Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI


I.J.



I


I, s. m. est la 9e Lettre de notre Alphabet, et elle est tout-à-la-fois voyelle et consonne. Quand elle est voy. elle s' écrit I et i, et quand elle est consone, J et j. = L' \ï, avec deux points, que les Imprimeurs apèlent ï tréma, sert à marquer que cet i doit être détaché, dans la prononciation de la voyelle précédente, comme dans aïeul [pron. a-ieul.] Voyez A, au comencement, et Aï. = L' I voyelle n' est pas diférent en français, de celui des aûtres langues de l' Europe. Les Allemands ont ce même son dans irren; les Anglais dans iniquity; les Italiens dans finire; les Espagnols dans ir. = Le son de l' J consone, devant toutes les voyèles, est le même que celui du g devant e et i. L' on prononce Jesus comme Gesus. Les Étrangers doivent faire atention à la prononciation de cette lettre, qui est bien diférente de celle que lui donent les autres Nations de l' Europe. Car les Italiens et les Anglais la prononcent plus fortement, et comme si elle était précédée d' un d; les Espagnols lui donent le son du k; les Allemands ne la distinguent pas de l' i voyèle, et prononcent jeune comme ieune. = L' J consone aproche beaucoup, pour la prononciation, du ch français, de sorte que l' J est un ch radouci, et le ch un J prononcé fortement. C' est pourquoi plusieurs prononcent ajevé, jeval, au lieu de achevé, cheval; et des Musiciens, Chesus, Cherusalem, pour Jesus, Jérusalem. = Pour la prononciation de l' i devant l' m et l' n: Voyez IM, IMM et IN.
   IA: ces deux voyelles ne font une diphtongue, une seule syllabe que dans diable, diantre, diamant, fiacre et leurs dérivés. L. T. Ajoutez y viande, qu' on prononçait autrefois vi-ande.

\ïAMBE


\ïAMBE, s. m. [I-anbe: 2e lon. 3e e muet.] Pied des vers grecs et latins, composé d' une brève et d' une longue. _ On done aussi ce nom à un vers composé d' iambes, sur-tout au 2d, au 4e et au 6e pied.
   Beatus ille, qui procul negotiis.      Horat.

ICELUI


ICELUI, ICELLE, pronom démonstratif et relatif. Il est malheureûsement rélégué au Palais. Il serait utile, et même nécessaire pour éviter des amphibologies, où l' on tombe sans son secours.

ICI


ICI, adv. de lieu. En ce lieu-ci. "Venez ici. "Il est ici. Hors d' ici. = Ici désigne le lieu où est la persone qui parle; Là désigne un lieu diférent: "Venez ici, allez là. L' un est plus près, l' aûtre est plus éloigné. Le 1er marque et désigne l' endroit: l' aûtre est plus vague: il a besoin, pour être entendu, d' être acompagné de quelque signe de l' oeil ou de la main. Gir. Synon. Voyez Là. = Il se met toujours après le verbe, même dans les temps composés. "Je suis ici arrivé, dit Voiture. Il faut dire, je suis arrivé ici. Il suit la même construction, lorsqu' il est associé avec de, par, jusque. "Il a passé par ici; il est parti d' ici; il est venu jusqu' ici; et non pas: il a par ici passé, il est d' ici parti, etc.
   Rem. "Quelques-uns disent ici, pour ci: cet homme ici, cette chambre ici, etc. au lieu de, cet homme-ci, cette chambre-ci. Mallebranche dit, ces trois ici, pour, ces trois-ci. Cela est populaire et gascon. = Dès ici, pour d' ici, n' est pas dans l' analogie de la Langue, parce que dès est une prép. non de lieu, mais de tems. "Je sentirai dès ici des effets de vos souhaits, dit Voiture: on dit, d' ici. = Les chôses d' ici-bas, de ce monde, de la terre. Fontenelle a dit, dans le même sens, les chôses d' ici haut, parce qu' il adressait son Épitre à Lucien, qu' il suposait aux enfers poétiques.

IDÉAL


IDÉAL, ALE, adj. IDÉE, s. f. [2e é fer.] Idéal, chimérique. "Pouvoir idéal: richesses idéales. = Il n' a point de plur. masc. On ne dit point, trésors idéaux, mais trésors en idée. = Idée est 1°. la notion que l' esprit se forme de quelque chôse "Idée claire, distincte, ou confuse, obscûre. "Se faire, ou concevoir une idée de. "Un bonheur (celui du Ciel) qui surpasse toutes nos idées. Le P. du Rivet. = 1°. Idée, pensée, imagination, (synon.) L' idée représente l' objet; la pensée le considère; l' imagination le forme. La 1re peint, la 2e examine, la 3e séduit. _ On est sûr de plaire dans la conversation, quand on a des idées justes, des pensées fines et des imaginations brillantes. _ On ne s' entend pas dans la plupart des contestations, faûte de simplifier les idées: on reproche aux Anglais de trop creuser les pensées: on acûse les femmes de prendre souvent des imaginations pour des réalités. Gir. Synon. = 2°. Dans l' idée et dans la tête, expressions adverbiales, ont quelque chôse de comun pour le sens: en voici la diférence. On a dans l' idée ce qu' on pense: on le croit; on a dans la téte ce qu' on veut: on y travaille. Nos imaginations sont dans l' idée, et nos desseins dans la téte. _ Les Courtisans se mettent aisément dans l' idée que le Prince doit faire leur fortune: mais il en est peu, qui se mettent dans la tête de la mériter par des services marqués au coin de la vertu. Idem. Ibid. = 3°. Dans l' idée de, avec l' infinitif, doit se raporter au sujet de la phrâse, au nominatif du verbe. "Pour les places de l' Afrique, elles avoient été démantelées par Genseric, dans l' idée de s' assurer des habitans. Montesq. Il me semble qu' il falait dire: Genseric les avait fait démanteler, dans l' idée de, etc. = 4°. Idée tout seul régit aussi de et l' infinitif. "Le Peintre lui fit naître l' idée d' avoir mon portrait et le sien. = 5°. On dit, avoir grande idée de, au sing. Mme. de Sévig. emploie le plur. contre l' usage. "C' est l' homme du monde, dont j' ai les plus grandes idées, et que je serais le plus aise de voir. = 6°. Se faire des idées, est une expression de bon goût. "J' employai toute la nuit à m' encourager à ne plus penser à elle; sans doute elle se fit des idées plus gaies. Créb. Se former des idées sur. "Dans l' homme tout tient aux idées qu' il se forme sur la Religion: le changement, qui s' introduit dans sa façon de penser à cet égard, change en lui l' esprit, le caractère et les moeurs. Le Comte de Valmont. "Ce doute si cruel, dont je ne puis soutenir l' idée. Ibid. = 7°. * Comme on dit, à l' aspect de, un Traducteur du Tasse a dit, à l' idée de: "À~ l' idée d' une mort éternelle, Tancrède est saisi d' un Saint éfroi. Jér. Dél. Cette expression est nouvelle; il faut atendre ce que l' usage en décidera.
   IDÉE, dessein, esquisse d' un ouvrage. "J' en ai jeté l' idée sur le papier. "Ce n' est que le squelette d' un ouvrage; ce n' en est qu' une idée informe. _ Mémoire. "J' en ai quelque idée; je n' en ai aucune idée. = Idées, visions. "Ce ne sont que de belles idées, des idées creûses. Il se répaît d' idées. Et au sing. "Quelle idée avez-vous là? "Il est riche en idée.

IDENTIFIER


IDENTIFIER, v. act. IDENTIQUE, adj. IDENTIQUEMENT, adv. IDENTITÉ, s. f. [Idantifi-é, tike, keman, tité: 2e lon, dern. é fer. au 1er et dern. 4e e muet au 2e et 3e.] Ces mots sont consacrés dans le langage de l' École, et n' en sont point encore sortis. On ne les emploie point dans le bon style. Le verbe est pourtant énergique, et placé à propos, il n' a point du tout l' air barbare. "À~ force de vivre avec des étrangers, dit M. Guys, on prend insensiblement leurs manières, et l' on parvient à s' identifier avec eux. Voy. Litt. de la Grèce. * Mme. de Sév. se sert du subst., et le cite d' après M. de Nevers. "Dieu sait si notre Ambassadeur soutiendra bien l' identité du plus grand Roi du monde, comme dit M. de Nevers. Qu' est-ce que soutenir l' identité de quelqu' un? M. de Nevers voulait dire, sans doute, que l' Ambassadeur, par sa hauteur et sa fermeté soutiendrait la gloire et la prééminence du Roi: mais on devine ce sens plutôt qu' on ne l' entend. = L' Acad. met ces mots sans remarque.
   IDENTITÉ est ce qui fait que deux ou plusieurs chôses ne font qu' une. = Identifier, comprendre deux ou plusieurs chôses sous la même idée, ou de ces chôses n' en faire qu' une. = Identique, qui ne fait qu' un avec un aûtre, ou qui est compris sous une même idée. "Propositions Identiques. "Deux et deux sont identiques avec quatre. = Identiquement, d' une manière identique.

IDIôME


IDIôME, s. m. IDIOTISME, s. m. Le 1er se dit du corps entier de la Langue; le 2d des manières de parler propres d' une Langue. * L' Abé Girard, tout habile Gramairien qu' il était, a donc mis un mot pour l' aûtre, quand il a dit: "Lorsque cette sorte de goût propre et distinctif ne regarde qu'~ une seule façon particulière de s' exprimer, on le nomme idiôme, c. à. d. propriété de Langue. P. ex. C' est un idiôme français d' exprimer par le pronom indéfini on, joint au verbe act. l' atribution vague et indéterminée d' une action; au lieu que c' est un idiôme italien de l' exprimer par le pronom réciproque si; et c' est un idiôme latin de se servir, pour cet éfet, du seul verbe passif, sans pronom, ni particule. Le français~ dit: on demande; l' italien, si domanda; le latin, qu‘ritur. Dans tout ce morceau, il falait mettre idiotisme, au lieu d' idiome: le français, l' Italien, le latin, sont des idiomes diférens; les façons de parler, les tours propres de ces idiômes sont des idiotismes. Ainsi, quand nous disons, gasconisme, anglicisme, latinisme, nous exprimons des idiotismes, et non des idiômes.

IDIOT


IDIOT, OTE, adj. et subst. [Idi-o, ote.] Stupide, imbécille. "C' est l' homme le plus idiot. "Elle n' est pas si idiote. "C' est un idiot, une paûvre idiote.

IDOINE


*IDOINE, adj. [Idoâ-ne; 2e lon. 3e e muet.] Vieux mot. Latinisme: idoneus. Propre à, capable de. Il ne se dit plus qu' au Palais.

IDOLâTRE


IDOLâTRE, adj. et subst. IDOLâTRER, v. n. et act. [3e lon. dern. e muet au 1er, é fer. au 2d.] Idolâtre, qui adôre les idoles, les créatûres. "Peuple idolâtre, Nation idolâtre. = S. m. Les idolâtres. = Fig. "Il est idolâtre de cette femme. "Elle est idolâtre de ses enfans. = Idolâtrer, adorer les idoles. "Les Hébreux idolâtrèrent dans le désert. = Fig. v. act. Aimer avec trop de passion. "Il Idolâtre cette femme: elle idolâtre ses enfans.
   REM. Idolâtre ne régit l' ablatif qu' au fig.
   Insensible aux plaisirs, dont j' étois idolâtre.
       Gresset.
On ne dirait point au propre, ces Peuples étaient idolâtres du feu, ni avec le verbe actif, ils idolâtraient le feu. Avec ces régimes, il faut se servir d' adorateur, adorer.

IDOLâTRIE


IDOLâTRIE, s. f. IDOLâTRIQUE, adj. [3e lon. dern. e muet.] Idolâtrie, au propre, adoration des idoles, des créatûres. "Ces Peuples étoient adonés à l' idolâtrie. = Au fig. amour excessif. "Il l' aime jusqu' à l' idolâtrie. = Idolâtrique, qui apartient à l' idolâtrie. "Culte, amour idolâtrique.

IDOLE


IDOLE, s. f. Autrefois on fesait idole masc. "Idole sacré. Corn. _ Le P. Barre, (Hist. d' Allem.) lui a encôre doné ce genre. "Les idoles furent brisés et jetés hors des temples. = Ce mot est aujourd' hui constamment fém. et depuis long-tems: idole sacrée; les idoles furent brisées. = Idole, figûre, statue, représentant une faûsse divinité, et exposée à l' adoration. "Adorer une idole, les idoles. "Temples, Prêtres des Idoles. = Fig. avec la prép. de, objet d' une passion extrême. "Il est l' idole de sa mère. "L' avare fait son idole de l' argent. "Bien revenu de ce phantôme d' honeur, dont il avoit fait son idole, Abailard jouissoit à Clugny de son obscurité. Le Pere Fontenai. = Sans régime: belle persone, qui n' est point animée. "C' est une idole, une vraie idole; ou persone stupide. "C' est une idole. "Il se tient là comme une idole; sans rien faire. Dans le 1er sens, et avec le régime, il est de tous les styles: dans le 2d, il n' est que du style fam.

IDYLLE


IDYLLE, s. f. [Idil-e.] petit Poème qui tient de la nature de l' Églogue. = On le fesait autrefois des deux genres, masc. ou fém. On ne le fait plus que fém. "Une belle Idylle.

IE


IE: nos anciens ne fesaient point dificulté de retrancher l' e dans les mots de cette terminaison, et de dire: je te pri' , je te suppli' , pour: je te prie, je te supplie, et par conséquent, d' employer, en vers, cette terminaison devant une consone.
   Passant, je te suppli' d' arrêter pour entendre.
       Ronsard.
Quitte-moi, je te pri' .Malherbe.
Mais il y a déja long-tems que cette licence est bannie de notre Poésie. Ménage. = Dans cette terminaison, la pénult. est toujours longue: il prie, il crie, etc. Mais elle devient brève, quand l' e devient fermé; prier, crier, etc.

IEL


IEL, IEN, sont dout. Fiel, tien, mien, etc. = Les noms terminés en latin en ianus, se terminent en français en ien: aûtrefois on les terminait en ian. On disait Dioclétian, Tertullian, Cyprian; et Boileau a encore dit Aurélian pour Aurélien.

IER


IER, est douteux, quand l' ê est ouvert, fier, altier. = Dans les verbes de cette terminaison, où l' é est fer., il faut observer, 1°. qu' à la 1re et 2e pers. de l' imparfait de l' indicatif et du prés. du subjonctif, il convient d' écrire et de prononcer deux i, pour distinguer ces deux tems du présent de l' indicatif. Ainsi l' on dira, au présent: nous prions, vous priez, et à l' imparfait aussi bien qu' au subjonctif: nous priions, vous priiez, etc. Il est peu de persones qui aient cette atention, et l' Acad. elle-même ne l' a pas. Nous la croyons pourtant juste et nécessaire. Cette remarque doit être étendue aux verbes terminés en yer, essayer, employer, etc. = 2°. Dans ces verbes terminés en ier, l' e du futur simple et du conditionel ne se prononce pas. Je prierai, je crierai, je justifierais, je sacrifierais, etc. Prononcez prî-ré, crî-ré, justifîrè, sacri--fîrè, etc.
   REM. Corneille a été le premier à faire meurtrier de trois syllabes. Il en fut repris par l' Acad. dans ses Sentimens sur le Cid: mais cette manière a prévalu; et ier, dans les noms terminés de la sorte, est constamment de deux syllabes en vers, sangli-er, boucli-er, peupli-er, etc. En prôse, il est monosyll. san-glié, etc.

IèRE


IèRE, pénult. longue:lumière, carrière, fière, etc. L' è est moyen entre l' ê ouvert et l' é fermé.

IGNâRE


IGNâRE, adj. [Mouillez le g; 2e lon, 3e e muet.] Ignorant, qui n' a point étudié. "Il est fort ignâre. Et, dans le style plaisant, ignâre et non lettré. = Ce mot dépâre la phrâse suivante. "La Natûre est un livre harmonieux, qui ofre à tout le monde le spectâcle ravissant de ses merveilles.... Les gens ignâres et non lettrés n' en sont pas ordinairement afectés. Du Plaisir. Quelle discordance de cette expression d' un bâs comique, avec l' expression pompeûse du livre harmonieux de la natûre! Pourquoi ne pas dire tout simplement, et par-là même plus noblement, que les ignorans n' en sont point afectés. = Ignâre ne se dit que des persones. "Leur controverse, dit M. l' Abé Gauchat, git à débiter, lorsque persone ne peut, ou n' ôse répondre, des blasphêmes ignâres et brutaux. La pensée a plus de vérité, que l' expression n' a de correction et d' élégance.

IGNÉE


IGNÉE, IGNICOLE, adj. [Le g n' est pas mouillé: pron. comme s' il était écrit 3 i-gue--née, i-gue-nicole, l' e sur-ajouté fort muet.] Le 1er signifie, qui est de feu, substance ignée, d' une natûre ignée. C' est un terme didactique. Le 2d veut dire, adorateur du feu. "Les peuples ignicoles.

IGNOBLE


IGNOBLE, adj. IGNOBLEMENT, adv. [Mouillez le g: 3e e muet; dans le 2d, en a le son d' an: bleman.] Ignoble, qui est bâs, qui n' est pas noble. Il ne se dit que des chôses: "Air, physionomie ignoble. "Manières, sentimens ignobles. "Dans les grandes villes, dit J. J. Rousseau avec son exagération ordinaire, la pudeur est ignoble et bâsse. = On fait un grand usage de ce mot dans le jargon moderne. "Quelle extravagance! quel mauvais goût! Cela est ignoble à un excès. Th. d' Éduc. Voyez CRAPULEUX. = Ignoblement, d' une manière ignoble. "Il est fait ignoblement, il parle ignoblement.

IGNOMINIE


IGNOMINIE, s. f. IGNOMINIEUX, EûSE, adj. IGNOMINIEûSEMENT, adv. [mouillez le g: 4e du 1er, et 5e des aûtres lon. nî-e, nî-eû, eû-ze, zeman.] Ignominie, grand déshoneur. Ignominieux, qui caûse de l' ignominie. Ignominieûsement, avec ignominie. "Être couvert d' ignominie. Soufrir de grandes ignominies. _ "Suplice ignominieux, mort ignominieûse. _ "On l' a traité ignominieûsement.

IGNORAMMENT


IGNORAMMENT, adv. IGNORANCE, s. f. IGNORANT, ANTE, adj. et subst. [mouillez le g: 3e br. au 1er, lon. aux aûtres: igno--raman, rance, ran, rante] Ignorance, défaut de savoir, de conaissance. Ignoramment, avec ignorance. Ignorant, qui n' a point de savoir. "Grande, profonde, grossière ignorance. "Siècle d' ignorance: croupir dans l' ignorance. _ "Il parle de ces matières fort ignoramment. _ "Il est si ignorant, qu' il ne sait pas lire. _ Subst. C' est un franc ignorant; une paûvre ignorante. "Il fait l' ignorant: vous faites l' ignorante, mais vous ne le savez que trop bien.
   Rem. 1°. Ignorance, n' a pas ordinairement de pluriel. Bossuet lui en done un dans une ocasion, où ce pluriel ne fait point mal. "On y trouve autant d' ignorances que de mots. Et Boileau: "Dieu a permis qu' il soit tombé dans des ignorances si grossières qu' elles lui ont atiré la risée des gens de lettres. _ Hors de là, on dit de plusieurs, leur ignorance et non pas leurs ignorances. "Dieu abandone la sagesse humaine à ses ignorances. Le pluriel n' est pas si régulier en cet endroit, ni dans la phrâse suivante de Madame de Sévigné. "Voilà une excûse toute prête pour nos ignorances. Je voudrais là notre ignorance. _ La diférence entre ces phrâses, c' est que dans le 1er ex. de Bossuet et dans celui de Boileau, ignorances est pris pour des faûtes, des actes d' ignorance; et dans les aûtres pour l' ignorance même, principe de ces faûtes. Ainsi l' on dit: un livre plein d' ignorances grossières, c. à. d. plein de faûtes, qui marquent une ignorance grossière.
   2°. Ignorance, régit quelquefois la prép. de. Ignorance du Droit; ignorance du fait. "Il vit dans une grande ignorance de tout ce qui se passe. = Prétendre caûse d' ignorance, c' est s' excuser sur une ignorance qu' on afecte et qui n' est pas réelle.
   3°. Ignorant, régit aussi la prép. de, mais dans le style familier seulement. "C' était un jeune métaphysicien fort ignorant des chôses de ce monde. Volt. _ * Le P. La Rue lui done ce régime en l' employant comme participe actif, ce qui est un vrai solécisme. "Le monde ignorant de vos sentimens intérieurs... sur quel fondement voulez-vous qu' il vous croie changé. Il falait dire, ignorant vos sentimens, etc. = L' Acad. dit bien; il est ignorant du fait: j' en suis aussi ignorant que l' enfant qui vient de naître, phrâse proverbiale; mais elle dit, ignorant en Géographie; ignorant là-dessus, sur ces matières-là. = * Être ignorant que pour ignorer que, est un barbarisme d' expression. Voy. un Ex. de Malherbe au mot Demeurant.
   4°. Ignorant, ne se dit que des persones. On lit dans l' Hist. du Droit Écl. Fr. "Le premier des Apôtres fut aussi leur chef, non leur Prince, suivant l' ignorante interprétation de ces paroles latines, Princeps Apostolorum. On dit, une interprétation savante; on ne dit point, une interprétation ignorante. L' adj. Savant modifie les chôses comme les persones: l' adj. Ignorant ne modifie que les persones. _ Bossuet a dit aussi: "Leurs ignorantes et iniques décisions. Et Boileau, choqué de l' ignorante audace avec laquelle, etc. Et Rousseau.
   Un ignorant sufrage
   Ne l' est pas moins qu' un ignorant ouvrage.
Ces exemples ne sufisent pas pour infirmer une remarque fondée sur l' usage le plus constant parmi les bons Écrivains.
   IGNORANT, ÂNE. (Synon.) Voy. ÂNE.

IGNORÉ


IGNORÉ, ÉE, adj. [Mouillez le g: 3e é fer. long au 2d: 4e e muet.] Il se dit ou tout seul, et il marche toujours après le substantif.
   Dans des pays jusqu' alors ignorés.
Ou avec la prép. de. "Les Amours d' Astarbé n' étoient ignorées que de Pigmalion.

IGNORER


IGNORER, v. act. [Ignoré: mouille le g: dern. é fer. l' o est bref devant la syll. masc. J' ignorais, il ignorait, etc. Il est long devant l' e muet: il ignôre, ignôrera, etc.] Ne pas savoir. "Ignorer les premiers principes des chôses. = Il est neutre dans cette phrâse du discours familier. "Il n' ignôre de rien.
   Monsieur l' Abbé, vous n' ignorez de rien.
   Et ne vis onc mémoire plus féconde.
       Rouss.
Hors de là et même avec rien, il est actif. Il n' ignore rien de tout ce qui se passe. = Ignorer, régit ordinairement les chôses; mais quelquefois aussi, il régit élégamment les persones.
   Victime tu le sais, d' un âge où l' on s' ignôre.
       Gresset.
"Ceux qui n' ont jamais souffert ne savent rien... Ils ignôrent les hommes: ils s' ignôrent~ eux-mêmes. Télém.
   Se flatent que Dieu les ignôre.
       Rouss.
* Il y en a qui disent: il m' a ignoré, il a fait semblant de ne me pas voir. Cette façon de parler n' est pas aussi sûre que les précédentes.
   Rem. Le que après ignorer régit-il l' indicatif ou le subjonctif? Il y a des exemples pour l' un et pour l' aûtre: mais le subjonctif est plus autorisé, pour le sens afirmatif, et l' indicatif pour le sens négatif. "On ignôre comunément que Tristan ait mis en vers l' Office de la Ste Vierge. Volt. = Dans le sens négatif, M. Targe lui fait régir le subjonctif précédé de la particule ne, deux chôses, qui sont contre l' usage. "Il n' ignoroit pas que les maximes, qu' il avoit adoptées n' attirassent sur lui la haine, etc. Hist. d' Angl. de Smollet. C' est le régime de douter. Il falait, il ne doutait pas qu' elles n' attirassent, ou il n' ignorait pas qu' elles lui atireraient, etc. _ Au premier aspect, il parait donc qu' ignorer suit une règle toute contraire à celle que suivent les verbes, qui expriment l' opinion, lesquels régissent l' indicatif, quand la phrâse est afirmative, et le subjonctif~, quand elle est négative, ce qui peut sembler bisârre. Mais quand on y réfléchit un peu, on ne voit plus, ni bisârrerie, ni exception, et l' on comprend qu' ignorer rentre dans la règle générale de ces verbes. Car ignorer sous un air d' afirmation a le sens réellement négatif: ignorer, c' est ne pas savoir. Et ne pas ignorer sous une aparence de négation a le sens afirmatif: ne pas ignorer, c' est savoir. On dira donc. J' ignore ou je ne sais pas que vous dussiez venir, et je n' ignore pas, ou je sais que vous deviez venir.

IL


IL, ILE, terminaison du masculin de certains adjectifs: Subtil, puéril, civil, vil, etc. agile, facile, stérile, utile, etc. La raison de cette diférence, qui ne parait dabord que le fruit du caprice, vient, selon le P. Bouhours, de la diférence de la quantité prosodique de ces adjectifs en latin. Ceux, qui ont l' i bref, se terminent en ile en français, agilis, facilis, sterilis, utilis, etc. Ceux, qui ont l' i long finissent en il, subtilis, civilis, etc. = L' Acad. avait dabord mis puérile dans les deux genres; mais ensuite elle a mis puéril au masculin.

IL


IL, ELLE, pron. pers. de la 3e persone. Sa déclinaison est, il, elle; de lui, d' elle; à lui, à elle, ou, lui, le la; de lui, d' elle: Au plur. Ils ou eux; d' eux, à eux; ou leur; les ou eux, d' eux. Voy. LUI et EUX. Voyez aussi les règles des pronoms personels au mot MOI. = 1°. Dans le pronom de la 3e persone, les mots, il, ils; elle, elles, peuvent s' employer pour toutes sorte d' objets, quand ils sont le nominatif de la phrâse. Ainsi parlant de prés, de montagnes, de rochers, on pourra dire: ils sont fleuris, elle est fort haute; il est escarpé: mais s' ils étaient nominatifs régis, il n' en serait pas de même; car, en parlant d' une montagne, on ne pourrait pas dire, c' est elle, qui est fort haute: il faudrait dire, c' est celle là, qui, etc. ou prendre un aûtre tour. = 2°. Lui, au datif, se dit de tous les animaux, aussi bien que leur. "Coupez-lui les aîles: donez-leur à manger. = 3°. On emploie Il et Elle dans tous les câs, quand on parle des persones et des objets personifiés, comme des vertus, des sentimens, des passions, etc. = 4°. Dans la conversation, on atribûe souvent aux animaux ce qui ne convient qu' aux Hommes. On dira d' une Dame, qui aime fort son chien, elle n' est jamais sans lui. = 5°. Dans les ocasions, où il faudrait éviter de mettre il ou elle, qui seraient le régime de quelque préposition; au lieu de cette préposition on met un adverbe correspondant, et on retranche le régime. Au lieu de dire d' un arbre, on était autour de lui, on dira, on était à l' entour; et parlant d' un cheval, on ne dira pas: montez sur lui, mais montez dessus. Dans ces ocasions, quelques prépositions deviènent adverbes, sans rien changer dans le mot. On ne peut pas dire d' un arbre, mettez-vous vis-à-vis de lui, mais on dira, mettez-vous vis-à-vis, en retranchant de lui. Dites-en de même des prépositions, à côté, à l' oposite, à couvert, à l' abri, au deçà, auprès, au delà, au-dessus, loin, proche, au travers, contre, etc. La prép. sans ne devient jamais adverbe. On ne dira pas, il ma faut ma canne, je ne puis être sans, ni, je ne puis être sans elle; (le 1er est un provençalisme) on prendra un aûtre tour, et l' on dira: je ne puis m' en passer. = 6°. Ces pronoms personels de la 3e persone s' acordent en genre et en nombre avec leurs substantifs; et ils se mettent au câs que demande le mot, dont ils sont suivis. "Cette femme, est une sote: on se moque d' elle. Elle est au singulier et au féminin comme femme, et à l' ablatif que régit se moquer. = 7°. Il et ils se mettent immédiatement devant le verbe; et ils souffrent tout au plus après eux les aûtres pronoms personels. "Il m' a doné, ils nous ont fait, etc. _ Dans les interrogations, ils se mettent après le verbe, et dans les tems composés devant le participe. "Que demande-t' il? Que veut-il? Qu' ont-ils fait? _ Remarquez que quand le verbe ou l' auxiliaire ne finit pas par un t, on ajoute ce t à la voyèle qui le termine, qu' a-t' il voulu dire? que souhaite-t' il? = 8°. Il se met aussi devant les verbes impersonels, ou employés impersonellement: il pleut, il tonne, il fait froid, il faut que, etc. "Il est arrivé un accident, il est des gens qui; il y a du plaisir à, etc.
   Rem. I. Comme Il et Elle supléent pour les noms, qu' on ne veut pas répéter sans cesse, il semble qu' ils ne devraient pas être employés, quand les noms sont exprimés. On trouve ridicule dans le peuple, qu' il dise: mon frère il m' a dit: ma soeur Sophie elle m' a écrit, etc. Cependant, quand il, elle, sont éloignés des noms qu' ils représentent plusieurs Auteurs, et des plus hupés~, n' ont pas fait dificulté de les employer avec ces mêmes noms; ce qui est un double emploi peu nécessaire et peu régulier. "Licinius étant venu à Antioche, et se doutant de l' impostûre, il fit mettre à la question les Prophètes de ce nouveau Jupiter. Fonten. Cet il est là inutile, et fait un mauvais éfet.
   Dans cette gracieuse attente
   Aminte, l' amitié constante,
   Entrerenant mon souvenir,
   Elle endort ma peine présente
   Dans les songes de l' avenir.
       Gresset.
Elle n' a d' utilité, en cet endroit, que pour fournir deux syllabes de plus au Poète. "Alexandre, pour faire plus d' honeur à l' Iliade d' Homère, il la mit dans cette riche cassette. Rapin. "Ce grand Prince (Salomon) entreprenant de faire le portrait d' une femme forte... il étudie tous ses traits, etc. Mascaron. Ce pronom est dans toutes ces phrâses contre l' usage, et contre le génie de la Langue. = Au reste, cela se doit entendre, quand le substantif précède; car, quand il suit, le tour est élégant, et depuis quelque tems surtout, il a pris grande faveur. Il sert à rompre l' uniformité de la construction, et à faire que le verbe puisse précéder le sujet, (le nominatif) c' est le tour favori de Neuville. "Ils sont râres, parmi ceux-mêmes, qui font profession de piété, les hommes assez éclairés pour conoître toute l' étendue de la Sainteté Évangelique. "Il viendra le jour où seront jugées les justices des hommes. "Ils sont râres les hommes, qui se piquent de ne rougir de rien. = Ce tour est encôre plus régulier dans les interrogations.
   J' entends du Libertin murmurer l' insolence,
   Où sont-ils ces objets de ma reconoissance?
       L. Rac.
Où sont-ils ces objets, est plus fort et plus énergique que si l' on disait simplement, où sont ces objets? = Remarquez que, quand on emploie ce tour dans les câs obliques, c. à. d. autres que le nominatif, on peut faire précéder le nom, mais alors il faut lui doner le même signe du régime qu' au pronom qui le suit: d' un homme, qui ne s' aime que lui-même, que peut-on en atendre? "À~ un homme qui exige trop, qui est indiscret dans ses demandes, souvent on ne veut rien lui acorder. = Il y a des exemples contraires à cette règle, que je crois fondée en raison. Il y a des Auteurs, qui mettent toujours le nom au nominatif, quoique le pronom correspondant soit à un aûtre câs. "Une âme noble et élevée, la grace lui montre... le honteux esclavage des indignes atachemens. Neuville. Le rang usurpé dont ils tombent (les Anglais) la France s' y trouve replacée sans efforts et sans inspirer d' alarmes. Linguet. J' aimerais mieux dire, à une ame;au rang, etc.
   II. Il, ils, elle, elles, tenant la place des noms, dont on a déjà parlé, ne doivent pas en être séparés par de longs intervales: autrement ils jettent de l' obscurité et de l' embârras dans le discours. Qu' on en juge par ce morceau de l' Hist. du Parl. de Paris. "De l' humiliation, où le Parlement fut plongé par le Cardinal de Richelieu, il monta tout d' un coup au plus haut degré de puissance, etc. Et après dix lignes. "Il l' exerça librement dans toute sa plénitude. Volt. Ce 2d il, si fort éloigné du mot Parlement, qu' il représente, arrêterait et embârrasserait le Lecteur, si la force du sens ne venait à son secours. _ Pour éviter l' équivoque, on répète le mot, précédé ou suivi de je dis, je veux dire, ou autre explication semblable. "M. de Coulanges arriva hier de Versâilles... Il est aussi content que le peut l' être le Maréchal de Villars. Tout Paris dit qu' il va être Duc; je ne dis pas Mr. de Coulanges. Mde de Coul. _ Il faut pourtant éviter d' avoir besoin de ces correctifs, qui rendent le style lâche et traînant.
   III. Ce pronom peut faire des équivoques d' une aûtre manière; en ce qu' il peut se raporter au sujet comme au régime. Ex. Hypéride a imité Démosthène en tout ce qu' il a de beau. Il se peut raporter à Hypéride comme à Démosthène. Il falait dire, suivant le sens qu' on avait en vûe. "Tout ce qu' Hypéride a de beau est imité du célèbre Démosthène. Ou "Hypéride a imité tout ce que Démosthène a de beau. Wailly.
   IV. Il, comme les aûtres pronoms relatifs, ne doit pas se raporter à un nom pris indéfiniment. Les phrâses suivantes ne valent rien. "Le Légat publia une Sentence d' interdit... il dura sept mois, etc "Octavien déclare en plein Sénat qu' il veut lui remettre le gouvernement de la République. Il faut dire: "Le Légat publia une Sentence d' interdit... et cet interdit dura, etc. "Octavien déclare au Sénat assemblé qu' il veut lui remettre, etc. Id.
   V. Il, comme tous les relatifs, doit se raporter au sujet de la phrâse précédente: aûtrement le discours manque de clarté. Si cet homme secouru eût pénétré les intentions de son bienfaiteur, ne serait-il pas dispensé de la reconaissance? Il l' aurait sans doute laissé succomber à ses malheurs, sans une circonstance qui a fait agir son zèle aparent. _ Le 1eril se raporte à cet homme secouru; et le 2d, à son bienfaiteur, ce qui met du louche dans la phrâse. = "Il doit être considéré comme le Père du Monastère, puisque c' est par ces soins qu' il subsiste. Ces deux il, dont l' un se raporte à un Religieux, et l' aûtre au Monastère, sont au moins une négligence de style.
   VI. * Anciènement, on retranchait le pron. il aux verbes impersonels: on disait, faut voir, pour il faut voir; y a pour il y a; lui sera doné, pour, il lui sera doné, etc.

