Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI {B00Aa}


E.



E


E, S. m. 5e Lettre de l' Alphabet Français, et la 2de des voyelles. Un e, un grand E, un petit e.
   I. Remarque. On distingue trois sortes d' e, qui expriment divers sons, et dont la diférence est sensible dans fermeté, honêteté: on apèle E ouvert, celui qui se présente le premier dans ces deux mots; E muet, celui du milieu; E fermé, celui qui est à la fin. = 1°. L' E ouvert est ainsi apelé, parce qu' on ouvre la bouche en le prononçant: mais comme on l' oûvre plus ou moins, on aurait dû distinguer plus de trois sortes d' E. Tête et tette sont deux e ouverts; mais le 1er l' est bien plus que le 2d, et ce serait une faûte de les faire rimer ensemble. Aussi, dans le Dictionaire Gramatical, nous avons soigneûsement distingué l' e ouvert en e simplement dit ouvert, et en e moyen, qui tient le milieu entre l' e ouvert et l' e fermé, se prononçant avec une ouvertûre de bouche plus grande que l' e fermé et moins grande que l' e ouvert. _ Tous les e suivis d' une double consone, et d' un e muet sont moy. belle, tendresse, trompette. Pour ceux qui n' ont après qu' une consone et l' e muet, on les accentûe avec l' accent grâve: nièce, remède, privilège, modèle, crème, cène, père, thèse, Prophète, brève, etc. _ Cette pratique n' est pas anciène: elle ne date guère que du milieu du siècle, et ne s' étendait pas à tous les mots qui sont dans ce câs. Elle est aujourd' hui universelle, et la publication du Dictionaire Gramatical n' a pas peu contribué à la rendre plus comune, et à en étendre l' usage à tous les mots qui ont ces terminaisons. _ * Aûtrefois on n' avait aucune règle sur ce point. Les uns n' ôsant marquer cet e moyen, ni avec l' accent grâve, parce qu' il n' est pas ouvert, ni avec l' accent aigu, parce qu' il n' est pas fermé, avaient pris le parti de ne point y mettre d' accent: ils écrivaient remede, college, zele, etc. mais ils exposaient les gens peu instruits à prendre ces e pour des e muets, et à les prononcer comme l' e féminin. Les aûtres mettaient à ces e moyens l' acc. aigu: reméde, collége, zéle: aûtre inconvénient, qui donait lieu à une prononciation presque aussi vicieûse. Aujourd' hui on emploie l' accent grâve pour l' è moyen, et le circonflexe pour l' ê ouvert: crème, même, etc. etc. _ * L' Académie convient qu' on distingue deux e ouverts, l' e grâve, tel qu' il est dans succès, et l' e aigu, tel qu' il est dans la seconde syllabe de trompette. Ce langage parait contradictoire; car le mot aigu semble anoncer un é fermé: comment est-il donc une espéce d' e ouvert? La pratique de l' Acad. dans son Dictionaire, n' est pas plus conséquente, puisque dans les e qui ne sont pas suivis de deux consones, et qui sont pourtant devant l' e muet, elle met tantôt l' accent grâve, comme dans brèche, tantôt l' accent aigu, comme dans collége, et une foule d' aûtres, quoique ces deux e soient de même natûre. Cette variété fait croire que tous les articles des anciènes éditions n' ont pas été revus avec soin et réformés dans la nouvelle.
   Les monosyllabes, les, des, mes, tes, ses, ont l' e fort ouvert. Plusieurs le prononcent comme muet, devant une voyelle ou une h muette, les animaux, les hommes: (le-zanimô, le-zome) il faut prononcer, lè-zanimô, lè-zome.
   Le siège de l' e tout-à-fait ouvert, ne peut jamais être que dans la dernière syllabe masculine: procès, succès, être, tête. Que si cette syllabe vient, dans les dérivés, à être suivie d' une aûtre, qui soit aussi masculine, alors l' e devient, ou tout-à-fait fermé, comme dans procéder, succéder, il était (exceptez têtu); ou il devient moyen, et ne s' ouvre que faiblement, comme dans procession, succession, qu' on prononce succè-cion, pro--cè-cion.
   2°. L' e muet n' a point d' accent. Il est apelé muet, parce qu' on ne le prononce presque pas, et e féminin, parce que les syllabes qu' il termine, sont apelées syllabes féminines, ou rimes féminines, comme les syllabes où entre un e ouvert ou un é fermé, sont apelées syllabes masculines, ou rimes masculines. = L' e muet ne commence jamais un mot sans être précédé de quelque consone, et il ne se troûve jamais en deux Syllabes consécutives; ou, s' il s' y trouve, ce n' est jamais à la fin du mot. C' est pour cela que les verbes dont la pénultième est muette à l' infinitif, comme apeler, jeter, peser, mener, prènent l' è moyen dans les temps qui finissent par un e muet: je mène, je pèse, je jète ou je jette, j' apèle ou j' apelle, ce qui s' étend aux futur et conditionel de ces verbes, j' apellerai, je mènerais, je jetterai, je pèserais, etc. _ On dit aussi chapelain et chapelle, chandelier et chandelle, celui et celle, etc. _ Par la même raison, quoiqu' on dise j' aime, je chante, nous disons aimé-je, chanté-je, et non pas aime-je, chante-je.
   Les Anglais et les Allemans ont des e muets: l' e de love en est un exemple pour les premiers, et le second e de meine pour les aûtres. Les Italiens et les Espagnols n' ont point d' e muet. BUF. = * Dans les Provinces méridionales, on done souvent à l' e final le son d' o ou d' ou: on y prononce gloa-ro, ou gloa-rou, pour gloire. Et pour les monosyllabes le, de, me, te, se, ce, que, et les particules re ou de, qui entrent dans la composition de beaucoup de mots, comme recevoir, demander, etc. on prononce un é fermé: lé, dé~, mé, té, sé, cé, qué, ré, dé, etc. Ce sont des gasconismes, et des plus choquans, auxquels les habitans de ces Provinces doivent faire atention. = Ces e muets sont le désespoir des Musiciens, sur-tout dans les finales: la plupart les prononcent en eu: la gloireu, la tempeteu, etc. = L' e muet ne se prononce point à la fin des mots, quand le mot suivant comence par une voyelle: une âme forte; pron. u-nâme forte.
   3°. L' é fermé, ainsi apelé, parce qu' on serre les lèvres en le prononçant, se marque par l' accent aigu, comme le dernier de fermeté. = Dans certains temps des verbes, l' é fermé est suivi d' un z: "Vous donnez, vous feriez, vous diriez, etc. Ce z tient lieu de l' accent et de l' s: pron. doné, ferié, dirié. = Dans la conjonction Et, l' e se prononce~ fermé, et non pas ouvert, comme font les Gascons, é, et non pas è.
   On troûve un correspondant à l' é fermé chez les Allemans, dans ehr; chez les Anglais, dans equity; chez les Italiens, dans ardore; chez les Espagnols, dans emanar.
   II. Aucun de nos mots, à l' exception d' Être, ne comence par un E tout-à-fait ouvert: aucun n' est terminé ainsi; et l' e ouvert, à la fin des mots, est toujours suivi d' une ou de deux consones: procès, désert, arrêts. = Dans tous nos mots, l' e initial ou final, non muet, est fermé, et toujours bref.
   III. L' E se prononce de plusieurs aûtres manières, comme quand il est suivi d' une n et d' un t, où il prend ordinairement le son de l' a: sentiment (sentiman). Mais si l' n n' est point suivie d' un t, l' e conserve son propre son: citoyen, moyen, etc. = Il a aussi le son d' an, quand il est joint à une m, et suivi d' un b, d' un p, ou d' une aûtre m: embaumer, empire, emmener; pron. anbomé, anpire, anmené. = Dans les troisièmes persones du pluriel des verbes, l' e, suivi d' une n et d' un t, a le son de l' e muet, et l' n ni le t ne se prononcent pas devant une consone: devant une voyelle, on ne prononce que le t: Voy. EN et ENT. = Quand l' e est joint à d' aûtres voyelles, pour former une diphtongue, alors, ou il est muet, en ce sens, qu' il ne se fait nullement sentir, ou il prend un son étranger à sa prononciation. = Nous mettons ces diphtongues à leur place, dans l' Ordre Alphabétique.

EA


EA, EAI, EAU: diphtongues, où l' e est entièrement muet: il n' y est mis que pour adoucir le son du g, après lequel ces diphtongues se troûvent: "Il mangea, je mangeai, engageant: si l' e ne s' y trouvait pas, on prononcerait, manga, mangai, engagan: par le secours de l' e, on prononce manja, manjé, angajan.

EAU


EAU, diphtongue, qui a le son d' un o plus ou moins ouvert: "chapeau, oiseau: pron. chapo, oazo. _ Dans fléau, l' e se détache de l' o [flé-o]. Quelques-uns en font autant, mais mal, pour le mot Eau. Voy. ce mot. = Les mots terminés en eau, au singulier, ajoutent un x au pluriel: bateau, oiseau: bateaux, oiseaux.

EAU


EAU, s. f. [O, dout. Au pluriel, eaux: pron. ô long.] Dans les composés, on met un tiret entre eau et les aûtres mots. Eau-de-vie, eau-forte.
   1°. EAU est un des quatre élémens: élément froid et liquide. Eau naturelle. Eau de source, de fontaine, de puits, etc. L' eau de la mer. Puiser, tirer, boire de l' eau. = 2°. Il se prend plus particulièrement pour la pluie. "Il est tombé bien de l' eau: "Le temps est à l' eau. = 3°. Mer, rivière, lac, étang. "Au bord de l' eau. Se jeter à l' eau. Pâsser l' eau; aler par eau. = 4°. Eaux minérales: Aler aux eaux; prendre les eaux. = 5°. Humeur, sérosité. "Les eaux qui tombent, qui distilent du cerveau. "Ce cheval a des eaux aux jambes. = 6°. Sueur. "J' étois tout en eau. "L' eau lui découloit du visage. = 7°. En style populaire, urine. "Faire de l' eau. Retenir, ou lâcher, ou laisser aler son eau. = 8°. Liqueur artificielle. "Eau-de-vie. "Eau rôse, de plantain, de chicorée, de cerises, de groseilles. Eau de senteur. = 9°. Lustre, brillant qu' ont les perles, les diamans: "Ces perles sont d' une belle eau, ces diamans de la première eau. _ En l' eau. Voy. EN.
   EAU entre dans plusieurs expressions du style familier et proverbial. _ Batre l' eau avec un bâton, faire une chôse inutile. On dit, dans le même sens, doner un coup d' épée dans l' eau. _ Tenir le bec dans l' eau à quelqu' un, le tenir dans l' incertitude, en diférant de se déterminer. _ Faire venir l' eau à la bouche: doner envie d' en tâter. Salivam movere. _ Suer sang et eau, faire de grands éforts pour venir à bout de quelque chôse. _ Faire venir l' eau au moulin, s' atirer des présens. _ Nager en grande eau, avoir le vent en poupe, réussir dans ses projets, être dans les grands moyens, dans les grandes ocasions de faire fortune. _ Revenir sur l' eau, rétablir ses afaires. _ Laisser courir l' eau, (il y en a qui ajoutent, sous le pont) ne se point mettre en peine du train que prènent les afaires. _ Rompre l' eau à quelqu' un, lui susciter~ des obstacles, des traverses. _ Nager entre deux eaux, se ménager entre deux partis. _ Pêcher en eau trouble, profiter, pour ses afaires, des malheurs publics et particuliers, les faire nâître à ce dessein. _ Porter de l' eau à la mer, doner à des gens qui en ont déjà trop. _ Faire de l' eau toute claire, manquer son coup, échouer. _ Se mettre dans l' eau de peur de la pluie, s' exposer à de grands inconvéniens, pour en éviter de petits. "Je me troûve mieux dans ces bois, que toute seule dans une chambre: c' est ce qui s' apèle se mettre dans l' eau de peur de la pluie: mais je m' acomode mieux de cette grande tristesse, que de l' ennui d' un fauteuil. Sév.
   On dit, d' un homme qui est doux et tranquille, ou niais et innocent, qu' il ne sait pas troubler l' eau; (l' Acad. dit, ne sait pas l' eau troubler). "Cette persone si fière, ce pauvre innocent, qui ne savoit pas troubler l' eau, dit ironiquement Mde. de Sévigné. _ Il n' y a pire eau que celle qui dort, qui croupit; il faut se défier des sournois, des mélancoliques.
   On dit aussi, de celui qui se plait à quelque chôse, qu' il y est comme le poisson dans l' eau; et quand il en est privé, que c' est le poisson hors de l' eau. _ Et d' un homme peu habile dans les afaires, que si on l' envoyait à la rivière, il n' y troûverait pas de l' eau. _ Voy. BâS, adjectif; COU, FEU, GOUTTE, NOYER, VIN.
   Rem. Tous les mots suivans doivent porter l' accent aigu sur l' E: on les écrivait aûtrefois sans accent, et dans le Rich. Port. on a continué cette pratique. Aparemment qu' on a jugé cet accent peu nécessaire; il est du moins très-utile, et l' usage le demande aujourd' hui.

ÉBAHIR


ÉBAHIR (S' ) v. r. ÉBAHISSEMENT, s. m. [Eba-i, iceman: l' h s' aspire: 4e e muet au 2d.] S' étoner, être surpris. Étonement, surprise. = L' Acad. dit que ces deux mots vieillissent. On disait dans Trév. dès le commencement du siècle, qu' ébahissement était vieux. Pour le verbe, on avertit qu' il ne se dit guère qu' avec le pronom personel, s' Ebahir, et dans presque tous les exemples qu' on done, il est employé au passif: être ébahi: Je suis tout ébahi: c' est-là en éfet son unique emploi.
   Rem. Jacques Grevin dona en 1561 une Comédie, qui avait pour titre: Les Ébahis. Ce verbe s' est maintenu, dit La Monnoie, jusqu' au milieu du siècle dernier. Il a depuis insensiblement vieilli, et il ne trouve plus sa place que dans le burlesque. _ St. Amant s' en est servi dans son Moyse Sauvé, où décrivant les Israélites, qui passaient la Mer Rouge à pied sec, il dit:
   Les poissons ébahis les regardent passer.
Vers dont, pour une autre raison, Boileau s' est moqué dans sa Poètique. La Monn. _ On se sert encôre du partic. dans le st. fam., mais il est un peu bâs et populaire. Il a le régime d' étoné: "Je la laissai tristement ébahie de tout ce qu' elle voyoit. Mariv.

ÉBARBER


ÉBARBER, v. a. ÉBARBOIR, s. m. [1re é fer. 3e é fer. au 1er, dout. au 2d. Ébarbé, boar.] Ebarber, c' est ôter les parties excédentes et superflues de quelque chôse. Ebarber du papier, des plumes, des pièces de monnoie. Trév. ne le dit que des métaux. _ Ébarboir, outil qui sert à ébarber.
   Rem. * Autrefois on disait ébarber, pour faire la barbe; et Trév. lui done encore ce sens; Se faire ébarber. _ Joubert le met parmi les mots vieux et burlesques.

ÉBAT


ÉBAT, *ÉBATEMENT, s. m. *S' ÉBATRE, v. réc. [1re é fer. 3e e muet aux 2 dern. Eba, Ebateman, Ébatre.] Passe-temps, divertissement. Se réjouir, se divertir. = Ébatement et s' Ébatre, sont vieux et hors d' usage. Ebat, se dit encore, mais seulement dans le style familier et au plur. Prendre ses ébats. _ Les deux autres étaient autrefois employés dans le beau style.
   Tu suis mes énemis, t' assembles en leur bande,
   Et des maux qu' ils me font prends ton ébatement.
       Malh.
"Elle étoit descendûe sur le rivage pour s' ébatre avec ses compagnes. D' Ablancourt.

ÉBAUBI


ÉBAUBI, IE, adj. [Ebobi, bî-e: 1re é fer. 2e dout. 3e lon. au 2d.] Ètoné, surpris. Il est populaire, et ne peut se dire qu' en plaisantant. "À~ qui en avez-vous, Madame, avec vos exclamations? = Oh! rien; mais me voilà bien ébaubie. Mariv.
   Je suis tout ébaubie, et je tombe des nûes. Mol. Tartufe.

ÉBAûCHE


ÉBAûCHE, s. f. ÉBAUCHER, v. act. ÉBAUCHOIR, s. m. [Ébôche, boché, bo--choar; 2e lon. au 1er, dout. aux deux aûtres.] Ebaûche, ébaucher, se disent au propre d' un ouvrage de Peinture ou de Sculpture, qui n' est que grossièrement comencé: au figuré, il se dit des ouvrages d' esprit. Ebaucher une statûe, un tableau: "Ce n' est que la première ébauche. "Cet Auteur n' a pas mis la dernière main à son ouvrage: il ne l' a qu' ébauché. "Cette pièce n' est qu' une ébauche. _ Voyez ESQUISSE.
   Ébauchoir ne se dit qu' au propre, et seulement en termes de sculptûre. C' est un outil de bois ou d' ivoire, dont les Sculpteurs se servent pour ébaucher.

ÉBAUCHÉMENT


*ÉBAUCHÉMENT, adv. Brièvement, et sans entrer dans le détail. "Il ne m' en a parlé qu' ébauchément; c' est un mot barbâre du jargon néologique moderne.

ÉBAUDIR


*ÉBAUDIR, v. a. ÉBAUDISSEMENT, s. m. Récréer, récréation. Ils sont vieux, et ne peuvent plus être bons que pour le burlesque. Ebaudir ses esprits; s' ébaudir. "Vous tous, Critiques à la journée, à la quinzaine, au mois, ébaudissez-vous bien, vous ne me ferez surement aucun mal, dit dans son dépit M. du B... auteur du vieux Garçon, Comédie.

EBèNE


EBèNE, s. f. ÉBÉNER, v. act. [1re é fer. 2e è moy. au 1er, é fer. au 2d: le Rich. Port. ne met point d' accent sur le 2d e du verbe: ébener.] L' ébène est le bois de l' ébénier. "Il y a diverses sortes d' ébènes: de l' ébène noire, de la verte, de la grise. Quand on dit, de l' ébène tout court, on entend parler de la noire. Cabinet d' ébène. Travailler en ébène. = Ebéner, c' est doner à du bois la couleur de l' ébène. _ L' Acad. ne met pas ce verbe: il est dans Trév. et dans le Rich. Port.

ÉBENIER


ÉBENIER, ÉBENISTE, s. m. [1re é fer. 2e e muet, suivant l' Acad. et le Rich. Port. _ Trév. met un accent aigu, ébénier, ébéniste: ainsi ce 2d e serait donc fermé comme le 1er. Les sentimens et la pratique sont partagés sur ces deux prononciations.] Le 1er se dit d' un arbre des Indes et d' Afrique, dont le bois est fort dur, et ordinairement noir; le 2d, d' un ouvrier qui travaille en ébène, et en ouvrages de marqueterie.

ÉBÉTÉ


*ÉBÉTÉ. C' est ainsi que Rollin écrit ce mot dans son Histoire Anciène. _ On écrit hébété avec une h. Voy. ce mot.

ÉBLOUIR


ÉBLOUIR, v. a. ÉBLOUISSANT, ANTE, adj. ÉBLOUISSEMENT, s. m. [Éblou-i, i-san, sante, seman: 1re é fer., 4e lon. au 2d et 3e, e muet au der.] Éblouir, c' est empêcher l' usage de la vûe par une trop grande lumière. Il se dit au propre et au figuré: "Le soleil, la grande blancheur, éblouit la vue, ou, les yeux; nous éblouit. _ C' est une beauté qui éblouit (le régime est sous-entendu.) _ Plus figurément, c' est 1°. Surprendre l' esprit par quelque chôse de brillant, de spécieux. "Il m' a allégué tant de raisons, qu' il m' a ébloui. "On se laisse souvent éblouir par une éloquence artificieuse. "Les hypocrites ont souvent ébloui les simples par leurs spécieux dehors. Fénélon. = 2°. Tenter, séduire. "On se laisse aisément éblouir par les richesses, par de séduisantes promesses. = Il régit ordinairement la prép. par, sur-tout au passif. "Il fut ébloui par l' éclat de tant de flambeaux. Il régit quelquefois la prép. de. "Ebloui des charmes trompeurs de la gloire, de l' éclat des richesses, etc.
   ÉBLOUISSANT, se dit dans tous les sens de son verbe, au propre et au figuré. "Éclat éblouissant, couleur éblouissante. Beauté éblouissante. Raisonemens éblouissans. Promesses éblouissantes, etc. etc. _ M. Marmontel lui fait régir la prép. de: "Éblouissante de vivacité et de fraicheur. On le dit ordinairement sans régime.
   ÉBLOUISSEMENT, ne se dit qu' au propre: 1°. Dificulté de voir, causée par une trop grande lumière. "On ne peut regarder le soleil sans éblouissement. "La neige cause de l' éblouissement aux yeux, à ceux qui la regardent trop long temps. _ Il ne serait pas bon de dire au figuré: "L' éblouissement que causent les richesses. Balzac a dit, et le Dict. de Trév. l' aproûve: "La grande estime que nous avons pour les Prédicateurs, peut venir de notre éblouissement et de notre illusion. On ne le dirait pas aujourd' hui, ou l' on dirait mal. = 2°. Dificulté de voir, ocasionée par quelque vapeur, ou aûtre caûse intérieûre. "Il m' a pris un tel éblouissement, que je ne voyois goutte. "Les vapeurs sont souvent accompagnées de vertiges et d' éblouissemens.

ÉBORGNER


ÉBORGNER; v. act. [Mouillez le g.] Rendre borgne. "Une branche d' arbre l' a éborgné. _ Par exagération, faire grand mal à l' oeil "Vous m' avez eborgné. = Figurément, ce mur, cet arbre éborgne cette chambre, cet apartement, lui ôte une partie de sa vûe, de son jour.

ÉBOUFFER


*ÉBOUFFER (S' ), v. réc. Richelet, s' éboufer de rire. Il est bâs et populaire. _ L' Acad. ne le met pas. On dit, pouffer de rire.

ÉBOUILLIR


ÉBOUILLIR, v. n. [Ébou-gli: mouillez les ll.] Diminuer, à force de bouillir. Il ne s' emploie qu' à l' infinitif et au participe. "Ne laissez point tant ébouillir le pot. "Le pot est trop ébouilli. "Cette saûce est trop ébouillie.

ÉBOULEMENT


ÉBOULEMENT, s. m. S' ÉBOULER, v. r. ÉBOULIS, s. m. [Ébou-le-man, lé, li: 1re é fer., 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] S' ébouler, se dit des terres, des bâtimens qui se renversent. Acad. On le dit sur-tout des terres. Pour les bâtimens, on dit d' ordinaire, s' écrouler. "Le rempart s' éboule; cette muraille, cette pile de bois s' est éboulée. _ Et neutralement: "Cela fera ébouler ce bastion. Acad. = Éboulement, chûte de la chôse qui s' éboule. "Eboulement des terres. L' Acad. dit, éboulement de la muraille, du bastion. On dit plutôt, écroulement. = Eboulis, terre qui s' est éboulée. "Éboulis de terre de sâble, etc.

ÉBOURGEONEMENT


ÉBOURGEONEMENT, s. m. ÉBOURGEONER, v. a. [Ébourjo-neman, né: 1re é fer., 4e e muet au 1er, é fer. au 2d: l' e qui est devant l' o est entièrement muet: il n' est là que pour doner au g un son doux, qu' il n' a pas devant l' o. _ Richelet met aussi ébourjonner, sans préférer l' un à l' aûtre: mais puisqu' on écrit bourgeon, et non pas bourjon, on doit, par analogie, écrire ébourgeoner, et non pas ébourjoner.] Ôter les bourgeons superflus. Retranchement des bourgeons. "Ébourgeoner les vignes, les arbres. "Ebourgeonement des arbres, des vignes.

ÉBOURIFÉ


ÉBOURIFÉ, ÉE, adj. [4e é fer., long au 2d.] Qui a les cheveux, ou la coîfûre en désordre. "Il est tout ébourifé: elle arriva toute ébourifée. = Trév., par sa définition, parait le dire de la coîfûre même, et des cheveux: Éparpillé, dérangé. On le dit de la persone.

ÉBOUZINER


ÉBOUZINER, v. a. Terme de Maçonerie. Ôter le bouzin d' une pierre.

ÉBRANCHEMENT


ÉBRANCHEMENT, s. m. ÉBRANCHER, v. a. [1re é fer., 2e lon., 3e e muet au 1er; cheman, é fer. au 2d, ché.] Ébrancher, c' est dépouiller un arbre de ses branches, en les coupant, ou en les rompant. "Il faut ebrancher cet arbre. "Le vent l' a tout ébranché. = Ébranchement, est l' action d' ébrancher un arbre, ou l' éfet de cette action.

ÉBRANLEMENT


ÉBRANLEMENT, s. m. ÉBRANLER, v. a. [1re é fer., 3e lon., 3e e muet au 1er, leman; é fer. au 2d.] Ebranlement, au propre, secousse. Ébranlement du cerveau. "Après un si grand ébranlement, il est à craindre que cette muraille ne tombe. _ Au figuré: "L' ébranlement de sa fortune.
   ÉBRANLER, doner des secousses. "Les vents ont ébranlé cette maison. Ce coup lui a ébranlé le cerveau. _ Il se dit figurément des persones, dans le sens de fraper, toucher, émouvoir: "Ces raisons l' ont fort ébranlé. "Les malheurs, les disgrâces, n' ont point ébranlé sa constance. "Il n' a point été ébranlé par tout ce qu' on a pu lui dire, par ce funeste évènement: mais le réciproque s' ébranler, ne s' emploie pas dans cette signification. On dit, de deux armées qui sont en présence, qu' elles s' ébranlent, pour dire, qu' elles comencent à se mouvoir et à agir; et des troupes, pour dire, qu' elles se mettent en moûvement pour prendre la fuite; mais on ne dit point d' une persone, qu' elle ne s' ébranle point, pour dire qu' elle ne se trouble point, qu' elle n' est point touchée, que la chôse ne la frape point. "Le Prince écouta tout ce discours du Roi sans s' ébranler. D' ORL. Révol. d' Esp. Il falait dire, ce me semble, sans en être ébranlé. "Quoique la nouvelle réforme fît tant de bruit, les Vaudois ne s' en ébranlèrent point. Bossuet, n' en furent point frappés. L' actif est beau au figuré, dans un sens plus aprochant du propre. "Telle est l' influence des Rois sur la destinée du monde: ils le gouvernent pendant leur vie, et l' ébranlent encore après leur mort. Thomas.

ÈBRE


ÈBRE est toujours bref: Célèbre, funèbre, etc., è moy.

ÉBRÉCHER


ÉBRÉCHER, v. a. [3 é fermés.] Faire une petite brèche. Ébrécher un couteau, un rasoir. S' ébrécher une dent. _ Suivant l' Acad. il ne se dit qu' en ces phrâses. Trév. le dit aussi des ruptûres faites aux ouvertûres des pots de terre, de faïance, etc.

ÉBRENER


ÉBRENER, v. a. [1re et 3e é fer., 2e e muet: devant la syll. fémin. ce 2d e devient moyen: Il ébrène, il ébrènera.] Ôter les matières fécales d' un enfant.

ÉBRIÉTÉ


*ÉBRIÉTÉ, ÉBRIOSITÉ, s. f. La Touche dit du 1er, que quelques persones le disent au lieu d' yvresse, mais qu' il parait encôre bien étranger, et que l' Acad. ne l' a point mis dans son Dictionaire. Depuis cette remarque, il n' a pas été plus en usage. _ Ébriosité pour ivrognerie, est encôre plus mauvais.

ÉBRUITER


ÉBRUITER, v. a. [Ebrui-té: 1re et 3e é fer.] Divulguer, rendre public. "Il ne faut pas ébruiter cette affaire. _ S' ébruiter, devenir public. "Cette affaire s' ébruite, commence à s' ébruiter; elle s' est bientôt ébruitée.

ÉBULLITION


ÉBULLITION, s. f. [On prononce les 2 l sans les mouiller, ébul-li-cion, en vers ci-on.] 1°. Moûvement que prend un liquide, qui est sur le feu. = 2°. Maladie, qui caûse sur la peau des élevûres, ou taches rouges. "Une ébullition de sang. "Il a une ébullition par tout le corps. Voy. EFFERVESCENCE.
   Molière s' est servi de ce mot au figuré, dans sa Critique de l' École des Femmes: "Je ne saurois soufrir les ébullitions de cerveau de nos Marquis de Mascarille. Je crois, dit La Touche, qu' on peut fort bien s' exprimer ainsi en plaisantant.

EC


EC. Cette finale est toujours brève. Bec, sec, etc. Les pluriels sont longs, Grecs, échecs, etc.

ÉCACHER


ÉCACHER, v. act. [1re et 3e é fer.] Écraser, froisser. Écacher une noix, un limaçon, en marchant dessus. "Il s' est écaché le doigt, et non pas, il a écaché son doigt. _ Nez écaché, camus et aplati.

ÉCâILLE


ÉCâILLE, s. f. ÉCâILLÉ, ÉE, adj. ÉCâILLEUX, EûSE, adj. [Ekâ-glie, glié, glié-e, glieû, glieû-ze: 1re é fer., 2e lon.: mouillez les ll; 3e e muet au 1er, é fer. au 2d et 3e, lon. aux 2ders.] Écâille, 1°. Matière mince et osseûse, qui vient sur la peau des poissons et de certains reptiles, et qui est séparée en plusieurs pièces: "Écâilles d' une carpe, d' un saumon, d' un crocodile. = 2°. Coquille, croûte dûre, qui coûvre les poissons qu' on nome testacées. "L' écâille d' une huitre: huitre à l' écâille. "Écâille de tortûe. _ Écâille tout court, s' entend toujours de l' écâille de tortûe.
   ÉCâILLÉ, à qui on a ôté les écâilles: Carpe écâillée; ou, dans le sens contraire, qui est couvert d' écâilles: Animaux écâillés. _ Écâilleux, qui se lève par écâilles. "Les cones du sapin sont des fruits écâilleux. "La racine du lys est écâilleûse.
   Rem. On dit figurément, que les écâilles tombent des yeux, pour dire, qu' on est détrompé; ou, comme disaient Mrs de Port-Royal, désaveuglé. Cette expression fait allusion à ce qui arriva à St. Paul, lors de sa conversion. Elle ne peut être bone que dans des ocasions pareilles. "Enfin, les écâilles lui tombent des yeux, il voit qu' il s' égare, dit d' Avrigny, en parlant de M. de Turenne et de sa conversion.

ÉCâILLER


ÉCâILLER, v. a. ÉCâILLER, ÈRE, s. m. et f. [Ékâ-glié, gliè-re: 1re é fer., 2e lon., 3e é fer. aux 2 1ers, è moy. et long au 3e.] Écâiller, c' est ôter l' écâille d' un poisson. Écâiller un brochet, une carpe. _ S' écâiller, se dit des couleurs d' un tableau, qui se détachent par petites parties, comme des écâilles; mais il se dit du tableau, d' un enduit, et non pas des couleurs mêmes. "Ce tableau, cet enduit s' écâille.
   ÉCAILLER, ÈRE, se dit de celui qui vend et qui oûvre des huitres à l' écâille.

