Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI ENRAYûRE


ENRAYûRE, s. f. [Anré-iû-re; 1re et 3e lon. 2e é fer. dern. e muet. _ Autrefois, enrayeure.] Ce qui sert à enrayer. "L' enrayûre câssa au milieu de la descente.

ENRÉGIMENTER


ENRÉGIMENTER, v. act. [Anrégi--manté, 1re et 4e lon. 2e et dern. é fer.] De plusieurs compagnies séparées en former un régiment. "On enrégimenta les compagnies franches.

ENREGISTREMENT


ENREGISTREMENT, ou ENREGîTREMENT, s. m. ENREGISTRER, ou ENREGîTRER, v. act. [Le Rich. Port. les met tous deux. Trév. et l' Acad. ne mettent que le 1er, en avertissant que plusieurs ne prononcent, ni n' écrivent l' s. Et les opinions et la pratique des Auteurs et des Imprimeurs étant ainsi partagées, nous ne pouvons nous décider sur l' une ou sur l' aûtre de ces manières on choisira celle qui plaira le plus. On est également partagé entre registre et regître. Voy. Ce mot.] Enregistrer, c' est mettre sur les registres où sont les actes publics. Enregistrement est l' action d' enregistrer. "L' Édit a été enregistré: on a enregistré la Déclaration du Roi. "Une saisie réelle ne vaut rien, si elle n' est enregistrée. "On s' est oposé à l' enregistrement, etc.

ENRHUMER


ENRHUMER, v. act. [Anrumé: 1re lon. 3e é fer.] Causer du rhume. "Un rien l' enrhume. "Vous vous enrhumerez. = On dit, burlesquement, d' une couleur manquée et peu agréable, couleur de diable enrhumé. L' Acad. ne met pas cette expression, et il n' est pas trop sûr de s' en servir.

ENRICHIR


ENRICHIR, v. act. ENRICHISSEMENT, s. m. [Anrichi, chiceman; 1re lon. 4ee muet au 2d.] Enrichir se dit au propre et au figuré. "Ce comerce l' a enrichi: S' enrichir des dépouilles d' autrui. _ "La broderie enrichit (orne) fort les habits. "Enrichir son âme de mérites et de vertus. "Il s' est enrichi des dépouilles de l' antiquité. "La mémoire s' enrichit par la lectûre. = Enrichir une langue, la rendre plus abondante, plus riche par la création de nouveaux mots, ou par de nouvelles phrâses que l' usage adopte. "Tout le monde travaille aujourd' hui à enrichir notre langue; mais il est beaucoup de néologismes, qui l' apauvrissent, au lieu de l' enrichir.
   ENRICHISSEMENT ne se dit qu' au figuré. On ne dit point, dans le sens litéral, l' enrichissement d' un homme, son enrichissement par le comerce. Il ne se dit que pour ornement, et il n' est aplicable qu' aux chôses. "L' enrichissement d' un habit, d' une tapisserie. "Les dorûres sont d' un grand enrichissement dans un apartement. "Il a fait de beaux enrichissemens dans sa maison. "Ces chôses servent beaucoup à l' enrichissement de son histoire. L. T. "Il a falu que j' aie cherché d' aûtres enrichissemens. La Font. "Il a bien travaillé~ à l' enrichissement de la langue. Acad.

ENRôLEMENT


ENRôLEMENT, s. m. ENRôLER, v. a. [Anrôleman, anrôlé: 2e lon. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Enrôler, c' est proprement, mettre, écrire sur le rôle. Il se dit particulièrement des gens de guerre, ou de marine, sur-tout des premiers. Enrôler des Soldats, des matelots. "On l' a enrôlé, il s' est enrôlé. = Par extension, et dans le style familier, on dit, s' enrôler dans une confrérie, dans une compagnie.

ENROUEMENT


ENROUEMENT, s. m. ENROUER, v. a. [Anroûman, anrou-é; 2e lon. au 1er: l' e après l' u y est tout-à-fait muet.] Enrouer c' est rendre la voix rauque et moins nette. Enroûment est l' incomodité de celui qui est enroué. "Le brouillard l' a enroué: il s' est enroué depuis huit jours. "J' ai un grand enroûment.
   Rem. M. Tissot dit enrouûres, c' est un barbarisme. M. Desgrouais le met au nombre des gasconismes, et l' illustre Médecin Suisse l' avait probablement pris à Montpellier.
   ENROUÉ, ÉE, adj. Il doit toujours suivre le substantif. Rousseau le fait précéder.
   À~ chaque instant redoublent les injures,
   Les aigres sons, les enroués murmures.
Cette inversion est à peine suportable dans le style marotique.
   ENROUÉ est employé adverbialement dans cette locution. "Il parle enroué.

ENROUILLER


ENROUILLER, v. a. [An-rou-glié; 1re lon. 3e é fer. mouillez les ll.] Au propre, rendre rouillé. "L' humidité enrouille le fer. "Le fer s' enrouille. _ Au figuré. L' oisiveté enrouille l' esprit. "L' imagination s' enrouille faûte d' exercice. "Je viens d' un pays où je me suis fort enrouillé. Voiture.

ENRUMER


ENRUMER. Richelet. Voy. Enrhumer.

ENSâBLEMENT


ENSâBLEMENT, s. m. ENSABLER, v. act. [Ansâbleman, ansablé: 2e lon. au 1er, 3e e muet au 1er, é fer. au 2d. Dans le verbe, l' a est long devant l' e muet. "Je m' ensâble, vous vous ensâblerez, etc.] Ensâblement, amâs de sâble, formé par les eaux ou par le vent. "Il y a un ensâblement qui gêne la navigation dans cette rivière. "Le vent cause des ensâblemens dans les déserts de l' Arabie. = Ensabler, faire échouer sur le sâble. "Le batelier nous a ensablés. Il ne se dit que sur les rivières. _ S' ensabler, échouer sur le sâble. "Le bâteau s' ensabla. "Il s' ensâble à tous momens.

ENSACHER


ENSACHER, v. a. [Ansaché: 1re lon. 3e é fer.] Mettre dans un grand sac. "Ensacher des noix, des pommes.

ENSANGLANTER


ENSANGLANTER, v. act. [Ansanglan--té; les trois 1res sont longues, dern. é fer.] Souiller de sang. "La blessure qu' il reçut ensanglanta tout son habit. "La terre était ensanglantée.
   Nous eussions dans le meurtre ensanglanté nos mains.
       MARIN. Fédéric.
La figûre est hardie, mais elle est belle. = Figurément. "Ce Prince a ensanglanté son règne; il a été cruel, il a fait mourir beaucoup de monde. _ "Il ne faut pas ensanglanter la scène, représenter aucun meurtre sur le théâtre.

ENSEIGNE


ENSEIGNE, s. f. et m. [An-cèg-ne; 1re lon. 2e è moy. mouillez le g, 3e e muet.] Enseigne est fém. 1°. Quand il signifie marque, indice servant à faire reconaître quelque chôse. "L' enseigne que vous m' aviez donée pour trouver cette maison, n' était pas fort juste. _ Il se dit ordinairement au pluriel. "Doner de bones enseignes. = 2°. Tableau que l' on atache à la maison d' un Marchand, d' un Artisan, d' un Aubergiste, etc. Son enseigne est un lion d' or. "Il est logé à l' enseigne de l' écu de France. "Cette enseigne est bien grossièrement peinte. = 3°. Signe militaire. "Les enseignes Romaines. _ On le disait autrefois des drapeaux de l' Infanterie, et ce mot est resté dans ces phrâses. "Tambour batant et enseignes déployées. "Combatre, marcher sous les enseignes de. = 4°. Charge de celui qui porte le drapeau. "Le Roi lui a doné une enseigne. = 5°. Il est masc. quand il signifie l' Oficier qui a cette charge. "Un Enseigne dans la Marine, etc.
   On dit adverbialement (n°. 1°.) à tèlles enseignes que, etc. Cela est si vrai que, etc. À~ bones enseignes, avec conaissance et sur de bones preuves, de bones raisons "Je vous crois et je sais que vous êtes tout comme il faut pour n' être persuadée qu' à bones enseignes. Sév. "Je ne me fierai à lui qu' à bones enseignes. = On dit, figurément, marcher sous les enseîgnes de quelqu' un, suivre son parti. (n°. 3°.) Et proverbialement, (n°. 2°.) être logés à la même enseigne. Être dans la même situation, avoir le même sort. _ On dit d' un méchant portrait, d' un mauvais tableau, qu' il n' est bon qu' à faire une enseigne à bière.

ENSEIGNEMENT


ENSEIGNEMENT, s. m. ENSEIGNER, v. act. [Ancègneman, né. 1re. lon. 2e è moy. mouillez le g: 3ee muet au 1er, é fer. au 2d] Instruction. Instruire. _ Le substantif ne se dit guère que des chôses morales. Le verbe se dit aussi des Lettres et des Arts. "Il n' a guère profité des bons enseignemens qu' on lui a donés. "Les faûtes d' autrui doivent nous servir d' enseignement. "Enseigner les ignorans. "Enseigner la vertu; les sciences, les langues. = Enseigner, c' est aussi indiquer, doner conaissance de... "Enseignez moi sa maison, cette recette. "La natûre nous enseigne que tous les excès sont pernicieux. = Enseigné ne se dit que des chôses. On ne dit point d' un enfant qu' il a été bien ou mal enseigné, quoiqu' on dise enseigner des enfans; mais on dit fort bien, par exemple, "Les sciences enseignées methodiquement ne s' oublient guère.
   Rem. 1°. Enseigner, régit à devant les noms et les verbes. "C' est lui qui a enseigné à ce jeune homme la Philosophie. "Il lui a enseigné à lire, à écrire. * Anciènement on disait, enseigner de. "Elles leur enseigneront de lire, d' ecrire, de coudre, etc. On dit aujourd' hui, à coûdre, etc. "Éloignez de lui la pernicieuse flatterie; enseignez-lui à se vaincre. TÉLÉM.
   * 2°. Bossuet fait régir au passif la prép. de. "Je ne refuserai jamais d' être enseigné du moindre de l' Eglise. Si ce verbe s' employait au passif, il régirait plutôt la prép. par; mais on ne dit point, être enseigné, je suis enseigné, etc.

ENSEMBLE


ENSEMBLE, adv. [Ansanble: 1re et 2e lon., 3e e muet.] L' un avec l' aûtre. "Marcher ensemble. "Ils sont sortis ensemble. = * On le disait aûtrefois pour outre cela. BOSSUET l' a employé dans le sens de tout-à--la-fois. "Ils méprisoient ensemble le mariage, l' usage des viandes, et les Sacremens. _ Ensemble n' est plus usité dans ces deux acceptions.
   REM. 1°. Plusieurs condamnaient, unir ensemble, comme un pléonasme et une superfluité de mots; mais Vaugelas, Chapelain, Th. Corneille, aproûvent cette expression. On sait bien qu' on ne peut unir sans mettre ensemble; mais aussi, on ne peut voir que de ses yeux, et entendre que de ses oreilles: ainsi, pour la même raison, il faudrait condamner, je l' ai vu de mes yeux, je l' ai entendu de mes oreilles, voler en l' air, etc., expressions universellement reçûes, et copiées même des Anciens.
   2°. Montesquieu a fait d' ensemble une espèce d' adjectif, et lui done le sens de réuni, rassemblé. "Pendant qu' il resta avec son armée ensemble, Annibal battit les Romains: mais lorsqu' il fallut qu' il mît des garnisons dans les Villes... ses forces se trouvèrent trop petites. _ Le même Auteur dit: "La Ville, déchirée, ne forma plus un tout ensemble. Je doute que cela fût du goût d' aujourd' hui.
   3°. À~ propôs de tout ensemble, on disait aûtrefois, le tout ensemble d' un tableau: on dit aujourd' hui l' ensemble, et on l' étend aux ouvrages de l' esprit: on l' emploie aussi au figuré: "Qui peut développer les ressorts de cette sagesse éternelle qui gouverne le monde? C' est un plan immense, dont nous n' appercevons ni l' ensemble, ni les détails, ni les moyens, ni les motifs. P. Berthier. L' Acad. ne le dit qu' en Peintûre et en Architectûre. "Il y a de belles figures dans ce tableau, de beaux morceaux dans ce bâtiment, mais l' ensemble n' en vaut rien. _ Elle dit aussi, le tout ensemble, mais dans un sens un peu diférent. "Il y a quelques défauts dans ce tableau, mais le tout ensemble ne laisse pas de plaire. "Cette femme a plusieurs traits irréguliers, mais le tout ensemble plait infiniment.

ENSEMENCEMENT


ENSEMENCEMENT, s. m. ENSEMENCER, v. a. [Ansemanceman, cé: 2e e muet, 3e lon.; 4e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Ensemencement, est l' action d' ensemencer, de jeter de la semence sur des terres labourées, et en saison convenable, pour les faire raporter. _ Le substantif est dans Trév. et dans le Rich. Port., qui le cite: l' Acad. ne le met pas. Je crois qu' on peut s' en servir. Voy. SEMER.

ENSERRER


ENSERRER, v. act. [Ancêré: 2e ê ouv. et long, r forte, 3eé fer.] Enfermer, contenir. _ Il est vieux, mais la Poésie le revendique encôre.
   Les Cieux instruisent la Terre
   À~ révérer leur Auteur;
   Tout ce que leur globe enserre
   Annonce un Dieu Créateur.
       Rouss.

ENSEVELIR


ENSEVELIR, v. a. ENSEVELISSEMENT, s. m. [Anseveli, liceman: 1re lon., 2e et 3e e muet; 5e e muet aussi au 2d.] Ensevelir, c' est proprement enveloper un corps mort dans un suaire, pour lui doner ensuite la sépulture dans la terre. Ensevelissement, c' est l' action d' ensevelir. = Le substantif ne se dit que dans le sens litéral; le verbe s' emploie aussi dans le figuré. "Être enseveli dans le sommeil, dans la retraite, dans les livres, dans le chagrin, dans la débauche. "Son nom est enseveli dans l' oubli, etc.
   "Il faut ensevelir ce secret.
   Un coeur que l' univers eût eu peine à remplir,
   Dans un désert affreux peut-il s' ensevelir?
       CAMPISTRON.
  ...Un gros de soldats, se jetant entre nous,
  Nous a fait, dans la foule, ensevelir nos coups.
       RAC. Alex.

ENSORCELER


ENSORCELER, v. act. ENSORCELLEMENT, s. m. [Ansorcelé, cèleman: 3e e muet au 1er, è moy. au 2d, dont la 4ee muet. _ Dans le verbe, l' e muet de la 3e se change en è moy. devant la syll. fém.: il ensorcelle, ou, ensorcèle; ensorcellera, ou, ensorcèlera, etc.] Ensorceler, c' est jeter un sort, ou maléfice sur quelqu' un. Ensorcèlement, c' est l' action d' ensorceler, ou le prétendu éfet de cette action. = Par exagération, ils se disent au figuré (st. famil.) "Cette femme l' a ensorcelé: elle l' ensorcèlera, s' il n' y prend garde. "Il y a de l' ensorcèlement dans son fait.

ENSORCELEUR


*ENSORCELEUR, s. m. Qui ensorcèle, qui enchante. Trév. Rich. Port. _ L' Acad. ne le met pas. Il n' est bon que pour le comique, ou le satirique.

ENSOUFRER


ENSOUFRER, v. act. [An-sou-fré: 1re lon. 3e é fer.] Enduire de souffre. _ On dit plus communément souffrer.

ENSUITE


ENSUITE, adv. et prép. [An-sui-te; autrefois on en faisait deux mots: en suite.] Après. Il se met ou à la tête de la phrâse; ensuite nous ferons le reste; ou après le verbe, même dans le temps composés: "Vous irez là ensuite, j' ai été ensuite où vous m' avez dit; et non pas ensuite été. = Ensuite est aussi préposition, régissant le genitif (la prép. de) "Ensuite de quoi, ensuite de cela, expression, dit Vaugelas, qui est française, mais qui n' est pas du beau style. _ L' Acad. avertit qu' elle ne se dit guère que dans les deux phrâses que nous avons citées. = * Aûtrefois on l' employait avec toute sorte de mots. "Lorsque la vengeance comence, c' est ensuite de la prière des saints. Boss. "Ensuite de cette belle réflexion, mon coeur galope comme le vôtre, et je ne souhaite rien tant que de partir. Sév. On dirait aujourd' hui; en conséquence de la prière etc. Après cette belle réflexion etc. _ * Un Auteur moderne en fait un adverbe de temps. "Quelques jours ensuite, le Brame honora le Missionaire d' une seconde visite. Let édif. Dites, quelques jours après. M. l' Ab. Grosier l' emploie comme adv. de lieu. "Deux pages ensuite l' apologiste (de Sénèque) oublie parfaitement le rôle dont il s' est chargé. Je voudrais dire: deux pages après. _ Mde de B. dit, immédiatement ensuite, peu de temps ensuite, et même, l' année d' ensuite, ce qui est encore plus barbâre. Dans toutes ces phrâses il faut mettre après, ainsi que dans la suivante. "Le Duc d' Hanover le fit peu de temps ensuite un de ses Conseillers privés de Justice. Neuf-ville, Vie de Leibnitz. _ Le vice de toutes ces phrâses, c' est d' associer ensuite avec des noms ou des adverbes: il ne s' unit qu' à des verbes. "Puis ensuite, expression, qui revient souvent dans l' Histoire privée des Français (par M. le Grand.) Ce sont deux adverbes synonymes, qui font pléonasme. Mercure.

ENSUIVRE


ENSUIVRE (s' ) v. réc. [An-sui-vre: 2e lon. 3e e muet.] Venir après. Il ne se dit qu' à la 3e persone, et seulement dans les chôses spirituelles et morales. "Le premier chapitre et tout ce qui s' ensuit. "La perte de la Religion et tous les maux qui s' ensuivent ou, bien mieux, qui s' en ensuivent, qui s' ensuivent de là. = 2°. C' est le 2d sens de ce verbe, dériver; procèder. "Les accidens, qui s' ensuivirent de là; tout ce qui s' en est ensuivi; les procédures qui s' en étoient ensuivies. "Quelles absurdités ne s' ensuivent pas de ce système. = Rem. que dans les temps composés, on met toujours le pronom relatif en devant l' auxil. être, mais dans les temps simples il n' est pas bon d' employer ce pronom, et de dire, comme Bossuet, et comme nous avons dit plus haut, ce qui s' en ensuivit. Ces deux en de suite font une cacophonie, qu' il faut éviter. Il faut dire alors tout ce qui s' ensuivit de là, etc. ou prendre un autre tour. Voyez un exemple de Mallebranche, au mot suivre. = 3°. Il s' ensuit que regit l' indicatif dans la phrâse afirmative, et le subjonctif, quand elle est négative ou interrogative. "Il s' ensuit de là que vous avez tort. "Il ne s' ensuit pas, ou s' ensuit-il de là que vous ayiez raison? * Le P. Griffet met l' indicatif dans une phrâse interrogative. "S' ensuit-il de là qu' il sufit de croire en J. C. pour avoir la vie éternelle? _ Je crois qu' il faut dire, qu' il suffise. = On emploie, il s' ensuit dans les aûtres temps. "Il s' ensuivoit, il s' ensuivroit, il s' ensuivra que, etc.

ENT


ENT, terminaison de certains temps des verbes, l' e y est muet, l' n ne s' y prononce jamais; le t ne se prononce que devant une voyelle. "Ils aiment, ils aimèrent. (pron. ème, émère.) Les gascons prononcent l' n et le t, en faisant l' éfermé. "Il-zéménte.
   ENT, finale brève dans, accident, dent, argent, arpent, parent, serpent, torrent, content, présent, vent, moment, joliment, etc. Quand l' e se prononce comme un ê ouvert, violent, ardent, opulent, président, etc. elle est douteûse. Tous les pluriels sont longs, accidens, momens, violens, etc. = Du temps de Malherbe on les écrivait, comme on les prononce, accidant, aparant, éloquant, il attant, contant, différant, présant, etc. = Les noms terminés en ent forment leur pluriel en changeant t en s, moment, serment; momens, sermens, etc. Plusieurs conservent le t au pluriel. Voy. une Remarque à la lettre T.

ENTACHER


ENTACHER, v. act. [Antaché: 1re lon. 2e br. 3e é fer.] Infecter, gâter. Il est vieux, et n' est plus en usage qu' au participe. "Entaché de lèpre; famille entachée de ladrerie. _ Et figurément (style simple et médiocre) entaché d' avarice.
   REM. 1°. Vaugelas n' aimait pas ce mot: il le trouvait extrêmement bâs, et voulait qu' on dît toujours souillé. _ La Mothe le Vayer le trouvait significatif et digne d' être conservé. Chapelain disait qu' il était bon. Th. Corneille ne l' admettait que dans le discours familier, et pensait qu' on ne devait pas l' écrire. L' Auteur des Observations sur les Remarques disait qu' il était encôre un peu en usage (à la fin du dernier siècle) soit, dans le propre, soit dans le figuré, et cependant il ne citait des exemples que du dernier. _ L' Acad. ne l' admet qu' au participe. Il est assez à la mode dans le sens métaphorique. "Fuyez tous ceux, qui sont entachés de quelque vice grossier. Du Plaisir. "Florence... devenue dabord la dot d' une bâtarde, sacrifiée par un Pape (Clement VII) entaché lui-même du soupçon d' illégitimité, à l' ambition d' agrandir sa maison. Linguet.
   2°. Dans ces derniers temps on a fait un grand usage de ce mot employé au mode actif, pour dire, imprimer une tache à... "Ils laisserent le Duc de... jouir de son triomphe, sans même l' entacher, comme ils firent quelques années après au Duc de... Anon. "Le seul M... est resté entaché, et s' en est moqué. Id.

ENTâILLE


ENTâILLE, s. f. ENTâILLER, v. act. ENTâILLûRE, s. f. [Antâ-glie, glié, gliû--re: 2e lon. 3ee muet au 1er, é fer. au 2d, lon. au 3e.] Entâille et entâillure ont la même signification, mais le 1er est le plus usité des deux: coche faite dans une pièce de bois, pour y en emboiter une aûtre. Faire des entâilles, ou une entâille, une entâillûre dans une poûtre. _ Entâiller, tâiller une pièce de bois, en sorte qu' une aûtre puisse s' y emboiter. "Entâiller une poûtre, pour y emboiter des solives.

ENTAMER


ENTAMER, v. act. ENTAMûRE, s. f. [Antamé, mûre: 1re lon. 3eé fer. au 1er, lon. au 2d.] Entamer, au propre, c' est faire une petite déchirûre; entamer la peau, la chair; ou ôter une petite partie d' une chôse entière; entamer du pain, un pâté, une pièce de drap, un sac d' argent. = Au figuré, comencer; entamer une matière, un discours, etc.
   Rem. Ce mot se dit élégamment au figuré. "Il s' est laissé entamer: (on a découvert ses sentimens) ne vous laissez pas entamer, pénétrer ou gagner. ("Il ne se laissa pas entamer ni à leurs promesses, ni à leurs menaces, et tint ferme pour le bien public. Rollin.) Dès qu' un Ambassadeur se laisse entamer, il est perdu, c. à. d. dès qu' il soufre qu' on lui retranche quelque chôse des honeurs, qu' on lui doit, ou qu' on ne lui acorde pas ce qu' on lui a promis. "Entamer une afaire, comencer à en parler, à en traiter. BOUH. Entamer un escadron, un batâillon; l' ouvrir, le rompre. Entamer la réputation de quelqu' un, lui doner ateinte. _ On dit aussi d' un homme qu' il est entamé, pour signifier que son crédit, sa faveur, ont reçu quelque échec par les mauvais offices de quelqu' un. L. T.
   ENTAMûRE ne se dit que dans le sens propre et litéral. Déchirûre: * Le coup lui a fait une légère entamûre. _ Le premier morceau qu' on coupe d' un pain. "Il aime l' entamûre du pain. _ Ouvertûre d' un jambon. "Je me suis trouvé à l' entamûre d' un bon jambon.
   EN TANT QUE, conjonct. "Je m' y opôse en tant que cela me touche. Voy. TANT.

ENTASSEMENT


ENTASSEMENT, s. m. ENTASSER, v. act. [Antaceman, cé: 1re lon. 3ee muet au 1er, é fer. au 2d] Entasser, mettre en un tâs. Entassement, amâs de plusieurs chôses entassées les unes sur les aûtres. _ Ils se disent au propre et au figuré. "Entasser papiers sur papiers, afaires sur afaires. "Il a entassé trop de citations dans ce livre. "Entassement de papiers, de livres, de meubles. Entassement d' afaires.

ENTASSÉ


ENTASSÉ, ÉE, adj. Pressé. Ils étaient dans cette assemblée entassés les uns sur les aûtres. _ Contraint dans sa tâille, qui a la tête enfoncée dans les épaûles. "Homme entassé.

ENTE


ENTE, s. f. ENTER, v. act. [Ante, anté: 1re lon. 2e e muet au 1er, é fer. au 2d] Ente se dit d' un scion d' arbre, lorsqu' il est greffé sur un aûtre arbre. Enter, gréffer, faire une ente. "Une belle ente, faire une ente, des entes. "Enter un poirier, un pommier. Enter franc sur franc; enter sur sauvageon. = Ente ne se dit que dans le propre: enter se dit aussi au figuré, mais seulement dans le style familier. "Cette famille est entée sur une telle aûtre: elle y est entrée et en a pris le nom et les armes. "Ils se sont entés sur une telle maison: ils prétendent être de cette maison: ils n' en sont pas. "Gascon enté sur un normand, qui réunit le caractère des deux Provinces.
   Diférens préjugés, entés sur la natûre,
   Du jugement humain corrompent la droitûre.
       du Resnel.
REM. * Quelques-uns écrivent et prononcent une hante, se hanter; c' est une faûte grossière; c' est confondre des mots qui ont une ortographe, une prononciation et une signification bien diférentes. "Ils se servent de l' argent du Roi pour se hanter (s' enter) sur la longue robe et la Noblesse. Anon. On voit aussi cette manière d' écrire dans des Mémoires imprimés en Province; et dans d' aûtres, enter, greffer, pour hanter (fréquenter.)

ENTENDEMENT


ENTENDEMENT. s. m. ENTENDEUR, s. m. ENTENDRE, v. act. [Antandeman, deur, dre: 2e lon. 3e e muet au 1er et au dern.] I. Entendement, est 1°. la faculté de l' âme, par laquelle elle conçoit. "L' entendement humain: les opérations de l' entendement. = 2°. Jugement, bon-esprit. "Avoir ou n' avoir pas de l' entendement. "C' est un homme d' entendement ou de petit entendement.
   II. ENTENDEUR, qui entend et conçoit bien. Il ne s' emploie que dans ces phrâses proverbiales. "À~ bon entendeur salut _ à bon entendeur peu de paroles.
   III. ENTENDRE a diférens sens; ouir, comprendre, prétendre, consentir. Voitûre renferme deux de ces significations dans la même phrâse. "Il n' y a pas une dame qui ait si bien entendu la galanterie, ni si mal entendu les galans. _ Ce jeu de mots paraitra à plusieurs de mauvais goût.
   ENTENDRE, difère d' écouter et d' ouïr, en ce que, entendre c' est être frapé des sons; écouter, c' est prêter l' oreille pour les entendre; ouïr difère d' entendre en ce qu' il marque une sensation plus confûse. Quelquefois on n' entend pas, quoiqu' on écoute, et souvent on entend sans écouter, et l' on écoute sans entendre. Quelquefois aussi on a ouï parler sans avoir entendu ce qui a été dit. "Il est souvent à propos de feindre de ne pas entendre. Il est malhonête d' écouter aux portes. Pour répondre juste, il faut ouïr distinctement. GIR. synon. "Votre solution me proûve que vous m' avez entendu, (compris) ou plutôt que vous m' avez écouté, car vous n' avez besoin que d' écouter pour entendre. J. J. ROUSS.
   REM. Entendre, ouïr, régit les verbes à l' infinitif, sans préposition; mais il n' a ce régime qu' à l' actif; il ne l' a pas, quand il est employé au passif. Au lieu de dire avec le P. Charlevoix. "Ils furent entendus prononcer les Saints Noms de Jesus et de Marie, dites: on les entendit prononcer, etc. Un Auteur très-moderne, en employant ce régime des verbes, met les noms au datif. "Les Évêques protecteurs de l' Hérésiarque lui entendoient froidement proférer ces erreurs. Berault de Bercastel. Il faut, l' entendoient proférer, etc. "Les Peres lui entendoient pousser de profonds soupirs. Vie de St. P. d' Alc. l' entendoient pousser. _ Il n' a ce régime qu' avec les verbes dire, raconter, etc. Je lui ai entendu dire, raconter, etc. = Entendre, prétendre, a le même régime, l' infinitif. "Je n' entends point parler à ceux qui, etc. je ne prétends point parler, etc. mon dessein n' est pas de parler, etc.
   ENTENDRE, neutre, et avec la prép. à pour régime, signifie consentir. "Le Duc de Weymar promit de n' entendre à aucun acomodement, etc. Reboulet. Il ne se dit qu' avec la négative ou avec le si de doute. "Cet honneur plaidait sa caûse dans mon âme, tandis que la cupidité plaidait la siène... je ne savais auquel entendre. "S' il veut entendre à ce mariage, s' il y veut entendre, etc. "Il n' y veut point entendre.
   ENTENDRE, vouloir, avoir intention, régit que avec le subjonctif. "J' entends que vous le fassiez. Quand il est au prétérit, on met le verbe régi au futur conditionel. "J' ai toujours entendu que vous le feriez. _ Il n' est pas du style élevé.
   S' ENTENDRE, s' acorder régit avec ou ensemble pour les noms et la prép. pour devant les verbes. Voiture a employé la prép. à. "Vous vous êtes entendu avec elle à me nuire. Dites pour me nuire. _ Ce régime de la prép. à apartient à s' entendre, signifiant se conaître à, être habile, exercé à, etc. "Il s' entend à conduire un procès comme à ramer des choux. Style proverbial.
   ENTENDRE entre dans plusieurs expressions familières ou proverbiales. On dit, entendre la Messe, pour assister à la Messe. _ Entendre à demi-mot, comprendre facilement, sans avoir besoin d' une grande explication. _ Entendre finesse ou malice à quelque chôse, y doner un sens fin ou malin. _ N' entendre ni rime ni raison, refuser par humeur de se rendre à ce qu' on propôse de plus raisonable. _ Doner à entendre, laisser entendre, insinuer. _ Je m' entends bien: Je sais ce que je veux dire. _ Entendons-nous, écoutons ce que chacun de nous dit, ou bien, comprenons bien les intentions les uns des aûtres, ou encôre, agissons de concert. _ Comment l' entend-il? Comment l' entendez-vous? De quel droit fait-il, dit-il cela: le faites-vous, le dites-vous? _ Cela s' entend, cela s' entend bien. Cela se supôse ainsi, cela doit être ainsi, cela n' est pas douteux. = À~ l' entendre, adv. "À~ l' entendre, rien n' étoit jamais dificile. Télém. "Il semble à l' entendre, que je demande quartier. Boss.
   On dit, proverb., ils s' entendent comme larrons en foire, ils sont d' intelligence dans cette afaire. Cela se prend en mauvaise part. _ Il s' entend à cela, comme à faire un cofre. On fait tant de bruit, qu' on n' entendroit pas Dieu toner. _ Il n' y a pas de pire sourd, que celui qui ne veut pas entendre.

ENTENDU


ENTENDU, UE, adj. [Antandu, dû-e. 2e lon. 3e lon. au 2d.] En parlant des chôses, Bien ordoné, assorti, etc. "Cet édifice est bien entendu, ce tableau est mal--entendu, ce discours n' est pas bien entendu, le dessein en est bon ou mauvais. _ En parlant des persones, Intelligent. "Il est fort entendu aux afaires, dans les afaires, au métier de la guerre. Et absolument: "Il est entendu, fort entendu, etc. _ S. m. Faire l' entendu, le capable, le sufisant, l' important. "Voilà le petit Beaulieu, qui s' en va faire l' entendu cet hiver à Versâilles. Sév.
   BIEN ENTENDU, adv. Sans doute. "Ce sont-là vos intentions? _ Bien entendu. = Bien entendu que, conjonction. À~ condition pourtant que... Il régit, ou le futur, ou les conditionels, ou le subjonctif. "Bien entendu que vous le ferez, que vous le feriez, que vous le fassiez. Le premier se met quand le verbe régissant est au présent; le 2d, quand il est à l' imparfait, ou au prétérit, le 3e quand il est au présent, au prétérit, ou au plusque parfait. "Je vous l' acorde, bien entendu que vous n' en abuserez pas. Il vous le permettoit, bien entendu que vous n' en abuseriez pas. "Je vous le done, bien entendu que vous n' en fassiez pas un mauvais usage. "Je vous l' avois confié, bien entendu que vous le remissiez à un tel.

ENTENTE


ENTENTE, s. f. [Antante; 1re et 2e lon. 3e e muet.] 1°. Interprétation qu' on done à un mot, qui a plus d' un sens. "Mots à double entente, à deux ententes. Un Auteur de ce siècle a dit, des termes à toute entente; mais cela ne se dit point, et les phrâses citées sont consacrées, et ne tirent pas à conséquence pour d' aûtres. _ De là, cette maxime proverbiale: "L' entente est au diseur. Celui qui parle sait le véritable sens qu' il a voulu doner à ses paroles. = 2°. Dans les Arts de goût et d' agrément, disposition, ordonance. Il correspond à l' adjectif entendu, apliqué aux chôses. On ne l' a dit dabord qu' en Peintûre et en Architectûre. "Ce tableau est de bone entente. "L' architectûre en est de bonne entente. "Il n' y a pas d' entente dans ce tableau. On comence à s' en servir pour les ouvrages de l' esprit. "Il y a dans ces pièces des détails heureux; mais nulle entente du Théâtre Sabat. Trois Siècles, etc. "Le Lutrin lui est préférable (à la Henriade) par la justesse et l' entente du plan, l' unité d' action, etc. Id. Ibid. _ Mais, avec entente, pour dire, avec intelligence, est un barbarisme d' expression. "Ceux qui étudient avec entente de pareils recueils, en tirent la vraie conoissance des afaires. Neufville, Vie de Leibnitz.

