Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI DOMINO


DOMINO, s. m. 1°. Camail noir que les éclésiastiques portent pendant l' hiver. Acad. Coifûre des chanoines pendant l' hiver. Trév. Le Rich. Port. ajoute, c' est le camail. Ces trois définitions pèchent par quelque endroit. L' Acad. atribûe le camail, le domino à tous les éclésiastiques, et laisse incertain s' ils le portent au choeur, ou dans la ville. Trév. et le Rich. Port. disent mal à propôs, que c' est une coifûre. On ne se douterait pas que cette coifûre est un camail. Et si le Rich. Port. l' ajoute, il n' ote pas tout a fait l' impropriété du mot coifûre. _ Le Dict. de Trév. ne l' atribue qu' aux chanoines; et dans la plupart des Églises, si ce n' est pas dans toutes, le domino diférencié est comun à tous ceux qui assistent au choeur.
   2°. DOMINO est une sorte d' habit de bal. "Un domino de tafetas bleu, couleur de rôse, etc.

DOMINOTERIE


DOMINOTERIE, s. f. DOMINOTIER, s. m. [4e e muet au 1er, é fer. au 2d.] On apèle dominoterie, le comerce de papier marbré et aûtres papiers colorés; et Dominotier le marchand qui les vend. Selon Trév. ce nom vient de ce que le peuple apelait aûtrefois ces papiers des Domino.

DOMMAGE


DOMMAGE, ou DOMAGE, s. m. DOMAGEABLE, adj. [domage, jable: dern. é fer. Dans le 2d l' e devant l' a n' est mis que pour doner au g un son doux qu' il n' a pas devant l' a, l' o et l' u: cet e est donc muet, et les étrangers doivent se garder de prononcer domage-able.] Domage, perte, détriment, préjudice. Acad. Perte, ruine. Dégât que font les bestiaux dans les prés, etc. Trév. Perte, tort. Sorte de malheur. Rich. Port. _ Perte est donc le mot comun aux trois définitions. Mais ce qu' ajoute l' Acad. vaut mieux que ce qu' ajoutent les deux aûtres Dictionaires. _ Causer du domage. Porter domage à... Faire, recevoir du domage. Réparer le domage. _ On dit, en exclamation: c' est domage! c' est grand domage! c' est une chose facheûse.
   REM. C' est domage est quelquefois suivi de la conjonct. que et du subjonctif. "C' est domage qu' il se conduise si mal, ayant tant de talens! _ * Voiture et Leibnitz emploient mal à propôs l' indicatif. "C' est domage que vous ne prenez (preniez) plaisir plus souvent à faire du bien. Voit. "C' est domage que M. le Chevalier Wren n' a pas (n' ait pas) continué de régaler le public. Leib. _ Plusieurs Êcrivains retranchent pas: "C' est domage que Rabelais n' ait vécu dans un siècle, qui l' eût obligé à plus d' honêteté et de politesse. Fonten. "C' est domage que M. Rolle n' ait fait ses Élémens où il auroit pu se developer davantage. Id. "C' est domage que vous n' ayiez eu le temps d' en dire davantage. Sév. "C' est domage que tout cela ne s' acorde avec tout ce que l' on quitte. La même. _ L' Acad. met cette négative sans pas, mais c' est dans des phrâses proverbiales, reste du vieux langage où pas était habituellement retranché. "C' est domage qu' il ne fasse cela, qu' il ne se joue à moi; ce qui se dit uniquement, pour dire, s' il faisait cela, s' il se jouait à moi, il s' en repentirait. = Quand la phrâse est afirmative, il n' y a point de dificulté: "C' est bien domage qu' on l' ait gâté de si bonne heure. Marm. _ On l' emploie aussi sans régime et à la fin de la phrâse. "Elle moralise un peu ton Angélique, et c' est domage. Id.
   DOMMAGEABLE, qui cause, qui aporte du dommage. Il régit la prép. à (le datif) domageable au Public. "Cette entreprise lui a été domageable.

DOMPTABLE


DOMPTABLE, adj. DOMPTER, v. act. DOMPTEUR, s. m. [On prononce le p dans la prononciation soutenûe. Il faut donc l' écrire. Plusieurs écrivent domter, etc. c' est ainsi qu' on le troûve dans le Dict. de Trév. et dans le Gramatical. On y a suivi, dans l' ortographe, la prononciation du discours familier.] _ Dompter, c' est subjuguer, vaincre, se rendre maître. Trév. Réduire sous son obéissance, surmonter. Acad. "Dompter une nation, les peuples, etc. Hercule dompta les monstres. = En parlant des animaux, les assujétir, leur faire perdre leur férocité. "Dompter un taureau, un cheval. = Figurément, dompter ses passions, sa colère, sa haine, etc.
   DOMPTABLE, qui peut être dompté, assujéti. Ce cheval est domptable; il n' est pas domptable. "Ce jeune homme n' est plus domptable. _ Il se dit sur tout avec la négative. Acad.
   DOMPTEUR, qui dompte. Il est tout au plus usité en vers et dans la prôse poétique, et il ne se dit qu' avec le régime. "Ce fier dompteur de tant de monstres. Th. des Grecs. "Le dompteur des Gaules. Voit.
   * Rollin dit dompteuse au fém. On lit même domptueûse: mais c' est sans doute une faûte d' impression. "Simonide apeloit Sparte la domptueûse d' hommes. H. Anc. En éfet on y domptait les hommes, comme nous domptons les chevaux. Mais en leur faisant perdre quelques mauvaises qualités, on leur en donait d' aûtres, qui étaient pires.