ÉCALE


ÉCALE, s. f. ÉCALER, v. a. [Ékale, lé: 1re é fer., 3e e muet au 1er, é fer., au 2d.] Écale, se dit de la coque des noix et des oeufs, et de la peau des poix, qui se lève quand ils cuisent. = Écaler, c' est ôter l' écale. "Ecaler des noix. "Les pois s' écalent, quand ils ont bouilli.

ÉCARLATE


ÉCARLATE, s. f. ÉCARLATINE, adj. f. [1re é fer.] Écarlate, se dit, et d' une couleur rouge fort vive, et de l' étofe même teinte de cette couleur. Teint en écarlate: une belle écarlate. Manteau d' écarlate. = Proverbialement, des yeux bordés d' écarlate, fort rouges. En Provence on dit, des yeux bordés d' anchois.
   ÉCARLATINE, ne se dit que d' une fièvre qui rend la peau très-rouge. On l' apèle vulgairement scarlatine.

ÉCARQUILLEMENT


ÉCARQUILLEMENT, s. m. ÉCARQUILLER, v. a. [Ékarki-glie-man, ki-glié: 1re é fer., 4e e muet au 1er, é fer. au 2d: mouillez les ll.] Écarquiller, ne se dit que des jambes et des yeux, qu' on écarte, qu' on oûvre. Ecarquillement, est l' action d' écarquiller. Ils sont du style familier.

ÉCART


ÉCART, s. m. [Le t ne se prononce pas.] 1°. L' action de s' écarter. "Pour éviter le coup, il fit un écart. "Son cheval eut peur, il fit un écart et le renversa. _ Figurément, faire un écart dans un discours, s' écarter de son sujet. = 2°. Prendre, ou, se doner un écart, se dit d' un cheval, qui s' est estropié en faisant un écart. = 3°. Cartes qu' on écarte, à certains jeux. "Où est votre écart? Que dites-vous de mon écart?
   À~ L' ÉCART, adv. En un lieu détourné, écarté. "Mener, prendre, trouver à l' écart. _ À~ part, en particulier. Tirer à l' écart; se mettre, se tenir à l' écart.
   Rem. 1°. L' emploi de ce mot au figuré, pour signifier faûte, désordre, n' est pas ancien. La Touche, au comencement du siècle, en parle comme d' une nouveauté. "L' imprudence fait faire de grands écarts: "Il est sujet à faire des écarts.
   2°. Laisser à l' écart, c' est fuir, éviter ou ne pas faire mention de...
   - - - Je conclus donc, que notre vrai salaire
   Doit se borner au plaisir de bien faire,
   Et qu' à l' écart laissant là les humains,
   Le Sage doit se payer de ses mains.
       Rouss.

ÉCARTÉ


ÉCARTÉ, ÉE, adj. Il se place toujours après le substantif: Chemin écarté; route écartée. "Allez dans cette grotte écartée, où toute est préparé pour votre repos. Télém.

ÉCARTELER


ÉCARTELER, v. act. [1re et dre é fer., 3e e muet; devant la syll. fémin. cet e devient moyen: il écartèle, écartèlera, etc.] Mettre en quatre quartiers, en le faisant tirer à quatre chevaux. "Il fut condamné à être écartelé. = V. n. En termes de Blason, "Il écartèle d' argent et de sable.

ÉCARTER


ÉCARTER, v. act. [1re et dern. é fer.] 1°. Éloigner, disperser. "Écarter les énemis, la foule. "Le vent a écarté les nuages. "La tempête a écarté les vaisseaux. = 2°. Détourner. "Écarter du droit chemin. "Vous vous écarterez trop, si vous prenez ce chemin là. = 3°. S' écarter se dit dans ces deux sens, avec la prép. de pour régime. "S'~ écarter de la foule. S' écarter du bon sens, de son devoir, de son sujet. = 4°. Écarter, éparpiller. "Ce fusil écarte son plomb. = 5°. À~ certains jeux de cartes, mettre à part des cartes dont on ne veut point se servir, pour en prendre d' autres. "Ecarter un as, un roi. "J' ai écarté mon jeu.

ECCLÉSIASTE


ECCLÉSIASTE, ou ÉCLÉSIASTE, s. m. ECCLÉSIASTIQUE, adj. ECCLÉSIASTIQUEMENT~, adv. [Éclézias-te, tike, tikeman; 1re et 2e é fer. _ On pourrait ne mettre qu' un c, et mettre l' acc. aigu sur l' é: Éclésiastique, etc.] Éclésiaste est le nom d' un des Livres sapientiaux de l' Ancien-Testament. = Éclésiastique se dit des chôses et des persones qui apartiènent à l' Eglise. _ Il suit toujours le nom qu' il modifie. "L' ordre éclésiastique: biens, revenus, lois éclésiastiques. L' état éclésiastique. "Persone éclésiastique: Pair, Électeur, Eclésiastique. = S. m. "Un Éclésiastique; un bon Éclésiastique. = L' Éclésiastique, un des livres de l' Écritûre Sainte.
   ÉCLÉSIASTIQUEMENT, en Éclésiastique régulier et édifiant: "Vivre éclésiastiquement.
   Rem. * Ces mots ne doivent se dire que des Chrétiens. M. l' Ab. Grosier parle des principaux Mahométans éclésiastiques et séculiers. C' est un abus des termes, trop comun aujourd' hui. Bientôt on dira, Eglise des Turcs, et non pas Mosquée. Un Auteur a déjà dit, Mosquée Cathédrale. Plusieurs, sans égard à l' origine et au sens du mot, emploient hiérarchie dans les matières profanes. Que gagne à cela la langue?

ECE


ECE: cette pénultième est toujours brève: nièce, pièce: è moy.

ÉCERVELÉ


ÉCERVELÉ, ÉE, adj. [1re et dern. é fer. 2e ê ouvert. 3e e muet.] Qui est sans jugement, sans prudence, étourdi, qui manque de cervelle. Trév. Qui a l' esprit léger, évaporé, qui est sans jugement. Acad. Fou, étourdi, fat. Rich. Port. Cette dernière définition ne vaut rien; fou dit trop, et fat est aûtre chôse. "Tête écervélée. = Subst. "C' est un jeune écervélé, une petite écervélée.

ÉCHAFAUD


ÉCHAFAUD, s. m. ÉCHAFAUDAGE, s. m. ÉCHAFAUDER, v. n. [Échafô, fodaje, fodé; 1re é fer. 3e lon au 1er, dout. aux deux aûtres. _ Richelet écrit échafaut avec un t: L' Acad. Trév. et le Rich. Port. avec un d, ce qui est mieux, à caûse des dérivés.] Échafaud est, 1°. planches soutenues par des treteaux, ou par des pièces de bois fichées dans un mur, sur lesquels se mettent des Maçons, des Sculpteurs, des Peintres, pour travailler en des lieux élevés. = 2°. Espèce de théâtre, sur lequel on place des spectateurs pour voir comodément quelque cérémonie, quelque spectacle. = 3°. Théâtre élevé dans une place publique, pour exécuter les criminels.
   ÉCHAFAUDAGE, construction d' échafaud. = Échafauder, dresser des échafauds.
   Rem. Échafaudage se prend quelquefois au figuré: "Cet Orateur fait un grand échafaudage pour ne nous dire ensuite que des riens. "Les détracteurs de cet Art salutaire (la Médecine) ne le regardent que comme un échafaudage d' ignorance et d' imposture. Voullone.

ÉCHALâS


ÉCHALâS, s. m. ÉCHALASSER, v. act. [1re é fer. 3e lon. au 1er; échalâ, lacé.] Échalâs est un bâton qu' on fiche en terre pour soutenir un cep de vigne. Échalasser, c' est garnir une vigne d' échalâs. = On dit en style proverbial, d' une persone maigre et sèche, que c' est un échalâs; et d' un homme qui afecte de se tenir droit, qu' il se tient droit comme un échalâs.

ÉCHALIER


ÉCHALIER, s. m. [Écha-lié: 1re et dern. é fer.] Clotûre d' un champ, faite avec des branches d' arbres, pour en fermer l' entrée aux bestiaux. Le Rich. Port. ne le done que comme un mot de plusieurs Provinces: L' Académie le met sans remarque.

ÉCHALOTE


ÉCHALOTE, s. f. [1re é fermé, dern. e muet.] Espèce d' ail.

ÉCHANCRER


ÉCHANCRER, v. act. ÉCHANCRûRE, s. f. [1re é fer. 2e lon. 3e é fermé au 1er, lon. au second.] Couper une étofe en ligne courbe, la vider en dedans. Trév. Tailler, vider, couper en dedans en forme de croissant. Il se dit des étofes, de la toile, du cuir, du bois, etc. Acad. Couper en manière d' arc. Rich. Port. = Echancrûre: coupe faite en croissant. Trév. Coupûre faite en dedans, en forme de demi-cercle. Acad. Chôse échancrée, la manière dont on échancre. Rich. Port. _ Il y aurait beaucoup à dire à toutes ces définitions; mais cela serait trop long, et la chôse n' en vaut pas la peine.

ÉCHANGE


ÉCHANGE, s. m. ÉCHANGER, v. act. [1re é fer. 2e lon. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Le Dict. de Trév. en 1704, marque le substantif fém. On lui a doné aûtrefois ce genre: Un Auteur moderne le lui a encôre doné tout récemment: une échange virtuelle, une échange proprement dite. C' est aujourd' hui un solécisme, on dit: un échange.
   ÉCHANGE, est le change d' une chôse pour une aûtre. Echanger, c' est faire un échange. "Échange avantageux. L' échange des ratifications, des prisoniers. "Échanger une pièce de terre contre une aûtre. "J' ai échangé mon cheval pour ou contre un coureur Anglais.
   Rem. 1°. Échange, permutation (Synon.) Suivant Ferrière, le 1er se dit des immeubles ou des meubles précieux, ou des marchandises en grôs; mais à l' égard du contrat, par lequel on done une chôse mobiliaire pour une aûtre, le mot de permutation lui convient mieux. _ Cette distinction peut être bone au Palais; mais, dans le langage ordinaire, on n' emploie guère permutation: on dit échange ou troc; le premier, pour les chôses considérables, le second, pour celles de moindre valeur. = Échanger est du style noble, troquer du style familier, permuter, du style de Palais.
   2°. Malherbe a été repris par Ménage, d' avoir dit faire échange à, pour changer en; sur quoi M. d' Olivet remarque, qu' il est plus aisé de blâmer ou de plaindre un Poète en pareil câs, que de lui suggérer un tour plus heureux. Il n' en est pas moins vrai que cette expression de Malherbe serait aujourd' hui regardée comme un barbarisme, même en vers.
   3°. On dit adverbialement, en échange avec la prép. de: "Allez rendre à Dieu la vie qu' il vous a donée, et en échange de laquelle il vous prépare la courone d' immortalité. _ * Dans le Journal de Litératûre, on lui fait régir mal-à-propos la prép. avec. "Charles Emmanuel obtint le Marquisat de Saluces en échange avec la Bresse et le Bugey. _ Ce régime est d' autant plus vicieux qu' il peut induire en erreur sur le sens de la phrâse. Ici, par exemple, on pourrait croire que Charles Emmanuel obtint en échange, et le Marquisat de Saluces, et la Bresse, avec ayant souvent le sens de la conjonction et. On dit échanger pour ou contre, et en échange de. _ Avec ne s' emploie que pour le régime de la persone. "Il a échangé, ou il a fait échange avec moi de sa montre contre ma tabatière. = En échange, se dit quelquefois sans régime. "M. Sauveur n' avoit, ni voix, ni oreille, et ne songeoit plus qu' à la Musique. Il étoit réduit à emprunter la voix et l' oreille d' autrui, et il rendoit en échange des démonstrations inconûes aux Musiciens. Fonten. _ À~ la tête de la phrâse, il signifie d' aûtre part, d' un aûtre côté.
   * Prendre l' échange est un barbarisme comun en Provence. Il faut dire, prendre le change. Voy. CHANGE.
   4°. * Échanger des Lettres avec quelqu' un, pour, avoir comerce de Lettres avec lui, est un anglicisme. "On voit bien par mes premières lettres, échangées avec M. Oldenbourg, que je n' étois guère allé plus avant. Leibnitz. "Je ne m' étois point entretenu de telles chôses, quoique nous eussions déjà échangé plusieurs Lettres. Id. "Les Lettres que nous échangeons, M. Newton et moi, vous instruiront du reste.

ÉCHANSON


ÉCHANSON, s. m. ÉCHANSONERIE, s. f. [1re é fer. 2e lon. 4e. et 6e e muet au 2d.] Échanson est un Oficier qui done à boire au Roi ou à un Prince. On ne dit plus ce mot que du Grand Échanson, et dans la Fable, où~ l' on dit de Ganimède, qu' il est l' Échanson des Dieux; et dans l' Histoire-Sainte, l' Échanson de Pharaon. = Echansonerie est le Corps des Officiers qui servent à boire au Roi, aux Princes, etc. et le lieu où est la boisson du Roi.

ÉCHANTILLON


ÉCHANTILLON, s. m. [Échanti-glion. 1re é fer. 2e lon. mouillez les ll.] Au propre, petit morceau de quelque chôse que ce soit, qui sert de montre pour faire conaitre la pièce. Il se dit sur-tout des étofes. "Ce n' est qu' un échantillon de la pièce. = On le dit au figuré, des ouvrages d' esprit. "Jugez de la pièce par l' échantillon, ce qui se dit aussi, familièrement, du caractère, de la conduite d' une persone. C' est juger d' un Poète par quelque morceau de Poésie, et d' un homme par quelqu' un de ses discours, ou quelqu' une de ses actions.

ÉCHAPATOIRE


ÉCHAPATOIRE, s. f. ÉCHAPÉE, s. f. [Écha-pa-toâ-re, échapé-e; on écrit ordinairement ces mots et les suivans avec deux p; c' est l' ancien usage, qui n' est fondé sur rien.] Échapatoire, défaite, subterfuge, moyen adroit pour se tirer d' embarrâs. Echapée, action imprudente d' un jeune homme qui sort de son devoir. _ Les étrangers doivent prendre garde à ne point confondre ces deux mots. "Trouver une échapatoire: "Il a toujours ses échapatoires toutes prêtes. _ "C' est une échapée de jeune homme: il a fait plusieurs échapées. = M. de Beaumarchais ou l' Imprimeur d' une de ses Lettres, fait échapatoire masculin. "On nomme en Angleterre canards boiteux, ceux qui profitent d' un échapatoire, pour fuir à leurs engagemens d' honeur. _ Fuir à doit-il être mis aussi sur le compte de l' Imprimeur?
   Rem. 1°. Échapatoire n' est que du style familier. Bossuet s' en est servi dans son Histoire des Variations. "Combien d' échapatoires pouvoit se préparer Bucer, dans des termes que chacun tiroit à son avantage. Le terme est peu noble et peu convenable, même dans le style de controverse et de dissertation, dans lequel cette Histoire est écrite. Subterfuge aurait mieux valu.
   2°. * Mde de B... en fait un adjectif. "Le Pape ne fit qu' une réponse échapatoire à ces plaintes. Hist. d' Angl. Et M. Linguet: c' est alors qu' ils ont imaginé la rûse échapatoire de l' intervention de la Cour des Aides. _ Cet adjectif est un néologisme.
   3°. Faire quelque chôse par échapées, c' est la faire par intervales, et comme à la dérobée. _ Dans cette expression du style familier, échapée n' a pas le sens ordinaire.

ÉCHAPER


ÉCHAPER, v. act. et neut. [1re et dern. é fer.] Ce verbe a diférens sens, suivant ses divers emplois, ou ses divers régimes. En parlant des persones: 1°. actif, avec le régime absolu, ou neutre, avec la prép. de, il signifie éviter: "Echaper un danger, ou d' un danger; échaper la potence; échaper du naufrage, ou se sauver; échaper des mains des Sergens, etc. = 2°. Avec la prép. à pour régime, n' être pas saisi, ou aperçu: "échaper à la fureur, à la poursuite des énemis: Echaper à la vûe. Il y a des insectes si petits qu' ils échapent à la vûe, aux yeux. = 3°. En parlant des chôses, avec la même préposition à: "Il lui est échapé un mot, ou un mot lui est échapé, ou il a laissé échaper un mot: il lui est arrivé de dire ce mot par mégarde, ou par imprudence, par indiscrétion. "Jamais il ne m' est échapé une parole, qui pût découvrir le moindre secret. Télém.
   Rem. 1°. Dans le 1er sens, n°. 1°. échaper prend l' auxiliaire avoir. "Il a échapé le danger, ou du danger. _ Dans le 2d. sens, n°. 2°. il prend avoir ou être: "Le cerf a échapé, ou est échapé aux chiens. _ Dans le 3e sens, n°. 3°. être échapé a un sens diférent de celui d' avoir échapé. Le premier, désigne une chôse faite par inadvertence, le second, une chôse non faite par oubli. "Ce mot m' est échapé, c. à. d. je l' ai prononcé sans y prendre garde. "Ce que je voulois vous dire m' a échapé, j' ai oublié ce que je voulois vous dire (Encycl.) "Hors de là, dit M. Beauzée, on dit assez indiféremment a échapé, ou est échapé. Je crois pourtant, ajoute-t-il, qu' il y a un choix à faire, et que quand on dit que le cerf a échapé aux chiens, c' est pour faire entendre qu' ils ne l' ont pas ateint ou aperçu; et quand on dit le cerf est échapé aux chiens, c' est pour faire entendre que les chiens l' ont vu et serré de près, mais qu' il s' est tiré du péril par agilité ou autrement. Synon. _ Cette distinction est très-juste et très-judicieûse; mais ce que dit cet illustre Académicien, de l' indiférence du choix des deux auxiliaires dans les autres ocasions, n' est pas aussi exact; car dans le sens d' éviter, on doit mettre toujours l' auxiliaire avoir, et avec l' impersonel, toujours l' auxil. être. _ * "Il avoit échapé dans ce Mémoire quelques assertions trop fortes. Anon. Il falait dire, il leur étoit échapé, etc.
   2°. S' Échaper a le 1er sens n°. 1°. on en voit la diférence d' avec échaper, dans cette phrâse. "Un des voleurs a échapé au Prévôt; l' autre, qui avait été pris, s' est échapé de prison. Voy. s' évader. = S' échaper régit quelquefois la prép. en: "Elle s' échape quelquefois en des discours un peu libres. Il se dit aussi sans régime. "Il est sujet à s' échaper; il s' échape souvent.
_ Pour les verbes, il régit la prép. à, et il est échapé, la prép. de; et ces deux régimes, indiquent des sens diférens. "Il s' est échapé à dire, il a eu le front, l' audace de dire: il lui est échapé de dire, il a dit par mégarde, par imprudence. "Rienzy née s' étoit encôre échapé à rien faire qui pût légitimement lui atirer quelque blâme. Duc.
   3°. * Quoiqu' échaper ait le sens d' éviter, il n' en a pas tous les régimes; et quoiqu' on dise, éviter de faire, on ne dit pas échaper de faire. "* Il seroit inconcevable comment... il auroit pu échaper de tomber entièrement sous l' esclavage de, etc. Hist. d' Angl.
   4°. On dit, échaper d' un danger, d' une batâille, et réchaper d' une maladie. * Boileau n' a pas fait cette distinction. Il dit, en parlant des Chanoines, poursuivis par les bénédictions du Prélat, et d' un Chanoine en particulier.
   Il tremble, il cède, il fuit, mais aucun n' en réchape.
Il y a dans ce vers deux impropriétés; l' une de mot, l' autre du régime. Il falait dire, n' y échape. Voyez n°. 2°. Voyez RÉCHAPER.
   5°. * Échaper un malade, pour dire, le guérir, est un provençalisme. "En ne saignant pas, on échape beaucoup de malades. L' expression est vicieûse et le terme impropre. Si le régime était bon, on dirait plutôt réchaper; mais ni l' un ni l' autre ne régissent les persones.
   6°. Laisser échaper se dit dans des ocasions où échaper tout seul serait un barbarisme. "Elle me dit qu' il ne lui arrivoit pas assez souvent d' avoir le plaisir d' entretenir des étrangers, pour en échaper l' ocasion. L' Abé Richard. _ On doit dire, laisser échaper l' ocasion, et non pas échaper l' ocasion; comme on dit, laisser tomber, et non pas, tomber un livre, ainsi que dit le peuple en certaines Provinces. Excepté dans le sens d' éviter, n°. 1°. Échaper est neutre, comme tomber.
   7°. On dit qu' une chôse est échapée de la mémoire, pour dire qu' on ne s' en souvient pas; et qu' elle est échapée de la main, pour dire qu' on l' a laissée tomber par mégarde. _ Rien n' échape à la prévoyance, aux lumières de cet homme: il voit tout, il prend garde à tout. _ Il l' a échapé belle, (st. prov.) Il a heureûsement évité un grand danger.
   ÉCHAPÉ, ÉE, adj. On dit, dans le st. fig. fam. d' un jeune homme inconsidéré et emporté, que c' est un cheval échapé, qu' il fait le cheval échapé. _ S. m. "Un échapé des petites maisons, un fou. _ Un échapé de barbe, un cheval engendré d' un barbe et d' une cavale du pays. Un échapé de Juif, ou un homme échapé de Juif, qu' on soupçone d' être de race Juive.

ÉCHARDE


ÉCHARDE, s. f. Piquant de chardon, ou petit éclat de bois, qui entre dans la chair.

ÉCHARDONER


ÉCHARDONER, v. act. Arracher les chardons d' un champ, d' un jardin. "Echardoner une terre, une prairie.

ÉCHARPE


ÉCHARPE, s. f. [1re é fer. dern. e muet.] Large bande d' étofe, etc. qu' on portait autrefois de la droite à la gauche, en forme de baudrier, et qu' on a porté ensuite en forme de ceinturon. _ Parmi les gens de guerre, la couleur de l' écharpe marque la Nation, ou le Parti. De là l' expression proverbiale, changer d' écharpe, de parti. _ Coup d' épée en écharpe, qui va en travers. Canon qui tire en écharpe, de biais.
   Avoir l' esprit en écharpe (st. prov.) L' esprit embrouillé, de travers, ou troublé, altéré, ou simplement distrait. _ Le lit est l' écharpe de la jambe. Quand on a une jambe malade, il faut se tenir au lit. _ En provençal, on dit: jambe au lit, et bras au cou, en écharpe.

ÉCHARPER


ÉCHARPER, v. act. [1re et dern. é fer.] Doner un coup d' épée de travers. Tâiller en pièces. Trév. Doner un coup d' estramaçon. Acad. _ L' Académie explique un mot peu conu par une expression encore moins conûe. "Il lui a écharpé le visage, le bras.

ÉCHARS


*ÉCHARS, ARSE, adj. ÉCHARSEMENT, adv. ÉCHARSETÉ, s. f. vieux mots. Chiche, avâre. D' une manière chiche. Avarice. On écrivait eschars, escharsement, escharseté. _ Echarseté est encore usité en termes de Monoie. Défaut d' une pièce qui n' est pas du titre ordoné.

ÉCHASSES


ÉCHASSES, s. f. pl. [Échâce; 1re é fer. 2e lon. 3e e muet.] Deux longs bâtons, à chacun desquels il y a une espèce d' étrier, ou un fourchon, dans lequel on met les pieds; dont on se sert pour marcher. _ On dit, en style familier, d' une persone qui est trop haut montée sur ses jambes, qu' il semble qu' elle soit sur des échâsses. _ Et dans le style médiocre et critique, d' un homme qui a l' esprit guindé, qu' il est toujours monté sur des échâsses. _ On le dit aussi du style.

ÉCHAUBOULÉ


ÉCHAUBOULÉ, ÉE, adj. ÉCHAUBOULûRE, s. f. [Écho-bou-lé, lé-e, lûre; 1re é fer. 4e é fer. aux 2 1ers, longue au 2d et 3e.] Échauboulé, qui a des échauboulûres, c. à. d. de petites élevûres rouges, qui viènent sur la peau.

ÉCHAUDÉ


ÉCHAUDÉ, s. m. [Échodé, 1re et dern. é fer. 2e dout.] Espèce de pâtisserie faite de pâte échaudée. _ * Dans les Provinces Méridionales, quelques-uns disent chaudé, mais mal.

ÉCHAUDER


ÉCHAUDER, v. act. [Échodé; 1re et dern é fer. L' au est douteux devant la syll. masculine; devant l' e muet, il est long: il échaûde, échaûdera, etc. Pron. échôde, échôdera, etc.] 1e. Laver d' eau chaude et bouillante. Echauder un pot de terre. = 2°. Tremper dans l' eau chaude: échauder de la volaille pour la plumer. = 3°. Jeter de l' eau chaûde sur.... Échauder de la pâte. = 4°. Fig. (st. fam.) S' échauder et être échaudé, être atrapé; recevoir quelque perte dans une afaire. "Il s' y est échaudé; il craint de s' y échauder. _ "Il y a été échaudé.

ÉCHAUDOIR


ÉCHAUDOIR, s. m. [Écho-doar; 1re é fer. 2e dout.] Il se dit et du lieu où l' on échaude, et des vaisseaux, qui servent à échauder.

ÉCHAUFAISON


ÉCHAUFAISON, ÉCHAUFûRE, s. f. [Échofézon, fûre; 1re é fer. 3e è moy. au 1er, lon. au 2d.] La Touche remarque qu' ils se disent également bien, suivant l' Acad. Il croit pourtant le 1er plus usité. Dans sa dern. édit. l' Acad. paraît y mettre quelque diférence. Elle dit le 1er, d' un mal causé par une chaleur excessive, et qui parait par une ébullition; et le 2d, d' une petite rougeur, d' une petite élevûre qui vient sur la peau dans une échaufaison. Mais les exemples qu' elle done paraissent les confondre. "Ce n' est qu' une échaufaison; ce n' est qu' une échaufûre.

ÉCHAUFFANT


*ÉCHAUFFANT ou ÉCHAUFANT, ANTE, adj. [Échofan, fante; 1re é fer. 3e lon.] Qui échaufe. "La grace éclairante et échaufante, Panégir. de St. François de Paule. _ Ces deux adjectifs sont des mots forgés peu heureûsement. "L' astre lumineux et échaufant. Feller. "Des boissons échaufantes; Tissot.

ÉCHAUFFEMENT


ÉCHAUFFEMENT, ou ÉCHAUFEMENT, s. m. ÉCHAUFFER, ou ÉCHAUFER, v. a. [Echôfeman, échofé; 1re é fer. L' au devant la syll. masc. est dout., devant l' e muet, il est long: il échaûfe; échaûfera, etc. Pron. échôfe, échôfera, etc.] Échaûfement, est l' action d' échaufer, ou l' éfet de cette action. Acad. Je crois qu' il n' a que ce dernier sens, un sens passif, et qu' il ne se dit point de l' action de ce qui échaufe, mais de l' état de celui, qui est échaufé. = Échaufer, doner de la chaleur. Échaufer la chambre. "Il avoit tant de froid, qu' on ne pouvoit l' échaufer. "Le vin, les épiceries échaufent le sang. _ S' échaufer. "Il s' est échaufé à marcher: "Il a pris une pleurésie, pour s' être trop échaufé.
   REM. 1°. Échaûfement ne se dit que dans ce dernier sens. "À~ mesûre que l' échaûfement augmente, la fumée devient plus dense. Bernard, Mémoire sur le charbon de pierre.
   2°. Échaufer et s' échaufer se disent dans le propre et dans le figuré. "Ce feu échaufe la chambre: ce discours échaufe les esprits: ses mains s' échaufoient par le travail. "La dispute, la querelle, la conversation s' échaufa: la guerre s' échaufe, elle est fort échaufée. = Si ce verbe a un 2d régime, c' est la prép. par, et non pas la prép. de, du moins en prôse.
   À~ quoi bon d' une muse au carnage animée
   Échaufer ta valeur déja trop allumée.
       Boil.
En prôse, on dirait, par les accens d' une Mûse; car, par une Mûse ne vaudrait rien. = Dans l' Ann. Litt. On lui fait régir la prép. à, qui est le régime d' animer. "La Duchesse de Montpensier pouvoit bien échaufer à sa vengeance l' assassin du dernier des Valois, mais Palmire est-elle dans le même cas? (dans la Tragédie de Mahomet.) Ce régime n' est pas admis par l' usage.
   3°. On dit, figurément (st. fam.) qu' une chose échaûfe le sang, la bile à un homme, pour dire, qu' elle le met en colère, qu' elle l' impatiente. _ Ne m' échauffez pas les oreilles: finissez un discours, qui comence à me mettre en colère. _ Le jeu s' échaufe, comence à s' échaufer: on comence à jouer avec chaleur: _ En st. proverbial et plaisant, on dit d' un homme qui se passione, qui s' anime trop, qu' il s' échaufe dans son harnois.
   4°. Se chaufer et s' échaufer, ont des sens diférens. Voy. CHAUFER.
   ÉCHAUFÉ, ÉE, adj. Il s' emploie ordinairement sans régime. Mde. de B... (Hist. d' Angl.) lui fait régir la prép. de. "Les convives étoient échaufés de vin et de joie. Ce régime ne fait point mal dans cette phrâse. = Il s' emploie quelquefois substantivement. Sentir l' échaufé, exhaler une odeur désagréable, ocasionée par une chaleur excessive.

ÉCHAUFOURÉE


ÉCHAUFOURÉE, s. f. [Écho-fou-ré-e; 1re et pénult. é fer.] 1°. Entreprise téméraire et malheureûse. "Il a fait une étrange échaufourée. = 2°. Rencontre imprévûe à la guerre. "Ce ne fut pas un combat: ce ne fut qu' une échaufourée. _ Dans l' un et l' autre sens, il n' est que du st. fam.

ÉCHAUFûRE


ÉCHAUFûRE. Voy. ÉCHAUFAISON.

ÉCHAUGUETTE


ÉCHAUGUETTE, s. f. [Échoghète; 1re é fer. 3e è moy. dern. e muet.] Guérite au haut d' une place forte, pour découvrir ce qui se pâsse aux environs.

ÊCHE


ÊCHE: l' ê est ouv. et long dans bêche, lêche, griêche, pêche (action de pêcher) pêche (fruit) revêche; il empêche, il dépêche. Il est bref et moyen dans calèche, flèche, crèche, sèche, brèche, on pèche, (on fait un péché.) D' Olivet.

ÉCHÉANCE


ÉCHÉANCE, s. f. [1re et 2e é fer. 3e lon. 4e e muet.] Terme où échoit le paiement d' une chôse dûe. "L' Échéance d' une lettre de change. À~ l' échéance du terme, du paiement.

ÉCHEC


ÉCHEC, s. m. [Échèk; 1re é fer. 2e è moy.] Brébeuf écrit échet avec un t à la fin; c' est une mauvaise ortographe. = Jeu qui se joue par deux persones sur un tablier ou damier, avec huit pièces et huit pions de chaque côté. _ = Il se dit aussi des pièces dont on joue à ce jeu, collectivement prises. "Des échecs d' ivoire, d' ébène, de bois, etc. _ Le proverbe dit qu' au jeu d' échecs, les fous sont les plus près des Rois; ce qu' on aplique malignement.
   ÉCHEC, au singulier, se dit quand on ataque le Roi, de sorte qu' il est obligé de se retirer, ou de se couvrir. Doner échec; mettre le Roi en échec. Échec au Roi et à la Dame. = Échec et mat, c' est quand le Roi est ataqué de manière qu' il ne peut ni se retirer, ni se couvrir. _ Figurément, (st. fam.) Être échec et mat, être perdu sans ressource. = Tenir en échec, empêcher d' agir, tenir en crainte: Tenir une Armée, une place, la partie adverse en échec.
   Il s' acomode encor moins d' un comique
   Dont la froideur tient la joie en échec,
   Que d' un tragique où l' oeil demeûre sec.
       Rousseau.
  ÉCHEC, au figuré, perte considérable que font des Troupes. "Les énemis reçurent un grand échec. _ Par extension, il se dit des particuliers. "C' est un grand échec à sa fortune, à son honneur, à sa faveur. Recevoir, ou soufrir un grand, un terrible échec en son honeur, en sa réputation.