ENTER


ENTER. Voyez ENTE.

ENTÉRINEMENT


ENTÉRINEMENT, s. m. ENTÉRINER, v. act. [Antérineman, né: 2e é fer. 4e e muet au 1er, é fer. au 2d. _ * On a dit autrefois, intérinement, intériner. _ Le Gendre écrit enthérinement avec une h, on ne devine pas pourquoi. Ces deux manières d' écrire ces mots sont vicieûses.] Ce sont des termes de pratique. Entériner une Requête; acorder ce qu' on demande. "L' entérinement d' une grâce, d' une rémission, etc. La vérification, l' homologation de, etc.

ENTERREMENT


ENTERREMENT, s. m. ENTERRER, v. act. [Antêreman, antêré: 2eê ouv. et long. r forte. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Inhumation. Inhumer un corps mort. "Enterrement somptueux. Voir passer un enterrement. _ "Enterrer dans un cimétiere. "On l' a enterré la nuit sans cérémonie.
   REM. Enterrement ne se dit que dans le sens litéral; enterrer se dit aussi au fig. Au propre, il est peu élégant, et il vaut mieux dire ensevelir. "César pleura en voyant la tête de Pompée: il la fit même enterrer avec toutes les solemnités ordinaires. Ensevelir me plairait davantage, d' autant plus qu' il rend mieux le sepelire des Latins, qu' il est plus noble, et qu' enterrer est plus de nos usages; parce que nous mettons les corps en terre, que des Romains, qui les plaçaient dans des tombeaux. = S' enterrer ne se dit qu' au figuré; et quoiqu' en disent le P. Bouhours et La Touche, il ne se dit point élégamment: il n' est que du style médiocre.
   Pour s' éloigner de bruit, pour trouver le repos;
   Faut-il fuir tout comerce, et s' enterrer d' avance?
       Sidney.
"Il s' est enterré dans la Province. "Il s' est enterré tout vif, il s' est entièrement retiré de tout comerce du monde. _ Enterrer son secret, ses talens; les tenir cachés. "Il faut enterrer cela, n' en point parler.
   ENTERRER, en parlant des chôses, enfouir, mettre dans la terre. "Enterrer de l' argent.
   ENTERRÉ, ÉE, adj. Maison enterrée, jardin enterré, dont la situation est trop bâsse.

ENTêTEMENT


ENTêTEMENT, s. m. ENTêTER, v. act. [Antêteman, té; 2e ê ouv. et long, 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Entêter, au propre, c' est envoyer à la tête des vapeurs incomodes ou fâcheuses. "Cette odeur m' entête; le tabac entête ceux qui n' y sont pas acoutumés. _ Le plus souvent le régime est sous-entendu. "Le charbon entête. "Un vin fumeux entête. = Figurément; "Les louanges entêtent. = Il se dit sur--tout, au fig. pour préocuper, prévenir en faveur de... "Qui vous a entêté de cet homme, de ce systême? "Il s' est entêté de cette femme, de cet Auteur, des nouvelles opinions, etc. = Et sans régime: "Il s' entête.
   ENTêTEMENT, préocupation, atachement aux chôses dont on est prévenu. "L' entêtement est un grand obstacle à la découverte de la vérité. "Il ne faut point avoir de l' entêtement pour les chôses du monde. = Entêtement, comme entêté, ne se disent qu' au figuré: le 1er régit pour, et le 2d de. "Il a un grand entêtement pour cette femme. "Il est entêté d' une folle.
   ENTêTÉ, opiniâtre, têtu, obstiné (synonim.) Tous ces mots marquent un grand atachement à son sens: mais ce défaut, dans un entêté, semble venir d' un excès de prévention; dans un opiniâtre, d' une constance mal-entendue; dans un têtu, de pure indocilité, ou d' une bonne opinion de soi-même; dans un obstiné, d' une espèce de mutinerie afectée, qui le rend intraitable. _ Entêté et têtu désignent un défaut, plus fondé sur un esprit trop fortement persuadé, que sur une volonté trop dificile à réduire. Opiniâtre et obstiné désignent, tout au contraire, un défaut, plus fondé sur une volonté revêche, que sur une conviction d' esprit. Gir. Syn.

ENTHOUSIASME


ENTHOUSIASME, s. m. ENTHOUSIASMER, v. act. ENTHOUSIASTE, s. m. [An--tou-zi-asme, mé, te. _ Richelet écrit entousiasme, etc. sans h; et je pense qu' on ne devrait pas faire un procès à ceux qui écriraient de même ces trois mots.] Enthousiasme est une fureur prophétique ou poétique, qui transporte l' esprit, qui enflame et élève l' imagination, et qui fait dire des chôses surprenantes et extraordinaires. Trév. Moûvement extraordinaire d' esprit, causé par une inspiration, qui est, ou qui paraît divine; ou par lequel un Poëte, un Orateur, un homme qui travaille de génie, s' élève en quelque sorte au-dessus de lui-même. Acad. _ Plusieurs diront peut-être: j' aime mieux la définition de Trévoux. D' aûtres préféreront celle de l' Académie. "Enthousiasme prophétique. Heureux, noble enthousiasme. "Enthousiasme d' éloquence, de Poésie, etc. "Il lui prend des enthousiasmes. Il ne parle que par enthousiasme. "Entrer en enthousiasme.
   ENTHOUSIASMER, ravir en admiration. "La lecture de cet ouvrage l' avoit enthousiasmé. "Il est enthousiasmé de cette musique. "Il s' enthousiasme aisément. _ On le dit plus souvent en critiquant, qu' en louant.
   ENTHOUSIASTE, Visionaire, Fanatique. "C' est un Enthousiaste. = Il est fort à la mode aujourd' hui, mais on lui done un sens moins odieux. On le dit simplement de celui, qui s' enthousiasme, qui s' afecte vivement de... On l' emploie même avec régime, ce qui est un néologisme; et aussi adjectivement. "Les États Protestans de l' Allemagne et de la Suisse, enthousiastes de leur liberté, comme de leur religion. Thom. "Ce Peuple enthousiaste de sa liberté jusqu' à croire que les Grecs étoient les seuls hommes libres par natûre. J. J. Rousseau. "Je suis enthousiaste de tout ce que les Peintres et les Sculpteurs apellent antique. Le Chev. de la Barre. "Peut-être faut-il qu' un Traducteur soit enthousiaste de son Auteur, pour le bien traduire. Ann. Litt.

ENTHYMèME


ENTHYMèME, s. m. [Antimème; 3e è moy. 4e e muet.] Terme de Logique. Argument qui n' est composé que de deux propositions, l' antécédent et la conséquence. "Dieu est souverainement aimable: il faut donc l' aimer de tout son coeur.

ENTICHÉ


ENTICHÉ, ÉE, adj. [Antiché, ché-e; 3e. é fer. longue au 2d.] C' est le participe du verbe enticher, gâter, qui n' est guère d' usage. Il se dit au propre, des fruits qui comencent à se pourrir. "Ces fruits sont un peu entichés. _ Au figuré, il n' est que du style familier ou critique. Il signifie entaché ou préocupé, opiniatrément ataché à... "Il est entiché d' avarice. "Qui vous a entiché de cette opinions. "On le soupçone d' être un peu entiché des nouvelles opinions. "Entiché de cette idée, il n' en démordra pas. "* Je vois à présent que vous n' êtes pas entiché de Mdlle. Amélie, comme je le croyois. Th. d' Éduc. _ M. Desgrouais traite cette expression de gasconisme. "Entiché d' une fille. _ Je ne crois pas, en éfet, qu' on le dise des persones en régime.

ENTIER


ENTIER, IèRE, adj. ENTIèREMENT, adv. [An-tié, tière, tièreman; 2e é fer. au 1er, è moy. et lon. aux deux aûtres. _ Il parait au P. Buffier que le dernier e d' entier se prononce ouvert, et qu' on fait soner l' r (comme dans fier); cette prononciation ne parait pas la plus comune, ni la plus autorisée.] Entier se dit, 1°. de ce qui est complet, qui a toutes ses parties, ou que l' on considère dans toute son étendue. Un pain, un jour entier; une Province, une Armée entière. Le monde entier, etc. = Il difère pourtant de complet, en ce qu' une chôse est entière, lorsqu' elle n' est, ni mutilée, ni partagée, et qu' elle est complète, lorsqu' il ne lui manque rien. Le premier de ces mots a plus de raport à la totalité des portions qui constituent l' intégrité essentielle, et l' aûtre à celles qui constituent la perfection accidentelle. "Les Bourgeois, dans les Provinces, ocupent des maisons entières: à Paris ils n' ont pas toujours des apartemens complets. GIR. Synon. "L' armure n' est pas complète~, mais ce qui reste est entier. Entier s' associe quelquefois avec tout, mais il aime à marcher de compagnie avec lui, et il ne veut pas en être éloigné. "Lire un livre tout entier, atendre une heure toute entière. "Toute la troupe entière le maudit. Mme. de G... Cela ressemble à un pléonasme. On ne voudrait que toute la troupe, ou la troupe entière. Ces deux mots raprochés ne choquent plus: la troupe toute entière. On sent que c' est une redondance qui done plus d' énergie à l' expression. = 2°. Dans les chôses morales, il se dit élégamment. "Entier détachement des chôses du monde. "Avoir une entière confiance en Dieu. "Laisser une entière liberté à ses amis. _ Dans cet emploi, il se plait à précéder le substantif. _ Dans le Dict. Gram. on critique ces deux vers de Molière, tirés de la comédie des Fâcheux.
   Un coeur bien enflamé prend assurance entière, etc.
   Je te parle, Vicomte, avec franchise entière.
C' est être trop sevère envers un Poète, et sur-tout Poète comique; mais en prôse, ce serait une faûte. On doit dire: une entière assurance, une entière franchise. _ Avec tout, et les pronoms possessifs~ son, sa, leur, etc. l' on doit le mettre après. "Conserver sa raison toute entière; sa réputation, sa vertu entière. = 3°. Entier est s. m. dans ces locutions, en son entier, en leur entier. "Cette pièce est raportée en son entier dans ce livre. "La chôse est en son entier. Remettre les chôses en leur entier. * Leibnitz dit l' entier, pour, le tout, ce qui n' est pas admis par l' usage. "Ces imperfections des parties servent à la perfection de l' entier. Dites du tout. = 4°. Entier se prend quelquefois pour obstiné, opiniâtre. "C' est un homme entier, fort entier en ses opinions. Femme opiniâtre et fort entière. _ Hors de là, il ne se dit point des persones. * "Guillaume parut tout entier dans ces ocasions. Rayn. Il me semble qu' il aurait été mieux de dire: le génie de Guillaume parut tout entier, ou l' habileté de, etc. parut toute entière. Avec le verbe être, tout entier se dit pour entièrement. "Il s' aplique uniquement à cet ouvrage: il y est tout entier.
   En entier, adv. Je voudrais pouvoir vous citer cette pièce en entier. Voy. n°. 3°.
   ENTIèREMENT, totalement, tout-à-fait. "Il est entièrement ruiné. "On l' a abandoné entièrement, ou entièrement abandoné.

ENTOILAGE


ENTOILAGE, s. m. ENTOILER, v. act. [An-toa-laje, lé; dern. e muet au 1er, é fer. au 2d.] Entoilage, toile à laquelle on coud une dentelle. Entoilage de mousseline, etc. = Entoiler, c' est 1°. Remettre de la toile à la dentelle d' un mouchoir, d' une cravate. "Entoiler un mouchoir, etc. = 2°. Coller sur une toile, en parlant des estampes, des cartes de Géographie. "Il a fait entoiler toutes ses estampes, toutes ses cartes géographiques.

ENTONNER


ENTONNER, ou ENTONER, v. act. ENTONNOIR, ou ENTONOIR, subst. masc. [Antoné; 1re lon. 2e é fer. anto-noar.] Entonner a deux sens, suivant ses deux étymologies, tonneau et ton. _ 1°. Verser une liqueur dans un tonneau. "Entonner du vin, du cidre, etc. _ On dit, proverbialement, d' un homme qui boit beaucoup, qu' il entone bien. _ Par analogie, s' entoner se dit du vent qui s' engoufre dans un lieu étroit = 2°. Mettre en ton. Comencer à chanter. "Entoner un air. "Entoner une antiène. "Il entone bien, il a mal entoné.
   ENTONOIR ne se dit que dans le sens du n°. 1°. Instrument avec lequel on entone une liqueur. "Entonoir de bois, de fer blanc.

ENTORSE


ENTORSE, s. f. [Antorse; 1re long. dern. e muet. _ Richelet écrit entorce, et prétend que l' usage est déclaré pour cette manière d' écrire ce mot. Il a donc changé. Il met aussi détorse, qu' il rejette. L' Acad. dit au contraire, qu' entorse a la même signification que détorse.] Violente extension d' un muscle, d' un nerf, qui se fait par accident. "Se doner une entorse au poignet, au pied, etc. = Figurément (st. famil.) "On lui a doné une entorse; on a diminué de son autorité, de ses droits. "Doner une entorse à un passage, le détourner de son sens naturel.

ENTORTILLEMENT


ENTORTILLEMENT, s. m. ENTORTILLER, v. act. [Antorti-glieman, glié; mouillez les ll, 4e e muet au 1er, é ferm. au 2d.] Entortiller, c' est, 1°. enveloper tout au tour, en tortillant. "Entortiller dans du papier; s' entortiller dans son manteau. = 2°. S' atacher à... en faisant plusieurs tours. "Le serpent s' entortilla autour de ma jambe. "La vigne et le lierre s' entortillent autour des ormes. = Entortillement se dit dans le dernier sens. "Entortillement du serpent, du lierre. = Le participe du verbe et le substantif se disent au figuré, de l' embârrâs du style. "Il y a de l' entortillement dans cette phrâse. "Style entortillé, pensée entortillée; phrâse, période entortillée. _ Richelet le dit des persones; entortillé, dissimulé, caché. Ni l' Acad. ni Trévoux. ne le mettent dans ce sens.

ENTOURS


ENTOURS, s. m. pl. [Antoûr: deux longues.] Environs, circuit. "S' assurer des entours d' une place. = Figurément, savoir prendre les entours, savoir mettre dans ses intérêts ceux qui ont du crédit sur les persones dont on a besoin. = "Je crains ses entours; les persones qui l' entourent, qui ont sa confiance. _ Ce dernier emploi de ce mot est un peu suspect. On le dit, en conversation et dans les lettres, mais il n' est pas dans les Dictionaires, et je ne me souviens pas de l' avoir vu dans aucun livre imprimé.
   À~ l' entour, adv. [Alantour; L' Académie le met sous la lettre A. _ Quelques Auteurs ou Imprimeurs écrivent alentour en un seul mot.] De bons Auteurs du siècle passé, comme Mrs. de Port Royal, Voitûre, d' Andilly, Benserade, Boileau, etc. ont fait ce mot préposition; tant en prôse qu' en vers. Il n' est plus aujourd' hui qu' adverbe sans régime. On dit d' une mère, qu' elle a ses filles autour d' elle, et non pas à l' entour d' elle. _ La préposition correspondante est autour. "On a bâti à l' entour. "On a bâti tout autour de ce Palais. = Boileau avait mis dans les premières éditions de ses Satires:
   À~ l' entour d' un castor j' en ai lu la préface.
Il mit dans sa dernière édition de 1701: Autour d' un caudebec, etc. = À~ l' entour, s. m. est un barbarisme. "Il tâchoit de s' assurer des à l' entours de ce Monarque. Hist. d' Angl. _ Des entours de, etc. serait plus suportable; mais il n' est pas trop sûr.

ENTOURAGE


ENTOURAGE, s. m. [Antourage.] Ce qui entoure. Ce mot est assez nouveau, mais il parait avoir été admis par l' usage. On l' a dit dabord des ornemens qui entourent un bijou. "Un entourage de diamans. "Voilà de jolies tablettes, et l' entourage est superbe. Th. d' Educ. _ Un Poète moderne l' a employé au figuré.
   Un bon ouvrage
   Est un brillant qu' il faut polir,
   Et le chant n' est que l' entourage
   Qui doit le faire ressortir.
       Le Réveil de Thalie.
Un Prosateur en a étendu l' emploi. "Les femmes Valaques ont une sorte de tablier devant et derrière, lié par une ceintûre; et cette espèce d' entourage leur sert de Jupon. Monnet, Traducteur du Voyage minéralogique de M. Born, Allemand.

ENTOURER


ENTOURER, v. act. [An-tou-ré; 1re lon. dern. é fer. _ Devant l' e muet l' ou est long: il entoûre, entoûrera, etc.] Environer, ceindre. Il régit l' ablatif, (la prép. de). "Entourer une Ville de murailles. "Les gardes dont, il étoit entouré.

ENTOURNûRE


ENTOURNûRE, s. f. [An-tour-nûre; 3e lon. 4e e muet.] Échancrûre d' une manche dans la partie qui touche à l' épaule.

ENTOUSIASME


ENTOUSIASME, ENTOUSIASMER, ENTOUSIASTE. Voy. ENTHOUSIASME, etc.

ENTR'ACCORDER


*ENTR'ACCORDER, (s' ) v. récip. Il est dur et peu nécessaire. S' acorder dit la même chôse, et avec plus d' agrément pour l' oreille.
   Et pour lier des mots si mal s' entr' acordans,
   Prendre dans ce jardin la lune avec les dents.
       Boileau.

ENTR'ACCUSER


ENTR' ACCUSER (s' ) v. réc. [Antra--kuzé.] S' accuser l' un l' aûtre. "Ils s' entr' acusoient de crimes énormes.

ENTR'ACTE


ENTR'ACTE, s. m. [Antrakte: 1re lon. dern. e muet.] Espace, intervalle qui est entre les actes d' un Drame. "Il y a plusieurs évènemens qu' on supôse qui se passent pendant les entr' actes. = On apèle aussi entr' acte, ce qui se joûe, se chante entre les actes d' une pièce de théâtre. "Il y avait des danses pour entr' actes. _ Et au singulier, et adverbialement: dans l' entr' acte, il y avoit des danses, etc. Marin. = Ce mot se met ordinairement au pluriel. On dit, un des entr' actes, plutôt que, un entr' acte. "Un des entr' actes étoit une noce de Village. = On dit aussi, dans ce sens, intermèdes. _ Le P. Bouhours remarque fort bien, au sujet de ces deux mots, que ceux qui viènent tout entiers du latin, conservent la préposition~ inter, comme intervalle, interrègne, etc. au lieu que les aûtres, dont la composition est toute française, prenent entre au lieu d' inter, comme entremets, entreprendre, etc. etc.

ENTR'ADMIRER


*ENTR'ADMIRER, (s' ) v. réc. [An--tradmiré.] S' admirer réciproquement. "Des Académies comme nous, ne s' assemblent point pour s' entr' admirer. PLUCHE. Spect. de la Nat. _ Ce verbe est peu usité, comme la plupart de ces composés d' entre.

ENTR'AFFOIBLIR


ENTR'AFFOIBLIR (s' ) v. récip. [Entra--fébli.] S' afaiblir mutuellement. C' est encôre un mot de Pluche. La prononciation en est fort dure, et l' usage peu comun. "Les natûres peuvent se méler, s' entr' afoiblir, s' entr' aider, et par là, produire des éfets diférens.

ENTR'AIDER


ENTR'AIDER, (s' ) v. réc. [Antrédé: 1re lon. 2e et 3e é fer.] S' aider l' un l' aûtre. "Les hommes doivent s' entr' aider.

ENTRâILLES


ENTRâILLES, s. f. pl. [Antrâ-glie; 2e lon.] Au propre, intestins, boyaux. "Avoir les entrâilles échaufées, brûlées. Humecter, rafraichir les entrâilles. = Au figuré, afection, tendresse, compassion. "Les entrâilles paternelles. "Avoir des entrâilles de père, de mère pour ses enfans. "Les entrâilles de la miséricorde de Dieu, expression consacrée, tirée du cantique de Zacharie, per viscera misericordioe Dei nostri. "Cet homme a des entrâilles, de la compassion, de la tendresse pour les malheureux. = L' Acad. dit aussi, avoir de bones entrâilles, les meilleûres entrâilles du monde, avoir un coeur très-tendre et très--sensible pour ses amis, pour ceux qui soufrent; mais ces manières de parler ne sont que du style familier; encore sont-elles peu usitées. = On dit d' un Acteur, qu' il a des entrâilles pour dire, qu'~ il s' afecte de son rôle, et le rend avec chaleur et vérité.
   ENTRAILLES, se dit figurément des chôses inanimées. "Les entrâilles de la terre.
   On l' a vu dans nos champs, semant les funérailles,
   De son propre pays déchirer les entrâilles.
       P. Marion. Cromvel.

ENTR'AIMER


ENTR'AIMER, (s' ) v. réc. [Antrémé; 1re lon. 2e et 3e é fer.] Ce mot est un peu dur, et on s' en aperçoit dans ces vers de Corneille.
   J' adore cet orgueil; il est égal au mien,
   Madame, et nos fiertés se ressemblent si bien,
   Que si la ressemblance est par où l' on s' entr' aime,
   J' ai lieu de vous aimer comme un autre moi-même.
       Atila.

ENTRAîNANT


ENTRAîNANT, ANTE, adj. [Antrê--nan, nante; 2e ê ouv. et long.] Qui entraîne. _ C' est un mot nouveau, qui ne se dit qu' au figuré. Il est beau et utile, et l' on peut bien en augurer. "L' éloquence entraînante de J. J. Rousseau. L' Ab. De Fontenai. "Entendez-les developer avec une éloquence entraînante les beaux systèmes qu' ils ont enfantés dans leurs cabinets. Id. "Il (M. de Belle-isle) s' exprimoit avec cette facilite entraînante que done la parfaite possession des matières qu' on traite. Le Duc de Niv...

ENTRAINEMENT


*ENTRAINEMENT, s. m. Mot forgé peu heureûsement, mais forgé sans prétention. Il est employé dans une lettre de M. l' Évêque de Chartres (Des Marais.) à Mde. De Maintenon. "Tant que vous ne consentirez pas à ces distractions, l' entrainement involontaire de votre imagination n' interrompra pas le mérite de votre action.

ENTRAîNER


ENTRAîNER, v. act. [Antrêné; 2e ê ouv. et long. 3e é fer.] Traîner avec soi. "Les torrens entraînent tout ce qu' ils trouvent sur leur passage. = Au figuré, il se dit de tout ce qui nous porte à quelque chôse avec force, et comme malgré nous. "Le penchant nous entraîne, la passion l' a entraîné. "Entraîner les sufrages, les coeurs, les esprits, etc. = Entraîner avec soi, avoir des suites, des conséquences. "Cette fausse démarche entraîna avec soi les suites les plus funestes.
   Rem. Boileau fait régir au participe la prép. de. "Ode pleine de mouvemens, où l' esprit parut plutôt entraîné du démon de la Poésie, que guidé par la raison. _ En vers, ce régime peut être bon, et les Poètes sont dans l' anciène possession de l' employer avec les verbes passifs. En prôse, on doit se servir de la prép. par. "Entrainé par le démon de la Poésie; par les charmes de la passion, etc.

ENTRANT


*ENTRANT, ANTE, adj. [Antran, trante: 1re et 2e lon.] Aisé à s' introduire, à se présenter. "Cet homme est entrant, cette femme est fort entrante. Je doute que cette locution soit française. Richelet le met en ce sens. "C' est un homme entrant. _ Quelques-uns disent, bassement et burlesquement, entrant comme une canule _ L' Acad. ne le dit pas des persones mêmes, et avertit qu' il est de peu d' usage. "Homme dont le caractère a je ne sais quoi d' entrant, (d' insinuant, d' engageant). = Dans sa signification ordinaire. M. Linguet en fait un substantif. "Les entrans et les sortans.

ENTR'APELER


ENTR' APELER (s' ) v. réc. [Antrapelé: 1re lon. 3e e muet, 4e é fer.] S' apeler l' un l' autre. "Dans l' obscurité, ils s' entr' apeloient.

ENTR' APROCHER


*ENTR'APROCHER, (s' ) v. réc. S' aprocher l' un de l' aûtre. Ce mot est singulièrement dur. Il est digne de Brébeuf, ou de Chapelain.
   Enfin, on s' entr' aproche, et les rames contraires,
   D' un air impétueux font choquer les galères.
       Bréb.

ENTRAVER


ENTRAVER, v. act. ENTRâVES, s. f. pl. [Antravé, antrâve: 1re long. 2e longue aussi au 2d; 3e é fer. au 1er, e muet au 2d.] Entrâves, sont des liens qu' on met aux pieds des chevaux, pour empêcher qu' ils ne s' enfuyent. Entraver, c' est mettre des entrâves. "Entraver un cheval; lui mettre des entrâves. = Le substantif a été de tous les temps employé au figuré et dans tous les styles. "Le génie ne peut point souffrir d' entrâves. "Cet homme s' est mis des entrâves. _ Entraver, jusqu' à présent ne s' était dit qu' au propre: on commence à l' employer au figuré. "Ils n' auront pas besoin d' entraver leur commerce pour faire face à leurs engagemens. Journ. Polit. de Genève.
   Rem. Dans le sens propre et litéral, entrâves ne se dit qu' au pluriel; mais dans le sens figuré et métaphorique, il se dit également au singulier et au pluriel. "Ce jeune fou auroit besoin d' une entrave. "En se mariant à cette femme, il s' est mis de terribles entraves. L. T.

ENTR'AVERTIR


ENTR'AVERTIR, (s' ) [Antravêrti: 1re lon. 3e ê ouvert.] S' avertir mutuellement. "Ils firent des feux sur les montagnes pour s' entr' avertir. Acad. "Les ailes servent aux abeilles, non-seulement à se transporter où elles veulent, mais aussi à faire un bruit par lequel elles s' entr' avertissent de leur départ, de leur arrivée, et s' animent entre elles au travail. Pluche. _ Cet Auteur aimait beaucoup ces composés d' entre. Il n' a pourtant pas osé dire s' entr' animer.

ENTRE


ENTRE, prép. [Antre: 1re long. 2e e muet.] C' est une préposition, ou de lieu: "Entre le ciel et la terre; ou de temps: "Entre Pâque et Pentecôte. _ Dans le premier sens, elle signifie au milieu; s' asseoir entre deux persones; ou dans: remettre quelque chôse entre les mains de quelqu' un. = On l' emploie aussi dans une acception, qui a raport au lieu dans ces phrâses: "Nager entre deux eaux; floter entre la crainte et l' espérance; et autres semblables. = Elle marque quelquefois assemblage: ils résolûrent entr' eux; ou participation: le gris est entre le blanc et le noir; ou parité: "Ils ont cela de commun entr' eux; ou disparité: "Il y a une grande diférence entre l' un et l' aûtre.
   Rem. 1°. Entre ne perd l' e muet et ne prend l' apostrophe que devant eux et elles. On lit dans des livres, entr' autres. Il faut écrire, entre autres.
   2°. Entre se construit quelquefois avec des infinitifs employés comme substantifs. "Il n' y a nulle comparaison à faire entre s' ennuyer et se noyer, dit Mde. de Sévigné à sa fille. Voyez la phrâse entière, au mot LONG.
   3°. Le Traducteur de l' Hist. d' Angl. de M. Hume (Mde. de B...) emploie cette préposition dans une acception qui n' est pas aprouvée par l' usage. "Tous les Lancastriens exilés acourûrent auprès d' elle, et entr' eux, le Duc de Somerset, etc. Parmi eux, ou dans le nombre, auraient été dans cet endroit, des expressions plus régulières. Entr' eux a bien l' air d' un anglicisme. _ L' Abé Prévôt, Traducteur aussi de l' anglais, dit: "Il avoit entr' eux (les Mores) beaucoup d' amis. Il falait dire, parmi eux. _ Malherbe avait dit, long-temps auparavant:
   D' où nâquit entre nous ce miracle de fleurs.
J' aurais dit, parmi nous, dit Ménage. = Entre nous signifie aûtre chôse. Il veut dire; je vous le done sous le secret, ne le dites pas. "Mais c' est entre vous et moi, la belle, car je sais bien comme il faut dire âilleurs. Sév.
   4°. Entr' eux, entr' elles, se mettent toujours après le verbe, auquel ils se raportent, soit dans les temps simples, soit dans les composés. "Ils résolûrent entr' eux, elles ont résolu entr' elles, et non pas entr' eux ils résolurent; elles ont entr' elles résolu. Dans la phrâse suivante, il est mal placé. "Les pays maritimes s' efforcèrent toujours entre eux d' entretenir une communication souvent interrompûe. L' Abé Prévôt. Il falait dire, d' entretenir entr' eux, etc.
   5°. Entre a une espèce d' ablatif, d' entre. "Un grand voluptueux est plus malheureux est plus à plaindre que le dernier et le plus vil d' entre le peuple. Massillon. _ Je pense que d' entre ne convient guère qu' avec des noms employés au pluriel, et que d' entre les hommes aurait été beaucoup plus régulier. _ Je ne voudrais pas dire d' entre la Noblesse, d' entre le Clergé, d' entre l' Armée. Je dirais d' entre les Nobles, les Gens d' Église, les Soldats.
   6°. On dit (st. fam.) Entre chien et loup, à l' entrée de la nuit. Mde. de Sévigné en fait un substantif, et on peut, je crois, le dire comme elle, sans dificulté. "J' y suis demeurée au-delà de l' entre chien et loup.
   ENTRE, forme avec des verbes et des substantifs des termes composés.
   S' entr' aider, entr' ouvrir, entrevoir;entrefaites, entremets, entremise, etc. Ceux qui forment des verbes réciproques sont peu usités aujourd' hui, et ils sont la plupart durs à prononcer. Corneille, Brebeuf et Pluche sont, de tous les Auteurs que je conais, ceux qui ont montré plus de prédilection pour ces composés d' entre. Un Poète qui faisait des vers dignes de la Pucelle et de la Pharsale, fait dire à un des personages d' une Tragédie réprésentée et non imprimée.
   Pour nous entrevenger nous entretuerons-nous!
   En nous entredonant nos chagrins l' un à l' aûtre.
Quelle dureté! = Sur ces composés, voy. une Remarque de Bouhours, au mot ENTR' ACTE.

ENTREBâILLÉ


ENTREBâILLÉ, ÉE, adj. [Antrebâ--glié, glié-e; 2ee muet, 3e lon. Mouillez les ll: 4eé fer. long au 2d.] Il ne se dit que d' une porte ou d' une fenêtre, qui n' est pas entièrement fermée.

ENTRECHAT


ENTRECHAT, s. m. [Antrecha: 1re lon. 2e e muet. On ne prononce point le t.] C' est, en termes de Danse, un saut dans lequel on passe les jambes l' une par-dessus l' aûtre, pendant que le corps est en l' air. "Faire un entrechat, des entrechats.

ENTRECHASSER


*ENTRECHASSER, ENTRE-COMUNIQUER (s' ) v. réc. Ils sont peu usités. "La lumière, le feu et l' air, quoique toujours ensemble, ne se confondent point. Ce sont des substances, qui s' entre-chassent, qui s' entre-comuniquent, par leurs chocs mutuels, des vitesses plus ou moins grandes. Pluche.

ENTRE-CHERCHER


*ENTRE-CHERCHER (s' ) v. réc. Il a été employé par Rollin. "Les Athéniens s' entre-cherchoient sans se pouvoir rencontrer.

ENTRE-CHOQUER


ENTRE-CHOQUER (s' ) v. réc. [An--trechoké; 1re lon. 2e e muet, dern. é fer.] Se choquer l' un l' aûtre. C' est un des composés d' entre, qui est le plus en usage. "Il s' éleva un bruit sourd, semblable à celui des vagues de la mer, qui s' entrechoquent dans une tempête. Télémaque. = Au figuré, se contredire avec aigreur. "Ces deux hommes ne font que s' entrechoquer.

ENTR'ÉCLAIRCIR


*ENTR'ÉCLAIRCIR (s' ) v. réc. Il est bien dur.
   Et vos craintes secrètes,
   Qui vous ont empêché de vous entr' éclaircir,
   Loin de tromper l' oracle, ont tout fait réussir.
       OEd. de Corn.

ENTRECOUPER


ENTRECOUPER, v. act. [An-tre--kou-pé; 1re lon. 2e e muet, dern. é fer.] Couper en divers endroits. "Les canaux, qui entrecoupent les jardins, les rendent plus agréables. "En parlant ainsi, de profonds soupirs entrecoupoient toutes mes paroles. Télém. Il est sur-tout en usage au participe, ou employé absolument et sans régime.
   Et des bois d' Hélicon les sensibles échôs
   En sons entrecoupés répétoient des sanglots.
Ou avec la prép. de: "Pays entrecoupé de rivières, de montagnes. "Joie d' ivresse et de trouble, qui est entrecoupée de passions furieûses et de cuisans remords. Télém. "Vénus répondit à Jupiter d' une voix douce, mais entrecoupée de profonds soupirs. Ibid. _ Style, discours entrecoupé de digressions, de citations, de parenthèses, etc. On ne le dit en ce sens, qu' en critiquant.

ENTRE-DÉCHIRER


*ENTRE-DÉCHIRER (s' ) v. réc. Se déchirer mutuellement. "Toutes les Nymphes jalouses sont prêtes à s' entre-déchirer. Télém. "Les hommes sont tous frères, et ils s' entre-déchirent. Ibid.

