Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI FLAQUE


FLAQUE, s. f. FLAQUÉE, s. f. FLAQUER, v. act. [Flake, ké-e, : 2e e muet au 1er, é fer. aux 2 aûtres, long au 2d.] Flaque, petite mâre d' eau. "Il y a des flaques d' eau dans ce chemin. = Flaquée, quantité d' eau qu' on jette avec impétuosité contre quelque chôse. "Le vent lui a jeté une flaquée d' eau par le visage. = Flaquer, jeter avec impétuosité de l' eau ou autre liqueur. "S' il trouve qu' on lui a doné trop de vin, il en flaque plus de la moitié au visage de celui qui est à sa droite. La Bruy. = Ce mot me parait bâs et populaire. L' Acad. se contente de dire qu' il est du style familier. = On dit dans le Dict. de Trév. qu' il ne se trouve dans aucun Dictionaire, (pas même dans Pomey) que Nicod seulement sur le mot flac, en cite un exemple: "Il la vous flacca-là.

FLASQUE


FLASQUE, adj. [Flas-ke: 2e e muet.] Mou et sans force. "Un grand homme flasque. "Le chaud m' a rendu flasque. = Rousseau l' a employé au figuré. Il se fait dire par les Mûses. "C' est par nos soins que ton esprit a de bonne heure apris.
   À~ distinguer des solides écrits.
   Ce vain amâs d' antithèses pointues.
   D' expressions flasques et rebatues.

FLATTER


FLATTER, ou FLATER, v. act. [Flaté: 2e é fer.] 1°. Louer excessivement dans le dessein de plaire, de séduire. "Flater les Grands. "Nous n' aimons que ceux qui nous flatent. "Ce Peintre l' a flatée; il l' a peinte plus belle qu' elle n' est. = 2°. Excuser par une mauvaise complaisance. "Flater les passions, les défauts de ses amis: flater le vice. = 3°. Tromper en déguisant la vérité. "Le Médecin flate ce malade. "Ne me flatez pas. "Dites-moi sans me flater ce que vous pensez de cet ouvrage. "Ce malade, ce plaideur se flate, etc.
   Soit dit, sans me flater, sans vanité.
   Si feu mon père.
   Sois dit, sans me flater, avait eu mon coup-d' oeuil,
   Jamais je n'~ eusse~ été Madame de Limeuil.
       Barthe.
= 4°. Traiter avec trop de douceur. Flater une plaie. "On ne guérit point les grands maux en les flatant. Cela est vrai dans le moral, comme dans le physique. = 5°. Caresser: flater un enfant; un chien; un cheval avec la main. "Chien qui flate son maître. = 6°. Flater de... faire espérer. "On le flate, ou il se flate d' un succès complet, de gâgner son procès. _ Se flater, se persuader. "Il se flate qu' on aura besoin de lui. "Il s' en est toujours flaté. = 7°. Délecter. "Musique qui flate l' oreille; vin qui flate le goût. "Cela flate l' imagination, les sens. _ Flater sa douleur, son ennui, en adoucir le sentiment.
   Rem. 1°. La prép. de, que régit flater, ne doit s' employer qu' avec les noms des chôses qu' on nous fait espérer. Voy. n°. 6°. Ce vers de Boileau me paraît donc répréhensible.
   Vînt flater le péché de discours imposteurs.
L' usage veut en cet endroit, par des discours imposteurs: Flater, y a le sens marqué au n°. 2°. _ Voltaire a fait la même faûte.
   Je m' entendais flater de cet auguste voix,
   Dont tant de Souverains ont adoré les lois.
Il aurait pu dire, sans déranger le vers.
   Je m' entendais flater par cette auguste voix.
De lui a paru plus doux que par, et il a sacrifié la régularité à l' harmonie. Voy. DE.
   2°. Se flater que ou de a le sens d' espérer. Un Auteur moderne lui done un aûtre sens que l' usage n' admet pas. "Ce Seigneur se flatoit de l' avoir dans son Régiment. Vous croiriez que ce Seigneur espérait de l' avoir dans son Régiment: ce n' est point cela. L' Auteur veut dire que le Colonel étoit flaté, se croyoit heureux de l' avoir, etc. _ Le P. La Ruë lui a doné, à peu près, le même sens. "Si le monde aprouve votre obéissance, ne vous en flatez pas; c. à. d. n' en tirez pas vanité. Ne vous en flatez pas, signifie ne le croyez pas. Ainsi, il y a un contresens dans cette phrâse. = M. Marmontel fait dire à une Dame; je me flate (c. à. d. j' aime à croire) d' être née pour rendre heureux un homme de bien. _ C' est le vrai sens de ce mot. = Se flater que avec le futur, c' est donc espérer que: se flater de avec l' infinitif, c' est avoir la présomption~, la persuasion de, etc. se persuader que, etc. = Remarquez enfin que, dans ce sens même, se flater régit que, lorsque le verbe régi ne se raporte pas au sujet de la phrâse, et de lorsqu' il s' y raporte: "Je me flate que vous viendrez: je me flate d' être aprouvé de vous. = Mais il n' a de régime des verbes qu' avec le pron. pers. et étant employé comme réciproque. "On dit, je me flate d' obtenir ou, que j' obtiendrai: On ne dit pas, vous me flatez que j' obtiendrai, ou d' obtenir. Il faut dire, vous me faites espérer d' obtenir, ou, que j' obtiendrai. "Nous devons craindre que notre vanité ne nous flate souvent de pouvoir parvenir à des conaissances, qui ne sont pas faites pour nous. Fontenelle. Je voudrais dire, que, séduits par notre vanité, nous ne nous flations de pouvoir, etc. _ L' actif se dit avec le régime des noms. "Flater le pécheur de l' impunité: la lui faire espérer.
   On dit, proverbialement, flater le dé, ne pas parler ou agir franchement. _ Flater le chien, jusqu' à ce que l' on soit aux pierres: faire bonne mine à certaines gens, jusqu' à ce qu' on puisse leur résister.
   *FLATER, s. m. Malherbe l' a employé:
   Les Muses hautaines et braves.
   Tiennent le flater odieux.
On dit, la flaterie.

FLATTERIE


FLATTERIE ou FLATERIE, s. f. FLATEUR, EûSE, adj. FLATEûSEMENT, adv. [2e e muet au 1er, lon. aux 2 dern. teûze, teû-zeman.] Flaterie, est une louange faûsse, donée dans le dessein de se rendre agréable. Flateur, qui loûe avec excès. Flateûsement, d' une manière flateûse. "Flaterie grossière ou délicate. Dire quelque chôse par flaterie. Parler sans flaterie. Je hais la flaterie. _ "Amis flateurs, discours, langage flateur. Il a toujours quelque chôse de flateur (d' obligeant) à dire. Manières flateûses, douces et insinuantes. _ Subst. "Lâche flateur, c' est un flateur à gages. "Je hais les flateurs. "Il n' y a pas loin de la mauvaise foi du flateur à celle du rebelle. Massill. _ "Parler flateûsement.
   REM. 1°. Flateur, se dit élégamment des chôses qui donent une agréable espérance ou causent un honête plaisir. "La flateûse espérance, une flateûse image. "Les charmes flateurs d' une éloquence douce et insinuante.
   Jamais un mot flateur n' est sorti de sa bouche.
       Barthe.
2°. Corneille done à flater le sens de favoriser et à flaterie celui de faveur, bonheur.
   La fortune me flate assez pour m' en louer.
   Mon père est gouverneur de toute la Syrie,
   Et comme si c' étoit trop peu de flaterie;
   Moi-même elle m' embrasse et vient de me doner,
   Tout jeune que je suis, l' Égypte à gouverner.
       Théodore.
On dirait encôre aujourd' hui que la fortune nous flate; mais on ne dirait pas qu' elle nous embrasse, et que ses faveurs sont des flateries.

FLATUEUX


FLATUEUX, EûSE, adj. FLATUOSITÉ, s. f. [Flatu-eû, eû-ze, ozité, 3e lon. aux deux premiers.] Venteux. Vents dans le corps. "Les légumes sont flatueux; ils causent des flatuosités. _ Dans le discours ordinaire ces mots ont l' air précieux et sentent l' afectation.

FLÉAU


FLÉAU, s. m. [Flé-o, et non pas Flo: celui-ci est un gasconisme: 1re é fer. 2e dout. au sing. lon. au plur. fléaux.] 1°. Instrument, qui est composé de deux bâtons d' inégale grandeur, atachés l' un au bout de l' aûtre avec des courroies, et qui sert à batre le blé. _ Au figuré, il se dit des maux que Dieu envoie aux homme pour les châtier. "La guerre est un terrible fléau. "La peste et la famine sont des fléaux.
   Sur ces coeurs durs et perfides,
   Il épuise ses fléaux.
       Le Franc.
= On le dit des persones. Atila s' apelait le fléau de Dieu. "Cet enfant est le fléau de son père, cette femme de son mari, etc. _ On l' a dit des critiques. "Les censeurs de Boileau devraient faire réflexion qu' en étant le fléau des Auteurs, il fut toujours l' ami de la vertu. Le Chev. des Sabl.
   2°. Verge de fer où sont atachés les deux bassins d' une balance. = 3°. Barre de fer qu' on met au derrière des portes cochères.

FLèCHE


FLèCHE, s. fém. [1reè moy. 2e e muet.] 1°. Trait qui se décoche avec un arc ou une arbalète. "Tirer une flèche "Il fendit l' air comme une flèche décochée avec violence. Le Sage. _ Fig. "Les flèches de l' Amour. Voy. BOIS. = 2°. Longue pièce de bois cambrée, qui joint le train de derrière d' un carrosse, avec celui du devant. = 3°. Partie du clocher qui en fait la couvertûre, et qui est en pyramide. On dit aussi aiguille. = 4°. Flèche ou lame au Trictrac, les figures coniques sur lesquelles on place les dames.

FLÉCHIR


FLÉCHIR, v. act. et neut. FLÉCHISSEMENT, s. m. [Fléchi, chiceman: 1re é fer. 3e e muet.] Fléchir, 1°. ployer, courber; fléchir le genou, ou les genoux. _ V. n. "Que tout genou fléchisse au nom de JÉSUS. "Fléchir sous le joug. "Tout le monde fléchissoit devant lui. = 2°. Adoucir, atendrir. "Rien ne peut le fléchir. "Se laisser fléchir aux ou par les prières. "Fléchir le courroux, le dûreté d' un Tyran. = V. neut. 3°. Cesser de persister, céder par complaisance ou par foiblesse. "Il fléchit aisément. "Il ne sait ce que c' est que de fléchir. * Il se dit sans régime: Molière lui done celui de céder. "Il faut fléchir au temps.
   Rem. 1°. Suivant le P. Bouhours, ce verbe ne se dit point dans le propre tout pur. On dit bien, fléchir un homme; fléchir la colère de quelqu' un, mais on ne dit pas fléchir un arbre; fléchir un bâton. Et quand on dit fléchir le genou, cela signifie adorer, et non pas simplement plier le genou devant l' idole. L' Acad. dit pourtant fléchir le genou, ou les genoux. Il est vrai qu' elle avertit que ce verbe ne se dit que dans ces deux phrâses, mais elle ne dit pas si elles sont au propre ou au figuré. L' autorité de l' Acad. est très-grande; mais l' opinion du P. Bouhours me parait fondée... Richelet le dit neutralement au propre: Ce bois ne fléchit point. = M. Pascal a dit. "Ce n' est pas à la règle à se fléchir, pour convenir au sujet. J' aimerais mieux dire, à se plier.
   2°. Le P. d' Orléans emploie faire fléchir avec la prép. à et l' infinitif, dans le sens de faire consentir, déterminer. "L' un et l' aûtre firent fléchir enfin le Roi de France à négocier. Ni l' expression, ni le régime ne sont suivant l' usage.
   FLÉCHISSEMENT, action de fléchir. "Le fléchissement des genoux devant les idoles est un crime d' idolâtrie. _ Il ne se dit que dans cette ocasion, et pour l' action de fléchir les genoux.

FLèGME


FLèGME, s. m. FLèGMATIQUE, adj. [Flègme, matike: 2e è moy. dern. e muet.] Flègme est 1°. une des quatre humeurs, qui compôsent la masse du sang de l' animal, et qui est froide et humide. = 2°. Pituite épaisse que l' on jète en crachant. "Jeter beaucoup de flègmes. _ En ce sens, il se dit ordinairement au pluriel. = 3°. Qualité d' un esprit posé, qui se possède. "Avoir du flègme; un grand flègme. "Son flègme démonte tout le monde. Ce flègme pourra-t-il ne s' échaufer de rien? Mol.
   FLèGMATIQUE, au propre, pituiteux, qui abonde en flègme. Homme, femme, flègmatique: tempérament flègmatique. = Au figuré, qui a du sang froid. "Il est singulièrement flègmatique. = S. m. "C' est un flègmatique.
   Rem. Richelet met flegme ou phlegme. On n' écrit aujourd' hui que le 1er.

FLÉTRI


FLÉTRI, IE, adj. Voy. FANÉ.

FLÉTRIR


FLÉTRIR, v. act. FLÉTRISSûRE, s. f. [1re é fer. pénult. lon. au second.] Flétrir, c' est faner, sécher, ôter la couleur, la fraîcheur. "Le hâle flétrit les fleurs; le temps, l' âge flétrit la beauté. "Les fleurs se flétrissent bientôt, sont bientôt flétries. "Sa beauté comence à se flétrir.
   Mon corps, victime infortunée,
   Du feu dévorant qu' il nourrit,
   Privé d' alimens, se flétrit,
   Comme l' herbe aux champs moissonée.
       Le Franc.
= Figurément, déshonorer: les discours imprudens flétrissent plus souvent la réputation que les discours malins. = Flétrir le coeur à... Chagriner, décourager: "Ce reproche lui a flétri le coeur.
   Flétrissûre se dit au propre et au figuré. "La flétrissûre des fleurs, des fruits, de la beauté. _ Tache à la réputation. "C' est une flétrissûre à un Militaire d' avoir fui dans un combat.

FLEUR


FLEUR, s. f. [Monos. dout. au sing. long. au pluriel. Fleurs.] Ce qui vient sur les plantes et sur les arbres avant la graine ou le fruit. "Fleur de pêcher, de jasmin, de pois. "Les blés sont en fleur. "Bouquet, guirlande de fleurs. = Il est fort usité au figuré. "La fleur de l' âge, de la beauté. "Cette première fleur de réputation, qui répand son odeur sur tout le reste d' une belle vie. Avoir la fleur d' une chôse; en avoir la première vûe, le premier usage. = La fleur de... l' élite. "C' étoit la fleur de la jeune noblesse, que le Roi avoit emmenée de Crète. Télém. = En style familier, on dit d' un homme qui a beaucoup de valeur et de probité, c' est la fine fleur de chevalerie. _ Plus familièrement encôre, on dit de toute persone, qu' on veut louer, c' est la fleur des pois.
   Rem. On dit d' un homme, qu' il est mort à la fleur de l' âge, à la fleur de ses ans, fort jeune, et non pas dans sa fleur, comme dit Mr. Laignelot dans sa Tragédie d' Agis.
   Pourquoi cette sombre douleur?
   Pleureroit-on mon fils, moissoné dans sa fleur?
   Dans le Journ. de Mons. cette expression est en italique; critique indirecte.
   À~ fleur de... adv. Au niveau de... à fleur de terre: à fleur d' eau. Cette balle a passé à fleur de corde. = Figurément (st. famil.) afaire qui a passé à fleur de corde, qui n' a eu que les sufrages absolument nécessaires.

FLEURAISON


FLEURAISON, s. f. [Fleurè-zon: 2eè moy.] C' est la formation des fleurs, et la saison dans laquelle les plantes fleurissent.

FLEURDELISÉ


FLEURDELISÉ, ÉE, adj. [Fleur-delizé, zé-e: 2e e muet: 4e é fer.] 1°. Couvert de fleur de lis. "Baton fleurdelisé. = 2°. Qui ressemble aux fleurs de lis des armoiries. "Fleur fleurdelisée.

FLEURER


FLEURER, v. neut. Répandre, exhaler une odeur. "Cela fleure bon. _ Proverbialement: cela fleure comme baûme: c' est une afaire qui paraît bonne et avantageûse. _ Voy. FLAIRER.

FLEURET


FLEURET, s. m. FLEURETTE, s. f. [Fleu--rè, rète: 2e è moyen.] Fleuret, 1°. espèce de fil fait de la matière la plus grossière de la soie. _ C' est aussi le ruban fait de ce même fil. = 2°. Épée sans pointe et sans tranchant, dont on se sert pour aprendre à faire des armes.
   FLEURETTE, au propre, petite fleur. Il n' est usité que dans la poésie pastorale. = Au figuré (st. familier) cajolerie. "Dire ou conter des fleurettes. Elle aime la fleurette, ou les fleurettes. "Diseur ou conteur de fleurettes.

FLEURI


FLEURI, IE, adj. [Fleu-ri, ri-e: 2e lon. au 2d.] Au propre, qui est en fleur. "Arbre fleuri: les prés fleuris. = Au figuré; teint fleuri, qui a de la fraîcheur et de l' éclat. "Discours fleuri, style fleuri, rempli de fleurs d' éloquence. _ Il se prend ordinairement en mauvaise part, en parlant du style et du discours.

FLEURIR


FLEURIR, v. n. Pousser de la fleur, être en fleur. "L' amandier est un des arbres qui fleurissent le plutôt. = Fig. être en crédit, en vogue. "Les Sciences, les beaux Arts ont toujours fleuri sous les grands Princes.
   Rem. Dans le propre, on dit fleurissant, et dans le figuré florissant. "Les prés fleurissans, les plantes fleurissantes. _ "Un empire florissant, une armée florissante.
   Ce verbe a d' autres temps où l' on emploie plutôt l' o que l' eu dans le figuré: "Un tel homme florissait sous un tel règne: l' art militaire florissait en un tel temps. Dans le propre on dit fleurissait: "Cet arbre fleurissait tous les ans deux fois, et non pas florissait.

FLEURISTE


FLEURISTE, s. m. 1°. Qui aime les fleurs, qui prend plaisir à les cultiver. "C' est un fleuriste, un grand fleuriste. = 2°. Qui s' adone à peindre les fleurs. "Ce Peintre est un excellent fleuriste. = 3°. Adj. m. "Jardin fleuriste. MARM. _ L' Acad. ne le met pas comme adjectif.

FLEURON


FLEURON, s. m. [Fleu-ron: 1re dout.] Espèce de représentation de fleurs, servant d' ornement. "Les fleurons d' une courone. "Les fleurons, que les Imprimeurs mettent au comencement et à la fin des livres, des chapitres, etc. = Fig. "C' est le plus beau fleuron de sa courone, un de ses plus beaux privilèges, un de ses plus grands revenus. _ Cette expression ne pâsse pas le style médiocre.

FLEûVE


FLEûVE, s. m. [1re lon. 2ee muet.] Grande rivière. "Fleûve profond, rapide, etc. "Le bord, la rive, le cours, le canal, le lit, le courant, l' embouchûre d' un fleuve.
   REM. 1°. Rivière: Fleûve. Le 1er se dit des grandes et des petites rivières; le 2d ne se dit que des grandes, si ce n' est qu' on parle du Dieu de la rivière; car alors on dit fleûve. Ménage fait encore remarquer que rivière n' est pas poétique, (il entend parler de la haute poésie) et que fleûve n' est pas du discours familier.
   2°. Quelques-un établissent cette distinction entre fleûve et rivière, que le 1er ne se dit que des rivières qui se jettent immédiatement dans la mer, et l' autre de celles qui ont leur embouchure dans d' autres rivières. La Saone est une rivière; le Rhône est un fleûve. _ Mais il est des rivières qui se jètent dans la mer, qui méritent à peine le nom de ruisseau. Telle est l' Huveaune à Marseille. La distinction de Ménage est donc plus juste, et il faut s' y tenir.
   3°. Les fleûves, qui sont du genre masculin, exigent du, de l' (c. à. d. l' art. défini) ceux du genre féminin la prép. de. (ou l' art. indéfini.) "On dit les rives du Tibre, du Tage, du Danube, du Rhône, etc. et les rives de Seine, de Loire, de Marne, etc. Mén. _ Mr. Brossete était du même avis, et il représenta à Boileau, qui avoit dit:
   De Stix et d' Achéron peindre les noirs torrens;
que du Stix, de l' Achéron serait plus régulier. Mais Boileau, qui avait dit, dans un aûtre endroit.
   Quel plaisir de te suivre aux rives du scamandre.
soutînt toujours que de Stix et d' Achéron était plus poétique, jusqu' à reprocher à Mr. Brossete qu' il avait l' oreille un peu prosaïque, et à traiter cette manière, qu' il avait préférée, d' un de ces agrémens, qui sont des mystères qu' Apollon n' enseigne qu' à ceux, qui sont véritablement initiés dans son art. Il me semble qu' il n' y a pas là grand mystère. = La Monnoie justifie Boileau sur ce que Stix et Achéron sont regardés comme des Dieux, que Stix est femelle en grec et en latin et aûtres semblables raisons. Il troûve même que rives de Scamandre a quelque chôse de plus noble et de plus poétique que, du Scamandre, et Boileau en éfet avait traité cette dernière version de faûte d' impression. La Monnoie nous renvoie d' ailleurs à l' oreille, qui est d' une grande autorité en cette matière, et il ajoute que qui l' a bonne peut et doit la consulter. Fort bien! mais plus une oreille sera bonne et exercée, plus elle sera choquée de ce qui est contre l' usage.
   M. MARIN pense qu' on dit toujours les rives de la Seine, de la Loire, etc. et non pas de Seine, de Loire, etc.

FLEXIBILITÉ


FLEXIBILITÉ, s. f. FLEXBLE, adj. [Flèkcibilité, cible: 1re è moy. dern. é fer. au 1er, e muet au 2d.] Flexible, souple, qui se plie aisément. _ Il se dit au propre et au figuré. "Un osier flexible, une canne flexible. "Un esprit flexible, une voix flexible. _ Inflexible, son contraire, ne se dit qu' au figuré; et il se prend en bonne et mauvaise part. "Un Juge inflexible. "Une âme inflexible. BOUH.
   FLEXIBILITÉ, qualité de ce qui est flexible: "La flexibilité de l' osier, de la voix, de l' esprit.

FLEXION


FLEXION, s. f. [Flèk-cion: 1reè moy.] État de ce qui est fléchi. "La flexion d' un ressort, d' une poûtre, etc. Acad. Ce mot est peu usité; il est pourtant nécessaire, et nous n' avons pas d' aûtre mot pour signifier ce qu' il exprime. = Son plus grand usage est en Anatomie. "Flexion simple ou composée.

FLIBOT


FLIBOT, s. m. FLIBUSTIER, s. m. [Fli--bo, bus-tié: dern. é fer.] Flibot, est une sorte de petit vaisseau. = Flibustier, sorte de Pirates de l' Amérique, fameux dans le siecle pâssé, et qui étaient un ramassis de toutes les nations de l' Europe. = On ne doit point le dire des Pirates des anciens temps. * "Il envoya ces émissaires en Norvège pour exciter les Flibustiers de ce Royaume à prendre les armes. Hist. d' Angl. 1066. _ C' est comme si l' on parlait de grenadiers, de dragons, de housards, en parlant des armées romaines.

FLOC


*FLOC ou FLOCON, s. m. Le 1er est peu usité; et le Dict. de Trév., qui les met tous deux ne done d' exemple que du 2d. "Flocon (petites toufes) de laine, de soie. "La neige tombait à gros flocons.
   FLORèS, terme emprunté du latin: il n' a d' usage que dans cette expression: faire florès; faire une dépense d' éclat, ou briller de quelque autre manière. "Quand il a de l' argent il fait florès; ce qui se dit en critiquant et en se moquant. "Ce Prédicateur fait florès; il est~ fort couru. St. famil.

FLORIN


FLORIN, s. m. [Flo-rein.] Pièce de Monaie, qui tire son nom, à ce qu' on prétend, de ce que les premiers furent batus à Florence, et de ce qu' ils étaient marqué d' une fleur. = C' est aussi une monaie de compte qui est de diverse valeur, suivant les pays où elle a cours.

FLORIR


*FLORIR, v. n. Il n' est usité qu' au participe actif et à l' imparfait de l' indicatif. Voy. FLEURIR. * Les Marchands qui y font florir le comerce. Sc. des Méd. On dit aujourd' hui fleurir, quoiqu' on dise le comerce florissait, qu' il était florissant en tel tems.

FLORISSANT


FLORISSANT, ANTE, adj. Qui est en honeur, en crédit, en vogue. Voy. FLEURIR. = Au masc. il se plait à suivre le nom qu' il modifie; au fém. il aime à le précéder. "Un empire florissant est mieux que, florissant empire, mais florissante jeunesse sone mieux que jeunesse, florissante.
   Vous, filles de sion, florissante jeunesse.,
   Joignez-vous à nos chants sacrés.
       Rouss.
REM. * Leibnitz dit, fleurissant empire; le Gendre, état fleurissant; et M. Astruc, le fleurissant commerce d' Amsterdam. _ Dans ces trois phrâses, on doit dire florissant. Celui-ci ne se dit qu' au figuré, l' aûtre ne s' emploie qu' au propre.

FLOT


FLOT, s. m. [le t ne se prononce point.] 1°. Onde, vague. Voy. VAGUE. "Les flots de la mer; fendre les flots. = Ce vaisseau est à flot; on l' a mis à flot; il est soutenu sur l' eau, il a assez d' eau pour floter. = 2°. Le flux et reflux, la marée. "Le flot vient jusque là. = 3°. Fig. Foule:
   Cotin à ses sermons traînant toute la terre,
   Fend les flots d' Auditeurs, pour aller à sa chaire.
"Il passa à travers les flots d' un peuple immense assemblé pour le voir. = Grande quantité; des flots de sang: Le sang coule à grands flots.
   Et les chiens tremperont leurs langues altérées,
   Dans les flots de leur sang.
       Le Franc.
À~ FLOTS, adv. Il se dit au propre et au figuré. "Les pluies tombent à flots sur la Zone-Torride. Pluche. = On dit plus ordinairement à grands flots. = M. de St. Ange aplique assez mal cette expression adverbiale.
   Et d' un miel savoureux la liqueur précieuse.
   Distilloit à flots d' or des branches de l' yeuse.
Distiller, c' est tomber goutte à goutte; et comment donc le miel pouvoit-il distiller à grands flots? ANN. LITT. = M. Linguet dit par flots. "On verse le sang par flots. _ C' est un néologisme. = À~ flots, au figuré; en foule. "On les a vus acourir à flots tumultueux. Thomas.

FLOTTABLE


FLOTTABLE, ou FLOTABLE, adj. FLOTAGE, s. m. FLOTAISON, s. f. FLOTTANT, ou FLOTANT, ANTE, adj. [2e dout. au 1er, lon. aux 2 dern. è moy. au 3e; flotèzon] Flotable, se dit des ruisseaux et des rivières sur lesquels on peut floter. = Flotage, est la conduite des bois sur l' eau, lorsqu' on le fait floter. = Flotaison, la partie du vaisseau qui est à fleur d' eau. = Flotant, au propre, qui flote. "Arbres flotans, \ïles flotantes. _ Au figuré, incertain, irrésolu. "Esprit flotant.
   Son coeur toujours flotant entre mille embarras;
   Ne sait ni ce qu' il veut, ni ce qu' il ne veut pas.
       Boil.
Rem. Cet adjectif suit ordinairement le substantif. Le fém. peut précéder en vers, et dans la prose poétique.
   Nos flotantes forêts couvrent le sein de l' onde.
       L. Racine.

FLOTTE


FLOTTE, ou FLOTE, s. f. FLOTEMENT, s. m. FLOTER, v. n. [2e e muet au 1er et au 2d, é fer. au dern.] Flote, nombre considérable de vaisseaux, qui vont ensemble. La flote des Indes; la flote d' Espagne. = Flotement ne se dit que du mouvement d' ondulation que fait en marchant le front d' une troupe, et qui la dérange de la ligne droite. = Floter, être porté sur l' eau. "On voyoit floter çà et là des débris. _ Fig. Chanceler, être irrésolu. "Floter entre diverses pensées, entre divers partis, entre la crainte et l' espérance.
   Votre raison, qui n' a jamais floté
   Que dans le trouble et dans l' obscurité.
   FLOTÉ, ÉE, adj. Bois floté, qui est venu à flot par la rivière.

FLOTTILLE


FLOTTILLE, ou FLOTILLE, s. f. [Floti--glie: mouillez les ll; dern. e muet.] Petite flote, que le Roi d' Espagne envoie en Amérique.

FLOU


FLOU, adv. [Monosyllabe.] Peindre flou, d' une manière tendre, légère. Il se dit par oposition à la peintûre dûre et sèche.

FLOUET


*FLOUET, ETTE, adj. Quelques-uns disent fluet; l' Acad. met l' un et l' aûtre, disait-on, dans le Dict. de Trév. _ Aujourd' hui l' Acad. ne dit que fluet; et Trév. y renvoie. Voy. FLUET.

FLUCTUATION


FLUCTUATION, s. f. [Fluktu-a-cion.] C' est, en Chirurgie, le moûvement d' un fluide épanché dans quelque tumeur, ou dans quelque partie du corps humain. _ Depuis quelque tems on l' emploie au figuré. "Entretenuë dans une fluctuation continuelle, la Langue finiroit par s' apauvrir, ou par se dessécher, en se polissant, si les gens de Lettres et les bons Auteurs ne concouroient à la fixer et à l' enrichir. L' Abé Arnaud. "Les fluctuations qui surviènent nécessairement dans le prix des efets négociables. Necker. "Il y a dans le cours de nos idées, je ne sais quelle fluctuation bisârre, qui souvent éloigne de notre esprit les aperçus, qui sembloient devoir en être le plus près. Id.

FLUER


FLUER, v. n. [Flu-é 2eé fer. devant l' e muet, l' u est long: il flûe: au futur et au conditionel, cet e muet ne se fait pas sentir. "Il flûera, flûeroit: prononc. flûra, flûrè.] Couler. Découler. "La mer flûe et reflûe. "Les humeurs qui flûent du cerveau. "Sa plaie flûe toujours. Fistule lacrymale, qui cesse de fluer. = Il ne se dit que dans ces sortes de phrâses.

FLUET


FLUET, ETTE, adj. [flu-è, ète; 2e è moy.] Délicat, de foible complexion. "Il est fluet, elle est fluette; visage fluet, mine fluette. "Complexion fluette.

FLUIDE


FLUIDE, adj. FLUIDITÉ, s. f. [Flu--ide, idité: dern. e muet au 1er, é fer. au 2d.] Fluide, qui coule aisément. Fluidité, qualité de ce qui est fluide. "L' air et l' eau sont fluides; et substantivement, sont des fluides. "Ce sang est trop épais; il faut tâcher de le rendre plus fluide. "La fluidité de l' eau, du sang, des humeurs.

FLûTE


FLûTE, s. f. [1re lon. 2ee muet.] 1°. Instrument de Musique qui est à vent, percé de plusieurs trous, et qu' on embouche. Il y en a de deux espèces. "Flûte douce ou à bec. "Flûte allemande ou traversière. _ On apèle proverbialement, des jambes maigres, des flûtes. _ Leurs flûtes ne s' acordent pas: Ils sont toujours en diférend. = Ce qui vient par la flûte s' en va par le tambour, ou retourne au tambour; ce qui est mal aquis ne profite pas. _ Ajuster ses Flûtes, préparer les moyens de faire réussir une afaire. _ Il y a de l' ordure à sa flûte: il y a fort à redire à sa conduite. = 2°. Sorte de navire à grôs ventre.

FLUTÉ


FLUTÉ, ÉE, adj. FLUTER, v. n. FLUTEUR, EUSE, s. m. et f. [L' Acad. met un acc. circ. sur l' u; mais cet u n' est long que devant l' e muet. Il Flûte, flûtera. Ce n' est donc qu' alors qu' on doit mettre l' accent sur l' u.] Fluté ne se dit qu' avec sons et voix. Doux, agréable comme le son de la flûte. "Voix flutée, sons flutés. = Fluter, jouer de la flûte. Il ne se dit que par mépris. "Il ne fait que fluter toute la journée. _ Boire. "Il aime à fluter. _ Il est populaire. = Fluteur ne se dit aussi que par mépris. Qui joue de la flûte. "C' est un flûteur, un mauvais flûteur. _ On le dit rarement au féminin, parce qu' il est peu de femmes qui jouent de la flûte.

FLUX


FLUX, s. m. [Flu, et devant une voyelle fluz.] 1°. Moûvement réglé de la mer vers le rivage à certaines heures du jour. "Le flux va jusqu' à un tel endroit. "Le flux et le reflux. = 2°. Écoulement des excrémens devenus trop fluides. "Il a le flux de ventre. "Il lui a pris un flux de ventre. "Flux de sang. "Flux hépatique, dévoiement provenant de ce que le foie ne fait pas bien ses fonctions. = Flux de bouche. "Flux de paroles. "Comment ce flux d' éloquence ne donne-t-il pas du ressort à votre langue? Coyer. = Flux de bourse, folles dépenses. Et flux de larmes, style burlesque.
   REM. Malherbe écrit flus; le Dict. de Trév. met flus ou flux. Dans les dernières éditions, on ne met que le dernier.
   Rousseau emploie figurément le flux et le reflux.
   L' âme d' un vrai héros, tranquille, courageuse,
   Sait, comme il faut, soufrir d' une vie orageuse
   Le flux et le reflux.
C. à. d. les biens et les maux.

