit se fonde,
   Et dont vous étalez l' orgueilleûse moisson.
       Rousseau.
Moissoner des palmes et des lauriers. "Ainsi la cruelle guerre moissone les bons et épargne les méchans. Télém. Et neutralement: "Nous semons aujourd' hui dans les larmes; nous moissonerons un jour dans la joie. = Être moissoné, mourir. "Ainsi le fils d' Idoménée, comme une jeune et tendre fleur, est cruellement moissoné dès son premier âge. Télém. _ Tout cela n' est que de la Poésie, ou de la Prôse poétique ou oratoire.
   Quelques-uns disent, proverbialement: Porter la faulx dans la moisson d' autrui; entreprendre sur ses droits, sur ses fonctions. Ce proverbe vient du latin. Richelet et l' Académie disent, mettre la faucille, etc. et cela vaut mieux; car on se sert pour la moisson, de faucille et non pas de faulx.

MOITE


MOITE, adj. MOITEUR, s. f. [Moa-te, teur.] Moite, qui a quelque humidité, qui est un peu mouillé. Moiteur, qualité de ce qui est moite. "Avoir le front moite, les mains moites. "Être moite de sueur. "Il a une petite moiteur aux mains. "Elle ne sûe plus; il ne lui reste qu' une légere moiteur. _ On le dit ordinairement du corps humain. Quelquefois cependant on s' en sert, en parlant de certaines chôses. On dit que des draps ne sont pas bien séchés, qu' ils sont encôre moites; qu' il y a encôre de la moiteur; qu' il faut les faire sécher, pour en ôter la moiteur; que, durant le dégel, les murâilles sont moites, etc. = On dit, en style poètique, le moite élément, le~ moite empire; la mer.
   Quelque autre Curé plus savant...
   Bravant les fougues de la bise,
   Se seroit livré sans remise
   Aux fureurs du moite élément.
       Gresset
Rousseau dit, le moite empire.

MOITIÉ


MOITIÉ, s. f. [Moa-tié, 2eé fer.] Partie d' un tout, divisé en deux parties égales. "La moitié de cette succession lui appartient. = Dans un sens moins strict, il se prend pour une des deux portions, quoique l' égalité entre elles ne soit pas parfaite, comme quand on dit: la moitié d' un pain, d' un poulet; une moitié d' agneau. = Mettre de moitié. "L' air satisfait et l' attention, avec laquelle il vous écoute, vous disent, en quelque sorte que vous avez plus de lumières que lui. S' il dit lui-même quelque chôse d' ingénieux, il vous y met adroitement de moitié. MARIN, L' homme Aimable. "Il a mangé la moitié de son bien. C' est dans ce sens qu' on dit, la grôsse, la grande moitié, la petite moitié.
   REM. Moitié, s' emploie souvent sans article: "Il a moitié dans cette succession: elle a moitié dans tous les meubles. Acad. "Un âne mange moitié autant qu' un boeuf. L' Ab. Guénée. "Ce second brâs n' est pas moitié aussi long que l' aûtre. Pluche. "Quelques villes perdirent moitié, d' autres les trois quarts de leurs habitans. Hist. d' Angl. "De tous ceux, qui liront, il y en aura moitié encôre, à qui tout ceci paroîtra trop vif. Linguet. = De tous ces exemples, le plus inusité est ce dernier, où moitié, sans article est nominatif, (sujet de la phrâse) il y aura moitié à qui, etc. Cela surprend un peu. Comme chacun a son goût, j' aimerais mieux dire: Il y en aura la moitié à qui, etc. = Moitié, adverbe, est plus autorisé par l' usage. "Moitié seigle, moitié froment. "Moitié eau, moitié vin. "Moitié de gré, moitié de force. = De moitié à moitié, adv. "Il a été de moitié trop long, ou trop long de moitié dans son discours. "Ce plan simple diminuera la dépense de près de moitié. Neck.~ "Être de moitié avec quelqu' un; partager les profits et les pertes avec lui, soit dans le comerce, soit au jeu. _ "Il est à moitié ivre. Avec plus, on dit, d' à moitié, le d étant régi par plus. "De l' argent plus d' à~ moitié dépensé; du vin plus d' à moitié bu. "Ces Évêques plus d' à moitié laïques. Moreau. * Le P. Sicard dit, plus de moitié. "Les deux autres colonnes sont plus de moitié détruites. Let. Édif. Il falait plus d' à moitié. _ Quelques uns disent, plus qu' à moitié; mais celui-ci n' est pas si bon. = Par moitié, autre adverbe. "Partager par moitié, ou moitié par moitié. _ En parlant de diférend, on dit, par la moitié. "Partageons ce diférend par la moitié.

MOL


MOL, ou MOU, MOLLE, adj. Peu de gens écrivent aujourd' hui mol au singulier, et presque persone n' écrit mols au pluriel. Ici l' anciène ortographe est trop oposée à la prononciation pour s' y opiniâtrer. Un de nos plus grands Écrivains, M. de Bufon, a encôre dit. "Les Chinois sont des peuples mols: et M. de Bougainville, les corps mols. Antilucrèce. Et M. Clément.
   Sur le mol édredon dormez-vous plus tranquille?
   Voy. MOU.

MOLAIRE


MOLAIRE, adj. fém. [Molère: 2e è moy. et long, 3e e muet.] Il se dit des grôsse dents qui servent à broyer les alimens. "Les dents molaires.

MôLE


MôLE, s. m. et fém. [1re lon. 2e e muet.] Il y a une transposition ridicule dans le Dict. Gram. sur le genre de ce mot. On le dit fém. quand il signifie une jetée de pierre, et masc. en termes d' Anatomie: c' est tout le contraire. Il est masc. dans le 1er sens, et fém. dans le 2d: un môle est une jetée de pierres à l' entrée d' un port: une môle est une masse de chair informe et inanimée, dont les femmes acouchent quelquefois au lieu d' enfant.

MOLÉCULE


MOLÉCULE, s. fém. Petite partie d' un corps. "Les molécules de l' air, du sang. = Ce mot n' est usité que parmi les Savans, et il y aurait de la pédanterie à s' en servir dans le discours ordinaire. "On nomme molécules ou petites masses, les corpuscules dont les corps sont composés. Paulian, Dict. de Phys.

MOLèSTER


MOLèSTER, v. act. [Molèsté: 2e è moy. 3e é fer.] Suivant La Touche, on se sert rârement de ce mot aujourd' hui: on dit plutôt chagriner, tourmenter: mais le 1er ne dit pas assez, et l' aûtre dit trop: molester tient le milieu entre les deux. _ L' Académie dit qu' on ne s' en sert guère qu' au Palais. Il me semble pourtant qu' il est assez d' usage dans le style familier. "Molester quelqu' un par ses chicanes, en lui suscitant des procês, etc.