ÉCHELLE


ÉCHELLE, s. f. ÉCHELON, s. m. [Échè--le, Échelon.] 1re é fer. 2e è moy. au 1er, e muet au 2d.] Echelle, instrument qui sert à monter. Trév. Rich. Port. Cela est trop vague. "Machine de bois composée de deux longues branches, traversées d' espace en espace par des bâtons, disposés en sorte qu' on puisse s' en servir pour monter et descendre. Acad. Il y a aussi des échelles de corde. Échelon est ce bâton qui traverse l' échelle et sert de degré pour monter. Monter à une échelle. "Il avoit le pied sur le premier, sur le dernier échelon.
   ÉCHELLE est encôre, 1°. dans les cartes géographiques et les plans, une ligne divisée en plusieurs espaces, pour mesurer les distances. = 2°. Place de comerce sur les côtes dans les Mers du Levant. "Trafiquer dans les Échelles du Levant.
   On dit proverbialement: après cela il faut tirer l' échelle: on ne peut voir de plus belle chôse.
   ÉCHELON, dans le st. figuré familier, est ce qui sert à mener d' un rang à un aûtre plus haut. "Cette petite charge est un échelon pour monter à une plus grande. "Il est monté d' un échelon, d' un degré: il est avancé d' autant. L' Acad. le met sans parler du style.

ÉCHELLER


*ÉCHELLER, v. a. Vieux mot, au lieu duquel on dit à présent, escalader. Trév. Rich.

ÉCHENILLER


ÉCHENILLER, v. a. [Écheni-glié; 1re et dern. é fer. 2e e muet: mouillez les ll.] Ôter les chenilles des arbres.

ÉCHEVEAU


ÉCHEVEAU, s. m. [Échevo; 1re é fer. 2e e muet, 3e dout.] Fil, soie ou laine, replié en~ plusieurs tours, afin qu' ils ne se mêlent pas. Écheveau de fil, de soie. Dévider un écheveau. = Mde. de Sévigné l' emploie au figuré. "Et puis cette Providence, qui me revient; car sans cela on n' auroit jamais fait à retourner sur le passé: C' est un écheveau, qui ne finiroit point.

ÉCHEVELÉ


ÉCHEVELÉ, ÉE, adj. [1re et 4e é fer., 2e et 3e e muet.] Qui a les cheveux épars et en désordre. Suivant l' Acad., il se dit plus souvent d' une femme que d' un homme. "Elle étoit échevelée.

ÉCHEVIN


ÉCHEVIN, s. m. ÉCHEVINAGE, s. m. [Éche-vein, vinage: 1re é fer., 2e e muet.] Échevin, est le nom d' un Oficier municipal, élu pour avoir soin des afaires comunes d' une Ville pendant un certain temps. On lui done ce nom à Paris, à Lyon, à Marseille. À~ Toulouse, on dit Capitouls; à Bordeaux, Jurats; dans les aûtres Villes, Consuls. = Échevinage, est la charge d' Échevin: "Briguer l' échevinage, et le temps de l' exercice: "Durant, ou, sous l' échevinage de... Sous~ son échevinage.

ÉCHIFRE


ÉCHIFRE, s. m. Terme d' Architectûre. Mur rampant, sur lequel portent les marches et la rampe d' un escalier.

ÉCHINE


ÉCHINE, s. f. ÉCHINÉE, s. f. ÉCHINER, v. a. [1re é fer., 3e e muet au 1er, é fer. aux aûtres.] Echine, est l' épine du dôs, la partie de l' animal qui prend depuis le cou jusqu' aux fesses. Trév. Depuis le milieu des épaules jusqu' au croupion. Acad. _ On le dit toujours au singulier, quand on ne parle que d' une seule persone. * En Provence, plusieurs disent les échines, mais mal. = On ne s' en sert que dans le discours familier: L' Acad. n' en distingue point l' usage. L. T.
   ÉCHINÉE, pièce d' un cochon, qui se coupe sur le dos. Trév. Morceau du dos d' un cochon. Acad.
   ÉCHINER, au propre, rompre l' échine. "On lui a donné un coup qui l' a échiné. "Il s' est échiné en voulant soulever un trop grand poids. = Au figuré, tuer, assomer dans une mélée, dans une déroute. "Allez à la guerre vous faire échiner. _ Échiner de coups, batre outrageûsement: c' est du figuré familier. _ Trév. met échiner, ou échigner. On n' écrit plus que le premier.

ÉCHIQUIER


ÉCHIQUIER, s. m. [Échi-kié: 1re et dre é fer.] Tablier carré sur lequel on joûe aux échecs, et qui est divisé en plusieurs câses, ou carrés de deux couleurs. "Planter des arbres en échiquier, c' est les planter en sorte que leur figûre représente plusieurs carrés faits en échiquier.

ÉCHO


ÉCHO, s. m. et f. [Pron. éko.] Ce mot est féminin, et s' emploie sans article, quand il se dit de la Nymphe de ce nom. "Écho entendit ses regrets, et d' une triste voix les répéta à toutes les Divinités champêtres. _ Il est masc., quand on parle d' un son réfléchi. "Un bon écho: les échos redoublés, les échos d' alentour. "Il y a des échos qui répètent jusqu' à six, sept, huit fois, et plus. = En ce sens, il se prend aussi pour le lieu où se fait l' écho. = Figurément, mais tout au plus dans le style médiocre, on dit, d' un homme qui répète ce qu' il a entendu, qu' il est l' écho de... Ce mot est aujourd' hui à la mode. "Ces bonnes gens-là, à force d' être les échos et les valets du grand homme (Voltaire) ont fait semblant, pour s' arranger une existence, d' en être les adorateurs. Ne pouvant pas trop prétendre aux honneurs de l' apothéose, ils desservent au moins le temple du Dieu. En conséquence, il leur faut des prosélytes, ou des martyrs. Dorat. Un Auteur moderne, parlant d' un fameux libertin, dit que sa mort fut l' écho de sa vie voluptueûse. Un Prédicateur avait ainsi divisé son Sermon sur la mort. "Elle est l' école de la vie; en pensant à la mort, on apprend à bien vivre. Elle est l' écho de la vie; on meurt comme on a vécu. _ Tout cela est de mauvais goût. _ Gresset l' emploie plus élégamment.
   Loin de ce Médisant infâme,
   Qui, de l' imposture et du blâme
   Est l' impur et bruyant écho.

ÉCHOIR


ÉCHOIR, v. n. [É-choar.] Au présent de l' indicatif, il n' est en usage qu' à la 3e pers. du sing. il échoit, qu' on prononce quelquefois échet (é-choa, échè). J' échus; j' écherrai, j' écherrais, que j' échusse, échéant. _ Il n' a point d' imparfait de l' indicatif, et l' on ne doit pas dire comme Mde. de B... (Hist. d' Angl.) La Loi lui permettoit d' aliéner les terres qui lui écheoient. M. des Essarts dit au futur, il échoira. "Pour jouir par les héritiers de la portion qui leur échoira. Causes Célèbres.
   ÉCHOIR, c' est 1°. Arriver par succession, par donation, par fortune, ou par hazard. Trév. Par sort, ou par cas fortuit. Acad. "Il lui est échu une succession, un lot de mille écus, etc. _ On dit (st. famil.), si le câs y échoit, si l' ocasion s' en présente. = 2°. Il se dit du terme, du temps préfix auquel on doit faire certaines chôses. "Le premier terme échoit à la Saint-Martin. "Cette lettre de change est échue, et non pas a échu: Ce verbe prend dans ses temps composés l' auxil. être. = 3°. Il se dit des persones, avec bien ou mal, dans le sens de rencontrer. "Vous ne sauriez que bien échoir, bien rencontrer. "Je suis mal échu, j' ai mal rencontré. _ Gresset lui fait régir la prép. en.
   Pour un enfant qui sort du Monastère,
   C' étoit échoir en dignes compagnons.       Ververt.

ÉCHOLE


ÉCHOLE, voy. ÉCOLE.

ÉCHOPPE


ÉCHOPPE, s. f. [Échope. On pourrait l' écrire de même avec un seul p: 1re é fer., dre e muet.] 1°. Petite boutique, ordinairement en apentis, et adôssée contre une murâille. = 2°. Pointe ou aiguille, dont les Graveurs se servent pour graver sur le vernis dur.

ÉCHOUER


ÉCHOUER, v. n. et a. [É-chou-é: 1re et dre é fer.] Doner contre un rocher, ou sur le sâble, dans un endroit de la mer où il n' y a pas assez d' eau pour floter. Il se dit, et du vaisseau, et de ceux qui sont dedans. "Le vaisseau échoua sur un banc de sable. "Nous échouâmes sur cet écueil. On le dit aussi des baleines. = Il est quelquefois actif et réciproque. "Le Pilote nous échoua, échoua le vaisseau. "Il aima mieux s' échouer que de nous laisser prendre. = Au figuré, ne réussir pas à ce qu' on a entrepris. Il se dit, et des persones, et des chôses: "Vous échouerez dans cette entreprise. Ses desseins échouèrent: cette afaire a échoué.
   Rem. L' usage ne done à ce verbe que l' auxil. avoir, soit dans le propre, soit dans le figuré. * Quelques Auteurs l' ont employé avec l' auxil. être. "L' expédient auquel ils avoient eu recours étoit entièrement échoué. Hist. d' Angl. "Octave Farnèse, voyant que son dessein étoit échoué. Hist. d' Allem. "Une fois que le vaisseau étoit échoué. Let. Édif. _ Le Père Bouhours lui-même a dit (Vie de St. Ign.): Bientôt l' affaire de l' enregistrement fut échouée en apparence. Il semble que dans cette phrâse ce verbe est employé au passif; mais on ne l' emploie de cette manière qu' au participe. On dit, vaisseau échoué, dessein échoué; c' est une afaire échouée; mais on ne dit pas avec le verbe être, le vaisseau, le dessein est échoué, l' afaire est échouée: on dit toujours a échoué.
   2°. Echouer se fait sans dessein; s' échouer, avec dessein. "Cette place, où on vit les Ennemis s' échouer. Test. Polit. de Louvois. Il falait dire échouer.

ÉCHUTE


*ÉCHUTE, s. f. Richelet. "Il m' est venu une bonne échute. Ce mot est un barbarisme.

ÉCIMER


ÉCIMER, v. a. Couper la cime des arbres. "On écime de temps en temps les saûles.

ÉCLABOUSSER


ÉCLABOUSSER, v. a. ÉCLABOUSSûRE, s. f. [Éklabou-cé, sûre: 1re é fer., 4e é fer. au 1er lon. au 2d.] Éclabousser, c' est faire rejaillir de la boûe sur... Éclaboussûre, est la boûe qu' on fait rejaillir. "Ce cheval, ce carrosse m' a tout éclaboussé, a éclaboussé jusqu' à mon chapeau. "Mon habit est tout plein d' éclaboussûres.

ÉCLAIR


ÉCLAIR, s. m. [Éclêr: 1re é fer., 2e ê ouv. On pron. l' r finale.] Éclat de lumière subit et de peu de durée. Il se dit sur-tout de celui qui précède le tonnerre. "Il fait des éclairs continuels. "On ne voyoit qu' à la lueur des éclairs. = Figurément, passer comme un éclair, passer vite, ne durer guère. "Il ne s' est point arrêté, il a passé comme un éclair. "La gloire du monde passe comme un éclair. = * Par éclair, tout en courant, et sans beaucoup de réflexion: expression nouvelle. "Des Ministres légers, sans soucis, sans nuages, voyant tout par éclair, et décidant de même. Necker.
   * Pourrait-on imaginer qu' un Poète de ce siècle ait fait ce mot féminin? C' est pourtant ce qu' a fait tout récemment l' Auteur des quatre Ages de l' Homme.
   Mes amis, le bonheur est semblable à l' éclair:
   Elle brille, et n' est plus.

ÉCLAIRANT


*ÉCLAIRANT, ANTE, adj. [Éclèran, rante: 1re é fer., 2e è moy., 3e lon.] Qui éclaire. "La grâce éclairante et échauffante. Ces deux adjectifs ne sont pas usités. _ L' Auteur d' un Dictionaire de Physique estimé l' a employé. "C' est ce commerce de lumière entre le corps éclairant, qui sert à réparer abondamment les pertes immenses que doit faire l' atmosphère du soleil. Père Paulian. _ On dit plus comunément, les corps lumineux.

ÉCLAIRCIE


ÉCLAIRCIE, s. f. [Éklêr-cî-e: 1re é fer. 2e ê ouv., 3e lon., 4e e muet.] Terme de Marine. Endroit clair, qui parait au ciel, en temps de brume. Il y a des Marins qui disent un éclairci. "Nous avons apperçu les ennemis, dans un éclairci, à deux lieues. Journ. de Gen.

ÉCLAIRCIR


ÉCLAIRCIR, v. a. ÉCLAIRCISSEMENT, s. m. [Éclêrci, cice-man: 1re é fer., 2e ê ouv., 4e e muet au 2d.] Éclaircir, est 1°. Rendre clair, ou plus clair. "Le vent a éclairci le temps. Éclaircir la voix, la vûe, le teint; éclaircir de la vaisselle. = 2°. En parlant des chôses liquides, rendre moins épais: "Eclaircir un sirop trop épais. = 3°. Diminuer le nombre. "Le canon éclaircissoit les rangs. "Eclaircir une forêt. _ Il a bien éclairci son bien (style plaisant), il en a mangé une partie. = 4°. Figurément, rendre plus clair, plus intelligible. Éclaircir un fait, un point de doctrine, une question, une matière. "Le temps éclaircira la vérité. _ Éclaircir un doute, une dificulté, les résoudre.
   Rem. Éclaircir et éclairer, ont, dans le fond, le même sens; mais ils n' ont pas le même emploi. Le 1er se dit des chôses seulement en régime absolu (l' acusatif); le 2d se dit des persones. On ne dit point éclaircir quelqu' un, mais l' éclaircir d' un fait, l' en instruire. Racine dit, dans Bajazet:
   O Ciel! combien de fois je l' aurois éclaircie,
   Si je n' eusse, à sa haine, exposé que ma vie!
La pensée du Poète est, je lui aurais tout dévoilé, je l' aurais instruite de son erreur sur mon compte; mais l' expression dont il s' est servi n' est pas suivant l' usage. _ Mde. Dacier dit aussi, dans l' Odyssée: "Je lui fis (à Ulysse) plusieurs questions, pour tirer la vérité de sa bouche: mais lui, avec sa finesse et sa souplesse ordinaire, il évita toujours de me répondre et de m' éclaircir. = Bossuet emploie souvent ce verbe avec le régime absolu des persones, dans le sens d' éclairer, instruire. "On aura égard à ce qui peut calmer, éclaircir, édifier les autres. "Je prie Dieu de vous éclaircir (éclairer) sur ce que vous avez à faire.
   M. de la Harpe, au contraire, emploie éclairer pour les chôses, au lieu d' éclaircir, dans une lettre adressée à Voltaire. Il le prie d' éclairer les doutes qu' il lui propôse. Éclaircir était là le vrai mot.
   Avec l' ablatif (la prép. de) pour 2d régime, éclaircir se dit fort bien des persones en régime absolu. "Je l' éclaircirai de ce point là: il faut l' en éclaircir. "Je veux m' en éclaircir. _ On dit aussi, s' éclaircir sur. "Il faut, s' éclaircir sur cette afaire.
   ÉCLAIRCISSEMENT, n' a que le 4e sens, le sens figuré d' éclaircir. Explication d' une chôse obscûre: "Éclaircissement d' une difficulté, d' un doute. On ne dit point au propre, l' éclaircissement du temps, de la vûe, de la voix, etc.; du sirop, d' un bataillon, etc., comme on dit éclaircir dans les 3 1ers nos. = Mais il a une signification particulière, que ce verbe ne partage pas. C' est, en matière de querelle, une explication que l' on demande à un homme, pour savoir si dans ce qu' il a dit, ou fait, il a eu intention d' ofenser, ou même s' il a dit, ou fait ce qu' on lui prête, et qu' on nous a raporté. Tirer un éclaircissement de... En venir à un éclaircissement. "Je veux avoir avec lui un éclaircissement. _ Plusieurs disent, en ce sens, s' éclaircir avec: "Je veux m' éclaircir avec lui; mais cette manière de parler est tout au moins douteûse.

ÉCLAIRÉ


ÉCLAIRÉ, ÉE, adj. [Ékléré, rée: les 3 é fer., le 3e long au 2d.] 1°. Au propre, qui a un grand jour, escalier bien éclairé. _ Qui a beaucoup de lumières, salle bien éclairée. = Au figuré, en parlant des persones, qui a de grandes lumières, beaucoup de conaissances. C' est un homme fort éclairé; un esprit fort éclairé. _ L' Ev. d' A... jouant le mot sur ces deux sens, dit tout haut, en sortant le soir du Palais de l' Arch. de... où il n' avait pas été reçu comme il croyait le mériter: "Cette maison est bien peu éclairée. = On dit, dans un aûtre sens, qu' une maison, qu' un jardin, sont trop éclairés, parce qu' on y est exposé à la vûe de tout le monde.
   ÉCLAIRÉ, suit toujours, même en vers, le substantif qu' il modifie.
   ÉCLAIRÉ, suivant l' Ab. Girard, est distingué de clairvoyant, en ce qu' il est le fruit de l' étude, et clairvoyant, de l' esprit. "L' homme éclairé ne se trompe pas, il sait; l' homme clairvoyant ne se laisse pas tromper, il distingue. "Un Juge éclairé connoît la justice d' une cause: il est instruit de la Loi qui la favorise, ou qui la condamne, le Juge clairvoyant pénètre les circonstances et la nature d' une cause, il est d' abord au fait, et voit de quoi il est question. GIR Synon. _ Ces deux qualités sont entre elles comme la science et la pénétration. Voy. INSTRUIT.

ÉCLAIRER


ÉCLAIRER, v. a. [Ékléré: 3 é fer.] 1°. Au propre, répandre la clarté sur... "Le soleil éclaire la terre. "Le flambeau éclaire toute la chambre. _ Et neutralement: "Le soleil éclaire; la lune n' éclairoit plus. = 2°. Au figuré, doner de la clarté à l' esprit. "Les bonnes lectures éclairent l' esprit, sans corrompre le coeur. "Seigneur, éclairez mon entendement. = 3°. Instruire de ce qu' on ignôre; détromper.
   J' imagine un moyen d' éclairer votre mere.
   Sur le fourbe insolent qui la mène aujourd' hui.
       Méchant.
_ Voy. ÉCLAIRCIR. _ On dit aussi, en ce sens, s' éclairer. "Lorsqu' on ne veut qu' être utile, on doit souhaiter de s' éclairer sur la manière de l' être. Anon. = 4°. Épier, observer; veiller sur. "Il faut l' éclairer de près, éclairer ses actions, sa conduite. = 5°. V. n. Aporter de la lumière à quelqu' un, pour lui faire voir clair. Il se dit au propre, et régit le datif (la prép. à.) Éclairez à Monsieur; et en sous-entendant le régime, éclairez; allez éclairer. "Euryclée éclairoit à ce jeune Prince. Mde. Dacier, Odyssée; c. à. d., portait le flambeau devant lui, comme l' Auteur l' a dit plus haut. * En Provence, plusieurs disent faire lumière à... "Faites lumière à Madame; faites-moi lumière. C' est un grossier provençalisme, un barbarisme d' expression. = 6°. Étinceler, briller. "Les yeux des chats éclairent pendant la nuit. _ * Quelques-uns le disent, mais mal, du feu, des flambeaux, des lampes: Ce feu éclaire bien; ces flambeaux éclairent mal: "Les lampes, qui éclairent devant la Chapelle du Saint. Vie de St. Pierre d' Alc. * Et activement: "Eclairez ce feu. Il faut dire, faites brûler, ou flamber. Desgr. En Franche-Comté, on dit clairer: "Ce feu claire bien. Le barbarisme est encôre plus sensible. = 7°. V. neut. impers., faire des éclairs. "Il éclaire, quand il tonne. "Il n' a fait qu' éclairer toute la nuit.

ÉCLANCHE


ÉCLANCHE, s. f. Du temps de Richelet ce mot était du bon style, puisqu' il dit que c' est ce qu' on apèle en Province gigot de mouton; l' Acad. dit, au contraire, qu' on l' apèle plus ordinairement gigot. _ Le Rich. Port. le met sans remarque.

ÉCLAT


ÉCLAT, s. m. [Ekla: 1re é fer.] 1°. Partie d' un morceau de bois, qui est rompu en long. Il fut blessé de l' éclat d' une lance. "Les lances des deux Chevaliers volèrent en éclats. _ On le dit aussi des pierres, des bombes, des grenades, etc. = 2°. Lueur brillante. "L' éclat du soleil, des pierreries, des couleurs, des yeux, du teint, etc. = 3°. Figurément, gloire, splendeur, magnificence. "Action d' éclat "Cela a répandu un grand éclat sur sa famille, sur son nom, sur sa répuation. "Il a paru à la Cour avec éclat. "Il n' aime point l' éclat et la pompe: "Ne vous laissez point éblouir par l' éclat des grandeurs et des richesses. = 4°. Bruit: Un éclat de tonnerre. un grand éclat de voix. _ Cette action a fait éclat, ou, de l' éclat; a fait peu d' éclat, ou, beaucoup d' éclat, elle a fait beaucoup de bruit. _ Eclat de rire, bruit qu' on fait en riant. "Il lui prit un éclat de rire. "Ils firent de grands éclats de rire. = 5°. Rumeur, scandale. Faire un éclat. "Craindre, éviter, prévenir, empêcher l' éclat, ou, un éclat. "Il devoit bien s' épargner cet éclat.
   Rem. 1°. Eclat, brillant, lustre (synon.) Il y a une gradation entre ces trois mots. L' éclat enchérit sur le brillant, et le brillant sur le lustre; de sorte que c' est avec quelque raison qu' on a critiqué l' expression d' un Auteur, qui a défini le je ne sais quoi, le lustre du brillant, et qu' on a remarqué qu' il aurait mieux dit, le brillant du lustre, s' il pouvait y avoir du mieux dans ce qui est absolument mauvais. _ Mais ces mots ne sont pas faits pour être sous le régime l' un de l' autre. On ne dit pas l' éclat du brillant, ni le brillant du lustre, encôre moins le lustre du brillant, ou le brillant de l' éclat. Il faut opter pour l' un des trois, suivant le goût ou la force de ce qu' on veut exprimer; ou si l' on veut les apliquer tous trois au même sujet, il faut que ce soit sans régime et par forme de gradation, en disant, par exemple, d' une étofe, qu' elle a du lustre, du brillant, et même de l' éclat. "Les couleurs vives ont plus d' éclat que les couleurs pâles: les couleurs claires ont plus de brillant que les couleurs brunes; les couleurs récentes ont plus de lustre que les couleurs usées. Il semble que l' éclat tiène du feu, que le brillant tiène de la lumière, et que le lustre tiène du poli. = On ne se sert guère du mot de lustre que dans le sens littéral, pour ce qui tombe sous la vue.; mais on emploie quelquefois celui d' éclat, et encôre plus, celui de brillant, dans le sens figuré, pour le discours et les ouvrages d' esprit. Etant considérés dans ce sens, il me paroît, dit l' Abé Girard, que c' est par la vérité, la force et la nouveauté des pensées qu' un discours a de l' éclat; qu' il a du brillant par le tour et la délicatesse de l' expression; et que c' est par le choix des mots, la convenance des termes et l' arrangement de la phrâse, qu' on done du lustre à ce qu' on dit. Gir. Synon.
   2°. Il parait que c' est Mrs. de Port-Royal, qui les premiers ont apliqué le mot d' éclat aux pensées. "Nicole dit que l' éloquence et la facilité de parler donent un certain éclat aux pensées; cette expression m' a paru belle et naturelle: le mot d' éclat est bien placé: ne le trouvez-vous pas? Sév.
   3°. * Mettre en éclat, pour illustrer, est une locution surannée. Corneille s' en est souvent servi.
   Allons mettre en éclat cette belle journée.
      OEdipe.
  Je lui dis qu' en éclat j' avois mis votre vie, etc.
4°.On dit, faire un éclat, témoigner avec éclat son mécontentement. * Du Cerceau, qu' une syllabe de plus embarrassait, a dit, faire éclat.
   Si vous n' y pourvoyez; et ne faites éclat,
   Vos troupes de trois mois ne seront en état.
On ne dit point, faire éclat tout seul. Voyez n°. 5°. p. 17.
   5°. Plusieurs disent rire aux éclats, pour éclater de rire, faire des éclats de rire. "Gens, qui parlent toujours, et ne s' interrompent que pour rire aux éclats de ce qu' ils ont dit et de ce qu' ils vont dire. L' Abé Le Monnier. "Élle rioit aux éclats, en se peignant la contenance étonée et bête qu' auroient les Grands et les Magistrats, etc. Reine Fantasque, Conte atribué à J. J. Rousseau. "Elles me regardoient de la tête aux piés avec une mine... une vilaine mine, je vous assure, et puis elles rioient entre elles, et aux plus grands éclats. Th. d' Éduc.

ÉCLATANT


ÉCLATANT, ANTE, adj. [1re é fer. 3e lon.] Qui a de l' éclat. Il se dit, comme éclat, au propre et au figuré. Lumière éclatante: couleurs, pierreries éclatantes. Tout éclatant de lumière. _ Action, gloire éclatante. _ Son éclatant, voix éclatante.
   Rem. 1°. Cet adjectif suit ou précède le substantif, au choix du Poète ou de l' Orateur.
   Dans une éclatante voûte
   Il a placé de ses mains
   Le Soleil, qui, dans sa route,
   Eclaire tous les humains.
       Rousseau.
"Lorsqu' il étoit revêtu de sa longue robe d' une éclatante blancheur. Télém. L' Auteur aurait pu dire aussi d' une blancheur éclatante. _ Il y a des ocasions où cet adjectif ne fait pas bien devant le substantif. "Tel que l' ivoire le plus blanc, qu' une femme de Méonie ou de Carie mêle avec la plus éclatante pourpre. Mde. Dacier. L' inversion est dûre, et je voudrais, en cet endroit, la pourpre la plus éclatante.
   2°. Éclatant ne se dit point des persones, sans régime. On peut dire sans doute, un Héros, un Auteur, tout éclatant de gloire; mais on ne doit pas dire, un Hérôs, un Auteur éclatant.
   Un Guerrier même, un Héros, un Achille,
   En fait de goût, n' est pas plus compétent,
   Qu' en fait de guerre, un Auteur éclatant.
       Rouss.
Cela ne vaut rien, même en vers, même dans le style demi-marotique. Voyez ÉCLATER. Rem. 1°.

ÉCLATER


ÉCLATER, v. n. [1re et dern. é fer.] 1°. Se rompre par éclats. "Ce bois a éclaté: la bombe éclata en tombant: le bois s' est éclaté. = 2°. Faire un grand bruit. "Le tonnerre vient d' éclater. _ Fig. fam. Éclater, s' éclater de rire. _ Fig. noble: éclater en injures, en invectives, en reproches. = 3°. Venir à la conaissance de tout le monde. "Leur inimitié a enfin éclaté = 4°. Faire paraître son ressentiment. Il s' étoit contenu quelque temps, mais enfin il éclata. "Je fus au moment d' éclater; mais cet éclat aloit me perdre; je pris le parti de dissimuler. = 5°. Avoir de l' éclat, briller. "Il n' y a point de pierreries, qui éclatent plus que le diamant. _ Fig. "Son nom, sa gloire éclatent par tout le monde.
   REM. 1°. Eclater, ne se dit point des persones dans ce dernier sens.
   Jadîs, non sans tumulte, on me vit éclater.
       Boil.
"On peut compter parmi les plus grands hommes Hipocrate, le Père de la Médecine, qui éclata au milieu des aûtres, dans ces heureux temps de la Grèce. Boss. Cela ne serait bon aujourd'~ hui~ ni en prôse, ni en vers. = Avec le verbe faire, on peut employer éclater dans cette acception. "Il fit éclater dans ses premières campagnes une intrépidité, une ardeur, qui changea les railleries en éloges. Marm.
   2°. Eclater de rire, vaut mieux que s' éclater de rire. L' Acad. les met tous deux sans remarque. Elle a peut-être puisé le 2d dans La Font.
   Le premier qui les vit, de rire s' éclata.
Quelques-uns disent éclater tout seul: son rire étoit celui de la joie: en éclatant, il laissoit voir des dents plus blanches que l' ivoire. Marm. "On se mit à rire... On rit encôre plus... On éclata à ne plus s' entendre. Coyer. _ La Bruyère l' avait dit autrefois de la sorte. "Quoiqu' il n' ait nulle envie de rire, il porte à la bouche l' un des bouts de son manteau, comme s' il ne pouvoit se contenir, et qu' il voulut s' empêcher d' éclater. "Parler sans cesse à un Grand... rire jusqu' à éclater en sa présence. _ Comme éclater tout seul signifie ordinairement faire un éclat, témoigner tout haut son mécontentement; il pourrait y avoir quelquefois de l' équivoque à l' apliquer au rire. * En Provence plusieurs disent éclater le rire. On ne peut excuser celui-ci de barbarisme. On doit dire, éclater de rire.
   3°. S' éclater, se fendre. La Quintinie le fait actif. "Prenez garde de trop baisser cette branche, de peur de l' éclater. Il faut dire, de peur de la faire éclater. Voy. n°. 1°. _ * En Provence encôre, on dit éclater pour forcer, briser, ouvrir avec effraction. "Éclater une maison, un cofre, un tronc. C' est encôre un barbarisme.

ÉCLÉSIASTE


ÉCLÉSIASTE; ÉCLÉSIASTIQUE. Voyez ECCLÉSIASTE, ECCLÉSIASTIQUE avec 2 c.

ÉCLIPSE


ÉCLIPSE, s. f. ÉCLIPSER, v. a. [1re é fer. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Au propre, obscurcissement, ou du Soleil par raport à nous, par l' interposition du corps de la Lune, ou de la Lune, par l' interposition de la terre. "Éclipse de Soleil, Éclipse de Lune. L' éclipse du Soleil, l' éclipse de la Lune. = Au fig. (st. fam.) en parlant des persones, disparition. Il a fait une éclipse, une longue éclipse. _ Et dans tous les styles, en parlant des chôses, obscurcissement. "Il n' est point de gloire si éclatante qu' elle ne soit exposée à soufrir quelque éclipse.
   ÉCLIPSER se dit comme Éclipse, et au propre et au figuré; la Lune éclipse le Soleil. "Corneille éclipsa tous les Poètes Tragiques qui l' avoient précédé. = S' éclipser est plus usité au propre qu' éclipser. "Le Soleil s' éclipsa, la Lune comença à s' éclipser à telle heure. _ Au fig. (st. fam.) S' absenter. "Il s' éclipsa tout d' un coup. Il s' est éclipsé de la Cour. _ Par extension, il se dit des chôses: j' avois mis là des livres, des papiers; ils se sont éclipsés.
   Éclipser, obscurcir, (synon.) Ils n' ont de ressemblance qu' au figuré; et ils difèrent alors en ce que le 1er dit plus que le 2d. "Le faux mérite est obscurci par le mérite réel, et éclipsé par le mérite éminent. _ Observez que le mot éclipse ne signifie qu' un obscurcissement passager, au lieu que le verbe éclipser désigne un obscurcissement total et durable.
   Tel brille au second rang, qui s' éclipse au premier.
       Voltaire.
Cette remarque est fort judicieuse. Cet article est tiré de l' Encyclopédie, et raporté par M. Beauzée.