FLUXION


FLUXION, s. f. FLUXIONAIRE, adj. [fluk-cion, cio-nère; 3e è moy. et long. 4e e muet.] Fluxion, écoulement d' humeurs malignes. "Fluxion sur le visage, sur la poitrine, ou de poitrine, etc. Fluxionaire, qui est sujet à des fluxions.

FOETUS


FOETUS OU FÉTUS, s. m. [Le 1er est le plus usité: on prononce l' s.] Il se dit en général, de l' animal, et plus particulièrement, de l' enfant formé dans le ventre de la mère.

FOI


FOI, s. f. [Foa, monos. dout.] 1°. La 1re des vertus théologales. "La Foi, l' Espérance, la Charité. "Acte de Foi. "Être ferme en la Foi. = 2°. Religion, dogme. "Article de foi. "Renoncer à la foi; renier la foi. "Profession, ou confession de foi. "Des passions naissantes avoient seules obscurci ma foi, et j' eus bientôt achevé d' en secouer le joug, pour être coupable avec moins de remords. Le Comte de Valmont. "Foi Divine, qui est fondée sur la révélation. Foi humaine, qui est fondée sur l' autorité des hommes. = 3°. Probité, fidélité à garder sa parole: "Homme sans foi, ou de peu de foi. "Doner, garder sa foi. "Manquer de foi, violer sa foi. "Foi de gentilhomme. "Être de bonne ou de mauvaise foi. "Être dans la bonne foi; faire une chose dans la bonne foi. "Possesseur de bonne ou de mauvaise foi. "Foi conjugale. "La foi des traités, etc. = 4°. Croyance. "Ajouter foi à quelque chôse, à quelqu' un. "Homme digne de foi. = 5°. Témoignage, assurance. "Faire foi d' une chôse, en faire foi.
  De ces deux vérités deux Fâbles feront foi.
      La Font.
"En foi de quoi j' ai signé, etc.
REM. 1°. Foi pris absolument, ne se dit que de la 1re des vertus théologales. "Il est rempli de foi: "Sa foi est inébranlable.
   Cultivez vos amis, soyez homme de foi.
       Boil.
On dit, homme sans foi, ou de peu de foi. On ne dit point, homme de foi: l' usage admet l' un et rejète l' autre. Rousseau a imité Boileau.
   D' une foi mâle revêtu...
   Sa propre vertu le condamne
   À~ s' immoler à sa vertu.
Sans ce qui précède, on croirait que le Poète parle de la foi chrétienne = Le P. Follard dit aussi dans Thémistocle.
   Xerxès est plein de foi, mais quel complot sinistre
   Sous un Roi chargé d' ans, n' ôse pas un Ministre?
Je n' oserais condamner ces expressions dans les Poètes, mais on ne doit pas les imiter dans la prôse.
   Au Palais, foi se dit au nominatif sans article. "Foi doit être ajoutée à un procês-verbal juridique. _ On dirait, hors du Palais, on doit ajouter foi, etc.
   FOI entre dans un grand nombre d' expressions, presque toutes du style familier ou médiocre. = N' avoir pas foi à... ne pas y croire. "Je n' ai pas de foi à votre laideur. Sév. Je ne saurois croire que vous soyiez devenue laide, comme vous le dites. _ Je crois qu' on doit toujours dire, n' avoir pas foi, et suprimer la prép. de.
   À~ sa vertu je n' ai plus grande foi
   Qu' à son esprit.       Rouss.
En prôse on dirait, je n' ai pas plus foi, ou plus grande foi à sa vertu, qu' à son esprit. = Sur la foi de, sous la conduite de, est de tous les styles.
   Bientôt ils ôseront, les yeux vers les étoiles,
   S' abandoner aux mers sur la foi de leurs voiles.
       L. Rac.
* La Fontaine dit, dans le même sens, dessus la foi.
Camarade épongier prit exemple sur lui,
   Comme un mouton, qui va dessus la foi d' autrui.
Le besoin d' une syllabe de plus lui a fait préférer dessus à sur, ce qui est pardonable dans une fâble, et ne doit pas être imité âilleurs. Voyez DESSUS. = Laisser quelqu' un sur sa foi, sur sa bonne foi, l' abandonner à sa propre conduite. "Votre fils est à Versailles sur sa bonne foi. Sév. "Trop ocupé de son avancement pour s' établir le gardien de sa femme; il la laissoit sur sa bonne foi. Marm. = Dégager sa foi, exécuter ce qu' on a promis.
   Et l' offre et le serment, j' accepte tout de toi;
   Mais par de prompts effets dégage ici ta foi.
       Follard, Thémistocle.
= Qui n' a ni foi ni loi, méchant homme. De bonne foi, en bonne foi, adverbes. À~ la tête de la phrâse, ils signifient, en vérité, et s' emploient comme une interjection. "De bonne foi, pouvez-vous parler de la sorte? "En bonne foi, pouvons nous avec justice nous emporter contre, etc. L' Ab. Arnaud. Dans le cours de la phrâse, le 1er signifie avec bonne intention, sans malice. "Il agit de bonne foi, de la meilleur foi du monde. On dit aussi, à la bonne foi. "Traiter à la bonne foi. "Il y va, à la bonne foi, de bonne foi.

FOIBLE


FOIBLE, ou FAIBLE, adj. FOIBLEMENTouFAIBLEMENT, adv. [Fèble, bleman; 1re è moy. 2e e muet.] Faible, qui manque de force. Il se dit des persones et des choses qui ont trait à la persone. "Être foible, avoir la vue, les jambes, les reins foibles. = Par extension, il se dit des choses inanimées. = Poutre trop foible. "Remède foible. = Par raport à l' âme: Homme foible, qui manque de fermeté: esprit foible, qui reçoit facilement toute sorte d' impressions: courage faible, timide. = Dans le moral: faible raison, faible espérance; faible secours. = Faible, Débile (synon.) On est faible, soit qu' on n' ait pas aquis assez de forces, soit qu' on ait perdu une partie de celles qu' on avoit: on n' est proprement débile que dans ce dernier câs. Un enfant est faible; un convalescent est faible; un vieillard est débile: on nait avec une constitution faible: l' âge nous rend débiles, etc. Roub. Synon. = S. m. En parlant des chôses: le faible d' une place, d' une machine, d' une caûse, etc. Ce qu' il y a de faible dans, etc. Du fort au faible; ou le fort portant le faible; compensation faite du mauvais avec le bon. _ En parlant des persones, le principal défaut. "Le jeu est son foible. "Avoir du foible (une amitié aveugle et trop complaisante) pour, etc. = Au pluriel, les foibles: "Il ne faut pas scandaliser les foibles. On ne dit pas au singulier, le foible, un foible. * Le docile et le foible sont susceptibles d' impressions. L' un en reçoit de bones; l' autre de mauvaises. La Bruyère. Régulièrement, on doit dire, l' homme docile, l' homme foible.
   Rem. 1°. Cet adjectif aime à précéder le substantif. "À~ la foible lueur d' un flambeau, il pénètre dans ce séjour d' horreur. Marm. * Une résistance foible. Hist. d' Angl. Dites, une faible résistance.
   Ton foible coeur s' est-il lassé de sa vertu?
       La Chaussée.
= On ne dirait pas pourtant, un faible homme, une faible femme. Il faut dire, un homme, une femme faible. "Les Dieux cachent aux foibles hommes leurs destinées. Télém. Aux faibles mortels, aurait été mieux.
   2°. Faible signifiant, plein de faiblesse et de lâcheté, ne doit se dire que des persones. Fénélon a parlé correctement, quand il a dit: "Ces hommes faibles, qui craignent de voir la vérité, etc. mais il a parlé d' une manière équivoque, en disant: "il ne faut pas pousser trop loin la bonté du coeur, ni tomber dans une amitié faible. Il entend, une amitié pleine de faiblesse; et cela peut signifier une amitié, qui n' est pas grande. Voyez une phrâse du P. Rapin au mot FAIBLEMENT. = Faible: voy. Fragile. = Faible, Inconstante, légère, Volage, (synon.) Voyez INCONSTANT.
   3°. Faible régit quelquefois la prép. de. "Faible de corps et d' esprit; et M. d' Ablancourt a dit: * Les énemis étoient foibles d' Infanterie. On voit, dans ces exemples, que l' article est indéfini, (ou qu' on n' emploie point l' article), et que l' on ne dirait pas bien, faible du corps et de l' esprit, etc. On dit, en ce sens, faiblesse d' esprit; mais plus comunément, après faiblesse, on met l' article. "La faiblesse de l' âge, du corps, de l' esprit, etc. Ce qui doit s' entendre des ocasions où l' article de faiblesse est aussi défini: la faiblesse, etc.
   4°. Bossuet fait régir à faible la prép. à et l' infinitif. "Ce que vous voulez faire foible: (c. a. d. ce que vous prétendez être foible) à vous faire du mal, le devient autant à proportion à vous faire du bien. _ Ce régime fait bien dans cette ocasion; mais l' usage n' en est ni sûr, ni constant.
   5°. FAIBLE, s. m. FAIBLESSE, s. f. (synon.) Il y a la même diférence entre les foibles et les foiblesses, qu' entre la cause et l' éfet. Un foible est un penchant qui peut être indiférent; une foiblesse est une faute toujours répréhensible. Encycl. = Corn. a confondu ces deux mots. Il fait dire à Didyme, dans la Tragédie de Théodore:
   Ma raison s' est troublée, et mon foible a paru.
Faiblesse était, dans cette ocasion, le mot propre. Il signifie là, le peu d' empire qu' on a sur ses passions. _ Être faible, avoir des foiblesses (synon.) Nous sommes foibles, par la disposition habituelle de manquer, en quelque sorte malgré nous, soit aux lumières de la raison, soit aux principes de la vertu. Nous avons des foiblesses, quand nous y manquons en éfet, entraînés par quelque cause diférente de cette disposition habituelle. "Persone n' est exempt d' avoir des foiblesses; mais tout le monde n' est pas homme foible. "Turenne n' étant plus jeune, eut la foiblesse d' aimer Mme. de C... Il eut la foiblesse encore plus grande de lui révéler le secret de l' État. Il répara la première, en cessant d' en voir l' objet: il répara la seconde, en l' avouant. Un homme foible auroit fait les mêmes fautes; mais jamais il ne les auroit réparées. Encyclopédie.
   FAIBLEMENT, avec faiblesse. "Il commence à marcher, mais bien faiblement. = D' une manière faible. "Se défendre, résister, agir, ataquer faiblement.
   Rem. Il ne se dit point dans le moral, et ne signifie pas avec faiblesse de coeur. Pris dans ce dernier sens, il ocasione un contre--sens dans cette phrâse du P. Rapin. "La fin de la Tragédie est d' aprendre aux hommes à ne pas craindre trop faiblement des disgraces communes. Craindre faiblement, c' est craindre peu; ainsi ne pas craindre faiblement, c' est craindre beaucoup; et le sens de l' Auteur est que, la fin de la Tragédie est de nous aprendre à ne pas craindre avec trop de faiblesse, etc. Le P. Rapin a donc dit tout le contraire de ce qu' il voulait dire.

FOIBLESSE


FOIBLESSE, ou FAIBLESSE, s. f. [Fè--blèce: 1re et 2eè moy. 3e e muet.] 1°. Manque de force. Faiblesse de jambes, de vue, d' estomac, de reins. "La faiblesse de l' âge, du sexe. Voy. Faible, REM. n°. 3°. = 2°. Défaillance. "Il lui a pris une faiblesse. Tomber en faiblesse. Revenir d' une faiblesse. 3°. Manque de puissance. "La faiblesse d' un État. = 4°. Par raport à l' âme. "Faiblesse d' esprit, de jugement, de mémoire. "La faiblesse d' un argument, d' un raisonement. "Les faiblesses de l' humanité. "Avoir des faiblesses. Voy. Faible, REM. n°. 5°. _ Il régit quelquefois de, et l' infinitif. "Il eut la faiblesse de n' ôser répondre. = Avoir de la faiblesse pour quelqu' un; avoir une grande disposition à tout excuser dans lui. "La faiblesse des mères pour leurs enfans fait le malheur et des enfans et des mères.

FOIBLIR


FOIBLIR, ou FAIBLIR, v. n. [fèbli~.] Perdre de sa force. "La première ligne des énemis faiblissoit visiblement. "Sa Muse comence à faiblir. "Dabord il paraissait inébranlable, bientôt on le vit faiblir.

FOIE


FOIE, s. m. [foâ~, monos. long. _ On ne doit pas écrire foye, qui ferait prononcer foa-ie, l' y faisant fonction de deux i.] Partie du corps de l' animal, qui est au-dessous du diaphragme, du côté droit. Rich. Port. Située dans l' hypocondre droit sous le diaphragme et les fausses côtes. Trév. La description de l' Acad. est plus étendûe. "Il a le foie brûlé, un squirre dans le foie, etc.
   Rem. M. de Wailly remarque fort bien que le mot foie étant masc. devrait s' écrire sans e, comme Roi, envoi, emploi, etc. et que l' on devrait écrire avec un e, la foie, comme on écrit la joie, la soie, la voie, etc. On objectera que la dipht. oi est longue dans le foie, et douteuse seulement dans la foi. Mais il reste à savoir si on écrit le foie, parce qu' oi y est long dans la prononciation; ou, si on le prononce long, parce qu' on le termine en oie. Quoiqu' il en soit, c' est l' usage d' écrire ces deux mots de la sorte, et il n' y a pas d' aparence qu' il change sitôt.

FOIN


FOIN, s. m. [Foein, monos.] Herbe sèche des prés, qui sert de nourriture aux bestiaux. "Meule de foin, grenier à foin.
   On dit proverbialement, chercher une aiguille dans une charretée (ou dans une botte) de foin. Prendre une peine inutile. Voy. BOTTE.
   FOIN! Interjection, qui marque le dépit, ou le mépris. Foin! Voilà un habit tout gâté. Foin de lui! Il est bâs et populaire.

FOIRE


FOIRE, s. f. [Foâ-re; 1re lon., 2e e muet.] 1°. Marché public, où les Marchands s' assemblent à certains jours, pour vendre en liberté leurs marchandises. "Foire franche. "Aler à la foire. = On dit, dans le discours familier: s' entendre comme larrons en foire, s' acorder, sur-tout pour mal faire. _ La foire n' est pas sur le pont: il n' est pas nécessaire de se tant presser. _ Et quand on voit arriver plusieurs persones dans une compagnie? "La foire sera bone, dit-on, les marchands s' assemblent. Celui-ci est un peu trivial. = 2°. Foire se dit aussi du présent qu' on fait au tems de la foire. "Doner la foîre à (et non pas faire la foîre) lui doner sa foîre. "Que me donerez-vous pour ma foîre? = 3°. Foîre, cours de ventre. "Avoir la foire. "Ces fruits lui ont doné la foire. _ Il me paraît bâs et peu usité parmi les honêtes gens, à moins qu' on ne plaisante. _ L' Acad. se contente de dire qu' il est du style familier.

FOIRER


FOIRER, v. n. FOIREUX, EûSE, adj. et subst. [Foa-ré, reû, reû-ze; 2e é fer. au 1er, lon. aux deux autres.] Ces deux mots sont bâs et vilains. Se décharger le ventre, quand on a la foire. (N°. 3°.) Qui a la foire, (ibid.) "Il a foiré par tout. "Elle a la mine foireûse, d' un foireux, d' une foireûse. "C' est un foireux, une foireûse.

FOIS


FOIS, s. f. [Foâ, monos. long: devant une voyelle, foâz.] Ce mot ne s' emploie qu' avec des noms de nombre: une fois, deux fois, etc. Plusieurs fois, quelquefois, etc. "Je ne l' ai vu qu' une fois. "C' est la première fois que je lui ai parlé. "Je l' ai oui dire cent et cent fois.
   Rem. Il semble à La Monnoie, qu' au lieu de fois, on a dit originairement foie pour voie, d' où vient le toute voie de nos anciens, et le tutta via des Italiens, pour toutefois. Le fiata des derniers vient manifestement de viata; et viage, en plusieurs Provinces de France, signifie la même chôse.
   FOIS, combiné avec d' autres mots, forme un grand nombre d' expressions, presque toutes adverbiales. = Pour une fois s' emploie avec la négative. "Le Ministre ne le dit pas pour une fois. BOSS. c. à. d. une seule fois: Il le dit plus d' une fois. "Cela n' a pas été vu pour~ une fois à la Chine. Fonten. = À~ cette fois, ou cette fois. "Connoissez à cette fois pour toujours les raisonnemens de votre Défenseur. Boss. = À~ diférentes fois. Linguet. = À~ plusieurs fois. Boss. Journ. de Litt. Let. Édif. et aûtres~ Auteurs. "Châtié à plusieurs fois; il y revient à plusieurs fois.
   Il rumine, il grifone; enfin, son ordonnance,
   À~ plusieurs fois il la relit.
       Fâble de M. d' Ardenne.
etc. L' Acad. ne le met point. Plusieurs fois, diférentes fois est plus selon l' usage; à plusieurs fois, à diférentes fois, a plus d' énergie. = On dit, plus d' une fois. Un Biographe a dit, plus que d' une fois, c' est un gasconisme. = Mille fois pour une. "Épargnez-moi des longueurs qui me font mourir mille fois pour une. = De fois à aûtre, de temps en temps. Il n' est pas du beau style. "Les fâcheux évènemens qui la traversent (la vie) de fois à aûtre. Du Plaisir. = Non pour une fois, plus d' une fois.
   Tu pinces et tu mords; et si tu le remarques,
   Il n' est aucun dans la maison
   Qui, non pour une fois, n' ait porté de tes marques.
       Reyre.
= * On disait autrefois, infinies fois, pour dire souvent. "Il fut infinies fois importuné de, etc. on dirait aujourd' hui, dans ce style hyperbolique, un nombre infini de fois. = Y regarder à deux fois, prendre bien garde à ce qu' on fait. "Quand on veut inculper un grand homme, il faut y regarder à deux fois. ANON. = Une fois se joint quelque--fois à dès que, lorsque, et sert à doner plus de force à ces conjonctions. "Dès qu' une fois, ou lorsqu' une fois on a perdu la Foi, on perd bientôt les moeurs. = Il faut, une bone fois, savoir à quoi s' en tenir sur le compte d' un Écrivain (L. H.) dont le mérite est encôre un problème. Ann. Lit. = N' en pas faire à deux fois; ne pas balancer, hésiter à le faire. Cette façon de parler est du st. famil. Aussi Bossuet voulant l' employer dans une matière sérieûse et respectable, en demande-t-il permission à ses Lecteurs. "On n' en fait pas à deux fois, s' il m' est permis de parler ainsi, et l' Antéchrist périt tout d' un coup. _ Pluche dit, sans tant de façon: Descartes n' en fit pas à deux fois; il n' employa qu' une caûse physique pour former la terre et l' habitant. Et Marivaux, faisant parler un valet: "Si Baptiste n' étoit pas mort, il vous aimeroit encôre, car moi, qui lui ressemble, je n' en ferois pas à deux fois. = Sans en faire à deux fois, tout de suite et sans y revenir. "Pour moi, ma fille, sans en faire à deux fois, je vous conjûre d' embrasser tous vos aimables Grignans. Sév. = Par fois, n' est plus bon que dans le style familier "Sa touche est ferme, rapide, vigoureûse, exacte, et son coloris, si c' est un défaut, est par fois trop brillant. Journ. de Lit. De qui parle t-on? D' un Peintre? Non: mais d' un Historien; de l' Auteur de l' Esprit des Croisades. = L' Acad. dit que par fois vieillit.
   À~ la fois, tout à la fois, adv. En même temps; tout d' un coup, ou tout ensemble. "On n' en peut pas tant faire à la fois. "Il en entreprend trop tout à la fois. "Il est tout à la fois, sage, brâve et homme de bien.
   Prendre ou saisir un homme à fois de corps; le prendre, le saisir par le milieu du corps. _ Cette expression est assez singulière. On ne voit pas trop bien qu' elle en est l' origine, et elle n' a guère de raport au sens du mot fois. L' Acad. l' a admise dans son Dictionaire.

FOISON


FOISON, s. f. FOISONER, verbe neut. [Foa-zon, zoné.] Abondance. Abonder. ""Il y aura foison de blé cette année. "Il y a de tout à foison, abondamment. "Les lapins foisonent beaucoup. Ils multiplient singulièrement. "Cette Province foisone en blés, en vins. "Cette ville foisone en ouvriers "La France foisonne en beaux esprits. Trév. "Une carpe à l' étuvée foisone plus qu' étant acomodée d' une aûtre sorte; elle fournit plus à manger. = Tout cela n' est que du style simple. = Le proverbe dit: cherté foisone: quand les chôses sont chères, elles dûrent davantage, parce qu' on les ménage mieux.

FOL


FOL, ou FOU, FOLLE, adj. et subst. [On écrit et l' on prononce fol devant une voyelle, et fou devant une consone.] 1°. Qui a perdu le sens, l' esprit. "Il est fou, il est devenu fou; fou à lier, à courir les rûes. "Fol espoir, fol amour, fol apel; folle espérance, folle idée. = Subst. "C' est un fou, une folle. = 2°. Gai, badin: "C' est un jeune fou; il a l' humeur folle. = 3°. En parlant des chôses, qui est fait sans raison, sans prudence. "Folle entreprise; action folle, extravagante. = 4°. Au Palais, fol apel, mal fondé; folle enchère, faite témérairement. = 5°. Chien fou, chien enragé; folle farine, (et non pas farine folle), la plus subtile fleur de la farine. = 6°. Faire le fou, le boufon. = 7°. Fou, au jeu des échecs, dont la marche est toujours en ligne transversale: "Le fou blanc, le fou noir "Le fou du Roi, le fou de la Dame.
   Rem. I. Fou est plus du style familier et insensé du haut style. "Projet fou; projet Insensé. = Fou, extravagant, insensé, imbécile (synon.) Le fou manque par la raison, et se conduit par la seule impression mécanique: l' extravagant manque par la règle, et suit ses caprices: l' insensé manque par l' esprit, et marche sans lumières: l' imbécile manque par les organes, et va par le mouvement d' autrui sans aucun discernement. Les fous ont l' imagination forte: les extravagans ont les idées singulières: les insensés les ont bornées: les imbéciles n' en ont point de leur propre fonds. Gir. Synon.
   II. Fol précède toujours le substantif: fou le suit toujours, excepté dans cette phrâse unique: un fou rire, un rire dont on n' est pas le maître. On pourraît dire aussi un rire fou, et celui-ci pourrait paraître meilleur; mais il a un aûtre sens. C' est un rire sans raison. _ Folle peut suivre ou précéder. Il faut pourtant consulter l' oreille. Femme folle; folle entreprise. On ne dirait point si bien entreprise folle, et folle femme sonerait fort mal. "Contenter sa vanité folle. TÉLÉM. Je voudrais là, sa folle vanité.
   III. Être fou de... aimer avec une passion démesurée. "Vous jouez quelquefois aux échecs. Pour moi, je suis folle de ce jeu. Sév. "Il a acheté un tableau, et il en est fou. Cette expression n' est que du style familier, et quelquefois critique et mordant.
   IV. On apèle vieux fou, un vieillard extravagant. "Barmécide est un vieux fou, entêté d' une fausse idée d' héroïsme. Ann. Litt.
   V. Je suis faite comme une folle, propôs à la mode parmi les Petites Maîtresses. "Vous vous placez sans avoir dit aux glaces, que vous êtes faite comme une folle. Coyer. On dit que la célèbre Princesse des Ursins tint ce propôs à la jeune Reine d' Espagne (Farnèse, seconde femme de Philipe V) et que la Reine, sur ce propôs, la fit conduire hors du Royaume.

FOLâTRE


FOLâTRE, adj. FOLATRER, v. neut. FOLâTRERIE, s. fém. [L' a n' est long que devant l' e muet: il ne faut donc point mettre d' accent au 2d: l' Acad. écrit pourtant Folâtrer. Je n' empêche.] Folâtre, qui s' amûse à badiner. Acad. Qui a l' humeur plaisante et badine. Trév. Badin, qui réjouit, qui fait et dit des chôses plaisantes. Rich. Port. = Folatrer, badiner, faire des actions folâtres. = Folâtreries; action, parole folâtre. "Il ou elle est extrêmement folâtre: il ou elle ne fait que folatrer. "Il fit, il dit mille folâtreries. _ L' Acad. dit que ce dernier est peu d' usage. Je ne vois pas pourquoi il serait moins usité que les aûtres.
   Folâtre, badin, (synon.) L' humeur fôlâtre, fait qu' on agit sans raison, mais avec assez d' agrément pour se passer de raison? l' esprit badin fait qu' on joûe sur les chôses, quelquefois avec de la raison, mais en l' égayant... Le folâtre est plus remuant, plus sémillant: le badin est plus plaisant, plus rieur... Une persone posée n' est pas folâtre: une persone badine n' est pas sérieûse. On ne folâtre pas sans des manières folâtres: on badine quelquefois sans avoir l' air badin, et quelquefois on n' en badine que mieux. ROUBAUD. Nouv. Syn. Franç.
   Rem. FOLâTRE suit ou précède au gré de l' oreille et du goût.
   L' essaim des folâtres amours.      Gresset.
Nous irons réveiller les folâtres échos.Id.
"La jeunesse folâtre. TÉLÉM. "Les jeux folâtres. IBID. _ On pourrait dire aussi, la folâtre jeunesse; mais, les folâtres jeux formerait une dissonance.

FOLICHON


FOLICHON, ONE, adj. Il enchérit sur folâtre, et il n' est que du style familier, au lieu que folâtre peut entrer dans tous les styles. "Esprit folichon, humeur folichone. = Subst. "Un petit folichon; une petite folichone.

FOLIE


FOLIE, s. m. [2e lon. 3ee muet.] 1°. Démence, aliénation d' esprit. "Sa folie augmente tous les jours. Accès de folie. "Il a un grain de folie _ Le dernier est du style plaisant. = 2°. Défaut de jugement. "La sagesse des hommes n' est que folie devant Dieu. "Il a fait la folie de se défaire de sa charge. = 3°. Passion excessive. "Les tableaux sont sa folie. "Chacun a sa folie.
   Rem. FOLIE, avec faire, se prend toujours en mauvaise part; mais avec dire, il a quelquefois un sens fort bon. "Il est toujours honteux de faire des folies: il est quelquefois agréable d' en dire.
   Le Proverbe dit: qui fait la folie doit la boire. On doit porter la peine de sa faûte.
   À~ la folie, adv. Éperdûment, avec une passion extrême. "Aimer à la folie. Il est du style familier.
   Valère, d' autre part, vous aime à la folie;
   Et, grâce à vous, Geronte en va voir le portrait
   Comme d' un libertin et d' un colifichet.
       Le Méchant.

FOLLE


FOLLE. Voy. FOL.

FOLLEMENT


FOLLEMENT, adv. [Foleman; 2ee muet.] Extravagamment, Imprudemment. "Entreprendre follement; parler, répondre follement.

FOLLET


FOLLET, ETTE, adj. [Folè, lète: 2e è moyen.] Diminutif de fou, folle. Il dit moins que folâtre. Qui aime à badiner. Il est follet: elle est un peu follette. "Il ou elle a l' esprit follet. = Il s' emploie dans quelques expressions. _ Poil follet, le premier poil qui vient au menton des jeunes gens. _ Feu follet, espèce de météôre. Figur. faux brillant dans les ouvrages d' esprit. _ Un esprit follet, ou simplement, un follet, lutin, qui, suivant un préjugé populaire, se divertit sans faire du mal.

FOLLICULAIRE


*FOLLICULAIRE, s. m. Terme de mépris. Nom que des Auteurs, le plus souvent justement critiqués, ont doné aux faiseurs de feuilles, Journaux ou autres ouvrages périodiques. On l' imprime encôre en caractères italiques, pour montrer qu' il n' apartient point à la Langue, mais seulement au jargon des Auteurs disgraciés, ou de leurs bénins Protecteurs.

FOMENTATION


FOMENTATION, s. fém. FOMENTER, v. a. [Fomanta-cion, fomanté: 2e lon.] Fomenter 1°. au propre, c' est fortifier une partie débilitée, en y apliquant quelque remède. = 2°. Entretenir, faire durer le mal. "Ce remède fomente le mal, au lieu de le guérir. _ FIG. "Fomenter l' amitié, la paix ou la division, la mauvaise intelligence; les désordres, les révoltes, les séditions, etc. Il se dit moins souvent en bien qu' en mal. FOMENTATION ne se dit qu' au propre, dans le 1er sens, et ordinairement au pluriel. "Faire des fomentations~. "Adoucir, amollir par des fomentations.

FONCER


FONCER, v. neut. On a dit aûtrefois foncer sur, pour fondre sur; et foncer, tout seul, ou foncer de l' argent, pour financer, payer, débourser, fournir. _ On ne le dit plus que dans cette phrâse proverbiale: foncer à l' apointement, où ce verbe a le même sens.
   FONCÉ, ÉE, adj. 1°. Riche, qui a un grands fonds d' argent. "Cet homme est bien foncé. _ En ce sens, il est du style familier, et un peu badin. = 2°. Habile dans une science, dans une matière. "Il est bien foncé. = 3°. Couleur foncée, fort chargée. "Rouge, bleu, violet foncé, etc.

FONCIER


FONCIER, IèRE, adj. [Fon-cié, ciè--re: 1re lon. 2e. é fer. au 1er, è moy. et long au second.] 1°. Qui concerne le fonds d' une terre. Seigneur foncier, le Seigneur du fonds, par distinction du Seigneur Haut-Justicier, ou du Seigneur direct. _ Rente foncière, assignée sur un fonds de terre. = 2°. Habile, qui a un fonds de science. "Cet Avocat n' est pas éloquent, mais il est foncier dans le Droit et dans la Pratique.

FONCIèREMENT


FONCIèREMENT, adv. [Fon-ciè-re--man; 2e è moyen et long, 3e. e muet.] 1°. À~ fond: "traiter une afaire foncièrement; l' examiner foncièrement. = 2°. Dans le fond. Il se met, ou à la tête de la phrâse, ou dabord après le verbe. "Foncièrement il est, ou il est foncièrement honête homme; et non pas, il est honête homme foncièrement.

FONCTION


FONCTION, s. f. [On pron. le c: fonk--cion, et non pas foncion: 1re lon.] Action de celui qui fait le devoir de sa charge. "Remplir, exercer ses fonctions. S' aquiter de ses fonctions. "Être en fonction. "C' est la principale fonction de cet emploi. "Les fonctions du saint ministère. _ Il régit quelque--fois de et l' infinitif. "Sa fonction est de rendre la justice, et non de régler le gouvernement. Anon. = Fig. on le dit de l' estomac et des autres viscères du corps humain: "Quand le foie, la rate, l' estomac font bien leurs fonctions, tout va bien. "Cet homme fait bien ses fonctions; il boit, mange et dort bien.
   Rem. Je doute que fonctions conviène a des soldats. Rollin l' a pourtant employé en parlant d' eux. "Se trouvant désormais plus libres pour leurs fonctions, les Soldats partirent avec joie. _ Je crois qu' on ne le dit que de ceux qui comandent.

FONCTIONER


*FONCTIONER, v. n. Mot forgé par M. Tissot. "Quand l' estomac fonctione bien; fait bien ses fonctions. Ce mot est de mauvaise fabrique, et l' on ne peut guère en bien augurer.

FOND


FOND, s. m. [On ne prononce point le d, même lorsque le mot suivant comence par une voyelle: fond inépuisable, pron. fon inépuizable.] 1°. L' endroit le plus bâs d' une chôse creûse. "Le fond d' un puits, d' un toneau, du sac, du pot, etc. "Le fond de la mer, des abîmes, etc. Aller au fond ou à fond. Trouver fond ou le fond. Perdre fond. = 2°. Ce qu' il y a dans un pays de plus retiré du comerce. "Se retirer au fond d' une Province. "Le fond d' un bois, d' une allée. "Du fond du Nord vint un essaim de Barbâres. = 3°. Ce qu' il y a de plus essentiel dans une afaire, dans une question. "Tel est le fond du procès, de la question. "Il a pour lui le fond, mais la forme est contre lui. = 4°. Figurément, ce qu' il y a de plus caché dans l' âme de l' Homme. Dieu seul conait le fond des coeurs, le fond de nos pensées.
   Rem. I. Fond et fonds sont deux choses diférentes: le 1er est le fundum des latins, c' est la partie la plus basse de ce qui contient ou peut contenir quelque chôse, le fond d' un toneau, d' un sac, etc. l' aûtre est le fundus des latins. Dans le propre c' est la terre, qui produit les fruits; dans le figuré, c' est tout ce qui raporte du profit: fonds de terre, faire fonds sur, etc. = Il faut donc dire, de fond en comble, et non pas de fonds en comble; et aussi au fond, venir au fond, etc. Vaug. _ Ménage et Th. Corneille rejètent cette distinction, mais il parait que c' est mal-à-propôs. L' Acad. l' admet dans son Dictionaire: cependant elle dit faire fond sur, au lieu de fonds, en quoi elle n' est pas conséquente, à mon avis. = Pour la même raison, on doit dire couler à fond, et non pas à fonds comme écrit M. Linguet, ou plutôt son imprimeur. * Anciènement on disait, en ce sens, mettre à fond. "Soubise met à fond et prend cinq de leurs vaisseaux. Mém. de Rohan.
   II. En parlant des vaisseaux, il me parait que l' usage est de dire couler à fond dans le mode actif et passif, et couler bâs dans le mode neutre. "On est fondé à croire que ce vaisseau a coulé à fond sur les côtes de Norvège. Journ. Polit. Je voudrais dire, a coulé bâs. J' avouerai pourtant que l' Acad. met couler à fond pour le neutre comme pour l' actif. = couler à fond (actif) au figuré, c' est ruiner, décréditer. _ Couler à fond, dans la dispute, c' est réduire l' adversaire à ne pouvoir répondre.
   III. Au fond et dans le fond, adverbes, peuvent se placer à la tête de la phrâse. "Au fond, il a raison de se plaindre: "Dans le fond vous avez tort de ne l' avoir pas averti. = Ils régissent quelquefois la prép. de. "Au fond du sac, dans le fond de l' apartement.
   Tes cris, semblables au tonnerre
   Jusqu' au fond de l' abîme ont porté la terreur.
       Le Franc.
* Bossuet a dit, en son fond, pour, au fond de son coeur. "Il sait bien, en son fond, que cela n' est pas: l' expression n' est pas de l' usage actuel. * M. Linguet emploie le pluriel. "Aux fonds de ses États. On dit toujours au fond, au singulier.
   IV. À~ fond, adv. On dit, parler à fond d' une afaire; mais parler à fond, tout seul ne se dit pas. "Il parlerait plus juste et plus à fond, s' il disoit qu' il ne peut doner ce qu' il n' a pas. Boss. = On dit aussi, traiter à fond. * Vaugelas dit à plein fonds, en quoi, si ce n' est pas une faûte d' impression, il aurait lui-même manqué à la régle qu' il a établie. Et quand même il aurait dit à plein fond, il se serait servi d' une locution, qui est aujourd' hui hors d' usage. "Toutes ces matières veulent être traitées à plein fonds, etc. Dites simplement être traitées à fond.
   On dit, proverbialement, voir le fond du sac, c. à. d. de l' afaire. "Voilà un long discours, mais j' ai voulu vous faire voir le fond du sac d' elle et de moi. SEV. = Déjeûner à fond de cûve: faire un grand déjeûné. = On dit plus noblement d' une afaire, d' une question fort embarrassée, fort embrouillée, qu' elle n' a ni fond ni rive. Et de ce qui est hors de la portée de l' esprit humain: c' est une mer, qui n' a ni fond ni rive.
   De fond en comble, entièrement, se dit au propre et au figuré, et il est de tous les styles. "Démolir une maison de fond en comble. "Cet homme est ruiné de fond en comble.