ÃŽLE


ÎLE, s. f. [1re lon. 2ee muet. On écrivait il n' y a pas si longtems encore Isle, et le plus grand nombre l' écrit encôre de même.] Espace de terre, entourée d' eau de tout côté. "L' Angleterre est une île: "L' île de Malte, etc.

ILL


ILL. On dit, dans le Dict. Gram. que dans les mots qui comencent par cette syllabe, on ne prononce qu' une l. Le P. Bufier, au contraire, et Mr. de Wailly veulent qu' on les prononce toutes deux, mais sans les mouiller. Nous sommes de leur avis.

ILLÉGAL


ILLÉGAL, ALE, adj. [pron. les 2 l: 2e é fer.] Qui est contre la loi. "Acord illégal; convention illégale.

ILLÉGITIME


ILLÉGITIME, adj. ILLÉGITIMEMENT, adv. ILLÉGITIMITÉ, s. f. [pron. les 2 l: 2e é fer. 5e e muet aux 2 1ers.] Illégitime, qui n' a pas les conditions requises par la loi. "Enfant, mariage illégitime. = Injuste, déraisonable; désir, prétention illégitime. = Illégitimement, injustement, sans raison. "Il prétend cela illégitimement. = Illégitimité, qualité de ce qui est illégitime. "L' illégitimité d' un titre, d' une convention, etc.

ILLÉTRÉ


*ILLÉTRÉ, ou ILLITÉRÉ, adj. Le 1er a été forgé par l' Ab. des Fontaines; l' autre est employé par plusieurs. L' usage n' a encôre adopté ni l' un ni l' aûtre. Qui est sans lettres, sans étude.

ILLICITE


ILLICITE, adj. ILLICITEMENT, adv. [pron. les 2 l: 4e e muet.] Illicite, qui est défendu par la loi. Illicitement, contre le droit et la justice. "Action, plaisir, amour, assemblée illicite. "Cela s' est fait illicitement. _ L' adv. est peu usité hors du Palais. L' adj. est de tous les styles.

ILLIMITÉ


ILLIMITÉ, ÉE, adj. [pron. les 2 l: 4e é fer.] Qui n' a point de limites, de bornes: "Pouvoir illimité, autorité illimitée.

ILLUMINATION


ILLUMINATION, s. f. ILLUMINER, v. act. [Pron. les 2 l sans les mouiller: il-lumi--na-cion, né.] Illuminer, éclairer; répandre la lumière sur... Illumination, action d' illuminer. Ils ne sont guère usités aujourd' hui qu' en parlant des lumières disposées avec ordre et symétrie dans une ocasion de fête, de réjouïssance. "Les rues étaient illuminées. On avait ordoné des illuminations. = L' Acad. dit que "le Soleil illumine toutes chôses, et que "la Lune n' éclaire que par l' illumination du Soleil. C' est du vieux style, ce me semble; tout comme l' emploi de ces mots au figuré. "Illuminant l' Église par sa Doctrine, dit Bossuet. "Alors par une soudaine illumination, elle se sentit si éclairée. Id. "Les illuminations divines. Id.
   Mais un esprit, solide, illuminé,
   Du monde entier semble être énemi né.       Rouss.
  Et je ne puis de mes célestes flammes
  Malgré vous-même illuminer vos ames.Id.
  Et dans la splendeur divine,
  De ces vertus qu' illumine
  Tout l' éclat du plus grand jour.Id.
Tous ces vers ne sont pas du bon tems de Rousseau; et à mon goût, cet esprit illuminé, ces âmes illuminées et ces vertus que l' éclat du jour illumine, sentent plus le siècle de Malherbe que le nôtre. M. Le Franc a dit plus récemment:
   Illumine enfin les pensées
   Du dernier de tes serviteurs.
       Le Franc.
= Le substantif serait plus nécessaire à conserver au figuré que le verbe. Nous avons un équivalent à illuminer, qui est éclairer: nous n' en avons point à illumination: clarté, lumière n' ont pas, comme ce nom, le sens actif. _ M. Thomas a dit assez récemment. "Agir tantôt par des réflexions profondes, et tantôt par ces illuminations soudaines, qui sont les élancemens du génie. Il me semble que ce mot est beau, employé de cette manière. _ L' Acad. ne dit illumination et illuminer au figuré qu' en termes de dévotion. = Le verbe ne s' est bien conservé qu' au participe, employé substantivement. "C' est un illuminé: un visionaire en matière de religion.

ILLUSION


ILLUSION, s. f. ILLUSOIRE, adj. ILLUSOIREMENT, adv. [Il-lu-zion, zoâ-re, re--man: 3e lon. 4e e muet au 2d et 3e.] L' illusion est une aparence trompeûse; un fantôme, une imagination chimérique. "Une illusion agréable; de douces illusions. "Il ne se repaît que d' illusions. = Illusoire, capable de tromper par une fausse aparence. "Contrat, proposition, demande illusoire. = Illusoirement, d' une manière illusoire. Celui-ci n' est d' usage qu' au Palais.

ILLUSTRATION


ILLUSTRATION, s. f. ILLUSTRE, adj. ILLUSTRER, v. act. [Il-lus-tra-cion; tre, tré: dern. e muet, au 1er, é fer. au 2d.] Illustre, éclatant, célèbre par le mérite, ou la noblesse, ou les talens, les succês, etc. Illustrer, rendre illustre. "Homme, race, maison illustre; se rendre illustre. "Le Chapitre de S. Jean de Latran est un des plus distingués et des plus illustres de Rome. La Lande. = Il se dit quelquefois des chôses. "Les illustres monumens, qui nous restent de l' antiquité. "Les grandes charges ont illustré cette famille. "Il a illustré son pays par ses ouvrages. "Les Saints et les Grands Hommes, qui ont illustré l' Église de France. Le P. Longueval.
   ILLUSTRATION, ne se dit que des marques d' honeur, dont une famille est illustrée. "Les charges, les dignités sont des illustrations dans une famille. "Elle est anciène, mais sans illustration. = * Autrefois on disait illustration, illustrer, pour éclaircissement, éclaircir, comentaire, comenter. "Les paroles de M. Racan étant considérables pour l' illustration de plusieurs endroits des Poésies de Malherbe. Ménage. "Cette solution y est illustrée par plusieurs exemples. Trad. d' une Lettre de Newton.
   REM. 1°. Illustre, se dit ordinairement en bien et comme un éloge. Quelquefois pourtant comme célèbre, il se dit en mal pour fameux. "Un illustre Scélérat. = 2°. Illustre, s' emploie quelquefois substantivement "Ce Peintre est un illustre. Acad. "La Postérité mettra M. Titon du Tillet au nombre des Illustres, qui ont honoré et encouragé les talens. L' Ab. des Font. _ Ce mot est peu usité comme substantif dans le style sérieux. Il est plus du style badin ou même moqueur.

ILLUSTRISSIME


ILLUSTRISSIME, adj. [Illustrissime.] Titre d' honeur doné aux Évêques. "Illustrissime et révérendissime; très-illustre et très-révérend.

ÃŽLOT


ÎLOT, s. m. [Îlo: 1re lon.] Petite île. Quelques-uns disent îlet: mais celui-ci n' est pas admis par l' usage.

IM


IM. Devant une consone, c' est une voyèle nasale, qui a le son d' ein, long. Imbiber, timbre. Devant une voyèle, l' i fait seul une syllabe, et l' m est consone et se joint à la voyèle qui suit. Image, Imiter: pron. I-ma--ge, I-miter. Devant l' e, l' o et l' u, on redouble l' m. Immédiat: immoler, immuable. Voy. IMM.

IMAGE


IMAGE, s. f. [I-mage: dern. e muet. Dans les Provinces méridionales, on fait assez comunément ce mot masc. On dit, un bel image; c' est une belle image qu' il faut dire.] Image, est 1°. Représentation, en Sculptûre et en Peintûre; il ne se dit en ce sens que des images des faux Dieux; et de celles des Saints; et surtout en parlant des Iconoclastes. "Honorer les images des Saints; briseur d' images. "On voit dans le milieu l' image du Sauveur. La Lande. "Cette image a été restaurée. Id. = 2°. Estampe. Il ne se dit que des plus grossières. "Ce livre est plein d' images. "Les images sont le grand ornement des chambres des paûvres gens. = 3°. Ressemblance. "Dieu a fait l' homme à son image. "Les Rois sont l' image de Dieu. "Cet enfant est l' image de son père. = 4°. Idée, tableau de l' imagination. "L' image de la mort, du péril lui est toujours présente. "Ce discours est rempli de belles images. Voy. EFFIGIE.
   On dit, proverbialement, d' une belle femme sans esprit, que c' est une image, une belle image; d' un enfant retenu et posé, sage, comme une image. = Et en plaisantant, vous avez bien fait, on vous donera une image, par allusion aux images qu' on done aux écoliers pour récompense. _ On dit au contraire, il a fait là une vilaine action: il n' en aura pas une image.

IMAGER


IMAGER, ÈRE, subst. [I-magé, gère: 3e é fer. au 1er, è moy. au 2d.] Celui, celle, qui vend des images, des Estampes.

IMAGINABLE


IMAGINABLE, adj. IMAGINAIRE, adj. [Imaginable, nère: pénult. dout. au 1er, è moy. et long au 2d.] Le 1er se dit des chôses; qui peut être imaginé. Il ne se dit guère qu' avec la négative ou en interrogation. "Cela n' est pas imaginable. "Cela est-il imaginable? = Le 2d se dit des persones, dont l' imagination est blessée ou trompée; malade, riche imaginaire, qui croient l' être et ne le sont pas; et des chôses plus souvent; qui n' est point réel et n' est que dans l' imagination. "Biens, honeurs, félicité, bonheur imaginaire. = Cet adjectif n' aime point à précéder. Son imaginaire voyage (Let. Édif.) forme une inversion dûre et choquante. _ En vers pourtant, il pourrait marcher devant et avec élégance, sous la direction de l' oreille et du goût.

IMAGINATIF


IMAGINATIF, IVE, adj. IMAGINATION, s. f. IMAGINER, v. act. [I-maginatif, tîve, cion, en vers ci-on: i-maginé: pénult. lon. au 2d.] Imaginer, c' est former quelque chôse dans son esprit. Imagination, faculté de l' âme, par laquelle elle imagine. Imaginatif, qui imagine aisément, qui a une grande fertilité d' imagination. "C' est un homme qui imagine de belles chôses. "Il a une belle imagination. "Telle est la natûre de l' esprit humain, qu' il veut que la raison même s' assujétisse à lui parler le langage de l' imagination. D' AGUESS. "Ce n' est que dans un roman qu' il est permis de peindre d' imagination. Le P. Longueval. "Il est fort imaginatif: il a l' esprit imaginatif. "Qu' imaginez-vous là? C' est un éfet de votre imagination: ce n' est qu' une imagination: il n' y a rien de réel.
   REM. 1°. Imaginer a divers sens suivant qu' il est réciproque ou actif. S' imaginer, signifie croire, se persuader. Il régit ou l' infinitif sans prép. ou la conjonction que avec l' indicatif ou le subjonctif, suivant que la phrâse est afirmative ou négative. "Il s' imagine être le seul, ou qu' il est le seul qui sache penser. "Il ne s' imagine pas qu' il soit le seul, etc. Avec le seul régime simple, il signifie concevoir. "On ne saurait s' imaginer rien de plus ridicule. _ Imaginer, actif, signifie toujours concevoir ou inventer; et l' on ne met jamais de que, ou d' infinitif après lui. On dit bien. "On ne peut rien imaginer de plus extravagant: j' imagine une chôse. J' imagine un moyen de, etc. mais on ne doit pas dire: j' imagine que cela est: il imagine être un grand homme; il faut dire je m' imagine, il s' imagine, etc.
   2°. Imaginative, est s. f. Dans le discours familier.
   Rare et puissant effort d' une imaginative,
   Qui ne le cède en rien à persone qui vive.
       Mol.
"Le goût pour les Romans a fait naître un nouveau genre tragique, champ vaste, et qui n' a d' autres bornes que l' imaginative du créateur. Coyer.

IMBÉCILE


IMBÉCILE, adj. et subst. IMBÉCILITÉ, s. f. [Inbecile, cilité: 2e é fer.] Faible et faiblesse d' esprit. "Le grand âge l' a rendu imbécile. "C' est un imbécille, un grand imbécille. "L' imbécilité de l' âge, de l' esprit. "Il est tombé dans l' imbécilité. "Il l' a fait par imbécilité, par pûre imbécilité. = * On le disait autrefois pour faible, débile. "Les foibles jouissent de la santé des robustes, et les robustes jouïront réciproquement du fruit de la patience des imbécilles. S. Fr. de Sales. "Né avec une santé fort infirme... Une mémoire grandement imbécile. Du Vair Garde des Sceaux.
   Le sang a peu de droits dans le sens imbécile.
       Corn. OEdipe.
* Fénélon lui done le sens d' incapable, qui est aussi suranné. "Défaut, qui rend un homme imbécile pour le gouvernement.

IMBIBER


IMBIBER, v. act. IMBU, ÛE, adj. [In--bibé, inbû, bû-e: 1er lon. 2e lon. aussi au dern.] Le verbe ne se dit qu' au propre. Mouiller de quelque liqueur, en sorte que la chôse en soit pénétrée. "La pluie a imbibé la terre. "Imbiber une compresse d' eau-de-vie, de vinaigre. = L' adjectif ne se dit qu' au fig. Pénétré de.... "Imbu d' une afaire, d' une nouvelle, d' une mauvaise doctrine. "Voilà deux jeunes gens imbus des mêmes principes, etc. Marm.

IMITABLE


IMITABLE, adj. IMITATEUR, TRICE, adj. et subst. IMITATION, s. fém. IMITER, v. act. [Imitable, tateur, trice, ta-cion, en vers ci-on, imité.] Imiter, se conformer à un modèle, suivre l' exemple. Imitable, qui peut, qui doit être imité. Imitateur, qui s' atache à imiter. Imitation, action par laquelle on imite. "Imiter les Anciens; les vertus des Saints. "Cette action n' est pas imitable; elle est plus admirable qu' imitable. "Les Peuples imitateurs. Rousseau. Les imitateurs des Anciens. "Fidèle imitatrice des Saints, etc. "Ils (les Saints) seroient peu touchés de la pompe de notre culte, si nos moeurs ne leur présentoient pas dans nous des imitateurs de leurs exemples. Le P. Chapelain "L' imitation des vertus, des vices. "Faire quelque chôse à l' imitation (à l' exemple) de quelqu' un. "Les ouvrages que l' imitation des Anciens à produits, ont mérité à leur tour d' ètre l' objet de l' imitation de tous les siècles suivans. D' Aguess. "L' imitation est souvent dangereuse: on perd ce qu' on a de génie en voulant prendre celui d' un autre. Gaichiéc.
   Imiter, copier, contrefaire. Ces trois termes désignent en général l' action de faire ressembler. On imite par estime: on copie par stérilité: on contrefait par amûsement. _ On imite les écrits; on copie les tableaux; on contrefait les persones. On imite en embélissant (pas toujours); on copie servilement; on contrefait en chargeant (en exagérant). Encycl.
   Imitable ne se dit guère qu' avec la négative. Il difère d' inimitable, en ce que celui-ci se dit du bien auquel on ne peut ateindre; et celui-là, du mal qu' il faut éviter. "Virgile est inimitable, et Lucain n' est pas imitable, Et ainsi dans le moral.

IMM


IMM: il n' en est pas de l' i suivi de 2 m, comme de celui qui n' a qu' une seule m a sa suite et une consone. Dans celui-ci, l' i et l' m ne forment qu' un son simple, une seule voyèle, qui est du nombre des nasales, et qui sone comme in. Voy. IM. Mais dans Imm, les 2 m font leur ofice de consones; la première se lie avec un e muet sous-entendu; la seconde, avec la voyèle suivante. Ainsi, immaculé, immédiat, imminent, immoler, immuable se prononcent comme si l' on écrivait, ime-maculé, ime-médiat, etc. (l' e sur-ajouté extrêmement muet) et non pas einmaculé einmédiat, etc.

IMMACULÉ


IMMACULÉ, ÉE adj. [Im-maculé, lé-e; 4e é fer. long au second.] Qui est sans tache de péché. Ce mot est consacré pour caractériser la conception de la Ste. Vierge. On ne l' emploie que dans cette ocasion. Ailleurs on ne pourrait s' en servir que dans le style burlesque.

IMMANQUABLE


IMMANQUABLE, adj. IMMANQUABLEMENT, adv. [Im-mankable, bleman 2e lon. 4ee muet. _ Bouhours, La Bruyère, Leibnitz et autres, ont écrit immancable,] Immanquable se dit de ce qui ne peut manquer d' arriver, de réussir. Cette afaire, le gain de ce procès est immanquable. "Il est immanquable de le trouver à telle heure. Il ne se dit point des persones. On ne dit point cet homme est immanquable, pour dire qu' on ne peut le manquer. = Immanquablement, infailliblement, sans manquer. "Cela arrivera immanquablement.
   Immanquable, infaillible (synon.) Le 1er désigne la certitude objective, ou que l' objet est en lui-même certain: le 2d la certitude~ idéale qu' on a, une science certaine de l' objet. "Un éfet est immanquable, qui dépend d' une caûse nécessaire: une prédiction est infaillible, qui procède d' une science certaine. "Le lever du Soleil est immanquable: une règle d' arithmétique est infaillible, etc. Roub. Synon.

IMMATÉRIALITÉ


IMMATÉRIALITÉ, s. f. IMMATÉRIEL, ELLE, adj. [Im-matérialité, èl, èle: 3e é fer. 5e è moy. aux deux dern.] Ces deux mots ne se disent que parmi les Savans, de ce qui est sans mélange de matière. "L' âme est immatérielle: l' immatérialité de l' âme.

IMMÉDIAT


IMMÉDIAT, ATE, adj. IMMÉDIATEMENT, adv. [Im-média, ate, ateman: 2e é fer. 5ee muet.] Immédiat, est 1°. Qui agit sans milieu; caûse immédiate. "Les eaux du déluge n' ont pu se trouver sur la terre, et en disparoître que par un effet immédiat de la toute-puissance divine. Les Helv. = 2°. Qui précède ou suit sans intervale. "Prédécesseur, successeur, Seigneur, Vassal immédiat. = Immédiatement, d' une manière immédiate. "Le Roi tient immédiatement de Dieu son autorité. _ Tout de suite et sans intervale. "Immédiatement après. _ * Les Traducteurs d' ouvrages Anglais donent à cet adverbe le sens d' incessament, incontinent, qu' il a dans la langue anglaise. "La populace prit immédiatement les armes. Hist. des Stuarts. L' Abé Prévot dans l' Hist. des Voyages, et Mde. de B... qui a traduit les Plantagenets et les Tudors l' emploient de même. C' est la traduction trop littérale de l' adv. Anglais immediately, qui a un emploi plus étendu que l' adv. Français immédiatement. = Il doit être placé devant les prépositions et les adverbes qu' il modifie; immédiatement après, et non pas après pâques immédiatement, comme le dit un des Auteurs des Let. Édif.

IMMÉMORIAL


IMMÉMORIAL, ALE, adj. [Im-mémori--al, ale: 2e é fer.] Qui est si ancien, qu' il n' en reste aucune mémoire, aucun souvenir. "Tems, usage immémorial. Possession immémoriale.

IMMENSE


IMMENSE, adj. IMMENSEMENT, adv. IMMENSITÉ, s. fém. [Im-manse, seman, sité: 2e lon. 3e e muet aux deux prem.] Immense, qui est sans bornes. Immensement, d' une manière immense. Immensité, grandeur, étendûe immense. "Grandeur, espace immense. Ambition immense; desirs immenses. Richesses, frais immenses. Il est immensement riche. "L' immensité de l' univers, de la misériocorde de Dieu.
   Rem. 1°. Il me semble que ces mots se disent de la quantité et de l' étendue, et non pas du nombre. Je ne voudrais pas dire avec Bossuet, des troupes immenses; une armée immense, ni l' immensité d' une armée, ni des troupes immensement nombreûses. = 2°. Immense est une espèce de superlatif: il ne comporte donc pas le plus ou le moins, et ne peut admettre de termes de comparaison. "Des desseins plus immenses. Acad. des Insc. _ Plus étendus, plus considérables auraient été des termes plus propres, car étendu et considérable ont des bornes, et immense n' en a point. = 3°. Immensement n' est point ancien dans la langue. Il est aujourd' hui fort en vogue, et plusieurs l' emploient à tout propôs: C' est pour eux un terme favori. Dans le nombre, il y en a qui écrivent et prononcent mal à propôs immensément, avec un accent aigu sur le 2d e.

IMMERSION


IMMERSION, subst. fém. [Im-mêr-cion: 2e ê ouv.] Action de plonger dans l' eau. Baptême par immersion. = En Astronomie, entrée d' une planète dans l' ombre d' une autre planète. L' immersion de la Lune dans l' ombre de la terre.

IMMEUBLE


IMMEUBLE, s. m. et adj. [Im-meuble.] Bien fonds, ou ce qui en tient lieu. "Les maisons, les terres sont des immeubles. "Obliger ses biens, tant meubles qu' immeubles.

IMMINENCE


*IMMINENCE, subst. fém. IMMINENT, ENTE, adj. [Im-minance, nan, nante: 3e lon.] Imminent, qui est prêt à tomber sur; qui menace, ou dont on est prochainement menacé. Il ne se dit qu' en ces phrâses. Danger, péril imminent: ruine, disgrâce imminente. = M. Necker a risqué imminence. "L' imminence du danger. Ce mot serait utile, et manque à la langue. Voyez ÉMINENT.

IMMOBILE


IMMOBILE, adj. IMMOBILITÉ, s. fém. [Im-mobile, bilité.] Ils se disent de ce qui ne se meut point. "On a cru long-tems que la terre étoit immobile au centre du monde. L' immobilité de la terre est un systême entièrement abandoné. Immobile se dit des persones, mais non pas immobilité, du moins au propre. "Elle demeura quelque temps immobile: une pâleur mortelle se répandit sur son visage. Le Sage. _ Dans le moral, ils expriment l' état d' un homme qui ne se done aucun mouvement sur rien. "Dans des afaires aussi importantes, il demeure immobile. "Il demeure dans une immobilité coupable.

IMMODÉRÉ


IMMODÉRÉ, ÉE adj. IMMODÉRÉMENT, adv. [3e et 4e é fer.] Immodéré, excessif, violent. Immodérément, avec excês, sans modération. "Luxe, desir immodéré: ardeur, haine, passion immodérée. "Boire, travailler, etc. immodérément. = Immodéré, démesuré, excessif, outré (Synon.) Le 1er se dit de ce qui pâsse le juste milieu; le 2d de ce qui pâsse la mesûre; le 3e de ce qui pâsse les bornes; le 4e de ce qui pâsse de beaucoup le but. Ce qui est immodéré pèche par trop de force et d' action; ce qui est démesuré, par trop d' étendûe et de grandeur; ce qui est excessif, par surabondance et abus; ce qui est outré, par violence et exagération. "Il faut retenir et contenir ce qui deviendroit immodéré; réprimer et resserrer ce qui seroit démesuré; arrêter et réduire ce qui devient excessif; adoucir et afoiblir ce qui est outré, etc. ROUB. Synon. = Dans le Dict. de Trév. on disait, au comencement du siècle, qu' immodération n' était pas encôre bien reçu, mais qu' il pourrait l' être avec le tems. Il a de la peine à s' établir. Peu d' Auteurs l' ont employé. L' Acad. ne le met point. Peu usité. Rich. Port. Ce mot est pourtant fort beau, et il est utile. "L' immodération des desirs.

IMMODESTE


IMMODESTE, adj. IMMODESTEMENT, adv. IMMODESTIE, s. f. [Im-modèste, te--man, tî-e, et non pas ci-e: 3eè moyen, 4e e muet aux deux premiers, lon. au 3e.] Ils se disent de ce qui est oposé à la modestie, à la pudeur. "Une persone immodeste. Discours, regards, posture, action, air immodestes. "S' habiller, parler immodestement. "Immodestie à l' Êglise; dans les discours, les postures, etc.

IMMOLATEUR


*IMMOLATEUR, s. m. IMMOLATION, s. f. IMMOLER, v. act. [Im-mola-teur, la--cion, lé.] Immoler, c' est ofrir en sacrifice. "Immoler à Dieu des victimes. = Fig. sacrifier à... "Immoler quelqu' un à son ambition, à sa haine.
   Aux douleurs, aux remords, à la crainte immolé,
   Je m' excitois moi-même aux larmes:
   Mais Dieu se fit entendre, et je fus consolé.
       Le Franc.
= Vaugelas aprouvait le réciproque s' immoler avec la prép. à pour régime; et Th. Corneille aprouvait l' opinion de Vaugelas, d' après les observations de l' Académ. elle-même. Cependant, dans son Dictionaire, elle ne dit que s' immoler pour, etc. Mais le régime du datif est autorisé par l' exemple de tant de bons Auteurs, que le silence de l' Académie ne doit pas engager à le proscrire. "S' immoler à ses desirs. "Il S' immole sotement aux préjugés barbâres du siècle.
   Rem. Immoler au propre, ne se dit que du sacrifice proprement dit, et non d' une simple ofrande. * Je mangeai le ris qu' on y immoloit. P. Bouvet. Let. Édif. Je crois qu' il falait dire, qu' on y ofrait.

IMMONDE


IMMONDE, adj. IMMONDICE, s. f. [2e lon. dern. e muet.] Immonde, impur, ne se dit que dans le langage de l' Écritûre. "Animaux, viandes immondes. Femme immonde. Qui dirait animaux impurs, etc. femme impure, ne parlerait pas correctement, surtout dans le dernier exemple, où la substitution du mot impur fait un sens tout diférent. Bouh.
   IMMONDICE, ordûre. En ce sens, il se dit toujours au plur. "Les rûes sont pleines d' immondices. "Auguste fit nettoyer le lit du tibre, qui étoit embarrassé et élevé par les immondices et les décombres. La Lande. = Immondice légale, qualité de ce qui est immonde, suivant la Loi mosaïque.

IMMORTALISER


IMMORTALISER, v. a. IMMORTALITÉ, s. f. IMMORTEL, ELLE, adj. [Im-mortalizé, lité, tèl, tèle: 3eè moy. aux deux dern. 5e é fer. aux deux premiers.] Immortel, qui n' est point sujet à la mort. Immortaliser, rendre immortel dans la mémoire des hommes. Immortalité, qualité de ce qui est immortel. "Les Anges sont immortels. "L' âme de l' homme est immortelle. _ Et par extension, qui doit être d' une longue durée. Procês immortel; haine immortelle. _ Et en parlant des hommes et de ce qui les concerne. "Des ouvrages, des exploits immortels. Des actions immortelles. "Immortaliser son nom, sa mémoire. "L' immortalité de l' âme. "Actions dignes de l' immortalité.
   Rem. Les Dieux immortels est une expression consacrée chez les Grecs et les Romains, qu' il ne faut pas étendre aux autres Nations idolâtres. * Le P. Charlevoix fait invoquer aux Bonzes Japonais les Dieux immortels: c' est pécher contre le costume. = On dit poétiquement, l' Immortel, pour dire, le vrai Dieu.
   Ce flambeau de notre ame,
   Qu' alluma l' Immortel d' une céleste flamme.       Gress.
On dit plus ordinairement l' Éternel.
  Oui, je viens dans son Temple adorer l' Éternel.