MOLETTE


MOLETTE, s. f. [Molète: 2eè moy. 3e e muet.] 1°. Cette partie de l' éperon, qui est faite en forme d' étoile, avec plusieurs pointes, pour piquer le cheval. = 2°. Morceau de marbre, qui sert à broyer des couleurs.

MOLLASSE


MOLLASSE, adj. MOLLEMENT, adv. MOLLESSE, s. f. MOLLET, ETTE, adj. [Molace, leman, lèce, lè, lète: 2e e muet au 2d, è moy. aux trois derniers.] La diférence de mollasse et de mollet, c' est que le premier se dit de ce qui est désagréablement mou au toucher; et l' autre de ce qui est mou au toucher agréablement. "Chair, peau, étofe mollasse. "Lit mollet. "Étofe douce et mollette. = Avoir les pieds mollets, se dit d' un homme qui marche encôre avec peine, après avoir été incomodé des pieds. = S. m. Le mollet de la jambe; le grâs de la jambe. "Leurs habits descendent jusqu' au dessous du mollet. Hist. des Voy. = Mollet, petite frange qu' on met aux lits, aux sièges. "Mollet de laine et de soie, d' or et d' argent.
   Mollesse, au propre, qualité de ce qui est mou. "La mollesse, ou la dûreté des corps. "La mollesse des chairs est une marque d' une mauvaise constitution, ou d' une mauvaise disposition. En termes de Peintûre, il se prend en bone part, pour signifier l' imitation vraie et gracieûse de la flexibilité des chairs. = Au figuré, manque de vigueur et de fermeté d' âme. "Il a de bones intentions; mais il a trop de mollesse. Sa mollesse a ruiné ses afaires. = Vie oisive et voluptueûse. "Vivre dans la mollesse. _ L' Acad. ne marque pas ce dernier sens: c' est un oubli.
   MOLLEMENT, se dit au propre dans ces phrâses; être couché mollement, s' asseoir mollement, dans un bon lit, sur un siège bien mou. = Au figuré, faiblement, lâchement. "Agir, travailler, se conduire dans une afaire mollement. = D' une manière molle et efféminée. "Vivre mollement.
   MOLLE, adj. fém. Voy. MOU.

MOLLETON


MOLLETON, s. m. [Moleton: 2ee muet.] Petite étofe de laine douce et mollette. "Du molleton. "Camisole de molleton. "Veste doublée de molleton.

MOLLIFIER


MOLLIFIER, v. act. MOLLIR, v. neut. [Molifié, moli.] Rendre mou. _ Devenir mou. = Le 1er ne se dit qu' en Médecine. "Mollifier les humeurs. Cataplasme pour mollifier une tumeur. _ * L' Ab. Prévot traduisant trop litéralement M. Hume, l' a employé au figuré: "Le génie de religion qui prévaloit à la Cour et dans la prélature, tendoit à mollifier ces préventions. H. des Stuarts. C' est un anglicisme: mollify. = Mollir se dit au propre. "Les pommes mollissent cette année; les nèfles mollissent sur la pâille. _ Manquer de force. "Ce cheval comence à mollir; il aura peine à fournir sa course. "Le vent mollissait contre les voiles. = Et au figuré~; céder lâchement, lorsqu' il faudrait tenir ferme. Vous mollissez. "Il ne faut pas mollir dans cette afaire.

MOLûE


MOLûE. Voy. MORûE.

MOMENT


MOMENT, s. m. MOMENTANÉ, ÉE, adj. [Moman, momantané, née: 2e lon. 4e lon. aussi au dern. é fer.] Instant, petite partie du tems. "Attendez un moment; je reviens dans un moment. "L' éternité dépend d' un moment.
   Qui n' a plus qu' un moment à vivre,
   N' a plus rien à dissimuler.
"Tous les momens sont précieux. "Il compte les heures et les momens. = Au moment régit de devant les noms et les verbes: "Au moment du départ; au moment de partir. = De ce moment, adv. Dès lors. "De ce moment le soleil commença à luire. Pluche. "De ce moment Gontran exerça l' autorité souveraine. _ D' autres disent dès le moment. "Le Poète (Voltaire) ne pardona pas cette chûte honteuse (d' Ériphile) au critique; (l' Ab. Des Fontaines) et, dès le moment, ils se déclârèrent une guerre scandaleuse. Le Chev. des Sablons. _ De ce moment aurait été mieux. = Dans le moment, sur le moment, adv. (le 2d est peu usité) sur le champ. "Dans le moment, ils bandent la plaie d' Ulisse. Mde. Dacier, Odyss. "Jupiter exauça sa prière sur le moment. Ibid. = Pour le moment: "Voilà tout ce que j' avais à dire pour le moment. "Il se contenta pour le moment, de faire fortifier ses places. Velly, Hist. de Fr. = À~ tout moment, ou à tous momens, adv. L' Acad. met les deux; et dans le seul exemple qu' elle done, elle emploie le 2d: "Un criminel croit voir à tous momens les Archers à ses trousses. _ Il me semble qu' à tout moment serait plus conforme à l' analogie. Voy. TOUT. = D' un moment à l' autre, ou de moment en moment: "Il peut venir d' un moment à l' autre; de moment en moment, à tous les momens, à tout moment. Voy. d' une heure à l' autre, au mot HEURE. = Racine a dit, dans Bérénice, de momens à momens.
   Prêts à quiter le port de momens à momens.
Je crois qu' il n' est pas à imiter en cela. = Du moment que régit l' indicatif. "Du moment que vous avez trouvé un mouvement intérieur dans la lune, voilà ses habitans qui renaissent. Fonten. Mondes. = Dans le moment que, ou dans le moment où: le 1er est le meilleur. "Je l' aflige dans le moment même qu' il vient d' avoir l' attention la plus délicate. Marm. "Dans le moment où le ciel commençoit à s' éclaircir... Mentor remarque un de leurs vaisseaux. Télém. = On dit, un bon moment, pour dire, un instant propre et favorable à faire ce qu' on desire. = Ce fou a de bons momens, des intervales lucides, où il parle avec sens.
   Moment régit quelquefois de et l' infinitif.
"Lothaire juge alors que le moment est venu d' acroître ses États. Moreau.
   MOMENTANÉ, qui ne dure qu' un instant. Ce mot n' est pas des plus anciens dans la langue; mais il est aujourd' hui bien établi. Il ne s' est dabord dit que parmi les savans. À~ présent il est reçu dans le discours ordinaire. "Le triomphe momentané de Marignan (sous François I) fut bientôt flétri par l' oprobre ineffaçable de Pavie. Linguet. "Action momentanée. Acad. = Trév. et le Rich. Port. écrivent momentanée pour le masc. comme pour le fém. et le premier le done pour un terme de Philosophie. On hazarde son salut pour un plaisir momentanée. _ L' Acad. qui met cette phrâse en exemple, écrit momentané, et le dit sans remarque. "Dans les intervales d' un calme momentané. Rayn. "La jalousie divisa bientôt ceux qu' un intérêt momentané avoit unis. Idem.
   *MOMENTANÉMENT, adv. Celui-ci n' est pas, à beaucoup près, aussi usité que l' adjectif momentané. Il n' est point dans les Dictionaires: c' est un de ces adverbes qu' on crée journellement dans la liberté de la conversation, et qu' on dit long-tems avant que de les écrire. Mde. de B... l' a employé. "Les chefs de ces factions oposées s' acomodèrent momentanément~. H. d' Angl.

