Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI


L



L


L, s. fém. Suivant l' anciène prononciation, èle: 1re è moy. 2e e muet; et s. m. suivant la nouvelle, le, e muet. "Une L: un L. = C' est la 12e lettre de l' Alphabet et la 9e des consones. C' est aussi une de celles qu' on apèle liquides, parce que leur prononciation a beaucoup de douceur. Placée entre une de ces consones qu' on apèle muettes et une voyelle, elle rend la syllabe plus douce, comme dans blesser, cloche, flame, plante, etc. = Le son de l' l française se trouve dans le mot Allemand loben, dans l' Anglais labour, dans l' Italien lavare, dans l' Espagnol leer. = À~ la fin des mots, souvent elle ne se prononce pas, comme dans baril, chenil, nombril, persil, gentil, sourcil, outil, fusil, saoul, (ou plutôt soul) Toul, cul; qu' on prononce bari, cheni, persi, etc. M. Marin est du sentiment que dans Toul (Ville) il faut prononcer l' l _ Dans ces quatre mots, fol, col, mol, sol (monaie) elle prend le son de l' u: on dit: fou, cou, mou, sou; on l' écrit méme ainsi aujourd' hui. _ D' autrefois l' l finale se prononce, ou simplement, comme dans fil, ou mouillée, comme dans Avril, qu' on prononce à peu près comme s' il était ecrit avrigle. Dites en de même d' orgueil, travail, soleil, sommeil. = Cette l mouillée est toujours précédée d' un i, lequel est tantôt seul, tantôt précédé d' une voyelle ou d' une diphtongue. Il est seul dans péril, il est précédé d' une voyelle dans travail, d' une diphtongue dans bouillir, deuil, etc. _ L' l mouillée est surtout à remarquer au milieu du mot, comme dans bataille, vermeille, famille, recueille, (ou mieux recueuille) bredouille, etc. Les Italiens ont un son semblable; c' est leur gli: et bataille se pron. comme s' il était écrit bataglie. _ C' est une prononciation très-vicieuse que celle qu' on substitue très-comunément à celle de l' l mouillée. On prononce fie, oré-ie, pâ-ie, Ver--sa-ie, etc. Ce défaut n' est pas moins comun à Paris que dans les Provinces. = l' l redoublée après l' i est ordinairement mouillée. Il est pourtant des mots où elle ne se prononce que comme une seule l simple, comme ville, subst., mille, distille, imbécille, syllabe, tranquille, etc. Il serait à souhaiter qu' on n' écrivit qu' une seule l à tous ces mots. _ Dans ceux où l' l est redoublée, sans être précédée d' un i, on ne la mouille pas, mais ordinairement on n' en prononce qu' une; allumer, collège, etc. Pron. alumé, colège. Dans un Discours de M. Godeau, qui est à la tête du IIIe vol. des OEuvres de Malherbe, on troûve toutes les doubles ll suprimées: on y voit écrits cruèle, excèlente, vile, subst. Cette ortographe n' a pu prendre, malgré les tentatives réitérées que quelques Auteurs ont fait de tems en tems pour la faire pâsser. Nous ferons toujours de voeux pour que l' usage l' adopte, soit pour simplifier l' ortographe, soit pour faciliter la prononciation aux étrangers et aux français illitérés, et pour certains mots même aux Gens de lettres. On ne conserverait la double l que quand elle est mouillée, abeille, famille, citrouille, etc.

LA


LA, article. fém. et pron. relat. Quand il est article, l' a s' élide devant une voyelle, ou une h muette, et est remplacé par une apostrophe. "L' âme, l' habitude, l' espérance, l' horreur, etc. = Quand il est pronom relatif, il doit suivre les pronoms personels auxquels il est joint, et non pas les précéder. "Je vous la donerai, et non pas, je la vous donerai. Éxceptez le pron. pers. de la 3e persone, lui, leur, qui doit suivre la. Ainsi ce serait mal parler que de dire, comme font certains; je lui la donerai: il faut dire, je la lui donerai. Plusieurs, dans ces ocasions, retranchent la et disent je lui donerai; mais c' est une aûtre faute. Voy. LE.


, adv. [On le distingue de la, art. f. par l' accent grâve qui est sur l' à: .] 2°. Il sert à désigner que la chôse dont on parle est éloignée, comme ci désigne qu' elle est proche. "En ce temps-ci, en ce temps-: en ce lieu-ci, en ce lieu-. = 2°. Quelquefois il se met après l' adverbe çà. "Toutes les troupes étaient dispersées çà et . = 3°. Il se joint aussi avec quelques aûtres adverbes. " haut, bâs, là dessus, là auprès, contre. = 4°. On la met souvent à la tête de la phrâse. " Télémaque aperçut des visages pâles, hideux et contristés. Fénél. Voyez ICI: et remarquez que dans cette construction, le verbe peut quelquefois précéder le nominatif. "Là avoient~ droit d' être jugés les Magistrats immédiats. Moreau. = 5°. et ici servent encôre dans les parallèles. "Ici, les biens ne nous sont donés que goutte à goutte: , les Élus seront inondés d' un torrent de délices, etc. Pensée du Ciel. = 6°. , comme ci, se joint à des noms substantifs: cet homme-ci, cette femme-. Il doit alors en être séparé, et y être cependant uni par un tiret ou division. Il sert à mieux marquer ce qu' on veut dire. = 7°. Quelquefois n' est employé que par une espèce de redondance, et pour doner plus de force et d' énergie au discours. "C' est une belle action. Que dites-vous là? Qu' avez-vous fait ? Sont-ce nos gens, etc.? = 8°. se met toujours après le verbe, même dans les tems composés. "Il s' assit ; il est venu , et non pas, il est venu. Dans des tours oratoires ou poétiques, il précède élégamment le verbe. ", il s' assit; , il se plaignit, etc. , je le vis expirer, etc. = 9°. Il est des phrâses où ne saurait être admis, sans une construction dure et sauvage, ni avant, ni après le verbe. Exemple: "L' Abrégé dont il est fait mention. Trad. d' une Lett. de Newton. Dont il est fait mention, ou, dont il est fait mention , seraient encôre plus mauvais. Il faut dire alors: dont il est fait mention en cet endroit. "Cette méthode n' a pas besoin d' une explication plus ample que celle que j' en done, et qui est raportée. Ibid. Qui est raportée , ou, qui est raportée, seraient aussi durs. = 10°. * Autrefois on disait là où, pour, au lieu que: on le dit encôre en certaines Provinces. "Je suis content avec peu; là où vous n' êtes pas satisfait en possédant beaucoup.

LA LA


LA LA, interj. et adv. Façon de parler familière. "La la, tout beau! La la, rassurez-vous! = Adv. Médiocrement. "Avez-vous bien dîné? la la.

LABEUR


LABEUR, s. m. Travail. La Touche le trouvait très-beau en Poésie et dans le style relevé: il ne conseillait pas de s' en servir ailleurs. Il ajoute qu' on le dit encôre dans certaines phrâses: Vivre de son labeur; ouvrage d' un grand labeur; une terre en labeur; c. à. d. en bon labourage, bien cultivée. _ Ce mot en est toujours au même point, un peu vieux, peu usité, employé par quelques Auteurs, n' étant ni proscrit, ni adopté par l' usage. "Il pensoit que c' étoit un labeur au-dessus de mes forces. Mme. Dacier, Odyss. "Un domestique, dont Dieu a béni le labeur. Ibid. "Le travail de limer et de polir ses propres vers est encôre ennuyeux... J' en apelle à témoins les Poètes, à qui la persévérance dans ce labeur a manqué. L' Abé Du Bos. "Dieu a dit à l' homme... Transmets à tes enfans le fruit de ton labeur. Moreau. = Plusieurs condamnent terres en labeur, et veulent qu' on dise, en labour. Ils se trompent: ces deux locutions ont des sens diférens. Une terre en labeur, est une terre cultivée, qui n' est pas en friche. Une pièce de terre en labour, est celle qui est préparée pour recevoir la semence.

LABIALE


LABIALE, adj. fém. On apèle de ce nom, en Gramaire, les lettres qui se prononcent des lèvres, en latin labia; comme le b, le p, l' f, l' m.

LABILE


LABILE, adj. fém. Il ne se dit que d' une mémoire peu fidèle, et qui manque au besoin. "Il a la mémoire fort labile.

LABIRINTE


LABIRINTE Voyez LABYRINTE.

LABORATOIRE


LABORATOIRE, s. m. [Labora-toâ-re: 3e lon. 4e e muet.] Lieu où l' on travaille. Il se dit proprement des Chimistes.

LABORIEUX


LABORIEUX, EûSE, adj. LABORIEûSEMENT, adv. [Laborieû, eû-ze, eû-zeman; 4e lon. 5e e muet.] Laborieux, qui est de grand travail. Il se dit des persones et des chôses. "Homme laborieux, femme laborieûse. "Vie, entreprise laborieûse. = Laborieûsement, avec beaucoup de peine et de travail. "Il passe sa vie fort laborieûsement.
   Rem. Quoique laborieux se dise des chôses, il ne se dit pas de toutes les chôses, même de toutes celles qui concernent la persone. On dit, des recherches laborieûses; et l' Acad. dit, une entreprise laborieûse; mais je ne voudrais pas dire avec le Dict. de Trév. que: "un Dictionaire est un ouvrage bien laborieux: j' aimerais mieux dire, bien pénible.

LABOUR


LABOUR, s. m. LABOURABLE, adj. LABOURAGE, s. m. LABOURER, v. act. LABOUREUR, s. m. [La-bour, rable, rage, , reur; 3e dout. au 2d, é fer. au 4e: devant l' e muet, l' ou est lon. Il laboûre, laboûrera, etc.] Labour est la façon qu' on done à la terre en la labourant. "Terre en labour: voyez LABEUR. "Doner deux ou plusieurs labours à une terre. "Chevaux de labour. "Payer les labours. "Doner tant à un fermier pour ses labours. = Labourable, propre à être labouré. "Terres labourables. = Labourage est 1°. l' art de labourer la terre. "Les instrumens du labourage. "Il entend bien le labourage. _ 2°. L' ouvrage du laboureur. "Tant pour le labourage de ma terre. "Le labourage des terres légères est plus aisé que celui des terres grâsses. = Labourer, c' est proprement, remuer la terre avec la charrûe, ou la bêche, ou la hoûe, etc. "Labourer la terre, un champ, des vignes, etc. = Par extension et fig. on dit que des taupes ont labouré un jardin; que le canon a labouré un champ; qu' une ancre laboure, quand le fond n' est pas bon, et qu' elle ne tient pas; qu' un vaisseau laboure, quand il touche le fond. = En style fig. fam. labourer c' est avoir beaucoup de peine, avoir beaucoup à souffrir. "Il aura bien à labourer avant que de parvenir à son but. = Laboureur, qui fait métier de labourer la terre. "Bon, paûvre, riche laboureur.

LABYRINTHE


LABYRINTHE, ou LABYRINTE, s. m. [Labi-rein-te; 3e lon. Richelet écrit labi--rinte.] Lieu où il y a beaucoup de détours, qui rentrent l' un dans l' aûtre, en sorte qu' il est dificile d' en trouver l' issûe. "Le fameux labyrinte de Crète. "On a fait dans ce jardin un beau labyrinthe. = Ce mot est beau au fig. "La vivacité, le caprice, l' envie de plaire et de s' amuser l' ont engagée dans le labyrinthe d' une société bruyante et frivole. Marm. "Il est plongé dans un labyrinthe d' afaires, de négociations. = Labyrinthe, Dédale (synon.) Suivant M. l' Abé Roubaud, le 2e n' est que du style noble: le 1er est de tous les styles. On dira également le labyrinthe et le dédale des lois: on dira plutôt le labyrinthe que le dédale de la chicane. "Le palais de la Justice est un vaste dédale, et ses avenûes sont quelquefois de tortueux labyrinthes, etc. etc.

LAC


LAC, s. m. [Lak.] Grand amâs d' eaux dormantes. "Le lac de Genève, de Constance.

LACER


LACER, v. act. LACET, s. m. [Lacé, lacè: 2e é fer. au 1er, è moy. au 2d; devant l' e muet, l' a est long; elle lâce, lâcera, etc.] Richelet écrit lasser, lasset, contre l' usage. Lacet, 1°. Cordon de fil ou de soie, dont les femmes se servent pour serrer leur corps de jupe. "Passer, serrer, lâcher un lacet, le lacet. = 2°. Lacs avec lequel on prend les perdrix, les lièvres, etc. = Lacer, serrer un lacet. "Lacer un corps de jupe; lacer une femme. "Elle se lâce elle-même.

LACÉRATION


LACÉRATION, s. f. LACÉRER, v. act. [Lacéra-cion, lacéré: 2e des deux et 3e du 2d é fer.] Lacérer, déchirer. Lacération, action de lacérer. Termes de Palais. "Lacérer une promesse. "Le Juge ordona la lacération de cet écrit: il fut lacéré et brûlé par Sentence du Juge.

LACET


LACET. Voyez LACER.

LâCHE


LâCHE, adj. LâCHEMENT, adv. LâCHETÉ, s. f. [1re lon. 2e e muet: en, dans le 2d, a le son d' an. 3e é fer. au dern.] Lâche, au propre, en parlant des chôses, qui n' est pas tendu: corde trop lâche. = Qui n' est pas serré. "Ceintûre, corps de jupe trop lâche. _ Dont la trame n' est pas bien batûe et serrée. "Toile, étofe, drap lâche. _ Avoir le ventre lâche, trop libre. = 2°. Au fig. en parlant des persones; mou, sans vigueur. "Ouvrier lâche au travail. _ Style lâche, languissant, qui n' a rien de nerveux. = Poltron. "Un lâche Soldat: une ame bien lâche. "Action lâche, indigne d' un homme d' honneur. = S. m. C' est un lâche. "Il n' y a que des lâches qui puissent tenir un tel propôs, etc.
   Lâchement et Lâcheté ne se disent qu' au fig. On ne dit point, cette ceintûre tient lâchement; la lâcheté d' une corde: mais on dit, travailler lâchement: s' enfuir lâchement. "La trahison est une lâcheté, une action lâche. "Il s' est déshonoré par sa lâcheté.
   Lâche, Poltron (synon.) Le lâche recule: le poltron n' ôse. Le 1er ne se défend pas: il manque de valeur. Le second n' ataque point: il pèche par le courage. "Il ne faut pas compter sur la résistance d' un lâche, ni sur le secours d' un poltron. Gir. Synon.

LâCHER


LâCHER, v. act. [1re lon. 2e é fer.] 1°. Faire qu' une chose ne soit plus si tendûe, si serrée. "Lâcher une corde, un corps de jupe, une ceintûre. "Lâcher la main, la bride à un cheval. _ Fig. "Lâcher la bride aux passions. _ Fam. Lâcher la main, la bride, la gourmette à quelqu' un, lui doner plus de liberté que de coutume. = V. n. "La corde a lâché. "Son pistolet, son fusil vint à lâcher, à se débander. _ V. réc. "Les cordes se sont lâchées. "Le ressort s' est lâché. = 2°. Laisser aler. "Ils l' avoient pris, mais ils l' ont lâché. "Lâcher~ prise: "Lâcher sa proie. _ Lâcher les chiens, les laisser courir après la bête. _ Lâcher des sergens après quelqu' un, etc. _ Lâcher une parole, un mot, dire inconsidérément ce qui peut nuire. _ Lâcher le mot, la parole: dire le dernier prix, ou doner enfin son consentement. Voyez PIED. = * Lâcher, doner un coup, est populaire. "Il lui lâcha un souflet.

LâCHETÉ


LâCHETÉ. Voyez LâCHE.

LACONIQUE


LACONIQUE, adj. LACONIQUEMENT, adv. LACONISME, s. m. [Lakonike, nike--man, nis-me: 4e e muet.] Ils se disent d' une façon de parler concise, à la manière des Lacédémoniens. "Style Auteur laconique. "Parler, répondre laconiquement. "Les Lacédémoniens ne répondirent que ce monosyllabe, si, à une longue lettre pleine de menaces, de Philipe Roi de Macédoine. C' est un laconisme mémorable.

LACS


LACS, s. m. [Lâs: on ne prononce presque point le c Acad. On écrivait aûtrefois lacs ou lacqs. L' Acad. mettait les deux: dans la dern. édit. elle n' a mis que le 1er.] Cordon délié, "On l' étrangla avec un lacs de soie. = Noeud coulant propre pour prendre du gibier. = Fig. Pièges. "Il est tombé dans les lacs. "On lui a tendu des lacs. "Elle le tient dans ses lacs. "Lacs d' amour, cordons pâssés l' un dans l' aûtre d' une certaine manière.

LACTÉE


LACTÉE, adj. fém. Il ne se dit qu' avec voie et veines. La Voie Lactée est une blancheur qui parait dans le ciel, formée par un assemblage prodigieux de petites étoiles. _ Veines lactées, qui contiènent le chyle.

LACUNE


LACUNE, s. f. *LACUNÉ, ÉE, adj. [2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] L' usage de lacune est borné à ce qui manque à des livres, dont on a égaré ou soustrait une partie, ce qui forme un vide, une interruption. "Il y a des lacunes, de grandes lacunes dans ce livre. * Lacuné, néologisme, dont on ne peut guère bien augurer. "Ne seroit-il pas intéressant qu' après six ou sept éditions lacunées de ces Mémoires (du Cardinal de Rets) la nouvelle fut entière. Anon.

LADRE


LADRE, adj. et subst. LADRERIE, s. f. [1re brève, 2e e muet, 3e lon. au 2d.] Au propre, lépreux, lèpre. = Au fig. 1°. Ladre, insensible. "Il est ladre; il ne sent rien. = Excessivement avâre. "Il est bien ladre: c' est une action bien ladre: quelle ladrerie! Voyez la ladrerie de cet homme. = Ladre est aussi subst. et il a au fém. ladresse. "C' est un ladre, une ladresse. "Notre maître est un ladre vert. D' Aubigné. Expression proverbiale. = Bayle a dit ladre d' esprit, pour hébété. Cette métaphôre est ridicule.

LAGUNE


LAGUNE, s. f. Petit lac; flaque d' eau marécageûse. "Les lagunes de Venise sont des canaux formés par la mer.

LAID


LAID, LAIDE, adj. LAIDERON, s. f. LAIDEUR, s. f. [, lède, lèdron, lè-deur. 1re è moy.] Laid se dit de ce qui a quelque défaut remarquable dans les proportions, ou les couleurs requises pour la beauté. "Il est fort laid. "Elle est horriblement laide. "Elle est laide à faire peur. = On le dit des animaux, et même des chôses inanimées. "Un chien bien laid, une laide bête, un laid animal. "Étofe, tapisserie bien laide. = En morale, déshonête, contraire à la bienséance. "C' est une laide chôse que de mentir. "Il est bien laid à une femme de boire, de jurer. (style fam.)
   LAIDERON: jeune fille ou jeune femme, qui est laide. L' Acad. ajoute, mais, qui n' est pas sans agrément. "C' est une laideron; une laideron, qui ne déplait pas. _ Elle dit même, une jolie laideron.
   LAIDEUR, qualité de ce qui est laid. "Horrible laideur. "La laideur de cette femme est peu comune. = On ne le dit, au propre, que des persones. On ne dit point la laideur d' un animal, d' une étofe. = Fig. "La laideur du vice: la laideur d' une action. "La méchanceté des Hommes se présentait à son esprit. avec toute sa laideur. Volt. Voy. DIFFORMITÉ.
   On dit, proverbialement, laid comme le péché, comme le diable, comme un démon. "On me mande que cette H... est à la cour, laide comme un démon. SEV.

LAINAGE


LAINAGE, s. m. LAINE, s. f. LAINEUX, EûSE, adj. LAINIER, s. m. [Lènage, lène, neû, neû-ze, nié: 1re è moy. 2e e muet au 2 derniers, lon. au 3e et au 4e, é fer. au dern.] Laine, est ce qui coûvre la peau des moutons, brebis, agneaux, etc. = Lainage, marchandise de laine. = Laineux, qui a beaucoup de laine. "Il y a des pays où les moutons sont plus laineux que dans d' aûtres. "Un drap bien laineux; une étofe bien laineûse. = Lainier, Marchand de laines.
   On dit, en st. prov. d' un homme qui souffre tout, qu' il "se laisse manger la laine sur le dôs; et de celui qui sait se défendre, qu' il ne se laisse pas, etc.

LAïQUE


LAïQUE, s. m. [La-i-ke: dern. e muet.] Qui n' est ni éclésiastique, ni religieux. "Officier, patron laïque. "Patronage laïque. = S. m. "Un laïque: les laïques.

LAISSE


LAISSE, s. f. [Quelques-uns écrivent lesse. Pron. lèce, 1re è moy. 2e e muet.] Corde, dont on se sert pour mener des lévriers atachés. "Mener, tenir, en laisse. _ Fig. On le dit des hommes: "Il le mène en laisse: il lui fait faire tout ce qu' il veut.

LAISSER


LAISSER, v. act. [Lècé: 1re è moy. 2e é fer.] 1°. Quiter. "Il a laissé son équipage et ses gens en un tel endroit. = 2°. Ne pas emporter. "Laissez ici votre montre, de peur qu' on ne vous la vole. = 3°. Mettre en dépôt. "Il a laissé ses papiers, son argent entre les mains d' un tel. = 4°. Céder: "Je lui en laisse tout l' honneur. = 5°. Léguer. "Je laisse à un tel Hôpital mille écus. = 6°. Pâsser sous silence. "Je laisse une infinité d' autres preuves. = 7°. Laisser faire, dire; soufrir qu' on fasse, qu' on dise, ne pas se soucier, ni se mettre en peine que, etc. "Laissez-le aller. "Il le laisse comander. "Il laisse faire. = 8°. Ne pas laisser de faire; continuer, ne pas cesser; ou s' abstenir de... "Il ne laissa pas de faire ce qu' il s' était proposé. "Il ne laisse pas de se plaindre.
   Rem. 1°. Anciènement on disait, au futur et au conditionel, je lairrai, je lairrais, pour, je laisserai, je laisserais. Il est des Provinces où l' on continue de le prononcer de même, quoiqu' on ne l' écrive pas. _ C' est une faûte grossière. Restaut.
   2°. Laisser, quand il a le datif pour régime des noms, régit à devant les verbes. "Il lui laisse tout à faire. "Je laisse aux témoins de ma conduite à me justifier. _ Quelques Auteurs mettent de, pour, à: "Ils laissent à la Providence de veiller sur leurs besoins. Anon. "Je laisse à mes actions d' anoncer et de justifier la noblesse de mon origine.
   3°. Dans le sens marqué n°. 8°. plusieurs ajoutent que. "Il ne laisse pas que de faire. Je ne parle pas de Leibnitz étranger: "La doctrine contraire ne laisse pas que d' être considérable aussi. Mais M. de Bufon. "Ces grands affaissemens ne laissent pas que de tenir une des premières places, etc. _ Et Fréron. "Nos Philosophes savent que cette petite supercherie ne laise pas que d' en imposer aux sots. _ Et M. Marmontel. "Cet empire de ma raison sur la sienne ne laissoit pas que d' être flateur à mon âge. "Il ne laissoit pas que de défendre le parti des bonnes moeurs avec une noble franchise. _ Et M. Sabatier de Castres. "Ce Drame n' a pas laissé que d' avoir du succès. _ Et l' Ab. des Fontaines: "Un opéra bien écrit... ne laisse pas que d' échouer. Plus bâs il dit, ne laisser pas de plaire sans que: il n' avait donc point de règle là-dessus. M. Desgrouais met ce que au nombre des gasconismes; mais il n' est pas particulier aux Provinces méridionales. On le voit bien par les exemples cités d' Auteurs nés dans des Provinces diférentes. Mais quoiqu' il y en ait parmi eux dont l' autorité est imposante, je crois avec Th. Corneille qu' il vaut beaucoup mieux retrancher le que. C' est l' usage le plus comun et le plus autorisé.
   4°. Se laisser, régit l' infinitif sans préposition. "Se laisser conduire, entraîner, etc. _ Se laisser aller, régit de plus à devant les noms et les verbes. "Il s' est laissé aller à des démarches, qui lui ont fait beaucoup de tort. "Ils se sont laissé aller à faire des supositions assez hardies. Fonten. = Hors de là le pron. pers. ne fait pas bien avec laisser. "Le nom, qu' on prend alors, se laisse aussi dans la vieillesse. Charles. H. du Japon. Il falait, on le laisse, ou plutôt, on le quite. Voy. une Rem. au mot RÉCIPROQUE. = Se laisser à une Église, c. à. d. y faire élection de sépultûre est encôre plus mauvais. C' est une expression provinciale et barbâre.
   5°. Il y a beaucoup de gens, qui disent, je me suis laissé dire, pour signifier, on m' a dit; j' ai ouï dire. Cette expression est tout-à-fait mauvaise, dit Th. Corneille; et La Touche était surpris que l' Acad. ne la condamnât pas dans les nouvelles Éditions, et qu' elle se contentât de dire que cette expression est du style familier. _ "Il est plus du vrai style familier de dire d' un livre, qu' on lit sans ennui, qu' il se laisse lire. "J' ai lu toute la vie de Madame de Montmorenci: elle se laisse lire. SEV.
   6°. Laisser, est subst. dans cette phrâse du st. famil. avoir le prendre ou le laisser, avoir le choix entre deux partis, de faire ou de ne pas faire, d' accepter ou de refuser. "L' homme sauvage a par tout le prendre ou le laisser dans la rencontre et le choix de la fuite ou du combat. J. J. Rouss.

LAIT


LAIT, s. m. LAITAGE, s. m. LAITERIE, s. f. LAITEUX, EûSE, adj. LAITIèRE, s. f. [, lètage, teri-e, teû, teû-ze, tiè-re: 1re è moy. 2e e muet au 3e, è moy. et long au dern.] Lait, est 1°. La liqueur blanche qui se forme dans les mamelles de la femme et des femelles des animaux. "Lait de femme, de chèvre, de brebis, de vache, d' ânesse, etc. = 2°. Certaine liqueur blanche, qui est dans les oeufs frais, quand ils sont cuits à propôs. = 3°. Suc blanc, qui sort de quelques plantes. = 4°. Il se dit de certaines liqueurs artificielles, par la ressemblance qu' elles ont avec le lait. "Lait d' amande; lait de chaux; lait virginal. = Le Proverbe dit que: "Le vin est le lait des vieillards. Voy. Dent, Frère, Vache.
   LAITAGE, ce qui se fait de lait, come beûrre, crème, fromage, etc. _ L' Acad. ne met pas ce mot: c' est un oubli. = Laiterie, lieu où l' on serre le lait des animaux, ou l' on fait la crème, le beûrre, les fromages. = Laiteux, eûse, se dit de certaines plantes, qui ont un suc semblable à du lait. = Laitière; femme, qui fait métier de vendre du lait. _ Vache, qui done beaucoup de lait; ou Nourrice, qui a beaucoup de lait. "Cette vache est une bone laitière. "Cette nourrice est bone laitière.

LAITE


LAITE, ou LAITANCE, s. f. LAITÉ, ÉE, adj. [Lète, lètance; lèté, té-e: 1re è moy. 2e lon. au 2d, è fer. aux 2 dern.] Laite, ou laitance, est cette partie des entrâilles des poissons mâles, qui est de substance blanche et molle, et qui ressemble à du lait câillé, d' où lui vient son nom. "Laite, ou laitance d' un hareng, d' un brochet, d' une carpe. = Laité, se dit des poissons, qui ont de la laite. "Hareng laité, carpe laitée.

LAITERIE


LAITERIE, LAITEUX, LAITIèRE, Voy. LAIT.

LAITON


LAITON, s. m. [Trév. et Richelet écrivent léton ou laiton. * Quelques-uns disent laton ou loton: ce sont deux barbarismes.] Cuivre rendu jaûne par le moyen de la calamine.

LAITûE


LAITûE, s. f. [Lètû-e: 1re è moy. 2e lon. 3e e muet.] Herbe potagère du genre des plantes laiteûses. "Laitûe pommée. Laitûe romaine.

LAMBEAU


LAMBEAU, s. m. [Lanbo: 1re lon. 2e dout. au sing. lon. au plur. Lambeaux.] Au propre, pièce d' une étofe déchirée. "Son habit est tout en lambeaux; s' en va par lambeaux. "Il y a laissé un lambeau de son habit. = Il se dit au figuré des ouvrages d' esprit: "On n' a retenu que quelques lambeaux (morceaux) de son discours. Acad. _ "Le temps détruit toutes chôses et les réduit en pièces et en lambeaux. TRÉV. Cette expression figurée est peu usitée hors de ce qui regarde les ouvrages d' esprit. = Lambeau, se prend en mauvaise part. On ne dit point un précieux lambeau, un lambeau éloquent.

LAMBIN


LAMBIN, INE, subst. LAMBINER, v. n. [Lambein, bine, biné: 1re lon. 3e e muet au 2d, é fer. au 3e.] Lambiner, agir lentement. Lambin, ine, celui ou celle qui lambine. "Il ou elle ne fait que lambiner. "C' est un lambin, une lambine. st. famil.

LAMBRIS


LAMBRIS, s. m. LAMBRISSAGE, s. m. LAMBRISSER, v. act. [Lanbri, bri-sage, bri-sé: 1re lon. dern. e muet au 2d, é fer. au 3e.] Lambris est un revêtement de menuiserie sur le plancher d' en haut, ou autour des murâilles d' une chambre, etc. = C' est aussi un revêtement fait avec de la latte et du plâtre au dedans de la couvertûre d' un galetas. = Lambrissage est l' ouvrage du maçon, ou du menuisier, qui a lambrissé. = Lambrisser, revétir de lambris.

LAME


LAME, s. f. 1°. Table de métal, fort mince: "Lame de cuivre, d' étain. = 2°. Clinquant d' or ou d' argent: "Habit tout couvert de lames. "Passement à deux, à trois lames. = 3°. Fer d' une épée, d' un couteau, d' un canif. = 4°. En termes de Marine, les vagues d' une mer agitée. = On dit, proverbialement, d' un homme, qui a l' esprit vif, qui réfléchit ou étudie beaucoup, et qui par là nuit à sa santé, que, la lame use le fourreau; et populairement, d' une femme fine et rusée, la bonne lame! la fine lame!

LAMENTABLE


LAMENTABLE, adj. LAMENTABLEMENT, adv. LAMENTATION, s. f. LAMENTER, v. act. [Lamantable, tableman, ta--cion, . 2e lon. 3e dout. au 1er, é fer. au dern.] Lamenter, plaindre, déplorer, regretter. Il est vieux comme verbe actif. "Lamenter la mort de ses parens. _ Il s' emploie neutralement: "Vous avez beau pleurer et lamenter. _ Son usage le plus ordinaire est avec le pron. pers. Se lamenter. "Des femmes, qui se lamentaient. "Vous vous lamentez en vain.
   LAMENTATION, plainte, acompagnée de gémissemens. "On n' entendit que lamentations. = Il ajoute à l' idée de plainte: la lamentation est une plainte forte et continuée. _ La plainte s' exprime par le discours; les lamentations sont acompagnées de gémissemens. "L' homme, qui se plaint, demande justice: celui, qui se lamente implore la pitié. Encycl. = Lamentation n' est que du st. famil. moqueur ou critique. "Que prétendez-vous avec vos lamentations? _ Les lamentations de Jérémie ont pâssé en proverbe. "Me revoilà dans mes lamentations de Jérémie: je n' ai reçu qu' un paquet cette semaine et je dois croire l' aûtre perdu. Sév.
   LAMENTABLE, déplorable, qui mérite d' être pleuré, et comme on disait aûtrefois, d' être lamenté. "Mort, accident lamentable. = Douloureux, qui excite à la pitié: "voix lamentable: cris lamentables. = Dans le style simple, il aime à suivre le substantif: En vers et dans le haut style, il peut le précéder élégamment.
   Des troupeaux expirans les lamentables voix.
       De Lille.
"Ce texte devient propre à mon lamentable sujet.
  LAMENTABLEMENT, d' un ton lamentable. "Il conta ce funeste accident si lamentablement, qu' il atendrit tous ceux qui l' écoutaient.

LAMIE


LAMIE, s. f. [2e lon. 3e e muet.] Monstre marin d' une grandeur extraordinaire.

LAMINAGE


LAMINAGE, s. m. LAMINER, v. act. LAMINOIR. s. m. Le 1er est l' action de laminer, c. à. d. de doner à une lame de métal une épaisseur uniforme par une compression toujours égale. Laminoir est la machine, qui sert à laminer.

LAMPâS


LAMPâS, s. m. [Lampâce, l' e sur ajouté très-muet.] En termes de Manège, tumeur au palais du cheval. = La Fontaine et M. l' Ab. Le Monnier ont doné ce nom au palais de l' homme.
   Vous humectiez volontiers le lampâs.
       La Font.
Va leur écorcher le lampâs.
L' Ab. Le Mon.

LAMPE


LAMPE, s. f. LAMPERON, s. m. LAMPION, s. m. [Lanpe, peron, pion: 1re lon. 2e e muet aux 2 premiers.] Lampe, vâse où l' on met de l' huile avec de la mêche, pour éclairer. "Lampe de verre, de cuivre, d' argent. "À~ la clarté de la lampe. = On dit, figurément (st. famil.) d' un homme, qui meurt par défaillance de nature, qu' il n' y a plus d' huile dans la lampe. = Lamperon est le petit tuyau ou languette, qui tient la mêche dans la lampe. = Lampion, petite lampe, dont on se sert dans les illuminations.
   M. Godeau a apelé la Lune.
   Lampe d' argent au ciel pendûe.
Cela rapèle le Poème de la Magdelène.
   La lune, par un trou, tout à fait obligeant,
   L' éclairoit tous les jours de sa lampe d' argent.
C' est du burlesque tout pur.

LAMPÉE


LAMPÉE, s. f. LAMPER, v. act. et n. [Lanpé-e, : 1re lon. 2e é fer. long au 1er] Lampée, grand verre de vin. Lamper, boire des lampées. "Il avala cinq ou six lampées. "Il lampa cinq ou six verres de vin. _ V. n. Il aime à lamper. Ces deux mots sont populaires et le verbe encôre plus que le substantif.

LAMPROIE


LAMPROIE, s. f. [Pron. lan-proa: en quelques Provinces on dit lampraie; mais mal.] Poisson de mer, qui ressemble à l' anguille, qui a des trous des deux côtés et qui entre au printemps dans les rivières. On apèle lamproyon une petite lamproie.