ENTRE-DÉCLARER


ENTRE-DÉCLARER (s' ) v. réc. Il est de peu d' usage. "La France et l' Empereur venoient de s' entre-déclarer la guerre. Journal de Mons.

ENTRE-DEMANDER


*ENTRE-DEMANDER (s' ) v. réc. Se demander l' un à l' autre.
   Déja chacun s' entre-regarde,
   S' entre demande à quoi ces ordres que j' ai mis.
       Attila.
Ce mot n' a pas été admis par l' usage.

ENTRE-DÉTRUIRE


*ENTRE-DÉTRUIRE (s' ) v. réc. Celui-ci n' est guère plus usité que le précédent.
   Et que son amitié s' en laissant moins séduire,
   Ne nous exposât point à nous entre-détruire.
       Pulchérie.

ENTRE-DÉROBER


ENTRE-DÉROBER (s' ) v. réc. Se dérober mutuellement. Ce mot est de l' invention de M. l' Abé Garnier, second continuateur de Velly. "Nous allons voir les Chefs plus habiles à s' entre-dérober des partisans, qu' à conserver ceux qu' ils avoient. Hist. de France.

ENTRE-DEUX


ENTRE-DEUX, s. m. [An-tre-deû: 1re et dern. lon. 2e e muet.] Partie qui est au milieu de deux choses avec lesquelles elle a relation ou contiguité. "L' entre-deux des épaules. "Dans l' entre-deux de ces pilotis.

ENTRE-DISPUTER


*ENTRE-DISPUTER (s' ) v. réc. Se disputer l' un à l' autre. "Ils s' entre-disputèrent l' honeur de tremper les premiers leurs mains dans leur sang. Hist. des Stuarts. _ Se disputer a le même sens, et il est plus doux et plus usité.

ENTRE-DONER


ENTRE-DONER, (s' ) v. réc. [Antre--doné: 1re lon. 2e e muet, dern. é fer.] Se doner mutuellement quelque chôse.

ENTRÉE


ENTRÉE, s. f. [Antré-e: 1re et 2e lon. é fer. à la 2e, 3ee muet.] 1°. Le lieu par où l' on entre. "L' entrée de la maison, de la ville, de l' Église, etc. "Dès l' entrée: Tout à l' entrée, etc. _ Par extension, l' entrée d' un soulier, d' un chapeau, d' une manche, d' une serrûre. "Ces bottes sont trop larges d' entrée. = 2°. L' action d' entrer "À~ son entrée dans la prison, il paya sa bien-venue. = 3°. Solennelle réception qu' on fait dans les villes aux Rois, aux Princes, aux Ambassadeurs. = 4°. Séance. "Avoir entrée au Parlement, aux États. = 5°. Comencement. "À~ l' entrée de l' hiver. "Dès l' entrée de son discours. = 6°. Entrées de table, plats d' entrée; mets qui se servent au comencement du repâs. _ Entrée de Ballet, se dit comme Scènes dans les Drames. = 7°. Figurément, Doner entrée à, être ocasion, ou cause de.... "Le mépris des lois done entrée à tous les désordres. _ Trouver entrée dans. "Il avoit trouvé entrée (s' était introduit) dans toutes les maisons, par le moyen de certains remèdes qu' il distribuoit. Let. Edif.
   REM. Entrée n' a un pluriel que dans deux ou trois expressions: les entrées chez le Roi, entrées de table, entrées de ballet. Ailleurs, on dit toujours entrée au singulier, quoiqu' il s' agisse de plusieurs persones, qui entrent. "Les Rois de France et d' Angleterre firent leur entrée (et non pas leurs entrées) à Paris. = Marsolier dit que les Syndics de Tonon pensèrent à faire une entrée à St. François de Sales. On a critiqué cette expression; cependant l' usage l' admet. Il est vrai qu' on joint ordinairement quelque épithète qui relève le mot d' entrée, et le détermine. "On fit une magnifique entrée à ce Prince, à cette Princesse. Acad. = D' Entrée, adv. s' est dit pour premièrement, dabord. L' Acad. ne le condamnait point: mais dans les dernières éditions, elle dit qu' il vieillit. _ D' entrée de jeu se dit encôre et au propre et au figuré, pour, dès le comencement; mais seulement dans le style familier.

ENTREFAITES


ENTREFAITES, s. f. pl. [Antrefète, 1re lon, 2e et 4e e muet, 3eè moy.] Il ne se dit que dans ces manières de parler; sur, ou dans ces entrefaites. _ L' Acad. dit l' un et l' autre. Mais, en ces entrefaites, ne vaut rien. _ C' est l' intereà des Latins; pendant que les chôses étoient dans cet état, ou pendant que telle autre chôse se passoit dans un autre endroit. _ Les Historiens emploient beaucoup cette expression, et elle leur sert de transition et de liaison pour passer d' une narration à l' autre.

ENTRE-FRAPER


ENTRE-FRAPER (s' ) v. réc. Se fraper l' un l' autre. Il est peu usité.

ENTREGENT


ENTREGENT, s. m. [Antrejan; 1re lon. 2e e muet.] Il n' est que du style fam. Manière adroite de se conduire dans le monde, ou plutôt dans les afaires. "Pour réussir dans le monde, il faut avoir de l' entregent, de l' intrigue.

ENTR'ÉGORGER


ENTR'ÉGORGER (s' ) S' égorger l' un l' aûtre. "Nous avons vu des usurpateurs féroces s' entr' égorger et entasser leurs cadavres sur les cadavres de leurs victimes. Rayn.

ENTRELâCEMENT


ENTRELâCEMENT, s. m. ENTRELACER, v. act. [Antrelâceman, lacé: 2e e muet, 3e lon. 4e e muet au 1er, é fer. au 2e.] Trév. renvoie à entrelasser; mais cette dernière ortographe est contre l' usage et la prononciation. Dans l' abrégé, on n' a mis qu' entrelacement, entrelacer. = État de plusieurs chôses entrelacées. = Enlacer l' un dans l' autre. "Les entrelâcemens de ces chifres sont faits avec beaucoup d' art. _ Entrelacer des branches d' arbres l' une dans l' autre.

ENTRELARDER


ENTRELARDER, v. act. [Antrelardé; 2e e muet, dern. é fer.] Faire des trous dans quelque viande, et y mettre du lard pour la rendre plus grasse. _ Par extension, on le dit de ce qu' on entremêle dans certaines chôses, quoique ce ne soit pas du lard. Entrelarder de clous de girofle, de canelle, d' écorce de citron, etc. _ Figurément, Entrelarder un discours, un ouvrage, de vers, de passages. * Joubert met entrelarder des plaisanseries à un discours sérieux. C' est un faux régime. Il faut dire, entrelarder un discours de, etc.

ENTRE-LIGNE


ENTRE-LIGNE, s. f. [Antreligne: 1re lon. 2e et dern. e muet: mouillez le g.] 1°. L' espace entre deux lignes. "Il ne faut pas écrire dans l' entreligne. = 2°. Ce qui est écrit dans cet espace. Il est défendu aux Notaires d' écrire en entreligne, il faut qu' ils fassent des renvois et des apostilles parafées des parties. On dit plus communément interligne. Marin. L' Ac. les met tous deux sans remarque. Interligne est du langage comun; entreligne, du style de Palais.

ENTRE-MANGER


ENTRE-MANGER (s' ) v. réc. Se manger l' un l' aûtre. "Depuis le plus grand des animaux que les eaux produisent, jusqu' aux plus petits, tout est en action et en guerre.... On s' y entre-mange, on s' y entre-pille sans pudeur ni mesure. Pluche.

ENTRE-EMBARRASSER


*ENTRE-EMBARRASSER (s' ) v. réc. S' embarrasser mutuellement. "Il vaut mieux qu' on se divise en petites troupes, qui ne s' entr' embarrassent point. Fontenelle. _ Ce mot est singulièrement dur. Il faut prendre son escousse pour le prononcer. Aussi est-il peu usité.

ENTRE-MÉLER


ENTRE-MÉLER, v. act. [Antremélé; 2e e muet, 3e é fer.: devant l' e muet, la 3e est un ê ouv. et long: il entre-mêle, entre-mêlera, etc.] Méler avec. "Il faut entre-méler les orangers et les citroniers. Entreméler des fleurs rouges parmi les blanches.

ENTRE-MESURER


*ENTRE-MESURER (s' ) v. réc. [An--tremezuré; 2e et 3e e muet, dern. é fer.] Se mesurer mutuellement.
   Je vois de tous côtés des partis et des ligues,
   Chacun s' entre-mesure et forme des intrigues.
       Pulchérie.

ENTREMETTEUR


ENTREMETTEUR, EûSE, s. m. et f. S' ENTREMETTRE, v. réc. ENTREMISE, s. f. [Antremèteur, teû-ze, mètre, mize; 1re lon. 2e e muet, 3eè moy. aux 3 prem. 4e lon. au 2d.] S' entremettre, c' est s' employer pour quelque chose qui regarde l' intérêt d' un autre. Entremetteur, est celui qui s' entremet. Entremise, est l' action de s' entremettre, d' interposer ses bons ofices. "S' entremettre pour acorder des gens qui sont brouillés, pour obtenir la grâce d' un homme qui a fait une faûte. _ S' entremettre (se méler) d' une afaire. "Il s' entremet de beaucoup de chôses. "Il a été l' entremetteur de cette affaire. "Elle a réussi par son entremise. "Il s' est servi de l' entremise d' un tel pour y réussir, etc.
   REM. 1°. Entremetteur n' est pas du style noble, et celui qui, parlant de l' intercession des Saints, a dit que le R. C. ne conait pas ces Entremetteurs, ou ignorait la propriété des termes, ou voulait rendre ce dogme ridicule. On dit Intercesseurs.
   2°. Entremetteuse ne se prend qu' en mauvaise part et dans un sens odieux et révoltant, pour celle qui favorise un comerce criminel ou illicite.

ENTREMETS


ENTREMETS, s. m. [Antremê; 1re lon. 2e e muet, 3e ê ouv.] Plats qu' on met entre le rôt et le fruit. "Plats, assiètes d' entremets. "On servit à l' entremets, pour l' entremets telle et telle chôse. "Pendant qu' on étoit à l' entremets, on vint annoncer, etc.

ENTRE-MONTRER


*ENTRE-MONTRER (s' ) v. réc. Se montrer mutuellement. "Tous les hommes s' entre-montrent au doigt. Anon. _ La prononciation de ce mot n' est pas fort agréable.

ENTRE-ENTENDRE


ENTRE-ENTENDRE (s' ) v. réc. Celui-ci est aussi bien dur.
   Vous vous entr' entendez comme larrons en foire.

ENTRE-NUIRE


ENTRE-NUIRE (s' ) v. réc. Se nuire l' un à l' aûtre.

ENTRE-PARDONNER


ENTRE-PARDONNER (s' ) v. réc. Se pardoner mutuellement. "Et nous entrepardonant comme le Seigneur nous a pardoné. M. Arnaud à M. Perrault.

ENTRE-PARLEUR


*ENTRE-PARLEUR, s. m. Il s' est dit autrefois pour interlocuteur.

ENTRE-PERCER


ENTRE-PERCER, (s' ) v. réc. Se percer les uns les aûtres. "Il s' entrepercèrent.

ENTRE-PILLER


*ENTRE-PILLER. Voy. ENTRE-MANGER.

ENTREPORTER


*ENTREPORTER, (s' ) v. réc. Il a été employé par Brébeuf, qui n' a pas eu beaucoup d' imitateurs.
   À~ l' exemple des chefs, les soldats s' entrexhortent.
   Ils soufrent, sans gémir, les coups qu' ils s' entreportent.
   Anciènement, s' entreporter avait encôre un aûtre sens; il signifiait, s' engager, se porter mutuellement à quelque chôse. "Elles doivent être unies ensemble et s' entreporter au zèle de l' observance. St. François de Sales.

ENTREPôT


ENTREPôT, s. m. [Antrepô: 1re et 3e lon. 2e e muet: le t final ne se prononce jamais.] Lieu où l' on met en dépôt des marchandises, que l' on veut porter plus loin. Un bon entrepôt. Lieu, ville d' entrepôt.

ENTREPRENANT


ENTREPRENANT, ANTE, adj. [Antre--prenan, nante: 2e et 3e e muet, 4e lon.] Hardi, qui se porte aisément aux entreprises. _ Il se prend ordinairement dans un mauvais sens, et veut dire téméraire, et qui entreprend sur les droits d' autrui. On dit bien qu' un Général d' Armée est entreprenant; mais on dit plus souvent: "Cet homme est entreprenant, d' humeur entreprenante.

ENTREPRENDRE


ENTREPRENDRE, v. act. et n. ENTREPRENEUR, EûSE, s. m. et f. ENTREPRISE, s. f. [Antreprandre, pre-neur, neû-ze, prize: 1re lon. 2e e muet, 3e lon. au 1er et au dern. e muet au 2d et au 3e; la 4e est longue au 3e.] Entreprendre: c' est 1°. Prendre la résolution de faire quelque action, quelque ouvrage. "Entreprendre une guerre, un bâtiment _ Il régit de devant les verbes. "Entreprendre de traduire un Auteur, etc. = 2°. S' engager à quelque chôse à certaines conditions. Faire un marché à forfait. "Cet Architecte a entrepris un tel bâtiment pour une telle somme. "Il a entrepris de fournir les vivres à l' armée. = 3°. Entreprendre quelqu' un, le pousser, le râiller, ou le poursuivre, l' ataquer. Il est tout au plus du style médiocre. "Alexandre voulut s' afermir avant que d' entreprendre un rival. Boss. = 4°. Entreprendre sur... Usurper "Il ne faut pas entreprendre sur l' autorité des supérieurs. _ Atenter à... "Il entreprit sur la liberté de la République.
   II. ENTREPRENEUR, ne se dit que dans le 2d sens d' entreprendre. "Un bon, un habile entrepreneur. _ On dit quelquefois, mais rârement, entrepreneûse pour celle qui entreprend quelque besogne et qui a plusieurs ouvrières sous elle. Trév. Acad.
   III. ENTREPRISE, se prend dans le 1er et le dernier sens du verbe, 1°. Pour ce qu' on a entrepris de faire. Belle, glorieuse entreprise; faire, exécuter une entreprise. Venir à bout de son entreprise. Manquer son entreprise. = 2°. Pour atentat, usurpation. Entreprise sur la juridiction, sur ou contre les droits de, etc. = Remarquez que ce mot, dans sa 1re signification, porte à l' esprit quelque chôse d' important, qui demande des talens et des soins; et que tout dessein, tout projet n' est pas une entreprise. Racine fait dire par Arsace à Antiochus. BÉRÉNICE. Acte. I. sc. 3e.
   Rien ne peut-il Seigneur, changer votre entreprise?
   Cette entreprise n' était que le dessein de quiter Rome, pour n' être pas témoin du mariage de Bérénice avec Titus. Le mot est impropre en cet endroit.

ENTREPRIS


ENTREPRIS, ISE, adj. [Antrepri, prize: 1re lon. 2e e muet, 3e lon. au 2d] Embarrassé, perclus. "J' ai la tête toute entreprise. "Il est entrepris d' un brâs. = Plusieurs le disent des persones en stile figuré familier, pour embarrassé, gauche, maladroit. "Il parut tout entrepris. Elle étoit toute entreprise. _ Les Dictionaires ne mettent pas cette signification, et je n' ai sous la main aucun Auteur à citer.

ENTRE-PRODUIRE


*ENTRE-PRODUIRE, (s' ) v. réc. Il semble que ces deux vertus se soient entre-produites dans son âme. Corneille. Ce verbe n' a pas été adopté par l' usage.

ENTRE-QUERELLER


ENTRE-QUERELLER, (s' ) v. réc. Se quereller l' un l' autre. "Ils ne font que s' entrequereller.

ENTRER


ENTRER, v. n. [Antré: 1re lon. 2e é fer.] Pâsser du dehors au dedans. _ Il se conjugue dans ses temps composés avec le v. être. "Il est entré dans la ville. Ils étoient entrés dans la maison, etc. Quelques Auteurs lui ont doné le v. avoir pour auxiliaire. "Luther eût [fût] entré lui-même dans ce sentiment, s' il l' eût pu. Boss. "Il semble que Ciceron ait (soit) entré dans les sentimens de ce Philosophe. La Bruy. "Les Prédicateurs ont entrés (sont entrés) en société avec les Auteurs et les Poètes. Ils ont enchéri (dans leurs éloges) sur les Épitres dédicatoires, sur les Stances et sur les Prologues. Id. "Pour tout renfort, on nous en envoya 170, qui n' avoient jamais entré (n' étoient jamais entrés) dans un vaisseau. Voy. D' ANSON. _ L' Ab. Des Fontaines lui-même a fait cette faûte. "J' aurois souhaité que l' Auteur eût (fût) entré dans des détails plus intéressans. = Entré participe employé adjectivement. Voy. PARTICIPE. 6e RÉGLE.
   ENTRER, s' emploie avec beaucoup de mots, précédés~ de dans ou en, ou à. "Entrer dans le monde, dans la pensée de quelqu' un. Cela n' est jamais entré dans l' esprit, dans la tête, dans la pensée de persone. Faire entrer quelque chôse dans un traité, dans un livre, dans un discours. Entrer dans les afaires dans les secrets, dans les plaisirs, dans les intérêts, dans la douleur de quelqu' un, etc. Entrer dans les détails des chôses. Entrer dans sa vingtième année, etc. = Avec en, les noms s' emploient sans article. "Entrer en religion, en condition, en service. Entrer en charge, en exercice, en fonction. Entrer en procès, en guerre, en débat. Entrer en comparaison, en parallèle, en concurrence avec, etc. Entrer en négociation, en composition, en acomodement, etc. Entrer en colère, en fureur, en défiance, en soupçon. Entrer en chaire, à l' autel, à la cour, à table.
   Rem. 1°. On dit, entrer Page chez le Roi, chez un Prince: mais ce n' est pas une conséquence pour d' autres mots; et l' on ne doit pas dire, il est entré Aumonier, gentil--homme, valet-de-chambre, chez le Duc de... Mais il faut dire, en qualité d' Aumonier, etc. etc.
   2°. On dit fort bien, ce chapeau entre facilement dans ma tête, ce gant ne saurait entrer dans ma main. Ces expressions paraissent fort extraordinaires, mais elles sont autorisées par L' usage. Dans la réalité, c' est la tête qui entre dans le chapeau, et la main qui entre dans le gant.
   3°. Comme on dit entrer en matière, etc. Un Auteur a cru pouvoir dire entrer en détail. "Cela m' engage à entrer un peu en détail de l' Antiquité Chinoise, etc. Let. Édif. On dit entrer dans le détail de, ou bien entrer dans quelque détail sur, etc. _ En détail étant employé dans un sens indéfini ne doit point avoir de régime.
   4°. On ne dit point entrer, mais rentrer en soi-même. "Ces réflexions firent entrer en lui-même l' Empereur. Dict. Hist. _ Peut-être est-ce une faûte d' impression.
   5°. Entrer dans, ne régit pas ordinairement les persones. On dit, il est vrai, entrer dans les Gardes du Corps, dans les Mousquetaires, etc. c. à. d. dans la Compagnie des Gardes, etc. Mais je ne sais si l' on doit dire avec Fontenelle. "Il entra dans les Pères de l' Oratoire. Je crois que la prép. chez vaut mieux dans ces ocasions. Je dirais plus volontiers, il entra chez les Capucins, que dans les Capucins.
   6°. Entrer pour rien, se dit ordinairement des chôses. "Cet objet, cet article n' entre pour rien dans mes demandes. Pluche le dit des persones. "Sans entrer (sans que nous entrions) pour rien dans ce détail, il suffit d' avoir indiqué la naissance des deux premières sortes de divinations. Hist. du Ciel. Il sufisait de dire, sans entrer dans ce détail. = N' entrer pour rien se dit des persones, mais dans un aûtre sens. "Je n' entre pour rien dans le tort qu' on vous a fait: je n' y ai contribué en rien.
   ENTRER, est quelquefois employé impersonellement. "Il entre plus d' ambition que d' atachement au devoir dans les travaux de la plupart des hommes.

ENTRE-REGARDER


ENTRE-REGARDER (s' ) v. réc. Se regarder mutuellement. "Les vieillards s' entre-regardèrent en riant, et furent surpris que ma réponse fût précisément celle de Minos. Télém. Voy. ENTRE-DEMANDER.

ENTRE-RÉPONDRE


ENTRE-RÉPONDRE, (s' ) v. réc. se répondre l' un à l' aûtre. "Les deux choeurs de musique s' entre-répondaient.

ENTRE-REPôS


*ENTRE-REPôS, s. m. C' est un terme de l' invention du P. La Rue; il n' a pas été heureux, et l' usage ne l' a pas admis. "Un intervale de dévotion, de retraite même et de pénitence, est un entre-repôs pour se délasser du péché.

ENTRE-ROI


ENTRE-ROI, s. m. Mot employé par Vertot et par Montesquieu. Ce mot est consacré à l' Histoire Romaine. Les autres Historiens disent Interrex, mot latin d' où est venu le mot français interrègne. L' Acad. ne met ni interrex, ni entre-roi.

ENTRE-SECOURIR


ENTRE-SECOURIR, (s' ) v. réc. Se secourir mutuellement. "Les Troupes étoient bien postées pour s' entre-secourir. _ * Le Gendre dit, que: "La Natûre et l' Art doivent s' entre-secourir mutuellement. C' est un vrai pléonasme. Il sufisait de dire s' entre-secourir ou, se secourir mutuellement.

ENTRE-SOL


ENTRE-SOL, s. m. [Antresol: 1re lon. 2e e muet. Il a le pluriel suivant la règle générale, entre-sols. _ L' ancien Trévoux avait mis entre-sole. L' Abé Laugier qui a écrit sur l' Architectûre, avoit aussi adopté cette ortographe. On n' écrit et l' on ne prononce plus que, entresol.] Logement pratiqué dans la hauteur d' un étage. Il se dit surtout d' un étage pratiqué dans la partie supérieûre du rés-de-chaussée.

ENTRE-SOUTENIR


ENTRE-SOUTENIR, (s' ) v. réc. Se soutenir mutuellement.
   Il faut doner aux bons, pour s' entre-soutenir.
   Le temps de se remettre et de se réunir.
       Corn. Othon.

ENTRE-SUIVRE


ENTRE-SUIVRE, (s' ) v. réc. Aller de suite l' un après l' aûtre. "Les jours et les nuits s' entre-suivent.

ENTRE-SUPORTER


*ENTRE-SUPORTER. (s' ) v. réc. Il est peu usité. Se suporter l' un l' aûtre. "Elles doivent se tolérer mutuellement et s' entre-suporter. Anon.

ENTRETEMPS


ENTRETEMPS, s. m. [Antretan] Intervale de temps, qui s' écoule entre deux actions. "Profiter de l' entre-temps. "Comme sa santé est mauvaise et que le chemin est long, (de Paris à l' armée) tout est à craindre dans cet entre-temps. Sév. "En câs que les légataires viènent à mourir dans l' entre--tems de la mort du testateur et de l' aquisition de l' hérédité, les legs sont transmis aux héritiers des légataires. Ferrière.

ENTRETèNEMENT


ENTRETèNEMENT, s. m. [Antretè--neman: 2e et 4e e muet, 3e è moy. _ Trév. et L' Acad. ne mettent point d' accent sur l' e de la 3e syll. de sorte qu' à suivre cette ortographe dans la prononciation, il y aurait 3 e muets de suite. Dans le Rich. Port. on met un accent~ aigu sur cet e, entreténement; mais entre deux e muets, l' e est moyen et non pas fermé; ainsi il convient d' y mettre un accent grâve.] Subsistance. Ce que l' on done à chacun pour vivre. "L' entretènement d' une Armée, des Troupes, d' un Hopital. _ Ce mot n' est d' usage qu' en style de Finances et de Palais. Hors de là, on dit entretien. Mde de Sévigné l' a employé. "L' amitié de cet oncle ne va pas toute seule: Il y faut de l' entretènement. Le mot est imprimé en italique par les soins de l' Éditeur. Il parait que ce mot serait quelquefois utile dans le discours familier. _ L' Acad. ne le condamnait pas d' abord. Dans les Éditions suivantes, elle dit qu' il vieillit. Dans la dernière, elle remarque qu' il est de peu d' usage, excepté en style de Finances et de Palais.

ENTRETENIR


ENTRETENIR, v. act. ENTRETIEN, s. m. [Antreteni, tien: 2e e muet; 3ee muet aussi au 1er: dans le 2d ien, n' a pas~ le son d' an.] Entretenir, est 1°. Tenir ensemble. "Cette pièce de bois entretient toute la charpente. = 2°. Tenir en bon état. "Entretenir un bâtiment, les ponts, les chemins, etc. = 3°. Faire subsister, et continuer. "Entretenir la paix, l' union, la désunion, etc. = 4°. Fournir les chôses nécessaires à la subsistance. "Entretenir une armée, une garnison. Entretenir un enfant au collège, à l' Académie. _ S' entretenir: "Il s' entretient d' habits, de linge et de tout. = 5°. Parler à quelqu' un. "Je l' ai entretenu, nous nous sommes entretenus assez longtems. Entretenir quelqu' un d' une afaire. S' entretenir de quelqu' un, de bagatelles, de chôses sérieuses. De quoi vous entretenez-vous? _ S' entretenir de Dieu, parler de Dieu, s' entretenir avec Dieu, penser à Dieu, méditer la parole de Dieu.
   ENTRETIEN, a presque toutes les significations d' entretenir. _ Ce que l' on dépense pour maintenir une chôse en état. (n°. 2°.) Entretien des chemins, des ponts. "Ce bâtiment est d' un grand entretien. _ Subsistance. (n°. 4°.) L' entretien d' une maison, d' une armée, d' une garnison, etc. _ Conversation. (n°. 4°.) Avoir un entretien avec... "Ils ont eu un long entretien ensemble. _ Entretiens spirituels: pieuses conversations. _ Et aussi exhortations, instructions, discours spirituels, etc.
   Rem. 1°. Quelques-uns écrivent entretient, soutient, avec un t à la fin; et un Auteur moderne, ou son Imprimeur a écrit l' entretient des troupes. C' est l' ortographe de la 3e pers. du sing. du v. entretenir. On dit, il entretient et l' entretien.
   2°. On dit élégamment entretien pour sujet d' entretien, comme on dit terreur, pour sujet de terreur. "Il fait l' entretien, et dans le haut style, il est l' entretien de tout le monde. La Touche n' aprouvait pas cette expression. Il la blâme dans Corneille, qui fait dire à Cornélie dans la Mort de Pompée.
   Eternel entretien de haine et de pitié,
   Restes du grand Pompée, écoutez sa moitié.
Il est pris là au figuré, restes, qui êtes l' entretien, de (qui entretenez) la haine et la pitié. _ Racine, dans le dernier sens, a dit du siège de Troie.
   Eternel entretien des siècles avenir.
Qui ferez l' entretien, qui serez le sujet de l' entretien des siècles, etc. Il est beau et élégant employé de cette manière.
   3°. ENTRETIEN, dans le sens de conversation, ne se dit pas absolument et dans un sens indéfini. On ne dit point, il faut être poli et discret dans l' entretien, comme on dit, dans la conversation. "Est il rien de plus commun dans l' entretien, que de rendre les plus louables actions suspectes, même en les louant. La Rue. Il falait dire dans la conversation.

ENTREVOIR


ENTREVOIR, v. act. [Antre-voar: 1re lon. 2e e muet.] Voir imparfaitement ou en passant. "Je n' ai fait que l' entrevoir. = S' entrevoir, avoir une entrevue, ou se rendre visite. Acad. Il est peu usité.

ENTREVûE


ENTREVûE, s. f. [Antrevû-e: 1re et 3e lon. 2e et dern. e muet.] Visite, rencontre concertée entre deux ou plusieurs persones, pour se voir ou parler d' afaires. Avoir, demander une entrevue; convenir d' une entrevûe. _ On dit, dans le Dict. Gram. que ce mot n' est bon que pour la première rencontre; mais c' est en trop borner l' usage.

S' ENTR'EXCITER


S' ENTR'EXCITER, S' ENTR'EXHORTER, v. réc.
   Par de nouveaux éforts les rameurs s' entr' excitent.
       Brebeuf.
À~ l' exemple du chef les soldats s' entr' exhortent.
Id. Ces mots sont durs et peu usités.

ENTR'IMMOLER


*ENTR'IMMOLER, (s' ) v. réc. S' immoler mutuellement et à l' envi.
   Ils s' entr' immolent tous au commun adversaire.
       Corn. Toison d' Or.
"Il demeure les brâs croisés, quand il les voit prêts à s' entr' immoler l' un à l' aûtre. Id. Exam.~ de Théodore.

ENTR'INJURIER


ENTR'INJURIER, (s' ) v. réc. S' injurier mutuellement. "Le Roi défendoit de s' entr' injurier pour cause de religion. L' Ab. Gar nier. Hist. de Fr.

ENTR'OUIR


ENTR' OUIR, v. act. [Antrou-i: 1re lon.] Ouir imparfaitement. "J' ai entr' oui sa voix. "Il me semble avoir entr' oui quelque chôse de semblable.

ENTR'OUVRIR


ENTR'OUVRIR, v. act. [An-trou-vri: 1re lon.] Ouvrir à demi. "Entr' ouvrir la porte, la fenêtre, les yeux. _ S' entr' ouvrir. "La terre s' entr' ouvre. "À~ la fin ses yeux s' entr' ouvrirent. _ La porte est entr' ouverte, etc.

ENTûRE


ENTûRE, s. f. [Antûre: 2e lon. 3e e muet.] L' endroit où l' on place une ente. "Il faut faire l' entûre avant de placer l' ente.

ENVAHIR


ENVAHIR, v. act. [Anva-i: 1re lon.] Usurper. "Envahir un État, une Province, un héritage. Envahir la puissance souveraine, l' autorité.

ENVAHISSANT


*ENVAHISSANT, ANTE, adj. ENVAHISSEUR, s. m. Mots nouveaux. Qui envahit. "Soumis à la volonté d' un voisin si supérieur et si envahissant. Hist. d' Angl. "Ne se jugeant pas assez fort pour aller au devant de cet envahisseur. Journ. de Gen. "Il croyoit que toutes les avances pour une réconciliation devoient être faites par le pouvoir envahisseur au pouvoir envahi. Ibid. Il faut atendre ce que l' usage décidera sur ces deux Néologismes.

ENVELOPANT


*ENVELOPANT, ANTE, adj. ENVELOPE, s. f. *ENVELOPEMENT, s. m. ENVELOPER, v. act. [Anvelopan, pante, pe, peman, pé: 1re lon. 2e e muet; 4e e muet au 3e et 4e, é fer. au dern.] Enveloper, c' est couvrir, enfermer quelque chôse, pour la conserver, avec du linge, de l' étofe, du papier, etc. Enveloper des habits; s' enveloper le doigt, la tête avec du linge, etc. = Fig. Cacher, déguiser. "Enveloper la vérité sous des fictions. _ Environer, entourer. "Enveloper l' énemi de tout côté. _ Comprendre. "Enveloper quelqu' un dans une acusation. "Se trouver envelopé dans de mauvaises afaires. = Discours, raisonement envelopé, confus, embarrassé. _ envelopé, qui ne s' explique pas clairement.
   *ENVELOPANT, qui envelope. C' est un mot de J. J. Rousseau. "Partie envelopante et colorée. Let. sur la Botanique.
   ENVELOPE, ce qui sert à enveloper. Il ne s' emploie qu' au sens propre et litéral. "L' envelope d' un paquet, d' une lettre. _ Écrire sous l' envelope de quelqu' un, c' est mettre sous l' adresse de quelqu' un, des lettres qui sont pour un aûtre. _ Quelques-uns disent sous le pli, style mercantile et barbâre. D' aûtres sous le couvert. Celui-ci est moins mauvais.
   *ENVELOPEMENT, action d' enveloper. Trév. Ce mot n' est pas fort usité. L' Acad. ne le met point.
   Rem. Envelope est moins d' usage au figuré qu' enveloper. "Vous ne verrez la vérité qu' à demi, et sous de belles envelopes. Télémaque. Le terme n' est pas fort noble. "Antoine s' envelopa en quelque sorte dans sa dignité (de Consul), et s' en servit comme d' une barrière, pour empêcher que Cesar (Octave) ne lui présentât de trop près la justice et la vérité. Vertot. "Hélas! abusée par ces illusions, l' insensée se forge la félicité suprême; mais mille doutes envelopent ses esprits d' un nuage épais. Jér. del.

ENVELOPEUR


*ENVELOPEUR, s. m. Celui qui envelope. Il ne se dit qu' au figuré, dit-on dans le Dict. de Trév. Ce serait tout au plus dans le burlesque.

ENVENIMER


ENVENIMER, v. act. [Anvenimé; 1re. lon. 2e e muet, dern. é fer.] Infecter de venin. "Des crapauds, en bavant sur ces herbes, les ont envenimées. _ Envenimer une plaie, la rendre plus mauvaise, plus dificile à guérir. "Ces remèdes trop âcres, ont envenimé la plaie. = Figurément Envenimer les discours, les raporter d' une manière odieûse. _ Envenimer les esprits, les aigrir, les irriter.
   ENVENIMÉ ne se dit point des persones même, mais seulement des chôses qui ont raport aux persones. "Discours envenimé, style envenimé, langue envenimée. _ M. Geofroi dit: "Il faut que M. G. soit bien envenimé, et trouve sa caûse bien mauvaise pour en venir jusqu' à falsifier le texte qu' il examine. _ On dit, à la vérité, envenimer les esprits, et c' est une expression comme consacrée; mais je doute qu' on dise qu' un homme est envénimé, qu' une femme est envénimée contre une autre, pour dire qu' il est aigri, qu' elle est irritée, etc.