IMMORTIFICATION


IMMORTIFICATION, s. f. IMMORTIFIÉ, ÉE, adj. [Im-mortifika-cion, en vers, ci-on; fi-é, fi-é-e.] C' est le contraire et l' absence de la mortification. "Passions immortifiées; l' immortification de l' esprit, des passions. = Ces mots ne sont pas anciens dans la langue. Au commencement du siècle, La Touche les compte au nombre de ceux qui se trouvaient dans de bons Auteurs, mais qui n' étaient pas généralement reçus. Ils étaient pourtant, dès-lors, insérés dans le Dict. de l' Acad. qui ne les admet qu' en style de dévotion.

IMMUABLE


IMMUABLE, adj. *IMMUABILITÉ, s. f. [Im-mu-able, abilité.] Immuable, qui n' est point sujet à changer. "Dieu seul est immuable. "Ses immuables décrets. = * Quoiqu' on dise immuable, et non pas immutable; on dit immutabilité, et non pas immuabilité: ainsi le veut l' usage. Le P. Griffet a préféré celui-ci. "Vous imiterez en quelque sorte l' immuabilité de Dieu. Ann. Chrét.

IMMUABLEMENT


IMMUABLEMENT, adv. D' une manière immuable. Il est peu usité.

IMMUNITÉ


IMMUNITÉ, s. fém. Exemption des impôts, charges, etc. "Les immunités de l' Église, d' une Ville, d' une Province.
   Immunité, exemption (synon.) Le 1er est la dispense d' une charge onéreûse; le 2d est une exception à une obligation commune. "L' immunité des persones et des biens éclésiastiques est un droit ancien: l' exemption des Églises et des monastères soustraits à la juridiction des Évêques est un droit plus nouveau. L' immunité a (le plus souvent) quelque chôse de respectable: l' exemption entraine souvent aussi quelque chôse d' odieux. Extr. des Nouv. Synon. Fr. de Mr. l' Abbé Roubaud.

IMMUTABILITÉ


IMMUTABILITÉ, s. f. Qualité de ce qui est immuable. "L' immutabilité des décrets divins.

IMPAIR


IMPAIR, adj. masc. [Inpêr: 1re lon. 2e ê ouv.] Qui n' est pas pair. Il ne se dit qu' avec nombre. "Tout nombre est pair ou impair: 3, 5, 7, sont des nombres impairs. Être en nombre impair.

IMPALPABLE


IMPALPABLE, adj. [Inpalpable: 3e dout. 4e e muet.] Qui ne se peut toucher avec les mains, ou, qui est si fin, si délié, qu' il ne fait aucune impression au toucher. "Poudre impalpable. * "Ce qui est impalpable, dit un Auteur Moderne, n' a pas besoin du ministère des sens. La pensée n' est pas juste; car ce qui est impalpable, peut pourtant être sensible, comme les cieux, l' air, la matière électrique, la lumière, et tout ce que l' on voit et l' on sent sans le pouvoir toucher.

IMPARDONABLE


IMPARDONABLE, adj. [Inpardonable: pénult. dout.] Qui ne mérite point de pardon. Crime, faûte impardonable. = On ne le dit point des persones. On ne dit pas: cet homme, cette femme est impardonable, par la même raison qu' on ne dit pas pardoner un homme ou une femme; ni, il doit être pardoné; elle ne doit pas être pardonée.

IMPARFAIT


IMPARFAIT, AITE, adj. IMPARFAITEMENT, adv. [Inparfè, fète, fèteman; 1re lon. 3e è moy. 4e e muet.] Imparfait, qui n' est pas achevé, à qui il manque quelque chôse. "Laisser un ouvrage imparfait. "Guérison, joie imparfaite. = Il ne se dit que des chôses, excepté peut-être chez les Ascétiques, qui le disent des persones, au pluriel. "Nul n' est exempt de cette guerre continuelle: les imparfaits y sont engagés comme les Saints. Ségaud. = Imparfaitement, d' une manière imparfaite. "Il n' est guéri qu' imparfaitement. "Il a traité ce sujet imparfaitement.
   Imparfait, tems des verbes. Il y a l' imparfait de l' indicatif et celui du subjonctif. Le premier se termine pour tous les verbes en ois, oit, ions, iez, oient; j' aimois, tu lisois, il tenoit, etc. ou mieux encôre, en ais, ait, aient; Il enseignait, j' écrivais; ils promenaient. _ L' imparfait du subjonctif se termine en asse, isse, usse, insse, suivant les diverses conjugaisons des verbes; que j' aimasse, tu fisse, je lusse, je vinsse; et non pas j' aimas, je fis, comme on dit en certaines Provinces.
   On se sert de l' imparfait de l' indicatif, 1°. Quand on parle de quelque chôse qu' on avait acoutumé de faire souvent: "j' alais tous les matins au manège, ensuite je fesais des armes. = 2°. Lorsqu' on parle des qualités et des passions qu' une persone a eûes. "Dans sa jeunesse il était galant; il aimait la danse, le jeu, etc.~ = 3°. Pour exprimer une chôse qui se passait dans le tems qu' on en fesait une aûtre. "J' écrivais pendant qu' il lisait. = 4°. Pour exprimer une circonstance de quelque durée. "Je vis hier un homme qui dansait sur la corde.
   Rem. Les Anglais qui, à proprement parler, n' ont point d' imparfait dans leur langue, se trompent souvent dans l' usage qu' on doit faire de ce tems. L. T. "Le Comte de Lancastre possédoit de son chef, et peu de tems après de celui de son épouse, au moins six comtés. Hist. d' Angl. Il falait, et il posséda peu de tems après, etc.
   C' est une règle générale que quand le verbe régissant doit être à l' imparfait de l' indicat. le v. régi doit être à l' imparfait du subjonct. En Franche-Comté, on le met au présent. On dit: vous vouliez que je vienne, au lieu de, que je vinsse. Bossuet, par inatention, a dit aussi. "Les preûves indicatives du Messie devoient être distribuées de telle sorte, qu' elles soient déclarées chacune en son tems. Il falait, qu' elles fussent déclarées, etc.

IMPARTIAL


IMPARTIAL, ALE, adj. IMPARTIALEMENT, adv. IMPARTIALITÉ, s. f. [Inpar--ci-al, ale, aleman, alité: 1re lon. 5ee muet au 2d et 3e.] Impartial se dit de celui qui ne prend point parti pour l' un plutôt que pour l' aûtre. Impartialement, sans partialité. Impartialité, qualité de celui qui est impartial. "Juge, Historien impartial. "Juger impartialement, avec impartialité.

IMPASSIBILITÉ


IMPASSIBILITÉ, s. f. IMPASSIBLE, adj. [Inpacibilité, cible: 1re lon. dern. é fer. au 1er, e muet au 2d.] Ils expriment la qualité de ce qui est capable de soufrir. "L' impassibilité des corps glorieux. Après sa résurrection, le corps de J. C. devint impassible.

IMPATIEMMENT


IMPATIEMMENT, adv. IMPATIENCE, s. fém. IMPATIENT, ENTE, adj. IMPATIENTER, v. act. [Inpa-cia-man, cian-ce, cian, ciante, cian-té: 3e br. au 1er, lon. aux autres.] Impatience est un manque de patience. Impatiemment, avec impatience. Impatient, qui manque de patience. Impatienter, faire perdre patience "Atendre avec impatience; soufrir avec impatience. "C' est un homme, un malade impatient. "Ceux qui se piquent le plus de raison, sont les plus impatiens dans leurs souffrances. Chemin. "Il soufre impatiemment que, etc. Il suporte son afliction fort impatiemment. "Il m' impatiente par sa lenteur. Vous m' impatientez par vos discours.
   REM. 1°. Avoir impatience, se dit sans art. et régit de et l' infinitif. "Hazaël, qui avoit impatience de conoître mes sentimens, etc. Télém. = L' Acad. ne dit pas avoir impatience, mais avoir une grande impatience de; et celui-ci, en éfet, est plus usité. = On dit, dans le même sens, et adverbialement, dans l' impatience de. L' Abé Prévot lui done un sens qu' il n' a pas. "Dans l' impatience d' être observés si curieusement, ils prirent tout d' un coup le large. H. des Voy. Avec ce régime, impatience signifie desir ardent: il y a donc un contre-sens dans cette phrâse, puisque ceux dont on parle, bien loin de desirer d' être observés, en étoient choqués, et ne pouvoient le soufrir. = Il y a des exemples d' impatience avec le régime du génitif (de la prép. de devant les noms.) "Il partagera l' impatience de l' arrivée du Chevalier de Tourville. Sév. Ce régime n' est pas trop sûr. On dit plutôt, l' impatience de voir arriver, etc. M. Moreau dit; l' impatience du joug; mais là, impatience a un aûtre sens. Voyez l' article suivant.
   2°. Selon le P. BOUH. impatient ne doit point avoir de régime, et l' Acad. ne lui en done point. Ménage était d' un aûtre sentiment, et plusieurs Auteurs l' ont préféré dans la pratique. "Impatiens du joug. "Impatiens de toute domination. Vertot. "Impatiens de leur exil. Hist. d' Angl.
   Impatient du Dieu, dont le soufle invincible
   Agite tous ses sens.
       Rousseau.
Il serait à souhaiter que l' usage consacrât ce régime: mais il n' est pas-encôre assez autorisé. _ Dans les phrâses précédentes, impatient signifie, qui ne peut soufrir~. Dans les exemples suivans, il veut dire, qui desire ardemment, qui atend avec impatience. Or, dans ce sens, le régime des noms est encôre plus usité. La Noblesse impatiente de gloire, ne demandoit qu' à marcher.
   Impatiens du tems de fraper leur victime.
       La Motte.
Impatient déjà des sacrés Aruspices.Ibid.
Dans ce sens, il régit fort bien de et l' infinitif. "Impatient de savoir ce qui en arrivera. "Impatient de briser ses fers, et de se venger. Hist. des Tud. Corn. lui fait régir la conjonct. que, suivi de la particule ne, et du subjonctif.
   Impatient pour eux que la cérémonie
   Ne comence bientôt, ne soit bientôt finie.
       Rodog.
C' est un faux régime.
3°. S' impatienter se dit sans régime. Mde. de B... (Hist. d' Angl.) lui fait régir de et l' infinitif. "Ils s' impatientèrent d' atendre le Roi. L' usage n' admet pas ce régime.

IMPATRONISER


IMPATRONISER (S' ) v. réc. [Inpatro--nizé.] Il est du st. fam. et il se prend en mauvaise part. S' introduire dans une maison et y dominer. "Il s' est impatronisé dans cette maison.

IMPAYABLE


IMPAYABLE, adj. [Inpé-iable: 2eé fer. 3e dout.] Qui ne se peut trop payer.
   C' est rompre mon hymen et celui de ma soeur:
   Oh! ce double succès me paroit impayable.
       Barthe.
Il est du st. fam.

IMPECCABILITÉ


IMPECCABILITÉ, s. f. IMPECCABLE, adj. [On ne prononce qu' un c, et il serait bon qu' on n' en écrivît qu' un, Impécabilité, cable.] Impeccable, incapable de péché. Impeccabilité, état de celui qui est impeccable.

IMPÉNÉTRABILITÉ


IMPÉNÉTRABILITÉ, s. f. IMPÉNÉTRABLE, adj. [2e et 3e é fer.] Impénétrable, qui ne peut être pénétré. Au propre, Un bois impénétrable. = Au figuré. "Les desseins de Dieu sont impénétrables. = Il régit quelquefois la prép. à. "Impénétrable à tous les traits. "Impénétrable à tous les regards. L' Abé Garnier, Hist. de Fr. = En parlant des persones; qui est extrêmement caché et secret. "Cet homme est impénétrable. "Il étoit d' autant plus impénétrable, que tout le monde croyoit le pénétrer. St. Réal. = Impénétrabilité, état de ce qui est impénétrable. Il se dit, comme l' adject. au propre et au figuré "L' impénétrabilité des corps, des desseins, de Dieu: mais il ne se dit pas des persones. On ne dit point, l' impénétrabilité de cet homme déroute ses énemis.

IMPÉNÉTRABLEMENT


IMPÉNÉTRABLEMENT, adv. D' une manière impénétrable. Acad. Il est peu usité.

IMPÉNITENCE


IMPÉNITENCE, s. f. IMPÉNITENT, ENTE, adj. [Inpénitance, tan, tante: 2e é fer. 4e lon. 5ee muet.] Ils expriment l' endurcissement dans le péché. "Vivre, mourir impénitent, dans l' impénitence.

IMPÉRATIF


IMPÉRATIF, adj. et subst. m. [Inpératif: 1re lon. 2e é fer.] Dans le sens d' impérieux, il n' est que du style plaisant. "Prendre un ton impératif, parler d' un air impératif. = Son emploi le plus ordinaire, est de signifier le 2d mode des verbes, le mode impératif; l' impératif.
   L' Impératif est une manière de signifier, dans les verbes, l' action de comander, de prier, d' exhorter. "Aporte-moi cela; faites-moi cette grace, craignez Dieu plus que les hommes. * Dans quelques Provinces, le peuple emploie, au lieu de l' impératif, la 2de persone du plur. du prés. du subj. "Ne fassiez pas, ne disiez pas, pour ne faites, ne dites pas. = 1°. Le futur de l' indicatif a quelquefois la signification de l' impératif. "Vous aimerez Dieu de tout votre coeur; c. à. d. aimez Dieu, etc. = 2°. Faut-il mettre une s à la 2e persone du sing. de l' impératif? Vaugelas répond à cette question, en distinguant trois sortes d' impératifs: les uns, où d' un commun consentement on ne met point d' s; d' aûtres où l' on en met toujours; et certains aûtres, où les opinions sont partagées. _ Tout le monde s' acorde à ne point mettre d' s à ceux qui se terminent en a et en e: va, aime. * M. Le Mierre met presque toujours une s: entasses, gardes-toi, etc. C' est peut-être la faute de son Imprimeur. Il y a long--tems que Boileau l' a reprise dans Perrault. _ Il y a pourtant des ocasions où va, est suivi d' une consone; car devant en, il prend un t, va-t' en; et devant y, il prend une s, vas-y. On met aussi une s devant y et en à ceux qui se terminent en e muet: "Portes-y, dones-en; ce qui doit s' entendre d' en pronom; car si en est prép. on ne met point d' s.
   O Dieu! porte en mon sein la douceur et la paix.
=L' on met toujours une s à ceux qui se terminent en au, eu, ou, an, en, at, er, eur, et, or, our; exemple: vaus, veus, résous, répans, prens, bats, sers, meurs, permets, dors, secours, etc. = Ceux sur qui les opinions sont partagées, sont les terminés en i, béni ou bénis; en ai, fais ou fai: (le 1er est plus usité) en ain, crain ou crains; le dernier est le meilleur: en ein, fein, ou mieux, feins; en oi, voi, meilleur que vois; en ien, tien ou tiens; le premier est le plus suivi; en ui; fui, meilleur que fuis. Vaug. = 3°. Les pronoms suivent l' impératif immédiatement, et l' on doit mettre un tiret, ou division (-) entre l' un et l' aûtre. "Aportez-moi, dites-lui, donez-nous, etc. Pour le, il faut éviter qu' il se rencontre avec l' article d' un nom qui suit, comme cela se trouve en ce vers des Plaideurs de Racine.
   Condamnez-le à l' amende, ou s' il le casse, au fouet.
Car, en prôse, on est obligé de s' arrêter, pour éviter la cacophonie de la la; et en vers, où l' on est obligé d' élider, on ne l' évite pas. D' Olivet. _ * Les Poètes se donent quelque--fois la licence de placer les pronoms avant l' impératif. "Parlez et lui montrez. Racine, Androm. "Allez, et vous joignez à, etc. Danchet. On dit: vous lui montrez, vous vous joignez, au prés. de l' indicatif; et montrez-vous, joignez-vous, à l' impératif.
   Avis aux Imprimeurs, et même aux Auteurs. On ne doit mettre un tiret ou division entre l' impératif et le pronom qui le suit, que quand ce pronom est régi par le verbe, qui est dans ce mode. Ainsi, on doit écrire, venez me parler, va te recréer, sans tiret, parce que me et te ne sont pas régis par l' impératif venez et va, mais par l' infinitif, parler et recréer; et au contraire, on doit écrire, laissez-moi faire, fais-toi friser, parce que moi et toi sont régis par laissez et par fais. J' ai lu dans des livres, venez-nous dire, et aûtres exemples semblables: c' est une faûte de typographie. Il faut venez nous dire, sans tiret, parce que nous, en cet endroit, est régi par dire, et non pas par venez. = On dit, transportez-vous y; envoyez-y moi; donez m' en, done-t' en, et ainsi des aûtres verbes; mais l' usage ne permet pas qu' on dise, transporte-ty, envoyez-y nous: il faut dire, transportes-y toi, envoyez-nous y.
   Rem. Quelquefois on se sert de la 1re persone du plur. de l' impératif, quoiqu' il ne s' agisse que d' une persone. Un homme se dira à lui-même: écrivons-lui, oublions ses torts, pour ne nous souvenir que de ses malheurs. = On emploîe aussi l' impératif dans le sens de, vous auriez beau faire, ou être, etc. "Soyez savant, habile, vertueux; instruisez les hommes; sauvez la Patrie, etc. vous êtes méprisés, si vos talens ne sont pas relevés par le faste. Télém.

IMPÉRATIVEMENT


IMPÉRATIVEMENT, adv. [Inpératîve--man: 1re lon. 2e é fer. 4e lon. 5e e muet.] D' une manière impérative.

IMPÉRATRICE


IMPÉRATRICE, s. f. La femme d' un Empereur, ou une Femme, qui de son chef possède l' Empire. _ * On a dit anciènement, Empérière, et même au figuré. "La Charité est l' empérière des vertus.

IMPERCEPTIBLE


IMPERCEPTIBLE, adj. IMPERCEPTIBLEMENT, adv. [Inpêrcèptible, bleman: 2e ê ouv. 3e è moy. 5e e muet.] Qui ne peut être aperçu ou senti. "Objet, odeur, son imperceptible. _ Fig. "L' art est imperceptible dans cet ouvrage. "Cela se fait imperceptiblement, d' une manière imperceptible.

IMPERDABLE


IMPERDABLE, adj. (style famil.) Qui ne saurait se perdre. "Jeu, procès, imperdable.

IMPERFECTION


IMPERFECTION, s. f. [Inpêrfèk-cion, en vers, ci-on: 1re lon. 2e ê ouv. 3e è moy.] Défaut, manquement. "Imperfection du corps, de l' esprit. "Nous sommes tous remplis d' imperfections. Voyez VICE. "Le pouvoir de faire le mal est une imperfection, et non pas un caractère essentiel de notre liberté. D' Aguess. = Imperfection, défaut, Défectuosité, (synon.) Le 1er est un manque de perfection: le 2d de rectitude: le 3e de propriété et d' éfet. L' imperfection laisse quelque chose à desirer; le défaut à corriger; la défectuosité à supléer. "L' Imperfection dégénère en défaut; le défaut en vice; la défectuosité en diformité. Extr. des Synon. Fr. de M. l' Abé Roubaud.

IMPÉRIAL


IMPÉRIAL, ALE, adj. Qui apartient à l' Empereur, ou à l' Empire. "Manteau impérial, Courone, Armée impériale, etc. Les Impériaux, les Troupes Impériales, ou les Ministres de l' Empereur.
   IMPÉRIALE, s. f. Le dessus d' un carrosse, ou d' un lit. = Espèce de jeu de cartes.

IMPÉRIEUX


IMPÉRIEUX, EûSE, adj. IMPÉRIEûSEMENT, adv. [Inpéri-eû, eû-ze, zeman: 1re lon. 2e é fer. 4e lon. 5e e muet.] Impérieux, qui comande avec hauteur. Impérieûsement, avec orgueuil. "Homme, esprit, air, ton, geste impérieux. Femme, humeur impérieûse. "La prospérité rend l' homme impérieux, fier, méprisant, à mesure qu' elle le rend indépendant. Chemin. _ Il se dit aussi des chôses. "Rien n' est plus puissant et plus impérieux que l' exemple sur le coeur de l' homme. Le Père Le Chapelain. "Parler impérieûsement. "Il traite tout le monde impérieûsement.

IMPÉRISSABLE


IMPÉRISSABLE, adj. Qui ne saurait périr. On le dit souvent par hyperbole.

IMPÉRITIE


IMPÉRITIE, s. f. [Inpéricî-e: 2e é fer. 4e lon. dern. e muet.] Défaut d' habileté. Ce mot n' est pas ancien dans la Langue. Dabord Il n' a été dit que par les Savans: insensiblement l' usage s' en est étendu: mais il n' est point encôre établi dans le discours familier. "Un Oficier ignorant est l' assassin des soldats qui périssent victimes de ses faûtes et de son impéritie. Anon. "Avec quelle impéritie il prononce sur les Historiens de l' Antiquité. Ann. Litt. = Ce mot est dans le Dict. de Trév. dès le comencement de ce siècle: mais on observait qu' il n' était pas reçu dans la langue ordinaire. L' Acad. le met sans remarque.

IMPERSONEL


IMPERSONEL, adj. IMPERSONELLEMENT, adv. [Inpêrsonèl, nèleman: 2eê ouv. 4e è moy. 5e e muet.] Termes de Gramaire. Ils se disent des verbes qu' on n' emploie qu' à la 3e persone du sing. comme, il faut, il importe, etc. "Ce sont des verbes impersonels: ils s' emploient impersonellement. = On peut mettre au nombre des verbes impersonels ceux qui sont précédés du pronom général on: on dit, on aime, etc. = On emploie quelquefois aussi les verbes impersonellement, quoiqu' il y ait un nominatif exprimé.
   Il brille sur son front une aimable assurance.       Font.
"Il se répandra toujours du fond de votre âme une amertume qui empoisonera vos plaisirs. Massill. "Ils ont cru qu' il réjailliroit sur eux quelques-uns des rayons, qu' ils ont soin de mendier pour lui. Linguet. _ Ce tour sert à varier la construction.
   Rem. Le verbe impersonel ne veut après lui que l' article indéfini. "Il se présentoit dabord à Albuquerque l' ÃŽle de Ceylan. Rayn. Il me semble qu' il falait dire: il se présentait dabord une ïle: c' était celle de Ceylan; ou, sans employer le verbe impersonellement: l' ïle de Ceylan se présentait dabord à Albuquerque.

IMPERTINEMMENT


IMPERTINEMMENT, adv. IMPERTINENCE, s. f. IMPERTINENT, ENTE, adj. et subst. [Inpêrtinaman, nance, nan, nante. 2e ê ouv. 4e br. au 1er, lon. aux aûtres.] Impertinent, qui parle ou agit contre la raison, la discrétion, la bienséance. Impertinence, caractère d' une chôse, ou d' une persone impertinente. Impertinemment, mal-à-propos et sans jugement. "Homme, discours, propos impertinent: femme, action, réponse impertinente. "L' impertinence de cet homme, de ce discours est révoltante. "Dire, faire des impertinences. "Répondre impertinemment. = Fat, Sot, Impertinent (synon.) Voyez FAT. = Impertinent, Insolent: le 1er manque avec impudence aux égards qu' il convient d' avoir: le 2d manque, avec arrogance, au respect qu' il doit porter. L' Impertinent vous choque: l' insolent vous insulte. "L' Impertinent est ridicule et insuportable: l' Insolent est odieux et punissable..... Un petit mérite, avec beaucoup de vanité, devient assez impertinent. La bone fortune, avec assez d' orgueuil, rend insolent. Roub. Synon.

IMPERTURBABILITÉ


IMPERTURBABILITÉ, s. f. IMPERTURBABLE, adj. IMPERTURBABLEMENT, adv. [1re lon. 2e ê ouv. 4e dout. au 2e, 5e e muet au 2e et au 3e: bable, bleman.] Imperturbable, qui ne peut être troublé, ému. Imperturbablement, d' une manière imperturbable. Imperturbabilité, état de ce qui est imperturbable. "Il est imperturbable dans ses résolutions. "Les vues droites, l' honnêteté imperturbable n' ont jamais de grands revers à craindre. Moreau. "Rien ne peut déranger l' imperturbabilité de son âme. "Il s' atache à ses desseins imperturbablement. = Le subst. et l' adv. sont peu usités. Ils sont trop longs, et trop dificiles à prononcer: cela n' en favorise pas l' usage.

IMPÉTRABLE


IMPÉTRABLE, adj. IMPÉTRATION, s. f. IMPÉTRER, v. a. [Inpétrable, tra-cion, tré: 1re lon. 2e é fer. Cet e, devant l' e muet, se change en è moy. Il impètre, impètrera, etc.] Impétrer, obtenir. Impétrable, qui se peut impétrer. Impétration, obtention, action par laquelle on impètre. Ils se disent, surtout au Palais. "Impétrer une grâce du Prince, un bénéfice. "L' impétration d' un bénéfice, d' une grâce. "Bénéfice impétrable. "L' Arrêt a déclaré ses bénéfices impétrables. = * Autrefois on employait impétrer hors du Palais, et l' Acad. met encôre: impétrer quelque chôse de la miséricorde de Dieu. On ne dit guère aujourd' hui qu' obtenir. Au Palais, on dit aussi, impétrant, celui qui impètre. "Dès que le Courrier est arrivé (à Rome) et que la grâce est demandée, par la date retenue, elle est censée accordée, et le droit formé en faveur de l' impétrant. Coch.

IMPÉTUEUSEMENT


IMPÉTUEUSEMENT, adv. IMPÉTUEUX, EûSE, adj. IMPÉTUOSITÉ, s. f. [Impétu--eû, eû-ze, eû-zeman, ozité: 1re lon. 2e é fer. 4e lon. aux 3 prem. 5e e muet au 1er et au 3e.] Impétueux, véhément, violent, rapide. Impétueûsement, avec impétuosité, avec violence. "Vent, torrent impétueux. "Homme, esprit impétueux: humeur impetueûse. "Le vent soufloit impétueûsement. "Parler, agir impétueûsement, avec impétuosité. "L' impétuosité des vents, des flots. "L' impétuosité de son humeur. "L' impétuosité des Français dans les batâilles.

IMPIE


IMPIE, adj. et subst. IMPIÉTÉ, s. f. [Inpî-e, in-pié-té; 1re lon. 2e lon. au 1er, é fer. au 2d. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Impie, qui est contraire à la Religion; sentimens, discours impies; et en parlant des persones, qui a du mépris pour la Religion. "Homme, esprit impie. "C' est un impie. Les impies. = Impiété, mépris pour la Religion. "L' impiété du siècle. Discours plein d' impiété. = Au pluriel, discours ou actions impies. "Faire, dire des impiétés.

IMPITOYABLE


IMPITOYABLE, adj. IMPITOYABLEMENT, adv. [Inpi-toa-ia-ble, bleman: 4e dout. au 1er, 5e e muet.] Impitoyable, qui est insensible à la pitié: impitoyablement, sans aucune pitié, d' une manière impitoyable. "Un homme, une âme, un coeur impitoyable. "Censeur, critique impitoyable. "Ces critiques impitoyables, qui semblent ne lire les livres, que pour y trouver des défauts. L' Abé Trublet. "Traiter, censurer impitoyablement. _ Impitoyable suit ordinairement le nom qu' il afecte. En vers, et dans la prôse poétique ou oratoire, il peut précéder. "Impitoyables conquérans. L' impitoyable loi. Rouss. "L' impitoyable Roi. De Lille. "Impitoyable amour. Gresset. "L' impitoyable fer d' Ajax. Mde. Dacier. On voit, par le dernier exemple, qu' il se dit figurément des chôses. = Bossuet lui faire régir le datif (la prép. à.) Il fait semblant d' être impitoyable aux Sociniens. L' Acad. ne met pas d' exemple de ce régime: il est peu usité, mais je n' ôse le condamner.

IMPLACABLE


IMPLACABLE, adj. [Inplakable: 3e dout.] Qui ne se peut apaiser. "Homme, haine, colère implacable. = Dans le style simple et modéré, il se place après le subst. Dans le style élevé, il le précède avec élégance. "Les implacables fureurs. Rouss. "L' implacable vieillesse. L. Rac. = * Il ne se dit que des chôses qui ont raport à la persone. On ne dit point des flots implacables, une tempête implacable. "Ses injustes prétentions venoient de l' engager dans une guerre implacable. Hist. d' Angl. Le mot est impropre.

IMPLEXE


IMPLEXE, adj. [Inplèkce; 2eè moy. 3e e muet.] Il se dit d' un sujet de Poésie Dramatique, où il y a duplicité d' action.

IMPLICITE


IMPLICITE, adj. IMPLICITEMENT, adv. [Inplicite, teman: 4e e muet.] Implicite se dit de ce qui est contenu dans une proposition, non pas en termes exprès et formels, mais qui s' en tire par une conséquence naturelle. Implicitement, d' une manière implicite. "Cela est contenu dans le contrat d' une manière implicite. "Cette clause y est contenue implicitement. = "Le premier certificat renfermoit implicitement le second. Cochin. * Ces deux mots ont en anglais, un sens que nous ne leur donons pas en notre Langue. Les Traducteurs des livres anglais parlent souvent de la foi implicite, de l' obéissance implicite; d' obéir, de croire implicitement: nous disons, en ce sens, aveugle, aveuglement, sans raisoner, sans examiner. Foi implicite se dit en français, mais dans un aûtre sens. Il signifie, foi qui n' est pas distincte, par laquelle on croit en général, ce que l' Église enseigne. Elle est oposée à foi explicite.

IMPLIQUER


IMPLIQUER, v. act. [Inpliké: dern. é fer.] C' est, en parlant de crime, d' afaire fâcheûse, enveloper dans. "On l' a impliqué dans cette accusation. = En termes d' École, impliquer, (enfermer) contradiction. "Esprit et matière, folie et sagesse impliquent contradiction. "Vous dites qu' il est sage, et vous racontez de lui des folies: cela implique contradiction.

IMPLORER


IMPLORER, v. act. [Inploré: 1re lon. dern. é fer. Devant l' e muet l' ô est long: il implôre, implôrera.] Demander avec ardeur; "Implorer le secours du Ciel, la grâce du St. Esprit. "Implorer la protection, la clémence, etc. Il ne régit point les persones. On dit: implorer Dieu dans ses aflictions. On ne dit point implorer, mais invoquer les Saints; ni implorer le vainqueur, mais la clémence du vainqueur. * L' Auteur d' Inès (La Motte), dit: implorer un secret.
   Et je me flate encôre
   De mériter de vous ce secret que j' implôre.
Il est condamné dans le Dict. Néol. = Crébillon lui fait régir l' abl. (la prép. de) des persones.
   Et c' est des Immortels le seul bien que j' implôre.
Ce régime me parait fort bon en cet endroit, et je pense qu' on peut l' employer dans des ocasions pareilles. = * On a dit aûtrefois, imploration pour, l' action d' implorer. On ne le dit plus qu' au Palais. L' imploration du bras séculier.