LANCE


LANCE, s. f. LANCER, v. act. LANCETTE, s. f. LANCIER, s. m. [lance, , cète, cié: 1re lon. 2e e muet au 1er, é fer. au 2d et au 4e, è moy. au 3e.] Lance, arme à long bois, qui a un fer pointu. "Tenir la lance en arrêt. Baisser la lance. "Un beau coup de lance. = On apelait aûtrefois lance un gendarme armé de lances. "Une compagnie de cent lances. = On dit proverbialement, venir, retourner à beau pied sans lance, c. à. d. à pied. "Madame de Chaulne arriva Dimanche. Mais savez-vous comment? à beau pied sans lance; entre onze heures et minuit. _ Rompre des lances pour quelqu' un; le défendre contre ceux qui l' ataquent. _ Baisser la lance, fléchir, mollir, se relâcher.
   LANCER, Darder, jeter avec roideur; lancer un trait, un dard, un javelot. _ Poétiquement, on dit que Dieu lance la foudre: et du Soleil, qu' il lance ses rayons sur la terre. _ Figurément, lancer des oeillades, des regards, des traits de raillerie. * M. l' Abé Le Monnier dit, lancer dans l' avenir des espérances sans nombre. Traduct. d' Horace. C' est outrer la métaphôre. = Lancer se dit aussi, des anciènes machines de guerre. "Elles lançaient de grosses pierres. = Se lancer, se jeter avec impétuosité. "Il se lancerait par une fenêtre plutôt que, etc. La Bruy. "Il se lança à travers les énemis. Aujourd' hui on dit plutôt, dans toutes ces phrâses, s' élancer: il s' élancerait par une fenêtre: s' élancer à travers les énemis. Marin. = En termes de chasse, lancer, c' est faire partir la bête du lieu, où elle se retire ordinairement: lancer un cerf, un loup, un sanglier.
   LANCETTE n' est pas un diminutif de lance. C' est un instrument de Chirurgie, servant à ouvrir la veine, à percer un abscês, etc. Doner un coup de lancette. "Enfoncer la lancette bien avant.
   LANCIER, Cavalier dont l' arme était une lance. "Une compagnie de Lanciers.

LANDE


LANDE, s. f. [1re lon. 2e e muet.] Grande étendue de terre, où il ne vient que des bruyères. Un pays plein de Landes. = On apèle figurément landes dans un ouvrage, des endroits peu agréables: "Il est obligé de pâsser par dessus, pour trouver un endroit, qui soit agréable. Cela s' apelle des landes... Il y en a beaucoup dans mes lettres avant que de trouver la prairie. Sév. La métaphôre est soutenûe.
   Lande, friche (synon.) Le premier anonce une plus grande étendue que le 2d: il y a des friches dans des cantons: il y a des landes dans des Provinces. Les landes sont de mauvaises terres: les friches sont des terres incultes, auxquelles il ne manque que la culture. Extr. des Nouv. Synon. Fr. de M. l' Ab. Roubaud.

LANGAGE


LANGAGE, s. m. LANGUE, s. f. [L' u dans le 2d est muet: il n' est là que pour doner au g un son fort qu' il n' a pas devant l' e: langhe.] Langue est 1°. cette partie qui est dans la bouche de l' animal, et qui est le principal organe du goût pour tous les animaux, et de la parole pour les hommes. = 2°. Langue et langage, idiôme, manière de parler d' une nation. "Le langage des turcs. La langue grecque. "Langage barbâre, inconu. Langue abondante, riche, féconde, ou pauvre, stérile. Langue mère, langue morte ou vivante, etc. = Quoique ces deux mots se confondent souvent, cependant on ne s' en sert pas toujours indiféremment. Quelquefois langage signifie discours, style. "Vous me tenez là un étrange langage, c. à. d. un discours étrange. "Son langage (son style) est fort pur. Langue ne vaudrait rien dans ces exemples. _ Celui de langage ne convient pas même toujours au lieu de discours.
   Vous en avez menti,
   Reprend le campagnard: et, sans plus de langage,
   Lui jette, par défi, son assiète au visage.       Boil.
Sans plus de langage ne serait pas aprouvé aujourd' hui. = Quand on veut marquer seulement la manière de s' exprimer d' un pays, on se sert de langue plutôt que de langage. "La langue maternelle, la langue française, anglaise, etc. et non pas le langage maternel, le langage français, etc. Ainsi l' on dit, bien parler sa langue, et non pas bien parler son langage, comme dit Racine le fils. "À~ ce maître en succèderait un autre, qui formerait cette jeunesse dans l' art de bien parler leur langage. = Mallebranche exprime parfaitement la diférence de langue et de langage: "Les hommes sont faits pour vivre en société: mais, pour l' entretenir, ce n' est point assez de parler une même langue; il faut tenir un même langage: il faut penser les uns comme les autres. = Il sait la langue latine, et la langue grecque peut s' exprimer en quatre manières; celle là dabord; ou bien, il sait la langue latine, et la grecque; ou, il sait la langue latine et grecque; ou enfin, il sait les langues latine et grecque. Les deux premières expressions sont à peu près également bonnes. (J' aimerais mieux la 2de). Les deux dernières ne valent rien du tout. On dit plus comunément, (et mieux) il sait le Latin et le grec. VAUG. TH. CORN. L. T.
   Langue de terre, espace plus long que large, qui ne tient que par un bout aux aûtres terres, et qui est environé d' eau de tous les aûtres côtés. "Il y a une langue de terre qui s' avance dans la mer.
   Langue fournit à plusieurs expressions du style familier. = Tirer la langue. Se moquer de... Avoir beaucoup de langue. Mol. être grand causeur. = Avoir la langue grâsse, grasséyer. = Avoir la langue liée, n' ôser parler de quelque chôse. = Avoir un chôse sur le bout de la langue, se dit d' une chôse qu' on sait, mais dont on ne se souvient pas au moment. = Prendre langue, s' informer de ce qui se pâsse avant que d' agir. "Si après avoir bien pris langue, ce généreux guerrier revient à nous, sa gloire sera célébrée par tous les hommes. Mde. Dacier. Iliade. L' expression n' est pas assez noble. = Avoir la langue bien pendûe, ou bien afilée; parler beaucoup; aimer à parler, parler facilement. "Voilà un gueux qui a la langue bien pendue. Mde. Dacier, Odyssée. Il arrive tant d' accidens aux femmes en couche, et vous avez la langue si bien pendue, à ce que dit Mr. de Grignan, qu' il me faut du moins neuf jours de bonne santé pour me faire partir joyeûsement. Sév. = Jeter sa langue aux~ chiens; renoncer à chercher à deviner. "Devinez-le: je vous le donne en trois. Jetez-vous votre langue aux chiens? Hé bien! il faut donc vous le dire. Sév.
   Rem. À~ force de vouloir polir notre langue, il est aisé de s' apercevoir qu' on l' a apauvrie et énervée. Nous avons perdu une infinité de tours et d' expressions qui n' ont pas été remplacés. Ils ne le sont pas fort avantageûsement par les néologismes modernes. On fut trop délicat dans le dernier siècle. On ne l' est pas assez aujourd' hui. Il est des points sur lesquels on respecte trop un usage ancien, mais déraisonable. Il en est d' autres sur lesquels on secoue mal-à-propos son joug, et c' est souvent lorsqu' il est plus conforme au génie de la langue.

LANGE


LANGE, s. m. [Dans le Dict. Gram. on le marque mal-à-propôs fém.] Morceau d' étofe, dont on envelope les enfans au maillot. Le Pape envoie des langes bénits au Roi, à la naissance du Dauphin. "J. C. naît dans un étable: il est envelopé de langes paûvres et grossiers. P. Grifet.

LANGOUREUX


LANGOUREUX, EûSE, adj. LANGOUREûSEMENT, adv. LANGUEUR, s. f. [Lan--gou-reû, reû-ze, reû-zeman, lan-gheur: 1re lon. 3e lon. aux trois premiers.] Langueur, état d' une persone qui languit. Langoureux, qui est en langueur ou qui marque de la langueur. Langoureûsement, d' une manière langoureûse. "Être, tomber en langueur. "Il est encôre tout langoureux. "Il parle d' un ton langoureux. "Regards langoureux. "Regarder langoureûsement.
   Rem. 1°. Langueur se dit aussi de l' ennui qui procède d' un désir violent. Ainsi, tenir quelqu' un en langueur, c' est lui faire atendre longtems ce qu' il désire. Il n' a guère ce sens que dans cette locution, et dans le langage des amoureux. = Il ne se dit point de toute sorte de maladies corporelles. C' est donc mal traduire les passages de l' Évangile, que de dire: "guérissant toute sorte de langueurs: il a pris lui-même nos langueurs.
   2°. Langoureux suit ou précède le substantif, au choix du Poète, guidé par l' oreille et le goût.
   Leur guitarre, trop langoureuse,
   Endormit les oiseaux des bois.
       Gress.
Les langoureux accens de ta mûse plaintive.
Il est substantif dans cette phrâse; faire le Langoureux (le passioné) auprês des Dames.

LANGOUSTE


LANGOUSTE, s. fém. [L' s s' écrit et se prononce.] Sorte de grôsse écrevisse de mer.

LANGUE


LANGUE, voy. LANGAGE.

LANGUETTE


LANGUETTE, s. fém. [Langhète: 1re lon. 2e è moy. 3e e muet.] Petite langue. Il ne se dit qu' en termes d' arts, de diférentes chôses, qui ont à peu près cette figûre, et qui servent à divers usages.

LANGUEUR


LANGUEUR. Voy. LANGOUREUX.

LANGUIR


LANGUIR, v. n. LANGUISSANT, ANTE, adj. LANGUISSAMMENT, adv. [Langhi; san, sante, saman: 1re lon. 3e lon. au 2d. et au 3e, br. au 4e.] Languir c' est, 1°. Être consumé peu à peu par une maladie qui abat les forces. "Depuis longtems il languit: il devrait déjà être mort. = 2°. Soufrir un suplice lent. "Languir dans les tourmens, dans une prison, dans un long exil. Languir de misère. = 3°. Soupirer après, atendre avec impatience. "Languir d' amour. "Nous ne faisons plus que languir après notre départ. Sév. "Il languissoit de revoir sa femme et ses enfans. Prévôt, Hist. des Voy. = 4°. Languir pour s' ennuyer ne vaut rien, dit Vaugelas. "Quand j' ai été trois mois à Paris, je languis, et je meurs d' envie de me retourner. _ Avec ennui, il peut se dire, mais c' est dans le sens marqué au n°. 3°. Languir d' ennui. = * En Provence, on dit se languir, pour dire, s' ennuyer. Il est plus mauvais encôre que le neutre languir. = 5°. Languir se dit, figurément, des chôses. "Les afaires languissent, traînent en longueur. La conversation languit, n' est pas animée. Ce discours, cet ouvrage languit; il intéresse peu. Les nouvelles, les plaisirs languissent; il y en a peu.
   LANGUISSANT, qui languit. "Il est languissant dans un lit, dans une prison. Voix languissante. Discours, style languissant. = Dans la prôse ordinaire, il aime à suivre le subst. En vers et dans la prôse poétique, il peut suivre ou précéder.
   La Nature languissante
   Se ranime et se nourrit.
   Cette triste brebis, l' espoir de mon troupeau,
   Dans sa fuite, a perdu son languissant agneau.
       Gress.
  À~ peine il jette encor de languissantes flammes.
      L. Rac.
  LANGUISSAMMENT, d' une manière languissante. "Parler, regarder languissamment.

LANIèRE


LANIèRE, s. f. [2e è moy. et long: la-niè-re.] Sorte de courroie longue et étroite. "La lanière d' un fouet.

LANSQUENET


LANSQUENET, s. m. [Lanskenè: 1re lon. 2e e muet, 3e è moy. On écrivait autrefois landsquenet.] 1°. Autrefois, fantassin Allemand. "Il avoit quatre cens lances et dix mille lansquenets. = 2°. Aujourd' hui, sorte de jeu de hazard, où l' on joûe avec des cartes. "Jouer au lansquenet.

LANTERNE


LANTERNE, s. fém. LANTERNER, v. neut. LANTERNERIE, s. f. LANTERNIER, NIèRE, s. m. et fém. [2e ê ouv. 3e e muet au 1er et au 3e, é fermé au 2d et au 4e, è moyen et long au 5e.] Lanterne, 1°. ustensile ou vâse où l' on met de l' huile, de la chandelle ou de la bougie pour éclairer, et qu' on suspend, ou qu' on porte à la main. "Lanterne de corne, de verre, de toile, etc. Allumer les lanternes. = 2°. En Architectûre, tourelle ouverte, mise sur un dôme ou sur le comble d' une maison. = 3°. Tribune grillée, d' où, sans être vu, l' on peut voir et écouter. "Au Parlement il y a des lanternes. = 4°. Lanterne magique, lanterne qui, par des verres disposés de certaine façon, fait voir diférens objets sur une toile ou sur une murâille blanche. = 5°. Lanternes~ ou lanterneries, fadaises, discours frivoles, contes impertinens. "Ce sont des lanternes. Dire des lanterneries. "Le moyen qu' ils vous laissent lire de telles lanterneries. Sév. = Lanterner, être irrésolu, perdre le tems en des chôses de rien. "Il ne fait que lanterner, et n' avance rien. _ V. act. Fatiguer par des discours impertinens et hors de propôs. "Je ne sais ce qu' il me vient lanterner tous les jours. = Lanternier ne se dit point au propre, pour faiseur de lanternes. On ne le dit qu' au figuré: diseur de fadaises. "C' est un lanternier _ Homme irrésolu, qui lanterne, avec qui l' on ne peut rien conclûre. "Ce n' est qu' un lanternier. "C' est un lanternier que son père, dont le style et la mauvaise volonté me mettent en colère. Sév. = Tous ces mots sont du style familier.

LANTIPONAGE


LANTIPONAGE, s. m. LANTIPONER, v. n. et act. Le premier se dit de l' action de lantiponer, c. à. d. de tenir des dicours frivoles, inutiles, importuns. "Point tant de lantiponage. "M. le Médecin, que de lantiponage! Mol. "Il ne fait que lantiponer. Que me vient-il lantiponer? Ils sont populaires.

LAPER


LAPER, v. n. Boire en tirant l' eau avec la langue. Il ne se dit proprement que du chien.

LAPEREAU


LAPEREAU, s. m. [Lapero. "On ne fait presque pas sentir l' e: on prononce lapro. Marin. 2e e muet, 3e dout. au sing. lon. au plur. lapereaux.] Jeune lapin.

LAPIDAIRE


LAPIDAIRE, s. m. [Lapidère: 3e è moy. et lon.: 4e e muet.] Ouvrier qui tâille les pierres précieûses. = Adj. style lapidaire, style des inscriptions sur la pierre, le marbre, le cuivre.

LAPIDATION


LAPIDATION, s. f. LAPIDER, v. act. [Lapida-cion, .] Lapidation est l' action de lapider, d' assommer à coups de pierres. Ce subst. est peu usité. L' Acad. le met sans remarque, et ne done pour exemple que "lapidation de St. Étienne. = Lapider, dans le propre, n' a lieu que dans deux ocasions; savoir, quand il s' agit du suplice dont les Juifs punissaient de certains crimes, suivant la loi de Moïse; et quand il s' agit de la mort des Martyrs. "Les Juifs lapidoient les adultères, etc. "Ils lapidèrent St. Étienne. _ On ne dirait pas d' un homme qu' on aurait poursuivi à coups de pierre, et qu' on aurait tué, il a été lapidé. Mais dans le figuré, nous nous servons élégamment de ce mot, en conversation. "Si je faisois cela, on me lapideroit. "Je me ferois lapider pour vous. Bouh. "Voilà mon ancienne thèse, qui me fera lapider un jour; c' est que le public n' est ni fou, ni injuste. Sév. Il l' est par intervales.

LAPIN


LAPIN, INE, s. m. et fém. Petit animal sauvage, qui creûse sous terre. "Lapin de garenne, lapin de clapier. = Lapine, femelle du lapin. "Une lapine prête à mettre bâs. = On dit, populairement, d' un homme habillé de neuf: brâve comme un lapin; et d' une femme qui fait beaucoup d' enfans: c' est une lapine, une vraie lapine.

LAPS


LAPS, s. m. [On pron. le p et l' s.] Terme de Droit. Laps de tems, écoulement, espace de tems. "Après un grand laps de tems. "Cette coutume s' est abolie par laps de tems.

LAQUAIS


LAQUAIS, s. m. [Lakê; 2e ê ouv. et long.] Valet de livrée; valet de pied. Voy. VALET.

LARCIN


LARCIN, s. m. [Lar-cein.] 1°. Action de celui qui dérobe, qui prend furtivement. "Faire, comettre un larcin. = 2°. La chôse dérobée. "Receler un larcin. _ Figurément. "Leurs disputes ne rouloient que sur des larcins d' idées. Marm. "Les plus beaux endroits de son livre sont des larcins.

LARD


LARD, s. m. LARDER, v. act. LARDOIRE, s. f. LARDON, s. m. [Lar, le d ne se prononce jamais; lardé, doâ-re, don: 2e é fer. au 2d, lon. au 3e.] Lard, partie grâsse qui est entre la couenne et la chair du porc. _ On le dit aussi des baleines, marsouins et aûtres grôs poissons de même natûre. = Lardon, petit morceau de lard, coupé en long, dont on pique les viandes. = Larder, mettre des lardons à... = Lardoire, brochette servant à larder.
   On dit, proverbialement, d' un avâre, vilain comme lard jaûne; d' un bon ménager, qu' il ne jète pas le lard aux chiens; d' une persone fort grâsse, grasse à lard; de celle qui dort la grasse matinée, qu' elle fait du lard. = Larder (percer) de coups d' épée. = Lardon, brocard, mot piquant. "Chacun lui done son lardon. "Tirer des lardons. Rousseau dit, jeter.
   Celui qui mord ses amis en cachette,
   Qui rit tout bâs des lardons qu' on leur jette.
La métaphôre est plus naturelle avec tirer, qu' avec jeter; mais celui-là n' aurait pas acomodé le Poète.

LâRES


LâRES, s. m. pl. Les Païens apelaient ainsi les Dieux domestiques. On met ce mot ordinairement au pluriel. Les Antiquaires l' emploient quelquefois au sing. "Cette figure represente un Dieu lâre.

LARGE


LARGE, adj. LARGEMENT, adv. LARGEUR, s. f. [2e lon. aux 2 1ers. en au 2d a le son d' an.] Large est, 1° une des dimensions du corps. Il exprime dans la surface, le côté le moins long. "Plus long que large. Aussi large que long, c. à. d. quarré. "Chemin large. "Chapeau trop large d' entrée, Voy. Long, à la fin. = 2°. Fig. Avoir la conscience large; être peu scrupuleux. = On dit proverbialement, acomodez-vous, le pays est large, pour dire, qu' on est en lieu où l' on peut prendre toutes ses comodités. = 3°. S. m. "Cette étofe a tant de large. "Prendre ou gagner le large, s' enfuir. = 4°. Au large, adv. "Se mettre au large. "Être logé fort au large. = Être au large, c' est aussi être dans l' opulence; et mettre au large, mettre dans un état plus aisé. = 5°. * Large s' est dit autrefois pour libéral: il est resté dans ce Proverbe: autant dépend (dépense) chiche que large: l' avarice mal entendue ne fait point de profit. = Largesses est maintenu honorablement: large, en ce sens, a péri.
   LARGEMENT, abondamment. "Il a été payé largement. _ Il n' a que l' ancien sens de large, marqué n°. 5°. = * Leibnitz l' emploie dans le sens du latè sumpta de l' École; et en ce sens, il est oposé à strictement. "Les livres Canoniques pris largement. "Il en fait le dénombrement d' une manière large. Ce sont des latinismes.
   LARGEUR, étendue d' une chôse considérée comme large. Il ne se dit que dans la 1re acception. "La largeur d' un fôssé, d' une rivière. "Cette toile a tant de largeur.

LARGESSE


LARGESSE, s. f. [Largèce? 2e è moy. 3e e muet.] Libéralité. "Faire largesse au peuple. = Il se dit ordinairement au pluriel. "Faire de grandes largesses.

LARIGOT


LARIGOT, s. m. Autrefois, petit flageolet. Aujourd' hui, un des jeux de l' orgue. = En style prov. boire à tire larigot, excessivement.

LARME


LARME, s. fém. LARMOYANT, ANTE, adj. LARMOYER, v. n. [3e lon. au 2d et au 3e, é fermé au dern. moa-ian, iante, .] Larme, 1°. goutte d' eau qui sort de l' oeuil, et dont la cause la plus ordinaire est la douleur. Il y a pourtant des larmes de joie. "Il ne jeta qu' une larme ou deux. Verser des larmes, un torrent de larmes. "Se fondre en larmes. "Essuyez vos larmes: mettez-fin à vos larmes. = Ce mot fournit à quelques expressions du style familier. = Pleurer à chaudes larmes. "Il se mit à pleurer à chaudes larmes sur cet arc, dont Ulysse, s' étoit servi. Mde Dacier, Odyssée. = Rire aux larmes. "J' ai ri aux larmes de cette peinture que vous nous faites, etc. Sév. = Les grosses larmes expriment une grande douleur. "Les grosses larmes me sont tombées des yeux, quand je me suis représenté le spectacle de ce pauvre Doyen, pénétré de douleur. La même. = Avoir le don des larmes, pleurer facilement. "Ne soyez jamais en peine de ceux qui ont le don des larmes! Je prie Dieu de ne jamais sentir de ces douleurs, où les yeux ne soulagent point le coeur. La Même. Voy. CROCODILE. = 2°. Goutte ou petite quantité de quelque liqueur. "Une larme de vin. "Je n' en veux qu' une larme. = 3°. Suc, qui coule de plusieurs arbres, ou plantes, quand on les tâille, comme le sapin, la vigne, etc.
   LARMOYER, pleurer, jeter des larmes. Larmoyant, qui fond en larmes. "On la trouva toute larmoyante. = Ces mots étaient déjà vieux du tems de La Bruyère, et il paraît les regretter. L' Acad. les met sans remarque. On les emploie encôre dans le st. familier.

LâRRON


LâRRON, ESSE, s. m. et fém. LâRRONNEAU, ou LâRONEAU, s. m. [Lâron, ronèce, rono: 1re lon. pron. l' r fortement: 3e è moyen au 2d; dout. au sing. du 1er, lon. au plur. lârroneaux.] Celui, ou celle qui dérobe, qui prend furtivement. "C' est un lârron, une lârronesse. "Il est lârron comme une chouette, comme une pie. (st. prov.) = Lârron, fripon, filou, voleur (synon.) Le lârron prend en cachette, il dérobe: le fripon prend par finesse, il trompe: le filou prend avec adresse, il escamote: le voleur prend de toute manière, et même de force, et avec violence. "Le lârron craint d' être découvert; le fripon d' être reconu; le filou d' être surpris; et le voleur d' être pris. GIR. Synon. = Le Proverbe dit: l' ocasion fait le lârron; l' on est tenté par la présence de l' objet. = Au plus lârron la bourse; se confier à celui dont on se devrait défier davantage. = Il ne faut pas crier au lârron, dit-on, quand on a acheté une marchandise ce qu' elle vaut. Voy. FOIRE.
   LâRONEAU, petit lârron qui ne dérobe que des chôses de peu de valeur. Il n' est guère en usage. Acad.

LARVES


LARVES, s. f. pl. Les Poètes donaient ce nom aux âmes des méchans qu' on croyait errer sous des figûres hideûses. = Quelques Auteurs l' ont employé au figuré. Je ne citerai que Mr. Cerutti. "Ces tourbillons, ces monades et tout cet amâs de larves systématiques, qui ont séduit la Philosophie pendant son sommeil.

LâS


*LâS! Interj. S' est dit autrefois pour Hélas! "Lâs! que j' ai souffert de peine!

LâS


LâS, LâSSE, adj. LASSANT, ANTE, adj. LASSER, v. act. LASSITUDE, s. fém. [Lâs, lâce, san, sante, , citude: 1re lon. aux deux premiers: 2e lon. au 3e et 4e, é fer. au 5e.] Lasser, fatiguer. Lâs, qui est fatigué. Lassant, fatigant. Lassitude, état de celui qui est lâs, qui a essuyé de grandes fatigues. "Le chemin l' a fort lassé. "Une trop grande contention lasse l' esprit. "Il est lassé du chemin, du travail. "Les Provinces, lassées de la tyrannie des Gouverneurs, étoient sur le point de se soulever. "Je suis bien lâs: elle est fort lâsse. "Travail lassant; besogne lassante. "Lassitude causée par un travail violent.
   I. Lasser, fatiguer, (synon.) La continuation d' une même chôse lasse: la peine fatigue. "On se lasse à se tenir debout: on se fatigue à travailler. "Être lâs, c' est ne pouvoir plus agir: être fatigué; c' est avoir trop agi. _ Dans le sens figuré, un supliant lasse par sa persévérance; et il fatigue par ses importunités. On se lasse d' atendre, on se fatigue à poursuivre. GIR. Synon. Voy. plus bas LASSITUDE. = Se lasser régit à quand il signifie se fatiguer; et de, quand il veut dire, être lâs ou ennuyé de faire, etc. "Se lasser à répéter, et se lasser de répéter les mêmes chôses. "On se lasse plus à demeurer debout qu' à marcher. "Il se lasse d' entendre toujours les mêmes chôses. "Être lassé. Voy. plus bâs une Rem. aprês Lâs.
   II. LâS, ennuyé régit de devant les noms et les verbes: "Je suis lâs de tout cela. "Il est lâs de toujours demander, sans jamais rien obtenir.
   D' autant plus alarmé, que déjà lâs de feindre,
   Mon coeur n' est point nourri dans l' art de se contraindre.
       Crébillon, Sémiramis.
Le Proverbe dit: on va bien loin quand on est lâs. Mde. de Sévigné le raporte au sujet des dépenses qui excèdent le revenu; et elle continue joliment la métaphôre~. "On va bien loin, dit-on, quand on est lâs; mais quand on a les jambes rompues, on ne va pas du tout. On apèle populairement, lâs d' aller, un homme mou, paresseux et lâche. "C' est un lâs d' aller.
   Rem. On dit plutôt être lâs d' aller, ou se lasser de, qu' être lassé de. Les Dieux... n' étaient pas encôre lassés de me persécuter. Télém.
   Mais, lassés d' être en butte aux traits des satiriques,
   L' espoir de se venger les transforme en critiques.
       L' Ab. du Resnel.
Dites, n' étaient pas encôre lâs de me persécuter, ou ne se lassaient pas encôre de, etc. _ Lâs, ou se lassant d' être en butte, etc.
   III. Lassitude, fatigue (synon.) La lassitude se fait quelquefois sentir, sans qu' on ait rien fait. Elle vient alors d' une disposition du corps, et d' une lenteur dans la circulation du sang. (les Médecins l' apèlent lassitude spontanée). La fatigue est toujours la suite de l' action. Elle supôse un travail rude, ou par la dificulté, ou par la longueur. Voyez plus haut, LASSER, FATIGUER.
   On dit, adverbialement, de pure lassitude, plutôt que par lassitude. "L' autre se taisant de pure lassitude, ne parle plus de moi, ni en bien, ni en mal. Voit.

LATIN


LATIN, INE, adj. et subst. Nom de peuple. Discours latin; harangue latine; l' Église latine. = S. m. Le latin, la langue latine. "Les Latins et les Grecs, ceux qui sont de l' Église latine ou de la grecque. = On dit, proverbialement, être au bout de son latin, ne savoir plus que dire, ni que faire pour venir à bout de quelque chôse. = Y perdre son latin, faire des éforts inutiles. "Elle est à l' agonie d' un travail, qui ne finit point, et où Bouchet perd son latin. SÉV. _ * Leibnitz le dit des Puissances, ce qui est ridicule: "Les Puissances maritimes et tant d' autres y ont perdu leur latin. = Du latin de cuisine; du mauvais latin. = Le pays latin; l' Université, les collèges. = Il est bon latin, il sait bien le latin.
   REM. Latin a fort mauvaise grâce, quand il précède le substantif, ainsi que les autres noms de peuple.
   Nous sommes délaissés, et les latines Mûses
   Sans espoir de secours sont tristes et confuses.
       Desmarets.
Les françaises Mûses serait aussi ridicule.

LATINISER


LATINISER, v. act. LATINISME. s. m. LATINISTE, s. m. LATINITÉ, s. f. [Lati--nizé, nisme, niste, nité: dern. é fer. au 1er et au dern. e muet au 2d et au 3e.] Latiniser un nom, c' est lui doner une terminaison latine. Arnaud, Arnaldus. = Latinisme, construction, tour de phrâse propre de la langue latine. M. Formey est plein de latinismes et de germanismes. = Latiniste, qui entend et parle bien ou mal la langue latine. "Bon ou mauvais latiniste. = Latinité; langage latin. "Sa latinité n' est pas pûre. = On apèle la basse latinité, le langage des Auteurs latins depuis l' irruption des Barbâres en Occident.

LATITUDE


LATITUDE, s. f. Terme de Géographie. La distance d' un lieu à l' égard de l' Équateur. En Astronomie, la distance par raport à l' Écliptique. = Autrefois on donait à ce mot un emploi plus étendu. Bossuet a encôre dit. "Il faut prendre ces façons de parler avec une certaine latitude, c. à. d. dans un sens moins rigoureux.

LATRIE


LATRIE, s. f. [2e lon. 3e e muet.] Culte de latrie, qui n' est dû qu' à Dieu seul. De là Idolatrie. C' est tout l' emploi de ce mot.

LATTE


LATTE, ou LATE, s. f. LATTER, ou LATER, v. act. LATTIS ou LATIS, s. m. [2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Late est une pièce de bois, longue, étroite et plate, que l' on cloûe sur des chevrons, pour porter la tuile ou l' ardoise, ou pour servir à des cloisonages ou à des lambris. Later, garnir de lattes. Latis, arrangement des lates sur un comble.

LAVAGE


LAVAGE, s. m. 1°. Action de laver. "Le lavage des vitres. = 2°. Trop grande quantité d' eau répandue pour laver. "Voilà un grand lavage pour bien peu de chôse. = 3°. Breuvages où l' on a mélé trop d' eau. "Ce vin, cette soupe n' est que du lavage. = 4°. Trop d' eau ou d' autres breuvages pris par remède. "Vous vous troûverez mal de tout ce lavage.

LAVANDE


LAVANDE, s. f. Plante aromatique. "Eau de lavande.

LAVANDIèRE


LAVANDIèRE, s. f. [3e è moy. et long.] Femme, qui lâve la lessive.

LAVANGE


LAVANGE, s. f. Grande quantité de neige, qui tombe tout à coup des montagnes.

LAVASSE


LAVASSE, s. f. [Lavace] Pluie, qui tombe tout-à-coup, avec impétuosité.

LAUDATIF


*LAUDATIF, IVE, adj. Mot nouveau. Qui loûe. "Exagération oratoire et laudative. L' Ab. Grosier. _ M. Grosson apèle M. Thomas le créateur, en quelque façon, de l' éloquence laudative. = Ce mot n' a pas l' air de faire fortune.

LAUDES


LAUDES, s. f. pl. [Lôde.] Cette partie de l' Office divin, qui se dit immédiatement après Matines.

LâVE


LâVE, s. f. [1re lon. 2e e muet.] Matière fondûe, qui sort des volcans, dans le tems de l' éruption.

LâVEMENT


LâVEMENT, s. m. LAVER, v. act. LAVETTE, s. f. LAVEUR, EûSE, s. m. et f. [Lâveman, lavé, vète, veur, veû-ze: l' â est long devant l' e muet: il lâve, lâvera, etc. 2e e muet au 1er, é fer. au 2d, è moy. au 3e lon. au dern.] Lâvement, est 1°. l' action de laver. Il ne se dit, en ce sens, que du lâvement des piés et des autels; cérémonies religieûses. = 2°. Et ordinairement clystère, remède. Voy. CLYSTèRE.
   LAVER, nettoyer avec de l' eau ou avec quelque aûtre chôse de liquide. "Laver la lessive; se laver les mains, les pieds, la bouche; et non pas laver ses mains, etc. "Laver une plaie avec du vin. "La pluie a bien lavé les rûes. = V. n. Se laver les mains avant que de se mettre à table. "Doner à laver. = On dit, dans le style familier, s' en laver les mains, déclarer qu' on n' est pas responsable de ce qui peut arriver. Allusion à ce que fit Pilate.
   Je m' en lave les mains, Seigneur, c' est votre affaire.       Ducerc.
Laver la tête, ou la coife, ou le beguin, suivant les persones, à qui ou de qui l' on parle; faire une vive réprimande. "Ce qu' il avoit à faire n' étoit autre chôse que d' avoir le plaisir de lui laver sa cornette. SÉV. Benserade, dans ses Métamorphoses en Rondeaux, parlant du Déluge, dit que:
   Dieu lava bien la tête à son image.
Peut-on, dit Boileau, à propos d' une si grande chôse, que le Déluge, dire rien de plus petit, ni de plus ridicule que ce quolibet. = Le Proverbe dit, qu' à laver la tête d' un âne, ou d' un môre, on y perd sa lessive. = Laver ses péchés avec ses larmes, les pleurer. = Se laver d' un crime, prouver son inocence. = On dit, en parlant d' un fleûve qu' il lâve les murâilles d' une ville, pour dire qu' il y pâsse tout auprès. = On dit plutôt et plus noblement qu' il les baigne.
   LAVETTE; petit bout de torchon, dont on se sert pour laver la vaisselle.
   Laveur, veûse; celui, celle qui lâve. "Laveur de vaisselle; laveûse d' écuelles.

LAVOIR


LAVOIR, s. m. [La-voar.] Lieu destiné à laver, ou le linge, ou la vaisselle; ou dans les comunautés et les sacristies, à se laver les mains.

LAURIER


LAURIER, s. m. [Lo-rié: 1re dout. 2e é fer.] Arbre toujours verd. Il est le symbole de la victoire; cueuillir des lauriers; moissoner des lauriers. Flétrir ses lauriers, déshonorer sa victoire.

LAVûRE


LAVûRE, s. f. [2e lon. 3e e muet.] L' eau, qui a servi à laver les écuelles. Hors de là on dit lavage.