FONDAMENTAL


FONDAMENTAL, ALE, adj. FONDAMENTALEMENT, adv. [Fondamantal, tale, taleman: 3e lon. 5e e muet.] Fondamental, qui sert de fondement. Au propre, pierre fondamentale. Au figuré. "Les points fondamentaux de la Religion. Loi fondamentale d' un État. = Fondamentalement, sur de bons fondemens, sur de bons principes. Il ne se dit qu' au figuré, et il n' est usité qu' en style de dissertation. "Ce point étant fondamentalement établi, tirons-en les conséquences.

FONDANT


FONDANT, ANTE, adj. [1re et 2e lon.] 1°. Qui se fond dans la bouche. Fruits fondans, poire fondante. = 2°. Qui sert à fondre les humeurs. "Remède fondant. _ S. m. C' est un fondant; user de fondants.

FONDATEUR


FONDATEUR, TRICE, s. m. et f. FONDATION, s. f. [Fonda-teur, trice, da-cion, en vers ci-on.] Fondateur, fondatrice, 1°. Celui, celle, qui a fondé quelque grand établissement. "Fondateur d' un Empire, d' une République; d' un ordre Religieux. "Ste Thérèse est la fondatrice des Carmélites. = 2°. Celui, celle qui a établi une Église, un Monastère, une OEuvre pie, avec des revenus fixes. "Les droits du fondateurs, de la fondatrice. Suivre les intentions du fondateur, etc. = On dit, proverbialement, c' est ou ce n' est pas l' intention du fondateur, de celui qui l' a ordoné, qui en a doné la commission. "Son mari lui mande, que si elle n' emploie à s' habiller les neuf cent francs qu' il lui fait tenir, il ne reviendra point de son quartier d' hiver: tellement que la petite Dame a doné dans l' étofe, selon l' intention du fondateur. SÉV. = Fondation, 1°. Travaux entrepris, pour asseoir les fondemens d' un édifice. "La fondation, ou les fondations d' un bâtiment. Quand il est fini, on doit dire les fondemens. = Fondation, tient davantage du sens actif, et fondemens du sens passif. "Pour faire une bonne fondation dans un terrein marécageux; il faut asseoir les fondemens sur des pilotis. = 2°. Fonds légué pour quelque oeuvre de piété. "La fondation d' un Monastère, d' une Messe à perpétuité, etc. "C' était le siècle des Fondations: c' est aujourd' hui le siècle des destructions. Anon.

FONDE


*FONDE, c' est ainsi qu' on écrivait aûtrefois, et cette manière d' écrire était plus conforme à l' étymologie, funda.
   Cet homme incomparable,
   À~ lancer de la fonde un plomb inévitable.
       Brebeuf.
On ne dit plus que fronde.

FONDÉ


FONDÉ, ÉE, adj. et participe du v. Fonder. Au Palais on lui fait régir la prép. de: fondé de procuration. _ Il est aussi subst. "Un fondé de pouvoirs. Moreau. "Le fondé des pouvoirs du Pape. Id.

FONDEMENT


FONDEMENT, s. m. [Fondeman: 1re lon. 2e e muet.] 1°. Le fôssé que l' on fait pour comencer à bâtir. "Fouiller, creuser les fondemens d' un édifice. = 2°. La maçonerie qui remplit le fôssé. Fondemens profonds, solides. "Asseoir, poser les fondemens. "Ébranler, saper les fondemens. Voy. FONDATION, n°. 1°. = Au propre, il se dit toujours au pluriel.
   Et les fondemens de la terre,
   Par ta course ébranlés, ont tressailli d' horreur.
       Le Franc.
Au figuré, il se dit dans les deux nombres. "La Foi est le fondement des Vertus Chrétiènes. "Jeter les fondemens de la paix. "Détruire la Justice, c' est saper les fondemens de l' État. "Il n' y a point de fondement à faire sur son amitié, sur sa parole. = 3°. Au figuré aussi, caûse, motif, sujet. "Quel fondement a-t' il de se plaindre? "Il se plaint avec fondement. "Il l' a dit, ou il ne l' a pas dit sans fondement. "Ce bruit est sans fondement. "Apel (d' Abailard) destitué de tout fondement valable. Le P. Fontenai. = 4°. Fondement, est un terme honête pour exprimer l' anus, l' endroit par où sortent les grôs excrémens. "Avoir mal au fondement.
   Rem. 1°. On dit d' une opinion qu' elle a du fondement dans l' Écritûre, etc. * Bossuet dit sur, ce qui n' est pas au moins de l' usage actuel. "Ces livres n' ont guère de fondement sur l' écriture. On dirait aujourd' hui, dans l' Écritûre.
   * 2°. On a dit aûtrefois faire fondement, comme on dit aujourd' hui faire fond, mais on le disait au singulier. Quelqu' un a dit: "Il y faisoit de nouveaux fondemens de son honneur~. Il y a plusieurs faûtes dans cette phrâse.

FONDER


FONDER, v. act. [Fondé, 1re lon. 2e é fer.] 1°. Au propre, poser les fondemens. "Fonder une maison sur le roc, sur le sâble, sur pilotis. _ Fonder une ville, être le premier à la bâtir. Au figuré, fonder un Empire, un Royaume, un État; fonder un Ordre Religieux. = 2°. Doner un fonds sufisant pour un établissement. = Fonder, Établir, Instituer, Ériger, (Synon.) Fonder, c' est doner le nécessaire pour la subsistance: il exprime proprement des libéralités temporelles. "St. Louis a fondé les Quinze-vingt. Établir, c' est acorder une place et un lieu de résidence. Il a un raport particulier à l' autorité et au gouvernement civil. "Louis XIV a établi les filles de St. Cyr. Instituer, c' est créer et former les chôses. Il en désigne l' Auteur, ou celui, qui les a le premier imaginées. "St. Ignace de Loyola a institué les Jésuites. Ériger, c' est changer en mieux l' état des chôses: il ne s' emploie bien que pour les fiefs et les dignités. "Paris a été érigé en Archevêché sous Louis XIII. GIR. Synon. = 3°. Se fonder, régit sur ou en. "Il se fonde sur de bons ou de mauvais titres. "Toute son espérance se fonde en vous. "Se fonder en autorité, en exemple. = 4°. Être fondé régit à et l' infinitif. "Je suis fondé à demander des dédomagemens.
   On dit, proverbialement, et en plaisantant. "Avant tout, il faut fonder la cuisine, établir de quoi vivre.

FONDERIE


FONDERIE, s. f. FONDEUR, s. m. [2e et dern. e muet au 1er, 3e lon.] Lieu où l' on fond du métal. _ Ouvrier en l' art de fondre les métaux. "Il y a là une fonderie. "Un Maître fondeur. Voy. CLOCHE.

FONDRE


FONDRE, v. act. et n. [1re lon. 2ee muet.] 1°. Liquéfier, rendre fluide. "Fondre du plomb, de la cire, de la neige, de la glace, une cloche, etc. Voy. CLOCHE. = Fig. Fondre un ouvrage dans un aûtre, renfermer, = V. n. ou sans régime. "La neige fond au soleil; l' étain au feu. _ Diminuer de force, maigrir. "Cet homme fond à vûe d' oeil; ou avec la prép. en: fondre en pleurs, en larmes, répandre beaucoup de larmes. = 2°. Fondre, aussi neutre; s' abimer. "La terre a fondu sous ses piés. "La maison fondit tout-à-coup. _ Fig. "Tout fond entre ses mains; tout se perd, tout s' égare; tout est bientôt dissipé. = 3°. Tomber impétueusement. "L' orage fondit tout à coup. "L' oiseau fondit sur la perdrix. "La colère de Dieu va fondre sur vous. "Tous les malheurs sont venus fondre sur moi. = Suivant le P. Bouhours, ce verbe, dans ce sens, ne se dit que des choses visibles et animées; fondre sur l' énemi, sur la proie. On ne dit pas bien: "Les vents sont venus fondre sur cette maison. "Un tourbillon de vent vint tout d' un coup fondre sur le lac. _ L' Acad. dit pourtant, l' orage est prêt à fondre: l' orage fondit tout-à-coup; et je crois que l' usage autorise à le dire. = On dit ordinairement fondre en larmes. * Madame de Sévigné dit, être fondu, en quoi on ne doit pas l' imiter: "Il s' en va dans peu de jours: ses gens sont fondus en larmes. _ Ailleurs elle dit fondre. "Je fonds en larmes, en lisant vos lettres. Il me semble que mon coeur veuille se fendre par la moitié.

FONDRIèRE


FONDRIèRE, s. f. [2e è moy. et long: 3e e muet: Fon-driè-re; en vers fondri-ère: 4 syll.] 1°. Lieu creux, où la terre s' est fondûe ou abimée. = 2°. Terrein marécageux, sous lequel les eaux croupissent, faûte d' écoulement.

FONDS


FONDS, s. m. [On ne prononce jamais le d; l' s ne se prononce avec le son du z que devant une voyelle.] 1°. Le sol d' un champ, d' un héritage. "Riche en fonds de terre. "Bon ou mauvais fonds. "Il ne faut pas bâtir sur le fonds d' autrui. = 2°. Somme d' argent. "N' avoir point de fonds pour payer. Faire un fonds. Assigner un payement sur un mauvais fonds. = 3°. Le capital d' un bien. "Il a mangé une partie du fonds, outre les revenus. "Fonds de boutique. "Ce Marchand a vendu son fonds. = 4°. Il se dit de l' esprit, du savoir, de la capacité. "Il a un grand fonds d' esprit. * L' Acad. dit aussi, avoir beaucoup de fonds d' esprit: celui-ci ne me parait pas admis par l' usage. "Cela marque un grand fonds de savoir, d' érudition, de probité, de malice, etc. "Un fonds inépuisable de science.
   Faire fonds sur, compter sur. "Je fais fonds ou peu de fonds sur vos promesses. _ L' Acad. met faire fond, mais celui-ci ne rend pas l' idée qu' exprime cette locution figurée. Car faire fonds, c' est mettre en quelque sorte son fonds, son bien, son espoir sur, etc. ce que fonds exprime mieux que fond. _ Voy. FOND. Rem. I.
   Être en fonds, avoir des espèces, des fonds. Gresset l' emploie au figuré. "Avec ce que j' ai vu, dit Cléon.
   Je suis en fonds, je crois, pour prendre ma revanche.
       Le Méchant.
"Riche de son propre fond. LE GENDRE. Il falait là fonds.
   Rem. Dans ses sentimens sur le Cid, l' Académie écrit fons sans d. Dans l' Apothéose du Dictionaire, on lui réproche d' avoir écrit fonds baptismaux. Elle a corrigé ces deux erreurs dans les dernières Éditions. Elle met Fonds avec un d, et Fonts baptismaux avec un t.

FONTAINE


FONTAINE, s. f. [Fontène: 2eè moy. 3e e muet. _ Dans la même page, Ménage écrit trois fois fonteine avec ei, et une fois fontaine avec ai: le dernier est le seul bon.] 1°. Eau vive, qui sort de terre. Aler à la fontaine. Eau de fontaine. = 2°. Corps d' Architectûre, qui sert pour l' écoulement, pour l' ornement ou pour les jeux d' une fontaine. "La Fontaine des Innocens. Les Fontaines de Versailles. = 3°. Vaisseau de cuivre ou de marbre, etc. où l' on garde de l' eau dans les maisons. = 4°. Robinet et tuyau de cuivre par où coule l' eau d' une fontaine, ou le vin d' un tonneau, etc.

FONTANGE


FONTANGE, s. f. Noeud de rubans que les femmes portent sur leur coifûre. Il tire son nom de Madame de Fontange.

FONTAINIER


FONTAINIER. Voy. FONTENIER.

FONTE


FONTE, s. f. [1re lon. 2ee muet.] 1°. Action de fondre. "La fonte des métaux; de la neige; des humeurs dans le corps humain. _ Ouvrage de fonte, de fer fondu. 2°. Certaine composition de métaux, dont le cuivre est la bâse. "Canon, mortier de fonte. = 3°. En Imprimerie, corps complet d' une même sorte de caractères. "Une nouvelle fonte. Une fonte toute neûve. "Une fonte de petit romain, de Philosophie, etc.

FONTENIER


FONTENIER, s. m. [Fonte-nié: 2ee muet, 3e é fer. _ Le Dict. d' Orth. done à choisir entre Fontainier et Fontenier. Le 1er est plus conforme à l' étymologie. (Fontaine) L' Acad. s' est décidée pour le 2d. Si la prononciation de ce mot était constante, elle résoudrait le doute; mais elle est partagée comme l' ortographe.] Celui, qui a charge de faire aller les fontaines et de les entretenir. "Maître Fontenier.

FONTS


FONTS, s. m. pl. [On ne pron. ni le t, ni l' s: fon, long.] Il se dit d' un grand vaisseau de pierre ou de marbre, où l' on conserve l' eau, dont on se sert pour baptiser. "Les fonts baptismaux. "Bénir les fonts. "Tenir un enfant sur les fonts, en être parrain ou marraine. = Proverbialement, tenir quelqu' un sur les fonts; parler de lui, ou en bien ou en mal.

FOR


FOR, s. m. Juridiction. For eclésiastique ou For extérieur: Juridiction éclésiastique. For intérieur ou For de la conscience: le jugement de sa propre conscience. "Tel est absous dans le for extérieur, qui ne l' est pas dans le for intérieur. = Plusieurs disent le for interne, le for externe.
   Rem. Des Auteurs ignorans écrivent fort avec un t. Le Gendre écrit Fore, contre l' usage. = On doit dire, For-l' Évêque, parce qu' il vient de Forum Episcopi, c. à. d. le lieu où s' exerçait la juridiction temporelle de l' Évêque de Paris. Men.L. T. Cependant l' usage a prévalu d' écrire Fort l' Evêque. On doit le réformer.

FORAIN


FORAIN, AINE, adj. [Fo-rein, rène: 2e è moy. au 2d.] Il ne se dit qu' avec Marchand et Traite. Qui est de dehors, qui n' est pas du lieu. "Marchand forain. = Traite foraine, droit sur les marchandises, qui entrent dans le Royaume, ou qui en sortent.

FORÇAT


FORÇAT, s. m. [For-sa: le t ne se pron. jamais.] Galérien, qui sert en qualité d' esclâve sur les galères, y ayant été condamné par la justice. Qui tire la rame par force. C' est l' origine de ce mot. = Ce terme n' est rien moins qu' un terme noble, et on ne doit pas l' employer en parlant des Anciens. * Brebeuf dit de Marius fugitif à Carthage, qu' il
   Remplit des Légions de serfs et de forçats.
Ces deux mots ne sont bons qu' en parlant des Nations modernes de l' Europe; et ils ne sont pas du beau style.

FORCE


FORCE, s. f. 1°. Vigueur, faculté naturelle d' agir vigoureûsement, (Acad.) de porter de grands fardeaux, d' abatre et renverser ce qui résiste. (Trév.) Cette dernière explication vaut mieux. "Force de corps, de brâs. "Y aler ou fraper de toute sa force. "Être sans force: manquer de force. "Il est dans sa force.
   Le courage, la peur, la force, la foiblesse,
   Et l' esprit de vertige et l' auguste sagesse,
   Sont les présens de Dieu propice ou couroucé.
       Le Franc.
= 2°. Au pluriel, il se dit proprement du corps, de la santé et par extention de l' esprit, du pouvoir, du crédit, etc. "Perdre, réparer, recouvrer ses forces. "Les forces lui manquent: ses forces s' épuisent, etc. = 3°. Les troupes d' un État. "Mettre des forces sur pied. Assembler ses forces. Les forces de terre; les forces navales, etc. 4°. Puissance, la force d' un état, d' un peuple, etc. Impétuosité: "La force de l' eau, du courant, du vent. _ Solidité. "La force d' une poûtre, d' un bâtiment, d' une toile, d' une étofe. = 5°. Violence. "User de force; employer la force, etc. = 6°. Énergie. "Ce mot a beaucoup de force; la force de l' éloquence, du raisonement. = 7°. Grandeur et fermeté de courage. "Il faut une grande force d' esprit pour soutenir les adversités: il faut encôre plus de force pour soutenir la bonne fortune. = 8°. Ce mot entre dans plusieurs locutions. Faire force de rames; faire force de voiles. On comprend aisément ce qu' ils signifient au propre: au figuré (st. famil.) faire tous ses éforts. _ Force majeure: Puissance à laquelle on est forcé de céder. _ La force de la vérité, le pouvoir qu' elle a sur l' esprit des hommes. La force du sang, moûvement secret de la natûre entre les persones les plus proches. = Maison de force, où l' on enferme les gens de mauvaises moeurs, qu' on veut corriger. = 9°. Il fournit à plusieurs adverbes. _ À~ force, il régit de devant les noms et les verbes. "À~ force de brâs; à force de pleurer. * Brebeuf dit à la force.
   On gagne le rivage à la force des brâs.
Peut-être le besoin d' une syllabe de plus a produit cette locution irrégulière. * Un Auteur moderne emploie singulièrement cet adverbe. "Nous avons, à force de siècles, perfectioné la science et la pratique de l' Economie rurale. * M. Linguet l' emploie sans régime. "On révoque à force les actes passés contre les Américains. _ L' Acad. ne le dit point de la sorte; mais il ne déplait pas ainsi employé. = De force. "Prendre une ville de force, d' assaut. _ De vive force, par une violence manifeste. = À~ toute force, absolument et sans en démordre, à quelque prix que ce soit. "Il veut, à toute force venir avec nous. Sév.
   Voulut, à toute force, atraper la lârron.
       La Font.
= À~ force ouverte. Il se dit toujours au singulier. Rollin le dit au pluriel. "Ataquer le Tyran à forces ouvertes. _ Au contraire, on dit toujours au pluriel, à forces inégales. "Je me suis exposé dans un combat avec Hippias à forces inégales. TÉLÉM. = De ma force, de sa force. "Je me disois, en regardant mes convives; ce sont là de bonnes gens, qui ne sont pas de ma force. MARIV. = En force. "Alors les Rois ne marchoient qu' en force. MOREAU. Ailleurs cet illustre Écrivain met le pluriel, qui vaut mieux, et qui peut-être est le seul bon; car forces, signifie là troupes. "Il y vint en effet; mais il y vint en forces. "On s' y troûvera en forces.
   REM. 1°. Quand force est tout seul, et surtout au pluriel, il ne se dit que de la force du corps. Quand on veut exprimer celle de l' âme, il faut ajouter quelque terme qui le désigne. "C' est ainsi que meurent les Politiques par le secours de la Philosophie. C' est ainsi que meurent les Héros par l' excès de leurs forces. MASCARON. _ Leurs forces, se dirait plutôt des Porte-faix que des Hérôs. = M. Moreau dit aussi. "Qui le croiroit? Il faut quelquefois plus de forces à un Roi pour régler sa Maison, qu' il ne lui en faudroit pour gouverner ses États.
   2°. Racine a dit, doner force sans article.
   Seconde mes soupirs, done force à mes pleurs.
Cela est bien dit en vers, dit M. Racine le Fils, (tout le monde n' en convient pas) et seroit mal dit en prôse. On doit dire, donne de la force à mes pleurs. _ Bossuet a dit aussi, sans article; perdre force, pour, perdre ses forces, on dit: perdre haleine: on ne dit pas perdre force.
   3°. On dit faire violence à son inclination, à ses desirs, les surmonter. * Corneille dit, dans le même sens, faire force.
   Faites un peu de force à votre impatience.
       Pompée.
* Ce grand Poète dit âilleurs, à force pour à peine.
  On ne conçoit qu' à force une telle fureur.
      Cinna.
4°. Il y a bien de la diférence entre régner par force et régner par la force, et ainsi de plusieurs aûtres verbes. Le 1er signifie qu' on le fait malgré soi, l' autre qu' on le fait, qu' on en vient à bout par la violence volontairement employée. Corneille (dans Horace) dit de l' Amour.
   Il entre avec douceur, mais il règne par force.
Il s' est mal exprimé. Il devait dire.
   S' il entre avec douceur, il règne par la force.
   5°. L' infinitif régi par à force, doit se raporter au sujet de la phrâse (au nominatif) "À~ force de l' importuner, j' obtiendrai de lui ce que je souhaite, est bien. À~ force de l' importuner, il fera ce que je souhaite, est mal.
   6°. Il m' est force, régit aussi de et l' infinitif. "Ce m' eût été une extrême peine de ne pas aimer une persone qu' il m' est force d' estimer. Voit. C. à. d. que je suis forcé, obligé d' estimer. "Si on m' en empêche, il me sera bien force de la laisser là. Mariv. = Dans cette façon de parler, qui n' est que du style simple, force se place quelquefois à la tête du membre de la phrâse, et l' on retranche le pronom il. "Il ne restait plus que l' étain, (pour Jupiter) force lui fut de s' en contenter. Pluche.
   7°. On dit, par force, c. à. d. par violence. * Bossuet, par analogie, dit, une force, pour une violence. "Elle a souscrit par force à sa condamnation. Est-ce une force, de la souscrire dans un Monastère? L' usage n' admet point cette analogie. Il faudrait dire: est-ce la souscrire par force, que de la souscrire dans un Monastère? = Il dit âilleurs: "Les Romains afectoient de paroître impitoyables à qui attendoit la force; c. à. d. envers ceux qui attendaient qu' on les forçât. Le moins qu' on puisse dire de cette manière de parler, c' est qu' elle n' est pas de l' usage actuel.
   8°. Par force se dit, quand il se raporte au sujet de la phrâse; et de force, quand il se raporte au régime. "Il l' a fait par force: on le lui a fait faire de force. "Il ne paroit devant la Justice que quand on l' y traine de force. Ann. Litt. = On dit aussi, amener de force; mais un peu de force me parait un peu niais. "Dès qu' il a pu amener un peu de force l' éloge de François I. et de Louis XIV, il s' écrie, etc. Journ. de Mons.
   9°. Tours de force, se dit des Bateleurs et Danseurs de corde; et figurément, de certains Écrivains guindés et contraints dans leur style. "Éloges amenés par des tours de force. L' Abé Royou. = La force du bois, c' est, au propre, l' abondance et la vigueur de la sève. On dit, au figuré, quand il échape quelque chose à la vivacité de quelqu' un, c' est la force du bois.

FORCE


FORCE, adv. Beaucoup. "Il a force argent, force amis, etc. Il ne se dit plus que dans le st. fam.

FORCÉMENT


FORCÉMENT, adv. [Forcéman; 2e é fer.] Par force, par contrainte. "Il l' a fait forcément et malgré lui.

FORCENÉ


FORCENÉ, ÉE, adj. [2e e muet, 3e é fer. long. au fém. _ On a écrit aussi forsené, mais celui-ci est moins autorisé.] Furieux et hors de sens. "Il est forcené. "Forcené de dépit, de rage, de colère. = S. m. "C' est un forcené, c' est le discours d' un forcené.

FORCENERIE


*FORCENERIE, s. f. C' est un mot de Mr.de Sévigné. Il peut être bon dans le style familier, badin ou critique. "J' ai fort envié le plaisir qu' elle avoit de tenir compagnie à ma mère, et je l' aurois préférée de bon coeur à la forcenerie des États (de Bretagne.)

FORCER


FORCER, v. act. 1°. Contraindre, violenter. Il y a une gradation entre ces trois verbes; violenter, dit plus que forcer, et forcer, plus que contraindre. "forcer son humeur, son inclination. "L' art doit perfectioner la nature, et non pas la forcer. Gaichiés. = Il régit à ou de devant les verbes, mais au passif, on dit ordinairement forcé de, comme obligé et contraint de. Bouh. "On l' a forcé de partir, ou à partir. Le 1er vaut mieux dans cette phrâse, pour éviter l' hiatus de forcé à. Il a été forcé de partir.
   Le plus fin, tôt ou tard, forcé d' être sincère,
   À~ des yeux atentifs s' est en vain dérobé.
   Il se croit sous le masque, et le masque est tombé.
       Barthe.
_ Il régit aussi à devant les noms. "Les énemis nous forcerent au combat. "Ils les ont forcés à cette démarche. = 2°. Prendre par force. "Forcer une place, une barricade, un passage. _ Forcer une bête, un lièvre, un cerf, etc. les prendre avec des chiens de chasse, après les avoir courus. = 3°. Rompre avec violence. "Forcer les prisons, une porte, un cofre. _ Forcer une clef, une serrure, les fausser. = Forcer un cheval, le faire trop courir, l' outrer. = Se forcer, faire de trop grands éforts. = Forcer de voiles, faire force de voiles. Il se dit au propre et au fig.
   FORCÉ, ÉE, adj. 1°. Contraint, qui n' a rien de naturel. "Cet homme est forcé dans toutes ses actions; style forcé, vers forcé. = 2°. Détourné du sens naturel et véritable. "Doner un sens forcé à un passage, à un Auteur.

FORCES


FORCES, s. f. pl. Grands ciseaux, dont on se sert pour tondre les draps, pour couper des étofes et les tailler: pour couper des lames de laiton, de fer-blanc, etc. "Une paire de forces.

FORER


FORER, v. a. [Foré; 2eé fer. L' o est long devant l' e muet; il fôre, fôrera, etc.] Forer, percer: forer une clef, un canon de pistolet, etc. Il ne se dit que dans ces sortes de phrâses.

FORêT


FORêT, s. f. FORET, s. m. [C' est deux mots difèrent par l' ortographe, la prononciation et le genre. Forê, Forè; 2e ê ouv. et long au 1er, è moy. et bref au 2e.] Forêt, grande étendue de pays couvert de bois. = Foret, instrument avec lequel on perce un tonneau. Acad. Outil de fer pointu en forme de vis, dont on se sert pour percer, faire des trous. Trév. En ajoutant, dans le bois, cette 2de définition sera meilleure que la 1re. L' Acad. borne trop l' usage du foret, en ne parlant que des tonneaux.

FORFAIRE


FORFAIRE, v. n. FORFAIT, s. m. [Forfère, , 2e è moy. long au 1er.] Le verbe est moins usité et moins noble que le substantif. Celui-là ne se dit qu' au Palais, pour prévariquer. "Un Juge qui vient à forfaire; et dans cette phrâse, forfaire un fief, le rendre confiscable de droit au profit du Seigneur, et dans cette expression du style familier: forfaire à son honeur, en parlant d' une fille ou d' une femme, qui s' est laissé séduire. = Forfait est du beau style, pour signifier un crime odieux. "Il a été puni pour ses forfaits. Voy. FAûTE.
   Mais s' ils sont malheureux, s' ils soufrent, s' ils périssent,
   Ce n' est qu' à leurs forfaits que ces malheurs sont dûs.      Le Franc.
FORFAIT est aussi, dans le style simple, un marché, par lequel un homme s' oblige de faire une chose à un certain prix, à perte ou à gain. "Faire un forfait avec un Architecte. "Traiter à forfait, prendre à forfait.
   REM. Forfaire n' a que l' infinitif et les temps composés: il a forfait, il avait, il eut, il aurait forfait, etc.

FORFAITûRE


FORFAITûRE, s. f. [Forfètûre, 2e è moy. 3e lon.] C' est un terme de Pratique. Il ne se dit que dans le 1er sens de forfaire. Prévarication d' un Magistrat.

FORFANTE


FORFANTE, ou FORFANTÉ, s. m. [Le 1er est dans les Dictionaires, qui écrivent ce mot sans accent. Plusieurs y mettent l' acc. et prononcent comme les Italiens, qui nous l' ont fourni.] Hableur, Charlatan, fourbe. Acad. "C' est un forfante. Il est du style familier et satirique.

FORFANTERIE


FORFANTERIE, s. f. [2e et 4e lon. 3e et dern. e muet.] Il est plus usité que le précédent. Hablerie, charlatanerie. "On a reconnu ses forfanteries.

FORGE


FORGE, s. f. FORGER, v. a. FORGERON, s. m. FORGEUR, s. m. [2e e muet au 1er et au 3e, é fer. au 2d.] Forge se dit du lieu où l' on forge le fer, et de la boutique d' un Maréchal, d' un Serrurier, d' un Armurier. Forgeron, qui travaille aux forges et bat le fer sur l' enclume. Forgeur, qui forge. "Forgeur d' épées, de couteaux, de ciseaux, de lancettes, etc. Il ne se dit pas de toute sorte d' ouvrages. Au fig. Qui invente. "Forgeur de contes, de nouvelles, de calomnies.
   FORGER, au propre, c' est doner la forme au fer, ou autre métal, par le moyen du feu et du marteau. "Forger un fer de cheval, une cuirasse, des assiètes d' argent, des cuillers, des fourchettes, etc. = Au fig. Inventer, suposer, controuver. "Forger un mensonge, un calomnie, une histoire. Forger des mots,des expressions. Forger des nouvelles. = Se forger des chimères, être visionaire. _ Se forger des dificultés, ou des monstres, pour les combatre, soit à dessein, soit par crainte. = M. Le Franc dit de Dieu, dans un sens figuré, qui tient du sens propre.
   Touché du remords sincère,
   Il rompt les fers redoutés,
   Qu' il forgea dans sa colère
   Pour ses enfans révoltés.
   Le Proverbe dit: à force de forger, on devient forgeron: à force de faire un métier, on l' aprend. Fabricando fabri fimus.

FORLIGNER


FORLIGNER, v. n. Dégénérer de la vertu de ses ancêtres. Il est vieux. On ne le dit plus que dans le style fam. et dans cette phrase: cette fille a forligné; elle s' est laissé séduire.

FORMALISER


FORMALISER (se) v. réc. [Formalizé; dern. é fer. l' i est long devant l' e muet. Il se formalîse, se formalîsera, etc.] * Plusieurs lui donent, mal-à-propos, le sens de s' informer. "Je ne m' en suis pas formalisée. Il ne signifie que s' ofenser, se choquer de... "Je lui ai parlé franchement, il ne s' en est pas formalisé. "Elle se formalîse de tout.

FORMALISTE


FORMALISTE, s. m. FORMALITÉ, s. f. [Dern. e muet au 1er, é fer. au 2d.] Formalité, est la manière de procéder en Justice selon les règles et les formes. Garder, observer les formalités. = Formaliste, qui est ataché aux formes, aux formalités. "Grand formaliste. _ En style familier et critique, façonier, vétilleux. "Il est trop formaliste. "C' est un grand formaliste; un formaliste gênant et incomode.

FORMAT


FORMAT, s. m. Il exprime ce qu' un livre a de hauteur et de largeur. Quel est le format de ce livre? C' est un in-douze, un in-4°. "Tous ses ouvrages sont imprimés dans le même format.

FORMATEUR


*FORMATEUR, s. m. FORMATION, s. f. [Forma-teur, ma-cion, en vers ci-on.] Qui forme. Action de former. = Le 1er a été forgé par Pluche. "Les principes formateurs. "La formation de l' enfant dans le ventre de sa mère. = En Gramaire, la manière dont un mot se forme d' un autre mot. "La formation des temps d' un verbe, d' un adverbe, etc.
   REM. Formation a un sens actif, et il exprime l' action de former, et non pas l' état de ce qui est formé. Aussi, quoiqu' on dise que les filles sont plutôt formées que les garçons, on ne dit pas: "La formation des filles n' est pas une règle générale, comme le dit l' Apologiste de l' État Religieux.