MOMERIE


MOMERIE, s. f. [2e et dern. e muet; 3e lon.] Autrefois mascarade. _ Aujourd' hui, 1°. déguisement de sentimens, qui fait faire au dehors un personage tout diférent de ce qu' on a dans le coeur. "Elle paroit fort afligée; mais c' est une momerie, ou pûre momerie (sans article). = 2°. Jeu joué pour tromper quelqu' un agréablement. "plaisante momerie. = L' Auteur des Grands hommes Vengés lui done le sens de pièce boufone, burlesque. "On rappelle dans cette momerie (le chef d' oeuvre d' un Inconu) un outrage fait à M. de Volt. _ Le mot est impropre.

MOMIE


MOMIE, s. f. 1°. Corps embaumé d' une manière particulière par les Egyptiens. = 2°. Corps enterré sous les sâbles dans les déserts d' Arabie, et qu' on trouve ensuite desséché par les ardeurs du soleil. "On a des momies dans les cabinets par curiosité. = Quelques-uns disent mumie, mais mal.

MOMON


MOMON, s. m. 1°. Défi au jeu des dés, porté par des masques. "Recevoir, jouer, perdre un momon. = 2°. C' est aussi un terme du jeu de lansquenet, et autres jeux semblables.

MON


MON, pron. possessif. De moi. Il sert pour le masculin, et aussi pour les noms féminins, commençant par une voyelle. _ Mon frère, mon oncle. "Mon amitié, mon estime, mon habileté, etc. Le pluriel est mes.

MONACAL


MONACAL, ALE, adj. MONACALEMENT, adv. MONACHISME, s. m. [Mona--kal, kale, kaleman, kisme; et non pas chisme, à la Française: 4ee muet.] Monacal, qui apartient, qui a raport à l' état de Moine. "Habit, chant monacal. "Vie, règle monacale. = Monacalement, d' une façon monacale. "Vivre monacalement. = Monachisme, l' état des Moines "Le Monachisme est bien étendu. _ Celui-ci toujours, et souvent les aûtres, ne se disent que par mépris. Voy. MOINE.

MONADE


MONADE, s. f. Être simple et sans parties, dont les Leibnitiens croient que tous les aûtres êtres sont composés.

MONARCHIE


MONARCHIE, s. f. MONARCHIQUE, adj. MONARQUE, s. m. [Mo-narchî-e, chi--ke, mo-narke: 3e lon. au 1er, dern. e muet dans tous les trois.] Monarchie est le gouvernement d' un État par un seul chef. Monarque, celui, qui a seul le pouvoir souverain dans un grand État. Monarchique, qui apartient à la monarchie. "La monarchie est la forme de gouvernement la plus parfaite. "Grand, puissant, glorieux Monarque. "La France est un État monarchique.
   Rem. 1°. Monarchie se prend souvent pour Empire, Royaume. "La Monarchie des Assyriens. "La Monarchie Française, etc. = 2°. Roi se dit des petits Princes comme des grands, parmi ceux qui ont ce titre: Monarque ne se dit que du Chef d' un grand Royaume.
   *MONARCHISTE; mot nouveau, employé par M. Raynal, pour signifier un partisan de la Monarchie. "Un peuple monarchiste veut étendre au delà des mers, la gloire et l' empire de son Maître. Un aûtre Écrivain dit Monarchisme. "Monarchisme universel, dont le projet, atribué à Louis XIV, fut un fantôme ou un épouventail politique. Anon.

MONASTèRE


MONASTèRE, s. m. MONASTIQUE, adj. [Mo-nastère, monastike: 3e è moy. et long au 1er.] Monastère, lieu où vivent les Moines ou les Religieuses. On dit vulgairement Couvent; mais Monastère est plus noble. "Se retirer, s' enfermer dans un Monastère. Sortir du Monastère. = Monastique, qui concerne les Moines. "Les Ordres Monastiques. "Vie, discipline monastique.
   Rem. Monacal et Monastique ont le même sens, mais ils n' ont pas le même emploi: Le premier se prend en mauvaise part, et se dit par mépris: le second se prend en bone part, et se dit sérieusement et par estime.

MONAUT


MONAUT, adj. [Monô, 2e lon.] Qui n' a qu' une oreille. "Chien, chat monaut.

MONCEAU


MONCEAU, s. m. [Mon-so: 1re lon. 2e dout. au sing. lon. au plur. monceaux.] Tâs, amâs fait en forme de petit mont. "Monceau de blé, de pierres, d' argent, etc. Voy. TâS.

MONDAIN


MONDAIN, AINE, adj. MONDAINEMENT, adv. MONDANITÉ, s. f. [Mon-dein, dène, dèneman, danité: 2e è moy. 3ee muet au 2d et au 3e.] Ils se disent, en style de dévotion, de l' atachement aux chôses vaines et passagères du Monde. "C' est une femme extrêmement mondaine. "Ses habits sont trop mondains; elle a un air bien mondain. = S. m. "Les mondains ne veulent pas entendre parler de pénitence. _ "Un sage mondain, qui n' a que les vertus morales. = Vivre mondainement, d' une manière mondaine. = "Pâsser sa vie dans les plaisirs et la mondanité. _ "Le mépris des mondanités, des chôses vaines du monde.