ENVERS


ENVERS, s. m. [Anvêr. 1re et 2e lon. ê ouvert.] Le côté le moins beau, comme l' endroit est celui qui est le plus beau. "L' endroit, l' envers d' une étofe. _ On dit, étofe à deux envers. C' est abusivement On devrait plutôt dire, à deux endroits, ou sans envers~. "Serge, velours à deux envers.
   À~ L' ENVERS, adv. En sens contraire. Méttre un manteau, un collet, des manchettes à l' envers. _ Figurément: "Ses afaires vont à l' envers. _ C' est un esprit à l' envers, mal fait, mal tourné. "Cette afliction lui a mis l' esprit à l' envers, lui a troublé l' esprit.
   ENVERS, prép. À l' égard de... Charitable envers les pauvres. Ingrat envers Dieu. Traitre envers sa patrie. = Vers et envers ne doivent pas être confondus. L' un a raport au lieu, l' aûtre à la persone. L' un est le versùs, l' aûtre est l' erga des latins.

ENVI


ENVI (à l' ) adv. À~ qui mieux mieux. Avec émulation. Il n' a de régime que dans cette phrâse; à l' envi l' un de l' aûtre. Hors de là, il s' emploie absolument. "Ils l' ont ruiné à l' envi ce royaume si florissant. = * On trouve dans plusieurs livres, à l' envie, peut être par l' ignorance des Imprimeurs. "Tant de beautés, qui semblent se disputer à l' envi son admiration. P. Du Rivet. On trouve aussi à l' envie dans le Traité de l' Amitié, par Sacy. = L' Acad. avait dabord dit qu' il était bâs, et ne se disait plus. Elle a retranché cette remarque dans la dernière Édit. aparemment parce qu' elle a cru qu' elle était aujourd' hui inutile.

ENVIE


ENVIE, s. f. [Envi-e: 2e lon. 3e e muet.] 1°. Déplaisir qu' on a du bien d' autrui. "L' envie le dévore. Il sèche d' envie. "Il est rongé d' envie. Exciter l' envie. _ Faire envie. "Il vaut mieux faire envie que pitié. "L' envie dégrade l' humanité: elle est un efet de l' orgueil qui se trouve blessé du mérite des autres hommes. MARIN, l' Homme aimable. Porter envie, se dit de la jalousie, ou quelquefois, d' une noble émulation. "Il ne faut pas porter envie aux heureux du siècle. "Alexandre portoit envie à Achile d' avoir eu un Homère pour chanter ses actions. = 2°. Desir, volonté. Il régit de devant les noms et les verbes "J' ai envie, ou grande envie de cet emploi, de vous voir, etc. = 3°. Marque que les enfans aportent en naissant. C' est un préjugé de croire qu' elles sont les éfets des desirs violens qu' ont eu les mères pendant leur grossesse, et qu' on apèle envies de femme grosse. = 4°. Petits filets, souvent douloureux, qui s' enlèvent de la peau autour des ongles.
   Rem. 1°. Envie, dans les deux sens, a une signification active. Il se dit de celui qui envie, ou qui desire, et non pas de celui qui est envié, ou de ce qui est desiré. Voiture s' est donc mal exprimé, quand il a dit. "Ne vous étonnez donc point qu' avec tant de gloire, vous ayez beaucoup d' envie. Il falait dire, beaucoup d' envieux.
   2°. Prendre envie régit, quand il est impersonel, le datif des noms, et de devant les verbes. "Il me prit envie de savoir ce qu' il diroit.
   3°. Envie se dit sur-tout des chôses; porter envie se dit des chôses et des persones. "Il ne faut pas envier le bien d' autrui.
   Au bonheur du prochain ne portez point envie.
"Moi, qui ne vous envie pas votre esprit, ni votre science, je vous porte envie de ce que vous avez été huit jours à Balsac. Voitûre.
   4°. Avoir envie (desir) régit quelquefois la conjonction que et le subjonctif. "J' ai envie que vous veniez, je n' ai pas envie qu' il viène _ Remarquez que le subjonctif se met quand le verbe régi ne se raporte pas au sujet de la phrâse, au nominatif du verbe avoir envie; et l' infinitif, quand il s' y raporte. "J' ai envie qu' il y aille; je n' ai pas envie d' y aller moi-même. _ Il en faut dire autant de mourir d' envie. "Je meurs d' envie de m' en retourner, qu' il s' en retourne.
   5°. On doit dire, perdre l' envie, et non pas quitter l' envie de, etc. Vaug. = Passer son envie de quelque chôse, satisfaire le desir qu' on en a. "Nous y vîmes un chat qui vouloit arracher les deux yeux de M. de la Fayette, et qui pensa bien en passer son envie, si vous vous en souvenez. Sév. = Faire passer l' envie de quelque chôse à quelqu' un: l' en rassasier, ou l' en dégoûter.
   6°. Envie, jalousie (synon.) On est jaloux de ce qu' on possède, et envieux de ce que possèdent les aûtres. C' est ainsi qu' un Prince est jaloux de son autorité; et qu' un homme, qui n' a pas de fortune, est envieux de la prospérité d' autrui. "L' homme qui dit qu' il n' est pas né heureux, pourroit du moins le devenir par le bonheur de ses amis ou de ses proches: l' envie lui ôte cette dernière ressource. La Bruy. = Quand ces deux mots sont relatifs à ce que possèdent les autres, envieux dit plus que jaloux. Le 1er marque une disposition habituelle et de caractère: l' autre peut désigner un sentiment passager. Le premier désigne aussi un sentiment actuel, plus fort que le second. On peut être quelquefois jaloux, sans être naturellement envieux, (Encycl.) "La jalousie est l' effet du sentiment de nos désavantages, comparés au bien de quelqu' un. Quand il se joint à cette jalousie de la haine, et une volonté de vengeance, dissimulée par foiblesse, c' est envie. (Conaiss. de l' Esprit humain). Beauzée. = À~ l' envie. Voy. ENVI.

ENVIEILLI


ENVIEILLI, IE, adj. [An-vié-gli, gli-e: 1re lon. 2e é fer. mouillez les ll; 3e lon. au 2d.] Il n' est en usage qu' au figuré. "Pécheur envieilli, habitudes envieillies. _ Au propre, on dit, il est fort vieilli, et non pas envieilli. _ Celui-ci avait été omis dans le Dict. de l' Acad. Il se trouve dans les dernières éditions avec cette remarque. "Ce mot n' est en usage qu' au figuré. _ Dans le Rich. Port. on dit qu' il est vieux. Erreurs envieillies. = Je pense qu' on peut l' employer sans crainte, et même avec la prép. dans "Homme envieilli dans le vice, dans la débauche, dans les sales voluptés.

ENVIER


ENVIER, v. act. ENVIEUX, EUSE, adj. et subst. [Anvié, vi-eû, eû-ze; 1re lon. 3e é fer. au 1er, longue aux deux aûtres.] Envier, c' est 1°. Avoir du déplaisir du bien d' autrui. Il régit, ou l' acusatif seulement: "Tout le monde l' envie; n' enviez pas le bonheur des méchans; ou il a le datif de la perosne pour 2d régime: "N' enviez pas aux méchans leur bonheur. = Au passif, il régit la prép. de. "Il est envié de tout le monde. = Envié s' emploie aussi sans régime, pour recherché; poste bien envié, charge fort enviée.
   2°. Envier ne signifie quelquefois que souhaiter pour soi-même un bonheur pareil à celui qu' un aûtre possède. Voyez Porter envie, au mot Envie, n°. 1°. à la fin. "J' envie votre bonheur. = 3°. Désirer. "C' est le poste du monde que j' envierois le plus.
   Envier, avoir envie, (synon.) Le premier est un mouvement de jalousie ou de vanité: "Nous envions aux aûtres ce qu' ils possèdent: nous voudrions le leur ravir. Le second l' est de cupidité ou de volupté. "Nous avons envie pour nous de ce qui n' est pas en notre possession: nous voudrions l' avoir. "Les subalternes envient l' autorité des supérieurs: les enfans ont envie de tout ce qu' ils voient. = Il me parait, ajoute l' Ab. Girard, qu' on se sert plus à propos d' envier pour les avantages personels et généraux, mais qu' avoir envie va mieux pour les chôses particulières et détachées de la persone. L' on dit, envier le bonheur d' autrui, et avoir envie d' un mets. GIR. Syn. = Envier, porter envie. Voyez ENVIE. Rem. n°. 3°.
   Rem. Envier, au futur et au conditionel, n' est que de trois syllabes: l' e muet ne s' y fait pas sentir. On prononce j' envierai, j' envierais, comme s' il était écrit j' envîrai, j' envîrais. Il en est qui l' écrivent de même.
   Pour le trône cédé, cédez-moi Rodogune,
   Et je n' envîrai point votre haute fortune.
       Corn.
ENVIEUX; qui porte envie. Il n' a que le premier sens d' envie et d' envier. "Homme envieux, femme envieûse. "Être envieux du bien d' autrui. "Les Auteurs envieux de la gloire d' autrui, ternissent par là l' éclat de leur propre gloire. = Quand il est sans régime, il suit dans la prôse ordinaire, et précède plus volontiers dans la prôse oratoire ou poétique. Auteur envieux, femme envieuse et maligne.
   Toujours à vos élus l' envieuse malice
   Tendra ses filets captieux.
       Rousseau.
Victime abandonnée à l' envieuse feinte.Id.
Envieux, jaloux (synon.) Voy. ENVIE, Rem. n°. 6°. = Envieux est aussi subst. "Un envieux n' a jamais de repôs. "Les envieux sont toujours tourmentés.

ENVINÉ


*ENVINÉ, ou AVINÉ, adj. Suivant le Dict. de Trév. le premier est le meilleur. Il se dit des Marchands de vin et de vaisseaux imbus de vin. _ L' Acad. ne met que Aviné.

ENVIRON


ENVIRON, prép. [Anviron: 1re lon.] À~ peu près, un peu plus, un peu moins. "Il est environ deux heures; il y a environ dix ans. = Il a une espèce de génitif, d' environ. "Son armée étoit d' environ 20 mille hommes. "Un Rhodien d' environ 35 ans, surmonta tous les autres. Télém.
   Rem. 1°. Bossuet emploie environ au lieu de vers. "Environ (vers) le temps. _ Sacy a dit aussi environ le temps de l' action. Tr. de l' Am. au lieu de, vers le temps, etc.
   2°. Environ, comme préposition, est mieux placé devant qu' après le nom auquel il est joint. Il est mieux de dire: il est environ deux heures, que, deux heûres environ: un homme d' environ 30 ans, que de 30 ans environ. Ce n' est qu' avec la conjonction ou qu' il doit être placé après, et alors il est adverbe. "Il est deux heures, ou environ.
   3°. On doit dire, environ deux heures, et non pas environ de deux heures, comme disent les Poitevins et les Angevins. _ Environ régit le génitif et non l' acusatif.
   ENVIRONS, s. m. pl. Lieu d' alentour. "Paris et ses environs: on a publié cette Ordonnance dans tous les environs, dans les Paroisses des environs. = Il régit quelque--fois la prép. de. "L' armée se logea aux environs de la place.

ENVIRONANT


*ENVIRONANT, ANTE, adj. ENVIRONER, v. act. [Anvironan, nante, né: 4e lon. aux deux 1ers, é fer. au 3e.] Environer, c' est 1°. entourer, enfermer. Environer une ville de fossés, de murailles. = 2°. Être autour de... Les énemis environaient la place: il fut impossible d' y pénétrer. Figurément. "Les dangers l' environaient de toutes parts. L' éclat qui l' environe; la gloire dont il est environé. "Le plus grand malheur des Princes, c' est d' être environé de flateurs.
   *ENVIRONANT, qui environe. "Il fit construire une chaussée dans les marais environans. Hist. d' Angl. _ C' est peut-être le deux milième adjectif verbal, créé depuis 20 ans. Celui-ci est sonore, et peut être utile: on peut en bien augurer. M. l' Ab. Garnier l' a employé depuis peu. "Le pont et les rûes environantes étoient couverts des monceaux de ces malheureux, etc. Hist. de Fr. "Tout le terrein environant n' étoit qu' un amas de cailloux et de sable. Ibid.

ENVISAGER


ENVISAGER, v. act. [Anvizagé.] Au propre, regarder au visage. "Dès que j' eus envisagé cet homme, je le reconus. "Il n' ôserait seulement m' envisager. = Au figuré, considérer en esprit. "Cette action est belle, si vous l' envisagez de ce côté là. "Le Sage n' envisage pas les richesses comme un bien. Envisager de sang froid la mort, le péril, etc.
   Rem. * C' est un gasconisme que de dire, que deux portes s' envisagent, pour dire qu' elles sont vis-à-vis l' une de l' aûtre.

ÉNUMÉRATION


ÉNUMÉRATION, s. f. [Enumera-cion, En vers, ci-on; 1re et 4e é fer.] Dénombrement de plusieurs chôses, dont on fait mention par le menu. "La simple énumération de ses conquêtes est un grand éloge. "L' énumération des parties est un des lieux communs de la Rhétorique.

ÉNUMÉRATEUR


*ÉNUMÉRATEUR, s. m. ÉNUMÉRER, v. act. Le premier est un mot risqué par La Bruyère: nous devons le second à M. Linguet. "Depuis trente années, on prête l' oreille aux Rhéteurs, aux Déclamateurs, aux Énumérateurs. La Bruy. Il met le mot en italique. L' usage ne l' a pas encôre adopté. Pour énumérer, son utilité le fera peut-être recevoir. Il serait plus court et plus comode que la périphrâse, faire l' énumération de, etc.

ENVOI


ENVOI, s. m. [An-voa: 1re lon.] Action par laquelle on envoie. Il se dit particulièrement des marchandises. "Par l' envoi d' un tel jour, j' ai reçu, etc. "Je vous ai déjà fait deux envois, etc. = L' emploi de ce nom est bien plus borné que celui du verbe Envoyer. * Bossuet l' emploie dans une ocasion où Mission est le terme consacré. "Les Vaudois étoient de purs laïques, aussi embarrassés de leur envoi (de justifier leur mission) et de leur titre, que ceux (les Protestans) qui ont recours à eux.

ENVOISINÉ


ENVOISINÉ, ÉE, adj. [Anvoa-ziné.] Qui a des voisins. "Il est bien ou mal envoisiné. _ C' est un mot du discours familier.

ENVOLER


ENVOLER, (s' ) v. réc. [Anvolé: 1re lon. dern. é fer.] S' enfuir en volant. "Les oiseaux se sont envolés. = Au figuré, passer rapidement: "Le temps, l' occasion s' envole.
   Rem. On ne doit pas, ce me semble, mettre deux fois en dans l' emploi de ce verbe. Mde. de Sév. dit: "Où sont ces petits oiseaux, qui s' en étoient envolés au Pui. "Je crains bien qu' à l' arrivée de cette lettre, tous les oiseaux ne s' en soient envolés. _ C' est comme ceux qui disent, je m' en suis en allé. Pourquoi répéter en? _ L' Acad. dit en exemple, les oiseaux se sont envolés; et plus bâs, on dit proverbialement, lorsqu' on cherche une chôse ou une persone dans un endroit où elle n' est plus. "Il n' y a plus que le nid: les oiseaux s' en sont envolés. Cette diférence vient-elle de ce que les phrâses proverbiales, quoique irrégulières, sont consacrées par l' usage? Mais au mot oiseau, elle dit au contraire, l' oiseau s' est envolé, expression proverbiale. Les deux manières seraient-elles également bones? Ce n' est pas mon sentiment. Je pense qu' il n' y a style proverbial qui tiène, et qu' on doit dire, les oiseaux se sont envolés, et non pas, s' en sont envolés.
   * Gresset emploie envolé adjectivement, avec la prép. de.
   Envolé de mon hermitage,
   Je vous aparoitrai soudain.
Les verbes réciproques n' ont pas proprement de participes passifs. On ne dit pas enfui de cet endroit, mais, m' étant enfui.

ENVOYÉ


ENVOYÉ, s. m. [An-voa-ié. Voyez ENVOYER.] Ministre envoyé par un Prince souverain, ou une république. C' est un grade inférieur à celui d' Ambassadeur. "L' Envoyé de France, de Gènes, etc.

ENVOYER


ENVOYER, v. act. [An-voa-ié: 1re lon. dern. é fer. _ Richelet écrit envoier, et le P. Follard, envoïer; mais aucune de ces deux manières d' écrire ce mot, n' en exprime la prononciation. L' y est nécessaire pour faire fonction de deux i, dont l' un se joint à l' o, et forme la dipht. oi, et l' autre se joint à l' e qui suit.] * Plusieurs disent au présent de l' indicatif, j' envois, tu envois, il envoit. Ils écrivent et parlent mal. Il faut dire et écrire, j' envoie, tu envoies, il envoie. _ On disait autrefois, au futur, j' envoyerai, nous envoyerons "Je vous les envoyerai par le premier vaisseau. Voit. "Nous lui envoyerons, etc. Mde. Dacier. _ Rollin met envoierai dans l' Hist. Anc. On dit aujourd' hui, j' enverrai, nous enverrons. _ Dès le temps de Th. Corneille, on le prononçait ainsi: on començait même à l' écrire.
   ENVOYER, avec le régime des persones, c' est dépêcher quelqu' un vers quelque lieu. "Envoyer un homme à la campagne, à la ville, en Province. _ Avec le régime des chôses, faire qu' une chôse soit portée en quelque lieu: "Envoyer un paquet, des étrènes: envoyer du secours dans une place. _ Et dans les chôses morales. "Les maux que Dieu nous envoie. = Il a le datif pour 2d régime. "Je lui ai envoyé une lettre de change. "Je leur envoie mon domestique pour les acompagner. _ Quelquefois il régit l' infinitif sans préposition. "Envoyer faire compliment.
   REM. Envoyer, se dit figurément des chôses: "la rate envoie des vapeurs au cerveau. "Le vin envoie des fumées à la tête. * Mais envoyer un coup de poing, de pied, de bâton; et envoyer une pierre, etc. sont des gasconismes ridicules. Il faut dire, doner ou apuyer un coup de, etc. Jeter une pierre, etc. _ Envoyer la main ou le pied est un provençalisme encôre plus barbâre.
   2°. ENVOYER, régit ou l' infinitif sans prép. ou précédé de pour. "Il envoya son fils l' assurer ou pour l' assurer que, etc. L' un et l' aûtre est bon, dit Vaugelas; et la question ayant été proposée à de gens capables de la résoudre, les uns crurent qu' il était plus naturel de mettre pour, et les aûtres, plus élégant de le suprimer. = La Touche et M. de Wailly font là-dessus une distinction fort judicieûse. On met l' infinitif tout seul, quand il est proche; et l' on se sert de pour, quand l' infinitif est séparé d' envoyer par plusieurs mots. "J. C. a envoyé annoncer sa parole aux gentils. Et Dieu a envoyé son fils unique sur la terre, pour racheter le genre humain.
   3°. Être envoyé régit les noms apellatifs sans article. "Il a été envoyé Ambassadeur à Naples. "Les Magistrats furent arrêtés et envoyés prisonniers à Édimbourg. Targe, Trad. de Smollet. _ Fontenelle done le même régime à l' actif. "Boulogne envoya le Marquis de Tanara Ambassadeur extraordinaire au Pape. "Le Roi eut la pensée de l' envoyer (M. Dangeau) Ambassadeur en Suisse. _ Et le P. Rapin emploie de la même manière le participe. "Tite-Live nous représente Scipion Envoyé Général de l' Armée des Romains en Espagne. _ Cette construction n' est bien sûre qu' avec le passif.

ENYVREMENT


ENYVREMENT, ENYVRER. Voy. ENIVREMENT, ENIVRER. Il n' y a aucune raison pour écrire ces mots et ceux d' IVRE, IVRESSE, IVROGNE avec un y.

ÉPAGNEUL


ÉPAGNEUL, EULE, s. m. et f. [Épa--gneul, neule: 1re é fer. mouillez le g.] Sorte de chien de chasse à long poil, ainsi apelé, parce que la race en est venue d' Espagne. "Petit, joli épagneul: cette épagneule a le nez excellent.

ÉPAIS


ÉPAIS, AISSE, adj. ÉPAISSEUR, s. f. [Épè, pèce, pè-ceur: 1re é fer. 2e è moy.] Epais se dit, 1°. d' un corps solide, relativement à sa profondeur. "Planche épaisse de deux pouces. Livre épais de trois doigts. = Avoir la langue épaisse, avoir dificulté de parler. _ Fig. Homme épais, qui a la tâille épaisse, ou qui a l' esprit épais, l' intelligence épaisse, grossière, lourde, pesante, qui a peine à comprendre. Figurément, Brouillard épais, ténèbres épaisses, nuit épaisse, ignorance épaisse. = 2°. Il se dit d' une chose liquide, qui prend une consistance moins claire et plus ferme. "Du vin trop épais, de l' encre trop épaisse. = 3°. Il se dit d' un amas de certaines choses, qui sont près à près. "Bois épais, blés trop épais, cheveux épais, herbe épaisse, batâillons épais. = 4°. Il est substantif, mais toujours précédé de la prép. de. "Pierre qui a deux pieds d' épais, femme qui met beaucoup de rouge, qui en a toujours un doigt d' épais. = 5°. Il est aussi adverbe: Semer épais. "Il a neigé épais de trois doigts.
   REM. Épais suit ou précède le substantif. Nuage épais, épais nuage, ténèbres épaisses, épaisses ténèbres. En prôse et dans le style simple et au sens propre, il se plait à marcher après. Dans le style figuré, oratoire et poétique, il aime à se placer devant. "Son épaisse crinière se dresse autour de sa tête monstrueuse.
   Les corbeaux même, instruits~ de la fin de l' orage,
   Folâtrent à l' envi parmi l' épais feuillage.
       De Lille.
  Nous errons dans d' épaisses ombres,
  Où souvent nos lumières sombres
  Ne servent qu' à nous éblouir.
      Rousseau.
D' épaisses ombres est une inversion un peu dure. En prôse, il vaudrait mieux dire, des ombres épaisses. _ Épaisse nuit serait encôre moins agréable~ Epais air ne pourrait se suporter.
   Épaisseur, profondeur d' un corps solide. Il se dit dans tous les sens d' épais, excepté en parlant des liqueurs, où l' on dit épaississement. _ L' épaisseur d' un mur, d' un bois, d' une forêt. L' épaisseur de l' air, des brouillards; l' épaisseur des ténèbres.

ÉPAISSIR


ÉPAISSIR, v. act. ÉPAISSISSEMENT, s. m. [Epèci, ciceman; 1re é fer. 2e è moy. 4e e muet au 2d.] Epaissir, rendre épais. Epaississement, état de ce qui est devenu épais. Il est actif, neutre et réciproque. "Mettre du sucre dans un sirop trop clair, pour l' épaissir. "Les vapeurs épaississent l' air. _ Le bouillon épaissit en cuisant. _ Le sirop s' épaissit; la langue s' épaissit; la taille de cette femme s' épaissit. "L' esprit de cet homme s' épaissit. Voyez ÉPAIS. _ "L' épaississement des liqueurs, de la langue. _ Celui-ci n' a pas un emploi aussi étendu que l' adjectif et le verbe.
   REM. Épaissir se dit élégamment au fig. sur-tout avec le pronom personel. "Un nuage de douleur s' épaissit sur les yeux du Sultan: des larmes inondent ses joues. Jér. Dél. "Tout semble tourner autour de lui: un voile s' épaissit sur ses yeux. Ibid.

ÉPAMPREMENT


ÉPAMPREMENT, s. m. ÉPAMPRER, v. act. [Epanpreman, pré; 1re é fer. 2e lon. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Epamprement, est l' action d' épamprer, d' ôter de la vigne les pampres inutiles, qui empêchent que le raisin ne mûrisse.

ÉPANCHEMENT


ÉPANCHEMENT, s. m. ÉPANCHER, v. act. [Epancheman, ché; 1re é fer. 2e lon. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Epanchement, éfusion. Au propre, il ne se dit guère que de la bile. _ Son plus grand usage est au fig. mais cet usage n' est pas fort étendu. "Épanchement de coeur, de joie. = Epancher, verser doucement. "Epancher du vin, de l' huile. Il est peu usité dans le sens litéral. _ Figurément, épancher son coeur, l' ouvrir avec confiance à un ami, etc. = Racine le dit avec le pron. personel.
   Mon coeur pour s' épancher n' a que vous et les Dieux.
Il le dit même des persones; ce qui est une plus grande hardiesse.
   Il s' épanchoit en fils, qui vient en liberté,
   Dans le sein de sa mère oublier sa fierté.
       Brit.
Cela n' est bon que dans la haute Poésie.
Fénélon fait régir à l' actif la prép. de: "Des laboureurs, acablés sous le poids des fruits que la terre épanchoit de son sein. Télém. _ Ce régime fait fort dans cette phrâse. Il ne serait peut-être pas aussi bon dans d' aûtres.
   REM. Epanchement, éfusion (synon.) L' effusion est plus vive, plus abondante, plus continûe que l' épanchement. "Un épanchement de bile cause des incommodités: l' effusion de la bile cause la jaunisse. _ Et au figuré: un coeur sensible cherche à se soulager par des épanchemens: un coeur trop plein cherche à se décharger par des effusions, etc. Voy. les SYNONYMES de M. l' Ab. Roubaud.

ÉPANDRE


ÉPANDRE, v. act. [1re é fer. 2e lon. 3e e muet.] Jeter çà et là, éparpiller, en parlant de l' eau, de la pâille, du sâble, des pièces d' argent, etc.
   Ce fleuve épand ses eaux dans de vertes prairies.
"Épandre du foin, du fumier, du grain, etc. "Les eaux s' épandirent dans la campagne. = Il a vieilli, surtout au figuré.
   Un bruit s' épand, qu' Enguin et Condé sont passés.
       Boil.
  Je ne sais d' homme nécessaire.
  Que celui dont le luxe épand beaucoup de bien.
      La Font.
Répand, vaudrait mieux, surtout dans le premier exemple. Il ne faudrait pourtant pas faire le procès à un Poète, qui aurait besoin de préférer épandre.

ÉPANOUïR


ÉPANOUïR, v. réc. ÉPANOUïSSEMENT, s. m. [Epa-nou-i, iceman: 1re é fer. 5e e muet au 2d.] S' épanouïr, c' est, en parlant des fleurs, s' élargir, s' ouvrir. "Les fleurs començaient à s' épanouir. "Le soleil fait épanouir les fleurs. _ Il est actif, dans cette phrâse proverbiale, épanouïr la rate, réjouir. "Ce conte lui a épanouï la rate. = On dit figurément, son front, son visage s' épanouït, se déride, devient serein. _ Cela ne passe pas le style médiocre.
   ÉPANOUïSSEMENT, Action de s' épanouïr. L' épanouïssement des fleurs. _ Et figurément, épanouissement de rate, du coeur.

EPARGNANT


EPARGNANT, ANTE, adj. EPARGNE, s. f. ÉPARGNER, v. act. [1re é fer. mouillez le g: 3e lon. aux 2 1ers, e muet au 3e, é fer. au dern.] Epargne, ménage dans la dépense. Epargner, user d' épargne. Épargnant, qui épargne. "Il a amassé de grands biens par son épargne. "Aller à l' épargne, épargner, etc. _ Il faut épargner les provisions. = On ne lui épargne pas l' argent. "On n' a pas épargné le poivre dans cette sauce, etc. _ Cet homme est trop épargnant, il est d' humeur épargnante.
   On dit, figurément, épargner sa peine, ses pâs, s' exempter d' agir, de prendre de la peine. Ne m' épargnez pas, employez-moi librement. _ S' épargner du chagrin, l' éviter, le prévenir par sa prévoyance. "Combien alors Lothaire se fût épargné de chagrins, si, etc. Epargnez-moi le chagrin, la douleur la honte de, etc. _ Épargner quelqu' un: ne lui pas faire tout le mauvais traitement qu' on pourrait. "La mort n' épargne persone. "La peste épargna peu de gens. _ Cet homme n' épargne persone: il médit de tout le monde.
   Rem. 1°. Plusieurs, en Provence, prononcent épragne, épragner, parce que telle est la prononciation dans le mot du patois.
   2°. Epargne, s' est dit autrefois pour signifier le Trésor public. Trésorier, billet, Ordonance de l' Epargne: mais dans le temps même qu' il était d' usage en ce sens, il n' était pas convenable de l' employer dans l' Histoire des Anciens Peuples:
   * Le Tribun, à ces mots, plus fortement s' obstine
   À~ dèfendre l' Epargne, ou trouver sa ruine.
       Brébeuf. Pharsale.
Le mot est impropre en cet endroit.

ÉPARPILLER


ÉPARPILLER, v. act. [1re et dern. é fer. mouillez les ll] Épandre çà et là. "Eparpiller de la paille, du foin, de la cendre, etc. = Figurément (et famil.) Ce dissipateur a éparpillé bien de l' argent, il en a beaucoup employé en folles dépenses.

ÉPARS


ÉPARS, ÉPARSE, adj. [1re é fer.] Épandu en diférens endroits. "Les Juifs sont épars dans tous les pays du monde. Nous avons recueilli et réuni ensemble des observations, qui étaient éparses dans un grand nombre de livres.
   REM. * Abadie fait d' épars un participe. On pourrait demander de quel verbe. "Les familles des Cananéens se sont ensuite éparses. Avec un régime, on se sert de répandu ou d' épandu; et sans régime de dispersé. "Ces familles se sont dispersées. Elles se sont répandues ou épandûes en divers lieux.

ÉPATÉ


ÉPATÉ, ÉE, adj. [1re et 3e é fer. long au 2d] Il ne se dit qu' avec verre et nez. "Verre épaté, qui a le pied cassé. "Nez épaté, grôs, large et court.

ÉPAûLE


ÉPAûLE, s. f. [Epôle: 1re é fer. 2e lon. 3e e muet.] Partie du corps de l' homme, qui est double, au haut du tronc ou du dôs, et qui se joint au brâs. "Porter un fardeau sur l' épaule, sur son épaule ou ses épaules. Pousser de l' épaule ou avec l' épaule. _ On le dit~ aussi des animaux. "Epaule de mouton, de veau. "Le sanglier fut blessé à l' épaule.
   ÉPAULE, entre dans plusieurs expressions figurées du discours familier. _ Pousser le temps à, ou avec l' épaule, gâgner du temps, passer le temps comme on peut. "J' atends vendredi avec de grandes impatiences. Voilà comme je suis à pousser toujours le temps avec l' épaule. SEV. "Quand le temps me déplait, je le pousse à l' épaule comme vous. La même. _ Prendre quelqu' un par les épaules, le chasser, le mettre dehors. La Bruyère dit du Prince d' Orange. "Il s' agit de prendre son père et sa mère par les épaules, et de les jeter hors de leur maison. _ L' Acad. dit, mettre dehors par les épaules. = Porter quelqu' un sur ses épaules; être inquiet sur sa fâcheuse situation. Mme de Sévigné l' emploie dans un sens, qui n' est pas tout à fait celui-là, et qu' on sent mieux qu' on ne peut le rendre. Il s' agit d' une des Demoiselles de Grignan, qui s' était retirée dans un Couvent. "Je suis plus fâchée de cette fuite, que je n' en suis surprise. Elle nous portoit tous sur ses épaules: tous nos discours lui déplaisoient. = Regarder par dessus l' épaule, avec mépris. _ Prêter l' epaule à quelqu' un: l' aider, l' apuyer. _ Faire hausser les épaules, faire pitié. "Vous avez un ridicule orgueil, qui fait hausser les épaules à tout le monde. Mol. Voy. LEVER. _ Faire une chôse par dessus l' épaule, ne la point faire. Expression bâsse et populaire. "Il vous payera par dessus l' épaule. = Il n' a pas les épaules assez fortes ou, il a les épaules trop foibles pour cet emploi, pour soutenir cette charge, cette dignité. Il n' a pas assez de bien, de talens, de capacité pour, etc.

ÉPAULER


ÉPAULER, v. act. [épolé: 1re et dern. é ferm. La 2de est douteûse devant la syll. masc. Nous épaulons, j' épaulais: devant l' e muet, elle est longue: il épaûle, épaûlera, etc.] 1°. Rompre ou démettre, disloquer l' épaûle, en parlant des bêtes à quatre pieds. "Il a épaulé ce cheval. "Ce cheval s' est épaulé. = 2°. Figurément, Assister, aider. "Il vous a épaulé: il fut épaulé par plusieurs persones. st. famil.
   ÉPAULÉ, ÉE, "Cheval épaulé, bête épaulée. _ Figurément, Style familier et satirique: bête épaulée, fille déshonorée. "On l' a trompé, on lui a doné en mariage une bête épaulée.

ÉPAULETTE


ÉPAULETTE, s. f. [Épolète: 1re é fer. 3e è moy. dern. e muet.] La partie du corps de jupe, qui couvre le dessus de l' épaule. _ Petite bande de toile, qui est sur l' épaule de la chemise.