ÉCLIPTIQUE


ÉCLIPTIQUE, s. f. [1re é fer. dern. e muet: Ékliptike.] Ligne, ou cercle qui partage le zodiaque dans toute sa longueur en deux parties égales, et que le Soleil ne quitte jamais.

ÉCLISSE


ÉCLISSE, s. f. ÉCLISSER, v. a. [Éklice, cé: 1re é fer. 3e e muet au 1re, é fer. au 2d.] Éclisse, morceau de bois pour serrer les membres rompus. Trév. Bâton plat pour tenir en état un bras, ou une jambe cassés. Rich. Port. La description de l' Acad. est plus étendûe, mais celle du Rich. Port. sufit pour doner une idée de la chôse. = 2°. Eclisse est aussi un petit rond de jonc ou d' osier, sur lequel on met égoutter le lait pour faire des fromages. = Éclisser, c' est mettre des éclisses (n°. 1°.) le long d' une fracture.

ÉCLOPÉ


ÉCLOPÉ, ÉE, adj. [1re et 3e é fer.] Au propre, Qui a quelque incomodité, qui fait qu' il marche avec peine. "Il est tout éclopé. _ Par extension, il se dit de toute infirmité, qui réduit en quelque langueur et inaction. = Rousseau l' emploie au figuré, mais c' est dans le style plaisant et satirique.
   Phébus voyant sa mine constipée,
   Dit: quelle est donc cette Mûse éclopée,
   Qui vient chez nous racler du violon,
   En manteau court?

ÉCLôRE


ÉCLôRE, v. n. [1re é fer. 2e lon. 3e e muet. _ Il faut savoir gré à l' Acad. de n' avoir mis qu' une seule r à ce verbe, où l' ancien usage en mettait deux.] Il n' est d' usage qu' aux 3mes persones de certains temps, que voici. Il éclôt, ils éclôsent: il éclôra, il éclôrait, qu' il éclôse. Dans les temps composés, il prend l' auxil. être; il est éclôs, il était éclôs; qu' il fut éclôs, et non pas, il a éclôs, il avait éclos, etc. = Il se dit proprement, des animaux qui naissent d' un oeuf, comme oiseaux, insectes, etc. _ Par extension, des fleurs qui comencent à s' épanouir; du jour qui comence à paraître: "Le jour vient d' éclôre, comence d' éclôre. = Figurément, des pensées, des desseins qui se manifestent, après avoir été cachés quelque temps. Son projet était près d' éclôre, et non pas prêt à éclôre, comme dit l' Acad. (Voy. PRêT et PRèS.) Ses desseins éclôront un jour. _ Il est de tous les styles, mais sur--tout du style élevé et soutenu. _ Il régit quelquefois la prép. de: "Ces vains systêmes, éclôs des cerveaux creux de nos prétendus Penseurs, qui, sous prétexte de tout réformer, sèment partout le trouble et la destruction. Journ. de Mons.

ÉCLûSE


ÉCLûSE, s. f. ÉCLUSÉE, s. f. [1re é fer. 2e lon. au 1er, 3e e muet au 1er, é fer. et long au 2d.] L' éclûse est une construction de pierre ou aûtre matière, pour retenir ou élever l' eau dans une rivière ou dans un canal. _ On done aussi ce nom aux portes, qui y sont placées pour contenir ou lâcher l' eau, en les levant ou en les baissant. = Éclusée, est la quantité d' eau qui coule, depuis qu' on a lâché l' écluse jusqu' à ce qu' on l' ait refermée.

ÉCO


ÉCO. Richelet. Voy. ÉCHO.

ÉCOLâTRE


ÉCOLâTRE, s. m. C' est le nom qu' on done, dans quelques Églises Cathédrales, à un Chanoine, chargé aûtrefois d' enseigner la Théologie.

ÉCOLE


ÉCOLE, s. f. ÉCOLIER, IèRE, s. m. et f. [1re é fer. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d, è moy. et long au 3e; le, lié, liè--re.] École, est, 1°. un lieu où l' on enseigne les Belles-Lettres ou les Sciences. On ne le dit guère plus que des petites écoles. Maître d' école, aler, envoyer à l' école: camarade d' école. Pour les grandes, on dit, Collège, Université. = 2°. Ce mot se dit, dans quelques phrâses, de la Philosophie et de la Théologie. St. Thomas d' Aquin est l' Ange de l' Ecole. Termes de l' école. Cela sent l' école; la Scolastique, le pédantisme. = 3°. Secte de Philosophes, ou de Théologiens; l' Ecole d' Aristote, de Platon, de St. Thomas, de Scot, de Suarès, etc. _ Parmi les Peintres: diférentes manières des Peintres fameux, que leurs Disciples ont imitées; on ajoute au mot École, ou le nom des Villes, des Provinces où ces Peintres ont travaillé, ou le nom même de ces Peintres. "L' École de Rome, de Florence, de Lombardie; l' Ecole française, flamande; l' Ecole de Raphaël, du Titien, de Rubens, etc. = 4°. Ce mot est beau au figuré. "Daguesseau savoit que les vertus se forment à l' école de la frugalité. Thomas. = 5°. Au jeu de trictrac, faûte qui consiste à oublier de marquer les points qu' on gâgne, ou à en marquer de trop. "Il a fait une école.
   On dit, familièrement, qu' un homme est en bone école, quand il est avec des gens très capables de l' instruire. _ Dire les secrets de l' école, révéler les secrets d' un parti, d' une cabale, d' une coterie. L' Acad. dit: les nouvelles; mais, outre que ce n' est pas l' usage le plus constant, c' est que la métaphôre n' est pas soutenûe: "L' École avoit des secrets; on n' y disoit pas de nouvelles. _ Ecole buissonière, Voy. Buissonier. Voyez aussi Chemin.
   ÉCOLIER, est 1°. celui qui va à l' école ou au collège. Jeune ou petit écolier: écolier en Droit, en Philosophie, en Théologie. Écolier de Rhétorique, d' Humanités, de Gramaire, etc. = 2°. Celui, qui aprend quelque chôse sous un maître. Ce Maitre à danser fait de bons écoliers. C' est une de ses meilleures écolières. "J' ai été son écolier, son écolière. _ Voy. ÉLèVE.
   On dit d' un homme peu habile: "Ce n' est qu' un écolier: il est encôre écolier. "Ce général a fait une faûte d' écolier. Locutions familières. _ Prendre le chemin des écoliers. Acad. On dit ordinairement, de l' école. Voy. CHEMIN.
   Rem. L' Ab. Desfontaines fait ce mot adjectif. Il dit, en parlant du discours de M. Crevier, sur la convalescence du Roi (Louis XV.) "Nulles pensées puériles, point d' antithèses écolières: rien qui sente la déclamation et le clinquant. _ Cet adjectif est un néologisme, qui ne fait point mal en cet endroit.

ÉCONDUIRE


ÉCONDUIRE, v. act. [1re é fer. 2e et 3e lon. 4e e muet.] Refuser à quelqu' un ce qu' il demande. "Il m' a éconduit tout net. "J' ai été éconduit. _ On dit, proverbialement, pour exciter quelqu' un à faire une demande: "Vous ne serez pas éconduit et batu tout-à-la-fois.
   Rem. La Touche ne croyait pas qu' aucun bon Écrivain voulût employer ce verbe, si ce n' est en badinant. Aûtrefois l' Acad. ne le blâmait point. Dans les éditions suivantes, elle dit qu' il vieillit. Dans la dernière, elle se contente d' avertir qu' on ne le dit que des persones. On l' emploie encôre dans le style famil. et la nécessité le fera conserver.

ÉCONOMAT


ÉCONOMAT, s. m. ÉCONOME, adj. et subst. [On écrivait aûtrefois OEconomat, OEconome, OEconomie, etc. On a retranché cet o, qui ne faisait qu' embarrasser. On aurait dû rendre le même service pour OEcuménique.] Economat présente l' idée de la charge, emploi, ou ofice d' Économe. On ne le dit que de l' administration des revenus d' un Évêque, d' une Abaye et aûtres Bénéficesæ, pendant la vacance. _ Bureau des Économats, Receveur des Économats. "Jouir par Economat; obtenir des lettres d' Economat.
   ÉCONOME, adj. Ménager, ménagère, qui sait épargner. "Il ou elle est fort économe. _ Subst. "Un sage Économe; une bone Économe. = Dans les maisons religieûses, celui ou celle qui a le soin de la dépense. = Par rapport aux Évêchés, Abayes, etc. celui que le Roi nomme pour en administrer les revenus pendant la vacance

ÉCONOMIE


ÉCONOMIE, s. f. [1re é fer. 4e. lon. 5e. e muet.] L' ordre, la règle qu' on aporte dans la conduite et la dépense d' une maison. Avoir de l' économie; entendre l' économie. User d' économie. Vivre avec économie. = Ce mot vient de deux mots Grecs, oikos, maison, et nomos, loi. Il ne signifie originairement, que le sage et légitime gouvernement de la maison, pour le bien comun de toute la famille. Le sens de ce terme a été étendu au gouvernement de la grande famille, qui est l' État. Pour distinguer ces deux acceptions, on l' apèle, dans ce dernier sens, économie générale ou Politique (le second est plus usité); et dans l' aûtre, économie domestique ou particulière. J. J. Rousseau. Le premier est le plus en usage. _ Quand on dit économie tout seul, on entend toujours la dernière. = On dit aussi, économie, pour, harmonie, entre les diférentes parties d' un tout. L' économie de l' univers, l' économie du corps humain, du tempérament. L' économie d' un discours, d' une Pièce de Théâtre. = L' économie de la Grâce: les Lois que le Seigneur s' est prescrites pour le don ou le refus de ses grâces.

ÉCONOMIQUE


ÉCONOMIQUE, adj. ÉCONOMIQUEMENT, adv. [1re é fer. 5e e muet: en au 2d a le son d' an.] Qui concerne l' économie. Prudence économique. = Avec économie: Vivre économiquement.

ÉCONOMISER


ÉCONOMISER, v. act. [Ékonomizé: 1re et dern. é fer.] Gouverner, administrer avec économie. "Il a bien économisé les revenus de cette terre.

ÉCOPE


ÉCOPE, s. f. [1re é fer. dern. e muet.] Pelle creûse à rebords, dont on se sert pour vider l' eau des bateaux.

ÉCOPERCHE


ÉCOPERCHE, s. f. [1re é fer. 3e ê ouv. dern. e muet.] Machine qui sert à élever des pierres, des fardeaux, et qui fait partie d' une grûe.

ÉCORCE


ÉCORCE, s. f. ÉCORCER, v. act. [1re é ferm. 3e e muet au 1er, é ferm. au 2d.] Écorce est 1°. la peau d' un arbre ou d' une plante boiseûse. La première ou la grosse écorce; écorce tendre, déliée. = 2°. La peau de certains fruits. "Écorce d' orange, de citron, de grenade. = 3°. Au figuré, la superficie des chôses. "Il ne faut pas s' arrêter à l' écorce. "Combien de gens, qui s' arrêtent à l' écorce, et ne savent rien aprofondir. Anon. "Cet homme n' a que l' écorce: il a de beaux dehors, mais dans le fond, rien de solide. _ * Bossuet dit d' un Auteur: Qu' il ne se jète plus sur les matières théologiques, dont il n' entendra que l' écorce. _ La métaphôre n' est pas soutenûe, et voilà deux mots qui ne sont pas faits l' un pour l' aûtre; qu' est-ce, en éfet, qu' entendre, ou comprendre, comme on voudra, l' écorce d' une science? = Rousseau apèle la glace, l' écorce des eaux. Cette expression est poétique, et ne peut être admise qu' en vers.
   Et les jeunes zéphirs, de leurs chaûdes haleines,
   Ont fondu l' écorce des eaux.
Il dit âilleurs:
   Dépouillez donc votre écorce,
   Philosophe sourcilleux!
On verrait en dessous de belles chôses.
   On dit, proverbialement, juger du bois par l' écorce; du dedans par le dehors. Voy. ARBRE.
   ÉCORCER, c' est ôter l' écorce du bois. "Il y a des arbres qu' on écorce. "Tous ces arbres ont été écorcés.

ÉCORCHER


ÉCORCHER, v. act. [1re et dern. é fer.] Écorcher est proprement, dépouiller un animal de sa peau: Écorcher un cheval, un boeuf. = 2°. Emporter, déchirer une partie de la peau d' un animal, ou de l' écorce d' un arbre. "Je me suis écorché le bras (et non pas, j' ai écorché mon bras, comme le disent plusieurs en certaines Provinces). "La selle a écorché ce cheval: cette charette, en passant, a écorché cet arbre. = 3°. Par extension, on dit d' une boisson, qu' elle écorche le palais, la gorge; d' une voix aigre, d' une méchante musique, d' un parler rude et barbâre, qu' ils écorchent les oreilles. = 4°. Exiger plus qu' il ne faut; faire payer trop cher. "Hotellerie où l' on écorche les gens. = 5°. Écorcher une langue; la mal parler "Il écorche le français, le latin. _ Au passif, il signifie, être dérivé: ce mot est écorché du latin. Cette manière de parler est tout au plus du style médiocre. L' Ab. Desfontaines, parlant des Règles de l' Éloquence, par M. Gibert, dit: "je n' aime pas les termes techniques, écorchés du grec: Il falait en substituer de plus intelligibles.
   Le Proverbe dit: "Autant celui qui tient, que celui qui écorche; les complices doivent être punis comme les malfaiteurs. _ Il n' y a rien de plus dificile à écorcher que la queûe; ce qu' il y a de plus dificile dans une afaire, est le point de la conclusion. _ On dit aussi d' un homme qui se plaint sans grand sujet; qu' il crie, comme si on l' écorchait. Voy. ANGUILLE. _ Il faut tondre les brebis, et non pas les écorcher: Les Princes ne doivent pas trop charger les peuples. _ Bassement et populairement, écorcher le renard; vomir après avoir trop bû.

ÉCORCHERIE


ÉCORCHERIE, s. f. [1re é ferm. 3e et dern. e muet; 4e. lon.] Au propre, lieu où l' on écorche les bêtes. Au figuré, Hôtellerie où l' on fait payer plus qu' il ne faut. Cette auberge est une écorcherie. St. famil. = M. Desgrouais met écorcherie au nombre des gasconismes. L' Acad. le met sans remarque.

ÉCORCHEUR


ÉCORCHEUR, s. m. [1re é fer.] Au propre, celui dont le métier est d' écorcher les bêtes. _ Au figuré (st. famil.) celui qui fait payer trop cher. Cet Aubergiste, ce marchand, ce Procureur est un écorcheur.

ÉCORCHûRE


ÉCORCHûRE; s. f. [1re é fer. 3e. lon. dern. e muet.] Enlèvement de la peau, en quelque partie du corps. Voy. ÉCORCHER, n°. 2°. "Il a une grande ou petite écorchûre à la jambe.

ÉCORNER


ÉCORNER, v. act. [1re et dern. é fer.] 1°. Rompre la corne à... ce boeuf fut écorné. = 2°. Il se dit plus souvent des chôses qui ont des angles. Écorner une table, une pierre: "Ces dés sont écornés. 3°. Figurément, diminuer: "Écorner les privilèges, la Juridiction, l' autorité, etc. st. simp.

ÉCORNIFLER


ÉCORNIFLER, v. act. [1re et dern. é fer.] Chercher à manger aux dépens d' autrui. "Il va écornifler un dîner où il peut. "Il est venu nous écornifler. _ St. famil. et plaisant.

ÉCORNIFLERIE


ÉCORNIFLERIE. s. f. ÉCORNIFLEUR, s. m. [1re é fer. 4e et dern. e muet au 1er.] Écornifleur est celui qui écornifle, un parasite. _ Ecorniflerie: action d' écornifleur. St. familier et critique.

ÉCORNûRE


ÉCORNûRE, s. f. [1re é fer. 3e lon. 4e e muet.] Éclat emporté de l' angle d' une pierre, etc.

ÉCOSSER


ÉCOSSER, v. act. ÉCOSSEUR, EUSE, s. m. et fém. [1re é fer. 3e lon. au 3e] Écosser, c' est tirer de la cosse. "Ecosser des poids, des fèves. = Ecosseur, eûse, celui, celle qui écosse.

ÉCOT


ÉCOT, s. m. [Éko: 1re é fer.] Au propre, la quote-part que doit chaque persone pour un repas comun. _ Au fig. (st. famil.) payer son écot, contribuer au succès, à l' agrément; faire sa tache. "J' ai assez bien payé mon écot dans ce 3e. Livre, pour que vous n' ayez rien à exiger de moi de long--temps. P. Paulian. Traité de paix entre Descartes et Newton. "Il a bien payé son écot, il a bien diverti la compagnie dans ce repas. = La Fontaine dit de la Fortune.:
   Il n' arrive rien dans le monde,
   Qu' il ne fâille qu' elle en réponde:
   Nous la faisons de tous écots.
   ÉCOT, signifie aussi la compagnie des persones qui mangent ensemble dans un cabaret. "Il y a trois écots dans la grand' salle. _ C' est dans ce sens qu' on dit, à une persone qui s' adresse à des gens qui ne parlent pas à lui, parlez à votre écot. Style familier et chagrin.

ÉCOULEMENT


ÉCOULEMENT, s. m. ÉCOULER (s' ) v. réc. [É-kou-leman, lé, 1re é fer. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Écoulement est le flux, le moûvement de ce qui s' écoule. S' écouler, c' est couler hors de quelque endroit. Ils se disent au propre et au figuré: "L' écoulement de l' eau, ou des eaux, des humeurs, des esprits, etc. L' écoulement de la lumière, de la grâce, etc. _ "Le torrent s' est écoulé, l' eau s' écoule; elle s' est écoulée. "Le vin s' est écoulé du tonneau, etc. Le temps, l' argent s' écoule; la foule, la presse s' écoule. "Cela s' est écoulé de la mémoire. = Écouler, est neutre dans ces phrâses: Faire écouler l' eau: "Laisser écouler la foule.
   ÉCOULÉ, participe. "Le temps est écoulé, le terme préfix est passé.
   Rem. 1°. Un Auteur moderne fait régir à s' écouler la prép. à et l' infinitif. "Ses heures s' écoulent rapidement à cultiver le jardin dont on lui a permis l' usage. Du Plaisir. _ C' est le régime de se passer, transporté à s' écouler; mais l' usage admet l' un, et reprouve l' aûtre.
   2°. * Ecoulement, pour Coulage, est un gasconisme. "J' ai perdu beaucoup de vin par un écoulement imperceptible. Gascon. corr.
   3°. * En Provence, plusieurs font ce verbe actif, et lui donent le sens de vider. "Il a écoulé toute la bouteille. _ C' est un provençalisme, une locution provençale, habillée à la Française.

ÉCOULûRES


*ÉCOULûRES, s. f. pl. C' est un mot des Provinces Méridionales. On dit, baquetûres. Gasc. Corr.

ÉCOURTER


ÉCOURTER, v. a. [É-cour-té; 1re et dern. é fer.] Rogner, couper trop court. "Écourter des cheveux, un manteau, une jupe. "Cet habit est bien écourté. = Écourter un chien, un cheval; leur couper la queue et les oreilles. _ Cet homme est écourté: on lui a coupé les cheveux fort courts.

ÉCOUTANT


ÉCOUTANT, s. m. [É-kou-tan; 1re é fer. 3e lon.] Qui écoute. On ne le dit que dans le style plaisant, d' un Avocat, qui ne plaide, ni n' écrit, ni ne consulte. Avocat écoutant. = La Fontaine l' emploie substantivement pour Auditeur. "Maître tel, qui trainoit après soi force écoutans. On doit mettre ce mot sur le compte de la rime.

ÉCOUTES


ÉCOUTES, s. f. pl. Il ne se dit que dans cette phrâse du style simple. "Être aux écoutes, être atentif à ce qui se passera dans une afaire. "On parle d' une telle affaire; il y a bien des gens qui sont aux écoutes.

ÉCOUTER


ÉCOUTER, v. act. [1re et dern. é fer.] 1°. Prêter l' oreille pour ouïr. "Il écoute ce qu' on dit: "Parlez bâs, on nous écoute. = Ecouter dit plus qu' entendre; car entendre, c' est simplement être frapé des sons; écouter, c' est prêter l' oreille pour les entendre. = 2°. Doner quelque croyance, ou quelque consentement à ce qu' on propôse, ou prendre plaisir à l' entendre. "Ecouter une proposition: "Il ne veut rien écouter. "Il parla d' accommodement, mais il ne fut pas écouté. "Ecouter la voix, les inspirations de Dieu, du ciel, de la grâce. = 3°. Suivre. "Écouter la raison, la passion.
   En vain je veux contre elle écouter ma colere.
       Corn.
Il est beau en ce sens. "Il n' écoute que son ressentiment. = 4°. S' écouter, être trop atentif à sa santé. "Naturellement, je ne m' écoute pas, je ne suis pas douillette. Th. d' Êduc. "Elle s' écoute trop. "Il ne faut pas tant s' écouter. _ On dit, d' un homme qui pèse avec afectation sur ses mots, qu' il s' écoute parler, style familier et critique.
   On apèle un écoute s' il pleut, un moulin qui ne va que par des écluses. _ Et en style proverbial, un homme qui s' atend à des chôses qui n' arrivent que rârement.
   Rem. Ecouter, régit quelquefois l' infinitif. "Elle l' écoutoit chanter. "Il écoute avec transport le vieux Silène... chanter d' une voix tremblante, etc. Anti-Lucrèce.
   * Ecouter avec des soupirs, est une métaphôre irrégulière. On dit, écouter avec atention, parce qu' on dit des oreilles, qu' elles sont atentives: mais on n' a jamais fait soupirer les oreilles.
   * On dit, ouïr, entendre des témoins, et non pas écouter. L. T.

ÉCOUTEUR


ÉCOUTEUR, s. m. Celui qui écoute. Trév. Il n' est pas dans le Dict. Acad. Il ne s' emploie que dans le style comique, ou satirique. "L' inquisition ministérielle avoit mis des écouteurs dans tous les cabinets. Necker.

ÉCOUTEUX


ÉCOUTEUX, adj. m. Terme de Manège. Il se dit d' un cheval distrait par les objets qui le frapent.

ÉCOUTILLES


ÉCOUTILLES, s. f. pl. [É-kou-ti-glie: 1re é fer., dern. e muet; mouillez les ll.] Terme de Marine. Trape, ou ouvertûre dans le tillac d' un vaisseau, par où l' on descend sous le tillac. "Ouvrir, fermer les écoutilles. = On a dit aûtrefois escoutilles, et Mrs de l' Acad. voulaient qu' on le dît de la sorte: ils se sont repris dans les dernières éditions.

ÉCOUVILLON


ÉCOUVILLON, s. m. ÉCOUVILLONER, v. a. [E-kou-vi-glion, glio-né: 1re é fer.; mouillez les ll.] Perche, ou grôs bâton garni de vieux linge, etc., avec lequel on nettoie le four, ou le canon. = Écouvilloner, nettoyer avec l' écouvillon.

ÉCRAN


ÉCRAN, s. m. Meuble dont on se sert pour se parer de la trop grande ardeur, ou de la lumière du feu.

ÉCRASANT


ÉCRASANT, ANTE, adj. verbal. Néologisme. "Cette somme modique (de trente mille ducats), qu' un seul Marchand auroit pu fournir quelques années auparavant, parut alors écrasante pour la Ville entière (de Milan). L' Ab. Garnier, Hist. de Fr.

ÉCRASER


ÉCRASER, v. a. [Ékrazé: 1re et dre é fer.; devant l' e muet l' a est long: Il écrâse, écrâsera, etc.] Aplatir et briser par le poids de quelque chôse, ou par quelque éfort. "Une grosse pierre tomba et lui écrasa la tête. "Il fut écrasé sous les ruines. Écrasez ces limaçons. = Au figuré, ruiner, détruire. "Ne vous jouez pas à traverser cet homme, il vous écrasera. On dit dans la colère, je l' écraserai comme un ver. = Plus figurément, vaincre, surpasser, en parlant de concurrens, de rivaux, de gloire. "Ce jeune homme se voit écrasé par mon fils d' une si terrible manière, qu' il est à craindre que l' amour propre humilié ne le conduise promptement à la jalousie et à l' aversion. Th. d' Educ.
   ÉCRASÉ, ÉE, adj. Trop aplati, trop court. Nez écrasé, taille écrasée. "Le comble de cette maison est trop écrasé. Figur. "Les peuples, écrasés de maux, cherchoient un réfuge au sein de la Religion. Millot.

ÉCRÉMER


ÉCRÉMER, v. a. [1re et 2e é fer., la 2e ê ouv. devant la syll. fémin., il écrême, écrêmera, etc.] Au propre, ôter la crême de dessus le lait. _ Au figuré, prendre ce qu' il y a de meilleur. "Il a écrémé cette affaire; cette cargaison de vaisseau, cette bibliothèque, ce cabinet: il en a pris, il en a acheté ce qu' il y avait de meilleur, et n' a laissé que du médiocre.

ÉCREVISSE


ÉCREVISSE, s. f. [Ecrevice: 1re é fer., 2e et dre e muet _ Dans Richelet, on trouve écrevice en titre, et dans les exemples, écrevisse.] Poisson testacée, espèce de cancre. Trév. Poisson qui, suivant l' opinion vulgaire, va toujours à reculons, et est du genre des testacées. Acad. Poisson crustacé fort connu. Rich. Port. = On dit d' un homme qui a le visage haut en couleur, rouge comme une écrevisse. _ "Ses affaires vont toujours plus mal; il va à reculons comme les écrevisses. _ Eplucher des écrevisses, s' arrêter à des minuties. "Vous savez combien on hait, en ce pays-ci (à la Cour) les démélés des Provinces. Cela s' appelle éplucher des écrevisses. SÉV. "Vous appelez Dom Robert un éplucheur d' écrevisses. Seigneur Dieu! S' il introduisoit tout ce que vous dites, plus de Jugement dernier; Dieu auteur du mal, plus de crimes. Appelleriez-vous cela éplucher des écrevisses? La même.

ÉCRIER


ÉCRIER (S' ), v. réc. [1re et dre é fer.; devant l' e muet l' i est long; il s' écrîe: au futur et au conditionel, cet e muet ne se fait pas sentir; Il s' écriera, s' écrierait: pron. s' écrira, crirè, 3 syll.] Faire un grand cri, une exclamation. "L' Orateur, au milieu de sa narration, s' écria: Ô honte! ô douleur! etc. S' écrier d' admiration, de douleur, etc.

ÉCRIN


ÉCRIN, s. m. [É-krein: 1re é fer.] Petit cofret, où l' on met des bagues, des pierreries. = Quelques-uns écrivent écrain, d' aûtres écrein.

ÉCRIRE


ÉCRIRE, v. a. et n. [1re é fer., 2e lon., 3e e muet.] L' i est bref devant la syll. masc. "Nous écrivons, il écrivait, écrivant, etc. = J' écris; nous écrivons; j' écrivois, ou, j' écrivais; j' écrivis; j' ai écrit; j' écrirai, j' écrirois, ou, j' écrirais; écris, écrivez; que j' écrîve (l' i est long); j' écrivisse, écrivant, écrit. = Tracer, former des lettres, des caractères. "Il sait lire et écrire. Maitre à écrire. Enseigner, montrer à écrire. = 1°. V. a. Ecrire son nom: "Ecrivez cela sur vos tablettes. Ecrire des lettres, etc. = 2°. Il est plus souvent neutre. "Il écrit bien, il écrit mal. Ecrire avec un crayon, sur la murâille, sur le sâble. _ Ecrire à un ami. "Je lui ai écrit que, etc. = 3°. Au Palais, mettre par écrit ses raisons. "Cet Avocat a écrit dans cette affaire. "Il écrit, et ne plaide pas. "Il plaide bien, mais il écrit mal, etc. = 4°. Composer quelque ouvrage d' esprit, "Ecrire en prôse, en vers.
   Qui ne sut se borner, ne sut jamais écrire.
"Les Auteurs qui ont écrit sur cete matière. * Mallebranche lui fait régir la prép. de: "Il seroit assez ridicule qu' un homme s' appliquât à écrire d' une matière qu' il penseroit être inutile. _ L' usage veut qu' on dise, sur une matière. = En ce sens, il se dit particulièrement du style, mais absolument et sans régime. "Il écrit poliment, nettement. "Il parle bien, il écrit mal, grossièrement.
   Rem. 1°. Quand on parle de lettres, écrire régit l' ablatif du lieu d' où l' on écrit, et l' acusatif du temps. "Je vous ai écrit de Paris, le douze de ce mois. Dater, au contraire, régit de, pour l' un et pour l' aûtre. Lettre datée de Paris, du douze de, etc. * Bossuet a confondu ces deux régimes. "Nous avons une Lettre de Grégoire III, écrite de l' année avant sa mort. _ Le de est de trop.
   2°. Le que après écrire, régit l' indicatif, quand la phrâse est afirmative; et le subjonctif, quand elle est négative. "Je vous ai écrit que votre frere étoit parti de Paris, mais je ne vous ai point écrit qu' il fût arrivé ici.
   3°. Il est écrit, signifie, il est décidé: "Il est écrit que je perdrai toujours.
   4°. Ecrire pour graver, imprimer, est beau au figuré. "Son crime est écrit sur son front. "Le spectacle de l' univers est un livre public, ouvert aux ignorans comme aux savans... Or, l' existence de Dieu y est écrite avec les caractères les plus éclatans. Pens. Théol.
   On dit proverbialement, écrire de la bone encre, fortement et avec chaleur. "Je lui écrirai de la bone encre; st. famil. et chagrin. _ Ce qui est écrit est écrit, on ne peut pas, ou, je ne veux pas en revenir. Allusion au mot de Pilate: Quod scripsi scripsi. _ La destinée des hommes est écrite au Ciel, etc. Voy. CIEL.

ÉCRIT


ÉCRIT, s. m. [Ekri: 1re é fer. On ne prononce pas le t.] 1°. Ce qui est écrit sur du papier. "Quel écrit est cela? Il me présenta un écrit, où je ne compris rien. = 2°. Acte, témoignage qu' on done par sa signature. "Il désavoue son écrit; il plaide contre son écrit. = 3°. Au pluriel, livres, traités, manuscrits, ou imprimés. "Les écrits des Professeurs, des Auteurs.
   PAR ÉCRIT, adv. "Remontrances par écrit; mettre par écrit; écrire ce qu' on a lu, ce qu' on a pensé. _ Familièrement, coucher par écrit. "Il couche bien par écrit, il écrit en bons termes.