IMPOLI


IMPOLI, ÎE, adj. IMPOLITESSE, s. f. [Inpoli, lî-e, litèce: 1re lon. 3e lon. au 2d. 4e è moy. au 3e.] Ils se disent de ce qui est contraire à la politesse. "Air, ton impoli, manières impolies. "La fierté, ou le manque d' éducation sont les sources ordinaires de l' impolitesse. = Impoli, Grossier, Rustique, (synon.) C' est un plus grand défaut d' être grossier, que d' être simplement impoli; et c' en est un encôre plus grand que d' être rustique. _ L' impoli manque de belles manières: il ne plait pas; le grossier en a de désagréables; il déplait; le rustique en a de choquantes: il rebute. _ L' impolitesse, est le défaut des gens d' une médiocre éducation; la grossièreté l' est de ceux, qui en ont une mauvaise; la rusticité de ceux, qui n' en ont point eu.
   REM. Richelet traite impoli et impolitesse de mots nouveaux, que l' Acad. n' avait pas encôre adoptés, et qui étaient pourtant confirmés par l' usage. = On disait aussi, au comencement du siècle, dans le Dict. de Trév. que, Impoli était un mot nouveau, hazardé par l' Ab. de Bellegarde, et que l' usage començait à confirmer; que l' Acad. ne l' avait pas encôre adopté, mais qu' aparemment elle l' adopterait. Il est si bien établi aujourd' hui, aussi-bien qu' impolitesse, qu' on les croirait l' un et l' aûtre très-anciens dans la Langue. = Les Dictionaires n' ont point encore admis impoliment, adverbe; parler impoliment, avec impolitesse: mais il est reçu dans la conversation, et il s' y montre aussi souvent que poliment, dont il est le contraire.

IMPOLICE


*IMPOLICE, IMPOLITIQUE, s. f. Deux mots nouveaux. Défaut de police, de politique. "On se plaint de l' impolice, qui règne dans le Parlement d' Angleterre. J. J. Rouss. "C' est une des plus étonantes singularités de la politique ou de l' impolitique moderne, que l' existence des Compagnies. (de comerce) Linguet. Il met ce mot en italique. M. Necker l' emploie souvent comme adjectif. "Des droits, des démarches impolitiques. J' ôse dire qu' il est à souhaiter que l' usage admette ces deux mots.

IMPORTANCE


IMPORTANCE, s. f. IMPORTANT, TANTE, adj. [Inportance, tan, tante: 3e lon. 4e e muet.] L' Importance d' une chôse est ce qui fait qu' elle est considérable et de conséquence, ou par elle-même, ou par ses suites. Important, qui importe, qui est de grande conséquence. "L' importance d' une afaire. "Discours, mot important. "Afaire importante, qui est d' une très-grande importance. = D' importance, adv. Extrêmement. "Je l' ai querellé d' importance. = On dit aussi faire l' homme important, ou l' homme d' importance, (st. critique) se faire trop valoir, faire l' homme de conséquence. Mais on ne dit pas l' importance de cet homme. "L' importance de l' ouvrage et celle de l' Auteur demande un examen sérieux et aprofondi. Ann. litt. Sur les Barmécides. On ne le dit, ni en louant, ni en se moquant. = On ne dit pas même, ce me semble, afaire d' importance sans y ajouter une épithète. _ Le Sage dit pourtant, ouvrage d' importance. * "Un changement d' importance. H. des St. "Fraper un coup d' importance. Ibid. _ "Un point de si haute importance. Ibid. * Destouches dit, être d' importance à
   Il vous est d' importance
   De savoir ce qu' il dit, ce que Géronte pense.
       L' Ingrat.
Et La Chaussée.
  J' ai de fortes raisons
  Pour ôser vous presser, et même avec instance,
  D' éclaircir ce mystère... il nous est d' importance.
       Le Préjugé à la mode.
* Mde de B... lui fait régir le datif (la prép. à.) "Un aûtre incident de la dernière importance à ses intérêts et à sa sûreté. Hist. d' Angl. On dit, pour ses intérêts, etc. Elle done ce même régime à important. "La protection de la France étoit très-importante aux Écossois. Hist. des Tud. _ L' Acad. met en exemple. "Il est important pour la République, pour le bien de vos afaires, etc. = Important, se place ordinairement à la suite du nom qu' il modifie: évènement important; afaire importante. En vers pourtant et dans la prôse poétique ou oratoire on peut le mettre devant, mais il faut éviter les inversions dûres. "Une importante destinée. Rouss. = Il est important, a les mêmes régimes qu' importer. Voy. ce verbe. = Dans le style critique, il est s. m. "C' est un important. "Les Importans du second Ordre. Sabat. "Il est juste que la Natûre comence par les importans de l' espèce. Coyer. Voy. plus haut faire l' important. Voy. aussi SUFFISANT.

IMPORTATION


IMPORTATION, s. f. IMPORTER, v. act. [Inporta-cion, té: 1re lon. dern. é fer. au 2d.] Ils se disent de l' action de faire arriver dans son pays les productions étrangères, comme exportation, exporter, signifient l' action de porter chez les étrangers les productions de son pays. Ces quatre mots ne datent pas de bien long-tems, mais ils sont fort employés dans les livres, qui traitent du comerce. Nous les devons aux Anglais. Les Néologues comencent à les employer au figuré. "Les Souverains du Nord, qui ont favorisé dans leurs États l' importation de notre doctrine philosophique, corruptrice des moeurs et du goût, ont choisi le plus court moyen pour y empoisoner et tarir la source des bonnes lettres et des beaux arts. Ann. Lit.
   IMPORTER, v. n. Il ne s' emploie qu' à l' infinitif et aux troisièmes persones du singulier. Être de conséquence. "Cela ne lui peut importer de rien, ne lui importe en rien. = Il est le plus souvent employé comme impersonel, avec le datif des noms et l' infinitif des verbes avec de, ou le subjonctif avec que. "Il lui importe de partir promptement: il importe à vos associés que vous partiez sur l' heûre. Sur quoi vous pouvez remarquer que quand le verbe régi se raporte au câs, il faut se servir de l' infinitif, et que quand il ne s' y raporte pas, du que avec le subjonctif. Car si l' on disait, il importe à vos associés de partir sur l' heure, on dirait tout autre chôse que ce que l' on veut dire, et l' on énoncerait la nécessité du départ de vos associés, et non celle de votre départ. = Dans la phrâse négative ou interrogative, on retranche quelquefois le pron. il, et quelque fois la particule négative pas. "Il faut que le bien soit conu, il n' importe par quelle voie. Marm. On pourrait dire aussi, n' importe sans il. "N' importe que tout soufre, pourvu que vous vous contentiez. "Qu' importe, ou que vous importe que les aûtres manquent de tout, pourvu que vous ne manquiez de rien? _ C' est surtout dans l' interrogation qu' il faut retrancher le pronom il. * "Qu' importe-t' il de mourir vingt ans plutôt, pourvu que le cours de la vie ait été bien employé? Du Plaisir. Il falait qu' importe que nous mourions, ou, que nous importe de mourir, etc.
   REM. Montesquieu et Racine lui font régir la prép. de devant les noms. "Si en général le caractère est bon, qu' importe de quelques défauts, qui s' y trouvent? Esprit des Lois.
   Et que m' importe hélas! de ces vains ornemens?
       Bérenice.
L' Ab. d' Olivet a critiqué ce vers: l' Ab. Des Fontaines et Racine. Le Fils le justifient: à la bone heure, pourvu qu' on conviène que le régime est irrégulier: c' est tout ce qu' on prétend. _ Campistron a dit aussi.
   S' il faut vous perdre hélas!que m' importe du reste?
Et Vertot: "Il leur importoit peu du succês du Siége, pourvu que leurs Généraux n' en eussent pas la gloire. Il falait dire; le succês du Siège leur importait fort peu, etc. = Nous remarquerons à ce propôs, qu' ils ont tort ceux qui croient qu' importer n' est que verbe impersonel: il est quelquefois verbe neutre, ayant un sujet (un nominatif) autre que le pronom il; toujours pourtant de la 3e persone. "Qu' importe la vérité de l' imitation, pourvû que l' illusion y soit? J. J. Rouss. Cela étant, avec le nom au pluriel, on ne doit pas dire qu' importe, mais qu' importent. "Qu' importe, dit l' Ab. des Fontaines, les plaintes et les murmures des Auteurs, si le Public s' en moque? Il devait dire, qu' importent? = N' importe quel, ou lequel est du style familier. "À~ l' éfet de rapeler les Oficiers, Soldats et Matelots, employés dans n' importe quel service étranger. Journ. Polit. de Gen. "J' ai lû dans un Auteur, n' importe lequel, etc.

IMPORTUN


IMPORTUN, UNE, adj. IMPORTUNÉMENT, adv. IMPORTUNER, v. act. IMPORTUNITÉ, s. f. [Inporteun, tune, néman, né, nité.] Importun, fâcheux, ennuyeux à force d' assiduité ou de questions trop souvent répétées, etc. Importunément, d' une manière importune. Importuner, incomoder, fatiguer par ses assiduités ou par ses discours. Importunité, action d' importuner. "Être, se rendre, devenir importun.
   Je crains d' être importun, même avec mes amis.
       Barthe.
"Presser importunément. "Je crains de vous importuner. "Il l' a obtenu par importunité, à force d' importunité. "Ils (les Incrédules) éloignent d' eux, le plus qu' ils peuvent, un Dieu, dont la seule idée les importune; et ils ne le dispensent si volontiers de ses soins, que pour qu' il daigne à son tour les dispenser de leur obéïssance. Le Comte de Valmont.
   REM. 1°. Importunément et importunité ne se disent que des persones. Importun et importuner, se disent aussi des chôses dans le sens d' incomode, incomoder, "Vent, chaud, froid importun. Pluie importune. "Cela devient importun à la longue.
   L' observance de tes décrets
   Ne me fut jamais importune.
       Le Franc.
"Bruit qui importune. "Tout l' importune.
2°. En parlant des persones, importun est aussi subst. masc. "C' est un importun: ce sont des importuns. On ne dit point une importune, des importunes. = Apliqué aux persones, il aime à suivre le substantif: "Un demandeur, un Poète, un Auteur importun. Quand il modifie les chôses, il peut marcher devant ou après; c' est au goût et à l' oreille à lui assigner sa place. "Importun souvenir, souvenir importun. "Importune largesse. Rouss. "L' importune cohorte. P. Follard. "L' importune envie. De Lille. "Une importune rêverie. Gresset.
   3°. Importunément, a l' accent aigu sur l' e, quoique formé du féminin importune, terminé en e muet: ainsi l' a voulu l' usage.
   4°. Importuner, régit quelquefois l' ablatif. "L' Histoire en est si conûe qu' il est superflu de vous en importuner. "Je suis honteux de vous importuner de cela.
   5°. Importunité, s' emploie souvent au pluriel. "Essuyer des importunités. "Il est bien dificile de résister long tems aux importunités de ce qu' on aime. "Il se laissa vaincre par ses importunités, et ce fut la source de tous les malheurs de sa vie.

IMPOSANT


IMPOSANT, ANTE, adj. IMPOSER, v. act. IMPOSITION, s. f. [Inpozan, zante, zé, zi-cion: 3e lon. aux deux premiers, é fer. au second: l' o est bref devant la syll. masc. il est long devant l' e muet: il impôse, impôsera, etc.] Imposer, 1°. C' est proprement, mettre dessus; mais en ce sens, il ne se dit qu' en cette phrâse, imposer les mains, en parlant des Sacremens. = 2°. Charger. Il régit le datif de la persone, l' acusatif de la chôse. "Il ne faut pas imposer aux aûtres un fardeau qu' on ne peut porter soi-même. "C' est au vainqueur à imposer la loi, les conditions aux vaincus. On dit dans le même sens, imposer une pénitence, des peines, et sans article, imposer silence à... S' imposer, (à soi-même) le se est au datif.
   Oui, j' ai su m' imposer un devoir rigoureux.
       Barthe.
= En parlant d' impôt, on dit imposer sur. "Imposer des droits sur tout ce qui entre dans un royaume, et sur tout ce qui en sort. = 3°. Imputer à tort. "On lui a imposé un crime, dont il était inocent. = 4°. En parlant de respect, inspirer. "La présence du Général imposa du respect aux mutins. On dit aussi absolument. "C' est un homme dont la présence impôse. "Un homme, qui fait rire les aûtres, impose peu. L' Ab. Trublet. = 5°. Avec la prép. en, sans régime: mentir. "Ne le croyez pas, il en impôse. Avec le datif (la prép. à) tromper. "Vous en imposez à vos Juges: vous nous en imposez. = * Dans ce sens, le pronom en est nécessaire. Quelques Auteurs, et des plus habiles, l' ont retranché mal-à-propôs. Bossuet et Massillon leur en ont doné l' exemple. "Il nous acuse de lui imposer. BOSS. "On craindra de vous imposer, quand l' impostûre n' aura plus à atendre que votre colère. Massill. On doit dire, de lui en imposer, de vous en imposer. _ Je ne veux pas dissimuler que le P. Bouhours se contente de dire qu' imposer se joint quelquefois avec la particule en: il supôse donc qu' il peut s' en passer, et il cite en éfet une phrâse où il s' en passe. "Ne le croyez pas, il impôse. Mais je crois toujours qu' il est plus sûr et plus régulier de l' y joindre. Ma remarque est fortifiée de l' autorité de l' Acad. qui avertit que, pour dire tromper, abuser; il faut toujours dire, en imposer et non pas imposer.
   IMPOSANT, ne se dit que dans le 4e sens d' imposer; qui impôse, qui imprime du respect. "Ton imposant, gravité imposante. "Cet apareil de splendeur imposante, qui environe la fortune. Le P. Du Rivet. = Imposition, ne se dit que de l' action d' imposer, de mettre des impôts et de l' imposition des mains. Voy. n°. 1°. et 2°. * Bossuet s' en sert dans le sens d' imposer, mentir, tromper, imputer à tort. "Il rendra compte un jour d' une imposition aussi faûsse et aussi maligne. On dit imputation, on ne dit pas imposition en ce sens.

IMPOSSIBILITÉ


IMPOSSIBILITÉ, s. f. IMPOSSIBLE, adj. [Inpocibilité, cible: 1re lon. le reste bref.] Impossible, se dit de ce qui ne peut être, ne se peut faire. Impossibilité est le caractère de ce qui est impossible. "Cela est impossible; de toute impossibilité. "Il y a de l' impossibilité à cela. "Il n' y a rien d' impossible à Dieu. "Cela est moralement impossible. On apèle impossibilité métaphysique, ce qui implique contradiction; impossibilité physique, ce qui est impossible selon l' ordre de la natûre; et impossibilité morale, ce qui est vraisemblablement impossible, quoique possible absolument parlant.
   Rem. 1°. Impossible, par lui-même, n' a point de régime: il ne régit l' infinitif ou le subjonctif que par le moyen du v. être auquel il s' associe souvent. "Il lui est impossible d' arriver, ou il est impossible qu' il arrive aujourd' hui. Le 1er régime se met quand impossible régit un nom au datif, comme dans le 1er exemple; le 2d, quand impossible n' a point de régime des noms. Mde. de B... dit: leur rendit impossible de persévérer, etc. et rendoit impossible aux Princes d' entretenir, etc. Cet adjectif n' a point ce régime avec tout autre verbe que les v. être et devenir; il falait dire: leur rendit impossible la persévérance; mettait les Princes dans l' impossibilité d' entretenir, etc. car impossibilité a aussi ce régime de l' infinitif. "Je suis dans l' impossibilité de vous satisfaire. "Cela lui est devenu impossible; et impersonellement: "Il lui est devenu impossible de le faire.
   2°. Quoiqu' impossible ait un sens négatif, il ne doit pourtant pas être employé comme possible, joint à une négative. Ainsi, quoiqu' on dise, la chôse ne me sera possible qu' avec votre secours; on ne peut pas dire, elle me sera impossible qu' avec votre secours. On doit se servir alors de la prép. sans, et dire. "Sans votre secours, elle me deviendra impossible. * Rollin dit: (Hist. Anc.) Philippe sentoit qu' il lui seroit impossible de mettre fin à cette guerre qu' en soulevant les Thébains, etc. Il devait dire, ou qu' il ne lui serait possible qu' en soulevant; ou, qu' il lui serait impossible s' il ne soulevait, etc.
   3°. Impossible est quelquefois employé substantivement, quoique abusivement: Scuderi avait repris Corneille d' avoir dit, faire l' impossible: mais l' Acad. condamna cette critique. "L' usage a prévalu, dit-elle, de dire, faire l' impossible, pour dire, faire tout ce qu' il est possible. _ On dit plus naturellement. "Je ne puis faire l' impossible; et proverbialement, à l' impossible nul n' est tenu. On dit encôre, réduire un homme à l' impossible, exiger de lui ce qu' il ne peut faire. C' est aussi, dans les disputes, le réduire à ne pouvoir répondre sans tomber en contradiction. _ Dans le jargon moderne, perdre l' impossible au jeu, c' est perdre immensement. "Verglan perdoit l' impossible. Le tremblement de sa main, et la pâleur de son visage exprimoient le trouble qu' il vouloit cacher. Marm. _ "Qui doute que vous ne le puissiez, dit Voitûre; et qui ne sait que pour votre esprit il n' y a point d' impossible. Il aurait pu dire: il n' y a rien d' impossible, mais il n' y a point d' impossible me parait préférable en cet endroit.

IMPOSTE


IMPOSTE, s. fém. Terme d' Architectûre. La dernière partie d' un pied droit, sur laquelle comence un arc, et qui fait saillie sur les aûtres pierres, pour cacher la naissance de l' arc.

IMPOSTEUR


IMPOSTEUR, s. masc. Trompeur. Qui acuse à faux. "Mahomet fut un grand imposteur. "C' est un imposteur, un calomniateur. = En parlant des chôses, on l' emploie adjectivement dans le 1er sens. "Un voile imposteur. Rouss. "Des Journaux imposteurs. Cerutti. = * Qui croirait qu' un Auteur moderne ait pu doner pour féminin a cet adjectif le mot impostûre. "Cette gloire impostûre. Él. de Gustave III, Roi de Suède. Voilà un singulier barbarisme.

IMPOSTûRE


IMPOSTûRE, s. fém. [Inpos-tûre: 3e lon. 4e e muet.] Calomnie; chôse faûssement imputée à quelqu' un. "Horrible impostûre. "C' est une impostûre aisée à détruire. = Illusion. "L' impostûre des sens = Hypocrisie. "Toute sa vie n' est qu' impostûre. = * Impostûres ne se dit au pluriel que dans le premier sens. On dit toujours sans impostûre au singulier. La contrainte de la rime a fait dire à Gresset:
   Mais si ce qu' aujourd' hui j' écris sans impostûres,
   Vainquant la nuit des tems, passe aux races futûres.

IMPôT


IMPôT, s. m. [Inpô; Deux longues.] Droit imposé sur certaines chôses. "Cet impôt est onéreux. Établir de nouveaux impôts. Acabler d' impôts.

IMPOTENT


IMPOTENT, ENTE, adj. [Inpotan, tante: 3e lon.] Privé du mouvement d' un brâs, d' une jambe. Qui ne peut presque ni marcher, ni agir. "Il est devenu impotent. "Elle est impotente.

IMPOURVU


*IMPOURVU (à l' ) On a dabord écrit à l' impourveu, puis à l' impourvû, avec l' accent circ. pour marquer la supression de l' e; ensuite à l' impourvu, sans accent. Suivant VAUGELAS, à l' impourvu et à l' improviste sont tous les deux bons, mais le 2d est plus élégant que le 1er. L' Acad. n' avait dabord mis que celui-ci: Dans les éditions suivantes, elle inséra aussi à l' impourvu. Elle l' a retranché dans la dernière. Voy. IMPROVISTE.

IMPRATICABLE


IMPRATICABLE, adj. [Inpratikable: pénult. dout.] Il a divers sens. Projet, chôse impraticable; qui ne peut se faire, s' exécuter. "Delà, ces fades railleries, dont on cherche à égayer ses remords, et dont le vrai principe est le dépit secret de voir faire à d' autres ce qu' on croit ou ce qu' on voudroit croire impraticable. SEGAUD. _ Chemin impraticable, où l' on ne saurait passer. "Maison impraticable, qu' on ne peut habiter sans de grandes incomodités. _ Homme impraticable, avec qui on ne saurait vivre. "Il est d' un esprit, d' une humeur impraticable, dont on ne peut s' acomoder. _ * Voltaire le dit de certains sujets de Tragédie. "Ce sont les sujets les plus ingrats et les plus impraticables. On le dit aussi dans l' An. Litt. "Ce sujet (Cléopâtre) est presque impraticable sur notre scène. Ni l' analogie, ni l' usage n' admettent ce mot en ce sens. Jusqu' à ce qu' on dise pratiquer un sujet de tragédie ou de comédie, il semble que sujet impraticable n' est pas un terme propre. On dirait mieux intraitable, si l' usage admettait cet adjectif apliqué aux chôses. Voy. INTRAITABLE.

IMPRÉCATION


IMPRÉCATION, s. fém. [Inpréka-cion, en vers, ci-on: 1re lon. 2e é fer.] Malédiction acompagnée de souhait funeste. "Faire des imprécations contre quelqu' un: le charger d' horribles imprécations. Les imprécations retombent sur ceux qui les font. = Imprécation, malédiction, exécration (synon.) Le premier est proprement une prière; le second un souhait, ou un arrêt prononcé; le troisième une sorte d' anathême. L' imprécation est oposée à la déprécation, qui tend à détourner le mal; la malédiction à la bénédiction, qui souhaite ou promet le bien; l' exécration à la consécration, qui met sous la protection de la Divinité. L' Imprécation invoque la puissance contre un objet; la malédiction prononce son malheur; l' exécration le dévoûe à la vengeance céleste, etc. Roub. Synon.

IMPRENABLE


IMPRENABLE, adj. [2e e muet, 3e dout.] Qui ne peut être pris, en parlant des Villes et places de guerre. "Cette place passoit pour imprenable. "Il n' y a point de Ville imprenable.

IMPRESCRIPTIBILITÉ


IMPRESCRIPTIBILITÉ, s. fém. IMPRESCRIPTIBLE, adj. [Inprèskriptibilité, tible: 2eè moyen, dern. é fer. au 1er, e muet au 2d.] Imprescriptibilité est la qualité de ce qui est imprescriptible, qui n' est pas sujet à prescription. "Droit imprescriptible. "L' imprescriptibilité de son droit.

IMPRESSION


IMPRESSION, s. fém. [Inprè-cion, en vers, ci-on: 1re lon. 2e è moyen.] 1°. l' efet que l' action d' un corps fait sur un autre. "Les impressions de l' air, du froid, du chaud sur le corps humain. "Il y a encôre une impression de chaleur. = Figurément, en parlant de l' esprit, du coeur, de l' âme: ni les menaces, ni les promesses, ni les reproches n' ont fait aucune impression sur lui. "Ce discours n' a fait aucune impression dans l' âme des Auditeurs. "On ne sauroit trop ménager dans les enfans les premières impressions. Le Comte de Valmont. "La prospérité fait sur le coeur de l' homme des impressions dangereuses. Chemin. = 2°. Empreinte. "L' impression d' un sceau, d' un cachet sur la cire. = 3°. Éfet de l' Imprimerie. "Belle ou vilaine impression. "Ce livre est de l' impression de Paris, etc. = Édition. "On a saisi toute l' impression, tous les exemplaires. "Les anciènes impressions sont fort recherchées. = 4°. En termes de Peintûre, la couleur telle qu' on la met dabord sur la toile pour la préparer à recevoir les vraies couleurs du tableau. = On apèle en ce sens, peintûre d' impression, l' ouvrage de ceux qui peignent des bâtimens, pour la distinguer de la peintûre en tableau.
   Rem. 1°. Au figuré, impression régit de: "Ce terrible combat laissa dans tous les coeurs une impression profonde et durable d' étonement et d' horreur.
   2°. Les Traducteurs de livres anglais donent à faire impression un sens qui est un pur anglicisme. "Cette expédition devint infructueûse, dit Mde de B... (H. d' Ang.) et ne fit pas une impression profonde sur l' énemi; c. à. d. qu' elle ne lui fit pas grand mal. L' Ab. Prévot (H. des Stuarts) a aussi traduit trop litéralement, quand il a dit. "Il déclara à ce Ministre qu' il falait de plus fortes impressions pour amener la France à des termes raisonables.
   Un noble de nouvelle impression c' est, en style proverbial, le novus homo de Ciceron, un anobli.

IMPRÉVOYANCE


*IMPRÉVOYANCE, subst. fém. IMPRÉVOYANT, ANTE, adj. Ce sont deux mots de M. Necker: Ils expriment un défaut de prévoyance. "L' imprévoyance des Contribuables. "Une classe d' hommes insensible ou imprévoyante. _ Ces mots seraient utiles. On peut souhaiter que l' usage les adopte.

IMPRÉVU


IMPRÉVU, VûE, adj. [2e é fermé, 3e lon. au 2d.] Qu' on n' a pas prévu, qui arrive lorsqu' on y pense le moins. "Accident imprévu; mort imprévûe. = Il n' est bien placé qu' après le nom qu' il modifie. Il s' emploie ordinairement sans régime. Bossuet lui fait régir le datif. "Ce ne sont point des conséquences imprévûes à l' Auteur. Ce régime est tout au moins douteux. = * Le P. Barre (Hist. d' Allem.) dit à l' imprévu pour à l' improviste: C' est un vrai barbarisme. "Ils les ont ataquées à l' imprévu. V. IMPOURVU et IMPROVISTE.

IMPRIMER


IMPRIMER, v. act. IMPRIMERIE, s. f. IMPRIMEUR, s. m. [Inprimé, merî-e, meur: 1re lon. 3e é fer. au 1er, e muet au 2d, dont la 4e est longue.] Imprimer, c' est, 1°. Faire une empreinte sur... Imprimer un sceau sur de la cire. = Figurément, "Il faut imprimer de bonne heure la crainte de Dieu, et des sentimens de vertu et d' honeur dans l' esprit des jeunes gens. "Les sciences qu' on aprend dans la jeunesse, s' impriment mieux dans l' esprit, dans la mémoire. "Ce spectacle lui imprima une grande terreur dans l' âme. "Nous naissons foibles et mortels; et nous imprimons sur tout ce qui nous environe, le caractère de notre foiblesse, et l' image de notre mort. D' Aguesseau. "Imprimons-nous fortement cette vérité dans l' esprit, que Dieu ne nous envoie des disgrâces que pour nous corriger. Chemin. = 2°. Empreindre des lettres sur du papier, du parchemin, etc. avec des caractères de fonte. Faire imprimer un livre. Imprimer un ouvrage. _ V. n. "Il imprime bien, correctement, avec goût. "Cet homme n' a pas encore imprimé; il n' a encore rien doné au public. _ On dit aussi imprimer des estampes; imprimer en bois, en tâille douce.
   REM. Molière done à être imprimé le sens d' être persuadé.
   Et pourtant Trufaldin
   Est si bien imprimé de ce Conte badin.
Je ne sais si cette expression était en usage du tems de Molière: aujourd' hui du moins on ne l' entendrait pas.
   IMPRIMER se dit au figuré, même pour les chôses physiques. "Nous ne trouvions aucun champ où la main du Laboureur diligent ne fût imprimée. Télém.
   Et mille foudres allumés
   Brûleront jusqu' à la poussière
   Où ses pas furent imprimés.      Le Franc.
IMPRIMERIE et IMPRIMEUR ne se disent que des livres et des estampes, dans le sens d' imprimer, n°. 3°. L' art d' imprimer. Celui qui exerce cet art. "L' Imprimerie est un bel art. "C' est un bon, un habile Imprimeur. "Maître Imprimeur, Compagnon Imprimeur. Imprimeur~-Libraire.

IMPROBABLE


IMPROBABLE, adj. *IMPROBATEUR, s. m. IMPROBATION, s. f. [Inprobable, ba-teur, ba-cion, en vers, cion: pénult. dout. au 1er.] Improbable. Qui n' a point de probabilité. "Quand on a perdu un tems précieux à former de pareilles hypothèses (celles de Diderot) qu' en résulte-t-il, autre chôse que des conséquences aussi improbables, aussi absurdes que les principes. Les Helv. "Ce que vous dites est improbable. Ce mot a resté long-tems enséveli au Palais et dans les Écoles: depuis quelque tems, il a passé dans le discours ordinaire; mais il n' est pas encôre fort ustié. On dit plus souvent: cela n' est pas probable. L' Ac. le met sans remarque.
   Improbation, action de désaprouver. Improbateur, celui qui désaprouve.
   Improbation avait été employé par Nicole et par Mde de Sévigné. "C' est une perfection un peu au-dessus de l' humanité, que l' indiférence qu' il (Nicole) veut de nous pour l' estime ou l' improbation du monde. Danet l' avait mis dans son Dictionaire. Richelet remarque qu' il n' était pas encôre reçu. L' Académie n' en fesait pas mention: elle l' a admis dans la dernière édition. Il est employé par un grand nombre de bons Auteurs; et l' on peut s' en servir sans scrupule. = Improbation a produit improbateur, qui atend encôre le sceau de l' usage. "Comment un pareil discours n' a-t-il pas excité ce murmure improbateur qui rapèle un harangueur public au ton de la décence et de l' honêteté. L' Ab. Grosier.

IM-PROMPTU


IM-PROMPTU, C' est ainsi qu' écrit L' Académie, contre l' étymologie; ce mot est tout latin, composé de la prép. in. L' Acad. a voulu peut-être suivre l' analogie, qui ne permet point que la particule in se montre devant le b et le p, et qui la change en im devant ces deux consones. Mais In promptu n' étant pas proprement un mot composé, mais un assemblage de deux mots séparés par une division, il semble qu' il est plus naturel de l' écrire avec in. V. IN-PROMPTU.

IMPROCÉDURE


*IMPROCÉDURE, Voy. INPROCÉDûRE.

IMPROPRE


IMPROPRE, adj. IMPROPREMENT, adv. IMPROPRIÉTÉ, s. f. [Inpropre, preman, prié-té; 3e e muet aux deux premiers, é fer. au 3e.] Ils ne se disent qu' en parlant du langage, pour exprimer ce qui n' est pas juste dans l' expression. "Mot, expression impropre. "L' impropriété d' une expression, d' un mot. "Parler improprement.
   Propre se dit des persones et des chôses: impropre ne se dit que des mots. Quand il n' est pas question du langage, on doit dire, qui n' est pas propre. * "Un homme impropre à la guerre. Montesq. "Il s' étoit rendu impropre à gouverner. L' Ab. Prévot, Hist. des Stuarts. "Buckingham, Ministre très-impropre à des conjonctûres si critiques. Id. Ibid. _ On peut dire que ce mot est très-impropre dans ces phrâses.