MONDE


MONDE, s. m. [1re lon. 2ee muet.] Ce mot a divers sens: 1°. En général, l' univers; le ciel et la terre, et tout ce qu' ils renferment. "Dieu a tiré le Monde du néant. "Depuis la création du Monde. = St. famil. "Depuis que le Monde est Monde. = L' an du Monde 2750; l' an de la création, etc. = 2°. Plus particulièrement, la terre, le globe terrestre. "Les quatre parties du Monde. "Faire le tour du Monde: courir le Monde: aux deux bouts du Monde. "L' ancien Monde, l' Europe, l' Asie, l' Afrique. Le nouveau Monde, l' Amérique. = 3°. La totalité des Hommes. "J. C. est le Sauveur du Monde. = 4°. Le commun des Hommes. "Le Monde ne pardone point l' ingratitude~. = 5°. Dans un sens indéfini, les gens, les persones. "Il ne faut pas condamner le monde si légèrement. "Vous vous moquez du monde, des gens. = 6°. Certain nombre de persones. "Il y avoit bien du monde au Sermon, à la promenade. = 7°. La société dans laquelle on a à vivre. "Le grand, ou le beau monde. "Le comerce du monde. "Aimer le monde. "Il ne voit qu' un certain monde. "Loin du monde et du bruit, etc. 8°. Les hommes, ou corrompus, ou qui ont des maximes, ou qui mènent une vie oposée à l' Évangile, à la Religion, à la piété. "Renoncer au monde. "L' esprit du monde. "Le Seigneur a anathématisé le monde. "Le monde est l' énemi des Jesus Christ, etc. = 9°. Les domestiques et les enfans, la famille, prise collectivement. "Tout son monde est venu: il a amené tout son petit monde, etc. = Le monde savant; les Savans. "Les Langues des Grecs et des Romains sont devenûes celles du monde savant. Rigoley de Juvigny.
   Rem. 1°. Th. Corneille dit que ce mot, pour dire une infinité, n' est plus du tout en usage. "Un monde de prodiges, un monde de faussetés. Je crois pourtant que cette locution est encôre en usage dans le discours familier. "Tout ce monde d' ajustemens, qui donne le prix à nos femmes. Coyer. C' est le mundus muliebris de Térence. = La Touche pense qu' on peut dire, par ex. Se voyant entouré d' un monde d' énemis. _ L' Acad. dit qu' il vieillit. = 2°. Monde pour troupes, n' est pas aprouvé par d' habiles gens, dit Vaugelas. "Il fit avancer tout son monde en batâille. _ Les observations sur les Remarques l' aproûvent, et l' Académie le met encôre dans la dernière édit. = 3°. Tout le monde, c' est toute sorte de persones. "Il craignoit tout le monde, parce qu' il faisoit du mal à tous. D' Avr. Quand on veut parler de la terre physique, il faut dire, le monde entier, ou tout l' univers. = 4°. L' autre monde ne se dit que de la vie à venir. En parlant de l' Amérique, il vaut mieux dire le nouveau monde, dit Bouhours. Aujourd' hui ce n' est pas assez dire. On ne le dit plus que de cette manière, et l' aûtre monde serait ridicule dans cette ocasion. = 5°. Mettre au monde. Voy. ENGENDRER. = Il est venu au monde (il est né) un tel jour. = 6°. Monde se dit aussi pour les usages du monde: savoir son monde. "De peur que Timante, qui ne savoit pas son monde, ne trouvât mauvais que son fils s' amusât. Marm. On dit aussi, avoir du monde, n' avoir pas de monde. Mais, dit-on également bien avoir beaucoup de monde, être sans monde? J' en doute. "Avec un peu d' esprit et beaucoup de monde, vous brillez plus qu' un homme de beaucoup d' esprit sans monde. Mercier. _ Je crois qu' on doit dire là, avoir ou n' avoir pas l' usage du monde. "Avec un peu d' esprit, et l' usage du monde, etc. 7°. On dit, sur-tout depuis quelque tems, le monde absolument pour le grand monde. "On ne s' amûse que dans le monde: être dans le monde, aller dans le monde. = 8°. Conaître le monde et conaître son monde ont des sens diférens. Dans le premier, monde signifie les usages du monde: dans le second, il signifie les persones. "Je conois mon monde; je vois ce qui s' y pâsse. Marm. Je crois qu' en cet endroit, il falait dire, je conais le monde. _ Je conais mon monde est autre chôse: c. à. d. je conais les gens à qui j' ai affaire. = Il sait bien le monde, la manière de vivre dans le monde. Là on pourrait dire son monde, sans craindre l' équivoque. = 9°. Monde est quelquefois un terme augmentatif, qui sert à doner plus de force à ce qu' on dit. "Rien au monde ne sauroit m' être plus agréable. "Il fit tout au monde (tous ses éforts) pour les séduire. Let. Édif. _ Le mieux du monde: ils sont le mieux du monde ensemble; três-liés, três-amis.
   On dit, proverbialement, à un homme, qui ne s' est pas montré depuis long-tems, ou qui ignôre une nouvelle qui est sûe de tout le monde, de quel monde venez-vous? _ Et de celui, dont les façons de vivre sont bizârres et extraordinaires: c' est un homme de l' aûtre monde. = Il doit à Dieu et au monde: il est extrêmement endetté.

MONDER


MONDER, v. act. Nettoyer. "Monder de l' orge; ôter la petite peau, qui le coûvre; monder de la casse; la tirer de son bâton et la préparer, après en avoir ôté les noyaux. _ Il ne se dit que dans ces deux phrâses. = Les Médecins disent mondifier un ulcère; la déterger; et mondicatif, détersif.

MONÉTAIRE


MONÉTAIRE, s. m. [Monétère: 2e é fer. 3e è moy. et long; 4e e muet.] Celui, qui fabrique la monnaie. Il ne se dit qu' en parlant des anciènes monaies et des médailles.

MONITEUR


*MONITEUR, s. m. MONITION, s. f. Celui, qui avertit. _ Avertissement. = Le 2d ne se dit qu' en Droit Canon: Le 1er est peu usité: il mériterait de l' être davantage: "Quelle reconoissance ne doit-on pas au moniteur utile, qui a produit la découverte d' un forfait et la punition d' un coupable. Linguet. _ Trév. et le Rich. Port. ont mis ce mot: l' Acad. le pâsse sous silence.

MONITOIRE


MONITOIRE, s. m. MONITORIAL, ALE, adj. [Moni-toâre, tori-al, ale: 3e lon. au 1er.] Monitoire, se dit des lettres qu' on obtient du Juge d' Église, pour obliger par censures éclésiastiques à venir à révélation sur certains faits, qui sont mentionés dans ces Lettres. "Fulminer, ou jeter un monitoire, c' est publier des Lettre en forme de monitoire. = On dit adjectivement, Lettres monitoires, ou monitoriales.
   On dit, en plaisantant, à quelqu' un, qui avait disparu, qu' on voulait faire jeter un monitoire pour le trouver. "On disait l' autre jour, qu' on avait jeté un monitoire pour savoir où était l' armée de M. de Luxembourg, Sév.