ÉCRITE


*ÉCRITE, s. f. Mot barbâre, en usage en certaines Provinces, au lieu d' écrit. "Passer une écrite.

ÉCRITEAU


ÉCRITEAU, s. m. [Ecrito: 1re é fer. _ eau est dout. au sing., long au pluriel, écriteaux.] Ecriteau, se dit des morceaux de papier, ou de carton (bois, toile, ou toute aûtre matière) sur lesquels on écrit (ou l' on peint) quelque chôse en grosses lettres, pour doner un avis au Public. Inscription, est ce qui s' écrit, ou se grâve sur un mausolée, une médaille, ou quelque aûtre monument, pour conserver la mémoire d' une chôse, ou d' une persone. = Selon cette distinction, ce n' est pas bien parler, que de dire, par exemple: "Ils marquèrent le sujet de sa condamnation dans une inscription, qu' ils mirent au-dessus de sa tête: Celui-ci est le Roi des Juifs. Il falait dire en cet endroit, écriteau, au lieu d' inscription. Bouh. L. T.

ÈCRITOIRE


ÈCRITOIRE, s. f. [Ekri-toâ-re: 1re é fer., 3e lon.] Plusieurs, en certaines Provinces, font mal à propos ce mot masculin, et disent, un grand, un petit écritoire, au lieu de dire, une grande, une petite écritoire. = Ce qui contient ce qu' il faut pour écrire, encre, plumes, canifs. Ecritoire portative, de corne, d' ivoire, de cuivre, etc. Ecritoire de bureau. _ On le dit aussi de ce qui ne contient que l' encre: Ecritoire de verre, de faïence, d' argent, etc.

ÉCRITûRE


ÉCRITûRE, s. f. [1re é fer., 3e lon., 4e e muet.] Il se dit 1°. Des caractères écrits. "On a effacé l' écriture. Belle, ou mauvaise écritûre. = 2°. De la manière de former les lettres. "Il a reconnu son écriture. "Des Experts ont été nommés pour vérifier les écritures. = 3°. Au Palais, écrits qu' on produit pour défendre sa caûse. "Quel est l' Avocat qui a fait vos écritures? = 4°. L' Ecriture-Sainte, ou absolument, l' Ecritûre, les Ecritures, l' Ancien et le Nouveau Testament. _ On dit en ce sens, dans le style familier, plaisant, ou critique: "Accordez, ou conciliez les Ecritures, accordez-vous avec vous-mêmes; expliquez et conciliez ces contradictions.

ÉCRIVAILLEUR


*ÉCRIVAILLEUR, ÉCRIVASSIER, s. m. Termes de mépris. Ils ne sont que du style comique, critique et mordant, ou satirique. _ Mauvais Écrivain. "Je demandai un autre Censeur, et pour le mettre à couvert de la tourbe des Ecrivailleurs, je priai le Magistrat qui présidoit alors à la Librairie de m' en donner un qui gardât l' anonyme. Freron. Quel dommage qu' une idée si heureûse fût tombée dans l' esprit d' un Ecrivailleur. Id. "Cette tourbe incommode de raisonneurs, de dissertateurs, d' écrivailleurs. L' Ab. de Fontenai. "Bien différent de ces Ecrivassiers, qui ne cessent de faire des livres sur des livres, et de ressasser des idées qu' on trouve par-tout. Id. = L' Acad. n' a eu garde de mettre ces deux mots.

ÉCRIVAIN


ÉCRIVAIN, s. m. [Ekri-vein: 1re é fer.] 1°. Celui qui montre à écrire. "Maitre Ecrivain. "Ecrivain juré. = 2°. Celui qui écrit bien, ou mal: "C' est un bon, un méchant Ecrivain. = 3°. Il se dit fort bien d' un Auteur. "C' est un Ecrivain agréable, un fameux Ecrivain. "Nos meilleurs Ecrivains parlent de la sorte, etc.
   Ecrivain, Auteur (synon.) Le 1er ne se dit que par raport au style, le 2d a plus de raport au fond de l' ouvrage qu' à la forme. De plus, il peut se joindre par la particule de, aux noms des ouvrages. "Racine est un Ecrivain pur, élégant, correct. Corneille est un excellent Auteur. "Descartes et Newton sont deux Auteurs célèbres. "L' Auteur de la Recherche de la Vérité est un Ecrivain du premier ordre (Encycl.) Beauzée, Synon. "Toujours de grandes et de belles idées, hardiesse, ou plutôt, audace dans les figures, vivacité, nouveauté dans les tours: il y auroit bien là de quoi faire un Auteur divin. Oui; mais sans la langue, sans la pureté du style, ce sera, quoi qu' il fasse, un méchant Auteur. D' OLIV.

ÉCRIVANT


*ÉCRIVANT, ANTE, adj. Qui écrit. "La secte écrivante, cabalante, intrigante, dirigeante de l' Encyclopédie. Linguet. Ce mot n' est bon que dans le style critique et mordant, ou plaisant et comique.

ÉCRIVEUR


*ÉCRIVEUR, EûSE, s. m. et f. Mots forgés. Qui écrit volontiers. Mde. de Sévigné dit écriveux au masc. "Vous avez de l' obligation à Langlade: ce n' est point un écriveux; mais il paroît votre ami en toute occasion. "La Maréchale de Villeroi n' est pas écriveuse. La même. Le mot est imprimé en italique dans les deux endroits. Il ne peut être bon qu' en conversation et dans les lettres, et dans le style badin.

ECROU


ECROU, s. m.; ou ECROûE, s. f. [Trév. les met tous deux. Richelet ne met que le 2d, mais il le marque masculin. L' Acad. ne met que le 1er, dans le sens ordinaire: elle met le 2d dans une acception qu' on verra plus bâs. Ferrière met écrou à sa place, et dans le corps de l' ouvrage, écroue.] 1°. Le trou dans lequel entre la vis, en tournant. "Cette vis n' est pas assez grosse pour l' écrou. "L' écrou d' un un pressoir. = 2°. Acte d' emprisonement d' une persone, écrit sur le registre de la geole. "L' Arrêt porte que l' écrou sera rayé et biffé. = 3°. En parlant des rôles de la dépense de la bouche du Roi, on dit écroûe. "Les écroues ne sont pas encore signées et arrêtées.

ECROUELLES


ECROUELLES, s. f. [Ekrou-èle: 1re é fer., 3e è moy., dre e muet.] Sorte de maladie. _ Trév. met écrouellé pour celui qui a cette maladie, et écrouelleux, pour ce qui y a raport, y apartient. _ L' Acad. ne met ni l' un, ni l' aûtre. On dit scrophuleux, mais il se dit de la maladie, non du malade. "Tumeur scrophuleûse. Voy. ce mot. _ Le peuple dit humeurs froides, pour écrouelles. "Le Roi de France guérit des écrouelles. en touchant les malades.

ECROUER


ECROUER, v. a. Il ne se dit que dans le 2d sens d' écrou: On l' a écroué un tel jour: "Il a été arrêté et écroué.

ECROULEMENT


ECROULEMENT, s. m. [E-krou-leman: 1re é fer., 3e e muet.] Eboulement. "Les soldats furent étonnés par l' écroulement du rempart.

ECROULER


ECROULER (S' ), v. réc. [E-krou-lé: 1re et dre é fer.] Tomber en s' afaissant. "La terre s' écroula sous leurs pieds. "Cette maison vint tout d' un coup à s' écrouler. Acad.
   Rem. 1°. Eboulement et ébouler, se disent plus proprement de la terre; écroulement et écrouler, des murâilles, des bâtimens, etc. Plusieurs les confondent, et l' Acad. elle-même. "Les Nègres n' ont pas assez d' industrie pour soutenir la terre dans les mines, et pour empêcher qu' elle ne s' écroule. Hist. des Voy. _ Je crois que, ne s' éboule, aurait été un terme plus propre.
   2°. Plusieurs Auteurs ont fait Écrouler neutre. "La maison du Missionaire étoit sur le point d' écrouler. Lettr. Édif. "S' ils viènent à écrouler, ou à tomber. Ferrière. "La montagne a écroulé. Journ. de Gen. _ Il faut dire, de s' écrouler, à s' écrouler, s' est écroulée.
   3°. Avec le verbe faire, on peut l' employer activement. "Les pluies abondantes furent sur le point de faire écrouler la maison.

ÉCROûTER


ÉCROûTER, v. act. [1re et dern. é fer. 2e lon. surtout devant l' e muet. il écroûte, il écroûtera.] Ôter la croûte. "Écroûter le pain.

ÉCRU


ÉCRU, ÛE, adj. [1re é fer. 2e lon. au 2d.] Il ne se dit qu' avec fil et soie. Fil écru, qui n' a point été lavé. Soie écrûe, qui n' a point été mise à l' eau bouillante.

ECT


ECT, est toujours bref. Respect, aspect, aspect. On ne prononce point le t, même devant une voyelle. Pronon. èk, è moy.

ECTE


ECTE; toujours bref aussi: insècte, suspècte, je respècte, etc. 2de è moy. èkte.

ECTIQUE


ECTIQUE; voyez ÉTIQUE.

ÉCU


ÉCU, s. m. [1re é fer. _ Les Gascons le font muet; le cu: équivoque ridicule.] 1°. Espèce de bouclier, que les Cavaliers portaient aûtrefois. = 2°. Figure de ce bouclier, sur lequel se peignent les armes. "Le Roi de France porte trois fleurs de lys dans son écu. = 3°. Pièce de monoie. Il y avait aûtrefois des écus d' or. Quand on dit, écu tout seul, on entend des écus d' argent. Petit écu, écu de six francs. Quand on ne spécifie pas la valeur, on entend ce mot d' un écu de trois francs: mille écus, dix mille écus, c. à. d. trois mille francs, trente mille francs.
   On dit proverb. d' un homme qui a beaucoup d' argent: c' est le père aux écus. _ Vieux amis et vieux écus: les vieux amis sont les meilleurs de tous.

ÉCUEIL


ÉCUEIL, s. m. [On devrait écrire écueuil, car ue ne représente pas la dipht. eu. Voyez ACCUEIL. Pron. é-keuil; mouil. l' l finale.] 1°. Au propre, rocher dans la mer. "Cette mer est pleine d' écueils. "Il se brisa contre un écueil. = 2°. Au fig. Danger pour la vertu, la fortune, la réputation. "Le monde est plein d' écueils.
   Voilà le sort et le fatal écueil,
   Où, tôt ou tard vient échouer l' orgueil.
       Rouss.
  J' ai vu que leurs honneurs, leur gloire, leur richesse,
  Ne sont que des filets tendus à leur orgueuil;
  Que le port n' est pour eux qu' un véritable écueuil.
      Id.

ÉCUELLE


ÉCUELLE, s. f. ÉCUELLÉE, s. f. [É--kuè-le, kué-lé-e: 1re é fer. 2e è moy. au 1er, é fer. au 2d; 3e e muet au 1er, é fer. et long au 2d.] Ecuelle est une pièce de vaisselle, qui sert à mettre du bouillon, du potage, etc. "Ecuelle couverte, écuelle à oreilles. _ Laver les écuelles. Dans cette expression, ce mot se prend pour toute sorte de vaisselles, assiètes, plats, etc. = On dit, en st. prov. Rogner l' écuelle à quelqu' un, lui retrancher de sa subsistance. _ Il a bien plu dans son écuelle: il a beaucoup gagné ou reçu. Celui-ci est bâs. _ Mettre tout par écuelles, traiter splendidement. _ Propre comme une écuelle à chats; extrêmement mal-propre. _ On apelle Archer de l' écuelle, un Archer qui a la commission de prendre les mendians et de les mener à l' hôpital.
   ÉCUELLÉE; plein une écuelle. "Une écuellée de soupe. = * On a dit aussi autrefois, éculée. "Il a mangé une grande écuellée, ou une grande éculée de soupe. Dict. Acad. 1re édit. _ Dans les éditions postérieures, éculée ne se trouve point.

ÉCUISSER


ÉCUISSER, v. act. [1re et dern. é fer.] Faire éclater un arbre en l' abatant.

ÉCUÉLE


*ÉCUÉLE. Voyez, ÉCUELLÉE.

ÉCULER


ÉCULER, v. a. [1re et dern. é fer.] On doit dire, éculer des souliers, et non pas Aculer. Ce dern. verbe signifie presser, pousser en un lieu d' où l' on ait de la peine d' échaper. Aculer les énemis. Il ne vaut donc rien avec souliers. _ L' Acad. dit, éculer des souliers, des bottes, et ajoute que plusieurs disent aculer, sans les condamner. L. T. Elle ne le dit plus dans les dernières éditions. = Il se dit aussi avec le pron. se "Quand un soulier est trop petit, il s' écule facilement.

ÉCUMANT


ÉCUMANT, ANTE, adj. [1re é fer. 3e lon.] Qui écume. _ L' Acad. ne met pas ce mot. Il est beau en Poésie.
   Il vaincra ces lions ardens,
   ET dans leurs bouches écumantes,
   Il plongera sa main, et brisera leurs dents.
       Rouss.
  Le jour, le triste jour où la voile flotante
  Emporta ses deux fils sur la mer écumante.
      Thomas.
  L' onde autour de son corps murmuroit écumante.
      Marin, Fédéric.
"Un vent favorable remplissoit déja nos voiles: les rameurs fendoient les ondes écumantes. Télém. = Il régit quelquefois la prép. de.
   Bouffi de rage, écumant de colère.
       Ververt.
"Il la laissa écumante de rage.
  Tels qu' on voit des bergers poursuivis par la rage
  D' un tigre, d' un lion, écumant de carnage.
      Marin, Fédéric.

ÉCUME


ÉCUME, s. f. ÉCUMER, v. n. [1re é fer. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] 1°. Bouillon de quelque liqueur agitée. Trév. Mousse blanchâtre, qui se forme et surnage sur l' eau ou sur quelque aûtre liqueur agitée ou échaufée. Acad. "L' écume de la mer, des flots, d' un pot qui bout. = 2°. Bâve de quelques animaux, lorsqu' ils sont échaufés ou en colère. "L' écume d' un cheval, d' un chien. "Quand cet homme est en colère, l' écume lui sort par la bouche. = 3°. Sueur qui s' amasse sur le corps du cheval. "Ce cheval étoit tout couvert d' écume. = 4°. Suivant M. du B.... tous les gens sensés que sa Tragédie de Nadir a révoltés ou ennuyés, ne sont que l' écume de la Litérature, qui a voulu empoisoner ses grands succès. _ L' expression est aussi bisarre que la pensée est fausse.
   ÉCUMER, jeter de l' écume. "La mer écume. * Ce vin, cette bière écume. "Cet homme écumoit de colère. = Actif: Ôter l' écume de ce qui bout sur le feu. "Ecumer le pot, la marmite, etc. _ Au fig. (st. plais. et crit.) écumer les marmites; se dit d' un parasite, d' un écornifleur. Ecumer les nouvelles. (même st.) en chercher partout, ça et là. _ Ecumer les mers, les côtes, exercer la piraterie "Ecumer sa rage, sa fureur, expression fort usitée autrefois parmi les Poètes.
   Au point qu' il écuma sa rage
   Le Dieu de Seine étoit dehors.       Malherbe.
  Les flots, en ecumant leur rage,
  S' enflent d' un tel orage,
  Qu' ils lui font regretter les délices du port.
      Racan.
  Le Pô, quand hors de ses bornes,
  Il écumera sa fureur.
Ménage ne dit rien de cette expression. Elle déplairait aujourd' hui. = En style prov. écumer le pot, c' est retrancher ce qui est inutile et incomode. "Que ne suis-je là pour écumer votre chambre, et vous doner le temps de respirer. Sév. (En éconduisant les importuns.) J' atendrai Gorde avec impatience, et laisserai bien assurément écumer mon pot à qui voudra, pour lui demander comment se porte ma fille, et que fait-elle? La même.

ÉCUMÉNIQUE


ÉCUMÉNIQUE. Voyez OECUMÉNIQUE.

ÉCUMEUR


ÉCUMEUR, s. m. ÉCUMEUX, EûSE, adj. ÉCUMOIRE, s. f. [Ékumeur, meû, meû-ze, moâ-re: 1re é fer. 3e lon. aux 3 dern.] Le 1er ne se dit point au propre; il ne se dit que dans ces phrâses: écumeur de marmites, de nouvelles, de mer. Voy. Écumer. _ Des Poètes l' ont employé dans le style critique et mordant.
   Fuyez surtout ces esprits téméraires,
   Ces écumeurs de dogmes arbitraires,
   Qu' on voit tout fiers de leur corruption,
   Alambiquer toute Religion.
       Rousseau.
  Vraiment il te sied bien, écumeur litéraire,
  De joindre à tes forfaits ce métier de corsaire.
      Palissot.
  ÉCUMEUX: Écumant, qui écume. "Les flots écumeux. Il est du style Poétique. Acad.
   Votre énemi superbe, à cet instant fumeux,
   Du Rhin, près de Tholus, fend les flots écumeux.
       Boil.
"Ces cavales couroient sur la pointe des vagues écumeuses, comme sur le rivage; Mde. Dacier. = M. Linguet a employé ce mot au fig. "Je ne me flate pas de rendre avec toute leur emphâse les expressions écumeûses de M. de.... Ann. Politiq. etc.
   ÉCUMOIRE, ustensile de cuisine, qui sert à écumer.

ÉCURER


ÉCURER, v. a. ÉCUREûSE, s. f. [1re é fer. 3e lon. au 2d.] Écurer, c' est nettoyer la vaisselle, la baterie de cuisine, etc. _ Écureûse est la femme ou fille, qui écure.

ÉCUREUIL


ÉCUREUIL, s. m. [1re é fer. Mouill. l' l finale. _ On a dit aûtrefois, escureuil, et plus anciénement, escurieu, puis écurieu.] Petit animal sauvage.

ÉCURIE


ÉCURIE, s. f. [1re é fer. 3e lon.] 1°. Lieu destiné à loger des chevaux. = 2°. Train, équipage, qui comprend écuyers, pages, carrosses, chevaux, etc. La grande, la petite écurie du Roi. "Les Pages de la grande, de la petite écurie, etc.

ÉCUSSON


ÉCUSSON, s. m. ÉCUSSONER, v. act. [1re é fer.] Ecusson est, 1°. Écu d' armoiries. Il ne se dit qu' en termes de Blason. = 2°. Manière d' enter, de greffer. "Enter en écusson, ou écussoner. "Tous les arbres que ce Jardinier a écussonés ont bien réussi.

ÉCUYER


ÉCUYER, s. m. [Éku-ié: 1re et dern. é fer.] 1°. Anciènement, Gentilhomme qui acompagnait un Chevalier, portait son écu, lui aidait à prendre ses armes et à se désarmer. = 2°. Aujourd' hui, titre que prènent les simples Gentilhommes et les annoblis. = 3°. Celui qui a l' intendance de l' écurie d' un Prince, d' un Grand Seigneur. = 4°. Celui qui aprend le manège. _ On dit d' un homme, qu' il est bon écuyer, quand il monte bien un cheval. = 5°. Oficier qui done la main à une Princesse pour la mener. Le premier Écuyer de la Reine: l' Ecuyer d' une telle Princesse. _ Dans le style fam. on l' étend à tous ceux qui donent la main à une Dame. "Madame, je serai votre écuyer, si vous me le permettez. = 5°. Ecuyer tranchant, Oficier qui coupe les viandes à la table d' un Prince. _ Ecuyer de cuisine, maître cuisinier d' un Prince ou d' un Grand Seigneur.

ÉDENTÉ


ÉDENTÉ, ÉE, adj. [Édanté, té-e; 1re é fer. 2e lon. 3e é fer. long au fém.] Qui a perdu toutes ses dents. "Vieille édentée.

ÉDENTER


ÉDENTER, v. act. [Édanté; 1re et 3e é fer. 2e lon.] Il ne se dit que des dents d' une scie, d' un peigne, etc. Les user, les rompre. "Vous édenterez votre scie. "Il a édenté son peigne.

ÉDIFIANT


ÉDIFIANT, ANTE, adj. ÉDIFIER, v. act. [1re é fer. 4e lon. aux 2 1ers, é fer. au dern.] Édifier, 1°. Au propre, bâtir. Il ne se dit que des Temples, et aûtres grands bâtimens publics. _ Figurément, il est oposé à détruire. "Vous êtes envoyé pour édifier, et non pas pour détruire. "Il détruit, au lieu d' édifier: au lieu de mettre la paix, il met le trouble et le désordre. = 2°. Figurément aussi, porter à la piété, à la vertu, ou par l' exemple, ou par le discours. "Édifier son prochain. Tout édifie en lui. Il est oposé à scandaliser. = 3°. Satisfaire par son procédé. "La conduite qu' il a tenue dans cette afaire, édifie tout le monde. "On est mal édifié de ce qu' il a fait. = 4°. Edifié, touché. "Il s' en retourna très édifié du sermon. _ Mal édifié, scandalisé.
   ÉDIFIANT ne s' emploie que dans le 2d sens. "Livre, sermon édifiant. Vie édifiante. Prêcher, se conduire d' une manière très-édifiante. "Cela n' est guère édifiant.

ÉDIFICATEUR


ÉDIFICATEUR, s. m. ÉDIFICATION, s. f. [1re é fer. tion, dans le 2d, a le son de cion en prôse, et de ci-on, en vers.] Edification a le 1er et le 2d sens d' édifier. "L' édification du Temple de Jérusalem. "Vie exemplaire et pleine d' édification. Cela est d' édification, ou de peu d' édification, de grande, ou de mauvaise édification. "N' avoir en vue que la gloire de Dieu et l' édification du prochain.
   ÉDIFICATEUR ne se dit que dans le premier sens, de celui qui fait un édifice.

ÉDIFIER


ÉDIFIER. Voyez ÉDIFIANT.

ÉDIFICE


ÉDIFICE, s. m. [1re é fer. dern. e muet.] Bâtiment. On ne s' en sert, ainsi que d' édifier et d' édification, qu' en parlant des Temples, des Palais, et aûtres grands bâtimens publics. "Grand, superbe édifice, bel édifice. "Elever, construire un édifice. La structûre d' un édifice. = On s' en sert élégamment au figuré. "Il faut enfin que cet édifice d' orgueil, et d' injustice s' écroule. Mass.

EDILE


EDILE, s. m. ÉDILITÉ, s. f. [1re é fer. dern. e muet au 1er, é fer. au 2d.] L' Edile était un Magistrat Romain, qui avait inspection sur les édifices publics, sur les jeux, etc. _ Edilité, est la Magistratûre de l' Edile. "Obtenir, exercer l' édilité. C' est aussi le temps qu' elle dure. "Pendant son édilité.

ÉDIT


ÉDIT, s. m. [1re é fer. On ne prononce point le t.] Ordonance, Constitution du Souverain. "En France, les édits n' ont que la date du mois où ils ont été donés. "Par l' Edit du mois de Février, etc. Quelques-uns portent le nom des lieux où ils ont été dressés: "L' Edit de Blois, de Melun, etc.

ÉDITEUR


ÉDITEUR, s. m. ÉDITION, s. f. [1re é fer. tion dans le 2d a le son de cion en prôse, et de ci-on en vers] Editeur est celui qui prend soin de revoir et de faire imprimer l' ouvrage d' autrui. "Préface de l' Editeur. = 2°. Edition se dit, ou absolument, pour la publication d' un livre. "Première, seconde édition; ou il se dit relativement aux Imprimeurs: "Ce livre est de l' édition de M. Didot; ou relativement aux Editeurs: "St. Augustin de l' édition des PP. Bénédictins.

ÉDREDON


ÉDREDON, s. m. [1re é fer. 2e e muet.] Duvet de certains animaux du Nord, dont on fait des couvertures. _ * Des ignorans disent aigledon.

ÉDUCATEUR


*ÉDUCATEUR, s. m. ÉDUCATION, s. f. *ÉDUQUER, v. a. [Éduka-teur, ka--cion, ké: 1re é fer.] L' éducation est le soin qu' on prend de l' instruction des enfans pour les exercices de l' esprit et du corps, et surtout pour les moeurs. "Doner, recevoir une bone éducation, une mauvaise éducation. "Il a pris soin de son éducation. "Depuis quelque temps on a beaucoup écrit sur l' Education. "Les uns sont pour l' éducation publique; les autres pour l' éducation privée et domestique. = Depuis peu on dit: Faire une éducation, élever un enfant. "Tout ce que peut faire un homme de Lettres, c' est de faire une éducation dans sa vie. Anon. _ * Le P. Barre dit de Rienzi: "Ses parens lui donnerent beaucoup d' éducation. Cette expression me parait barbâre. On dit, ses parens lui donèrent, ou, il reçut de ses parens une bone éducation.
   *EDUCATEUR, est un mot nouveau. Celui qui élève un enfant. Il ne se dit que de l' éducation particulière. On a d' abord dit Précepteur, puis Gouverneur, puis Instituteur: on dit aujourd' hui, Educateur. "Plan d' éducation pour former des Educateurs. Journ. de Mons.
   *EDUQUER, élever. Ce mot était resté long-temps dans la conversation des Néologues provinciaux. Depuis quelque temps on a comencé à l' écrire. "Le goût de l' étude, dans les personnes sensées et bien éduquées, croît avec l' âge. Du Plaisir. "On n' avoit pas fait attention à un barbet qu' il avoit avec lui, éduqué pour ce manège. Anon. "Une Demoiselle, fille point mal née, assez bien éduquée. Id. "Presque toute la génération d' alors avoit été éduquée par eux. Id. _ Mde. de Genlis met ce mot dans la bouche d' une servante. "Elle m' offriroit de m' avancer de l' argent. _ D' autant plus que cette Dame, qui vous a éduquée et placée ici, le lui rendroit. Th. d' Educ. _ Freron blâme, dans M. Cailhava, le mot éduquer; il le laisse passer dans Dorat:
   Pauvres sujets! Que naîtra-t-il d' utile
   D' un pareil choîx? Un tigre éduquer un lion!
   EDUQUER, est une expression que l' Auteur (M. de Mayer) afecte: "Il avoit été éduqué avec soin. C' est qu' on est éduqué. Ann. Litt. Ce mot n' est pas encôre reçu, et il a bien des contradicteurs. Il est d' ailleurs peu nécessaire, puisqu' élever, qui est ancien dans la Langue, a le même sens.

ÉFAUFILER


ÉFAUFILER, v. a. [Efofilé: 1re et dre é fer.] Tirer la soie d' un ruban, ou d' un bout d' étofe, pour juger de sa qualité, ou pour en faire de la ouate.

EFF


EFF. Les mots suivans sont écrits avec une seule f par Richelet: Efacer, éfectif, éféminer, etc. Cette ortographe serait plus comode, et il est à souhaiter qu' elle s' établisse.

EFFAÇABLE


EFFAÇABLE, ou EFAÇABLE, adj. EFACER, v. a. EFAÇûRE, s. f. [1re é fer., 3e dout. au 1er, é fer. au 2d, lon. au 3e.] Efaçable, qui peut être éfacé. Il n' est guère usité, quoique son contraire, inéfaçable, soit fort en usage. L' Acad. le met sans remarque. "Il n' y a point d' écriture qui ne soit effaçable, avec l' eau forte.
   EFACER, rayer. Ôter les marques, les vestiges de ce qui était écrit, peint ou gravé, etc. Efacer une ligne, deux lignes, un mot, plusieurs mots. "Le temps a effacé les traits, les couleurs de ce tableau. = Figurément, éfacer les idées, le souvenir; éfacer une chôse de la mémoire, etc. "Ses dernières actions ont effacé les taches de sa vie passée. "Effacer ses péchés par ses larmes. _ "Il a effacé la gloire de ses ancêtres. "Il a effacé tous ceux qui l' ont précédé. "Cette femme a effacé toutes celles qui étoient dans l' assemblée, etc. = Dans certains exercices du corps on dit, éfacer le corps, éfacer l' épaûle, les tenir dans la position qui done le moins de prise, ou le plus de grâce. "Ce soldat a les épaules bien effacées.
   EFAÇûRE, ce qui est éfacé, soit par accident, soit à dessein. "L' effaçure n' empêche pas qu' on ne lise certains mots, qui font deviner le reste. "Cette lettre étoit pleine d' effaçures.

EFFACEMENT


*EFFACEMENT, s. m. Ce mot est de Port-Royal: il n' a pas été admis par l' usage. "Le jeûne est l' effacement de nos offenses. Voy. RETRACEMENT.

EFFARER


EFFARER, ou EFARER, v. a. [1re et dre é fer.] Troubler quelqu' un, le mettre hors de lui-même. "Qu' a-t-on pu vous dire, qui vous ait si fort effaré? "Cet homme est sujet à s' effarer. = Son plus grand usage est au participe: Efaré, éperdu, troublé, hors de lui. "Il est venu tout effaré, avec un visage effaré, etc.

EFFAROUCHANT


EFFAROUCHANT, ANTE, adj. verbal. Qui éfarouche. "Ces assemblées si effarouchantes ne seront point rétablies. _ Ce mot est nouveau: il peut être utile.

EFFAROUCHER


EFFAROUCHER, ou EFAROUCHER, v. act. [Efa-rou-ché: 1re et dre é fer.] 1°. Epouvanter, éfrayer. "Effaroucher des pigeons, le gibier. _ On dit proverbialement, éfaroucher les pigeons, éloigner d' une maison ceux qui aportent du profit. "Ce marchand est trop cher, il effarouche les pigeons. = 2°. Figurément, dégoûter, doner de l' éloignement. "Si vous lui faites cette proposition, vous l' effaroucherez.

EFFECTIF


EFFECTIF, ou EFECTIF, IVE, adject. EFECTIVEMENT, adv. EFECTUER, v. act. [Efèktif, tive, tiveman, tu-é: 1re é fer., 2e è moy., 4e e muet au 2d et 3e.] Efectif, en parlant des chôses, qui est réellement, et de fait. "Armée de trente mille hommes effectifs. "Il a dix mille écus effectifs dans son cofre. = En parlant des persones: qui fait ce qu' il dit, qui ne promet rien qu' il ne fasse. "Cet homme est effectif, sa parole est effective. "Je crains que M... ne soit point effectif. Mde. de Maintenon.
   EFECTIVEMENT, réellement, en éfet. "Cela est effectivement vrai. "Il a compté effectivement cette somme. = Cet adverbe se met quelquefois à la tête de la phrâse, et sert de liaison avec les phrâses précédentes. "Effectivement, à peine est-il à quelques journées de Bourges, qu' il apprend la marche rapide d' un parti, etc. Moreau.
   Efectivement, en éfet (synon.) Le 2d est plus d' usage dans le style noble, le 1er dans la conversation. Encycl. Beauzée, Synon.
   EFECTUER, mettre à éfet, en exécution. "Il a effectué ses promesses. Et neutralement, en sous-entendant le régime: "Ce n' est pas tout que de promettre, il faut effectuer. On sous-entend, ce qu' on a promis. Voy. RÉALISER.

EFFÉMINER


EFFÉMINER, ou EFÉMINER, v. a. [1re, 2e et dre é fer.] Amollir, rendre faible, comme l' est ordinairement une femme. "Les voluptés efféminent l' âme et le corps. "Les délices de Capoue efféminèrent les soldats d' Annibal. "L' amour des spectacles, où l' on prend toutes les passions qui peuvent efféminer un peuple. Raynal.

EFEMINÉ


EFEMINÉ, adj. Homme éféminé; visage, air éféminé, mine éféminée. _ S. m. C' est un efféminé. "Il n' y a que des efféminés, qui puissent avoir de tels sentimens.

