Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI INFATUATION


INFATUATION, s. fém. INFATUER, v. act. [Infatu-a-cion, tu-é.] Ils expriment une prévention ridicule et excessive en faveur de quelqu' un ou de quelque chôse. "Son infatuation est extrême. "Qui vous a infatué de cet homme, de ce livre? "Le monde vous dédaigne; et cependant vous en êtes toujours plus infatués. Chemin. "Il s' est infatué, ou il est infatué de cette femme, de cette opinion.

INFÉCOND


INFÉCOND, ONDE, adj. INFÉCONDITÉ, s. fém. [2eé fer. 3e lon.] Stérile. Stérilité. Ces deux mots me paraissent meilleurs pour la poésie et le haut style, que pour la prôse ordinaire. "Champ infécond, terre inféconde. Et figurément, esprit, génie infécond; veine inféconde. "L' infécondité des terres, des esprits.

INFECT


INFECT, ECTE, adj. INFECTER, v. a. [Infèk, fèkte, fèkté: 1re lon. 2e è moyen, 3ee muet au 2d, é fer. au 3e.] Infect, puant, corrompu. Infecter, gâter, corrompre. "Lieu infect, haleine infecte. Air infect; exhalaison infecte. "Cette puanteur infecte tout le voisinage. "Cette quantité de cadâvres infectèrent l' air. "Il nous a infectés de son haleine. "Ceux qui étoient infectés de cette maladie. _ Fig. "Il infecta le pays de sa méchante doctrine. "Il vous infectera de ses erreurs.
   La doctrine, à son tour, est bientôt infectée.
   Quand le coeur se corrompt.
       Le Franc.
Rem. 1°. Des Imprimeurs ignorans ou inatentifs, ont confondu infecter avec infester. "Les Athéniens s' étoient mis en mer pour infecter (infester) les côtes de la Béotie. Rollin. "Cette mer est souvent infectée (infestée) de Corsaires. P. Sicard. Même avec infestée, il fallait dire, par les Corsaires. "Il convertit une famille, qui étoit infectée (infestée) par le Démon. Let. Édif. "Que le démon infectoit (infestait) depuis long-temps. Ibid.
   2°. Infecter ne régit point les persones en régime direct. (à l' acusatif.) "De là l' imputation qu' on fit à l' Empereur Alexis d' avoir infecté les troupes. DICT. HIST. Il falait dire, d' avoir infecté les puits pour faire périr les troupes. * "Un matelot, qui en avoit mangé fut infecté si subitement, qu' il mourut sans pouvoir être sauvé par aucun secours. H. des Voy. On ne dit point être infecté tout seul, en parlant des persones.

INFECTION


INFECTION, s. f. [Infèk-cion; en vers ci-on: 1re lon. 2e è moy.] Grande puanteur. "Causer, doner de l' infection. = Corruption, contagion. "L' infection des corps morts mit la peste dans cette ville.

INFÉLICITÉ


*INFÉLICITÉ, s. f. Infortune, malheur. Il est dans St. Évremont. Le Dict. de Trév. le cite sans le critiquer. Dans le Rich. Port. on dit qu' il est peu usité. Il n' est pas dans le Dict. de l' Acad.

INFÉRER


INFÉRER, v. act. [1re lon. 2e et 3e é fer. devant l' e muet, le 1ere se change en è moy. et long: il infère, infèrera, etc.] Conclûre, tirer une conséquence de... "Que voulez-vous inférer de là? Vous ne pouvez rien en inférer.

INFÉRIEUR


INFÉRIEUR, EURE, adj. INFÉRIEUREMENT, adv. INFÉRIORITÉ, s. f. [1re lon. 2e é fer. 5ee muet au 2d et au 3e.] Inférieur, qui est au-dessous. "La partie supérieure et la partie inférieure. = Apliqué aux persones, il régit le datif de la persone, et la prép. en de la chôse. "Il lui est fort inférieur en mérite, en science, en talens, en vertus. = Subst. Il est rélatif à supérieur. "Je suis son inférieur~. "Il en ûse bien avec ses inférieurs. = Inférieurement, au-dessous. "Il écrit, il prêche, il chante bien inférieurement à un tel. = Infériorité, rang de l' inférieur à l' égard de son supérieur. "Son infériorité devrait le rendre plus humble. = Il se dit surtout de l' infériorité du génie, des talens. "Sentez votre infériorité, et vous ne serez plus si dificiles, ni si sévères L' Ab. Trublet.

INFERNAL


INFERNAL, ALE, adj. Qui apartient à l' enfer. "Monstre infernal. "Les puissances infernales. = Dans le style simple, il aime à suivre. En vers et dans la prôse poétique, il peut précéder.
   Ou percer par mes chants les infernales voûtes
   De l' Empire des morts.
       Rouss.

INFERTILE


INFERTILE, adj. Stérile, qui n' est pas fertile. "Champ infertile, terres infertiles. _ Fig. Esprit infertile, sujet infertile. _ Il est plus de la poésie que de la prôse, aussi bien qu' infertilité. L' Acad. les met sans remarque.
   Les parens de l' Athlète étoient Gens inconus;
   Son père un bon bourgeois, lui sans autre mérite,
   Matière infertile et petite.
       La Font.
  Quoi, dis-je tout chagrin, dans ma verve infertile.
  Des vertus de mon Roi spectateur inutile, etc.
       Boil.
Voiture dit aussi que les lauriers sont des plantes infertiles. "Terres froides et infertiles. BUFON.

INFERTILITÉ


INFERTILITÉ, s. f. Stérilité. "L' infertilité de ces terres. Voy. INFERTILE. = Ces deux mots ont soufert des contradictions. Ils prènent faveur aujourd' hui.

INFESTER


INFESTER, v. act. [Infèsté: 1re lon. 2e è moy. 3e é fer.] Piller, ravager, vexer par des incursions. "Les Pirates infestoient toutes ces côtes. = Incomoder. "Les rats infestent cette maison. Voy. INFECTER. = Dans quelques-unes des Lettres Édifiantes, il est parlé de l' infestation des Démons. Ce mot n' est pas dans les Dictionaires.

INFIDèLE


INFIDèLE, adj. INFIDèLEMENT, adv. INFIDÉLITÉ, s. f. [3eè moy. aux 2 premiers, é fer. au 2d; 4ee muet.] 1°. Déloyal, déloyauté, manque de foi, trahison. Infidèle apliqué aux persones, se dit ou seul: époux, épouse, ami infidèle; ou avec la prép. à (le datif) Femme infidèle à son mari. Apliqué aux chôses, il se dit toujours sans régime. "Raport, récit infidèle, où l' on déguise la vérité. Mémoire infidèle, qui manque au besoin. = 2°. Qui n' a pas la vraie foi. "Les peuples, les Nations infidèles; et substantivement, les infidèles: être pire qu' un infidèle.
   INFIDèLEMENT, d' une manière infidèle. "Agir infidèlement avec.... raporter les chôses infidèlement.
   INFIDÉLITÉ, se dit dans tous les sens d' Infidèle. "Noire, horrible infidélité. "L' infidélité d' un domestique, d' un ami, d' une femme. Faire, comettre une infidélité.
   Avec tant de mérite, avec tant de beauté,
   Vous n' avez pas dû craindre une infidélité.
       Destouches.
Infidélité de la mémoire, d' un récit, d' un raport. "Les Juifs sont obstinés dans leur infidélité.

INFILTRATION


INFILTRATION, s. f. S' INFILTRER, v. rec. [Infiltration, tré.] Ils expriment l' action d' un liquide, qui passe dans les pôres d' un solide, comme par un filtre. "L' eau s' infiltre dans le bois. "L' infiltration des humeurs. "Hydropisie par infiltration.

INFINI


INFINI, IE, adj. INFINIMENT, adv. INFINITÉ, s. f. [Infini, nî-e, niman, nité; 1re lon. 2e br. 3e lon. au 2d.] Infini est proprement, qui n' a point de bornes. En ce sens, il ne peut se dire que de Dieu. "L' être infini. "Tous les atributs de Dieu sont infinis; sagesse, miséricorde infinie, etc. = Inombrable. "Il y avait un monde infini dans cette assemblée. "Un nombre infini d' Auteurs raportent que, etc. = À~ l' infini, adv. "Cela irait à l' infini.
   INFINIMENT, sans bornes, sans mesûre. "Dieu est infiniment bon. = Extrêmement: "Il est infiniment heureux; il soufre infiniment.
   INFINITÉ, qualité de ce qui est infini. "On ne saurait comprendre l' infinité de Dieu. = Grand nombre: "Une infinité de persones, de chôses, de raisons, etc. = Rem. que quand infinité régit ainsi des noms au pluriel, le verbe doit se mettre aussi au pluriel. "Une infinité de gens croient, et non pas croit. VAUG. Par la même raison, il faut mettre le pluriel quand infinité régit le pronom en, parce que ce pronom relatif exprime un pluriel. "Il y en a une infinité, qui soutiènent le contraire, c. à. d. il y a une infinité de persones, etc. Th. Corn. = Infinité, n' a pas ordinairement de pluriel: mais dans le style épistolaire on peut lui en doner un. "Je vois des Harangues, des infinités de complimens, de visites. Sév. "Il faut avoir combiné des infinités de raports pour aquérir des idées de convenance, de proportion, d' harmonie et d' ordre. J. J. Rouss. _ Une infinité paraissait sufire pour rendre la pensée de l' Auteur: mais des infinités la rend plus énergiquement.
   Rem. Il y a long-tems qu' on a agité la question, s' il faut dire: il a de l' esprit infiniment, ou, il a infiniment d' esprit, ou enfin, il a infiniment de l' esprit. RICHELET trouvait la 1re manière la meilleûre et la plus sûre et la 2de après. L' Auteur de l' Apothéose du Dictionaire prétendait au contraire que la dernière vaut mieux, parce que infiniment ne change point le régime. L' Acad. disait aussi il a infiniment de l' esprit et ne faisait pas mention des aûtres. Dans la dern. Édit. au contraire elle ne met que infiniment d' esprit. Madame de Genlis et beaucoup d' aûtres le disent aussi. Cette illustre Auteur dit aussi supérieurement d' esprit, médiocrement d' esprit, par analogie. = Infiniment, ne parait pas susceptible de degrés de comparaison et ne fait pas bien, ce me semble, avec des superlatifs et des comparatifs. "La traduction de Petra est infiniment la meilleure, dit Boileau. Il devait se contenter de dire, est la meilleure de beaucoup. "Il y a sans doute, dit MALLEBRANCHE, infiniment bien plus de plaisir et plus d' honeur à se conduire par ses propres yeux, que par ceux des aûtres. _ Infiniment plus était déjà trop: mais infiniment bien plus met le comble à l' exagération.

INFINITIF


INFINITIF, s. m. C' est, en Gramaire, un mode des verbes, ainsi apelé, parce qu' il exprime d' une manière indéfinie, sans aucun raport de nombres, ni de persones: aimer Dieu, lire un livre. = 1°. On peut dire qu' il se décline comme les noms. Nominatif. "Aimer Dieu est notre premier devoir. Lire est une utile ocupation. _ Génitif. "J' ai envie de lire. _ Datif, je passe mon tems à lire. _ Acusatif. "Je veux lire. _ Ablatif; je viens de lire. = 2°. De, avec l' infinitif, se met quelquefois à la tête de la phrâse. "De vous dire que tout cela se passe sans larmes, il n' est pas possible. SÉV. "De violer des traités écrits et confirmés par serment, tout homme... devroit en avoir honte et horreur. Moreau. Dans ce tour, en est nécessaire. C' est la même construction que celle qui est citée au mot IL. Rem. I. Elle rompt un peu l' uniformité de la construction française. = Dans le style plaisant, de et l' infinitif s' emploient sans être régis par rien, et expriment un présent ou un imparfait de l' indicatif.
   Grenouilles aussî-tôt de sauter dans les ondes,
   Grenouilles de rentrer dans leurs grotes profondes.
       La Font.
  Souris de revenir, femme d' être en posture, etc.Id.
c. à. d. les grenouilles sautent, rentrent, etc. Les souris reviènent, etc. La femme se remet en postûre, etc. "On ajoûte qu' il y avoit 200 litières (au siège d' Orange) et de rire. Sév. c. à. d. on riait. _ Il peut même exprimer un futur. "Alors hurlemens de cesser, pantomimes lugubres de disparoître, larmes comiques de tarir: on aura honte d' avoir aplaudi à des comédies larmoyantes~. Sabat. c. à. d. cesseront, disparaîtront, tariront, etc. = La prép. de devant l' infinitif se met plus régulièrement à la place du Gérondif. "Vous êtes bien cruel à vous-même de vous refuser (en vous refusant) ces adoucissemens. "Vous avez fait une action généreuse de leur donner (en leur donant) un azyle dans votre nouvel établissement. Télém. = 3°. L' infinitif, précédé de la prép. à, se met aussi quelquefois à la tête de la phrâse, comme les ablatifs absolus des Latins. "À~ tout prendre, il en arrive à-peu-près comme au jeu, où le plus habile l' emporte à la longue. "À~ ne regarder que les rencontres particulières, la fortune semble seule décider de l' établissement et de la ruine des Empires. = L' infinitif s' emploie même de la sorte sans préposition. "Faire périr le Roi, ou le rétablir, il n' y avoit pour elle qu' un de ces deux partis à prendre. Rayn. "Avoir tant travaillé; et tout se termine non à vivre, mais à mourir dans la splendeur. Neuville. = Ces infinitifs sans préposition s' emploient sur-tout en exclamation. "Quoi, disois-je, tirer un homme de sa Patrie... et puis l' abandoner dans cette isle déserte pendant son sommeil! Télém. "Traduire Milton en vers! Mais n' est-ce pas une entreprise peut être impossible? l' Ab. de Fontenai. Ou en interrogation: "Quel usage plus doux et plus flateur pourriez-vous faire de votre élévation et de votre opulence? Vous atirer des hommages. Mais l' orgueil lui-même s' en lasse. Comander aux hommes et leur doner des loix? Mais ce sont-là les soins de l' autorité, ce n' en est pas le plaisir, etc. Massill. = 4°. L' infinitif sert quelquefois de sujet à la phrâse.
   Vivre, sans se conaitre, est un trop dur suplice.
       L. Rac.
Mais il n' y a pas beaucoup d' ocasions, où l' infinitif puisse être ainsi le nominatif du verbe, et je ne conseillerais pas d' imiter l' exemple suivant. "Soufrir sur le trône un usurpateur si monstrueux, sembloit déshonorer la Nation. H. d' Angl. Il faut alors se servir de c' est, et dire, par ex. "Soufrir, etc. c' étoit déshonorer, etc. _ L' Acad. dans ses sentimens sur le Cid, reprend ce vers de Corneille.
   Et paroître à la Cour eût hazardé ma tête.
Il falait, dit-elle, dire: ç' eût été hazarder, etc. Car on ne peut faire un substantif de paraître pour régir eut hazardé. - C' est a même cet emploi, quoique l' infinitif soit précédé de la prép. de: "Il est évident que de laisser les crimes impunis, c' est les multiplier. "De vous dire à présent s' il y a plus de gens à lier dans un pays que dans l' aûtre, c' est ce que mes faibles lumières ne me permettent pas. Volt.
   Rem. Plusieurs infinitifs de suite rendent ordinairement la phrâse dûre. "Je veux aller faire sentir, etc. Cependant, quand ces infinitifs ne sont pas régis l' un par l' aûtre, ils ne sont pas désagréables. "Vous l' avez vu rougir, pâlir, trembler, gémir, menacer, prier, etc.

INFIRME


INFIRME, adj. [dern. e muet. Plusieurs en Provence prononcent Infierme: c' est une faûte grossière.] Mal sain, ou actuellement indisposé. "Homme infirme, corps extrêmement infirme.
   Le Fils rend à son Père, infirme et sans défense,
   Les secours que de lui reçut sa foible enfance.
       Barthe.
= Subst. "C' est un infirme, les infirmes. = * Aûtrefois on disait infirme, infirmité au figuré, au lieu de faible, faiblesse. "Les Évêques doivent prêter leurs voix aux infirmes. BOSS. "La foi infirme des peuples. Id. "Il faut aider l' infirmité de nos frères. Id. Le P. Fabre a dit plus récemment: Le pape n' avoit envoyé un Légat que pour les soulager dans les infirmités, dont ils alloient être accablés. Hist. Eccl. _ L' Acad. le dit en ce sens: "Le péché a rendu l' homme infirme, la volonté infirme. L' infirmité de la natûre causée par le péché. J' ôse dire, que c' est du vieux langage.

INFIRMER


INFIRMER, v. act. Au Palais, invalider. "Infirmer un acte. = Dans le style didactique et polémique, afaiblir. "Infirmer une preûve, un témoignage, en montrer le faible.

INFIRMERIE


INFIRMERIE, s. f. INFIRMIER, IèRE, s. m. et f. [1re lon. 3ee muet au 1er, é fer. au 2d, è moy. et long au 3e, merî-e, mié, miè-re.] Infirmerie, ne se dit que dans les Maisons Religieuses: Lieu destiné pour les malades. "Il est à l' infirmerie. = Infirmier, qui a soin des malades. Il se dit dans les couvens, et dans quelques Hôpitaux.

INFIRMITÉ


INFIRMITÉ, s. f. Indisposition ou maladie habituelle. "Il est sujet à de grandes infirmités. Il se dit ordinairement au pluriel. Voy. INFIRME.

INFLAMMABLE


INFLAMMABLE, adj. INFLAMMATION, s. f. INFLAMMATOIRE, adj. [Inflamable, ma-cion, ma-toâ-re: on peut écrire ces mots avec une seule m, et ce serait le mieux que tout le monde les écrivît de même.] Inflamable, qui s' enflâme facilement. "Matière inflamable. _ Fig. "Un zèle inflamable, que la contradiction et les obstacles font dégénérer en fureur. Marm. "Ce caractère opiniâtre, inflamable, et en même tems inflexible, que la Natûre m' a donné. Linguet.
   INFLAMATION, action qui enflâme une matière combustible. "Le feu prit aux poûdres, et l' inflamation fut si prompte que, etc. = Âcreté et ardeur, qui surviènent aux parties du corps excessivement échaufées. "Inflamation de poumon, des entrâilles, etc.
   INFLAMATOIRE, ne se dit que dans le 2d sens d' inflamation. "Maladie inflamatoire, qui caûse l' inflamation.

INFLÉXIBILITÉ


INFLÉXIBILITÉ, s. f. INFLÉXIBLE, adj. INFLÉXIBLEMENT, adv. [In-flék-cibi--lité, cible, bleman: 2e é fer. 4ee muet aux dern.] Ces mots sont bons au figuré, et ne valent rien au propre. On dit un homme inflexible, qui ne se laisse point mouvoir à compassion; une vertu inflexible, qui ne se laisse point ébranler par aucune considération. On dit, en ce sens, l' inflexibilité d' un juge; l' inflexibilité du coeur de... Son inflexibilité; "Demeurer inflexiblement ataché à son opinion, etc. Mais on ne dit point, un arbre inflexible, l' inflexibilité de cet arbre, etc.
   Inflexible, inexorable, impitoyable, implacable. (Synon.) Le 1er se dit de celui qu' on ne fléchit en aucune manière; le 2d, de~ celui qu' on ne fléchit point par les prières; le 3e de celui, qu' on ne fléchit point par les signes de la douleur; le 4e, de celui dont on ne fléchit pas la colère. _ Le 1er parait être le genre, et les autres les espèces. ROUB. Syn.

INFLÉXION


INFLÉXION, s. f. [Inflek-cion: 1re lon. 2e é fer.] Il se dit proprement des changemens de la voix, lorsqu' elle passe d' un son à l' aûtre. "Il a des infléxions de voix charmantes. = On le dit aussi de la facilité plus ou moins grande à faire ces changemens. "Cet Orateur n' a point d' infléxion dans la voix.
   Infléxion de corps, disposition~ naturelle à plier, incliner le corps.
   INFLÉXION, en Gramaire, c' est la variation des noms et des verbes en des câs, ou en des tems, ou en des modes diférens. Dict. Gram. "L' inflexion des noms, des verbes, la manière, dont les noms se déclinent, dont les verbes se conjuguent. Acad.

INFLICTION


INFLICTION, s. f. INFLIGER, v. act. [Inflik-cion, fligé.] Ils expriment l' action de l' autorité qui impôse une peine. "Infliger une peine, un châtiment. "L' infliction d' une peine. = Infliction ne se dit qu' au Palais. Infliger est du langage comun.

INFLUENCE


INFLUENCE, s. f. INFLUER, v. n. [In--flu-ance, influ-é: 1re lon. 3e lon. au 1er, é fer. au 2d: l' u est long devant l' e muet: il inflûe. Au futur, cet e muet se suprime dans la prononciation, et les Poètes le retranchent même dans l' ortographe: il influera, influeroit: pron. inflûra, inflûrè.] = Influence se disait aûtrefois des vertus prétendûes, qui découlent des astres. "Bone, maligne influence. = On ne le dit plus qu' au fig. "Il a eu beaucoup d' influence dans cette afaire. "Les premières démarches influent, ou ont beaucoup d' influence sur le reste de la vie.

INFORMATION


INFORMATION, s. f. INFORMER, v. act. [Informa-cion, .] Informer, c' est 1°. Avertir, instruire. "Informez-moi de ce qui se passe. = S' informer, s' enquérir. "S' informer de la vérité du fait. * Racine, gêné par la mesure du vers, lui fait régir l' acusatif de la chôse, comme de la persone.
   Ne vous informez point ce que je deviendrai.
Il falait dire, de ce que je deviendrai. En français, aucun verbe ne régit deux acusatifs. D' Oliv. = Dans le Dict. Gram. on reprend Molière d' avoir dit:
   Cet Enrique, dont hier je m' informois à vous.
On prétend qu' il faut dire, dont je m' informais auprès de vous. _ Mais il y a plusieurs exemples de ce régime du datif de la persone. "Je m' en suis informé à tous ceux que je conoissais. Acad. etc. Fénélon emploie l' ablatif. "Un de ses Oficiers, qui fut chargé de s' informer de ceux qui avoient pris notre vaisseau, si nous étions éfectivement ou Grecs ou Phéniciens. Télém. Ce régime indique un aûtre sens; je me suis informé de vous, de ce qui vous regarde. "Pendant près de 20 ans, il n' a pas daigné s' informer d' un ami, qui lui a sauvé la vie; d' un fils unique, etc. Ann. Litt. = Informer est neutre au Palais. Informer contre quelqu' un, faire une enquête, une information contre lui. _ On le dit aussi au passif, impersonel. "Il sera informé des vie et moeurs de, etc. On informera de, etc. "Une union (de bénéfices) ne peut être valable, si l' on n' informe point des causes de l' union, etc. Cochin.
   INFORMÉ, ÉE, adj. "Bien ou mal informé. = S. m. "Un plus ample informé, se dit au Palais, quand le Juge n' est pas assez instruit, et qu' il ordonne qu' il en sera plus amplement informé.
   INFORMATION, au Palais, action d' informer. Faire des informations. = Dans le langage comun: action de s' informer; prendre des informations, aller aux informations.

INFORME


INFORME, adj. Imparfait, qui n' a pas la forme qu' il devrait avoir. "Masse, animal informe; acte, pièce informe, ouvrage informe.

INFORMER


INFORMER. Voy. INFORMATION.

INFORTUNE


INFORTUNE, s. f. INFORTUNÉ, ÉE, adj. [4e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Malheur. Malheureux. Ceux-ci sont de tous les styles: les aûtres conviènent mieux dans le style élevé. "Tomber dans l' infortune. "Grand dans l' infortune. "L' infortune est bien propre à raprocher les hommes dans tous les climats. St. Pierre.
   Epouse vertueuse autant qu' infortunée.
       La Chaussée.
Prince infortuné. _ Infortuné Prince sonerait mal: mais, infortunés guerriers; infortuné trésor ne déplaisent pas, comme infortunés hôtes. (Hist. d' Angl.) Cet infortuné Roi (An. Litt.) Cet infortuné globe. (Linguet.)

INFRACTION


INFRACTION, s. f. INFRACTEUR, s. m. [Infrak-cion, teur.] Transgression. Transgresseur. "Infracteur des lois. Infraction des Traités. _ Avec le verbe faire, on dit, aux Lois, aux Traités; mais il semble que quand il est seul, infraction n' a pas ce régime. "L' infraction aux lois du Royaume. Mém. de Me. Cochu. Une nouvelle infraction aux règles de l' ordre judiciaire. = L' Acad. met infraction au traité, ou contre le traité. J' avoûe que cet infraction contre, me parait bisârre. _ On dit, contrevenir aux ordonances, et enfreindre les ordonances: il est donc naturel de dire, infraction des ordonances, et contravention aux ordonances. = C' est une règle assez générale, que quand le verbe régit l' acusatif, le nom qui en est dérivé régisse la prép. de; et que quand le verbe régit le datif, le nom régisse la prép. à: telle est l' analogie de la langue.