IMPROVISTE


IMPROVISTE, (à l' ) adv. Subitement, lorsqu' on y pense le moins. "Il est arrivé à l' improviste. V. IMPRÉVU et IMPOURVU. Ce mot est pris de l' Italien _ Récemment on l' a fait adjectif. On a dit l' éloquence improviste, par oposition à l' éloquence préparée; deux expressions nouvelles, dont la première est tirée des mots nouveaux, aussi empruntés de l' Italien; improviser, faire des in-promptus; improvisateur, improvisatrice, celui, celle qui fait des in-promptus.

IMPROUVER


IMPROUVER, v. act. Désaprouver. "Tout le monde improuve sa conduite. _ Ce mot n' est pas ancien dans la langue, et n' est pas encôre d' un usage universel. Plusieurs, par habitude, préfèrent désaprouver. "Il n' improuvoit pas la pratique des autres. Le P. Fontenai. Les Pères n' ont pas improuvé d' aprendre et de prononcer les Sermons d' autrui. Le P. Gaichiés. _ Ce régime est vicieux. Il faut: qu' on aprène et qu' on prononce, etc.

IMPRUDEMMENT


IMPRUDEMMENT, adv. IMPRUDENCE, s. fém. IMPRUDENT, ENTE, adj. [Inpru--daman, dance, dan, dante: 1re lon. 3e br. au 1er, lon. aux autres.] Ils expriment un défaut de prudence. "Agir imprudemment, avec imprudence, en homme imprudent. "Il a fait une grande imprudence. Faire des imprudences. Tenir un discours imprudent, une conduite imprudente.
   REM. Imprudence n' est employé au pluriel que quand il signifie, non le vice, mais ses éfets, les actes qu' il produit. On dit bien, comettre des imprudences; vos imprudences vous ont perdu; mais on ne doit pas dire, même en parlant de plusieurs ou à plusieurs: j' admire leurs imprudences, vos imprudences: il faut dire, leur imprudence, votre imprudence.

IMPUBèRE


IMPUBèRE. adj. et subst. Celui ou celle qui n' a pas ateint l' âge de puberté.

IMPUDEMMENT


IMPUDEMMENT, adv. IMPUDENCE, s. fém. IMPUDENT, ENTE, adj. [Inpuda--man, dance, dan, dante; 1re lon. 3e br. au 1er, lon. aux aûtres.] Éfrontément. Éfronterie. Éfronté. Ils marquent un manque de pudeur. "Parler, répondre impudemment. "Il a eu l' impudence de le nier. "Homme impudent, fille impudente. "Discours impudent, action impudente. = S. m. C' est un grand impudent. = Dans le style simple, impudent aime à suivre le nom qu' il afecte: dans le style élevé, il se plait davantage à le précéder. "Ces propos impudens; ces impudens blasphêmes. "Une jeunesse impudente; une impudente jeunesse. "Observez à Paris, dans une Assemblée, l' air sufisant et vain, le ton ferme et tranchant d' une impudente jeunesse, tandis que les anciens, craintifs et modestes, ou n' ôsent ouvrir la bouche, ou sont à peine écoutés. J. J. Rouss. Let. sur les Spectacles.

IMPUDICITÉ


IMPUDICITÉ, s. f. IMPUDIQUE, adj. IMPUDIQUEMENT, adv. [Inpudicité, dike, dikeman: 1re lon. 4e e muet. au 2d et 3e] Ils expriment le vice contraire à la chasteté. "L' impudicité perd le corps et l' âme. "Homme, femme impudique. "Regards, discours, chansons impudiques. = S. fém. "C' est une impudique. "Vivre impudiquement.

IMPUGNER


IMPUGNER, v. act. Disputer, ataquer, combatre une proposition. Il est vieux, même au Palais et dans les Écoles.

IMPUISSANCE


IMPUISSANCE, s. fém. IMPUISSANT, ANTE, adj. [In-pui-sance, san, sante, 3e lon. 4e e muet.] Impuissance, manque de pouvoir, Impuissant, qui a peu de pouvoir, ou qui n' en a point. Le substantif se dit ordinairement avec de et l' infinitif. "Être dans l' impuissance de payer ses dettes. "Je suis dans l' impuissance de vous servir. _ "Des énemis foibles et impuissans. "éforts impuissans: haine, colère impuissante. "Ô Hommes! mesurerez-vous toujours les opérations et les vûes de l' Être infini sur votre impuissance et sur la foiblesse de vos lumières? Le Comte de Valmont. "Vous en faites, ou un Être insensible, ou un Être impuissant comme vous; et vous prétendez encôre honorer sa grandeur. Ibid.
   REM. 1°. Racine a dit: impuissant à trahir; et quoiqu' en dise son fils, ce n' est pas une expression qui soit devenue très-française. Brébeuf a dit aussi, impuissante à porter ces éforts: et on troûve dans le Mercûre: Impuissante à sauver ceux, etc. Il ne parait pas que l' usage ait encôre adopté ce régime.
   2°. Impuissance et impuissant sont des termes négatifs. Il est donc inutile, et contre le sens et la Gramaire d' ajouter une autre négation aux verbes qu' ils régissent. "Plut à Dieu, dit Mascaron, que je sois autant dans la nécessité de ne rien diminuer, que je suis dans l' impuissance de ne rien ajouter. Retranchez ne, et dites: dans l' impuissance de rien ajouter.

IMPULSIF


IMPULSIF, IVE, adj. IMPULSION, s. f. [Inpulcif, cîve, cion; en vers ci-on: 3e lon. au 2d.] Impulsion au physique, c' est le moûvement qu' un corps done à l' aûtre, par le choc. Suivant Descartes, tous les mouvemens se font par impulsion. Au moral, Instigation, action de pousser quelqu' un à faire quelque chôse. "Il l' a fait par l' impulsion d' un tel. = Impulsif ne se dit qu' au physique; qui agit par impulsion. "Force impulsive.

IMPUNÉMENT


IMPUNÉMENT, adv. IMPUNI, NîE, adj. IMPUNITÉ, s. f. [Inpunéman, ni, nî-e, nité, 3e é fer. au 1er, lon. au 3e.] Impunité, manque de punition. Impuni, qui demeure sans punition. Impunément, avec impunité, sans encourir de punition. "Dieu ne laisse point les crimes impunis. "Au fait, quelle est leur Philosophie? le règne de leurs passions, et le desir impuissant de les croire impunies. L' Abé Gauchat. "Le pécheur est un coupable, qui voudroit que le crime fût impuni. Chemin. "L' impunité des crimes augmente les désordres. "Comettre impunément toute sorte de crimes. = Impunément a un aûtre sens que n' ont pas impuni et impunité. "Ne pouvoir faire une chôse impunément; c. à. d. sans qu' il en arrive quelque inconvénient. _ * Mentir impunément, pour impudemment, est un gasconisme. = Impuni ne se dit pas des persones. "Ils craignirent que ce Prince ne le laissât impuni. P. Barre (Hist. d' Allem.) Dites, ne laissât son crime impuni, son audace impunie. = Cet adjectif doit toujours suivre le substantif.

IMPUR


IMPUR, ÛRE, adj. IMPûRETÉ, s. f. [In--pur, pûre, pûreté: 2e lon. au 2d et au 3e; la 3e est un e muet.] Impur, au physique, qui n' est pas pur, qui est mélangé de quelque chôse de mauvais. "Ce qu' il y a d' impur dans les métaux. _ Dans le moral, impudique, lubrique. "Vie impûre, amours impurs, moeurs impûres. = Impûreté se dit dans les deux sens. "L' impûreté des humeurs. "Vivre dans l' impûreté. "Livre rempli d' impûretés. = * Autrefois on a dit, style impur. "La diction doit être congrûe, et n' avoir rien d' impur. P. Rapin. Ce mot impur, est là fort impropre. On dit, style pur et correct: on ne dit pas style impur et incongru. L' Acad. dit aussi, dans ses Sentimens sur le Cid, qu' il y a dans cette Tragédie... beaucoup de façons de parler impûres: elle ne le dirait pas aujourd' hui. = * Quoiqu' on dise, l' impureté des humeurs, on ne dirait pas, des humeurs impûres, ni de la pâille impûre, comme on le dit dans la Traduct. de Shakespéare: c' est sans doute un anglicisme. _ Impur ne se dit au Physique, que des métaux et des matières soumises à l' analyse. = Chez les Juifs, impureté légale, était celle qu' on contractait en fesant certaines chôses, défendues par la Loi.

IMPUTATION


IMPUTATION, s. f. IMPUTER, v. act. [Inputa-cion, té: 1re lon, dern. é fer. au 2d.] Imputer, est, 1°. dans le langage ordinaire, atribuer à quelqu' un quelque chôse de digne de blâme. "Ne m' imputez pas cette faûte. "L' Empereur craignoit que le Pape ne lui imputât le mauvais traitement que son Légat avoit reçu à cette Diette. P. Fabre. Il régit aussi de et l' infinitif. On lui impute d' avoir voulu corrompre des témoins. On dit, sans article: imputer à faûte, à déshoneur.
   Imputation, acusation faite sans preûve. "Faûsse imputation. "Il a montré la faûsseté de tant de noires imputations. = 2°. En termes de Finance, apliquer un payement à certaine dette. "Imputer une somme payée sur le principal, et non pas sur les intérêts. = Imputation, action d' imputer, dans les deux sens. "Justifiez-vous de ces horribles imputations qu' on vous a faites. "Imputation d' un payement sur le principal.

IN


IN, devant les consones, est un son simple, une voyèle du genre des nazales; qui a le son d' ein, soit au comencement, au milieu, ou à la fin des mots. Incomode, extinction, destin: prononcez, ein-komode, exs-teink-cion, des--tein. Le P. Bufier prétend qu' il n' y a que des Bourgeois de Paris et quelques beaux esprits de Province, qui prononcent de la sorte: mais Mrs. Rollin et Duclos sont d' un autre sentiment, et leur autorité est plus grande. = Devant les voyèles, i est voyèle aussi, et l' n se joint à la voyèle suivante. Inabordable, inexcusable, inique, inopiné, inutile: pron. i-nabordable, i-nutile, etc. Dans plusieurs Provinces, on prononce, ein-nutile, ein-na--bordable, et M. Duclôs avait remarqué cette prononciation dans quelques Acteurs du Théâtre de Paris, qui l' avaient aportée de leurs Provinces.
   IN entre dans la composition de plusieurs mots, et signifie ordinairement, privation, oposition, négation. Inabordable, inconsolable, qui ne peut être abordé, consolé. = Quelquefois le composé est usité, et le simple ne l' est pas. On dit, inconsolable, mais consolable ne se dit point.
   Rem. L' n d' in se change en m devant les mots qui comencent par m, b ou p; et en l et r devant ceux qui comencent par ces deux consones: immodeste, imbiber, imbu, impatient, illégitime, irrégulier, etc. Elle se change en g devant noble, ignoble, etc.
   IN final est douteux, vin, destin; mais suivi d' une consone, il est long, soit au milieu du mot, soit à la fin: pinte, il vint.

INABORDABLE


INABORDABLE, INACCESSIBLE, adj. [I-nabordable, i-nakcècible: pénult. dout. au 1er, 3e è moy. au 2d.] Dont l' abord, dont l' accês est impossible, ou (dans un sens plus modéré) extrêmement difficile, pénible. Ils se disent des lieux et des persones. "Plage inabordable: rocher inaccessible. "Cet homme est inabordable; il est devenu inaccessible. "Vous avez placé votre Trône, ô mon Dieu, dans une lumière inaccessible. Le P. du Rivet. = Quelquefois le 1er et souvent le 2d est suivi de la prép. à. "Toute la côte de la pêcherie est inabordable aux vaisseaux d' Europe. "Le port est inaccessible aux vaisseaux, même d' une médiocre grandeur. Lett. Édif. "Il est inaccessible aux sollicitations: elles ne peuvent rien sur lui.
   Et désormais au trouble inaccessibles.
dit ironiquement Rousseau aux mécréans. = Il dit âilleurs de Dieu:
   Une profonde obscurité
   Aux regards des humains le rend inaccessible.

INACOMODABLE


INACOMODABLE, INACOSTABLE, adj. [Pénult. dout. dern. e muet.] Qui ne peut être acomodé, en parlant des afaires, des querelles. "Afaire, querelle inacomodable. = Qu' on ne peut acoster. "C' est un homme inacostable.

INACOUTUMÉ


INACOUTUMÉ, ÉE, adj. [I-na-kou--tumé, mée: 5e é fer. long au fém.] Que l' on n' a pas coutume de faire, d' éprouver. Rich. le met sans remarque. Suivant Trév. il a pris la place d' insolite, qu' on disait autrefois. Celui-ci a repris faveur, et il est plus d' usage aujourd' hui que inacoutumé. L' Acad. n' avait pas dabord mis celui-ci dans son Dictionaire: elle l' a inséré dans les dernières éditions. Ils sont tous deux bons à conserver, d' autant plus qu' inacoutumé n' a pas tout-à-fait le même sens qu' insolite. On dit, par exemple, sentir des mouvemens inacoutumés: on ne dirait pas, des mouvemens insolites. Le 1er répond à la signification, d' être acoutumé de, et le 2d, au sens d' être acoutumé à. Voyez ACCOUTUMER. Rem. n°. 3°.

INACTIF


*INACTIF, IVE, adj. INACTION, s. f. [I-naktif, tîve, i-nak-cion.] L' inaction est la cessation de toute action. Inactif, qui demeure dans l' inaction. = Le substantif n' est pas ancien, mais il est très-bien établi. "À~ la vue de tant de désordres, des visiteurs doivent-ils demeurer dans l' inaction? Cochin. L' adjectif est tout nouveau, et il a besoin du sceau de l' usage. "Les spectacles ne serviroient qu' à rendre un peuple inactif et lâche. J. J. Rouss. "Les prêteurs, considérés en général, ne sont que des propriétaires inactifs. Necker. "Des fonds inactifs et infructueux. Id. "Mari d' une femme malade, ou inactive faûte d' ouvrages. Briatte.

INADMISSIBLE


INADMISSIBLE, adj. [I-nad-micible: dern. e muet:] Qui ne peut, ou ne doit pas être admis; qui n' est pas recevable. "Ces moyens sont inadmissibles. "Preuve inadmissible.

INADVERTENCE


INADVERTENCE, Trév. ou mieux, INADVERTANCE, Acad. S. f. Défaut d' atention, d' aplication~. "C' est une inadvertance. "Il l' a fait, il l' a dit par inadvertance.

INAFFECTATION


*INAFFECTATION, s. f. Mot, dont Boursault s' est servi, pour se moquer des expressions d' une Précieuse. Richelet. "Ce serait le contraire d' affectation; mais ce mot n' est point reçu. Trév.
   Des mots pleins d' énergie et d' érudition;
   Comme inintelligible, inaffectation.

INALIÉNABLE


INALIÉNABLE, adj. [I-nali-énable: 4e é fer. pénult. dout.] Qui ne peut s' aliéner. "Les biens de l' Église sont inaliénables.

INALLIABLE


INALLIABLE, adj. [I-nali-able: pénult. dout. dern. e muet.] Qui ne peut s' allier avec, en parlant des métaux. "Ces deux métaux sont inalliables. = Fig. "Les intérêts de Dieu et ceux du monde sont inalliables. = Il est peu usité. L' Acad. le met sans remarque.

INALTÉRABLE


INALTÉRABLE, adj. [3e é fer. 4e dout.] Qui ne peut être altéré. Il aime à suivre le subst. au propre. On prétend que l' or est inaltérable. Au fig. "Tranquillité, paix inaltérable. Il peut précéder quelquefois. "L' amour de la religion et de la piété est la véritable source du bonheur et de l' inaltérable tranquillité. Griffet. = Les inaltérables règles de la société, fait une inversion peu agréable. Mais, l' inaltérable cours, quoique cet adjectif polysyllabe soit devant un monosyllabe, ne sone point mal.
   J' ai rapelé dans ma mémoire
   Des bontés du Seigneur l' inaltérable cours.
       Le Franc.

INAMISSIBLE


INAMISSIBLE, adj. INAMISSIBILITÉ, s. f. [I-namicible, cibilité.] Ils ne se disent qu' en Théologie, en parlant de la grâce. Qui ne se peut perdre. "Grâce inamissible. "L' inamissibilité de la justice.

INANIMÉ


INANIMÉ, MÉE, adj. [4e é fer. long au 2d.] Qui n' a point d' âme. Corps inanimé: créatures inanimées. = Fig. Qui ne marque point de sentiment. "Persone inanimée: chant inanimé; figûre inanimée.

INANITÉ


*INANITÉ, s. f. (Néologisme) Vanité, inutilité. "L' inanité de mes vains desirs. J. J. Rouss. _ Il ne parait pas que ce mot ait pris, même parmi les amateurs et amatrices des mots nouveaux.

INANITION


INANITION, s. f. [I-nani-cion: en vers, ci-on.] Faiblesse causée par défaut de nourritûre. "Il tombe d' inanition. "Si vous ne mangez pas, vous mourrez d' inanition.

INAPLICABLE


INAPLICABLE, adj. INAPLICATION, s. f. INAPLIQUÉ, ÉE, adj. [I-naplikable, ka--cion, ké, kée: pénult. dout. au 1er: 4e é fer. lon. au dern.] Inaplicable se dit des chôses. "Cet exemple, cette comparaison est inaplicable au fait présent. Inaplication, inapliqué, se disent des persones, et marquent un défaut d' aplication, d' atention. "Il est trop inapliqué: son inaplication a nui à sa fortune, au dévelopement de ses râres talens. = La Touche, dès le comencement du siècle, met inaplication au nombre des mots nouveaux, dont on peut se servir sans scrupule. Il est dans Trév. dès 1704. On n' y cite, à la vérité, que l' Abé de Bellegarde, à qui la Langue doit plusieurs mots. Aujourd' hui il est parfaitement bien établi; et c' est trop peu dire, que d' assurer qu' on peut en bien augurer, comme on le dit dans le Dict. Gramm.

INAPRÉCIABLE


INAPRÉCIABLE, adj. [3e é fer. pénult. dout.] Qui ne peut être aprécié. On dit, dans le Dict. de Trév. que ce mot a besoin d' être confirmé par l' usage. L' Acad. le met sans remarque et sans exemple. "Le dégât que font les sauterelles, est inapréciable. Journ. Polit. Je crois qu' on peut s' en servir sans scrupule.

INAPTITUDE


INAPTITUDE, s. f. On dit inepte avec un e, et inaptitude avec un a: telle est la bisarrerie de l' usage. Défaut d' aptitude à, de capacité pour. "Il a de l' inaptitude à tout, pour tout. "L' inaptitude à toute espèce d' ocupations sérieûses. Linguet. "L' inaptitude de son fils à le seconder. Anon.

INARTIFICIEL


*INARTIFICIEL, ELLE, adj. Le contraire d' artificiel. C' est un mot de Bossuet. "Ces preuves inartificielles, comme les apellent les maîtres de Rhétorique. _ Ce mot n' a pas pâssé.

INARTICULÉ


INARTICULÉ, ÉE, adj. Qui n' est point articulé. "Des sons inarticulés, tels que ceux des enfans à la mamelle. "Des acusations vagues et inarticulées.

INATTAQUABLE


INATTAQUABLE, ou INATAQUABLE, adj. [I-natakable: pénult. dout.] Qu' on n' ôserait ataquer. "Poste inataquable. "L' inataquable authenticité de nos droits. Dom. Ansart.

INATTENDU


INATTENDU, ou INATENDU, ÛE, adj. [I-natendu, dû-e: 3e lon. 4e lon. au 2d.] Qui ne pouvait pas être atendu. "Malheur inatendu. Pour le bonheur, on dit inespéré; parce qu' on atend le mal, et l' on espère le bien.

INATTENTIF


INATTENTIF, ou INATENTIF, ÎVE, adj. INATENTION, s. f. [I-natantif, tîve, I--natan-cion; en vers ci-on. 3e lon.] Ils expriment un défaut d' atention. "Enfant toujours inatentif. "Il l' a fait par inatention.

INAUGURATION


INAUGURATION, s. f. [Inogu-racion; en vers ci-on.] Cérémonie religieûse, qui se pratique au Sacre ou au Couronement des Souverains. _ Par extension, on le dit dans les Universités étrangères, de l' installation des Professeurs. _ "M. Formey parle de harangue inaugurale. C' est un vrai latinisme.

INCAPABLE


INCAPABLE, adj. INCAPACITÉ, s. f. [3e dout. au 1er, dern. e muet au 1er, é fer. au 2d.] Incapable, qui n' est pas capable. Il a tous les sens et les régimes du simple. "Un mineur est incapable de disposer de son bien. "Sa mauvaise santé le rend incapable d' aplication. "Il est incapable de vigilance, de veiller, de pourvoir à, etc. "Son estomac est incapable de digérer les alimens les plus légers. _ On le dit du mal comme du bien. "Il est incapable de lâcheté, d' une mauvaise action; de manquer à sa parole. = Sans régime, il signifie mal-habile. "C' est l' homme du monde le plus incapable. = Incapacité n' a que ce dernier sens. Son incapacité est reconue. _ Au Palais, il régit de et l' infinitif. "Quand il y a incapacité de doner de la part du Testateur, la reconoissance d' une dette, qui n' est point établie dailleurs, est inutile. Cochin.

INCARNADIN


INCARNADIN, INE, adj. Il ne se dit que d' une couleur plus faible que l' incarnat ordinaire.

INCARNAT


INCARNAT, ATE, adj. Espèce de couleurs qui est entre le cerise et le couleur de rôse.

INCARNATION


INCARNATION, s. f. S' INCARNER, v. réc. [Inkarna-cion, né.] Ils ne sont usités qu' en parlant du Mystère par lequel le Verbe s' est fait homme. "L' Incarnation du Verbe. "Un Dieu s' est incarné pour racheter les Hommes. = Incarné, ée, adj. "Le Verbe incarné. = Fig. et fam. "Diable, Démon incarné. Méchant homme. "C' est la vertu, la prudence, ou la malice incarnée.

INCARTADE


INCARTADE, s. f. Espèce d' insulte faite inconsidérément. Il n' est que du style familier.
   Quel compliment! quelle brusque incartade!

INCENDIAIRE


INCENDIAIRE, subst. et adj. INCENDIE, s. m. [Insandi-ère, dî-e: 1re et 2e lon. 3e lon. au 2d: 4e è moy. et long au 1er.] Incendie, grand embrâsement. "Furieux, horrible incendie. L' incendie du Palais, etc. = Suivant Vaugelas, on doit distinguer incendie, d' embrâsement, en ce que le 1er se dit proprement d' un feu mis a dessein; et que le second convient mieux à un feu, qui a été mis par câs fortuit. Bouhours ne trouve pas que cette distinction soit admise par l' usage; et il pense avec raison, qu' on dit incendie et embrâsement d' un feu, qui a été mis à dessein ou par hasard. Il met une autre diférence entre ces deux mots: c' est qu' incendie se dit ordinairement sans régime; et qu' embrâsement, au contraire, a d' ordinaire un régime: l' embrâsement de Troie, de Londres, du Palais. Cette diférence ne me parait pas mieux fondée que la 1re: on dit, l' incendie d' un Temple, d' un Palais. Une distinction plus juste, ce me semble, c' est qu' Incendie ne se dit que d' un embrâsement ordinaire, et embrâsement d' un Incendie mémorable et extraordinaire. On ne dit pas l' incendie de Troie, l' incendie de l' Univers; mais l' embrâsement; on ne dira pas non plus l' embrâsement, mais l' incendie d' une maison, et même d' un village.
   INCENDIAIRE, Auteur volontaire d' un incendie. "Il n' est point de suplice assez grand, pour les incendiaires.
   Rem. Ces deux mots s' emploient au figuré pour exprimer les troubles que les hérésies et les factions excitent dans un État: mais dans cet emploi, incendiaire est un néologisme heureux, et il s' emploie adjectîvement. "Les nouvelles hérésies ont causé de grands incendies dans le Royaume. Acad. "Ces propôs incendiaires se tiennent publiquement à Londres. Linguet. Discoureur incendiaire. Dupan. = * Dans les Provinces méridionales, plusieurs font incendie féminin, et disent une grande incendîe, au lieu de dire, un grand incendîe.

INCENDIER


INCENDIER, v. act. [Insandi-é: dern. é fer.] Brûler, consumer par le feu. "Ce village a été entièrement incendié. Il se dit le plus souvent au passif.

INCERTAIN


INCERTAIN, AINE, adj. INCERTAINEMENT, adv. INCERTITUDE, s. f. [Incêr--tein, tène, tèneman, titude: 2eê ouv. 3e è moy. au 2d et au 3e, dont la 4e e muet.] Incertain, apliqué aux chôses, a plusieurs sens: douteux, qui n' est pas assuré. "Évènement incertain. Et substantivement: Quiter le certain pour l' incertain. = Variable. "Le tems est bien incertain. "La faveur des Rois et encôre plus incertaine. "C' est un discours trop incertain pour qu' il puisse mériter quelque foi. Cochin. = Indéterminé. "On prend quelquefois un nombre certain pour en désigner un incertain. = Apliqué aux persones, 1°. Irrésolu. "Je suis incertain de ce que je dois faire. "Elle demeura quelque tems incertaine de la réponse qu' elle devoit faire. Le Sage. _ 2°. Qui ne sait pas, qui doute. "Je suis incertain de ce qui arrivera; incertain de réussir. = Remarquez que ce régime de la prép. de ne se met qu' avec ce, et qu' il n' est pas reçu devant les noms. Je ne crois pas qu' on dise, je suis incertain de son amitié, de sa protection, ni, comme dit Bossuet. L' Egypte elle-même est incertaine des tems les plus éclatans de sa Monarchie. = Douteux, Incertain, Irrésolu. (Synon.) Le doute vient de l' insufisance des preûves ou de l' égalité de vraisemblance entre les preûves pour ou contre: l' incertitude du défaut des lumières nécessaires pour se décider; l' irrésolution du défaut de motifs d' intérêt, ou de l' égalité des motifs oposés. _ Les deux premiers concernent l' esprit; le troisième concerne le coeur. _ Douteux, ne se dit que des chôses; incertain, se dit des chôses et des persones; Irrésolu, ne se dit que des persones. Il marque de plus une disposition habituelle et tient au caractère. _ On dit, d' un fait légèrement avancé, qu' il est douteux; et d' un bonheur légèrement espéré qu' il est incertain. Ainsi, incertain se raporte à l' avenir, et douteux au pâssé ou au présent. ENCYCL. Beauzée. Voy. plus bâs Incertitude.
   INCERTAINEMENT, avec doute et incertitude. "On parle de cela fort incertainement.
   INCERTITUDE, ne se dit que des persones dans son sens naturel: c' est l' état d' une persone incertaine sur ce qui doit arriver, ou irrèsolue sur ce qu' elle doit faire. "Je suis dans une grande incertitude sur, ou de ce qu' il en arrivera. "L' incertitude où l' on est du succês tient les esprits en suspens. "Il est dans l' incertitude du parti qu' il doit prendre. = Incertitude, Doute, Irrésolution (Synon.) Dans le sens où ces mots sont synonymes, ils marquent tous les trois une indécision; mais l' incertitude vient de ce que l' évènement des chôses est inconu; le doute de ce que l' esprit ne sait pas faire un choix; et l' irrésolution de ce que la volonté a peine à se déterminer. _ On est dans l' incertitude sur le succês de ses démarches; dans le doute sur ce qu' on doit faire; et dans l' irrésolution sur ce qu' on veut faire. _ L' homme sage ne sort guère de l' incertitude sur l' avenir, du doute sur les opinions, et de l' irrésolution sur ses engagemens. GIR. Synon. Voy. IRRÉSOLU et IRRÉSOLUTION.
   INCERTITUDE, se dit quelquefois dans un sens indéfini. "Il y a beaucoup d' incertitude dans l' Histoire, dans la Médecine. = On dit aussi l' incertitude, pour l' inconstance du tems.

INCESSAMMENT


INCESSAMMENT, adv. [Incè-saman: 1re lon. 2e è moy.] Au plutôt, sans délai. Il ne s' emploie que pour désigner le futur. "Il arrivera, il doit partir; on l' attend incessamment. = * Autrefois on lui fesoit modifier tout autre tems des verbes, dans le sens de continuellement. "Il travaille incessamment. VERTOT, dit d' Auguste. "Le souvenir des Ides de Mars (ou César fut assassiné) se présentoit incessamment à son esprit. On dirait aujourd' hui, se présentait sans cesse.

INCESTE


INCESTE, s. m. INCESTUEUX, EûSE, adj. INCESTUEûSEMENT, adv. [Incèste, tu-eû, eû-ze, eû-zeman: 1re lon. 2e è moy. 4e lon. aux 3 dern.] L' inceste est une conjonction illicite entre des parens ou alliés au degré prohibé par les lois. "Comettre un inceste avec, etc. = Incestueux, coupable d' inceste. Homme incestueux; comerce incestueux. = Incestueûsement, vivre incestueûsement, dans l' inceste.

INCIDEMMENT


INCIDEMMENT, adv. INCIDENT, ENTE, adj. INCIDENT, s. m. INCIDENTER, v. n. [Incidaman, dan, dante, dan, danté: 3e. br. au 1er, lon. aux aûtres.] Incident, est, 1°. Un évènement, qui survient dans le cours d' une afaire. "Incident imprévu. "Il survint un incident, qui l' obligea de revenir. = 2°. Dans un Poème dramatique, évènement considérable, qui survient dans le cours de l' action principale. "Cette pièce de théâtre est trop chargée d' incidens. = 3°. En matière de procês, point à débatre, qui nait ou qu' on fait naître dans le cours de l' action principale. "Il survint; l' on fit naître un incident, etc. = 4°. Dans les disputes, contestation le plus souvent étrangère au sujet.
   Rem. Les Traducteurs de livres anglais emploient souvent incident, pour évènement, parce que ce mot a cette signification dans la langue anglaise. M. Linguet, dans le séjour qu' il a fait au barreau, et en Angleterre, s' est familiarisé avec ce mot. "On a pris des incidens (évènemens) particuliers, pour des preûves générales. _ Incident, comme on l' a dit, ne se dit pas de tout évènement, mais d' un évènement, qui survient dans le cours d' une entreprise, d' une afaire, et qui y a quelque raport.
   Incidemment et Incident, adjectif, ne se disent qu' au Palais et dans les disputes. V. n°. 3°. et 4°. "Il s' est constitué incidemment demandeur. "On n' a traité cette question qu' incidemment. "Demande, requête, question, proposition incidente. = Incidenter, c' est faire naître des incidens dans le cours d' un procês, d' une afaire, dans une dispute, au jeu, etc. "Au lieu de presser le jugement du procês, de répondre directement à la question, il ne fait qu' incidenter. "Les mauvais joueurs incidentent toujours. _ Le P. Berruyer, dit des Incrédules. "Cesse-t' on jamais d' incidenter, de disputer, de chicaner, quand on a un grand intérêt à ne point se rendre? = Il régit quelquefois la prép. sur devant les chôses; mais il n' a que ce seul régime. Bossuet lui fait régir le datif de la persone: "Nous incidenter sur cet article est une chicane peu digne d' eux.