EFFERVESCENCE


EFFERVESCENCE, ou EFERVESCENCE, s. f. [Efêrvé-sance: 1re et 3e é fer., 2e ê ouv., 4e lon, 5e e muet.] Bouillonement qui se fait dans une liqueur, par la première action de la chaleur. _ Il ne faut point le confondre avec fermentation, ni avec ébullition. "La bière est en fermentation, l' eau qui bout est en ébullition; le fer dans l' eau forte est en effervescence. Acad. "Les alcalis font effervescence avec les acides. Ibid. _ "Cela s' appelle donc, comment dites-vous, ma fille, des effervescences d' humeurs? Voilà un mot dont je n' avois jamais entendu parler: mais il est de votre Père Descartes: je l' honore à cause de vous. Sév. Que n' honorait pas Mde. de Sévigné, à caûse de sa fille? Ce n' en était pas moins une vraie pédanterie dans une femme, de se servir de ce mot. Depuis quelque tems il est devenu à la mode, et une femme d' esprit aurait honte de dire aujourd' hui qu' elle n' en a pas entendu parler. = On l' emploie au figuré. "On s' intéressoit, on raisonnoit; peu à peu on s' échauffoit. En général, dans toutes les affaires susceptibles de discussion, c' est un malheur que cette effervescence. Linguet. "Effervescence causée par un zèle de parti et par d' odieuses animosités. Targe. = * M. Moreau dit, effervescence de gloire; mais ce mot, au figuré, ne doit se dire que d' une passion, d' un sentiment exalté. "Philippe dut à cette effervescence de gloire (les Croisades) le repos des dernieres années de sa vie. _ Cet illustre Auteur a-t-il entendu par gloire, l' amour de la gloire? L' expression aurait plus de justesse: mais gloire n' a pas cette signification.

EFFET


EFFET, ou EFET, s. m. [Efè: 1re é fer., 2e è moy. _ On écrivait aûtrefois effect.] 1°. Ce qui est produit par quelque caûse. "L' effet d' une machine, d' une mine, d' une médecine, etc. Bon éfet, mauvais éfet. "Elle a produit un bon effet, etc. "Votre discours a fait effet, un grand effet sur son esprit. = 2°. Il se prend pour l' exécution d' une chôse. "En venir à l' effet. Mettre à effet. "Il en faut voir l' effet. "La chose a eu son effet, etc. = On dit en ce sens, pour cet éfet, à cet éfet (le 1er est plus d' usage que le 2d), pour l' exécution de quoi. "À~ quel effet? à quelle intention? pourquoi? _ À~ l' éfet de... pour l' acomplissement de... Celui-ci se dit au Palais. = 3°. Partie d' un bien d' un particulier, sur-tout d' un homme d' afaires. "Ce billet n' est pas un trop bon effet. "Les effets d' une succession. Effet dans le commerce, etc. Il se dit le plus souvent au pluriel.
   EN EFET, adv. Réellement: "Il a raison en effet: il le mérite en effet. _ Il se met quelquefois à la tête de la phrâse. Voy. EFFECTIVEMENT. "Nous devons aimer Dieu. En effet, qu' y a-t-il de plus raisonnable que d' aimer un pere, un bienfaiteur, etc.
   Rem. 1°. * On disait autrefois, sortir son éfet, pour avoir son éfet (n°. 2°.) Cette façon de parler est un latinisme, mais latinisme barbâre. C' est du latin du Code, Lata Sententia sortitur effectum. Les bons Auteurs ont toujours dit: Habere, obtinere effectum, perduci ad effectum. Vaug. _ Sortir son éfet, est resté au Palais, où il a pris naissance.
   2°. EFET s' emploie, depuis quelque temps, indéfiniment, sans régime et sans raport. On dit, produire de l' éfet, faire éfet, comme on dit, faire impression. _ C' est un néologisme, dont on peut bien augurer. "Les Historiens en ont une (passion), c' est celle de montrer du talent, de produire de l' effet, et d' obtenir une grande réputation. Mercûre. "L' Auteur a su se rendre maitre des évènemens, et les disposer de la façon la plus propre à faire effet. Sabatier.
   3°. * Par éfet, s' est dit autrefois pour efectivement. LA RUE s' en sert souvent: il n' est pas de l' usage actuel. "Les châtimens exercés par effet, sur tant et tant de pécheurs, ne sont point pour vous des menaces, ni des exemples.
   4°. On dit souvent: "C' est un effet de la Providence que... Dans ce tour de phrâse, il faut employer le subjonctif. * Le Gendre met mal-à-propôs l' indicatif. "C' est un effet de la Providence que les animaux de proie sont (soient) peu féconds, et que ceux qui servent de proie aux autres sont (soient) d' une fécondité qui les multiplie beaucoup.

EFFEUILLER


EFFEUILLER, v. a. [E-feu-glié: 1re et dern. é fer.; mouillez les ll.] Dépouiller de feuilles. "Effeuiller une branche d' arbre, des rôses, etc. "Les rôses s' effeuillent du matin au soir.

EFFICACE


EFFICACE, ou EFICACE, adj. et subst. EFICACEMENT, adv. EFICACITÉ, s. f. [1re é fer., 4e e muet aux 2 1ers; en a le son d' an, ceman.] Eficace, qui produit son éfet. "Remede fort efficace: discours efficace, etc. La grace efficace. = Eficacement, d' une manière éficace. "Il y a travaillé efficacement.
   EFICACE, subst., et EFICACITÉ, ont le même sens. La force, la vertu de quelque caûse. "L' efficace d' un remède. "L' éloquence a une grande efficace, est d' une grande efficacité. = Le P. Bouhours condamnait éficacité; l' Acad. le trouvait bon, mais elle trouvait éficace meilleur et plus usité. Dans la dern. édit. elle dit, au contraire, qu' éficacité est beaucoup plus en usage, et qu' il se dit principalement en parlant de la grâce. _ La raison de le préférer est d' ôter, ou de prévenir l' équivoque qu' éficace subst. peut faire avec éficace adjectif. "Il opposera ces pénitences chimériques à la pénitence sincère de J. C.; la stérilité des premières à l' éficacité de la seconde... de sorte que le pécheur, après avoir rougi de son péché, sera contraint de rougir encore de sa pénitence. P. du Rivet.
   Rem. EFICACE, adj., ne se dit que des chôses. "* La Princesse fut plus efficace, dit le P. Charlevoix. Je crois qu' il falait dire: Les discours, ou les démarches de la Princesse furent plus éficaces.

EFFICIENTE


EFFICIENTE, adj. fém. Terme de l' Ecole. Il ne se dit qu' en cette phrâse: La caûse efficiente qui produit un éfet. "Le soleil est la cause efficiente de la chaleur.

EFFIGIE


EFFIGIE, s. f. EFFIGIER, v. a. [Efigi-e, gi-é: 1re é fer., 3e lon. au 1er, 4e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Effigie, figûre, représentation d' une persone. _ L' usage de ce mot est fort borné. "On doit porter respect à l' effigie du Prince. "Après la mort des Rois, des Princes, on expose leur effigie en public, c. à. d., leur représentation en cire. _ Exécuter un criminel en effigie, c' est mettre sur l' échafaud son portrait, ou un tableau, ou un manequin, où il est représenté soufrant le suplice auquel il a été condamné. "Il fut pendu, roué en effigie.
   EFFIGIER, ne se dit que dans cette dernière acception: Il a été condamné par contumace, et on l' a effigié. "Il a été effigié.
   Effigie, Image, Figûre, Portrait (synon.) L' effigie, est pour tenir la place de la chôse même. "On pend en effigie les criminels fugitifs. (On avait mis sur le Catafalque l' effigie du Prince.) Image, est pour en représenter simplement l' idée: "On peint des images de nos Mystères. La figûre est pour en montrer l' attitude et le dessein: "On fait des figures équestres de nos Rois. Le portrait est uniquement pour la ressemblance. "On grâve les portraits des Hommes illustres. = Effigie et portrait, ne se disent dans le sens litéral que des persones. Image et figure, se disent de toute sorte de choses. Portrait, se dit dans le sens figuré, pour certaines descriptions que les Orateurs font, soit des personnes, soit des caractères, ou des actions. GIR. Synon.

EFFILÉ


EFFILÉ, ÉE, adj. EFFILER, v. a. [Efilé, lé-e, lé: 1re é fer., 3e é fer. aussi, long au 2d.] Effilé a plusieurs sens. Visage effilé, long et étroit; tâille effilée, trop menue et trop déliée: Cheval effilé, qui a l' encolûre fine et déliée.
   EFILÉ, est aussi subst. masc. Linge qui est éfilé par le bout en espèce de frange, et qu' on porte dans le deuil. "Porter de l' éfilé.
   EFILER, défaire un tissu fil à fil. Efiler une toile. "Il faut bougier le bord de cette toile, de cette étofe, de peur qu' elle ne s' éfile.

EFFLANQUER


EFFLANQUER, ou ÉFLANQUER, v. a. [1re et dre é fer., 2e. lon.] Il ne se dit proprement que des chevaux que l' excès du travail, ou le défaut de nourritûre a maigris, jusqu' à leur rendre les flancs creux ou abattus. "Le travail, la mauvaise nourriture, a efflanqué ce cheval. "Cheval efflanqué, bête efflanquée. = Dans le style plaisant, on peut le dire des hommes au propre; et dans le style critique, des ouvrages d' esprit au figuré. Vers éflanqués, style éflanqué, maigres, sans force, sans nerf.

EFFLEURER


EFFLEURER, ou ÉFLEURER, v. act. [E-fleuré: 1re et dre é fer. _ Eu est long devant l' e muet: Il éfleûre, éfleûrera, etc.] Dans le sens litéral, ne faire simplement qu' enlever la superficie. "Le coup n' a fait que lui effleurer la peau. "Il laboure fort mal, il ne fait qu' effleurer la terre. = Dans le sens figuré, toucher légèrement. "Il n' a fait qu' effleurer la question. "Il ne fait qu' effleurer les choses, sans aller au fond. "Tous les objets qui l' environnoient ne faisoient qu' effleurer ses sens: une seule idée occupoit son ame. _ Comme on le voit par ces exemples, on l' emploie ordinairement avec ne faire que. On peut aussi lui associer à peine. "Il effleure à peine les matières, etc.

EFFONDREMENT


EFFONDREMENT, ou ÉFONDREMENT, s. m. ÉFONDRER, v. act. [1re é fer. 2e lon. 3e e muet au 1er, dreman, é fer. au 2d, dré.] Ils expriment l' action de remuer, de fouiller la terre à la profondeur de plusieurs piés. "On a commencé l' éfondrement de cette terre: il done beaucoup de peine. On a achevé d' éfondrer tout ce terrain: il a fallu un mois pour finir cette opération. = Efondrer est aussi enfoncer, rompre, briser. "Efondrer un cofre, une armoire. = En parlant de la volaille, vider. "Efondrer un chapon, des poulets. _ Efondrement ne se dit point dans ces deux dernières acceptions.

EFFONDRILLES


EFFONDRILLES, s. fém. pl. [éfondri--glie: 1re é fer. 2e long. mouillez les ll.] Parties grossières qui restent au fond d' un vâse, dans lequel on a fait cuire ou infuser quelque chôse. "Ce bouillon est plein d' éfondrilles.

EFFORCER


EFFORCER, (s' ) v. réc. [Éforcé; 1re et dern. é fer.] Au propre, employer toute sa force à faire quelque chôse. "Il s' est éforcé à courir; ne vous éforcez pas à parler. = Au figuré, employer son industrie pour parvenir à une fin. "S' éforcer de gagner les bonnes grâces de quelqu' un. Acad.
   Rem. Ce verbe a deux régimes. On dit, s' éforcer à, et s' éforcer de. Le 1er paraissait, au P. Bouhours, le plus usité. Dans le Dict. Gram. on préfère le 2d. L' Acad. paraissait dire l' un et l' aûtre sans distinction. On doit distinguer, avec M. de Wailly: Dans le sens le plus ordinaire à ce verbe (n°. 2°.) de vaut mieux. "On voit bien que vous vous éforcez d' être plaisant, mais ce n' est pas le moyen de l' être. Au contraire dans le 1er sens (n°. 1°.) il régit à: "Ne vous éforcez pas à crier. _ Cette distinction est très-judicieûse; et les exemples que done l' Acad. l' autorisent.

EFFORT


EFFORT, ou ÉFORT, s. m. [Éfor; 1re é fer. le t final ne se prononce jamais.] 1°. Action faite en s' éforçant. Il se dit du corps et de l' esprit. "Faire le dernier éfort, ou les derniers éforts, ou tous ses éforts: employer tous ses éforts. "Il en est venu à bout sans beaucoup d' éforts. _ Efort d' esprit, d' imagination, de mémoire. = 2°. Ouvrage qui est l' éfet des éforts. Celui-ci se dit sur-tout de l' esprit et des talens. "Cet ouvrage est un éfort d' esprit, un éfort de l' art; un des plus grands éforts de l' art. = 3°. Ce qu' on ne fait qu' avec beaucoup de peine, et en s' incomodant. "Il a fait un éfort pour marier sa fille. = 4°. Avoir un éfort se dit d' un cheval, qui s' est blessé en faisant un éfort.
   Rem. 1°. Éfort n' a de régime que par le moyen des verbes auxquels il est joint, comme faire, employer, etc. Avec eux, il régit la prép. pour et l' infinitif: tout seul, il ne régit rien. "Le Roi, plus afermi encor par ce vain éfort pour le détroner, hazarda enfin de convoquer un Parlement. Hist. d' Angl. Il falait dire, par ce vain éfort qu' on avait fait pour, etc.
   2°. On dit, faire éfort, sans article. "Faire éfort pour se détourner de toutes les chôses mauvaises, où la natûre nous porte. De Saci. c. à. d. s' éforcer de se détourner, etc. on peut dire aussi, dans ce sens: faire tous ses éforts pour, etc. Il est des ocasions où faire éfort vaut mieux. = Mais, que faut-il penser de faire éfort à, avec l' infinitif?
   Faites éfort à plaire, autant comme on vous plait.
       Corn.
Je crois que cela n' est pas de l' usage actuel, et qu' il faudrait dire: éforcez-vous de plaire autant que l' on vous plait.
   3°. * On dit, défendre de toutes ses forces. Mde. de B... (Hist. d' Angl.) dit, de tous ses éforts. "Ptolemaïs, que Saladin défendoit de tous ses éforts. _ Je doute que l' usage autorise cette expression.

EFFRACTION


EFFRACTION, ou ÉFRACTION, s. f. [Efrak-cion: 1re é fer.] Terme de Pratique. Fractûre que fait un voleur pour dérober. "Vol avec éfraction.

EFFRAYANT


EFFRAYANT, ou ÉFRAYANT, ANTE, adj. ÉFRAYER, v. act. [Éfré-ian, ian-te, éfré-ié, 1re et 2e é fer. 3e long. aux deux premiers, é fer. au 3e. Devant l' e muet, ai a le son d' un ê ouvert: il éfraie, pron. éfrê. Au futur et au conditionel, l' e qui est devant l' r est entièrement muet: il éfraiera, éfraierait, et non pas, il éfrayera, etc. Pron. éfrèra, éfrèré, en trois syllabes. _ Richelet écrit éfraïant, et le P. Follard, effraïant; mais cette ortographe induit à prononcer éfra-ian, contre l' usage. Voy. à la Lettre A au comencement.] Efrayer c' est doner de la frayeur. Efrayant, qui éfraie. "Cette nouvelle est éfrayante: elle a éfrayé tout le monde. "On s' éfraie de peu de chôse.
   Rem. 1°. Efrayant marche après ou devant le substantif, auquel il se raporte. "Exemple éfrayant, pensée éfrayante. "L' éfrayant tableau des désordres: l' éfrayante pensée, etc.
   Oui, d' une illusion, échapée à ma vue,
   Je découvre, trop tard, l' éfrayante étendue.
       Sidney.
2°. Efrayer n' a pas ordinairement de 2d régime; mais quand il en a un, c' est plutôt la prép. par que l' ablatif (la prép. de).
   Dieu même, disent-ils, s' est retiré de nous...
   On ne voit plus pour nous ses redoutables mains,
   De merveilles sans nombre, éfrayer les humains.
       Athalie.
La prép. de acomodait mieux le Poète; et il serait ridicule de le chicaner là-dessus; mais, en prôse, il faudrait dire, éfrayer les humains par des merveilles sans nombre.
   3°. Efrayé et être éfrayé régissent la prép. de devant les noms et les verbes. "Il est éfrayé, ou il s' est éfrayé de la menace qu' on lui a faite. "Philocles, éfrayé de voir tant de malice dans les hommes, prit un parti plein de modération. Télém. "Il s' éfraye de penser aux obstacles qu' on lui suscite.

EFFRÉNÉ


EFFRÉNÉ, ÉE, adj. [éfréné, né-e; 3 é fermés, le 3e est long au fém.] Qui est sans frein, sans retenue. _ Il ne se dit qu' au figuré, et des chôses qui ont raport aux persones: il ne se dit pas des persones mêmes. On ne dit point un jeune homme éfréné; mais on dit: licence, langue, ambition éfrénée, etc.

EFFRèNEMENT


*EFFRèNEMENT, s. m. Le Diction. d' Ortog. met ce mot. Je ne le crois pas français. Il n' est point dans les Dictionaires. Je ne me souviens pas de l' avoir lu dans aucun livre. Il serait utile pourtant; et il est à souhaiter que des Auteurs célèbres le mettent en vogue.

EFFROI


EFFROI, ou ÉFROI, s. m. [é-froa; 1re é fer.] Frayeur, épouvante. "Trembler, pâlir d' éfroi. Porter par tout l' éfroi.

EFFRONTÉ


EFFRONTÉ, ou ÉFRONTÉ, ÉE, adj. ÉFRONTÉMENT, adv. ÉFRONTERIE, s. f. [1re et 3e é fermé aux trois premiers, la 3e du dern. e muet, 2e long. 4e longue au dern.] Efronté, qui n' a pas de front, impudent, qui n' a honte de rien. Efrontément, d' une manière éfrontée. Impudemment. _ Efronterie; impudence. "Homme éfronté, femme éfrontée. _ Subst. "C' est un éfronté, une petite effrontée. "Entrer, parler, regarder effrontément. "Soutenir effrontément un mensonge. "Il est plein d' effronterie; il n' a que de l' effronterie. "Il a eu l' effronterie de soutenir ce mensonge. "Par-tout on est convenu qu' en négligeant les manières de leur sexe, les femmes en négligent les devoirs. Par-tout on voit qu' alors tournant en effronterie la mâle et ferme résolution de l' homme, elles s' avilissent par cette odieuse imitation, et déshonorent, à la fois, leur sexe et le nôtre.
   Efronté, Efronterie. Voy. HARDIESSE.
   Rem. Efronté, ne se dit que des persones. Boileau a pourtant dit, dans sa Xe Satire:
   Se font, des mois entiers, sur un lit effronté,
   Traiter d' une visible et parfaite santé.
Mais ce sont des figûres hardies, aprouvées dans les Poètes, et qu' on ne doit pas imiter en prôse, même dans le style le plus relevé.
   On dit, en style proverbial, éfronté comme un page de Cour, extrêmement éfronté.

EFFROYABLE


EFFROYABLE, ou ÉFROYABLE, adj. EFFROYABLEMENT, adv. [E-froa-ia-ble, ia-bleman: 1re é fer., 4e e muet.] Efroyable, qui caûse de l' éfroi. Spectacle éfroyable. "Il faisoit des sermens effroyables. _ Par exagération, extrême, étonant, prodigieux. Laideur éfroyable: dépense éfroyable. "Cette femme est effroyable, extrêmement diforme.
   EFROYABLEMENT, d' une manière excessive. "Il dépense effroyablement: elle est effroyablement laide. Voy. EPOUVANTABLE.
   Rem. 1°. Efroyable est toujours pris en mauvaise part. Il y a une grande diférence entre cet adjectif et redoutable. Celui-ci se dit des Conquérans et des Hérôs; l' aûtre, des Monstres et des Furies. Ménage fait cette observation au sujet de ces vers du Sonet de Malherbe à Henri le Grand:
   Et qu' après le trépas, ce miracle de guerre
   Soit encor effroyable en sa Postérite.
Ce mot révolterait aujourd' hui: on dirait, redoutable.
   2°. EFROYABLE, suit ou précède le substantif, au gré de l' Orateur, ou du Poète, guidé par l' oreille et le goût. "Nuages effroyables: un vaste amas d' effroyables nuages:
   Quels effroyables abîmes
   S' entr' ouvrent autour de moi!
       Rousseau.
  3°. Cet adjectif s' emploie d' ordinaire sans régime. Crébillon lui fait régir la prép. à.
   Monument effroyable à la race future.
On peut l' imiter en vers: en prôse, je n' oserais le conseiller.

EFFROYÉ


*EFFROYÉ, ÉE, adj. C' est ainsi qu' on écrivait autrefois; et cette ortographe était plus conforme à l' étymologie d' effroy. On prononçait alors éfroa-ié. On a puis écrit et prononcé effrayé.

EFFUSION


EFFUSION, s. f. [Efu-zion: 1re é fer.] Épanchement. Acad. _ Trév. ajoute, de choses liquides, qui se fait avec quelqu' éfort. _ L' Acad. ne done que ces deux exemples: "Effusion du vin dans les Sacrifices. "Il y eut une grande effusion de sang dans ce combat. _ L' emploi de ce mot est fort borné au propre. = Au figuré, on dit, éfusion de coeur, vive et sincère démonstration de confiance et d' amitié.

ÉGAL


ÉGAL, ALE, adj. ÉGALEMENT, adv. ÉGALER, v. a. [1re é fer., 3e e muet au 2d et 3e, é fer. au dern.] Egal, est 1°. Pareil, semblable. Deux points égaux: deux lignes égales: "Deux personnes d' un âge égal, d' une condition égale. _ Faire tout égal, ne pas doner à l' un plus qu' à l' aûtre, ne pas favoriser l' un plus que l' aûtre. Tenir la balance égale, a le même sens. Celui-ci est plus du style noble, l' aûtre du style familier. = En parlant des chôses, indiférent. "Tout m' est égal. "Qu' on lui donne chaud, qu' on lui donne froid, tout lui est égal. = 3°. Figurément, qui est toujours le même. "Esprit, caractère égal; humeur égale. "Une ame égale et constante. = 4°. Uni, qui n' est point raboteux. "Chemin bien égal, allée bien égale. = 5°. Uniforme: "Style égal. "Toujours marcher d' un pas égal. "Il a tenu une conduite égale dans toutes les affaires. = * 6°. Corneille lui done le sens de tranquille.
   Et le prends-tu pour homme à voir d' un oeil égal,
   Et l' amour de son Frere, et la mort d' Annibal?
       Nicom.
Oui, pourrait-on répondre; il est irrité de l' un et de l' aûtre. Mais ce n' est pas ce que veut dire Prusias: par oeil égal, il entend oeil tranquile. Pourra-t-il voir tranquillement? Cet adjectif ainsi employé, outre qu' il est contre l' usage, peut faire un sens équivoque.
   ÉGAL, s. m. "Se battre contre son égal. "Vivre civilement avec ses égaux. Cela est bon entre égaux, d' égal à égal. _ * Bussi-Rabutin dit, des amis égaux, pour des amis qui soient nos égaux.
   Des amis égaux, le corps sain;
   Être prudent, sans être fin;
   Être complaisant et facile;
   Un sommeil pas long, mais tranquille;
   Être satisfait de son sort;
   Quel qu' il soit, ne s' en jamais plaindre,
   Et regarder venir la mort
   Sans la desirer, ni la craindre.
   Rem. 1°. EGAL régit quelquefois le datif (la prép. à:) "Son génie est égal à son emploi: "Sa vertu est égale à ses talens.
   2°. Quand il est sans régime, il se met assez indiféremment devant, ou après le substantif: "Une égale douceur, une douceur égale: mais quand il a un régime, il doit être toujours placé après. Gresset dit, dans la Ve Eglogue de Virgile:
   Je goûte, à vous entendre, une égale douceur
   À~ celle que ressent l' avide Voyageur, etc.
Il me semble que, même en vers, il faut dire, une douceur égale à celle, etc.
   3°. Il est fort bien dans le moral. Esprit égal, humeur égale: il me parait qu' il ne se dit point des persones mêmes. "Les Stoïciens nous disent qu' il faut toujours être égal, et sans la moindre inquiétude, quoiqu' il puisse nous arriver. Mallebr.
   4°. Quand il est substantif, ou il s' emploie avec le verbe être: "C' est mon égal, mon égale. "Il n' est pas son égal en talens, en mérite; ou il forme avec d' aûtres verbes des expressions composées. _ Marcher l' égal de quelqu' un, être au même rang.
   Ministre vertueux, que le Ciel a fait naître
   Pour honorer ton siècle, et marcher mon égal.
C' est ainsi que M. Thomas fait parler Colbert à M. de Sechelles.
   Et quand, passant des jeux aux soins de votre rang,
   * Vous marcherez égal aux Dieux de votre sang.
       Gresset.
Je crois qu' on dit toujours, marcher l' égal de, et non pas, marcher égal à. = Traiter d' égal à égal avec... * Bossuet dit, traiter d' égal, tout seul. "Abraham traitoit d' égal avec les Rois. _ Cela n' est pas exact. = Trancher d' égal. Voy. TRANCHER.
   5°. EGAL, avec le verbe être impersonel, régit de et l' infinitif. "Il étoit égal à ces Pirates de dévaster les Provinces de France, ou celles d' Angleterre. Moreau.
   À~ L' ÉGAL DE, adv. Autant que, aussi-bien que. "Il est craint à l' égal du tonnerre.
   Et son Coursier, qui vole à l' égal des Zéphirs,
   Suffit encore à peine à ses bouillans desirs.
   EGALEMENT, d' une manière égale "Il les estime également. "Il les traite tous également. = Autant, pareillement: "Egalement utile et glorieux; aussi glorieux qu' utile. = * Un Auteur moderne lui done le même régime qu' à aussi, autant. "Plusieurs en sont également scandalisés que si l' on prononçait tout-à-fait ces juremens. Anon. _ Dites, aussi scandalisés que, etc. _ On lit aussi, dans une Lettre écrite de Bretagne, et imprimée: "Elles ont également que moi, à se louer de la méthode curative de, etc. Il faut là, autant que moi.
   ÉGALEMENT, s. m. Terme de Pratique. Voy. ÉGALISATION.
   ÉGALER, 1°. Rendre égal. "Egaler les parts et les portions. "La mort égale tous les hommes. = 2°. Rendre uni: "Cette allée est raboteûse, il faut l' égaler. = 3°. Être égal à... "Ce Prince égale les Héros les plus fameux. "Cet Auteur a égalé les Anciens. = 4°. Egaler quelqu' un à un aûtre, prétendre qu' il lui est égal. "Il n' est aucun Auteur vivant qu' on puisse lui égaler. "Il se veut égaler à un tel: quelle présomption!
   REM. Egaler et égaliser, ne sont point synonymes. Le 1er, se dit des persones et des chôses; le 2d, ne se dit que des chôses. Celui-là est de tous les styles, et du discours comun; celui-ci ne se dit qu' en termes de Pratique. * Un Avocat de Province dit, dans un Mémoire contre les Bénéficiers d' un Chapitre: "Il est bien surprenant qu' ils veuillent se comparer, s' assimiler, et presque s' égaliser aux Chanoines. On dit, s' égaler à, et non pas, s' égaliser. _ M. Linguet dit aussi: "Pour égaliser les Parties contractantes: mais c' est un aûtre sens; et il s' agit là de partage, et non pas de rang et de privilèges. Voyez ÉGALISER.

ÉGALISATION


ÉGALISATION, s. f. ÉGALISER, v. act. [Égaliza-cion, lizé: 1re é fer.] Termes de Pratique. Ils expriment l' action par laquelle on égale le partage des lots. "Égalisation des lots. "Égaliser les lots d' un partage. _ L' Acad. ne dit point égaliser, des persones.
   Égalisation et également, ne sont pas synonymes. Le 1er, se dit de l' action d' égaliser; le 2d, de ce qu' on done pour rendre égal un lot qui est moindre que les aûtres. "On donne à ceux qui ont reçu moins, un également, tel, qu' ils ayent autant que celui qui a reçu le plus.

ÉGALITÉ


ÉGALITÉ, s. f. [1re et dre é fer.] 1°. Conformité, raport entre des chôses égales. "L' égalité des persones, des conditions. = Distribuer avec égalité, en portions égales. = 2°. Uniformité. "Égalité d' esprit, d' humeur, de conduite. Égalité de style. Voyez ÉGAL, n°. 3°. et 5°.

EGARD


EGARD, s. m. [Égar: le d ne se prononce jamais, même devant une voyelle.] Considération, circonspection. Atention, marques d' estime. "Avoir égard à la prière de; à ce qu' on nous représente. "Un homme circonspect et tout rempli d' égards. "Avoir de grands égards pour... Avoir égard au mérite des personnes, etc. etc.
   Egards, ménagemens, atentions, circonspection (synon.) Les égards sont l' éfet de la justice; les ménagemens, de l' intérêt; les atentions, de la reconaissance ou de l' amitié; la circonspection, de la prudence. "On doit avoir des égards pour les honnêtes gens, des ménagemens pour ceux de qui on a besoin; des atentions pour ses parens et ses amis, de la circonspection avec ceux avec qui on traite. _ Les égards suposent, dans ceux pour qui on les a, des qualités réelles; les ménagemens, de la puissance ou de la foiblesse; les atentions, des liens qui les atachent à nous; la circonspection, des motifs particuliers ou généraux de se défier. Encycl. Beauzée, Synonimes.
   EU ÉGARD, prép. Ayant égard à.... "Eu égard à la qualité de l' afaire. "À~ l' égard, 1°. Pour ce qui regarde, pour ce qui concerne. "À~ l' égard de ce que vous disiez; des propositions que vous faites, je vous dirai que, etc. 2°. Par comparaison, par proportion. "La terre est fort petite à l' égard du soleil. = À~ cet égard, adv. On le met rarement au pluriel, même quand il est relatif à plusieurs chôses, dont on a parlé. "Nous ne nous vîmes pas seulement trompés à ces égards. Voyage d' Anson. _ Dites, à cet égard. = On dit bien, à diférens égards, à divers égards, mais c' est dans un autre sens: sous diférentes vues.
   Rem. 1°. Plusieurs ont dit, à mon égard, à l' égard de moi, pour dire, pour moi, pour ce qui me regarde. "La conversation tomba sur le Poème Héroïque. Chacun en parla suivant ses lumières. À~ l' égard de moi... je soutins que, pour être excellent, ce Poème devoit être chargé de peu de matière. Boil. "Un Religieux parlant de ses aliances, qui étoient considérables, le Saint lui répondit qu' à son égard il étoit le fils d' un pauvre tisserand. Vie de Saint Jean de la Croix. "Ces Marchands dirent au Roi qu' à leur égard ils étoient résolus de soutenir leurs plaintes, etc. Hist. d' Angl. _ L' Acad. dit bien: à mon égard, à son égard; mais sans les employer dans des phrâses, qui en dévelopent le sens. _ Je pense que, pour moi, pour lui, pour eux, est plus de l' usage actuel; et qu' à mon égard, à son égard, à leur égard, dans les phrâses précédentes, sont vieux et hors d' usage. _ Pour à l' égard de moi, qu' a employé Boileau, j' ose dire qu' il est tout-à-fait mauvais.
   2°. On dit, par égard pour: * J. J. Rouss. a dit, par égard à. "Cependant, par égard au sentiment de ceux de mes compatriotes, qui, etc. je veux bien rechercher encôre si cet expédient est praticable.