FORME


FORME, s. f. [2e e muet.] 1°. Ce qui détermine la matière à être telle chôse plutôt que telle aûtre. "La matière reçoit toutes sortes de formes. = Dans les Sacremens, les paroles sont la forme. _ On a long--temps disputé en Philosophie sur les formes substantielles. = 2°. La figûre extérieûre d' un corps. "L' Ange aparut à Tobie sous la forme d' un voyageur. "Doner une forme convenable à un bâtiment. "Cela comence à prendre une bone, une meilleure forme. "Pluche dit, prendre forme sans article. * Tout prit forme. _ Je pense qu' il faut dire, tout prit une forme. = 3°. Modèle de bois sur lequel on fait un chapeau, un soulier. "La forme d' un soulier, d' un chapeau. = C' est aussi la partie qui est faite sur ce modèle. "La forme de ce chapeau est toute gâtée, etc. = 4°. Il se dit des stalles du choeur, et des bancs garnis d' étofe et rembourrés. = 5°. En termes d' Imprimerie, châssis dans lequel sont arrangés les caractères. Il se dit aussi d' un des côtés de la feuille qu' on imprime. "On a tiré la première forme. = 6°. Manière, règle, conduite. "Garder toujours une même forme de vie, ou de vivre. "Garder, conserver, changer la forme du gouvernement. "Mariage fait dans les formes. "Sans aucune forme de procês. Observer les formes; se dispenser des formes.
   EN FORME, adv. Il se dit, ou sans régime: argument en forme, qui est selon les règles de la Logique; Lettres en bonne forme; ou avec la prép. de. "Une aile de bâtiment en forme de pavillon.
   Un arbrisseau, dont la tempête
   Avoit courbé la tige et fait plier la tête,
   En forme à peu près de berceau.
       L' Abé Reyre.
  PAR FORME DE, adv. "Dire quelque chôse par forme d' avis, de reproche, de plainte, de conversation, etc. = Pour la forme, adv. sans régime; uniquement pour observer les cérémonies. "Je l' ai été voir pour la forme.
   On dit, d' un procês qu' on a perdu, faute d' avoir observé les formes, que la forme emporte le fond, qu' il est bon dans le fond, mais que la forme n' en vaut rien; ce qui s' aplique, dans le discours familier, à d' autres choses que les procês.

FORMEL


FORMEL, ELLE, adj. FORMELLEMENT, adv. [Formèl, mèle, mèleman; 2e è moy. 3e e muet.] Formel, exprês, précis. Termes formels; paroles, clauses formelles. Désaveu formel. = Formellement, en termes exprês. "La Loi de Dieu le dit, l' ordone, le defend formellement.

FORMER


FORMER, v. a. 1°. Doner l' être et la forme. "Dieu a formé l' homme à son image. = 2°. Produire. "Les exhalaisons forment le tonnerre. "Prince, l' auguste sang dont vous avez été formé, etc. _ Former (faire) des voeux, des souhaits. = 3°. Figurer, façoner. "Le vâse que le potier a formé. "Former bien ses lettres, etc. = Figurément, Former un dessein, un projet. Se former des chimères. _ Former une question, une dificulté. Au Palais, former sa plainte; former oposition à; former son oposition devant le Juge, etc. = 4°. Composer une chôse de plusieurs aûtres, et lui doner une forme. "Former un corps d' armée, une République, une société. "Former une cabale, une conspiration, etc. = Former un siège, comencer le siège d' une place. = 5°. Instruire, dresser, élever. Il se dit, ou avec le seul régime direct, Former un jeune homme, un aprenti, un disciple. "La lecture des bons livres forme extrêmement les moeurs; ou il régit à ou sur: former un élève à la vertu, aux bones moeurs. "Former son style sur les meilleurs modèles. = Il régit aussi la préposition à devant les verbes. "On assure que l' éducation de la jeunesse est généralement beaucoup meilleure qu' elle n' étoit autrefois. Il est certain que les enfans savent décider, trancher, interroger, couper la parole aux hommes, importuner tout le monde sans modestie, sans discrétion. On dit que cela les forme. Je conviens que cela les forme à être impertinens; et c' est de toutes les chôses, qu' ils aprènent par cette méthode, la seule qu' ils n' oublient point. J. J. Rousseau = 6°. Se former est, ou réciproque passif: "Le poulet se forme dans l' oeuf. "Le tonnerre se forme des exhalaisons (n°. 2°.); ou il est réciproque actif. "Il s' est bien formé depuis peu. "Il se formera avec le temps, (n°. 5°.)

FORMIDABLE


FORMIDABLE, adj. Qui est à craindre. Il se dit des persones et des chôses. "Homme formidable; armée formidable; se rendre formidable. "Danger formidable. "C' est la chôse du monde la plus formidable. = En prôse et dans le discours ordinaire, il aime à marcher après le substantif, comme on le voit par les exemples. En vers, et dans le discours soutenu, il peut élégamment le précéder.
   Et de Bellone en furie
   Les formidables concerts.
= Régit-il la prép. à? (le datif.) Je n' en ai guère vu d' exemples. "On voit combien il leur étoit formidable. Targe, Hist. de Smollet. "Redoutable a ce régime: on pourrait bien le doner à formidable.

FORMULAIRE


FORMULAIRE, s. m. FORMULE, s. f. [3e è moy. et long au 1er, e muet au 2d; lère, le.] Formule, modèle des actes. Formulaire, livres de formules. "Formule d' arrêt, de serment. "Chez la plupart des Chrétiens, les actes des vertus ne sont que de vaines formules. "Le formulaire des Notaires, des Arrêts du Conseil. = Formulaire, s' est dit quelquefois, et se dit encôre d' une profession de foi.: "Signer le Formulaire. = Dans l' Ann. Litt. on l' emploie comme adjectif. "Cette aprobation... se réduisoit à ces trois lignes formulaires: "J' ai lu, etc. et je crois qu' on en peut permettre l' impression. _ Cela peut être bon pour le style plaisant ou critique.

FORNICATEUR


FORNICATEUR, s. m. FORNICATION, s. f. [Fornika-teur, cion.] Le 2d exprime le péché entre deux persones non mariées et non liées par aucun voeu: le 1er se dit de celui qui est coupable de ce péché. On ne dit point fornicatrice. = Ces deux mots ne sont employés que dans des discours et des traités de Religion.

FORS


*FORS, adv. Il s' est dit aûtrefois pour hormis; mais du temps de Vaugelas, il était déja tout-à-fait banni de la prôse, et aujourd' hui il l' est même des vers. "Tout est perdu, fors l' honeur, écrivait François I, aprês la bataille de Pavie.

FORSENÉ


FORSENÉ, voy. FORCENÉ.

FORT


FORT, FORTE, adj. FORTEMENT, adv. [For, forte, teman; 2e e muet.] Fort est adjectif, substantif et adverbe. I. Adj. 1°. Robuste, vigoureux. "Homme fort, qui a le brâs fort, la main forte. = 2°. En parlant des chôses: Capable de porter un poids, ou de résister au choc. "Il faut une poûtre, une bârre de fer plus forte. "Cette planche n' est pas assez forte. = Damas fort; du ruban bien fort; toile, étofe forte. = 3°. Propre à résister aux ataques de l' énemi. "Ville, place forte. "Des dehors plus forts encôre que le corps de la place. = 4°. Toufu. "Les blés sont forts. Bois extrêmement fort. "Cette haie est forte et impénétrable. = 5°. Rude, dificile. "Montagne forte à monter: cheval fort à dompter. "La jeunesse est forte à pâsser. Il est dificile qu' on n' y tombe dans de grands inconvéniens. _ "Le plus fort en est fait. _ Terre forte, dificile à labourer. _ Colle forte, plus tenace que l' ordinaire. _ Cofre fort, dificile à ouvrir et à rompre. = 6°. Grand, violent dans son genre. "Vent fort: pluie, gelée, douleur très-forte. "Vinaigre fort, bière forte. = 7°. Âcre, piquant au goût et à l' odorat. "Beurre fort. "Avoir l' haleine forte. "Ces odeurs sont trop fortes. = 8°. Puissant, considérable. "Son parti est le plus fort. "Les énemis sont plus forts en nombre. Cette armée est plus forte en Soldats, et l' autre en Oficiers: l' une est plus forte d' infanterie, l' autre de cavalerie. "Céder au plus fort: la raison du plus fort. = 9°. Dans les chôses morales, grand, violent, extrême: "Forte inclination, forte passion pour, etc. "Faire une forte impression sur l' esprit, sur le coeur. "Un des plus forts argumens; une des plus fortes raisons. _ Expression forte, énergique; ou dure et ofensante. "L' épithète est forte: cela est trop fort. = 10°. Fig. Habile, expérimenté. "Fort sur une matière: fort aux échecs, au piquet. "Vous êtes plus fort que moi; trop fort pour moi. = Avoir l' esprit fort et être un esprit fort, ont des sens bien diférens: l' un anonce une véritable force d' esprit; l' autre n' en énonce que la faiblesse. = Tête forte, capable des plus grandes afaires.
   Rem. 1°. Forte, peut se placer devant ou après le substantif au choix de l' Écrivain dirigé par l' oreille et le goût: femme forte, forte épée, etc. Si l' on disait forte femme, ou épée forte, on parlerait fort mal. Au masc. en parlant des persones, il ne s' emploie guère seul, et~ sans la compagnie d' un adjectif ou d' un adverbe de comparaison. On dit bien esprit fort; mais on ne dirait pas, c' est un fort homme, ou un homme fort. On dira, un homme fort et courageux, ou bien, extrêmement fort. * "Sous les forts règnes de François I et de Henri II. les Réformés furent fort soumis. BOSS. "Ils s' emparèrent d' un fort camp. Targe. Celui-ci entre autres est excessivement dur. Fort, n' aime pas à précéder, surtout un monosyllabe. Voy. VIGOUREUX.
   2°. Quelques-uns lui font régir la prép. de. "Voilà qui est fort de café: cette liqueur est forte d' eau de vie. L' Auteur du Diction. Néol. pour se moquer d' un Poète, qui parlait de traits forts de sens, dit que son style est fort d' esprit. Je ne sais si cet article et de l' Ab. Des Fontaines, qui a augmenté ce Dictionaire, mais il a employé lui-même ce régime. Il dit d' une Épitre en vers, que les vers y sont un peu forts de plaisanterie et de satire. Fréron a dit aussi: "La solution de ce problème littéraire et un peu forte de métaphysique. = Corneille et Voltaire, l' un en vers, l' aûtre en prôse ont mieux employé ce régime.
   Je m' attachois sans crainte à servir la Princesse,
   Fier de mes cheveux blancs et fort de ma foiblesse.
       Pulchérie.
"Les Turcs... dangereux encôre et forts de nos divisions, assiégeaient depuis deux ans Candie.
   3°. Se faire fort, se rendre garant, régit de et l' infinitif. "Il se fait fort de vous convaincre. "Je me fais fort d' en venir à bout. "Je n' ai pas ces mille écus, dit l' usurier, mais je me fais fort de vous trouver un homme, qui vous les prêtera. Le Sage. = Dans cette expression, fort est indéclinable; de sorte qu' une femme dira, je me fais fort et non pas forte; et au pluriel, ils se font fort et non pas forts. = Du reste cette expression n' est pas fort noble, et elle est peu digne du style d' une tragédie.
   Le Roi, s' il s' en fait fort, pourroit s' en trouver mal.
       Nicom.
  II. FORT, subst. = L' endroit le plus fort d' une chôse: "Mettre une poutre sur son fort; le fort de la voûte, de la balance, de l' épée, etc. = L' endroit le plus toufu d' un bois. "S' enfoncer dans le fort du bois. "Relancer une bête dans son fort. = Fig. Ce qu' on sait le mieux; par où l' on excelle. "La chronologie est son fort. "Il faut le tirer de son fort, et vous le trouverez fort ignorant sur tout aûtre article. = Le fort et le faible; du fort au faible; le fort portant le faible, compensation faite d' une chôse avec une aûtre. = Le tems où une chôse est à son plus haut point. "Dans le fort de l' hiver, de l' été, au fort de la tempête. "Dans le fort de ma colère, je n' ai point fait de plaintes contre vous. Voit.
   Ce ver caché, ce remors, qui vous ronge,
   Jusqu' au plus fort de vos égaremens.
       Rouss.
= Faire son fait de et faire fort sur, expressions souvent employées par Bossuet, et aujourd' hui peu en usage. "Faire son fort d' une preûve. "Je n' ai vu aucun homme de bien, qui fît fort sur cet article. _ Que d' expressions utiles, que l' usage a abandonées depuis moins de cent ans, qu' il n' a pas remplacées!
   FORT, ouvrage de terre ou de maçonerie, propre à résister~ aux ataques des Énemis. Bâtir; ataquer,, prendre un fort. "Un fort de terre défendait l' entrée du pont.
   III. FORT, adv. de quantité. Extrêmement; beaucoup. Il modifie les adjectifs, les adverbes et les verbes; il est fort aimable; fort bien, fort heureûsement; il m' a fort diverti; mais il y a beaucoup de verbes avec lesquels il ne se combine pas heureûsement. "Je l' ai fort vu depuis quelque temps, comme dit M. de Coulanges, a quelque chôse de dur et de sauvage. Beaucoup, est d' un usage plus étendu et plus sûr. = Fort, se met toujours aprês les temps simples des verbes, et dans les temps composés entre l' auxiliaire et le participe. "Il m' amûse fort, il me plait fort: il m' a fort ennuyé. Voy. TRèS. = * Anciènement on disait fort pour trop. "M. de Chaudebonne est fort chagrin pour batre les sonnettes. Voiture. On dirait aujourd' hui, trop chagrin pour, etc. = Fort, vigoureûsement. "Fraper fort: heurtez plus fort. = Fort et ferme, adv. "Il travaille fort et ferme à une espèce de liquidation des controverses. Boss. Cette expression n' est pas du beau style.
   IV. FORTEMENT, avec vigueur, avec véhémence. "Parler, agir fortement. "Apuyer fortement son opinion.

FORTERESSE


FORTERESSE, s. f. [Forterèce: 2e et dern. e muet, 3e è moy.] Petite place bien fortifiée. "Ataquer, prendre une forteresse.

FORTIFIANT


FORTIFIANT, ANTE, adj. Qui fortifie. Il ne se dit que des remèdes et des alimens.

FORTIFICATION


FORTIFICATION, s. f. [Fortifika-cion, en vers ci-on.] 1°. Ouvrage de terre ou de maçonerie, qui rend une place forte. "Fortification régulière ou irrégulière. "Abatre, râser les fortifications. = 2°. L' art de fortifier les places: "Il entend bien la fortification. "Se conaitre aux fortifications. = Dans l' un et l' autre sens il s' emploie plus souvent au pluriel qu' au singulier.

FORTIFIER


FORTIFIER, v. act. [Fortifi-é: dern. é fer. Devant l' e muet, l' i est long: il fortifie. Au futur et au conditionel, cet e muet ne se fait pas sentir: il fortifiera, fortifierait; pron. fortifira, firè, en 4 syllabes.] 1°. Rendre fort. Fortifier un camp, une ville. "Les Énemis s' étaient fortifiés dans un poste avantageux. = 2°. Doner plus de force. Il se dit du corps et de l' esprit. "Le bon vin fortifie l' estomac, si l' on en boit avec modération. "La Philosophie chrétiène fortife l' esprit et le coeur. "Se fortifier dans sa résolution. = 3°. Se fortifier, devenir plus fort. "Cet enfant se fortifie tous les jours.
   REM. Se fortifier et fortifié, régissent de ou contre, et quelquefois tous les deux. "L' admiration qu' on avoit pour son mérite personel se fortifioit de l' atendrissement qu' inspiroient ses malheurs. Hist. d' Angl. "Cette corruption générale de moeurs fortifiée de l' ignorance et de la férocité des Barbâres. Le Franc. "Octave ne cherchait qu' à se fortifier du secours d' Antoine contre les défenseurs de la République. Vertot.

FORTIN


FORTIN, s. m. [For-tein.] Petit fort.

FORTUIT


FORTUIT, UITE, adj. FORTUITEMENT, adv. [Fortu-i, ite, ite-man; en conversation, for-tui.] Ils se disent de ce qui arrive par hazard. "C' est un câs fortuit. Rencontre fortuite. "Cela est arrivé; je l' ai rencontré fortuitement.
   REM. 1°. Fortuit, est de trois syllabes, même en prôse. À~ plus forte raison en vers.
   Le Maître vient le voir, et par un câs fortuit
   Il oublie, en parlant de refermer la porte.
       L' ab. Reyre.
Il y a une syllabe de trop dans le premier vers. Peut-être est-ce une faûte d' impression, et faut-il lire, par câs fortuit.
   2°. Il semble à La Touche que fortuitement signifie quelque chôse de plus que par hasard, et qu' il marque souvent un hasard heureux. "Il trouva fortuitement un vaisseau, qui le porta où il avoit dessein d' aller. _ La remarque me parait juste.

FORTUNE


FORTUNE, s. f. FORTUNÉ, ÉE, adj. [3e e muet au 1er, é fer. aux 2 aûtres.] Fortune, est 1°. Cas fortuit, hasard. "Les accidens de la fortune. Tenter, brusquer fortune. Le 2d de ces verbes est bâs. = 2°. Il signifie, tantôt bonheur. "Il est en fortune; il n' a pas ou il a peu de fortune; tantôt malheur. "Contre fortune bon coeur; Dieu vous préserve de mal et de fortune. St. prov. = 3°. Avancement et établissement favorable. Faire fortune, ou sa fortune. "Établir, afermir, ou perdre, ruiner sa fortune. "Il me doit sa fortune, etc. = 4°. État ou condition où l' on est. "Être content de sa fortune. = 5°. Biens de la fortune, les richesses, les honeurs, les charges. = 6°. Homme ou soldat de fortune, qui d' un petit comencement est parvenu à de grands biens, à des grandes considérables. "Ce négociant est un homme de fortune. "Le Maréchal Fabert était un soldat de fortune. = 7°. La Fortune, Divinité païène, dont on parle encôre aujourd' hui plus qu' il n' est permis, ce semble, à des chrétiens. "La Fortune lui rit, le favorise. "La Fortune lui a tourné le dôs, etc. etc. "La Fortune se joûe de tout, etc. "Les Hommes demandent à la Fortune un présent qu' ils ne doivent atendre que de la Vertu. D' Aguesseau. = Anciènement on employait presque toujours fortune sans article. "Contre fortune instruit. Malherbe. On dit encôre: courir, tenter, chercher fortune. "Un jeune Manceau, qui venoit à Paris chercher fortune. LE SAGE. Faire fortune. _ Celui-ci se dit même des chôses. "Ce systême n' a pas fait fortune.
   On dit figurément, adorer, encenser la fortune; sacrifier à la fortune; courir après la fortune, s' atacher à ceux, qui sont en faveur, en crédit. Et proverbialement, atacher un clou à la roûe de la Fortune, trouver moyen de la fixer.
   Rem. 1°. En parlant de la Fortune en général, on l' emploie toujours au singulier. On dit des fortunes rapides, de bones fortunes; mais on dit; la gloire, la fortune et non pas les fortunes, comme dit St. Evremont.
   2°. Dans Athalie, Josabet parlant de Joas à la Reine, lui dit:
   Vous avez entendu sa fortune;
   Sa présence à la fin pourroit être importune.
Qu' est-ce qu' entendre la fortune de quelqu' un? En prôse ce serait une expression barbâre; mais les Poètes ont de grands droits. Ils supriment souvent des mots que le Lecteur doit sous entendre. Vous avez entendu sa fortune, veut dire, vous avez entendu le récit de ce qui lui est arrivé.
   De fortune, de bonne fortune, adverbes; par hasard, par un heureux hasard. Ils ont vieilli et ne peuvent plus être bons que pour le style familier. "Le loup de fortune passa. La Font.
   Au mot de guet, que de fortune,
   Notre loup avoit entendu.      Id.
"Elle vous a envoyé Mlle... qui, de bonne fortune n' avoit pas encore trouvé de condition. Voiture.
   FORTUNÉ, heureux. Il est peu usité en prôse dans le discours ordinaire; mais en vers et dans le discours relevé, il est quelque--fois plus noble que le terme d' heureux. VAUG. L. T. Prince fortuné, siècle fortuné. = Fortuné, heureux, (synon.) le 2d se dit à l' égard de tous les genres de biens et de bonheur, le 1er se dit d' un bonheur singulier et des grâces signalées. Si vous jouez à pair ou non, et que vous gâgniez, vous êtes heureux: et quand vous aurez peu de chances pour vous, à la loterie, par exemple, vous êtes fortuné, si vous gâgnez. Celui-là est fortuné, qui doit beaucoup plus à la fortune qu' à sa sagesse: celui-là est heureux, qui doit à sa sagesse tout ce qu' il a pu ne pas abandoner à la fortune, etc. ROUB. Syn. = Il aime à suivre le nom qu' il modifie, surtout au fém. En vers le masc. peut précéder.
   Pour acomplir ces fortunés présages.
Fortuné Prince, fortuné siècle soneraient fort mal; fortuné homme serait épouvantable.
   REM. Fortuné, signifie heureux, et non pas riche, qui a de la fortune. "Par les largesses de plusieurs prosélytes fortunés, dit M. Berault de Bercastel. En ce sens, c' est un barbarisme.

FORT-VêTU


FORT-VêTU, s. m. Homme qui a un habit au-dessus de son état.

FORûRE


FORûRE, s. f. Terme de serrurier. Trou fait avec un foret.

FôSSE


FôSSE, s. f. FôSSÉ, s. m. [Fôce, fôcé: 1re lon. 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Fôsse, est 1°. un creux large et profond dans la terre, fait par la natûre ou par l' art. "Tomber dans une fôsse. Faire, creuser une fôsse pour un arbre, des fôsses pour des vignes. = 2°. Il se dit plus particulièrement du creux qu' on fait en terre pour y mettre un corps mort. = Fôssé, est une fôsse creusée en long pour enfermer quelque espace de terre, ou pour la défense d' une Place, ou pour faire écouler les eaux. "Remplir, combler, sauter le fôssé. "Pays tout coupé de fôssés.
   On dit, proverbialement, avoir un pied dans la fôsse, étre vieux ou malade. _ Mettre les clefs sur la fôsse, renoncer à une succession. = Faire de la terre le fôssé; ce qu' on ôte d' une chôse la faire servir à une aûtre; ne rien laisser perdre.

FOSSETTE


FOSSETTE, s. f. [Focète: 2eè moy. 3e e muet.] 1°. Petit creux que les enfans font en terre, pour jouer à qui y fera tenir plus de noix, de noisettes, ou de pièces de monoies, etc. "Jouer à la fossette. = 2°. Petit creux, que quelques persones ont au bout du menton, ou qui se forme au milieu des joûes, quand elles rient.

FOSSILE


FOSSILE, adj. et subst. [Focile.] Qui se tire du sein de la terre. "Sel fossile, coquilles fossiles. = S. m. Un fossile, les fossiles.

FOSSOYER


FOSSOYER, v. act. FOSSOYEUR, s. m. [Fo-soa-ié, ieur.] Il fossoie, fossoiera, etc. et non pas fossoye, fossoyera, etc. = Suivant l' Acad. on ne dit fossoyer que pour fermer avec des fossés. Le Dict. de Trév. ajoute, fouir, creuser en terre, faire des fossés; et il parait que c' est l' emploi le plus ordinaire de ce verbe. = Fossoyeur, ne se dit que de celui, qui fait les fôsses pour enterrer les morts. "Shakespear a introduit des fossoyeurs dans sa Tragédie de Hamlet.

FOU


FOU, Voy. FOL.

FOûDRE


FOûDRE, s. m. et f. [1re lon. 2e e muet: foû-dre.] Exhalaison enflamée, qui sort de la nuë avec éclat et violence. = Il y a longtems que Muret a remarqué, sur un sonnet de Ronsard, que ce mot est masc. et fém. MALHERBE le fait tantôt d' un genre, tantôt de l' aûtre. "Prendre ta foûdre, Louis. "Portant la foûdre de nos Rois.
   Tu passes comme un foûdre en la terre flamande.
   À~ peine il a vu le foudre
   Parti pour le mettre en poûdre.
Suivant Ménage et Bouhours, on le fait plus souvent fém. dans le propre, et masc. dans le figuré. L' Acad. done plusieurs exemples du féminin, et n' en done que deux du masculin au propre. "l' éclat de la foûdre, la foûdre est tombée. Lancer la foûdre; touché de la foûdre; crime digne de la foûdre. "Le foudre vengeur. "Être frapé du foûdre ou de la foûdre. = Au figuré, il faut distinguer. Parle-t' on d' un homme, c' est le foûdre, un foûdre de guerre.
   Mânes des grands Bourbons, brillans~ foûdres de guerre.
       Corn.
Parle-t' on du courroux des Dieux ou des Princes, c' est la foûdre.
   Ton Monarque éternel ne cherche qu' à t' absoûdre,
   Il t' aime, ta douleur peut éteindre sa foûdre.
= On dit au pluriel, les foûdres de l' Église, l' excomunication.
   FOûDRE, est aussi le nom d' un grand vaisseau, dont on se sert en Allemagne, et qui contient plusieurs muids de vin.
   Coup de foûdre, se dit figurément, d' un malheur imprévu. "Cette séparation fut un coup de foûdre pour moi. Télém. _ Aller comme la foûdre (st. famil.) fort vite. _ Être craint comme la foûdre; être terrible et violent.

FOUDROIEMENT


FOUDROIEMENT, s. m. FOUDROYANT, ANTE, adj. FOUDROYER. v. act. [Fou-droâ--man, droa-ian, iante, : 2e lon. au 1er. _ L' oi est long aussi devant l' e muet, il foudroie, foudroiera; et cet e muet ne se fait pas sentir; fou-droâ, droâ-ra, etc.] Foudroyer, c' est fraper de la foûdre. Foudroyant, qui foudroie. Foudroiement, action par laquelle une persone ou une chôse est foudroyée. Il a le sens passif. On ne dit pas le foudroiement de Jupiter qui foudroya les Titans, mais le foudroiement des Titans, de Phaéton, qui furent foudroyés. "Jupiter foudroyant: Au propre, ils ne se disent que dans ces phrâses. = Au figuré, on ne dit point foudroiement; on dit poétiquement, brâs foudroyant, épée foudroyante; et dans le style noble sans être poétique, foudroyer une ville, un bastion, les batre à coup de canon et de mortier avec grande violence. Et en parlant d' un Orateur, foudroyer les vices, les erreurs.
   Il ne suporte plus les reproches terribles,
   Dont il est foudroyé par la divine loi.
   Et cherche à surmonter par des transports horribles,
   Les remords et l' effroi.
       Le Franc.
= Foudroyer, est quelquefois neutre, sans régime. "Il tonne, il foudroie, il mêle le ciel et la terre. Patru.
   Rem. 1°. Foudroyé, dans le propre, ne doit se dire que d' un homme frapé de la foûdre en punition de ses crimes: ordinairement on doit dire; frapé de la foûdre ou du tonerre.
   2°. Foudroyer, ne me parait pas si propre dans les batâilles anciènes, où il n' y avait pas de canons. "Il est surpris de trouver une armée énemie, qui * foudroie la sienne. MOREAU. Louis le Jeune.

FOUET


FOUET, s. m. FOUETTER, v. act. [Fouèt, monos. è moy. fouè-té: 1re è moy. 2e é fer. Le 1er è est plus ouvert devant l' e muet: il fouette, fouettera, ou fouète, fouètera.] Fouet, cordelette, atachée à un bâton, avec laquelle les cochers et voituriers frapent les chevaux, mulets, etc. pour les faire aller. = Coups de verges ou de corde dont on châtie les enfans. "Doner le fouet; avoir le fouet. = Coups de verges dont la Justice fait châtier quelques criminels. "Condamné au fouet. Voy. CUSTODE et CLAQUER.
   FOUETTER, doner des coups de fouet. "Fouetter les chevaux, un enfant; un coupeur de bourse. = Au figuré, v. n. "Le vent fouette; il lui fouette dans le visage. "La pluie, la neige, la grêle fouettent. "Le canon fouette tout le long de la courtine. Ce canton a été fouetté du mauvais temps. = Pour dire, nous partons, on dit proverbialement, et puis fouette cocher. "Un fiacre est venu nous prendre: nous nous y sommes emballés sans façon, et puis fouette cocher. MARIV.
   FOUETTÉ, ÉE, adj. OEillet fouetté, tulipe, pêche fouettée, marqués de petites raies, comme de coups de fouet. = Crème fouettée. Voy. CRèME, à la fin.

FOUETTEUR


FOUETTEUR, s. m. [Fouè-teur: 1reè moy.] Celui, qui fouette. Il ne se dit point sans épithète. "Ce Maître d' école est un grand fouetteur, un fouetteur impitoyable.

FOUGèRE


FOUGèRE, s. f. [Fou-gère: 2e è moy. 3e e muet.] Sorte de plante qui croît ordinairement dans les bois. Il en est beaucoup parlé dans les chansons et les poésies pastorales. "Sur la verte fougère. Danser sur la fougère. "La cendre de la fougère sert à faire le verre.

FOUGUE


FOUGUE, s. f. FOUGUEUX, EûSE, adj. [Fou-ghe, gheû, gheû-ze: 2ee muet au 1er, lon. aux 2 aûtres. L' u est muet: il n' est mis là que pour doner au g un son fort qu' il n' a pas devant l' e.] Fougue, est proprement un moûvement violent et impétueux, ordinairement acompagné de colère. "Être, entrer, se mettre en fougue. "Quand la fougue lui prend. "Dans la fougue, ou sa fougue. = On le dit aussi des animaux. "Ce cheval a trop de fougue. = Figurément, enthousiasme, saillie.
   La plupart emportés d' une fougue insensée,
   Toujours loin du bon sens vont chercher la pensée.
       Boil.
FOUGUEUX, qui est sujet à entrer en fougue. Il peut se placer aprês ou devant le substantif. "Cheval fougueux, le fougueux Aquilon; vivacité fougueûse. "L' Ardente et fougueûse Bellone. Il faut toujours consulter l' oreille. Fougueux cheval, par exemple, Aquilon fougueux, fougueûse vivacité, et Bellone fougueûse~ soneraient mal.

FOUILLE


FOUILLE, s. f. FOUILLER, v. act. [Fou-glie, glié: mouillez les ll: 2ee muet au 1er, é fer. au 2d.] Fouille, est le travail qu' on fait en fouillant la terre. Faire une fouille. "La fouille des terres. = Fouiller, creuser pour chercher quelque chôse. "Fouiller des mines d' or, d' argent. "Fouiller la terre pour chercher des antiques, des médailles. = Fouiller quelqu' un, un voleur, par exemple, chercher soigneûsement dans ses poches, ses habits, s' il n' a pas caché quelque chôse. = V. n. "Fouiller dans un champ, dans sa poche, sa bourse. _ Fouiller dans les livres, les archives. = * Au figuré, il est bâs et il fait un mauvais éfet dans une histoire sérieûse. "Sa Sainteté fouilloit fréquemment dans la bourse des fidèles. Hist. d' Angl. Il n' est bon que pour le style familier, plaisant ou critique, ou polémique. "Boileau ne calomniait pas les moeurs de ceux qu' il critiquait. Il ne fouilla pas dans tous les replis de leur vie... ainsi qu' ont fait d' autres Écrivains à l' égard des deux Rousseau, de M. Le Franc, etc. Le Chev. des Sabl.
   FOUILLE-AU-POT, petit marmiton.

FOUINE


FOUINE, s. f. [Foui-ne, 2 syll. e muet.] Grosse belette. "La fiente de fouine sent le musc.

FOUIR


FOUIR, v. n. [Foui, monos.] Creuser. "Fouir la terre; un puits, etc. = V. n. Il faut fouir bien avant. = Il ne se dit proprement que de la terre. Acad.

FOULANTE


FOULANTE, adj. fém. Il ne se dit qu' avec pompe.

FOULE


FOULE, s. f. [Fou-le: 2e e muet.] 1°. Presse, multitude de persones, qui s' entrepoussent. "Se jeter dans la foule. Je crains la foule: laissons écouler, pâsser la foule. = Figurément, une foule d' afaires, de raisons, de pensées, etc. "La foule des afaires l' acâble. "Il allégua une foule de raisons. = 2°. Opression, vexation. "Cela va à la foule du peuple. Acad. Il n' est pas fort usité en ce sens.
   REM. 1°. Foule, régit le génitif, (la prép. de sans article.) ou avec l' article. "Une foule de curieux, d' importuns. La foule des curieux, des importuns. Si l' article de foule est indéfini, comme dans le 1er ex. celui du génitif doit être aussi indéfini, et au contraire s' il est défini, comme dans le 2d ex. on doit dire des et non pas de. Ainsi l' on dira le grand nombre, la multitude des soldats, et un grand nombre, une multitude de soldats. "* La Bruyère fournit un exemple contraire à cette remarque. "La foule inombrable de cliens et de courtisans, dont la maison d' un Ministre se dégorge tous les jours. Je crois qu' il falait dire: la foule des cliens et des courtisans, etc.
   2°. FOULE, comme multitude, nombre et autres termes semblables ne peut se dire que de plusieurs, et ne doit pas être modifié par un nom au singulier, ce nom fût-il un nom collectif: on dit une foule de soldats, une multitude d' habitans, un grand nombre de citoyens; mais on ne dit pas une foule d' armée, une multitude de ville, un grand nombre de peuple, etc. * Voltaire dit pourtant, escorté d' une foule de noblesse. (Hist. du Parl. de Paris) et Mme. de B... escorté d' une foule de peuple (Hist. d' Angl.); et Prévot (Hist. des Voyages) dit aussi une foule de peuple. Je voudrais dire, escorté d' une foule de Gentilshommes, de gens du peuple.
   3°. Le verbe, après foule, doit-il être au pluriel ou au singulier? Doit-il s' acorder avec foule, ou avec le pluriel que foule régit? Doit-on dire, avec M. Moreau. "Une foule de courtisans cherchent à deviner son foible; ou bien, faut-il dire, cherche, etc. Je crois qu' il faut le singulier. Voyez COLLECTIF.
   4°. Faut-il dire en foule, ou à la foule? Le premier me parait le meilleur, et La Touche est dans ce sentiment. L' Acad. les dit également. "Ils entrèrent tous à la foule, en foule. Quelques Auteurs ont dit, à la foule.
   Les Parthes à la foule aux Syriens mêlés.
       Corn. Rodogune.
"Les ruës se trouvèrent toutes remplies de peuples, qui y acouroient à la foule. ANON. Pour l' emploi irrégulier de peuples au pluriel, voyez Peuple. = Au figuré, on dit toujours en foule. "Les pensées, les raisons se présentent en foule.
   Se retirer de la foule, c' est, au figuré, et dans le style simple ou médiocre, se tirer du commun.
   FOULER, v. act. [Foul-lé; 2e. é fer.] 1°. Presser quelque chôse qui cède. "Fouler l' herbe, la vendange. "Les chevaux l' ont foulé aux pieds. = Fouler aux pieds, figurément, traiter avec mépris. "Fouler aux pieds les grandeurs, les vanités du siècle, etc. les lois, les sentimens d' honeur, de religion, etc. = 2°. Oprimer par des exactions, surcharger. "Fouler les peuples, les Provinces. = 3°. Blesser. "Les selles neûves foulent les chevaux. "Il s' est foulé le pied. = "Cette bête a les jambes foulées, usées par un long et violent travail.