INCIRCONCIS


INCIRCONCIS, ISE, adj. INCIRCONCISION, s. f. [Incirkonci, cî-ze, ci-zion.] L' adjectif au propre ne se dit qu' au masculin. Qui n' est pas circoncis. Les juifs apelaient Incirconcis, tous ceux, qui n' étaient pas de leur nation. = Fig. Immortifié. (style de l' Ecritûre) Incirconcis des lèvres, du coeur, des oreilles. = Le substantif ne s' emploie qu' au figuré. "L' incirconcision du coeur.

INCISER


INCISER, v. act. INCISIF, ÃŽVE, adj. INCISION, s. f. [Inci-zé, zif, zîve, ci-zion: 1re lon. 3e lon. au 3e.] Inciser, 1°. En chirurgie, couper: on lui a incisé tout le brâs. = 2°. En parlant des arbres, faire des taillades: "Inciser un pin, pour tirer la résine; un arbre pour le gréfer. = 3°. En parlant des sucs de l' estomac; diviser. "Les sucs de l' estomac servent à inciser les alimens. = Incisif, se dit en Médecine des remèdes propres à diviser, à aténuer les humeurs. = Dents incisives, celles de devant, qui servent à couper les alimens. = Incision, coupûre, taillade: "Faire une incision au brâs, à la cuisse; à un arbre, etc. Voy. plus haut Inciser, n°. 1°. et 2°.

INCITATION


INCITATION, s. f. [Incita-cion.] Instigation, action d' inciter à quelque chôse de mauvais. "Il l' a fait par l' incitation du malin esprit, d' un faux ami.

INCITER


INCITER, v. act. Il se dit en bien comme en mal. Induire à faire quelque chôse. "Inciter à bien faire; "Les bons exemples incitent à la vertu. "Inciter à la révolte. "On l' a incité à cette démarche, à intenter ce procês.

INCIVIL


INCIVIL, ILE, adj. INCIVILEMENT, adv. INCIVILITÉ, s. f. Ils expriment un manque de civilité. "Homme incivil; persone incivile. "Procédé incivil et mal-honête. _ Demande, prière incivile, contraire à la bienséance, à l' honêteté. "Traiter quelqu' un incivilement. "Il y a de l' incivilité à faire cela. _ Faire, comettre une incivilité, des incivilités, se dit des actions ou des paroles contraires à la civilité.

INCLÉMENCE


INCLÉMENCE, s. f. [Inklémance: 2e é fer. 3e lon.] Défaut de clémence. Racine a été des premiers à employer ce mot: "L' inclémence des Dieux. Le P. Bouhours en augurait bien: mais sa prédiction a tardé de s' acomplir. On le dit aujourd' hui plutôt des chôses que des persones: l' inclémence de l' air, du ciel, du temps, de la saison; la rigueur de, etc. On ne dit point l' inclémence du Prince, du vainqueur. Pour l' inclémence des Dieux, il ne se dit que dans la haute Poésie. = * On a voulu introduire inclément, mais il n' a pas été admis.
   Molière l' a admis au pluriel, mais c' est en se moquant. "Voudriez-vous, faquins, que j' exposasse l' embonpoint de mes plumes aux inclémences de la saison. Préc. Rid.

INCLINAISON


INCLINAISON, Voy. INCLINATION.

INCLINANT


*INCLINANT, ANTE, adj. Qui est enclin à... "Les bons Princes sont plus inclinans à la douceur qu' à la sévérité. On ne croit pas, disait-on dans le Dict. de Trév. que ce mot soit fort usité en ce sens. Dans l' Abrégé et dans le Rich. Port. on le met sans remarque. L' Acad. ne le met que comme terme de Gnomonique. "Cadran inclinant ou incliné.

INCLINATION


INCLINATION, INCLINAISON, s. f. INCLINER, v. act. et n. [Inklina-cion, en vers ci-on, nèzon, né: 3eè moy. au 2d, é fer. au 3e.] Incliner, actif, c' est baisser, pencher, courber. "Incliner la tête, le corps; s' incliner devant quelqu' un. = Neutre, Avoir du penchant pour quelque chôse, y être porté. "Incliner à la pitié, à la paix, à un avis, à une opinion. = C' est aussi pencher d' un côté. "La victoire inclinait du côté des Français. "Un peu de philosophie fait incliner à l' athéïsme: un plus grand savoir dans la Philosophie ramène l' esprit à la conoissance d' un Dieu. Bacon.
   Inclinaison, Inclination, ont à-peu-près le même sens: état de ce qui penche: mais le 1er se dit dans le propre en Géométrie. "L' inclinaison d' un plan: l' angle d' inclinaison Le 2d se dit au figuré dans le langage ordinaire et au propre, en chimie; verser par inclination. On dit aussi inclination de tête; faire une profonde inclination devant le Saint-Sacrement. = Inclination, Penchant. (Synon.) L' inclination dit quelque chôse de moins fort que le penchant: la 1re nous porte vers un objet, et l' aûtre nous y entraîne. Il semble aussi que l' inclination doive beaucoup à l' éducation, et que le penchant tiène beaucoup du tempérament. _ On done ordinairement à l' inclination un objet honête; mais on supôse celui du penchant plus sensuel, et quelquefois même honteux. Ainsi, on dit qu' un homme a de l' inclination pour les Arts et pour les sciences, et qu' il a du penchant à la débauche et au plaisir. GIR. Synon. = Avoir de l' inclination, régit à ou pour devant les noms (le 2d est le meilleur) et à devant les verbes: "Avoir de l' inclination aux armes ou pour les armes. Acad. "Il a de l' inclination pour vous. "Avoir de l' inclination à bien faire, à mal faire, à médire, etc. "L' inclination que j' ai toujours eûe à révérer le mérite. Voit. = Inclination, se prend quelquefois pour la persone ou la chôse qu' on aime. "Cette femme est l' inclination d' un tel. "La chasse est son inclination.
   D' INCLINATION, adv. Aimer d' inclination. "Un homme que vous aimerez d' inclination. Mariv. "On loûe dans les Arméniens leur aplication continuelle au travail qu' ils aiment d' inclination. Let. Édif. L' Acad. ne met pas cet adverbe: mais il est très-usité, du moins dans le style simple.

INCLUS


INCLUS, ÛSE, adj. INCLUSIVEMENT, adv. [Inklu, klûze, ziveman: 2e du 2d et 3e du 3e lon. la dern. du 2d, et la 4e du 3e e muet.] Inclus, est le participe du v. Inclûre, qui n' est plus d' usage. Enfermé dans... Le billet ci-inclus; la lettre ci-inclûse. = S. f. L' inclûse, la lettre renfermée dans un paquet. = Inclusivement, en y comprenant, y compris. Il est oposé à exclusivement, qui veut dire, non compris. "Depuis le 15 jusqu' au 30 inclusivement, c. à. d. y compris le 30.

INCOGNITO


INCOGNITO, adv. [mouillez le g] Sans être conu. "Il a pâssé incognito. = Ce terme italien est fort usité dans notre Langue. Vaugelas en parle comme d' un mot nouveau. Les Italiens, qui vinrent avec Marie de Medicis (femme de Louis XIII) l' avaient mis sans doute à la mode. La Mothe. Le Vayer ne le pouvait soufrir: Th. Corneille l' aprouvait fort; et il est très-bien établi depuis long~-tems. Boursaut a dit, rire incognito.

INCOHÉRENCE


INCOHÉRENCE, INCOHÉSION, s. f. INCOHÉRENT, ENTE, adj. [Inko-érance, é-zion, éran, rante: 3e é fer. 4e lon. au 1er et aux 2 dern.] Ils expriment un défaut de cohérence, de liaison, d' acord, de raport entre les parties. Ces mots sont assez nouveaux. Des Dissertations Physiques, ils ont passé dans les discussions litéraires ou politiques. "L' Ab. Grossier troûve une incohérence monstrueûse dans le mélange d' objets sacrés et profanes que fait M. Le Mierre dans ses Fastes. "Ces crises ocasionées en Pologne par l' incohérence aristocratique trouvent leur remède dans l' autorité d' un chef. Journ. Polit. Fréron n' aimait pas l' emploi de ces mots, et il s' en moquait tout en les employant. "Tous ses vers sont détachés, décousus, incohérens, pour me servir d' un beau terme philosophique. Ann. Lit. "Idées disparates et incohérentes, comme s' expriment nos sublimes Philosophes. Ibid.

INCOMBUSTIBLE


INCOMBUSTIBLE, adj. [Inkonbus-ti--ble.] Qui ne se consume point au feu. "Toile, mèche incombustible, telle que celle de l' asbeste.

INCOMMENSURABILITÉ


INCOMMENSURABILITÉ, ou INCOMENSURABILITÉ, s. f. INCOMMENSURABLE ou INCOMENSURABLE, adj. [Inkomansura--bilité, rable: 3e lon.] Termes de Géométrie. Ils se disent de deux quantités, qui n' ont point de comune mesûre. "Le côté d' un cârré, et sa diagonale sont incomensurables. "Leur incomensurabilité est démontrée.

INCOMMODANT


*INCOMMODANT, ANTE, adj. Qui incomode. "Ce sont gens bien incomodans. Le Dict. de Trév. le met sans remarque. _ C' est un de ces mots qu' on dit, et qu' on n' écrit pas.

INCOMMODÉ


INCOMMODÉ, ÉE, ou INCOMODÉ, ÉE, adj. [4e é fer. lon. au 2d.] Malade. Il se dit ou seul, ou avec régime. "Depuis quelque tems il est incomodé. "Elle est incomodée de la vûe, d' un brâs, d' une jambe. = Paûvre, qui n' est pas à son aise. Marchand incomodé. Trév. La Touche n' aprouve incomodé en ce dernier sens qu' avec l' addition, dans ses afaires. L' Acad. ne le met aussi qu' avec cette addition. Voy. ACCOMMODÉ.

INCOMMODE


INCOMMODE, ou INCOMODE, adj. INCOMODÉMENT, adv. INCOMODER, v. act. INCOMODITÉ, s. f. [Inkomode; déman; dé, dité: 4ee muet au 1er, é fer. au 2d et au 3e. = Incomodément, doit avoir l' acc. aigu sur l' e, quoique formé d' Incomode, dont l' e est muet.] Incomode, en parlant des chôses, fâcheux, qui cause quelque peine. "Maison, habit, chaleur, bruit, vent incommode. = En parlant des persones, importun, qui est à charge. "Homme, femme incomode; d' une société, d' une humeur incomode. = Incomodément, avec incomodité. "Être logé, assis incomodément. = Incomoder, causer de l' incomodité. "La moindre chôse l' incomode. "Je crains de vous incommoder. "Il a une toux qui l' incomode fort. "Ces arbres incomodent la vûe du Château. "La perte de ce procês l' a fort incomodé, a fort incomodé ses afaires. Voyez plus haut INCOMODÉ.
   INCOMODITÉ, 1°. La peine que caûse une chôse incomode. "C' est une grande incomodité que d' être mal logé. "Il y a dans cette maison de grandes incomodités. _ L' incomodité du vent, du soleil, etc. = 2°. Indisposition, maladie. "Les incomodités de l' âge, de la vieillesse. "Être sujet à des incomodités. "Mon incomodité ne me permet pas de sortir pour vous aler voir.
   REM. Incomode, régit quelquefois le datif (la prép. à.) "Il est incommode à tout le monde. = Quand il est sans régime, il suit volontiers le substantif, même en vers.
   * Le chagrin me paraît une incomode chôse.
L' inversion est dûre: mais on peut pâsser cela dans une Comédie.

INCOMMUNICABLE


INCOMMUNICABLE, adj. [Inkomu--nikable.] Qui ne se peut comuniquer; dont on ne peut faire part. "Bien incomunicable. "Droits, honeurs incomunicables.

INCOMMUTABILITÉ


INCOMMUTABILITÉ, s. f. INCOMMUTABLE, adj. INCOMMUTABLEMENT, adv. [Inkomutabilité, table, tableman: 5e e muet aux 2 dern.] Ce sont termes de Pratique, qui se disent d' une possession, où l' on ne peut être légitimement troublé. "L' incomutabilité de sa possession est prouvée. "Propriété, possesion; possesseur, propriétaire incomutable. "Posséder incomutablement. = * l' Ab. des Fontaines a employé incomutable en matière de litérature. "Un grand Écrivain a, pour ainsi dire, un style individuel et incomutable. = Pluche l' emploie en Physique, et dit tantôt incommutable, tantôt incommuable. "Ces métaux sont improductibles, incommuables et indestructibles.

INCOMPARABLE


INCOMPARABLE, adj. INCOMPARABLEMENT~, adv. [Inkonparable, rableman: 4e dout. au 1er, 5e e muet.] Incomparable, à qui ou à quoi rien ne peut être comparé. Incomparablement, sans comparaison. "Homme d' une sagesse, d' une piété incomparable. "Orateur incomparable. = Ironiquement, c' est un homme incomparable, dit-on, quand quelqu' un a fait quelque sotise peu comune. _ "Elle est incomparablement plus vertueûse que sa compagne. _ Cet adverbe est toujours suivi d' un adverbe de comparaison plus, moins, mieux, etc.

INCOMPATIBILITÉ


INCOMPATIBILITÉ, s. fém. INCOMPATIBLE, adj. [Inkonpatibilité, tible.] Incompatibilité est, 1°. l' antipathie des humeurs et des esprits. "Il y a de l' incompatibilité entr' eux. = 2°. Impossibilité de posséder deux charges, deux bénéfices qui ne peuvent, suivant les lois, être réunis dans la même persone. "Il est obligé de remettre un de ces bénéfices pour caûse d' incompatibilité. = Incompatible a ces deux sens: "homme, esprit, humeur incompatibles. "L' amour de Dieu et l' amour du monde sont incompatibles.
   REM. Incompatible a un sens relatif. Il ne doit donc point s' employer au singulier absolument et sans la prép. avec. HUME apèle la Religion Catholique une religion incompatible. On pourrait demander avec qui? Il devait donc ajouter: avec la Religion Anglicane. Dans le premier sens d' antipathie, incompatible s' emploie absolument. Dans le second, au pluriel même, pour qu' il puisse être employé sans régime, il faut qu' on exprime les deux termes de la relation, les deux chôses qui ne peuvent compatir ensemble. "L' Évangile et les spectacles sont incompatibles. * Fleuri dit: "Ne tâchons-nous pas d' acorder avec l' Évangile plusieurs divertissemens que toute l' antiquité a jugés imcompatibles. Il devait ajouter, avec lui. Sa phrâse signifie seulement que ces divertissemens ne sont pas compatibles entr' eux.

INCOMPÉTEMMENT


INCOMPÉTEMMENT, adv. INCOMPÉTENCE, s. f. INCOMPÉTENT, ENTE, adj. [Inkonpétaman, pétance, tan, tante: 3e é fer. 4e br. au 1er, lon. aux aûtres.] Ce sont termes des Pratique, qui expriment un défaut de compétence. "Cela a été mal, et incompétemment jugé. "Faire juger l' incompétence. "Juge incompétent. Partie incompétente. = Incompétemment est resté au Palais; mais incompétence et incompétent s' emploient dans les matières de sciences et de littératûre. "Tout le monde s' érige en juge et en censeur: il y en a beaucoup d' incompétens, et leur incompétence est notoire pour tout autre que pour eux.

INCOMPRÉHENSIBILITÉ


INCOMPRÉHENSIBILITÉ, s. f. INCOMPRÉHENSIBLE, adj. [Inkompré-ancibilité, ci--ble.] L' incompréhensibilité~ est l' état de ce qui est incompréhensible, qui ne peut être compris. "L' incompréhensibilité des mystères. "Les voies de Dieu sont incompréhensibles. = Style famil. "Cet homme est incompréhensible; on ne conçoit rien dans son raisonement, dans sa conduite, tant ils sont bisârres.

INCONCEVABLE


INCONCEVABLE, adj. [2e lon. 3e et dern. e muet, pénult. dout.] Qui n' est pas concevable. "Mystère inconcevable. "Chôse, nouvelle, conduite inconcevable. "Cet homme est inconcevable, incompréhensible. = Il s' emploie ordinairement sans régime. Il peut pourtant régir le datif; la prép. à.
   O doux amusemens! ô charme inconcevable
   À~ ceux que du grand monde éblouit le cahos.
       Rouss.
Il aime à suivre le substantif: il peut pourtant quelquefois le précéder.
   Quelle inconcevable puissance
   Fait fleurir sa gloire au dehors!
       Rouss.
"Une si inconcevable mal-adresse. J. J. Rouss. Dans cette dernière phrâse l' inversion est un peu dûre.

INCONCILIABLE


INCONCILIABLE, adj. Qui ne peut se concilier avec. Au singulier, il exige la prép. avec. Au pluriel, les deux termes de la relation étant exprimés, cette préposition devient inutile. Voy. une Rem. au mot INCOMPATIBLE. "Cet abus était inconciliable avec toute espèce de constitution. "Ce sont des faits, des maximes inconciliables. On sous-entend, entre eux, entre elles.

INCONCLUANT


*INCONCLUANT, ANTE, adj. Qui n' est pas concluant. "Cette objection est inconcluante. Me. Portalis, Avocat. _ Ce mot n' est point dans les Dictionaires. Il serait utile.

INCONDUITE


INCONDUITE, s. fém. Défaut de conduite. "Il s' est perdu par son inconduite. = Ce mot ne s' est dit dabord que dans la conversation; on n' ôsait pas l' écrire. Il comence à paraître dans quelques écrits. M. Linguet s' en est servi: L' Acad. l' a admis dans son Dictionaire.

INCONGRU


INCONGRU, ÛE, adj. INCONGRûMENT, adv. INCONGRUITÉ, s. f. [2e lon. 3e lon. au 2d et au 3e. On écrivait autrefois incongruement.] Termes de Gramaire. Ils se disent d' une manière de parler qui pèche contre les règles de la syntaxe. "Discours incongru, façon de parler incongrûe. "Parler incongrûment. "Ce discours est plein d' incongruités. = Celui-ci se dit, au figuré, des faûtes contre le bon sens ou la bienséance, soit dans le discours, soit dans la conduite. "Sa conduite et ses raisonemens sont pleins d' incongruités. "Il fait chaque jour quelque nouvelle incongruité. "Ses incongruités le font mépriser. = Molière fait dire à ses Précieûses: "Ces gens là sont tout-à-fait incongrus en galanterie. Trévoux met. "Il fait toutes chôses incongrument; et l' admet pour le comique et le burlesque.

INCONNU


INCONNU, ou INCONU, ÛE, adj. 1°. Qui n' est point conu. "Homme inconu; terres inconûes. = S. m. Cette lettre a été remise par un inconu. = 2°. Qui est peu conu, ou qu' on regarde comme de peu de chôse. "Elle s' est entêtée d' un inconu.
   Rem. Inconu régit à, et conu la prép. de. "Inconu à toute la terre: conu de tout le monde. "L' ennui, qui dévôre les autres hommes, est inconnu à ceux qui savent s' occuper par quelque lecture. Télém.
"La Boussole étoit inconnue aux Anciens. _ * Quelques Auteurs lui ont fait régir l' ablatif.
   L' hymen est inconnu de la pudique abeille.
       De Lille.
"Ils veulent rester inconnus du Public. L' Ab. De Fontenai. = Sans régime, il suit toujours le substantif.

INCONSÉQUENCE


INCONSÉQUENCE, s. fém. INCONSÉQUENT, ENTE, adj. [Inkonsékance, kan, kante: 2e et 4e lon. 3e. é fer. 5e e muet.] Inconséquence, défaut de conséquence. Acad. Oposition dans les diférentes conduites de la vie. Trév. "Il y a de l' inconséquence dans ses discours, dans sa conduite. = Inconséquent, qui n' est pas conséquent, qui parle ou agit contre ses principes. "Il est inconséquent dans sa conduite, comme dans ses prôpos. = Ce mot d' inconséquence n' était pas aparemment fort usité du tems de Bossuet, car il demande permission de l' employer. "C' est une marque de fausseté et d' inconséquence (qu' on me permette ce mot) dans la doctrine. _ Il n' a plus besoin de correctif; et il est assez à la mode. Il est vrai que les ocasions de l' employer deviènent tous les jours plus fréquentes, et en litératûre, et en morale. "C' est une inconséquence de croire un enfer, et de mener une vie déréglée. Rich. Port.

INCONSIDÉRATION


INCONSIDÉRATION, s. fém. INCONSIDÉRÉ, ÉE, adj. INCONSIDÉRÉMENT, adv. [Inkonsidéra-cion, ré, rée, réman: 4e é fer. 5e é fer. aussi aux trois derniers] Inconsidération, légère imprudence, ou dans le discours, ou dans la conduite. Inconsidéré, étourdi, imprudent. Inconsidérément, d' une manière inconsidérée. "Il y a en cela de l' inconsidération. "Parler avec inconsidération. _ "Homme inconsidéré: persone inconsidérée. "Discours inconsidéré. Action, conduite inconsidérée. "Se conduire, agir, parler inconsidérément.

INCONSISTANCE


*INCONSISTANCE, s. fém. Inconséquence. "Cette méthode (raprochée de ses desseins) forme une inconsistance difficile à concevoir. Hist. des Stuarts. "Une indolente et molle disposition... capable d' autant d' inconsistances que la folie ou l' imbécilité. Ibid. C' est un anglicisme. Inconsistency or inconsistence. Quoique nous ayions inconséquence, cependant inconsistance serait utile, soit pour varier, soit parce que le dernier est plus fort et plus énergique. Dailleurs nous avons déjà consistance dans le sens oposé.

INCONSOLABLE


INCONSOLABLE, adj. INCONSOLABLEMENT, adv. [2e lon. 4e dout. au 1er, 5ee muet.] Inconsolable, qui ne se peut consoler. Inconsolablement, de manière à ne pouvoir être consolé. "Homme inconsolable. "Douleur, afliction inconsolable. "Être afligé inconsolablement.
   Rem. 1°. Inconsolable régit de ou sur. "Toute l' Êgypte parut inconsolable de cette perte. Télém "Amaury... étoit sur-tout inconsolable de la perte d' un tribut considérable, que les Fathimistes lui payoient. Hist. de Saladin. "Il est inconsolable sur cette mort Acad. = 2°. On dit, des douleurs inconsolables; mais on ne dit pas, des larmes inconsolables: c' est qu' on console la douleur; on ne console pas les larmes. * Tous les pauvres le pleuroient avec des larmes inconsolables. Vie de Dom Barthelemi des Martyrs.

INCONSTAMMENT


INCONSTAMMENT, adv. INCONSTANCE, s. fém. INCONSTANT, ANTE, adj. [Inkonstaman, tance, tan, tante: 3e br. au 1er, lon. aux trois autres.] L' inconstance est une facilité à changer d' opinion, de résolution, de sentiment, de conduite. Inconstamment, avec inconstance. Inconstant, qui est sujet à changer. "Agir, se conduire inconstamment. "Rien n' est plus indigne d' un homme sage, que l' inconstance. "Homme, esprit inconstant. Femme inconstante. "Inconstant dans ses résolutions. = Le subst. et l' adject. se disent figurément, des chôses sujètes à changer. "L' inconstance des vents, de la mer, des saisons, de la fortune. "Tems inconstant. Saison inconstante. = L' adjectif suit ou précède. "Les inconstantes étoiles. Télém. "L' inconstante Renomée. Rouss. Son inconstant hommage. L. Rac. Dans le style simple, il est mieux après; dans le style soutenu, il est souvent mieux devant. = Faible, inconstante, légère, volage, indiférente (syn.) Une femme foible est celle à qui l' on reproche une faûte, qui se la reproche à elle-même, dont le coeur combat la raison, qui veut guérir, qui ne guérira jamais, ou qui ne guérira que bien tard. Une femme inconstante est celle qui n' aime plus: une légère, celle qui déjà en aime un aûtre: une volage, celle qui ne sait si elle aime, ni ce qu' elle aime: une indiférente, celle qui n' aime rien. La Bruy. "Les femmes accusent les hommes d' être volages, et les hommes disent qu' elles sont légères. Id. Voyez LÉGER.

INCONTESTABLE


INCONTESTABLE, adj. INCONTESTABLEMENT, adv. INCONTESTÉ, ÉE, adj. [Inkontèstable, bleman, tèsté, té-e: 3e è moy. 4e dout. au 1er, é fer. aux deux derniers.] Incontestable, qui ne peut être contesté. Incontestablement, d' une manière incontestable. Incontesté, qui n' est pas contesté. "Cela est incontesté; mais n' est pas pour cela incontestable. Il n' est pas vrai, incontestablement. "Les preuves incontestables du déluge universel, sont en même tems pour tout homme instruit et physicien, une preûve incontestable de la vérité de la Religion. Les Hel. = Rousseau dit: un juge incontestable; mais contester ne régit pas les persones: incontestable ne doit donc point leur être apliqué, même en vers.

INCONTINENCE


INCONTINENCE, s. fém. INCONTINENT, ENTE, adj. INCONTINENT, adv. [Inkontinance, nan, nante, nan: 2e et 4e lon. 5e e muet.] Incontinence est le vice oposé à la continence. Incontinent, qui n' a pas la vertu de continence. "Son incontinence a été la caûse de sa perte. "C' est un homme incontinent. = L' adject. est moins usité que le substant.
   INCONTINENT, adv. de tems. Aussi-tôt, au même instant. "Dès qu' il eut reçu cet avis, il partit incontinent. = Bientôt: "Trois heures soneront incontinent. = Tout de suite. "Je vous parlerai incontinent après. = L' Auteur des Réflexions, etc. trouvait que c' était fort mal à propôs qu' on avait du dégout pour cet adverbe. Dans le Dict. Gram. on dit qu' il est vieux, et qu' on ne s' en sert guère plus. L' Acad. le met sans remarque. On peut dire qu' il n' est que de la conversation, et qu' il n' entre point dans le beau style.

INCONVÉNIENT


INCONVÉNIENT, s. m. [Inkonvéni-an: 2e et der. lon. 3e é fer] Ce qui survient de fâcheux dans quelque afaire; ou ce qui résulte d' un parti qu' on prend. "Il est survenu un inconvénient qu' on n' avait pas prévu. "En voulant éviter un inconvénient, on tombe dans un aûtre. Il n' y a pas d' inconvénient à cela.

INCONVICTION


*INCONVICTION, s. fém. INCONVAINCU, adj. Mots hasardés par M. Servan. "Il faut plaindre l' inconvaincu. "Ne distinguera-t-on jamais l' inconviction, qui doute en examinant, de l' incrédulité, qui nie sans examen? _ On les a toujours distinguées, mais on a reproché, avec raison, à la seconde, de se parer insidieûsement de la première. = M. Caraccioli avait dit auparavant, les inconvaincus.

INCORPORALITÉ


INCORPORALITÉ, s. fém. INCORPOREL, ELLE, adj. Ils se disent de Dieu et des esprits qui n' ont point de corps.

INCORPORATION


INCORPORATION, s. fém. INCORPORER, v. act. [Inkorpora-cion, ré.] Ils expriment, 1°. En Chimie, l' action de méler ensemble quelques matières pour en faire un corps qui ait quelque consistance. "L' incorporation de plusieurs drogues. "La cire et les gommes s' incorporent facilement. = 2°. Figurément, Joindre un corps moral à un aûtre. "Incorporer une Collégiale dans le Chapitre de la Cathédrale; un régiment dans un autre; une terre au Domaine. "L' incorporation de, etc.

INCôRRECTION


INCôRRECTION, s. fém. [Inkôrèk--cion, en vers, cion: 2e lon. r forte 3e è moy.] Défaut de côrrection. "Incorrections de style. Incorrections dans le dessein d' un tableau. = On dit aussi, style, Écrivain, dessein incôrrect. Je ne sais pas pourquoi les Dictionaires ne le mettent pas.

INCôRRIGIBILITÉ


INCôRRIGIBILITÉ, s. fém. INCôRRIGIBLE, adj. [2e lon. r forte. Inkôrigibilité, gible.] Ils expriment le caractère de celui qui ne veut pas, ou de ce qui ne peut pas se côrriger. "Il est incôrrigible. "Il y a des défauts qui sont incôrrigibles. "Son incôrrigibilité l' a fait abandoner de ses maîtres. _ Celui-ci ne se dit que des persones. On ne dit point l' incorrigibilité d' un livre, d' une faûte d' impression.

INCôRRUPTIBILITÉ


INCôRRUPTIBILITÉ, s. fém. INCôRRUPTIBLE, adj. INCORRUPTION, s. fém. [Inkôrruptibilité, tible, cion: 2e lon.] Les deux premiers se disent de ce qui ne se peut corrompre: le 3e ne se dit qu' en Physique, de ce qui ne se corrompt point. "Les substances spirituelles sont incôrruptibles. "L' incôrruptibilité des corps glorieux. = Fig. Qui est incapable de se laisser corrompre. "Juge, Magistrat incôrruptible. "L' incôrruptibilité est la gloire d' un Magistrat.

INCRÉDULE


INCRÉDULE, adj. et subst. INCRÉDULITÉ, s. fém. [2e é fer.] Incrédule est celui qui ne croit que dificilement, ou qui refuse même de croire ce qui est croyable. L' incrédulité est le vice de l' incrédule. "Esprit incrédule. "Vous êtes bien incrédule. "Incrédulité opiniâtre. = Incrédule et incrédulité s' entendent sur-tout aujourd' hui, d' un manque de foi divine. "L' incrédulité a fait de grands progrès. "On se fait gloire de passer pour incrédule. "On parle beaucoup des incrédules: quand ils étaient plus râres, on les apelait mécréans. "Les incrédules sont souvent très-crédules: c' est qu' ils ne sont pas incrédules par éfort de raison, mais par passion: ils croient ce qui les acomode, et ne veulent pas croire ce qui contredit leur penchant, quelque bien prouvé qu' il puisse être. = Il faut bien distinguer l' incrédule de celui qui n' est pas crédule. Celui-ci ne veut croire que sur de bones raisons; l' aûtre refuse de croire, malgré les raisons les plus fortes, qu' il craint d' examiner. = "Afficher l' incrédulité, c' est insulter à cette foule respectable de citoyens qui nous environent; c' est faire le procès à cette multitude de grands hommes, qui nous ont précédés. MARIN: l' Homme Aimable. "Bien diférent de ceux qui afichent l' incrédulité, et n' aprènent qu' à nier, je ne puis rien nier, rien adopter qu' avec une pleine conviction. Le Phil. du Valais.

INCRÉÉ


INCRÉÉ, ÉE, adj. [1re lon. 2e et 3e é fer.] Qui existe sans avoir été créé. "Dieu seul est l' être incréé. On apèle le fils de Dieu la Sagesse incréée.