LAXATIF


LAXATIF, IVE, adj. [Laksatif, tive: 3e lon. au 2d.] Qui a la propriété de lâcher le ventre. "Remede laxatif. "Tisane laxative.

LAYETIER


LAYETIER, s. m. LAYETTE, s. f. [Lé--ie-tié, lé-iè-te: 1re é fer. 2e e muet au 1er, dont la dern. é fer., è moy. au 2d, dont la dern. e muet.] Layette, est 1°. Un tiroir d' armoire, où l' on serre des papiers. = 2°. Petit cofre de bois. = 3°. Le linge, les langes, le maillot et tout ce qui est destiné pour un enfant nouveau né. "Doner une layette. = Layetier qui fait des layettes; n°. 2°.

LAZARET


LAZARET, s. m. [Lazarè: 3e è moy.] Lieu destiné pour y faire faire quarantaine à ceux qui viènent des lieux infectés, ou soupçonés de peste.

LE


LE, article masc. et pronom. [e muet: les gascons le prononcent comme s' il était fermé: lé roi: c' est une faûte grossière et fort comune dans les Provinces méridionales.] La déclinaison de le article est: le, du, au, le, du. Plur. les, des, aux, les, des. Devant une voyèle ou une h muette, l' e s' élide, et il se décline alors l' , de l' , à l' ; l' , de l' : l' amour; de l' amour, l' homme, à l' homme, etc.
   1°. Quand il est pronom, il doit toujours suivre les pronoms personels et non pas les précéder. La Poésie même n' autorise pas à transposer ces pronoms. On doit dire, p. ex. vous vous le figurez; je vous le donerai, et non pas je le vous donerai; vous le vous figurez. Malherbe avait coutume de les transposer de la sorte: "Nous le vous amenons; je le vous dis en prôse, pour; nous vous l' amenons, je vous le dis. Balzac le fait encôre plus souvent, qui le vous confirme, etc. de le vous dire, etc. Vaugelas improuvait cette construction, La Mothe le Vayer la trouvait fort bonne; mais dès le tems de Ménage elle avait vieilli; et il assûre que ceux, qui écrivaient avec délicatesse, ne s' en servaient plus. Le P. de Neuville a pourtant dit encôre, représentez-le vous, etc. Il a voulu éviter de dire, représentez-vous le, qui est dur: mais l' un ne vaut pas mieux que l' aûtre. Il devait prendre un aûtre tour, ou substituer le nom au pronom: "Représentez-vous cet enfant chéri entre les brâs d' une mère vertueûse, etc. Serm. sur l' Éducation. = Exceptez le pron. pers. de la 3e. pers. lui, leur, qui doit suivre le. Ce serait mal parler que de dire, je lui le donerai: il faut dire, je le lui donerai. = Plusieurs, dit Vaugelas, retranchent ce pron. relatif le dans ces ocasions; et disent, il faut que je lui fasse voir, au lieu de: il faut que je le lui fasse voir. Amiot le dit toujours de même, pour éviter la cacophonie de le lui, le leur, ce qui n' est pas une raison suffisante pour laisser un mot si nécessaire. Que si l' on veut éviter la rudesse de ces deux mots mis ensemble, il faut, dit Th. Corneille, prendre un aûtre tour, ce qui est quelquefois assez difficile pour écrire naturellement. = Malherbe a dit aussi:
   Que ce qu' elle est à cette heure,
   Elle soit jusqu' à la mort.
Il faut, pour parler correctement, dire, elle le soit. Nos anciens, dit Ménage, auroient dit, el' le soit = Madame de Sévigné a dit encôre. Demandez-lui, pour, demandez-le lui. _ Depuis quelque tems cet ancien usage a repris faveur, mais seulement dans le style familier. "Cela est cruel sans doute, et je lui ai dit cent fois. Marm. Je le lui ai dit, etc. "Vous croyez? _ Oui je le crois. Id. Vous le croyez?
   Les belles tous les jours vous trompent: on leur rend.       Gresset.
On le leur rend.
Je ne suis point ingrate et je lui rendrai bien.Id.
Je le lui rendrai. "Sa santé ne lui ayant pas permis. Henaut. Ne le lui ayant pas permis. _ Cela peut être bon dans le discours familier: encôre l' afectation de le dire toujours de la sorte peut paraître avoir quelque chôse de précieux. Mais dans le haut style cela n' est pas pardonable. Racine avait dit dans les Frères Ennemis, Tragédie par où il débuta, et qu' il ne revit plus.
   Il veut que je vous voie, et vous ne voulez pas.
Pour, vous ne le voulez vous pas. La vivacité de la Poésie, dit avec raison son fils, rend cette faûte excusable.
   2°. Il ne faut pas trop éloigner le pronom le du substantif, auquel il se raporte. Boileau a fait cette faûte dans son Lutrin.
   Ce spectacle n' est pas, pour amuser nos yeux,
   Dit-il, le temps est cher; portons le dans le temple.
   Lui-même se courbant, s' aprête à le rouler...
Ces deux le se raportent à Lutrin, qui est quatre vers plus haut. Cela n' est pas régulier. = Racine a fait la même faute dans Britannicus.
   Vos jours, toujours sereins, coulent dans les plaisirs.
   L' Empire en est pour vous l' inépuisable source,
   Ou, si quelque chagrin en interrompt la course,
   Tout l' Univers soigneux de les entretenir,
   S' empresse à l' effacer de votre souvenir.
Les est beaucoup trop éloigné de plaisirs et le de chagrin. = Et dans Bajazet.
   Hélas, je cherche envain, rien ne s' offre à ma vûe:
   Malheureûse, comment puis-je l' avoir perdûe.
Trois vers après, on voit qu' il est question d' une lettre, qui avoit été perdûe. L' éloignement du pronom relatif est d' autant plus irrégulier dans cette ocasion, qu' il ocasione une équivoque, et qu' on peut raporter à vûe, qui précède immédiatement l' expression, l' avoir perdûe.
   3°. Le pronom, supléant pour le nom, ne devrait point paraître dans une phrâse où le nom même est employé. Il y parait pourtant régulièrement, et il done la facilité au régime de précéder le verbe. "Ce coeur, que toute la France auroit aujourd' hui droit de nous envier; ce coeur, si digne de Dieu, il a voulu que nous le possédassions, et que nous en fussions les dépositaires. Bourdal. Or. Fun. de Louis de Condé. "Les remontrances les plus justes et les plus respectueûses, l' adulation les travestit en une témérité punissable. Massill. "L' apareil des éloges est doné à l' usage et à la vanité: l' admiration secrette et les louanges~ réelles, on ne les done qu' à la vertu et à la vérité. Id. Ce tour est très-familier au P. de Neuville, et il est plus du haut style que de la conversation. Cependant on peut quelquefois l' employer dans le discours familier. "Ce qu' elle me disait, je crus l' aprendre encôre en l' entendant raconter par elle-même. Mariv. "Le cachot qu' on me promet, empêchez qu' on ne me le tienne. Id.
   4°. On ne doit point mettre le, le, la, après des mots, qui sont employés indéfinement. Les phrâses suivantes sont condamnables pour cette raison. "Vous avez droit de chasse, et je le trouve bien fondé. "Le Roi lui a fait grâce, et il l' a reçue, allant au suplice. "J' ai raison de me plaindre, et vous ne l' avez pas de m' accuser. Pour réformer ces phrâses, il faut joindre au nom ainsi employé indéfiniment un article, ou répéter ce nom au 2d membre de la phrâse, ou prendre un aûtre tour. Ainsi, on dira: vous avez un ancien droit de chasse, et je le trouve bien fondé. "Le Roi lui a acordé sa grâce, et il l' a reçue, etc. ou bien, vous avez droit de chasse, et je trouve ce droit bien fondé. Le Roi lui a fait grâce, et il a reçu sa grâce allant au suplice. Pour la 3e phrâse, on peut la réformer en mettant en au lieu de la: j' ai raison de me plaindre, et vous n' en avez pas de m' accuser. = Le P. Bouhours excepte de la loi générale la phrâse suivante; si vous ne me faites pas justice, je me la ferai moi-même. Par là il saûve ce vers de Racine.
   Quand je me fais justice, il faut qu' on se la fasse.
       Mithridate.
Je consens, dit l' Ab. d' Olivet, que cette phrâse, à force de revenir souvent dans la conversation, ait acquis le droit de ne paraître pas irrégulière. Mais elle ne laisse pas de l' être, surtout dans le style soutenu. Faire grâce, dit Bouhours ne saurait être suivi d' un pronom. Faire justice est dans le même câs. Tenons-nous-en à ce principe, qui est ce qu' il y a de plus sûr.
   5°. LE, est relatif ou d' un seul mot, ou d' une phrâse entière, et c' est ce qui peut occasioner de l' embarras, de l' équivoque ou du contre-sens dans le discours. Fontenelle fait dire à l' Astrologue Anselme. "Le grand leurre des hommes, c' est l' avenir; et nous aûtres Astrologues, nous le savons mieux que persone. Ce le peut signifier deux chôses: nous aûtres Astrologues, nous savons l' avenir, mieux que persone; ou bien, nous savons, mieux que persone, que le grand leurre des hommes c' est l' avenir. En lisant ce morceau, il n' est pas aisé de deviner lequel de ces deux sens l' Auteur a eu en vûe.
   6°. Le pronom le ne se met après le verbe qu' à l' impératif: Traitez-le bien. Dans tous les autres modes, et quand le verbe à l' impératif est acompagné de la particule négative, le doit précéder. "Vous l' aimez: "Ne le grondez pas.
   7°. Quand deux verbes consécutifs régissent le pron. le, il faut le répéter. Ainsi ce serait pécher contre les règles que de dire: je veux le revoir et augmenter (en parlant d' un livre) il faut dire: le revoir et l' augmenter.
   8°. Le pron. le est indéclinable, quand il se raporte à des adjectifs. Ainsi une femme dira: j' étais malade, et je le suis encôre, et non pas la suis. On dira au pluriel: nous étions contens, et nous le sommes encôre, et non pas les sommes. Madame de Sévigné n' était pas de cette opinion, et elle répondit à Ménage, qui lui citait la Règle; "Je croirois avoir de la barbe au menton, si je disois, je le suis. Cependant elle l' observait, sans s' en douter, du moins pour le pluriel. "Les gazettes en sont pleines; mais comme nous le sommes aussi... cela se trouve naturellement au bout de la plume. = C' est tout le contraire, quand le se raporte à un substantif; car alors il se décline, et change de genre et de nombre. "Êtes-vous Madame une telle? _ Oui je la suis. Sont-ce là vos enfans? _ Oui, ce les sont, et non pas le sont. Restaut. = Que si le substantif est employé adjectivement, il suit la règle des adjectifs. "Je veux être mère, parce que je le suis. Mol. Si l' Auteur avait dit en parlant de ses enfans, je veux être leur mère, il falait dire, parce que je la suis.
   9°. Regnier des Marais dit, que la particule (le pronom) le a comme les autres particules relatives, la force de changer les temps des verbes, et les verbes mêmes, auxquels elle se raporte, et à la place desquels on la substitûe. Il cite en exemples ces phrâses qu' il aprouve. "Je le traiterai comme il mérite de l' être. "Il ne faut pas condamner après leur mort, ceux qui ne l' ont pas été pendant leur vie; dans lesquelles phrâses, le, qui se raporte à un futur, ou à un infinitif, suplée pour un participe passif, comme il mérite d' être traité; qui n' ont pas été condamnés, etc. J' ai vu bien des persones, qui ne pouvaient soufrir ces phrâses, et qui soutenaient qu' il falait dire: je le traiterai, comme il mérite d' être traité. Cela est plus régulier sans doute, surtout dans le discours soutenu: mais en conversation on se sert sans dificulté des phrâses citées et aûtres semblables.
   10°. LE, devant plus, moins, mieux, ne prend ni genre, ni nombre: I. Quand avec ces adverbes, il forme un superlatif adverbe. "C' est la chôse que j' aime le plus, et non pas, la plus. "Ce sont les biens, que je désire le moins, et non pas les moins. Nous devons parler le plus sagement, et nous énoncer le plus clairement qu' il est possible. GIR. Wailly. II. Le, est indéclinable, même quand ces adverbes de quantité sont suivis d' un adjectif, lorsqu' ils n' emportent pas proprement de comparaison. "Nous ne pleurons pas toujours, lorsque nous sommes le plus afligés. Dans cet exemple, on ne veut point comparer son afliction à celle de quelques aûtres persones: mais on dira: "la Dame, qui pleure moins que les aûtres, n' est pas la moins afligée. Dans cette dernière phrâse, le superlatif emporte comparaison: le doit donc prendre le genre et le nombre du substantif. Wailly.
   II°. Dans le jargon précieux moderne, on dit le pour cela. "Savez-vous pourquoi elle s' est décidée à vous voir? Pour vous étudier et vous connoître. _ Ah! m' étudier! Je le trouve charmant. T. d' Éduc.


, s. m. [é fer.] La largeur d' une toile, d' une étofe entre ses deux lisières. "Un lé de damas, de velours. "Il y a deux lés à ces draps; quatre ou cinq lés à ce jupon, à cette tapisserie.

LÔCHE


LÔCHE, s. f. [1re è moy. 2e e muet.] Tranche fort mince de quelque chôse à manger. "Une lèche de jambon, de pain.

LèCHEFRITE


LèCHEFRITE, s. f. [1re è moy. 2e et 4e e muet.] Ustensile de cuisine, qui sert à recevoir le jus, qui tombe d' une viande à la broche.

LÉCHER


LÉCHER, v. act. [léché: 2 é fer. Devant l' e muet, le 1er e devient moyen: il lèche, lèchera, etc.] Pâsser la langue sur... "Lécher un plat, des confitûres. "Les chiens guérissent leurs plaies en les léchant. = Léché, adj. Ours mal léché, homme mal fait et grossier. = En Peintûre, tableau léché, trop léché, fort soigné, mais avec peu d' art et de goût. = En litératûre, ouvrage léché, travaillé avec trop de soin.
   Dans ses portraits léchés substituant toujours
   Le flègme des Rhéteurs aux élans des Apôtres.
       Poème sur l' Éloquence.
On dit, proverbialement, des bons morceaux, qu' on s' en lèche les doigts; et quand on n' en done que peu, qu' on n' en a qu' à lèche doigt.

LEÇON


LEÇON, s. f. [1re e muet. Léçon est un gasconisme.] 1°. Instruction qu' on done. "Leçon de Droit, de Théologie, de Médecine. = On dit, prendre leçon de, sans article. "Quand on voudra ménager des surprises agréables, c' est de vous qu' il faudra prendre leçon. = Boileau a dit, faire leçon pour, doner des leçons.
   Savant en ce métier, si cher aux beaux esprits,
   Dont Monmaur aûtrefois fit leçon dans Paris.
L' Acad. dit aussi, faire publiquement leçon de quelque chôse. Il est permis de douter que cette façon de parler soit réellement admise par l' usage. = L' Abé du Resnel dit, dans le même sens, doner leçon.
   Chacun, content de soi, suit sa foible raison,
   Et des arts qu' il ignôre, ôse doner leçon.
= 2°. Ce qu' un Régent ou Précepteur done à l' Écolier à aprendre par coeur. "Aprendre étudier, réciter, savoir sa leçon. _ On dit, en ce sens, prendre des leçons d' un maître de danse, de musique, etc. Prendre sa leçon de danse, etc. = 3°. Fig. Avis, instruction, donés à quelqu' un pour sa conduite, ou pour la direction d' une afaire. "Je lui ai fait sa leçon. "Il a reçu chez lui de bones ou de mauvaises leçons. = Faire la leçon à.... se dit, ou, pour instruire de ce qu' on doit faire, ou, pour faire une réprimande. = 4°. En style d' érudition, c' est la manière dont le texte d' un Auteur est écrit. Voltaire l' emploie au lieu de traduction. Après avoir traduit, à sa manière, le 1er chapitre de la Genèse, il dit: cette leçon est dailleurs conforme à l' anciène idée des Phéniciens, etc. "Leçon! s' écrie l' Abé Guénée: dites, s' il vous plaît, traduction: une leçon est une façon de lire un texte; et ces mots, les Dieux firent, ou les Dieux fit, ne sont pas le texte, ils n' en sont qu' une traduction infidèle et barbâre. Traduction n' est pas leçon: vous vous expliquez mal. On apèle variantes, les diverses leçons d' un texte.

LèCTEUR


LèCTEUR, s. m. LèCTURE, s. f. [1re è moy. 2e lon. au 2d.] Lecteur: celui qui lit. "Un bon, un méchant lecteur. = Chez le Roi et les Princes, titre de charge, dont la fonction est de lire devant le Roi, le Prince ou la Princesse. = Chez quelques Religieux, Professeur. "Lecteur en Philosophie, en Théologie. = On disait autrefois, avis au Lecteur, pour avertissement, petite préface. On ne le dit plus qu' en plaisantant. Avis au Lecteur, ou c' est un avis au Lecteur; cela vous regarde, prenez cela pour vous. = Autrefois on tutoyait le Lecteur dans les préfaces. "Si je voulois faire ici ce que j' ai fait en mes derniers ouvrages, et te doner le texte ou l' abrégé des Auteurs, dont cette histoire est tirée, afin que tu pusses remarquer, etc. Je me contenterai de t' avertir, etc. Avant propos de la Tragédie de la mort de Pompée par Corneille.
   Rem. Dans le Rich. Port. on met Lectrice; chez les Religieûses, celle qui lit au réfectoire. L' Abé des Fontaines, Fréron et M. Linguet, l' ont employé dans le sens propre et naturel de Lecteur. "Il mérite quelque indulgence de la part des Lectrices. "Il doit produire les plus fortes impressions sur le coeur et l' esprit des jeunes Lectrices. "Je demande bien pardon à mes Lectrices de la comparaison. _ L' Abé des Fontaines l' avait fait imprimer en italique. Les deux autres Écrivains cités n' ont pas pris cette précaution.
   LECTûRE: 1°. Action de lire. "Assister à la lectûre d' une pièce: entendre la lectûre d' un contrat. = 2°. Étude. Il aime la lectûre; il est fort adoné à la lectûre. "Il a beaucoup de lectûre; bien de la lectûre. "la lectûre forme l' esprit.
   REM. 1°. Avoir une grande lectûre, se dit sans régime. "Leibnitz avoit une lectûre prodigieûse. Anon. Le Duc de Vivone étoit un des hommes de la Cour, qui avoit le plus de goût et de lectûre. Volt. "Il avoit une vaste lecture et une mémoire, qui la mettoit toute à profit. Fontenelle. = Je crois qu' on ne doit pas imiter Fleuri, quand il dit que: "Ammonius avoit une grande lectûre d' Origène, de Didyme, etc. = On ne le dit aussi qu' au singulier. "Beaucoup de lectûres et de réflexions caractérisent les premiers. Du Plaisir. "Il falait beaucoup de lectûre ou une grande lectûre et beaucoup de réflexions, etc. = 2°. Avoir une grande lectûre se dit des Lecteurs; et être, d' une lectûre des livres. "Ce petit morceau d' histoire est d' une lectûre intéressante. Trois Siècles, etc. = 3°. Lectûre a un sens act. Mes lectûres signifie, les lectûres que je fais. Ainsi, quoiqu' on dise, la lectûre de ces lois, on ne doit pas dire, leur lectûre, en parlant des lois; car les lois ne lisent pas: elles sont lûes. "L' on voit par leur lectûre (des lois Gombettes) l' esprit qui dominoit parmi ces peuples. Anon. Il falait: on voit, en les lisant, etc. = 4°. Dit-on, entendre lectûre ou la lectûre de? M. de la Condamine emploie le premier: j' aimerais mieux le 2d: "Ceux qui ont entendu lectûre des deux raports. Lett. sur l' Inoculation. _ L' Acad. dit, faire la lectûre d' un contrat, ce qui est un préjugé pour, entendre la lectûre. _ Entendre lire est plus sûr. "Il ne suffit pas qu' ils entendent lire les notes des deux Comissaires. Id. ibid.

LÉGAL


LÉGAL, ALE, adj. LÉGALEMENT, adv. [1re é fer. 3e e muet; en dans le 3e, a le son d' an.] Légal, qui concerne la Loi. "Cérémonies, observations légales. Impureté légale. En ce sens, il ne se dit que de la Loi de Moïse. = Qui est selon la Loi: "Démarche, procédure légale. = Légalement, d' une manière légale. "Procéder légalement. Légal, legitime, licite (synon.) C' est la forme qui rend la chôse légale; c' est le droit qui la rend légitime, c' est le pouvoir qui la rend licite. "Une élection est illégale, quand on n' y observe pas les conditions requises par la loi. Une puissance est illégitime, si elle exerce la force sans droit. Un comerce est illicite, quoique bon dans l' ordre naturel, si la loi le défend, etc. Extr. des Synon. de M. l' Abé Roubaud.

LÉGALISATION


LÉGALISATION, s. f. LÉGALISER, v. a. [Légaliza-cion, lizé.] Ils se disent de la certification du Juge, ou autre ayant l' autorité publique, qui ateste que celui qui a dressé un acte ou extrait, est tel qu' il se qualifie. "La légalisation est nécessaire à un grand nombre d' actes, pour qu' ils puissent faire foi hors du ressort où ils ont été pâssés. "Faire légaliser un extrait baptistaire, mortuaire, etc.

LÉGAT


LÉGAT, s. m. [1re é fer. le t final ne se prononce pas.] Cardinal, Gouverneur de quelque Province de l' État Éclésiastique; ou envoyé extraordinairement par le Pape auprès de quelque Prince Chrétien. = Ce mot, et celui de Nonce, ne se disent plus en français que des Ambassadeurs du Pape. Leibnitz done donc mal-à propos ce nom à ceux des Empereurs d' Allemagne. = * Quoiqu' on dise légataire, on ne dit point légat, mais legs. Voyez ce mot. Légat, en ce sens est un gasconisme.

LÉGATAIRE


LÉGATAIRE, s. m. et f. [Légatère: 1re é fer. 3e è moy. et long; dern. e muet.] Celui, celle qui a reçu un legs. "Légataire particulier. "Elle est légataire universelle.

LÉGATION


LÉGATION, s. f. [Léga-cion; 1re é fer.] La charge du Légat; l' étendue et le district de sa légation; et le tems que dûrent ses fonctions. "Le Pape lui a doné la légation de Bologne. "Cette ville est de sa Légation. "Cela se passa pendant sa Légation.

LÉGENDAIRE


LÉGENDAIRE, s. m. LÉGENDE, s. f. [Lé--jandère, jande; 1re é fer. 2e lon. 3e è moy. et lon. au 1er.] Légende se dit de la vie des Saints. On ne le dit que des anciènes vies, ou, par mépris, des nouvelles. Légendaire, Auteur des légendes. = Légende, en style plaisant ou critique, liste ennuyeûse. = Il se dit: mais sérieûsement, de l' inscription gravée autour d' une médaille, ou d' une pièce de monaie.

LÉGER


LÉGER, ÈRE, adj. LÉGèREMENT, adv. LÉGèRETÉ, s. f. [1re é fer. l' r finale se prononce dans le 1er; 2e è moy. 3e e muet.] Au propre, 1°. qui ne pèse guère. "L' air est plus léger que l' eau. "Habit léger, étofe légère. = 2°. Aisé à suporter. "Joug léger; pénitence légère. Peine, douleur légère. "Viande légère. = 4°. Dispôs et agile. "Marcher d' un pied, d' un pas léger. "Être léger à la course. Je me sens aujourd' hui plus léger qu' à l' ordinaire. = 5°. Volage. "Esprit, coeur léger. = Légère, Inconstante, volage, Changeante, (synon.) Une légère ne s' atache pas fortement; une inconstante ne s' atache pas pour long-tems; une volage ne s' atache pas à un seul; une changeante ne s' atache pas au même. _ La légère se done à un autre, parce que le 1er ne la retient pas; l' inconstante, parce que son amour est fini; la volage, parce qu' elle veut goûter de plusieurs; et la changeante, parce qu' elle en veut goûter de diférens. _ Les hommes sont ordinairement plus légers et plus inconstans que les femmes? mais celles-ci sont plus volages et plus changeantes que les hommes. Ainsi les premiers pèchent par un fond d' indiférence, qui fait cesser leur atachement; et les secondes, par un fond d' amour, qui leur fait souhaiter de nouveaux atachemens. Girard, Synon.
   = 6°. Peu considérable. "Un sujet bien léger; une injûre légère. "Légère, faute, dispute, ocasion. Une légêre idée: un léger repas. "Il a le sommeil léger; la moindre chôse l' éveille. = 7°. Agréable et facile. Style léger, conversation légère.
   Rem. 1°. La prononciation de léger n' est pas bien décidée. L' Acad. avertit de prononcer l' r; dans le Rich. Port. on se contente de dire que les uns prononcent fortement l' r finale, et les aûtres non. Gresset fait rimer légers avec airs, et Rousseau, au contraire, fait rimer léger avec déroger. = Plus comunément on ne fait pas trop sentir l' r: léger se prononce comme berger. Tous les Poètes font rimer ces deux mots ensemble. Marin. = 2°. De léger, à la légère, adverbes; le premier signifie trop facilement; le 2d, inconsidérément. "Il croit de léger. "Il ne faut pas entreprendre un grand dessein à la légère. L. T. L' Acad. dit du 1er qu' il vieillit. C' est un italianisme: di leggiero. = 3°. On a dit, armé à la légère, et légèrement armé. Vaugelas dit que, quoique le 1er soit plus en usage, il faut se servir des deux, pour diversifier. L' Acad. dit l' un et l' aûtre. = 4°. Léger régit quelquefois la prép. de. "Léger de cerveau, d' argent, etc. "Femme très-légère de scrupules. Mariv. = 5°. * S' en doner de léger, ne pas s' en inquiéter, est un gasconisme barbâre.
   LÉGèREMENT, 1°. D' une manière légère. Vétu, armé légèrement. "Marcher, courir légèrement. = 2°. À~ la légère: "croire légèrement. "Prendre son parti légèrement. "Toucher une matière légèrement.
   LÉGèRETÉ, qualité de ce qui est léger. Il a presque tous les sens de léger. "La légèreté de l' air, des vapeurs. "La légèreté d' un cerf, des oiseaux. "Marcher, courir avec légèreté. "La légèreté des peuples, de son esprit, de son humeur. "La légèreté d' une faûte. "Cette faûte a été commise par légèreté, sans malice.

LÉGION


LÉGION, s. f. LÉGIONAIRE, s. m. [Lé--gion; en vers, gi-ion, gio-nère; 1re é fer. 3e è moy. et lon. au 2d.] Corps de gens de guerre chez les Romains. "La 1re, 2e, etc. Légion. "La Légion Thébaine. Légionaire, soldat d' une Légion. "Les Légionaires combatirent vaillamment. En st. fig. fam. Legion se dit d' un grand nombre. "Des Légions de menteurs. La Font. = En style de l' Écritûre: des legions d' Anges, de Démons.

LÉGISLATEUR


LÉGISLATEUR, TRICE, s. m. et f. LÉGISLATIF, TIVE, adj. LÉGISLATION, s. f. [Légis-la-teur, trice, latif, tîve, la-cion; 1re é fer. 4e lon au 4e.] Législateur, celui qui établit des lois pour tout un peuple. Moïse fut le Législateur du Peuple de Dieu. "Lycurgue et Solon, célèbres Législateurs. = Pouvoir législatif, puissance législative. Le pouvoir de faire des lois. = Législation, le droit de faire des lois. "En France, la législation n' apartient qu' au Roi.
   REM. Législatrice, est peu usité, parce qu' on a peu d' ocasions de l' employer. L' Acad. le met sans en doner d' exemple. "L' opinion, cette première législatrice des États. L' Abé de Boismont.

LÉGISTE


LÉGISTE, s. m. [1re é fer. dern. e muet.] Celui qui fait profession de la science des lois. L' Acad. dit aussi Jurisconsulte: mais il serait plutôt synon. de Juriste. Dans quelques Universités, on apèle Légistes les Étudians en Droit.

LÉGITIMATION


LÉGITIMATION, s. f. LÉGITIME, adj. et subst. LÉGITIMER, v. act. LÉGITIMITÉ, s. f. [Légitima-cion, me, , mité; 1re é fer. 4e e muet au 2d, é fer. au 3e.] Légitime, adj. 1°. Qui a les qualités requises par la loi, "Mariage légitime, enfant légitime. = 2°. Juste, équitable. "Droit, prétention légitime. "Avoir un sujet légitime de se plaindre. = Légitime, s. f. La portion que la Loi atribûe aux enfans sur les biens de leurs pères et de leurs mères. "Il n' a eu que sa légitime: il a été réduit à sa légitime. _ On apèle légitimaire, celui qui n' a eu que sa légitime, par oposition à héritier et à légataire. "Il y a procès entre les héritiers, les légataires et les légitimaires.
   Légitimer, c' est rendre un enfant naturel capable des droits des enfans légitimes. Légitimation est l' acte par lequel un bâtard est légitimé. "Lettres de légitimation. "Il a été légitimé par le mariage subséquent de ses père et mère; ou par lettres du Prince. = Fig. "Cette incertitude autorise leurs représentations, mais elle ne peut pas légitimer leur désobéissance. Anon. La rendre légitime.
   Légitimité, état, qualité d' un enfant légitime. "On lui dispute sa légitimité. = Équité. "La légitimité de ses droits, de ses prétentions, etc.

LEGS


LEGS, s. m. LÉGUER, v. act. [1re è moy. au 1er, é fer. au 2d. mais devant l' e muet cet é fer. se change en è moy. je lègue, il lèguera, etc.] Legs, est une libéralité laissée par un testament. On apèle Légataire, celui à qui le Testateur a~ fait cette libéralité. Voyez LÉGAT. "Doner, laisser un legs de dix, de cent mille francs. "Legs pieux. Acad. Au Palais on dit, legs pies. = Léguer, doner par testament. "Il lui a légué, il leur lègue telle somme, telle pension. "Je done et lègue à un tel, etc.

LÉGUME


LÉGUME, s. m. LÉGUMINEUX, EûSE, adj. [1re é fer. 4e lon. au 2d; neû, neû-ze.] On ne devrait régulièrement apèler légumes, que les grains qu' on recueille dans des cosses, comme pois, fèves, lentilles, haricots, lupins, etc. mais l' usage étend ce nom aux racines mêmes et à la plupart des plantes potagères. Pluche. = Quelques Auteurs ont fait légume fém. Le P. Tarteron, M. l' Abé Bullet, Fleury, Moeurs des Israélites. "De bones légumes, des légumes trop nourrissantes. Il est constamment masc. et l' on doit dire, de bons légumes, des légumes nourrissans. = Légumineux, ne se dit guère qu' au fém. "Fleurs légumineuses, telles que celles des pois, fèves, etc. et d' un grand nombre de plantes, qui n' ont pourtant aucun raport avec les légumes proprement dits.

LENDEMAIN


LENDEMAIN, s. m. [Lande-mein; 1re lon. 2e e muet.] Le jour d' après. "Ils partirent le lendemain. "Ils arrivèrent le lendemain des fêtes. = Nos anciens écrivaient l' an demain en deux mots et avec une apostrophe.

LENDôRE


LENDôRE, subst. et adj. [Landôre: 1re et 2e lon. 3e e muet.] Lent dans ses opérations. "C' est un lendôre, une grande lendôre. Il est populaire. Acad. Mde. de Sévigné l' a employé adjectivement. "Il est vrai qu' il a a été un peu lendôre sur son départ de cette garnison.

LENT


LENT, ENTE, adj. LENTEMENT, adv. LENTEUR, s. f. [Lan, lante, lanteman, lan-teur: 1re lon. 2e e muet au 2d et au 3e.] Lent, qui est tardif et n' agit pas avec promtitude. Lenteur, manque d' activité et de célérité. Lentement, avec lenteur. "Esprit lent, humeur lente: elle est lente à tout ce qu' elle fait. "Lent à parler, à écrire.
   Il est lent à punir, promt à récompenser.
   Quoique lents à punir, ils punissent enfin.
Poison lent, fièvre lente. "Marcher, agir lentement, aler lentement en besogne; agir avec lenteur. "Sa lenteur à punir est-elle un titre pour continuer à l' ofenser? _ Figur. Avoir une grande lenteur d' esprit, d' imagination: imaginer et concevoir dificilement et avec peine.

LENTICULAIRE


LENTICULAIRE, adj. LENTILLE, s. f. [Lantikulère, lanti-glie; 1re lon. 4e è moy. et long au 1er: mouillez les ll du 2d.] Lentille est, 1°. une espèce de légume. Ménage disait aussi nentille, et le préférait. Il a été seul de son sentiment. Si les Parisiens disent encôre nentille, comme Ménage assure qu' ils le disaient de son tems, ce ne peut être que les badauds de Paris. = Taches rousses, qui viènent aux mains et au visage, et qui ressemblent à des lentilles. Trév. et le Rich. Port. disent, en ce sens, lentilleux, qui est semé de taches ou lentilles. "Visage lentilleux. L' Acad. ne le met point. = 3°. Verre convexe des deux côtés: verre lenticulaire, ou lentille.

LÉOPARD


LÉOPARD, s. m. Espèce de bête féroce, qui a la peau tachetée.

LèPRE


LèPRE, s. f. LÉPREUX, EûSE, adj. [1re è moy. au 1er, é fer. aux deux aûtres, 2e e muet au subst. lon. à l' adj.] Ils se disent d' une certaine maladie, autrefois fort comune, qui paraît sur la peau, et y fait une vilaine croûte. "Frapé de la lèpre: "couvert de lèpre. "Homme lépreux, femme lépreûse. = S. m. Hôpital pour les lépreux. On l' apelait léproserie. = On dit, fig. la lèpre du péché.; mais il serait ridicule d' apeler les pécheurs des lépreux spirituels. Il faut toujours se tenir en garde contre les préjugés de l' analogie.