MONNOIE


MONNOIE, ou MONAIE, s. f. MONNOYAGE, s. m. MONNOYER, v. act. MONNOYEUR, s. m. [Monè, né-ia-ge, né-ié, né-ieur. _ Plusieurs prononcent monoa-ié, noa-ieur, . Il serait à souhaiter qu' on les écrivit comme on les prononce, monayer, mo--nayeur.] Monaie, 1°. Piêce de métal marquée au coin d' un État Souverain, servant au commerce, aux achats et aux ventes. "Avoir droit de battre ou faire batre monaie. "Fausse monaie. = Il s' emploie au figuré (st. famil.) On dit à quelqu' un, qui a bien riposté: vous lui avez doné la monaie de sa pièce. "Après la mort de M. de Turenne, il y eut une promotion de huit Maréchaux de France... Madame Cornuel (fameuse par ses bons mots) dit que c' étoit la monnoie de M. de Turenne. "Cette nombreuse génération de Poètes nouveaux est la monnoie de ceux, que la mort nous a ravis. Ann. Litt. = Là monnoie, se dit des petites espèces. Ainsi dix pièces de douze sous sont la monnoie d' un écu de six francs. "Des complimens! je n' en fais point: c' est la fausse monnoie du monde. Marm. "Il ferait de la fausse monnoie pour lui, il n' y a rien qu' il ne fit pour lui faire plaisir. "La Poésie est devenûe une coquette: elle a changé son ingénuité contre des minauderies. Elle n' a plus que de l' esprit; et l' esprit tout seul n' est que la fausse monnoie du talent. L' Ab. de Voisenon. "Avec beaucoup de cette faûsse monnoie on peut paroître fort riche dans un certain monde, où l' on n' y regarde pas de si près. Journ. de Mons. "Quoique Mr de V... ait été le premier dans ce siècle à~ employer la fausse monnoie des injures; ce n' est pas une raison de la faire courir. (contre lui.) Gr. Hom. Vengés. _ "Il est décrié comme la fausse monaie: il a une fort mauvaise réputation. = Payer en même monaie, se venger d' une injûre par une autre injûre, rendre la pareille. Voy. GAMBADE. = 2°. Lieu où l' on bat la monaie. "Porter des lingots à la Monaie.
   MONAYAGE, fabrication de la monaie. On a dit autrefois Monnéage. = Monayer, faire de la monaie. "Monayer des louis, des écus, des sous, etc. "Argent monayé. = Monayeur, qui travaille à la monaie par l' autorité du Prince. Faux monayeur est celui, qui fait de la monaie sans la permission du Prince ou de l' État souverain, à qui ce droit apartient. = Dans les Ordonnances on dit monnoyer, pour monnoyeur.

MONOGAME


*MONOGAME, s. m. MONOGAMIE, s. f. Mots nouveaux, qui expriment l' état d' un homme, qui n' a eu qu' une femme. Ce sont les oposés de Bigame, Bigamie.

MONOGRAMME


MONOGRAMME, s. m. [Mo-nograme: dern. e muet.] Caractère factice composé des principales lettres d' un nom, et quelque--fois de toutes. "Les signatures de la plûpart de nos Rois étoient en monograme.

MONOLOGUE


MONOLOGUE, s. m. [Monologhe; et non pas gûe: l' u n' est dans ce mot que pour doner au g devant l' e le son qu' il a devant l' a, l' o et l' u.] Scène d' une pièce de théâtre où un Acteur parle seul. "On trouve presque toujours les monologues trop longs. "Les monologues ne sont pas dans la natûre.

MONOPERSONEL


*MONOPERSONEL, adj. masc. C' est le nom, que M. De Wailly done aux verbes, que les aûtres Gramairiens apèlent impersonels. Il leur done ce nom, parce qu' ils ne s' emploient qu' à une seule persone, qui est la troisième du singulier, il faut, il importe, etc.

MONOPOLE


MONOPOLE, s. m. 1°. Privilège exclusif de vendre seul des marchandises ou des denrées, dont la vente devrait être libre. = 2°. Convention inique entre des marchands pour enchérir de concert quelque marchandise. = 3°. Abusivement, imposition onéreuse établie par l' autorité sur les marchandises. "On invente sans cesse des monopoles. "On vient d' établir un nouveau monopole. = Dans tous les sens c' est un terme odieux, et qui apartient au style chagrin et satirique. Quand on ne veut pas blâmer, on dit au 1er sens, privilège et au dernier, droit, octroi. = Dans le 2d sens, il n' y a pas d' autre terme que monopole, et il se prend toujours en mauvaise part.

MONOPOLEUR


MONOPOLEUR, s. m. Celui, qui cherche à vendre seul quelque denrée, ou quelque marchandise nécessaire à la vie. = Le peuple apèle ainsi abusivement et odieûsement les traitans, et ceux qui sont commis à la levée des droits. = * Monopoler, s' est dit autrefois, pour dire, faire des cabales. RICH. PORT. = Quelques-uns le disent encôre, pour dire, faire le monopole.

MONOSYLLABE


MONOSYLLABE, s. m. et adj. [Mono--cilabe; dern. e muet.] Qui n' est que d' une syllabe. "C' est un monosyllabe; ce mot là est monosyllabe. "An, bois, champ, eau, feu, etc. sont des monosyllabes, des mots monosyllabes.
   Rem. Les vers composés uniquement de monosyllabes ont beaucoup de douceur. Vaugelas et Ménage citent ces deux-ci de Malherbe.
   Et moi je ne vois rien, quand je ne la vois pas...
   Et tout ce que je vois n' est qu' un point à mes yeux.

MONOTONE


MONOTONE, adj. MONOTONIE, s. f. M. Targe dit monoton; haranguer avec un flux monoton, prolixe et ennuyeux. Hist. d' Angl. de Smollet. C' est peut-être une faûte d' impression. = Des imprimeurs ignorans ou inatentifs écrivent monotomie. On troûve cette mauvaise ortographe dans des livres, où l' on ne peut être tenté de la mettre sur le compte des Auteurs. Des persones, qui ignorent l' origine de ce mot, prononcent aussi monotomie. = Ces deux mots expriment au propre, l' uniformité ennuyeuse du ton dans la conversation, ou dans un Discours prononcé en public. "Chant monotone; déclamation monotone. "Ce Prédicateur endort par une désagréable monotonie. = Figurément ils se disent d' une grande uniformité dans le style, ou dans les tours, les figûres d' un discours. "Son style est monotone. "Il faut éviter la monotonie dans les ouvrages d' éloquence. "Presque toutes les phrâses de M. D. L. H. commencent par il; ce qui produit la monotonie la plus désagréable. Ann. Litt. "Est-il donc enchaîné dans le cercle monotone qu' il parcourt depuis son aparition sur la scène françoise. Salaun. _ Cercle monotone, ne me parait pas une métaphore fort juste.