FOULERIE


FOULERIE, s. f. FOULON, s. m. Le 1er se dit du lieu où l' on foule les draps; le 2d de l' Artisan qui les foule. = On apèle terre à foulon, une sorte de terre, qui sert à dégraisser les draps; et moulin à foulon, un moulin qui sert à les fouler.

FOULûRE


FOULûRE, s. f. [Fou-lûre: 2e lon.] Contusion, blessûre d' un membre foulé. "Remède pour la foulûre des nerfs.

FOUR


FOUR, s. m. [Monosyllabe: on prononce l' r finale.] Lieu voûté en rond avec une seule ouvertûre par devant, où l' on fait cuire le pain, la pâtisserie. = Pièce de four, gâteau, tourte, etc. on ne le dit point du pain. = Four se dit aussi du lieu où est le four à cuir du pain. Aller au four, revenir du four. = Il se dit encôre des lieux voutés et ouverts par en haut, où l' on fait cuire la chaux, la brique, le plâtre. = Lieu où l' on cache ceux qu' on enrôle par force.
   On dit, proverbialement, d' un lieu où il fait extrêmement chaud, qu' il y fait chaud comme dans un four, et d' un lieu fort obscur, qu' il y fait noir comme dans un four. Voy. CHAUFER.

FOURBE


FOURBE, adj. et subst. FOURBER, v. act. FOURBERIE, s. f. [2e e muet au 1er et au 3e, é fer. au 2d.] Fourbe, adj. Trompeur, qui trompe avec finesse. Fourber, tromper par de mauvaises finesses. Fourbe, subst. et Fourberie; tromperie. "Il ou elle est bien fourbe. = Subst. masc. "C' est un fourbe, un grand fourbe. _ On ne dit pas une fourbe. "Il fourbe tout le monde; il m' a fourbé vilainement. "Inventer une fourbe. Faire une fourberie. = Le verbe fourber n' est que du style familier.
   Il s' agit de fourber un ingrat très-insigne,
   Qui du premier coup-d' oeuil devine au moindre signe.
       Destouches.
Fourbe, adj. et Fourberie, sont de tous les styles. = Suivant l' Auteur des Réflex. etc. Fourbe (subst.) et fourberie, se disent avec quelque diversité de signification. La Touc. n' est pas de cette opinion: ces deux mots lui paraissent signifier la même chôse; et il assûre qu' il pourrait en alléguer plusieurs exemples. Ce qui est plus sûr encôre, c' est que l' emploi de fourbe est moins comun que celui de Fourberie. "Appius inventa une fourbe détestable, dont le succès devoit faire tomber Virginie entre ses mains. Il semble qu' avec inventer et découvrir, on dit mieux fourbe que fourberie.

FOURBIR


FOURBIR, v. act. FOURBISSEUR, s. m. FOURBISSûRE, s. fém. [Four-bi, bi-ceur, sûre: pénult. lon. au dern.] C' est, en parlant des armes, nettoyer, polir. Nettoiement, polissûre. _ Artisan, qui fourbit et qui monte des épées. "Fourbir une épée, un mousquet, une cuirasse. "La fourbissûre d' une lame. Un Maître Fourbisseur. "Acheter une épée chez le Fourbisseur.

FOURBU


FOURBU, ÛE, adj. FOURBûRE, s. f. [2e lon. au 2d et 3e.] Ils expriment la maladie d' un cheval entrepris des jambes pour avoir trop travaillé, ou pour avoir bu trop tôt après avoir eu chaud. "Cheval fourbu; jument fourbûe. "Dessoler un cheval pour la fourbûre.

FOURCHE


FOURCHE, s. fém. FOURCHER, v. n. [2e e muet au 1er, é fermé au second.] Fourche, instrument de bois ou de fer, avec deux ou trois branches ou pointes. "Fourche d' étable, fourche à faner. "Chasser à coups de fourche. = Fourches patibulaires. Voy. PATIBULAIRE. = À~ la fourche, adv. Négligemment, ou grossièrement.
   FOURCHER, se séparer en deux ou trois, en manière de fourche. "Ces arbres fourchent; chemin qui fourche. _ Figurém. famille, qui n' a point fourché; qui n' a fait qu' une seule branche. = "La langue lui a fourché: il a dit un mot pour l' aûtre. = Se fourcher. "Ces cheveux se fourchent, commencent à se fourcher. = Fourché, adj. "Avoir les cheveux fourchés. "Animaux qui ont les pieds fourchés, ou fendus.

FOURCHETTE


FOURCHETTE, s. f. [Four-chète: 2eè moy. 3e. e muet.] 1°. Ustensile de table, en forme de petite fourche à trois ou quatre pointes, dont on se sert à table pour prendre les viandes. = 2°. Fourche à deux pointes, sur laquelle on posait autrefois le mousquet, en le tirant. "Mousquet à fourchette. = 3°. Long morceau de bois à deux branches de fer, qui est ataché à la flèche d' un carrosse, et que l' on baisse pour empêcher que le carrosse ne viène à reculer, quand il est sur un endroit qui va en penchant. "Abatre la fourchette. = 4°. Endroit du pied du cheval qui est plus élevé que le dedans du pied, et qui finit au talon. "Cheval blessé à la fourchette. = 5°. Partie d' une manchette, qui garnit l' ouvertûre de la manche d' une chemise d' homme.

FOURCHON


FOURCHON, s. m. Une des pointes d' une fourche ou d' une fourchette.

FOURCHU


FOURCHU, ÛE, adj. [2e lon. au 2d.] Qui se fourche. "Arbre fourchu; menton fourchu; chemin fourchu; barbe fourchûe. = Faire l' arbre fourchu: avoir la tête en bas et les pieds en haut, écartés l' un de l' aûtre. * On dit, en Provence, faire l' arbre droit. C' est un provençalisme.

FOURCHûRE


FOURCHûRE, s. fém. L' endroit où une chôse comence à se fourcher. Trév. Rich. Port. L' Acad. ne le met pas.

FOURGON


FOURGON, s. m. Sorte de charrette, dont on se sert dans les armées pour porter les munitions et le bagage. On s' en sert aussi dans les voyages. = Pièce de fer emmanchée, qui sert à remuer et à arranger le bois et la braise dans le four. = Le Proverbe dit: la pelle se moque du fourgon: cet homme se moque de quelqu' un qui aurait autant de droit de se moquer de lui.

FOURGONER


FOURGONER, v. n. C' est proprement remuer avec le fourgon. = Par extension, remuer le feu sans nécessité, avec les pincettes, et le déranger en voulant l' acomoder. = Figurément, fouiller mal adroitement en brouillant et mettant tout sens dessus dessous. "On~ a fourgoné dans ce cofre: tout y est pêle-mêle: st. famil.

FOURMI


FOURMI, s. f. FOURMILLIèRE, s. fém. [3e è moy. et long au 2d: mouillez les ll: four-mi-gliè-re.] Fourmi, petit insecte, qui fait ordinairement sa demeure sous terre. = On dit, proverbialement, de quelqu' un qui se tient dans une grande soumission devant un aûtre, qu' il est plus petit qu' une fourmi devant lui. = Lieu où se retirent les fourmis. "Il y a plusieurs fourmillières dans ce petit champ.
   Rem. 1°. L' Ab. Prévot écrit fourmie: il parle de fourmies blanches, espèces de monstres. Hist. des Voy. On dit fourmi, sans e.
   2°. Fourmillière s' emploie au figuré; mais il n' est rien moins qu' un terme noble. On dit: une fourmillière de peuple, de paûvres, de souris, pour dire une grande quantité de, etc. Un Écrivain anonyme l' emploie bien ridiculement. Il dit dans une Relation. "Tous les apartemens (de Versâilles) la galerie et les terrasses n' étoient plus qu' une fourmillière de Princes et de Seigneurs.

FOURMILLEMENT


FOURMILLEMENT, s. m. FOURMILLER, v. neut. [Four-mi-glie-man, mi-glié: mouillez les ll: 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Fourmiller, c' est 1°. Abonder. "Cette garenne fourmille de lapins. "La France fourmille de Soldats. = 2°. Causer un picotement entre cuir et chair, principalement aux pieds et aux mains, qu' on apelle fourmillement. "La main, les pieds me fourmillent: je sens un fourmillement par tout le corps. = Fourmillement ne se dit point dans le premier sens de fourmiller. On dit, en ce sens, fourmillière. = Ce verbe n' est pas du beau style, et on s' en sert plutôt pour blâmer que pour louer. "Cet écrit fourmille de pensées neuves et hardies. Anon. Je voudrais dire, est plein, est rempli, etc. On dit qu' un livre fourmille de faûtes, ou que les faûtes, les erreurs y fourmillent, qu' elles y sont en grand nombre. "Ces petites aventûres, dont la société fourmille. MARM. Voyez un aûtre exemple au mot FOURNISSEUR.

FOURMILLIèRE


FOURMILLIèRE. Voyez FOURMI. _ Trév. écrit fourmillère; mais cette ortographe n' exprime point la prononciation.

FOURNAISE


FOURNAISE, s. fém. [Four-nèze: 2e è moy. 3e e muet.] Sorte de grand four. "Fournaise ardente.

FOURNEAU


FOURNEAU, s. m. [Four-no: 2e dout. au sing. lon. au plur. fourneaux.] 1°. Vaisseau propre à contenir du feu. "Faire bouillir une marmite sur un fourneau. = 2°. Grand four, où l' on fond le verre. = 3°. Creux fait en terre, et chargé de poudre, pour faire sauter une murâille.

FOURNÉE


FOURNÉE, s. fém. [2eé fermé et long, 3e e muet.] La quantité de pain ou de chaux qu' on peut faire cuire à la fois dans un four.

FOURNIER


FOURNIER, IèRE, s. m. et f. [Four--nié, niè-re: 2eé fer. au 1er, è moyen au second.] Celui, celle qui tient un four public.

FOURNIL


FOURNIL, s. m. [On ne pron. point l' l finale.] Le lieu où est le four et où l' on pêtrit la pâte.

FOURNIMENT


FOURNIMENT, s. m. [Four-niman.] Étui de bois ou de corne à mettre de la poûdre, que portent ceux qui ont des armes à feu, pour les charger.

FOURNIR


FOURNIR, v. act. FOURNISSEUR, s. m. FOURNITûRE, s. f. [Four-ni, niceur, ni--tûre: 3e lon. au 3e.] Fournir, 1°. Pourvoir. Il gouverne, ou l' acusatif de la persone et l' ablatif de la chôse; ou l' acusatif de la chôse et le datif de la persone. On dit également: on l' a fourni de de ce qui était nécessaire, ou, on lui a fourni ce qui, etc. Le second est plus usité. "Ce livre m' a fourni plusieurs remarques. "Son esprit lui fournit tous les jours de nouvelles pensées. = 2°. V. neut. Contribuer. "Fournir à la dépense, aux frais. "Les Lettres fournissent aux besoins les plus importans de la vie civile; et répandent sur elle les plaisirs les plus délicats. Raymond, Acad. de Mars. = Il régit quelquefois de et à: "Ils naissent pour soufrir, pour fournir de leurs peines et de leurs sueurs à vos plaisirs. Massill. = 3°. Suffire. "Il ne saurait fournir à tout. "Ce cheval fournit à tout le travail.
   FOURNITûRE, provision. "Fournitûre de blé, de vin, de bois, etc. = Ce que les Tâilleurs, Tapissiers fournissent, outre leur travail. "Tant pour la façon, et tant pour les fournitûres. = On apèle aussi fournitûres, les petites herbes, dont on acompagne la salade.
   FOURNISSEUR, celui qui entreprend de faire la fournitûre de quelque marchandise. "Les fournisseurs des troupes. = Au figuré, on l' emploie dans le style badin ou critique. "Ne somme-nous pas les vrais faiseurs et fournisseurs de l' Europe. Coyer, parlant des modes. "Les bévûes sans nombre dont cet écrit (la Philosophie de l' Histoire) fourmille de toutes parts, doivent être moins attribuées à M. de Voltaire qu' à ses fournisseurs. L' Ab. Guenée c. à. d. à ceux qui lui ont fourni des matériaux.

FOURRAGE


FOURRAGE, s. m. FOURRAGER, v. n. et act. FOURRAGEUR, s. m. [Foûrage, , geur: r forte: 2e e muet au 1er, é fer. au second.] Fourrage est 1°. La pâille et l' herbe sèche qu' on done aux chevaux, etc. = 2°. Toute l' herbe qu' on coupe et qu' on amasse pour la nourritûre des chevaux. "L' armée manquait de fourrage. = 3°. Action de couper le fourrage. On fit un grand fourrage en présence de l' Énemi. = 4°. Troupes comandées pour soutenir ceux qui vont au fourrage. "Ce jour là il comandoit le fourrage. "Le Regiment de Champagne étoit du fourrage.
   FOURRAGER, neutre, couper et amasser du fourrage: "L' armée a fourragé dans ce pays là: il y paroît. = V. act. Ravager. L' armée a fourragé tout le pays. "Ce troupeau a fourragé toute cette prairie.
   FOURRAGEUR, Soldat qui va au fourrage. "Les énemis tombèrent sur les fourrageurs.

FOURRÉ


FOURRÉ, ÉE, adj. Voy. FOURRER à la fin.

FOURREAU


FOURREAU, s. m. [Fou-ro: r forte; 2e dout. au singul. lon. au plur. fourreaux.] Gaine, étui, envelope. Fourreau d' épée, de pistolet, de chaise, etc. On dit proverbialement, coucher dans son fourreau, tout habillé. = L' épée use le fourreau: un esprit trop vif nuit à la santé, et souvent abrège la vie. = Fourreau, peau qui couvre le membre d' un cheval. "Ce cheval a mal au fourreau. = Faux-fourreau, se qui se met sur le véritable fourreau de l' épée, pour le garantir de la pluie.

FOURRER


FOURRER, v. act. [Fou-ré: r forte; 2e é fer. Devant l' e muet~, ou est long: il foûrre; foûrrera.] Mettre en quelque endroit parmi d' aûtre chôses. "Fourrez ces livres avec les aûtres. "Fourrez cela dans l' armoire. "Il lui a fourré son épée dans le ventre. = 2°. Insérer hors de propôs. "Il foûrre toujours des Proverbes dans son discours. = 3°. Fourrer dans l' esprit, dans la tête de... "On eut de la peine à lui fourrer dans la tête que, etc. "Vous vous fourrez dans l' esprit mille chimères. = 4°. Introduire. "Qui l' a fourré dans cette maison, dans cette afaire. "Il se foûrre par tout. On ne le dit que pour blàmer. Proverbialement, il fourre son nez par tout. "Pourquoi vient-il fourrer son nez où il n' a que faire?
   FOURRER, garnir de fourrûre. "Fourrer une robe de martre, d' hermine, etc. Se fourrer, se bien fourrer, se garnir d' habits bien chauds.
   FOURRÉ, ÉE, adj. Pays fourré, garni de bois, de haies. = Coups fourrés, au propre, coups donés et reçus en même tems; au figuré, mauvais ofices réciproques. _ Coup fourré, au singulier, mauvais ofice caché, dont on ne se défie pas. = Paix fourrée, paix, reconciliation feinte. = En style proverbial, homme fourré de malice, fort malicieux. "Inocent fourré de malice; homme qui paraît simple, et qui est fin et malicieux.
   Rem. Fourrer n' est suportable que dans le style très-familier, ou critique ou comique. On le voit avec peine employé dans des matières grâves et sérieûses. "Je crois avoir fourré ici de quoi vous doner conaissance du point historique. Leibnitz. "On vouloit empêcher les livres apocriphes de se fourrer parmi les canoniques. Id. "Gratien en foûrre un assez grand nombre dans son Décret. Anon. "Lope de Vega s' abandone trop à son esprit, et foûrre ses imaginations par--tout. P. Rapin. _ Cette expression jûre avec le ton sérieux de ces ouvrages.

FOURREUR


FOURREUR, s. m. FOURRûRE, s. fém. [Fou-reur, fou-rûre: r forte; 2e lon. au 2d.] Fourreur se dit d' un Artisan qui travaille en Pelleterie. Fourrûre, peau pâssée et garnie de son poil, servant à fourrer des habits, des robes, etc. = Il se dit aussi pour une robe fourrée. "La fourrûre d' un Président, d' un Docteur.

FOURRIER


FOURRIER, s. m. [Fou-rié: r for. 2e é fer.] Oficier dont la fonction est de marquer le logement de ceux qui suivent la Cour, ou le lieu où doivent loger ou camper des gens de guerre. "Fourrier de chez le Roi. Loger par Fourriers. "Les Fourriers de l' armée.

FOURRûRE


FOURRûRE. Voy. FOURREUR.

FOURVOIEMENT


FOURVOIEMENT, s. m. FOURVOYER, v. act. [Four-voâ-man, voa-ié: 2e lon. au 1er, où l' e muet ne se prononce pas. On doit écrire fourvoiement, et non pas fourvoyement; et dans le verbe, il fourvoie, et non pas il fourvoye, et ainsi au futur et au conditionel, fourvoiera, fourvoierait, et non pas fourvoyera, fourvoyerait. On prononce fourvoâra, voârè, en trois syllabes.] Fourvoiement est l' erreur de celui qui s' égâre de son chemin. Fourvoyer, c' est égarer, détourner du chemin. = Ils se disent au propre et au figuré. Le substantif est peu usité. "Ils s' aperçurent de leur fourvoiement. "Il est tombé dans un étrange fourvoiement. "Ce guide nous a fourvoyés. "Nous nous sommes fourvoyés. "Les mauvais exemples l' ont fourvoyé. "Plus on suit ses passions, plus on se fourvoie du chemin du salut. Acad. = Égarement, égarer, s' égarer sont plus nobles et plus usités sur--tout au figuré. Fourvoiement et fourvoyer sont plus énergiques et plus pitoresques.

FOUTEAU


FOUTEAU, s. m. Grand arbre, qu' on apèle ordinairement hêtre. Il vaut mieux se servir de celui-ci: l' aûtre aproche trop d' un juron obscène; et la langue peut aisément fourcher à ceux qui le prononcent.

FOYER


FOYER, s. m. [Foa-ié: 2eé fer.] Racine fait rimer foyers avec fiers: c' est une fausse rime. Voy. ER. = 1°. Âtre, lieu où se fait le feu. "Ôter la cendre du foyer: nettoyez le foyer. = 2°. Dans un miroir ardent, le point où les rayons se réunissent. = 3°. Lieu où les Acteurs et les Actrices se rassemblent et se chauffent en hiver. = On dit d' un homme, qui aime le repôs, et qui mêne une vie retirée, qu' il aime à garder son foyer (n°. 1°.) Et plus noblement, combatre pour ses propres foyers, pour sa maison, sa famille, sa Patrie.

FRACâS


FRACâS, s. m. FRACASSER, verbe act. [Frakâ, kacé: 2e lon. au 1er.] Fracâs, ruptûre ou fractûre avec violence et grand bruit. Fracasser, briser en plusieurs pièces. "Le vent a fait un grand fracâs dans cette forêt. "Un éclat de bombe lui a fracassé la jambe, et non pas, a fracassé sa jambe. "Dans sa fureur, il fracassa toutes les porcelaines.
   FRACâS se dit plus souvent pour désordre, grand bruit, sans qu' il y ait rien de cassé. "Il étoit de mauvaise humeur: en arrivant chez lui, il fit un horrible fracâs. = Figurém. il se dit de ce qui fait beaucoup d' éclat dans le monde, soit en bien, soit en mal. "Quand le Cid parut, il fit du fracâs dans le monde. = Fracâs dit plus que bruit, soit au propre, soit au figuré.

FRACTION


FRACTION, s. fém. FRACTûRE, s. f. [Frak-cion, en vers ci-on, fraktûre.] Action par laquelle on romt. En ce sens, il ne se dit que de l' Eucharistie: la fraction du pain, de l' hostie. On dit fractûre, pour ruptûre avec éfort; et au Palais, effraction. "Fracture ou effraction de portes, et non pas fraction. Celui-ci, en ce sens, est un gasconisme. = Fraction n' est d' usage qu' en Arithmétique, « ¬ 1/6, etc. sont des fractions. = Fractûre, en Chirurgie, est une rupture faite à un ôs par la violence de quelque caûse externe.

FRAGILE


FRAGILE, adj. FRAGILITÉ, s. fém. Sujet à se casser: aisé à rompre. _ Disposition à être facilement cassé, brisé. "Fragile comme un verre. "La porcelaine est fort fragile. "La fragilité du verre, de la porcelaine. = Ils se disent élégamment au figuré. "Biens fragiles; fortune fragile. "La fragilité des chôses humaines, de la fortune. = En parlant des persones, faible, sujet à errer, à pécher. "La natûre est fragile. "Péchés de fragilité. = * Rouss. done à fragile le sens de mortel, sujet à mourir, ce qui n' est pas avoué par l' usage.
   Les jours, hélas! trop peu durables,
   Des fragiles humains.
   Les Dieux même, éternels arbitres
   Du sort des fragiles mortels.
   On dit de la vie des hommes, qu' elle est fragile; mais on ne le dit pas des hommes même.
   Fragile est plus usité que Frêle, et dans le propre et dans le figuré. L. T. Il est pourtant des ocasions où frêle plait davantage: "La porcelaine est fragile, le verre est frêle. "La jouissance des honeurs est une félicité bien fragile: la beauté est un frêle avantage. Il semble que frêle anonce quelque chose de plus frivole, de moins considérable. = Fragile, faible (synon.) L' homme fragile cède à son coeur, à ses penchans: L' homme faible cède à des impulsions étrangères. "Il n' y a rien à dire à la faiblesse, dit on, dans l' Encyclopédie; on ne la change pas. Mais la Philosophie n' abandone pas l' homme fragile: elle l' éclaire, elle le soutient, elle lui pardone. _ La Religion est donc supérieure à la Philosophie. Car tout ce que celle-ci se vante de faire en faveur de l' homme fragile, et qui n' est que trop souvent inefficace dans ses mains, la Religion le fait d' une manière bien plus sûre et bien plus abondante. Elle fait plus: elle n' abandone pas même l' homme faible, qui devient fort dans celui qui le fortifie. _ Le triomphe de la Religion a été d' inspirer à l' âge et au sexe le plus faible un courage invincible au milieu des tourmens; et aux âmes les plus fragiles, une fermeté inébranlable contre les tentations les plus séduisantes. Beauzée. Synon.

FRAGMENT


FRAGMENT, s. m. [Prononc. comme s' il était écrit, fragheman; l' e surajouté extrêmement muet.] Morceau de quelque chose qui a été brisé. "Les fragmens d' une statue antique. _ Fig. Les fragmens d' un Poème. "Nous avons plusieurs fragmens de Saluste.

FRAI


FRAI, s. m. [Frè, è moy. = Trév. écrit fraie, et le marque s. f.] Il se dit et de l' action de la multiplication des poissons, et du temps où elle se fait, et des oeufs de poisson mélés avec ce qui les rend féconds, et du petit poisson.

FRAîCHE


FRAîCHE. Voy. FRAIS.

FRAîCHEMENT


FRAîCHEMENT, adv. FRAICHEUR, s. f. [Frêcheman, frê-cheur: 1re ê ouv. et long, 2e e muet au 1er.] Fraîcheur se dit d' un frais agréable. Fraîchement, avec un frais agréable. "La fraîcheur des bois, de la nuit. = Fraîcheur du teint, des couleurs, des fleurs, leur éclat, leur vivacité. _ "Être logé fraîchement. = L' adv. signifie aussi, récemment. "J' ai reçu fraîchement de ses nouvelles.
   Rem. On ne dit point fraîcheur au fig. On dit, des troupes fraîches; de fraîche date; mais la fraîcheur des troupes, la fraîcheur de la date, seraient des expressions barbâres. Bouh.

FRAîCHIR


FRAîCHIR, v. n. [Frêchi; 2eê ouv. et lon.] En termes de Marine, il se dit du vent, qui devient fort. "Le vent fraîchit.

FRAIRIE


FRAIRIE, s. f. [Frè-rie: 1reè moy. 2e long.] Partie de divertissement, de bonne chère. "Faire frairie. "Être d' une frairie, ou en frairie.

FRAIS


FRAIS, FRAîCHE, adj. [Frê, frêche; 1re ê ouv. et long, 2e e muet.] 1°. Médiocrement froid; qui tempère la grande chaleur. "Un vent, un temps, un air frais, une nuit, une matinée fraîche. = Il se dit quelquefois pour froid. "Au printemps les matinées sont encôre fraîches. = 2°. Récent. "Un oeuf frais, des figues fraîches. "Des lettres, des nouvelles fraîches. De fraîche date; de fraîche mémoire. Acad. "J' en ai encôre la mémoire fraîche, toute fraîche. "La plaie est encôre toute fraîche. = On le dit même des persones dans cette phrâse. "Je suis tout frais de cette lecture. "Il étoit encôre tout frais de ses leçons, de ses exercices. Il en avoit la mémoire récente. = 3°. Délassé, qui a recouvré ses forces par le repos. "Je suis à présent tout frais; frais et reposé. = 4°. Visage ou teint frais, coloré et vif. "Il est frais, il a bon visage. = 5°. Bouche fraîche, en parlant d' un cheval, humide et écumeûse. = 6°. Qui se conserve long--temps sans se trop sécher. "Le pain de seigle se conserve long-temps frais. "Ces herbes sont encôre fraîches, quoique cueuillies depuis plusieurs jours. = 7°. Qui n' a point été salé. "Du beûrre, du saumon frais. De la morûe fraîche.
   FRAIS, s. m. Un froid agréable. "Un bon frais, chercher le frais, voyager au frais. Prendre le frais. Mettre du vin au frais.
   FRAIS, FRAîCHE, adv. Nouvellement, récemment. "Bâtiment tout frais fait. "Des herbes fraîches cueillies. "Frais arrivé. "Il est tout frais émoulu de ses études.

FRAIS


FRAIS, s. m. [Frê; ê ouv. et long.] Dépense; dépens. "Grands frais, menus frais. "Faire des frais; faire les frais de... "Tous frais faits. Sur nouveaux frais. = "Cet homme est de grands frais, il coûté beaucoup à entretenir. "Constituer quelqu' un en frais, l' obliger à quelque dépense extraordinaire. {B286a~}
   Rem. 1°. Quelques Auteurs, M. le Prés. Henaut, entr' autres, écrivent frais avec un x: cette ortographe est contre l' usage.
   2°. Se mettre en frais, est du style familier. Il se dit au propre et au fig. "Il se met en frais pour peu de chôse. "Je l' en croyois sûr, avant qu' il se mît en frais. Coyer. c. à. d. avant qu' il fît tant d' éforts pour l' assurer. = M. l' Abé Dusserre-Figon a employé cette expression dans un fort beau Panégyrique de Ste. Thérèse. "L' on voit en Thérèse une de ces favorites du Très-Haut, en faveur desquelles sa magnificence se met en frais, si je puis parler ainsi, pour montrer comment sont glorifiés ceux que le Roi des Rois veut spécialement honorer. _ Malgré le correctif, plusieurs blâmeront cette expression en cet endroit.
   Sur nouveaux frais, adv. De nouveau. "Il faloit recomencer sur nouveaux frais. Rollin. "Je vous en remercie sur nouveaux frais. Sév. "Nous nous embrassâmes, en pleurant un peu sur nouveaux frais. Mar. _ Il est plus du style famil. épist. et de conversation, que de celui de l' histoire.

FRAISE


FRAISE, s. f. [Frèze; 1reè moy. et long; 2e e muet.] Ce mot a plusieurs significations, qui n' ont aucun raport l' une avec l' aûtre. = 1°. Espèce de petit fruit, fort agréable au goût. = 2°. Le mésentère et les boyaux de veau et d' agneau. = 3°. Espèce de collet qui avait plusieurs doubles et plusieurs plis ou goderons, et qui tournait autour du cou. La mode en est revenue de temps en temps. = 4°. Rang de pieux qui garnit une fortification de terre par dehors.

FRAISER


FRAISER, v. act. [Frézé: 2 é fermés. Devant l' e muet: le 1erè est moy. et long. Il fraise, fraisera, etc. Pron. Frèze, frè--zera, etc.] Ce verbe répond aux deux derniers sens de fraise. _ Plisser à la manière d' une fraise. "Fraiser des manchettes, du papier. _ Garnir de pieux par dehors. "Fraiser un bastion, etc. = "Manchettes fraisées. "Bastion fraisé et palissadé.

FRAISETTE


FRAISETTE, s. f. [Frèzète; 1re et 2e è moy. 3e e muet.] Petite fraise, (n°. 3°.) En grand deuil les hommes portent des fraisettes au lieu de manchettes.

FRAISIER


FRAISIER, s. m. [Frè-zié: 1re è moy. 2e é fer.] La plante qui produit les fraises.

FRAISIL


FRAISIL, s. m. [Frèzil; 1reé fer.] Cendre du charbon de terre dans les forges. {B286b~}

FRAISQUE


*FRAISQUE ou FRESQUE. Dans l' anc. Trév. on met les deux. Le dern. a prévalu, et c' est le seul qui soit aujourd' hui d' usage.

FRALATER


*FRALATER. Voy. FRELATER.

FRAMBOISE


FRAMBOISE, s. f. FRAMBOISER, v. a. FRAMBOISIER, s. m. [Fran-boâ-ze, boa--zé~, boa-zié~: 2e lon. au 1er, 3ee muet au 1er, é fer. aux 2 autres.] Framboise est un petit fruit, qui croît sur un arbrisseau épineux. Framboisier est le nom de cet arbrisseau. Framboiser, c' est acomoder avec des framboises. "Framboiser des cerises, des groseilles.

FRANC


FRANC, s. m. [On ne pron. jamais le c final.] 1°. C' est le nom qu' on done aux anciens Français du temps de Clovis. = 2°. C' est aussi le nom d' une anciène pièce de monaie valant vingt sous. Aujourd' hui ce n' est plus qu' une monaie de compte, de même valeur. On ne dit, ni un franc, ni deux, trois ou cinq francs: on dit vingt sous, quarante sous, trois livres, cent sous. Voy. LIVRE.

FRANC


FRANC, FRANCHE, adj. [Le c ne se prononce au masc. que devant une voyelle. Voy. C.] 2°. Libre. "Franc arbitre. Acad. On dit plutôt libre-arbitre. "Il a fait cela de sa pure et franche volonté. (st. fam.) = 2°. Exempt d' impositions, de charges, de dettes. "Être franc de toutes charges. "Je vous vends ce domaine franc de toute redevance et servitude. Paquet franc de port, et non pas, port franc. Lettres franches de port. = 3°. Sincère, qui dit ce qu' il pense. "Homme franc, coeur franc.
   Il est inutile de feindre,
   Écoutez, je suis franche, et vous l' allez bien voir.
       La Chaussée.
= 4°. Devant le substant. il a le sens de vrai. "Un franc animal, une franche coquette. = 5°. Entier, complet. "Ils n' y ont été que deux jours francs. = 6°. En parlant des arbres: qui porte du fruit doux, sans avoir été enté. "Noisetier franc, noisettes franches. "Franc pêcher; pêche franche. "Enter franc sur franc: enter franc sur sauvageon. = 7°. Cheval franc de collier, qui tire bien, sur-tout en montant. _ Fig. (st. famil.) Homme franc de collier, toujours prêt à servir ses amis, ou à tirer l' épée, et à aller au combat toutes les fois que l' ocasion s' en présente.
   FRANC, adv. Sans déguiser, sans biaiser. "Il m' a parlé franc. "Il le démentit tout franc, ou franc et net.
   Rem. Aûtrefois on employait plus souvent franc dans le sens de libre. Les Poètes sont encôre en possession de le prendre dans cette acception, et ils feront bien de la conserver.
   Cette vertu franche de tout sophisme.
       Rousseau.
  Et les siècles futurs francs de haine et d' envie.
      Colardeau.
L' Acad. dit encore, franc de toute passion, franc d' ambition; franc d' envie, etc. Libre est plus noble et plus usité; et franc, en ce sens, ne me paraît bon, en prôse, que dans le st. fam.