LEQUEL


LEQUEL, LAQUELLE, pronom relatif. Voici sa déclinaison. "Lequel, laquelle; duquel, de laquelle, ou dont, auquel, à laquelle; lequel, laquelle, ou que; duquel, de laquelle, ou dont. Plur. Lesquels, lesquelles; desquels, desquelles, ou dont; auxquels, auxquelles; lesquels, lesquelles, ou que; desquels, desquelles, ou dont. = 1°. Lequel et laquelle, dans tous leurs câs tant au singulier qu' au pluriel, peuvent se dire des persones et des chôses. Cependant: 1°. On ne s' en sert presque jamais au nominatif; et les oreilles seraient blessées dans ces phrâses. "Dieu, lequel a créé le ciel et la terre. "La grâce, laquelle nous est nécessaire. Il faut se servir de qui: Dieu, qui a créé; la grâce, qui nous est nécessaire, etc. = Vaugelas fait une exception à cette règle; et c' est que, quand on emploie dans une phrâse deux noms substantifs de différent genre, alors, si le pronom relatif qui ne se raporte pas au plus proche des deux, il faut se servir du pron. relatif lequel. Ex. "C' est un effet de la Providence~, qui, etc. Le qui se raporte à effet, et non à Providence. Pour éviter l' équivoque, il faut mettre lequel. = On peut se servir aussi de lequel au nominatif, pour éviter deux qui de suite. C' est ce qu' ont fait Bouhours et le Maître. "Certaines plantes, lesquelles n' ont rien, qui les distingue. "Il îmite ces peuples, qui habitent la Zone torride, lesquels jettent des flèches contre le soleil. = 2°. Quand le génitif du pronom relatif est avant le nom substantif, dont il dépend, l' usage ne souffre pas qu' on emploie duquel ou de laquelle; et qu' on dise, par exemple; le livre duquel vous m' avez fait présent; la religion de laquelle on méprise les maximes: il faut alors se servir du génitif dont. Mais si le génitif du pronom relatif est après le nom substantif, dont il dépend, on peut employer duquel ou de laquelle; p. ex. "La Seine dans le lit de laquelle viennent se jeter d' aûtres rivières: "Les moutons, à la dépouille desquels les hommes doivent leurs vêtemens. = Remarquez sur cette Règle, que si le nom substantif, auquel se raporte le génitif du pronom relatif est au datif ou à l' ablatif, on doit se servir de duquel ou de qui, en parlant des persones, jamais de dont; et pour ce qui regarde les chôses ou les bêtes, le génitif duquel, ou de laquelle est le seul qu' on doive employer. "Femme à la conduite de qui ou de laquelle il n' y a rien à redire. "Homme, de la bonne foi de qui ou duquel on ne peut douter. "Cheval, de la bonté duquel j' ai fait l' épreuve. Regn. = 3°. Le datif auquel et à laquelle sont d' un usage très--ordinaire: on n' en peut pas dire autant de l' acusatif lequel, laquelle sur lequel on ne peut guère doner de règles générales, et il faut renvoyer à l' usage; ainsi que pour l' ablatif duquel, de laquelle, qui suit les mêmes règles que le génitif. = Ce qu' on peut dire seulement, c' est que lequel n' est guère régi par des verbes, excepté en style de Pratique, et qu' on se sert ordinairement de l' acusatif que. Mais, quand il est régi par des prépositions, on peut s' en servir en toute sorte de style. On le doit même quand on parle des bêtes ou des chôses inanimées; excepté dans les phrâses où le pronom quoi peut être employé. "Le cheval sur lequel il étoit monté. "Le sujet pour lequel ils se querelloient. Regn. = Voiture dit lesquels, au lieu de que; mais de la manière dont il l' emploie, ce pronom fait fort bien. "J' en vis sept (royaumes) tout d' une vûe... Lesquels c' est dommage que vous laissiez entre les mains des Môres. Si, à la place de lesquels, il avait mis que, il y aurait eu deux que de suite, l' un pronom, l' aûtre conjonction; ce qui aurait produit un mauvais éfet. _ Ce lequel acusatif n' est pas si bien dans d' aûtres phrâses d' anciens Auteurs, qui l' employaient volontiers en régime simple. "Dieu donnoit à Adam des satisfactions intérieures, lesquelles, depuis le péché, les hommes ne ressentent plus, sans une grâce particulière. Mallebr. On dirait aujourd' hui, que depuis le péché, les hommes ne ressentent plus, etc. = 5°. Tout ce qu' on vient de remarquer ne regarde lequel, que lorsqu' il est relatif; mais lequel, pronom absolu et interrogatif, peut être sujet (nominatif) et régime simple (acusatif). "Dites-moi laquelle de ces deux personnes vous plait davantage. "Laquelle préférez-vous? Sur laquelle ferez-vous tomber votre choix? À~ laquelle donnez-vous la préférence? De laquelle feriez-vous choix, si vous aviez à choisir? = On voit par le premier exemple, que quand on n' a pas encôre établi la comparaison, lequel régit les objets de l' alternative au génitif. = Avec ce régime, il peut se placer à la tête de la phrâse. "Lequel de ces deux bijous, que vous choisissiez, vous rencontrerez toujours bien. "Auquel de ces deux Auteurs que vous donniez la préférence, vous aurez de quoi la justifier.
   Rem. Malherbe ne s' est servi que deux fois de lequel dans toutes ses Poésies.
   Et trois ou quatre seulement
   Au nombre desquels on me range.
Lequel ne se dit plus en poésie, et cette phrâse dailleurs, au nombre desquels on me range n' est pas agréable. Il pouvait éviter ce desquels, et dire, au nombre de qui l' on me range, mais son vers n' eut pas été si harmonieux. Mén. _ Le même Poète a employé laquelle dans l' Ode à M. de Belle-Garde.

LES


LES, plur. des art. le et la. [Pron. , è moy. et devant une voyèle lêz.] Les femmes, les hommes.

LèSE


LèSE, adj. fém. LÉSER, v. act. LÉSION, s. fém. [Autrefois on écrivait avec un z, et comme on prononce lèze, lézer, lézion; et quelques Auteurs ou Imprimeurs l' écrivent encore de même aujourd' hui: 1re è moy. et long au premier, é fermé au 2d, la 2e est un e muet à l' adj. un é fer. au verbe.] On dit, crime, criminel de lèze-Majesté divine, humaine. C' est un terme consacré. Un Auteur a dit, en imitation, crime de lèse-république; et pourquoi, dit, ironiquement, l' Auteur du Dict. Néol. ne pourrait-on pas dire aussi, crime de lèse-Dieu, de lèse-Père, de lèse-État, etc. = Léser. Ofenser, faire tort. Il a le second sens plus souvent que le 1er. "Il n' y a que lui de lésé dans cette afaire. "Elle est beaucoup lésée; on l' a lésée considérablement dans cette vente, dans cette transaction. = Lésion, tort, domage qu' on souffre en quelque marché, en quelque contrat. "Lézion énorme, d' outre moitité du juste prix. "Il y a ou il n' y a pas lésion. "Où est donc la lésion? = * Au Bârreau, quelques-uns disent lésif, lésive: "C' étoit à lui à veiller à son intérêt, et à ne pas s' engager dans un marché qu' il pouvoit croire lésif.

LÉSINE


LÉSINE, s. f. LÉSINER, v. n. [Lézine, ziné: 1re é fer. dern. e muet au 1er, é fer. au 2d.] Lésine, épargne sordide et rafinée jusque dans les moindres chôses. Lésiner, user de lésine. "Il lésine sur toutes chôses.

LÉSION


LÉSION, voy. LèSE.

LESSIVE


LESSIVE, s. f. LESSIVER, v. act. [Le--cîve, civé: 1re e muet, 2e lon. au 1er.] Lessive, eau chaude que l' on verse sur du linge à blanchir, qui est entassé dans un cuvier, et sur lequel on a mis un lit de cendre de bois neuf, ou de soude, etc. = Lessiver; blanchir le linge; faire la lessive. = Figurément, on apèle lessive, une grande perte au jeu. Mde. de Sévigné done ce nom à l' éfet d' une purgation. "Les eaux (de Vichi) m' ont purgée autant que j' ai pu l' être, car il s' en faut bien que j' aie le même besoin que j' avois de cette lessive, il y a dix ans. Voy. LAVER.

LEST


LEST, s. m. [è moy. le t se prononce.] Pierres, sâble ou autre matière pèsante dont on charge le fond d' un vaisseau. = * L' Ab. Prévôt écrit leste contre l' usage.

LESTAGE


LESTAGE, s. masc. LESTER, v. act. LESTEUR, s. m. [1re è moy.] Lestage, est l' action de lester, de mettre du lest dans un vaisseau. Lesteur, bateau qui sert à transporter le lest. = On dit figurément (st. famil.) bien lesté, qui a bien mangé et bien bu.

LESTE


LESTE, adj. LESTEMENT, adv. [Lèste, teman: 1re è moy. 2e e m. 3e l.] Leste, proprement vétu. "Vous voilà bien leste. "Son équipage étoit fort leste. = Bien en ordre. "Troupes fort lestes. = Adroit; c' est un homme fort leste. = Lestement, proprement. "Lestement vétu. _ Avec adresse: "Il s' est tiré lestement de cet embârras. = Depuis quelque tems on le dit du ton et des propôs. Hardi, sans façon, sans égard. C' est un mot à la mode. "Le propôs est leste. Jugem. de Midas. "Ces lettres renferment... un ton des plus lestes sur les matières les plus serieuses. "Ses procédés étoient lestes, parce que ses desirs étoient vifs. Mercure.

LÉTHARGIE


LÉTHARGIE, s. f. LÉTHARGIQUE, adj. [1re é fer. l' h est muette, et n' est là que pour l' étymologie.] Au propre, assoupissement profond et contre natûre, qui ôte l' usage des sens. "Il est tombé en léthargie; "Sommeil léthargique. = Figurément, Insensibilité et nonchalance en toutes chôses. "Il est dans une léthargie honteûse. Paresse léthargique.

LÉTON


LÉTON, Voy. LAITON.

LETTRE


LETTRE, s. fém. LETTRÉ, ÉE, adj. [Lètre, lètré, tré-e: 1re è moy. 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Lettre est, 1°. chaque caractère de l' alphabet. = 2°. Épitre. missive, dépêche. "J' ai reçu votre lettre, "Lettre de crédit, de change, etc. = 3°. Au pluriel, actes qui s' expédient au nom du Prince. Lettres closes, ou patentes. "Lettres de grâce, d' abolition, etc. _ Et dans certaines compagnies, actes qui s' expédient sous le sceau de quelque puissance. "Lettres de tonsûre, de Prêtrise, etc. Lettres de Maître-ès-arts, etc. = 4°. Science et doctrine. Les lettres humaines, Les Belles-Lettres. La République des Lettres. "François I fut le père des Lettres. "Cet homme a beaucoup d' esprit, mais il n' a point de lettres. = 5°. À~ la lettre, au pied de la lettre, dans le sens litéral. "Cela est vrai à la lettre. "Il ne faut pas le prendre au pied de la lettre. "Rien n' empêche qu' on ne puisse prendre au pied de la lettre la parole de notre Sauveur. Boss. "La Maréchale n' aura point de pain au pied de la lettre. Mde de Coul. "Je vous aime de tout mon coeur, mais c' est au pied de la lettre et sans en rien rabattre. Sév. "Je plaisantois... vous prenez tout au pied de la lettre, ce n' est pas ma faute. Th. d' Éduc. = 6°. Aider à la lettre, au propre, supléer à ce qui manque à quelque passage obscur et défectueux; au figuré, entrer dans l' intention de celui qui parle ou qui écrit; et expliquer ce qu' il a dit ou écrit obscurément.
   LETTRÉ, qui a des lettres, de l' érudition. "Homme lettré. = En st. prov. "Gens ignâres et non lettrés.
   Rem. 1°. Il ne faut pas confondre Lettre avec Épitre. Lettre se dit généralem. de toutes les lettres qu' on écrit d' ordinaire, à quoi il faut ajouter, lettre de cachet, de change, de créance. Épître ne se dit qu' en deux ou trois câs: Épître dédicatoire; Épître de St. Paul, de St. Jean, etc. L' Épître de la Messe; les Épîtres de Cicéron, de Sénèque, de Pline, et d' autres Anciens Les Lettres en vers s' apèlent aussi Épîtres. BOUH. On dit aussi Épître pour lettre, dans le style badin, ou critique. J' ai reçu votre longue Épître. "Il m' accable de ses fades Épîtres. = Il faut dire, lettre de change, et non pas d' échange, comme on dit en quelques Provinces. = 2°. On a dit long-tems, au singulier, un Litérateur, plutôt qu' un homme de lettres; celui-ci est pourtant fort bon. "Qu' est-ce qu' un bel-esprit, un homme de lettres, en comparaison d' un homme vertueux? Marin. L' Homme Aimab. Mais au pluriel, gens de lettres se dit plus souvent, et a une signification plus étendûe que Litérateur. Depuis quelque tems, on ne voit paroître que des compilations, par une Société de Gens de Lettres. = M. Fréron, en imitation d' Homme de Lettres, a dit, Femme de Lettres. Je ne sais si quelqu' un l' a répété d' après lui. "Parmi les Femmes de Lettres vivantes~, qui sont célèbres. _ Plus récemment on lit dans l' Ann. Litt. "Je ne conçois pas les Hommes de Lettres. Je crois qu' on doit toujours dire les gens de lettres. = 3°. On dit, avoir des lettres, pour, de la litératûre. L' Ab. des Fontaines, dit, en ce sens, n' avoir aucunes lettres, expression qui me parait tout au moins douteûse. On se faisoit gloire autrefois de n' avoir aucunes lettres. L' Acad. dit: "Il n' a point de lettres; mais on ne peut conclûre d' une expression à l' autre. = 4°. Ajouter à la lettre, exagérer, en dire plus qu' il n' y en a. = Avoir lettres de, avoir des nouvelles sûres, ou l' assurance de. = On dit d' un ouvrage achevé, qu' il n' y manque pas une lettre. = Ce sont lettres clôses: c' est un secret. = On dit d' une date ou d' une somme qu' elle est en toutes lettres, pour dire qu' elles ne sont pas en chiffres. On aplique figurément cette expression à d' autres objets. "M. William Burck (quoique Anglais, Protestant et Philosophe) ôse écrire en toutes lettres, (ouvertement~) que ses malheureux habitans (de l' Amérique) n' eurent d' autre réfuge que l' humanité des Prêtres. Ann. Litt. * Échanger~ des~ lettres, avoir un commerce épistolaire, est un latinisme germanique. "J' en écrivis sur ce ton là~ à M. Oldenbourg, avec qui auparavant je ne m' étois entretenu de telles choses, quoique nous eussions déja échangé plusieurs lettres. Leibnitz; c. à. d. quoique nous nous fussions déja écrit plusieurs fois. = 5°. Plusieurs terminent leurs lettres, en disant, qu' ils ont l' honneur d' être avec respect, etc. cette manière de les terminer déplait à beaucoup de gens de goût. Ils prétendent qu' on doit mettre; j' ai l' honeur d' être, simplement; ou je suis avec respect, etc.

LEVAIN


LEVAIN, s. m. [Le-vein: 1re e muet.] 1°. Au propre, et en général, tout corps capable d' exciter un gonflement, une fermentation interne dans celui auquel on l' incorpôre. _ En particulier, morceau de pâte aigre, qui, mèlé avec la pâte dont on veut faire le pain, sert à la faire lever et fermenter. "Faire un levain, ou du levain. Mettre trop de levain. "L' Église latine ne consâcre qu' avec du pain sans levain, qu' on apèle azyme. = 2°. Par extension, mauvaise disposition des humeurs. "Il y a quelque mauvais levain dans l' estomac. = 3°. Figurément, mauvaise impression que le péché laisse dans l' âme. "Le levain du péché originel. "Épanche dans moi la rosée de ta grâce: détruis le levain impur, qui infecte mon âme, etc. Jér. Dél. = Reste de quelque passion violente. "Levain de discorde, de haine, de division. "Il reste encore parmi ce peuple un levain de sédition, de révolte.

LEVANT


LEVANT, adj. et s. m. LEVANTIN, INE, adj. et subst. [Levan, van-tein, tine: 1re e muet; 2e lon.] Adj. il ne se dit qu' avec soleil. Qui se lève. "Le Soleil levant. En st. prov. adorer le Soleil levant, faire sa cour au nouveau favori. = S. m. La partie du monde où le Soleil se lève. "La France a l' Allemagne au levant. "Depuis le levant jusqu' au couchant. = Levant a le même sens qu' Orient, mais le 1er est plus du style simple, et le 2d du style poétique. Il y a encôre un autre diférence, c' est que Levant se dit des contrées qui sont sous la Domination des Turcs; et Orient des Indes. L' Ab. Prévot dit, en parlant des dernières. "Tous ces peuples du Levant ne cherchent qu' à tromper. Il fallait dire, de l' Orient. = Levant ne convient pas non plus en parlant des anciens peuples. Corn. dit de Neron.
   Les troupes du Levant d' un tel monstre lassées.
Je voudrais là d' Orient.
   LEVANTIN: Natif du pays du Levant. "Les peuples levantins. "C' est un levantin, une levantine. Voy. l' article précédent. En parlant des anciens peuples, on dit les orientaux, mais on ne dit pas au sing. un oriental, une orientale.

LEVÉE


LEVÉE, s. fém. LEVER, v. act. et s. m. [Levé-e, ve: 1re e muet, 2e é fer. long. au 1er. Devant l' e muet la 1re se change en è moyen et long; il lève, lèvera, etc.] Levée est, 1°. l' action de lever, de recueuillir, en parlant des fruits, et principalement des grains; et aussi des deniers, des impôts. "La levée des fruits. "La levée des deniers, des droits du Roi. = 2°. Enrôlement. "Levée de soldats, de troupes _ Figurém. levée de boucliers. Voy. BOUCLIER = 3°. Digue, chaussée. = 4°. L' heure à laquelle une compagnie se lève pour finir la séance. "À~ la levée du Conseil, de la Grand' chambre, etc. = Levée d' un Siège, retraite des troupes qui assiégeaient une place. = Levée du scellé, action par laquelle on le lève, on l' ôte. = Levée du corps, action de le faire porter en terre, et de comencer le convoi des funérâilles. = 5°. Au jeu des cartes, main qu' on a levée. "Nous n' avons pas fait une levée. "Ils ont déja cinq levées.
   LEVER c' est, 1°. Hausser. "Lever de terre. "Lever les mains, les yeux au Ciel; quelques-uns disent, vers le Ciel, mais Vaugelas les condamne de barbarisme. Lever les yeux sur quelqu' un, etc. = Voici la diférence, que l' Ab. Girard trouve entre lever, élever, soulever, hausser, exhausser. On lève en dressant ou mettant debout; lever une échelle: on élève, en plaçant dans un lieu ou dans un ordre éminent; élever une statûe: on soulève en fesant perdre terre et portant en l' air; soulever un coffre: on haûsse, en ajoutant un degré supérieur, soit de situation, soit de force, soit d' étendûe; hausser les épaules, la voix, etc. On exhaûsse en donant plus de hauteur pour la continuation de la même chôse, exhausser un bâtiment. = 2°. Dresser une chôse qui était couchée ou penchée. "Lever le pont-levis, la bascule. " Levez votre robe, votre manteau qui traîne. = Se lever, se mettre debout sur ses pieds. Se lever de table. "Tout le monde s' est levé pour lui faire honeur. "Levez-vous de là. = Sortir du lit. "Il se lève de bon matin, ou bien tard. On le dit des astres. "Le soleil se lève à présent à cinq heures. _ La tempête, l' orage, le vent se lève; comence. "Il se leva une tempête, etc. = 3°. Ôter une chôse qui était dans une autre. "Lever le scellé, l' apareil d' une plaie. Lever un plat. Lever la nape, etc. "Lever l' ancre. Lever le siège d' une place, ou de devant une place; retirer les troupes qui la tenaient assiégée. On dit qu' une armée a levé le piquet, pour dire qu' elle a décampé; et que des troupes ont levé le piquet, qu' elles se sont retirées avec quelque précipitation. = 4°. Recueuillir. "Lever les fruits, les impôts, la tâille. = 5°. V. n. pousser, sortir de terre, en parlant des plantes. "Les blés commencent à lever. "Les orges lèvent plus vite que les fromens, etc. = 6°. Lever entre dans plusieurs expressions du style figuré. Les plus nobles sont, lever le masque; agir ouvertement, après s' être contraint pendant quelque tems; et lever l' étendard, faire profession de... "Lever l' étendard de la révolte, de la dévotion, de l' irréligion; etc. Lever l' étendard contre quelqu' un, se déclarer ouvertement contre lui. _ Les aûtres sont du style familier. Lever la crète, ou le nez, montrer de l' orgueuil, ou seulement de la satisfaction, quand les afaires sont en bon état. Lever le lièvre; ouvrir le premier un avis, ou doner lieu à une discussion. Au propre, faire lever un lièvre, une perdrix; les faire partir. _ Lever les épaules, montrer par ce signe son improbation. _ Prendre quelqu' un au pied levé; lui vouloir faire faire quelque chôse, sans lui doner le tems de se reconaître. Marcher, ou aller par-tout tête levée, sans rien craindre. _ Il faudra se lever matin pour atraper cet homme, il est fin et rusé. _ Lever un habit, une étofe; acheter le drap ou l' étofe chez le Marchand. "Nous allons tantôt lever un habit pour ce Monsieur-là. Mariv. = * Dans certaines Provinces, on dit lever pour ôter. "Pourriez-vous lever cette tache? "Levez votre chapeau. Lever n' a ce sens que dans le figuré; lever le masque, (au propre, on dit, ôtez votre masque) lever un empêchement, un obstâcle, des doutes, un scrupule; lever les défenses, l' interdit, l' excomunication. = Lever le plan d' une place, etc. le tracer, en prendre des mesûres.
   LEVER, s. m. L' heure, le tems où l' on se lève. "Le lever du Roi. "Le lever du soleil, des étoiles; le tems où ils comencent à paraître sur l' horison.

LEVIER


LEVIER, s. m. [le-vié: 1re e muet, 2e é fer.] Bârre de fer, ou de quelque aûtre matière solide, propre à soulever, à remuer quelque fardeau. "La force du levier; le point d' apui d' un levier.

LEVIS


LEVIS, adj. m. [1re e muet.] Pont-levis, pont, qui se lève et qui se baisse pour ouvrir ou pour fermer le passage d' un fôssé. _ C' est tout l' emploi de cet adjectif.

LÉVITE


LÉVITE, LÉVITIQUE, s. m. [1re é fer. dern. e muet.] Le 1er se dit d' un Israélite de la Tribu de Levi, destiné au service du Temple; le 2d du 3e Livre du Pentateuque.

LEUR


LEUR, pron. possessif et personel, "Leur maison, je leur donerai. Dans le 1er exemple, il est possessif; c' est le pluriel de son, sa, ses; et il fait au pluriel leurs. Dans le 2d exemple, il est personel; c' est le pluriel de lui: il se rend par, à eux ou à elles. Il est indéclinable. "Ils leur ont dit, et non pas leurs ont dit, comme dit le peuple en certaines Provinces. = Leur possessif est quelquefois subst. "Les gens sages conservent leurs amis; les fous perdent les leurs. Voy. LUI. Voy. PRONOM.

LEVRAUT


LEVRAUT, Voy. LIèVRE.

LèVRE


LèVRE, s. fém. [1re è moy. et long; 2e e muet.] Partie extérieure de la bouche, qui couvre les dents, et qui aide à former la parole. "La lèvre supérieure, ou, de dessus; la lèvre inférieure, ou, de dessous. "Avoir mal aux lèvres, ou, à la lèvre. = Il forme, avec d' aûtres mots, des expressions figurées, du st. famil. = Rire du bout des lèvres; rire forcément. "Je n' ai pu la faire rire que du bout des lèvres. Th. d' Éduc. _ Avoir le coeur sur les lèvres; être ouvert, franc, sincère. "On le trouvait toujours libre, naturel, ouvert, comme un homme, qui a son coeur sur ses lèvres. Anon. Avoir la mort sur les lèvres; être à l' agonie. _ Avoir un mot sur les lèvres. (ou sur le bout de la langue) le savoir, mais ne pouvoir pas le dire. _ Se mordre les lèvres, pour ne pas rire. Madame Dacier lui done un aûtre sens. "Il dit, et tous les Princes étonés se mordent les lèvres, (de rage) et admirent la hardiesse de Télémaque. Odyssée. = L' Ab. Coyer dit, ne pas desserrer les lèvres, se taire: on dit, ordinairement, ne pas desserer les dents. = Le même Auteur apèle amitié des lèvres les fausses amitiés, qui ne sont qu' en paroles et en démonstrations.

LEVRETTE


LEVRETTE, s. f. LÉVRIER, s. m. LEVRON, s. m. [Levrète, lé-vrié, levron. Il n' y a pas de raison, ce me semble, d' écrire le 1er et le 3e de ces mots sans accent et le 2d avec un accent aigu. Mais on dit que c' est l' usage, et l' Acad. l' a mis de la sorte.] Lévrier, sorte de chien haut-monté sur ses jambes, qui a la tête afilée et le corps délié. Il a tiré son nom de ce qu' on s' en sert ordinairement pour courre le lièvre. Levrette, femelle du lévrier. Levron, lévrier au dessous de six ans.

LEûRRE


LEûRRE, s. m. LEURRER, v. act. [Leû--re, leu-ré: l' r se prononce fortement: 1re lon. au 1er, 2e e muet au 1er, é fer, au 2d.] Leûrre, apât; ce dont on se sert pour attirer quelqu' un. "On vous ofre telle chôse; mais c' est un leûrre pour vous attraper. "Le grand leûrre des Hommes c' est l' avenir. Fonten. "Ne vous laissez pas prendre à ce leûrre. = Leurrer, atirer par quelque chôse, qui done envie de, etc. "On l' a leurré de cette récompense; de cette espérance, il s' est laissé leurrer par de belles espérances; ou, absolument; il s' est laissé leurrer.

LEVûRE


LEVûRE, s. f. [2e lon. 1re et dern. e muet.] Écume, que fait la bière, quand elle bout. Les Boulangers s' en servent au défaut d' aûtre levain. = C' est aussi ce qu' on lève de dessus ou de dessous le lard à larder. "Une levûre, des levûres de lard.

LEXICOGRAPHE


LEXICOGRAPHE, s. m. LEXIQUE, s. m. [Lèkcikografe, lèkcike: 1re è moy. dern. e muet.] Lexique, Dictionaire. Il se dit principalement des Dictionaires grecs. Lexicographe Auteur d' un Dictionaire. C' est mots ne se disent que parmi les savans.

LEZ


LEZ, adv. Vieux mot. À~ côté, proche de... Tout contre; vis-à-vis. On le dit encôre de certains lieux. Le Plessis lez-Tours, Ville--neuve lez-Avignon.

LÉZARD


LÉZARD, s. m. LÉZARDE, s. f. [Lézar, zarde: 1re é fer.] Le Lézard est un animal ovipâre, à quatre pieds et à longue queûe. = Lézarde, crevasse, qui se fait dans un mur.

LIAIS


LIAIS, s. m. [liê, monos. ê ouv. et long.] Sorte de pierre dûre, dont le grain est très-fin.

LIAISON


LIAISON, s. f. LIAISONER, v. act. [liè--zon, zoné, 1re è moy.] Liaison est de 3 syll. en vers. Corneille dit de l' Amitié.
   L' égalité... en est le ferme apui,
   C' en est le fondement, la liaison, le gage.
       Rodogune.
LIAISON, union de plusieurs corps; des parties du discours; des afaires, des persones. "La liaison des pierres, des pièces de bois. "Il n' y a point de liaison dans ce discours. Cette période n' a pas de liaison avec la précédente. "La liaison des scènes est bien observée dans cette pièce. "Cette afaire a une grande liaison avec la vôtre. "Liaison d' intérêt; liaison d' amitié: il y a une étroite liaison entre eux. Former, rompre une liaison. "Prendre des liaisons avec les mécontens. Fénél. = Liaisons du Discours. Ce sont des particules, qui servent à lier les phrâses entre elles; comme, car, vu que, afin que, mais, etc. Elles rendent le discours doux et coulant, mais il est bon de les suprimer, quand on doit s' énoncer avec moûvement et chaleur. Andry. "Je regrette fort, disait Vaugelas, les mots, qui servent aux liaisons des périodes, parce que nous en avons grand besoin et qu' il faut les varier.
   Rem. Un Auteur moderne voyant que lier régit la prép. à, a doné ce régime à liaison. "Sentir la liaison des divertissemens (de l' opéra) à l' intrigue. Mallebranche avait dit avant lui: "Nous ne conoitrons jamais leurs diverses liaisons (des parties du cerveau) d' un côté aux organes, qui reçoivent l' impression des objets, et de l' aûtre à toutes les parties de notre corps. _ On dit avec et non pas à. Les substantifs n' ont pas toujours les mêmes régimes que les verbes du même sens. = On personifie quelquefois le mot liaisons, comme celui de conaissances. "Je n' ai d' aûtre intime que la Vicomtesse: les aûtres ne sont que des liaisons. Th. d' Éduc.
   LIAISON, en termes de cuisine, jaunes d' oeufs délayés, ou autre matière propre à épaissir une saûce.
   LIAISONER; Terme de Maçonerie. Arranger des pierres de façon que les joints des unes portent sur le milieu des aûtres. On le dit aussi des pavés.

LIANT


*LIANT, s. m. Douceur, souplesse dans le caractère. "Il a du liant dans l' esprit, dans le caractère. "Leon X mettoit plus de modération, de liant, de dextérité (que Jules II) dans l' emploi des moyens de réussir. Hist. d' Angl. "Je suis toujours révoltée, quand j' entends honorer cette criminelle indulgence, de douceur de caractère, de liant dans l' esprit, et de condescendance indispensable dans la société. Mil. Catesby. _ L' Acad. ne met point ce mot. Trév. le met comme adjectif; doux, complaisant, affable.

LIBAGE


LIBAGE, s. m. Gros moellon mal tâillé qu' on n' emploie que dans les fondemens d' un édifice.

LIBATION


LIBATION, s. f. [Liba-cion, en vers ci--on.] Éfusion de vin ou d' autre liqueur, que les Anciens faisaient en l' honeur de la Divinité. _ Il ne s' emploie guère qu' au pluriel. "Les libations étaient pratiquées par les Juifs et par les Païens dans leurs sacrifices.

LIBELLE


LIBELLE, s. m. LIBELLER, v. act. [li--bèlle, libellé: on pron. les 2 ll: 2e è moy. au 1er, é fer. au 2d: Richelet écrit libelle ou libèle, libeller, ou libéler. Il n' y a que les deux premières manières qui soient bones.] Libelle, écrit injurieux. "Libelle difamatoire. "Faiseur de libelles. = Libeller, est un terme de Pratique. Libeller un exploit, une demande, les dresser, et y expliquer sa demande. "Exploit libellé; demande libellée.
   * Libelle, ne se dit plus que d' un livre satirique et clandestin. On le disait autrefois d' un petit livre. Boileau dit à ses vers.
   Et déjà chez Barbin, ambitieux libelles
   Vous brûlez d' étaler vos feuilles criminelles.
Un Poète, même satirique, ne qualifierait pas aujourd' hui de ce nom ses Poésies.

LIBELLISTE


*LIBELLISTE, s. m. Faiseur de libelles. Mot nouveau, et peut-être nécessaire dans un siècle où les libelles sont si comuns. "Le Calvinisme lui échauffa la tête, (à Henri Étienne) et d' Auteur estimable en fit un libelliste et un calomniateur. Sabat. Trois siècles, etc. M. Linguet s' est aussi servi de ce mot.

LIBÉRAL


LIBÉRAL, ALE, adj. LIBÉRALEMENT, adv. LIBÉRALITÉ, s. f. [2e é fer. 4e e muet, au 2d et au 3e; en a le son d' an.] Ils expriment la vertu par laquelle on aime à doner. "Il est libéral, elle est fort libérale. "La natùre lui a été libérale de ses dons. "Doner libéralement: "Exercer sa libéralité envers quelqu' un. = Fig. On dit main libérale. "Les dons infinis que nous avons reçu de la main libérale du Tout-Puissant; de ses mains libérales. * Vaugelas et Ménage aimaient mieux libéral arbitre, que libre arbitre: mais celui-ci a prévalu, et l' aûtre ne se dit plus. = Arts libéraux, se dit par oposition à Arts méchaniques. Là il signifie, arts exercés par des gens libres. "La Peintûre, la Musique, la Médecine sont des arts libéraux. = Libéralité, se dit aussi du don que fait une persone libérale. "Voilà une grande libéralité. Ce n' est qu' en ce sens qu' on peut le mettre au pluriel. "Les libéralités de César étaient des corruptions pour acheter les suffrages du Peuple. St. Evr. _ Mais en parlant de la vertu, on ne le dit qu' au singulier. "On ne saurait trop admirer leur libéralité, et non pas, leurs libéralités.

LIBÉRATEUR


LIBÉRATEUR, TRICE, s. m. et f. Celui, celle, qui a délivré, etc. "Le libérateur de la Patrie. "Elle est sa libératrice.

LIBÉRATION


LIBÉRATION, s. f. LIBÉRER, v. act. [Libéra-cion, libéré: 2e é fer.] Termes de Jurisprudence et de Pratique. On s' en sert pour exprimer la décharge d' une dette, d' une servitude. "La libération d' un débiteur. "Il faut vous libérer de cette dette. "Il veut libérer sa maison de cette servitude. Et sans régime. "Il est toujours permis à un débiteur de se libérer. = M. Moreau dit libération des persones, et done à ce mot un sens et un emploi plus étendu. "Les corporations commencèrent la libération des peuples. En ce sens, c' est un néologisme.