INFRUCTUEûSEMENT


INFRUCTUEûSEMENT, adv. INFRUCTUEUX, EûSE, adj. [Infruktu-eû-zeman, tu-eû, eû-ze: 4e lon. 5ee muet.] Infructueux, qui ne raporte point de fruit, ou qui en raporte fort peu. Infructueûsement, sans profit, sans utilité. "Champ infructueux: {B468a~} année infructueûse. _ Et fig. Travail infructueux~, peine infructueûse. "Travailler infructueûsement~. = On les dit plus souvent au fig. qu' au propre, sur-tout l' adjectif.

INFUS


INFUS, ÛSE, adj. INFUSER, v. act. INFUSION, s. f. [Infûs, fûze, fuzé, fu-zion: 1re lon. 2e lon. aux 2 1ers, 3e e muet au 2d, é fer. au 3e.] L' adjectif ne se dit qu' au fig. et il a un emploi très-borné: science infûse, savoir infus, sagesse infûse; qu' il a plu à Dieu de répandre dans des homes privilégiés. = Le verbe ne se dit qu' au propre. Faire infuser du séné; de la rhubarbe dans du vin: les mettre tremper dans quelque liqueur, afin qu' elle en tire le suc. Infuser à froid; infuser à chaud. _ Le subst. se dit au propre, pour l' action d' infuser, et pour la liqueur où les drogues ont séjourné: une infusion de séné; et au fig. Les Apôtres avaient les dons des langues par infusion. Il ne se dit dans ce style que dans cette ocasion.

INGAMBE


INGAMBE, adj. [Inganbe: 2e lon. 3e e muet.] Léger, alerte. "Il est ingambe. Style familier.

INGÉNIER


INGÉNIER (s' ) v. réc. [Ingéni-é: 2e et dern. é fer.] Tâcher de trouver dans son esprit quelque moyen de réussir. "Ingéniez-vous pour sortir de cet embârras. = Ce mot déplait à bien des gens. L' Abé Des Fontaines l' a mis dans le Dict. Néol. Fréron le critique dans M. Cailhava. L' Acad. l' admet pour le style fam. C' est un mot de conversation, et on s' en sert sur tout à l' infinitif. "Il faut s' ingénier.

INGÉNIEUR


INGÉNIEUR, s. m. [2e é fer.] Celui qui possède l' Architecture militaire, et qui trace et conduit les travaux pour l' ataque et la défense des places.

INGÉNIEUX


INGÉNIEUX, EûSE, adj. INGÉNIEûSEMENT, adv. [Ingénieû, eû-ze, eû-zeman, 2e é fer. 4e lon. 5e e muet.] Ils se disent, et des persones qui ont du génie, et des chôses qui en anoncent et en marquent, dans celui qui les fait. "Homme ingénieux: femme ingénieûse. "Ouvrage fort ingénieux. "Machine, invention, composition ingénieûse: répartie tout-à fait ingénieûse. "Il a traité ce point fort ingénieûsement. "Cela est ingénieûsement dit.
   REM. Ingénieux aime à suivre le subst. En vers, il peut précéder. "Ingénieux Poète! Gresset. "Vaugelas parle d' un des plus beaux et des plus ingénieux esprits du siècle. L' inversion est dûre. = Ingénieux régit quelque--fois la prép. à et l' infinitif. "Le vice, ingénieux {B468b~} à se déguiser, "Elle est ingénieûse à se tourmenter. "J' admire combien vous êtes ingénieux à augmenter votre infortune. Marin, Julie.

INGÉNU


INGÉNU, ÛE, adj. INGÉNUITÉ, s. f. INGÉNûMENT, adv. [2e é fer. 4e lon. au 2d et au dern. nû-e, nûman. On écrivait aûtrefois ingénuement.] Ils expriment une franchise mélée de naïveté et de simplicité. "Homme ingénu; discours, air, aveu ingénu. "Il a dit cela ingénûment, de la manière la plus ingénûe. "Elle montre une grande ingénuité dans son air, dans ses paroles. L' Amante Ingénûe: Comédie de M. Marin.

INGÉRER


INGÉRER (s' ) v. réc. [2e et 3e é fer.] Se méler de quelque chôse sans en être requis. Il régit dans, pour les noms, et de pour les verbes. "S' ingérer dans les afaires d' autrui. "Il s' ingère de doner des avis.

INGRAT


INGRAT, ATE, adj. INGRATITUDE, s. f. 1°. Ils marquent un défaut de reconnoissance pour un bienfait reçu. Quand ingrat se dit absolument, en parlant des persones, on le dit substantivement: "C' est un ingrat. "Vous n' obligerez pas un ingrat. "Il devroit y avoir des lois pour punir les ingrats. = Il se dit adjectivement avec la prép. envers. "Ingrat envers Dieu, envers son Bienfaiteur. Vaugelas a dit, ingrat à la fortune; et Racine, ingrate à vos bontés. Patru a critiqué le 1er, et d' Olivet le 2d. Leur critique est très-juste. Voltaire a aussi critiqué dans Corneille: ingrat à ses mérites, et il a dit lui-même, ingrat à tes bontés, ingrat à ton amour. M. l' Abé Roubaud pense qu' on dit, ingrat aux chôses, et ingrat envers les persones. Il prétend qu' on dit; une terre ingrate à la cultûre; une pierre ingrate au ciseau; un esprit ingrat aux leçons; une persone ingrate à nos soins. = Ingratitude se met, ou absolument, ou avec le même régime qu' ingrat. "Les gens de bien détestent l' ingratitude. "Son ingratitude envers vous l' a fait abandoner de tout le monde.
   Crois-tu qu' il soit une peine plus rude,
   Que celle de se voir noirci d' ingratitude?
   Non: le coeur d' un ingrat est toujours agité:
   Et je crois qu' un damné n' est pas plus tourmenté.
       Destouches.
  Fi, morbleu! les ingrats ne valent pas le diable.
      Id.
= 2°. Ingrat se dit des chôses, pour, stérile, infructueux "Travail ingrat: terre ingrate. "Étude, afaire ingrate: "Ces mêmes professions, selon nous, si ingrates et si stériles pour la vertu, furent pour les Saints, riches et fertiles en mérites. Ségaud. Ou qui fournit peu à l' esprit dans les compositions; sujet ingrat, matière ingrate. = Le subst. ne se dit point des chôses. On ne dit point, l' ingratitude d' une terre, d' un travail, d' un sujet, etc.
   Rem. Quand on parle du vice de l' ingratitude, on met toujours ce mot au singulier. On dit, même en parlant de plusieurs, leur ingratitude, et non pas leurs ingratitudes. Le pluriel signifie non le vice, mais les actes qu' il a produits. "Vous servez Dieu, comme s' il étoit aveugle à vos infidélités et à vos ingratitudes. La Rue. "Les fréquentes ingratitudes qu' on éprouve. Moncrif.
   On fait un long récit de mes ingratitudes.
       Rac. Brit.

INGRÉDIENT


INGRÉDIENT, s. m. [Ingrédi-an: 2e é fer. dern. lon.] Ce qui entre dans la composition d' un remède, d' un vernis, etc. "Il entre bien des ingrédiens dans, etc. "Il y a trop d' ingrédiens. = Par extension on le dit d' une sauce, d' un ragoût.

INGUÉRISSABLE


INGUÉRISSABLE, INGOUVERNABLE, adj. Qui ne peut être guéri: qu' on ne peut gouverner. "Ce mal est inguérissable. "Cet esprit fier et presque ingouvernable. Le Laboureur sur Castelnau. "Alors nos vaisseaux étoient ingouvernables. Journ. Polit. = Ingouvernable n' est point dans les Dictionaires. Inguérissable est dans Trév. Ce sont des mots de conversation, qui se disent et ne s' écrivent point. Voy. INCURABLE.

INHABILE


INHABILE, adj. INHABILITÉ, s. f. [l' h est muette: i-nabile, bilité.] Il ne faut pas confondre ces mots avec incapable, incapacité. Ceux-ci dénotent un défaut de talens et de lumières; les aûtres marquent seulement le défaut de certaines qualités requises pour certaines fonctions. "Il est inhabile à posséder aucun bénéfice: il est incapable d' en remplir les obligations. La condamnation aux galères emporte inhabilité à recueillir aucune succession. "Son incapacité pour remplir ce poste est reconûe de tout le monde. = Boileau done à inhabile le sens d' inutile.
   Mais pour moi, de Paris Citoyen inhabile.
Il aurait pu, il aurait du, et peut-être voulu mettre inutile, mais il avait besoin de ce mot pour le vers suivant, ce qui ne le justifie pourtant pas.

INHABITALBE


INHABITABLE, INHABITÉ, ÉE, adj. [Inabitable, , té-e: 4e dout. au 1er, é fer. aux 2 aûtres.] Le 2d se dit de ce qui n' est point habité, et le 1er de ce qui ne peut l' être. "Lieux inhabités. "Pays, maison inhabitable. = La Bruyère emploie celui-ci dans un sens, qui parait contraire au sens naturel, mais qui est piquant dans la circonstance. "Un Bourgeois se fait bâtir un Hôtel si beau, si riche et si orné, qu' il est inhabitable. Le maître, honteux de s' y loger, se retire au galetas.

INHABITUDE


*INHABITUDE, s. f. Défaut d' habitude. Mot forgé par M. de Condorcet. Il dit, en parlant de la déclamation d' un Comédien, que, par parenthèse, il apèle mal-à-propos, la diction; "C' est de l' inhabitude de phraser, et de moduler que naissent ces transitions brusques, qui étonent sans séduire. "Je passe, dit M. Linguet, l' inhabitude, pour le défaut d' habitude. L' usage ne sera pas peut être aussi complaisant. Inhabitude serait pourtant un mot utile. Il est à souhaiter qu' il passe.

INHÉRENCE


INHÉRENCE, s. f. INHÉRENT, ENTE. adj. [Inérance, ran, rante: 2e é fer. 3e lon. 4e e muet.] Termes de Philosophie, qui expriment la jonction des chôses. "L' inhérence de l' accident à la substance. "L' accident est inhérent à, etc.

INHIBER


INHIBER, v. act. INHIBITION, s. f. [I-nibé, bi-cion: 3e é fer. au 1er.] Termes de Palais. Défendre, défense. "Nous avons inhibé et défendu. "L' Ordonance porte défenses et inhibition à... de, etc.

INHOSPITALITÉ


INHOSPITALITÉ, s. f. [Inospitalité: dern. é fer.] Défaut d' hospitalité. "Irez-vous vous exposer à la barbarie et à l' inhospitalité de ces peuples?

INHUMAIN


INHUMAIN, AINE, adj. INHUMAINEMENT, adv. INHUMANITÉ, s. f. [I-nu-mein, mène, mèneman, manité: 3e è moy. 4e e muet au 2d et au 3e.] Cruel. Cruellement. Cruauté. Ce qui est contraire à l' humanité. "Tyran, maître inhumain. Action inhumaine. Loi, coutume inhumaine. "Traiter quelqu' un inhumainement, avec inhumanité. "Exercer de grandes inhumanités.

INHUMATION


INHUMATION, s. f. INHUMER, v. act. [I-numa-cion, : 3e é fer. au 1er.] Enterrement. Enterrer. Ceux-ci sont plus vulgaires; les autres plus nobles et plus recherchés. "Inhumer les corps, les morts. On l' inhuma dans le cîmetière. "Les frais de l' inhumation.

INJèCTER


INJèCTER, v. act. INJèCTION; s. f. [Injèkté; jèk-cion: 2eè moy. 3e é fer. au 1er.] Ils expriment l' action de jeter avec une seringue quelque liqueur dans une plaie. "Injècter une plaie. "Faire des injèctions.

INIMAGINABLE


INIMAGINABLE, adj. Qui ne se peut imaginer. Il est dans d' Ablancourt: on le dit souvent: mais on ne l' écrit guère. L' Acad. le met sans remarque.

INIMITABLE


INIMITABLE, adj. Qui ne peut être imité. "Homme, action inimitable. Il est plus usité que son simple imitable. = Quand on veut signifier qu' une chôse ne doit pas être imitée, il ne faut pas se servir d' inimitable. Quelques Auteurs ont fait cette méprise. Il faut dire simplement, qu' on ne doit pas l' imiter.

INIMITIÉ


INIMITIÉ, s. f. [I-nimi-tié: dern. é fer.] Haine, aversion. "Avoir, concevoir de l' inimitié contre quelqu' un. "Encourir son inimitié.

ININTELLIGIBLE


ININTELLIGIBLE, adj. [I-nein-téligi--ble: 2e lon. 3e é fer.] Qu' on ne peut pas entendre. "Ce discours est inintelligible.

INJONCTION


INJONCTION, s. f. [Injonk-cion, en vers ci-on: 2e lon.] Comandement exprès. "On a fait injonction à tous les habitans de prendre les armes. "L' Arrêt porte injonction à un tel de, etc.

INIQUE


INIQUE, adj. INIQUEMENT, adv. INIQUITÉ, s. f. [Inike, keman, kité: 3e e muet aux 2 premiers.] Ils ne se disent qu' en parlant des Juges, et expriment ce qui est contre l' équité. "Juge, arrêt, conseil inique. "Juger iniquement. "L' iniquité des Juges, des Jugemens. = Iniquité sans régime, signifie dans le langage de la Religion, crime, péché. "Boire l' iniquité comme l' eau. "Enfant d' iniquité: c' est le comble de l' iniquité. "Notre Seigneur s' est chargé de nos iniquités.
   Fermez les yeux sur mes offenses,
   Et du livre de vos vengeances
   Effacez mes iniquités.
       Le Franc.

INITIALE


INITIALE, adj. [Ini-cia-le: dern. e muet.] Lettre initiale; lettre qu' on met à la tête des chapitres, des alinéa et des noms propres. Les Imprimeurs disent au masc. Un A, un C, un D initial, etc.

INITIATION


INITIATION, s. f. INITIER, v. act. [Inici-a-cion, ci-é.] Ils se disent proprement de l' admission dans les Mystères chez les Païens. "Les cérémonies de l' initiation. "Il se fit initier aux Mystères de Cèrès, de Bacchus. = Par extension, on le dit de quelque religion que ce soit. = Fig. "Être initié dans une science, dans une société, y être admis, être reçu au nombre de ceux, qui la compôsent.
   Dans ta Justice et ta sagesse,
   Quand tu m' auras initié;
   À~ tes élus associé,
   Mes hymnes te loûront sans cesse.
       Le Franc.

INJûRE


INJûRE, s. f. INJURIER, v. act. INJURIEUX, EûSE, adj. INJURIEûSEMENT, adv. [Injûre, jurié, ri-eû, eû-ze, eû-zeman. 2e lon. au 1er. 4e lon. 5ee muet.] Injûre, tort, outrage. Injurier, dire des injûres. Injurieux, outrageux, ofensant. Injurieûsement, d' une manière injurieûse. "Faire injûre, ou une injûre à quelqu' un. "Oublier, pardoner les injûres.
   Je ne veux point, dit-il, me répandre en injûres.
       Destouches.
"Il m' a injurié. "Il injurie tout le monde. "Discours, écrit injurieux pour la Religion; injurieux à sa gloire. "Parler injurieûsement contre quelqu' un: le traiter injurieûsement.
   Injûre, invective, (synon.) Le 1er consiste dans les termes; le 2d, dans les chôses et la manière. "Le mépris, l' insolence injurient: la colère, le zèle invectivent. Une injure, dite de sang froid, est plus piquante qu' une longue invective, parce qu' il vaut mieux exciter une grande colère que le mépris, etc. ROUB. Synon.
   REM. 1°. Faire injûre, ou une injûre, et dire une injûre, des injûres, sont deux chôses diférentes. Le 1er signifie faire tort, injustice, (Voy. TORT.) le 2d veut dire, parler à quelqu' un en termes injurieux. Madame de Sévigné les réunit tous deux dans la même phrâse. "Je vous avertis, Ma très-chère, que vous n' aimez point à lire, et que votre fils tient cela de vous. Je vous dis cette injûre, pour me venger de celle, que vous m' avez faite.
   2°. Richelet dit, tirer quelque chôse à injûre: cette expression n' est point de l' usage actuel. On dit, tenir, réputer à injûre. = On dit figurément, les injûres de l' air; l' injûre du tems, de la fortune. "Déguiser l' injûre de ses vieux ans. Corn. Le sort, le destin injurieux, la fortune injurieûse.
   3°. INJURIEUX, ne se dit que des chôses, qui ont raport à la persone. * Bossuet le dit des persones mêmes. "Le St. Esprit nous ayant montré deux moyens de conoître la vérité (l' Écritûre et la Tradition) nous serions injurieux envers lui, si nous négligions l' un des deux. _ Cela n' est pas à imiter.

INJUSTE


INJUSTE, adj. INJUSTEMENT, adv. INJUSTICE, s. f. [Injus-te, teman, tice: 3e e muet aux 2 premiers.] Ils se disent de ce qui est contre la justice. "Homme, arrêt, sentence, guerre, demande injuste. "Moyens injustes. "Il a été condamné injustement. "Procédé plein d' injustice. "Comettre des injustices. "Il y a un Dieu, qui permet l' injustice des Hommes, et qui ne la fait pas. Le Comte de Valmont.
   INJUSTE, suit ou précède, au choix du Poète ou de l' Orateur. "La guerre la plus heureûse est le plus grand fléau des peuples, et une guerre injuste est le plus grand crime des Rois. "Une injuste censûre refroidit les talens. "Son injuste manie. Boil. "L' injuste fortune. Rouss.
   Quel est le prix d' une étude si dure?
   Le plus souvent une injuste censure.      id.
REM. Injustice, ne se dit au pluriel que quand on parle des éfets de l' injustice, et alors ce mot a un sens passif. "J' ai enduré de sa part de grandes injustices. Quand on veut parler du sentiment même oposé à la justice, à la droitûre, on doit se servir du singulier; et alors ce mot a une sens actif. La contrainte de la rime a fait dire à Voltaire.
   Le peuple, pour ses Rois, toujours plein d' injustices,
   Hardi dans ses discours, aveugle en ses caprices.
Le sens demandait plein d' injustice au singulier. = M. Moreau dit, faire injustice sans article. "Ils comencèrent toujours par suposer que le Souverain leur faisoit injustice. "Eudes veut prouver que le Roi lui-même lui a fait injustice. On dit bien, faire, rendre justice; mais je ne crois pas que l' usage admette faire injustice. C' est-là que l' analogie trompe, comme dans beaucoup d' ocasions.

INLISIBLE


*INLISIBLE, adj. Qu' on ne peut lire. On troûve ce mot dans l' Hist. de Russie par Voltaire. "Sa main (de Pierre le Grand) ne forma que des caractères inlisibles. _ Il est contre l' analogie de la Langue. Devant les mots, qui comencent par une l, l' n de la particule in se change en l: illégal, illégitime, etc. Il faut donc dire illisible: mais celui-ci aura de la peine à être admis.

INN


INN: Dans les mots, qui comencent par cette syllabe on ne prononce qu' une n, excepté dans Inné, innomé, innominé, Innovation, innover, qu' on prononce, in-né, in-nova--tion, etc. Dans les aûtres in n' a pas le son d' ein: la 1ren est muette, la 2de se joint avec la voyèle suivante. Innocent, et ses dérivés, innombrable, etc. Pron. I-nosan, i-non--brable; et non pas In-nosan, In-nombrable, et encôre moins Ein-nosan, Ein-nombrable, comme on les prononce dans quelque provinces, trompé par ces deux n, dont il y en a une tout au moins d' inutile. On les conserve, dit-on, pour l' étymologie. Mais en Latin on les prononce toutes deux: pourquoi les transplanter dans une Langue, où l' on n' en prononce qu' une?

INNÉE


INNÉE, adj. f. [In-né-e: 2e é fer. et long.] Qui est né avec nous. "Espèces, idées, qualités, innées. _ Ce mot ne se dit que parmi les savans.

INNOCEMMENT


INNOCEMMENT, adv. INNOCENCE, ou INOCENCE, s. f. INOCENT, ENTE, adj. et subst. [Inosaman, sance, san, sante: 3e br. au 1er, lon. aux aûtres, 4ee muet.] Inocent, 1°. En parlant des persones, qui n' est point coupable, qui est exemt de crime. "Il est inocent du crime dont on l' acuse. "Il a été reconu inocent. = Subst. il a ce même sens au pluriel. "Protéger ou persécuter les innocens. _ Au singulier, quand il est seul, il signifie ordinairement un benet, un imbécille, un homme simple et sans malice. "C' est un inocent. "Vous êtes bien inocent de croire ce que l' on vous a dit. Au fém. il a un sens moins ridicule: "Une paûvre inocente. _ On ne l' emploie en bone part et dans son sens naturel que quand il est oposé à coupable. "Il vaut mieux sauver mille coupables que de faire mourir un inocent. "Il ne sufit pas de renvoyer un inocent absous, il faut encôre lui laisser la liberté de demander vengeance de la calomnie. Cochin. Dans cette phrâse, le mot absous détermine le sens d' Inocent. = 2°. En parlant des chôses, qui ne nuit point. "Remède inocent. = 3°. Pur et candide: "Esprit innocent, âme inocente.
   INOCENCE, état de celui, qui est inocent. "Il a conservé son inocence. "Il a prouvé; on a reconu l' inocence de ses vûes. = L' âge d' inocence; l' enfance. = Trop grande simplicité. "Cet homme est d' une grande inocence. "Admirez son inocence.
   Rem. Inocence est souvent personifié, et se dit pour les hommes inocens.
   Dieu vengeur de l' inocence.
       Le Franc.
INOCEMMENT, avec inocence, sans mauvais dessein. "Il a vécu inocemment. "Je l' ai fait inocemment. = Sotement, niaisement. "Il est venu inocemment raconter la sotise qu' il avoit faite.
   Rem. 1°. Inocent peut quelquefois marcher devant le substantif. "Les inocentes Bergères. Télém.
   Elle croit que l' hymen est un engagement,
   Dont son sexe est toujours l' inocente victime.
       La Chaussée.
  Offrez d' innocentes fêtes
  À~ l' Auteur de vos destins.
    Le Franc.
  Je puis lever au Ciel une innocente main.
       Thom.
On dirait en prôse: des mains inocentes: et peut-être faudrait-il aussi le dire en vers.
   Dans leurs flancs innocens tu conduisois sa main.
       Gress.
Dans leurs inocens flancs serait insuportable.
2°. Le peuple confond ridiculement les divers sens d' inocent. Marivaux fait dire inocemment à une fille de boutique, au sujet de quelqu' un qui avait été mis en prison par méprise: "Si jamais quelqu' un a eu la mine d' un innocent, c' étoit vous assurément. Elle voulait dire: a eu l' air d' être inocent.
   3°. Inocence n' a point de pluriel. Un Auteur a dit: leurs innocences. On dit, même en parlant de plusieurs, leur inocence.

INNOCENTER


INNOCENTER, v. act. [I-no-santé: 3e lon. 4e é fer.] Absoûdre, déclarer inocent. Il n' est pas du beau style.

INNOMBRABLE


INNOMBRABLE ou INOMBRABLE, adj. [I-nonbrable: 2e lon. 3e dout.] Qui ne se peut nombrer. "Nombre, multitude, inombrable. = On a dit anciènement innumérable. = Cet adjectif suit ordinairement: il peut quelquefois précéder. "Autour de ce trône sont d' innombrables esprits, etc. Jér. Dél. "Ses Innombrables vaisseaux. Rouss. "D' innombrables essains. De Lille. = Plusieurs n' aiment pas nombre inombrable; mais l' usage l' a admis; et cette expression n' a rien de ridicule. On le dit par exagération d' un nombre, qui ne peut pas être soumis au calcul. On dit tous les jours: le nombre en était si grand, que je n' ai pu les compter. C' est ce que signifie inombrable.

INNOMÉ


INNOMÉ, INNOMINÉ~, adj. [In-nomé, in-nominé.] Qui n' est point nomé. Le premier se dit en droit: contrat innomé; le second en Anatomie: ôs innominés.

INNOVATEUR


INNOVATEUR, s. m. Quoiqu' on dise innovation et innover, on ne dit point innovateur: le mot usité est Novateur. L. T. On peut dire pourtant qu' innovateur manque à la langue; et que Novateur ne le suplée pas. Celui-ci ne se dit que des opinions, surtout de celles qui sont oposées à la Foi; et pour d' aûtres objets, il ne peut exprimer le sens de celui qui innove. Il serait donc à souhaiter que l' usage admît innovateur. L' Auteur de l' Apothéôse du Dictionaire aprouvait ce mot: mais son opinion n' a pas fait fortune.

INNOVATION


INNOVATION, s. fém. INNOVER, v. act. [On prononce les deux n: in-nova-cion, en vers, ci-on; in-nové.] Ils signifient l' introduction des nouveautés. "Saladin appréhenda les troubles qu' une telle innovation pourroît produire. Marin. "Les innovations sont dangereûses. "Il est dangereux d' innover en matière de Religion, de gouvernement. = Ils se prènent en mauvaise part, et ne se disent que des lois, usages et coutumes. On lit dans l' Ann. Lit. que: "Nos Aïeux admirerent Lulli... ils crurent qu' ayant atteint le dernier degré de la perfection, il n' étoit plus possible de rien innover. Il me semble qu' il aurait été mieux de dire, de rien trouver de nouveau en ce genre. Innover n' a pas ce sens là, qui est pourtant celui de l' Auteur.