FRANCHEMENT


FRANCHEMENT, adv. [Francheman: 1re lon. 2e e muet.] Sincèrement, ingénument. "J' avoue franchement que, etc. "Parlez-moi franchement. = Il se met quelquefois à la tête de la phrâse comme une interjection. "Franchement, il ne se peut pas qu' il ne reste quelque dificulté en cette matière. Fonten.

FRANCHIR


FRANCHIR, v. a. [Franchi: 1re lon.] 1°. Sauter par-dessus. "Franchir un fôssé, une barrière. = 2°. Pâsser hardiment et heureusement des endroits dificiles. Après avoir franchi les Alpes, Annibal entra en Italie. = 3°. Franchir les limites, les bornes, pâsser au-delà. _ Fig. Franchir les bornes de la pudeur, de la modestie, du devoir, etc. "Rejeter de pareilles pièces, ce seroit franchir les justes bornes de la critique. Le P. Longueval. = 4°. Franchir, (surmonter) les dificultés, les obstacles, etc. = 5°. En style proverb. on dit, qu' un homme a franchi le pas ou le saut, quand après avoir hésité quelque temps, il s' engage enfin dans une entreprise périlleûse. = Franchir le mot, parler franc et net. "Enfin il a franchi le mot, et l' a apelé un fripon; ou bien, c' est prononcer une chôse à laquelle on avait de la peine à se résoûdre. "À~ la fin il a franchi le mot, et il a promis de le faire à ce prix.

FRANCHISE


FRANCHISE, s. f. [Franchîze; 1re et 2e lon. 3e e muet.] 1°. Exemption, immunité. "Lieu de franchise. "Jouir de la franchise. = 2°. Il se dit du droit d' asile et de l' asile même. "Les franchises des Églises n' ont pas lieu en France. = 3°. Et c' est son usage le plus commun, Sincérité, candeur. "Parler avec franchise. "Il est plein de franchise. = 4°. Il se disait autrefois au lieu de liberté. Tous les amoureux se plaignaient d' avoir perdu leur franchise.
   Cesse de soupirer, Rome, pour ta franchise.
       Corn.
Ce mot est vieux, même en vers. M. Linguet l' a employé tout récemment. "À~ Athène, à Rome, les Citoyens doivent être regardés comme ayant su conserver toute la franchise, dont la société laisse les hommes susceptibles.

FRANÇAIS


FRANÇAIS, ÇAISE, adj. et s. m. et f. [Francè, cèze: 2eè moy. et long.] C' est ainsi qu' écrivait M. de Voltaire, et un petit nombre d' Auteurs l' ont imité. Il serait à souhaiter que cette ortographe s' établît. Voyez OIS. Voy. FRANÇOIS.

FRANCISER


FRANCISER, v. act. [Francizé: dern. é fer.] Doner une terminaison française à des mots tirés du latin, ou des langues étrangères. = Se franciser, (st. fam.) a un autre sens: c' est prendre l' air, le ton, les manières françaises. "Cet étranger s' est bien francisé depuis le peu de temps qu' il est à Paris.

FRANÇOIS


FRANÇOIS, OISE, subst. et adj. m. et f. Il se prononce tantôt, Fran-soâ, soâ-ze, quand c' est un nom de baptême; tantôt, Francè, cèze, quand c' est un nom de nation. Pour ne pas confondre ces deux prononciations, il serait bon que, dans le dernier sens, on écrivît français, française. "Qu' il (l' Orateur) joigne la politesse françoise au sel attique des Grecs et à l' urbanité des Romains. D' Aguess. = On dit, proverbialement, parler français, parler clairement, franchement. "À~ présent vous parlez français. C' est aussi parler avec autorité et d' un ton menaçant. "Il lui a parlé français. = Ne pas entendre le français; ne pas comprendre ce qu' on veut nous faire entendre. "Après ce qu' on lui a dit, il auroit dû se retirer: mais il n' entend pas le français. = En bon français, clairement, en propres termes. "Mon histoire étoit celle d' un paysan, d' un valet, en bon français. Mariv. = À~ la française, à la manière des Français. "Habillé à la française.

FRANGE


FRANGE, s. f. FRANGER, v. a. et s. m. [1re lon. 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Frange, tissu de fil, de soie, etc. Franger, garnir de frange. "Franger une jupe. = S. m. Artisan qui fait de la frange.

FRANQUE


FRANQUE, adj. f. C' est le nom d' un jargon, mélé de français, d' italien, d' espagnol, et d' aûtres langues, usité dans le Levant. "La Langue Franque.

FRANQUETTE


FRANQUETTE, s. f. [Frankète: 2eè moy. 3e e muet.] Il n' a d' usage que dans cette phrâse adverbiale du style familier., à la franquette, franchement, ingénument, ou sans façon, sans cérémonie. "Parler à la franquette: agir à la franquette.

FRAPPEMENT


FRAPPEMENT, ou FRAPEMENT, s. m. FRAPPER, ou FRAPER, v. a. [Frapeman, ; 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] L' Académie ne dit frappement que de l' action de Moyse, frapant le rocher. Trév. ne dit que frapement de mains, aplaudissement. On ne le dit sérieusement que dans la première acception: l' autre ne peut avoir lieu que dans le style badin, plaisant, comique, ou critique. = Fraper, 1°. Doner un ou plusieurs coups. "Pourquoi le frapez-vous? Fraper la terre du pied. = 2°. V. n. Fraper à la porte "l' heure a frapé. = Fig. "Le son frape l' oreille. "Objet qui frape la vue, l' imagination, l' esprit. Il régit de ou dans.
   Fatale vérité, que j' ai trop combatue,
   De quel afreux éclat viens-tu fraper ma vue?
       Créb.
  Je vais fraper son coeur par l' endroit le plus tendre.
      Camp.
Dans l' endroit aurait mieux été, à mon avis. _ Avec prendre, la prép. par est plus selon l' usage. = 3°. Être frapé, régit l' ablatif (la prép. de). Être frapé d' étonement, d' anathème, d' une opinion. Être frapé de la foudre, du tonerre, de la peste, d' apoplexie. = Frapé au coin, se dit au propre et au figuré. Monaie frapée au coin du Roi; homme frapé à un bon, ou à un mauvais coin, qu' on a imbu de bones ou de mauvaises impressions. _ En parlant des ouvrages d' esprit, un endroit bien frapé, un portrait bien frapé, des vers bien frapés, pleins d' énergie. = Du vin frapé de glace, qu' on a fait rafraîchir dans la glace.
   REM. Frapé, se dit des maladies, mais seulement de celles qui sont mortelles et subites. Frapé d' un ulcère à la langue, comme dit le P. Charlevoix, me parait une expression vicieûse et presque ridicule. La métaphore n' y est pas juste. Un ulcère n' est pas censé fraper, comme la peste, l' apoplexie, etc. qui se déclârent tout d' un coup et avec violence.

FRAPEUR


FRAPEUR, EûSE, s. m. et f. Celui, celle, qui frape. Il est du style familier, plaisant et comique.

FRASQUE


FRASQUE, s. f. [Fras-ke: 2ee muet.] Mauvais tour qu' on fait à quelqu' un pour le tromper, le choquer ou le trahir. Trév. Ce n' est point cela. "Action extravagante, imprévûe et faite avec éclat. Acad. C' est le vrai sens de ce mot. Le Rich. Port. les met tous les deux. "La jeunesse est sujette à faire des frasques. "Il m' a déjà fait une frasque, plusieurs frasques, etc.

FRATER


FRATER, s. m. [2e ê ouv.] Mot latin, transporté dans notre langue sans changement. En latin, il signifie frère, en français, garçon chirurgien. Il ne se dit que par mépris.

FRATERNEL


FRATERNEL, NELLE, adj. FRATERNELLEMENT, adv. FRATERNISER, v. n. FRATERNITÉ, s. f. [Fratêrnèl, nèle, nèle--man, nizé, nité: 2e ê ouv. 3e è moy. aux 3 1ers, dont la 4ee muet.] Fraternel, qui est propre à des frères. Fraternellement, d' une manière fraternelle. Fraterniser, vivre fraternellement. Fraternité, relation de frère à frère. Union fraternelle. "Amour fraternel. Afection fraternelle. "Ils ont toujours vécu fraternellement. "Ces deux compagnies fraternisent. "Les noeuds sacrés de la fraternité. "Ils vivent dans une grande fraternité. "Il y a fraternité (liaison étroite) entre ces deux corps, ces deux familles.

FRATRICIDE


FRATRICIDE, s. m. Il se dit, et du meurtrier et du meurtre d' un frère ou d' une soeur. "Caïen est le premier fratricide. "Il a été condamné pour fratricide. = Quelques-uns disent sororicide pour le meurtre et le meurtrier d' une soeur.
   REM. Vaugelas voulait qu' on dît toujours parricide pour le frère et la soeur, comme pour le père et la mère. Mais fratricide distingue fort bien le genre du crime. On peut s' en servir et l' Acad. l' aproûve. L. T.

FRAûDE


FRAûDE, s. f. FRAUDER, v. act. FRAUDEUR, EûSE, s. m. et f. [Frôde, frodé, deur, deû-ze: 1re lon. au 1er, dout. aux aûtres: 2ee muet au 1er, é fer. au 2d, lon. au 4e.] Fraûde: Tromperie, action faite de mauvaise foi. "Fraûde subtile ou manifeste. Sans fraûde. Par fraûde. User de fraûde. Faire un contrat en fraûde de ses créanciers. = "On emploie la fraûde et l' artifice pour éluder la loi. Cochin. _ Frauder. * Aûtrefois, tromper. "Il m' a fraudé. _ Aujourd' hui, frustrer par quelque fraûde. "Il a fraudé ses créanciers, ses cohéritiers. Frauder les droits du Roi, etc. = Fraudeur, fraudeûse, celui, celle qui fraude. "L' art des fripons et des fraudeurs se subtilise. Anon. "Que seroit-ce à trois mille lieuës de distances, quand les premiers fraudeurs seroient les chefs mêmes du gouvernement. Linguet.

FRAUDULEûSEMENT


FRAUDULEûSEMENT, adv. FRAUDULEûX, EûSE, adj. [Frodu-leû-zeman, leû, leû-ze: 3e lon. 4e e muet.] Frauduleux, est 1°. enclin à la fraûde. "Esprit frauduleux. Il est moins usité en ce sens que dans le suivant. = 2°. Fait avec fraûde. "Contrat frauduleux, banqueroute frauduleûse. = Il ne se dit point des persones, même dans le premier sens. = Frauduleûsement, avec fraûde. "Agir, contracter frauduleûsement.

FRAYER


FRAYER, v. act. et n. [Fré-ié: 2 é fer. Devant l' e muet, les uns écrivent avec l' y, fraye, frayera et prononcent fré-ié, fré--iera; les autres fraie, fraiera, qu' on pron. frê, frêra. Les opinions et les pratiques sont partagées là-dessus. L' Acad. est pour la 1re; Je serais pour la 2de manière.] 1°. Marquer, tracer. Frayer la voie, le chemin. _ Fig. se frayer le chemin aux dignités, à la gloire frayer le chemin à quelqu' un, lui doner les moyens, ou l' exemple de faire quelque chôse. = 2°. Froler, toucher légèrement en passant: "Le coup n' a fait que lui frayer la botte. = 3°. V. n. Il exprime la jonction des poissons pour la multiplication de l' espèce. "Dans la saison où les poissons frayent. Acad. = 4°. Convenir, ensemble, s' acorder. Il se dit presque toujours avec la négative, et il n' est que du style familier. "Ces deux hommes ne frayent point ensemble.
   FRAYÉ, adj. ne se dit qu' avec chemin. "Il n' y a point de chemin frayé dans ce bois.

FRAYEUR


FRAYEUR, s. f. [Fré-ieur: 1reé fer.] Agitation véhémente de l' âme, causée par la prévoyance d' un mal réel ou aparent. "Grande frayeur. Trembler de frayeur. "Les plus grands maîtres n' ont jamais parlé en public sans quelque frayeur. Le P. Gaichiés. = Il se dit ordinairement au singulier. On dit pourtant les frayeurs de la mort. "Il est dans des frayeurs continuelles. = D' ordinaire aussi il ne régit rien à moins qu' il ne soit joint au v. avoir. On peut dire, la frayeur que les saints ont eu des jugemens de Dieu; mais on ne dit point absolument, la frayeur des jugemens de Dieu, comme on dit, la crainte de ses jugemens.

FREDAINE


FREDAINE, s. f. [Fredène: 1re et dern. e muet: 2e è moy.] Trait de libertinage; folie de jeunesse. _ Il se dit le plus souvent au pluriel. "Il a fait une fredaine. "Il fait beaucoup de fredaines. "Tout le monde est indigné de vos fredaines. Il est du style familier et chagrin. = On dit, dans le Dict. Gramm. que ce mot n' a point de singulier: c' est trop dire.

FREDON


FREDON, s. m. FREDONER, v. n. [1re e muet.] Fredon, espèce de tremblement agréable dans le chant. Fredoner, faire des fredons. "Il fredone agréablement. = * Quelques-uns disent fredoner un air, pour dire, le chanter entre dents. C' est une expression barbâre. = Boileau l' a fait actif.
   On dirait que Ronsard sur ses pipeaux rustiques.
   Vient encor fredoner ses idylles gothiques.

FREGATE


FREGATE, s. f. [1re et dern. e muet.] Vaisseau de guerre moindre et plus léger que les grands vaisseaux. = C' est aussi le nom d' un oiseau de mer.

FREIN


FREIN, s. m. [Monosyllabe.] 1°. Au propre Mors. Celui-ci est plus du discours ordinaire: l' autre est plus du style noble et élégant. On dit bien qu' un cheval ronge son frein; mais on dit qu' il prend le mors plutôt que le frein aux dents. = Ronger son frein, en style figuré familier, c' est retenir en soi-même son dépit, sa colère, sans ôser la faire éclater. = 2°. Figurément, il se dit de tout ce qui retient dans le devoir. "La crainte de Dieu sert de frein à nos passions. "L' honeur, les lois, les bienséances sont autant de freins pour retenir les hommes.
   Rem. On dit plutôt mettre que doner un frein. Madame des Houlières, qui avait besoin d' une syllabe de plus, a préféré le dernier.
   Pour être heureux, pour être sage.
   Il faut savoir doner un frein à ses désirs.
L' Acad. ne met ni mettre, ni doner un frein; mais la 1re locution est très-usités, et employée par de bons Auteurs.

FRELATER


FRELATER, v. act. [1re e muet, dern. é fer. On a dit anciènement fralater.] Méler quelque drogue dans le vin. Il se dit surtout au participe. "Ce vin est frelaté. = Figurément (st. famil.) on dit, qu' une chôse n' est point frelatée, pour dire qu' on n' a rien fait pour la faire paraitre plus belle qu' elle ne l' est en éfet. "On ne voit guère aujourd' hui que des ouvrages frelatés, des beautés frelatées. On n' entend que des sermons frelatés. = Rousseau et Gresset l' ont aussi employé au figuré dans le style critique; mais la métaphôre n' est pas fort juste, de la manière, dont l' un et lÞaûtre l' ont employée.
   Et tout mortel, qui porte un coeur gâté,
   N' a jamais eu qu' un esprit frelaté.
       Rouss.
  Aux plaisirs de la vérité.
  Préférant le goût frelaté.
  Des plaisirs qu' à faits l' impostûre,
  Ou qu' inventa la vanité.
      Gresset.
Dans le propre, ce n' est pas le goût qui est frelaté, ce sont les boissons. Dans le figuré, donc on ne devrait pas le dire de l' esprit et du goût, mais des ouvrages et des plaisirs, dont ils se nourrissent.

FRêLE


FRêLE, adj. [1re ê ouv. et long: 2e e muet.] Fragile, aisé à casser, à rompre. Voy. FRAGILE. = Il se dit au propre et au figuré: "Frêle, comme un roseau. "C' est un frêle apui que le sien. = Il aime à marcher devant le substantif.
   Pour empêcher qu' un frêle chalumeau
   Ne languisse acablé sous son riche fardeau.
       De Lille.
"Les Tyriens furent les premiers, qui osèrent se mettre dans un frêle vaisseau, à la merci des vagues et des tempêtes. Télém.
   Ces citoyens des mers, qu' une ardeur vagabonde
   Dès l' enfance enchaîna dans de frêles vaisseaux.
       Le Franc.

FRELON


FRELON, s. m. [1re e muet.] Sorte de grosse mouche-guêpe.

FRELUQUET


FRELUQUET, s. m. [Frelukè: 1ree muet, dern. è moy.] Homme léger, frivole et sans mérite. "Ce n' est qu' un freluquet, st. famil.
   M' embarrassant fort peu des intrigues frivoles
   D' un tâs de Freluquets, d' une troupe de folles.
       Le Méchant.

FRÉMIR


FRÉMIR, v. n. [1re é fer.] Être ému avec quelque tremblement causé par la crainte, la colère, etc. Il s' emploie ou sans régime. "Je tremble, je frémis: son nom seul fait frémir nos veuves et nos filles. Rac.
   Le faux calme, dont ils jouïssent.
   Est toujours prêt à se troubler.
   Un éclair seul les fait trembler.
   Ils blasphêment, mais ils frémissent.
       Le Franc.
Ou avec la prép. de. "Frémir d' horreur, de crainte, de colère.
   Mon coeur s' en effarouche et j' en frémis d' horreur.
       Corn.
On le dit quelquefois des chôses, comme de l' eau, qui est près de bouillir et de la mer, qui comence à s' agiter.

FRÉMISSEMENT


FRÉMISSEMENT, s. m. [Frémiceman: 1re é fer. 3e e muet.] 1°. Émotion, tremblement causé par quelque passion violente. "En aprenant cette nouvelle, je fus saisi d' un frémissement involontaire. = 2°. Tremblement causé par la maladie. "Il m' a pris un grand frémissement par tout le corps. = 3°. Comencement d' agitation dans l' air, la mer, les eaux. = 4°. Rage, fureur.
   D' un ciment éternel ton Église est bâtie,
   Et jamais de l' Enfer les noirs frémissemens,
   N' en pourront ébranler les fermes fondemens.
       Boil.

FRèNE


FRèNE, s. m. [1re è moy. 2e e muet.] Sorte de grand arbre.

FRÉNÉSIE


FRÉNÉSIE, s. f. FRÉNÉTIQUE, adj. [Frénézi-e, tike: 1re et 2eé ferm. dern. e muet.] L' étymologie demanderait que ces deux mots s' écrivissent avec ph: mais l' usage le plus général est de les écrire avec une f, et l' Acad. a préféré cette ortographe. _ Richelet met les deux, frénésie ou phrénésie, et Trév. aussi.
   FRÉNÉSIE, aliénation d' esprit, acompagnée de fureur. Frénétique, qui est ateint de frénésie. "Accês de frénésie. "Tomber, entrer, être en frénésie. _ "Malade frénétique. Il ou elle est frénétique. _ Subst. "c' est un frénétique, une frénétique.
   FRÉNÉTIQUE, ne se dit ordinairement qu' au propre: on peut pourtant l' employer au figuré comme frénésie. "Ce n' est pas un fou, c' est un frénétique. "La passion qu' il a pour le jeu est une frénésie. = Racine le fils lui fait régir la prép. de
   De l' or ni des honeurs l' indigne frénésie.
la frénésie de l' or, pour, l' amour de l' or est peut-être une figure trop hardie en poésie, mais sûrement elle le serait en prôse.

FRÉQUEMMENT


FRÉQUEMMENT, adv. FRÉQUENCE, s. f. FRÉQUENT, ENTE, adj. [Frékaman, kance, kan, kante: 1reé fer. 2e lon. excepté au 1er.] Fréquemment, souvent. Fréquent, qui arrive souvent. Fréquence, réitération fréquente. "Il va fréquemment dans cette maison. "Cela arrive fréquemment. "Usage fréquent. "Visites; rechutes; confessions, communions fréquentes. "Discours sur la fréquente communion. En Médecine, pouls fréquent, qui bat plus vite qu' à l' ordinaire. = On dit dans le Dict. Gramm. que Fréquence ne se dit qu' en Médecine, en parlant du pouls. Et un célèbre Académicien souhaitait qu' on pût dire, la fréquence des visites m' inportune. Ses souhaits ont été remplis. L' Acad. admet cette phrâse, et la fréquence de ses lettres, de ses rechutes _ M. l' Ab. Royou a dit plus récemment, la fréquence de la pulmonie. Je ne garantis pas celui-ci. Quoique l' usage permette de dire, que la pulmonie est un mal fréquent dans un tel pays, je doute qu' il aprouve, la fréquence d' un mal.

FRÉQUENTATIF


FRÉQUENTATIF, adj. m. [Frékanta--tif: 1er é fer. 2e lon.] Il ne se dit qu' en Gramaire, des verbes qui expriment une action fréquente; comme criâiller, qui signifie, crier souvent.

FRÉQUENTATION


FRÉQUENTATION, s. f. FRÉQUENTER, v. act. et n. [Frékanta-cion; : 1reé fer. 2e lon.] Fréquenter, Hanter souvent. Fréquentation, Hantise fréquente. Ainsi ces deux mots ajoutent au sens des aûtres quelque chôse de réitéré plus souvent. "Fréquenter les gens de bien, le Bârreau, les bonnes compagnies, les sacremens. "La fréquentation des sacremens, des gens de bien. "Mauvaise fréquentation. = * Avoir une fréquentation, une intrigue avec une fille ou une femme, me parait un gasconisme.
   FRÉQUENTER, est aussi neutre, mais seulement dans le style familier. "Il fréquente dans une telle maison, chez un tel; il y est souvent, il y fait de fréquentes visites. Boileau dit, en parlant de Regnier.
   Heureux, si ses discours, craints du chaste Lecteur.
   Ne se sentoient des lieux où fréquentoit l' Auteur.
= L' Acad. met aussi fréquenter avec les Hérétiques, pour dire, avoir un fréquent comerce avec eux: celui-ci ne me parait pas aussi usité, et fréquenter les hérétiques est plus sûr.
   REM. 1°. Fréquenter, est plus en usage et plus du beau style que Hanter. RÉFLEX. L' Acad. ne les distingue pas: elle dit sur Fréquenter, hanter souvent et sur Hanter, fréquenter, visiter souvent et familièrement. C' est donc blanc bonnet, bonnet blanc. Il y a pourtant de la diférence dans l' emploi de ces deux mots: d' abord celle qu' établit l' Auteur des Réflexions; ensuite celle que nous avons établie plus haut. Outre cela on dit fréquenter le barreau, les spectâcles. Là on ne dirait pas si bien hanter. On dit au contraire, hanter les brelans, les tripots, les mauvais lieux. Ici fréquenter ne serait pas si propre. = Suivant M. l' Ab. Roubaud, l' idée propre de fréquenter est celle de concours, d' afluence; l' idée distinctive de hanter celle de société, de compagnie. Rigoureusement parlant, c' est la multitude qui fréquente, et elle fréquente des lieux, des places; ce sont des particuliers, qui hantent, et ils hantent des persones, des assemblées... On fréquente un lieu quel qu' il soit: on hante proprement des lieux d' assemblée, les églises, les cabarets, etc. ROUB. Synon.
   2°. FRÉQUENTATION, a un sens passif, il se dit des persones qu' on fréquente, qui sont fréquentées, et non pas de celui qui fréquente. "La fréquentation des bonnes compagnies, polit et forme un jeune homme. "La fréquentation des libertins l' a gâté en peu de temps.
   3°. FRÉQUENTÉ, adj. ne se dit que des lieux. "Un Palais, un jardin fort fréquenté. "Il fuit les lieux fréquentés: il aime la solitude.

FRèRE


FRèRE, s. m. [1re è moy. et long: 2e e muet.] 1°. Celui~, qui est né de même père et de même mère, ou de l' un des deux seulement. Les premiers s' apèlent frères germains, les aûtres s' apèlent frères consanguins, s' ils sont du même père; et utérins, s' ils sont de la même mère. On apèle aussi vulgairement les 1ersfrères de père et de mère, et les aûtres demi-frères. = Frère de lait, l' enfant de la nourrisse et son nourrisson qu' elle a nourri du même lait. = 2°. Tous les hommes sont frères, en ce sens qu' ils ont un 1er père commun. "Nous sommes tous frères en Adam. _ Les Chrétiens le sont plus particulièrement. "Ils sont tous frères en J. C. "Les paûvres sont nos frères, et comme hommes et comme chrétiens. = Tous les grands Prédicateurs, les Bourdalouë, les Massillon, les Neuville, etc. ont toujours dit, Mes frères, Mes très-chers Frères, en adressant la parole à leurs Auditeurs. Plusieurs rougissent aujourd' hui de cette expression, et y substitûent celle de Messieurs. Il est vrai que leurs sermons ne sont pas des sermons, mais des Discours académiques. = 3°. Frère, est un nom que les Religieux prènent dans les actes publics. On disait aûtrefois plus souvent qu' aujourd' hui, les Frères Mineurs, les Frères Prêcheurs. On dit aujourd' hui les Cordeliers, les Dominicains. On dit encôre les frères de la charité, les frères des écoles chrétienes, parce qu' ils ne sont pas Prêtres. = Dans les Couvens on dit frère lai, frère Convers, de celui qui n' a pas été reçu pour être prêtre, et qui n' est pas dans la cléricature. On dit plus comunément frère tout court et sans addition. "Le frère quêteur, le frère cuisinier. = 4°. Faux-frère, celui qui trahit une société où il a été admis. _ En style proverbial, bon frère, bon compagnon, homme sans souci et qui n' aime qu' à faire bonne chère et à se divertir.

FRÉRIE


FRÉRIE, Richelet. Voy. FRAIRIE.

FRESQUE


FRESQUE, s. f. [Frèske: 1reè moy. 2e e muet.] Richelet met Fresque ou Fraisque: on n' écrit plus que le 1er. = Sorte de peintûre apliquée à une murâille, à une voûte, à un plafond fraîchement enduits. Ce mot nous vient des Italiens. "Dans les lieux humides, la fresque ne dûre pas longtems. "Mengs a traité la fresque d' une manière surprenante. La Lande. "Peindre à fresque et non pas à la fresque, comme disent les ignorans.

FRESSûRE


FRESSûRE, s. f. [Et non pas frésûre. Pron. Fré-sûre, s forte.] C' est un terme collectif, qui se dit de plusieurs parties de certains animaux, prises ensemble, comme sont le coeur, la rate, le foie, le poumon. "Fressûre de mouton, d' agneau, de veau, etc.

FRET


FRET, s. m. FRÉTER, v. act. FRÉTEUR, s. m. [Frèt, è moy. le t se prononce légèrement: frété, teur: 1re é fer. 2e é fer. aussi au 1er de ceux-ci. _ L' ancien Trév. écrivait fretter avec 2 t, on n' en a mis qu' un dans les Éditions postérieures. Le Dic. d' Ort. écrit mal à propos ces deux mots sans accent sur l' e.] Fret, est le louage d' un vaisseau pour aller sur mer. C' est aussi, et plus comunément le transport par mer des marchandises d' un lieu à un aûtre. Fréter, c' est doner ou prendre un vaisseau à louage. Le Dict. du Citoyen ne le dit que du Bailleur. On le dit de même dans le Dict. du Droit Civil. Fréteur, ne se dit que du Propriétaire du vaisseau qui le loûe, et non pas de celui qui le prend à louage.

FRÉTILLANT


FRÉTILLANT, ANTE, adj. FRÉTILLEMENT, s. m. FRÉTILLER, v. n. [Fréti--glian, glian-te, glie-man, glie: 1re é fer. mouillez les ll: 3e lon. aux 2 1ers, e muet au 3e, é fer. au dern.] Frétiller, (st. famil. et badin) c' est se démener, se remuer, s' agiter. Frétillant, qui frétille. Frétillement, moûvement de ce qui frétille. "Cet enfant frétille sans cesse; il ne fait que frétiller. "Il est fort frétillant: il est dans un frétillement continuel. = Proverbialement, la langue lui frétille, (à cet homme, à cette femme) il ou elle a grande envie de parler: les piés lui frétillent, il a impatience d' aller.

FRETIN


FRETIN, s. m. [Fre-tein: 1ree muet.] Menu poisson. "Vous n' avez pris que du fretin. = Figurément, chôses de rebut, de peu de valeur. "Il ne reste plus que le fretin, il n' y a plus que du fretin dans cette bibliothèque, dans cette boutique, dans cet encan. Il est du style familier.

FRIABILITÉ


FRIABILITÉ, s. f. FRIABLE, adj. Ils expriment la qualité de ce qui peut aisément être réduit en poûdre. "La friabilité du sel. "Le sel est friable.

FRIAND


FRIAND, ANDE, adj. FRIANDISE, s. f. [Fri-an, ande, dîze: 2e. lon. 3e e muet au 2d, lon au 3e.] Friand, qui aime les bons morceaux et s' y conait. Il dit quelque chôse de moins bas et de plus rafiné que gourmand. = En parlant des chôses, goût friand, délicat: morceau friand, mets ou morceau délicat. = Figurément (st. famil.) en parlant des persones, il régit quelquefois la prép. de. "Friand de nouvelles, de comédies, de musique, etc.
   L' homme friand de haute renomée
   Craint tout rieur, qui pèse sa fumée.
       Rouss.
  FRIANDISE, amour des bons morceaux. "La friandise caûse beaucoup de dépense, excepté chez les parasites. = Au pluriel, morceaux friands, comme sucreries, pâtisserie. Aimer les friandises. Doner des friandises aux enfans, c' est nuire à leur corps et à leur âme. = En style proverbial, avoir le nez tourné à la friandise, c' est en parlant d' une femme, avoir l' air coquet et éveillé. Style plaisant ou satirique.

FRICANDEAU


FRICANDEAU, s. m. [Frikando: 2e lon. 3e dout. au sing. lon. au pluriel: frican--deaux.] Tranche de veau lardée. "Un plat de fricandeaux.

FRICASSÉE


FRICASSÉE, s. f. FRICASSER, v. act. FRICASSEUR, s. m. [Frikacé-e, , ceur: 3e é fer. aux 2 1ers.] Fricasser, c' est faire cuire quelque chôse dans la poile, après l' avoir coupée en morceaux. "Fricasser des poulets, etc. Fricassée, viande fricassée. "Fricassée de poulets, de pieds de mouton. = Fricasseur, mauvais cuisinier.
   On dit populairement; cet homme a tout fricassé, tout dissipé en débauche, en folles dépenses. "Il est fricassé, il est ruiné: cet argent est fricassé, il est perdu.

FRICHE


FRICHE, s. f. [2e e muet.] Dans le Dict. Gramm. On remarque qu' on disait aûtrefois une friche. C' est suposer qu' on ne le dit plus. On se trompe. L' Acad. et de bons Auteurs le disent encôre. = Pièce de terre qu' on a laissée quelque tems sans la cultiver. "Cette vigne n' est plus qu' une friche. Acad. "Les chèvres trouvent autant de nourritûre qu' il leur en faut dans les bruyères, les friches. BUF. = Le plus souvent on le dit adverbialement: en friche, sans cultûre. "Laisser une terre en friche.

FRICTION


FRICTION, s. f. [Frik-cion.] Frotement que l' on fait en quelque partie du corps par remède. User de friction: se servir de frictions. "Les frictions ouvrent les pores. = Friction, n' est pas du discours ordinaire, et il serait ridicule de s' en servir hors des ocasions de maladies et de remèdes. On doit dire ailleurs frotement.

FRILLEUX


FRILLEUX, ou mieux FRILEUX, EûSE, adj. [On ne mouille point les ll, et il est mieux de n' en écrire qu' une comme fait l' Acad. _ Fri-leû, leû-ze. = Il est étonant que Richelet, qui retranche tant qu' il peut les lettres doubles, ait pourtant écrit frilleux. Peut-être de son tems mouillait-on les ll: peut-être était-ce son opinion particulière.] Fort sensible au froid. "Il est fort frileux; vous êtes bien frileûse.
   Et déjà les tristes hyades.
   Forcent les frilleuses Dryades
   De chercher l' abri des rochers.
       Rouss.

FRIMâS


FRIMâS, s. m. [2e. lon. Frimâ.] Brouillard froid et épais, qui se glace en tombant. "Arbres couverts de frimâs.

FRIME


FRIME, s. f. Mine, semblant. "Il a fait la frime de s' en aller. Faire la frime à quelqu' un, lui faire un mauvais acueuil. = Ces deux expressions sont basses. L' Acad.ne met que la 1re, et se contente de dire qu' elle est familière. Trév. les met toutes deux, et traite ces mots de populaires. "C' était une frime pour faire la généreuse. Th. d' Éduc. C' est une persone du peuple qui parle.

FRIMOUILLE


*FRIMOUILLE, ou FRIMOUSE, s. fém. Ils sont bas et populaires, comme le précédent. "Bone frimouse, bone mine. = Ils sont dans l' ancien Trév. L' Acad. ne met ni l' un ni l' autre.

FRINGANT


FRINGANT, ANTE, adj. FRINGUER, v. act. [Frein-gan, gante, ghé: 1re lon. 2e lon. aux deux premiers, é fermé au second, où l' u est muet, et n' est employé que pour doner au g un son fort qu' il n' a pas devant l' e.] Fringant, fort alerte, fort éveillé. "Il est fringant: elle est bien fringante. "Il a l' air fringant, la mine fringante, st. familier. = Cheval fringant, qui a beaucoup de vivacité. Faire le fringant, se doner toute sorte de libertés. Il se dit sur-tout des jeunes gens. = Fringuer *, s' est dit aûtrefois pour danser. Il ne se dit plus qu' activement dans cette phrâse: fringuer un verre, jeter de l' eau dessus et le rinser.