MONSEIGNEUR


MONSEIGNEUR, s. m. [Moncèg-neur: 2e è moy. mouillez le g.] On dit au pluriel Messeigneurs, et dans les Requêtes Nosseigneurs. "Au Roi et à Nosseigneurs de son conseil. "À~ Nosseigneurs du Parlement, suplie humblement, etc. = Titre d' honeur qu' on done en parlant ou en écrivant aux persones distinguées par leur naissance, ou par leur dignité. "Monseigneur le Prince, le Maréchal, l' Évêque, etc. "Doner à quelqu' un du monseigneur; le traiter de Monseigneur. = L' Acad. dit qu' on apelait simplement Monseigneur le Dauphin fils de Louis XIV. C' est trop restreindre l' usage de ce mot. On a apelé de même les aûtres Dauphins, qui sont venus après. "Officier de Monseigneur, page de Monseigneur. Avant Louis XIV, ou disait Monsieur le Dauphin.
   Rem. Quand on adresse ces paroles à Dieu, ou à J. C. il faut les séparer et écrire mon seigneur, et non pas Monseigneur, et la lettre majuscule doit être à Seigneur et non pas à mon. * "Brûlez-moi, Monseigneur, consumez-moi du feu de votre amour, Vie de S. P. d' Alc. Il convient même, dans ces ocasions, de ne pas dire mon Seigneur tout seul, pour éviter l' allusion de ce titre aux Grands de la Terre; et de dire p. ex. mon Seigneur et mon Dieu, etc. ou de dire, Seigneur, tout seul, sans mon. "Consumez-moi, Seigneur, du feu de votre amour.
   VAUGELAS done quelques règles pour placer convenablement dans une lettre, dans un compliment, ou, dans un discours adressé à une persone qu' on respecte, ces mots, Monseigneur, Monsieur, Madame, Mademoiselle, etc. = 1°. Il n' en faut pas mettre deux de suite, dans la même phrâse. = 2°. Après vous, quand ce pronom personel termine le membre de la période, il faut placer un de ces mots: "Il n' apartient qu' à vous, Monseigneur, etc. "J' ai reçu de vous, Madame, etc. = 3°. Il est fort bien placé après car, mais, au reste, après tout, certes, certainement, c' est pourquoi et aûtres semblables. = 4°. Il faut prendre garde à ne le point mettre après un verbe actif, à caûse de l' équivoque. "Je ne veux pas acheter, Madame, si peu de chôse; etc. il faut alors dire: "Je ne veux pas, Madame, acheter si peu de chôse, etc. Dites-en de même de tous les endroits où ce mot ferait une équivoque. Car, quoique ces équivoques soient déraisonables, et ne puissent même se dire équivoques, qu' en faisant violence à la phrâse, d' une manière grossière et impertinente; comme dans ces phrâses triviales: voulez-vous du veau, Monsieur, "C' est une truye, Madame, etc. etc. il ne faut pas laisser de les éviter avec soin, parce qu' il y a plus de persones déraisonables et impertinentes, qu' il n' y en a d' aûtre sorte. = 5°. Il ne faut pas le mettre entre le substantif et l' adjectif, si celui-ci est du même genre que Monseigneur ou Madame, etc. Comme: c' est un procédé, Monseigneur, très-insolent: "C' est une procédure, Madame, désaprouvée de tout le monde, etc. = 6°. Il est bien placé devant que ou de. "Je ne crois pas, Madame, que vous me fassiez l' injûre de croire, etc. "C' est un éfet, Monseigneur, de votre bonté, etc. = 7°. On ne doit jamais aussi mettre ni Sire ni Monseigneur, ni Madame, aprês votre Majesté, votre Altesse, etc. mais on peut les mettre devant. = 8°. Il est à propos d' ajouter ici, qu' il y a bien des gens, qui, en écrivant, aussi-bien qu' en parlant, répètent trop souvent, Monseigneur, Monsieur, Madame, jusqu' à se rendre insuportables. Ils veulent honorer et ils importunent.

MONSEIGNEURISER


*MONSEIGNEURISER, v. act. Mot du style plaisant, ou critique. Traiter de Monseigneur. Doner du Monseigneur.
   Amuser un Crésus stupide,
   Et monseigneuriser un fat.
       Gresset.
Ce mot est dans le Dict. de Trév. (1704) au mot Monseigneur: il n' est pas dans le Dict. de l' Acad.

MONSIEUR


MONSIEUR, s. m. [Mon-cieu, sans faire sentir l' r dans la conversation. Plusieurs, en certaines Provinces prononcent mocieu: c' est un gasconisme. = Le pluriel est Messieurs; pron. mè-cieu, 1re è moy. 2e lon. Le petit peuple de Paris, et les villageois des environs, disent des Monsieu, pour des Messieurs. LA MONN.] Titre qu' on done par civilité à ceux à qui l' on parle, à qui l' on écrit, ou de qui l' on parle, et qu' on nomme en écrivant. Oui, Monsieur. "Monsieur l' Abé, le Président de... Monsieur un tel. "Messieurs du Parlement, etc.
   Rem. 1°. Le nom de Monsieur ne doit se mettre que devant le nom des Auteurs, qui sont encôre vivans, ou dont la mémoire est encôre fraîche. Ainsi, dit Vaugelas, je dis Amyot et M. Coeffeteau, quoique Amyot eût été Évêque aussi bien que M. Coeffeteau. Vaugelas avait vu celui-ci; et je ne saurais, dit-il le nommer aûtrement; soit en parlant, soit en écrivant, que comme nous avions acoutumé de le nommer pendant sa vie. _ Nous disons aujourd' hui Corneille, Racine, Boileau, Bourdaloue, Massillon, etc. On commence déja à dire Crébillon, Montesquieu, Voltaire. On dit encore M. de Bufon, M. Linguet, et il est à souhaiter qu' on le dise longtems. On dit encôre le P. de Neuville: on dira bientôt Neuville tout court. = 2°. Le nom de Monsieur, comme celui de Madame, Mademoiselle et autres titres d' honeur ne sont en usage qu' en Europe. Il ne faut donc pas les employer dans les discours qu' on fait tenir ou adresser à des particuliers des aûtres parties du Monde, "Allez, Monsieur, fait dire Charlevoix à un Japonais, vos voeux sont acomplis. Cela m' a paru ridicule: je ne sais si je me trompe. = 3°. Le nom de Monsieur et de Madame, doné aux pères et aux mères; c' est le bon ton, qui n' est pas celui de la natûre. "Je remarquai leur fatuité à la dernière visite qu' ils rendirent à leur père. Ils l' apelèrent Monsieur dans la conversation. Le bon homme à ce terme se retourna, s' imaginant qu' ils parlaient à quelqu' un qui venoit, et qu' il ne voyoit pas. Mariv. = 4°. On ne doit, pas ajouter aux noms de Monsieur, Madame, Mademoiselle, le nom propre de la persone, quand on lui adresse la parole; excepté que le grand nombre des persones, qui sont dans l' Assemblée n' oblige de le faire, pour qu' on sache à qui l' on s' adresse. Hors de là c' est un air de supériorité, ou un ton de trop grande familiarité, ou une grande ignorance du monde et des bienséances. _ Pour les noms de dignité, ou les titres d' honeur, on les joint quelquefois et assez ordinairement aux noms de Monsieur et de Madame. "Monsieur le Duc, Madame la Marquise, etc. Encôre est-il mal de le répéter trop souvent. = 5°. Monsieur tout court et sans addition, c' est pour toute la Nation le Frère aîné du Roi; et pour des domestiques le Maître de la maison. "Quand MONSIEUR vint à Marseille, il parut vivement touché de la joie générale et naïve du Peuple. "Le Journal de MONSIEUR. _ "Monsieur (c' est le maître de la maison dont je parle.) ne se rebuta point du premier refus qu' elle avait fait de ses ofres. Mariv. "Monsieur, surpris de ce que je ne lui disois rien, me demanda à quoi je pensois. Id.
   On dit, populairement, et en se moquant, un monsieur, et familièrement faire le monsieur; voilà un beau monsieur. "Est-ce qu' un monsieur a besoin de femme de chambre? Mariv. C' est un paysans qui parle. "S' il n' est pas encôre un monsieur, peut-être qu' il le sera un jour. Id. _ Il est devenu gros monsieur; il a fait fortune. _ On dit d' un mari et d' une femme qu' on compare ensemble, Monsieur vaut bien Madame. = Voy. MONSEIGNEUR.