INNUMÉRABLE


*INNUMÉRABLE, adj. Il s' est dit autrefois pour innombrable. "D' où s' en sont ensuivis plusieurs grands, et innumérables maux à nous et à la choses publique. Hist de Louis XI.

INOBSERVATION


INOBSERVATION, s. fém. [I-nobsêr--va-cion: 3e ê ouv.] Manque d' obéissance. "L' inobservation des Règles, des Lois. = Manque d' observer. "L' inobservation des traités. _ On a dit aussi inobservance, et Trév. le met; l' Acad. ne le met pas: elle met observance, mais elle lui done un autre emploi.

INOCULATEUR


INOCULATEUR, s. m. INOCULATION, s. f. INOCULER, v. act. INOCULISTE, s. m. [I-nokula-teur, la-cion, , liste.] Inoculation est une opération par laquelle on comunique artificiellement la petite vérole. Ce mot est synonyme d' insertion, cette opération ayant beaucoup de raport avec celle de la grèfe des arbres. On a dabord dit indiféremment, inoculation, insertion, transplantation de la petite vérole. Le premier a prévalu, et l' on dit inoculation, sans ajouter de la petite vérole. Acad. = Inoculer, c' est comuniquer la petite vérole par inoculation. = Inoculateur, celui qui inocule: Inoculiste, partisan de l' inoculation: C' est la diférence de ces deux mots.

INODôRE


*INODôRE, adj. Qui n' a pas d' odeur. On dit dans le Dict. Gram. que ce mot se troûve dans un discours qui a été fort aplaudi, mais qu' il ne parait pas dans le goût de la langue. On l' a employé aussi dans le Journal de Litératûre: "Cette eau est limpide, inodôre, sans goût; et dans l' Ann. Lit. "Ce Recueil est un parterre où l' on trouve quelques fleurs agréables, d' autres inodôres, plusieurs inutiles, et même dangereûses. = Inodôre est un mot très-usité, et le seul pour exprimer ce qui n' a pas d' odeur. Marin. J' avoue sans peine que ce mot est utile, et même nécessaire; mais il ne me parait pas que l' usage l' ait encôre adopté. Tout ce qu' on peut dire, c' est qu' il mérite d' être regardé comme un heureux néologisme, dont on peut bien augurer.

INOFFICIEUX


INOFFICIEUX, adj. masc. Il ne se dit qu' en terme de Jurisprudence. Testament inoficieux, est celui où l' héritier légitime est déshérité sans caûse. L' Ab. Prévot emploie ce mot dans sa Traduction de l' H. des Stuarts de M. Hume. "Les cabales inofficieûses du Roi d' Espagne. C' est un anglicisme: Inofficious.

INONDATION


INONDATION, s. f. INONDER, v. a. [I-nonda-cion, dé: 2e lon. _ le P. Follard écrit innonder, mauvaise ortographe, qui pourrait induire en erreur pour la prononciation.] Ils expriment l' action de submerger, de couvrir un pays par un débordement d' eaux. "Grande, fâcheûse inondation. _ Figurément, une grande inondation de Barbâres: une inondation d' écrits, de brochûres. _ "Le Nil inonde l' Égypte, et la fertilise en l' inondant. "Le Tibre étoit autrefois beaucoup plus large, et plus sujet à inonder la Ville. La Lande. _ Figurém. "Les Goths, les Lombards inondèrent l' Italie. "Nous sommes inondés d' une multitude de mauvais livres. "Ils inondent l' Europe de leurs écrits artificieux.

INOPINÉ


INOPINÉ, ÉE, adj. INOPINÉMENT, adv. [4e é fer. , né-e, néman.] Ils se disent des évènemens qui sont imprévus, et auxquels on ne s' atendait pas, et qui surviènent tout d' un coup. "Accident inopiné: fortune inopinée. = Inatendu ne se dit que du mal, inespéré que du bien. Inopiné se dit de l' un et de l' autre. = "Cela est arrivé inopinément. "Il arriva inopinément, sans qu' on attendît son arrivée, ou qu' on la crut si prochaine.

INOUï


INOUï, IE, adj. [I-nou-ï, î-e: 3e lon. au 2d.] Qui est tel qu' on n' a jamais rien ouï dire de semblable. "C' est une chôse inouïe, des cruautés inouïes. "Il est inouï que, etc. = Ce mot est à la mode: on lui done le sens de singulier, étrange. "Il est inouï que cette petite fille ait pris l' alarme sur un mot que je lui ai dit en passant. Th. d' Éduc. C' est un Petit-Maître, qui parle.

IN-PROCÉDûRES


*IN-RPOCÉDûRES, s. fém. pl. Irrégularités dans les Procédûres. Mot nouveau, à ce que je crois, employé par un Magistrat dans une Lettre imprimée. Si ce mot était usité, il faudrait écrire improcédûre, avec une m; car in change l' n en m devant le b et le p: imbiber, impatient, impérieux, improbable. Il n' y a d' excepté, dans mon opinion, que in-promptu, qui est moins un mot composé que deux mots latins, unis par un tiret.

IN-PROMPTU


IN-PROMPTU, s. m. [On prononce le 2d p.] Ce qui se fait sur le champ; comme une Épigramme, et autre pièce de quelques vers, faites sans préméditation. Faire un in-promptu, des in-promptu. Il ne prend point d' s au pluriel. On apèle par plaisanterie un in-promtu fait à loisir, ce qu' on a prémédité, et qu' on done comme venu sur le champ dans l' esprit. = Figurément, In-promptu se dit de tout ce qui se fait sans préparation. "Ce dîner, ce concert était un in-promptu. = M. l' Ab. Grosier. écrit Im-promptu, comme l' Académie, et l' emploie adjectivement, ce que l' Acad. ne fait pas. "Un voyage aussi impromptu anonce-t-il un projet médité? _ Voy. Im-promptu et In-procédûres.

INQUIèT


INQUIèT, ÈTE, adj. INQUIÉTANT, ANTE, adj. INQUIÉTER, v. act. INQUIÉTUDE, s. fém. [In-kiè, kiè-te, kié-tan, tante, : 2e è moy. au 1er et au 2d. é fer. aux autres; 3e lon. au 3e et 4e.] Inquiétude, agitation d' esprit, impatience causée par quelque passion. Inquiet, qui est en inquiétude. Inquiéter, rendre inquiet. Inquiétant, qui inquiète. "Cela le rend inquiet; elle est inquiète sur cette afaire. "Elle est fort inquiétante: elle l' inquiète extrêmement. "De quoi vous inquiétez-vous? "D' où viènent ces inquiétudes? "Je l' ai tiré d' inquiétude. "Cette affaire leur causoit beaucoup d' inquiétude. P. Fabre. "Embarrassé de sa dignité, et rongé d' inquiétude. Le P. Fontenai, Hist. de l' Égl. Gall.
   Rem. 1°. Il ne faut pas confondre, être inquiet, être inquiété et s' inquiéter. Le 1er ne signifie qu' une certaine situation de l' âme, sans qu' on ait égard à la caûse d' où cette situation peut venir: le 2d renferme tout à la fois, et l' idée de cette situation, et l' idée d' une caûse étrangère d' où elle vient. Enfin, par s' inquiéter, nous entendons que l' âme qui est dans cette situation, agit sur elle-même. ("Vous êtes inquiet sans savoir pourquoi: vous vous plaignez que vous êtes continuellement inquiété par tout le monde; c' est vous qui vous inquiétez à tout propôs et sans raison.) D' après ces principes, M. l' Ab. d' Olivet trouve à redire à ces vers de Racine.
   Mon ame inquiétée
   D' une trop juste crainte est sans cesse agitée.
       Alex.
La Grèce en ma faveur est trop inquiétée.
Androm.
Il prétend avec raison, qu' il falait dans le 1er exemple, mon âme inquiète; et dans le 2d, la Grèce s' inquiète trop. _ M. Rac. le Fils condamne cette critique. "Ne dit-on pas dans la conversation, dit-il: vous vous inquiétez trop? Pourquoi ne dirait-on pas votre ame est trop inquiétée? Pourquoi? Parce qu' on ne dirait pas vous êtes trop inquiété; parce que s' inquiéter et être inquiété n' ont pas le même sens.
   2°. Inquiet a une signification diférente, suivant qu' il régit de ou sur: la 1re de ces prépositions exprime la caûse de l' inquiétude; la 2e en exprime l' objet. "Je suis fort inquiet de ce triste évènement, exprime le chagrin qu' il me caûse; je suis fort inquiet sur ce qui en résultera, exprime ma crainte sur ses suites. * "Inquiets de l' indépendance et de la liberté de leur pays, ils eurent soin de régler des conditions, etc. Hist. d' Angl. _ La prép. sur aurait été plus convenable en cet endroit. Car ils (les Écossais) n' étaient pas chagrins de leur indépendance, au contraire; mais ils craignaient de la perdre.
   3°. Inquiet se dit des chôses qui ont raport à la persone. "Joie inquiète; esprit, caractère, tempérament inquiet. "Humeur inquiète. = Pour inquiétude, on le dit non seulement de l' âme, mais du corps. "Elle a des inquiétudes aux jambes. Sév. "Ce malade a passé la nuit dans une grande inquiétude, dans de grandes inquiétudes. Acad. On dit, en ce sens, malade inquiet; sommeil inquiet.
   4°. Inquiétant, employé adjectivement, peut être regardé comme un néologisme heureux. "La situation la plus inquiétante. Moreau. "Ce cortège dut paroître inquiétant aux, etc. Linguet. "Ces incursions qui avoient été si inquiétantes pour ses prédécesseurs. Hist. d' Angl. "Un voisinage si inquiétant. Ibid.

INQUISITEUR


INQUISITEUR, s. m. INQUISITION, s. fém. [Inkizi-teur, zi-cion.] L' Inquisition est un Tribunal établi en certains pays pour rechercher et pour punir ceux qui ont des sentimens contraires à la Foi. Inquisiteur, Juge de l' Inquisition. "Grand Inquisiteur. Inquisiteur de la Foi. "Pays d' inquisition. "Il a été mis à l' inquisition. = * De bons Auteurs se sont servis d' inquisition, au lieu de perquisition; mais l' Acad. dit que dans ce sens il n' a guère d' usage.

INSAISISSABLE


INSAISISSABLE, adj. Qui ne peut être saisi. Mot forgé par M. Linguet. "L' usage variant sans cesse dans une langue vivante, c' est une folie de créer à grands frais une Cour pour enchaîner ce prothée insaisissable. = M. Marin pense qu' on dit, des biens insaisissables; une pension insaisissable; et que ce mot n' est, ni forgé, ni nouveau. Je crois bien que ce mot peut se dire au Palais, et quelquefois en conversation. Mais, et en conversation, et au Palais, on ne se fait pas une peine de forger des mots. Celui-ci n' est dans aucun Dictionaire; et je ne me souviens pas de l' avoir lu dans aucun autre Auteur que M. Linguet. Du reste, il peut être utile, et il est à souhaiter que l' usage l' adopte.

INSALUBRE


*INSALUBRE, adj. INSALUBRITÉ, s. f. Ils se disent de ce qui est mal sain. "Les logemens sont humides, et dans des expositions insalubres. M. Raymond, Méd. et Acad. de Marseille. "Cette mortalité est ocasionée (à Ste. Lucie) par l' insalubrité de l' air. Journ. Polit. "L' insalubrité de ces places de garnison. _ Ce sont des mots nouveaux, dont ont peut bien augurer.

INSATIABILITÉ


INSATIABILITÉ, s. f. INSATIABLE, adj. INSATIABLEMENT, adv. [Insaci-abili--lité, able, ableman: 5e e muet aux deux dern.] Au propre, ils se disent d' une avidité de manger, qui ne peut se rassasier; au figuré, d' une passion que rien ne peut satisfaire. "Il a une insatiabilité que rien ne peut assouvir. "Insatiabilité de gloire, de richesses. "L' insatiabilité de l' avarice, de l' ambition. _ "Apétit, faim insatiable. "Avarice, ambition insatiable. "Il est insatiablement avide de gloire, d' honeur. = Suivant le P. Bouhours, on emploie insatiable seul et sans régime. Il condamne insatiable de bien, insatiable de voir. L' Académie done des exemples du régime des noms. "Insatiable de gloire, d' honeur, de richesses, de louanges. Ce régime parait usité. = Celui des verbes est douteux. "Cette émulation sainte, non moins insatiable de vertus et de mérites que l' ambition humaine est avide des honeurs du monde. Le P. Le Chapelain.

INSCRIPTION


INSCRIPTION, s. f. INSCRIRE, v. act. [Le p. se prononce dans le premier; 2e lon. dans le 2d.] Inscrire, c' est écrire dans un registre public. "Inscrire dans un registre. "Se faire inscrire, s' inscrire. = Au Palais, s' inscrire en faux, soutenir en justice qu' une pièce, produite par la partie adverse, est faûsse. _ Cette expression a pâssé dans le langage comun. "Je m' inscris en faux contre ce que vous dites. "Je ne sais pas contre laquelle de ces assertions un Cartésien peut s' inscrire en faux.
   INSCRIPTION, titre renfermé en peu de paroles, et gravé sur le cuivre, le marbre, etc. "On trouve encôre en Italie beaucoup d' inscriptions antiques. = Inscription en faux est au Palais, un acte par lequel on s' inscrit en faux, Voy. plus haut. Le verbe a pâssé dans le discours ordinaire: le subst. est resté au Palais.

INSCRUTABLE


INSCRUTABLE, adj. Impénétrable. Il ne se dit qu' en termes de l' Écritûre. Les décrets, les jugemens de Dieu sont inscrutables.

INSÇU


INSÇU, s. m. Puisqu' on écrit aujourd' hui savoir, j' ai su, et non pas, comme autrefois, sçavoir, j' ai sçu, il semble qu' on devrait aussi écrire insu, et non pas insçu. = Il ne se dit qu' adverbialement avec à et les pronoms possessifs: à mon insu, à votre insu, à son insu, ou avec de, etc. sans que j' en eusse conaissance, ou que vous en eussiez, ou il en eût, etc. "Il l' a fait à mon insu, à l' insu de tout le monde. "Il s' est marié à l' insu de ses parens. = * Plusieurs disent à l' issue pour à l' insu, trompés par la ressemblance de ces deux mots.

INSèCTE


INSèCTE, s. m. [2e è moy. 3e e muet.] Petit animal dont le corps est coupé comme par anneaux; et c' est de là que lui vient son nom. "Les vers, les fourmis, les mouches, les hannetons sont des Insectes. = Les ignorans disent inceste. Un Sacristain se plaignait que les incestes eussent ataqué les gredins et les buses de l' Autel.

INSENSÉ


INSENSÉ, ÉE, adj. [Insansé, sé-e: 2e long. 3eé fermé.] Fou, folle, qui a perdu le sens. "Homme insensé, femme insensée. = Subst. "Il parle, il agit, il court par les rûes comme un insensé. = Il se dit aussi des chôses qui ont raport à la persone. "Discours insensé. "Action, démarche, conduite, passion insensée. = Insensé s' emploie élégamment en exclamation. "Insensé! Qui croit que sa fureur peut balancer les décrets de l' Être suprême. Jér. Dél. "Une femme est volage, indiscrète: elle veut, elle ne veut plus. Insensé, qui s' endort sur la foi de ses promesses!

INSENSÉMENT


*INSENSÉMENT, adv. Comme un insensé. On dit dans le Dict. Gram. que ce mot, hazardé par un Auteur moderne, est encôre barbâre, et qu' il a l' air de l' être long-tems. On s' était contenté jusqu' à présent de le dire en conversation: on commence à l' écrire. "Galere désespéré, et ne sachant à qui s' en prendre (de la violence de ses maux), faisoit insensément mourir les Médecins. Berault de Bercastel. Histoire de l' Église.

INSENSIBILITÉ


INSENSIBILITÉ, s. fém. INSENSIBLE, adj. INSENSIBLEMENT, adv. [Insancibi--lité, cible, cibleman: 4e e muet au 2d et au 3e.] Le subst. et l' adj. expriment un défaut de sensibilité. Ils se disent au propre et au fig. "Le froid rend souvent certaines parties du corps insensibles; il y caûse l' insensibilité. "Il est insensible à la honte, aux injûres. "Étoit-il permis à... d' être insensible à des maux si pressans. Cochin. "Elle a l' âme dûre et insensible. = S. m. "C' est un insensible, il n' est point sensible à l' amour. "Insensibilité aux reproches. "Vit-on jamais une telle insensibilité?
   Tant de tranquillité
   Peut vous faire acuser d' insensibilité.
       La Chaussée.
= En parlant des chôses, l' adjectif a un aûtre sens, dont on ne peut s' apercevoir. "Le moûvement de l' ombre d' un cadran est insensible. "L' insensible transpiration. _ Insensibilité ne se dit point en ce sens.
   Insensiblement, n' a point la 1re signification du subst. et de l' adj. Il signifie, peu-à-peu, d' une manière peu sensible. "L' eau creûse insensiblement les pierres. "Les abus se glissent insensiblement dans les sociétés les mieux réglées. Une molle oisiveté détruit insensiblement l' ouvrage qu' un travail opiniâtre avoit à peine élevé. D' Aguess. = Insensibilité. Voy. Indifférence. = On dit: être insensible à, et avoir de l' insensibilité pour. M. l' Abé Royou a repris justement M. l' Abé Boulogne d' avoir dit, dans l' Éloge de M. le Dauphin: "Il sait qu' une trop grande insensibilité à l' opinion publique... entraîne toujours les Rois à l' avilissement. Il falait dire, pour l' opinion, etc.

INSÉPARABLE


INSÉPARABLE, adj. INSÉPARABLEMENT, adv. [2e é fer. 5e e muet.] Qui ne peut être séparé. _ D' une manière à ne pouvoir étre séparé. "L' ombre est inséparable du corps: elle lui est inséparablement atachée. _ Inséparable régit de:
   Les délices et l' abondance,
   Inséparables de la paix.
       Rousseau.
"La pensée de la mort est le contrepoids naturel de l' orgueuil presque inséparable de la fortune. Le P. Du Rivet. Employé sans régime, il se dit des chôses et des persones; mais apliqué aux chôses, il signifie, qui ne peut être séparé; et il a un sens passif. Apliqué aux persones, il a un sens actif, et signifie, qui ne se sépare point. "La chaleur et le feu sont inséparables: "ce sont deux amis inséparables.
   Inséparable ami des mortels qui te craignent,
   De leur fidélité je partage l' honeur.
       Le Franc.

INSÉRER


INSÉRER, v. act. INSERTION, s. f. [In--séré, Insêr-cion: 2eé fer. au 1er, ê ouv. au 2d.] Insérer, faire entrer dans... Il ne se dit qu' au fig. "Insérer une pièce dans une Histoire; une claûse dans un contrat. = Insertion, action par laquelle on insère. "Insertion d' un mot dans un discours, etc. _ Voyez INOCULATION.

INSIDIATEUR


*INSIDIATEUR, s. m. C' est un mot de Mrs. de Port-Royal: l' usage ne l' a point adopté~; l' on peut dire que c' est domage.

INSIDIEUX


INSIDIEUX, EûSE, adj. INSIDIEûSEMENT, adv. [Insidi-eû, eû-ze, eû-zeman: 4e lon. 5ee muet. _ Des Imprimeurs écrivent mal-à-propos incidieux avec un c.] Ils se disent de ce qui tend à surprendre quelqu' un. "Présens insidieux: caresses insidieûses. "Faire une demande insidieûsement. = Ces mots n' ont été long-temps d' usage qu' au Barreau. Ils ont pâssé ensuite dans d' autres écrits; mais ils ne sont point du style simple et famil.

INSIGNE


INSIGNE, adj. [Mouillez le g, dern. e muet.] Signalé, remarquable. "Bonheur, malheur insigne. "Grâce, faveur insigne. "Un insigne fripon, faussaire, etc.
   Toi, par tes seuls vices insigne,
   Comment soutiendras-tu l' éfort
   De cent Rois, qu' arme pour ta mort,
   Un courroux, dont tu n' es pas digne.
       Lamotte.

INSIGNIFIANT


*INSIGNIFIANT, ANTE, adj. [Mouillez le g: 5e lon.] Qui ne signifie rien. Mot nouveau, qui atend le sceau de l' usage. "Celle des Danaïdes est bien au-dessus de ces ouvertûres insignifiantes, qui ne peignent rien. Mercûre. "C' est une de ces pièces insignifiantes, si l' on peut se servir de ce terme. Journ. Gén. de Fr.

INSINUANT


INSINUANT, ANTE, adj. INSINUATION, s. f. INSINUER, v. act. [4e lon. aux 2 prem. é fer. au dern. nu-an, ante, nu-a-cion, nu-é: l' u, devant l' e muet, est long: il in--sinûe. Au futur, cet e est entièrement muet, et ne se fait pas sentir: il insinuera, insinuerait: pron., insinûra, insinûré.] Insinuer, 1°. Au propre, c' est introduire doucement: "Insinuer le doigt, la sonde dans une plaie. "L' air s' insinue dans les corps. = 2°. Au fig. Faire entrer adroitement dans l' esprit. "Insinuer de bons ou mauvais sentimens. "Il faut de bone heure insinuer de bons principes aux enfans. "Insinuez-lui que, etc. "Un malheureux (Abailard) que l' afliction préparoit à tout ce qu' on continueroit de lui insinuer avec amitié. Le P. Fontenai. S' insinuer dans l' esprit, dans les bones grâces, dans la bienveillance de, etc. = 3°. S' insinuer, s' introduire. "Il s' insinûe par-tout, dans toutes les sociétés. = 4°. Insinuer, en termes de Palais, enregistrer dans un certain Grèfe qu' on apèle Grèfe des Insinuations. "Faire insinuer une donation, un testament, etc.
   INSINUATION, action d' insinuer, ne se dit que dans le 2e et 4e sens. "Il en est venu à bout par ses insinuations. _ "L' insinuation d' un acte. Voyez n°. 4°.
   INSINUANT ne se dit qu' au fig. (n°. 2°.) Homme fort insinuant, femme insinuante.
   Rem. L' Abé Girard compare insinuer avec persuader, suggérer. Le premier, dit-il, dit quelque chôse de plus délicat: le 2d, quelque chôse de plus pathétique: le 3e, quelque chôse de frauduleux. On insinue finement et avec adresse: on persuade fortement et avec éloquence: on suggère par crédit et avec artifice.

INSIPIDE


INSIPIDE, adj. INSIPIDITÉ, s. f. Ils se disent au propre, et au fig. de ce qui n' a nulle saveur, nul goût. "Mets, viande, liqueur insipide. "Poème, discours, conte, conversation, plaisanterie, louange insipide. "Orateur, râilleur froid et insipide. "L' insipidité d' une viande. "L' insipidité d' un discours, d' une plaisanterie, etc. Voyez FADE. = Insipide peut quelquefois précéder le substantif.
   Mais de ce style éflanqué, sans vigueur,
   J' aime encor mieux l' insipide langueur,
   Que l' emphatique et burlesque assemblage
   D' un faux sublime, etc.
       Rouss.

INSISTER


INSISTER, v. n. [Incisté: 3e. é fer.] Persévérer à demander. Il régit sur, devant les noms, et à, devant les verbes. "Il insiste toujours sur cette demande. "Ils insistèrent à demander des Églises. Hist. d' Allem.

INSOCIABLE


INSOCIALBE, adj. INSOCIABILITÉ, s. f. Ils expriment le caractère de celui qui n' est pas sociable. "Homme, femme, humeur insociable. "L' insociabilité de son humeur, de son caractère.

INSOLEMMENT


INSOLEMMENT, adv. INSOLENCE, s. f. INSOLENT, ENTE, adj. [Inso-laman, lance, lan, lante: 3e br. au 1er, lon. aux 3 aûtres: 4e e muet.] Insolence, trop grande hardiesse et manque de respect. Insolent, hardi, qui perd le respect. Insolemment, avec insolence. "On ne peut soufrir son insolence. "Y eût il jamais une telle insolence! "Il a fait, il a dit mille insolences. "Il est insolent au dernier point. "Discours insolent. "Réponse insolente. = Subst. C' est un insolent, une insolente. _ "Il, ou elle a répondu insolemment.
   REM. Insolent ne signifie quelquefois que, orgueilleux. "La prospérité rend les hommes insolens. "Insolent dans la victoire. "La fortune est insolente. = Mde. de B... lui fait régir la prép. de. "Ils devinrent insolens de leur force, et poussèrent plus loin leurs prétentions. Hist. des Tud. _ Ce régime n' est pas assez autorisé, mais je n' ôserais le condamner. On dit, il est orgueilleux de ses succès; pourquoi ne pourrait-on pas dire aussi, insolent de ses succès, de sa force, de sa puissance?