LIBERTÉ


LIBERTÉ, s. f. [2e ê ouv. 3e é fer.] 1°. En général, le pouvoir qu' a l' âme de se déterminer à faire ou à ne pas faire. "Dieu a doné la liberté à l' Homme. "La grâce éficace non seulement ne contraint pas, mais elle ne nécessite pas la liberté. "Les passions afaiblissent la liberté. = 2°. L' indépendance des comandemens d' autrui. "Il aime sa liberté. "Il ne veut point assujétir, captiver sa liberté. = 3°. L' état d' une persone libre. "L' exemption de la servitude. "Vendre, engager; recouvrer sa liberté: "Donner la liberté à un esclâve. = 4°. En parlant d' un État, d' un pays; forme de gouvernement démocratique. "Ce tyran a oprimé la liberté de son pays. "Rome jouït long-tems de la liberté, mais d' une liberté orageûse. = 5°. Il est oposé à captivité. "Ce prisonier a récouvré sa liberté. "On l' a mis ou remis en liberté. "On l' a laissé en liberté sur sa parole. "Doner la liberté à un oiseau, qui était en cage. = 6°. Pouvoir d' agir, conformément aux Lois. "Liberté d' agir; liberté du comerce. _ Liberté de conscience, permission de professer une religion aûtre que la dominante. = 7°. Manière d' agir, libre, familière, hardie. Il se dit en bien ou en mal. "Honête liberté. J' ai pris la liberté de vous écrire. "C' est trop de liberté. _ Au pluriel, il se prend en mauvaise part. "Se doner, prendre des libertés. = 8°. Il est oposé à contrainte. "Laisser en liberté. "Parler en liberté, avec liberté. = 9°. Facilité, disposition naturelle. "Faire toutes chôses avec grâce et liberté. "Liberté de pinceau, de burin. _ Liberté d' esprit, dégagement de tout objet étranger, qui pourrait distraire, inquiéter. _ Liberté de ventre, facilité qu' il a de bien faire ses fonctions.
   Rem. 1°. Liberté, ne se dit au pluriel que dans le sens de privilèges, franchises. "Les libertés de l' Eglise Gallicane. "Par la capitulation, par le traité on laisse à cette ville, à ce peuple ses libertés, immunités et franchises. = On le dit aussi dans ce nombre, au sens marqué. n°. 7°. _ Hors de là on ne l' emploie qu' au singulier. Corneille dit dans Cinna:
   La perte de nos biens et de nos libertés.
Il ne parait pas que le Poète ait eu en vue d' exprimer la perte des privilèges du Peuple Romain, mais l' exemption de la servitude, l' état d' un peuple libre. Il falait donc dire, pour parler exactement, et de notre liberté. Mais la rime demandait un pluriel. = 2°. On dit bien, prendre, se donner des libertés; mais je ne pense pas qu' on puisse dire, vos libertés, ses libertés, pour dire, les libertés que vous prenez, qu' il se done, etc. Dans les Frères Énemis Jocaste dit à Créon:
   Craignez mon courroux,
   Vos libertés enfin retomberont sur vous.
= 3°. Liberté ne régit pas à mais de. "L' on comença à doner aux Évêques plus de liberté à user d' indulgence. Hist. d' Angl. _ On dit, avoir, doner la liberté, d' user, de faire, d' aler, de venir. = À~ votre liberté, à sa liberté, expression adverbiale. "Ils ne font pas dificulté de risquer leur vie, pour vivre à leur liberté. ANON.

LIBERTIN


LIBERTIN, INE, adj. et subst. LIBERTINAGE, s. m. LIBERTINER, v. n. [Libêr--tein, tine, nage, : 2e ê ouv.] Libertin, 1°. Qui aime sa liberté, qui hait toute sorte de sujétion, de contrainte. On ne le dit guère des femmes dans ce sens, ni même des hommes, on ne l' emploie guère qu' en parlant des enfans: cet écolier est devenu bien libertin; ou quand on l' aplique aux chôses, qui ont raport aux persones. "Elle est d' une humeur bien libertine. "Il mène une vie libertine. Mais quoiqu' en disent Bouhours et La Touche; on ne dit point, il est fort libertin; c' est la femme la plus libertine que je conaisse, pour dire, qui aime le plus sa liberté, et qui sait le moins se gêner. = 2°. Subst. Qui mène une vie déréglée. "C' est un libertin, une libertine. = 3°. Esprit fort, incrédule. "Les impies et les libertins.
   LIBERTINAGE, n' a que le 2d et le 3e. sens "Il, ou elle vit dans le libertinage. "Il fait profession de libertinage. "Le libertinage des moeurs conduit au libertinage de l' esprit et à l' irréligion. = Ainsi, en parlant des persones, il se prend toujours en mauvaise part; mais apliqué aux chôses, il ne signifie quelquefois que liberté, inconstance. "Voyez un peu où me porte le libertinage de ma plume. Sév. "Il y a trop de libertinage dans vos études; vous ne saurez jamais rien à fond. Acad.
   LIBERTINER, être dissipé, libertin. "Cet enfant ne fait que libertiner. Il n' est que du st. famil. = * Les Gascons disent se libertiner. "Cet enfant se libertine. Desgr.

LIBIDINEUX


*LIBIDINEUX, EUSE, adj. Dissolu, lascif. Apétits libidineux. Je le crois vieux. L' Acad. le met sans remarque.

LIBRAIRE


LIBRAIRE, s. m. LIBRAIRIE, s. f. [Li--brère, brérie: 2e è moy. et long au 1er, é fer. au 2d.] Libraire, marchand de livres. = Librairie, art, profession du Libraire. "Il s' est enrichi dans la Librairie. _ * Autrefois, bibliothèque. "La librairie du Roi.

LIBRE


LIBRE, adj. LIBREMENT, adv. [2e e muet; en a le son d' an.] Libre, est 1°. Qui a le pouvoir de se déterminer. "Nous sommes libres sous l' empire de la grâce. "Vous êtes libre de faire tout ce qu' il vous plaira. = 2°. Indépendant. "Il est libre, il ne dépend de persone. = 3°. Qui n' est pas esclâve. "Il est né libre, de condition libre. _ Qui n' est plus captif. "Il est libre, il est sorti de prison. = 4°. Qui n' est point contraint. "Libre dans sa tâille. "Air libre et dégagé; tâille, contenance libre et aisée. _ Avoir la voix, la parole libre, n' avoir point d' empêchement dans la voix, dans la parole. = Dans une assemblée, les suffrages ne sont pas libres, quand on n' ôse y dire son avis. _ Avoir le ventre libre, n' être pas constipé. = Être libre avec quelqu' un, n' être pas gêné; vivre avec lui sans cérémonie. = 5°. En parlant des mers, des chemins, où l' on peut aller en sûreté. "Les mers, les chemins, les passages sont libres. = 6°. Libre de; délivré; libre de soins, de soucis, de toute sorte d' engagement. = 7°. Licencieux, hardi, téméraire. "Discours, paroles libres. "Il est trop libre en ses discours. "Il a des sentimens trop libres sur la religion. = 8°. En parlant des vers; de mesûre inégale. "Pièce en vers libres.
   REM. Libre régit la prép. de. "Vous êtes libre de le faire: il vous est libre d' aler où il vous plaira. * Bossuet lui done pour régime la prép. à. "Celui, qui pèche, a été libre à ne pas pécher. Il faut, de ne pas pécher. = * Montesquieu lui fait régir la prép. de devant les noms, dans le sens de peu ataché à, peu scrupuleux sur. "Les Étoliens étoient hardis, téméraires... toujours libres de leur parole. _ D' aûtres donent le même régime à être libre, dans le sens de, être le maitre. "Il est libre du choix (de choisir.) Ann. Lit. Je crois ce régime tout au moins douteux. = Libre, délivré, exempt a ce regime selon l' usage.
   Libre d' ambition, de soins débarrassé.
       L. Rac.
  Aux humains inconu, libre d' inquiétude,
  C' est-là que de lui-même il faisait son étude.
       Henriade.
LIBREMENT, 1°. Sans contrainte. "Agir, vivre, parler, écrire librement. "Vous pouvez en user librement. = 2°. Sans circonspection, sans égard. "Parler, en user trop librement.

LIBRE-PENSEUR


*LIBRE-PENSEUR, s. m. C' est le nom que l' Ab. Guénée done aux Philosophistes. Il sent l' anglicisme: free-thinker.

LICE


LICE, s. f. Ce mot a trois significations, qui n' ont aucun raport l' une avec l' aûtre. I. Lieu préparé pour les tournois, les combats à la barrière, etc. "Entrer dans la lice, ou en lice. Ils se disent tous deux dans le propre; le 2d seul se dit au figuré. "Le beau sexe y entre en lice avec les savans. Hist. du Japon. = II. Sorte de fabrique de tapisserie. On l' apèle de haute-lice, quand le fond sur lequel les tapissiers travaillent est tendu de haut en bâs, et de basse-lice, quand il est couché tout plat. "Tapisserie de haute-lice, de basse-lice, et absolument, une haute-lice, une basse-lice. = III. Femelle d' un chien de chasse.

LICENCE


LICENCE, s. f. LICENCIEMENT, s. m. LICENCIER, v. act. [Li-sance, ciman, ci-é: 2e. lon. Richelet écrit licenciment comme on prononce.] Licence. * Aûtrefois permission. "Doner licence à tout le monde de nous dire des injûres. D' Abl. = Aujourd' hui, Liberté trop grande. "Il prend des licences; il se done de grandes licences. = Dérèglement. "Licence effrénée. "C' est ouvrir la porte à la licence. "Ce n' est pas liberté, c' est licence. = Licence Poétique, liberté que les Poètes se donent contre les règles du langage, ou contre l' usage. Dans le st. famil. on aplique cette expression à d' autres objets. "Gardez-vous bien de faire conoître au bon d' Hacqueville que je vous ai envoyé sa lettre. La rigueur de son exactitude ne comprendroit pas cette licence poétique. SÉV. = Licence est, dans les Universités, le tems qu' on est sur les bancs pour obtenir le degré de licencié. "Faire sa licence, comencer, achever sa licence, entrer en licence; sortir de licence. = Licencié, s. m. qui a fait sa licence, qui a pris ses degrés de licence. * Plusieurs et Richelet entre aûtres, écrivent licentié avec un t, contre l' analogie.
   LICENCIER, act. Congédier. "Licencier des troupes. = Se Licencier, s' émanciper. "Il s' est licencié jusqu' à dire, etc. "Il s' était licencié à des paroles un peu dûres. M. Marin pense que ces phrâses ne sont guère d' usage, et qu' il n' y a que le peuple qui parle ainsi. L' Acad. les met sans remarque. * Bossuet l' emploie sans régime. "Il étoit temps de ramener les catholiques, qui se licencioient. On ne le dit point de la sorte. S' émanciper, qui a le même sens, s' emploie bien sans régime; mais se licencier doit être toujours acompagné de la préposition à, ou de quelque adverbe: "Il se licencie beaucoup. = Licenciement, congé qu' on done à des troupes, dont on n' a plus besoin. "Licenciement des troupes.

LICENCIEUX


LICENCIEUX, EûSE, adj. LICENCIEûSEMENT, adv. [Li-san-cieû, cieû-ze, cieû--zeman; 2e et 3e lon. 4e e muet, en vers et dans le discours soutenu, ci-eû, etc. L' Ab. de Houteville et d' autres Auteurs, ou leurs imprimeurs ont écrit et écrivent licentieux avec un t, contre l' analogie et l' usage.] Ils se disent de ce qui est déréglé, désordoné. "Vie licencieûse; discours licencieux, paroles licencieûses: il est fort licencieux en paroles. "Vivre, parler licencieûsement. = Ils se prènent en mauvaise part, et ne se disent que de ce qui concerne les moeurs. * Autrefois on le disait de la litérature. "Ces explications licencieûses (libres, peu exactes) font trouver tout ce qu' on veut dans l' Écritûre. Boss. _ Racan dans la Vie de Malherbe, parle de sonnets licencieux, pleins de licences et contraires aux Règles. Ménage emploie aussi cette expression; et M. Coste, dans une note sur un endroit de La Bruyère. "Un Anglois, qui a mis au jour en sa langue une traduction ou plutôt une paraphrâse très-licencieûse, (libre et peu litérale) des caractères de Théophraste, etc. Tout cela est vieux et hors d' usage.

LICITE


LICITE, adj. LICITEMENT, adv. [3e e muet; en a le son d' an.] Licite, qui est permis par la loi. Licitement, sans aler contre la loi. "C' est une chôse licite. "On le peut licitement. _ Ils ne sont que du style didactique. On dit dans le discours comun, cela est permis.

LICOL


LICOL, ou LICOU, s. m. Le 1er ne se dit qu' en vers, devant une voyèle, pour éviter l' hiatus. Hors de là on dit toujours licou. Lien, que l' on met autour de la tête des chevaux, mulets, ânes, pour les atacher.

LICORNE


LICORNE, s. f. Animal sauvage, qui a une corne au milieu du front, et qui ressemble à un petit cheval.

LICTEUR


LICTEUR, s. m. [Lik-teur.] Officier, qui servait chez les Romains auprès du Consul et des aûtres Magistrats. "Les Licteurs portaient des haches, envelopées de faisceaux.

LIE


LIE, s. f. [lî-e: 1re lon. 2e e muet.] Ce qu' il y a de plus grossier dans une liqueur, et qui va au fond. "Lie de vin, de bière, etc. Boire jusqu' à la lie. = FIG. La lie du peuple, la plus vile populace. _ Un Auteur gémissant sur la dépravation horrible des moeurs du siècle où nous vivons, l' apèle la lie des siècles. Et Madame de Sévigné, parlant de l' extrême vieillesse, dit éloquemment. "Que la lie de l' esprit et du corps est humiliante à soutenir!

LIèGE


LIèGE, s. m. LIÉGER, v. act. [1re è moy. au 1er, é fer. au 2d.] Liège, espèce de chêne verd, dont l' écorce est spongieûse et légère. = On le dit sur-tout de l' écorce de cet arbre, dont on fait des bouchons, des semelles, etc. = Liéger, garnir de morceaux de liège. "Liéger un filet. C' est un terme de Pêcheurs.

LIEN


LIEN, s. m. [Monos. en prôse lien; de deux syll. en vers, li-en.
   Vous triomphez, dit-il, je ne résiste plus,
   Cependant les liens sont ici superflus.
       Marin, 6e. Éclo. de Virg.]
1°. Ce qui sert à lier. "Lien d' une gerbe, d' un fagot. = 2°. Corde ou chaîne dont un prisonnier est ataché. "Forger des liens. Briser, rompre ses liens. = Figurément. "C' est toi qui a brisé les liens dont la pudeur enchaînoit mon sexe. Jér. Dél. Il se dit en ce sens, au pluriel. = 3°. Tout ce qui atache et unit les persones ensemble. "Le lien conjugal, ou le lien du mariage; lien sacré, indissoluble. "Liens d' intérêt, d' amitié. "Les liens du sang, de la natûre, etc.
   Rem. Quoiqu' on dise le lien du mariage, et célébrer un mariage, on ne dit pas, célébrer ce lien, comme le dit Molière, dans l' École des Femmes.

LIENTERIE


LIENTERIE, s. fém. [Li-anterîe; 2e et 4e lon. 3e et 5e e muet.] Dévoîment, dans lequel on rend les alimens tels qu' on les a pris.

LIER


LIER, v. act. [Li-é: 2e é fer. l' i est long devant l' e muet; il lîe, ils lîent. Au futur et au conditionel, cet e muet ne se fait pas sentir: il liera, lierait: pron. lîra, lîrè, en deux syll. l' i est long; au lieu que dans le futur et le conditionel du v. Lire, l' i est bref: il lira, il lirait.] Serrer avec un lien. "Lier un fagot, une bote de foin, les mains, les pieds, etc. Lier un homme à un arbre. "Fou à lier. = 2°. Joindre ensemble. "La chaux et le ciment lient les pierres. = 3°. Fig. unir ensemble. "L' amitié qui nous lie. Ils sont liés d' amitié, d' intérêt. = 4°. On dit, en st. famil. lier une partie de plaisir, de promenade. = Lier amitié avec quelqu' un, (sans article) et lier conversation, lier commerce ou société avec. = Se lier les mains, s' obliger, s' ôter le pouvoir de faire autrement. "Je ne veux pas me lier, ou qu' on me lie les mains.

LIERRE


LIERRE, s. m. [liè-re: r forte: 1re è moy. 2e e muet.] Plante qui rampe, ou à terre, ou contre les murâilles et autour des arbres. = Certains Poètes l' ont fait de trois syllabes, li-èr-re.
   Et permets que la main des timides Pasteurs
   Unisse à tes lauriers un lierre et des fleurs,
       Gresset.
D' autres ne l' ont fait que de deux syll.
  Cet immortel Vida, qui joignit à la fois
  Le lierre du critique au laurier du Poète,
       L' Ab. du Resnel.
  Et la vigne flexible, et le lierre aux cent mains
      L' Ab. de l' Isle.

LIESSE


*LIESSE, s. fém. Joie, gaîté. Vieux mot. Il est resté dans cette phrâse proverb. "Vivre en joie et en liesse. Il peut encôre être employé dans le st. marotiq.
   Aux noces d' un tyran, tout le peuple en liesse,
   Noyoit son souci dans les pots.
       La Font

LIEU


LIEU, s. m. [Monos. dout. au singul. long. au pl. lieux.] 1°. L' espace qu' un corps ocupe. "Tout corps est dans un lieu: il ne peut être naturellement en plusieurs lieux. = 2°. Endroit: "Lieu agréable, ou afreux, désert, solitaire. = 3°. Endroit indiqué. "Nous irons sur les lieux. "Descente du Juge sur les lieux. = 4°. Place, rang. "Le premier lieu, le troisième lieu d' une licence. "Chaque créancier viendra en son lieu. "Être au lieu et place de... En premier lieu, en troisième lieu, etc. Adv. Premièrement, troisièmement, etc. = 5°. Maison, famille. "Venir de bon lieu, ou de bâs lieu; s' allier en bon lieu. = 6°. L' endroit, le tems convenable de dire, de faire. "Ce n' est pas ici le lieu de disputer. "Nous en parlerons en tems et lieu. = 7°. L' endroit, le passage d' un livre. "Aristote dit en plus d' un lieu, etc.
   REM. Lieu, endroit, place (synon.) Lieu marque un total d' espace; endroit n' indique proprement que la partie d' un espace plus étendu; place insinûe une idée d' ordre et d' arrangement. Ainsi l' on dit: le lieu de l' habitation, l' endroit d' un livre cité; la place d' un convive, ou de quelqu' un qui a séance dans une assemblée. "Paris est le lieu du monde le plus agréable. "Les espions vont dans tous les endroits de la Ville. "Les premières places ne sont pas toujours les plus commodes. GIR. Synon. _ De-là concluons qu' on ne peut dire, comme a dit Boileau:
   Et laissoit en leur lieu,
   À~ des Chantres gagés, le soin de louer Dieu.
En leur place aurait été beaucoup plus propre, selon moi, dit La Touche; ni lieu pour endroit, en parlant d' un livre, comme a dit Bossuet. "Il faudroit conclure de ce lïeu, (de cet endroit) que, etc. "Voici dans le même lieu (dans le même endroit) des paroles qui ne sont pas moins étranges. "Dans ce lieu (cet endroit) de St. Augustin~; ni lieu, pour place, comme a dit Voitûre: "Tenant le lieu (la place) où vous êtes, il n' y a rien que vous trouviez plus mal aisément que des affections aussi pûres que la mienne.
   Avoir ou y avoir lieu, régit de et l' infinitif. "J' ai lieu de me faire plaindre. "Il n' y a pas lieu de tant crier. = Tenir lieu la prép. de: "Il m' a tenu lieu de père. = Doner lieu le datif des noms et de devant les verbes. "Ne lui donnez pas lieu de se plaindre. = Au reste, avoir et doner lieu se disent sans article. "Ces plaisirs n' y avoient point de lieu. Boss. Le de est de trop. "Cette obligation n' a plus de lieu pour les simples fidèles. Griffet. "La vengeance de Dieu n' a pas de lieu, quand on a soin de la prévenir. Id. Ce qui a induit en erreur ces illustres Ecrivains, ce sont les adverbes point, plus et pas, qui sont ordinairement suivis de la prép. de: mais dans ces expressions, ils s' emploient sans régime. = Y avoir lieu régit le datif des noms, (la prép. à) et non pas le génitif (la prép. de). "Leur animosité réciproque étoit montée à un tel degré, qu' il ne pouvoit pas y avoir lieu de réconciliation. Targe. Dites, à la réconciliation. = Être en lieu régit de devant les verbes. "Vous êtes en lieu de prendre vos résolutions sur le lait.
   Au lieu, prép. régit aussi de devant les noms et les verbes. "Au lieu de lui, au lieu de faire, etc. _ Quelques Auteurs ont dit en lieu de, mais il ne se dit plus. = Au lieu que régit l' indicatif. "Il persécute ses bienfaiteurs, au lieu qu' il devroit les défendre. "Il s' est montré, au lieu qu' il auroit dû se cacher. = Au lieu de et au lieu que peuvent se placer, ou au comencement de la phrâse, ou au second membre. "Au lieu de venir, il s' est enfui, ou Il s' est enfui au lieu de venir. "Au lieu qu' il auroit dû me remercier, il me boude; ou bien, il me boude, au lieu qu' il auroit dû me remercier. = Au lieu et place de est une expression usitée au Palais. "Le créancier est subrogé au lieu et place d' un autre, dont il a la cession.

LIEûE


LIEûE, s. fém. [Lieû-e: 1re lon. l' e muet de la seconde ne se fait presque pas sentir.] Espace d' une certaine étendue, qui sert à mesurer la distance d' un lieu à un aûtre. Les lieûes ordinaires sont de trois mille pas, les plus grandes de quatre mille, les moindres de deux mille. "Grande, petite lieûe: lieûe comune. Faire une, deux, trois lieûes, etc. par heure, par jour. = On dit, proverbialement, d' un homme qui n' écoute pas, qu' il est à cent lieûes de ce qu' on dit; de celui qui ne saisit pas une dificulté, qu' il en est à mille lieûes. "Je suis à mille lieues de l' hydropisie: il n' en a jamais été question. Sév.

LIèVRE


LIèVRE, s. m. LEVRAUT, s. m. [Liè--vre, levrô; 1re è moy. et long au 1er, e~ muet au 2d, 2e e muet au 1er, lon. au 2d.] Le lièvre est un animal fort vite et fort timide, assez conu. Levraut, lièvre qui n' a pas encôre toute sa grandeur. "Chasser au lièvre, ou le lièvre; courre le lièvre. "Petit levraut. Levraut de trois quarts.
   Prendre le lièrre au collet, ou au corps, c' est, figurément, en st. prov. alléguer la vraie raison. "Je vous aime par bien des raisons; mais sur-tout parce que vous m' aimez: celle-là est bien pressante, et prend le lièvre au corps. Sév. = Courir ou chasser deux lièvres à la fois, mener deux afaires, ou prendre deux moyens diférens pour la même, ou prétendre à deux postes disparates, etc. "M. Gui court deux lièvres à la fois. Le jour qu' il présenta une requête au Grand Conseil, il en présenta une autre à la Quatrième des Enquêtes. Sév. = Montrer le lièvre, l' afaire, le but, etc. "Il me sufit de leur avoir montré le lièvre: je laisse à leur industrie le soin de l' atraper. Coyer. = Peureux comme un lièvre, excessivement peureux. = C' est-là où git le lièvre, c' est le noeud de l' afaire. Voyez LEVER.

LIEUTENANT


LIEUTENANT, ANTE, s. m. et fém. LIEUTENANCE, s. f. [2e e muet, 3e lon.] Lieutenant, qui tient lieu de; qui est sous un Oficier en chef, et qui comande en son absence. Lieutenante, femme d' un Lieutenant de robe, ou de Roi. Lieutenance, ofice de Lieutenant. "Lieutenant Général pour le Roi dans la Province de... "Lieutenant de Roi de... Lieutenant dans un régiment. "Lieutenant Général, Civil ou Criminel, etc. "Madame la Lieutenante de Roi. "La Lieutenante Générale; la Lieutenante Civile ou Criminelle. "On lui a doné la Lieutenance Générale, ou de Roi de, etc.

LIGATûRE


LIGATûRE, s. fém. [3e. lon. dern. e muet.] Bande de drap dont les Chirurgiens serrent le bras, le pied, pour l' opération de la saignée. = C' est aussi la manière de lier avec cette bande.

LIGNAGE


LIGNAGE, s. m. LIGNAGER, s. et adj. masc. [mouillez le g: dern. e muet au 1er, é fer. au second.] Lignage, race, famille. "Homme de haut lignage. "Ils sont de même lignage. _ Il vieillit = Lignager~ qui~ est de même lignage. "Les lignagers~, dans la coutume de Paris, ont~ les quatre~ quints des propres. _ Adj. masc. Retrait lignager, action par laquelle on retire, sur un étranger, un héritage qui a été vendu par un parent.

LIGNE


LIGNE, s. fém. [mouillez le g: 2e e muet.] 1°. Trait simple, considéré comme n' ayant que la longueur sans largeur, ni profondeur. Ligne droite ou courbe. = 2°. Cordeau ou ficelle dont plusieurs ouvriers se servent pour dresser leurs ouvrages. = 3°. Ficelle, petite corde qui a un hameçon ataché au bout, et dont les Pêcheurs se servent pour prendre du poisson. "Pêcher à la ligne. = 4°. En termes de guerre, rang, rangée. "L' armée était campée sur trois lignes. "La première ligne plia, etc. = 5°. La ligne ou l' équateur, cercle de la sphère, également distant des deux pôles du monde. "Les peuples qui sont sur la ligne. = Ligne horisontale, parallèle à l' horison. _ Ligne méridienne, qui marque le méridien dans le lieu où elle est tracée. = 6°. La 12e partie d' un pouce. "Deux pieds, six pouces quatre lignes. = 7°. En termes de généalogie, la suite des descendans d' une race. "Ligne directe ou collatérale. "Le Roi descend de Saint Louis, en droite ligne.
   On dit, proverbialement, droit comme une ligne (n°. 1°.) Mde de Sévigné se sert de cette expression au figuré. "Je trouve des âmes de paysans plus droites que des lignes, aimant la vertu~, comme naturellement les chevaux trotent. Hors de ligne, à la marge. On dit aussi hors ligne. L' Acad. ne met que celui-ci. = À~ la ligne, alinéa. Mettre un mot à la ligne. * M. l' Ab. Garnier dit en droite ligne, pour, en droitûre. "Ils s' étoient transportés en droite ligne à Cahors Hist. de Fr. = Mettre, ou tirer en ligne de~ compte, employer dans un compte. On le dit quelquefois figurément. "Je ne mets~ pas en ligne de compte tant d' autres services que je vous ai rendus. = Donner la ligne~ c' est, dans une lettre, après le mot de Monsieur, qui est mis au haut de la lettre, ne rien mettre dans le reste de la ligne, et laisser un espace plus ou moins grand entre ce mot et le comencement de la lettre.

LIGNÉE


LIGNÉE, s. f. [mouillez le g; 2e é fer. et long; 3e e muet.] Race. "Ce Prince mourut sans laisser de lignée.

LIGNEUL


LIGNEUL, s. m. [Li-gneul: mouillez le g.] Sorte de fil ciré, dont les Cordoniers se servent dans leur ouvrage.

LIGUE


LIGUE, s. fém. LIGUER, v. act. LIGUEUR, EûSE, s. m. et fém. [Li-ghe, ghé, gheur, gheûse: l' u est muet, il n' est là que pour doner au g un son fort qu' il n' a pas devant l' e: 2e e muet au 1er, é fer. au 2d, lon. au dern.] Confédération de plusieurs États pour se défendre ou pour ataquer. "La ligue de Cambrai, d' Ausbourg, etc. = La Ligue, absolument, criminelle confédération qui se fit en France pour exclûre Henri IV du trône. = Ligue se dit quelquefois des complots entre particuliers. = Liguer, unir dans une même ligue. "Le Prince d' Orange ligua presque tous les États d' Europe contre Louis XIV. = Il se dit sur-tout avec le pronom personel. "Tous les peuples se liguèrent pour la défense de leur liberté. "Ses propres enfans se liguèrent contre lui. = Ligueur ne se dit que de ceux qui étaient de la ligue du tems de Henri III et de Henri IV. "C' était un grand ligueur; une ligueûse fanatique.
   Rem. Dit-on, entrer en ligue avec? J' en doute. "Cromvel souhaita avec passion d' entrer en ligue avec la Suède. Histoire des Stuarts.

LIMAÇON


LIMAÇON, Voy. LIMAS.

LIMâILLE


LIMâILLE, s. f. [Limâ-glie.: 2e lon. mouillez les ll: 3e e muet.] Petites parties du métal que la lime fait tomber. "Limâille de fer, d' acier, d' or, d' argent.

LIMAS


LIMAS, LIMAÇON, s. m. LIMACE, s. f. Insecte rampant, de substance molle et visqueûse. L' Acad. avait mis aussi colimaçon. _ Elle l' a retranché des dernières éditions. Elle dit qu' on apèle plus ordinairement limas ou limace ceux qui n' ont point de coquille, et limaçon ceux qui en ont. La Touche dit qu' il ne voudrait se servir que de limaçon. C' est celui, en éfet, dont on se sert le plus comunément. = On apèle, escalier à limaçon, un escalier qui tourne autour d' un noyau. = On dit aussi, st. prov. limaçon qui sort de la coquille, d' un homme de néant, qui sort de son état.

LIMBES


LIMBES, s. m. pl. [Lein-be: 1re long. 2e e muet.] Le lieu où étaient les âmes de ceux qui étaient morts en la grâce de Dieu avant la venûe de J. C. et celui où sont les enfans morts sans baptême, suivant l' opinion de plusieurs Théologiens.

LIME


LIME, s. f. LIMER, v. act. [2e e muet au 1er, é fer. au second.] Lime, outil de fer creusé par diverses lignes, qui sert à polir et à couper le fer. = Lime sourde est, au propre, une lime garnie de plomb, et qui ne fait point de bruit quand on l' emploie; au figuré, sournois, hypocrite: et aussi caûse qui mine, qui détruit insensiblement. = On dit, figurément, dans un style plus noble, passer la lime sur un ouvrage d' esprit, le limer, le corriger, le polir. = Limer, c' est polir, ou couper, ou amenuiser avec la lime.

LIMIER


LIMIER, s. m. Gros chien de chasse, avec lequel~ le Véneur quête et détourne la bête quand on veut la courir.

LIMINAIRE


*LIMINAIRE, adj. On disait autrefois Épître liminaire, pour dire Préface, ou Épître dédicatoire. "L' Épître liminaire de Tite Live, adressée à M. de Luines. Vie de Malherbe. _ Boileau parle aussi des Épîtres Liminaires, en se moquant.
   De-là vint cet amas d' ouvrages mercenaires,
   Stances, Odes, sonnets, Épîtres liminaires.
   Liminaire ne se dit plus: on ne dit que préliminaire avec Discours. _ L' Acad. se contente de dire qu' il vieillit. C' est probablement une remarque de la 1re édit., conservée dans les suivantes.

LIMITATIF


LIMITATIF, IVE, adj. LIMITATION, subst. fém. LIMITER, v. act. [4e lon. au second, tatif, tive, ta-cion, .] Limiter c' est borner, doner des limites. "On lui a limité le prix; le tems de son voyage. "Limiter le pouvoir de, etc. = Limitatif, qui limite, qui renferme dans des bornes certaines. = Limitation; fixation, restriction. "On lui a doné des pouvoirs sans limitations.

LIMITES


LIMITES, s. f. plur. LIMITROPHE, adj. [Limite, trofe: dern. e muet.] Limites, au propre, bornes qui séparent un territoire, une Province, un État d' avec un aûtre. "Les limites de la France et de l' Espagne. = Fig. "Ne point doner de limites à son ambition. Il est moins usité que bornes, au figuré.
   REM. Rollin et le Géographe d' Anville ont fait limites masc. "Pourvu que les limites en fussent marqués et fixés bien clairement. Hist. Anc. "Sur un terrein vague et indécis convient-il d' établir des limites aussi marqués? D' Anville. _ Ce mot est constamment féminin.
   LIMITROPHE, qui est sur les limites. "Ces deux pays sont limitrophes. "Cette Province est limitrophe de l' Espagne.

LIMON


LIMON, s. m. LIMONADE, s. f. LIMONADIER, IèRE, s. m. et f. LIMONEUX, EûSE, adj. LIMONIER, s. m. [3e lon. au pénult., neû, neû-ze; é fer. au dern. nié: 4e é fer. au 3e, è moy. et lon. au 4e; nadié, diè--re.] Limon a trois significations, qui n' ont point de raport l' une avec l' aûtre: 1°. Boûe. "Dieu forma Adam du limon de la terre: 2°. Citron, qui a beaucoup de jus. "Sirop de limon. 3°. L' une des deux grosses pièces de devant d' une charrette, entre lesquelles on atèle les chevaux. "Mettre un cheval dans les limons. = Limoneux a raport au 1er sens: bourbeux, plein de limon. "Terre limoneûse. = Limonade et Limonadier se disent dans le 2d: Boisson faite avec du jus de limon, ou de citron, de l' eau et du sucre. _ Celui qui fait et qui vend de la limonade, de l' orgeat, etc. _ Limonier a le 2e et le 3e sens. Arbre qui porte les limons. _ Cheval qu' on met aux limons.

LIMPIDE


LIMPIDE, adj. LIMPIDITÉ, s. f. [Lein--pide, dité: dern. e muet au 1er. é fer. au 2d.] Limpide, clair, net. Limpidité, qualité de ce qui est limpide. _ Ils ne se disent que des liqueurs. = Ces mots ont eu bien de la peine à s' établir. M. Andry ne les regardait pas comme assez autorisés par l' usage. L' Acad. ne les avait pas dabord mis dans son Dict. Elle les a insérés dans les dern. édit.

LIMûRE


LIMûRE, s. f. Action de limer. "Cette limûre sera longue. = État de ce qui est limé. "La limûre de ce pistolet est achevée.

LIN


LIN, s. m. [Lein.] Plante dont on file l' écorce. "Filer du lin. "Toile de lin.

LINCEUL


LINCEUL, s. m. [Lein-ceul: 2 syll. 1re lon.] Drap de toile qu' on met dans un lit. M. Desgrouais traite ce mot de gasconisme. L' Académie se contente de dire qu' on se sert plus ordinairement du mot de draps. _ Linceul s' est conservé dans cette phrâse proverbiale. "Il n' a pas un linceul pour se faire ensevelir. Il est extrêmement paûvre.

LINÉAMENT


LINÉAMENT, s. m. [Linéa-man: 2e é fer.] Il ne se dit que des traits du visage. Académie. "Il étudie tous ses traits.: il examine tous ses linéamens. MASCARON. Ce mot est vieux, et l' on ne s' en sert plus guère. M. Marin pense qu' on dit encôre, les linéamens du front, de la main, d' un dessin, etc.