FRIPER


FRIPER, v. act. FRIPERIE, s. f. FRIPIER, IÉRE, s. m. et fém. [2e é fer. au 1er et au 3e, e muet au 2d, è moyen et long au dern. Trév. écrit ces deux mots avec deux p; l' Acad. avec un seul.] Friper (st. famil.) c' est chifoner, ou gâter, user. "Vous avez fripé votre collet, vos manchettes. "Votre habit est tout fripé. "Cet enfant fripe tous ses habits en peu de temps. = Figurément, consumer, dissiper en débauche. Il a fripé tout son bien dans trois ou quatre ans. = Fripe-sauce, goinfre, goulu; il est bâs.
   FRIPERIE, se dit du métier d' acheter, d' acomoder et de revendre de vieilles hardes, de vieux meubles. = Il se dit aussi du lieu où logent ceux qui font ce métier. = Fripier, ière, celui, celle qui se mêle de friperie. = Ces deux mots s' emploient au figuré, en parlant des ouvrages d' esprit; ce n' est qu' en style critique ou comique. "Ce n' est pas assez de savoir coûdre des lambeaux étrangers à son ouvrage, et dont on conoît dabord la friperie. L' Ab. Sabat. Trois Siècles, etc.
   Les fables romanciéres
   De ces fripiers d' impostures grossières.
       Rouss.
Se jeter, tomber, ou se mettre sur la friperie de quelqu' un; c' est, en style proverbial, parler de ses défauts, en dire du mal.

FRIPON


FRIPON, ONE, s. m. et f. FRIPONER, v. act. et neut. FRIPONERIE, s. fém. [3ee muet au 2d et au 4e, é fermé au 3e.] Trév. écrit ces mots avec deux p: l' Acad. n' en met qu' un. = Fripon, fourbe qui dérobe secrètement, qui tâche de tromper ceux qui ont afaire à lui. "C' est un fripon, une fripone. = Adjectif, il a un sens moins odieux: il ne signifie que gai, éveillé, coquet et quelquefois un peu libertin. "OEuil, air fripon, mine fripone. Voy. LARRON.
   FRIPONER, escroquer, atraper quelque chôse par fourberie. "Il a friponé cette montre. "Il a déjà friponé cinq ou six persones. = V. n. friponer au jeu.
   FRIPONERIE, action de fripon. "C' est une friponerie. Faire une friponerie.

FRIRE


FRIRE, v. act. [1re lon. 2ee muet.] Faire cuire dans une poile avec du beurre, du vin doux, ou de l' huile bouillante. Frire des soles, du merlan, des oeufs, etc.
   Rem. Ce verbe n' est d' usage qu' au sing. du prés. de l' indicatif; je fris, tu fris, il frit; au futur, je frirai, etc. et aux temps composés, j' ai frit, j' avais frit, etc. Pour supléer à ce qui manque à ce verbe, on se sert des tems du V. Faire, joints à l' infinitif de frire: je faisais frire, je fîs frire; faites frire; que je fasse, je fisse frire; faisant frire.
   On dit, proverbialement, il n' a plus de quoi frire, il n' y a plus rien à frire, il est ruiné: il n' y a plus à manger, à profiter.
   La pitance du cerf déchut de beaucoup:
   Il ne trouva plus rien à frire.
       La Fontaine.
Il est frit, il est ruiné; tout est frit, tout est perdu. Ces deux-ci sont populaires.
   Tout homme qui la voit est frit.
       Voiture.
C' est du bâs comique.

FRISE


FRISE, s. f. [Frîze: 1re lon. 2e e muet.] Pièce d' architectûre, qui est entre l' architrâve et le corniche. "Frîse plate, ou enrichie de sculptûres.

FRISER


FRISER, v. act. FRISûRE, s. f. [Frizé, zûre: 2e é fer. au 1er, lon. au 2d.] Au propre, créper, boucler, en parlant des cheveux. Frisûre, façon de friser. "Friser des cheveux aux fers, avec des papillotes. "Cette frisûre est belle ou ridicule, etc.
   FRISER, au figuré, ne faire que toucher superficiellement. "La bale lui a frisé le visage, (et non pas, a frisé son visage.) = En style proverbial, friser la corde, risquer d' être pendu. _ Friser le galimathias, en aprocher de fort près. Dans beaucoup d' ouvrages modernes, il y a bien des morceaux qui frisent le galimathias. _ * Je m' en frise, je m' en moque, je m' en soucie peu, est bâs et populaire: il est sur-tout peu décent dans la bouche des femmes.

FRISSON


FRISSON, s. m. FRISSONEMENT, s. m. FRISSONER, v. neut. [Fri-son, soneman, soné: 3e e muet au 2d, é fer. au 3e.] Frisson est, au propre, le tremblement causé par le froid, qui cause la fièvre. Au figuré, il se dit d' une émotion causée par la peur. Frissonement et frissoner s' emploient aussi dans ces deux significations. La fièvre se déclâre, il est dans le frisson: il sent un frissonement: il comence à frissoner. "Cette mauvaise nouvelle lui a causé d' étranges frissons; en l' aprenant, il lui a~ pris un horrible frissonement. "Il frissone de peur, d' horreur.
   D' une secrette horreur je me sens frissoner.
       Racine.
Rem. Un Médecin Provençal fait frisson du genre fém. "Une fièvre lente... des frissons presque habituelles. = C' est un vrai provençalisme.

FRISûRE


FRISûRE. Voy. FRISER.

FRITûRE


FRITûRE, s. f. [2e lon. 3ee muet.] 1°. Action et manière de frire. "Voilà une belle fritûre. = 2°. Beûrre ou huile qui ont servi à frire, et qu' on a gardés pour le même usage. "Cette fritûre est trop vieille. = 3°. Poisson frit. "La fritûre l' incomode. "Il ne mange point de fritûre.

FRIVOLE


FRIVOLE, adj. FRIVOLITÉ, s. fém. [Dern. e muet au 1er, é fer. au second.] Frivole, vain, léger, qui n' a point de solidité. Il se dit des persones et des chôses. "Homme frivole; esprit frivole. "Discours frivole; raison, argument frivole. = On peut l' employer comme substantif abstrait. On peut dire, le frivole, comme on dit, le beau, le vrai, le faux. "L' orgueil des hommes est, dans le fond, d' assez bonne composition sur certains préjugés: il semble que lui-même il en sente le frivole. MARIV.
   FRIVOLITÉ, qualité, caractère de ce qui est frivole. "Il y a bien de la frivolité dans cet ouvrage, dans la conduite de cette femme. "Le goût du siècle est la frivolité: voilà la règle des leçons philosophiques; ou bien, elles seront en pure perte. L' Abé Gauchat. = Au pluriel, chôses frivoles. "Ce discours est rempli de frivolités.

FROC


FROC, s. m. [Frok.] C' est proprement la partie de l' habit monacal qui coûvre la tête; mais on le dit ordinairement de tout l' habit. "Porter, prendre, quiter le froc. _ On ne s' en sert guère que par plaisanterie et par mépris. = En style proverbial, jeter le froc aux orties, quiter l' habit et le monastère, après avoir fait profession. Et par extension, renoncer à quelque profession que ce soit; abandoner par dépit une afaire comencée, etc.

FROID


FROID, s. m. FROID, OIDE, adj. FROIDEMENT, adv. [Froa, froa-de, deman: 2e e muet. = On dit, dans le Dict. Gram. que froid se prononce de deux manières: froa et frè, que la 1re est du style soutenu, et l' aûtre de la conversation. Tout le monde, il s' en faut bien, n' est pas de cet avis; et les Litérateurs et critiques les plus estimés, veulent qu' on prononce toujours froa.] Froid exprime la qualité oposée à la chaleur. "Froid et chaud sont les deux contraires. "Il fait froid; avoir froid; trembler de froid. = Figurément. Air sérieux et composé. "Il a un froid qui glace tout le monde. "Il m' a répondu avec son froid ordinaire. = L' emploie de cette expression n' a pas beaucoup d' étendûe: il est presque tout renfermé dans ces deux phrâses du style familier.
   Le Roi, sombre et pensif, m' écoutoit froidement.
   Ce silence, ce froid est un consentement.
       P. Follard, Thémistocle.
Ce froid, pour cet air froid n' est pas une expression fort noble, et elle est peu digne du style d' une Tragédie. = On dit, proverbialement, soufler le froid et le chaud, parler pour et contre.
   FROID, FROIDE: qui participe actuellement à la natûre, à la qualité du froid. "Pays froid, temps froid; avoir les mains froides, etc. = Figurém. Sérieux, posé, réservé, qui n' est ému de rien. "Il est froid; il a l' abord, l' air froid. "Il croyoit nous faire rire, mais tout le monde demeura froid. = Être, agir, écouter, etc. de sang froid, se posséder, ne pas s' émouvoir. = Faire froid, batre froid à quelqu' un, le recevoir avec un air froid et moins gai, moins ouvert qu' à l' ordinaire. "Pourquoi me faire froid et vous plaindre! La Bruy. _ Marivaux dit, batre froid avec. "C' est une jeune étourdie, assez mal élevée, et avec qui je te prie de battre froid. _ À~ qui vaudrait mieux. = Froid ami, qui n' est pas empressé à rendre service. _ Froid Orateur, qui ne touche pas ses Auditeurs. = En matière d' ouvrages d' esprit, qui n' a point d' agrément, qui ne pique ni ne touche. Style froid; raillerie froide. "Cette harangue est bien froide, etc.
   Rem. 1°. Dans la prôse ordinaire, froid, marche après le substantif. En vers et dans le discours élevé, il peut quelquefois aller devant, sur-tout au fém. "Le froid Borée, "Aux froides eaux du Ciel. De Lille. "Les froides soirées. Rouss.
   2°. Froid, dans le moral, se dit des persones. "Vous écrivez à des amis (anglais) aussi froids que leur patrie. Coyer. Mais dans le physique, il ne se dit point des persones. On ne doit pas dire je suis froid, vous êtes froide: On ferait entendre toute aûtre chôse que ce qu' on voudrait dire. On doit dire alors, j' ai froid, vous avez froid, etc.
   À~ FROID, adv. Sans mettre au feu. "Infuser, tremper à froid. "Fer batu à froid. = Dans l' Ann. Litt. on dit au figuré, laisser à froid. "Il s' exhale en lieux communs, en déclamations, qui laissent le spectateur à froid. = Je doute que l' usage admette cette expression.
   FROIDEMENT, dans un état où l' on est exposé au froid. "Être logé froidement. Il est peu usité en ce sens. Son emploie ordinaire est au figuré: d' une manière sérieuse et réservée. "Il me reçut, il me répondit froidement.

FROIDEUR


FROIDEUR, s. fém. FROIDIR, v. neut. FROIDûRE, s. fém. [Froa-deur, di, dûre.] Froideur est la qualité de ce qui est froid. Froidûre, le froid répandu dans l' air. Le 1er se dit au propre et au figuré: "La froideur de l' eau, du marbre, du tems, de la vieillesse. "Il m' a recu avec froideur. "Il y a de la froideur entr' eux. _ Le 2d ne se dit qu' au propre. "La froidûre d' un climat, de la saison.
   Loin de vous, l' aquilon fougueux,
   Soufle sa piquante froidûre.
       Rousseau.
  Tel un arbre, que la nature
  Plaça sur le courant des eaux,
  Ne redoute pour ses rameaux,
  Ni l' aquilon, ni la froidure.      Le Franc.
Du jour, la chaleur dévorante,
Et la froidûre de la nuit.Id.
On s' en sert~ aussi pour signifier l' hiver; mais, en ce sens, il n' est d' usage qu' en Poésie.
   Attends que dans les Cieux disparoisse l' arcture,
   Et poursuis jusqu' au temps où règne la froidure.
       De Lille.
  O! qu' après la triste froidure,
  Nos yeux, amis de la verdure,
  Sont enchantés de son retour.
      Rousseau.
FROIDIR, devenir froid. Il est neutre et réciproque. "Ne laissez pas froidir le dîner. "Les viandes se froidissent.

FROIDUREUX


FROIDUREUX, EûSE, adj. [Froa-du--reux, reû-ze: 3e lon.] Frileux, sujet à avoir froid. "Vous avez déjà pris l' habit d' hiver: vous êtes bien froidureux. On dit sérieûsement frileux; on ne dit guère froidureux, qu' en raillant et en blâmant.

FROISSEMENT


FROISSEMENT, s. m. FROISSER, v. act. FROISSûRE, s. fém. [Froa-ceman, , sûre: 2e e muet au 1er, é fer. au 2d, lon. au dern.] Froisser, c' est, 1°. meurtrir par une impression violente. "Sa chute lui a froissé toute la cuisse (et non pas, a froissé sa cuisse). Il s' est froissé tout le corps en tombant. = 2°. Chifoner. "Froisser une étofe à force de la manier. = Froissement est l' action de froisser; froissûre, l' impression qui demeure à une partie qui a été froissée: Le premier a le sens actif, et le second le sens passif. "Le froissement des cailloux excite du feu. "Il sera bien dificile de guérir cette froissûre. = L' usage de ces deux mots est borné.

FRôLEMENT


FRôLEMENT, s. m. FROLER, v. act. [Frôleman, frolé: 1re lon. au 1er, 2e e muet au 1er, é fer au 2d. _ L' Acad. met un acc. circ. sur l' o dans les deux; mais cet o n' est long que devant l' e muet: il frôle, frôlera, etc. On ne doit donc pas mettre l' accent devant la syll. masc. Froler, Frolant, Frola, etc.] Froler, c' est toucher légèrement en passant. Frôlement, est l' action de froler, ou l' état de ce qui est frolé. "La balle lui frola les cheveux, le brâs. "Le frôlement de la balle lui a fait une légère contusion. "Ce n' est qu' un simple frôlement: il sera bientôt guéri.

FROMAGE


FROMAGE, s. m. FROMAGER, ÈRE, s. m. et f. FROMAGERIE, s. f. [3e e muet au 1er et au dern. é fer. au 2d, é moyen et long au 3e.] Fromage est une sorte de laitage, câillé et égouté. "Fromage de Roquefort, de Hollande, de Gruyère, etc. "De la soupe au fromage. = On dit, proverbialement, entre la poire et le fromage, dans la gaité où l' on est d' ordinaire à la fin d' un bon repâs.
   Fromager, gère, celui, celle qui fait ou qui vend des fromages. = Fromagerie, manufactûre de fromage.

FROMENT


FROMENT, s. m. [Froman: on disait aûtrefois froument.] C' est le nom de la meilleure espèce de blé. "Terre à froment: farine de pur froment.

FRONCEMENT


FRONCEMENT, s. m. FRONCER, v. a. FRONCIS, s. m. [Fronce-man, , ci: 1re lon. 2e e muet au 1er, é fermé au 2d.] Froncer, plisser, en parlant de certains plis que l' on fait à du linge, à des étofes. Froncis est le nom de ces plis. "Froncer une jupe; faire un froncis à une robe. = Le Dict. de Trév. met aussi fronçure dans le même sens. L' Acad. ne le met pas.
   Froncer signifie encôre rider, et en ce sens, il ne se dit que du sourcil. "Il fronça le sourcil de dépit et de colère. Ce n' est aussi qu' en ce sens qu' on dit froncement. "Le froncement des sourcils.

FRONDE


FRONDE, s. f. FRONDER, verbe act. FRONDEUR, s. m. [1re lon. 2e. e muet au 1er, é fer au 2d. _ Sans considérer l' étymologie de ce nom, qui vient du latin funda, où il n' y a point d' r, il faut dire fronde, et non pas fonde, comme ont dit aûtrefois des Auteurs estimables de leur tems pour le langage.] Fronde est un tissu de corde, avec lequel on jète des pierres. "Les anciens avaient dans leurs troupes, des frondeurs, des gens armés de frondes. = Fronder, au propre, jeter des pierres avec une fronde. "Fronder des pierres. _ V. n. "Ces petits garçons s' amusent à fronder. = Par extension, il se dit de tout ce qu' on jète avec violence. "Il lui fronda une assiète à la tête. = Au figuré, blâmer, critiquer hautement. "On a frondé sa harangue. "Je suis le premier à fronder les ridicules de la Cour. Mol. "Dès qu' il eut ouvert la bouche, tout le monde le fronda. = C' est aussi parler contre le gouvernement. Dans ce sens, il est neut. "Il ne fait que fronder tout le jour. "C' est un des plus grands frondeurs que je conaisse. "Nous vivons dans un siècle frondeur et sistématique, où l' esprit ne s' exerce qu' aux dépends de la raison. Ann. Litt. _ Fronder et Frondeur, au figuré, datent de la Minorité de Louis XIV. Ils sont du style familier.

FRONDERIE


*FRONDERIE, s. fém. Mot forgé par Mme. De Sévigné, d' après fronder et frondeur. Il y a ici (en Bretagne) de grandes fronderies: mais cela s' apaise dans 24 heures.

FRONT


FRONT, s m. FRONTAL, FRONTEAU, s. m. [Fron, frontal, fronto: 1re long. 2e dout. au sing. du dern. long. au plur. fronteaux.] Front est, 1°. la partie du visage, qui est depuis la racine des cheveux jusqu' aux sourcils. "Avoir des rides au front ou sur le front. = Il se prend quelque--fois pour tout le visage. "On lit, on voit sur son front, etc. = 2°. Il se dit du devant de la tête de quelques animaux. "Le front d' un cheval, d' un boeuf, d' un éléphant. = 3°. Figurément; audace, impudence. "Aurez-vous le front d' assurer un pareil mensonge? _ De quel front Virgile osait-il vous dire, etc. Font. _ N' avoir point de front, n' avoir ni honte, ni pudeur. _ Il a un front d' airain, ou c' est un front d' airain; il ne rougit de rien. Toutes ces expressions, et sur-tout la dernière, sont du haut style, comme du style familier. = 4°. Front se dit des chôses, quand on parle d' une armée, d' une troupe, d' un bâtiment. L' armée présentait un grand front. "Ce bataillon avoit tant de front. "Il faisoit front de tous côtés. "Le front d' un bâtiment, d' un bastion.
   DE FRONT, adv. Par devant. "Ataquer l' énemi de front. "Il se présente, pour ainsi dire, de front au péril. Vertot. "La fausse grandeur est farouche... elle se cache, et ne se montre pas de front. = Tout-à-la-fois et en même tems: "Leibnitz mena de front toutes les sciences. "Loin de séparer les deux méthodes, celles de l' expérience et du raisonement, on ne peut aporter trop de soin à les mener de front, et à les unir perpétuellement. Ann. Lit. "Le talent râre de combiner les évènemens politiques avec les succès guerriers, de les enchaîner avec adresse, et de les faire marcher, pour ainsi dire, de front. Ibid. "L' embârras de faire marcher de front une intrigue et des caractères. Mercûre. = Les uns disent choquer, les aûtres, heurter de front, ouvertement. "Heurtant de front tout ce qui fait aujourd' hui l' admiration des hommes, je ne puis m' attendre qu' à un blâme universel. J. J. Rousseau. _ M. l' Abé Guénée dit, choquer de front, mais heurter vaut mieux, et il est plus usité. = L' Acad. ne met ni choquer, ni heurter de front, ni mener ou faire marcher de front, ni se présenter, ou se montrer de front. Ce n' est pas à dire pourtant que ces expressions ne soient d' usage, et qu' on ne puisse s' en servir. C' est qu' il est impossible qu' on n' omette de tems en tems quelques articles, même intéressans; et qu' on ne pense jamais à tout.
   REM. Front, pour air, est poétique.
   Ah! je n' en doute pas, et ce front satisfait
   Dit assez à mes yeux que Porus est défait.
       Rac. Alex.
"Le sort me verra, d' un front toujours égal recevoir ses bienfaits et braver ses rigueurs. Jér. Dél. _ On dirait, en prose, cet air satisfait, d' un air toujours égal. = À~ front découvert, est aussi plutôt du style soutenu, que du familier.
   Mais en ce siècle à la révolte ouvert,
   L' impiété marche à front découvert.
Lever un front orgueilleux, est aussi une expression poétique ou oratoire.
   De vils mortels jusqu' au plus haut des cieux
   Osent lever un front audacieux.
       Rouss.
FRONTAL et FRONTEAU ont la même signification, mais ils n' ont pas le même emploi. Ils signifient tous deux, un bandeau qu' on met sur le front: mais le 1er se dit d' un remède pour apaiser le mal de tête; et d' une corde à plusieurs noeuds, dont on serre le front d' un homme, pour le forcer d' avouer quelque chôse. Le 2d se dit d' un bandeau sur lequel était écrit le nom de Dieu, ou quelque passage de l' Écriture Sainte, que les Juifs avaient acoutumé de porter sur le front; de cette partie de la têtière, qui passe au-dessus des yeux du cheval; et encôre du morceau de drap noir, dont on couvre le front d' un cheval, quand on l' enharnache de deuil. = Dans ces deux derniers sens, on dit aussi frontail.

FRONTIèRE


FRONTIèRE, s. f. [Fron-tiè-re: 2e è moy et long, 3e e muet.] Les limites qui séparent les États de diférens Souverains. "L' armée étoit sur la frontière. " Reculer par ses victoires les frontières d' un État. = Adj. f. "Ville, place, province frontière.

FRONTISPICE


FRONTISPICE, s. m. Il y a plus de 50 ans que La Touche a remarqué qu' on ne dit plus ce mot, ni de la face d' un bâtiment, ni de la 1re page où est le titre d' un livre, qu' il apèle la tête ou le devant. Il avoue pourtant que l' Acad. l' aprouve en ces deux sens là. Elle a continué de le dire dans la dern. édition. Pour les deux mots que La Touche a voulu substituer à frontispice, ils sont bien moins usités. Ce qui est plus vrai, c' est qu' en parlant de bâtimens, on ne dit celui-ci que des grands édifices et de leur face principale, qui est la mieux décorée. "Le frontispice du Louvre, de St. Pierre de Rome, etc.

FRONTON


FRONTON, s. m. Ornement d' architecture, qui est ordinairement en triangle, qui termine un frontispice, et qu' on met quelquefois aussi en haut des portes, des croisées.

FROTTAGE


FROTTAGE, ou FROTAGE, s. m. FROTEMENT, s. m. FROTER, v. a. [2e e muet au 2d, é fer. au 3e, froteman, . _ Quelques-uns prononcent froaté: prononciation très vicieuse.] Froter, c' est, 1°. pâsser plusieurs fois la main par-dessus. "Froter fort, ou doucement. "Se froter les yeux, et non pas froter ses yeux. "Se faire froter. "Froter le plancher. = 2°. Oindre. "On lui frota le bras avec du baûme. "Les athlètes se frotoient d' huile avant que de luter. = 3°. En style familier, Batre, fraper. "On l' a froté comme il faut. _ Se froter à, hanter, fréquenter. "Ne vous frotez pas à ces gens-là, ils pourroient vous séduire. = S' ataquer à... Il ne fait pas bon se froter à lui.
   FROTEMENT ne se dit que des choses: collision, de deux choses qui se frotent. "Le frotement de l' essieu ûse le moyeu~ de la roue. = Frotage, le travail de celui qui frote. Il ne se dit guère que des planchers.
   REM. Frotement est à la mode au figuré. "Le frotement qu' éprouvoient sans cesse les idées, les passions, les préjugés avec des idées, des passions, des préjugés contraires. Esprit des Crois. _ Ah! Molière, où es-tu? Après avoir joué les Précieuses, tu jouerais aujourd' hui les Précieux ridicules.

FROTTEUR


FROTTEUR, ou FROTEUR, s. m. FROTTOIR ou FROTOIR, s m. [Fro-teur, toar.] Froteur, comme frotage, ne se dit que des planchers. = Frotoir, est 1°. Linge dont on se sert pour se froter la tête et le corps. 2°. Linge dont les Barbiers se servent pour essuyer leurs rasoirs, quand ils font la barbe. 3°. Brosse à laquelle est atachée une courroie, où le froteur passe le pied pour froter le plancher des apartemens. = L' Acad. dans la définition et dans les exemples, ne met que le 1er sens.

FRUCTIFIER


FRUCTIFIER, v. n. [Fruktifié.] Il se dit plus souvent au figuré qu' au propre. Raporter du fruit. "Une terre bien fumée fructifie davantage. "L' Évangile a bien fructifié dans les Indes. Dieu a béni son travail, son zèle, et l' a fait fructifier.

FRUCTUEûSEMENT


FRUCTUEûSEMENT, adverbe, FRUCTUEUX, EûSE, adj. [Fruktu-eû-zeman, tu-eû, tu-eûze: 3e lon. 4e e muet.] Fructueux, utile, profitable, lucratif. Fructueûsement, utilement, avec fruit. "Emploi fructueux, charge fructueûse. Il ne se dit que des chôses. "Les Missionaires ont travaillé fructueûsement en cette Province.

FRUGAL


FRUGAL, ALE, adj. FRUGALEMENT, adv. FRUGALITÉ, s. f. [3e e muet au 2d et au 3e, gale, galeman, dern. é fer. au 4e.] Frugal, qui se contente de peu pour sa nourriture~, qui vit de choses comunes. Frugalité, vertu de l' homme frugal. Frugalement, avec frugalité. "Il est extrêmement frugal, il mène une vie frugale: "Il vit frugalement, avec frugalité. "La frugalité sert à la santé du corps comme au bien de l' âme. = Frugal se dit du repas et de la table, où l' on ne sert que des mets simples et comuns, et seulement ce qu' il en faut pour se nourrir.
   REM. 1°. Frugal n' a point de pluriel au masc. On dit, des persones frugales; mais on ne dit point, des hommes frugals, ni frugaux. Réflex. Acad.
   2°. Il aime à suivre le substantif, qu' il modifie. "Homme frugal, vie frugale. En vers, il précède élégamment.
   Ami des frugales demeures,
   Sommeil, pendant les sombres heures,
   Tu répands sur ses yeux tes songes favoris.
       Gresset.

FRUIT


FRUIT, s. m. [Frui: on ne prononce point le t final.] Au propre, production des arbres et des plantes. "Les fruits de la terre; les fruits de la saison. = Il se dit plus particulièrement et absolument des arbres. "Il aime le fruit, il ne vit que de fruit. "Fruits d' été, d' automne, d' hiver, etc. = Fruit, dessert. "Servez le fruit. "On en étoit au fruit, quand il est arrivé. Voy. DESSERT. = Fruits, au pluriel, se dit des revenus d' une terre, d' un bénéfice, d' une charge. = Par extension et par métaphore, on apèle fruit, l' enfant qu' une femme enceinte porte dans son sein, ou qu' elle vient de mettre au monde. "Une femme est obligée de conserver son fruit. "Elle s' est délivrée de son fruit. En Droit, on apèle fruits, les revenus d' un bénéfice. "Pouvoit-il, sans choquer la raison et la pudeur, s' apliquer tous les fruits, et refuser la pension? Cochin.
   Au figuré, on dit fruit, pour utilité, profit, avantage qu' on retire de quelque chose. "Le fruit de ses travaux, de ses veilles, de ses études. * Anciènement, on disait, tirer fruit: Aujourd' hui, on dit, du fruit. "Pour tirer fruit (du fruit) de ce saint exercice, etc. "Je n' ai tiré aucun fruit de toutes mes peines. On dit aussi retirer le fruit. "Saladin, qui devoit en retirer tout le fruit, (de cette expédition) fut le seul qui refusa d' accompagner son oncle. Marin, Hist. de Saladin. = Faire du fruit, produire des éfets avantageux pour le salut des ames. "Ce Prédicateur fait du fruit. "Cette Mission a fait un grand fruit, ou beaucoup de fruit dans cette ville. = C' est aussi, figurément, l' éfet bon ou mauvais d' une cause. "C' est le fruit de sa piété, de ses soins. "La honte et le repentir sont les fruits ordinaires des passions.

FRUITERIE


FRUITERIE, s. f. FRUITIER, IèRE, adj. et subst. [Frui-teri-e, tié, tiè-re: 2e e muet au 1er, é fer. au 2d, è moy. et lon. au 3e.] Fruiterie est, dans les maisons, le lieu où l' on garde le fruit. Fruitier, ière, celui, celle qui fait métier de vendre du fruit. = Adj. Arbre fruitier, qui porte du fruit. Jardin fruitier, où il y a beaucoup d' arbres fruitiers. _ On dit aussi substantivement, un fruitier.

FRUSQUIN


*FRUSQUIN, s. m. Terme populaire. "Il a perdu tout son frusquin, ce qu' il avait d' argent et de nipes.

FRUSTRER


FRUSTRER, v. a. Priver quelqu' un de ce qui lui est dû, ou de ce à quoi il s' atend. "Le frustrer de ses droits, de ses espérances. = On dit, avec le seul régime direct, frustrer ses créanciers; frustrer l' espérance ou les espérances de quelqu' un.

FUGITIF


FUGITIF, IVE, adj. [on pron. l' f finale au fém.] Qui fuit, ou qui a fui. "Esclave fugitif. = Poétiquement, l' onde fugitive, qui fuit, qui court. = S. m. "C' est un fugitif. = En Litératûre, on apèle pièce fugitive, un petit ouvrage, soit manuscrit, soit imprimé, et on lui done ce nom, parce que par la petitesse de son volume, il est sujet à se perdre. = On le dit sur-tout des morceaux détachés de poésie légère. "Ses Pièces fugitives (de Dorat) ont un ton et une physionomie, qui sont particuliers à ce Poète. Sabatier, Trois Siècles, etc.
   REM. Fugitif se dit ordinairement sans régime. M. des Essarts lui fait régir la préposition de et au propre: fugitives de Paris, de Flandres, d' Angleterre; et au fig. "On y voit une mère figitive de ses Tribunaux, qui veut faire ordoner par les nôtres le déshoneur de sa fille. Causes Célébres. Ce régime peut être bon au Palais, au Barreau, mais, hors de-là, il n' est point admis par l' usage.

FûIE


FûIE, s. f. [Fû-ie: 1re lon. 2e e muet.] Petit colombier où l' on nourrit des pigeons domestiques.

FUIR


FUIR, v. n. [Monosyllabe.] Malherbe, qui avait l' oreille bonne, a toujours fait fuir de deux syllabes, et fuit d' une seule.
   Mîsérable qu' il est, se condamne lui même
   À~ fuir & mourir.
   Si le plaisir me fuit, aussi fait le sommeil.
Il a été suivi par plusieurs Poètes, et aprouvé de Vaugelas. Le P. Mourgues prétend, au contraire, qu' il est d' une seule syllabe; et il en raporte des exemples de Quinaut, Racine, Despreaux, et même de Corneille. = L' Académie est de ce sentiment. La Touche prétend aussi que cette diphtongue en deux syllabes rend le vers languissant et désagréable, et que déjà de son tems (au comencement du siècle) les bons Auteurs le faisaient monosyllabe. = Fuï, participe, est aussi de deux syllabes, suivant Ménage et suivant la décision de l' Acad. d' alors, qui, dans ses Sentimens sur le Cid, reprit l' Auteur de l' avoir fait d' une seule syllabe.
   Fuir: je fuis, nous fuyons; je fuyois, nous fuyions, etc. Je fuis, j' ai fuit, je fuirai, fuirois. Fui, qu' il fuie, je fuisse, fuyant.
   Rem. Quoiqu' on dise fort bien, par exemple, j' ai fui les ocasions de disputer; on ne dit pas, les ocasions que j' ai fuies: il faut dire, que j' ai évitées. L' Abé Regnier apèle cela une bisârrerie de l' usage: mais cette bisârrerie n' est pas sans raison. Il est sensible que, les ocasions que j' ai fuies, sone fort mal à l' oreille, qui est avec la raison le Législateur des langues. _ Le P. d' Avrigni dit: "On en a vu, solitaires dans leur cour, fuis par leurs propres enfans. _ Cela est dur à l' oreille.
   Fuir peut-être employé, ou comme verbe actif, dans le sens d' éviter. "Fuir le péril, le combat, le monde, ou comme verbe neutre, dans le sens de prendre la fuite. "Fuir devant les énemis. _ Dans cette dernière acception, on ne s' en sert guère à l' aoriste, on emploie plutôt le composé s' enfuir. "Les énemis s' enfuirent et non pas, fuirent. "Dioclétien fuit Rome, qu' il trouvoit trop libre. Bossuet. Il valait mieux dire, quita Rome. = Le temps fuit, il passe vîte: ce toneau fuit, il coule par quelque félûre. Ce chicaneur fuit toujours, il tâche d' éloigner la conclusion de l' afaire, la décision du procès. On dit proverbialement, en jouant sur le mot: il fuit, mais je l' atraperai bien sans courir. = Avec le pron. pers. il présente un beau sens: se fuir soi-même, chercher à éviter les remords et l' ennui. "Je vivrai au milieu des remords... Je me craindrai moi-même, et me fuyant toujours, je me retroûverai sans cesse. Jér. Dél.
   REM. Voltaire fait régir à ce verbe la préposition de.
   Vous chercherez la mort, la mort fuira de vous.
Le P. La Rue lui done pour régime cette même prép. devant l' infinitif. Il dit aux vindicatifs: "Comment pouvez-vous suporter la vue de J. C. en Croix? Comment ne fuyez-vous pas d' attacher vos regards sur lui? _ Ces deux régimes sont inusités, sur-tout le dernier.