ÉGAREMENT


ÉGAREMENT, s. m. ÉGARER, v. act. [Egareman, ré: 1re é fer. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d. _ Devant l' e muet l' a est long: il égâre, il égârera, etc.] Egarement, au propre, méprise d' un voyageur qui se détourne de son chemin. "Après un long égarement, ils revinrent dans leur chemin. = Au figuré, il est plus en usage. Il se dit de l' esprit et des moeurs. "Les égaremens des Philosophes. "Les Hérétiques sont tombés dans de grands égaremens. "Egarement d' esprit, démence. _ "Il est revenu des égaremens (des désordres) de sa jeunesse, etc.
   ÉGARER, au propre, fourvoyer, tirer du droit chemin. "Notre guide nous a égarés. _ Au figuré, jeter dans l' erreur. "De mauvais conseils l' ont égaré. = Il se dit sur tout au réciproque: "Il s' est égaré de son chemin: il s' égara dans la forêt. _ "La présomption, l' orgueil, font que les Hérétiques s' égârent. _ "Il s' est égaré dans ses pensées, dans les voies de l' iniquité, etc. "Il se perd, il s' égâre dans son discours; il s' éloigne du sujet qu' il traite.
   ÉGARÉ, ÉE, adj. "Brebis égarée. "Avoir la vûe égarée, l' air égaré, les yeux égarés, l' esprit égaré. "Ce cheval a la bouche égarée: on lui a gâté la bouche en le menant mal. = Au figuré, brebis égarées, ceux qui sont sortis du sein de l' Eglise, pour embrasser l' hérésie.

ÉGAUDIR


*ÉGAUDIR (s' ) v. réc. Vieux mot, qui dabord signifiait chasser dans un bois, et ensuite, se réjouir. Il n' est plus usité, ni dans une acception, ni dans l' autre.

ÉGAYER


ÉGAYER, v. act. [éghé-ié; 3 é fer. _ Devant l' e muet, le 2d ê est ouvert: il égaie, ils égaient; pron. pour l' un et pour l' autre éghê: Au futur et au conditionel, l' e après ai, est entièrement muet: il égaiera, égaierait: pron. éghêra, éghêrè, en trois syll.] Egayer, réjouir, rendre gai. "Egayer une compagnie; égayer la conversation. égayer un malade. "Il faut s' égayer. _ "Tâchez de vous égayer l' esprit, etc. _ On dit, dans le bon style, égayer un ouvrage; égayer son style, son sujet; le traiter d' une manière plus riante, plus fleurie: "Il n' y a rien de si sombre qu' on ne puisse égayer par l' adresse de l' esprit. Le Chev. de Méré. Et dans le style familier, égayer son deuil; porter un deuil moins exact, moins régulier.
   Egayer du linge. Voyez Aigayer. _ L' Académie les met tous deux à leur place, sans avertir que c' est le même mot sous deux orthographes diférentes, et que celui-ci est le meilleur et le plus conforme à l' étymologie.

ÈGE


ÈGE. Dans cette finale, l' è est moyen et long: sacrilège, collège, siège, privilège, etc.

ÉGIDE


ÉGIDE, s. f. Nom qu' on done au bouclier, ou à la cuirasse de Pallas _ Ce mot est beau au figuré, dans le style poétique.
   Le Batave vous vit oposer votre égide
   Au cruel démon des combats.
       Rousseau.

ÉGLISE


ÉGLISE, s. f. [1re é fer. 2e lon. 3e e muet; Egli-ze.] 1°. L' assemblée des Fidèles. "L' Eglise Catholique, etc. "Le Pape est le chef visible de l' Eglise. "Hors de l' Eglise, point de salut, etc. = 2°. On done aussi ce nom aux diférentes parties de l' Eglise, en les distinguant par les noms des lieux. "L' Eglise d' Orient, d' Occident, d' Afrique. "L' Eglise Latine, Grecque, Gallicane, etc. L' Eglise de Milan, de Paris, etc. _ Par extension, on le dit même des Eglises schismatiques: "L' Eglise Anglicane, les Eglises Protestantes, etc. = 3°. Temple consacré à Dieu "Bâtir, consacrer, fonder une Eglise. "Eglise Métropolitaine, Cathédrale, Collégiale, Paroissiale, etc. = 4°. Il se prend pour l' état du Clergé: "Un homme d' Eglise; les gens d' Eglise; se faire d' Eglise. "Dans les cérémonies, l' Eglise a le pâs. etc. = Cour d' Eglise, la Juridiction de l' Evêque ou de l' Archevêque.
   On dit, en style proverbial, gueux, comme un rat d' Eglise. _ Près de l' Eglise et loin de Dieu. Pour être près de l' Église, on n' en est pas pour cela plus dévot.

ÉGLOGUE


ÉGLOGUE, s. f. [égloghe: 1re é fer. dern. e muet. _ On écrivait aûtrefois éclogue; et quelques-uns l' écrivent encôre de même, quoiqu' ils prononcent églogue.] Sorte de poésie pastorale. "Les Eglogues de Théocrite, de Virgile, de Fontenelle, etc.

ÈGNE


ÈGNE. La pénultième est longue, è moy. Règne, douègne, etc.

ÉGOïSER


ÉGOïSER, v. neut. ÉGOïSME, s. masc. ÉGOïSTE, s. m. et fém. [égo-izé, is-me, iste: 1re é fer. au 1er, e muet aux deux aûtres.] Egoïser, parler trop de soi. Egoïsme, amour propre, qui consiste à parler trop de soi, ou qui raporte tout à soi. _ Il se dit aussi, mais plus rârement, de l' opinion de certains Philosophes, qui prétendent qu' on ne peut être sûr que de sa propre existence. _ Egoïste, celui ou celle qui a le vice, ou qui suit la doctrine de l' Egoïsme.
   Egoïste, Homme personel (synon.) Le 1er ne parle que de lui; le 2d ne songe qu' à lui: l' un se met au milieu de la scêne, et l' autre au centre des chôses. L' égoïste, tout ocupé de lui-même, veut vous ocuper de lui: L' Homme personel, quelquefois ocupé de vous, ne s' en ocupe que pour lui: l' amour propre de celui-là est plus vain, l' amour propre de celui-ci est plus profond: le 1er est ridicule, le 2d est redoutable. Extr. des synon. de M. l' Ab. Roub.

ÉGOISTIQUE


*ÉGOISTIQUE, adj. Mot forgé d' après égoïsme et égoïser. À~ mesure que ce vice est devenu plus commun et plus sensible, on a inventé des mots pour l' exprimer. "Le philosophisme égoistique de nos jours. L' Abé Guénée.

ÉGOLOGIE


*ÉGOLOGIE, s. fém. Autre mot forgé depuis peu. Egoisme, dans le premier sens. "Il (Boindin) ne s' épargne pas les louanges; ce qui sufirait pour dispenser le public de lui en acorder. L' Éditeur aurait dû suprimer cette égologie. Sabat. Trois Siècles, etc. L' Auteur met ce mot en italique, pour montrer qu' il le hazarde.

ÉGORGER


ÉGORGER, v. act. [1re et dern. é fer.] Au propre, couper la gorge: "Égorger un boeuf; un mouton, ou tuer de quelque manière que ce soit. "Les Siciliens égorgèrent tous les français. Au figuré, ruiner la réputation, la fortune; porter un préjudice considérable. "Ce Tuteur a égorgé son pupille.

ÉGOSILLER


ÉGOSILLER, (s' ) v. récip. [Égozi-glié: 1re. et der. é fer. mouillez les ll.] Se faire mal au gosier à force de crier. "Il s' est égosillé à force de chanter.

ÉGOUT


ÉGOUT, s. m. [É-goû; 1re é fermé, 2e lon.] 1°. Chûte, écoulement des eaux. Il a recueilli l' égoût de plusieurs sources. "Il n' est pas permis de laisser tomber l' égoût de ses eaux sur son voisin. = 2°. Cloaque, conduit. "L' égoût est bouché, les eaux regorgent. = 3°. Plaie, ulcère, cautère. "Cet ulcère est l' égoût du corps; toutes les mauvaises humeurs passent et sortent par là. = 4°. On dit, en stile plaisant ou critique, qu' une Ville est l' égoût d' un pays, pour dire que c' est le lieu où se retirent les gens de mauvaise vie, etc. "Nice et Avignon sont les égoûts de la Provence. C' est là que se retirent ceux qui fuyent l' animadversion de la Justice, les débiteurs insolvables, etc.

ÉGOUTTER


ÉGOUTTER, v. neut. [É-gou-té: 1re et dern. é fer.] Faire écouler l' eau. "Laisser égouter, ou faire égouter du lait câillé, du fromage. Mettre égouter de la morûe, des cardes, des asperges, etc. "Ce fromage s' égoutera peu à peu.

ÉGRAPER


ÉGRAPER, v. act. Ôter la grape du raisin.

ÉGRAINER


ÉGRAINER, Voy. ÉGRÉNER. L' Acad. ne met que le second. Le Rich. Port. les met tous deux.

ÈGRATIGNER


ÈGRATIGNER, v. act. [1re et dern. é fer. mouillez le gn.] Faire une déchirûre à la peau avec des grifes, des ongles, une épingle, etc. "Le chat l' a égratigné. Souvent les enfans s' égratignent. = Dans le Journ. de Monsieur, on l' emploie au figuré. "C' est un homme (Volt.) qui se caresse, et qui égratigne ses énemis. = On dit, en style proverbial, d' un homme qui fait du pis qu' il peut: que, s' il ne mord, il égratigne. _ Il n' est si petit chat qui n' égratigne: tout le monde se mêle de critiquer. _ * Dans certaines Provinces, le Peuple dit, égrafigner, et dans d' aûtres, grafigner.

ÉGRATIGNûRE


ÉGRATIGNûRE, s. f. [1re é fer. 4e lon. mouillez le gn.] Légère blessûre, qui se fait en égratignant; et la marque qui demeûre quand on a été égratigné. = On le dit quelquefois d' une légère blessûre. "Il a reçu un coup d' épée; mais ce n' est qu' une égratignûre. = On dit, proverbialement, d' une persone peu endurante et trop sensible, qu' elle ne saurait soufrir la moindre égratignûre.

ÉGRÉNER


ÉGRÉNER, v. act. [Égréné; 3 é fermés: devant l' e muet, le 2d e est moyen. Il égrène, ègrènera, etc. _ Richelet écrit égrainer; et cette manière est plus conforme à l' étymologie de grain, graine. _ L' Acad. écrit égrener, sans accent sur le 2d e. Je ne sais si cet usage est bien constant et assuré, et si l' on doit prononcer cet e muet. Il semble que l' analogie et l' étymologie demandent que cet e soit fermé; et que si l' on n' écrit pas égrainer, on doit du moins écrire et prononcer égréner.] Faire sortir le grain de l' épi, la graine des plantes, détacher les grains de la grape. "Égréner du blé, du fenouil, du raisin. "Le raisin s' égrène etc.

ÉGRETTE


*ÉGRETTE. C' est ainsi que Pluche écrit ce mot, dont l' ortographe la plus autorisée est Aigrette.

ÉGRILLARD


ÉGRILLARD, ARDE, adj. [Égri-gliar, arde; 1re é fer. mouillez les ll.] Vif, éveillé, gaillard. "Esprit égrillard, humeur égrillarde. = Subst. "C' est un égrillard. St. famil.

ÉGRISER


ÉGRISER, v. act. [Égrizé; 1re et 3e é fer. _ Devant l' e muet, l' i est long: il égrise, il égrisera, etc.] Ôter les parties brutes d' un diamant.

ÉGRUGEOIR


ÉGRUGEOIR, s. m. ÉGRUGER, v. act. [Égru-joar, jé; 1re é fer. 3e dout. au 1er, é fer. au 2d.] Egrugeoir est un petit vaisseau, ordinairement de buis, dans lequel on égruge, on brise le sel avec un pilon. _ Egruger, mettre en poudre dans l' égrugeoir.

ÉGUADE


*ÉGUADE, Richelet. On écrit aussi aiguade. Id. Celui-ci est le seul bon, le seul conforme à l' étymologie, le seul admis par l' usage

ÈGUE


ÈGUE, dans cette finale, l' è pénultième est moyen et bref. Bègue, collègue, il allègue, etc.

ÉGUÉER


*ÉGUÉER, Trév. Voy. ÉGAYER et AIGAYER.

ÉGUEULER


ÉGUEULER, v. act. [É-gheu-lé; 1re et dern. é fer.] Câsser le haut d' un goulot d' un vaisseau de terre, ou de verre. "Il a égueulé sa cruche, son pot, etc. = S' égueuler, s' égosiller. "Il S' égueule de crier, à force de crier. _ S' égueuler est plus du st. plaisant et comique, et s' égosiller du style simple et du discours ordinaire.

ÉGUIèRE


*ÉGUIèRE, ÉGUILLE, voy. AIGUIèRE, AIGUILLE.

ÉGUILLETIER


ÉGUILLETIER, ÉGUILLETTE, Voy. AIGUILLETIER, AIGUILLETTE. _ Ménage, qui emploie la première ortographe, veut qu' on prononce égulletier, égullette; il se trompe; et pourquoi mettre un i devant les ll, si on ne les mouille pas? Et l' ortographe et la prononciation sont également vicieûses.

ÉGUILLONER


*ÉGUILLONER. C' est l' ortographe de quelques Auteurs ou Imprimeurs; mais AIGUILLONER, est plus selon l' usage et l' étymologie. Voy. ce mot.

ÉGUISER


*ÉGUISER. Voy. AIGUISER. Quelques Auteurs ont employé la première manière d' écrire ce mot. "Le vice... s' éguise contre la Loi, et devient fin, à mesure qu' elle devient plus ferme. Servan. "Un zèle sage est souvent obligé de s' éguiser et de s' animer, pour n' être pas infructueux. Sab. Trois Siècles, etc.

ÉGYRE


*ÉGYRE, s. f. On écrit ordinairement Hégyre. Voyez ce mot.

EH


EH! ou HÉ! interj. qui exprime l' admiration, la surprise. Le premier est le plus usité. Ils se mettent souvent devant bien: "Eh bien! ou hé bien! Fénélon emploie le dernier. Eh! se dit aussi tout seul, à la tête de la phrâse. "Eh! qui pourrait suporter plus long-tems de pareilles injustices?

ÉHANCHÉ


*ÉHANCHÉ. Voy. DÉHANCHÉ.

ÉHERBER


*ÉHERBER, v. act. Voy. SARCLER.

ÉHONTÉ


*ÉHONTÉ, ÉE, adj. Vieux mot. "Il serait à souhaiter qu' on fît revivre ce mot, qui dit plus qu' éfronté. Réflex.

EI


EI, diphtongue. Les Allemands en font deux syllabes, et le prononcent a-ï. Ils prononcent ein, comme nous prononçons a-ïn. Ils doivent prendre garde à cela, en prononçant les mots français où la dipht. ei se trouve.

ÉJECTION


ÉJECTION, s. f. [Éjèk-cion. 1re é fer. 2e è moy.] Terme de Pratique. "Il rendit plainte contre l' Aubergiste... pour éjection de sa persone dans la rue pendant la nuit. Gazette des Tribunaux.

EIN


EIN, dipht. nazale. _ Ein, aim, im, in, ont le même son: dessein, essaim, impotent, vin. Pron. Dé-cein, é--sein, ein-potant, vein.

ÉJOUIR


*ÉJOUIR (s' ) v. réc. On dit, dans le Dict. Gram. que ce mot n' est pas français. On le regarde comme nouveau. Il est très-vieux, et hors d' usage. "Ejouis-toi, stérile, qui n' enfantois point. Vieille traduction du texte: l‘tare sterilis, etc. On dit aujourd' hui, se réjouir, réjouis-toi.

ÉLABORER


*ÉLABORER, v. act. Travailler. J. J. Rousseau a employé ce mot. "L' esprit humain, moins étendu, moins noyé parmi les opinions vulgaires, s' élabore et fermente mieux dans la tranquille solitude. _ C' est une métaphôre tirée de la Médecine, où l' on dit que le sang s' élabôre. = Rich. met Elabouré. "Un Ouvrage bien élabouré. Voy. le mot suivant.

ÉLABOURÉ


ÉLABOURÉ, ÉE, adj. [Éla-bou-ré, ré--e: 1re et 4e é fer.] Travaillé. _ Il ne se dit que dans le style badin. "Artistement élabouré.

ÉLAGUER


ÉLAGUER, v. act. [Élaghé; 1re et dern. é fer.] Couper les branches inutiles des arbres. = Fig. "Il faut élaguer cet article. = Elaguer, Emonder (syn.) Le premier signifie proprement retrancher, le 2d. nettoyer. Elaguer un arbre, c' est en retrancher les branches superflues et nuisibles, etc. Emonder un arbre, c' est ôter ce qui le gâte et le défigure. Emonder a surtout un objet d' agrément; Elaguer, un objet d' utilité, etc. Extr. des Syn. de M. l' Abé Roubaud.

ÉLAN


ÉLAN, s. m. Espèce d' animal, qui se troûve dans les Pays Septentrionaux. = Fig. "Des élans d' imagination, qui étonent. Sabat.
   Toi, qui, rival et fils du grand Racine,
   As fait revivre en tes premiers élans,
   Sa piété non moins que ses talens.       Rouss.
Il ne se dit qu' au pluriel. "Les élans de dévotion, d' amour de Dieu. _ L' Acad. le met au propre. "Les élans du cerf. "Un cheval qui ne va que par élans. Voy. ÉLANCEMENT. = Dans le Journ. de Mons. on l' emploie au singul. "Ce n' est point une éducation molle et tranquille, qui nourrit le génie, et lui done cet élan enflamé, seul capable d' ateindre aux plus brillans succès.

ÉLANCEMENT


ÉLANCEMENT, s. m. [Elanceman; 1re é fer. 2e lon. 3e e muet.] Au propre, impression subite de douleur, provenant d' une caûse interne. "Sentir des élancemens. = Suivant l' Acad. il se dit en termes de dévotion: "Les élancemens de l' âme vers Dieu. Je le crois vieux en ce sens: élans est plus de l' usage moderne.
   La Touche était aussi du sentiment que ce mot se dit au figuré. Il cite ce vers de Molière, dans le Tartufe.
   Il faisoit des soupirs, de grands élancemens.
Cela ne peut plus se dire qu' en se moquant.

ÉLANCER


ÉLANCER, v. n. [1re et dern. é fer. 2e lon.] Il se dit à la 3e persone, de la douleur aigûe que l' on soufre, pareille à celle que fait la pointe d' une aiguille ou d' une alêne. On ne le dit point de la persone qui soufre cette douleur, mais de la partie du corps où elle la ressent. "Le doigt m' élance. "Je sens quelque chôse qui m' élance.
   S' ÉLANCER, v. réc. Se jeter en avant avec impétuosité. "Il s' élança au travers des énemis. "Le cerf, le cheval s' élança. _ M. Thomas l' emploie au figuré avec la prép. à. "Il (le Duc de Sully) y puisa cet orgueil généreux, qui s' élance à la gloire par la vertu.
   ÉLANCÉ, ÉE, adj. Cheval élancé, qui est devenu éflanqué par l' excès du travail, ou le défaut de nourriture. _ On dit aussi, par dérision, homme élancé, persone élancée, dont la tâille est trop afilée.

ÉLARGIR


ÉLARGIR, v. act. ÉLARGISSEMENT, s. m. ÉLARGISSûRE, s. f. [Élargi, gi-ce--man, gi-sûre: 1re é fer. 4e e muet au 2d. lon. au dern.] Elargir, rendre plus large. "Elargir des souliers, un just' au corps; une chambre, une alée, un fôssé. = V. n. et réc. "Le visage lui élargit, lui est élargi. "Le chemin s' élargit en cet endroit, va en s' élargissant.
   ÉLARGISSEMENT, est l' action d' élargir, et Elargissûre, ce qu' on ajoute pour élargir. "Elargissement d' un canal, d' un chemin, etc. "Elargissûre d' un corps de jupe, d' une robe, etc.
   Rem. * On écrivait autrefois eslargir, et on lui donait le sens de distribuer. "Il vendit tout son bien, et l' eslargit aux paûvres. Chron. C' est un latinisme: elargiri.

ÉLASTICITÉ


ÉLASTICITÉ, s. f. ÉLASTIQUE, adj. [1re é fer. dern. é fer. 1er, e muet au 2d.] Elastique, se dit de ce qui a du ressort; corps élastique; ou, de ce qui produit le ressort; force ou vertu élastique. "Elasticité, propriété d' un corps élastique. "L' élasticité de l' air.

ELBE


ELBE, s. m. Rivière. Le Père Barre, (Hist. d' Allem.) le fait fém. "Il trouva l' Elbe toujours plus large, plus profonde. Dites plus profond.

ÉLECTEUR


ÉLECTEUR, s. m. [Élèk-teur; 1re é fer. 2e è moyen.] Celui qui élit. L' Acad. avertit qu' il ne se dit guère que des Electeurs de l' Empire. "L' Electeur de Saxe, de Bavière, de Cologne, etc. _ Il me paraît pourtant qu' on le dit, sans dificulté, de tous ceux qui élisent, dans quelque élection que ce soit.

ÉLECTIF


ÉLECTIF, IVE, adj. ÉLECTION, s. f. [Elèktif, tîve, élèk-cion, en vers, ci-on. 1re é fer. 2e è moy.] Electif, qui se fait par élection. Élection, 1°. Action d' élire. "Le Pape est électif. "Il y a des Rois électifs. _ Royaume électif, où le Roi se fait par élection. _ "Faire, aprouver, confirmer une élection. = On dit, en termes de Pratique: Faire élection de domicile, marquer un lieu, où l' on recevra les assignations et autres actes judiciaires. = On apèle les Prédestinés, des vâses d' élection, et ce titre se done à St. Paul par excellence.
   2°. ÉLECTION signifie aussi un Tribunal composé de plusieurs Oficiers pour juger les diférends, touchant les Tâilles, les Aides, et les Gabelles; et l' étendue du Ressort de ce Tribunal.
   Rem. On se servait autrefois d' élection, au lieu de choix, et d' élire, au lieu de choisir. "L' élection qu' on aloit faire d' un Gouverneur, pour le Prince de Castille. Acad. Sentimens sur le Cid. Le Roi choisit, il n' élit point: il fait choix, et non pas élection d' une persone pour un emploi.
   Vraiment, je suis ravi que mon élection
   Ait enfin mérité ton aprobation.
       Corn. Suite du Menteur.
_ Mde. de Sévigné, parlant à sa fille du systême de Descartes sur l' âme des bêtes, lui dit: "Parlez un peu au Cardinal de vos machines: des machines qui aiment, qui ont une élection pour quelqu' un, etc. Le mot est impropre aussi bien que le régime. _ Le P. Mallebranche parle aussi d' un amour électif. "Ils ne peuvent conserver long-temps leur amour électif pour Dieu, contre l' amour naturel pour les biens sensibles. _ Cela ne se dit plus, et n' aurait jamais dû se dire. = L' Acad. définit élection, choix fait par plusieurs persones. Voyez CHOIX. Voyez ÉLIRE.

ÉLECTORAL


ÉLECTORAL, ALE, adj. ÉLECTORAT, s. m. [1re é fer. 2e è moy. l' l finale se prononce dans le 1er, mais on ne prononce pas le t final dans le dernier.] Ils ne se disent que des Electeurs de l' Empire. _ Electoral, qui apartient à l' Electeur, ou aux Electeurs. "Bonnet électoral; Collège électoral; Altesse électorale. Électorat, la dignité d' Electeur; et l' étendue du pays soumis à un Electeur. "L' Electorat est une très-grande dignité. "Dans tout l' Electorat de Mayence.

ÉLECTRICISME


*ÉLECTRICISME, s. m. Mot nouveau, et assez inutile: il a le même sens qu' Electricité. "L' Electricisme et le magnétisme de la matière. Ann. Litt.

ÉLECTRICITÉ


ÉLECTRICITÉ, s. f. ÉLECTRIQUE, adj. [1re é fer. 2e è moy.] Electricité, est la propriété des corps, qui étant frotés, en atirent d' aûtres. Électrique, qui a cette propriété. "L' électricité du verre, de l' ambre. "Corps électrique, vertu électrique. "Les phénomènes de l' électricité sont aussi admirables qu' inexplicables.

ÉLECTRISABLE


ÉLECTRISABLE, adj. Qui peut être électrisé. Les Dictionaires ne mettent pas ce mot, mais il est fort employé par les Physiciens.

ÉLECTRISATION


ÉLECTRISATION, s. f. ÉLECTRISER, v. a. [Élèktriza-cion, zé: 1re é fer., 2e è moy.] Électrisation, est l' action d' électriser, de communiquer la vertu électrique, l' électricité. Acad. Trév.; ou, pour mieux dire, de la déveloper, "L' eau reçoit par l' électrisation, une véritable augmentation de fluidité. P. Paulian, Let. sur l' Électricité. "On a tenté d' électriser des paralitiques, et on a quelquefois réussi à les guérir.
   Rem. Électriser et électricité, sont des mots à la mode. On électrise non-seulement les corps, mais encôre les âmes. "Ce n' est point dans la solitude, c' est dans le concours général que les ames s' échauffent et s' électrisent. Le Mierre. _ Je crois qu' on peut, sans prévention, trouver cette métaphôre forcée. _ M. R. D. L., dans le Discours Préliminaire aux Promenades de Chloé, dit que son plan est de donner à l' ame des adolescens un coup d' électricité morale Quelle métaphôre!

ÉLECTUAIRE


ÉLECTUAIRE, s. m. [Élèktu-ère: 1re é fer., 2e è moy., 4e è moy. aussi et long, 5e e muet.] Composition de Médecine, qui a la consistance de conserve. Espèce d' opiat.

ÉLÉGAMMENT


ÉLÉGAMMENT, adv. ÉLÉGANCE, s. f. ÉLÉGANT, ANTE, adj. [Élégaman, gance, gan, gante: 1re et 2e é fer., 3e lon., excepté au 1er.] Élégance, est proprement la politesse et le choix du langage. Élégant, choisi, poli. Élégamment, avec élégance. "Élégance sans affectation. Parler, écrire avec élégance, sans élégance. "Discours élégant, façon de parler élégante. "Parler, écrire élégamment.
   Rem. 1°. Quand on parle du style, élégance difère d' éloquence, en ce que la 1re s' aplique plus à la beauté des mots et à l' arrangement de la phrâse, et que la 2de s' atache plus à la force des termes et à l' ordre des idées. L' élégance, contente de plaire, ne cherche que les grâces de l' élocution. L' éloquence, voulant persuader, met du véhément et du sublime dans le discours. L' une fait les beaux parleurs, l' autre les grands Orateurs. GIR. Synon.
   2°. ÉLÉGANCE, est aussi un goût fin et délicat, qui se fait sentir dans les Arts, dans la parure, dans le bon air et les belles manières. Trév. Rich. Port. "Élégance de pinceau; élégance de la parure. _ L' Acad. ne le met point dans le dernier sens.
   3°. ÉLÉGANT, suit ou précède. "Discours élégant.
   Des fleurs qu' elle a cueilli, élégant assemblage.
"Élégante parure, ou parûre élégante.
   4°. Dans le style précieux et néologique, on fait élégant substantif. "C' est un élégant, une élégante. "Les élégans de la Cour. Diderot. "Peut être à Paris seroit-il ce qu' on appelle un élégant: sur les bords du Nil, c' est un observateur, un philosophe. Anon. "Une élégante du jour, qui n' aime que les amusemens et la dissipation. = On le fait aussi adjectif en ce sens, en l' apliquant aux persones. "Un Seigneur élégant pousse devant lui un coureur et un chien. Coyer. Tout cela n' est bon que dans le style critique et mordant.

ÉLÉGIAQUE


ÉLÉGIAQUE, adj. ÉLÉGIE, s. f. [Elé--gia-ke, gi-e: 1re et 2e é fer., 3e lon. au 2d.] L' Élégie est une espèce de poésie qui s' emploie dans les sujets tristes et plaintifs. Élégiaque, qui apartient à l' Élégie. "Les Élégies d' Ovide, de Tibulle, de Properce. "Vers élégiaques. Poètes élégiaques.
   Rem. En parlant des vers, élégiaque se dit sur-tout des vers latins, qui sont alternativement hexamètres et pentamètres, et qui s' emploient dans d' aûtres poésies que des Élégies.

ELÉMENT


ELÉMENT, s. m. ÉlÉMENTAIRE, adj. [Éléman, mantère: 1re et 2e é fer., 3e lon., 4e è moy. et long.] 1°. Corps simple, qui entre dans la composition des corps naturels, qu' on apèle mixtes. "Les quatre élémens vulgaires sont, le feu, l' eau, l' air, et la terre. "Il ne restoit plus aux Forbins qu' à paroître dans la Marine, pour cueillir, sur le plus terrible des élémens, les mêmes lauriers qu' ils avoient si souvent moissonnés au champ de Mars. Mourraille. Acad. de Mars.
   J' aurois pu vaincre seul, en ces premiers momens,
   Les efforts conjurés des divers élémens.
       Le Chev. de Langeac.
= 2°. Au figuré, lieu où l' on se plait. "La chasse est son élément. "Quand il est à Paris, il est dans son élément; quand il n' y est pas, il est hors de son élément. = 3°. Au pluriel, principes d' un art, ou d' une science. "Les élémens de la Gramaire, de la Géométrie. "Être encore aux élémens, aux premiers élémens. "Les Anglois étoient encore aux élémens du Commerce.
   ÉLÉMENTAIRE~, qui apartient à l' élément. "Corps élémentaire: Le feu élémentaire (n°. 1°.) Géométrie élémentaire (n°. 3°.) Les élémens de Géométrie. "Il est difficile de bien faire un livre élémentaire. L' Ab. de Fontenai. = M. de Wailly l' a employé substantivement. "Je ne m' en suis pas tenu, dit-il, au pur élémentaire de la Grammaire.

ÉLÉPHANT


ÉLÉPHANT, s. m. [Éléfan: 1re et 2e é fer., 3e lon.] La plus grande des bêtes à quatre pieds, qui a une trompe, et dont les dents principales, quand elles sont détachées de la gueule de l' animal, sont apelées ivoire.