ÉPÉE


ÉPÉE, s. f. [1re et 2eé fer. dern. e muet.] 1°. Arme ofensive et défensive qu' on porte à son côté. Porter, tirer l' épée. Mettre l' épée à la main. Se battre à l' épée. Remettre l' épée dans le fourreau, etc. = 2°. L' épée, l' état des gens d' épée. "Homme d' épée. On l' a mis dans l' épée. On lui a fait prendre le parti de l' épée.
   Ce mot fournit à un grand nombre d' expressions familières et proverbiales. = Poursuivre un homme l' épée dans les reins, avec vivacité et impatience d' obtenir ce qu' on souhaite. = Vouloir obtenir une chôse à la pointe de l' épée, ou vouloir l' emporter l' épée à la main, avec hauteur, et non par prières, et par insinuations.
   Rien d' assuré, point de lipée,
   Tout à la pointe de l' épée.
       La Fontaine.
Mourir d' une belle épée, perdre au jeu par un beau coup que fait l' adversaire; périr pour une belle caûse. = Se tuer de la même épée; par les mêmes chôses qui ont fait mourir un aûtre. "Vous ne direz pas aujourd' hui que je vous done un mauvais èxemple (par une trop longue lettre), et que vous voulez vous tuer de la même épée. Sév. = Se blesser de sa propre épée. "M. le Chevalier en eut les yeux rouges en la lisant (cette lettre); et moi je me blessai tellement de ma propre épée, que j' en pleurai de tout mon coeur. La même. = Mettre du côté de l' épée, s' aproprier les chôses, ferrer la mule.
   On dit d' un homme, qu' il se bat de l' épée qui est chez le Fourbisseur, quand il se met en peine d' une chôse, qui ne le regarde point; de celui qui est toujours prêt à se batre, que son épée ne tient point dans son fourreau; de celui dans qui la vivacité de l' esprit nuit à la santé, que l' épée use le fourreau. = Il n' a que la cape et l' épée: il n' a pas de bien. Et si l' on parle d' un ouvrage; il n' a rien de solide. = Quand on manque son coup, on dit que c' est un coup d' épée dans l' eau. = L' épée d' un homme est trop courte, quand il n' obtient pas ce qu' il demandait. _ À~ vaillant homme, courte épée; un homme habile réussit avec les moyens les plus faibles. _ On apèle épée de chevet, tout ce dont on se sert continuellement, un bon ami, etc. Traineur d' épée, un bréteur, un bateur de pavé, qui traîne une longue épée, sans aller à la guerre. = Il se fait tout blanc de son épée, il se vante d' avoir beaucoup de pouvoir, de crédit.
   Rem. Il y a de la diférence entre, mettre l' épée à la main, et mettre la main à l' épée. La première expression marque qu' on tire l' épée tout-à-fait hors du fourreau; et la seconde signifie qu' on se met seulement en devoir de tirer l' épée, ou qu' on ne la tire qu' à demi.

ÉPELER


ÉPELER, v. act. [1re é fer. 2e e muet. _ Dans l' ancien Trévoux on écrit épeler; mais le 2d e étant muet, il ne faut mettre qu' une l, pour ne pas induire à prononcer un é fer. L' Acad. le Rich. Port.l' Abr. de Trév. n' en mettent qu' une. _ Devant l' e muet on en met deux, et alors le 2d e devient moyen. Il épelle ou épèle; il épellera ou épèlera, etc.] Nommer les lettres de l' alphabet, et en former des syllabes en les assemblant l' une avec l' aûtre. On dit à un enfant: épelez ce mot. _ V. n. Il comence à épeler.
   Rem. On doit dire épeler, et non pas apeler les lettres, quoiqu' en dise l' Auteur des Réflexions sur la Langue. L. T.

ÉPERDU


ÉPERDU, ÛE, adj. ÉPERDUMENT, adv. [Épêrdu, dû-e, duman: 1re é fer. 2eê ouv. 3e lon. au 2d.] Eperdu, troublé par la crainte ou par quelque aûtre passion. "Elle acourut toute éperdûe. "Il est éperdu d' amour. = Éperdument, violemment. Éperdument amoureux.

ÉPERON


ÉPERON, s. m. ÉPERONÉ, ÉE, adj. ÉPERONIER, s. m. [1re é fer. le 2d est si muet qu' il ne se fait presque pas sentir: épron, éproné, nié; dern. é fer.] Eperon est 1°. une pièce de fer, composée de deux branches qui embrassent le talon d' un Cavalier, et d' une pointe, rôse ou molette, faite en forme d' étoile, qui avance par derrière, pour piquer le cheval. = 2°. Il se dit de certaines rides qui se voient aux coins de l' oeil des persones qui vieillissent. 3°. De l' ergot que les coqs ont au derrière de la jambe, vers le bâs, et les chiens au derrière des jambes de devant. = 4°. La proûe et la pointe des vaisseaux et galères, qui fait une grande saillie, et avance en mer. On l' apèle aussi cap, avantage et poulaine. 5°. Sorte de fortification en angle sâillant. 6°. Ouvrage de maçonerie terminé en pointe. _ Il se dit sur-tout de celui qui sert à rompre le cours de l' eau devant les piles des ponts, ou sur les bords des rivières.
   ÉPERON se dit au figuré, dans le discours familier. = Il a besoin d' éperon: il faut le presser. = Il a plus besoin de bride que d' éperon, plus besoin d' être retenu que d' être pressé. = Il n' a ni bouche ni éperon; ni sentiment, ni courage. _ On le dit, au propre, d' un cheval qui a la bouche forte, et qui n' est point sensible à l' éperon. = Chausser les éperons à quelqu' un; le poursuivre vivement. = Doner un coup d' éperon jusqu' à un certain endroit; y courir, y aller en diligence. "Donez un coup d' éperon jusque là.
   ÉPERONÉ se dit dans le 1er, le 2d et le 3e sens d' éperon. _ Il est boté et éperoné; tout prêt à monter à cheval. "Coq, chien éperoné. Elle est épéronée, elle a les yeux éperonés: elle a des rides au coin de l' oeil.
   ÉPERONIER ne se dit que dans la 1re acception. Artisan, qui fait ou vend des éperons, des mors, des étriers, etc.

ÉPERVIER


ÉPERVIER, s. m. [1re et dern. é fer. 2e ê ouv. Epêr-vié. _ Nos Anciens écrivaient éprevier. Richelet met l' un et l' aûtre. On ne dit plus que le premier.] 1°. Oiseau de proie. _ 2°. Sorte de filet à prendre du poisson.
   On apèle, proverbialement, mariage d' épervier, celui où la femelle vaut mieux que le mâle. _ D' une buse on ne saurait faire un épervier, ni d' un sot un habile homme.

ÉPHÉMèRE


ÉPHÉMèRE, adj. [Éfémère; 1re et 2e é fer. 3e è moy. 4e e muet.] Qui ne dûre qu' un jour. "Fièvre éphémère, fleur éphémère, animaux éphémères. À~ l' exception de la fièvre éphémère, le plus long accès d' une fièvre intermitente, n' aproche pas de la durée la plus courte des fièvres continûes, proprement dites. Voulonne. = Richelet en fait un substantif. Il a eu un éphémère un peu violent. _ C' est un barbârisme. = Ce mot est aujourd' hui fort à la mode, au figuré: productions éphémères. Sabat. de Castres. _ Ouvrages éphémères, J. J. Rousseau. _ M. l' Ab. Boulogne le dit même des persones: c' est une plus grande hardiesse. "Qu' ils embrassent ce fantôme (de la gloire) ces immortels éphémères. Él. du Dauphin. Et M. Raynal. "Les Flibustiers, peuple éphémère, qui ne brilla qu' un instant. _ Il parait qu' il y a encore de l' afectation à se servir de ce mot, hors du style critique.

ÉPI


ÉPI, s. m. [1re é fer.] Tête du tuyau de blé où est le grain. "Épi de froment, épi de blé, d' orge, etc. "Les bleds sont en épi, montent en épi. = M. de Bougainville écrit épic au sing. et M. Linguet met épics au pluriel. Est-ce le goût de ces deux Auteurs, ou la faute de leurs-Imprimeurs? Je n' en sais rien: mais cette ortographe est contre l' usage; et si elle a quelque fondement dans l' étymologie, il y a long-temps qu' on n' y a plus d' égard. = Le peuple, en certaines Provinces, fait épi féminin. "Les épis sont fort belles, fort haûtes. Il faut dire, fort beaux, fort hauts.

ÉPICE


ÉPICE, s. f. [1re é fer. dern. e muet.] Drogue aromatique, chaude et piquante, dont on se sert pour assaisoner les viandes, comme sont le clou de girofle, la muscade, le poivre, etc. = Aûtrefois on apèlait épices les confitûres. Les plaideurs en faisaient des présens aux Juges; ils ont été convertis en argent; et c' est delà qu' on apèle épices ce qui est dû aux Juges pour le jugement d' un procès par écrit.

ÉPICER


ÉPICER, v. act. [Épicé: 1re et dern. é fer.] Assaisoner avec de l' épice. "On a trop épicé ce pâté. _ Et neutralement: "Ce cuisinier épice trop.

ÉPICERIE


ÉPICERIE, s. f. ÉPICIER, IèRE, s. m. et fém. [1reé fer. 3ee muet au 1er, é fer. au 2d, è moy. au 3e, ceri-e, cié, ciè-re.] Épicerie est un nom collectif, qui comprend non-seulement les épices proprement dites, mais encôre le sucre, le café, le miel, les drogues. "Il trafique en épicerie. "Il fait un grand comerce d' épiceries. = Épicier, Épicière: celui ou celle qui vend des épiceries.

ÉPICURIEN


ÉPICURIEN, s. m. Dans le sens litéral, Sectateur d' Épicure. _ Par extension, voluptueux; homme qui ne songe qu' à son plaisir. "C' est un franc épicurien. = Pluche a voulu distinguer les Épicuriens des Épicuréistes, des Atomistes modernes, qui ont Gassendi à leur tête.

ÉPIDÉMIE


ÉPIDÉMIE, s. f. [1re et 3e é fer. 4e lon. 5ee muet.] Quoiqu' on dise épidimie, dit Ménage, on dit néanmoins épidémique. L' usage a donc changé; car on dit aujourd' hui, constamment et universellement, épidémie. Richelet écrit épidimie; et Trév. a mis l' un et l' aûtre sans remarque. = Terme de Médecine. Maladie populaire et contagieûse. "Il a régné tout l' été des épidémies en plusieurs Provinces. "Cette maladie dégénéra en épidémie. = Depuis peu on l' emploie au figuré. "Il semble que l' épidémie philosophique comence à gagner les Provinces, et que les Candidats, qui y briguent les palmes académiques, suivent l' exemple de ceux qui aspirent à celles de la Capitale. Ann. Lit.

ÉPIDÉMIQUE


ÉPIDÉMIQUE, adj. [Epidémike; 1re et 3e é fer. dern. e muet.] Qui tient de l' épidémie. "Mal épidémique. Maladie épidémique. _ Figurément. "Le délire épidémique, qui faisoit alors tourner toutes les têtes, empêcha qu' un tel éfet ne produisit, même la sensation qu' il devoit causer. Anon.

ÉPIDERME


ÉPIDERME, s. m. [1re é fer. 3e ê ouv. dern. e muet.] La première peau de l' animal, et la plus mince. "Enlever, écorcher, éfleurer l' épiderme.

ÉPIE


ÉPIE, s. f. On l' a dit anciènement pour espion.

ÈPIER


ÈPIER, v. act. [Épi-é; 1re et der. é fer. _ Devant l' e muet, l' i est long: il épîe. Au futur et au conditionel, cet e muet ne se fait presque pas sentir: épiera, épierait. Prononcez épîra, épirè.] Observer quelqu' un et ses actions. "On l' épie depuis long-temps. "On a mis quelqu' un auprès de lui pour épier tout ce qu' il fait. "Vous êtes épié. "Je le fais épier. _ Avec les chôses, pour régime, être atentif à saisir; à profiter de... Epier l' ocasion, le temps, le moment, etc.

ÉPIERRER


ÉPIERRER, v. act. [É-piê-ré; 1re et dern. é fer. r f. 2eê ouv.] Ôter les pierres. "Il faut épierrer les carreaux (d' un jardin) où l' on veut planter des fleurs. "Il y a des champs qu' on ne sauroit épierrer.

ÉPIEU


ÉPIEU, s. m. [É-pieu: 1reé fer. 2e dout. au sing. long. au plur. épieux.] Arme faite en forme de hallebarde, qui sert particulièrement à la chasse du sanglier.

ÉPIGRAMMATIQUE


ÉPIGRAMMATIQUE, adj. ÉPIGRAMMATISTE, s. m. ÉPIGRAMME, s. f. [Épi--gramatike, tis-te, épigrame; 1re é fer. dern. e muet. Il serait mieux d' écrire ces mots avec une seule m.: épigramatique, etc.] Épigramme est une petite pièce de vers, susceptible de toute sorte de sujets, dont le mérite est dans la dernière pensée, qu' on apèle la pointe, et qui doit être vive, nette et juste. Épigrammatique, qui est de la natûre de l' épigramme. Épigrammatiste, celui qui compôse des épigrammes. "Il y a du sel dans cette épigramme. "Cet ouvrage est écrit d' un style épigrammatique. "Les épigrammatistes sont quelquefois licencieux.
   Rem. On a disputé long-tems sur le genre du mot épigramme, les uns le voulant toujours masculin et les aûtres toujours fémin. Ménage d' après Balzac voulait qu' il fût mâle et femelle. Il avouait pourtant qu' il était plus comunément féminin, et qu' il s' en voudrait toujours servir dans ce genre. Il y en avait enfin qui le fesaient féminin, quand l' adjectif précédait une belle épigramme, et masculin, quand il suivait: un épigramme bien aigu. _ Aujourd' hui ce mot est constamment féminin, quoiqu' en dise l' Ab. Vallart.

ÉPIGRAMMATISER


*ÉPIGRAMMATISER, v. act. Néologisme. Faire une épigramme contre... Épigrammatiser les Ministres de la Religion. Journ. de Mons. _ Ce mot pourra être admis dans le style badin et critique.

ÉPIGRAPHE


ÉPIGRAPHE, s. f. [Épigraphe: 1re é fer. dern. e muet.] Ce terme est devenu à la mode, depuis que les Auteurs mettent de courtes maximes, en vers ou en prôse, au titre de leurs ouvrages. "Nous savons enfin votre secret, dit l' Ab. Guénée à Voltaire. Vous l' avez dit, et il est venu jusqu' à nous. Abbé... il m' importe beaucoup d' être lû... et très-peu d' être cru. C' est donc là votre devise, Monsieur... Elle serait bonne à mettre pour épigraphe à la tête de vos ouvrages.

ÉPILEPSIE


ÉPILEPSIE, s. f. ÉPILEPTIQUE, adj. et subst. [Épilèpsi-e, tike: 1reé fer. 3e è moyen.] Convulsion de tout le corps, ou de quelqu' une de ses parties, avec lésion de l' entendement, qui vient par accès de temps en temps. Être sujet à, ou avoir des ataques d' épilepsie. _ Epileptique, qui apartient à l' épilepsie. "Symptôme, convulsion épileptique. _ Subst. en parlant des persones; qui est sujet à l' épilepsie. "Un épileptique perd toute connoissance en un moment.

ÉPILOGUE


ÉPILOGUE, s. m. ÉPILOGUER, v. n. ÉPILOGUEUR, s. m. [Epiloghe, ghé, gheur: 1re é fer. 4e e muet au 1er, é fer. au 2d: l' u devant l' e est muet, il n' est là que pour doner au g un son fort qu' il n' a pas naturellement devant l' e.] Epilogue est la conclusion d' un discours en prôse ou en vers. Il se dit particulièrement d' un poème. "L' épilogue doit être court. "L' épilogue doit résumer les principaux raisonemens d' un discours. _ On dit plus comunément pero--raison. = Épiloguer et épilogueur ne se disent point dans le sens d' épilogue. Ils sont synonymes de censurer, censeur: mais ceux-ci sont de tous les styles; les premiers n' apartiènent qu' au discours familier. "Il épilogue sur tout. "C' est un grand épilogueur.

ÉPINARDS


ÉPINARDS, s. m. pl. [Épinar. Il n' a point de singulier.] Herbage qu' on mange cuit. Plat, tourte d' épinards.

ÉPINE


ÉPINE, s. fém. [1re é fermé, dernière e muet.] Arbrisseau dont les branches ont des piquans. "Haie d' épines. Dans ce champ, il ne croît que des épines. = Épine se dit aussi du piquant même de cet arbrisseau, et d' autres arbres ou arbustes. "Il lui est entré une épine dans le pied, dans le doigt. = Figurément, embârrâs, obstacle, dificultés. "Le monde est plein d' épines. Les épines des sciences abstraites, de la chicane, etc. = Épine du dôs: la suite des vertèbres qui règne le long du dôs de l' hôme et de plusieurs aûtres animaux.
   On dit figurément (style famil.) Être sur les épines, être embârrassé, n' être pas à son aise. _ On dit aussi d' un homme bourru et dificile, que c' est un fagot d' épines. "Je vous ai mandé comme Mme. de Vins m' a écrit joliment sur la jalousie qu' elle a de Mme. de Villars. Jamais vous n' avez vu un si joli fagot d' épines. Sév. "Elle me dit que pour ne point souhaiter mon amitié, il n' y a point d' autre invention que de ne m' avoir jamais vûe: et toute la lettre dans ce goût là. N' est-ce pas un fagot de plumes, au lieu d' un fagot d' épines. = Se tirer une épine du pied: se débarrasser d' un souci, d' une afaire désagréable. "Que ne finissez-vous promptement? Que ne vous ôtez-vous, et à nous, cette épine du pied. Sév. = Il n' y a point de rôses sans épines; point de plaisirs sans peines.

ÉPINETTE


ÉPINETTE, s. f. [Épinète: 1re é fer. 3e è moy. 4e e muet.] Instrument de musique, plus petit qu' un clavecin; mais du même genre. "Jouer de l' épinette.

ÉPINEUX


ÉPINEUX, EûSE, adj. [Épi-neû, neû-ze; 1reé fer. 3e lon.] Qui a des piquans. Arbre épineux. = Il n' est usité au propre, qu' en parlant des arbres. On ne doit pas dire un champ épineux, une terre épineuse, mais un champ plein de ronces, une terre toute couverte d' épines. = L' usage ordinaire de ce mot est au figuré. En parlant des chôses, plein de dificultés, d' embârrâs; question épineûse, négociation épineûse, afaire épineûse. _ En parlant des persones; qui fait des dificultés sur tout. "Homme épineux; esprit épineux. "Il est trop épineux.

ÉPINGLE


ÉPINGLE, s. f. [É-pein-gle: 1re é fer. 2e lon. 3e e muet. _ Dans certaines Provinces on prononce éplingue, mais mal.] Petit brin de fer ou de léton qui sert à atacher, à coifer, et à d' aûtres usages. = On dit, figurément, (stile familier) tirer son épingle du jeu, se retirer d' une afaire. _ Être tiré à quatre épingles; être fort leste et fort ajusté. _ Tuer à coup d' épingles; faire soufrir par des douleurs ou par des mortifications réitérées. _ Epingles se dit de ce qu' on done à une servante pour le service qu' elle a rendu, et de ce qu' on stipule avec un mari en faveur de la femme. "On lui a tant promis; elle aura tant pour ses épingles.

ÉPINGLIER


ÉPINGLIER, IèRE, s. m. et f. [É-pein--glié, gliè-re: 1re é fer. 2e lon. 3e é fer. au 1er, è moy. et long au 2d.] Marchand ou Marchande d' épingles.

ÉPIQUE


ÉPIQUE, adj. [Epike: 1reé fer. dern. e muet.] Il ne se dit que d' un Poème où l' Auteur raconte quelque action héroïque, qu' il embellit de fictions, d' épisodes, d' évènemens merveilleux. "Le Poème épique raconte: le Poème dramatique représente. "L' Iliade, l' Odyssée, L' Énéide, la Jérusalem délivrée, le Paradis perdu sont des Poèmes épiques. Plusieurs pensent que la Pharsale et la Henriade ne sont que des Histoires en vers.

ÉPIQUIE


*ÉPIQUIE, s. f. [On voit dans l' ancien Trévoux épikie, avec un k: mais le qu est plus dans le goût de la langue française.] Vertu par laquelle on se relâche de la rigueur de la loi par principe d' humanité et d' équité naturelle. _ Ce mot est peu usité. Il n' est plus dans les Dictionaires. Il est pourtant utile, et aucun terme ne l' a remplacé. Mais il n' a pas eu le bonheur de plaire à l' usage. _ M. de Bérault de Bercastel l' a employé depuis peu. "Pour les autres (Évêques) quoiqu' ordonés par Majorin, hors du sein de l' Église, le Concile, donant un exemple d' épiquie et de dérogation à la rigueur des lois, leur laissa la liberté de garder leurs sièges, en renonçant à leurs erreurs. Hist. de l' Egl. _ On disait autrefois, user d' épiquie envers: avoir de l' épiquie pour, etc.

ÉPISCOPAL


ÉPISCOPAL, ALE, adj. ÉPISCOPAT, s. m. [1re é fer. le t final du dernier ne se prononce pas.] Episcopat, dignité d' Évêque. Episcopal, qui apartient à l' Evêque. "Il fait honeur à l' épiscopat. Pendant son épiscopat. "Ornemens épiscopaux. Dignité; fonction épiscopale.

ÉPISODE


ÉPISODE, s. m. [Épizode. 1re é fer. dern. e muet.] Action détachée, que le Poète lie à l' action principale. "Les épisodes de la Tragédie sont courts; ceux du poème épique sont plus étendus.
   Rem. Ce mot, pendant long-temps n' a point eu de genre fixe. Aujourd' hui, il est certainement masculin, et ce serait une faûte de le de faire féminin. "L' Épisode de M. Daube est charmante, dit l' Editeur de l' Almanach des Muses en 1772. "Je relève cette petite faûte, dit M. Fréron, parce qu' elle échape souvent dans la conversation à des persones qui, d' ailleurs parlent bien leur langue, et qu' on la trouve même dans des ouvrages écrits par de bones plumes. Ann. Lit.

ÉPISODIER


*ÉPISODIER, v. act. [Épizodi-é: 1re et dern. é fer.] Étendre par des épisodes. Trév. "Épisodier une action. _ L' Acad. ne met pas ce mot.

ÉPISODIQUE


ÉPISODIQUE, adj. [Épizodike.] Qui apartient à l' épisode. "Action épisodique. "Voilà bien de quoi s' ennorgueillir d' avoir cousu quelques scènes épisodiques, qui n' ont d' autre liaison entre elles qu' un froid soliloque de Molière. l' Ab. de Fontenai.

ÉPISTOLAIRE


ÉPISTOLAIRE, adj. [Epistolère: 1re é fer. 4e è moy. et long, 5e e muet.] Qui regarde la manière d' écrire des lettres. "Style épistolaire. "Le genre épistolaire. Il n' a guère d' usage qu' en ces deux phrâses. * Quelques-uns disent, avoir un comerce épistolaire, etc. il faut dire, être en comerce de lettres, etc. Comerce épistolaire n' est pas admis par l' usage. _ M. l' Ab. Sabatier de Castres aplique cet adjectif aux persones. "Le Louangeur Épistolaire, après avoir comparé son hérôs à trois anciens Géomètres, etc. Cela ne peut être bon, ce me semble, que dans le style comique ou satirique. _ Épistolaire ne se dit sérieusement que comme substantif, et en parlant des Auteurs, dont les lettres ont été recueillies. "La seconde partie contient.. Les Epistolaires anciens et modernes.

ÉPISTOLIER


*ÉPISTOLIER, s. m. Ce mot est de l' invention de Ménage: mais cette invention n' a pas été heureuse. "Ce mot parfaitement, dit-il, ne peut être mis avec un comparatif, et moins encôre avec un superlatif, comme l' emploient ceux qui finissent leurs lettres par ces mots: je suis parfaitement votre très-humble serviteur. Cette faûte est très-ordinaire à tous les faiseurs de lettres, et même au grand Épistolier. M. de Balzac. _ M. l' Abé Sabatier de Castres se sert aussi de ce mot. "La réponse la plus honête à de pareils Épistoliers ne devroit-elle pas se borner à ce demi-vers d' Ovide: Nil mihi rescribas. _ Nous répéterons sur ce mot ce que nous venons de dire sur celui d' Épistolaire, apliqué aux persones, dans le même sens, qu' il ne peut être employé que quand on plaisante ou qu' on critique.

ÉPITAPHE


ÉPITAPHE, s. f. [épitafe: 1re é fer., dern. e muet.] Inscription que l' on met, ou qui est faite pour être mise sur un tombeau.
   REM. Les uns, dit Vaugelas, font épitaphe masculin, les autres fém. Mais la plus comune opinion est qu' il est féminin. Ménage est de l' avis de Vaugelas, sur épitaphe, qu' il est des deux genres, mais plutôt fém. que masc. Th. Corn. _ Richelet le dit aussi m. et f.; mais le plus souvent masculin _ P. Corneille lui a doné ce genre.
   Je n' ai plus qu' à mourir; mon épitaphe est fait,
   Et tu m' érigeras en cavalier parfait.
       Suite du Menteur.
Aujourd' hui on ne fait plus ce mot que féminin. "Belle épitaphe. Mettre, graver une épitaphe. _ On dit, proverbialement, d' un homme vigoureux, qu' il fera l' épitaphe du genre humain.

ÉPITALAME


ÉPITALAME, s. m. [1re é fer. dern. e muet.] Sorte de Poésie qui se fait à l' ocasion d' un mariage et à la louange des nouveaux mariés. "Faire un épithalame. "Un épithalame, est un genre d' ouvrage assez insipide. Gresset dit, un épithalame à la glace.

ÉPITHèTE


ÉPITHèTE, s. f. [1reé fer. 3e è moy. 4e e muet: on l' a fait autrefois masc. et fém. Ce dernier genre a prévalu. "Une belle épithète.] Nom adjectif, qui désigne quelque qualité du nom substantif, auquel il est joint. Nuit obscûre, pays froid. _ Un des défauts les plus ordinaires des vers, c' est d' être trop chargés d' épithètes "Voltaire conseille de ne point rimer par les épithètes: ces sortes de rimes rendent les vers lâches et pesans.
   Rem. Quand on joint une épithète à un substantif, il faut qu' elle ajoute quelque chôse au sens. "Ils furent surpris tout-à-coup par une tempête orageûse. Cette épithète orageûse ne parait rien ajouter au sens du mot tempête. On pourrait dire, par une afreûse, ou une violente tempête. Wailly.

ÉPITôME


ÉPITôME, s. m. *ÉPITOMER, v. act. [1re é fer. 2e lon. dern. e muet au 1er, é fer. au 2d] Épitôme, abrégé, précis d' un livre. * Épitomer un livre, le reduire en abrégé. _ Le substantif est aujourd' hui peu usité, et le verbe est entièrement hors d' usage. _ L' Acad. met épitôme sans remarque, et ajoute qu' on disait autrefois épitomer, pour dire, faire un abrégé. _ Epitôme, ne se dit plus que des anciens livres qui portent ce titre. "Épitôme de Trogue Pompée. Épitôme de Baronius. _ On pourrait le dire encôre en plaisantant, ou en se moquant.

ÉPîTRE


ÉPîTRE, s. f. [1re é fer. 2e lon. 3e e muet.] Lettre missive. _ L' Acad. avertit qu' il ne se dit guère que des Lettres des Anciens. "Les Epitres de Ciceron, de St. Jérome, de St. Paul. "Les Épitres canoniques. _ Aujourd' hui on ne le dit presque plus que des dernières. L' on dit les épitres de St. Pierre, de St. Paul, de St. Jean; mais on dit, les lettres de Cicéron, de Pline, de St. Jérôme, de St. Augustin, etc. = Épitre, ne se dit plus que de celles qui sont en vers, les épitres d' Horace, de Boileau, de Rousseau, etc. On ne le dit sérieûsement en prôse qu' avec dédicatoire. Autrement on ne s' en sert qu' en plaisantant ou en se moquant.
   On dit, proverbialement, familier comme les Epitres de Ciceron, parce qu' on done, mal-à-propôs pourtant, à quelques unes des lettres de Cicéron, le titre d' Épitres Familières. Leur vrai titre est, Epistoloe ad Familiares, lettres écrites aux Parens, ou aux Amis. _ C' est ainsi qu' on a apelé Lettres Provinciales, les Lettres écrites à un Provincial, ou plutôt à un homme de Province.

ÉPLORÉ


ÉPLORÉ, ÉE, adj. [1re et 3e é fer. Il est: long à la 3e du fém.] Qui est tout en pleurs. "Je trouvai ses parens tout éplorés. "Elle entra toute éplorée. _ Il se dit surtout des femmes.
   Rem. 1°. Suivant La Touche, on dit épleuré ou éploré. "Ils furent au Palais tout épleurés. VAUG. Quinte-Curce. "Les femmes des principaux Officiers étoient toutes éplorées. D' ABL. Ann. de Tacite. Le premier, ajoute La Touche, est plus du style familier, et le second du style relevé. Cette distinction est inutile aujourd' hui. On ne dit plus épleuré.
   2°. Eploré, se dit absolument et sans régime. Boileau lui fait régir de devant l' infinitif, dans son Ode sur la prise de Namur.
   Cérès s' enfuit éplorée
   De voir en proie à Borée.
   Ses Guérets d' épis chargés.
Qu' on ne le condamne point dans un Poète, à la bone heure: mais ce serait, je crois, une faûte en prôse.

ÉPLUCHEMENT


ÉPLUCHEMENT, s. m. ÉPLUCHER, v. act. ÉPLUCHEUR, EUSE, s. m. et f. [1re é fer. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d, longue au dernier; cheman, ché, cheur, cheû-ze.] Éplucher, c' est ôter ce qu' il y a de mauvais, de gâté dans les herbes, les graines, etc. Épluchement, est l' action d' éplucher. Éplucheur, eûse, est celui, celle, qui épluche. = Celui-ci et le verbe se disent au figuré pour examiner, rechercher curieûsement et malignement. "Eplucher la généalogie, la vie, les actions de quelqu' un "Il est peu de persones, dont on puisse éplucher la vie, sans y trouver quelque tache. _ Dans le Journ. de Mons. on dit sur ces vers de M. de Florian.
   Et de rocs escarpés une chaine terrible
   Garantit ce séjour paisible,
   Et des Aquilons et des Rois.
"Laissons ces éplucheurs de mots, se borner au vice littéraire de ce bisarre raprochement, etc. _ Les Auteurs critiqués donent volontiers ce titre aux Auteurs critiques. Mais dans la plupart des ouvrages modernes il y a autre chôse que des mots à éplucher, à censurer.

ÉPLUCHûRES


ÉPLUCHûRES, s. f. pl. [1reé fer. 3e lon. 4e e muet. _ Il n' a point de singulier.] Les ordûres qu' on ôte de quelque chôse qu' on épluche. "Cherchez dans les épluchûres~: vous y trouverez encore quelque chôse de bon.

ÉPOINTER


ÉPOINTER, v. act. [É-poin-té: 1re et dern. é fer. 2e lon.] Ôter la pointe à quelque instrument. "Epointer un couteau, une aiguille.

ÉPONGE


ÉPONGE, s. f. ÉPONGER, v. act. [1re é fer. 2e lon. 3ee muet au 1re, é fer. au 2d] Plante marine, aride et poreûse, dont on se sert pour nettoyer et laver certaines chôses en la trempant dans l' eau, dont elle s' imbibe fortement. Éponger, nettoyer avec une éponge. "Laver les jambes des chevaux avec une éponge. "Eponger un carrosse.
   Rem. On dit, passer l' éponge sur, éfacer; ce qui se dit sur tout au figuré. "Passer l' éponge sur quelque action: en éfacer le souvenir, l' oublier, n' en parler plus. Cette expression n' est tout au plus que du style médiocre. On ne dirait pas aujourd' hui dans une tragédie, comme a fait Corneille dans Rodogune:
   Sur les noires couleurs d' un si triste tableau,
   Il faut passer l' éponge, ou tirer le rideau.
L' Ab. Coyer faisant parler l' Ab. des Fontaines, dans son Testament Littéraire, a pu lui faire dire. "Je consens de passer l' éponge sur tout ce que j' ai pu écrire de contraire aux vrais sentimens que je consigne ici. Mais Mascaron s' est servi d' une expression trop familière, quand il a dit, dans l' Or. Fun. d' Henriette d' Angl. "Il me semble que ce coeur me reproche... que je ne passe pas assez vite l' éponge sur tous ces traits~ d' Adam corrompu, que Rome payène adore, et que Rome chrétiène déteste. _ Dans le siècle passé on n' était pas aussi délicat et aussi dificile qu' on l' est aujourd' hui sur l' emploi des expressions figurées. = * Montesquieu s' en sert aussi figurément, et d' une manière assez singulière. "Quand la sagesse divine dit au peuple Juif: je vous ai doné des préceptes, qui ne sont pas bons, cela signifie qu' ils n' avoient qu' une bonté rélative; ce qui est l' éponge de toutes les dificultés que l' on peut faire sur les lois de Moïse. Esprit des Lois. N' y aurait-il pas une faûte d' impression en cet endroit, et ne faudrait-il pas lire réponse à toutes les dificultés? Ou bien est-ce une métaphôre hardie? Si c' est le dernier, elle ne sera pas du goût de tout le monde.
   On dit, proverbialement, boire comme une éponge, c. à. d. beaucoup. _ Presser l' éponge, faire rendre gorge à celui, qui s' est enrichi par des voleries. _ Vouloir sécher la mer avec des éponges: tenter des chôses impossibles.

ÉPOPÉE


ÉPOPÉE, s. f. [1re et 3e é fer. dern. e muet.] Genre du poème épique. "L' Epopée demande un génie élevé: le bel-esprit ne sufit pas pour y réussir.

ÉPOQUE


ÉPOQUE, s. f. [Époke: 1reé fer. 3e e muet.] Point fixe dans l' Histoire. L' Epoque du Déluge. "La Naissance de J. C. est l' époque d' où nous començons à compter les années.
   On dit, en style familier et critique, brouiller les époques, confondre les dates: "Un peu plus d' atention, s' il vous plait: vous êtes sujet à brouiller les époques. L' Ab. Guenée à M. de Voltaire.