INCROYABLE


INCROYABLE, adj. [In-kroa-iable: pénult. dout.] Qui ne peut être cru, qui est dificile à croire. Suivant l' Ab. Girard, il difère de paradoxe, en ce que celui-ci regarde les opinions, et l' autre les évènemens. On raconte des chôses incroyables: on propôse des paradoxes. = On dit, avec le verbe être impersonel: il est incroyable combien, ou quel, etc. C' est un latinisme adopté par l' usage. "Il est incroyable combien cet homme fait de chôses. Acad. "Il est incroyable quel est l' amour et le respect que les chrétiens de cette bourgade ont pour le P. Bouchet. Let. Édif.
   Incroyable se dit souvent par exagération, pour excessif, extraordinaire. "Joie, plaisir, douleur, mal, peine incroyable.

INCRUSTATION


INCRUSTATION, s. fém. INCRUSTER, v. act. [Inkrus-ta-cion, té.] Ils se disent de l' aplication de quelque pièce de marbre, etc. contre une murâille pour l' orner. "Incruster un pilâstre: Église incrustée de marbre. La Lande. "Une belle incrustation. = Le subst. se dit aussi d' une croûte qui se forme autour de quelques corps qui ont séjourné dans l' eau.

INCULPABILITÉ


INCULPABILITÉ, s. f. Inocence. État de celui qui n' est pas coupable, à qui l' on atribue faûssement quelque faûte. (Mot nouveau). "Nous avons vu M. de... près de se voir englouti, au moment où son inculpabilité étoit devenue incontestable. Linguet.

INCULPATION


INCULPATION, s. fém. INCULPER, v. act. [Inkulpa-cion, pé.] Ils expriment l' action d' atribuer une faûte à quelqu' un. "On l' a mal-à-propôs inculpé. "Il s' est lavé de cette inculpation. Ils ne se disaient dabord qu' au Palais: Ils ont ensuite passé dans le langage comun; mais ils ne sont pas encôre du beau style. On dit mieux et plus élégamment acusation, acuser: mais il semble qu' inculper, inculpation sont plus énergiques.

INCULQUER


INCULQUER, v. act. [Inkulké: dern. é fer.] Répéter souvent une chôse à quelqu' un, afin de la graver dans son esprit. "Le peuple et les enfans ont besoin qu' on leur inculque les vérités de la Religion.

INCULTE


INCULTE, adj. Qui n' est point cultivé. "Terre inculte = Figurément. "Esprit inculte: moeurs incultes: naturel inculte. = * M. Retif a hasardé incultûre. "Lisette avait de beaux cheveux, malgré l' inculture où on les avoit laissés. = Ce mot pourrait être utile. Nous n' avons que defaut de cultûre pour le supléer, et c' est une périphrâse. "L' incultûre de l' esprit, du naturel, sont la source de beaucoup d' erreurs et d' égaremens. Il serait à souhaiter que l' usage adoptât ce mot.
   Rem. Bourdaloue aplique inculte aux persones. "Le Prince n' étoit pas de ces Héros incultes, qui, de la bravoure, se font un droit d' ignorance pour tout le reste. On voit aussi dans Trév. jeune homme inculte. L' Acad. ne le dit que de l' esprit, des moeurs, du naturel: on ne le dit point des persones.

INCURABILITÉ


INCURABILITÉ, s. f. INCURABLE, adj. Ils expriment l' état de ce qui ne peut être guéri. "Mal incurable. Malade incurable. "L' incurabilité d' une plaie. = Le subst. ne se dit point des persones. = Incurable, inguérissable (synon.) Le premier se dit du mal qui résiste à tous les remèdes; le 2d, de celui qui ne laisse aucun espoir de salut. "Le mal incurable est celui contre lequel les éforts de l' Art ne peuvent rien; la maladie inguérissable, celle contre laquelle la Nature et l' Art ne peuvent pas davantage. "Il n' y a point de remède à l' un: il n' y a pas de ressource contre l' autre. ROUB. Synon. = Fontenelle emploie l' adj. au fig. "Quand les Philosophes s' entêtent une fois d' un préjugé, ils sont plus incurables que le peuple même: parce qu' ils s' entêtent également, et du préjugé, et des fausses raisons dont ils le soutiennent. L' Acad. dit aussi caractère, passion incurable. = Incurable n' a point de régime: l' on ne dit point incurable à tous les remèdes, comme l' a dit Voitûre. BOUH.

INCURIE


INCURIE, s. fém. [3e lon. 4ee muet.] Défaut de soin, négligence. "Il a dérangé ses afaires par son incurie. "Macrin s' abandona à la mollesse, à la crapule et à l' incurie, qui en est la suite. _ Depuis quelque tems on dit insouciance à peu près dans le même sens. Celui-ci, est plus français; l' autre sent toujours un peu le pays latin.

INCURSION


INCURSION, s. f. [Incur-sion, en vers si-on.] Course de gens de guerre en pays énemi. "Les incursions des Barbâres dans les Gaules. Voy. IRRUPTION.

INDE


INDE, s. f. On dit tantôt l' Inde, tantôt les Indes, plus souvent le dernier. Le P. Tachard, Missionaire des Indes, dit toujours l' Inde.

INDÉBROUILLABLE


*INDÉBROUILLABLE, adj. Qui ne peut être débrouillé. Mot nouveau assez heureûsement inventé. "Le cahôs politique le plus indébrouillable, celui de l' association germanique. Linguet.

INDÉCEMMENT


INDÉCEMMENT, adv. INDÉCENCE, s. f. INDÉCENT, ENTE, adj. [Indé-saman, sance, san, sante: 2e é fer. 3e br. au 1er, lon. aux aûtres.] Ils se disent de ce qui est contraire à la décence. "Agir, se comporter indécemment; avec indécence. "Parole, action, postûre indécente. "Il y a de l' indécence à, ou il est indécent à un homme grâve de dire, de faire, etc. M. l' Ab. Trublet, parlant des mauvais plaisans, dit:"C' est bien pis encôre, lorsqu' en forçant la natûre on viole les bienséances de son état, joignant ainsi l' indécence au ridicule. Ess. de Mor. et de Litt. = Indécences, au plur. chôses indécentes. "Les derniers (ouvrages de V...) sont si remplis d' indécences et de blasphêmes, qu' en déshonorant ses talens et sa vieillesse, il ne mérite, malgré sa haute réputation littéraire, que l' indignation des gens sensés. Le Phil. du Valais.

INDÉCHIFRABLE


INDÉCHIFRABLE, adj. Qui ne se peut lire, déchifrer, deviner. "Chifre indéchifrable. "Lettre indéchifrable. = Fig. Homme indéchifrable: "Sa conduite est indéchifrable, impénétrable. = Obscur, embrouillé. "Passages d' un Auteur indéchifrables à tous les Comentateurs.

INDÉCIS


INDÉCIS, ISE, adj. [Indéci, cîze: 2e é fer. 3e lon. au 2d.] En parlant des chôses, qui n' est pas décidé. "Ce point est demeuré indécis: question indécise. = En parlant des persones, irrésolu, qui a de la peine à se déterminer. "Il est indécis; ou, qui ne s' est pas encôre déterminé: il est encôre indécis. _ M. Bastide a dit indécidé, pour indécis. "Qui laisse la question indécidée. Ce mot n' est ni usité, ni nécessaire, puisque nous avons indécis. = Dans le Dict. Gram. on condamne mal-à-propôs indécis apliqué aux persones. On veut qu' on dise, irrésolu, incertain. On a tort: l' Acad. admet, homme indécis, et les bons Auteurs se sont servis de cette locution.

INDÉCISION


INDÉCISION, s. f. [Indéci-zion, en vers zi-on: 2e é fer.] Indétermination: état d' un homme indécis. "Rester dans l' indécision. Son indécision est caûse qu' on ne peut finir avec lui.

INDÉCLINABLE


INDÉCLINABLE, adj. Terme de Gramaire. Qui ne saurait être décliné. "Nom indéclinable, est celui qui se joint à d' autres mots en toute sorte de câs, de genre, et de nombre sans rien changer à sa terminaison.

INDÉCROTABLE


INDÉCROTABLE, adj. Qui ne peut se décroter, se polir. Balzac a employé ce mot: il apèle un Pédant, animal indécrotable. Il ne se dit que dans le style figuré, comique ou satirique.

INDÉFECTIBILITÉ


INDÉFECTIBILITÉ, s. f. INDÉFECTIBLE, adj. Ils ne se disent que de l' Église, qui ne peut faillir, errer. "L' Église est indéfectible; l' indéfectibilité de l' Église.

INDÉFENDU


INDÉFENDU, ÛE, adj. [Indéfandu, dû-e: 2e é fer. 3e lon. 4e lon. au 2d.] Que persone ne défend, ne protège. "Princesse indéfendûe. Trév. met ce mot: l' Acad. ne le met point. Il était hors d' usage: on recomence à s' en servir. L' Ab. Velly l' emploie substantivement. "Protèger les veuves, les orphelins, les indéfendus. H. de Fr.

INDÉFINI


INDÉFINI, IE, adj. INDÉFINIMENT, adv. [Indéfini, ni-e, niman: 2e é fer. 4e lon. au 2d.] Indéfini, est ce dont on ne peut déterminer les bornes. Indéfiniment, d' une manière indéfinie. "Tems, nombre indéfini, espace indéfini. Ligne indéfinie. "Prétérit indéfini. Voy. PRÉTÉRIT. Article indéfini. Voy. ARTICLE. "Promettre indéfiniment, sans rien marquer de précis.

INDÉFINISSABLE


INDÉFINISSABLE, adj. [2e é fer. pénult. dout.] Qu' on ne saurait définir. Il ne se dit que des persones. "Un caractère, un homme indéfinissable. * Les Gascons disent indéfinible.

INDÉLÉBILE


INDÉLÉBILE, adj. [2e et 3e é fer.] Qui ne peut être éfacé. On dit dans le Dict. Gram. que ce mot est inusité et inutile, et que nous avons pour le même sens ineffaçable. Le Rich. Port. le met sans remarque. Trév. et le Dict. de l' Acad. l' admettent pour les Sacremens; caractère indélébile. Richelet le dit au figuré du Pédantisme. La Touche le met au nombre des mots nouveaux, dont on peut se servir sans scrupule. Plusieurs Auteurs estimables l' ont employé. "Leibnitz se dépouilloit avec elles (les femmes) du caractère de savant et de philosophe, caractère cependant indélébile. FONTEN. "On ne corrige point le naturel... Mais quel oeil assez fin démêlera ce naturel indélebile. MARM.
   C' est de la Nation le vice indélébile.
       Bret.
M. Moreau s' en est aussi servi: on le troûve dans l' Ann. Lit. et âilleurs. "Ces organes n' ont jamais manqué aux besoins des animaux, et ils sont indélébiles comme leurs instincts. St Pierre. Cet adjectif ne me parait pas propre avec le mot organes. Dirait-on des organes, des instincts inéfaçables? _ Ce mot n' est usité que chez les Savans: dans le langage comun, on dit inéfaçable. * M. Linguet a employé indélébilité. "Depuis que le mariage a acquis l' indélébilité majestueûse, atachée au caractère de Sacrement. Les critiques de cet illustre Écrivain diront que le mot est impropre, et que l' Auteur ne sait pas son catéchisme. Comme on ne dit pas éfacer, mais dissoudre un mariage, indissolubilité aurait mieux convenu que Indélébilité. Celui-ce, ne serait bon que pour les Sacremens, qui impriment un caractère; le Bapt. la Confirm. et l' Ordre.

INDÉLIBÉRÉ


INDÉLIBÉRÉ, ÉE, adj. [2e, 4e et 5e é fer.] Il se dit d' une action, d' un moûvement sur lequel on n' a pas délibéré ni réfléchi. "Acte, moûvement involontaire et indélibéré.

INDEMNISER


INDEMNISER, v. act. INDEMNITÉ, s. f. [Pron. non pas Indânizé, nité, comme on le marque dans le Dict. Gram. mais comme s' ils étaient écrits Inda-me-nizé, nité, l' e ajouté à l' m très-bref.] Dédomager. Dédomagement. "Indemniser un Marchand des pertes qu' il a soufertes. "S' indemniser d' une perte sur un aûtre article. "Il demande une indemnité.

INDÉPENDAMMENT


INDÉPENDAMMENT, adv. INDÉPENDANCE, s. f. INDÉPENDANT, ANTE, adj. [Indépandaman, dance, dan, dante: 2e é fer. 3e et 4e lon. excepté la 4e du 1er, 5e e muet au 2d et au dern.] Indépendant, qui ne dépend de persone. Indépendance, état de celui qui est indépendant. Indépendamment, d' une manière indépendante. "Il est indépendant; esprit indépendant. "Indépendant des évènemens. "Vivre dans l' indépendance. "Aspirer à l' indépendance. "Tous les hommes aspirent à l' indépendance; mais cet heureux état, qui est le but et la fin de leurs desirs, est celui, dont ils jouissent le moins. D' Aguesseau.
   L' instant, qui fit les Rois, fit leur indépendance.
       P. Marion. Cromvel.
"Indépendamment de tout cela, de ce qui peut en arriver.
   Rem. 1°. L' Ab. des Fontaines écrivait toujours indépendemment contre l' usage et l' analogie, puisqu' on écrit indépendant, indépendance, et non pas indépendence, indépendent. Cette ortographe est dans plusieurs livres, ou par le goût, ou l' inatention des Auteurs, ou par l' inadvertence des Imprimeurs. = 2°. Indépendamment, ne s' emploie point absolument et sans régime. "La Postérité d' Adam jouït indépendamment (l' Auteur veut dire, dans l' indépendance) et paisiblement de la terre, qui lui avoit été donnée. Anon. = 3°. Dans l' Ann. Lit. on emploie indépendamment dans le sens de, à part, excepté. "Indépendamment des erreurs, que j' ai remarqué (remarquées) dans cette traduction, elle n' est point sans mérite du côté du style. Indépendamment de veut dire outre: que dans cette phrâse on mette outre à la place, et elle n' aura pas de sens. Il falait dire. "À~ part les erreurs que j' ai remarquées, etc.
   4°. Indépendant, n' a pas toute l' étendue du sens et de l' emploi du v. dépendre. On dit, cela ne dépend pas de moi, mais on ne dit pas cela est indépendant de moi. "Des crimes involontaires et des malheurs indépendans de celui, qui en est acablé. Marm. L' Auteur veut dire, qu' il ne dépend pas de lui d' éviter; mais il s' exprime mal, à mon avis.

INDESTRUCTIBILITÉ


INDESTRUCTIBILITÉ, s. f. INDESTRUCTIBLE, adj. [2e è moy.] Ils expriment la qualité de ce qui ne peut être détruit. "L' essence des chôses est indestructible. "L' indestructibilité de, etc. "Rien de plus charmant en Physique, dit ironiquement l' Auteur des Helviennes, que ces petits êtres (les molécules organiques) toujours vivans, toujours indestructibles et toujours actifs.

INDÉTERMINATION


INDÉTERMINATION, s. f. INDÉTERMINÉ, ÉE, adj. INDÉTERMINÉMENT, adv. [Indétêrmina-cion, né, née, néman: 2e é fer. 3e ê ouv. 5e é fer. aux 3 dern.] Indéterminé, 1°. En parlant des chôses, indéfini, qui n' est pas déterminé. "Espace, tems, nombre indéterminé. = 2°. En parlant des persones, Irrésolu. "Il est encôre indéterminé là-dessus. = Indétermination a raport au 2d sens, irrésolution. "Il est encôre dans l' indétermination. = Indéterminément, est relatif au 1er sens: d' une manière indéterminée, et sans rien spécifier. "Il lui a promis beaucoup de chôses, mais indéterminément. = Indéterminé suit toujours le substantif.

INDÉVOT


INDÉVOT, OTE, adj. et subst. INDÉVOTEMENT, adv. INDÉVOTION, s. f. [In--dévo, vote, teman, vo-cion: 2e é fer. 4e e muet au 2d et au 3e.] Richelet écrit Indevot sans accent, et il y en a plusieurs, en éfet, qui prononcent devot, indevot avec un e muet: mais c' est une prononciation gascone. = Ces mots expriment un défaut de dévotion. "Il est indévot; elle est fort indévote: "C' est un indévot, une indévote: "Prier indévotement, se tenir indévotement dans le Lieu Saint. "Son indévotion scandalise tout le monde.

INDEX


INDEX, s. m. [Indèkce: 2eè moy. l' e muet surajouté très-bref.] 1°. La Table d' un Livre Latin. On dit Table, pour les livres des Langues modernes. = 2°. Le doigt de la main, le plus proche du pouce, ainsi nomé parce qu' il sert, quand on l' étend tout seul à indiquer, à montrer ce qu' on veut faire apercevoir, etc. On dit adjectivement le doigt index ou substantivement l' index. _ Il n' a point de pluriel. M. Thouvenel dit indexes. "Il place la baguette sur les doigts indexes. Je crois qu' il faut dire sur les index ou les deux index.

INDICATIF


INDICATIF, IVE, adj. INDICATION, s. f. [Indikatif, tîve, Indikacion] Indicatif, qui indique; Indication, action par laquelle on indique. "Symptôme indicatif d' une crise. "Sur votre indication, je me suis adressé à... "C' est une indication d' un abscês, etc. = Indicatif, s. m. Le 1er mode des verbes, qui est une manière d' exprimer l' action avec l' afirmation simple, j' aime, j' aimais, j' ai aimé, j' aimerai, etc.

INDICE


INDICE, s. m. Signe aparent et probable d' une chôse. "Violent, puissant ou faible, léger indice. "J' en ai de grands indices. "On ne condamne point un homme sur de simples indices. "Plusieurs autres indices font voir que les portes (de Rome) étoient à peu près où elles sont actuellement. La Lande.

INDICIBLE


INDICIBLE, adj. Qu' on ne saurait exprimer. "Joie, douleur, plaisir indicible. Il est peu d' usage hors de ces phrâses. Il est du style familier. Pour le discours soutenu, on dit inéfable, et quelquefois inénarrable. = Le P. Charlevoix dit, une consolation indicible; et Rollin, des tourmens indicibles. Peu d' Auteurs ont employé ce mot. On le dit souvent, on ne l' écrit guère.

INDICTION


INDICTION, s. f. [Indik-cion.] Convocation d' une grande assemblée pour un tel jour. Il a raport au 2d sens d' indiquer, comme Indication au 1er. "L' indiction d' un Concile. "La Bulle de l' indiction.

INDIENNE


INDIENNE, ou INDIèNE, s. f. [In-diè--ne: 2e è moy. 3ee muet.] Toile peinte, ainsi nomée de ce qu' elles le sont à l' imitation de celles qui viènent des Indes. "Une belle indiène. "Une robe d' Indiène.

INDIFFÉREMMENT


INDIFFÉREMMENT, adv. INDIFFÉRENCE, s. f. INDIFFÉRENT, ENTE, adj. [Indiféraman, rance, ran, rante: 1er lon. 3e é fer. 4e br. au 1er, lon. aux autres.] Indiférent, en parlant des chôses, c' est, 1°. Qui peut se faire également bien de diférentes manières. En ce sens, il s' emploie ordinairement avec le v. être impersonel, et régit le datif des noms, et de avec l' infinitif, ou que avec le subjonctif pour les verbes. "Il est indiférent qu' on prène ce chemin ou l' aûtre. "Il lui est indiférent de sortir ou de rester, que vous l' aprouviez ou que vous le blâmiez. Ces~ deux dernières phrâses apartienent au n°. 2°. Voy. plus bâs. _ On le dit aussi sans régime. "Tous les chemins sont indiférens; ou avec le seul régime du datif. "Tous les partis que vous proposez lui sont indiférens. _ Actions indiférentes, qui d' elles-mêmes ne sont ni bones, ni mauvaises. "Nous parlions de chôses indiférentes, qui n' intéressent persone, qui ne sont de nulle conséquence. = 2°. Qui touche peu, qui n' intéresse guère. "Tout cela m' est indiférent. "Cet homme-là lui est fort indiférent. = 3°. En parlant des persones, qui n' a pas plus de penchant pour une chôse que pour une aûtre. "Il est indiférent pour tout, à tout. "Le Peuple indiférent à la fortune de son vizir, s' irrita au récit des cruautés exercées par les chrétiens. MARIN. Hist. de Saladin. "Ce n' est plus le câs de demeurer indiférent: il faut prendre un parti. = Segaud lui fait régir à devant l' infinitif. Pour confondre leur froideur indiférente à écouter et à croire à sa parole. Ce régime est peu usité. = 4°. Qui n' a d' atachement à rien, qui n' est touché de rien. Il est d' une humeur indiférente. "Il regarde tout d' un oeuil, d' un air, d' un esprit indiférent. = 5°. S. m. pl. "Il n' y a que les indiférens, qui puissent juger sainement: les amis et les énemis sont également suspects.
   Indiférence a raport au n°. 3°. et 4°: état d' une persone indiférente. "L' indiférence pour les biens de ce monde. "Il a une grande indiférence pour l' éclat, la magnificence. "Vivre dans l' indiférence, sans aucun vif atachement. = Indiférence, Insensibilité, (synon.) La première est à l' âme ce que la tranquillité est au corps; et la léthargie est au corps ce que l' insensibilité est à l' âme. L' indiférence détruisant les passions, ou plutôt naissant de leur non-existence, fait que la raison sans rivales exerce plus librement son empire: l' insensibilité, détruisant l' homme lui-même, en fait un être sauvage et isolé, qui a rompu les liens, qui l' atachaient au reste de l' Univers. "L' indiférence fait des sages, et l' insensibilité fait des monstres. Encycl. Beauzée, Syn.
   Indiféremment, avec indiférence, avec froideur. "Il fut reçu fort indiféremment. "Il reçoit tout indiféremment. = Sans distinction. "Je mange de tout indiféremment. "La diférence des conditions ne prouve rien contre les règles générales (de sainteté) prescrites indiféremment à tous. Segaud.

INDIGENCE


INDIGENCE, s. f. INDIGENT, ENTE, adj. [Indijance, jan, jante: 1re et 3e lon. 4e e muet.] Indigence, grande paûvreté. Indigent, paûvre, nécessiteux. "Il est tombé dans l' indigence. "Il faut assister ceux qui sont indigens. Voy. BESOIN.
   Le riche, qui tarit les pleurs de l' indigent,
   Au plus haut intérêt a placé son argent.
       Barthe.
REM. Indigent, s' emploie sans régime. Rousseau lui donant le sens, de, qui a besoin, lui done le même régime, la prép. de. Le vieux Saturne, dit-il:
   Donna la terre, indigente d' apui,
   À~ gouverner à des Dieux comme lui.       Allég.

INDIGèNE


INDIGèNE, subst. m. et f. Il se dit des naturels d' un pays. "C' est un indigène, une indigène; les indigènes. Ce mot n' est usité que parmi les savans. = Adj. Plante indigène par oposition à plante exotique.

INDIGèSTE


INDIGèSTE, adj. INDIGèSTION, s. f. [3e è moy. dans le 2d le t a le son, qui lui est naturel, et non pas celui du c, tion et non pas cion.] Indigèste, qui est dificile à digérer. Indigestion, mauvaise digèstion. Viande indigèste. "Causer; avoir, sentir des indigèstions. "Ce mal provient d' indigèstion. = Indigèste, se dit, au figuré, des ouvrages mal conçus, sans ordre et sans netteté. "Cet ouvrage (le Dict. de Bayle) à le bien considérer, n' est qu' une compilation indigèste, où l' on troûve dix articles inutiles avant d' en rencontrer un intéressant. Sabat. Trois siècles.

INDIGNATION


INDIGNATION, s. f. INDIGNER, v. act. [Indig-na-cion, né: mouillez le g.] L' indignation est une colère que done une chôse indigne, injuste, contraire à la raison, à la vertu. Indigner, c' est exciter l' indignation. "La prospérité des Méchans done de l' indignation. "On ne peut la voir sans indignation. "Elle nous indigne, on en est indigné. "Cette action a indigné tout le monde contre lui = S' indigner, concevoir de l' indignation. "L' auditeur s' indigne contre le Prédicateur, qui ne fait pas ce qu' il dit. Le P. Gaichiés. Il régit de et l' infinitif. "Il s' indigne de voir les injustices des hommes. Être indigné a le même regime, et il régit aussi que avec le subjonctif. "Il est indigné d' aprendre cette méchanceté. "Je suis indigné que vous ayiez manqué à votre parole. _ Rem. Que le régime de l' infinitif s' emploie quand le verbe régi se raporte au sujet de la phrâse, et le régime du subjonctif, quand il ne s' y raporte pas. "Les Anciens se sont indignés de voir cette jeunesse inconsidérée prétendre leur doner des leçons. Linguet. "Les villes, les royaumes, tout meurt, tout a son tombeau.... Et l' Homme s' indigne d' être mortel! Jér. Dél.

INDIGNE


INDIGNE, adj. INDIGNEMENT, adv. INDIGNITÉ, s. f. [Indig-ne, neman, nité: mouillez le g; 3e e muet aux 2 1ers.] Indigne. 1°. En parlant des persones, qui n' est pas digne, qui ne mérite pas. "Il est indigne de cette faveur, indigne de voir la lumière du jour. _ S. m. (St. famil.) C' est un indigne. = 2°. En parlant des chôses; qui ne convient pas au rang, au caractère. "Cela est indigne d' un honête homme, d' un homme de qualité. = 3°. Condamnable. Il se dit alors sans régime. "Traitement indigne, action indigne.
   REM. Indigne, se prend toujours en mauvaise part. On est indigne du bien et non pas du mal. Pour signifier donc que quelqu' un ne méritait pas les malheurs qu' il essuie, on ne doit pas dire qu' il en était indigne. Ainsi Racine a employé une expression impropre, quand il a dit dans Les Frères Enemis:
   Ménécée, en un mot, digne frère d' Hémon,
   Et trop indigne aussi d' être fils de Créon.
M. De Wailly fait la même remarque d' après l' Auteur des Réflexions. On dit, il est indigne de vos bontés, de pardon; mais on ne dirait pas bien, il est indigne de punition, de mort; il faut dire: il ne mérite pas d' être puni, de mourir. = * M. l' Ab. Royou, par distraction, a employé indigne pour incapable, ou il a transposé l' aplication de cet adjectif. "Je suis indigne de ces lâches ménagemens. Journ. de Mons. Il veut dire qu' il n' en est pas capable, ou qu' ils sont indignes de lui.
   INDIGNEMENT, a raport au 3e sens d' Indigne. "On l' a traité indignement. "S' acquiter de son emploi indignement.
   INDIGNITÉ, qualité de ce qui est indigne. "Il fut exclus de cette charge à caûse de son indignité, de l' indignité de sa persone, de sa profession. = Énormité. "L' indignité de cette action a révolté tout le monde. = Outrage, afront. "C' est une indignité; traiter avec indignité. = Il n' a de pluriel que dans ce dernier sens. "Il a soufert mille indignités de votre part. _ Hors de-là, on dit à plusieurs comme à un seul, votre indignité et non pas vos indignités.

INDIQUER


INDIQUER, v. act. [Indiké: 1re lon. dern. é fer.] 1°. Montrer à quelqu' un ce qu' il cherche, ou qui peut lui être utile. "Indiquez-moi la demeure de, etc. "Je lui ai indiqué un bon Médecin. = 2°. Marquer, en parlant d' une Assemblée. Indiquer la Session d' un Concile. Indiquer une Assemblée à un tel jour. = Indication a raport au 1er sens et Indiction au 2d.

INDIRECT


INDIRECT, ECTE, adj. INDIRECTEMENT, adv. [Indirèk, rèkte, rèkteman: 1re lon. 3e è moy. 4e e muet.] Indirect, qui n' est pas direct. On ne l' emploie point au propre. On dit, au figuré, louanges indirectes, donées adroitement, et sans qu' il paraisse qu' on a intention de louer. = Vues indirectes, desseins intéressés, que l' on cache sous l' aparence de quelque autre dessein. Moyens indirects, voies indirectes, mauvais moyens employés pour parvenir à ses fins.
   INDIRECTEMENT, d' une manière indirecte. "Ce qu' il a dit à M. de.... s' adressait indirectement à moi. "Il ne l' assiste ni directement, ni indirectement.

INDISCIPLINABLE


INDISCIPLINABLE, adj. INDISCIPLINÉ, ÉE, adj. INDISCIPLINE, s. f. [Indici--plinable, né, né-e, ne: 5e dout. au 1er, é fer. au 2d et 3e, e muet au dern.] Le 1er se dit de ce qui n' est pas capable d' être discipliné; le 2d de ce qui ne l' est pas. "Enfant indisciplinable; troupe indisciplinée. = Indiscipline, manque de discipline. "L' indiscipline des troupes. _ Ce dernier est fort nouveau: mais il est assez bien établi.

INDISCRèT


INDISCRèT, ÈTE, adj. INDISCRèTEMENT, adv. INDISCRÉTION, s. f. [Indis--krè, krète, krèteman, kré-cion, en vers ci-on: 1re lon. 3eè moy. aux 3 premiers, é fer. au dern. _ L' Acad. écrit Indiscrétement avec l' acc. aigu sur le 1er e; mais cet e est moyen et non pas fermé: l' acc. grâve lui convient donc mieux.] L' indiscrétion, est un manque de discrétion, de prudence. Indiscret est celui qui en manque. Indiscrètement, imprudemment, d' une manière indiscrète. "Homme fort indiscrèt; femme indiscrète. "Zèle indiscrèt; action, parole indiscrète; prière, demande indiscrète.
   Un éclat indiscret ne fait qu' aliéner
   Un coeur, que la douceur auroit pu ramener.
       La Chaussée.
"Il ou elle a beaucoup d' indiscrétion. "Je ne le croyais pas capable d' une si grande indiscrétion. "Il parle indiscrètement. "Il en a usé bien indiscrètement. Ils se disent quelquefois de celui, de celle, qui ne garde aucun secret; et les exemples cités, du moins plusieurs peuvent avoir ce sens. Il s' emploie, surtout alors substantivement: "C' est un indiscret.
   Rem. Quand on parle du vice, on le met toujours au singulier. On dit de plusieurs ou à plusieurs, leur indiscrétion, votre ïndiscrétion est bien grande; et non pas leurs indiscrétions, vos indiscrétions sont bien grandes. On ne le met au pluriel, que quand on parle des éfets de ce vice, des actions, des paroles indiscrètes. "On n' a vu que trop de ces malheureûses entretenir l' audience des indiscrétions de leur vie. Patru. Dans cet emploi, il se dit aussi au singulier. "Comettre une indiscrétion.