FUITE


FUITE, s. f. [Fui-te; 2e e muet.] L' anc. Trév. écrivait fuitte. C' était alors une fureur de mettre partout de doubles consones, et l' on n' en est pas encore guéri. = 1°. Action de fuir. "Être ou mettre en fuite, fuir, ou faire fuir. Prendre la fuite. = Figur. "La fuite du vice, de l' ocasion. = 2°. Délai, échapatoire, retardement artificieux. "Il use de fuites. "Toutes ces procédures ne sont que fuites. "Ce que vous dites n' est pas une bone raison: c' est une fuite.
   REM. 1°. Fuite, n' a point de pluriel dans le sens litéral. On ne dirait pas aujourd' hui, comme a dit autrefois. Malherbe.
   Les fuites des méchans, tant soient-elles secrettes,
   Quand il les poursuivra n' auront point de cachettes.
   Au lieux les plus profonds ils seront éclairés.
   2°. Il me semble que fuite ne s' alie pas bien avec les pronoms démonstratifs. Je n' aime pas le P. d' Orléans quand il dit: "La nouvelle de cette fuite mit le Roi de Castille en fureur. J' aimerais mieux dire la fuite de ce Prince que cette fuite. M. MARIN croit que l' un ne vaudroit pas mieux que l' aûtre. Si cela est, il faut donc prendre un aûtre tour.
   3°. On dit prendre la fuite, mais se tourner en fuite, comme dit Vertot, est une locution barbâre. "Ces jeunes gens, idolâtres de leur beauté, se tournèrent en fuite, de peur de s' exposer à être défigurés par des blessûres et des cicatrices. = On dit aussi, mettre en fuite les aûtres, mais je ne crois pas qu' on puisse dire, se mettre en fuite (soi-même.) "Qu' il (le Démon) voie seulement le signe de la croix, il se mettra en fuite. P. Berthier. Il faut dire; il prendra la fuite.

FULMINANT


FULMINANT, ANTE, adj. FULMINATION, s. f. FULMINER, v. act. et n. [3e. lon. aux deux premiers, é fer. au dern. nan, nan--te, na-cion, .] Fulminer, c' est en termes de Droit Canon, publier quelques actes avec certaines formalités. "Fulminer des bulles, une sentence d' excomunication. = V. n. Dans le discours familier, s' emporter, invectiver avec menaces. "Il fulmine, il tempête. "Il fulmine contre vous. = Fulmination, se dit dans la 1ere acception: La fulmination des bulles, etc. Fulminant dans la seconde. "Il se met en colère pour la moindre chôse: il est toujours fulminant.

FUMANT


FUMANT, ANTE, adj. FUMÉE s. f. FUMER, v. n. et act. [2e lon. aux deux premiers, é fer. aux 2 dern. Fuman, mante, mé-e, .] 1°. Fumée, vapeur épaisse, qui sort des chôses brûlées ou extrêmement échaufées par le feu. Fumer, jeter de la fumée. Fumant, qui fume. "S' exhaler en fumée. Le bois verd fait beaucoup de fumée; il fume beaucoup. "Tison fumant. = On dit qu' une cheminée, qu' une chambre, etc. fume, lorsque la fumée au lieu de sortir par le tuyau entre dans la chambre. 2°. Fumée et fumer, se disent aussi des vapeurs, qui s' exhalent des corps humides, lorsqu' ils viènent à être échaufés par quelque caûse que ce soit. Au printemps, il sort des fumées de la terre; on voit les prés, les marécages fumer.
   3°. FUMÉES, au plur. se dit des vapeurs qu' on croit qui s' élèvent des entrâilles au cerveau. "Les fumées du vin, de la mélancolie.
   4°. FUMER, actif, mettre des viandes à la cheminée, et les y tenir longtems pour les sécher et leur doner un certain goût, qui plait au plus grand nombre. "Fumer des langues, du boeuf salé, etc. = C' est aussi prendre du tabac en fumée. "Fumer du tabac, une pipe de tabac. _ Et neutralement. "Il n' aime pas à fumer: il a fumé tout le jour.
   5°. FUMER, épandre du fumier sur un champ cultivé. "Fumer un champ, une vigne. "Les inondations des fleuves... périodiques fument les terres qu' elles submergent. St. Pierre.
   REM. I. Fumant, suit toujours le nom qu' il modifie, et rârement ferait-il un bon éfet, s' il étoit placé devant.
   Je le verrai ce Dieu puissant
   Foudroyer leurs têtes fumantes.
       Rouss.
= Il ne se dit pas tout seul des persones. On dit un homme fumant de colère, mais on ne dit pas comme Brebeuf.
   Le Gent-d' Arme, à ces mots tout fier et tout fumant,
   Pousse vers l' énemi son coursier écumant.
_ On dit aussi des mains d' un meurtrier qu' elles sont fumantes du sang qu' il a versé; mais on ne dit pas du meurtrier lui-même qu' il est fumant d' un meurtre. * L' audacieux Joab, qui se montre à David, fumant du meurtre d' Absalon. Neuville. _ Ce grand Orateur dit mieux en un aûtre endroit. "Une montagne fumante de son sang (de J. C.) sacrilègement répandu.
II. Fumée, entre dans quelques expressions figurées du beau style. _ S' en aller en fumée, s' évanouïr. "Ces grandes espérances s' en allèrent en fumée. _ Se repaître de fumée; de vaines espérances, ou, de vains honeurs. _ "Les chôses du monde ne sont que fumée, sont vaines et frivoles. "Lorsqu' on vient à réfléchir que c' est pour un peu de fumée que les Philosophes sont capables d' en venir entr' eux à des extrémités si cruelles... on est bien tenté de les regarder en pitié. Palissot.
   En style proverbial, on dit qu' il n' y a point de fumée sans feu, que les mauvais bruits ont toujours quelque fondement, (ce qui n' est pas toujours vrai) et qu' il n' y a point de feu sans fumée, qu' on ne peut pas réussir à cacher une violente passion. _ Ne fréquentez pas mauvaise compagnie, si vous n' y êtes pas brûler du feu, vous y serez noirci par la fumée, si vous n' y perdez pas vos moeurs, vous y perdrez votre réputation. _ On dit d' un homme, qui tire parti d' un crédit qui n' est qu' aparent, qu' il vend de la fumée; que c' est un vendeur de fumée. _ Manger son pain à la fumée du rôt, voir prendre aux aûtres des plaisirs, ou faire des profits qu' on ne peut partager.
   III. Fumer, figurément et proverbialement, signifie être de mauvaise humeur. "Pour la moindre chôse, il fume, ou la tête lui fume. "Il fume de couroux, de colère, etc.

FUMERON


FUMERON, s. m. [2e e muet.] Morceau de charbon de bois, qui jète encore de la flamme.

FUMET


FUMET, s. m. FUMEUR, s. m. FUMEUX, EûSE, adj. [Fumè, meur, meû, meû-ze: 2e è moy. au 1er, lon. aux 2 dern.] Fumet, est une vapeur, qui s' exhale de certains vins et de certaines viandes, et qui chatouille l' odorat et le goût. "Ce vin, ce lapin, cette perdrix a un bon ou un grand fumet, un trop grand fumet, a trop de fumet. = Fumeur, qui a acoutumé de fumer du tabac. "Un grand fumeur. = Fumeux, se dit du vin et d' aûtres liqueurs qui envoient des fumées, des vapeurs à la tête. "Vin fumeux: bière fumeûses. = * Suivant le Dic. de Trév. Il se dit des persones et signifie vif, bouillant. On ne pourrait en ce sens le dire que par métaphôre et seulement dans le style comique. _ L' Acad. ne le met pas.

FUMIER


FUMIER, s. m. [Fu-mié: 2eé fer.] Paille mélée avec la fiente, dont on se sert pour amender les terres. = En style proverbial, être sur son fumier, c' est être chez soi. "Il ne faut pas ataquer un homme sur son fumier. "Le coq est bien fort sur son fumier. _ Je suis sur mon fumier, comme toi sur le tien. = On dit, dans le même style d' un dissipateur, qu' il mourra sur un fumier.

FUMIGATION


FUMIGATION, s. f. [Fumiga-cion.] 1°. Action de brûler quelque aromate ou quelque liqueur pour en répandre la fumée. "Les fumigations sont quelquefois salutaires. = 2°. Action d' exposer un corps à la fumée.

FUMISTE


FUMISTE, s. m. Ouvrier, dont la profession est d' empêcher que les cheminées ne fument.

FUNAMBULE


FUNAMBULE, s. m. Ce mot ne se dit que par les savans, pour signifier un danseur de corde. Il signifie proprement, qui marche sur une corde.

FUNèBRE


FUNèBRE, adj. [2e è moy. 3e e muet.] Qui concerne les funérailles. "Ornemens, honeurs funèbres. Pompe funèbre. Convoi, apareil funèbre. Oraison funèbre. = Fig. triste, lugubre; cri, image funèbre. = De funèbres accens. _ Dans la prôse ordinaire, il suit le substantif. Dans la prôse poétique ou oratoire, il précède élégamment.
   Paroissez, aportez de funèbres ofrandes.
       Gresset.

FUNÉRâILLES


FUNÉRâILLES, s. f. pl. FUNÉRAIRE, adj. [Funérâ-glie, rère: 2eé fer. 3e lon. è moy. au 2d.] Funérâilles, obsèques et cérémonies, qui se font aux enterremens. "Faire les funérâilles de... Assister aux funérâilles. "Le jour, la pompe, la cérémonie des funérâilles.
   Puissent tes palais embrasés
   Eclairer de tes Rois les tristes funérâilles.
       Le Franc.
= Funéraire, n' est usité que dans cette locution. Frais funéraires, faits pour les funérailles.
   Funérâilles, obsèques, (syn.) L' un et l' autre anonce un enterrement fait avec plus ou moins de cérémonies; mais le mot pompeux de funérâilles anonce tout seul des obsèques pompeûses. Aussi le discours relevé s' empare de funérâilles, et le récit simple, quoique noble, se contente d' obsèques. "Un fils fait des obsèques à son père et laisse les funérâilles à la vanité. L' usage atribûe spécialement aux funérâilles l' apareil et l' éclat du deuil, et aux obsèques l' homage et le tribut particulier de la piété. ROUB. Syn.

FUNESTE


FUNESTE, adj. FUNESTEMENT, adv. [Funèste, teman: 2e è moy. 3e e muet.] Funeste, sinistre, qui porte avec soi la calamité et la désolation. Funestement, d' une manière funeste. "Accident, voyage, évènement, mort funeste. "Entreprise, nouvelle funeste. = Il régit quelquefois le datif. "Son audace lui a été funeste. = "Cela est arrivé le plus funestement du monde.
   Rem. 1°. Ordinairement funeste marche après le nom qu' il modifie. Dans le discours oratoire ou poétique, il peut élégamment le précéder. "Jusqu' au funeste port. Thomas. "Le venin des funestes vapeurs. Delille.
   2°. Il ne se dit que des chôses: ROUSSEAU l' aplique aux persones.
   La mort expia les crimes
   De vos funestes aïeux.
Il ne faut pas chicaner les Poètes, mais il ne faut pas imiter en prôse des licences que la Poésie autorise, et souvent même nécessite.

FUR


FUR. On dit au fur et à mesure, ou à fur et à mesûre, pour dire à mesûre que. Le 1er est employé par les Notaires: le 2d est du discours ordinaire et familier.

FURET


FURET, s. m. FURETER, v. n. FURETEUR, s. m. [Furè, reté, teur: 2e è moy. au 1er, e muet aux 2 aûtres. Devant l' e muet, la pénult. est un è moy. il furète, furètera ou furette, furettera.] Furet, est au propre un petit animal, dont on se sert pour prendre des lapins, et qui va les chercher dans leur terrier. "Chasser au ou avec le furet. = Fig. Homme curieux, qui s' enquiert de tout. "C' est un furet, un vrai furet. = Remède, qui va chercher les humeurs les plus cachées dans le corps. "Le mercure et l' émétique sont des furets.
   FURETER, au propre, chasse au furet. Au figuré, chercher par-tout avec soin. "Il va fureter par-tout. "Il furète par tout, pour savoir ce qui se pâsse. "Il va fureter dans les bibliothèques.
   FURETEUR, qui chasse au furet. = Qui cherche par tout, soit par curiosité, soit pour faire son profit. "C' est un ardent, un habile fureteur. = Fureteur de nouvelles, qui va furetant des nouvelles par-tout.

FUREUR


FUREUR, s. f. FURIBOND, ONDE, adj. [le d final ne se prononce point au 2d.] Fureur, 1°. Manie, frénésie. "Accès de fureur. "Quand il entre en fureur: quand la fureur lui prend. "Il lui prit une furuer de la langue. (st. plaisant) elle dit mille injûres au Comte. Le Sage. = 2°. Violent transport de colère. "La fureur l' emporte. "Il est transporté de fureur. "La patience irritée se change en fureur. = 3°. Violente agitation, en parlant des chôses inanimées. "La fureur de l' orage, de la tempête, de la mer, des vents, des flots, des flâmes. = 4°. Passion démesurée. "Il a la fureur du jeu. "Il a une grande fureur pour les coquilles, les fleurs. = 5°. Transport, qui élève l' esprit au-dessus de lui-même. "Fureur prophétique; poétique, martiale. "Une sainte fureur le saisit.
   Fureur et furie ont le même sens, mais ils n' ont pas le même emploi. On dit: fureur poétique, fureur divine, fureur martiale, fureur héroïque, et non pas furie: au contraire furie se dit du combat, de la maladie: on ne dit pas dans la fureur, mais dans la furie du combat, du mal. Il semble que le mot de fureur dénote davantage l' agitation violente du dedans, et le mot de furie celle du dehors. Vaug.
   Rem. On dit, adverbialement, aimer, haïr avec fureur, jusqu' à la fureur. "Il haïssait le St. Prélat à la fureur. MARSOLIER = En fureur, se dit des persones, et avec fureur des chôses. "Cet homme est sorti en fureur, comme un furieux. "Le feu s' est étendu avec fureur jusqu' aux maisons voisines. Voltaire trouvant que le 2d de ces adverbes avoit une syllabe de trop pour le vers, a employé le premier, quoique moins propre.
   La flâme, dont brûla Sion désespérée,
   S' étendit en fureur aux murs de Césarée.
       Zaïre.
= On dit, par exagération, avoir la fureur de faire. "En vérité, Monsieur le Baron, vous êtes terrible, vous avez la fureur de me faire chanter: mais je n' ai pas ici ma musique, et je ne sais presque rien par coeur. MARIN, l' Amante Ingénue. "Cette fureur de grossir indiscrètement les volumes est comune à tous les Éditeurs. Sabat. Trois siècles, etc.
   Furibond, furieux, sujet à de grands emportemens de colère. "Il arriva tout furibond. = S. m. "C' est un furibond. _ Il n' est pas du beau style. Il est excellent pour le style badin ou critique. "Nos jeunes Poètes sont de petits furibonds, qui reçoivent avec indignation les conseils les plus sages. Ann. Litt. _ L' Auteur ou le Rédacteur ont mis le mot en italique.
   Furieux, furibond. (Synon.) Le 1er dénote particulièrement l' acte de fureur, ou l' accès de furie; le 2d, la disposition à ces accès et à leur fréquence. Celui-là est furibond, qui n' est jamais maître de lui-même. Celui-là est furieux, qui cesse de l' être. Il y a dans le second un violent écart, et dans le premier un vice de caractère et d' humeur. "L' homme colère, lorsqu' il est fortement contrarié devient furibond: l' homme le plus doux, lorsqu' on abûse à tout excès de sa bonté, devient furieux. ROUB. Synon.

FURIE


FURIE, s. f. FURIEûSEMENT, adv. FURIEUX, EûSE, adj. [Furi-e, rieû-zeman, rieû, rieû-ze; en vers ri-eû: 2e lon.] Furie, est 1°. Un emportement de colère. "Être, se mettre, entrer en furie. = 2°. Ardeur, impétuosité de courage. "Les français vont au combat avec furie. "Ils donèrent de furie sur l' énemi. = 3°. Il se dit des animaux et de certaines chôses inanimées. "Le lion, la tempête, la mer en furie. "La furie des vents, de l' orage. "Dans la furie du combat, de la fièvre, etc. = 4°. Furie, divinité infernale. "Les trois furies, Alecton, Mégère et Tisiphone. = Une furie d' enfer, une vraie furie, se dit par exagération d' une femme méchante et violente.
   REM. L' adverbe en furie ne s' unit qu' aux noms.
   Ne désespérez pas une Amante en furie.
       Racine.
"Une populace en furie qui n' avoit pris la loi que de son ressentiment Vertot. = Avec les verbes, on dit, de furie. "Il se jeta de furie sur lui. P. Charlevoix. = "Madame de Sévigné fait régir l' ablatif à l' adv. en furie. "J' en suis en furie. Elle n' est pas à imiter en cela.
   FURIEUX, 1°. Qui est en furie. "Il est devenu furieux. "Tigre, lion furieux: lione furieûse. = S. m. "Doner des armes à un furieux. "Ce sont des furieux. "C' est une furieûse. = 2°. Véhément, impétueux, en parlant des chôses: "Vents furieux; furieûse tempête; Furieux combat, furieûse ataque. = 3°. Excessif, extraordinaire en son genre. "Un furieux mangeur; un furieux coup, une furieûse dépense. = En ce sens, il précède toujours le substantif.
   REM. 1°. Furieux, est fort célébré dans le jargon moderne. "En bien et en mal ils escaladent tous les superlatifs; ils sont comblés, enchantés, furieux à propôs de rien. Coyer. = C' est aussi une mauvaise habitude d' employer à tout propôs furieux, pour énorme, excessif. "Un furieux ennui, une furieûse douleur, etc.
   2°. St. Évremont, Vertot, Linguet, l' Ab. Prévôt, ont fait régir à furieux la prép. de. Les trois premiers ont dit furieux de liberté, ou de sa liberté, ou de la liberté. Le dernier dit: "La populace toujours éfrayée des dangers présens, furieûse de ceux qui lui paraissent éloignés. Hist. des Stuarts. = Fénelon l' a aussi employé avec ce régime. "Astarbé le vit, l' aima et en devint furieûse. TÉLÉM. On dit, en devint folle: mais cet illustre Auteur a regardé cette dernière expression comme trop familière, et en a employé une moins usité, mais plus noble et plus énergique. = Furieux, se dit sans régime des noms. Pour les verbes, il régit de et l' infinitif ou que avec le subjonctif. "Il est furieux d' avoir manqué son coup. "Charles furieux que toutes ces concessions ne fissent qu' augmenter leurs demandes. Hist. des St. _ Le régime de l' infinitif s' emploie quand le verbe régi se raporte au sujet de la phrâse; le régime du subjonctif, quand il ne s' y raporte pas.
   Mettre des armes entre les mains d' un furieux, c' est figurément, doner à un méchant homme ou à un fou des chôses dont il abusera pour mal faire, et pour nuire aux aûtres et à lui-même. _ Cette expression peut être employée dans tous les styles, mais avec précaution, dans le style soutenu.
   FURIEûSEMENT, avec furie. Il est peu usité en ce sens, ou pour mieux dire, il ne l' est point du tout. = Excessivement: "Furieûsement grand, riche, laid, laide. "Il ment furieûsement. _ On peut dire que plusieurs sont furieûsement amateurs de furieux et furieûsement: ils les ont sans cesse à la bouche. C' est une mauvaise habitude.

FURONCLE


FURONCLE, s. m. Flegmon enflamé et douloureux, qui se termine par un abscês. = On l' apèle vulgairement clou.

FURTIF


FURTIF, IVE, adj. FURTIVEMENT, adv. [l' f finale se prononce, l' i est long devant l' e muet.] Furtif, qui se fait en cachette, à la dérobée. = Suivant La Touche, il ne se dit guère qu' en Poésie et dans les phrâses suivantes: entrer d' un pâs furtif, de furtives amours, des oeillades furtives. _ L' Acad. done les deux derniers exemples sans remarque. = Au masc. il suit toujours: au fém. il peut précéder.
   FURTIVEMENT, à la dérobée. "Entrer furtivement. _ Il est plus de la prôse que de la haute poésie.

FUSEAU


FUSEAU, s. m. FUSÉE, s. f. [Fuzo, 2e dout. au sing. lon. au plur. fuseaux: fuzé-e: 2e é fer. et long.] Fuseau, est un petit instrument, dont les femmes se servent pour filer et tordre le fil. "Tourner, remplir, vider le fuseau. = On dit, poétiquement, le fuseau des Parques. = En style famil. on apèle des jambes grêles, des jambes de fuseau, des fuseaux.
   FUSÉE est, 1°. Le fil qui est autour du fuseau. = On dit, figurément (st. famil.) achever sa fusée, terminer sa vie. _ Déméler une fusée, débrouiller une afaire, une intrigue. "Il n' y a rien à faire que de leur laisser déméler leur fusée. SÉV. 2°. Pièce d' artifice, faite avec du carton, rempli de poudre à canon. "La baguette d' une fusée. "La fusée a crevé. Jeter des fusées. Fusées volantes. Fusées à serpentaux. = 3°. En termes d' Horlogerie, petit cône canelé, autour duquel tourne la chaîne d' une montre.

FUSELIER


FUSELIER. Voy. FUSILIER.

FUSIBILITÉ


FUSIBILITÉ, s. fém. FUSIBLE, adj. [Fuzibilité, zible.] Fusible, qui peut être fondu. Fusibilité, qualité de ce qui est fusible. Tous les métaux sont fusibles. "La fusibilité de l' or et de l' argent.

FUSIL


FUSIL, s. m. FUSILIER, s. m. FUSILLER, v. act. [Fuzi, zi-lié, zi-glié: mouillez les ll au 3e.] Fusil est, 1°. Une petite pièce d' acier, avec laquelle on bat un câillou pour en tirer du feu. "Pierre à fusil, battre le fusil. = 2°. La pièce d' acier qui couvre le bassinet de certaines armes à feu. "Fusil de pistolet, d' arquebûse. = 3°. L' arquebûse elle-même, quand elle est à fusil. "Il le tua d' un coup de fusil.
   REM. Richelet met fusil ou fusi; mais on écrit toujours fusil, quoiqu' on ne prononce jamais l' l.
   FUSILIER, soldat qui a pour arme un fusil. Il ne se dit que de l' infanterie. "Compagnie de fusiliers.
   Rem. L' Acad. ne disait dabord que fuselier: elle a dit ensuite fusilier. Rich. écrit l' un et l' autre, et dit: prononcez fusilier. Il vaut donc mieux qu' on l' écrive de la sorte; et dâilleurs, fusil, d' où il dérive, doit le faire préférer. = Ménage voulait qu' on dît fuselier des soldats, et fusilier des ouvriers; mais on dit toujours le dernier dans quelque sens qu' on prène ce mot.
   FUSILLER, tuer à coups de fusil un soldat condamné à être pâssé par les armes. "On a fusillé trois déserteurs.

FUSION


FUSION, s. f. [Fu-zion.] Fonte, liquéfaction. "La fusion des métaux. "Mettre en fusion.

FUSSE


FUSSE, FUSSENT, imparfait du subjonctif du v. être. = Il s' emploie comme adverbialement, à la tête du membre de la phrâse; mais alors est-il indéclinable, ou doit-il suivre le nombre du nom qu' il régit? Je pencherais pour le 1er. "Qu' ils n' envient pas le sort de ceux qui se distinguent dans le monde par des travaux éclatans! Fussent même des travaux utiles à la Religion. P. Grifet; c' est-à-dire, quand même ce seraient des travaux, etc. J' aimerais mieux dire, fusse même des travaux, etc.

FUSTIGATION


FUSTIGATION, s. f. FUSTIGER, v. act. [Fustiga-cion, .] Fustiger, batre à coups de fouet. "Il a été condamné à être fustigé. "Il faut le fustiger. = Fustigation, action de fustiger. "La fustigation est le suplice des filous.

FUT


FUT, prétérit du v. être. = Fut dit, fut fait, aussitôt dit, aussitôt fait. _ Fut dit, fut fait, on aporte la fiole. L' Ab. Reyre.

FûT


FûT, s. m. [On prononce le t: l' û est long.] 1°. Le bois sur lequel est monté le canon d' un fusil, d' un pistolet. = 2°. La partie de la colone qui est entre la bâse et le chapiteau. = 3°. Le bois du tonneau. "Les vieux fûts. "Ce vin sent le fût, il a un mauvais goût, qu' il a contracté dans le toneau.

FUTAIE


FUTAIE, s. f. [Futê: 2eê ouv. et long.] Bois composé de grands arbres. "Bois de haute futaie. = L' Acad. dit aussi une futaie, une belle futaie. Et Mme. Dacier. "Une futaie de grands pins, et de hauts chênes.

FUTâILLE


FUTâILLE, s. f. [Pron. Futâ-glie: 2e lon. 3e e muet: mouillez les ll.] Vaisseau de bois à mettre du vin ou d' aûtres liqueurs. "Futâille en botte, les douves et les fonds préparés et non assemblés. Futâille montée, qui est reliée. = Futâille se prend aussi collectivement, pour signifier une grande quantité de toneaux.

FUTAINE


FUTAINE, s. f. [Futène: 2eè moy. 3e e muet.] Sorte d' étofe de coton.

FUTÉ


FUTÉ, ÉE, adj. [2e é fer. long au fém.] Fin, rusé. "Il est bien futé: elle est bien futée. Il est du style familier. = On dit, proverbialement, futé merle, futé matois, futé compère.

FUTILE


FUTILE, adj. masc. et fém. FUTILITÉ, s. fém. Frivole; frivolité: "Raisons, discours futiles. "La futilité de ce raisonement. Ce livre n' est plein que de futilités.
   Rem. Ces mots ne sont pas anciens dans la langue. L' Auteur des Réflexions, etc. dit, à la fin du dernier siècle, qu' un habile Écrivain s' est servi de futile, et que cependant il n' est pas usité. Suivant LA TOUCHE, futilité ne se dit sérieûsement que par les gens du pays latin. Il ajoute pourtant que l' Acad. ne condamne point ces deux mots. Aujourd' hui, ils sont très bien établis: mais il ne sont pas du style familier. On dit, frivole, frivolité; et ceux-ci sont de tous les styles.
   2°. Futile, en prôse, et dans le discours ordinaire, aime à suivre le nom qui se l' associe: en vers et dans le style relevé, il le précède élégamment.
   Gardez-vous d' écouter ces futiles discours.
   3°. Rousseau, dans une allégorie sur cette pensée: ce monde-ci n' est qu' une oeuvre comique, où chacun fait ses rôles diférens, aplique futile aux persones.
   Pour nous, vil peuple, assis aux derniers rangs,
   Troupe futile, et des Grands rebutée,
   Par nous d' en bas la pièce est écoutée.
   Mais nous payons, utiles Spectateurs,
   Et quand la farce est mal représentée,
   Pour notre argent, nous siflons les Acteurs.
Je crois que frivole se dit des persones et des chôses, et que futile ne se dit que des chôses. On dit, un homme frivole: on ne dit pas, un homme futile. _ Frivole même, n' a pas le sens que lui done Rousseau en cet endroit, où il entend par troupe futile, une troupe vile et méprisée. = Rousseau de Genève, a dit aussi futile des persones. "Ces vains et futiles déclamateurs vont de tous côtés, armés de leurs funestes paradoxes, sapant les fondemens de la Foi, et anéantissant la vertu. Disc. sur les Sciences. "Cette éloquence frivole, l' étude et le charme des hommes futiles. Ibid.

FUTUR


FUTUR, ÛRE, adj. [2e lon. au second.] Qui est à venir. = Suivant Vaugelas, cet adjectif est plus de la Poésie que de la bonne prôse; et il n' y a que les Notaires qui s' en servent: les futurs époux, les futurs conjoints, etc. Mais le P. Bouhours a fort bien remarqué qu' on dit: les présages de sa grandeur futûre, les biens de la vie futûre; qu' il y a plusieurs autres endroits où on peut l' employer, et qu' il est bon en prôse comme en vers. = Ce qui est particulier aux Notaires, et au style familier et plaisant, c' est de l' employer substantivement: le futur, la futûre.
   Futur peut se placer devant ou après le substantif, au choix de l' Orateur, guidé par l' oreille et le goût. Futûre vie, par exemple, ne serait pas suportable: les futûres races ne vaudrait guère mieux.
   Mais si ce qu' aujourd' hui j' écris sans impostures,
   Vainquant la nuit des temps, passe aux races futures.
       Gresset.
On peut dire assez indiféremment, les présages de sa futûre grandeur, ou de sa grandeur futûre.
   FUTUR, s. masc. Tems des verbes, qui exprime les chôses à venir. Je ferai, je dirai, vous irez, il reviendra. "Nos corps ressusciteront au dernier jour. = I. Ce temps n' a aucune dificulté. Il est à remarquer seulement que les étrangers s' en servent quelquefois au lieu du présent du subjonctif. Ils disent, par exemple: "Je ne crois pas que le Roi fera la campagne, au lieu de, fasse la campagne. Ils sont excusables assurément, puisqu' on dit dans l' afirmative, je crois qu' il fera. Il ignôrent seulement que dans la phrâse négative, le futur se change en présent du subjonctif après certains verbes. Je ne crois pas qu' il viène, et non pas, qu' il viendra. Lorsque le sens est interrogatif, on peut mettre l' un et l' autre: croyez vous qu' il viène, ou qu' il viendra: le 1er est pourtant le meilleur. * Il est plus étonant que le Gazetier de Leyde, qui doit savoir sa langue, ait fait une faûte si grossière. "Il n' est pas aparent qu' il se passera rien de considérable, etc. "Il n' est pas probable que l' administration actuelle voudra s' y oposer. _ Il faut dire, qu' il se passe; que l' administration veuille, etc.
   Rem. 1°. Plusieurs prononcent l' e qui est à la dernière syllabe des futurs, comme s' il était ouvert; je ferai: pron. feré, et non pas ferè. Les Poètes le font rimer avec des noms terminés en .
   Pour moi j' obéirai,
   Aux ennuis de l' exil mon coeur est préparé.
       Gresset.
Quelques-uns l' écrivent avec un y feray, et prononcent fereï: d' aûtres enfin y ajoutent un z ferèz, et ils confondent le futur avec le conditionel, je ferais. = Pour la seconde persone du pluriel, il y a des gens qui prononcent aussi mal-à-propos l' e ouvert, vous ferez, vous direz, comme ferais, dirais. _ L' Auteur des Réflexions, etc. dit qu' il faut tenir le milieu entre ferez et ferais. Il se trompe, dit La Touche, l' e est entièrement fermé, suivant la natûre du z, qui est de rendre fermé l' e qui précède.
   2°. Dans les verbes de la 1re conjugaison, l' e pénultième du futur est un e muet; je mangerai, tu aimeras; il passera, etc. Quelquefois cet e muet est précédé d' une voyelle ou diphtongue; il sacrifiera~, vous oublierez, j' avouerai, tu essaieras, etc. Alors l' e muet se perd ordinairement dans la prononciation, et l' on prononce, il sacrifîra, vous oublirez, j' avoûrai, tu essaîras, etc. En voici quelques exemples chez les Poètes. Corneille:
   Son sang criera vengeance.
   Que ne publieront point l' erreur et l' imposture?
   Je n' oublierai jamais, etc.
Racine:
  Qu' ils s' essaira sur vous à combatre pour eux.
       Androm.
  Que tout autre que lui me paierait de sa tête.
      Britan.
  Avant la fin du jour vous me justifierez.
      Béren.
  vous louerez mon silence.Ibid.
  Tu le nierois en vain.Bajaz.
  Je l' avouerai pourtant.Athalie.
Parmi ces exemples, il y en a trois qui regardent le conditionel présent, qui est dans le même câs.
   3°. On se sert souvent du présent pour exprimer un futur: je reviens sur mes pas, je suis à vous dans l' instant, où allez-vous ce soir? etc. c. à. d. je reviendrai, je serai, où irez-vous? etc. = On se sert même toujours du présent après la particule si: je le ferai, si je puis. = Le prétérit composé ou indéfini s' emploie aussi souvent pour le futur. "Avez-vous bientôt achevé? pour, aurez-vous, etc. j' ai fait dans un moment, au lieu de j' aurai fait, etc.
   4°. Le présent de l' infinitif, précédé des verbes promettre, espérer, compter, s' atendre, menacer, etc. désigne un futur. "Il promet de venir, c. à. d. qu' il viendra. "Il espère vous contenter, c. à. d. qu' il vous contentera, etc.
   5°. Le futur simple a la signification de l' impératif, quand il exprime un comandement ou une défense. "Vous aimerez Dieu de tout votre coeur. "Vous ne mentirez pas c' est-à-dire, aimez Dieu, ne mentez pas.
   6°. Il y a un tour de phrâse assez particulier, où le futur se place à la tête de la phrâse devant son nominatif (qui relatif). "Croira qui voudra l' Historien Capitolin; et quelques autres Écrivains, qui font aussi danser les éléphans sur la corde.
   II. Le futur passé ou antérieur, marque l' avenir, avec raport au passé. "Quand j' aurai fini mes afaires, je vous irai voir. Dans cette phrâse, la fin de mes afaires est encôre à venir, mais je la marque comme pâssée à l' égard de ma visite, qui est aussi à venir. = Ce futur pâssé s' exprime par le futur des auxiliaires avoir ou être, et le participe passif du verbe. Il se met ordinairement après dès que, aussitôt que, après que, lors que, quand et autres conjonctions semblables. "Dès que j' aurai dîné; dès que je serai arrivé, j' irai vous voir. "Couchez-vous aussitôt que vous aurez soupé.
   III. Il y a un 3e futur, qu' on peut apeler, antérieur sur-composé, et dont l' usage est assez râre. Ex. "Il sera sans doute sorti, dès qu' il aura eu achevé sa lettre. Ce temps est composé du futur antérieur du v. avoir et du participe d' un autre verbe.

FUYARD


FUYARD, s. m. [On ne pron. jamais le d.] Soldat qui s' enfuit du combat. Il se dit ordinairement au pluriel. "Poursuivre les fuyards. Rallier les fuyards. = Adj. "Animaux fuyards, troupes fuyardes.