ÉPOUDRER


ÉPOUDRER, v. act. [é-pou-dré: 1re et dern. é fer.] Ôter la poudre. "Époudrer un tapis, un habit, des meubles, des livres, etc.

ÉPOUFFER


ÉPOUFFER, (s' ) v. réc. [é-pou-fé: 1re et dern. é fer.] S' enfuir secrètement, disparaitre. "Il s' est époufé. _ Ce mot est bâs et populaire.

ÉPOUILLER


ÉPOUILLER, v. act. [é-pou-glié: 1re et dern. é fer. mouillez les ll] Ôter les poux. "Une mère qui épouille son enfant. Un gueux, qui s' épouille.

ÉPOUMONER


ÉPOUMONER, v. act. [1re et dern. é fer.] Fatiguer les poumons. "Ce discours était long: il m' a époumoné. "Je me suis époumoné à faire entendre raison à cet homme. _ Il est du style familier.

ÉPOUSâILLES


ÉPOUSâILLES, s. f. pl. ÉPOUSÉE, s. f. ÉPOUSER, v. act. ÉPOUSEUR, s. m. [é-pou--zâ-glie; zé-e, zé, zeur. 1re é fer. 3e lon. au 1er, é fer. au 2d et au 3e] Épousâilles, se dit de la célébration du mariage; Epousée, de celle qu' un homme vient d' épouser ou va épouser: Épouser, c' est prendre en mariage: Epouseur, celui qui est connu pour avoir envie de se marier, et qui cherche une femme. "Le jour des épousâilles, l' épousée se trouva mal. Celui qui devait l' épouser en eut un grand chagrin. Une mere sage dit: je veux des épouseurs pour ma fille, je ne veux pas des amans. "Ses enfans l' embarrassent, (cette jeune veûve) elle sent très-bien qu' ils écartent les épouseurs.
   REM. 1°. Epouser, se dit au figuré; les autres ne se disent qu' au propre et dans le style simple. _ Épouser les intérêts, les querelles, les opinions d' autrui, les adopter, en faire les siens propres. * Cette expression figurée ne s' étend pas à toute sorte de chôses. Un Auteur moderne dit que: "Le lecteur épouse en idée la situation des Héros fabuleux. Je crains que la métaphôre ne paraisse pas juste à bien des gens.
   2°. Epouser, est neutre en cette phrâse proverbiale, tel fiance, qui n' épouse pas; ce qui s' aplique à d' autres chôses que le mariage. Tel a avancé une afaire, qui ne l' achève pas; et nous l' avons dit quelquefois en travaillant à ce Dictionaire. Hors de cette phrâse, épouser, neutre, est un gasconisme. "Ils ont épousé aujourd' hui: ils épousent demain. Il faut dire, ils se sont mariés, ils se marient. On dit bien s' épouser; mais seulement dans un sens indéfini et absolu. "Ils ont fait longtems l' amour: à la fin, ils se sont épousés. = Un gasconisme encore plus ridicule, c' est de dire qu' un Prêtre a épousé une femme, pour dire qu' il l' a mariée, qu' il lui a doné la bénédiction nuptiale. _ Marier et épouser ne sont rien moins que synonymes.
   On dit, proverbialement, d' une persone ajustée et parée ridiculement, qu' elle est parée comme une épousée de village.

ÉPOUSE


ÉPOUSE, s. f. Voy. ÉPOUX.

ÉPOUSSETER


ÉPOUSSETER, v. act. ÉPOUSSETTE, s. f. [é-pou-ceté, cète: 1reé fer. 3e e muet au 1er, è moy. au 2d; 4e é fer. au 1er, e muet au 2d] Epoussette vieillit, on dit plutôt vergette, qui a le même sens. _ Epousseter, se dit encôre, comme vergeter. "Epoussetez bien ce manteau, ce tapis _ Et au fig. (st. fam.) Batre. "On l' a bien épousseté. "Je l' époussetterai comme il faut.
   Molière retranche l' e muet d' épousseter. _ Je l' épousterai bien.
   Quels que soient les droits des Poêtes, cet exemple n' est pas à imiter, même dans des vers de Comédie.

ÉPOUVANTABLE


ÉPOUVANTABLE, adj. ÉPOUVANTABLEMENT, adv. [Plusieurs écrivent ces mots et les suivans avec un e devant l' n: épouventable, etc. 1re é fer. 3e lon. 5e e muet: table, tableman.] Épouvantable, qui caûse de l' épouvante. "Spectre épouvantable. = Par exagération, étonant, incroyable, étrange, excessif. "L' aideur, faim, douleur épouvantable. = Epouvantablement ne se dit que dans le dernier sens. "Epouvantablement laide.
   Epouvantable, Effrayant, Effroyable, Terrible (synon.) Effrayant est moins fort qu' épouvantable, et celui-ci moins fort que effroyable (quoique épouvanté soit au contraire plus fort qu' effrayé.) Ces trois mots se prènent toujours en mauvaise part: mais terrible peut se prendre en bone part, et suposer une crainte mélée de respect. Ainsi on dit, un cri effrayant, un bruit épouvantable, un monstre effroyable, un Dieu terrible. _ Les deux premiers supôsent un objet présent qui inspire de la crainte; le troisième, un objet qui inspire de l' horreur: le dernier peut s' apliquer à un objet non présent. "La pierre est un mal terrible; les douleurs qu' elle cause sont effroyables; l' opération est épouvantable à voir: les seuls préparatifs en sont effrayans. Encycl. BEAUZ. Synon.
   Epouvantable suit ou précède, au gré de l' Orateur ou du Poète. Désordre épouvantable.
   Quelle épouvantable image
   De morts, de sang, de carnage
   Frape nos regards tremblans?
       Rouss.

ÉPOUVANTAIL


ÉPOUVANTAIL, s. m. [1re é fer. 3e lon. mouillez l' l finale: ai n' y a pas le son de l' e, tail, et non pas tel. _ Il a au plur. épouvantails et non pas épouvantaux.] Hâillon que l' on met au bout d' un bâton dans les chenevières, les champs, les jardins, pour épouvanter et écarter les oiseaux. _ On dit, proverb. d' une persone laide à faire peur, ou d' une chose qui fait peur sans pouvoir faire de mal, que c' est un épouvantail de chenevière.

ÉPOUVANTE


ÉPOUVANTE, s. f. *ÉPOUVANTEMENT, s. m. ÉPOUVANTER, v. act. [1re e fer. 3e lon. 4e e muet aux 2 1ers, é fer. au 3e; te, teman, té.] Epouvante, terreur, peur causée par quelque accident imprévu. * Epouvantement a à-peu-près la même signification, mais il n' est plus du bel usage. Trév. _ L' Acad. ne le met pas. = Epouvanter, causer de l' épouvante. "Causer, doner de l' épouvante. "Jeter l' épouvante dans le pays énemi. Prendre l' épouvante. "L' épouvante l' a pris, l' a saisi. "Ces menaces auroient dû l' épouvanter; mais il ne s' épouvante pas aisément.

ÉPOUX


ÉPOUX, ÉPOUSE, s. m. et f. [E-poû, poû-ze; 1re é fer. 2e lon.] Qui est conjoint par mariage. _ On ne dit guère ces mots que des gens nouvellement mariés, dit La Touche (j' ajoute, et le jour seulement du mariage) ou dans le style relevé. Le peuple dit mon époux, mon épouse. Les honêtes gens, qui ne disent pas Monsieur, Madame, disent, mon mari, ma femme. _ On ne dit qu' au pluriel, les époux. = L' Acad. les met sans remarque. Elle done pour exemples: son époux, son cher époux. "Voilà votre époux, le futur époux, la futûre époûse. Pour les deux premiers, je crois qu' on ne peut les dire qu' en badinant. Les autres sont relatifs à la remarque de La Touche. = Au fig. et dans le style relevé, on dit époux, époûse. On dit que J. C. est l' époux de l' Église, et que l' Église est l' épouse de J. C. On le dit aussi des Vierges consacrées à Dieu. _ Pour St. Joseph, on dit, dans le sens littéral, qu' il est l' époux et non pas le mari de Marie, parce qu' en effet il n' était que son époux.

EPRE


EPRE. La pénultième est toujours longue, excepté dans lèpre.

ÉPREINDRE


ÉPREINDRE, v. act. ÉPREINTE, s. f. [1re é fer. 2e lon. 3ee muet.] Epreindre, c' est presser quelque chose pour en exprimer le jus. "Epreindre des herbes, du verjus. "Faites bouillir ces herbes, ces racines, et épreignez-les: épreignez-en le suc.
   Épreinte n' a qu' un raport éloigné avec épreindre. Il exprime une douleur, causée par une matière âcre, qui done de fausses envies d' aller à la selle. "La bile cause des épreintes.

ÉPRENDRE


ÉPRENDRE (s' ) v. réc. Se laisser surprendre par une passion. Ce verbe n' est usité qu' au participe et dans les temps composés. "Il est épris, ou il s' est épris d' amour pour cette femme. Voyez ÉPRIS.

ÉPREVIER


ÉPREVIER. Voy. ÉPERVIER.

ÉPREUVE


ÉPREUVE, s. f. ÉPROUVER, v. act [É-preû-ve, É-prouvé: 1reé fer. 2e lon. au 1er, 3ee muet au 1er, é fer. au 2d. _ Dans le verbe, ou est long devant la syll. fém. "Il éproûve, éproûvera. _ Quoiqu' on dise preûve et épreûve, on dit prouver et éprouver, et non pas preuver, épreuver; comme on disait autrefois.] Épreûve, expérience qu' on fait de quelque chôse. Eprouver, faire expérience de.... Conaître par expérience. "Faire l' épreûve d' une machine, d' un canon: les éprouver. "J' en ai fait l' épreûve. "Éprouvez s' il vous fera du bien; c' est un remède que j' ai éprouvé. "Éprouver la fidélité de quelqu' un. "Il a éprouvé l' une et l' autre fortune. C' est un homme d' une valeur, d' une fidélité éprouvée.
   À~ l' ÉPREûVE, adv. Il se dit ou sans régime: "Sa vertu est à l' épreuve; ou avec la prép. de: "Cuirasse à l' épreuve du mousquet. "Vertu à l' épreuve de la médisance. "Il est à l' épreuve de tout, à toute épreuve, etc.
   ÉPREûVE, en termes d' Imprimerie, est la feuille d' impression, qu' on envoie à l' Auteur pour en corriger les faûtes avant que de la tirer. Recevoir, corriger une épreûve. _ Il se dit aussi des premières feuilles qu' on tire d' une estampe.
   Rem. 1°. Quoiqu' épreûve et expérience aient à peu près la même signification, on ne dit pas, voir, savoir par son épreûve, comme on dit, savoir, voir par son expérience.
   Je vois, par mon épreuve, avec qu' elle injustice
   Je vous refusois Elpinice.
       Agésilas.
On dit bien, je vois par ce que j' éprouve, par l' épreuve que j' ai faite, etc. mais on ne dit pas, je vois par mon épreuve, etc.
   2°. On dit, adverbialement, à toute épreûve, et nous en avons doné un exemple. La Bruyère a dit, au pluriel, à toutes épreuves, ce qui n' est pas aussi conforme à l' usage. "Avec un esprit sublime, une doctrine universelle, une probité à toutes épreuves, n' apréhendez pas de tomber à la Cour, et de perdre la faveur des Grands, pendant tout le temps qu' ils auront besoin de vous. = On dit, être et mettre à l' épreûve. "Ils ne furent pas à l' épreuve d' une plus longue soufrance. Boss. Cette amitié fut mise à une épreuve, qu' elle eut peine à soutenir. Marm.
   3°. Rollin a dit dans une ocasion, faire épreuve, au lieu de faire preuve, qui était l' expression propre en cet endroit. "Combats d' esprit, où les Orateurs, les Historiens, les Poètes faisoient épreuve de leur habileté. _ Assurément ces Orateurs, ces Poètes, etc. n' allaient pas aux jeux olympiques, pour éprouver leur habileté, mais pour la prouver aux aûtres. Ainsi, je crois qu' il falait dire, faire preûve, et non pas faire épreûve. _ Je serais fort porté à mettre cette méprise sur le compte de l' Imprimeur; mais, de qui que ce soit qu' ait été la faûte, la remarque ne sera pas inutile.
   4°. Éprouver régit quelquefois les persones. "On éprouve un homme pour connoître de quoi il est capable, soit en bien soit en mal. "Il faut l' éprouver "Je l' ai longtemps éprouvé.
   5°. Eprouver régit la conjonct. que avec l' indicatif, si le sens est afirmatif; & avec le subjonctif, si le sens est négatif ou interrogatif. "J' éprouve que la religion est la seule consolation des malheureux. "Eprouvez-vous que ce remède vous ait soulagé. "Je n' éprouve pas qu' il me fasse aucun bien.

ÉPRIS


ÉPRIS, ISE, adj. [Épri, prîze; 1re é fer. 2e lon. au 2d, dont la 3e est un e muet.] L' Auteur des Réflexions, dit qu' on ne se sert guère de ce terme qu' en poésie. Cependant, dit La Touche; M. de Vaugelas, M. Despreaux et plusieurs aûtres Auteurs l' ont employé en prôse. C' est un beau mot, dont on peut fort bien se servir, et sur--tout dans le style relevé. L. T. _ l' Acad. n' en distingue point l' usage; et, en éfet, ce mot est de tous les styles. _ On l' emploie, ou absolument: "Il est fortement épris; ou avec la prép. de: "Il est épris du plus violent amour pour la persone qui le mérite le moins. "Il en est extrêmement épris. "L' objet, dont il est si fort épris, le méprise et le trahit. Voy. ÉPRENDRE.

ÉPRON


ÉPRON, ÉPERON. Suivant Richelet, l' un et l' aûtre se dit. Les aûtres Dictionaires ne mettent qu' éperon, et c' est le seul qu' on écrive. Voy. ce mot.

EPTE


EPTE. Dans cette terminaison, la pénultième est toujours brève: précepte, il accepte, etc. le p doit se prononcer: èpte, è moy.

ÉPUCER


ÉPUCER, v. act. Ôter les puces. "Épucer un chien.

ÉPUISABLE


ÉPUISABLE, adj. ÉPUISEMENT, s. m. ÉPUISER, v. act. [É-pui-zablezeman, zé; 1re é fer. 3e dout. au premier, e muet au second, é fermé au dernier.] Épuiser, c' est tarir, mettre à sec; Epuisable, qui peut être épuisé. Épuisement n' est pas l' action d' épuiser, mais l' état d' un corps épuisé. = L' adjectif ne se dit qu' au propre, et il est peu usité. = Le verbe et le substantif se disent au propre et au figuré. "Épuiser une fontaine. "Les débauches ont épuisé ses forces. "Une grande aplication épuise les esprits. _ Épuiser le trésor public; épuiser une Province d' hommes et d' argent. "Cet Auteur a épuisé la matière: "Il a dit sur ce sujet tout ce qu' on pouvait dire. _ "Les jeûnes et les veilles l' ont jeté dans un grand épuisement. "L' épuisement où il est tombé, ne vient que de ses débauches. "L' épuisement des finances le mit hors d' état de rien entreprendre.
   Rem. 1°. Le réciproque, comme l' actif, a pour régime relatif la prép. de: "Son état s' épuise d' hommes et d' argent. Télém. "Ô faute si légère... comment me parus-tu assez diforme pour épuiser de mon coeur toute la tendresse d' un père. Trad. de Shakespear. Ici le régime est transposé. Ce n' est pas la tendresse qu' on épuise du coeur, c' est le coeur qu' on épuise de tendresse. _ Mais ce régime ne fait pas si bien avec le passif. "Ses modulations expriment le délire d' une âme enivrée de plaisirs, ou épuisée de sentimens.
   2°. S' épuiser régit aussi la prép. en. "Vous vous épuisez en voeux, en sentimens, en soins, en services pour vos parens et vos amis, et vous ne songez seulement pas à prier pour eux. = Il régit encôre la prép. à devant l' infinitif. "Il s' est épuisé à travailler. = L' actif est beau au figuré, avec la prép. sur. "Seigneur, épuise sur nous ta colère en ce monde, pour nous épargner dans l' aûtre. Mais il ne s' unit pas avec toute sorte de mots. Et Racine n' est pas à imiter, quand il dit dans Bajazet:
   O ciel! si notre amour est condamné de toi,
   Je suis la plus coupable, épuise tout sur moi.
   Sans la gêne de la mesure, le Poète aurait dit: épuise sur moi tous tes traits.

ÉPUISANT


ÉPUISANT, ANTE, adj. verbal. "Il faut que l' art s' arrête dans tous les câs, où le secours qu' il se propose d' employer, n' est pas éficacement dirigé contre la caûse épuisante. Voulonne. _ Ce mot n' est pas dans les Dictionaires. Il peut être utile dans les ocasions où cet illustre Médecin l' a employé.

ÉPURER


ÉPURER, v. act. [1re et dern. é fer.] Rendre plus pur. "Il se dit quelquefois au propre, mais plus souvent au figuré. Il faut épurer ce sirop. "Épurer de l' eau bourbeûse, en la filtrant avec du sâble. = Épurer la langue, la rendre plus pure et plus polie. Épurer un Auteur, en retrancher ce qu' il y a de trop libre. _ Epurer son coeur de toute afection terrestre. _ Epurer le goût, le rendre plus pur et plus délicat. = S' épurer: devenir plus pur. "Cette liqueur s' épurera avec le tems. "L' or s' épure dans le creuset, et le coeur dans les aflictions. "L' esprit, les moeurs, le style s' épurent, se perfectionent. Son goût s' est épuré. = Epuré; sentimens épurés, intentions épurées, nobles et détachées de tout intérêt.

EQU


EQU. Dans les mots suivans, la lettre qu se prononce comme k, excepté dans équateur, équation, où l' u a le son de l' ou, et qua se prononce koua: d' équiangle, d' équilatéral, d' équitation, etc. ou l' u et l' i ont chacun leur propre son, et où qui se prononce kui; et enfin d' équestre, où l' u se prononce aussi, ékuèstre.

ÈQUâRRIR


ÈQUâRRIR, v. act. ÉQUâRISSAGE, s. m. ÉQUâRISSEMENT, s. m. [Ékâri, ri-sage, riceman; 1re é fer. 2e lon. 4e e muet au 3e.] Equârrir, c' est tâiller à angles droits. Equârrissage est l' état de ce qui est équârri; équârrissement, l' action d' équârrir. Ainsi, des deux substantifs, le premier a le sens passif, le second le sens actif; et c' est ce qui les distingue, et doit empêcher de les confondre, et d' employer l' un pour l' aûtre. "Equârrir une poûtre, une pierre. "Cette poûtre a quinze pouces d' équârrissage. "L' équârrissement de ce bloc de marbre a doné beaucoup de peine.
   Rem. Quoiqu' on dise une équerre, et non pas une équarre, on dit équârrir, équârrissement, etc. et non pas équérir, etc.

ÉQUATEUR


ÉQUATEUR, s. m. ÉQUATION, s. f. [E-koua-teur, cion: 1re é fer.] L' équateur est un grand cercle de la sphère, également distant des deux pôles. = Équation est un terme d' Astronomie et d' Algèbre.

EQUE


EQUE. Excepté dans Évêque et Archevêque, cette finale est toujours brève: èke, è moy. Bibliothèque, hypothèque, etc.

ÉQUERRE


ÉQUERRE, s. f. [Ékêre; 1re é fer. 2e lon. ê ouv. r forte, 3e e muet.] Instrument servant à tracer un angle droit. "Dresser à l' équerre. "Ce bâtiment n' est pas d' équerre.
   Rem. 1°. * On écrivait aûtrefois équierre, et Boileau a suivi cette ortographe. Fleury dit aussi: "Ils avoient grand soin que tout fût bien uni et bien dressé au plomb et à l' équierre, et au niveau. Moeurs des Israëlites.
   2°. * Quelques-uns font mal-à-propôs ce mot masculin. Ils disent: bâti à faux équerre: c' est à faûsse équerre qu' il faut dire.

ÉQUESTRE


ÉQUESTRE, adj. [l' u se prononce: é--kuès-tre; 1re é fer. 2eè moy. 3ee muet.] Il ne se dit qu' avec statûe, figûre, ordre. "Statûe ou figure équestre, représentant une persone à cheval. Ordre équestre, l' ordre des Chevaliers Romains. _ C' est aussi le second ordre dans la Noblesse de Pologne.

ÉQUIANGLE


ÉQUIANGLE, adj. [é-kui~-angle; et non pas ékiangle: 1re é fer. 2e lon. 3e e muet] Terme de Géométrie. Qui a ses angles égaux à ceux d' un aûtre. "Figures, triangles équiangles.

ÉQUIDISTANT


ÉQUIDISTANT, ANTE, adj. [é-kui-dis--tan, tante: 1re é fer. 4e lon.] Il se dit de ce qui est, dans toutes ses parties, également éloigné des parties d' un aûtre corps. "Les lignes parallèles sont équidistantes.

ÉQUILATÉRAL


ÉQUILATÉRAL, ALE, ÉQUILATèRE, adj. [é-kui-latéral, rale, latère: 1re é fer. 4e é fer. aux 2 1ers, è moy. et long au 3e.] Ces deux adjectifs ont la même origine et paraissent avoir la même signification: mais il y a entre les deux quelque diférence. Le 1er se dit absolument d' un triangle, qui a les côtés égaux. Le 2d est un terme relatif, et se dit des figûres qui ont les côtés égaux à ceux d' une aûtre. "Triangle équilatéral. "Figures équilatères.

ÉQUILIBRE


ÉQUILIBRE, s. m. [Ékilibre: 1re é fer. dern. e muet.] Égale pesanteur de deux corps, comparés l' un à l' aûtre. Trév. État des chôses, qui, étant pesées sont d' un poids si égal, qu' elles n' emportent la balance d' aucun côté. Acad. Cette 2de définition est plus nette et donne une idée plus juste de la chôse. "Cela est en équilibre; fait l' équilibre; mettre dans l' équilibre. "Les fluides tendent à se mettre en équilibre. _ Figurément. "Tenir les Puissances voisines dans l' équilibre. "L' équilibre de l' Europe: le système de l' équilibre n' a été bien dévelopé qu' à la fin du dernier siècle.

ÉQUINOXIAL


ÉQUINOXIAL, ALE, adj. ÉQUINOXE, s. m. [Ekinokci-al, ale, nokce: 1re é fer.] L' Equinoxe est le temps de l' année, auquel le soleil, passant par l' équateur, fait les nuits et les jours égaux. = Equinoxial, ale, qui apartient à l' équinoxe. "Cercle équinoxial. Ligne équinoxiale. _ s. m. L' Équinoxial: l' équateur.

ÉQUIPAGE


ÉQUIPAGE, s. m. [Ékipage: 1re é fer. dern. e muet.] 1°. Train, suite. "Équipage de guerre, de chasse. "Grand, superbe équipage. "Dans cette déroute, il perdit son équipage. "Les équipages de l' armée. "Se mettre en équipage. = 2°. Carrosse et chevaux. "Il a un équipage. "Il est venu avec son équipage. = 3°. L' Équipage d' un vaisseau, ne se dit que des soldats et des matelots. "Le vaisseau a péri, mais l' équipage a été sauvé. "Il y a des vaisseaux de douze cens hommes d' équipage.
   Rem. 1°. Quand on parle d' un carrosse, le mot équipage comprend aussi les chevaux. L' un sans l' aûtre n' est pas un équipage. Ainsi c' est mal parler que de dire: *attelez les chevaux à l' équipage. GASC. CORR.
   2°. Scudéri avait critiqué ce vers du Cid, marcher en si bon équipage; et l' Acad. trouva que l' observateur avait eu raison de dire, qu' il eût été mieux de mettre, en bon ordre, qu' en bon équipage; parce qu' ils allaient au combat et non pas en voyage; mais qu' il avait eu tort de dire que le mot d' équipage était vilain. Sent. sur le Cid. Ce qu' on peut dire, c' est qu' il n' est pas fort noble, et que dans le discours soutenu et le style relevé, en bon ordre vaut mieux, tant pour le voyage que pour le combat. = Équipage est encore moins propre pour exprimer la parûre d' une femme. "Agesilas, dit Rollin, ne changea rien ni à ses repâs, ni à ses bains, ni à l' équipage de sa femme. _ L' Auteur n' entendait par là que l' équipement, la parûre de la Reine; car assurément les Reines Spartiates n' avaient pas de carrosses.
   On dit, proverbialement, l' équipage de Jean de Paris, pour dire, un équipage, un train magnifique; et un équipage de Boheme, (qu' on prononce boame) pour dire, un équipage délabré. = Être en bon ou en mauvais équipage, bien ou mal vétu. "Cet homme est en mauvais, ou, en triste, ou, en paûvre équipage: sa santé, ses afaires sont en mauvais état.

ÉQUIPÉE


ÉQUIPÉE, s. f. ÉQUIPEMENT, s. m. ÉQUIPER, v. act. [Ekipé-e, peman, pé; 1re é fer. 3eé fer. au 1er et au dern. e muet au 2d] Equipée, se dit d' une action, d' une entreprise ou démarche indiscrète, téméraire et qui réussit mal. "Cet écolier, par esprit de libertinage, s' est allé enrôler, ce n' est pas sa premiere équipée. "Cet officier entreprit cette affaire mal à propôs, et cette équipée lui coûta cher. "Il est sujet à faire des équipées, dont il a lieu de se repentir.
   ÉQUIPEMENT, est l' action d' équiper, de pourvoir des chôses, qui sont nécessaires. "L' Equipement d' une flotte, d' un vaisseau. "Equiper un vaisseau, une flotte. = Le substantif ne se dit que des chôses; le verbe se dit aussi des persones. "Equiper un cavalier. "Il a envoyé son fils dans une pension, et il l' a équipé de toutes chôses. "Il lui faut tant pour s' équiper.
   Rem. Quand équiper signifie habiller, il se dit de l' habillement complet. Fontenelle, parlant des cérémonies de l' Initiation, dit: "On vous équipe d' une tunique de lin. _ Ainsi l' on pourrait dire qu' on a équipé un paûvre d' une chemise neûve, ce qui paraitrait ridicule, si on le disait serieûsement. Équiper, ne peut être employé de la sorte que dans le style comique, ou satirique. Dans ce style s' équiper, c' est se parer. "Ma fille, êtes vous folle de vous équiper de la sorte? Savez-vous à qui vous ressemblez? À~ une danseûse de corde. Th. d' Éduc.

ÉQUIPOLLENCE


ÉQUIPOLLENCE, s. f. ÉQUIPOLLENT, ENTE, adj. ÉQUIPOLLER, v. act. [On prononce les deux ll: ékipol-lance, lan, lante, lé: 1re é fer. 4e lon. aux 3 1ers, é fer. au dern.] Équipoller, c' est valoir autant que... Equipollent, qui vaut autant que... Equipollence: égalité de valeur. "Le gain équipolle la perte. "La perte est équipollée au gain. "L' un est équipollent à l' aûtre: le profit est équipollent à la perte. "L' Équipollence de l' un avec l' aûtre.
   À~ l' équipollent, adv. À~ proportion, à l' avenant. Il se dit seul, ou avec la prép. de. Il a perdu mille écus dans cette affaire et les autres à l' équipollent, ou à l' équipollence de ce qu' ils y avaient mis.
   REM. L' Acad. remarque qu' équipollence ne se dit guère que dans cette phrâse, l' équipollence des propositions, pour dire, des propositions, qui reviènent, qui équivalent l' une à l' aûtre. C' est un terme de logique. _ Mais c' est trop restreindre l' usage de ce mot.

ÉQUIPONDÉRANT


*ÉQUIPONDÉRANT, ANTE, adj. Équipollent; c' est un mot de Rousseau le Philosophe. "Article essentiel, article équipondérant à tous ceux qui vous sont contraires. _ Ce néologisme n' a pas fait fortune.

ÉQUITABLE


ÉQUITABLE, adj. ÉQUITABLEMENT, adv. [ékitable, bleman; 1re é fer. 4e e muet.] Équitable, en parlant des chôses, qui est conforme à l' équité. "Jugement équitable. "Cela est ou n' est pas équitable. _ En parlant des persones; qui a de l' équité. "Homme, Juge équitable. "Il y a peu de gens équitables. = Equitablement, d' une manière équitable, avec équité. "Il faut juger équitablement de toutes chôses.
   ÉQUITABLE. Voy. JUSTE. = Cet adjectif suit ou précède le substantif: mais c' est à l' oreille et au goût à lui assigner sa place dans la construction. "Loi équitable, Prince équitable.
   Dieux moins conus par le tonerre
   Que par d' équitables bienfaits.
       Gresset.
  Son équitable austérité
  Soutiendra le foible pupile.
      Rouss.
Il peut y avoir en ce genre, des inversions dures; Equitable loi ne serait pas fort mélodieux; équitable Prince sonerait assez mal, et équitable homme serait insuportable.

ÉQUITATION


ÉQUITATION, s. f. [é-kui-ta-cion, en vers ci-on: 1re é fer.] L' art de monter à cheval. "Dissertation sur l' équitation anciène et moderne. = On le dit aussi depuis quelque temps de l' exercice, ou de l' action de monter à cheval. "L' Équitation est un exercice très--salutaire. _ L' Acad. et le Rich. Port. ne le mettent que dans le 1er sens; Trévoux ne le dit que dans le second. Je crois qu' on peut s' en servir dans tous les deux.

ÉQUITÉ


ÉQUITÉ, s. f. [ékité: 1re et dern. é fer.] 1°. Justice, droitûre: "Avec équité, selon l' équité. En toute équité; contre toute équité. "Homme, plein d' équité, ou, sans équité, qui n' a point d' équité. = 2°. Il signifie aussi la justice exercée, non pas selon la rigueur de la Loi, mais avec un adoucissement raisonable. "Les Juges subalternes sont des Juges de rigueur, mais les Juges Supérieurs peuvent juger selon l' équité.

ÉQUIVALENT


ÉQUIVALENT, ENTE, adj. ÉQUIVALOIR, v. n. [Ékivalan, lante, loar: 1re é fer. 4e lon. aux 2 1ers] Équivaloir, c' est être de même prix, de même valeur. Équivalent, qui équivaut. "Une once d' or équivaut à quinze onces d' argent et plus. "Un héritage équivalent; chose équivalente. = Il est aussi subst. Ofrir un équivalent; des équivalens, etc. = Le verbe régit la prép. à; le substantif peut régir la prép. de; mais l' adjectif s' emploie ordinairement sans régime. "Cela équivaut à ce que j' ai fourni pour vous: "C' est l' équivalent de ce que vous m' avez doné. "Je vous donerai un bijou équivalent.

ÉQUIVOQUE


ÉQUIVOQUE, s. f. et adj. ÉQUIVOQUER, v. n. et réc. [ékivoke, voké] Équivoque, qui a un double sens. Équivoquer, user d' équivoque. S' équivoquer, dire un mot pour un aûtre. "Discours, expression équivoque. _ Action, réputation équivoque. "C' est une équivoque: user, se servir d' équivoques pour tromper. "Il équivoque continuellement. "Il s' est équivoqué. = Le verbe n' est que du style familier, tant au neutre qu' au réciproque. Le substantif et l' adjectif sont de tous les styles.
   I. REM. 1°. Équivoque, substantif, était autrefois des deux genres, témoin la 12e satire de Boileau, le plus mauvais de ses ouvrages.
   Du Parnasse François bisarre hermaphrodite,
   De quel genre te faire équivoque maudite, ou maudit, etc.
Aujourd' hui et depuis longtems le féminin l' a emporté.
   2°. Équivoque, adjectif, suit presque toujours le nom qu' il modifie, du moins dans la prôse; langage équivoque, démarche équivoque. On peut absolument le faire marcher devant en vers, et dans la prôse poétique et oratoire: équivoque langage, équivoque démarche: mais souvent aussi l' inversion serait dure.
   3°. Un Auteur moderne lui fait régir le datif (la prép. à) "Les signes de plaisir, que donent la plupart des Animaux, nous sont équivoques. Du Plaisir. Cela sent le jargon de l' École.
   4°. Ce mot ne se dit que des chôses qui ont raport aux persones; il ne se dit point des personnes mêmes. On ne dit point un homme, une persone équivoque. Cependant le P. d' Orléans l' a employé plusieurs fois en ce sens là dans son livre des Révolutions d' Angleterre. L' Acad. ne dit point cet adjectif des personnes. L. T.
   II. Les équivoques nuisent beaucoup à la netteté du discours, qui est la plus précieuse qualité du langage. Il vaut mieux être long, que d' être obscur. Brevis esse laboro: obscurus fio. Hor. Et il est quelquefois à propôs d' expliquer ce qu' on veut dire, plutôt que de le laisser à deviner. "Je vous défie tous deux d' aimer mieux Me de Grignan, que moi, c' est à dire, que je l' aime. SEV. que moi étoit-là équivoque; car il pouvait signifier, aimer mieux Mde de Grignan que vous ne m' aimez moi, ou l' aimer mieux que je ne l' aime; moi pouvant être également bien le sujet ou le régime du membre de la phrâse. Me de Sévigné, en déterminant le sens qu' elle lui done, ôte l' équivoque. Mais cela ne fait bien que dans le style familier. Dans le discours soutenu, ces paranthèses ne font qu' embarrasser, et il faut alors ôter l' équivoque, en changeant de tour et de construction. _ Il y a aussi une équivoque dans cette phrâse de J. J. Rouss. qui ridiculisant la coutume de haranguer les Princes au berceau, dit: "Les Présidens du Sénat et des Académies commencèrent à composer, raturer, étudier, feuilleter leur Démosthene pour aprendre à parler à un Embryon. Reine Fantasque. Le sens de l' Auteur est pour aprendre à parler eux-mêmes à, etc. Mais ces mots peuvent signifier aussi et signifient plus souvent pour aprendre à l' embryon à parler, et le contexte seul détermine le sens. _ Voy. la conjonction ET.