INDISPENSABLE


INDISPENSABLE, adj, INDISPENSABLEMENT, adv. [Indispansable, bleman: 3e lon. 4e dout. au 1er: 5e e muet.] Indispensable, dont on ne peut se dispenser. Indispensablement, nécessairement, par une loi, un devoir indispensable. "Loi, devoir, engagement, afaire indispensable. "Il y est indispensablement engagé.
   REM. Indispensable est très-bon; mais il n' en est pas de même de dispensable, dont s' est servi M. Le Maitre. = Nous pensons qu' indispensable ne doit se dire que des chôses, dont on ne peut être dispensé. Quelques Auteurs modernes l' ont fait synonyme de nécessaire, et lui ont doné toute l' étendûe de la signification de cet adjectif. L' Abé Sabatier parle des principes les plus indispensables; mais quoique les principes puissent être regardés comme des lois, on ne dirait pas, être dispensé, ou se dispenser d' un principe; on ne doit donc pas dire qu' un principe soit indispensable. Le même Auteur avait dit, qualités indispensables à un bon ouvrage. Outre l' impropriété du mot, il y avait l' irrégularité du régime. On a corrigé du moins cette faute dans l' errata, en mettant pour, au lieu d' à. _ M. Moreau dit aussi. "Ces détails nous sont indispensables. _ Dans l' Ann. Litt. on dit: jamais les conseils (donés aux Auteurs) ne furent plus indispensables. J' avoûe que j' aimerais mieux dire, plus nécessaires. Cependant j' ai dit moi-même, par déférence, il est vrai, dans le Prospectus de ce Dictionaire, qu' il n' est point de Langue, à laquelle le secours de la critique soit plus indispensable que la Langue Française. Je persiste à croire que le mot est impropre, et qu' il faut dire, plus nécessaire. Il me paraît que ce mot est en faveur depuis quelque temps, mais que plusieurs l' apliquent à tort et à travers, et en font une selle à tous chevaux. = Cet adjectif aime à suivre le nom qu' il modifie. En vers pourtant, et dans la prôse poétique ou oratoire, il peut être placé régulièrement et élégamment devant: l' indispensable loi du trépâs.

INDISPOSER


INDISPOSER, v. act. INDISPOSÉ, ÉE, adj. INDISPOSITION, s. f. [Indispozé, zé, zé--e, zi-cion: 4e é fer. aux 3 prem. devant l' e muet, l' ô est long: il indispôse, indispôsera.] Le verbe se dit de l' âme; l' adj. du corps; le substantif, de l' un et de l' aûtre. Indisposer, c' est aliéner, fâcher, mettre dans une disposition peu favorable. "Vous l' avez indisposé contre moi. M. Barthe dit, s' indisposer.
   J' ai su m' indisposer Mme. de Nozan.
Ainsi l' on dirait: vous vous êtes indisposé vos protecteurs: il s' est indisposé son meilleur ami. Assurément ce régime est contre l' usage. On dit indisposer contre. = Indisposé, légèrement malade. "Il est un peu indisposé. = Indisposition, incomodité légère. "Ce n' est pas une maladie, ce n' est qu' une indisposition. = Disposition peu favorable à quelqu' un. "Tout le monde est dans une grande indisposition contre lui. = Dans le langage de la Religion, on dit, défaut de disposition, en parlant de l' état de la conscience: on ne dit pas (du moins aujourd' hui) indisposition, comme a dit Bossuet. "S' il arrivoit que quelqu' un doutât de sa justification, à caûse de son indisposition, etc. Hist. des Variat.

INDISPUTABLE


INDISPUTABLE, adj. qui ne peut être disputé. Il est peu usité hors de la conversation. L' Acad. ne le met point. Rouss. l' a employé dans une de ses Odes.
   De ces Dieux, fantômes charmans,
   De votre verve poétique
   Indisputables élémens.

INDISSOLUBILITÉ


INDISSOLUBILITÉ, s. f. INDISSOLUBLE, adj. INDISSOLUBLEMENT, adv. [5e e muet au 2d et au 4e: luble, lubleman.] Ils expriment la qualité de ce qui ne peut se dissoudre, ou être dissous. Le subst. et l' adj. se disent au propre et au figuré. L' adverbe ne se dit qu' au figuré. "L' indissolubilité de l' or dans l' eau-forte. "L' indissolubilité du mariage. "L' argent est indissoluble dans l' eau régale. "Le mariage est indissoluble parmi les Chrétiens. "Atachement, union indissoluble. _ "Ils sont unis indissolublement.

INDISTINCT


INDISTINCT, INCTE, adj. INDISTINCTEMENT, adv. [Indis-teink, teink-te, teink-teman: 3e lon. 4e e muet.] Qui n' est pas bien distinct. Il ne se dit que des sons et des idées. "On n' entendoit que des voix confuses et indistinctes. "Je n' en ai qu' une idée confuse et indistincte. = Indistinctement, 1°. D' une manière indistincte. "Prononcer indistinctement. 2°. Confusément. "On ne peut voir ces objets qu' indistinctement. = 3°. Sans distinction, sans faire aucune diférence de l' un à l' aûtre. "On reçut indistinctement les parens et les étrangers. "Il médit indistinctement des amis et des énemis.

INDIVIDU


INDIVIDU, s. m. INDIVIDUEL, ELLE, adj. INDIVIDUELLEMENT, adv. [5e è moy. 6e e muet aux 2 dern. du-èl, èle, èleman.] Individu se dit de chaque être organisé, soit animal, soit végétal, par raport à l' espèce dont il fait partie. "Chaque individu. = En style plaisant, on dit, avoir soin de son individu; conserver son individu. = Individuel, qui a raport à l' individu. "Qualité, diférence individuelle. = Individuellement, d' une manière individuelle. "Pierre est individuellement diférent de Paul, et ne l' est pas spécifiquement. _ L' adj. et l' adv. sont des termes didactiques.

INDIVIS


INDIVIS, ISE, adj. [Indivis, vî-ze: 2e br. 3e lon. au 2d.] Qui n' est point divisé. "Les trois Rois, frères de Charibert, étoient convenus que la ville de Paris resteroit indivise entre eux. Moreau. _ Cet adjectif est surtout usité au Palais, où l' on dit aussi, posséder par indivis, sans partage.

INDIVISIBILITÉ


INDIVISIBILITÉ, s. f. INDIVISIBLE, adj. INDIVISIBLEMENT, adv. [Indivizibilité, zible, zibleman: 5e e muet aux 2 dern.] Ils se disent de ce qui ne peut se diviser. "L' indivisibilité d' un atôme. "Point, atôme indivisible. "Ils sont indivisiblement unis. _ L' adv. ne se dit qu' au fig.

INDIVISION


*INDIVISION, s. f. Mot employé, et peut-être forgé par M. Moreau, d' après indivis. "Plan formé par nos deux premiers Empereurs, pour assurer à l' Empire Français l' unité et l' indivision.

INDOCILE


INDOCILE, adj. INDOCILITÉ, s. f. Ils expriment un manque de docilité, une dificulté à être instruit et gouverné. "Enfant, homme, esprit, peuple indocile. "Des moeurs indociles. "L' indocilité d' un enfant; l' indocilité de son esprit: son indocilité. = Ils régissent la prép. à: "Indocile à toutes les remontrances. "Son indocilité aux avis qu' il recevoit, a perdu ce jeune homme. Mascaron fait régir à l' adjectif la prép. à devant l' infinitif. "Notre Hérôs (Turenne) indocile à soufrir de grandes richesses, n' a jamais pu consentir à en recevoir qu' autant qu' il en falloit pour mettre la bonté et la reconnoissance de son Prince à couvert. _ Ce régime n' est pas admis par l' usage.

INDOLENCE


INDOLENCE, s. f. INDOLENT, ENTE, adj. [Indolance, lan, lante: 1re et 3e lon. 4e e muet.] Ils marquent l' état d' un homme, qui n' est sensible à rien de ce qui touche les aûtres hommes. "Indolence de caractère. "Son indolence a ruiné ses afaires. "Caractère, air indolent, mine, humeur indolente. "C' est l' homme du monde le plus indolent. = Indolent~, Nonchalant, Négligent, Paresseux, Fainéant, (Synon.) L' indolent craint la peine: il n' aime que la tranquillité. Le Nonchalant craint la fatigue: il n' aime qu' un beau loisir. Le Négligent craint l' aplication: il n' aime que la dissipation. Le Paresseux craint l' action: il n' aime rien tant que le repôs. Le Fainéant craint le travail: il n' aime que l' oisiveté..... L' Indolence semble prendre sa source dans une sorte d' apathie, dans l' indiférence: la Nonchalance, dans la froideur du tempérament; la Negligence, dans la légèreté de l' esprit; la Paresse, dans une grande mollesse; la Fainéantise, dans la lâcheté de l' âme, etc. Roub. Synon. * La Rue dit, l' indolence aux afaires, indolent aux injûres. On le disait aûtrefois pour insensibilité: et l' Acad. dit encôre: l' indolence des Stoïciens est dificile à concevoir. Il me parait vieux en ce sens. = Ces mots sont nés au milieu du dernier siècle. Scarron s' en moquait: ils sont aujourd' hui, et, depuis long-tems, très-bien établis.

INDOMPTABLE


INDOMPTABLE, adj. INDOMPTÉ, ÉE, adj. [Richelet écrit sans p: aparemment, il ne le prononçait pas: mais on le fait sentir dans la prononciation soutenûe; il faut donc l' écrire.] Le 1er se dit de celui qui ne peut être dompté; et le 2d, de celui qui ne l' a pas encôre été. Celui-là peut se placer devant le substantif: celui-ci doit toujours marcher après. "Animal indomptable: courage indomptable. "L' indomptable vainqueur. "Cheval indompté.

INDU


INDU, DûE, adj. [2e lon. au 2d.] Il ne se dit qu' au fém. "Heure indûe: et au Palais, vexation indûe; contre l' usage, contre la règle et les lois.

INDUEMENT


INDUEMENT, voy. INDûMENT.

INDUBITABLE


INDUBITABLE, adj. INDUBITABLEMENT, adv. [4e dout. au 1er: 5e e muet: table, bleman.] Indubitable, certain, assuré, dont on ne peut douter. "Droit, succès, afaire, nouvelle, indubitable. = Indubitablement, certainement, assurément, sans aucun doute. "Il réussira, il se ruinera indubitablement.

INDUCTION


INDUCTION, s. f. INDUIRE, v. act. [Induk-cion, duî-re; 2e lon. au 2d.] Induire, c' est 1°. Porter à quelque chôse. "Qui vous a induit à cela?
   Tiens, prens. _ _ Je n' ai pas cru vous induire en dépense.      La Chaussée.
Induire en erreur (et non pas à erreur.) Induire à mal faire. Les uns disent, induire en erreur, et les aûtres, induire à erreur, dit M. l' Abé Roubaud. Il ne paraît pas aprouver ces derniers. Il croit pourtant qu' on peut dire l' un et l' aûtre en des sens diférens. Induire en erreur, c' est tromper à dessein. Induire à erreur, c' est être cause que les aûtres se trompent: ce qui peut se faire sans malice. = 2°. Inférer, conclûre, tirer une conséquence. "Qu' induisez-vous de là? "Induira-t' on de là, que Charlemagne ne fût point le maître? Moreau. Il régit l' indicatif dans le phrâse afirmative; et le subjonctif, quand le sens est négatif ou interrogatif.
   Induction a les deux sens d' induire. _ Instigation. "Il s' est porté à le faire par l' induction de... = Conséquence qu' on tire. "Tirer une induction d' une proposition. _ Énumération: prouver par induction.

INDULGENCE


INDULGENCE, s. f. INDULGENT, ENTE, adj. [Induljance, jan, jante. 3e lon. 4e e muet.] L' indulgence est la bonté, la facilité à excuser, à pardoner les faûtes. Indulgent, qui a de l' indulgence. "User d' indulgence envers..... Avoir de l' indulgence pour. "Maître, père indulgent.
   Vous donez toutes deux dans un excès contraire.
   L' une trop indulgente, et l' aûtre trop sévère;
   Elle lui passe tout: vous ne lui passez rien.
       Barthe, la Mère Jalouse.
Être indulgent à, ou pour ses enfans.
   Rome, lui sera-t' elle indulgente ou sévêre?
       Racine.
"Un homme inexorable à soi-même n' est indulgent aux aûtres que par un excès de raison. La Bruyère.
   Rem. On ne dit plus indulgences au pluriel, qu' en parlant des Indulgences acordées par le Pape ou par les Évêques. Hors delà, on doit toujours se servir du singulier, même en parlant à plusieurs. Un Orateur, par exemple, doit dire, j' ai besoin de votre indulgence, et non pas, de vos indulgences, comme on le disait aûtrefois.

INDULT


INDULT, s. m. INDULTAIRE, s. masc. [Indulte, Indultère: 3e è moy. et lon. au 2d. l' e muet ajouté au 1er très-bref.] L' Indult est un mandat par lequel le Roi nomme un Clerc à un Collateur, sur la présentation d' un Oficier du Parlement de Paris, pour qu' il dispose en sa faveur du premier bénéfice qui vaquera à sa collation, ou à sa présentation. = Indultaire, qui a droit à un bénéfice en vertu d' un indult.

INDûMENT


INDûMENT, adv. [Indûman: 2e lon. On écrivait autrefois induement.] D' une manière indûe. "Procéder indûment. Il ne se dit qu' au Palais.

INDUSTRIE


INDUSTRIE, s. f. INDUSTRIEUX, EûSE, adj. INDUSTRIEûSEMENT, adv. [trî-e, tri--eû, eû-ze, eû-zeman: 3e du 1er et 4e des autres longue, 5ee muet.] Industrie, dextérité, adresse à faire quelque chôse. Industrieux, qui a de l' industrie. Industrieûsement, avec industrie. "Avoir de l' industrie. "Mettre, apliquer, employer son industrie à... "Combien de maux, où l' industrie des hommes ne peut trouver de remède? Chemin. "Homme, ouvrier industrieux; ouvrière industrieûse. "L' industrieûse abeille. "Travailler industrieûsement. "Cela est fait industrieûsement.
   On dit vivre, subsister d' industrie, sans article; trouver des moyens de subsister, bons ou mauvais. * Regnard, ayant besoin d' une syllabe de plus pour faire le vers, a dit: je vis de l' industrie. C' est une faûte, même dans une comédie. = On apèle, proverbialement, Chevalier d' industrie, celui qui n' ayant pas de bien, vit d' adresse, ordinairement aux dépens des sots. = On dit, dans un sens moins odieux, que la nécessité est la mère de l' industrie.

INÉBRANLABLE


INÉBRANLABLE, adj. INÉBRANLABLEMENT, adv. [2e é fer. 3e lon. 4e dout. au 1er, 5e e muet: lable, lableman.] Qui ne peut être ébranlé. Fermement, d' une manière inébranlable. "Rocher, courage, fermeté inébranlable, "Inébranlablement ataché à ses devoirs. = Dans le Dict. Néol. on dit que cet adjectif se dit sans régime, et l' on critique un Auteur d' avoir dit d' un homme, qu' il demeure inébranlable à toutes les secousses de la Fortune. Il y a plusieurs exemples de ce régime.
   Mon coeur inébranlable aux plus cruels tourmens.
       Corn.
Rocher inébranlable à l' impétuosité des vents. Acad. "Courage inébranlable   toutes sortes d' accidens. Ibid. = On dit aussi, demeurer inébranlable contre, etc. Acad. Celui-ci n' est pas si bon. "Inébranlable dans ses résolutions vaut mieux.

INEFFABLE


INEFFABLE, ou INÉFABLE, adj. INÉFABILITÉ, s. f. [2eé fer. 4e dout. au 1er.] Ils expriment l' impossibilité d' exprimer quelque chôse par des paroles. "La grandeur, le nom inéfable de Dieu. Mystère inéfable. "L' inéfabilité des mystères. Inéfable peut quelquefois précéder le subst.
   Grace au pécheur qui vous implore!
   Grâce, ô mon Dieu, j' espère encore
   En vos ineffables bontés.
       Le Franc.
= Inéfable, indicible, inénârrable, Inexprimable sont synonimes pour le sens; ils ne le sont pas pour l' emploi. Le 1er ne se dit que dans le haut style; le 2d, dans le style familier; le 3e, dans quelques phrâses consacrées. "Joie inénârrable. Gémissement inénârrable. etc. Le dernier est de tous les styles.

INEFFAÇABLE


INEFFAÇABLE, ou INÉFAÇABLE, adj. [2e é fer. pénult. dout.] Qui ne peut être éfacé. "Tache, souvenir inéfaçable. Traits inéfaçables. Voy. Indélebile.

INEFFECTIF


*INEFFECTIF, adj. C' est un mot de M. L' Ab. De Rancé. Il l' a dit tout seul, à ce que je crois, dit M. l' Ab. Roubaud.

INEFFICACE


INEFFICACE, ou INÉFICACE, adj. INÉFICACITÉ, s. f. [2eé fer.] Ils marquent un défaut de vertu, d' éficacité. "Secours, remède inéficace. "L' inéficacité d' un remède, d' un secours, d' un moyen.

INÉGAL


INÉGAL, ALE, adj. INÉGALEMENT, adv. INÉGALITÉ, s. f. [2e é fer. 4e e muet au 2d et au 3e; dern. é fer. au 4e] Ils expriment un défaut d' égalité. "Mouvement inégal. "Deux chôses de grandeur inégale; deux persones d' une condition inégale. _ "Homme inégal, esprit inégal, qui est d' une humeur bisârre. _ Style inégal, qui ne se soutient pas. "Un homme à saillies et à bons mots est très-inégal, et même journalier. L' Ab. Trublet. _ Terrein, chemin inégal, raboteux. "Se conduire inégalement. "L' inégalité de deux lignes; d' un terrein, d' un plancher. "Inégalité de Style, d' humeur, d' esprit, de caractère. "Avoir de l' inégalité dans l' humeur. _ Et au pluriel, avoir de grandes inégalités.
   Rem. Inégal peut précéder élégamment les substant.
   Des mois l' inégale courrière.
       Malherbe.
  Comment de nos soleils l' inégale clarté.
  S' abrège dans l' hiver, se prolonge en été.
       De Lille.
"L' inégal assemblage, etc. = Inégalité. Voy. DIFÉRENCE. Il s' emploie sans régime. Corneille lui fait régir la prép. à.
   Et l' inégalité de son destin au mien
   Ravaleroit son sang, sans élever le mien.
Ce régime n' est point d' usage.

INÉLÉGANCE


*INÉLÉGANCE, s. fém. INÉLÉGANT, ANTE, adj. Qui manque d' élégance. _ Bossuet a employé le substantif. "L' inelégance et l' irrégularité du langage. M. L' Ab. de Fontenai s' est servi de l' adjectif; mais il l' a mis en italique pour montrer qu' il le hazardait: "Une prose trop souvent inélégante. _ Celui-ci est dans Trév. sans remarque; et dans le Rich. Port. comme peu usité. L' Acad. ne met ni l' un ni l' autre.

INÉLIGIBLE


INÉLIGIBLE, adject. Qui ne peut être élu.

INÉNâRRABLE


INÉNâRRABLE, adj. [I-nénârable: 2e é fer. 3e lon. 4e dout.] Qui ne peut être raconté. Il ne se dit que dans certaines phrâses de l' Écritûre-Sainte. "St. Paul transporté au troisième Ciel, vit des chôses inénârrables. Voy. INEFFABLE.

INEPTE


INEPTE, adj. INEPTIE, s. f. [I-nèpte, nèpcî-e: 2e è moy. 3e lon. au 2d.] Inepte, qui n' a nulle aptitude à certaines chôses. Ineptie, absurdité, sotise, impertinence. "Il est inepte à tout."C' est l' homme du monde le plus inepte. Il ne dit que des inepties. = Suivant le P. Bouhours, l' adjectif ne se dit que dans le discours familier, et l' on se sert plus souvent d' ineptie. Cela est encôre vrai aujourd' hui, et le substantif est plus usité que l' adjectif; mais, ni l' un, ni l' autre ne sont du beau style. L' Acad. les met sans remarque. Les critiques emploient volontiers ces deux mots. "Le grand nombre d' inepties, qui se produisent tous les mois dans ce Journal, étoient un préjugé contre le mérite de ces Drames. Sabat. Trois siècles. = Rousseau dit d' Horace qu' il:
   Des sots Auteurs berue les vers ineptes:
   Nous instruisant par gracieux préceptes.
L' Ab. des Fontaines fait inepte substantif. "Quoi de plus capable de décourager et d' éteindre le vrai mérite, que de voir les titres, les honeurs, les emplois prodigués aux ineptes. = On voit dans Trév. l' adverbe Ineptement, d' une manière impertinente. On y dit qu' il est peu usité. L' Acad. ne le met point.

INÉPUISABLE


INÉPUISABLE, adj. [I-né-pui-zable: 2e é fer. 4e dout.] Qu' on ne peut tarir, épuiser. Il se dit au propre et au figuré. "Source d' eau inépuisable. "Fonds inépuisable de science. "Sujet, matière inépuisable, extrêmement abondans.
   Mais, pour les justes, tes faveurs
   Sont un trésor inépuisable.
       Le Franc.

INERTIE

INERTIE, s. fém. [Inêrcî-e 2e ê ouv. 3e lon.] Indolence, inaction. Ce mot a passé de la physique dans le langage comun. * M. Linguet a hazardé inerte. "L' enfance débile, la vieillesse presque aussi inerte, etc.

INESPÉRÉ


INESPÉRÉ, ÉE, adj. [2e è moy. 3e et 4eé fer.] Imprévu; à quoi on ne s' atendait pas. Bonheur inespéré; succès, évènement inespéré. Il ne se dit que du bien, et inatendu du mal. Voyez INATTENDU, = Inespéré suit toujours, et inespéré succês (Test. de Louv.) forme une inversion intolérable.

INESPÉRÉMENT


INESPÉRÉMENT, adv. [I-nèspéréman: 2e è moyen, 3e et 4e é fer.] Lorsqu' on s' y atend le moins. "Il lui est survenu inespérément une succession qui a rétabli ses afaires. _ Il ne se dit que des bons évènemens.

INESTIMABLE


INESTIMABLE, adj. [I-nèstimable, 2e è moy. pénult. dout.] Qu' on ne peut assez estimer, assez priser. Il ne se dit que des chôses. "C' est une chôse inestimable; d' un prix, d' une valeur inestimable.

INÉVITABLE


INÉVITABLE, adj. INÉVITABLEMENT, adv. [2e é fer. 5e e muet.] Ils se disent de ce qui ne se peut éviter. "Malheur inévitable "Fatale et inévitable nécessité. Chemin. "Inévitable destinée. Le P. Du Rivet. "Vous tomberez inévitablement dans ce malheur.

INEXACT


INEXACT, ACTE, adj. INEXACTITUDE, s. fém. On condamne ces deux mots dans le Dict. Gram. mais l' Acad. les aprouve, et ils sont assez bien établis aujourd' hui. Ils expriment un défaut d' exactitude. "Mémoires suspects et inexacts. Sabat. "Idées trop vagues, trop inexactes. J. J. Rouss. "Il y a bien de l' inexactitude dans cet ouvrage. Acad. = Dans le Dict. Hist. on a employé inexactement. "Il en a parlé inexactement.

INEXCUSABLE


INEXCUSABLE, adj. [Inèks-kuzable: 2e è moy. pénult. dout.] Qui ne peut être excusé. Il se dit des chôses et des persones: "Faûte inexcusable. "Le pécheur est inexcusable de ne penser pas à sa conversion dans l' adversité, et de n' en pas devenir meilleur. Chemin.

INEXÉCUTABLE


*INEXÉCUTABLE, adj. Qui ne peut être exécuté. "On prétendit dabord que sa musique étoit inexécutable. Dict. Hist. art. Rameau. "L' ordre étoit inexécutable. Ibid. Art. Soliman. = Ce mot n' est point dans les Dictionaires.

INEXÉCUTION


INEXÉCUTION, s. f. [I-nègzéku-cion: 2e è moyen. 3e é fer.] Défaut d' exécution. Il ne se dit que des contrats, des traités. "L' inexécution des traités. = * Un anonyme a dit inexécuté. "Si ce traité demeure inexécuté. C' est un néologisme.

INEXORABLE


INEXORABLE, adj. INEXORABLEMENT, adv. [I-nègzorable, rableman: 2e è moyen, 5e e muet.] Ils signifient, qui ne peut être fléchi, apaisé. "Il est inexorable: "Il refûse inexorablement ce qu' on lui demande. = L' adj. régit à mais non pas des pers. ce me semble. "Aurez-vous le coeur assez dur pour être inexorable à votre Roi. Télém. On dit inexorable aux prières, aux larmes, etc.

INEXPÉRIENCE


INEXPÉRIENCE, s. fém. INEXPÉRIMENTÉ, ÉE, adj. [I-nèks-péri-ance, ri--manté, té-e; 2e è moyen, 3e é fer. 5e lon. 6eé fer. aux deux derniers.] Ils expriment un manque d' expérience. "L' inexpérience d' un jeune homme. "Ceux qui avaient abusé de son inexpérience.
   L' inexpérience indocile
   Du compagnon de Paul Émile,
   Fit tout le succès d' Annibal.
       Rouss.
"Général, Chirurgien, etc. inexpérimenté. "Ceux qui sont nouveaux et inexpérimentés dans les voies de Dieu. De Saci. = Ces mots sont de la fin du siècle pâssé. L' Acad. ne les avait pas dabord admis: elle les a placés dans la dernière Édition sans remarque.

INEXPIABLE


INEXPIABLE, adj. Qui ne se peut expier. "Crime inexpiable.

INEXPLICABLE


INEXPLICABLE, INEXPRIMABLE, adj. Le 1er se dit de ce qu' on ne peut expliquer; et le 2d de ce qu' on ne peut exprimer. "Mystère inexplicable. "Joie, douleur inexprimable. = Inexplicable régit quelque--fois le datif. "Ils sont une énigme inexplicable à eux-mêmes. Mass.~ _ Cet illustre Orateur aplique cet adjectif aux persones. "Le monde, toujours inexplicable, a de tout tems attaché également de la honte, et au vice et à la vertu. _ On dit d' un homme qu' il est indéfinissable; mais je doute fort qu' on dise qu' il est inexplicable.

INEXPUGNABLE


INEXPUGNABLE, adj. [I-nèks-pug--nable; 2e è moyen, ne mouillez pas le g; pénult. dout.] Qui ne peut être pris d' assaut. "Fort, Ville inexpugnable. = Ce mot avait paru long-tems vieux, et n' être propre que du burlesque. Mais de bons Auteurs l' ont rajeuni et ennobli. "La ville de Derbent, du coté de la terre, paroît inexpugnable. Volt. "Cette ville superbe, (la Rochelle) jusqu' alors réputée inexpugnable. L' Ab. Royou, etc. L' Acad. avertit qu' il ne se dit guère que dans le style soutenu.

INEXTINGUIBLE


INEXTINGUIBLE, adj. [I-nèks-tein-ghi--ble: 2e è moyen, 3e lon.] Qui ne peut être éteint. "Feu, lampe inextinguible.

INEXTIRPABLE


*INEXTIRPABLE, adj. Qui ne peut être extirpé. Fléau honteux; destructeur inextirpable. Linguet. _ C' est un néologisme.

INEXTRICABLE


INEXTRICABLE, adj. [I-nèks-trikable: 2e è moy. pénult. dout.] Qui ne peut être démélé. "Labirinte inextricable. "Chaos inextricable de dificultés. Acad. "Dans un dédale inextricable. _ L' Acad. le met sans remarque. Cependant ce mot ne parait pas être encôre sorti du Palais, des Journaux et des discussions polémiques.

INFâILLIBILITÉ


INFâILLIBILITÉ, s. fém. INFâILLIBLE, adj. INFâILLIBLEMENT, adv. [l' ai n' y a pas le son de l' é; mais l' a y a son propre son, et l' i n' est là que pour faire mouiller les ll; Infâ-glibilité, glible, bleman.] Ils expriment deux sens; en parlant des chôses, certitude entière. "L' infaillibilité d' une règle; des Mathématiques, "Règle, vérité infâillible. "Succès, perte infâillible. "Cela arrivera infâilliblement. "Un jeune homme qui se livre aux Philosophes, le devient infâilliblement. L' Ab. Gauchat. = En parlant des persones; qui ne peut errer, ni tromper. "L' infâillibilité de l' Eglise. "Dieu est infâillible dans ses promesses. "Il n' y a aucun Auteur, aucun critique qui soit infâillible. = L' adverbe ne se dit point dans ce second sens.

INFAISABLE


INFAISABLE, adj. [Infézable: 2eé fer. 3e dout. Quelques-uns écrivent et prononcent infesable, 2e e muet.] Qui ne peut être fait. "La chôse est infaisable. Il n' est que du st. famil.

INFAMANT


INFAMANT, ANTE, adj. INFâME, adj. INFAMIE, s. fém. [2e lon. au 3e seulement; 3e lon. au 4e.] L' infamie est une flétrissûre notable à l' honeur, à la réputation, soit par la loi, soit par l' opinion publique. "Cela porte infamie; encourir note d' infamie. "Couvrir quelqu' un d' infamie. = Il se dit aussi des actions et des paroles infâmes ou injurieûses, et alors il peut se mettre au pluriel. "C' est une grande infamie de plaider contre sa promesse. "Il a fait mille infâmies. "Il lui a dit toute sorte d' infamies.
   Infamie, ignominie, oprobre (synon.) Suivant la force des termes, l' infamie ôte la~ réputation; l' ignominie souille le nom; l' oprobre soumet aux reproches, aux outrages. _ Les idées de honte et de blâme sont comunes à ces termes. L' infamie agrave ces idées par celles de décri, de flétrissûre; l' ignominie par celles d' avilissement, de turpitude; l' oprobre par celles de scandale, d' anathême. ROUB. Synon.
   INFâME, difamé, noté, flétri par la loi ou par l' opinion publique. "Gens infâmes. _ Subst. "C' est un infâme, une infâme. = En parlant des chôses: honteux, sordide. "Avarice infâme. "Action, comerce, trafic, infâme. = Par exagération, mal-propre, mal séant. "Logement, habit infâme.
   INFAMANT, ANTE, qui porte infamie. Arrêt infamant; Sentence infamante. "Paroles, injures infamantes. = Au Palais, on dit aussi infamation pour difamation.

INFANT


INFANT, ANTE, s. m. et fém. Ils ne se disent sérieûsement que des Princes et Princesses d' Espagne. _ Hors de-là, on ne dit le fém. que pour se moquer. "Me pardonnez vous d' avoir empêché votre frère d' épouser cette Infante. SÉV.

INFANTERIE


INFANTERIE, s. fém. [2e et 4e lon. 3e et dern. e muet.] Gens de guerre qui vont et combattent à pied. "Régiment, Colonel, compagnie, Capitaine d' Infanterie. "L' Infanterie énemie fut tâillée en pièces.

INFATIGABLE


INFATIGABLE, adj. INFATIGABLEMENT, adv. [Quelques Auteurs ou Imprimeurs ont écrit et écrivent encôre infatiguable, etc. aparemment à caûse de fatiguer; mais l' u est nécessaire à celui-ci, à caûse de l' e qui le suit; il est inutile à ceux-là où le g est suivi d' un a.] Infatigable, qui ne peut être lassé par la fatigue, par le travail. Il est infatigable; courrier, corps, ouvrier, esprit, Ministre infatigable. = Infatigablement, sans se lasser: "Attaché infatigablement à son travail.
   Bossuet et d' aûtre Êcrivains ont fait régir à infatigable la prép. à et l' infinitif. "Infatigable à disputer et à écrire. Boss. "Il étoit infatigable à expédier promptement les caûses. Hist. d' Angl. _ Je troûve ce régime fort bon.