INSOLITE


INSOLITE, adj. Qui est contre l' usage, contre les règles. Malgré les éforts de quelques Auteurs modernes, ce mot n' a point passé du Barreau dans le beau style. "Clause, procédûre insolite.

INSOLVABILITÉ


INSOLVABILITÉ, s. f. INSOLVABLE, adj. Impuissance de payer. _ Qui n' a pas de quoi payer. "Il est insolvable. "Son insolvabilité est démontrée.

INSOLUBLE


INSOLUBLE, adj. Qui ne peut se résoûdre. "Argument, dificulté, problême insoluble. _ En chimie, qui ne peut se dissoûdre.

INSOMNIE


INSOMNIE, s. f. [Pron. Inso-me-nie: l' e muet de la 3e très-bref: pénult. lon.] Indisposition qui consiste à ne pouvoir dormir. "Une longue, une continuelle insomnie. "Il est travaillé d' une cruelle insomnie. = Aûtrefois on a fait ce mot masc. On disait, un grand, un cruel insomnie.

INSOUCIANCE


INSOUCIANCE, s. f. INSOUCIANT, ANTE, adj. Sans souci. Mots nouveaux. On ne les a dabord dits qu' en conversation: on comence à les écrire. "Aficher l' insouciance. Sabat. de Castres. "Une souveraine insouciance. L' Abé Grosier. "Le lâche insouciant. Rochon de Chabanes. _ * M. l' Abé Garnier, (Hist. de Fr.) dit insoucieux.

INSOUTENABLE


INSOUTENABLE, adj. [In-sou-tenable: 3e et dern. e muet, 4e dout.] Qui n' est pas soutenable. "Cause, opinion insoutenable. = Qui n' est pas suportable. "Vanité insoutenable. "homme insoutenable.

INSPèCTEUR


INSPèCTEUR, s. m. INSPèCTION, s. f. [Ins-pèk-teur, cion: 2e è moy.] Inspèction. 1°. Action par laquelle on regarde, on examine. "L' inspèction du ciel, des astres; des pièces d' un procès. "À~ la première inspèction, on voit que la pièce est fausse. = 2°. Charge et soin de veiller. "On lui a doné l' inspèction sur... "Il a inspection, ou l' inspèction sur, etc. * "On sait à quel point les biens dépérissent, quand le maître n' a aucune inspèction dessus. Cochin. Dans cette phrâse, le mot me parait impropre; car inspèction se dit de la vigilance et de l' atention, dont un aûtre nous charge, et non de celle que notre intérêt nous inspire.
   INSPèCTEUR, qui a inspection sur: n' a que ce dernier sens; Inspècteur de Cavalerie, d' Infanterie, du Comerce, des Manufactures, etc. etc.
   *INSPèCTER, exercer le droit d' inspection, veiller, examiner. Mot nouveau. "Les bâtimens publics doivent être encôre plus sévèrement inspèctés à cet égard (de la solidité) que ceux des particuliers. Linguet. "La direction des Écoles les inspèctera (ces Maitres d' École.) Journ. Polit.

INSPIRATION


INSPIRATION, s. f. INSPIRER, v. act. [Ins-pira-cion, .] Inspiration, conseil, suggestion. "Je n' ai agi que par votre inspiration. "Par l' inspiration du St. Esprit. "L' éloquence évangélique tient de l' inspiration: elle perce par des traits vifs: elle remûe, elle entraîne. = Chôse inspirée, idée, pensée. "J' ai eu une bonne inspiration. "Ils commençoient à tourner leurs inspirations sacrilèges à une révolte manifeste. P. Fabre. = Inspirer, faire naître, suggérer quelque pensée, quelque moûvement. _ Il régit le datif (la prép. à.) des noms, et de, devant les verbes. "On lui a inspiré cette démarche~, de demander cet emploi. "Son livre (de Luther) de la Liberté Chrétienne n' avoit pas peu contribué à leur inspirer la révolte. Père Fabre. _ * Racine lui fait régir la prép. dans.
   Vos bontés, à leur tour,
   Dans les coeurs les plus durs inspireront l' amour.
M. l' Abé d' Olivet condamne ce régime: M. Racine le Fils ne défend son père, qu' en disant que la critique est juste, mais que son père a eu ses raisons pour dire, inspirer dans; puisqu' il était si aisé de tourner le vers aûtrement.
   Même aux coeurs les plus durs inspireroient l' amour.
Il n' est pas aisé de deviner qu' elles peuvent être les raisons qui ont déterminé le Poète. Ce qui nous sufit, c' est qu' on remarque l' irrégularité du régime, que M. l' Abé d' Olivet a relevée.

INSTABILITÉ


INSTABILITÉ, s. f. Manque de stabilité. Il ne se dit qu' au fig. "L' instabilité de la fortune, du monde, des chôses humaines, du coeur humain. = * Quelques-uns ont dit, en ce sens, instable: fortune instable; et La Touche les aprouve, quoiqu' il avoûe qu' instabilité est dans le Dict. de l' Acad. et qu' instable n' y est pas. Celui-ci n' a pas fait fortune.

INSTALLATION


INSTALLATION, s. f. INSTALLER, v. act. [Instala-cion, Instalé: plusieurs prononcent, mal-à-propos les deux l: instal--lacion, etc.] Instaler, c' est mettre en possession d' un office, d' un bénéfice. Instalation, action d' instaler. "Instalation d' un Chanoine, d' un Magistrat. "Instalation dans une charge, dans un bénéfice. "On s' est oposé à son instalation. "On l' a instalé dans cette charge, cette dignité.

INSTAMMENT


INSTAMMENT, adv. INSTANCE, s. f. INSTANT, ANTE, adj. [Instaman, tance, tan, tante: 2e br. au 1er, lon. aux aûtres.] Instance est une sollicitation pressante. Instamment, avec instance.. Instant, ante, pressant, pressante. "Faire de grandes, de vives instances. "Je l' en ai sollicité avec toutes les instances possibles. "Ces secours puissans (de la grâce) qui ne sont acordés qu' aux plus fortes instances. Le P. Le Chapelain. "Je l' en ai prié instamment. "Aux instantes prières, par les instantes sollicitations de, etc. = Instance, est aussi une demande en Justice. "Former, faire vider une instance. "L' instance est pendante au Parlement, etc. = Ces locutions ne sont guère dignes de l' Histoire, et elles sont encôre moins convenables dans les histoires anciènes. "Il n' étoit au plus question que de savoir, si l' afaire y seroit portée en première ou en seconde instance, dit l' Abé Vertot dans ses Révolutions Romaines.
   REM. 1°. Instance, dans le 1er sens, ne s' emploie point au singulier. L' Auteur du Dict. Néol. condamne avec raison, ce me semble, un Poète qui a dit:
   Thétis, à ses genoux, redouble son instance.
Il a évité une fausse rime aux dépens de l' exactitude. L' Acad. dit, il est vrai, faire instance: je l' ai fait à son instance~, et quelques Auteurs l' ont dit autrefois aussi: mais le dernier, à son instance ne me parait pas de l' usage actuel; on dit, à sa prière, à sa sollicitation; et si l' on veut dire quelque chôse de plus fort, à son instante prière, etc.
   2°. L' adj. Instant, ne s' emploie point au masc. on ne le dit qu' au fém. avec prière, sollicitation, poursuite, demande, etc. et le plus souvent au pluriel. = Dans le Journ. Polit. on dit: "Il est instant que l' Amiral Rodney en conduise un plus grand nombre, etc. C' est un anglicisme.
   INSTANT, s. m. Moment. Le plus petit espace de tems. "Il ne faut qu' un instant. "Il l' a fait dans un instant. = Il régit quelquefois la prép. de: "L' instant de son triomphe alloit devenir l' instant de sa mort. MARIN, Hist. de Saladin.
   Du Monarque du sombre bord,
   Tout ce qui vit, sent la puissance,
   Et l' instant de notre naissance,
   Est pour nous un arrêt de mort.
       La Motte.
À~ l' instant, adv. Tout à l' heure. "Je reviens à l' instant. _ À~ l' heure même: il partit à l' instant. "Il est ârrivé à l' instant que vous êtes parti.
   REM. 1°. Rousseau a dit au figuré, filer les instans, comme on dit, filer les jours.
   Prétendois-tu que les Parques
   Dussent, filant tes instans,
   Signaler des mêmes marques
   Ton hiver et ton printems.
       Rouss.
On voit bien que la rime a nécessité cette expression inusitée.
   2°. À~ l' instant, se met quelquefois à la tête de la phrâse. "À~ l' instant on chanta le combat des Centaures avec les Lapithes. Télém. = En un instant, s' aplique au présent et au pâssé, et dans un instant au futur. "Il le fait, ou il l' a fait en un instant. "Je le ferai dans un instant, c. à. d. bientôt. On dit aussi dans l' instant. = À~ tout instant vaut mieux qu' à tous instans, et d' instant à aûtre au sing. que d' instans à aûtres au plur. "Il y a une expression si admirable dans les deux têtes (de St. Pierre et de St. Paul) qu' on croit à tous instans que les Apôtres parleront. L' Ab. Richard. Descr. d' Italie. "D' instans à aûtres les Officiers du nouveau Doge présentoient des rafraichissemens. Id. _ Le même Auteur, à l' imitation de, être sur le point de faire, dit, être à l' instant de faire, ce qui ne se dit point. * Coriolan, qui venoit détruire sa Patrie, ce qu' il étoit à l' instant de faire. = Plusieurs Auteurs disent de ce moment, de cet instant, pour, dès cet instant, dès ce moment. "De cet instant, Alexandre put se regarder comme le possesseur légitime et paisible de l' Empire. Linguet. "De cet instant, on était reconu roi, etc. Moreau. = * Un Auteur moderne a dit, par instans, pour dire, par intervalles. Oh! pour celui-ci, il n' y a pas d' aparence qu' il pâsse. "Ces Hotes importuns, qui ne peuvent que par instans troubler leur repôs. H. Nat.

INSTANTANÉE


INSTANTANÉE, adj. *INSTANTANÉITÉ, s. f. INSTANTANÉMENT, adv. [2e lon. 4e é fer.] Instantanée et spontanée sont les seuls adjectifs de cette terminaison, qui aient un e muet au masc. comme au fém. Le Rich. Port. et quelques Auteurs disent instantané au masc. et instantanée, au fém. Cette manière me parait préférable. _ Qui ne dûre qu' un instant. "Mouvement, qui n' est qu' instantané. * Le Gendre dit: l' instantanéité de la lumière. Il aurait du dire, du moins, du mouvement de la lumière. = * Depuis peu on a dit aussi instantanément. "Le transmettre sans bruit et instantanément. Journ. de Litt.

INSTAR


INSTAR, (à l' ) adv. Terme de Pratique, emprunté du latin, où l' on dit ad instar. _ À~ l' exemple, à la manière de... "À~ l' instar des compagnies supérieures.

INSTAURATION


INSTAURATION, s. f. [Instora-cion.] Rétablissement. Il ne se dit que des Édifices et des cérémonies publiques, sur-tout de celles où la Religion entre pour quelque chôse. Ce mot ne se dit que parmi les savans.

INSTIGATION


INSTIGATION, s. f. INSTIGATEUR, TRICE, s. m. et f. INSTIGUER, v. act. [Ins--tiga-cion, ga-teur, trice, instighé: l' u est nécessaire au verbe, pour doner au g un son fort qu' il n' a pas devant l' e: il est inutile aux deux substantifs, parce que cette même consone a naturellement ce son fort devant l' a.] Instiguer, c' est inciter, presser, pousser à... Instigation, Incitation, sollicitation pressante. Instigateur, trice, celui, celle, qui incite, qui pousse à faire, etc. Ils ne se disent que du mal. "Il a fait cela à l' instigation de... "C' est lui, qui en a été l' instigateur. _ Le verbe est très-peu usité. L' Acad. le met sans remarque, et sans en doner d' exemple. _ Elle ne met point instigatrice; le Rich. Port. le met; et l' ocasion de l' employer ne se présente que trop souvent. "Ceux, que l' instigatrice avoit armés contre la vie de la plaignante. Mercure.

INSTILLER


INSTILLER, v. act. [Instilé: 3eé fer.] Faire couler, verser goutte à goutte. "Instiller quelques gouttes de... dans une plaie. _ L' Acad. l' admet au figuré: "Instiller une faûsse, une pernicieûse doctrine dans l' esprit. _ Cette expression figurée me parait être du vieux style.

INSTINCT


INSTINCT, s. m. [Ins-teink: 2 longues.] Certain mouvement et sentiment qui agit. Au propre, il se dit des animaux. "L' instinct leur tient lieu de raison. _ Fig. il se dit des hommes: "La Natûre done à l' Orateur cet instinct secret... qui sent, comme par inspiration, ce qui sied et ce qui ne sied pas. D' Aguess. "Il y a un goût d' instinct, pour ainsi dire, et un goût de réflexion. L' Ab. Trublet.

INSTITUER


INSTITUER, v. act. INSTITUTION, s. f. [Institué, institu-cion: dern. é fer. au 1er: l' u est long devant l' e muet: il institûe: au futur cet e muet se suprime dans la prononciation, et plusieurs Poètes le retranchent, même dans l' ortographe: il instituera, instituerait: pron. Institûra, tûrè; en quatre syllabes.] Instituer, établir quelque chôse de nouveau. Institution, action par laquelle on institûe. "Instituer une fête; des jeux solemnels;un ordre, une confrérie. _ Instituer un Officier, un Vicaire, etc. l' établir en charge, en fonction. _ Instituer un héritier, nomer, faire un héritier par testament. _ "L' institution du Parlement, d' un Ordre, etc. _ Institution d' héritier. = Institution, se prend aussi pour la chôse instituée. "C' est une pieûse, une sainte institution. = Il se dit encôre, mais plus rarement pour Éducation. "L' institution d' un Prince.

INSTITUT


INSTITUT, s. m. INSTITUTEUR, TRICE, s. m. et f. [1re lon. le t final ne se pron. pas au 1er.] Institut est une certaine manière de vivre selon une certaine règle. "Un pieux, un saint institut. Conc. de Trente. = Pour les élémens du Droit Romain, on a dit aûtrefois tantôt l' institute, tantôt les institutes, tantôt les instituts, tantôt enfin les institutions de Justinien. On ne dit plus que les institutes.
   Instituteur, trice, celui, celle, qui institûe. "L' Instituteur d' un Ordre Religieux. "La Reine Jeanne est l' institutrice des Annonciades. = Instituteur, se dit aussi de celui, qui done les premières instructions à un Prince. = Depuis quelque tems on le dit pour précepteur, éducateur, en parlant des particuliers. "C' est la vertu ou la folie des Parens, qui fait les bons ou les mauvais instituteurs. Th. d' Éduc.

INSTRUCTIF


INSTRUCTIF, IVE, adj. INSTRUCTION, s. f. INSTRUIRE, v. act. [Ins-truktif, tîve, truk-cion, truî-re: 3e du 2d et 2e du dern. lon.] Instruire, 1°. Enseigner, doner des leçons, des préceptes pour les sciences ou pour les moeurs. "Instruire la jeunesse, les enfans. "Ils sont bien ou mal instruits. "Une critique sage m' instruira, et une critique injuste ne m' aigrira point. Le P. Longueval. _ On le dit par extension des bêtes. "On instruit les chiens à danser, à faire le manège, etc. = 2°. Informer, doner conaissance de... "Instruisez-le de ce que vous voulez qu' il fasse: il en est mal instruit.
   Mes regards, mes discours ont pu vous en instruire:
   Mais au fond de mon coeur vous ne pouviez pas lire.
       Barthe.
= 3°. Au Palais, instruire un procês, le mettre en état d' être jugé. _ Instruire le procês de quelqu' un, lui faire son procês en matière criminelle.
   Rem. 1°. On disait autrefois au prétérit, il instruit, ils instruirent, pour, il instruisit, ils instruisirent. "Les Religieux y allèrent et l' instruirent, et après l' avoir baptisé, il mourut. Chron. = S' instruire, Voy. APPRENDRE.
   Instruire, s' emploie quelquefois neutralement et sans régime. "L' objet des écrits est de plaire, d' instruire, de convaincre. L' Ab. Gauchat. "Avant que d' instruire, il faut s' être instruit. Le P. Gaichiés.
   2°. Instruit, éclairé, (synon.) l' homme instruit connait les chôses; l' homme éclairé en sait faire un aplication convenable. "Il y a mille hommes instruits pour un homme éclairé. Encycl. Beauzée, synon. = Instruit régir par et à, le 1er devant les noms, qui marquent la source de l' instruction; le 2d, devant les noms, qui en expriment l' objet. "Endurci par les fatigues; instruit par les dangers. Marm. "Instruite aux crimes, elle s' est couverte d' une éternelle honte. Madame Dacier. _ L' actif a ce 2d régime.
   Avant que de m' avoir choisi pour les conduire,
   Les Grands à la révolte avoient su les instruire.
       Cromvel.
Il régit aussi de. "Instruit des règles et de l' usage. Cochin: c. à. d. conaissant les règles et l' usage. "Saladin, instruit du dessein des ennemis, ne négligea rien pour faire échouer leur entreprise. Marin.
   INSTRUCTION, est: 1°. Institution, éducation. "L' instruction de la Jeunesse. = 2°. Les préceptes, qu' on done pour instruire. "Doner des instructions salutaires. = 3°. Conaissance qu' on done. "Faire un mémoire pour l' instruction de... L' instruction d' un procês; tout ce qui est nécessaire pour mettre un procês en état d' être jugé. = 4°. Au pluriel, ordres donés à un envoyé, à un Ambassadeur. "Il n' a pas suivi ses instructions. "Mes instructions portent que, etc.
   REM. Avoir de l' instruction, pour dire, être instruit, est une expression nouvelle, qui est assez à la mode. "Vous avez de l' esprit, des talens, de l' instruction. TH. D' ÉDUC. "Si j' avois plus d' instruction, j' aurois tout quitté avec joie pour me consacrer entièrement à l' éducation de Lucie. Ibid. "Elle est un prodige d' instruction. Ibid. "Elle est remplie d' instructions et de talens. Ibid. _ Instruction s' est dit jusqu' à présent activement de l' action d' instruire: on l' emploie ici passivement, et on le dit de l' état de celui, qui est instruit. Il faut atendre ce qu' en décidera l' usage. En ce sens, il est encôre plus hazardé au pluriel qu' au singulier.
   INSTRUCTIF, qui instruit. Il ne se dit que des chôses. "Livre, mémoire, etc. fort instructif. "Méthode bien instructîve. "La conaissance des anciens Canons... est peut-être la partie la plus instructîve de cet ouvrage. Le P. Longueval. Hist. de l' Égl. Gall. = Le masc. suit toujours le substantif: le fém. peut quelquefois le précéder.
   Je sais que l' Art doit, pour fin générale,
   Se proposer l' instructive morale.
       Rouss.
Mais cette construction n' est bone qu' en vers.

INSTRUMENT


INSTRUMENT, s. m. INSTRUMENTAL, ALE, adj. INSTRUMENTER, v. n. [Ins-tru--man, mantal, tale, manté: 1re et 3e lon.] Instrument au propre, outil; qui sert à l' ouvrier, à l' artiste. "Instrument de Maçon, de charpentier. Instrument de chirurgie. _ On dit, par extension, instrumens de mathématique; la règle, le compâs de proportion, le quart de cercle, etc. _ Instrumens de musique; violons, basses, bassons, haut-bois, flûtes, etc. = Au figuré, caûse, moyen. "Il a été l' instrument de la vengeance de... "Il voulait me faire servir d' instrument à sa passion, etc. = En style de Pratique, Instrument, se dit des contrats et des actes publics. "Instrument authentique.
   INSTRUMENTALE, ne se dit qu' avec caûse et Musique. "Caûse instrumentale, qui sert d' instrument. On ne le dit qu' en Philosophie. Musique instrumentale, qui est faite pour les instrumens.
   INSTRUMENTER~, ne se dit que dans le dernier sens d' Instrument. Faire des contrats, des exploits et aûtres actes publics. "Ce Notaire instrumente fort bien. "Les sergens ne peuvent point instrumenter hors de leur ressort.

INSUBORDINATION


*INSUBORDINATION, s. f. Défaut de subordination. Mot nouveau, dont on peut bien augurer. "L' insubordination règne tellement parmi eux, que, etc. Let. Édif. "Dans un siècle, ou l' insubordination conjugale est portée au plus haut degré, préconisée même. Retif.

INSUFFISAMMENT


INSUFFISAMMENT, adv. INSUFFISANT, ANTE, adj. INSUFFISANCE, s. f. [On ne pron. qu' une f, et il conviendrait de n' en écrire qu' une. Insufizaman, zan, zante, zance: 4e br. au 1er, lon. aux aûtres.] Insufisant, qui ne sufit pas. Insufisamment, d' une manière insufisante. Insufisance, manque de sufisance. "Moyens insuffisans. "Concourir à... insuffisamment. "L' insufisance de ses raisons, de ses moyens. = D' Avrigni, quelques aûtres Auteurs et l' Acad. elle-même, disent insufisance des persones, dans le sens d' incapacité. "L' insufisance de ses généraux. D' Avr. "On ne l' a pas admis à cette charge, à cause de son insufisance. ACAD. = Sufisance, dans le sens de capacité me parait vieux: insufisance pour incapacité me semble encôre moins en usage.
   INSUFISANT, régit-il le datif. (la prép. à) J' en ai vu peu d' exemples. "Si ces vertus d' état ne sont soutenues et animées des vertus chrétiennes, ce ne sont plus que des vertus morales, insufisantes au salut. Segaud.

INSULAIRE


INSULAIRE, s. m. et f. [Insulère: 1re lon. 3e è moy. et long: 4ee muet.] Habitant d' une Île. "Un ou une insulaire. Les insulaires. _ L' Acad. l' emploie aussi adjectivement: "Les peuples insulaires. = Je crois qu' on ne l' a guère dit de la sorte.

INSULTANT


INSULTANT, ANTE, adj. INSULTE, s. f. INSULTER, v. act. et n. [3e lon. aux 2 premiers, e muet au 2d; é fer. au 3e.] Insulte, mauvais traitement de fait ou de parole, avec dessein d' ofenser. Faire insulte, ou une insulte à. "Recevoir une cruelle insulte de... = Insulter quelqu' un, et insulter à quelqu' un, n' ont pas tout-à-fait le même sens. Le 1er signifie simplement, faire insulte: il l' a insulté jusque chez-lui.
   Nos Énemis, par leurs outrages,
   Insultent tes autels détruits.
       Le Franc.
"Ses soldats étoient souvent insultés par ceux de la garnison. MARIN. Hist. de Saladin. Le 2d ajoute, à cette idée, celle de la lâcheté, qui fait qu' on prend avantage de la misère de quelqu' un pour l' insulter. "Il ne faut pas insulter aux misérables. "C' est une indignité que d' insulter à la misère, même d' un énemi: res est sacra miser. "Vous parlez au nom d' une classe de citoyens, qui vient d' éprouver un malheur, et à qui vous semblez me soupçoner de vouloir insulter. LINGUET. = On a dit aûtrefois insulter contre, et insulter sur. TH. CORN. ne condamnait pas tout-à-fait le 1er: mais il aimait mieux dire s' emporter contre. _ Chapelain trouvait que le 2d était rude, mais il croyait qu' on pouvait s' en servir. _ L' un et l' aûtre sont hors d' usage depuis long-tems. = En termes de Guerre, insulter une place, c' est l' ataquer hautement et à découvert. Th. Corn. _ En ce sens, il régit quelquefois la prép. de. "Il insulta la ville, la flote de quelques coups de canon. On dit aussi, mettre hors d' insulte, mettre une place en état de ne pouvoir être prise d' emblée.
   INSULTANT, qui insulte: il ne se dit que des chôses: "Discours insultant. "Paroles, manières insultantes.
   Rem. 1°. On a dit anciènement insult, et on le fesait masc. Bouhours, et Fléchier lui ont doné ce genre, en écrivant pourtant insulte. Ménage en reprit le premier, et il avoua son tort. L' Acad. au comencement du siècle le fesait masc. en avertissant que plusieurs le fesaient fém. TRÉV. = Boileau a encore dit, dans le Lutrin.
   Evrard seul, en un coin prudemment retiré,
   Se croyoit à l' abri de l' insulte sacré,
   Deux puissans énemis......
   À~ mes Sacrés Autels font un profane insulte.
   INSULTE, Voy. AFFRONT.
   2°. INSULTER, ne date que du siècle passé. M. Coeffeteau l' avait vu naître, un peu avant sa mort, et il n' avait jamais ôsé s' en servir, à cause de sa trop grande nouveauté, tant, dit Vaugelas, il était religieux à n' user d' aucun terme, qui ne fût en usage. On peut dire qu' il l' était jusqu' au scrupule et à la superstition. On done aujourd' hui dans l' excês contraire.

INSUPORT


*INSUPORT, s. m. Mot qu' un mauvais usage a adopté, et dont ne se servent pas ceux, qui parlent bien. "On est convenu d' une pension, en câs d' insuport. = Suivant M. MARIN, c' est un terme très-reçu. Il dit la chôse, et la dit d' une manière précise. Je m' en raporte. Le moins qu' on puisse dire, c' est qu' il est tout au plus du style familier.