LINGE


LINGE, s. m. LINGER, ÈRE, s. m. et f. LINGERIE, s. f. [Lein-ge, , gère, gerî-e: 1re lon. 2e e muet au 1er et au dern. é fer. au 2d, è moy. et long au 3e.] Linge, toile de lin ou de chanvre, mise en oeuvre. "Ouvrière en linge. "Faire, coudre du linge. "Changer de linge, etc. = On dit, proverbialement, d' un homme faible, qu' il n' a non plus de force qu' un linge mouillé; ce qui se dit au figuré, comme au propre. = Linger, Lingère, celui, celle qui vend, ou fait du linge. "Marchand linger. "Boutique de lingère. = Lingerie. 1°. Métier de linger, de lingère. "Il, elle entend bien la lingerie. = 2°. Lieu où sont les boutiques de lingers, de lingères. = 3°. Dans les Monastères, lieu où l' on serre le linge de la Communauté.

LINGOT


LINGOT, s. m. [Lein-go: 1re lon.] Or ou argent en masse. "Lingot d' or, d' argent: "Or, argent en lingot.

LINGUAL


LINGUAL, ALE, adj. [Lein-goual, gou--ale.] Qui apartient, qui a raport à la langue. "En Anatomie, nerf lingual, artère linguale. = En termes de Gramaire, il se dit des consones qui sont produites par les diférens mouvemens de la langue. "D, L, N, R, T sont des consones linguales.

LINON


LINON, s. m. Toile de lin très-claire et très-déliée.

LINOTTE


LINOTTE ou LINOTE, s. f. Petit oiseau qui chante très-agréablement. "Sifler une linote. = On apèle (st. prov.) tête de linote, un homme de peu de sens. "Des linotes mitrées. Anon. = Sifler la linote, (fig. fam. burlesque) boire.
   J' ai le gosier brillant pour sifler la linote.
   REM. Trév. dit linot, pour le mâle. "Ce linot est joli.
   Un linot depuis peu, charmé de votre note,
   A fait divorce avec que sa linote.
       Pellisson.
L' Acad. n' a point mis linot.

LINTEAU


LINTEAU, s. m. [Leinto; au plur. Linteaux: eau est dout. au sing. long au plur.] Pièce de bois qui se met en travers au-dessus de l' ouvertûre d' une porte, ou d' une fenêtre, pour soutenir la maçonerie.

LION


LION, LIONNE ou LIONE, s. m. et f. [Li-on, Li-one.] Animal féroce. On apèle le Lion le Roi des animaux. = On dit, d' un homme brave et courageux: c' est un lion; il a un coeur, un courage de lion. = Partage de lion, si inégal, que tout est d' un côté, rien de l' aûtre. La Fable du lion de la Fontaine a doné lieu à ce proverbe. = Un lâche qui menace, est un âne couvert de la peau du lion. Voyez COûDRE. = On apèle lionceau, le petit d' une lione.

LIPPE


LIPPE, ou LIPE, LIPPÉE, ou LIPÉE, s. f. On apèle, par dérision, grosse lipe, vilaine lipe, la lèvre d' en bas, quand elle est trop grôsse, trop avancée. = Lipée, bouchée. (st. fam.) "Il en a pris une bone lipée, deux ou trois grôsses lipées~. = Franche lipée, (même style) bon repâs. "Il a eu une franche-lipée, un bon repâs, qui ne lui a rien coûté. "Chercheur de franches-lipées, qui aime à faire bone chère aux dépens d' autrui.
   Rien d' assuré, point de franche-lipée,
   Tout à la pointe de l' épée.
       La Fontaine.
D' Ablancourt dit lippée franche, contre l' usage.

LIPPU


LIPPU, ou LIPU, ÛE, adj. [2e lon. au 2d, 3e e muet.] Celui, celle qui a une grôsse lipe. "Il est lipu, elle est lipûe. = S. m. "C' est un grôs lipu.

LIQUATION


LIQUATION, s. f. LIQUÉFACTION, s. f. LIQUÉFIER, v. act. [Li-koua-cion, Rich. Port. Likué-fak-cion. Acad. Likéfié, Acad. Rich. Port. 2e é fer. aux deux dern.] Liquéfier, rendre liquide. Liquéfaction, changement qui survient à un corps, qui de solide devient fluide. Liquation, opération de métallurgie, qui consiste à séparer la portion d' argent qui est contenûe dans le cuivre.

LIQUEUR


LIQUEUR, s. f. LIQUIDE, adj. LIQUIDITÉ, s. f. [Li-keur, kide, kidité.] Liqueur se dit en général, de toute substance fluide et liquide. "L' eau est la plus simple des liqueurs. "Le vin de Chipre est une agréable liqueur. "Liqueur bachique, (st. plais.) le vin. = En particulier, boisson dont la bâse est l' eau-de-vie, ou l' esprit de vin. "L' usage immodéré des liqueurs est très-nuisible à la santé. = Vins de liqueur, vins muscats, vins d' Espagne, et aûtres. = Vin qui a de la liqueur, trop de liqueur, trop de douceur. "Ce vin de Bourgogne a de la liqueur. = Liqueurs fraîches, rafraichissantes, telles que la limonade, les eaux de groseille, etc.
   LIQUIDE, qui a ses parties fluides et coulantes. "Ce breuvage est trop épais; il n' est pas assez liquide. = Subst. Les liquides, alimens liquides, par oposition aux solides. "Il a la fièvre: on l' a réduit aux liquides. = Confitûres liquides, qui sont dans du sirop. = En Gramaire, on apèle consones liquides l' L, l' M, l' N, l' R, parce que jointes à d' aûtres consones, dans la même syllabe, elles sont fort coulantes. = Liquide, en parlant de biens, net et clair, qui n' est point sujet à contestation. "Il a dix mille écus de bien clair et liquide.
   LIQUIDITÉ. Qualité de ce qui est clair et liquide.

LIQUIDATION


LIQUIDATION, s. f. LIQUIDER, v. act. [Likida-cion, .] Termes de Pratique. Ils expriment l' action de rendre clair et certain, ce qui était incertain et embarrassé. "Liquidation de dépens, d' intérêts. "Liquider les dépens, ses dettes, son bien; les intérêts à tant, etc.

LIQUOREUX


LIQUOREUX, EûSE, adj. *LIQUORISTE, ou LIQUEURISTE, s. m. [Liko-reû, reû-ze, Likoriste, Li-keu-riste: 3e lon. aux 2 prem.] Liquoreux ne se dit que des vins qui ont une douceur qu' ils ne devraient pas avoir. "Vin trop liquoreux: "Boisson trop liquoreûse. = Liquoriste, celui qui fait et qui vend des liqueurs. Plusieurs disent liqueuriste. _ Ni l' un ni l' aûtre ne sont dans les Dictionaires.

LIRE


LIRE, v. act. [1re lon. 2e e muet.] Je lis, nous lisons; je lisais, je lus, j' ai lu; je lirai, je lirais; lis, que je lise, je lusse; lisant; lu. = Lire, parcourir des yeux ce qui est écrit. "Lire tout bas, lire à haute voix. "Ne savoir ni lire, ni écrire, etc. = Figurément, pénétrer, conaître, deviner, augurer. "Lire dans la pensée, dans les yeux, dans l' avenir. "Soit qu' elle cherchât à lire dans leurs yeux ce qu' ils vouloient qu' elle fît. Marm. "On lit sur son front la certitude d' un succès, etc. Jér. Déliv. = Il se dit souvent neutralement et sans régime. "Les persones les plus maigres sont ordinairement celles qui mangent le plus. Les cervelles les plus vides sont souvent celles qui lisent davantage. Marin. = On dit, d' un livre qu' on lit sans ennui, qu' il se laisse lire. Voyez LAISSER. On dit aussi qu' il se fait lire. "Ces vers (de M. de Vixouze sur Rome d' aujourd' hui) se font lire, même après ceux de M. de Voltaire. Ann. Litt. _ Se laisser lire et se faire lire, étaient des expressions favorites de l' Abé des Fontaines.

LIS


LIS, s. m. Fleur blanche, qui a beaucoup d' odeur. = Plante qui produit cette fleur. = Teint de lis et de rôse, blanc et vermeil. = Fleur de lis, en armoiries, figûre de trois fleurs de lis liées ensemble. "Fleur de lis d' or, d' argent. Autrefois, dans l' écu de France, il y avait des fleurs de lis sans nombre. Charles VI les réduisit à trois. = Siéger ou être assis sur les fleurs de lis, pour dire, exercer une charge de judicatûre, est une expression triviale. Elle ne l' était pas aparemment du tems de Fléchier, puisqu' il l' a employée dans une Oraison Funèbre. "Comme s' ils n' étoient juges que pour être assis de tems en tems sur les fleurs de lis, où ils vont rêver à leurs divertissemens passés..... ou réparer par un mortel assoupissement les veilles qu' ils ont donées à leurs plaisirs.

LISET


LISET, s. m. ou LISETTE, s. f. [Lizè, Lizète: 2e è moy. Le Rich. Port. les met tous deux indiféremment. Trév. préfère le 2d. l' Académie ne met que le 1er.] Insecte, apelé autrement Coupe-bourgeon.

LISEUR


LISEUR, EûSE, s. m. et f. [Li-zeur, zeû--ze; 2e lon. au 2d.] Celui, celle qui lit, dit l' Acad. Je ne crois pas cette définition juste. c' est plutôt celui, celle qui aime à lire. C' est l' un et l' aûtre, au sentiment de M. Marin. Liseur, Liseûse ne sont pas synonimes de Lecteur, Lectrice. Ceux-ci s' emploient toujours relativement à quelque ouvrage dont on parle: "Ce livre plaira à ses lecteurs; il ne sera pas du goût des lectrices. Ceux-là se disent absolument, et dans un sens indéfini, d' un homme, d' une femme qui aiment la lectûre, qui lisent beaucoup. "C' est une liseûse: elle sait un peu de tout: j' en ai aussi une petite teintûre; de sorte que nos superficies s' acordent fort bien ensemble. Sév. "Je ne suis pas étonné qu' il y ait des liseurs assez ignorans, pour croire de pareils mensonges; mais j' admire qu' il se trouve un Écrivain (Volt.) assez peu jaloux de sa réputation pour les imprimer. L' Abé du Volsin. Naturellement, lecteur aurait été un mot plus propre dans cette dernière phrâse; mais comme c' est une critique, liseur y fait très-bien. = Remarquez qu' on ne doit jamais l' associer aux pronoms personels. On ne doit point dire, vos liseurs, ses liseûses; mais, vos lecteurs, ses lectrices. Il régit pourtant fort bien la prép. de. "Grand liseur de romans. Boileau.

LISIBLE


LISIBLE, adj. LISIBLEMENT, adv. [Li--zible, bleman; 3e e muet.] Lisible, qui est aisé à lire. Lisiblement, d' une manière lisible. "Écriture lisible. "Caractères mal formés, ou à demi éfacés, qui ne sont pas lisibles. "Écrire lisiblement.

LISIèRE


LISIèRE, s. f. [Li-ziè-re; 2e è moy. et lon. 3e e muet.] L' extrémité de la largeur d' une toile, d' une étofe. "La lisière de cette toile est trop lâche. = Fig. Les extrémités d' un champ, d' un pays, relativement à un aûtre, dont il est limitrophe. "Les lisières d' une forêt, d' une Province.
   Rem. Quelques Auteurs, ou Imprimeurs, écrivent lizière avec un z: ce n' est pas le bon usage. = Mener par la lisière, se dit dans le propre, des enfans qu' on mène par des cordons atachés par derrière à leurs robes; et au figuré, des persones plus âgées, qu' on veille de fort près, et dont on éclaire et l' on règle toutes les démarches. "Il se trompe, s' il a prétendu me mener à la lisière: je lui ferai voir que je ne suis plus un enfant. Marm. "M. de St. Ange peut aller tout seul et sans lisière, s' il m' est permis de me servir de ce terme. Qu' il travaille donc d' après lui, etc. L' Abé de Fontenai.

LISSE


LISSE, adj. LISSER, v. act. LISSOIR, s. m. [Li-ce, , soar; 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Lisse, uni et poli. Lisser, rendre lisse. Lissoir, instrument avec lequel on lisse la toile, le papier. "Étofe lisse. "Lisser du linge, de la dentelle, du papier. "Passer le lissoir sur, etc. = Trév. et le Rich. Port. mettent lissoir, s. m. ou lissoire, s. f. le Dict. d' Ortog. ne met que le 2d; l' Acad. que le 1er.

LISTE


LISTE, s. f. Catalogue de plusieurs noms. Ils se dit ordinairement des persones. "La liste des Conseillers, des Juges, etc. Quelquefois, des chôses. "La liste des bénéfices vaquans. Acad. On dit comunément, la Feuille. "Être sur la liste. "Ce livre n' est pas dans ma liste.

LISTEL


LISTEL, s. m. [2e è moy.] Trév. met aussi Listeau: mais celui-ci ne se dit que par les ouvriers. Les Architectes ne disent que listel. Petite moulure cârrée. = Espace plein entre les canelûres d' une colonne.

LIT


LIT, s. m. [Li.] 1°. Meuble fait pour y coucher, s' y reposer, y dormir. "Dresser, tendre un lit. Se mettre au lit; être, se tenir au lit. "Garder le lit. Voy. GARDER. = 2°. Il se prend pour le bois et le fond du lit seulement. "Un lit de bois de noyer: un lit de sangle. _ Quelquefois pour le tour du lit seulement; lit de damas, de serge, etc. _ Quelquefois pour les matelas; lit de plume; bon lit, méchant lit; lit mollet; lit extrêmement dur. "Faire, défaire un lit, le lit. = 3°. Il se prend souvent pour tout lieu où l' on se couche. "La terre nûe était son lit. = 4°. Mariage. "Enfans du premier, du second, du troisième lit. "Il a des enfans de deux, de trois lits. = 5°. Lit de Justice. Trône du Roi, quand il siège au Parlement. "Le Roi tint ce jour-là son lit de Justice. = Lit d' honeur; circonstance honorable où l' on meurt. "Il est mort au lit d' honeur. = 6°. Canal, par où coule une rivière. "Le lit de la Seine est profond: "La Durance change souvent de lit. "La Loire sort quelquefois de son lit. = 7°. Couche de quelque chôse, qui est étendue sur une aûtre. "En fouillant on trouva sous la terre franche un lit de sâble, sur un lit d' argile. "Un lit de pierre; un lit de moellon.

LITANîES


LITANîES, s. f. pl. [3e lon. 4e e muet.] Prière qu' on fait à Dieu en invoquant la Ste Vierge et les Saints les uns après les aûtres. "Dire, chanter les Litanîes. = Litanie au singulier (st. famil.) Longue et ennuyeûse énumération. "Il nous a fait une longue litanie de ses exploits, de ses chagrins. Voy. KIRIELLE. = Mettre dans ses litanies, (même style) se souvenir de quelqu' un, soit en bien, soit en mal. "Je l' ai mis dans mes litanies.

LITIèRE


LITIèRE, s. f. [2e è moy. 3e e muet.] 1°. Pâille ou aûtre chôse semblable, qu' on épand dans les écuries ou les étables, sous des chevaux, boeufs, moutons, etc. afin qu' ils se couchent dessus. "Litière fraiche. "Vieille litière. "Faites bone litière à ces chevaux. = On dit qu' un cheval est sur la litière, quand il est malade à ne pouvoir sortir de l' écurie; ce qui se dit figurément des hommes. = Faire litière de (st. prov.) prodiguer, ne point ménager. "Il fait litière de son corps, de son bien.
   2°. LITIèRE, chaise couverte, portée sur deux brancards par deux mulets ou deux chevaux, l' un devant, l' autre derrière.

LITIGE


LITIGE, s. m. LITIGIEUX, EûSE, adj. [3e e muet au 1er, lon. aux 2 dern. gieû, gieû-ze; dans le discours soutenu et sur-tout en vers, gi-eû, gi-eû-ze.] Litige, contestation en Justice. "Bénéfice, terre en litige. = Litigieux, qui peut être en litige. "Bénéfice, droit litigieux. "Chôse litigieûse.

LîTRE


LîTRE, s. f. [1re lon. 2e e muet.] Bande ou ceintûre noire autour d' une église ou d' une chapelle, ou en dedans ou en dehors, sur laquelle sont peintes des armoiries.

LITRON


LITRON, s. m. Mesure contenant la 16e partie d' un boisseau de Paris ou 36 pouces cubes. "Un litron de farine, de pois, de fèves; de sel, etc.

LITTÉRAIRE


LITTÉRAIRE, adj. LITTÉRATEUR, s. m. LITTÉRATûRE, s. f. [ou LITÉRAIRE, etc. avec un seul t: 2e é fer. 3e è moy. et long au 1er; 4e lon. au dern. Litérère, ra--teur, ratûre.] Litéraire, qui apartient aux Belles-Lettres. "Journal, Société litéraire. = Litérateur, celui, qui est versé dans la litératûre; c. à. d. dans l' érudition. "Grand Litérateur. "Profonde litératûre.
   REM. Litéraire, ne se dit que des chôses, et n' est qu' adjectif. Un Auteur moderne le dit des persones, et l' emploie comme substantif~. "Un litéraire de profession. On dit, un litérateur.

LITTÉRAL


LITTÉRAL, ALE, adj. LITTÉRALEMENT, adv. [ou Litéral, etc. avec un seul t: 2e é fer. 4e e muet, en a le son d' an à la 5e.] Litéral, qui est à la lettre, selon la lettre. "Sens litéral, explication litérale. = En conversation, cet homme est trop litéral; il prend trop les chôses au pied de la lettre. = On distingue le grec, l' arabe litéral, tel qu' il est dans les anciens Auteurs, du grec, de l' arabe vulgaire, tel qu' on le parle aujourd' hui dans le Levant. = Litéralement; à la lettre. "Expliquer, prendre un passage litéralement.
   Littéralement, à la lettre. (Synon.) Le 1er désigne plus proprement le sens naturel et propre du discours; le 2d en désigne le sens stricte et rigoureux. "Il ne faut pas prendre litéralement ce qui se dit par métaphôre. Il ne faut pas prendre à la lettre ce qui ne se dit qu' en plaisantant. ROUB. Synon.
   REM. 1°. Litéral n' a point de pluriel masculin. Le P. Berruyer lui en done un: des commentaires littéraux. M. de Wailly. = 2°. Un Auteur moderne a confondu litéral avec litéraire. "Ce n' est pas par une curiosité littérale que nous avons fait ces recherches, etc. Il est évident qu' il falait dire au moins par une curiosité litéraire; encore cette expression n' est-elle pas trop bone. Litéral est ce qui est selon la lettre: litéraire, ce qui a raport aux lettres.

LITURGIE


LITURGIE, s. f. [3e lon. 4e e muet.] L' ordre du service divin et les cérémonies qu' on y observe. "L' anciène liturgie. La liturgie grecque. La liturgie de l' Église Romaine.

LIVIDE


LIVIDE, adj. LIVIDITÉ, s. f. Ils se disent de ce qui est de couleur plombée, et tirant sur le noir. "Teint livide, lèvres livides. "Il a des marques livides sur la peau; éfets d' une contusion. "La lividité de la peau.

LIVRAISON


LIVRAISON, s. f. [livrèzon; 2e è moy.] Action par laquelle on livre la marchandise, qu' on a reçûe. = Ce mot n' est en usage que parmi les marchands.

LIVRE


LIVRE, s. m. [1re lon. 2e e muet.] 1°. Plusieurs feuilles de papier, reliées ensemble. "Livre manuscrit ou imprimé. = Livre en blanc, les feuilles d' un livre imprimé, qui n' est pas encôre ni broché, ni relié. = 2°. Registre, papier, journal. "Livre de compte, de raison. "Le livre d' un marchand fait foi en justice. "Livre journal. "Teneur de livres. = 3°. Ouvrage d' esprit, soit en prôse, soit en vers, d' assez grande étendûe pour faire un volume. "Faire, composer un livre. "Mettre un livre au jour. = 4°. Partie d' un volume. "Poème en 12 Livres. "Histoire divisée en six livres. "Livre premier, chapitre second. = 5°. À~ livre ouvert, adv. "Chanter à livre ouvert, sans avoir besoin d' étudier la note. "Traduire un auteur à livre ouvert, entendre parfaitement la langue dans laquelle il est écrit.
   Rem. Quand on dit de mauvais livres, on entend des livres contre les moeurs ou la Religion. Madame de Sévigné le dit de livres mal faits, mal écrits. Voy. DÉVOREUR. L' expression est impropre. = En style proverbial; on dit d' un ignorant, qui n' a jamais lu, qu' il n' a jamais mis le nez dans un livre; de celui qui n' aime pas à lire, qu' il est brouillé avec les livres; de celui qui lit avec une extrême rapidité; qu' il dévore les livres. = Parler comme un livre, très bien. Voy. BRûLER. = Livre est beau au figuré. "Le livre du Monde, de la Natûre. "Comment pourrions-nous lire dans le grand livre des secrets du Ciel, puisque nous ne lisons presque rien dans le livre de la Natûre, qui semble ouvert à nos pieds. L. Racine. = * Il est des hommes, qui ont le talent de gâter les meilleures chôses. Parce qu' on dit le livre de la Natûre, un Auteur moderne a cru pouvoir dire que: "Notre vie est un livre, dont la préface est l' enfance, et dont chaque feuillet que nous tournons est un jour qui passe. Car... quelle maussade allégorie!

LIVRE


LIVRE, s. f. 1°. Poids contenant un certain nombre d' onces. Il y a des livres de douze, de quatorze, de seize, de dix-huit onces. = 2°. Monaie de compte valant vingt sous. = Livres et francs sont synonymes pour la signification, mais non pas pour l' emploi. Franc ne se met point avec mille et rente, on dit: il a vingt, trente mille livres de rente, et non pas francs de rente. On dit, au contraire sa maison lui a coûté vingt mille francs, et non pas vingt mille livres. = On ne dit jamais un franc, vingt et un francs, ni 2, 3, 5, francs, quoiqu' on dise, 4, 6, 7, 8, 9, francs. On ne dit pas non plus, 1, 2, 3 livres, quoiqu' on l' écrive en faisant des comptes: il faut dire, 20 sols, quarante sols, un écu, cent sous. = Quand après 5, 6, 7, 8, il suit un autre nombre, on se sert de livres et non pas de francs: l' on dit, 4 livres, 10 sols, 7 livres 12 sols etc. et non pas 4 francs, 10, etc. = On dit: il me doit 100 francs; et ce serait mal dit: il me doit cent livres: mais quand la somme passe cent, il semble qu' on ûse indiféremment de l' un et de l' aûtre. = On dit enfin un sac de mille francs, et non pas de mille livres. BOUH. Tout le monde n' est pas d' acord sur cette remarque, ni sur l' usage qu' elle supôse.

LIVRÉE


LIVRÉE, s. f. [2e é fer. et long: 3e e muet.] Habits de couleur, dont on habille les pages, les laquais, cochers, etc. "Belle, riche, livrée. "Prendre, porter, quiter la livrée. = Il se dit collectivement de tous les gens portant une même livrée. "Toute la livrée d' un tel Seigneur. _ Et dans un sens plus étendu, de tous les laquais. "La livrée n' est point admise au spectâcle.
   Rousseau a employé livrée au figuré.
   Vertumne a changé ses livrées,
   Et nos campagnes labourées
   Me flattent d' un prochain retour.

LIVRER


LIVRER, v. act. [Livré: 2e é fer. l' i est long devant l' e muet: il lîvre, lîvrera, etc.] 1°. Mettre au pouvoir, en la possession de... Livrer de la marchandise à... "Livrer une place à l' énemi, etc. Voy. BATAILLE, COMBAT. = 2°. Abandoner. "Livrer une ville au pillage, à la fureur du soldat. "Se livrer à la joie. = 3°. Se livrer à, se confier. "Il s' est entièrement livré à un homme qui le trahit.

LIVRET


LIVRET, s. m. [Livrè: 2e è moy.] Petit livre. "Un livret; un petit livret. = En Arithmétique, table, qui contient les produits des neuf premiers chifres. = Au Pharaon et à la Bassette, les 13 cartes diférentes, qu' on done à chacun des Pontes.

LôBE


LôBE, s. m. [1re lon. 2e e muet.] Pièce molle et un peu plate de certaines parties du corps des animaux, spécialement du poumon et du foie. C' est aussi un terme de Botanique, qui se dit des deux parties de certaines semences, comme celle des fèves, etc.

LOCAL


LOCAL, ALE, adj. Qui a raport au lieu. "Mouvement local. Coutume locale: usages locaux. = S. m. Conaitre le local _ L' Acad. ne done point d' exemple de ce substantif.

LOCATAIRE


LOCATAIRE, s. m. et f. [Lokatère: 3e è moy. et long, 4e e muet.] Celui, celle, qui tient une maison ou une partie de maison à louage. "Principal locataire. "Les locataires ne sont tenus que des menûes réparations. * M. Linguet met locatrice au fém. "La locatrice de la Dame de Solar. _ Locataire est des deux genres: il falait dire, la locataire.

LOCATI


LOCATI, s. m. (st. famil.) Cheval de louage.

LOCATIVE


LOCATIVE, s. f. Qui regarde le locataire. "Réparations locatives. C' est tout l' emploi de ce mot.

LOCATION


LOCATION, s. f. [lokacion.] Action de celui qui done à ferme, à loyer. Conduction, est l' action de celui qui prend. Ces deux mots ne se disent qu' au Palais.

LOCHER


LOCHER, v. n. Branler. Il ne se dit plus que d' un fer à cheval. De là cette phrâse proverbiale. "Il y a toujours en son fait quelque fer qui loche, quelque chôse qui va mal dans sa santé ou dans sa fortune.

LOCUTION


LOCUTION, s. f. [loku-cion, en vers ci-on.] Expression, façon de parler. "Mauvaise locution: locution bâsse, impropre. _ Il ne se dit que dans le didactique.

LOGE


LOGE, s. f. LOGETTE, s. f. LOGEABLE, adj. LOGEMENT, s. m. LOGER, v. act. et n. [2e e muet au 1er et au 4e, è moy. au 2d, é fer. au dern. loge, gète, jable, geman, .] Loge; petite hutte, petit réduit. Logette, petite loge. Logeable, où l' on peut loger comodément. Logement, le lieu où l' on loge comunément. Loger, neutre, habiter: actif, doner la retraite à... "La loge d' un portier, les loges de la comédie. "Maison logeable. "Où est son logement? "Il loge chez soi; en chambre garnie. "Où logerez-vous tant de monde? "Il s' est logé magnifiquement.

LOGICIEN


LOGICIEN, s. m. LOGIQUE, s. f. [Logi--cien, gike: ien au 1er n' a pas le son d' ian.] La Logique est l' art de raisoner juste. La Logique naturelle est une disposition à bien raisoner sans avoir étudié les règles de logique. "Il n' y a pas de logique dans cet ouvrage: il est sans méthode, sans principes. = Logicien, qui possède bien la logique. "Bon, grand, excellent, ou mauvais logicien.

LOGIS


LOGIS, s. m. [Logi et devant une voyèle, logiz.] 1°. Habitation, maison. "Garder le logis: demeurer au logis. "Ne bouger du logis. = 2°. La maison de celui qui parle. "On m' atend au logis. "Il y a long-tems que vous n' êtes venu au logis. = 3°. Hôtellerie. "Bon logis à pied et à cheval. Inscription de plusieurs Hôtelleries. "Le brâs d' or est un bon logis.
   Rem. Il y a quelque diférence entre maison et logis. On dit l' un et l' aûtre d' une maison de la ville; mais on ne peut se servir de logis en parlant d' une maison de campagne. Les honêtes gens disent: il est venu au logis: il a diné au logis. Il n' y a que le peuple, qui dise: il est venu à la maison. BOUH. L' usage a donc changé. C' est tout le contraire aujourd' hui. Les gens du monde ne disent jamais le logis, mais la maison. La petite bourgeoisie et le peuple disent le logis. MARIN. = On dit, faire maison neuve, mais on ne dit pas faire logis neuf, et encôre moins faire son logis neuf; puisqu' on ne dirait pas même, faire sa maison neuve. BOILEAU avait dit dabord:
   * Et, que dans son logis fait neuf, en son absence.
Mais il changea ce vers dans la suite. St. Marc.

LOGOGRIPHE


LOGOGRIPHE, s. m. Sorte d' énigme, qui consiste à prendre en diférens sens les diférentes parties d' un mot.

LOGOMACHIE


LOGOMACHIE, s. f. (st. polémique.) Dispute de mots. "Il y a beaucoup de discussions, qui ne sont que des logomachies.

LOI


LOI, s. f. [Loa: monos. Plur. autrefois loix, aujourd' hui, lois.] Loi, au propre, est une règle établie par autorité divine ou humaine, qui oblige à certaines chôses et en défend d' aûtres. "Loi naturelle, ou divine, ou humaine. "La loi de Moïse. "La loi de Grâce. "Établir, ou abroger une loi. "Se soumettre à la loi, ou, enfreindre la loi, etc. = Par extension, il se dit de certaines obligations de la vie civile. "Les lois de la bienséance, de l' honêteté, de la société, etc.
   Faire la loi, régit le datif: "Il leur a fait la loi. Mais, quand il est sans régime, on dit, faire loi, sans article. "Votre opinion ne fera pas loi. MARM. _ Au reste ces deux expressions ont un sens diférent; et l' on s' en aperçoit bien dans la phrâse suivante. "Au lieu de vous dire le mien (mon goût) qui ne fait la loi à persone, etc. Pluche. Il falait, qui ne fait loi pour persone, etc. _ Faire la loi, c' est prescrire des lois: Faire loi, c' est être une loi à suivre. Le 1er se dit des persones, le 2d des chôses. = On dit aussi doner des lois à, et recevoir la loi de; gouverner et être gouverné. L' Être suprême... donne des loix à l' Univers. Jér. Dél. "Son corps reçoit la loi de l' âme qui l' anime. Ibid. = Se faire une loi, régit de devant les verbes; et prendre la loi, devant les noms. "Je me suis fait une loi de ne pas répondre aux injûres. "Je prendrai toujours la loi de vous. * Corneille dit, prendre loi sans article, ce qui est contre l' usage actuel, même en vers.
   Ses desirs prendront loi de mes propres desirs.
       Agésilas.
  Que le foible parti prenne loi du plus fort.
= Aquérir force de loi, se dit sans article. "Si le bill pouvait acquérir la force de loi. TARGE, Traduct. de Smollet. Retranchez la. _ Ce même Auteur dit ailleurs. "Ce bill acquit depuis force de loi, mais habituellement, il dit, la force.
   On dit, proverbialement, d' un méchant homme, qu' il n' a ni foi, ni loi. Et de ce qui est incontestable, que c' est la loi et les Prophètes. "Il vous loue fort... du soin que vous avez de payer vos arrérages. C' est tout: c' est la loi et les Prophètes. SÉV. = Le proverbe dit: nécessité n' a point de loi: on ne peut faire l' impossible. Ou plutôt la nécessité, le besoin absolu force à faire ce qu' on ne ferait pas sans cela. MARIN.
   REM. Loi, dans le sens de foi, religion ne doit pas s' unir avec les pronoms possessifs, quand on parle des hommes. On dit, ma foi, ma religion; mais on ne doit pas dire avec Boileau.
   Le fidèle atentif aux règles de sa loi.
La raison de cela, c' est que la foi est l' acte du fidèle qui croit, et loi l' acte du Législateur qui ordone. Foi, se dit activement des fidèles, et Loi passivement. On dit, en parlant de Dieu, qu' il nous ordone d' observer sa loi. Le pronom possessif est là à sa place.

LOIAL


LOIAL, LOIAUTÉ, LOIER, Voy. LOYAL, LOYAUTÉ, LOYER.