ÉLÉVATION


ÉLÉVATION, s. f. ÉLèVE, s. m. et f. ÉLEVER, v. a. [Éléva-cion, en vers, ci-on; élève, élevé: 1re é fer., 2e é fer. au 1er, è moy. et dout. au 2d, e muet au 3e. _ Devant la syllabe féminine cet e muet se change en è moy.: il élève, élèvera, etc.] Élévation, exhaussement. Il se dit au propre et au figuré. "Élévation d' un bâtiment: "Monter sur une élévation, sur un terrain~ élevé, sur une éminence. "Élévation du pôle, d' un astre. "Elévation de fortune. "Élévation d' esprit, de coeur, d' âme. "Élévation dans le style. "Élévation de voix. "L' élévation du pouls. _ L' élévation de l' Hostie, ou simplement l' Élévation, le temps où le Prêtre élève l' Hostie à la Messe.
   Rem. Élévation, se dit des persones, en parlant de l' agrandissement de leur fortune et de leur promotion à des postes élevés et honorables. On dit, l' élévation d' un homme: il lui doit son élévation. Mais je crois que c' est par une faûsse analogie que Bossuet a dit, l' élévation d' une secte. "* Cette secte (des Vaudois), en peu de temps fit des progrès. Bernard, Abbé de Fontcaud, qui en a vu les commencemens, en marque l' élévation sous le Pape Lucius III. _ On dirait plus régulièrement, les plus grands acroissemens, que l' élévation d' une secte.
   ÉLèVE, disciple. Il se dit proprement du disciple d' un Peintre "Élève de Raphaël, de Le Brun, de Mignard, etc. Mais par extension, il se dit de tout homme formé par un aûtre, en quelque art et en quelque science que ce soit: "C' est l' élève d' un tel: "Je me fais gloire d' avoir été votre élève. Bouh. L. T. Acad. = Il semble que quand on parle des femmes on doit mettre ce mot au fém. "On voit chez elle (Mlle. de Beaulieu) d' autres tableaux, qui font aisément reconnoître un digne Élève de M. Greuze. Journ. de Paris. _ Je voudrais dire, une digne Élève.
   Élève, Écolier, Disciple (synon.) L' Écolier, est celui qui reçoit des leçons réglées, pour aprendre ce qu' il ne sait pas; l' Élève, celui qui reçoit des instructions plus détaillées, pour pouvoir exercer ensuite la même profession. Le terme de Disciple ne suppose qu' une adhésion aux sentimens du Maitre, sans rien indiquer de la manière dont on en a pris connoissance. _ On forme des Élèves; on enseigne des Écoliers; on fait des Disciples. BEAUZÉE. _ On dit, les Écoliers de l' Université; les Élèves de Rubens; les Disciples de Platon, de St. Augustin, etc.
   ÉLEVER, 1°. Hausser, porter plus haut. "Élever un tableau, un dais, qui étoient trop bas. "Élever un mur de trois pieds. "S' élever en l' air, en haut, etc. "Le soleil élève les vapeurs. "Élever la voix, parler plus haut. _ Figurément, élever son style; élever son coeur, son esprit, son âme à Dieu. "Élever quelqu' un aux charges, aux dignités. "Élever quelqu' un jusqu' aux nues, jusqu' au ciel, lui doner des louanges excessives. "Cela lui a élevé le coeur, l' ame, les sentimens, le courage, l' esprit, etc. = 2°. Construire, bâtir, ériger. "Élever un bâtiment, un parapet, une statue, une pyramide. = 3°. Nourrir. "Cet enfant est foible, il sera mal-aisé à élever. "Élever des animaux, des plantes. _ Instruire, doner de l' éducation. "Élever la jeunesse dans la crainte de Dieu. "Il a été élevé dans la bonne Religion, dans l' héresie, etc.; dans un tel Collège, par un tel, etc. = 4°. S' élever, réciproque neutre: "Il s' est élevé une tempête, un orage. "Il s' éleva un bruit dans l' assemblée. "Une dispute, une sédition s' est élevée, etc. _ Réciproque actif: "Les vapeurs s' élèvent de la terre; les fumées s' élèvent au cerveau. = 5°. S' élever, au figuré, s' ennorgueillir. "Vous avez beau le louer, il ne s' en élevera pas davantage.
   Rem. 1°. * Quelques Auteurs ont fait régir à élever la prép. en: ils n' ont pas été aprouvés. Corneille avait dit dans le Cid:
   Enfin, vous l' emportez, et la faveur du Roi
   Vous élève en un rang qui n' étoit dû qu' à moi.
L' Acad. condamna cette expression. On doit dire, élever à un rang, à un état, à une dignité. On dit, à la vérité, élever en honeur, en dignité: mais alors le substantif régi est pris dans un sens indéfini: mais on dit~, élever à une haute dignité, à un grand honeur. _ Le P. Bouhours a repris aussi, avec raison, les phrâses suivantes de Port-Royal: "En s' élevant d' orgueil, il perdit tous ses États, et devint semblable aux animaux. Il falait, en s' enflant d' orgueil. "Ne vous élevez point de vos bonnes oeuvres: Il ne s' éleva point d' une grande puissance. Dites, ne vous glorifiez point; il ne se glorifia point. S' élever a ce sens, mais il n' a pas ce régime.
   2°. ÉLEVER, est employé neutralement par Neuville; mais le régime est sous-entendu. "La vertu des Saints est une preuve incontestable d' une grace surnatûrelle, qui élève au-dessus des foiblesses de la nature. On sous--entend l' homme; qui élève l' homme au-dessus, etc.
   3°. Elever les yeux au Ciel, est une expression que Vaugelas condamne de barbarisme: il prétend qu' on doit dire lever.
   4°. S' élever aux Cieux, peut être bon en vers. On ne doit pas condamner M. Thomas, pour avoir dit:
   L' agile Renommée, en parcourant le monde...
   Leur apprend que l' Anglois, d' un pas audacieux,
   A franchi ces rochers, qui s' élèvent aux cieux.
Mais en prôse, on doit dire, jusqu' aux cieux.
   5°. ÉLEVER, se dit au propre et au figuré: Élever une murâille, élever en dignité. Exhausser, ne se dit qu' au propre: exhausser un bâtiment.
   6°. ÉLEVER, avec le seul régime absolu (l' acusatif), se dit de l' éducation, et non pas de l' élévation. "Nous venons de parler de la mort de Concini, et nous touchons ici le commencement des malheurs de l' infortunée Princesse, qui l' avoit élevé. D' Avr. _ Sans le mot de Princesse, qui empêche qu' on ne s' y méprène, on croirait que cette infortunée avait été sa gouvernante. Il falait ajouter, à élever, quelque chôse qui marquât mieux le sens; par exemple, qui l' avait élevé si haut.
   7°. S' ÉLEVER, est quelquefois suivi de la prép. contre. "Il s' éleva avec force contre ces dangereuses opinions.

ÉLÉVEMENT


*ÉLÉVEMENT, s. m. C' est la même chôse qu' élévation; mais il a été réprouvé par l' usage. _ Suivant Richelet, il est condamné par les uns, et aprouvé par d' aûtres. "Elévement de coeur. "L' honneur du monde et la gloire de vaincre ont un attrait et un élévement qui éblouit. Arn. Conf. _ Ce sont de vieilles phrâses dont on ne se sert plus.

ÉLEVûRE


ÉLEVûRE, s. f. [1re é fer., 2e et dre e muet, 3e lon.] Bouton qui vient sur la peau. "Il a le visage tout plein d' élevûres.

ÉLIDER


ÉLIDER, v. a. ÉLISION, s. f. [Elidé, éli-zion, en vers, zi-on.] Elision, est la supression d' une voyelle dans un mot, à la rencontre d' une aûtre voyelle. Elider, c' est faire une élision. En français, l' élision se marque par une apostrophe; l' âme, l' homme, qu' il, qu' elle, s' il, etc. _ Il se fait, dans la prononciation, beaucoup d' élisions qui ne se marquent pas dans l' écritûre. Ainsi l' on dit, il marche après moi, comme s' il était écrit, marchaprè moa. On élide l' e muet final de marche. _ En français, il n' y a que l' e muet qui s' élide de la sorte.

ÉLIGIBILITÉ


ÉLIGIBILITÉ, s. fém. ÉLIGIBLE, adj. [1re é fer., dre é fer. au 1er, e muet au 2d.] Eligible, se dit de celui qui peut être élu; éligibilité, capacité d' être élu. "Il est éligible: on conteste son éligibilité. "Il a obtenu un bref d' éligibilité.

ÉLIMER


ÉLIMER (S' ), v. réc. S' user à force d' être porté. "Cette étofe s' est élimée en moins de rien. Cet habit est tout élimé.

ÉLIRE


ÉLIRE, v. a. [1re é fer., 2e. lon., 3e e muet. _ Devant la syll. masc. l' i devient bref: nous élisons, vous élisez, etc. élisant.] Choisir, prendre par préférence. Élire un Pape, un Empereur, un Roi, un Magistrat, etc.
   Rem. Choisir, se dit d' un seul, et élire, de plusieurs. Dict. Gramm. Il faut ajouter, qu' il supôse, et assemblée, et délibération: car, si plusieurs conviènent entr' eux de faire choix d' un lieu, et de le préferer à un aûtre, pour une partie de plaisir on ne dira point qu' ils l' ont élu, mais choisi. * Racine dit, dans son Ode de la Renomée aux Mûses:
   Venez donc, puisqu' enfin vous ne sauriez élire
   Un plus charmant séjour.
   Quoique les Mûses soient plusieurs, le terme élire n' est pas propre, parce qu' il ne s' agit pas dans cet endroit de faire une élection, mais simplement de faire choix d' un lieu, pour y fixer son séjour. _ * Molière a donc aussi parlé improprement, quand il a dit: "Quel conseil vous me faites élire! au lieu de choisir. _ Corneille lui done les mêmes régimes qu' à ce dernier verbe.
   Le Roi doit, à son Fils, élire un Gouverneur.
Et le régime, et l' emploi du mot, sont également vicieux. Le Roi choisit, il n' élit pas. _ On dit, à la vérité, élire sa sépultûre, élire domicile; mais ce sont des phrâses consacrées, qui ne tirent pas à conséquence pour d' aûtres. Voyez ÉLECTION.
   ÉLIRE, régit les noms, ou sans article et sans préposition, ou avec la prép. pour. "On l' a élu premier Consul. "Romulus, Fondateur de Rome, en fut élu pour le premier Roi.
   ÉLISION, voy. ÉLIDER.

ÉLISÉE


ÉLISÉE, s. m. [Elizé-e: 1re et 3e é fer., dre e muet.] Séjour où, suivant la Fable, il n' y a d' admis que les Hérôs et les hommes vertueux. _ On a dit, les Champs élisées, ou élysées, ou élysiens. MÉNAGE préférait élisée, sans condamner les aûtres. L' Acad. les dit également. L. T. _ Gresset se sert d' élisée, sans article.
   Sous ces lauriers, vainqueurs du sort,
   Que les Citoyens d' Èlisée
   Sauvent du souffle de la mort.
Je ne crois pas que, même en vers, on puisse dire élisée pour l' élisée, et que cette licence poétique soit admise par l' usage.

ÉLITE


ÉLITE, s. f. [1re é fer., dre e muet.] Ce mot a un sens passif; il n' exprime pas l' action de choisir, mais ce qui a été choisi. "L' élite de l' armée, ce qu' il y avoit de meilleur. Voy. CHOIX.

ELIXIR


ELIXIR, s. m. [Élikcir, et non pas élik--cier, comme quelques-uns prononcent, dans certaines Provinces.] Au propre, liqueur spiritueûse, extraite des parties d' une, ou de plusieurs substances. _ Suivant l' Acad. c' est la même chôse que ce qu' on nome teintûre, quintessence, extrait. "Tirer l' élixir de, etc. = Au figuré, ce qu' il y a de meilleur dans un discours, dans un ouvrage. Acad. Ce qu' il y a de plus ingénieux, de plus excellent dans les Arts, ou les ouvrages d' esprit. Trév.

ELLE


ELLE. Dans les mots ainsi terminés, la pénult. est brève. Immortelle, rebelle, éternelle, etc. Cela n' empêche pas que dans le chant et la déclamation soutenûe, on n' alonge quelquefois cette syllabe, sur tout quand elle termine la phrâse. _ Un jour on suprimera une des l, et l' on écrira immortèle, rebèle, éternèle, etc.

ELLE


ELLE, pron. pers. fém. de la 3e persone. [Èle: 1re è moy., 2e e muet.] Elle, d' elle; à elle, ou lui; la, ou elle; d' elle. Pluriel, elles; d' elles, à elles, ou leur; les, ou elles; d' elles. Voy. IL et LUI.
   Rem. 1°. Les anciens Poètes, quand une syllabe de plus les embarrassait, disaient el' avec l' apostrophe. Ménage dit, sur ces vers de Malherbe:
   Que ce qu' elle est à cette heure,
   Elle soit jusqu' à la mort.
Il faut, elle le soit. Nos Anciens auraient dit, el' le soit.
   2°. ELLE, au nominatif, ne convient pas moins à la chôse qu' à la persone; et l' on dit également bien, d' une femme et d' une maison, elle est agréable; mais aux câs obliques, elle, ne convient pas à la chôse come à la persone; et l' on ne dirait pas, par exemple, d' un homme à qui la philosophie plait extrêmement, il s' atache fort à elle, il est charmé d' elle. Il faut dire, pour bien parler, il s' y atache fort, il en est charmé. Gresset a manqué à cette règle. Valère dit à Ariste, en parlant de Cléon:
   Il faut l' entendre; après une Pièce nouvelle,
   Il règne, on l' environne; il prononce sur elle.
       Le Méchant.
On doit excuser, ou plaindre les Poètes, mais les Prosateurs sont inexcusables. "Les frontières de la Flandre Espagnole étoient presque sans fortifications et sans garnisons. Louis n' eut qu' à se présenter devant elle. Volt. _ L' usage seul peut bien aprendre quand on peut se servir du pronom elle, dans les câs obliques, en parlant des chôses inanimées. = Avec les noms féminins, on peut mettre elle au lieu de lui. "La terre renferme dans elle (ou dans soi) toutes les semences.
   3°. Le datif d' elle c' est lui, pour les verbes actifs, et à elle, pour les verbes neutres et réciproques. "On dit, donnez- les lui, et non pas, donnez-les à elle. "Il faut s' adresser à elle, revenir à elle. _ Le verbe parler, prend, tantôt lui, tantôt à elle. "Il vouloit lui parler. "Il croyoit même parler à elle, ne sachant plus où il étoit. Télém. _ Quand on y ajoute même, on peut dire à elle avec les verbes actifs, en faisant précéder lui. "Donnez-les lui, à elle-même.
   4°. À~ l' acusatif, on ne doit employer elle, qui marche toujours après les verbes, qu' aprés avoir fait précéder le pronom la, ou les, suivant le nombre singulier, ou pluriel. C' est aujourd' hui une règle indispensable: on s' en dispensait aûtrefois. "Le dragon vouloit dévorer elle et son fruit. Bossuet. Dites, la dévorer elle, etc. _ M. Linguet a dit plus récemment: "Il est affreux d' accuser l' Eglise d' un genre d' excès qu' elle a toujours désavoué... C' est calomnier elle, et l' époque à laquelle on lui fait cette injure. Dites, la calomnier, elle, et l' époque, etc. Peut-être la a été omis par l' Imprimeur. = C' est un pléonasme reçu, et qui est même élégant, que de se servir d' elle, ou, de la, quoiqu' il y ait déjà un nom au nominatif, ou à l' acusatif, qui sert de sujet, ou de régime.
   - - - Qu' elle a d' autorité, l' Histoire, qu' en silence
   Sont contraints d' écouter, des témoins qu' elle offense.
       L. Rac.
"Cette histoire, si édifiante, vous la connaissez depuis long temps. Voy. des exemples semblables au mot IL.
   Rem. Il est contre la clarté du discours, qui est sa première et sa plus importante qualité, de mettre, dans la même phrâse, deux elle, qui ne se raportent pas au même nom. "Grande Reine, il vous faut combatre contre la mort; mais contre une mort lente, qui vous attaquera avec toute sa rage. Elle l' ataque, Messieurs, mais elle en triomphe avec une constance qui doit ravir tous les esprits. Mascar. Or. Fun. d' Anne d' Autriche. Le premier elle se raporte à la mort, le second à la Reine: c' est une irrégularité. _ M. de St. Ange dit de Minerve, qui va trouver l' Envie.
   Elle frémit, s' arrête, et la pique à la main,
   Elle frape à la porte: elle s' ouvre, et soudain, etc.
   Les deux premiers elle se raportent à Minerve, le 3e à la porte: cela fait une construction louche.

ELLÉBôRE


ELLÉBôRE, s. m. [Prononcez les 2 ll: 2e é fer. 3e. lon. 4e e muet.] Herbe qu' on croit propre à guérir la folie. C' est sur cette erreur populaire, très-anciène, qu' est fondée la phrâse proverbiale. "Il a besoin d' ellébôre: il n' est pas dans son bon sens.

ELLIPSE


ELLIPSE, s. f. ELLIPTIQUE, adj. [Prononcez les deux ll.] En Gramaire, retranchement d' un ou de plusieurs mots qui seraient nécessaires pour la régularité de la construction, mais que l' usage permet de suprimer. Acad. Expression abrégée, par laquelle on retranche quelque chôse du discours, qui est sous entendu, et qu' on doit supléer. Trév. _ Ex. "Je le savais à Paris: c. à. d. je savais qu' il était à Paris. "Il a vu votre lettre, et Guitaut et M. de L. R. F. Sév. Supléez, l' ont vûe aussi. "Après le collège, Fonten. pour, après qu' il fut sorti du collège, etc. _ Tout le monde conait ce fameux vers de Racine dans Andromaque.
   Je t' aimois insconstant, qu' aurois-je fait fidèle.
   Il faut sous-entendre, si tu avais été fidèle.
   Et je charge un Amant du soin de mon injure.
       Ibid.
Pour, du soin de venger mon injûre.
  Toute science, enfin, toute industrie,
  Qui ne tend point au bien de la Patrie,
  Ne sauroit rendre un mortel orgueilleux,
  Que ridicule, au lieu de merveilleux.
      Rousseau.
Pour, au lieu de le rendre merveilleux. = Les ellipses sont plus admises en vers qu' en prose. En vers même, il ne faut pas les prodiguer; et l' on doit prendre garde sur--tout qu' elles ne nuisent à la clarté.
   ELLIPSE, en Géométrie, est une courbe, qu' on forme en coupant obliquement un cône droit, par un plan qui le traverse entiérement.
   ELLIPTIQUE, qui tient de l' ellipse. "Façon de parler elliptique. _ Figûre elliptique.

ELME


ELME. On apèle feu St. Elme, des feux qui s' atachent aux mâts d' un vaisseau, et qui paraissent ordinairement après une tempête. Les Anciens les nomaient Castor et Pollux. = Un Missionaire dit que St. Elme étoit de l' Ordre de St. Dominique. Je ne sais où il l' a pris. Le Patron des Marins est St. Erasme. (honoré le 2 de Juin) qu' on a apelé par corruption, St. Elme.

ÉLOCUTION


ÉLOCUTION, s. f. [Éloku-cion; en vers ci-on.] Langage, manière dont on s' exprime. "Élocution nette, élégante, ou faible, triviale. = La 3e. partie de la Rhétorique, qui a pour objet le choix et l' arangement des mots.

ÉLOGE


ÉLOGE, s. m. [1re é fer. dern. e muet.] Discours à la louange de quelqu' un. Panégyrique. "Eloge historique. Eloge funèbre. _ Il se prend quelquefois pour de simples louanges. "En voulant le blâmer, vous faites son éloge. "On a fait de grands éloges de lui. Doner, mériter des éloges, etc.
   Rem. Éloge a un sens passif. L' Éloge de... ou son Eloge, se dit de celui qui est loué, et non pas de celui qui loûe. "Cet Éloge de M. de Condorcet a été goûté et aplaudi du Public. Mercûre. _ C' est l' Éloge de M. Lieutaud, par M. de Condorcet.

ÉLOGIER


*ÉLOGIER, ÉLOGISTE, s. m. Faiseur d' éloges. Le 1er a été fabriqué par M. Linguet: le 2d. est depuis long-temps dans Trév. "Il n' y a point d' homme honête qui ne soit indigné de voir l' élogier (M. d' A...) atacher aussi lestement l' épithète de coupable à un nom (celui de Jacques II.) que la postérité ne prononcera jamais sans atendrissement et sans respect. Élogier est imprimé en italique. _ M. l' Ab. de Fontenai s' est servi d' Elogiste. "L' un et l' aûtre de ces Elogistes ne manquent pas, comme c' est l' ordinaire, de présenter leur Hérôs sous le jour le plus favorable. _ Ces deux mots ne sont bons que pour le style plaisant, moqueur et critique.

ÉLOIGNEMENT


ÉLOIGNEMENT, s. masc. ÉLOIGNER, v. act. [É-loag-neman, né: 1re é fer. mouillez le g, 3e e muet au 1er, é fermé au 2d.] On écrivait aûtrefois élognement, élogner; mais cette ortographe ne représentait pas la prononciation. = Éloignement est, 1°. l' action par laquelle on éloigne une persone, ou l' on s' éloigne soi-même; ou c' est l' éfet de cette action. "L' éloignement d' un Ministre. "L' éloignement des ocasions du péché. "Durant son éloignement. = 2°. Antipathie, aversion. Avoir de l' éloignement pour une persone, pour le mariage, etc. = 3°. Négligence, oubli. "Il vit dans un grand éloignement de Dieu, des chôses de Dieu. "L' éloignement de Dieu est une chôse terrible. = 4°. Absence. "Triste et fâcheux éloignement. "Depuis son éloignement de la capitale. "Son éloignement n' a pas duré. = 5°. Distance, soit de lieu, soit de temps. "L' éloignement de deux maisons, de deux campagnes. "Être dans un grand éloignement d' une Ville. _ L' éloignement des temps. "Il ne voit cette afaire que dans un grand éloignement~. = 6°. En éloignement. "De ce lieu, on voit Paris en éloignement. _ Dans l' éloignement. Ce tableau présente dans l' éloignement des troupeaux et des bergers.
   ÉLOIGNER, écarter une persone, une chôse d' une aûtre. Il régit de. "On l' a éloigné du Palais. "Il est éloigné, ou il s' est éloigné de la Cour. "S' éloigner du rivage, de son but, etc. de son devoir, du respect qu' on doit, etc.
   Eloigner, Ecarter, mettre à l' écart (synon.) Le 1er est plus fort que le 2d. "Un Prince doit éloigner de soi les traitres, et en écarter les flateurs. _ Le 2d est plus fort que le 3e. "On écarte ce dont on veut se débarrasser pour toujours: On met à l' écart ce qu' on veut ou qu' on peut reprendre ensuite. "Un Juge doit écarter toute prévention, et mettre à l' écart tout sentiment personel. (Encycl.) Beauzée.
   2°. Être éloigné de, au figuré, être dans une disposition contraire à; avoir de la répugnance pour, etc. "Je suis bien éloigné de vouloir vous surprendre. "Il n' est pas beaucoup éloigné, ou, il ne s' éloigne pas beaucoup d' accepter cette préposition. = 3°. Retarder. "Éloigner un acomodement, la conclusion d' un traité, etc = 4°. Aliéner. "Éloigner les coeurs, les esprits, les affections.
   ÉLOIGNÉ, ÉE, adj. "Pays éloigné, tems éloigné. _ En style proverbial: ils sont éloignés de compte, ils sont bien éloignés de s' acorder dans leurs calculs. _ Il est éloigné de son compte; (on dit plus ordinairement, loin de, etc.) "Il se trompe dans ses calculs, dans ses espérances, dans ses prétentions. _ "Cela est fort éloigné de la vérité, est très-faux.
   Rem. I. Des Poètes ont dit, éloigner un lieu, pour s' éloigner d' un lieu.
   Cependant l' insensible éloignoit ces beaux lieux.
       Anon.
  Ses vaisseaux en bon ordre, ont éloigné la ville.
      Corn.
  Du camp des Rutelois, éloignant les quartiers.
      Segrais.
Ménage veut justifier cette manière de parler. Elle est hors d' usage, et on ne la soufrirait pas aujourd' hui.
   II. On dit, nous sommes éloignés des cieux, nous en sommes fort éloignés. Mais doit-on dire: "Étant aussi éloignés des cieux que nous en sommes, ou que nous le sommes? Mallebranche a préféré la première manière; mais la seconde est la seule bone, la seule conforme à l' analogie de la langue. On pourrait en raporter mille preûves: une seule sufit. On dit, j' en suis fort aise: mais on doit dire, étant aussi aise de cela que je le suis, et non pas, que j' en suis.

ÉLOQUEMMENT


ÉLOQUEMMENT, adv. ÉLOQUENCE, s. f. ÉLOQUENT, ENTE, adj. [Élokaman, kance, kan, kante; 1re é fer. 3e lon. aux 3 dern.] l' éloquence est l' art de bien dire, de toucher et de persuader. Éloquent se dit de celui qui possède cet art. Eloquemment, avec éloquence. "Èloquence, mâle, rapide: sublime éloquence. "L' éloquence de la Chaire, du Bârreau. Cet homme a beaucoup d' éloquence. = Eloquent se dit des persones et des chôses. "Homme éloquent; qui parle, qui écrit éloquemment. "Discours éloquent, termes éloquens. _ "Les larmes sont éloquentes, elles persuadent mieux, elles touchent plus que les discours. "La colère est éloquente: elle rend éloquent. "Il y a un silence plus éloquent que les paroles. _ Voyez ÉLÉGANCE.
   Rem. 1°. Du temps de Malherbe on écrivait éloquance, éloquant. Il serait à souhaiter qu' on fît revivre cette manière d' écrire, et pour ce mot et pour tous ceux, qui se terminent en ence et en ent: ce serait un des moyens de simplifier l' ortographe. 2°. L' adjectif n' aime pas à précéder, sur tout au masc. "Un des plus éloquens hommes, comme disent Charlevoix et Marsolier, fait une construction dure. Dites, un des hommes les plus éloquens. Voy. DISERT. = Neuville lui fait régir la prép. à et l' infinitif. "Le Sanctuaire, changé en Académie, ofre, à la place d' un Paul, qui préchoit la folie de la Croix de J. C., un Philosophe éloquent à débiter les leçons de la sagesse fastueuse du Portique. _ Ce régime ne fait point mal en cet endroit.
   3°. Le P. Rapin l' emploie substantivement. "Quand on a du discernement, on trouve qu' il y a peu de véritables éloquens, et de parfaits Orateurs. _ Cet illustre Ecrivain traite éloquent comme Orateur: mais on dit, un Orateur: on ne dit pas un éloquent. Il falait, peu d' hommes véritablement éloquens.
   *ÉLOQUENMENT; Richelet. Voyez ÉLOQUEMMENT. L' ortographe de Richelet, qu' il étend à tous les adverbes, supose dans lui, et produirait dans ceux qui voudraient le suivre, une mauvaise prononciation: élo--kanman. On prononce élokaman.

ÉLU


ÉLU, s. m. 1°. Prédestiné à la vie éternelle. "Il y a beaucoup d' apelés, mais il y a peu d' élus. "Il est du nombre des élus. = Oficier d' une Election. Voyez ÉLECTION, n°. 2°. = On apèle Elûe la femme d' un Élu.
   Madame la Baillive et Madame l' Élue.

ÉLUCUBRATION


ÉLUCUBRATION, s. f. [Élukubra--cion.] Ouvrage composé à la lumière de la lampe, c. à. d. à force de veilles et de travail. On ne le dit qu' en se moquant, et pour critiquer. "Toujours malheureux dans ses élucubrations litéraires, cet Ecrivain a doné une Traduction de Suétone, qui n' a fait que le jeter dans un autre genre de déconvenûe. Sabat. Trois Siècles, etc.

ÉLUDER


ÉLUDER, v. act. Éviter avec adresse. "Eluder une dificulté proposée. "Éluder les poursuites, les artifices de quelqu' un. "M. Moreau l' emploie neutralement. "Ils voulurent éluder. Il sous-entend, les questions qu' on leur faisait.
   REM. * Eluder ne se dit que des chôses. Molière l' aplique aux persones; lui done le sens de tromper, et lui fait régir la prép. de.
   J' éludois un chacun d' un deuil si vraisemblable.
C' est dans l' Etourdi, sa première Pièce, composée en Languedoc, que Molière parle de la sorte. C' est un vrai barbarisme de phrâse.

ÉLUSION


*ÉLUSION, s. f. Tromperie. Trév. C' est un mot barbâre. On l' a retranché dans l' Abregé.

ÉLYSÉE


ÉLYSÉE. Voyez ÉLISÉE.

ÉMAIL


ÉMAIL, s. m. ÉMAILLER, v. act. [Mouillez l' l finale du 1er et les ll du 2d: E-mail, et non pas É-mel; Ema-glié, et non pas Émé-glié: ai n' y a pas le son de l' e, mais il conserve son propre son.] Email est, au propre, une espèce de verre coloré. "Email noir, verd, rouge, blanc. _ Porcelaine ou Faïance d' un bel émail; dont les couleurs sont vives et brillantes. _ Figurément et Poétiquement, grande diversité de fleurs et de couleurs. "L' émail des prairies, d' un parterre, etc. _ L' émail des dents, la superficie luisante qui couvre la partie osseûse de la dent.
   ÉMAILLER se dit aussi, au propre et au figuré. "Émailler une bague, la boîte d' une montre. "Le printemps émaille la terre. "La natûre a émaillé ces prairies de mille fleurs. "Mille fleurs naissantes émailloient les tapis verds dont la grotte étoit environnée. Télém.
   La terre s' émailloit de fleurs.
       Mde. de la Suze.
  Ces argumens, émaillés d' antithèses,
  Ces riens pompeux, avec art enchâssés,
  Dans d' autres riens fièrement énoncés
      Rousseau.

ÉMAILLEUR


ÉMAILLEUR, s. m. ÉMAILLûRE, s. f. [Ema--glieur, gliû-re 1re é fer. 2e br. 3e dout. au 1er, lon. au 2d.] mouill. les ll. Emailleur se dit de l' ouvrier qui travaille en émail; émaillûre, de l' art d' émailler: il excelle dans l' émaillûre: ou de l' ouvrage de l' émailleur. "Cette émaillûre s' est écâillée.

ÉMANATION


ÉMANATION, s. f. ÉMANER, v. n. [Emana-cion, en vers ci-on: Emané.] Emaner, c' est tirer son origine de... "Le verbe émane du Père éternel, le St. Esprit, du Père et du Fils. "Édit, qui émane de la Puissance Royale. Cet ordre émane de l' autorité légitime.
   ÉMANATION, a un sens tantôt actif, tantôt passif: il se dit, et de l' action d' émaner. "L' émanation du verbe, l' émanation de la lumière; et de la chôse qui émane. "Les émanations des corps odorans. "L' autorité des Parlemens n' est qu' une émanation de l' autorité Royale. "Les émanations de tous les corps se mêlent dans l' air. "Les Anglais prènent la précaution de renfermer la matière qu' ils veulent fondre, dans des creusets, où les émanations de la houille ne puissent pénétrer. Bernard, Acad. de Mars.

EMANCIPATION


EMANCIPATION, s. f. ÉMANCIPER, v. act. [Emancipa-cion, cipé.] Émanciper, au propre, c' est mettre un fils ou une fille hors de la puissance paternelle, et mettre un mineur en état de jouir de ses revenus. "Son père l' a émancipé. "Dans le pays de Coutumes, il faut des Lettres du Prince, pour émanciper un mineur. = Au fig. S' émanciper, c' est se doner trop de licence. Il régit à devant les noms et les verbes. "Il s' est émancipé à des entreprises, qui sont de vrais atentats. "Elle s' émancipe à dire et à faire des chôses qui font tort à sa réputation. _ * La Grange met de à la place de à.
   En vain l' Espagne s' émancipe
   De porter trop loin son pouvoir.
   ÉMANCIPATION ne se dit qu' au propre, de l' acte juridique, par lequel on est émancipé.