MONSTRE


MONSTRE, s. m. MONSTRUEUX, EûSE, adj. MONSTRUEûSEMENT, adv. MONSTRUOSITÉ, s. f. [Mons-tre, tru-eû, eû-ze, eû-zeman, ozité: 2e e muet au 1er, 3e lon. au 2d, 3e et 4e, dont la 4e e muet.] Monstre se dit au propre, d' un animal, qui a une conformation contraire à l' ordre de la natûre. "Monstre afreux, hideux, etc. = Au figuré, il se dit de ce qui est extrêmement laid et diforme. "Cette femme est horriblement laide: c' est un monstre. = Plus figurément encôre, on le dit d' une persone cruelle et dénaturée. "Néron étoit un monstre. = On dit, par exagération, qu' on a servi des monstres sur la table, pour dire, des poissons d' une grandeur extraordinaire.
   REM. Monstre, au figuré, régit quelquefois la prép. de. "Monstre d' impiété, d' ingratitude, de cruauté. _ Dans le propre on dit, monstre de nature; mais l' expression est bâsse. "Les Circasses, qui sont un si beau peuple, ont assez près d' eux les Tartares Kalmouks, qui sont des monstres de nature. Let. Édif. L' Acad. dit, monstre de laideur et monstre de nature sans remarque.
   MONSTRUEUX, (on a écrit autrefois monstreux) 1°. Qui tient du monstre. "Enfant, animal, monstrueux; conformation monstrueûse. = 2°. Prodigieux, excessif en son genre. "Laideur monstrueûse. "Homme d' une grandeur monstrueûse. "On servit des poissons monstrueux. Excepté dans cette dernière phrâse, il se prend toujours en mauvaise part. En chôses morales, on ne le dit que des vices. "Avarice, prodigalité, ingratitude, monstrueûse. = Cet adjectif aime à suivre le substantif: il peut pourtant quelquefois le précéder.
   Après l' affreux hymen, qui cause mon trépas.
   Ces monstrueux accords ne me surprendront pas.
       Gresset.
  MONSTRUEûSEMENT, ne se dit qu' au figuré. Prodigieûsement, excessivement. "Monstrueûsement grôs ou grâs. C' est tout l' emploi de ce mot, qui se borne à des phrâse pareilles.
   MONSTRUOSITÉ: chôse monstrueûse. Ce mot n' est pas ancien dans la langue; mais il y est bien établi. Il se dit au propre et au figuré. C' est une monstruosité. "Cette légèreté à disposer de l' existence des citoyens est une monstruosité commune à tous les tribunaux de l' Europe. Linguet. "Les monstruosités de notre procédure. Id. "La pédanterie dans la jeunesse me paroit une espèce de monstruosité. Th. d' Éduc.

MONT


MONT, s. m. MONTAGNE, s. f. MONTAGNARD, ARDE, adj. MONTAGNEUX, EûSE, adj. [Mon, montag-ne, nar, narde, neu, neû-ze: 1re lon. mouillez le g; 3ee muet au 2d, lon. aux deux derniers.] Mont ou Montagne, grande masse de roche et de terre, fort élévée au dessus de la terre. Le 1er ne se dit jamais seul: on ne dit pas, un mont fort élevé, un mont fort rude et escarpé; il ne se dit qu' acompagné d' un nom propre; le mont Olympe, les monts Pyrénées; le mont Liban, etc. = Le 2d se dit ou seul, grande, haute montagne; le sommet, le haut, la cime de la montagne; ou avec la prép. de. "La montagne de Tarare. = Ainsi l' on dit, le mont Sinaï et la montagne de Sinaï, le mont Thabor et la montagne du Thabor; le mont Parnasse et la montagne du Parnasse;le mont Apennin et les montagnes de l' Apennin. = Mont, se dit tout seul dans les phrâses suivantes. "Le double mont, le Parnasse, phrâse poétique. "Delà les monts, en deçà des monts, des montagnes, qui séparent la France de l' Italie. "Un Bel-esprit de de-là les monts. BOUH. _ Et en st. proverbial promettre des monts d' or, promettre de grands avantages; promettre monts et merveilles; plus qu' on ne peut ou qu' on ne veut tenir. _ Par monts et par vaux, de çà, de là, de tous côtés. "Aller, chercher par monts et par vaux.
   Nos gaillards pélerins
   Par monts, par vaux et par chemins
   Au gué d' une rivière à la fin arrivèrent.
       La Font.
Mont, Montagne (Synon.) Le 2d désigne une masse plus considérable que le 1er. Le mont est oposé au vallon: la montagne est proprement oposée à la plaine. La montagne a toujours quelque chôse de grand et d' extraordinaire: le mont varie et s' abaisse même par degrés jusqu' à devenir un monticule. Extr. des Synon. Fr. de M. l' Ab. Roubaud.
   Montagne, au figuré, pour signifier amâs, monceau, est une expression exagérée. Boileau la critique dans Brebeuf.
   Mais n' allez point aussi, sur les pas de Brebeuf,
   Même en une Pharsale, entasser sur les rives
   De morts et de mourans cent montagnes plaintives.
Voy. ENFANTER = Chaîne de montagnes, suite de montagnes, qui se touchent l' une l' aûtre. = On dit, proverbialement, deux montagnes ne se rencontrent pas; mais deux hommes se rencontrent, ce qui se dit ou par menace, ou par amitié.
   MONTAGNARD, se dit des persones, qui habitent les montagnes; montagneux des pays où il y a beaucoup de montagnes. Montueux, d' un pays extrêmement inégal, et mélé d' espace en espace de plaines et de collines. Quelques-uns confondent ces deux derniers mots.