ER


ER au milieu des mots. Dans plusieurs Provinces on prononce cette syllabe comme s' il y avait un a: on dit vartu, sarge, etc. pour vertu, serge, etc.
   ER, est bref dans Jupiter, Lucifer, Ether, Clerc, Cancer, Pater, Magister, Frater et quelques aûtres, ou noms propres, ou noms étrangers. = Il est bien plus ouvert et long, dans altier, fer, enfer, léger, mer, amer, ver, hiver. = Il est douteux dans les infinitifs; car, si l' r est muette, comme dans aimer Dieu, qu' on prononce aimé Dieu, il est bref; mais si l' r sonne avec la voyelle suivante, comme il le faut dans le vers et dans la prononciation soutenûe, il est long.
   Mais je sais peu louer et ma muse tremblante, etc.
   Rem. Plusieurs Poètes français, parmi les Anciens, suposant que cette r dans les infinitifs se prononce fortement, les ont fait rimer avec des mots, dont l' e final est ouvert.
   Et soufrez que je tâche enfin à mériter,
   Au défaut de Phinée un fils de Jupiter.
       Andromede.
  Que vos droits, sans ma main, ne sont que droits en l' air.
  Ciel!... Allez, et du moins aprenez à parler.
      Attila.
Malherbe employait souvent ces rimes vicieûses, qu' on appelle normandes, parce que les normands, qui prononcent er des infinitifs comme er ouvert, les ont introduites dans la langue. Quitter et vanter, riment chez lui avec Jupiter; aveugler avec clair; philosopher avec enfer. D' autres Poétes du temps de Malherbe, comme Gombaud, Voiture, etc. le pratiquaient de même. Aujourd' hui, on ne le souffrirait pas.

ÉRâBLE


ÉRâBLE, s. m. [1re é fer. 2e lon. 3e e muet.] Espèce d' arbre, du genre de ceux, qui ne portent point de fruit.

ÉRâFLER


ÉRâFLER, v. act. ÉRâFLûRE, s. f. [1re é fer. 2e lon. surtout devant l' e muet, il érâfle, érâflera, etc. 3e é fer. au 1er, lon. au 2d] Érâfler, c' est éfleurer la peau, l' écorcher légèrement. Erafllûre, écorchure légère.

ERAI


ERAI, terminaison des futurs de plusieurs verbes: l' e y est muet; j' aimerai, je ferai, c' est une faûte grossière, et cependant très--comune de le prononcer avec un è moyen, je fèrai, je trouvèrai. _ Ceci est aplicable au futur conditionel terminé en erois. Restaut.

ÉRâILLER


ÉRâILLER, v. act. ÉRâILLûRE, s. f. [Érâ-glié, gliû-re: 1reé fer. 2e lon. mouillez les ll: 3eé fer. au 1er, lon. au 2d.] Erâiller une toile, ou une étofe, c' est la tirer avec éfort, en telle sorte que les fils se relâchent. "On a érâillé cette toile. "Cette étofe est érâillée. _ Par extension, oeuil érâillé, où il parait des filets rouges et dont la paupière est trop ouverte par la violence de quelque fluxion. = Erâillûre, marque qui reste à une toile, ou à une étofe, quand elle est érâillée.

ÉRATER


ÉRATER, v. act. Ôter la rate. Il est peu usité. "On dit qu' on a ératé des chiens, pour savoir s' ils pouvaient vivre sans rate. = * Fig. Ératé, ée, adj. Gai, enjoué, éveillé. "Il est fort ératé, elle est bien ératée. Subst. "C' est un ératé, une ératée. Trév. L' Acad. ne le met point en ce sens, ni le Rich. Port. On dit, proverbialement, ératé comme une potée de souris, qui a beaucoup de gaité.

ERBE


ERBE, finale, dont la pénultième est brève. Herbe, acerbe, etc.

ERCE


ERCE, ERCHE, ont la pénultième toujours brève: comerce, il berce, etc. Perche, il cherche, etc.

ERDE


ERDE et ERDRE, sont brefs aussi: qu' il perde, perdre.

ÈRE


ÈRE à la pénult. longue, l' è y est moyen: père, mère, sincère, il espère, etc.

ÈRE


ÈRE, s. f. [1re è moy. et long, 2e e muet.] Terme de chronologie. Point fixe d' où l' on comence à compter les années. La Naissance de J. C. est l' ère des chrétiens: celle des mahométans, ou aûtrement l' Hégire, c' est la fuite de Mahomet.

ÉRECTION


ÉRECTION, s. f. [Érèk-cion, en vers ci-on: 1re é fer. 2eè moyen.] Institution, établissement. "L' Érection d' un Parlement, d' un présidial; d' une terre en Duché. = Action d' ériger; l' érection d' une statûe, d' un monument.

ÉREINTER


ÉREINTER, v. act. [é-rein-té: 1re et dern. é fer. 2e lon.] Rompre les reins. "Si vous lui mettez un fardeau si pesant, vous l' éreinterez. "Il fit un si grand éfort qu' il s' éreinta. = * On a dit autrefois erréner, ou éréner.

ÉRÉMITIQUE


ÉRÉMITIQUE, adj. Acad. Rich. Port. _ Trév. met hérémitique avec une h, et ç' a été jusqu' à présent l' ortographe la plus comune. _ Vie érémitique, vie que mènent les hermites, les solitaires dans le désert, par oposition à la vie cénobitique, qui est celle des Religieux, qui vivent en communauté. _ Il n' a d' usage que dans cette ocasion.

ÉRÉSIPèLE


ÉRÉSIPèLE ou ÉRYSIPèLE, s. f. ÉRÉSIPÉLATEUX, ou ERYSIPÉLATEUX, adj. [Trév. met le 1er; l' Acad. le 2d, le Rich. Port. du second renvoie au 1er, celui-ci est plus selon l' usage, l' aûtre est plus conforme à l' étymologie; mais peu de persones le disent et l' écrivent.] L' Erésipèle est une maladie qui vient sur la peau, causée par des sérosités âcres, d' où il naît une inflammation ardente. = Erésipélateux, qui tient de l' érésipèle. "Bouton érésipélateux.

ÉRÉTHISME


ÉRÉTHISME, s. m. [1re et 2e é fer. dern. e muet.] Tension violente des fibres. Plusieurs écrivent érétisme sans h. _ M. Linguet l' emploie au fig. "La fièvre, qui consume déja deux des plus grandes Nations de l' Europe, et l' érétisme qui comence à tourmenter les autres, etc. _ La fureur de tirer leurs métaphores des termes d' arts inconus à la plupart des lecteurs, est une maladie des Auteurs de ce siècle. On ne parle et on n' écrit que pour se faire entendre; et c' est une affectation pédantesque que d' employer des termes d' art avec ceux pour qui ce n' est point une honte de les ignorer. Convulsions aurait exprimé à-peu-près le même sens, et aurait été entendu de tout le monde. Un aussi beau génie et un aussi grand Écrivain que M. Linguet, n' a pas besoin de la ressource de ces mots extraordinaires, et certainement il ne les afecte pas. Mais dans sa brillante imagination tout se peint fortement, et il rend les choses comme il les sent.

ERGE


ERGE, a la pénultième brève: verge, serge, etc.

ERGO-GLU


ERGO-GLU. Façon de parler du st. plais. et moqueur, dont on se sert pour se moquer de ceux qui font de grands raisonemens qui ne concluent rien. C' est l' abregé de, ergo glu capiuntur aves, donc on prend les oiseaux avec de la glu; et cela revient à ce que Molière fait dire au Médecin malgré lui: "Et voilà justement pourquoi votre fille est muette.

ERGOT


ERGOT, s. m. [1re ê ouv. On ne prononce point le t final.] 1°. Petit ongle pointu, qui vient au derrière du pied de quelques animaux. "Les ergots d' un coq, d' un chien. _ On dit figur. dans le style familier, être ou monter sur ses ergots, parler avec colère et d' un ton fier et élévé. "Junon.... Dame toujours sur ses ergots Scarr. = 2°. Maladie qui ataque le seigle, et qui en rend le pain très-dangereux.

ERGOTÉ


ERGOTÉ, adj. m. Il se dit du seigle ataqué de l' ergot. "Seigle ergoté, ou blé cornu. = Rousseau lui done une signification~ relative au premier sens d' ergot.
   L~Þaffligé~ Bucéphale,
   Qui saccadé par la bride fatale,
   Se sent encor diffamer les côtés
   Par deux talons de pointes ergotés.
Cela n' est admissible que dans le style burlesque ou marotique.

ERGOTER


ERGOTER, v. n. ERGOTEUR, s. m. [Ergoté, teur; 1re è ouv. 3e é fer. au 1er.] Ergoter, c' est pointiller, disputer et argumenter sur tout, et sans cesse. Ergoteur, pointilleux, qui dispute et pointille sans raison. "Il ergote sans cesse: il ergote sur toutes choses. "C' est un ergoteur importun, insuportable. _ On ne le dit guère des femmes. L' Acad. dit pourtant: c' est une ergoteûse. _ Mde. de B.... emploie le masc. adjectivement. "Le génie ergoteur des Réformés. Hist. d' Angl.

ERGUE


ERGUE. La pénult. est brève: Exergue, vergue, etc.

ÉRIGER


ÉRIGER, v. act. [1re et dern. é fer.] Consacrer, élever. "Eriger une statue, un autel, des trophées, un monument à......à la gloire de.... = Ériger une commission en titre d' ofice, une terre en Duché, etc. = S' ériger en... S' atribuer une qualité, un droit qu' on n' a pas, ou qui ne convient pas. "S' ériger en censeur public, en réformateur, en bel esprit, en Auteur, en diseur de bons mots, etc. etc. _ Voyez FONDER.

ERLE


ERLE. Finale, dont la pénultième est brève: Perle, merle.

ERME


ERME, dans cette terminaison, on prononce brève la pénult: Ferme, il ferme, afferme, etc.

ERMITAGE


ERMITAGE, s. m. ERMITE, s. m. [Trév. écrit hermitage, hermite avec une h, et c' est l' ortographe la plus commune. L' Acad. écrit ces deux mots sans h, et le Rich. Port. l' a suivie.] Ermite, Solitaire qui s' est retiré dans un désert, pour y servir Dieu. Ermitage est l' habitation d' un Ermite. _ Figurément, lieu écarté et solitaire. _ Vivre comme un ermite, mener une vie fort retirée. Voyez HERMITAGE, HERMITE.

ERNE


ERNE, a sa pénultième brève: caverne, citerne, etc.

EROIS


EROIS, terminaison du futur conditionel d' un grand nombre de verbes: j' aimerois, je donnerois, je ferois, etc. Voy. ERAI.

ÉROSION


ÉROSION, s. f. [Ero-zion: 1reé fer.] Terme de Médecine. Action de toute liqueur acide, qui ronge quelque substance. "Les humeurs âcres mangent les chairs par érosion

ÉROTIQUE


ÉROTIQUE, adj. ÉROTOMANIE, subst. f. [Érotike, tomani-e: 1re é fer. pénult. lon. au 2d, dern. e muet dans les deux.] Érotique se dit de ce qui apartient à l' amour, ou qui en procède. "Délire érotique. "Poème, Poète érotique. Vers érotiques. C' est tout l' emploi de ce mot. = Érotomanie, délire amoureux.

ERR


ERR, dans Erreur, terreur, errant, erroné, erra, l' e est presque fermé et bref. Dans terre, guerre, tonerre, il erre, perruque, ferrer, terrein, nous verrons: il est très-ouvert et long. Dans guerrier, terroir, terrible, atterrer, derrière, c' est un son mitoyen, qui rend la syllabe douteûse. D' Olivet.

ERRANT


ERRANT, ANTE, adj. [Ér-ran, rante 1re é fer. 2e lon.] 1°. Vagabond, qui erre de côté et d' aûtre. "Il est errant et vagabond. Chevalier errant. = 2°. Qui est dans l' erreur en matière de foi. "Nos frères errans. Il ne se dit que dans cette ocasion; et substantivement, redresser les errans dans la foi. = On dit proverbialement, d' un homme qui change souvent de demeûre, que c' est un Chevalier errant, un Juif errant. La dernière expression est fondée sur l' erreur populaire, qu' il y a un Juif qui va de ville en ville, et qui sera ainsi errant jusqu' à la fin du monde. D' habiles, ou plutôt de hardis imposteurs, ont abusé de cette erreur populaire, pour tromper les sots et s' enrichir à leurs dépens.

ERRATA


ERRATA, s. m. [Ér-rata: la 1re est un é presque fermé:] Ce terme est emprunté du latin: il signifie faûtes. En français, c' est la liste des faûtes survenûes dans l' impression d' un ouvrage. "Il a fait un errata fort exact. _ Il ne prend point d' s au pluriel. "Les errata des livres sont rârement bien faits.

ERRE


ERRE, s. f. [Êr-re: 1reê ouv. et lon. 2e e muet.] 1°. Train, allûre. Au propre, aller grand' erre, ou belle erre, aller bon train. Au figuré, faire trop grande dépense. C' est le seul emploi de ce mot, qui n' est que du style familier. = 2°. On dit au pluriel, suivre les erres, marcher ou aller sur les erres de: tenir la même conduite que, etc. Et en parlant d' afaires, reprendre les premières erres, les dernières erres, recomencer à travailler sur une afaire, la reprendre où on l' avait laissée. On dit aussi erremens. Voy. ce mot. Celui-ci est même plus usité.

ERREMENS


ERREMENS, s. m. pl. [Êr-reman: 1reé ouv. et lon. 2e e muet.] C' est la même chose qu' erres. Voyez le mot précédent, à la fin. Il ne se dit qu' au figuré, et en parlant d' afaires. Acad. Reprendre les derniers erremens d' une afaire.
   REM. Boileau et Voltaire ne pouvaient soufrir cette expression, apliquée aux persones. "Suivre des erremens, s' écrie le premier, juste ciel! Quelle langue est celle-là? "Quand Bossuet, dit Voltaire, quand Fénélon, Pellisson voulaient signifier qu' on suivait ses anciènes idées, ses projets, ses engagemens, ils ne disaient point: j' ai suivi mes erremens, j' ai travaillé sur mes erremens. Let. à M. l' Abé d' Olivet. _ "Il reprit ses derniers erremens, et leva de nouveau l' étendard de la rébellion. Villaret, Hist. de Fr.

ERRER


ERRER, v. n. ERREUR, s. f. [Ér-ré, reur: la 1re est un é presque fer.] Errer, est 1°. Aller çà et là à l' aventûre. "Errer de côté et d' aûtre: errer par la campagne. = 2°. Se tromper, avoir une fausse opinion. Tous les hommes sont sujets à errer. "Vous errez dans votre calcul. Errer dans les principes, dans le droit, dans la foi. = On a dit au fig. dans le premier sens, laisser errer sa pensée sur un objet, sur un projet, etc. M. Necker a employé depuis peu cette expression, qui est belle, et qui fait image.
   ERREUR, 1°. Fausse opinion "Être, tomber dans l' erreur, sortir d' erreur, revenir de son erreur. Vivre, persister dans l' erreur. "Erreur dans la foi, en matière de foi. "Doctrine pleine d' erreurs, etc. = 2°. Erreurs, au pl. dérèglement dans les moeurs. "Les folles erreurs de la jeunesse. "Il est bien revenu de ses erreurs, etc. = 3°. Faûte, méprise. "Commettre une erreur dans une citation, dans un compte. Erreur de calcul, erreur dans la chronologie, etc.
   REM. 1°. Erreur, était autrefois masc. mais il est depuis quelque temps fém. disait Vaugelas, et si déclaré, que qui le fait d' un aûtre genre, fait un solécisme.
   2°. Errer se dit dans le propre, plus souvent que dans le fig. Erreur, au contraire, ne se dit plus que dans le fig.: on ne l' emploie plus dans le sens propre. Il n' y a d' exception que dans cette phrâse: les Erreurs d' Ulysse. "Si après cela, je fais quelques souhaits, dit Voiture à Mlle. Paulet, c' est qu' à la fin de tant d' erreurs, je puisse avoir l' honeur de vous en entretenir. On dit aujourd' hui courses. "Tels qu' étoient les Israélites, lorsqu' après de longues erreurs, ils mirent enfin le pied dans la terre promise. La Ruë.
   Cet espoir m' a guidé dans mes erreurs diverses.
       P. Folard, Thémistocle.
Ce terme est aujourd' hui suranné en ce sens.

ERRONÉ


ERRONÉ, ÉE, adj. [Er-roné, né-e, 1re é presque fer. 3e é fer. aussi, long au fém.] Il ne se dit point des persones mêmes. Il ne signifie pas, qui est dans l' erreur, mais qui contient des erreurs. On ne dit pas, homme erroné, mais sentiment erroné, opinion, proposition erronée.

ERS


ERS est toujours long, ou à cause de l' ê ouvert: univers, pervers, etc. ou par la natûre du pluriel, dangers, passagers. Dans les premiers on prononce l' r; dans les aûtres on ne la prononce pas.

ERT


ERT, est douteux au singulier, concert, désert, ouvert, etc. et long au pluriel, déserts, concerts, etc.

ERTE


ERTE a sa pénlut. brève, perte, ouverte, alerte, etc.

ERTRE


ERTRE est aussi bref dans sa pénultième, tertre.

ÉRUDIT


ÉRUDIT, adj. ÉRUDITION, s. f. [Érudi, di-cion, en vers ci-on: 1reé fer.] Érudition, grande étendue de savoir: conaissance fort étendue dans toute sorte de littératûre. Érudit, qui a beaucoup d' érudition. "Homme fort érudit, qui a de l' érudition, beaucoup d' érudition.
   REM. 1°. Érudition est assez ancien dans la langue, mais Erudit ne date que de ce siècle. L' Abé du Bos, qui aimait les mots nouveaux, met celui ci en italique, pour montrer qu' il n' était pas encore adopté par l' usage. "Les Commentateurs les plus érudits.
   2°. Les Dictionaires ne donent point de féminin à cet adjectif. On aurait dû lui en doner un, ne fût-ce qu' en faveur de Mde. Dacier, qu' on peut apeler une femme très--érudite.
   3°. Érudit s' emploie aussi substantivement; mais quand il est employé sans épithète, il se prend en mauvaise part. "Ce n' est qu' un érudit. "C' est un érudit de la première classe; plein de mépris pour ce qui est moderne, il estime les choses par le nombre des siècles. Murm. _ Quand il a une épithète, elle en détermine le sens. "Un Savant, nullement versé dans les Humanités Latines et Françaises, n' est qu' un pédant érudit. L' Abé des Font. "Les Dissertations (de l' Abé Anselme) sont plus propres à le faire regarder comme un sage érudit et un bon Litérateur. Sabatier, Trois Siècles, etc. Voyez SAVANT.
   4°. Comme on dit, un homme d' esprit, un Auteur, par analogie, a dit: un homme d' érudition; un aûtre dit: Éclésiastique d' érudition: ce qui vaut encore moins. "Vous m' étonez de m' assurer que ces brébis désobéissantes ont pour protecteurs non-seulement des gens grossiers et débauchés comme eux, mais des Eclésiastiques d' érudition. Let. de M. de Ste. Marthe. On ne pourrait pas même dire des Eclésiastiques d' esprit; encore moins peut-on dire, des Eclésiastiques d' érudition. _ L' Abé Prévot a dit, dans la Traduct. de l' Hist. des Stuarts: "Homme de mérite~ et d' érudition. L' Acad. met aussi pour exemple: il est homme d' érudition; mais cela est un peu diférent, et on ne peut pas conclure de-là qu' on puisse dire, c' est un homme d' érudition, comme on dit: c' est un homme d' esprit.
   ÉRUDITION signifie aussi, remarque, recherche savante, curieûse. "Voilà une érudition très recherchée, mais mal placée.

ÉRUPTION


ÉRUPTION, s. f. [Erup-cion, en vers ci-on: 1re é fer.] En Médecine, évacuation subite et abondante; ou sortie des pustules, boutons, etc. "Éruption de la petite vérole. = En parlant des volcans, sortie prompte et avec éfort. "L' éruption du Vésuve.

ÉRYSIPèLE


ÉRYSIPèLE, ÉRYSIPÉLATEUX. Voy. ÉRÉSIPLèLE, etc.

ES


ES. Cette finale est toujours longue: tu es, progrès, succès, procès, etc. les, des, mes, tes, ses, ces, pronoms et articles; l' e est ouvert: tu ès, lès, dès, etc.

ÈS


ÈS, prép. C' est un mot fait par contraction de la prép. en, et de l' article plur. les: en les. Il n' a plus d' usage que dans, Maître-ès-arts (en les arts), et en quelques locutions qui ne sont en usage qu' au Palais. = On disait aûtrefois, ès mains, ès droits, pour, en les mains, en les droits: Cette façon de parler, qui était aûtrefois si élégante, est devenue si barbâre, que Ménage ne voudrait pas qu' on s' en servit, même au Palais.

ESC


ESC: Il paraitra à plusieurs fort inutile d' avertir que dans les mots qui commencent par cette syllabe, on doit prononcer l' e; mais dans les Provinces méridionales, on trouvera l' avis nécessaire. Plusieurs y prononcent scabeau, scadre, scamoter, etc. au lieu de escabeau, etc. ce qui est une faute grossière.

ESCABEAU


ESCABEAU, s. m. ESCABELLE, s. fem. [Èskabo, bèle: 1re è moy. 3e è aussi moy. au 2d, dout. au 1er: au pluriel elle est longue: escabeaux.] Ces deux mots ont le même sens, mais le 2d est moins usité que le premier. _ Simple siège de bois, sans brâs ni dossier. "S' asseoir sur un escabeau. = On dit, proverbialement, remuer les escabelles; déménager, changer de domicile. Et figurément (style plaisant), on lui a bien dérangé les escabelles, on lui a rompu toutes ses mesûres: on a mis du désordre dans ses afaires. _ Je lui ferai bien remuer ses escabelles; je le ferai changer de situation de fortune.

ESCâDRE


ESCâDRE, s. f. ESCADRON, s. masc. ESCADRONER, v. neut. [Èskâdre, èska--dron, droné; 1re è moy. 2e lon. au 1er.] Escâdre se dit dans la marine, et escadron dans la Cavalerie. En Anglais, on dit, squadron pour les deux; et des Traducteurs de livres Anglais s' y sont mépris, et ont dit, un escadron de dix vaisseaux: barbarisme ridicule.
   ESCâDRE, nombre de galères ou de vaisseaux de guerre sous un même chef. "On arme une Escâdre. "Chef d' Escâdre.
   ESCADRON, troupe de cavalerie, composée ordinairement de quatre compagnies. "Former un escadron. Ataquer, enfoncer, rompre, défaire, renverser, faire plier un escadron.
   ESCADRONER, se mettre en escadron. "Notre Cavalerie escadrone bien. _ On dit que deux troupes escadronent ensemble, pour dire, qu' elles se joignent pour en former un escadron.

ESCALADE


ESCALADE, s. f. ESCALADER, v. act. [Èskalade, ladé: 1re è moy. dern. e muet au 1er, é fer. au 2d.] _ J' ai vu dans des livres scalade. L' imprimeur était aparemment Provençal.] Escalade est l' ataque d' une place avec des échelles. Escalader, c' est ataquer, ou même emporter par escalade. "Ils escaladèrent la place: ils montèrent à l' escalade. "Ils emportèrent le fort par escalade.

ESCALIER


ESCALIER, s. m. [Es-ka-lié: 1reè moy. 3e é fer.] Degré, la partie du bâtiment qui sert à monter et à descendre. "Grand, petit escalier. Escalier à deux rampes. "Le palier, le repôs d' un escalier. "Monter descendre l' escalier.
   Rem. Dans les Provinces méridionales, on dit, les escaliers, pour l' escalier; monter, descendre les escaliers; et l' on dit, un escalier, pour une marche d' escalier, Une Dame disait: j' ai monté (je suis montée) jusqu' au dernier étage de cette maison, j' ai compté quatre-vingt-dix escaliers. Vous devez être bien fatiguée, lui dit-on, car à soixante marches par escalier, c' est cinq mille quatre cent marches que vous avez montées. _ Dans ces mêmes Provinces, on dit aussi, rouler les escaliers, pour dire, tomber en roulant d' une marche à l' autre. Voy. ROULER.
   On dit, sur l' escalier, pour dire, sur le repôs de l' escalier. "Elle m' attendoit au passage; je la trouvai sur l' escalier. Mariv. _ Voy. Degré et Montée.

ESCAMOTER


ESCAMOTER, v. act. ESCAMOTEUR, s. m. [Èscamoté, teur; 1re è moyen, dern. e muet au 1er.] Escamoter, c' est faire disparaitre quelque chôse par un tour de main, sans qu' on s' en aperçoive, comme font les joueurs de gobelets. _ Par extension, il signifie dérober subtilement. "On lui a escamoté sa bourse. = Escamoteur, qui escamote. "C' est un habile Escamoteur. = Filou, qui dérobe subtilement, qui trompe au jeu. = Ces deux mots ne se disent, au figuré, que dans le style familier.

ESCAMPER


*ESCAMPER, v. n. ESCAMPETTE, s. fém. Ces mots sont populaires. "Il escampa, il s' enfuit. "Il a pris de la poudre d' escampette, il s' est enfui.

ESCAPADE


ESCAPADE, s. f. C' est la même chôse qu' échapée; mais il est plus familier. "C' est une escapade d' écolier. "Il est sujet à faire des escapades.

ESCARBILLARD


ESCARBILLARD, ARDE, adj. [Trév. dit escarbillat, Richelet, escarabillat. C' est un mot gascon.] Éveillé, gai, de bonne humeur. "Enfant, drôle, escarbillard. _ Richelet dit que ce mot est tout-à fait du peuple. L' Acad. se contente de dire qu' il est du style familier. _ On dit dans le Dict. de Trév. qu' il se prend quelquefois en mauvaise part, pour un homme un peu escroc. _ On l' emploie aussi substantivement: "C' est un escarbillard: il n' aime que la joie. _ Ce n' est peut-être pas la peine de dire qu' on le dit aussi, mais plus rârement, des femmes.

ESCARBOT


ESCARBOT, s. m. Sorte d' insecte.

ESCARBOUCLE


ESCARBOUCLE, s. f. Espèce de rubis, d' un rouge foncé, qui a beaucoup d' éclat.

ESCARCELLE


ESCARCELLE, s. f. [Èskarcèle; 1re et 3e è moy. dern. e muet.] Grande bourse à l' antique. On ne se sert plus de ce mot que dans ces phrâses proverbiales. "Il a rempli, il a vidé son escarcelle. Mettre la main à l' escarcelle; fouiller dans l' escarcelle.
   Bon homme, c' est ce coup qu' il faut, vous m' entendez,
   Qu' il faut fouiller à l' escarcelle.
       La Fontaine.
  * Bref, il plut dans son escarcelle;
  On ne parloit chez lui que par doubles ducats.
      Idem.
On dit qu' il pleut dans l' écuelle de quelqu' un. Voy. ÉCUELLE. Mais, il pleut dans l' escarcelle ne se dit point, et la métaphore n' est pas juste.

ESCARGOT


ESCARGOT, s. m. Espèce de limaçon. On dit, en style proverbial, fait comme un escargot, contrefait, mal bâti.

ESCARMOUCHE


ESCARMOUCHE, s. fém. ESCARMOUCHER, v. neut. ESCARMOUCHEUR, s. m. [Èskar-mou-cheché, cheur: 1re è moy. 4ee muet au 1er, é fer. au 2d.] Escarmouche est un combat qui se fait en présence de deux armées, par des hommes qui s' en détachent. Escarmoucher, c' est combattre par escarmouches. Escarmoucheur, qui va à l' escarmouche. = Escarmoucher et s' escarmoucher se dit figurément, des disputes de l' école. "Ces deux Docteurs escarmouchèrent, ou s' escarmouchèrent long-temps. Le neutre vaut mieux que le réciproque. _ On dit plutôt se chamâiller.

ESCARPE


ESCARPE, s. f. ESCARPER, v. act. [Ès--karpe, pé: 1re èmoy. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Escarpe est le mur intérieur du fôssé, celui qui est du côté de la place. Il ne se dit que par oposition à la contr' escarpe, qui est le mur oposé. = Escarper un rocher, une montagne, un fôssé; les couper droit de haut en bâs. _ On dit, adjectivement, rocher escarpé, montagne escarpée, rude et de dificile accès. Escarper est l' ouvrage de l' art, escarpé de la natûre. _ Cet adjectif suit toujours le substantif. "Un escarpé rocher est du style de Du Bartas.

ESCARPOLETTE


ESCARPOLETTE, s. f. [Èscarpolète: 1re et 4e è moy. dern. e muet.] Jeu, exercice où l' on se brandille, étant assis sur un bâton ataché de travers à une corde, qui est pendue en quelque lieu haut. = On dit, en style proverbial, qu' un homme a la tête à l' escarpolette, pour dire qu' il est fort étourdi.

ESCâRRE


ESCâRRE, s. f. [Èskâre:r forte: 1re è moy. 2e lon. 3ee muet.] 1°. Croûte noire faite sur la chair ou les plaies. "Il faut atendre que l' escârre tombe. 2°. Ouvertûre faite avec violence. "Le canon a fait une grande escârre dans ce batâillon, dans la murâille de ce bastion.

ESCIENT


*ESCIENT, s. m. [E-cian: 1reé fer.] Ce mot est vieux, et Th. Corneille a dit, il y a près de cent ans qu' il avoit tout-à-fait vieilli. Faire quelque chôse à bon escient, tout de bon, sans feinte. À~ son escient, sciemment, sachant bien ce qu' on fait. = L' Académie ne blâmait point dabord à bon escient. Dans les éditions suivantes, elle a remarqué qu' il vieillit; et depuis qu' elle l' a dit, il doit être devenu bien vieux.

ESCLANDRE


ESCLANDRE, s. m. [1re è moy. 2e lon. 3e e muet.] Ce mot n' est pas du beau style. Accident fâcheux qui trouble le cours d' une afaire, qui fait de l' éclat, et qui est acompagné de quelque honte. "Il est arrivé un grand esclandre dans cette ville, dans ce corps, cette famille.

ESCLAVAGE


ESCLAVAGE, s. m. ESCLâVE, s. m. et f. [1re è moy. 2e lon. au 2d.] Esclâve, est celui ou celle qui est sous la puissance actuelle d' un maître. Esclavage est l' état et la condition d' esclâve. "Un jeune esclâve, une vieille esclâve. "Rude, cruel, dur esclavage. = Ils s' emploient élégamment au figuré: "L' esclavage des passions. "L' amour est un esclavage.
   La Royauté n' est rien qu' un brillant esclavage.
       P. Marion. Cromvel.
Il est esclâve de la faveur, de ses intérêts, de ses passions: il fait, il sacrifie tout pour, etc. "Il est esclâve de tous ceux qui peuvent contribuer à sa fortune. "Il est ou il n' est pas esclâve de sa parole; il est, ou il n' est pas exact à la garder. "On est esclâve auprès de ce maître, dans cette maison; on y est à l' atache, on ne peut s' éloigner, ni faire aûtre chôse.
   Rem. Dans le propre, il est substantif; dans le figuré, il s' emploie adjectivement, ou s' il est employé comme substantif, il semble qu' il ne doit être mis que dans le genre masculin. "Si la rime n' est qu' une esclâve, qui ne doit qu' obéir, dit l' Ab. Du Bos, il en coûte bien pour ranger cette esclâve à son devoir. À~ mon avis, un esclâve, et cet esclâve irait mieux en cet endroit. Au figuré, esclâve n' a point de sexe. = Il se dit non seulement des persones, mais des chôses. "Sous le gouvernement féodal, tout était esclâve ou tyran. Anon. Voilà, pour le propre, esclâve employé adjectivement. "C' est une situation triste pour un Général, de songer qu' il n' a autour de lui que des coeurs aliénés, et qu' il ne peut être servi que~ par des brâs esclâves. Linguet.
   Les procès renaissans, les campagnes désertes,
   Qu' une moisson esclave à regret à couvertes.
       Maisonneuve.
"Une moisson esclâve me paroit une heureuse hardiesse, dit un des Auteurs de l' Ann. Lit. Dans le Mercûre, au contraire, on trouve que ce n' est qu' un abus du terme poétique, que précaire était la seule expression juste, mais qu' elle manquait d' harmonie. On peut ajouter, et de noblesse. Si on ne pouvait donc l' employer dans des vers, que restait-il de mieux à dire que moisson esclâve? Le P. Follard avait dit longtemps auparavant.
   Pour retenir esclave un transport téméraire,
   Ma voix, mes yeux ont feint la haine et la colère.
       Thémistocle.
Cette figûre hardie n' est que de la haute poésie.

ESCLAVITUDE


*ESCLAVITUDE, s. f. Malherbe se servait toujours de ce mot, et ne pouvait soufrir esclavage. Vaugelas, en assurant que celui-ci est beaucoup plus usité, conseille d' éviter l' un et l' aûtre, autant qu' il est possible; et il ajoute qu' il n' est pas le seul de cet avis. Thomas Corneille dit qu' il n' a jamais entendu condamner esclavage, et qu' il l' a toujours cru un bon mot; mais que pour esclavitude, M. Chapelain a grande raison de dire qu' il ne vaut rien du tout, que c' était une des fantaisies de Malherbe, et que persone ne l' a jamais dit que lui. _ Il est probable que ce Poète avait pris ce mot en Provence, où il avait fait un assez long séjour, et où ce terme est encôre usité, parmi le peuple. On peut conjecturer, outre cela, que le besoin d' une rime le lui fit employer dabord, et qu' il continua par entêtement, car il était prodigieusement entêté.