LOIN


LOIN, adv. et prép. [Loein, monos. On écrivait autrefois loing.] À~ grande distance. Adv. de lieu. "Aller loin, revenir de loin. = Adv. de tems: "Parler de loin, d' un temps éloigné. = Prép. Elle régit de et à. "Il y a loin de Marseille à Paris. "Quelque--fois il n' y a qu' un seul de ces régimes d' exprimé; et c' est toujours le 1er. Il est loin de nous. "Loin du monde, loin du bruit. "Loin des yeux, loin du coeur, dit le Proverbe. = Prép. de tems. "Il y a loin d' ici à Noël. "Nous sommes encôre loin de Pâques.
   Au loin, loin à loin, de loin à loin, adverbes. "Aler, chasser au loin. "Planter des arbres loin à loin. "Il ne me vient plus voir que de loin à loin. Plusieurs de nos Auteurs les plus estimés disent de loin en loin, comme l' Ab. des Fontaines, J. J. Rousseau, M. Linguet, M. l' Ab. Grosier, M. de la Cretelle, etc. On peut croire que cette manière est aussi bone que l' aûtre.
   Il est à remarquer que loin est tantôt précédé, tantôt suivi de la prép. de. "Ce qui est beau de loin ne l' est pas toujours de près. "Loin de vous je m' ennuie. "Loin d' eux s' enfuyoit le doux sommeil. Télém. = Loin de, se met quelquefois à la tête de la phrâse par manière d' interjection. "Loin de nous les Héros sans humanité! Bossuet. = Rousseau dit loin tout seul, mais c' est dans le style demi-marotique.
   Loin tout rimeur~, enflé de beaux passages,
   Qui, sur lui seul moulant ses personages,
   Veut qu' ils aient tous autant d' esprit que lui;
   Et ne nous peint que soi-même en autrui!
M. De Lille dans ses Jardins fournit une multitude d' exemples de ce tour, qui lasse et devient monotone pour être trop souvent employé. _ Loin donc ces froids jardins... Loin le luxe bourgeois... Mais loin l' architectûre de ces tristes gradins... Loin ce cercueil factice... Loin ces vains monumens, etc. etc. _ De loin, se met ordinairement après le verbe, même dans les tems composés. Quelquefois pourtant il est mieux devant, parce qu' il ne sépâre pas le verbe de son régime. "Charles, qui de loin a prévu les projets de son frère, etc. Moreau. _ Qui a prévu de loin les projets, ne serait pas si bien.
   Non loin de, adv. Près de. "Dans les montagnes de Savoie, non loin de la route de Briançon, etc. Marm.
   Non loin de ce rivage, un bois sombre et tranquille,
   Sous des ombrages frais présente un doux asile.
       Henriade.
Non loin de est plus élégant que près de: mais il est plus du haut style que de la conversation. = * Être loin de faire fut critiqué autrefois dans la Princesse de Clèves. On disait qu' il falait dire, être éloigné de faire. Malgré cette Critique, qui me parait juste et qui n' est guère conûe, on a continué de le dire. "Les Allemands sont encôre loin de pouvoir prétendre à la célébrité dans les Beaux Arts. Journ. de Mons. = D' aussi loin que, régit l' indicatif. On a dit aûtrefois de tant loin que. "De tant loin qu' ils purent découvrir la croix, ils l' adorèrent. Vie de S. P. d' Alc.
   Bien loin, conjonction, est suivi ou de la prép. de, et de l' infinitif, ou de que avec le subjonctif. "Bien loin de le faire; bien loin qu' il le fasse. = On dit assez indiféremment, et en prôse et en vers, loin de, et bien loin de; et on avait décidé mal-à-propôs dans le Dict. Gram. que loin sans bien était une faûte. On s' était fié uniquement à Vaugelas, qui a été réformé sur cet article par Th. Corneille, et encôre mieux par les exemples multipliés des meilleurs Auteurs.
   Les Dieux ont prononcé: loin de leur contredire,
   C' est à vous de pâsser du côté de l' Empire.
       Rac. Brit.
"Loin que le chef ait un intérêt naturel au bonheur des particuliers, etc. J. J. Rouss.
   Loin que ce nom si doux eût fléchi le cruel,
   Il n' eût fait que le rendre encor plus criminel.
       Crebillon, Rhadamiste.
REM. Bien loin, rend la phrâse négative, et doit produire le même éfet pour la construction que les particules qui expriment le sens négatif. Ainsi, comme on dit, je ne crois pas que vous l' ayiez fait; on doit dire: bien loin de croire que vous l' ayiez fait, je crois tout le contraire; et non pas, que vous l' avez fait. J' estime donc peu exacte la phrâse suivante de Boileau. "Bien loin de convenir qu' il y a du sublime dans ces paroles, vous prétendez, etc. Je pense qu' il falait dire, qu' il y ait, etc. parce qu' on dirait avec la négative; vous ne convenez pas qu' il y ait du sublime dans ces paroles, mais vous prétendez au contraire, etc. = * Bien loin que, etc. qu' au contraire, etc. est un tour suranné, dont les bons Écrivains ne se servent plus. "Bien loin qu' il s' en repente, qu' au contraire il continue toujours d' en faire de plus belles.
   On dit, fig. st. famil. _ Voir venir de loin, se douter de ce qu' on nous va dire. _ Il ira loin, il fera fortune. = Il n' ira pas loin: il mourra bientôt. _ On dit d' un jeune homme fort malade, la jeunesse revient de bien loin; et, en général, revenir de loin, ou de bien loin, réchaper d' un extrême danger, se rétablir après quelque disgrâce. _ Renvoyer, rejeter une chôse bien loin, la rebuter. _ En matière de science, aler loin, bien loin, faire de grands progrès. _ En matière d' afaire, aler loin, trop loin, s' engager beaucoup, trop. _ Cette afaire va ou ira plus loin qu' on ne pense, est de plus grande conséquence qu' on ne croit. _ * Il en sait de loin, pour de long, barbarisme gascon. Desgr.

LOINTAIN


LOINTAIN, AINE, adj. [loein-tein, tène: 1re lon. 2e è moy. au 2d.] Qui est fort loin du lieu où l' on est, ou dont on parle. "Pays, climat lointain. Régions lointaines. = La Touche croyait ce mot peu usité, comme adjectif et plus de la poésie que de la prôse. Il avoûe cependant que l' Acad. l' aproûve comme adjectif; un pays lointain, des campagnes lointaines. = S. m. En termes de Peintûre. "Le lointain d' un tableau. "On voit dans le lointain des Bergers, qui, etc. Dans ce sens, il vaut mieux qu' éloignement. = Cet adjectif suit ordinairement le substantif qu' il modifie. "Les bords lointains, les campagnes lointaines, et non pas les lointains bords, les lointaines campagnes. _ En vers pourtant, il peut quelquefois précéder.
   Et le Berger connoit par d' assurés présages
   Quand il doit éviter les lointaïns pâturages.
       De Lille.

LOISIBLE


*LOISIBLE, adj. [loazible.] Qui est permis. "Cela n' est pas loisible. Il est vieux, il l' était même déjà du tems de Vaugelas et de Th. Corneille. L' Acad. se contente de dire qu' il vieillit, mais il y a déjà du tems qu' elle le dit. Ce mot dans la conversation a un tout autre sens que, il est permis. Il signifie souvent, s' il vous fait plaisir, ou si vous en avez le loisir. L' on dit; et il est fort d' usage: "Vous y viendrez, s' il vous est loisible. MARIN.

LOISIR


LOISIR, s. m. [loa-zir.] 1°. Tems, où l' on n' a rien à faire. "Jouïr d' un doux, d' un honête loisir. = 2°. Espace de tems sufisant pour faire quelque chôse comodément. "Je n' ai pas le loisir d' y penser. "Vous ne me donez pas le loisir d' y répondre. = À~ loisir, adv. à son aise, à sa comodité. "Vous ferez cela à loisir, vous y penserez à loisir. Bossuet dit, à grand loisir. "Mandez-moi à grand loisir ce que cette lectûre aura produit.
   Loisir, oisiveté (synon.) Le loisir est un tems de liberté: l' oisiveté est un tems d' inaction; c' est l' abus du loisir. "Le loisir d' un homme de bien ocasione beaucoup de bonnes actions: l' oisiveté ne peut ocasioner que des maux. Beauzée, synon. = Loisir, s' emploie quelquefois au pluriel en poésie. "D' heureux, d' agréables loisirs. = Quand loisir est sans régime, on dit assez indiféremment, avoir du loisir, et être de loisir. "J' ai du loisir, êtes-vous de loisir? Mais quand il régit l' infinitif, il faut se servir d' avoir. "Aurez vous le loisir de faire cette course? = On dit, doner le loisir de faire. * Voiture dit, doner loisir sans article. "Vous me deviez doner loisir d' aprendre notre langue, devant que de m' obliger à vous écrire. Lettre à M. Godeau. = En st. famil. avoir bien du loisir, avoir du loisir de reste, se dit d' un homme qui s' amûse à des bagatelles, ou qui s' ocupe l' esprit de chôses, qui ne le regardent pas. = Il aura tout le loisir de se repentir, il s' en repentira à loisir, se dit de celui, qui fait quelque chôse, dont on croit qu' il sentira long-tems les suites.

LONG


LONG, LONGUE, adj. [lon, lon-ghe, et non pas longûe.] Qui a de la longueur, 1°. Relativement à l' étendûe. "Champ long et étroit: "Barque fort longue. "Une longue alée; une longue course. = S. m. "Dix aûnes de long. "Étendu tout de son long. "En long et en large, etc. = 2°. Relativement à la durée. "En été les jours sont longs. "Cela ne sera pas de longue durée. "Le tems est long à qui atend. = 3°. En parlant des persones, lent, tardif. "Il est long dans tout ce qu' il fait. _ "Les arbres sont longs à venir.
   Le long, du long, au long. L' Acad. les met tous trois comme prépositions. "Le long de la rivière; au long du bois; tout le long du carême; tout du long de l' année. _ Vaugelas et Ménage prétendent au contraire qu' il n' y a que le long qui soit préposition; et qu' au long et du long sont adverbes sans régime. "On voit des arbres le long de cette rivière: on y voit tout du long de beaux arbres, (tout le long, adverbe ne vaudrait rien.) "Il a traité ce sujet fort au long: je vous écrirai plus au long. _ Le sentiment des deux Gramairiens me parait préférable à la pratique de l' Académie, et il me semble que l' usage le plus autorisé le justifie. Si quelques Auteurs, comme Bossuet, l' Ab. Prévot et un petit nombre d' aûtres ont doné un régime à du long et au long, le plus grand nombre les a employés sans régime = À~ la longue, adv. Avec le tems. "À~ la longue tout s' ûse. "À~ la longue on en viendra à bout. = De longue main, adv. Depuis long-tems. "Il est mon ami de longue main. = De son long, tout de son long, tout étendu. = Au long, tout au long; amplement, d' une manière difûse.
   On dit, en style proverbial, long comme carême, comme un jour sans pain. _ Ne pas la faire longue, ne pas vivre long-tems. "S' il demeure à Commerci, il ne la fera pas longue. SÉV. = Tirer de longue, s' en aller bien loin. On dit aussi tirer de long.
   La colombe l' entend, part et tire de long.
       La Font.
= * Un Auteur moderne dit, adverbialement, plus long pour davantage. "Il étoit impossible d' en dire plus long. Anon. Il faut dire~, d' en parler plus au long, ou d' en dire davantage. = Prendre le plus long, on sous-entend chemin. "Je veux vous remercier d' avoir pris le plus long, pour éviter ces ruisseaux, qui étoient devenus rivières. Sév. = En savoir long, être habile et rusé. "Avec son air tout uni, il en sait long = En avoir tout du long et du large, être bien batu. = Au long et au large, dans toute l' étendûe: "S' étendre au long et au large. * Quelques-uns disent en long et en large, mais mal.
   On dit, par allusion à la quantité des syllabes, observer les brèves et les longues, être exact aux bienséances. "Nous partons lundi, après avoir observé toutes les longues et les brèves du cérémonial de Bourbon. Sév.
   Rem. Il y a dans la langue française des syllabes longues, sur lesquelles on apuye davantage. Outre les règles générales que nous avons insérées dans ce Dictionaire, selon l' ordre alphabétique, d' après le Traité de la Prosodie de M. l' Ab. d' Olivet, nous avertissons à chaque mot des syllabes qui sont longues. = 1°. On peut établir, d' après le P. Buffier, comme une règle générale, que toute syllabe qui précède un e muet est longue. La raison en est, qu' on ne saurait apuyer sur un e muet: on est donc obligé d' apuyer sur la pénultième. Ainsi, toute la diférence qu' il y a entre châsse et chasse, race et grâce, c' est que l' â du 1er et du dern. est plus long que l' a du second et du 3e. Il y a donc des longues plus longues les unes que les autres. On n' apèle pourtant de ce nom, et nous ne marquons de l' accent que celles qui le sont sensiblement. = 2°. Toute voyèle qui porte l' accent circonflexe; et l' on ne doit plus employer cet accent que pour marquer la quantité de la syllabe. Autrefois on l' employait indiféremment, et à cet usage, et à marquer la supression de quelque lettre, et sur-tout de l' s. On écrivait, et le grand nombre l' écrit encôre aujourd' hui, chrêtien, mêler, quoique l' e ne soit ni ouvert, ni long. On doit écrire chrétien, méler, etc. = 3°. Les voyèles nazales, an, am, em, en, im, in, on, om, un, um, suivies d' une consone, sont longues, soit au milieu, soit à la fin des mots. Saint, crainte, chambre, champ, jambe, lampe, blanche, danse, chante, etc. ateindre, feinte, temple, gendre, évidence, tentes, etc. timbre, simple, pinte, etc. sombre, pompe, compte, Comte, conte, monde, songe, etc. humble, j' emprunte, etc. 4°. Les pluriels de tous les mots dont la terminaison est masculine, sont longs, quoique le singulier soit souvent bref ou douteux: Almanachs, détails, airs, atraits, remparts, chefs, autels, momens, déserts, dangers, sujets, feux, etc. = 5°. Je remarque aussi que l' r, l' s et le v placés entre un e muet et une autre voyèle ou diphtongue rendent cette voyèle ou diphtongue longues: éclaire, fournaise; barbâre, emphâse, esclâve; chimère, thèse, trêve; empire, surprîse, captîve; aurôre, chôse, augûre, mûse ont la pénult. longue. _ Il est vrai que si l' e muet se change en une syllabe masc. alors la voyèle, qui était longue, devient brève. Ainsi, dans je m' égâre, l' a pénult. est long; dans j' égarais, égaré, il est bref. Dites-en de même de j' espère, j' espérais; je pèse, je pesais; il désîre, désirer; ils lîsent, il lisait; il devôre, dévorer; il propôse, proposer; augûre, augurer; il amûse, amuser, etc. = 6°. L' r redoublée, précédée d' un a ou d' un o rend ces voyèles longues, soit devant l' e muet, soit devant les syllabes masc. Bizârre, lârron, éclôrre, il éclôrra, etc.

LONGANIMITÉ


LONGANIMITÉ, s. f. Patience, clémence; qui tarde, qui difère de punir. Il se dit sur-tout de Dieu et des Princes. "Les Pécheurs abûsent de la longanimité de Dieu. "On ne saurait trop louer la longanimité de ce Prince. _ Les Ascétiques le disent aussi de la patience dans les maux. _ Il vieillit, et n' est guère plus d' usage. L' Acad. le met sans remarque.

LONGER


LONGER, v. act. Terme de guerre et de chasse. Marcher le long de... "L' armée longea la rivière; le cerf a longé cette route.

LONGÉVITÉ


*LONGÉVITÉ, s. f. Grand âge, longue vie. Mot nouveau. "Cet exemple de longévité est assez remarquable. L' Ab. de Fontenai. "Exemple fort singulier et fort remarquable de longévité. Journ. Polit. = M. Voulonne s' est aussi servi de ce mot dans son excellent Mémoire sur la Médecine agissante, et sur la Médecine expectante; mais il a mis longévité en italique.

LONGITUDE


LONGITUDE, s. f. En Géographie, l' éloignement d' un lieu à l' égard du premier méridien, en alant vers l' orient. En Astronomie, la distance de deux étoiles, prises sur l' écliptique, en allant du couchant au levant.

LONG-TEMPS


LONG-TEMPS, ou LONG-TEMS, adv. [Lontan: deux longues.] Pendant un tems considérable. "Cela dûre long tems. "Il a long-tems étudié. = 1°. Il peut se mettre à la tête de la phrâse. "Quand les hommes veulent quitter le mal, le mal semble encôre les poursuivre. Long-tems il leur reste de mauvaises habitudes, etc. Télém. _ Quand il n' est pas à la tête, il se met toujours aprês le verbe dans les tems simples, devant ou aprês le participe dans les tems composés; et comunément aprês l' infinitif. "Il y demeura long-tems; il y a long-tems demeuré, ou il y a demeuré long-tems. "Il faut étudier long-tems pour aprendre. On pourrait dire aussi, il faut long tems étudier: mais la première manière est préférable. = 2°. Assez et trop long-tems exige le prétérit.
   Assez et trop long-tems son exemple vous flate.
       Cinna.
En prôse on dirait, vous a flaté. En vers il faudrait dire:
   Ah! depuis trop long-tems son exemple vous flate.
= 3°. De long-tems se dit toujours avec la négative ne. "Je ne le ferai de long-tems. "Je ne m' y acoutumerai de long-tems. On retranche pas plus élégamment qu' on ne l' emploie. _ La Fontaine l' emploie sans négative, pour, depuis long-tems.
   Je vous connois de long-tems mes amis.
   Bossuet dit, dès long-tems, qui ne vaut pas mieux. "Dès-long-tems le Cardinal de Lorraine avait médité de leur proposer, etc. Ni de long-tems, ni dès long-tems ne doivent se dire pour depuis long-tems. * On disait autrefois, dès il y a long-tems, pour il y a déjà long-tems. 4°. On dit être long--tems à ou sans avec l' infinitif. "Leur poûdre ne fut pas long tems à s' épuiser. Je crois que sans s' épuiser aurait été mieux. La prép. à ne s' emploie qu' avec les verbes qui ont un sens actif. "Il est long-tems à faire l' ouvrage. "Vous avez été long-tems à revenir. Mariv. Or, s' épuiser est un réciproque passif, qui équivaut à être épuisé. Il falait donc dire sans s' épuiser, et non pas à s' épuiser. "On ne fut pas long-tems à s' apercevoir dans le Village que la Néophyte avoit disparu. Let. Édif. La prép. à est mieux dans cette phrâse, parce que s' apercevoir a le sens actif. "Je ne fus pas long-tems à m' apercevoir que cet Auteur (Schooten, comentateur de la Géométrie de Descartes) avoit plutôt aspiré à la gloire de se faire commenter, qu' à celle de commenter son Maître. P. Paulian, Traité de Paix, etc. = 5°. Plusieurs Auteurs ont fait long-tems substantif. "Un long-tems, un si long-tems. BOSS. "M. de Turenne n' oublia rien durant un long-tems pour reconnoître le fort et le foible de sa première religion. Mascar. _ Je voudrais dire durant long-tems, ou fort long-tems. Ce substantif fait mieux dans la phrâse suivante. "Quand les biens du monde pourraient vous satisfaire, vous n' en jouiriez pas toujours. En jouirez-vous long-tems? Et qu' est-ce encôre que ce long-tems? etc. L' Ab. Poulle. Précédé de le et suivi de que, long--tems fait aussi très-bien. "Les usages nationaux s' étoient fortifiés par le long-tems qu' ils avoient duré. "Malgré le long-tems écoulé depuis mon mariage, ma mère ne peut pas soufrir encôre le nom de mon mari. Fielding. = Avec aprês, long-tems cesse d' être adverbe. Ainsi l' on doit dire: aprês un si long tems, et séparer long de tems, et non pas aprês si long-tems. "Lui reprocher cette injustice après un si long-temps. ANN. LIT.

LONGUE


LONGUE. Voy. LONG.

LONGUEMENT


LONGUEMENT, adv. [Longheman: 1re lon. 2e e muet: l' u ne se prononce point: il n' est-là que pour doner au g un son fort qu' il n' a pas devant l' e.] Durant un long tems. Acad. "Vivre longuement. "Il a parlé longuement.

LONGUET


LONGUET, ETTE, adj. [Longhè, ghète: 1re lon. 2e è moy.] Diminutif de long. Qui est un peu long. "Son discours a été longuet, un peu longuet, st. famil.

LONGUEUR


LONGUEUR, s. f. [Lon-gheur: 1re lon. l' u est muet: il n' est-là que pour doner au g un son fort qu' il n' a pas devant l' e.] Il se dit de l' étendûe de l' un des bouts à l' autre: longueur d' un chemin, d' un bâton, d' un manteau, etc. et de la durée: la longueur du tems, des jours, des nuits, etc. = Il signifie aussi lenteur, retardement. "C' est une longueur afectée. "Tirer les chôses en longueur. _ Il se dit sur-tout au pluriel:
   On nous mine par des longueurs.
       La Fontaine.
"Épargnez-moi des longueurs qui me font mourir mille fois pour une. Mariv. "Je suis ennuyé de ses longueurs. Acad.
   Rem. 1°. Quand on parle d' un discours, longueurs, au pluriel, a un sens diférent de celui qu' il présente au singulier. On en voit la preûve dans cette réflexion judicieûse de M. l' Ab. Grosier. "Les discours d' Agrippa et de Mécène (dans Dion Cassius) ont toute la profondeur, la netteté, la précision de ceux de Cinna et de Maxime (dans la Tragédie de Corneille); je dis, la même précision, quoique les premiers soient plus dévelopés, parce que ce sont les longueurs, et non pas la longueur, qui détruisent cette qualité essentielle du style. Journ. de Litér. Ainsi, un discours peut être long sans avoir des longueurs, et il peut avoir des longueurs sans être long. = 2°. Faire longueur est une expression nouvelle: elle a besoin du sceau de l' usage. "Quand ce morceau seroit bien pensé, il seroit défectueux, parce qu' il fait longueur. Ann. Lit. = 3°. On dit tirer ou traîner en longueur, le 1er est le meilleur. * Richelet dit aler en longueur: "L' afaire va en longueur. Je doute que cette expression soit de l' usage actuel.

LOPIN


LOPIN, s. m. [Lo-pein.] Morceau. Il est populaire et n' est bon~ que pour le st. plaisant.
   Point de couroux, Messieurs, mon lopin me suffit.
       La Font.
"Il en a eu; il en a emporté un bon lopin.

LOQUACITÉ


*LOQUACITÉ; s. fém. [Lo-koua-cité.] Babil, multitude de paroles. Il se prend en mauvaise part, et n' est bon que pour le st. critique ou polémique. "À~ cet égard, la loquacité brétone (anglaise, au Parlement) n' est pas plus fructueûse que la taciturnité française (des Ministres) Linguet. "À~ mille bonnes qualités, il joignoit une loquacité qui le rendoit incomode et souvent ridicule dans le commerce de la vie. L' Ab. Garnier, Hist. de France. _ Ce mot n' est point dans les Dictionaires.

LOQUE


LOQUE, s. fém. [Loke: 2e e muet.] Petite pièce. "Son habit s' en va en loques. st. famil.

LOQUENCE


*LOQUENCE, s. fém. Vieux mot. Éloquence. Le peuple le dit encôre dans certaines Provinces: "Cet homme a de la loquence, ce qui, à le bien prendre dans son idée, ne signifie autre chôse, si non qu' il a du caquet. _ Oudin, Nicot et d' autres vieux Lexicographes ont mis loquence pour éloquence. LA MONN.

LOQUET


LOQUET, s. m. LOQUETEAU, s. m. [Lo--kè, keto: 2e è moy. au 1er, e muet au 2d.] Sorte de fermetûre, qui s' ouvre ordinairement en haussant. _ Loqueteau, petit loquet qu' on met aux volets d' en haut, et qu' on hausse avec un cordon qui y est ataché.

LORD


LORD, s. m. Titre d' honeur usité chez les Anglais. Il signifie Seigneur, et Milord, mon Seigneur. On ne done ce titre qu' aux Ducs, Marquis, Comtes, Vicomtes et aux Archevêques et Évêques.

LORGNER


LORGNER, v. act. LORGNERIE, s. f. LORGNETTE, s. f. LORGNEUR, EûSE, s. m. et fém. [Lorg-né, nerî-e, nète, neur, neû-ze: mouillez le g, 2e é fer. au 1er, e muet au second, è moyen au 3e, lon. au dern.] Lorgner, regarder comme à la dérobée. Lorgnerie, action de lorgner. Lorgneur, eûse, celui, celle qui lorgne. "Lorgner quelqu' un. "Les lorgneries d' un petit-maître sont fort incomodes. "C' est un lorgneur, une lorgneûse. = Lorgner se dit souvent neutralement et sans régime. "On parla peu, mais on lorgna beaucoup. = Lorgner une femme, la regarder comme un amoureux. _ Figurément (st. familier.) Lorgner une charge, une maison; la convoiter, avoir des vûes sur...
   LORGNETTE, petite lunette dont on se sert pour regarder les objets peu éloignés. "Lorgnette d' opéra.

LORS


LORS, adv. [Dans lorsque, on fait sentir l' s de lors: mais dans dès lors et pour lors, on ne la fait point entendre: lorske: Dèlor, pour lor.] * 1°. Lors s' est dit anciènement pour alors.
   Il devoit être sourd aux aveugles souhaits:
   Il ne le fut pas lors.
       La Font.
Fleury a encore dit: "Telle étoit lors (alors) la loi de la guerre. "La soie lors (alors) encôre si râre.
   2°. Lors de son élection, de son avènement à la couronne, de son mariage. Acad. _ Vaugelas et Corneille le condamnent: mais on le conserve dans le discours familier, parce qu' il abrège un grand tour qu' il faudrait prendre sans cela. = 3°. Lors n' est adverbe qu' avec dès et pour. "Dès-lors, dès ce tems là: pour lors, en ce tems là. "Dès lors il résolut de ne plus se fier à des hommes~ qui l' avoient trompé. "Pour lors, il comença à changer de conduite. * On ne doit point dire, depuis lors, mais simplement depuis. = 4°. Joint à que, il est conjonction: "Lors qu' il fut arrivé. Il peut être séparé de que par quelques adverbes. "Lors enfin que l' épée est remise dans le fourreau. Moreau. "Lors même que le Prince étoit à la tête de son armée, etc. Id. Lors du moins que, etc. Lors aprês cela que, etc. Lors aprês tout que, etc. Cette construction est pourtant plus dûre et plus sauvage que la construction naturelle et ordinaire; enfin, lorsque; aprês tout lorsque, etc. Même est le seul adverbe qui âille mieux entre lors et que, que s' il était devant lorsque. C' est le seul que M. de Wailly aproûve dans cette construction. "Je ne dirois pas, dit-il, il faut nous défier de la fortune, lors sur-tout qu' elle nous flatte le plus. Je dirois sur-tout lorsqu' elle, etc. = 5°. Lorsque régit ordinairement l' indicatif. "Lorsqu' il veut; lorsqu' il vouloit; lorsqu' il aprit, etc. = 6°. Dès lors que ne se dit point. * "Dès lors qu' il est arrivé. Dites. Dès qu' il fut arrivé. On peut fort bien dire, il est vrai, je vis bien dès lors que j' étais perdu: mais là, que se raporte à je vis, et non pas à dès lors; (et celui-ci n' est là qu' adverbe; il n' y est point conjonction. Vaugelas, Corneille.

LôS


*LôS, s. m. [On fait sentir l' s.] Vieux mot. Louange. Il n' est plus bon que pour le marotique.
   Tous renonçoient au lôs des belles actions.
       La Font.
  Peuple maudit et malheureuse race,
  Que votre lôs fait dessécher d' ennui.
      Rousseau.

LOSANGE


LOSANGE, s. f. [Lozange: 2e lon. 3e e muet.] Figure à quatre côtés égaux, ayant deux angles aigus et deux aûtres obtus. "Dans les jeux de cartes, ce qu' on apèle coeur est une losange. "Les filles portent l' écu de leurs armoiries en losange.

LOT


LOT, s. m. LOTERIE, s. f. [Lot, Lote--rîe: 2e e muet, 3e lon.] Lot est 1°. Portion d' un tout, qui se partage entre plusieurs persones. "Les lots ont été tirés au sort. "Ce lot là est plus fort que les aûtres. = 2°. Ce que gâgne à une loterie celui à qui il échet un bon billet. "Le grôs lot. "Un lot de mille écus. = Loterie, Banque où les lots sont tirés au sort. "Faire, tirer une loterie. Mettre à une loterie, à la loterie.

LOTIR


LOTIR, v. act. LOTISSEMENT, s. m. [Loti, ticeman: 3e e muet.] Ils expriment l' action de faire des lots. Voyez LOT, n°. 1°. "Lotir les éfets d' une succession. "Les Fripïers ont acheté tous les meubles; puis ils les ont lotis entre eux. Ils en ont fait le lotissement. "En st. fam. "Le voilà bien loti, mal partagé, malheureux en femme, en mari, en associé.

LOTON


LOTON. Voyez LAITON.

LOUABLE


LOUABLE, adj. LOUABLEMENT, adv. [Lou-able, bleman: 2e dout. au 1er, 3e e muet.] Qui mérite d' être loué. _ D' une manière louable. "Il, ou elle est bien louable de s' être conduite de la sorte. "Il s' est conduit très-louablement dans cette afaire. "Action louable. "Cela est bien louable.

LOUAGE


LOUAGE, s. m. LOUER, v. act. Ils expriment l' action de transporter ou de recevoir l' usage de quelque chôse pendant un certain tems à un certain prix. "Doner ou prendre à louage. _ Louer a ces deux sens: il se dit du bailleur et du preneur. Louer des meubles, des cârosses, des chevaux. "Il m' a loué sa maison. = On dit proverbialement, d' un homme qui est sans emploi, qu' il est à louer. = On met sur les écriteaux, maison à louer. = Mde. de Sévigné joûe le mot sur les deux sens de louer, doner des louanges, et prendre à louage. "Ce logis, que tout le monde vient, que tout le monde admire, et que persone ne veut louer.

LOUANGE


LOUANGE, s. f. LOUANGER, v. a. LOUANGEUR, EûSE, s. m. et f. [ 2e lon. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d, lon. au 4e.] Louange, éloge, discours par lequel on relève le mérite de quelqu' un. Louanger, doner des louanges. Louangeur, qui done des louanges. "Mériter des louanges. "Célébrer, publier les louanges de... "Chanter les louanges de... Celui-ci n' est que du st. fam. "Quand les uns batoient, les aûtres étoient batus: il n' étoit pas possible de leur chanter à tous leurs louanges. Fontenelle. "Il veut qu' on le louange sans cesse: il aime à être louangé. "Il n' est entouré que de fades louangeurs. Ce subst. et le verbe se disent en mauvaise part et par moquerie.
   Rem. On a dit autrefois, tourner à louange. "Il leur tournent à louange cette irrévérence. Boss. On dit aujourd' hui; ils leur font un sujet d' éloge de, etc. _ On dit encôre, mais neutralement: "Cela tourne à sa louange. = Brébeuf a dit: être la louange de, pour la gloire de. Cette expression est surannée.
   Dans cet abaissement, dans ce malheur étrange
   Mieux que dans ma grandeur, je suis votre louange.
On lit aussi dans les Lett. Édif. et dans une des plus modernes: "La louange de cet excellent missionaire, (le P. Benoit) c' est d' avoir toujours craint et fui celle des hommes. Dans cette phrâse, on done dabord à louange le sens passif (être loué), et ensuite le sens actif louer. Il falait dire: la gloire de ce Missionnaire est d' avoir craint les louanges, ou bien, un grand sujet de louange, etc. est d' avoir craint celle, etc. = Dit-on, en la louange, ou à la louange de? On ne dit que le 2d. Voy. EN, prép. _ L' Acad. dit: on peut dire à sa louange que, etc. mais je ne crois pas qu' on puisse dire avec M. Moreau: "À~ la louange de son Abé, il composa la vie de Robert. _ Ce sont des vers à sa louange, se dit ironiquement et par antiphrâse. Mais on dit sérieusement: "Il composa des vers à sa louange. "La Reine exigea aussi de Robert des poésies à sa louange.

LOUCHE


LOUCHE, adj. LOUCHER, v. n. [Lou--che, ché: 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Ils se disent au propre, de celui qui a la vûe de travers. "Il ou elle est louche. "un oeil louche. "Il ou elle louche. "Il s' acoutume à loucher. = Au fig. l' adjectif se dit de ce qui n' est pas clair, qui est trouble. "Du vin louche. "Des perles qui ont un oeuil louche. _ Phrâse, expression louche, qui n' est pas bien nette. = S. m. "Cette expression jète du louche dans la phrâse. _ Comme l' assemblée (le Colloque de Poissy) y remarquait du louche (dans cette formule) elle crut devoir en renvoyer l' examen à la Faculté de Théologie. L' Abé Garnier, Hist. de Fr. M. Linguet dit un louche, ce qui n' est pas autant selon l' usage. "C' est un piège que l' on vous tend, pour jeter sur les démarches du Comte un louche qu' elles n' auront certainement pas à un oeil impartial. "Afin de ne laisser aucun louche sur sa conduite, il rendit publiques les deux lettres de, etc. Anon. _ L' Acad. ne le met pas subst.

LOUER


LOUER, v. act. LOUEUR, EûSE, s. m. et f. [Lou-é, Lou-eur, eûse; 2e é fer. au 1er, lon. au dern.] Louer a deux sens, qui n' ont aucun raport l' un avec l' aûtre. 1°. Doner, ou prendre à louage. Voyez LOUAGE. = 2°. Doner des louanges. Voy. LOUANGE. "Louer les belles actions. "On l' a fort loué de ce procédé. "J' aimerois mieux voir les Philosophes loués par d' autres que par eux-mêmes. Le Phil. du Val. = Se louer de quelqu' un, ou de quelque chose, témoigner qu' on est fort content du service qu' on en a reçu. "J' ai sujet de me louer de lui, de ce remède, du cheval que vous m' avez prêté = On dit, en st. prov. de celui qui parait fort content de ce qu' il a fait, qu' il se loûe et se remercie.
   LOUEUR, EûSE, c' est 1°. Celui, celle qui fait métier de doner à louage. "Loueur de chevaux, de chambres garnies. "Loueûse de chaises dans une Église. = 2°. Celui, celle qui loûe: il ne se dit qu' en mauvaise part. "Un loueur impertinent, une loueûse à gages.
   Sur-tout craignez le poison des loueurs.
       Rousseau.

LOUIS


LOUIS, s. m. Monoie d' or de 24 livres. On dit, un louis, un demi louis, un double louis. On dit quelquefois un louis d' or, et on le disait sur-tout, quand il y avait des louis d' argent. Aujourd' hui, on dit le plus souvent un louis tout simplement.

LOUP


LOUP, s. m. [On ne prononce jamais le p: Lou, monos.] Animal sauvage et carnassier, qui ressemble à un grand chien. "Ce mot entre dans plusieurs expressions proverbiales. _ Manger comme un loup, beaucoup. _ Doner les brebis à garder au loup; confier des chôses précieûses à un administrateur infidèle. _ Tenir le loup par les oreilles; être embarrassé dans une afaire douteûse. _ Avoir vu le loup; être expérimenté et aguerri. On le dit aussi d' un homme enrhumé, et aussi l' on dit qu' il a crié au loup. _ Quand on parle du loup, on en voit la queue, se dit de quelqu' un qui entre, qui parait au moment qu' on parle de lui. _ Marcher à pâs de loup, doucement et à dessein de surprendre. _ Être conu comme le loup blanc; fort conu. Voyez CHIEN, FAIM, ENTRE, GUEULE, HURLER, BERGERIE, GAROU.

LOUPE


LOUPE, s. f. 1°. Tumeur enkistée, qui devient souvent prodigieûsement grôsse. = 2°. Verre convexe, qui grossit les objets. "Se servir d' une loupe pour lire de très-petits caractères.