MONTAGE


MONTAGE, s. m. Action de monter. Peine, travail pour monter certaines chôses. "Payer le montage du bois, des grains.

MONTANT


MONTANT, s. m. [2 longues: on ne prononce point le t final.] 1°. Pièce de bois ou de fer, qui est posée de haut en bâs, dans certains ouvrages de menuiserie, serrurerie, etc. "Les montans d' une croisée, d' une grille de fer, etc. = 2°. Le total d' un compte, d' une recette: "Le montant est de tant. _ En ce sens, il est participe indéclinable. "Toutes les sommes ci-dessus montant (et non pas montantes) à tant. Le Gendre le décline: "Il se trouvoit, à la mort d' Henri II, des dettes montantes à 41 millions 183,000 livres. = Adj. Qui monte. "Bateau montant. "Il y dans ce puits un seau montant et un descendant. = Substantif, Celui à qui il apartient de monter à quelque place, en câs de vacance. "Ce Chanoine, ce Lieutenant, ce Conseiller est le premier montant.

MONTÉE


MONTÉE, s. f. [2e é fer. 3e e muet.] Il n' est pas du bel usage pour signifier un petit escalier. L. T. L' Académie ne le désaprouvait point dabord; dans les dern. éditions, elle dit: petit escalier d' une petite maison. Elle ajoute: il n' est en usage que parmi le peuple. Boileau l' a employé:
   Deux servantes déjà largement soufletées,
   Avoient à coups de pié descendu les montées.
Elle dit encôre: montée se dit aussi pour une des marches d' un escalier, mais il est populaire. Voyez DEGRÉ = Escalier est aujourd' hui devenu le seul terme d' usage. Degré ne se dit plus que par les bourgeois, et montée par le peuple. Encycl. = Faire sauter les montées à quelqu' un. (style fam. et prov.) le chasser honteûsement de chez soi. "S' il s' avise de venir encôre chez moi, je lui ferai sauter les montées. = 2°. Endroit par où l' on monte à un côteau, à une éminence. "La montée est roide, dure, pénible, ou douce, aisée. = 3°. Action de monter. "Les chevaux ont plus de peine à la descente qu' à la montée.

MONTER


MONTER, v. n. et act. [1re lon. 2eé fer. Monté.] 1°. Se transporter en un lieu plus haut que celui où l' on est. "Monter à un arbre, à une échelle, à un escabeau. "Monter dans une chambre, dans un carrosse ou en carrosse. Monter à cheval, etc. = Et activement: monter les degrés, l' escalier. "Monter du foin au grenier, des meubles dans une chambre, etc. = Il prend l' auxil. avoir, quand il est actif et qu' il a le régime direct; j' ai monté les degrés; et il prend l' auxil. être, quand il est neutre. "Je suis monté dans ma chambre. = Monter à cheval, et monter un cheval, sont deux chôses. Le premier se dit, quand on n' a aucun égard à la qualité du cheval: Je montai à cheval avant le jour; le second à un raport direct à la qualité du cheval. "Je n' ai jamais monté de cheval plus rude.
   Rem. Il est surprenant que Vaugelas prétende qu' il faut toujours conjuguer ce verbe avec l' auxil. Être; je suis monté, etc. Mais quand il est actif et qu' il a un régime simple ou direct, (qu' il régit l' acusatif) il est évident qu' il doit prendre l' auxil. avoir. "Il a monté les degrés sans peine. = M. de S. A. lui done mal-à-propos cet auxilaire, quoique monter soit neutre.
   Il voudroit aujourd' hui
   N' avoir (n' être) jamais monté sur le char de son père.
"Ne faut-il pas, n' être jamais monté, dit M. Geoffroi, en se servant d' une expression collégiale, qui signifie n' avoir pas été jugé digne de pâsser à une classe supérieure. C' est en jouant le mot sur les deux sens de monter, qu' un couvreur disait à son fils, étudiant au Collège: si tu montes, tu ne monteras pas, (sur les toits) et si tu ne montes pas, tu monteras. L' Acad. met en exemple: "La rivière a monté cette année à une telle hauteur. _ Peut-être est-ce une phrâse consacrée par l' usage. Peut-être en parlant des chôses qui s' élèvent, avoir vaut mieux que être. "La chaleur lui a monté au visage. Voyez plus bâs, n°. 5°. = Quand on dit, Monsieur est monté, Monsieur est descendu, est sorti, on entend qu' il est monté, descendu, sorti dans le tems qu' on parle. L. T.
   2°. Au figuré, parvenir. "Monter au faîte des honeurs. "Monter au Trône; Acad. ou, (mieux, ce me semble) sur le Trône. = 3°. En parlant de certains corps naturels, comme l' air, l' eau, le feu, etc. s' élever: "Au déluge, l' eau monta quinze coudées au-dessus des plus hautes montagnes. "La chaleur, le sang, la rougeur lui monte au visage. "Il lui monte des chaleurs à la tête. = 4°. Passer à un grade supérieur, à une place plus élevée. "Il est monté à la Lieutenance. "C' est à lui à monter à la Grand' Chambre (du Parlement.) = 5°. Hausser de prix, croître en valeur. "Le blé est monté ou a monté jusqu' à vingt francs le setier. Acad. = 6°. S' acroître. "Sa puissance, ou sa cruauté, son orgueil montèrent à un tel point que, etc. = 7°. Monter ou se monter, se dit d' un total composé de plusieurs sommes, ou de plusieurs nombres. "Toutes ces sommes montent ou se montent à tant. = 8°. Monter, se combine avec plusieurs mots, et l' on trouvera l' explication de ces expressions composées, en cherchant les mots, avec lesquels ce verbe s' associe. "Monter la garde, la tranchée; un clavecin, etc. etc.
   MONTÉ, ÉE, adj. "Il est bien, ou mal monté; il est monté sur un bon ou un mauvais cheval; ou bien, il est bien ou mal en chevaux. _ En style proverb. Il est monté comme un saint George, très-avantageûsement. = Cheval monté haut ou haut monté, qui a les jambes trop longues. = Vaisseau monté de trente, de cent cinquante hommes. = Fig. (style famil.) Il est monté sur un ton plaisant, sur un ton singulier.