ESCOFFION


*ESCOFFION, s. m. Mot du style burlesque. Coifûre de tête pour les femmes. "Cette femme avoit un drôle d' escoffion. "Elles se battirent et s' arrachèrent leur escoffion.

ESCOGRIFE


ESCOGRIFE, s. m. Ce mot est pûrement burlesque. On ne s' en est guère servi avant 1640. Cirano de Bergerac a écrit escogrif et caïf, dans une boutade de 73 petits vers, tous rimés en if. La Monn. _ Escogrife se dit, 1°. d' un homme qui prend hardiment sans demander. 2°. D' un homme de grande tâille, et mal bâti.

ESCOMPTE


ESCOMPTE, s. m. ESCOMPTER, v. a. [Èsconte, té; 1re è moy. 2e lon. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Escompte est la remise que fait au payeur celui qui veut être payé avant l' échéance. Escompter c' est faire l' escompte. _ On disait aûtrefois, excompte, excompter.

ESCOPETTE


*ESCOPETTE, ESCOPETTERIE. Vieux mots. Le premier se disait d' une espèce de carabine; le 2d de la Salve ou décharge de plusieurs escopettes, fusils, mousquets en même temps. _ Ces mots ne peuvent plus entrer que dans le burlesque.

ESCORTE


ESCORTE, s. f. ESCORTER, v. a. [ès--korte, té: 1re è moy. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d] Escorte est 1°. une Troupe de gens armés, qui accompagnent quelqu' un ou quelque chôse dans un voyage. Escorter, faire escorte, acompagner pour mettre en sûreté. L' escorte d' un convoi, du bagage. "Escorter la caisse militaire. Faire escorte ou servir d' escorte à.... "Je vous ferai escorte, je vous servirai d' escorte. "Il se fait toujours escorter quand il voyage. = 2°. Suite d' une persone de qualité, troupe de courtisans, d' amis ou de persones, qui acompagnent. Trév.Rich. Port. _ L' Acad. ne met pas ce 2d sens. Est-ce par oubli, ou parce qu' elle le condamne? Il semble que l' usage l' admet, qu' on le dit, et qu' on l' écrit sans dificulté. "Je me fais un honeur de grossir votre escorte, de vous escorter.

ESCOUADE


ESCOUADE, s. f. [èskoua-de: 1reè moy. dern. e muet.] Certain nombre de Soldats détachés, comandés par un oficier. On ne le dit plus que du guet à pied. Autrefois escouade était dans l' Infanterie ce que brigade est dans la Cavalerie: une Compagnie était divisée en trois escouades.

ESCOURGÉE


ESCOURGÉE, s. f. [èskour-gé-e; 1re. è moy. 3e é fer. & long. 4e e muet]. Fouet, qui est fait de plusieurs courroies de cuir.

ESCOURGEON


ESCOURGEON, s. m. [ès-kour-jon: 1re è moy. l' e devant l' o est muet: il n' est là que pour doner au g un son doux, qu' il n' a pas devant l' o] Orgehâtive, qu' on fait manger en vert aux chevaux.

ESCOUSSE


ESCOUSSE, s. f. [ès-kou-ce: 1reè moy. 3e e muet]. Prendre son escousse, c' est faire quelques pâs en arrière pour sauter et s' élancer avec plus de force. _ Suivant Trév. il se dit par corruption de secousse. Dans les Provinces méridionales, on dit prendre course et c' est une corruption de langage encôre plus grande. _ Cette expression n' est que du style familier, même au propre; et elle ne peut être employée au figuré que dans le style comique ou critique, ou du moins badin et enjoué. "Ne prenez pas de si loin votre escousse pour être en peine: ne donnez pas à votre imagination la liberté de vous inquiéter. Sév.

ESCRIME


ESCRIME, s. f. ESCRIMER, v. n. ESCRIMEUR, s. m. [Èscrime, mé, meur: 1re è moy. 3ee muet au 1er, é fer. au 2d]. Escrime est l' art de faire des armes. Escrimer, c' est s' exercer, se batre avec des fleurets. Escrimeur, qui entend l' art d' escrimer. "Tours, Salle, Maître d' escrime. Pour le dernier on dit plus ordinairement Maître d' armes (l' Acad.) et encôre mieux Maître en fait d' armes. Trév. _ "Ils escriment tous les jours l' un contre l' aûtre. "Il y a plaisir à voir faire des armes à deux bons Escrimeurs. ACAD.
   Remar. Plusieurs pensent qu' escrimer est vieux dans le propre et qu' on dit plutôt fuire des armes. _ Au figuré il est du style familier, et se dit des disputes, débats, contestations.
   Mais laissons-les entr' eux s' escrimer en repos.       Boil.
S' escrimer de quelque chôse; savoir s' en servir. "Joue-t-il du luth? il s' en escrime un peu. _ Et bâssement, s' escrimer de la mâchoire, manger beaucoup; et burlesquement s' escrimer des armes de Samson, qui défit les Philistins avec une mâchoire d' âne.

ESCROC


ESCROC, s. m. ESCROQUER, v. a. [Ès--krok, èskroké: 1reè moy. 3e è fer.] Fourbe, fripon, qui atrape quelque chôse par impudence, par artifice, soit sous prétexte d' emprunt, soit aûtrement. Escroquer, tirer, atraper quelque chôse par artifice etc. "c' est un Escroc: il m' a escroqué dix pistoles etc. _ Le verbe régit aussi les persones en régime direct (à l' Acusatif). "Il n' y a point de marchand qu' il n' escroque. _ Et neutralement. "Il escroque tant qu' il peut, par tout où il peut. _ On dit d' un Parasite, qu' il escroque des diners.
   Rem. Plusieurs écrivent excroc, excroquer, contre l' usage. "Tous les Citoyens qu' ils auront trompés, abusés, excroqués. M. Linguet, ou plutôt son Imprimeur.

ESCROQUERîE


ESCROQUERîE, s. f. ESCROQUEUR, s. m. [èskrokeri-e, keur. 1re è moy. 3e e muet au 1er, 4e lon.] Escroquerie est l' action d' escroquer. Escroqueur, celui, qui escroque. On dit au fém. escroqueûse.
   Rem. Escroc et escroqueur ont à-peu-près le même sens, mais le 1er se dit toujours absolument. "Gardez-vous des escrocs: le 2d ne se dit qu' avec la prép. de. "Escroqueur de livres, qui les emprunte et ne les rend jamais.

ESPACE


ESPACE, s. m. [èspace: 1reè moy. dern. e muet.] 1°. Etendûe de lieu, depuis un point, jusqu' à un aûtre. "Grand, long espace. "Il n' y a pas assez d' espace. "D' espace en espace. = 2° Il se dit aussi de l' étendûe du temps. "Dans l' espace de six mois, d' un an, etc. = On appelle espaces imaginaires, des espaces, qui n' existent point, et qu' on a cru être hors de l' enceinte du monde. Et l' on dit proverbialement, se promener dans les espaces imaginaires, se forger des visions.
   Rem. Espace est masculin, ainsi qu' intervalle, a dit depuis long-temps Vaugelas, quoiqu' on l' ait fait aûtrefois féminin. Il faut dire un long espace, soit que l' on parle d' un espace de temps, ou d' un espace de lieu, car il se dit de tous les deux; et au pluriel, il en est de même qu' au singulier, de grands espaces et non pas de grandes espaces. * "Ce monument renfermoit une espace très--spacieuse, dit le P. Sicard. Outre le vice du genre, espace & spacieux vont mal ensemble, précisément parcequ' ils se ressemblent trop. C' est comme si l' on disait des grâces fort grâcieuses.

ESPACEMENT


ESPACEMENT, s. m. ESPACER, v. a. [èspaceman, cé; 1re è moy. 3e e muet au 1er é fer. au 2d] Espacement est la distance entre un corps et un aûtre. Il se dit surtout en Architectûre. "L' espacement des colonnes, des solives &c. = Espacer c' est ranger les chôses de telle manière qu' il y ait entr' elles l' espace nécessaire. Espacer des arbres. "Ces arbres n' ont pas été bien espacés. "Colones bien espacées. = On le dit particulièrement des lettres, des mots et des lignes dans l' Imprimerie.

ESPADON


ESPADON, s. m. ESPADONER, v. n. [Éspa--don, doné; 1re è moy.] l' espadon est une grande épée à~ deux mains. Espadoner, se servir de l' espadon. "Il espadone bien. _ * Le peuple, en certaines Provinces (et par raport à la Langue le sens de ce mot a une grande étendue) dit espadron, espadroner.

ESPALIER


ESPALIER, s. m. [èspa-lié; 1re è moy. 3e é fer.] Arbre qu' on ne laisse pas croître en plein vent, et qu' on atache à la murâille, auprès de laquelle on l' a planté, de manière que ses branches prènent la forme d' un évantail.
   ESPALIER, v. a. [Èspa-li-é; 1re è moy. 4e é fer. _ Dans le Substantif, lier n' est que d' une syllabe: dans le verbe il est de deux syllabes.] Mettre des arbres fruitiers en espalier.

ESPALMER


ESPALMER, v. a. Enduire de suif fondu & d' aûtre composition le dessous d' un Vaisseau. On le dit particulièrement d' une Galère. Trév. Acad. _ Le Dict. de Trév. ajoute qu' on dit aussi carener; mais celui-ci exprime une opération, dont l' action d' espalmer n' est qu' une partie.

ESPATULE


ESPATULE, s. f. Dans le Dict. de Trév. on dit ce mot et d' une plante purgative et d' un instrument de chirurgie. L' Acad. et le Rich. Port. ne le disent que de la 1re et pour le 2d, ils disent Spatule et c' est ainsi qu' il faut dire. On dit en éfet avec la spatule et non pas avec l' espatule. Celui-ci est un gasconisme. VOY. Spatules sous la lettre S.

ESPèCE


ESPèCE, s. f. [1re et 2eè moy. 3e e muet.] 1°. Terme de Logique. Ce qui est sous le genre, et contient sous soi plusieurs individus. Ainsi dans cette phrâse, animal raisonable, ou irraisonable, animal est le genre, qui contient les deux espèces, le raisonnable, qui est l' homme, et l' irraisonable qui comprend les aûtres sortes d' animaux. "L' espèce la plus parfaite des animaux c' est l' homme. = 2°. Sorte. Il ne se dit sérieûsement que des chôses: quelle espèce de drap, de cheval est ce là? Des poires, des pommes d' une belle espèce. _ On ne le dit des hommes qu' en critiquant et en se moquant. "Quelle espèce d' homme nous avez-vous amené là? C' est une pauvre espèce d' homme, ou absolument, une paûvre espèce. "On prétend que c' est un homme, qui n' a jamais eu de chagrin: je voudrais voir une espèce si râre. Volt.
   À~ moi les proposer! Hélas! ils font pitié
   Voyez un peu la belle espèce!      LA FONT.
Que diable voulez-vous? quelqu' un, qui me conseille
  De m' empêtrer ici d' une espèce pareille,
  M' aime-t-il?....            Gresset, Le Méchant.
On dit aussi, une espèce de valet de chambre; une espèce de Demoiselle de compagnie, pour dire quelqu' un qui avait la mine de etc. une fille qui avait l' aparence de etc. _ On dit encôre, adverbialement, de nouvelle espèce, ou d' espèce nouvelle: le 1er est plus du style simple, et l' aûtre du style badin ou plaisant et critique. "C' est un Sage de nouvelle espèce; un Philosophe d' espèce nouvelle. "Vous aimerez, je crois, la manière, dont ce méchant d' espèce nouvelle, trace le portrait de son maître. Ann. Litt.
   3°. Au pluriel, espèces, les diverses pièces de monoie. "Tant en billets et tant en espèces. "Payer en espèces sonantes. "Je ne veux pas des éfets négociables, je veux des espèces, de l' argent. = Dans le Sacrement de l' Eucharistie, les aparences du pain et du vin. = Dans la vieille Philosophie, les images, les représentations des objets sensibles. "Cette mémoire, qui avoit été si prompte, si présente, vint toute vide des espèces et des images du siècle. Fléchier. "C' est la crèche où le Sauveur envelopé de drapeaux et d' espèces etrangères, est adoré des Rois, aussi bien que des Bergers. La Rue. _ Il est suranné en ce sens: espèces pour aparences ne s' est conservé qu' en parlant de l' Eucharistie; et pour images, il ne se dit plus que dans cette phrâse du style familier, brouiller les espèces, confondre les idées. "Toutes les Filles de la Reine furent chassées hier, on ne sait pourquoi. On soupçone, qu' il y en aura eu une qu' on aura voulu ôter, et que, pour brouiller les espèces, on aura fait tout égal. Mme. de Sevigné. Son fils dit, dans le même sens, confondre les espèces. "Les États nous vont tellement confondre les espèces, que je ne pourrai profiter du temps qu' elle (ma mère) sera encôre en Bretagne.
   Rem. 1°. Je pense qu' on doit dire, de toute espèce au singulier, et de toutes les espèces au pluriel, comme de toute sorte et de toutes les sortes; en tout genre et dans tous les genres. Il me parait que ç' a été toujours l' usage le plus commun et le plus autorisé, comme le plus raisonable. Depuis quelque temps il comence à changer, et plusieurs Auteurs disent de toutes espèces, en tous genres, etc. _ Pour moi j' aimerai toujours mieux dire, de toute sorte, de toute espèce, comme de tout état, de toute condition. La raison est que tout équivaut à un pluriel: qui dit tout n' excepte rien; et que les noms employés sans article, le sont dans un sens indéfini, qui, suivant l' analogie, demande le singulier. Quand l' article le modifie, il est bien force alors d' employer le pluriel. "Des vaisseaux de toute espèce. "Des marchandises de toutes les espèces. Voy. SORTE et TOUT. = De toute espèce doit suivre le nom qui le régit, et non pas le précéder. On doit dire, par exemple. "Il y a des arbres fruitiers de toute espèce; et non pas, comme dit un Auteur moderne: "Il y a de toute espèce d' arbres fruitiers. = Au nominatif, on dit toute sorte, on ne dit pas toute espèce. "Le terroir est fertile, (chez les Chinois) Toute espèce de légumes y réussiroit, etc. Let. Edif.
   Rem. 2°. Quand espèce est joint à un nom substantif qu' il régit au génitif, il est plus convenable de faire accorder l' adjectif, qui doit modifier, avec ce substantif qu' avec le mot espèce. Fontenelle dit, dans l' Eloge de Mr. Hartsoeker, que "les Hollandois lui firent dresser une petite espèce d' observatoire. Il me semble qu' une espèce de petit observatoire aurait été mieux. Ainsi l' on dira, une espèce de gros bâton et non pas une grosse espèce de bâton.

ESPÉRANCE


ESPÉRANCE, s. f. ESPÉRER, v. act. et n. [1re è moy. 2e é fer. 3e lon. au 1er, é fer. au 2d.] Ces deux mots expriment l' atente d' un bien qu' on desire et qu' on croit qui arrivera. "Espérer une succession, une meilleûre fortune. "L' espérance d' une meilleure fortune, d' une succession. Avoir espérance, se nourrir d' espérance. Vivre d' espérance, ou en espérance. Mettre son espérance en Dieu; espérer en Dieu. Perdre espérance, ou l' espérance, ou toute espérance. * Jeune Prince de grandes espérances. L' usage est pour le singulier, de grande espérance. Avec le v. doner, on met le pluriel, qui donait de grandes espérances.
   I. REM. 1°. Espérance a un sens actif: il se dit de celui, qui espère et non pas de celui de qui ou en qui l' on espère. C' est donc un latinisme que de traduire, comme a fait M. d' Alembert. "Si quos spes me‘, si quos propinquus sanguis... movebat. "Ceux que les liens du sang et mes espérances m' ont attaché. Il fallait dire, ceux, qui fondaient sur moi des espérances. Journ. de Litt. Mes espérances, ne peut s' entendre que de celui, qui parle, et non de ceux, dont il parle. Si l' expression était française, il faudrait dire, en parlant de ceux-ci, les espérances en moi, qui a un tout aûtre sens que mes espérances.
   2°. Espérance, régit de devant les verbes comme devant les noms. "L' espérance de réussir le soutient dans ses travaux. Avec ce régime pourtant, espoir vaut mieux.
   3°. Espérance, se dit quelquefois des persones, pour, sujet d' espérance, comme consolation, terreur. "Dieu est notre espérance. "Il est l' espérance et la consolation de sa famille. "Il est la terreur de ses Énemis.
   II. Espérer, est quelquefois neutre, et il régit en et de. Avec le 2d régime il est actif. "Espérer en Dieu. "J' espère en vous; en votre Justice. "J' espère tout de votre bonté. "On espérait de lui de grandes chôses. = Il régit aussi ordinairement l' infinitif sans préposition. "J' espère gagner mon procès, et non pas de gagner. J' espère revenir et non pas de revenir. Corn. Acad. Cependant quand espérer est à l' infinitif, il faut mettre de devant l' infinitif, qui suit. "Puis-je espérer de l' obtenir. Ibid.
   2°. Il ne faut pas confondre espérer avec atendre, et les employer indiféremment l' un à la place de l' aûtre, comme on fait assez mal à propos, dans les Provinces méridionales sur tout, où l' on dit: * Je vous esperais, pour je vous atendais, et ce qui est pis encôre; * Il s' espère tous les jours, pour, on atend tous les jours son arrivée. Mde de B... dit (Hist. d' Angl.) on espérait à toute heure le passage du Roi. Atendait, était là le mot propre, le seul qu' il falut employer. = Espérer, renfermer l' incertitude de la chôse même, atendre ne désigne que l' incertitude du temps, où une chôse assurée arrivera. "J' espère que vous viendrez: j' atends que vous veniez. = Il semble aussi que ce qu' on espère, soit plus une grâce ou une faveur, et que ce qu' on atend soit plus une chôse de devoir et d' obligation. Ainsi nous espérons des réponses favorables à nos demandes, et nous en atendons de convenables à nos propositions. GIR. synon. Voy. ATTENDRE. Suivant M. l' Ab. Roubaud, on espère un bien incertain, et l' on attend une chôse ou nécessaire, ou probable: on espère ce qui peut arriver: on attend ce qui doit arriver. Nous espérons de la bonté divine des grâces, ce qui peut être refusé: nous attendons de la Justice divine le prix de nos oeuvres, ce qui est dû. L' espérance nait du desir, et la crainte la contrebalance: l' attente nait de l' opinion, et elle peut être exempte de desir et de crainte. "Le vrai chrétien espère la sainte mort qu' il désire et qu' il craint de ne pas obtenir. Le Philosophe (dit qu' il) attend la mort sans la désirer ni la craindre. Synonymes Français. = Enfin atendre régit les persones et les chôses; espérer ne régit que les chôses en régime direct (à l' accusatif.) Mde de Sévigné a dit, il est vrai. "Je lis, je me promène, je vous espère; et elle a dit très-bien; mais c' est par Ellipse. Je vous espère, signifie là, je m' ocupe de l' espérance de vous voir bientôt. Il ne signifie pas, je vous atends, car elle n' atendait pas encore sa fille.
   3°. Espérer, régit quelquefois la prép. à. "Mandez-moi bien des nouvelles de M. le Chevalier. J' espère au changement de climat, à la vertu des eaux, et plus encôre à la douceur consolante d' être avec vous et avec sa famille. Sév. "Malheureûse, mon Dieu, de n' avoir pas mis en vous mon unique espérance, et d' avoir pu espérer à la vanité et au mensonge. Mascar. _ L' Acad. ne met d' exemple que de la prép. en.
   4°. Le que après espérer régit le futur, quand la phrâse est afirmative, et le subjonctif, quand elle est négative ou interrogative. "J' espère que vous le ferez: je n' espère pas que vous le fassiez. Espériez vous que je le fisse? _ * On lit dans le Mercûre sur l' Éloge de M. Le Maréchal du Muy: "Quelles que soient la force et l' évidence de ces Réflexions, il ne faut pas espérer qu' on les verra adoptées dans les Cours. Il faut dire qu' on les voie, etc. _ Dans le sens interrogatif, on peut mettre assez indiféremment le futur ou le subjonctif; Espérez-vous que je le fasse, ou que je le ferai? Espérait-il que je vinsse ou que je viendrais lui demander pardon? Mais dans le sens négatif il faut toujours mettre le subjonctif.
   5°. Espérer, se raportant au passé ou au présent est un anglicisme. Les Anglais disent: j' espere que vous ne l' avez pas dit; j' espère que vous en êtes persuadé. Mde de Sévigné et Malebranche ont employé cette façon de parler. "J' espère que Pauline se porte bien, puisque vous ne m' en parlez pas. Sév. "L' erreur des Libertins et des Hérétiques vient... de ce qu' ils espèrent que les vérités de la foi se peuvent conoître avec évidence. Espérer n' était pas là le terme propre: l' Auteur devait dire: pensent ou croient que, etc. Espérer, ne porte à l' esprit que l' idée d' une chôse futûre. Pour les choses présentes on dit croire, penser, se flater que. "Je crois que Pauline se porte bien. "Je me flatte que vous en êtes persuadé. "J' aime à penser que vous le croyez et non pas j' espère que vous le croyez. _ Cet anglicisme est aujourd' hui à la mode: mais en France les modes ne dûrent pas. Voy. ESPOIR, Rem. n°. 2°.
   6°. J' espère, termine quelquefois la phrâse, et se dit pour, je l' espère; mais c' est seulement dans le style familier. "Je me flate que la méprise sera détruite sans retour: mais voici une dernière raison, qui n' y laissera plus lieu, j' espère. LINGUET. C' est comme s' il y avait, à ce que j' espère.

ESPIèGLE


ESPIèGLE, adj. et subst. ESPIèGLERIE, s. f. [1re et 2e è moy. 3ee muet, 4e lon. au 2d] Espiègle, vif, éveillé. Espièglerie, tour d' espiègle. Ils ne se disent que des enfans. "Il est espiègle, c' est un espiègle. "Il fait tous les jours de nouvelles espiègleries.

ESPION


ESPION, s. m. ESPIONER, v. act. [ès--pion, pio-né: 1re è moy.] Espion, est celui ou celle qui épie, qui fait le métier d' épier. Espioner, c' est servir d' espion. "Entretenir des espions. "Ce Prince, ce général dépense beaucoup en espions. "Il vous sert d' espion auprès de... "Elle est l' espion du quartier. _ "On vous espione de tous côtés. _ Et neutralement. "Il ne fait qu' espioner. "C' est un vilain métier que d' espioner.
   On dit, proverbialement, de celui, qui n' est pas bien averti de ce qu' il lui importe de savoir, qu' il ne dépense pas beaucoup en espions.

ESPLANADE


ESPLANADE, s. f. [1re è moy. dern. e muet.] Espace uni et découvert au devant d' un lieu bâti, au devant d' une place fortifiée. "Devant la citadelle de Montpellier il y a une grande esplanade. "On a fait une grande esplanade au devant de la Place, pour découvrir de plus loin.

ESPOIR


ESPOIR, s. m. [Es-poar: 1reè moy. _ Il n' a point de pluriel. On dit à plusieurs persones comme à une seule, votre espoir et non pas vos espoirs.] Espérance. Suivant Bouhours, on peut se servir d' espoir en prôse comme en vers, excepté quand on parle de la 2de vertu Théologale, car alors il faut dire Espérance. Suivant La Touche, espoir est meilleur en poésie qu' en prôse. L' Acad. le met sans remarque. Nous croyons que l' opinion de Bouhours est la mieux fondée, mais qu' espoir est plus du discours soutenu que du style familier. "Espoir trompeur: vain espoir. "Je n' ai d' espoir qu' en vous, etc. Suivant M. l' Ab. Roubaud, l' espérance s' étend sur tous les genres de bien que nous désirons d' obtenir: l' espoir s' adresse proprement à cette sorte de biens, dont nous désirons le plus ardemment la possession, et dont la privation serait pour nous un malheur. Vous parlez d' espoir, lorsqu' il s' agit de votre salut, de votre vie, de votre bonheur, de votre fortune, etc. Vous parlez d' espérance et vous ne parlez pas d' espoir, lorsqu' il ne s' agit que d' un objet agréable, ou simplement utile, etc. _ Vous trouverez généralement l' espoir apliqué à de grands objets, tandis que l' espérance s' abaisse jusqu' aux plus petits Synonymes Français.
   REM. 1°. Espoir régit de devant les noms et les verbes. "L' espoir de la récompense ou d' être récompensé anime les hommes dans leurs travaux.
   2°. Le sens propre d' espoir ne regarde que des chôses, qui sont à venir. Racine l' aplique à des chôses présentes.
   ...Me cherchiez-vous, Madame,
   Un espoir si charmant me seroit-il permis?
Pour mieux comprendre le défaut de propriété dans l' emploi de ce mot, il n' y a qu' à mettre la phrâse en prôse. "Madame, me seroit-il permis d' espérer que vous me cherchiez? On sent que croire étoit le terme propre. D' OLIV. _ C' est l' anglicisme que nous avons relevé au mot Espérer. Rem. n°. 5°.

ESPONTON


ESPONTON, s. m. Demi-pique que portaient aûtrefois les officiers d' Infanterie.

ESPRIT


ESPRIT, s. m. [èspri: 1reè moy. le t final ne se prononce pas.] 1°. Substance incorporelle. "Dieu est un pur esprit. "Le St. Esprit, la 3e Persone de la très-Sainte Trinité. Les Esprits bienheureux, les Esprits célestes. = 2°. L' âme de l' homme. "L' esprit est plus noble que le corps. Rendre l' esprit, mourir. = 3°. Les facultés de l' âme raisonable. "Cultiver son esprit. "Apliquer, exercer, ocuper, employer son esprit à... "Cela me fatigue, me choque l' esprit, etc. "Netteté; justesse, élévation d' esprit. = 4°. Facilité de l' imagination, de la conception. "Il a beaucoup d' esprit. "Avoir l' esprit vif, brillant, fécond, ou pesant, lourd, bouché, stérile. _ On le dit aussi absolument. "L' esprit est si commun dans ce siècle, qu' il n' y a plus de mérite à en avoir MARIN. N' avoir pas l' esprit de... "Il n' a pas eu l' esprit de répondre, etc. J' ai eu l' esprit de m' en dispenser. SÉV. 5°. Vertu, puissance surnaturelle. "L' esprit de Dieu. "L' esprit du Démon. "L' esprit de Prophétie = Le motif ou la manière d' agir; Esprit de charité, de paix, ou de vengeance, de faction, etc. = 6°. L' humeur, le caractère. "Esprit doux, souple, commode ou fâcheux, turbulent, factieux, etc. _ Il se dit en ce sens, et par raport aux talens, de la persone même. "C' est un bon esprit, un des meilleurs esprits du Royaume. "Un bel--esprit, un esprit fort, etc. = 7°. Le sens d' un Auteur. "Vous n' avez pas pris l' esprit de cet Auteur; ou le caractère de son génie, de son style. "Il a voulu imiter cet Auteur, mais il n' en a pas pris l' esprit. = 8°. En Chimie, fluide très-subtil, ou vapeur très-volatile. "Ésprit de vin, de soufre, de vitriol etc. = 9°. Esprits au pluriel se dit surtout des esprits animaux, dont parlent encôre ceux-là même, qui n' y croient plus. La Bruyère dit: "Le Philosophe consomme sa vie à observer les hommes, et il ûse ses esprits à en démêler les vices et le ridicule. _ S' il avait dit: il ûse son cerveau ou son esprit, cela n' aurait pas été si plaisant. = Hors de là, esprit ne s' emploie ordinairement qu' au singulier, du moins dans la prôse. En vers on l' emploie au pluriel pour, âme, coeur, persone.
   L' excès de la douleur acâble mes esprits.
       Rac. Beren.
  Hélas! de quelle horreur ses timides esprits
  Ã€~ ce nouveau spectacle auront été surpris!
      Brit.
  Dailleurs, mille desseins partagent mes esprits.
      Mithrid.
  Comme si les beaux noeuds où vous me tenez pris
  Ne devoient arrêter que de foibles esprits.
      Alex.
En prôse on diroit des âmes faibles, des coeurs faibles. Esprit se dit de l' âme pensante et non pas de l' âme aimante. = Rousseau définit l' esprit, dans le premier sens, raison assaisonée. Alors il n' a pas ordinairement de pluriel. Gresset fait pourtant dire à Florise,
   Cleon a tous~ les tons, tous les esprits ensemble
   C. à. d. toutes les sortes d' esprit. Et Rousseau dit de ses Ouvrages,
   De-là sont nés ces esprits bigârrés,
   Fous, sérieux, profanes et sacrés.
Le pluriel est bien dans ces deux endroits, mais il ne le serait pas dans beaucoup d' aûtres.
   Rem. 1°. Quand il s' agit de la 3e persone de la T. S. Trinité, il faut mettre une division entre Saint et Esprit; Saint-Esprit.
   2°. Saint-Esprit, Symbole des Ordres du Roi, n' a pas, je crois, de pluriel: "Le Chevalier veut vous envoyer votre cordon bleu avec deux Saints-Esprits. SÉV. Je pense qu' il faut dire avec deux Saint-Esprit.
   3°. Esprit se met souvent au singulier, quoiqu' il se raporte au pluriel: "Je n' ai pas grande foi à l' esprit de ces hommes si vantés. _ Un Auteur moderne dit: "À~ voir avec quelle ardeur les hommes de toutes nations cultivent leurs esprits etc. Il me semble que leur esprit irait mieux là, et que c' est ainsi que parlent les bons Auteurs.
   4°. L' Adjectif mis devant esprit fait quelquefois une aûtre signification qu' étant mis après. Saint-Esprit signifie la 3e persone de la T. S. Trinité: Esprit-Saint convient également aux Trois persones, et signifie d' ordinaire l' esprit de Dieu. = De même, il y a de la diférence entre malin esprit et esprit malin: le 1er se dit du Démon, l' aûtre d' un homme malicieux. On dit pourtant quelquefois d' un homme, c' est un malin esprit; mais alors, on dit plus, ce semble, que si l' on disait, c' est un esprit malin. Comme malin esprit convient proprement au Démon, c' est doner à l' homme la malice du Démon que de l' apeler, malin esprit. BOUH. = On distingue aussi entre~ avoir bon esprit et avoir un bon esprit: le 1er va plus aux Sciences et à ce qui regarde l' esprit: l' aûtre va plus aux afaires et à la conduite = Enfin, il y a bien de la diférence entre ouvrage de l' esprit et ouvrage d' esprit: on dit le premier de tout Livre, bon ou mauvais, de tout Ouvrage de la raison, quelle qu' en soit la qualité. On ne dit le second que des Ouvrages, où brille cette raison, assaisonée par la finesse et le goût. "Le plus grand nombre des Ouvrages de l'~ esprit ne sont pas des Ouvrages d' esprit.
   5°. On dit, un homme d' esprit, mais ce n' est pas une conséquence pour d' aûtres mots, exprimant les persones. Et quoique homme se troûve dans gentilhomme je crois que Le Vassor n' a pas bien dit, en disant: "Un Gentihomme d' esprit me racontait un jour etc. ni Leibnitz~, quand il a dit: "Un Gentihomme d'~ esprit de mes amis crut etc. _ On ne dit pas non plus, un Auteur d' esprit, un Eclésiastique d' esprit; il faut dire alors, qui a de l' esprit, beaucoup d' esprit etc.
   6°. On dit, se mettre dans l' esprit que etc. Être persuadé, ou se persuader que etc. "Mettez-vous dans l' esprit qu' il n' y a qu' une grande envie de faire fortune, ou un zèle ardent de travailler au salut des âmes, qui puisse faire trouver quelque agrément dans ce séjour, Let. Edif. = Mais dit-on, dans l' esprit de, pour dire dans la vûe de etc. Je ne le crois pas, et je ne me souviens pas d' avoir vu cette expression aûtre part que dans La Bruyère. "Dans l' esprit de contenter ceux, qui reçoivent froidement tout ce qui apartient aux Étrangers et aux Anciens et qui n' estiment que leurs moeurs: on les ajoute à cet Ouvrage.
   7°. À~ la pointe de l' esprit, expression adverbiale. Par raison et en quelque sorte malgré soi. "Il est dificile de se soutenir long--temps, quand il faut tout faire à la pointe de l' esprit. _ Cette manière de parler n' est pas du style relevé. * Mascaron s' en est pourtant servi plusieurs fois dans ses Oraisons Funèbres; mais aûtrefois on n' était pas si délicat. "La vérité, maîtresse de cette pointe de l' esprit par ses rayons et ses lumières, déclâre la guerre à la volonté ou rebelle, ou paresseûse.
   8°. On dit d' un homme devenu fou, que l'~ esprit lui a tourné. * Il y en a qui disent, dans le même sens, il a tourné l' esprit; ils disent mal; et c' est un gasconisme.
   Avoir l' esprit aux talons, manquer de jugement et de bon sens. Expression bâsse et populaire.
   * Faire de l' esprit, et faiseur d' esprit. Expressions modernes. "Un Ivrogne, qui fait de l' esprit, un ivrogne dont la tête est assez froide, pour trouver des pointes et des jeux de mots, c' est ce que persone n' avait encore vu, et l' honeur de l' invention est dû à MM. de P... et B... Ann. Litt.
   "Quelques faiseurs d' esprit, pour se doner un air de singularité, ne se sont point fait scrupule de se déclarer les admirateurs du Koran (de l' Alcoran,) d' en exalter les dogmes. M. Porter, cité dans le Cat. Philos. _ Fréron dit dans le même sens, ouvrier d' esprit. "Tant de malheureux ouvriers d' esprit, qui se trainent dans des routes batûes.