LOURD


LOURD, LOURDE, adj. LOURDAUD, DAUDE, s. m. et f. LOURDEMENT, adv. LOURDERIE ou LOURDISE, s. f. [Lour; le d ne se prononce jamais. Lourde, , dôde, de--man, deri-e, dî-ze: 2e e muet au 2d et au 5e; lon. au 3e, 4e et dern.] Lourd, 1°. Pesant, dificile à remuer, à porter. "Un lourd fardeau. "Charge trop lourde pour un cheval. = 2°. En parlant des persones; qui se remûe pesamment. "Il est devenu bien lourd. "Les chevaux de Flandres sont lourds. = 3°. Stupide, grossier. "C' est un esprit lourd: il a l' esprit lourd. = 4°. Dificile et rude à faire. "Lourde besogne, lourde tâche. = 5°. Grossier; lourde faûte. _ Lourde chûte; quand on est tombé de toute sa hauteur. = 6°. Lourd, pesant (synon.) Le 1er regarde plus proprement ce qui charge le corps, et le 2d a un raport plus particulier à~ ce qui charge l' esprit. Il faut de la force pour porter l' un, et de la supériorité de génie, pour soutenir l' aûtre. "L' homme foible trouve lourd ce que le robuste trouve léger. "L' administration de toutes les afaires d' un État est un fardeau bien pesant pour un seul. Gir. Synon. _ M. Beauzée y troûve une aûtre diférence, qui parait plus juste. Pesant exprime une pesanteur absolûe; lourd, une pesanteur relative. "Un homme foible troûvera trop lourd un fardeau qui ne sera que pesant pour un aûtre, et qui sera même léger pour un troisième. _ Au figuré, Lourd enchérit sur pesant. "L' esprit pesant conçoit avec peine, avance lentement, et fait peu de progrès. L' esprit lourd ne conçoit rien et ne fait aucun progrès. "La médiocrité est l' apanage des esprits pesans: la stupidité est le caractère des esprits lourds. Extr. de M. Beauzée.
   LOURDAUD, grossier et mal-adroit. "C' est {B573a~} un lourdaud, un grôs lourdaud, une grôsse lourdaude. _ Lourdement, pesamment, rudement. "Marcher, tomber lourdement. _ Fig. Grossièrement: errer, se tromper lourdement. = Lourderie, lourdise, faûte grossière contre le bon sens, la bienséance. "Il a fait une étrange lourderie ou lourdise. _ Le 2d vieillit.

LOURDEUR


LOURDEUR, s. f. Pesanteur. (Néol.) "Le Frélon seroit fort dangereux pour les Abeilles, sans sa lourdeur et le bruit de son vol. De Lille. "Quelle diférence entre la lourdeur de notre vers alexandrin, et la précision, l' harmonie, la cadence du vers hexamètre. L' Abé de Fontenai.
   Le tems est un éclair pour le mortel actif.
   Le tems avec lourdeur pèse sur l' homme oisif.
       M. Royou, Avocat.

LOûVE


LOûVE, s. f. LOûVETEAU, s. m. LOûVETER, v. n. [Loû-ve, veto, veté; 1re lon. 2e e muet.] Loûve est la femelle d' un loup. Loûveteau est le petit d' une loûve. Loûveter se dit de la louve, quand elle met bâs.

LOûVETERIE


LOûVETERIE, s. f. LOûVETIER, s. m. [1re lon. 2e e muet; 3e e muet au 1er, é fer. au 2d: teri-e, tié.] Le 1er se dit de l' équipage pour la chasse du loup, et du lieu destiné dans quelques maisons royales pour loger cet équipage. Le 2d est le titre d' un Ofice de la Maison du Roi qui comande cet équipage. "Le Grand Louvetier.

LOUVOYER


LOUVOYER, v. a. [Lou-voa-ié; 3e é fer. l' oi est long devant l' e muet; il louvoie; pron. lou-voâ. Au futur, cet e muet ne se fait pas sentir; il louvoiera, il louvoierait: pron. lou--voâ-ra, lou-voâ-rè, en 3 syll. _ La Touche dit aussi louvier, et les regarde tous deux comme bons, en avouant pourtant que louvoyer est plus en usage, et que l' Acad. n' a pas mis louvier dans son Dictionaire. Je le crois en effet inusité. Le Rich. Port. les met tous deux sans remarque.] Terme de Marine. Faire plusieurs routes, en portant le cap, tantôt d' un côté, tantôt d' un aûtre. "Nous fûmes contraints de louvoyer.

LOûVRE


LOûVRE, s. m. [1re lon. 2e e muet.] Palais du Roi à Paris, qu' il habitait autrefois. Malherbe dit de la mort:
   Et la garde qui veille aux barrières du Loûvre,
   N' en défend pas nos Rois.
   Figurément, st. fam. on apèle Loûvre une maison superbe et magnifique. "C' est un palais que cette maison; c' est un loûvre. = C' est par abus que quelques uns donent le nom {B573b~} de loûvre à toutes les maisons royales.

LOYAL


LOYAL, ALE, adj. LOYALEMENT, adv. LOYAUTÉ, s. f. [Loa-ial, iale, leman, ioté; 3e e muet au 2d et au 3e.] L' adjectif est encôre en usage: il se dit des persones et des chôses. "C' est un homme fort loyal, plein d' honeur et de probité. "Un procédé loyal. "Des marchandises loyales; vin loyal et marchand, qui n' est point fraudé, frelaté. = Le substantif est vieux et ne se dit plus que dans le st. badin. Fidélité, probité. "Homme plein de loyauté. = L' adverbe est assez usité dans le st. fam. "Vendre loyalement; se comporter loyalement. _ L' Acad. dit que le subst. vieillit. Le Rich. Port. met ces trois mots sans remarque.

LOYER


LOYER, s. m. [Loa-ié; 2e é fer.] 1°. Prix du louage d' une maison. "Bailler, doner, prendre une maison, une femme à loyer. Payer un grôs loyer de maison. "Il doit les loyers de six ans. = 2°. Salaire. "Celui qui retient le loyer du serviteur et du mercenaire est maudit de Dieu. Acad. On dit plus ordinairement gages pour le serviteur, et salaire pour l' ouvrier. = 3°. Récompense. En ce sens, il est plus usité en vers qu' en prôse, et ne s' emploie qu' au singulier.
   Qui, pour digne loyer de la Bible éclaircie,
   Te paye, en l' acceptant, d' un je vous remercie.
       Boil.
  Mais seroit-ce raison qu' une même folie,
  N' eut pas même loyer.
      Malherbe.
On voit par le dernier exemple que les Poètes ne le prènent pas seulement pour récompense, mais encôre pour châtiment. Les Latins ont usé de même du mot pretium en ces deux significations. Ménage ajoute que le mot de loyer est beau, et que ceux qui font dificulté de s' en servir sont trop délicats. Rousseau l' a employé dans le 2d sens.
   Triste loyer, chatiment lamentable
   D' un amour propre, il est vrai plus traitable,
   Et de vapeurs, moins qu' un aûtre enivré,
   Mais dans soi-même encor trop concentré.
   Les Poètes feront bien de ne pas laisser perdre ce mot.
   *LOYER pour louage, est un Gasconisme. Dites, le louage, et non pas, le loyer d' un cheval. Loyer ne se dit que d' une maison, d' une terre. Desgrouais.

LOZ


LOZ. Voy. LôS.

LUBIE


LUBIE, s. f. LUBIEUX, EûSE, adj. Caprice, fantaisie. _ Capricieux, fantasque: ils sont du st. f. "Il lui prit une lubie. Scar. Il a il lui prend souvent des lubies. Acad. "Elle demanda pardon de son extravagance; c' est ainsi qu' elle qualifioit cette lubie. Anon. "Il est fort lubieux, elle est extrêmement lubieûse. _ L' Acad. ne met point l' adjectif.

LUBRICITÉ


LUBRICITÉ, s. f. LUBRIQUE, adj. LUBRIQUEMENT, adv. [3e e muet aux 2 dern. en, au 3e, a le son d' an; Lubrike, keman.] Lubrique, lascif, impudique. Lubricité, lasciveté. Lubriquement, d' une manière lubrique. "Homme, femme lubrique. "Actions, postures, regards, paroles lubriques. "Lubricité insatiable. "Contenter sa lubricité. "Danser lubriquement.
   REM. La Touche trouvait ce mot peu honête, et ne le croyait bon que pour le style comique. Il le serait plutôt pour le satirique. L' Acad. n' en distingue point l' usage, non plus que de lubrique, lubriquement. Boileau a employé l' adjectif.
   Et tous ces lieux comuns de morale lubrique,
   Que Lulli réchauffa des sons de sa musique.

LUCARNE


LUCARNE, s. fém. Fenêtre pratiquée au toit d' une maison pour doner du jour au galetas. "Il passa par la lucarne.

LUCIDE


LUCIDE, adj. Il ne se dit qu' avec intervale. "Ce fou a des intervales lucides; il raisone bien en certains momens. Ce mot est reçu dans le langage, et souvent employé pour clair. "Raisonement lucide; terme, expression lucide; cela est lucide: clair et net. MARIN. Dans cet emploi c' est un néologisme qui a besoin du sceau de l' usage.

LUCRATIF


LUCRATIF, IVE, adj. [On pronon. l' f du 1er, 3e lon. au 2d, 4e e muet.] Qui aporte du lûcre, du profit. "Métier, emploi lucratif; charge, commission lucrative.

LûCRE


LûCRE, s. m. [1re lon. 2e e muet.] Gain, profit qui se retire d' un négoce, d' un travail mercenaire, d' un emploi, d' une charge. "Travailler pour le lûcre. "Être ataché au lûcre. "Il ne considère pas le lûcre, mais l' honeur dans cette afaire. St. famil.
   Rem. Ce mot n' est pas du beau style. On dit plutôt gain, profit. Le mot de lûcre anonce quelque chôse de bâs dans les sentimens de celui qui le recherche. On ne doit guère s' en servir que dans le comique ou le critique. "Ces Héros, sans être tout-à-fait désintéressés, ne semblent pourtant pas avoir précisément le lûcre pour objet. Linguet. "Persone ne sait mieux que lui que dans le commerce il n' y a pas de petit lûcre. Id. _ Il n' est pas si bien placé dans l' Hist. des Révol. Rom. "C' étoit le lucre qui l' y attiroit; mais la proie étoit renfermée dans un château, sîtué sur la croupe d' une montagne. Vertot. Ce mot n' est pas digne, ce me semble, du style et de la gravité de l' histoire.

LUETTE


LUETTE, s. fém. [On pourrait écrire comme l' on prononce, luète: 2e è moy. 3e e muet.] Morceau de chair molasse, qui est à l' entrée du gosier. "Avoir la luète enflée, relâchée, abatûe, tombée. Remettre la luète.

LUEUR


LUEUR, s. f. [Lu-eur.] Clarté faible. "La lueur de la lune, des étoiles, du feu. "Lire à la lueur du feu. = Figurément, légère aparence. "Il y a en cela quelque lueur d' esprit, de raison. "Il n' y a pas la moindre lueur de bon sens en tout ce qu' il dit. "Avoir quelque lueur d' espérance.

LUGUBRE


LUGUBRE, adj. LUGUBREMENT, adv. [3e e muet; en au second a le son d' an.] Lugubre, qui marque de la douleur: voix, cris, ton, plaintes lugubres. _ Qui est propre à inspirer de la douleur. Spectâcle lubugre. Apareil lugubre~; pensées lugubres. = Dans le haut style, en vers, cet adjectif précède élégamment le substantif. "Un lugubre silence, Gresset. "Un lugubre nuage. L. Rac. "Les lugubres eaux du Stix. De Lille.
   LUGUBREMENT, d' une manière lugubre. "Chanter, être vétu lugubrement.

LUI


LUI, pron. de la 3e pers. [Lui, monos. et non pas lu-i, en deux syllab. même en vers.] Il a aux câs obliques, de lui, à lui, lui, de lui; et au pluriel, eux, d' eux, à eux, eux, d' eux. = 1°. Lui n' est guère usité au nominatif et à l' acusatif. On met à la place ordinairement il pour le nominatif, et le pour l' acusatif. Dans les interrogations, on met en réponse lui. "Qui a fait cela? Lui. "Qui choisira-t-on? Lui. Quelquefois aussi on joint lui à le. "Nous le choisirons lui. Dites-en de même d' eux, par raport à ils et à les. = 2°. Il est pourtant des ocasions où l' on se sert de lui au nominatif et à l' acusatif, dans les phrâses afirmatives. On dit, p. ex. "Ils sont venus, lui et son frère. "On les a punis, lui et son complice. Voy. NOUS. "Il est impossible qu' un homme de mauvais naturel aime le bien public; car, comment pourroit-il aimer un million d' hommes, lui, qui n' a jamais aimé personne. Fréron, cité par M. de Vailly. "L' une et l' autre puissance recherchoit son amitié, et lui, par intérêt, ne se lioit irrévocablement à pas une. Moreau. = Remarquez que, précédé de et, lui n' a pas besoin d' être acompagné de il, comme dans les premiers exemples; mais, sans ce secours, il ne peut se pâsser de la compagnie de cet autre pronom. * "Quoique lui-même (le Schérif) fût inférieur au Comte en dignité, il étoit regardé comme très supérieur en autorité. Hist. d' Angl. Il falait, quoiqu' il fût lui-même, etc. Il en est de même d' eux. Quand on veut l' employer en régime simple (à l' acusatif.) il faut lui associer les, comme on associe le à lui. * La phrâse suivante pèche contre cette règle "Ils chasseroient lui et eux du Royaume. Hist. d' Angl. Dites ils les chasseroient lui et eux. _ On dit de même pour le datif; on lui a doné à lui et à son frère; on leur a doné à eux et à leurs partisans, etc. D' aprês cette règle, consacrée par l' usage, il faut réformer les phrâses suivantes. "Pénélope ne voyant revenir, ni lui, ni moi, n' aura pu résister à tant de prétendants. Télém. Il falait, ne nous~ voyant revenir, ni lui, ni moi. Voy. NOUS. "Il semble que Valdo ait eu d' abord un bon dessein, et que la gloire de la pauvreté (évangélique) ait séduit lui et ses partisans. Boss. Il falait, les ait séduit lui, etc. "Melanchton console le mieux qu' il peut son ami et lui-même. Id. Ici il faut répéter le verbe consoler. "Il console son ami, et se console lui-même le mieux qu' il peut. = En vers, lui, dans les énumérations peut être régime, sans être précédé de le.
   J' immolerois plutôt lui, Judith et moi-même.
       Duché.
On pardone cette irrégularité aux Poètes: mais en prôse, il faudrait dire: je l' immolerois lui, etc. = Lui se met quelquefois aprês il par pure élégance, et sans nécessité; mais cela n' est bon que dans le style familier. "On troûvera peut-être les représentations que me faisoit l' honeur un peu longues: mais il a besoin de parler long-tems lui, pour faire impression. Mariv. _ Ainsi l' on dit fort bien, et lui s' en ala de son côté, mais, et lui il s' en ala est souvent plus énergique. = 3°. Au lieu du génitif de lui, d' elle, et de lui, datif, on se sert souvent d' en et d' y pronoms. Voyez EN, pron. et Y. Voyez aussi plus bâs, n°. 4°. _ On met aussi quelquefois le datif lui, leur à la place du pronom possessif son, sa, ses, leur. Au lieu de dire: on a jeté des doutes dans son esprit, on dit: on lui a jeté des doutes dans l' esprit. = 4°. Lui, comme elle, eux, elles ne se dit que des persones, et de ce qui est regardé comme persone. En parlant d' un livre, si je demande, est-ce le vôtre? il ne faut pas répondre, c' est lui, mais se servir du pron. supléant le, et dire: ce l' est. De même parlant d' une afaire, on ne dit pas, que dit-on d' elle? ni faites atention à elle; mais qu' en dit-on? Faites y atention. BUF. _ M. de Wailly croit pourtant qu' après avoir parlé d' une chôse inanimée, d' un livre, d' une tabatière, d' un couteau, etc. on peut dire, est-ce là lui, est ce là elle; et qu' on peut répondre: c' est lui, c' est lui-même. Il ajoute, il est vrai, que dans ce câs on dit aussi: "Est-ce là votre livre? oui, ce l' est. Sont-ce là vos livres? oui, ce les sont. _ Je pense que cette dernière façon est la meilleure; l' autre est tout au moins douteûse, et on ne doit l' employer qu' en plaisantant. _ Pour lui-même, il est encôre plus sûr qu' il ne se dit point des chôses. "Le choix lui-même qu' en faisoit G... qui sans doute le conoissoit à l' épreuve, ne devoit-il pas les convaincre de la duplicité du personage. Anon. Il fallait dire; le choix même, etc. = 5°. Lui est quelquefois joint à le, la, ou les. Alors il ne doit jamais les précéder, mais il doit les suivre toujours dans la construction. C' est une faûte grossiêre de dire: * je lui le done, au lieu de dire: je le lui done. Pour les règles des câs obliques de lui, voyez MOI. = 6°. On ne doit pas se servir indiféremment de lui et de soi. _ I. Quand on parle en général, sans marquer une persone qui soit le sujet de la phrâse, il faut se servir de soi: "On fait mille faûtes, quand on ne fait nulle réflexion sur soi. Mais quand il s' agit de quelqu' un en particulier, on met lui au lieu de soi. "C' est un homme qui ne fait point de réflexion sur lui. _ II. On met soi plutôt que lui, quand on parle de l' extérieur. "Cet homme est propre sur soi; et quand on parle d' une chôse comme d' une persone: "Le corps qui a plus de force, atire à soi la vertu de l' autre. Sur quoi il faut remarquer que la chôse étant du genre féminin, on peut plus aisément substituer elle à soi; mais si elle est du masculin, rârement on pourrait mettre lui au lieu de soi. On ne dirait pas: le vice a dans lui tout ce qui peut le rendre odieux; comme on dirait; la vertu a dans elle tout ce qui peut la rendre aimable. _ Avec l' article de, elle ne pourrait se mettre à la place de soi, comme par exemple: "Aucune de ces espèces n' est parfaite de soi, et non pas d' elle. _ III. Soi-même et lui même se disent presque également aux câs obliques, quand il s' agit d' une persone particulière. Il semble pourtant que lui-même soit plus ordinaire et plus élégant, en prôse, que soi-même; et qu' au contraire, soi-même ait plus de grâce et plus de force, en poésie, que lui-même. _ Pour le nominatif, soit en prôse, soit en vers, on met toujours lui-même. _ Quand il est question d' une chôse, et non pas d' une persone, il est plus sûr de dire soi-même; car soi-même va toujours bien, et il est meilleur que lui-même, dans les ocasions même où celui-ci peut avoir lieu. Bouh.
   Rem. Les pronoms mal placés ocasionent souvent des équivoques. En voici un exemp. dans Racine; au sujet du pronom lui. ANDROMAQUE, Acte II. Sc. I.
   Il l' aime. Mais enfin cette veuve inhumaine
   N' a payé jusqu' ici son amour que de haine,
   Et chaque jour encôre on lui voit tout tenter
   Pour fléchir sa captive, etc.
   Selon l' ordre du discours, ce lui se raporte à cette veuve inhumaine; et selon le sens, il se raporte à il, à Pyrrus. Rien, ajoute M. D' Olivet, ne coûte tant que d' éviter toujours les équivoques de cette sorte. Mais, où la nécessité se troûve, la dificulté n' excuse pas. = Le même défaut se rencontre dans la phrâse suivante du discours que ce grand Poète prononça à l' Académie Française. "On croira même ajouter quelque chôse à la gloire de notre Auguste Monarque, lorsqu' on dira qu' il a estimé, qu' il a honoré de ses bienfaits le Grand Corneille, et que même deux jours avant sa mort, lorsqu' il ne lui restoit plus qu' un rayon de connoissance, il lui envoya encore des marques de sa libéralité. _ Les premiers sa et lui sont équivoques: suivant les règles de la langue, ils doivent se raporter au Roi; cependant c' est de Corneille que parle Racine. Il pouvait dire: "Et que même deux jours avant la mort de ce grand génie, (ou, pour ne pas répéter ce mot de grand, et ne pas faire mourir les génies, avant la mort de cet illustre Poète) à qui il ne restoit plus qu' un rayon de connoissance, il lui envoya, etc. etc. Wailly. = La faûte est encôre plus grossière dans la phrâse suivante. "Jean-Baptiste Tiepolo, qui travâille à présent pour le Roi d' Espagne, lui est infiniment supérieur. _ S' il était possible de s' y méprendre, on croirait que Tiepolo était supérieur au Roi d' Espagne, à qui lui semble se raporter. Dans le sens de l' Auteur (L' Ab. Richard) ce lui se raporte à Piazetta, autre Peintre, qui est nomé au comencement d' un article assez long, qui précède celui de Tiepolo. Et voilà ce que c' est que de trop éloigner les relatifs de leurs antécédens.

LUIRE


LUIRE, v. neut. LUISANT, ANTE, adj. [Luî-re, lui-zan, zante: 1re lon. au 1er, 2e e muet au 1er, lon. aux deux aûtres.] Luire, je luis, nous luisons, je luisais; je luirai, luirais; que je luise, luisant. _ Ce verbe n' est en usage, ni au prétérit de l' indicatif, ni à l' impératif, ni à l' imparfait du subjonctif. = Éclairer, répandre de la lumière. "Le jour nous luit. "Quand le Soleil luit. "Du feu qui ne luit point. = Figurément. "Un rayon d' espérance nous luit au milieu de tant de sujets de découragement. = Il régit quelquefois le datif, comme dans cette phrâse et la première; mais pas toujours. Rousseau dit de Minerve, descendûe parmi les hommes pour les éclairer:
   Elle s' avance, et cherchant à leur luire,
   Je viens, dit-elle, ici bas vous instruire.
Il ne faut pas être si sévère avec les Poètes gênés par la rime et la mesûre; mais en prôse, on ne pourrait dire luire aux hommes pour éclairer les hommes.
   LUISANT, qui luit. "Ver luisant, étoiles luisantes. _ Qui a quelque éclat. "Couleur, étofe, encre luisante. "Visage luisant de fard; cheveux luisants de pomade. = S. m. "Le luisant d' une étofe.

LUMIèRE


LUMIèRE, s. f. [2e è moyen et long, 3e e muet.] 1°. Clarté, ce qui éclaire et qui rend les objets visibles. "L' éclat de la lumière. "Un rayon de lumière. = 2°. petit trou qui est à la culasse d' une arme à feu. "La lumière de ce canon est bouchée. "La lumière de ce fusil est trop large. = 3°. Figurément, intelligence. "Lumière naturelle. "Cet homme n' a aucune lumière pour les sciences, pour les afaires. = Conaissance et talens. "Il a de grandes lumières. = Tout ce qui éclaire l' esprit: la lumière~ de la Foi, de l' Évangile. "Dieu est le Père des lumières. Cette dernière phrâse est consacrée. = 4°. Éclaircissement, indice sur quelque sujet. "Je n' ai aucune lumière sur cette afaire. "Je vous donerai des lumières.
   Rem. * Faites-moi lumière, pour, éclairez-moi est un gasconisme, un provençalisme grossier. = Mettre en lumière s' est dit autrefois pour imprimer, doner au public. "Traité du Nivellement de M. Picard, mis en lumière par M. de la Hire; c. à. d. imprimé par les soins de, etc. L' Acad. le met sans remarque. Je le crois vieux et hors d' usage. = On dit encôre aujourd' hui d' un ouvrage non encôre imprimé, qu' il n' a pas encôre vu la lumière. = En style poétique, comencer à voir la lumière, ou la lumière du jour, naître: jouir de la lumière, vivre. Perdre la lumière, ou être privé de la lumière, mourir, ou être aveugle. On dit des Saints Docteurs, qu' ils sont les lumières de l' Église; et d' un homme d' un grand savoir, qu' il est ou a été la lumière de son siècle: mais on ne dit pas absolument, qu' ils ont été ou qu' ils sont des lumières, comme l' a dit M. Sabatier de Castres, en parlant des Philosophes. "Les esprits qui ne jugent que par des impulsions étrangères, les ont regardés comme des lumières, des génies, des bienfaiteurs.

LUMIGNON


LUMIGNON, s. m. [mouillez le g.] 1°. Le bout de la mêche d' une bougie ou d' une chandelle alumée. = 2°. Ce qui reste d' un bout de bougie ou de chandelle, qui achève de brûler.

LUMINAIRE


LUMINAIRE, s. masc. [Luminère: 3e è moy. et long, 4e e muet.] Il ne se dit plus que dans le langage de l' Écritûre. Dieu fit deux grands luminaires, etc. et des cierges dont ont se sert pour le service divin. "Tant pour le luminaire de l' Église. "Le luminaire d' un enterrement. = En style proverbial et plaisant, on dit le luminaire pour la vûe. "Il a usé son luminaire à force de lire, de travailler. = * Mascaron a dit autrefois dans une Oraison Funèbre. "Le signe du lion n' est jamais plus brillant... que lorsqu' ils est joint au Soleil, et qu' il reçoit un redoublement d' ardeur de la conjonction de ce grand luminaire. _ Cela paraîtrait aujourd' hui burlesque et de mauvais goût.

LUMINEUX


LUMINEUX, EûSE, adj. [Lumi-neû, neû-ze; 3e lon.] Qui a, qui jète, envoie, répand de la lumière. "Corps lumineux; traces lumineûses. = Fig. "Esprit lumineux. "Il y a des traits lumineux dans ce discours. "Principe fécond et lumineux, d' où l' on tire une foule de conséquences, qui répandent la clarté sur tout. Anon.

LUNAIRE


LUNAIRE, adj. LUNAISON, s. f. LUNATIQUE, adj. et subst. [Lunère, nèzon, natike; 2e è moy. aux deux prem.] Lunaire, qui apartient, qui a raport à la lune. "Mois, année, cadran lunaire. = Lunaison est le tems qui s' écoule depuis le comencement de la nouvelle lune jusqu' à la fin du premier quartier. = Lunatique ne se dit au propre substantivement qu' en cette phrâse. "Le lunatique de l' Évangile que le Seigneur guérit. _ Fig. st. fam. Fantasque, capricieux. "Il ou elle est lunatique. = Subst. "C' est un lunatique, une lunatique.

LUNDI


LUNDI, s. m. Le second jour de la semaine. "C' est aujourd' hui lundi. "Je le ferai lundi prochain. "On s' assemble tous les lundis.

LUNE


LUNE, s. f. Planète qui est plus proche de la Terre que toutes les aûtres, et qui nous éclaire souvent pendant la nuit. "La lune emprunte sa lumière du soleil. "Clair de lune. "Lire, danser au clair de la lune, etc. = En style proverb. Avoir des lunes; être sujet à des lunes; avoir la lune ou un quartier de la lune dans la tête: c' est être fantasque, inégal, un peu fou. Faire un trou à la lune, s' en aler sans rien dire et sans payer ses créanciers. Voyez ABOYER, DENT.

LUNETTE


LUNETTE, s. f. [Lunète; 2e è moy. 3e muet.] Verre tâillé de telle sorte qu' il soulage la vue, et rend la vision plus nette et plus distincte. "Lunette convexe; lunette concâve. "Une paire de lunettes. "De bones, de mauvaises lunettes. "Prendre. porter des lunettes. = On dit, en st. prov. d' un homme qui n' a pas bien vu clair dans une afaire, qu' il n' a pas bien mis ou bien chaussé ses lunettes; qu' il a mis ses lunettes de travers. = Lunette d' aproche ou de longue vûe, ou à longue vûe: tuyau à chaque extrémité duquel il y a ordinairement un verre, qui grossit les objets éloignés.

LUNETTIER


LUNETTIER, s. m. [Lunétié; 2e et 3e é fer.] Faiseur ou marchand de lunettes.

LUSTRALE


LUSTRALE, adj. f. Il ne se dit qu' avec eau. "Eau lustrale, dont les Prêtres des Païens se servaient pour purifier le Peuple.

LUSTRE


LUSTRE, s. m. 1°. Êclat que l' on done à une chôse. "Le lustre d' une étofe. "Le vernis de la Chine est d' un grand lustre. = 2°. Fig. Éclat que done la beauté, le mérite, la dignité. Voyez ÉCLAT. "Il ou elle done à cette charge, à cette parûre plus de lustre qu' il ou elle n' en reçoit. "La laideur de cette femme servoit de lustre à sa voisine. "Ce tableau sert de lustre à celui qu' on a placé auprès. = 3°. Chandelier à plusieurs branches, qu' on suspend au plancher pour éclairer. = 4°. Espace de cinq ans. Il ne s' emploie que dans le style poétique. "Il étoit à peine parvenu à son troisième lustre; à l' âge de quinze ans. "Il veut que son exemple done à la Religion de nouveaux vengeurs; et qu' après plusieurs lustres écoulés, il enflâme encore les Héros futurs. Jer. Dél.

LUSTRER


LUSTRER, v. act. [Lustré; 2e é fer.] Doner du lustre à une étofe, à un chapeau, etc. "Lustrer un chapeau, une étofe.

LUTH


LUTH, s. m. LUTHIER, s. m. [L' h est muette: Lut, Lu-tié; 2e é fer.] Luth est un instrument de musique du nombre de ceux, dont on joûe en pinçant les cordes. "Jouer, Joueur de luth. = Luthier, Ouvrier qui fait des luths et d' autres instrumens à cordes.

LUTIN


LUTIN, s. m. LUTINER, v. a. et n. [Lu--tein, ti-né; dern. é fer. au 2d.] Au propre, populairement, Esprit follet. = Fig style famil. Enfant qui fait continuellement du bruit; c' est un lutin; il fait le lutin. = Cet homme ne dort non plus qu' un lutin; il est sans cesse en mouvement, et dort fort peu. = Lutiner, actif; tourmenter quelqu' un, comme ferait un lutin. = Neutre; Faire le lutin. "Il ne fait que lutiner toute la nuit.

LUTRIN


LUTRIN, s. m. [Lu-trein.] Pupitre élevé dans le choeur d' une Église, sur lequel on met les livres de chant. "Chanter au lutrin.

LUTTE


LUTTE ou LUTE, s. f. LUTTER ou LUTER, v. n. LUTTEUR ou LUTEUR, s. m. [2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Lutte, sorte d' exercice gymnastique ou de combat où l' on se prend corps à corps pour se terrasser l' un l' aûtre. Lutter, combattre à la lutte. Lutteur, celui qui lutte. _ Celui-ci ne se dit qu' au propre, du moins dans le sérieux. Luter est beau au fig. "Luter contre les passions, contre les dificultés, contre la tempête, contre les flots, etc. Depuis quelque tems, lutte est à la mode dans le sens métaphorique. "Les querelles de littératûre ont ouvert dans tous les tems un champ de discorde aux luttes de l' amour propre. L' Abé Royou. _ M. l' Abé de Boismont parle aussi de la lutte pénible contre l' adversité.
   De haute lutte, adv. Par autorité, sans ménagement. "Emporter ou faire quelque chôse de haute lutte. = De bonne lutte, sans fraude. _ L' Acad. ne met point celui-ci.

LUXE


LUXE, s. m. [Lukce; 2e e muet.] Somptuosité excessive, soit dans les habits, soit dans les meubles, soit dans la table, etc. "Le luxe des habits; il aime le luxe. "Le luxe est plus grand que jamais. "Le luxe fut toujours la première cause de la décadence des Empires. = Il y a des gens qui confondent luxe avec faste. _ Le luxe est une somptuosité excessive dans les habits, etc. Le faste signifie proprement une grande vanité acompagnée d' aparences éclatantes. "Les Pharisiens donoient l' aumône avec faste. "Les Espagnols ont beaucoup de faste; les Français beaucoup de luxe. "Le faste est tout en ostentation; le luxe recherche encôre le rafinement des aises et des comodités. = * On a dit autrefois luxure pour luxe. Un Auteur assez moderne l' a encore employé dans ce sens. "L' homme engraisse l' oison. Sa luxure, (son luxe) son plaisir, sa vanité l' engagent à prendre soin d' un grand nombre d' animaux. Préface d' une Trad. de l' Essai sur l' Homme de Pope.

LUXUEUX


*LUXUEUX, EûSE, adj. Qui a, qui montre du luxe. Comme de faste on a fait fastueux, M. Fréron de luxe a fait luxueux. "Les Athéniens et les Carthaginois étoient aussi luxueux (passez-moi ce terme) dans le tems de leurs prospérités, que dans celui de leur chûte. Ann. Litt. "L' Auteur s' éforce de démontrer que les moeurs ne sont pas meilleures chez un Peuple peu luxueux que chez un Peuple qui a beaucoup de luxe. "Dire que les moeurs ne sont pas meilleures chez une Nation peu luxueuse, que chez une Nation qui a beaucoup de luxe, c' est dire que la fièvre ne fera pas plus de ravage dans un corps plein de bile et d' humeurs, que dans un corps libre et sain. _ Le mot est imprimé en italique, comme de raison. Il n' a pas fait fortune. Il serait à souhaiter que l' usage l' adoptât.

LUXûRE


LUXûRE, s. f. LUXURIEUX, EûSE, adj. [Luk~-sûre, su-rieû, rieû-ze; en vers, ri-eû, etc. 2e du 1er et 3e des deux autres long.] luxûre, incontinence, lubricité. On ne le dit, aussi bien que luxurieux, qu' en parlant du péché contre le 6e Comandement. "La luxûre est un des péchés capitaux. Luxurieux point ne seras. Hors delà ces deux mots ne sont pas d' usage. = La Touche dit qu' on ne se sert plus de ces deux mots que dans le comique, et qu' on dit en leur place, impudicité, impudique. L' Académie dit que luxure n' a guère d' usage dans le discours ordinaire. On pourrait ajouter qu' il n' en a pas davantage dans le discours relevé. Je ne vois pas non plus de quelle ressource il peut être dans le comique, où la Touche le rélègue. Je pense qu' il n' y a que le satirique qui puisse s' en acomoder. = M. Arnaud avait déjà dit, dans sa lettre à M. Perrault, que: "ce que l' on peut dire de ces mots luxurieux et lubrique, c' est qu' ils sont un peu vieux, ce qui n' empêche pas qu' ils ne puissent bien trouver place dans une satire. _ M. Beauzée met en regard luxure avec lubricité et lasciveté. La 1er, dit-il, exprime le penchant criminel qui porte un sexe vers l' aûtre avec empressement et sans retenue; le 2d, l' influence sensible de ce penchant sur la contenance, le geste, les regards, etc.: le 3e, la manifestation de ce penchant par des actes étudiés. "Les célibataires luxurieux sont les fléaux de la société. "Fuyez la compagnie des persones qui ont le maintien et le regard lubriques, et qui aiment à tenir des propos lascifs.

LYCÉE


LYCÉE, s. m. Chez les Grecs, lieu public destiné aux exercices du corps. _ L' École d' Aristote, comme le Portique signifie l' École de Zenon. _ Aujourd' hui et figurément, lieu où s' assemblent les Gens de Lettres.

LYNX


LYNX, s. m. [Leinks, monos. long.] Animal sauvage renomé pour l' excellence de sa vûe. _ De là: avoir des yeux de lynx, au propre, avoir la vûe très-bone: au figuré, être pénétrant dans les afaires.

LYRE


LYRE, s. f. LYRIQUE, adj. [Lîre, 1re lon. Lirike.] Lyre, instrument à cordes, en usage chez les Anciens. = Poésie, Poète Lyrique, se dit tantôt des Odes, tantôt des Opéra.

LYS


LYS, voyez LIS.