INSUPORTABLE


INSUPORTABLE, adj. INSUPORTABLEMENT, adv. [pénult. dout. au 1er; dans le 2d, en a le son d' an: table, tableman.] Insuportable, qui ne peut être soufert, suporté: intolérable. Insuportablement, d' une manière insuportable. "Douleur insuportable. "Homme, humeur, manières insuportables. "Il écrit, il danse, il chante insuportablement.

INSURGENS


INSURGENS, s. m. pl. INSURRECTION, s. f. Le 1er ne s' est dit dabord que de certains corps de troupes hongroises, levées extraordinairement pour le service de l' État. _ On l' a apliqué dans la suite aux peuples de la Nouvelle Angleterre, lorsqu' ils se séparèrent de la Métropole. On les apèle aujourd' hui les Etats unis. = Insurrection est l' action de se soulever. On ne le disait au propre que de la Pologne. On l' a dit ensuite de la scission entre les Colonies Anglaises et la Métropole. "Il y avait dans les Colonies une insurrection, que nous nous efforcions d' apaiser. Journ. Polit. _ M. Linguet l' a employé au figuré. "L' insurrection d' un Brutus littéraire contre les Tarquins qui aspirent au despotisme dans cette République (des Lettres.)

INSURMONTABLE


INSURMONTABLE, adj. Qui ne peut être surmonté. "Dificulté, obstâcle insurmontable. "Envie de dormir insurmontable.

INTACTE


INTACTE, adj. fém. Qui est demeurée pure et entière; qui n' a pas été touchée. "Réputation intacte. = Trév. et le Rich. Port. l' admettent au masc. comme au fém. et au propre, comme au figuré. L' Acad. ne le met point. = M. MARIN pense aussi qu' on l' emploie au masculin. "Cela est encôre intact.

INTARISSABLE


INTARISSABLE, adj. [pénult. dout. In--tari-sable.] Qui ne se peut tarir. "Source, mine, carrière intarisable. "Larmes intarissables. = Fig. "Érudition, imagination, veine d' un Poète intarissable.

INTèGRE


INTèGRE, adj. INTÉGRITÉ, s. f. [2e è moy. au 1er, é fer. au 2d.] Intègre, qui est d' une probité incorruptible. Intégrité, vertu, qualité d' une persone intègre. "Juge, vertu intègre. "Corrompre l' intégrité de... "Sa prudence... son intégrité prévenoient en sa faveur. P. Fabre, Hist. Eccl. = Intégrité a aussi le sens d' entier, sain. "Garder long--tems des fruits dans leur intégrité, etc.
   Rem. Dans le moral, intègre, intégrité, ne se disent plus que de l' exacte probité d' un Juge. Aûtrefois on leur donait un sens et un emploi plus étendu. On les employait dans l' idée générale de vertu, inocence, probité universelle. On disait: c' est l' homme le plus intègre. "C' est ainsi, dit Aristote, qu' il faut juger du plaisir, sans exposer son intégrité, en s' y laissant corrompre. P. Rapin.

INTELLECT


*INTELLECT, s. m. INTELLECTIF, IVE, adj. INTELLECTUEL, ELLE, adj. [Intélèk, lèktif, tive, tu-èl, tu-èle: 2e de tous é fer. 3e des 3 premiers, et 5e des 2 dern. è moy.] Termes de la vieille Philosophie. Ils se disaient de l' Entendement, et de ce qui lui apartient. "L' intellect; la faculté, la vision intellectuelle; la faculté, la puissance intellective. _ Ces mots ne sont presque plus d' usage chez les Philosophes modernes.

INTELLIGEMMENT


INTELLIGEMMENT, adv. INTELLIGENCE, s. f. INTELLIGENT, ENTE, adj. [Intélijaman, jance, jan, jante: 2eé fer. 4e br. au 1er, lon. aux 3 aûtres.] Intelligence a plusieurs sens: 1°. Faculté, capacité de conaitre, de comprendre. "L' homme est doué d' intelligence. "Les animaux sont dépourvus de cette intelligence, vive et agissante, qui raproche les objets par la réflexion, etc. Le P. Du Rivet. "Cet enfant a de l' intelligence, peu d' intelligence. "Il ou elle a l' intelligence vive, promte, ou dûre, tardive, etc. = 2°. Conaissance, compréhension. "L' intelligence des langues; des textes obscurs; des Pères; de l' Écritûre, etc. L' intelligence des afaires. = 3°. Amitié réciproque. "Être en bone intelligence. "Cette afaire a rompu leur intelligence. = 4°. Acord, correspondance. "Être d' intelligence. Le peuple ne manqua pas d' acuser le Sénat d' être d' intelligence avec Coriolan. Vertot.
   Je sens qu' avec son coeur le mien d' intelligence
   Se refuse aux soupçons qu' on cherche à me donner.
       Destouches.
"Entretenir intelligence avec... Avoir des intelligences dans une place, des partisans secrets propres à nous seconder.
   INTELLIGENT, n' a que les 2 premiers sens: l' homme est un être intelligent. "Cet homme est fort intelligent dans ces matières-là. "C' est un homme intelligent.
   INTELLIGEMMENT, ne s' emploie que dans la 2e acception: avec conaissance et intelligence. "Il parle intelligemment de toutes chôses. _ Cet adverbe est peu usité. L' Acad. le met sans remarque.
   Rem. 1°. L' Auteur de l' Art de Penser emploie intelligence, pour signifier le sens, la signification des mots. "Marquer la fausse intelligence qu' on pourrait doner à ce mot. Intelligence, se dit des persones, et il a un sens actif: il exprime l' action d' entendre, de comprendre. Il se dit aussi des chôses dans un sens passif. "Les comentaires bien faits facilitent l' intelligence des textes dificiles. Il se dit alors de ce qui est entendu, compris: mais on ne le dit point des mots dans le sens de l' Auteur cité. On ne dit point doner une fausse intelligence à un terme, comme on dirait lui donner un sens faux et inusité.
   2°. Le P. Rapin fait d' intelligent un substantif. "Les intelligens sentiront bien par leurs propres lumières la vérité de ce que je dis. _ Ce substantif serait utile à employer: je crois qu' on peut s' en servir sans dificulté.

INTELLIGIBLE


INTELLIGIBLE, adj. INTELLIGIBLEMENT, adv. [Intéligible, bleman: 1re lon. 2eé fer. 5e e muet.] Intelligible, qui peut être oui facilement, et distinctement. "Sons distincts et intelligibles. "Parler à voix haute et intelligible. = Qui est aisé à comprendre. "Cet Auteur n' est pas intelligible. "Ce passage est fort intelligible. Il se dit quelquefois des persones. "Il faut prendre plus de soin de se rendre intelligible, que de paroître docte. Le P. Gaichiés.
   INTELLIGIBLEMENT; d' une manière intelligible. "Cela est écrit fort intelligiblement.

INTEMPÉRAMMENT


INTEMPÉRAMMENT, adv. INTEMPÉRANCE, s. f. INTEMPÉRANT, ANTE, adj. INTEMPÉRÉ, ÉE, adj. [Intanpéraman, ran--ce, ran, rante, , rée: 2e lon. 3e é fer. 4e br. au 1er, lon. aux trois suivans, é fer. aux deux dern.] Intempérance, vice oposé à la tempérance. Intempéramment, avec intempérance. Intempérant, qui a de l' intempérance. Intempéré, déréglé dans ses passions, dans ses apétits. "Son intempérance a ruiné sa santé. "Il boit intempéramment. "C' est un homme fort intempérant. Et substantivement: l' intempérant ruine sa santé par ses débauches. C' est un homme intempéré en toutes chôses. Acad.
   Rem. 1°. On ne se sert guère d' intempéramment. L' Acad. le met sans remarque, et sans en doner d' exemple. = Intempéré est aussi peu usité. Il n' est point dans Trév. Il est dans le Dict de l' Acad. et dans le Rich. Port.
   2°. Intempérance se dit des hommes, et intempérie de l' air, du climat. * "Ce grand Roi (St. Louis) étoit mort de l' intempérance du climat. Hist. d' Angl Dans le Journ. Polit. et dans la traduction d' un papier anglais, on dit aussi l' intempérance du climat. C' est un anglicisme. * Bossuet dit, au contraire, intempérie dans le moral. Il dit, en parlant des guerres civiles des Anglais. "Quel transport, quelle intempérie a causé ces agitations et ces violences? Or. Fun. de la Reine d' Angl. = Intempérance, employé absolument et sans régime, ne se dit que de l' excês dans le boire et le manger. Autrefois on lui donait un sens plus étendu, et on le disait de toute passion brutale. "Il se fit alors de grands mouvements par l' intempérance d' Appius Claudius, un des Décemvirs, et le meurtre de Virginie. Boss. = Au figuré, il régit la prép. de. "Quelques-uns, par une intempérance de savoir... les embrassent toutes (les sciences) et n' en possèdent aucune. La Bruy. "Un certain excès et une certaine intempérance de sagesse. Bourdal. "Il y a une intempérance d' étude. Le P. Gaichiés "L' intempérance des idées porte au pour et au contre sur chaque objet. Sabat. art. Bayle. _ L' Acad. dit qu' il y a de l' intempérance à trop étudier, à vouloir trop savoir. _ On dit aussi intempérance de la langue, trop de liberté de parler.

INTEMPÉRIE


INTEMPÉRIE, s. f. [Intanpérîe: 2e et 4e lon. 3e é fer. dern. e muet.] Dérèglement dans l' air et dans les humeurs du corps humain. "L' intempérie de l' air, des saisons, des humeurs. Voy. INTEMPÉRANCE.

INTENDANCE


INTENDANCE, s. fém. INTENDANT, ANTE, s. m. et f. [Intandance, dan, dante: 2e et 3e lon. 4e e muet.] Intendant est celui qui est préposé pour avoir la direction de certaines afaires. "Intendant de la maison d' un grand Seigneur, d' un Prince. Intendant des Finances, de la Marine. Intendant ou Comissaire départi dans les Provinces. Intendante, la femme d' un Intendant de la Marine, ou des Provinces. On ne le dit point des femmes des aûtres Intendans. = Intendance, direction, administration. "Il a l' intendance sur... "Il lui a doné l' Intendance de sa maison, de ses finances. L' Intendance d' une Province. = Il se dit, dans ce dernier sens, du logement de l' Intendant, du tems que dûre son administration, et du district où elle s' étend.

INTENTER


INTENTER, v. act. [Intanté, 2e lon. 3e é fer.] Comencer. Intenter un procès, une acusation contre quelqu' un.

INTENTION


INTENTION, s. f. INTENTIONÉ, ÉE, adj. [Intan-cion, en vers, ci-on: Intan--cio-né, né-e: 3e lon. 4eé fer. aux deux dern.] Dessein par lequel on tend à quelque fin. "Bone, droite, louable, ou, mauvaise intention. "Avoir intention, ou l' intention de faire. Dieu est le seul juge des intentions. "Les hommes jugent souvent témérairement de l' intention. "Je l' ai fait à votre intention, en votre considération. _ Dire des prières, ou faire des aumônes à l' intention de quelqu' un, dans le dessein qu' elles lui atirent des grâces de la part du Seigneur.
   Rem. 1°. Intention ne se dit point des chôses. * Il est certain, dit Bossuet, que l' intention de la confession d' Ausbourg étoit d' établir la présence réelle. _ L' esprit aurait été là le mot propre.
   2°. Un Auteur moderne dit toujours en intention de, pour dans l' intention, dans le dessein de... Il a pour garant le P. Bouhours, qui a dit dans le Recueil des Pensées ingénieuses. "Il monte au Parnasse, en intention de quereller les Mûses. _ Je pense pourtant que dans l' intention vaux mieux, et dans le dessein, mieux encôre. = * Deux aûtres Auteurs modernes ont dit plus récemment, dans le même sens, être d' intention (c' est un barbarisme d' expression). "Je serais d' intention de doner cet acte entier. Traduct. d' un écrit Holandais. "S. M. Pr. étant sérieusement d' intention de conserver. Traduct. d' un écrit Allemand. On dit avoir intention de faire, et son intention est que vous fassiez: l' un régit de et l' infinitif, et l' autre que avec le subjonctif~.
   Je soutiens, je conclus que son intention
   Sera qu' incessamment vous épousiez Cléon.
       Destouches.
INTENTIONÉ, ÉE: il ne se dit qu' avec bien, mal, ou mieux. "Il est bien intentioné; elle était mal intentionée. "Cet homme~ est mieux intentioné que vous ne pensez: il a de meilleûres intentions que vous ne croyez.
   INTENTIONÉ s' emploie sans régime. Dans l' Ann. Lit. on lui fait régir la prépos. à devant l' infinitif. "Gens intentionés à lui nuire. _ Ce régime est inusité. Il faut dire, qui ont intention, ou l' intention de lui nuire.

INTERCALAIRE


INTERCALAIRE, adj. INTERCALATION, s. fém. INTERCALER, v. act. [Intêrkalère, la-cion, lé: 2e ê ouv. 4eè moyen et long au 1er, é fer. au dern.] Intercaler c' est ajouter un jour de quatre en quatre ans dans le mois de février. Voy. BISSEXTILE. Intercalation, action d' intercaler. Intercalaire, qui est inséré et ajouté. "Jour intercalaire.

INTERCÉDER


INTERCÉDER, v. n. INTERCESSEUR, s. m. INTERCESSION, s. fém. [In-têrcédé, cè-ceur, cè-cion: 2e ê ouv. 3e é fer. au 1er, è moy. aux deux autres.] Intercéder, prier, solliciter pour... Intercesseur, celui qui intercède. Intercession, action d' intercéder. "Il a intercédé auprès du Roi pour ce criminel. "Soyez mon intercesseur. "Des intercessions si respectables furent parfaitement secondées par la docilité d' Abailard. Le P. Fontenai.
   Rem. Plusieurs font cet adverbe actif. Dans les Vendangeurs, on dit:
   C' est lui qu' on intercède.
   On reprend ce solécisme dans l' Ann. Lit. Cependant dans le même Journal, on dit à l' ocasion de l' exposition des Tableaux: "Celui qui représente Saint Roch, intercédant la Vierge pour la guérison des pestiférés, a fait la plus vive sensation. C' est la même faûte qui est échapée au critique.

INTERCEPTER


INTERCEPTER, v. act. INTERCEPTION, s. fém. [Intêrcèpté, cèp-cion: 2e ê ouv. 3e è moy. 4eé fer. au 1er] Intercepter, arrêter, interrompre le cours. Interception, action d' intercepter. "Intercepter la transpiration, les rayons de la lumière. "L' interception des esprits, des rayons. Ils ne se disent en ce sens qu' en Physique. _ Dans le discours ordinaire, intercepter une~ lettre, un paquet; c' est les surprendre et les empêcher de parvenir à leur destination; les décacheter et les lire pour découvrir quelque secret qui intéresse. _ On ne dit point interception dans ce sens.

INTERDICTION


INTERDICTION, s. f. INTERDIRE, v. act. INTERDIT, s. m. [In-têrdik-cion, dîre: 2e ê ouv. 3e lon. aux deux derniers.] Interdire, c' est 1°. défendre à. "On lui a interdit l' entrée de cette maison. = 2°. Défendre par sentence aux Éclésiastiques l' exercice de leurs ordres, et la célébration des Sacremens et du service divin. "Interdire un Prêtre, une Église, une Ville, etc. = 3°. Défendre à des Oficiers de Justice d' exercer leurs charges. En termes de Palais, c' est défendre à un particulier de contracter, de disposer de son bien, pour cause d' incapacité ou de dissipation. "On l' a interdit, on l' a fait interdire. = 4°. Étoner, troubler, déconcerter. En ce sens, il ne se dit que dans les tems composés: "La peur l' avait tellement interdit, que, etc. "Il était si interdit, qu' il ne répondit pas un seul mot. "Il demeura tout interdit. = Interdiction ne se dit proprement que dans le 3e sens, et interdit dans le 2d: "Défendre à peine d' interdiction. "Mettre une Église, une Ville en interdit. = On dit aussi, interdiction du comerce; arrêt d' interdiction contre un prodigue, etc.~
   REM. 1°. Interdire se conjugue comme dire, excepté la 2e persone du pluriel du présent, où il faut dire interdisez, et non pas interdites. = Pour l' aoriste, Andry de Bois-Regard, Th. Corneille, La Touche, de Wailly, etc.~ n' admettent que j' interdis, il interdit, etc. Ménage est seul de son sentiment, pour interdisis, interdisit, etc. Dans le Dict. Gram. on se contente de dire qu' interdis est le meilleur. Ce n' est pas assez dire: il falait avertir que c' est le seul bon.
   2°. Bossuet fait régir à interdire l' ablatif (la prép. de) qui est le régime de bannir. "Elles devoient être interdites (bannies) de toute la vie Chrétienne. _ Ce régime est inusité. = Interdire régit plus régulièrement la prép. de devant l' infinitif. "La nature n' a pas interdit aux femmes d' être raisonables, sensibles, honêtes, vertueûses. Marm. "Pourquoi seroit-il interdit aux autres nations, en s' engageant dans la carrière que les Grecs ont frayée, de pénétrer au delà des bornes, où ils se sont arrêtés. L' Ab. Langier.

INTÉRESSANT


INTÉRESSANT, ANTE, adj. INTÉRESSÉ, ÉE, s. m. et fém. INTÉRESSER, v. a. [Intéré-san, sante, , sé-e, : 1re lon. 2e et 3e é fer. 4e lon. aux deux premiers; é fer. aux trois dern.] Intéressant, qui intéresse. Il se dit ordinairement des chôses: ouvrage intéressant. Jeu intéressant. Pièce intéressante. _ Dans le discours familier, il se dit des persones: qui plait, qui s' atire l' afection. "C' est un homme intéressant. En ce sens, c' est un néologisme heureux.
   INTÉRESSÉ, ÉE: Celui, ou celle qui a intérêt à... Il ne se dit guère qu' au pluriel: on ne dit point; c' est un intéressé, une intéressée: on dit, c' est un des intéressés~;une des intéressées. = Quand il est participe, il régit à comme son verbe. "Il chargea de l' entreprise Schirkouh, non moins intéressé que lui-même à la conquête de l' Égypte MARIN, Hist. de Saladin. = Employé adjectivement, il signifie, qui est trop ataché à ses intérets. "Il est fort intéressé: c' est une femme fort intéressée.
   INTÉRESSER, en parlant des persones, c' est 1°. faire prendre part à: "Vos procédés m' ont intéressé à votre bonheur. Marm. "Je voudrais intéresser votre pitié au succès de cette afaire. = 2°. Faire entrer quelqu' un dans une afaire, en sorte qu' il ait part au profit. "On m' a intéressé dans cette entreprise. = La diférence de ces deux sens vient de la diférence des régimes à ou dans. = 3°. Avec le seul régime simple, doner quelque chôse à quelqu' un pour le rendre favorable à une afaire, etc. "Cette afaire ne saurait se faire sans lui: il faut l' intéresser. = 4°. Émouvoir, toucher de quelque passion. "Cette Tragédie intéresse les Spectateurs. _ Et, neutralement, on sous-entend le régime: "Cet ouvrage est bien écrit, mais il n' intéresse pas. = 5°. En parlant des chôses: Importer. "En quoi cela vous intéresse-t-il? "Cela intéresse mon honeur, ma réputation, ma santé. = Engager. "Tout vous intéresse à remplir vos devoirs. = Attacher: le gros jeu intéresse; le petit jeu n' intéresse guère. = On dit, en ce sens, intéresser le jeu; le rendre plus intéressant en jouant plus grôs jeu. = 6°. Intéresser se dit sur-tout au réciproque et au passif. S' intéresser a plusieurs régimes: la prép. à. "S' intéresser aux afaires de l' État. (n°. 1°.) _ La prép. pour. "Mon coeur s' intéresse pour vous. "Intéressez-vous pour moi. _ La prép. dans: "S' intéresser dans une entreprise. (n°. 2°.) et (n°. 1°.) "Toute l' Europe s' intéresse dans cette afaire, dans cette guerre. _ L' infinitif avec la prép. à: "Je m' intéresserai à vous procurer ce poste. = Être intéressé, avoir intérêt. "Tous les sujets sont intéressés au salut du Prince, à la prospérité de l' État. "Vous êtes intéréssé à ne le pas souffrir.
   Rem. 1°. M. l' Ab. De Cambacérès dit, être intéressé de: c' est un faux régime. "On n' a donc cessé de croire que quand on a été intéressé de ne croire pas. Il faut dire, a été intéressé à ne croire pas. "Vous êtes intéressé à empêcher que... dit l' Acad.
   2°. S' intéresser et être intéressé ont des sens diférens: l' un signifie prendre intérêt, et l' autre avoir intérêt à une chôse. "Fuyez les procès sur toutes chôses. Souvent la conscience s' y intéresse (y est intéressée.), la santé s' y altère, les biens se dissipent. De W... L' afectation de la symétrie dans la phrâse a peut-être produit ce contre-sens.

INTÉRêT


INTÉRêT, s. m. [1re long. 2e é fermé, 3e ê ouv.] 1°. C' est, en général, ce qui importe, ou à l' honeur, ou à l' utilité. "Intérêt public. "L' intérêt de l' État. "Vous n' entendez pas vos intérêts. "C' est l' intérêt qui gouverne tout. "Il n' a que ses intérêts en vûe, etc. "Croyant qu' il y alloit de son intérêt de ne point abandoner son entreprise. Le sage. = L' intérêt particulier l' emporte presque toujours sur l' intérêt général. "L' esprit philosophique concentre toutes les passions dans la bassesse de l' intérêt particulier, dans l' abjection du moi humain, et sape à petit bruit les fondemens de la société. J. J. Rouss. = 2°. Il se prend en particulier et absolument, pour ce qui concerne le lucre, le profit. "Il est au dessus de l' intérêt: il ne se laisse point tenter à l' intérêt. Il y a peu de gens à l' épreuve de l' intérêt. M. Le Franc fait dire aux impies:
   Le vice et la vertu sont des noms arbitraires;
   Le plaisir, l' intérêt, la force fait nos droits.
   Laissons aux malheureux, laissons aux coeurs vulgaires.
   Les autels et les lois.
= 3°. Profit que l' on retire de l' argent prété. "Préter, mettre, emprunter de l' argent à intérêt, à gros intérêt. "Joindre l' intérêt au principal. "Cet argent porte intérêt, etc. = 4°. Ce qui atache et intéresse les Lecteurs, les Spectateurs, les Auditeurs, en parlant des ouvrages d' esprit. "Il y a beaucoup d' intérêt dans cette pièce. "Ce discours est bien écrit, mais il manque d' intérêt; il ennuie par le défaut d' intérêt.
   Rem. 1°. On doit distinguer soigneusement, avoir intérêt et prendre intérêt. Le premier signifie qu' on est intéressé à la chôse; le 2d, qu' on s' y intéresse. "J' ai intérêt au gain de ce procès: vous avez intérêt à le ménager "Je prends intérêt à cette persone, à sa joie, à sa disgrace, etc. = Avoir intérêt régit à ou de devant l' infinitif. Fénélon fournit des exemples des deux manières. "Vous n' avez pas moins d' intérêt à empêcher que, etc. Télém. "Chacun de nous avoit un intérêt pressant de desirer la paix. Ibid. = Remarquez qu' avoir intérêt se dit des persones, et signifie être intéressé à: un Auteur moderne le dit des chôses, et lui done le sens d' être intéressant pour: "Tout ce qui regarde l' Angleterre et l' Amérique a un grand intérêt pour les François. Merc. _ Un Autre dit, avoir de l' intérêt, pour mettre de l' intérêt (n°. 4°.) "M. Le Beau n' a pas... dans son style, autant d' intérêt que le célèbre Recteur de l' Université (Rollin) Sabat. Trois siècles, etc. = * Avoir l' intérêt de quelqu' un, mériter et obtenir qu' il s' intéresse à nous, est une expression nouvelle, qui a besoin du sceau de l' usage. Élle me parait sentir un peu le jargon moderne. "On fait alors son devoir, et l' on a l' intérêt et l' aprobation de tous les honêtes gens. Th. d' Éduc. _ Mde. de G... dit âilleurs: "L' intérêt d' Almanzor pour Boulaski ne s' est manifesté que depuis que ces vers ont paru. _ Cette illustre Auteur done là à intérêt le sens et les régimes d' atachement. C' est encôre une nouveauté que l' emploi de ce mot, de cette manière. = M. Targe, toujours servile Traducteur de Smollet, lui done le sens de pouvoir; crédit, influence. "Louis XIV résolut d' élever le Prince de Conti au trône de Pologne, ce qui aurait considérablement augmenté les intérêts de la France en Europe. _ C' est encôre là un anglicisme.
   2°. Intérêt ne régit des prépositions, comme à et pour, que par le moyen des verbes auxquels il est joint. On dit, j' ai intérêt à cela, vous prenez intérêt à ce qui me regarde; mais on ne dit point, mon intérêt à cette afaire, votre intéret à ma situation, etc. * "Il faut que le Ministre les anime (les subalternes.), et par un intérêt continuel au zèle qu' ils dévelopent, et par une aprobation éclairée. Necker. Je voudrais dire: et par l' intérêt qu' il prend au zèle, etc.
   3°. Il est de l' intérêt de...il est de mon intérêt, de son intérêt, etc. régit la conjonction que avec le subjonctif, ou la prép. de avec l' infinitif: la seconde, quand le verbe se raporte au régime ou au pronom, joint à intérêt: la première, quand il ne s' y raporte pas. "Il est de l' intérêt de votre famille de faire, et que~ vous fassiez, etc. "Il est de son intérêt de le dire, et que vous le disiez, etc. Ainsi, la phrâse suivante est irrégulière pour le régime. "Il étoit de votre propre intérêt de céder à une autre une place dont nous ne pouvons remplir les devoirs. C' est un Évêque, se démettant de son Évêché, qui dit cela à ses Diocésains. Il falait donc qu' il dit: "Il étoit de votre intérêt que nous cédassions~, etc. _ Le P. Charlevoix. dit mieux: "Il étoit de votre intérêt que la guerre ne traînât pas en longueur. Il aurait pu dire aussi: de ne pas faire traîner la guerre en longueur. Traîner, dans la première manière, ne se raporte~ pas à leur: faire traîner s' y raporte dans la 2de. c' est la raison de la diférence des deux régimes. = Au reste, dans cette expression, on met toujours intérêt au singulier, lors même qu' il s' agit de plusieurs. * "Il est de nos intérêts, dit M. l' Ab. Henn... de varier les actions vertueûses. Du Plaisir. Il devait dire, il est de notre intérêt.
   4°. On a dit anciènement intérêt pour avarice, cupidité. On le dit encôre absolument: "C' est l' intérêt qui divise le frère d' avec le frère; mais on ne le dit plus avec un pronom ou avec un régime, comme on le disait aûtrefois; comme l' a dit encôre, il n' y a pas si long-tems, Mde. de B... "La preuve de l' intérêt sordide de Henry (VII) est ce que Bacon nous en aprend comme témoin oculaire. H. d' Angl.
   5°. M. Necker dit mettre intérêt à, sans article. "Soit qu' on mît intérêt à leur satisfaction, soit qu' on voulût accélérer l' expédition des afaires. _ Je crois qu' il faut dire, en pareil câs, mettre intérêt avec l' art. le ou un, ou quelque. "L' intérêt que je mets; ou je mets un grand intérêt, ou quelque intérêt, etc. Ainsi je voudrais dire, en réformant la phrâse précédente. * Soit qu' on mît quelqu' intérêt, ou un assez grand intérêt à, etc.
   6°. Être dans les intérêts de quelqu' un; s' interesser à ce qui le touche. "Je suis trop dans vos intérêts pour vous faire faire un pas qui puisse vous nuire. Le Sage.

INTERJECTION


INTERJECTION, s. f. [Intêrjèk-cion: 2e ê ouv. 3e è moy.] On apèle de ce nom, en Gramaire, des mots dont on se sert pour exprimer quelques mouvemens de l' âme, comme la joie, la douleur, la crainte. Ah! Hélas! etc. = Au Palais, interjection d' apel, action d' interjeter un apel.

INTERJETER


INTERJETER, v. act. On ne le dit que dans cette phrâse: interjeter apel, ou un apel: le premier est le meilleur; apeler d' un jugement.

INTERIEUR


INTERIEUR, EURE, adject. INTÉRIEUREMENT, adv. [Intéri-eur, eû-re; eûreman: 1re lon. 2eé fer. 4e lon. aux deux dern.] Intérieur, qui est au dedans; il est oposé à extérieur. "Les parties intérieures du corps. "Les mouvemens intérieurs de l' âme. "Feu intérieur, paix intérieure. = Subst. m. La partie de dedans. "L' intérieur du Temple. "Dieu seul conoit l' intérieur, etc.~ = Intérieurement: dedans. "La grâce de Dieu agit intérieurement. "Il se sentit intérieurement touché. "Il faut nétoyer ce vâse intérieurement et extérieurement.
   Intérieur, interne, intrinsèque, (synon.) Le premier, se dit plus particulièrement des chôses spirituelles: dévotion intérieure; le second, a plus de raport aux parties du corps: maladies internes; le troisième, s' aplique à la valeur ou à la qualité des chôses mêmes, indépendamment de l' estimation des Hommes: "La valeur intrinsèque des monoies. GIR. Synon. _ Andry de Bois-regard done la même distinction pour intérieur et interne. _ L' Acad. dit intérieur du corps comme de l' âme; et elle a raison, dit La Touche. "La conformation intérieure du corps humain. _ Ce qu' on peut ajouter, c' est qu' intérieur est du Langage commun, et qu' interne ne se dit guère qu' entre les savans.

INTÉRIM


INTÉRIM, s. m. [Intérime: 1re lon. 2e é fer. l' e muet sur-ajouté à l' m, extrêmement bref.] Il n' est subst. que quand on parle d' un règlement fait par Charles V, sur les matières controversées entre les Protestans et les Catholiques, en atendant les décisions du Concile. _ On l' emploie ordinairement d' une manière adverbiale. Dans l' entre temps. "Il arriva dans l' intérim, que, etc. "Il gouverna par intérim, dans l' intérim. _ C' est un mot emprunté du latin. _ Dans le discours familier, on l' emploie quelquefois adverbialement, sans prép. "Intérim (en atendant) tout va de travers.

INTERLIGNE


INTERLIGNE, s. m. INTERLINÉAIRE, adj. [Intêrlig-ne, intêrliné-ère: 1re lon. 2e ê ouv. mouillez le g au 1er; 4e é fer. 5e è moyen et long au 2d.] Interligne est l' espace blanc qui reste entre deux lignes d' écritûre. "Écrire dans l' interligne. = Interlinéaire, qui est écrit dans l' interligne. "Glôse, comentaire, explication, interprétation interlinéaire.
   Rem. 1°. Ligne étant fém. il semble qu' interligne~ doit l' être aussi. Trév. et le Rich. Port. lui donent en éfet ce genre. L' Acad. le marque masc.
   2°. Mde de Sévigné l' emploie au figuré fort joliment, à son ordinaire. Mde de Vins me parut hier fort tendre pour vous, c' est-à-dire, à sa mode; mais sa mode est bonne. Il ne me parut aucun interligne à ce qu' elle disoit Voilà encôre ce mot employé au masc. mais on peut douter si c' est cette illustre Auteur, ou l' Éditeur, ou l' Imprimeur qui lui a doné ce genre.

INTERLOCUTEUR


INTERLOCUTEUR, s. m. Il ne se dit que des personages qu' on introduit dans un Dialogue. M. Linguet dit aussi interlocutrice. "Les deux interlocutrices de ce Dialogue sont deux femmes frivoles et ridicules.

INTERLOCUTION


INTERLOCUTION, s. fém. INTERLOCUTOIRE, adj. et subst. INTERLOQUER, v. neut. et act. [Intêrloku-cion, toâ-re, loké: 2e ê ouv. 5e lon. au 2d] Ce sont termes de Prat. Interloquer, ou doner une Sentence, un Arrêt interlocutoire, ou d' interlocution; c' est doner un Jugement qui ordone une instruction préalable. "On a rendu un Arrêt qui interloque; et activement: on a interloqué cette afaire. = Un Auteur moderne dit, être interloqué, confus, embarrassé. "Il est fort comique que M. Carac... soit tout interloqué qu' on l' ait gâgné de vitesse. Tart. Épist. = Cette locution parait apartenir~ à quelque jargon de société. = On dit qu' une Dame à qui l' on anonça qu' on avoit doné une Sentence interlocutoire, se fâcha beaucoup, et dit qu' elle ne vouloit pas être interloquée. Elle prit ce mot pour une injure.

INTERLOPE


INTERLOPE, s. m. et adj. Ce mot nous est venu des Anglais. Vaisseau marchand, qui trafique en fraude, pour éviter de payer les droits, ou qui fait un comerce prohibé. On dit: faire un comerce interlope, ou le comerce par interlope. Marin.

INTERMèDE


INTERMèDE, s. m. INTERMÉDIAIRE, adj. [2e ê ouv. 3e è moy. au 1er, é fer. au 2d; dont la 4e è moy. et long.] Intermède ou entr' acte, est ce qu' on done entre les actes d' une pièce de théâtre. Voyez ENTR' ACTE. = Intermédiaire, qui est entre deux. "Temps, espace intermédiaire. _ On disait aussi;tems intermédiat; et l' Acad. le dit encôre. _ Intermédiat est subst., en termes de Chancellerie. Lettres d' intermédiat. Trév. Acad. = M. Linguet emploie intermédiaire substantivement. "Une vieillesse anticipée, qui succède sans intermédiaire à l' enfance. _ Il me semble qu' en cet endroit, intermédiaire vaut mieux qu' intervalle. Mais l' usage ne l' a pas encôre admis.

INTERMINABLE


INTERMINABLE, adj. [2e ê ouv. pénult. dout.] Qui ne saurait être terminé. "Questions, dificultés interminables.

INTERMISSION


INTERMISSION, s. f. INTERMITTENCE, s. f. INTERMITTENT, ENTE, adj. [In--têrmi-cion, tance, tan, tante: 2eê ouv. 4e lon. aux 3 dern.] Ils expriment tous trois, interruption, discontinuation: mais le 1er est du langage comun. "Il travaille sans intermission. "La fièvre lui a duré trois jours sans intermission: les deux aûtres ne se disent que du pouls, et de la fièvre; pouls intermittent, fièvre intermittente. "L' intermittence du pouls, de la fièvre.

INTERNE


INTERNE, adj. [2e ê ouv. 3e e muet.] Qui est au dedans. Qualité, vertu interne; Principes, caûses internes. Voyez INTÉRIEUR.

INTERNONCE


INTERNONCE, s. m. Ministre chargé des afaires de Rome, au défaut d' un Nonce. "L' Internonce de Bruxelles.

INTERPELLATION


INTERPELLATION, s. f. INTERPELLER, v. act. [On pron. les 2 l: 2e ê ouv. 3eé fer. Intêrpél-la-cion, .] Ils expriment, en termes de Palais, l' action de sommer quelqu' un de répondre sur la vérité ou la fausseté d' un fait. "Je vous interpelle de dire la vérité. "Il fut interpellé de répondre. "Le Sénat, qui favorisoit le Luthéranisme, interpella l' Évêque. P. Fabre. "Il ne répondit point à l' interpellation.

INTERPOLATEUR


INTERPOLATEUR, s. m. INTERPOLATION, s. f. INTERPOLER, v. act. [Intêrpola--teur, la-cion, lé: 2e ê ouv. dern. é fer. au dern.] Interpoler, c' est insérer un mot, une phrâse dans le texte d' un manuscrit. Interpolateur, celui qui interpole. "Interpolation, action d' interpoler.

INTERPOSER


INTERPOSER, v. act. INTERPOSITION, s. f. [Intêrpozé, zi-cion: 2e ê ouv. 4e é fer. au 1er; l' o est long devant l' e muet: il interpôze, interpôzera, etc.] Ils ne se disent au propre, qu' en Astronomie: Se mettre entre deux. "La Lune venant s' interposer entre le Soleil et la Terre; quand la Terre s' interpôse entre la Lune et le Soleil. "L' interposition de la Lune, de la Terre, etc. = Au figuré, ils signifient faire intervenir et intervention. "Interposer l' autorité, la faveur, le crédit, la médiation de... Interposer son autorité, ses bons ofices. "L' interposition de l' autorité du Roi. "Négocier par persones interposées, par la médiation, l' entremise de, etc.

INTERPRÉTATIF


INTERPRÉTATIF, ÎVE, adj. INTERPRÉTATION, s. f. INTERPRèTE, s. m. et f. INTERPRÉTER, v. a. [2eê ouv. 3e é fer. aux deux prem. et au dern.; è moy. au 3e. Intêr--prétatif, tîve, ta-ci-on, prète, prété.] Interpréter, c' est 1°. Traduire d' une Langue en une aûtre. = 2°. Expliquer ce qui est obscur ou caché. "Comment interprétez-vous ce passage? Interpréter les songes. "Vouloir interpréter les pensées, les intentions. = 3°. Prendre en bone ou en mauvaise part. "Interpréter en bien, en mal. "Cela peut être diversement interprété. = Interprétatif, qui interprète, qui explique ce qui est obscur ou équivoque. Il ne se dit que des chôses. "Déclaration interprétative. = Interprétation, action d' interpréter; explication, etc. Il a tous les sens de son verbe. "L' interprétation de l' Écriture Sainte. "Doner une telle interprétation à un tel texte. "L' interprétation des songes. "Cela peut soufrir diverses interprétations; est sujet à interprétation. "À~ force de commentaires, on n' entendit plus ni le texte, (de l' Alcoran) ni l' interprétation. Hist. de Saladin.
   Interprète, c' est 1°. celui qui interprète une Langue en une aûtre. "Savant, habile, fidèle Interprète. = 2°. Celui qui éclaircit le sens d' un Auteur, d' un discours. "Cela n' a pas besoin d' interprète. "L' Église est l' interprète infaillible de la Sainte Écriture. = 3°. Celui qui a charge de faire conaitre les intentions, les volontés d' un aûtre. "Un tel sera mon interprète auprès de vous. "Les Interprètes des Dieux, chez les Payons; les Interprètes des volontés du Prince. = On dit, figurément, que "les yeux sont les interprètes de l' âme. = 4°. Celui qui explique ou qui présage quelque chôse. "Interprètes des songes, etc. = Voyez TRUCHEMENT.
   REM. Interprète n' est guère d' usage au fém. On le dit au masc. pour les femmes comme pour les hommes; et j' aimerais mieux dire, que la tradition est le seul interprète de l' Évangile, que de dire, d' après Bossuet, qu' elle en est la seule interprète. _ L' Acad. met pourtant une phrâse toute pareille. "L' Église est la seule interprète sûre de l' Écritûre Sainte. _ Je dis mon sentiment, et je m' en raporte à de plus habiles.

INTERRèGNE


INTERRèGNE, s. m. [Intêr-règne, 2e ê ouv. 3e è moy. Mouillez le gn; 4e e muet.] Intervale de tems, pendant lequel il n' y a pas de Roi. "Pendant l' interrègne. = On en étend l' emploi aux Chefs des Républiques, quoiqu' ils ne règnent pas, à proprement parler. "Lorsque les Romains ne convenoient pas pour l' élévation des Consuls, il y avoit un interrègne. "Après la mort du Doge de Venise, l' interrègne est fort court.

INTERROGATIF


INTERROGATIF, ÎVE, adj. INTERROGATION, s. m. INTERROGATOIRE, s. m. INTERROGER, v. a. [Intérogatif, tîve, ga--cion, ga-toâ-re, gé: 1re lon. r forte, 2e é fer. M. de Wailly, dans le Rich. Port. met un acc. grâve sur l' é; il supôse donc que l' è est moyen; je le crois fer., dans le Dict. Gram. on dit qu' il est ouv.: c' est une erreur encôre plus grande. 5e lon. au 2e et au 4e.] Interroger, c' est faire une question, une demande à.. Interrogatif, qui sert à interroger. Interrogation, question, demande. Interrogatoire, se dit, et des questions que fait le Juge, et des réponses de celui qui est interrogé. "Les Examinateurs l' ont interrogé; le Juge l' a interrogé. Pourquoi m' interrogez-vous? _ "Termes interrogatifs; particules interrogatives, comme, Quand? ? etc. "Répondre aux interrogations. "Subir l' interrogatoire. "Prêter l' interrogatoire sur faits et articles. = Interroger. Voyez QUESTIONER.
   REM. 1°. Interrogatoire ne se dit qu' au Palais: Interrogatif ne s' emploie qu' en Gramaire. Interrogation et Interroger, sont du langage comun et de tous les styles.
   2°. Quelques-uns disent point d' interrogation; d' aûtres, l' Acad. entre aûtres, point interrogant (?).
   3°. Les phrâses interrogatives se forment de deux manières; ou par les pronoms interrogatifs, qui, lequel, quoi, quel, que; et les adverbes, , quand~, comment, combien, etc. "Lequel voulez-vous? "Que souhaitez-vous? "D' où venez-vous? etc. Ou par les pronoms personels, je, vous, il, etc. "Ai-je bien entendu? Avez-vous fait? Veut-il venir? etc. Que si le nominatif du verbe est un nom, il précède le verbe, et l' on met après le pronom personel de la 3e persone. "L' homme a-t-il été créé pour imiter les animaux? = Quand la phrâse comence par un pronom interrogatif, employé dans un cas oblique, c. à. d. dans tout autre cas que le nominatif, le nom se met après tout le verbe. "À~ quoi pense cet homme? De quoi se mêle cette femme? On peut dire aussi: À~ quoi cet homme pense-t' il? À~ quoi a-t' il pensé? De quoi cette femme se mêle-t' elle? de quoi s' est-elle mêlée? _ Remarquez que le pronom personel surajouté doit toujours suivre le nom, et qu' il ne peut jamais le précéder, même en vers.
   Va-t' il sur nous fondre un nouvel orage?
       Gustave de Piron.
Il faut dire, un nouvel orage va-t' il fondre sur nous?
   4°. Une des propriétés du sens interrogatif, employé avec le verbe régissant, est de changer les modes, et quelquefois les tems des verbes régis. Ainsi l' on dit en afirmant, vous pensiez qu' il venait; vous avez cru qu' il était venu, et en interrogeant; pensiez-vous qu' il vînt? Croyez-vous qu' il fût venu? mettant le subjonctif au lieu de l' indicatif. Quand le verbe régissant est au présent, on met avec l' interrogation, le présent du subjonctif ou le futur de l' indicatif. "Je crois, qu' il viendra? Puis-je croire qu' il viène ou qu' il viendra. = Remarquez pourtant que quand ces verbes sont employés dans un sens tout-à-la fois interrogatif et négatif, ce sens équivaut au sens afirmatif, et demande l' indicatif, et non le subjonctif. Ainsi l' on dit: croyez-vous qu' il soit sincère? Et, ne croyez-vous pas qu' il est sincère? * On lit, dans le JOURN. DE MONS. "Ne trouvez-vous pas que le portrait d' un parvenu soit une des plus agréables pièces de Mr. de la Louptère? _ Je pense qu' il falait dire, est une, etc.
   5°. Quand le sens est interrogatif et négatif tout-à-la fois, il faut mettre les deux négations ne et pas. P. Corneille y a souvent manqué.
   Que ne permettra-t' il à son ressentiment?
       Polieucte.
  Et jusques à quel point ne porte sa vengeance,
Une juste colère avec tant de puissance.
       Pertharite.
  Mais de quoi n' est capable un malheureux Amant?
      Rodogune.
  Quelles peines depuis grands Dieux! n' ai-je souffertes?Ibid.
  Que n' en ai-je souffert, et que n' a-t' elle ôsé etc. etc.
Dans tous ces exemples, il faut ajouter pas: ne permettra-t' il pas? Ne porte pas; n' est pas capable, n' ai-je pas soufertes, n' a-t' elle pas ôsé, etc.
   6°. Les pronoms et les adverbes interrogatifs régissent quelquefois l' infinitif sans préposition. "Que faire? Qui consulter? où aller? où en trouver? etc. On sous-entend, que puis-je, que doit-on, etc.

INTERROMPRE


INTERROMPRE, v. act. INTERRUPTION, s. f. [Intéronpre, rupcion: r forte, 2eé fer. dans le Rich. Port. on le marque comme moyen, et Dans le Dict. Gram. comme ouvert: je le crois fermé.] Interrompre, c' est empêcher la continuation. Il régit les persones et les chôses. "On l' a interrompu dans sa harangue, dans son travail: "On a interrompu deux fois le sermon. "J' ai été obligé d' interrompre cet ouvrage. = Dans le discours familier, on dit, sans vous interrompre, tout en interrompant: c' est pour faire une espèce d' excuse de ce qu' on interrompt le discours de quelqu' un. = Interruption, action d' interrompre, ou état de ce qui est interrompu. "La moindre interruption peut troubler un Orateur. "Interruption du travail, du comerce, etc.

INTERSTICE


INTERSTICE, s. m. Intervale de tems. Il ne se dit qu' en parlant du tems que l' Église fait observer entre la réception de deux Ordres Sacrés. "Garder les interstices; et, en Physique, des petits intervales que laissent entre elles les particules ou les molécules, dont les corps sont composés: "les interstices de l' eau.

INTERVALLE


INTERVALLE ou INTERVALE, s. m. [Quelques-uns le font mal à propôs fém. On doit dire, un grand intervale, et non pas une grande intervale.] Distance d' un lieu, ou d' un tems à un aûtre: "Il y a un grand intervale entre cette ville et cette aûtre; tant d' années d' intervale entre le règne de ce Prince et celui de cet aûtre. "En rangeant une armée en batâille, il faut laisser des intervales entre les batâillons et les escadrons. "Ce fou a de bons intervales; des intervales lucides, etc. = On dit adverbialement, sans intervale au sing. et par intervales au pluriel. "Il y travaille sans aucun intervale. "Sa maladie le quite et le reprend par intervales.

INTERVENIR


INTERVENIR, v. n. INTERVENTION, s. f. [Intêrveni, van-cion: 2e ê ouv. 3e e muet au 1er, lon. au 2d.] 1°. Ils expriment l' action d' entrer dans une afaire; de demander d' être reçu dans une instance. "Intervenir dans un contrat, dans un procês. "Cette intervention a été mendiée; n' a pas été admise. = 2°. Ils marquent aussi l' action de se rendre médiateur, ou d' interposer son autorité, son crédit. "Le Pape intervînt dans le différend de ces deux Princes, pour les acorder. "L' autorité Souveraine intervint dans cette afaire. "L' intervention de l' autorité royale devint nécessaire. = 3°. Intervenir a un 3e sens, que n' a pas intervention. Il se dit au Palais des jugemens, qui se rendent pendant un procês; et de toutes les chôses qui arrivent dans le cours d' une afaire. Il intervint plusieurs Arrêts: "Que d' incidens intervinrent pendant cette afaire? = On retranche quelquefois le pronom impersonel et l' article du nom. "La cause portée à l' Audience, intervint Sentence contradictoire. Causes célèbres.

INTERVERTIR


INTERVERTIR, v. act. INTERVERSION, s. f. DÉRANGER, DÉRANGEMENT. "Intervertir l' ordre de la succession. "L' interversion de l' ordre de la succesion; "L' interversion de l' ordre, des rangs. = L' emploi de ces mots n' est pas fort étendu. _ M. Linguet, dit intervertion des lois: il me semble qu' il n' est guère usité avec lois: pour tion au lieu de sion, il faut le mettre sur le compte de l' Imprimeur.

INTESTAT


INTESTAT, adj. et adv. [Intèsta; 2e è moy. on ne prononce pas le t final.] Terme de Droit. "Mourir intestat; sans avoir testé. "Hériter ab intestat, c' est hériter d' une persone, morte sans avoir fait de testament, ou dont le testament est nul: il se porte pour héritier ab intestat. Voy. AB INTESTAT, sous la lettre A. = Un Auteur moderne a dit, intestable, qui ne peut tester. "Ils ont été regardés comme intestables, et inhabiles à certaines fonctions de la vie civile. _ Cela sent le factum.

INTESTIN


INTESTIN, INE, adj. INTESTINS, s. m. pl. INTESTINAL, ALE, adj. [Intès-tein, tine, tein, tinal, nale: 1re lon. 2e è moy.] Intestin, qui est au dedans. "Mouvement intestin; douleur, chaleur, fièvre intestine. _ Guerre, discorde intestine.
   Mais armant tôt ou tard ses haînes intestines,
   L' Écosse peut encor sortir de ses ruines.
       Gress. Édouard.
Intestins, boyaux: Il a les intestins gangrenés. = Sing. "Le gros intestin. = Intestinal, qui apartient aux intestin: "Canal intestinal.

INTIMATION


INTIMATION, s. f. INTIMER, v. act. [Intima-cion, .] Intimer, c' est 1°. En termes de Pratique, signifier avec l' autorité du Magistrat: "Il lui a fait intimer la vente de ses meubles. = C' est aussi apeler en Justice. "Il l' a intimé. = Subst. "L' intimé, l' intimée: "L' apelant et l' intimé; celui, qui apèle et celui, qui est apelé. = 2°. Intimer un Concile, c' est assigner le lieu et le tems, auquel il doit se tenir. = Intimation, est l' acte par lequel on intime. "Intimation en cas d' apel. "L' intimation du Concile.

INTIME


INTIME, adj. INTIMEMENT, adv. [3e e muet, me, meman.] Ils se disent de celui pour qui l' on a une afection très-forte. "Ami, amîe intime. = Subst. "C' est son intime. SÉV. ACAD. = On dit aussi, union, liaison intime. = Intimement, avec une afection très-particulière; avec une liaison très-étroite. "Ils sont intimement unis.

INTIMIDER


INTIMIDER, v. act. Doner de la crainte à... "Il ne faut pas trop intimider les enfans. "On n' a qu' à l' intimider pour venir à bout de lui. "Il est fort aisé à intimider. "Il était fort intimidé. "Il s' intimide bientôt. = * Le Dict. de Trév. met intimidation comme plus énergique que menace. Il n' est d' usage qu' au Palais. L' Acad. ne le met pas.

INTIMITÉ


INTIMITÉ, s. f. Liaison intime. "Ils vivent dans la plus grande intimité. "Je doute que leur intimité soit telle que vous le dites.

INTITULÉ


INTITULÉ, s. m. INTITULER, v. act. [dern. é fer. aux deux.] Titre. Doner un titre. Le substantif ne se dit que des actes. "L' intitulé de l' acte, de l' inventaire. = Quelques-uns le disent des livres. "Vous voyez par l' intitulé seul que ce n' est point pour les hommes ordinaires que M. de Mayer donne ici ses sublimes leçons. Ann. Lit. = Le verbe se dit des livres, comme des actes. "Il a intitulé sa pièce, le Devin du Village. "Intituler un acte. = Quelques-uns disent intitulation en parlant d' un livre. Je le préfèrerais à intitulé, mais chacun a son goût, et il ne faut pas en disputer.

INTOLÉRABLE


INTOLÉRABLE, adj. [3e é fer. 4e dout.] Qui ne se peut tolérer. "Cela est intolérable. Il se dit ordinairement sans régime. "Dans l' acâblement de tous les maux, Job n' en trouvoit point de plus intolérable que la multitude de ses acusateurs qui lui disputoient son innocence. Segaud. Je crois pourtant qu' il peut régir la prép. à: "Des rapines intolérables aux paûvres de la campagne.

INTOLÉRANCE


INTOLÉRANCE, s. f. INTOLÉRANT, RANTE, adj. INTOLÉRANTISME, s. m. [3e é fer. 4e lon.] Ils sont le contraire de tolérance, tolérant, tolérantisme. = Ils ne se disent qu' en matière de Religion. "On ne distingue pas assez l' intolérance théologique de l' intolérance civile. "Oui, je suis intolérant pour les opinions contraires à la foi, mais non pour les persones, qui errent. "Le tolérantisme, est l' indiférence par raport à toutes les Religions: "L' intolérantisme est le sentiment de ceux qui ne croient salutaire que la seule religion véritable.

INTONATION


INTONATION, s. f. [Intona-cion.] Manière d' entoner un chant. "Mauvaise intonation. "Manquer à l' intonation.

INTRADUISIBLE


INTRADUISIBLE, adj. Qui ne peut être traduit. Fréron avait employé ce mot qu' il imprima dabord en italique pour montrer qu' il le hazardait. On s' en est servi ensuite sans cette prêcaution dans l' Ann. Litt. et âilleurs. "Ces facéties (anglaises) tombant sur des usages anciens sont par là même intraduisibles pour ceux, qui ne sont pas au courant de ces usages. Fréron. "S' il y a un Poète intraduisible, c' est assurément Théocrite. Ann. Litt. = L' Acad. ne met pas ce mot. Trév. le met sans remarque. Dans le Rich. Port. on dit qu' il est peu usité.

INTRAITABLE


INTRAITABLE, adj. [Intrétable: 2eé fer. 3e dout.] Rude, d' un comerce dificile; qui n' est pas traitable. "Il ou elle est intraitable. "Esprit, humeur intraitable. "Des enfans mal nés... des parens intraitables ou fâcheux à vivre. Chemin. = * M. Clément le dit des sujets de litératûre, qui ne peuvent être traités. "Ce qui rend intraitable un Poème sur l' Agricultûre, c' est que, etc. Il est à souhaiter que l' usage admette l' emploi de ce mot dans cette acception.

INTRÉPIDE


INTRÉPIDE, adj. INTRÉPIDEMENT, adv. INTRÉPIDITÉ, s. f. [2eé fer. 4e e muet dans les 2 premiers: en au 2d a le son d' an: intrépideman.] Ils expriment une fermeté inébranlable dans le péril. "Homme, courage intrépide. "Il soutint intrépidement l' ataque de l' énemi. "Il montra une merveilleuse, une héroïque intrépidité.
   INTRÉPIDE, dans le discours ordinaire, aime à suivre le substantif. "Ces guerriers intrépides. En vers et dans le discours soutenu, il peut le précéder. "Mille intrépides guerriers. Rouss. * Un des Auteurs des Let. Édif. l' emploie substantivement. "Ils laissèrent ces intrépides se rembarquer avec tout leur butin. _ Le P. Paulian dit aussi: "Ces bruits effroyables, qui jettent la consternation dans l' âme des plus intrépides. Let. sur l' Électricité. Mais en cet endroit, il est adjectif; et l' on sous-entend hommes, comme on le fait pour beaucoup de superlatifs.

INTRIGANT


INTRIGANT, ANTE, adj. INTRIGUE, s. f. INTRIGUER, v. a. [Intrigan, gante, ghe, ghé: 3e lon. aux 2 premiers, e muet au 3e, é fer. au 4e. _ Quelques-uns écrivent Intriguant avec un u, par analogie; mais cet u n' est nécessaire que dans intrigue, intriguer, pour doner au g un son fort, qu' il n' a pas devant l' e; mais comme le g a naturellement ce son devant l' a, l' u y est inutile.] Intrigue, est 1°. Pratique secrette qu' on emploie pour faire réussir une afaire. "Former, conduire, mener une intrigue. "Déméler, débrouiller, dénouer une intrigue. "Les intrigues de la cour, du cabinet; vivre d' intrigues. On le personifie quelquefois, et on le met pour les intrigans. "Des biens acoutumés à être le partage de l' intrigue, quelque--fois celui du crime, et presque toujours refusés au mérite. Le P. Du Rivet. = 2°. Dans le Dramatique, c' est le noeud, et les diférens incidens qui le forment. "L' intrigue de cette Comédie est bien démélée, ou, trop compliquée. = 3°. En st. famil. embarras, incident fâcheux. "Être hors d' intrigue; se tirer d' intrigue. Il se dit quelquefois d' un malade, pour, hors d' afaire. = 4°. Comerce secret de galanterie.
   Rem. Ce mot est pris de l' Italien. * Aûtrefois Plusieurs le fesaient masc. et quelques Poètes disaient intrique pour le faire rimer avec pratique, et autres mots en ique. * P. Corneille fournit des exemples de l' un et de l' aûtre.
   Mais enfin ces pratiques,
   Peuvent vous engager en de fâcheux intriques.
       Le Menteur.
  Je connois avant lui la Cour et ses intriques,
  J' en connois les détours, j' en connois les pratiques.
       Polieucte.
Il écrit intrique, même en prôse. Voy. L' ÉPITRE, qui est avant la Comédie du Menteur.
   INTRIGANT, qui se mêle de beaucoup d' intrigues. (n°. 1°.) "Homme fort intrigant; femme fort intrigante. = Subst. "C' est un intrigant, une intrigante.
   INTRIGUER, embârrasser: il ne régit que les persones. "Vous l' avez bien intrigué, parce que vous lui avez dit. "Elle était fort intriguée. Il se dit des chôses comme sujet: "Il (Ellis) remarqua que la surface de l' eau y était douce, ce qui l' intriga beaucoup. St. Pierre. = Quand il est neutre ou réciproque, il signifie faire des intrigues. LA TOUCHE croit le 2d meilleur; j' aimerais mieux le 1er, et dire, ils intriguent beaucoup, que de dire, ils s' intriguent beaucoup. _ L' Acad. les met tous deux sans remarque. Elle dit: "Il s' intrigue par tout: il intrigue continuellement. = S' intriguer, signifie plutôt, se doner beaucoup de peine et de soin pour faire réussir une afaire. "Il s' est beaucoup intrigué pour obtenir ce poste.

INTRINSèQUE


INTRINSèQUE, adj. INTRINSèQUEMENT, adv. [In-trein-sèke, sèkeman: les 2 premieres lon. 3e è moy. 4e e muet.] Ce sont termes de Philosophie. Intérieur, qui est au dedans. "Qualités, propriétés intrinsèques. = En parlant des monoies, valeur intrinsèque, c' est la valeur des espèces, par raport au poids. _ Voy. INTÉRIEUR. = "Cela est bon intrinsèquement.

INTRODUCTEUR


INTRODUCTEUR, TRICE, s. m. et f. INTRODUCTION, s. f. INTRODUIRE, v. act. [Introduk-teur, trice, duk-cion, duî-re: 1re lon. 3e lon. au dern.] Introduire, c' est faire entrer, doner entrée à... Introduire quelqu' un à la cour, à l' audience; un personage sur la scène, etc. "Il m' a introduit dans cette maison. "Il s' introduit par tout. = Figurément, doner cours à... "Introduire une coutume, un usage. "Depuis que le vice s' est introduit dans son âme, etc. "Gustave, nouveau Roi de Suède, l' introduisit (le luthéranisme) dans ses États. P. Fabre. = Introducteur, trice; celui, celle, qui introduit. Il ne se dit qu' au propre. "Il m' a servi d' introducteur. "Vous serez mon introductrice. _ Le fém. est dur à prononcer. Cependant quelques bons Auteurs s' en sont servi. Le Dict. de Trév. cite Nicole, et Richelet, Godeau. _ L' Acad. ne l' avait pas dabord mis: elle l' a inséré dans la dern. Édit. = Introduction, action d' introduire, se met au propre et au figuré. "Introduction de la sonde dans la vessie. "Introduction d' une coutume, d' un usage. "Introduction à une science. _ Au Palais, introduction d' une instance, comencement d' une procédûre.

INTROMISSION


INTROMISSION, s. f. [Intromi-cion.] Il se dit en Physique, de l' action de s' introduire. "L' intromission de l' air dans les interstices de l' eau.

INTRONISATION


INTRONISATION, s. f. INTRONISER, v. act. [Introniza-cion, nizé.] Ils ne se disent que de l' installation d' un Évêque dans son siège épiscopal. "Après son intronisation; après qu' il fut intronisé, on chanta le Te Deum.

INTROUVABLE


INTROUVABLE, adj. (st. famil.) Qui ne peut se trouver. "Vous êtes un homme introuvable.
   Mais, mon cher Saint-Geran, vous êtes introuvable.
   Que devenez-vous donc?
       Barthe.

INTRUS


INTRUS, ÛSE, adj. INTRUSION, s. f. [Intrûs, trûze; zion: 1re lon. 2e lon. aux 2 premiers.] Intrus, se dit de celui, qui est introduit par force, ou par ruse et contre le droit dans une dignité, ofice ou bénéfice éclésiastique. _ On le dit par extension des charges et des emplois. "Il s' est intrus dans cette charge, dans ce bénéfice. "Cette Abesse est intrûse. = Subst. "C' est un intrus. = Intrusion, est l' action par laquelle on s' introduit, etc. "Intrusion violente. "Il n' est dans ce poste que par intrusion.

INTUITIF


INTUITIF, IVE, adj. INTUITION, s. f. INTUITIVEMENT, adv. [Intu-itif; tîve, icion, tîveman: 1re lon. 4e lon. au 2d et au 4e, 5e e muet.] Termes de Théologie, qui ne se disent que de la vision béatifique. "L' intuition: la vision intuitive: voir Dieu intuitivement. "Être admis à la conoissance intuitive de Dieu même. Le P. Du Rivet.

INTUMESCENCE


INTUMESCENCE, s. f. [Intumé-sance: 3e é fer. 4e lon, 5e e muet.] Terme de Physique: l' action par laquelle quelque chôse s' enfle. "L' astre (la Lune) qui produit l' intumescence des eaux. Bufon.

INTUS-SUSCEPTION


INTUS-SUSCEPTION, s. f. [Intus-su--cèp-cion: 4e è moy.] Autre terme de Physique. Introduction d' un suc, d' une matière dans un corps organisé. "Les plantes se nourrissent et croîssent par intus-susception.

INVAINCU


*INVAINCU, ÛE, adj. Qui n' a pas été vaincu. P. Corneille avait fait ce mot, et il l' avait placé si heureusement, aussi bien qu' exorable, que de bonnes raisons parlaient en leur faveur: mais l' usage n' écoute, ni les raison, ni les étymologies. Rem. de L. Racine. = On lit dans Richelet que Messieurs de l' Acad. remarquaient que ce mot n' a d' usage qu' en poésie, et par oposition à invincible.
   Son bras est invaincu, mais non pas invincible.
       Corn.
Dans le Rich. Port. on se contente de dire que Corneille a employé ce mot, et l' on cite ce vers. L' Acad. n' a point mis invaincu dans son Dictionaire.

INVALIDE


INVALIDE, adj. INVALIDEMENT, adv. INVALIDER, v. act. INVALIDITÉ, s. f. [4e e muet aux 2 premiers, é fer. au 3e; de, deman, .] Invalide, dans le langage comun, infirme, qui ne saurait travailler, ni gâgner sa vie. "Les mendians tant valides qu' invalides; soldat invalide: "Il est invalide. = Subst. C' est un invalide. "L' Hôtel, l' Hopital des Invalides. = Fig. Qui n' a pas les conditions requises par les lois pour produire son éfet. Acte, donation, mariage invalide. = C' est dans ce sens qu' on dit: qu' un homme interdit contracte invalidement: "L' invalidité d' un contrat, d' un mariage: "Invalider un acte; le rendre nul, le déclarer, le rendre invalide.

INVARIABLE


INVARIABLE, adj. INVARIABLEMENT, adv. INVARIABILITÉ, s. f. [Invari-able, ableman, abilité: 4e dout. au 1er, e muet au 1er et au 2d.] Invariable, qui ne change, ne varie point. Invariabilité, qualité de ce qui est invariable. Invariablement, d' une manière invariable. "Il est invariable dans ses résolutions. C' est une régle invariable. "Constance invariable dans la pratique du devoir. Le P. Du Rivet. "Contestez-vous l' invariabilité de cette règle, de cette loi de la Natûre? "Il est invariablement ataché à son devoir.

INVASION


INVASION, s. f. [Inva-zion.] Action de celui, qui veut s' emparer. Rich. Port. Action par laquelle on envahit. Trév. Irruption faite dans un pays dans le dessein de le piller ou de l' envahir. Acad. La définition du Trév. n' est pas exacte; car l' invasion est plutôt une tentative faite pour envahir, que l' action même d' envahir. Il me parait aussi que quand on ne veut que piller, irruption est plus propre qu' invasion. Ainsi des deux membres de la définition de l' Acad. le 1er n' est pas fort juste. Je préfererais celle du Rich. Port. = Invasion, par lui-même ne régit que la prép. de: "L' invasion de la Grèce par les Turcs. _ Invasion en France, est le titre d' un Article de l' Hist. d' Angl. On dit irruption en France, et l' invasion de la France. Ce n' est qu' avec le v. Faire que ce mot régit en ou dans. "Les Tartares firent une invasion dans la Pologne. Acad. Encôre avec ce verbe, je pense qu' irruption vaux mieux. = Dans cette même Histoire d' Angleterre, le Traducteur (Madame de B.) emploie le génitif, mais assez mal, à mon avis. "En menaçant la France de l' invasion des forces réunies de l' Autriche, de l' Angleterre et de l' Espagne. Il falait dire, avec les forces réunies, etc. Car on n' envahit pas des forces, mais on envahit, on ataque un Royaume avec des forces.

INVECTIVE


INVECTIVE, s. fém. INVECTIVER, v. n. [Invèktîve, tivé; 2eè moy. 3e lon. 4e e muet au 1er, é fer. au 2d] Invective, parole, expression injurieûse et véhémente. Discours plein d' invectives. "S' emporter en invectives, à des invectives. = Invectiver, faire des invectives contre. "Invectiver contre quelqu' un, contre le vice, contre la Religion, etc.

INVENDU


INVENDU, ÛE, adj. [Invandu, dû-e, 1er et 2e lon. 3e lon. au second.] Qui n' a pas été encôre vendu. "Ces marchandises sont encôre invendûes. _ C' est un mot utile dans la conversation, et qui n' est pas du beau style. Richelet le met comme nouveau, et conseille de ne le hazarder que dans le satirique et le comique. Je ne vois pas qu' il ait aucun raport, ni à la satire, ni à la comédie. _ L' Acad. ne le met point.

INVENTAIRE


INVENTAIRE, s. m. [Invantère: 2e lon. 3e è moyen et long.] État, dénombrement des biens, etc. "Faire l' inventaire des biens, des meubles, des marchandises. "On l' a apelé à l' inventaire, etc.

INVENTER


INVENTER, v. act. INVENTEUR, TRICE, s. m. et f. [Invanté, invan-teur, trice: 1re et 2e lon.] Inventer, c' est trouver quelque chôse de nouveau par la force de son génie. "Inventer un art, une science, un systême, une machine, une mode, un jeu, etc. = 2°. Suposer, controuver. "Inventer une fausseté, une calomnie: "Cela n' est pas vrai: il l' a inventé. = On dit, proverbialement, qu' un homme n' a pas inventé la poûdre, pour dire qu' il a peu d' esprit. Voy. POûDRE.
   INVENTER s' emploie quelquefois neutralement. "Il aimoit à inventer et à innover. Le P. Fontenai.
   INVENTEUR, TRICE, celui, celle qui a inventé. "L' inventeur de l' art d' écrire, de l' Imprimerie: "Cérès pâsse pour l' inventrice du labourage. "Il est l' inventeur de cette calomnie.

INVENTIF


INVENTIF, IVE, adj. INVENTION, s. fém. [Invantif, tîve, invan-cion: 1re et 2e. lon. 3e lon. au 2d.] Inventif, qui a le génie, le talent d' inventer. "Homme, esprit inventif: femme fort inventive. = Invention se prend, 1°. pour la disposition de l' esprit à inventer. "Cet homme est plein d' invention. "Il a ou il n' a pas d' invention. "Ce Poète, ce Peintre a l' invention belle, heureûse. = 2°. Pour l' action d' inventer. "L' invention de l' Imprimerie, de la Boussole, etc. = 3°. Pour la chôse inventée. "Belle, heureûse invention. "Cet ouvrage est plein de belles inventions. = Invention, découverte, (synon.) On apèle seulement invention ce que l' on trouve de nouveau; mais on ne doit apliquer le nom de découverte qu' à ce qui est non-seulement nouveau, mais en même tems curieux, utile et dificile à trouver. Encycl. Il me semble aussi, dit Mr. Beauzée, (et il lui semble bien) que l' idée de la découverte tient plus de la science; et que celle de l' invention tient plus de l' art. Une découverte étend la sphère de nos conaissances: une invention ajoute aux secours dont nous avons besoin. "Une découverte peut être dûe au hazard; mais une invention ne peut être que le résultat d' une recherche expresse. Beauzée. = Pour les pays nouvellement conus, on dit, découverte, et non pas invention. "La découverte du nouveau monde; mais l' usage veut qu' on dise l' invention, et non pas la découverte de la Sainte Croix; des Reliques longtems inconûes, etc.
   Rem. * Un Auteur moderne a dit, faire des inventions, pour, de nouveaux établissemens: l' expression est vicieûse. "Il a ajouté les inventions utiles qu' on y a faites (dans ces villes). Géog. Mod. = Quelques-uns apèlent faire des inventions, répandre des calomnies. C' est une expression populaire.

INVENTORIER


INVENTORIER, v. act. [Invantori-é: 2e et 3e lon. dern. e muet.] Mettre dans un Inventaire. "Inventorier des meubles, des livres, les pièces d' un procês.

INVERSABLE


INVERSABLE, adj. Il ne se dit qu' en parlant d' une voitûre qui ne peut verser. On cherche depuis long-temps à rendre les voitûres inversables. _ Richelet le done comme un mot nouveau. L' Acad. l' a admis dans son Dictionaire.

INVERSION


INVERSION, s. f. [Invêr-sion, en vers, si-on: 1re lon. 2e ê ouv.] Dérangement des mots dans la construction, sur-tout lorsqu' on place avant ceux qui ont acoutumé de marcher après. Les inversions sont souvent dûres et forcées, quelquefois élégantes, quelquefois nécessaires. Exemple de ce dernier câs:
   Enrichir de ses dons, et couroner la France~.
       Thomas Jumonville.
Il aurait été mieux de dire:
De ses dons enrichir et couroner la France.
parce que de ses dons étant le régime des deux verbes, doit être devant ou après tous les deux. = Pour la même raison, l' inversion n' est pas naturelle dans les vers suivans, où Mr. de Saint-Ange parle de la Lune.
   Qui croît, et tour-à-tour décroît par intervalle.
L' ordre naturel demandait qu' on dit: qui, tour-à-tour, croit et décroit; ou, qui croit et décroit tour-à-tour.

INVESTIR


INVESTIR, v. act. INVESTISSEMENT, s. m. INVESTITûRE, s. fém. [Invèsti, ti--ceman, titûre: 1re lon. 2eè moyen, 4e e muet au 2d, lon. au 3e.] Investir a deux significations: 1°. Doner le titre et la possession d' un fief. "L' Empéreur l' a investi de ce Duché, etc. = 2°. Environer une place de guerre, ou enveloper des troupes, en sorte que tous les passages pour le secours et la retraite soient fermés. "Il investit la place avec trois mille chevaux. "Il tint l' armée investie dans ces défilés.
   Ta main guidoit Jacob par l' Egypte investi.
       Le Franc.
= Investitûre répond au 1er sens; investissement au 2d: "Doner l' investitûre d' un fief. "L' investissement de la place a eu lieu un tel jour. * Fontenelle a confondu ces deux mots. "Les ennemis ayant été obligés de faire en même temps l' investitûre (l' investissement) de Dunquerque, de Bergue, etc.

INVÉTÉRER


INVÉTÉRER, (s' ) v. réc. [Invétéré, trois é fermés: 1re lon.] Devenir vieux, et dificile à guérir. Il se dit au propre, des maladies, et au figuré, des mauvaises habitudes. "Cette maladie s' est invétérée. "Quand les vices se sont invétérés dans une âme, il est bien dificile de les corriger. = Avec le v. laisser, il est neutre: "Il ne faut pas laisser invétérer les maladies, les mauvaises habitudes. = Mal invétéré, haine invétérée, etc.

INVINCIBLE


INVINCIBLE, adj. INVINCIBLEMENT, adv. [In-vein-cible, cibleman: 1re et 2e lon. 4e e muet.] Invincible, qu' on ne saurait vaincre. "Prince, armée, courage invincible. _ Figurément: "Obstacle, opiniâtreté invincible. "Argument, raison invincible. _ Ignorance invincible, ignorance des chôses, dont il est impossible qu' un homme ait eu conaissance. = Invinciblement, d' une manière à laquelle on ne peut résister. "Raison qui prouve invinciblement que, etc. Il ne se dit guère que dans cette ocasion.
   INVINCIBLE suit ordinairement le subst. En vers et dans la prôse poétique, il le précède élégamment.
   Rien n' en pouvoit dompter l' invincible poison.
       De Lille.
  Leur invincible fermeté
  Lasse enfin l' injuste fortune.
      Rouss.
  Par toi seul, Prince invincible, etc.
       Idem.
Invincible Prince sonerait fort mal.
REM. Rollin fait régir à invincible la prép. à: Peuples invincibles au fer et aux armes. "Le Roi seul invincible à tant de maux. _ Ce régime n' est pas fort usité: L' Académie n' en donne point d' exemple. Je n' ôse pourtant le condamner; et fût-il de l' invention de Rollin, je crois qu' il mérite d' être adopté.

INVIOLABLE


INVIOLABLE, adj. INVIOLABLEMENT, adv. [Invi-olable, lableman: 1re lon. 4e dout. au 1er, 5e muet aux deux.] Inviolable, qu' on ne doit jamais violer, enfreindre. "Serment, voeu, droit, asyle inviolable. = Qu' on ne viole point: C' est une loi, une coutume inviolable parmi ces peuples. "C' est un homme dont la parole est inviolable.
   INVIOLABLEMENT, d' une manière inviolable: "Il tient inviolablement ce qu' il a promis. "Cette règle est inviolablement suivie. Cochin.

INVISIBILITÉ


INVISIBILITÉ, s. fém. INVISIBLE, adj. INVISIBLEMENT, adv. [Invizibilité, zible, zibleman: 4e e muet au 2d et au 3e] Invisible, qui ne peut être vu. "Les Anges, les esprits sont invisibles. "Il a reçu un secours invisible. = En style famil. devenir invisible, disparaitre subitement. = Invisibilité, état de ce qui est invisible. "L' invisibilité des atômes, des esprits. = Invisiblement, d' une manière invisible. "Le Corps de J. C. est réellement, quoique invisiblement, sous les espèces sacramentales. "L' Esprit saint descend invisiblement dans les âmes bien disposées.
   INVISIBLE, dans le discours ordinaire, n' aime pas à précéder. En vers, il peut marcher devant.
   Ils tombent enchaînés d' ïnvisibles entrâves.
       Le Franc.
  Par d' invisibles feux périssoient consumées.
      De Lille.
  Par un invisible ressort.
       Gress.

INVITATION


INVITATION, s. fém. INVITER, v. a. [Invita-cion, .] Inviter, convier, prier de se trouver, d' assister à... "Inviter à des noces, à une cérémonie. "Inviter à dîner, à se trouver à une assemblée. = C' est aussi exciter à:
   Un exemple si beau vous invite à le suivre.
       Racine.
"Le beau temps nous invite à la promenade.
  Où le sommeil invite au fond d' un antre sombre.
          De Lille.
Dans le premier sens, il se dit des persones, et dans le second, des chôses. = Invitation est l' action d' inviter, dans la 1re acception. "Invitation à un festin, à une cérémonie. "Faire l' invitation à... Faire des invitations.

INVOCATION


INVOCATION, s. fém. INVOQUER, v. act. [Invoka-cion, voké: 1re longue, dern. é fer. au 2d.] Invoquer, c' est apeler à son secours une puissance divine. "Invoquer le St. Esprit, les Saints. "Invoquer Dieu à son aide. = Les Poètes invoquent Apollon, les Mûses, etc. = Invoquer régit les persones, et Implorer les chôses. "Invoquer un Saint, implorer son intercession.
   INVOCATION, action d' invoquer. "L' invocation des Saints est établie par toute la Tradition. Dans cette phrâse, il a le sens passif: il se dit des Saints qui sont invoqués. Dans la suivante, il a le sens actif, et se dit de celui qui les invoque. "C' est au tombeau même où s' ensévelit toute gloire humaine, que comence la gloire des Saints: c' est-là qu' ils revivent, pour ainsi dire du sein de la mort, pour recevoir l' encens et l' invocation du fidèle. Le P. Le Chapelain. = Dans un Poème, invocation se dit des vers par lesquels on s' adresse à quelque Divinité vraie ou fausse, pour lui demander son secours.
   Mûse, redis-moi donc quelle ardeur de vengeance
   De ces hommes sacrés rompit l' intelligence.
       Boil. Le Lutrin.
Descends du haut des Cieux, auguste vérité,
Répands sur mes écrits ta force et ta clarté.
       Volt. Henriade.

INVOLONTAIRE


INVOLONTAIRE, adj. INVOLONTAIREMENT, adv. [Involontère, tèreman: 1re et 3e lon. 4e è moy. et long, 5ee muet.] Involontaire est, 1°. ce qui est contre la volonté. "Action involontaire. = 2°. Qui est indépendant de la volonté. "La digestion est involontaire. "Mouvement indélibéré et involontaire. = "Faire quelque chôse involontairement; sans le vouloir, contre sa volonté.

INVOQUER


INVOQUER, Voy. INVOCATION.

INVRAISEMBLANCE


INVRAISEMBLANCE, s. f. INVRAISEMBLABLE, adj. [Invrèsanblance, blable: 1re et 3e lon. 2e è moy.] Ce sont les contraires de vraisemblance, vraisemblable. Ces mots sont assez nouveaux, sur-tout le subst. mais ils prènent faveur toujours davantage. "Cette invraisemblance fait beaucoup de tort à l' ouvrage. Ann. Lit. "L' invraisemblance de cette Fable (des Barmécides) ne peut produire aucune espèce d' intérêt. L' Ab. de Fontenai. "Toutes les acusations (contre Colomb) furent reçues, jusqu' aux plus invraisemblables, et aux plus absurdes. Robertson.

INUSITÉ


INUSITÉ, ÉE, adj. [Inuzité, té-e: 4e é fer. long au 2d.] Qui n' est point usité. "Cela est inusité. "C' est une chôse inusitée: Mot inusité: façon de parler inusitée.

INUTILE


INUTILE, adj. INUTILEMENT, adv. INUTILITÉ, subst. fém. [I-nutile, leman, lité, 4e e muet aux deux premiers, dern. é fer. au 3e.] Quelques Auteurs, et le P. Sicard entre aûtres, ont écrit inutil au masc. "Ces moyens ont tous été inutils. C' est contre l' usage, au moins actuel. Inutile est des deux genres. _ Qui ne sert à rien, qui n' est pas utile. "Travail, peine inutile. "Paroles, soins, précautions inutiles. "Homme inutile à tout, par défaut de talens. Homme inutile, par défaut d' ocupations ou de bone volonté. "Il ne faut pas le laisser inutile: il faut l' employer.
   REM. Inutile régit la prép. à devant les noms; mais, par lui-même, il ne la régit pas devant les verbes. "Lorsqu' il vit son abjuration inutile à lui sauver la vie. Boss. Ce régime est inusité. = Avec le v. être, il régit de, quand ce verbe est impersonel, et à, quand il ne l' est pas. "Il est inutile de dire cela. "Cela est inutile à dire. "Ce qui est inutile de savoir. Mallebr. Il faut, ce qui est inutile à; ou bien, ce qu' il est inutile de savoir.
   INUTILEMENT, envain, sans utilité. "Travailler, se fatiguer, se tourmenter inutilement. "Vous le tenteriez inutilement. = Il se met quelquefois à la tête de la phrâse comme envain; et alors le pronom nominatif se met après le verbe, mais cette construction ne vaut rien, quand cet adverbe n' est pas à cette place. "Inutilement se flatterait-on que, etc. est bien. * Il est des ocasions (évènemens) qu' inutilement se flateroit-on de présenter au naturel. Let. Édif. Là il falait dire qu' inutilement on se flaterait, etc. Voy. VAINEMENT.
   INUTILITÉ: 1°. Manque d' utilité. "L' inutilité de ses peines, de ses tentatives. "L' inutilité de ses efforts (de M. de Bufon) est une nouvelle preuve qu' il faut absolument recourir à l' action immédiate du Tout-puissant, pour trouver une cause capable de produire un déluge universel. Les Helv. = 2°. Défaut d' emploi ou d' ocasion d' être utile. "On le laisse mal-à-propos dans l' inutilité. = 3°. Chôse inutile. En ce sens, il se dit au pluriel. "Il ne dit que des inutilités. Discours, ouvrage rempli d' inutilités. = Ce mot était nouveau du tems de Bouhours, mais il le trouvait énergique. "Les sciences ont leurs inutilités.

INVULNÉRABLE


INVULNÉRABLE, adj. [3e é fer. 4e dout. dern. e muet.] Qui ne peut être blessé. Vous n' êtes pas invulnérable. = Figurément. "Il est invulnérable à tous les traits de la Médisance. "Vous vous exposez aux tentations, vous vous jetez au milieu de tous les traits des énemis du salut, comme si vous étiez invulnérable.

IO


IO, ION: ils sont ordinairement diphtongues. Fiole, pioche, ambition. Pron. fio-le, pio-che, anbi-cion. En vers, ils sont de deux syllabes: fi-ole, pi-oche, anbici-on.
   REM. Ronsard avait déjà dit dans la Préface de la Franciade: "Tu te doneras de garde, si ce n' est par grande contrainte, de te servir des mots terminés en ion, qui passent plus de trois ou quatre syllabes, comme abomination, testification; car tels mots sont languissans, et ont une traînante voix, et, qui plus est, ocupent lauguidement la moitié du vers. _ Tel est le second hémistiche de ce vers de St. Amand.
   Verse un sacré trésor de bénédictions.
Et celui de Corn. dans le Cid.
   Qui pâsse le commun des satisfactions.
Ces mots sont plus tolérables dans le 1er hémistiche qu' à la fin du vers. Malherbe a souvent employé, dans ses vers, des mots de quatre syllabes, terminés en ion, comme compassion; mais il n' en a jamais employé qui fussent de davantage. Mén.

\ïOTA


\ïOTA, s. m. Lettre de l' alphabet grec. Il a fourni à quelques expression familières de la langue française. "Il n' y manque pas un ïota: "Il n' y a pas un ïota à retrancher. "Il est si exact, qu' il ne manque pas un ïota.

IRASCIBLE


IRASCIBLE, adj. Il ne se dit que dans ces phrâses surannées. "L' apétit, ou la partie, ou la faculté irascible; la faculté de l' âme, par laquelle elle se porte à surmonter les dificultés qu' elle trouve à la poursuite du bien, ou à la fuite du mal. = "On dit encôre d' un homme, qu' il est irascible. MARIN. C. à. d. porté à la colère, se fâchant aisément.

IRE


IRE: Cette pénult. est longue: empire, écrire, sire, il soupire, etc. mais l' i est bref devant une syll. masc. soupirer, désirer; il soupirait, il inspira, etc.

IRE


IRE, s. f. [1re lon. 2ee muet.] Colère. _ Il est vieux, et ne se dit plus que dans la haute Poésie, et dans la marotique. "L' ire des Dieux.
   Sans trop d' effroi, je m' atends à leur ire.
       Gress.
  Avoir des sots excité l' ire:
  L' ire des sots et des esprits malins.
      Rouss.

IRONIE


IRONIE, s. fém. IRONIQUE, adj. IRONIQUEMENT, adv. [Ironî-e, nike, nike--man: 3e lon. au 1er, 4e e muet dans tous.] L' ironie est une figure du discours, par laquelle on dit le contraire de ce qu' on veut faire entendre. "Il dit cela par ironie. "Les esprits forts savent-ils qu' on les appelle ainsi par ironie? LA BRUY.
   De grace, épargnez-nous cette froide ironie.
       La Chaussée.
= Ironique, où il y a de l' ironie~. "Discours, ton ironique. = Ironiquement, d' une manière ironique. "Il dit cela ironiquement.

IRRAISONABLE


IRRAISONABLE, adj. [Ir-rézonable: 2e é fer. 4e dout.] Qui n' est pas doué de raison. "Animal irraisonable.

IRRÉCONCILIABLE


IRRÉCONCILIABLE, adj. IRRÉCONCILIABLEMENT, adv. Qui ne se peut réconcilier. "Haine, inimitié irréconciliable. Acad. "Enemis irréconciliables. "Ils ont rompu, ils sont brouillés irréconciliablement.

IRRÉFORMABLE


IRRÉFORMABLE, adj. Qui ne peut être réformé. "Jugement irréformable.

IRRÉFRAGABLE


IRRÉFRAGABLE, adj. [2e é fer. 4e dout.] Qu' on ne peut contredire. "Docteur, autorité irréfragable. = Qu' on ne peut récuser. "Témoin, témoignage irréfragable. = L' Acad. remarque qu' il n' est en usage que dans l' École. Il me semble qu' elle en resserre trop l' emploi.

IRRÉGULARITÉ


IRRÉGULARITÉ, s. f. IRRÉGULIER, IèRE, adj. IRRÉGULIèREMENT, adv. [Irré--gularité, lié, liè-re, lièreman; 2e é fer. 4eé fer. au 2d, è moy et lon. aux deux aûtres.] Ils se disent de ce qui est contre les règles. "L' irrégularité de la conduite, d' un procédé. "L' irrégularité d' un Poème, du pouls, des saisons. _ "Procédé irrégulier, conduite irrégulière. Poème irrégulier. Pièce irrégulière. "Vivre irrégulièrement. "Maison bâtie fort irrégulièrement.

IRRÉLIGIEUX


IRRÉLIGIEUX, EûSE, adj. IRRÉLIGIEûSEMENT, adv. IRRÉLIGION, s. f. [Irréli--gieû, gieû-ze, gieû-zeman, gion; 2e é fer. 4e lon. au 1er, 2e et 3e. Il est à remarquer que le simple a l' e muet: Religieux, Religion et que le composé a l' é fer. Rich. ne met point d' acc. l' Acad. met un acc. aigu, et Trév. et le Rich. Port.] Ils expriment un manque de Religion; ce qui est contraire à la Religion. "Sentiment irréligieux. "Action irréligieûse. Il ne se dit que des chôses. _ "Vivre, se comporter irréligieûsement. _ "La corruption des moeurs est la vraie source de l' irréligion.

IRREMÉDIABLE


IRREMÉDIABLE, adj. IRREMÉDIABLEMENT, adv. [2e e muet, 3e é fer. 5e dout. au 1er _ Je ne sais comment il est arrivé que dans le Dict. Gram. on ait mis un accent aigu sur la 2e syllabe. C' est aparemment qu' on a copié trop servilement le Dict. de Trév.] À~ quoi on ne peut remédier. "Mal irremédiable. _ Fig. "Faûte irremédiable. = "Les débauches l' ont ruiné irremédiablement.

IRRÉMISSIBLE


IRRÉMISSIBLE, adj. IRRÉMISSIBLEMENT, adv. [Ir-rémicible, bleman. 2e é fer. 5e e muet.] Qui n' est pas pardonable. "Crime, faûte irrémissible. = Sans rémission, sans miséricorde. "Il sera condamné, puni irrémissiblement.

IRRÉPARABLE


IRRÉPARABLE, adj. IRRÉPARABLEMENT, adv. [Ir-réparable, bleman: 2e é fer. 4e dout. au 1er.] Qui ne se peut réparer. "Perte irréparable. "Afront, injûre irréparable. "Il l' a ofensé irréparablement.

IRRÉPRÉHENSIBLE


IRRÉPRÉHENSIBLE, adj. IRRÉPRÉHENSIBLEMENT, adv. [Irré-pré-ancible, bleman. 2e et 3e é fer. _ Rich. ne met point d' accent sur la 2de. Trév. l' Acad. et le Rich. Port. y mettent un aigu.] Qu' on ne saurait reprendre. Il se dit des persones et des chôses. "Homme irrépréhensible. "Vie, conduite, action irrépréhensible. "Il vit, il se conduit irrépréhensiblement.

IRRÉPROCHABLE


IRRÉPROCHABLE, adj. IRRÉPROCHABLEMENT, adv. [Ir-réprochable, bleman; 2e é fer. Trév. n' y met point d' acc. l' Acad. et le Rich. Port. y mettent un accent aigu.] Qui ne mérite point de reproche. Il se dit des persones et des chôses. "Homme irréprochable. "Sa vie, ses moeurs sont irréprochables. "Celles, dont la conduite étoit la plus irréprochable, ne l' abordoient qu' en tremblant. Cochin. "Il a toujours vécu irréprochablement.

IRRÉSISTIBLE


IRRÉSISTIBLE, adj. IRRÉSISTIBLEMENT, adv. [2e é fer. 5e e muet.] À~ quoi on ne peut résister. Il ne se dit guère qu' au figuré, et des chôses. "Charme irrésistible. _ On a dit pourtant, et je ne saurais le blâmer; que, Homère est irrésistible, comme Achille. = D' une manière irrésistible. "Les gens passionés se justifient en disant, qu' ils ont été entraînés irrésistiblement.

IRRÉSOLU


IRRÉSOLU, LûE, adj. IRRÉSOLUMENT, adv. IRRÉSOLUTION, s. f. [2e é fer. 4e lon. au 2d.; lu, lû-e, luman, lu-cion.] Ils expriment l' état d' une persone, qui a peine à se résoûdre, à se déterminer. "Homme toujours irrésolu. "Je suis irrésolu sur ce que je dois faire. "Il a parlé fort irrésolument. "Il est dans des irrésolutions perpétuelles. "Son irrésolution ou ses irrésolutions a, ou ont fait échouer l' afaire.

IRRÉVÉREMMENT


IRRÉVÉREMMENT, adv. IRRÉVÉRENCE, s. f. IRRÉVÉRENT, ENTE, adj. [Ir--révéraman, rance, ran, rante. 2e et 3e é fer. 4e br. au 1er, lon. aux aûtres.] Ils expriment un manque de révérence, de respect. "Il se commet mille irrévérences dans l' Église: on s' y comporte fort irrévéremment. "Posture irrévérente; manières irrévérentes. = L' adj. ne se dit point des persones: le subst. ne s' emploie guère qu' à l' égard de Dieu et de la Religion. L' Acad. le dit du Roi: "C' est une irrévérence de se couvrir dans la chambre du Roi, quoiqu' il n' y soit pas.

IRRÉVOCABILITÉ


IRRÉVOCABILITÉ, s. f. IRRÉVOCABLE, adj. IRRÉVOCABLEMENT, adv. [2e é fermé. Richelet est le seul des Lexicographes qui n' y mette point d' accent.] Qualité de ce qui est irrévocable, qui ne peut être révoqué. "L' irrévocabilité des décrets de Dieu. "Serment, loi, donation, arrêt irrévocable. "Cela a été décidé irrévocablement. = Irrévocable aime à marcher après le subst. En vers pourtant et dans le haut style, il peut le précéder élégamment. "L' irrévocable arrêt de la Justice divine.

IRRITATION


IRRITATION, s. f. IRRITER, v. a. [Ir--rita-cion, .] Irriter, 1°. en parlant~ des persones: mettre en colère. "Nos péchés ont irrité le Seigneur. "On a voulu l' irriter contre moi.
   Enfant de la paix, je l' aime,
   Mais hélas! ma douceur même,
   Les irrite contre moi.
       Le Franc.
= 2°. En parlant des chôses: augmenter, aigrir. "Vous irritez sa colère, au lieu de l' apaiser. = 3°. Exciter, provoquer. "Irriter l' apétit, la soif, les désirs. "Irriter la fièvre, le mal; l' augmenter, le rendre plus dangereux ou plus violent. "De tels remèdes ne font qu' irriter le mal. = 4°. Figur. on dit, les flots irrités, la mer irritée, agités, agitée par la tempête. = Irritation ne se dit que dans le sens du n°. 3°. l' irritation des humeurs. On ne le dit point de la colère; et c' est un barbarisme que de dire qu' un homme est dans une grande irritation, pour dire, qu' il est fort irrité.
   Rem. Depuis peu on dit, irritable, et irritabilité. On ne l' a dabord dit que des nerfs; ensuite on s' est hazardé à le dire des persones, du moins le substantif. M. l' Abé Royou dit de J. J. Rousseau: "Écrivain d' une sensibilité vraiment profonde, d' une irritabilité peut-être trop grande.

IRRUPTION


IRRUPTION, s. f. [Ir-rup-cion, en vers ci-on.] Entrée soudaine des énemis dans un pays. "Les énemis firent une irruption en telle Province. Voy. INVASION. "Cette place met le pays à couvert d' une irruption. = Incursion, Irruption (synon.) La première est brusque et passagère; l' aûtre est violente et soutenue. L' incursion est faite comme une course, dans un esprit de retour: l' irruption est un acte de violence dans un esprit de destruction ou de conquête. "Un peuple barbâre fait des incursions dans un pays pour le piller; il y fera des irruptions pour s' en emparer... ou pour le dévaster, etc. Roub. synon.

ISE


ISE, pénult. longue: Remise, surprise, ils lisent, etc.

ISLE


ISLE, s. f. Voyez ÎLE.

ISOLER


ISOLER, v. a. [Izolé: dern. é fer.] Faire qu' un bâtiment n' en touche pas un aûtre. "Pour isoler son hôtel, il a détruit plusieurs maisons. "Son palais est isolé. = Depuis quelque tems on l' emploie au figuré, et on le dit des persones. "L' amour propre nous isole, nous concentre en nous-mêmes. Anon. "C' est la Philosophie, qui l' isole (l' Homme), c' est par elle qu' il dit en secret, à l' aspect d' un homme souffrant: péris, si tu veux, je suis en sûreté. J. J. Rouss. "Le plus méchant des hommes est celui, qui s' isole le plus. Id. "Chacun s' isole autant qu' il le peut. Linguet. = En Architectûre, on dit, l' isolement des colonnes. = Un Auteur moderne a employé isolément, adv. "Ceux qui ont traité isolément les mêmes matières. Journ. de Litt. Ce néologisme n' a pas l' air de faire fortune.

ISRAÉLITE


ISRAÉLITE, s. m. On dit d' un homme bon, simple et sans malice, que c' est un bon Israelite. Cette expression familière est tirée de l' Évangile, où Jesus dit de Nathanaël, qu'~ on~ croit être St. Barthelemi: "Bonus Israelita, in quo dolus non est.
   Le Curé de l' île susdite,
   Vieux papa, bon israëlite.
       Gresset.

ISSIR


*ISSIR, v. n. Il s' est dit anciènement pour sortir. Il n' en est resté que le participe, issu, issûe, venu, descendu d' une persone, d' une race. "Issu des Rois de.... "Issu d' un père malheureux. "Issu de bâs lieu.

ISSûE


ISSûE, s. f. [2e lon. 3ee muet.] Au propre, lieu par où l' on peut sortir. "On a fait une nouvelle issûe à cette Église: elle étoit nécessaire. "Les lieux publics doivent avoir plusieurs issûes. = Au fig. évènement des afaires. "Quelle fut l' issûe du combat? celle qu' il étoit aisé de prévoir. "On parla d' une aûtre affaire, dont l' issûe ne dut pas plaire au Légat. P. Fabre, Hist. Eccl. = À~ l' issûe de, adv. À~ la sortie de. "À~ l' issûe de Vêpres. Voy. INSU. = On apèle issûe les extrêmités et les entrâilles de quelques animaux. "Une issûe d' agneau.

ISTHME


ISTHME, ou ISTME, s. m. [Richelet met les deux: Trév. l' Académie et le Rich. Port. ne mettent que le 1er, isthme: 2ee muet.] Langue de terre qui joint deux terres, sépare deux mers. "L' Isthme de Corinthe. "L' Isthme de Panama. * L' Abé Prévot fait ce mot fém. "Diu, ville fameûse, qui étant située sur une péninsule triangulaire, joint le continent par une fort petite isthme. Hist. des Voy. Il faut, par un fort petit isthme.

ITALIQUE


ITALIQUE, adj. et subst. [Italike.] Caractère d' Imprimerie diférent du romain, et un peu couché. Dans ce Dictionaire, les mots répétés entre deux crochets, sont en caractère italique. On se sert de l' italique pour marquer ce qu' on veut distinguer du reste du discours.

ITE


ITE: pénult. lon. dans bénîte, gîte, vîte, et dans les troisièmes persones du pluriel~, dans le prétérit indéfini de l' indicatif: vous fîtes, vous vîtes; brève ailleurs.

ITEM


ITEM, adv. et s. m. [Pron. itème; 2e è moy. 3e e muet fort bref: et non pas iten, et encôre moins itan.] Mot tout latin, naturalisé~ dans notre langue. De plus. On s' en sert dans les comptes. "Pour tel article, tant. Item pour tel aûtre, tant. = On dit, en st. fam. "C' est là l' item: c' est le fait, le point de la dificulté. _ Aûtre grand item, il faut vivre; après tout, il faut qu' on troûve son compte à ce qu' on entreprend.

IVOIRE


IVOIRE, s. m. [i-voâ-re: 2e lon. 3e e muet.] Dent d' éléphant, quand elle est détachée de la machoire de l' animal. = On l' écrivait autrefois avec un y. Vaugelas et Th. Corneille le décident f. Boileau au contraire, le fait masc. et ce dernier genre a prévalu.
   L' ivoire trop hâté deux fois romt sur sa tête.
       Lutrin.
"Cet ivoire est bien blanc. Acad.

IVRAIE


IVRAIE, voyez IVROIE.

IVRE


IVRE, adj. IVRESSE, s. f. [Îvre, ivrèce: 1re lon. au 1er, 2e e muet au 1er, è moyen au 2d.] Ils expriment l' état d' une persone qui a le cerveau troublé par les vapeurs du vin ou de quelque autre boisson. "Il est ivre: "il est dans l' ivresse. = Fig. "Être ivre de vanité; d' ambition, d' orgueil. "L' ivresse des passions. "Il sort de l' ivresse et de l' assoupissement du plaisir. Jér. Dél. = Ivresse n' a point de plur. Rousseau lui en done un; et il fait fort bien dans l' endroit où il l' emploie
   Le réveil suit de près vos trompeuses ivresses.
   Et toutes vos richesses,
   S' écoulent de vos mains.

IVROGNE


IVROGNE, adj. et s. m. IVROGNER, v. n. IVROGNERIE, s. f. IVROGNESSE, s. f. [Ivrog-ne, , nerî-e, nèce: mouillez le g: 3e e muet au 1er et au 3e, é fer. au 2d. è moy. au dern.] Ivrogne, qui est sujet à s' enivrer. Ivrognesse, femme sujette au vin. Ivrogner, boire avec excès et souvent. Ivrognerie, habitude de s' enivrer. "Un laquais ivrogne. "C' est un grand ivrogne: une vieille ivrognesse. "Il est tous les jours dans les cabarets à ivrogner. "Il est adoné à l' ivrognerie.
   REM. Ivrognesse est un mot populaire et du bâs comique. On dit plutôt femme ivrogne. = Ivrognerie se dit des actes, aussi bien que de l' habitude; et alors il peut se mettre au plur. "Cette femme ne peut plus soufrir les ivrogneries de son mari.

IVROIE


IVROIE, s. f. [I-vroâ. 2e lon. Plusieurs écrivent et prononcent Ivraie. Le Rich. Port. ne met que celui-ci. L' Acad. est pour ivroie. Je crois, qu' au moins au figuré, ivraie vaut mieux.] Espèce de mauvaise herbe, qui croît parmi le froment., et qui produit une graine noire. "Champ plein d' ivroie; arracher l' ivroie. = Fig. Séparer l' ivraie d' avec le bon grain; les méchans d' avec les bons; la mauvaise doctrine d' avec la bone.