DON


DON, s. m. Présent, gratification, libéralité. Faire un don à... de... Il s' emploie quelquefois avec le 1er régime seulement, quelquefois avec tous les deux. "Il m' a fait un don fort agréable. "Il lui a fait un vilain don. "Il leur a fait un don à chacun d' une montre. _ Voy. PRÉSENT. Voy. DOM.
   REM. Don n' est pas l' action de doner, mais l' éfet de cette action. Ainsi le don de la communion pour l' action de doner la communion est une expression peu juste.
   2°. Don, avantage, grâce, faveur. "Les dons du ciel, de la natûre; les dons de la grâce, de Dieu, du St. Esprit.
   3°. DON, talent, aptitude à certaines chôses. "Le don de la parole, de l' éloquence; le don de plaire. "Je n' ai pas le don de deviner. _ Et abusivement, il a le don de déplaire, de se faire haïr de tout le monde.
   Le proverbe dit, qu' il n' y a pas de plus bel aquêt que le don. _ On dit en plaisantant, qu' une femme a le don des larmes, qu' elle pleure quand elle veut. On dit là, une femme, pour, les femmes. Voy. DON.

DONATION


DONATION, s. f. DONATAIRE, s. m. et f. DONATEUR, TRICE, s. m. et f. [Dona--cion, tère, teur, trice; 3e du 2d è moy. et long.] Donation, est un don fait par acte public. Donateur, celui qui fait ce don. Donataire, celui ou celle à qui on le fait. "Il lui a fait une donation de tous ses biens. Le donateur est encore plus satisfait que le donataire. "Le donataire a accepté la donation: elle est irrévocable; le donateur ne peut plus en revenir.

DONC


DONC, conjonction qui sert à exprimer la conclusion d' un raisonement. "Je pense, donc je suis.
   Rem. 1°. On a dit aûtrefois, doncque, doncques, ou donque, donques. Cela était comode pour les Poètes, qui avaient quelquefois besoin d' une syllabe de plus.
   2°. Le c de donc se prononce come un k, lorsque donc comence la phrâse, ou qu' il est suivi d' une voyelle. "Votre Maître vous aime; donc, vous devez l' aimer. "Votre frère est donc arrivé. Mais devant une consone, lorsqu' il est dans le cours de la phrâse, il ne se prononce point. Votre frere est donc sorti. Wailly.
   3°. DONC, se met, ou à la tête de la phrâse, ou après le verbe, ou entre l' auxiliaire et le participe. "Je pense; donc, j' existe. "Vous avez offensé Dieu; il faut donc faire pénitence. "Elle se plaint; il l' a donc maltraitée.
   4°. Vaugelas a observé qu' on pouvait comencer une période par donc. Il devait ajouter, dit Ménage, qu' on pouvait même commencer un Poème par ce mot, comme a fait Malherbe, dans son Ode pour le Roi, alant châtier les Rochellois:
   Donc, un nouveau labeur à tes armes s' apprête.
   Prends ta foudre, Louis, et va comme un lion,
   Donner le dernier coup à la derniere tête
   De la Rebellion.
   Neuville comence aussi par donc, le 1er Point du Sermon sur la nécessité de servir Dieu dans la jeunesse. "Elles ont donc pu s' introduire, et s' établir dans le monde chrétien, ces maximes scandaleuses, qu' il est un âge pour le monde, pour le plaisir.
   DONC, peut, au contraire, terminer la phrâse. "En quoi! tout le monde me quitte donc! Mariv. _ * Ordinairement on le met après le verbe, du moins dans les temps simples. Racine le met devant, pour éviter un hiatus. "Où donc est la Princesse? S' il avait dit, où est donc, comme on le dirait en prôse, il y aurait eu une rencontre de l' u et de l' e, qui est depuis long-temps une grande faûte contre la versification. L' Auteur a préféré une faûte de Gramaire: cependant, cet où donc est, parait bien dur et bien sauvage.
   5°. * Anciènement on disait adonc pour donc, et on le dit encôre dans le style marotique.
   Phébus adonc va se désabuser
   De son amour pour la docte Fontaine,
   Et connoîtra que pour bons vers puiser,
   Vin Champenois vaut mieux qu' eau d' Hipocrène.
       Rouss.

DONDON


DONDON, s. f. Femme ou fille qui a de l' embonpoint et de la fraîcheur. Acad. Femme grosse, belle et réjouie. Trév. Ces deux dernières épithètes n' entrent point dans l' idée que présente dondon. "Une grosse dondon. _ Ce mot n' est que du style familier.

DONJON


DONJON, s. m. C' est la partie la plus forte et la plus élevée d' un château, dit l' Acad. et qui est ordinairement en forme de tour. Pour la plus élevée, à la bone heure; mais pour la plus forte, ce n' est pas toujours ainsi. Elle ne l' est que par sa situation. Trév., à mon avis, définit mieux le donjon. "La partie la plus élevée d' un château bâti à l' antique, qui sert à découvrir de loin. Il ajoute: "Réduit, dans une place, ou dans une citadelle, où l' on se retire, pour capituler avec plus d' avantage, étant, par cette situation, plus en état de se défendre, et de fatiguer l' ennemi.

DONNANT


DONNANT, ANTE, adj. DONNER, ou DONER, v. a. DONEUR, EûSE, s. m. et f. [Donan, nante, doné, neur, neû-ze; 2e é fer. au 3e, lon. aux 2 1ers et au der. Les mots donataire, donateur, donation, font voir qu' on devrait écrire doner avec une seule n, sans compter l' étymologie donare. Wailly, Rich. Port.] I. Donant, qui done, qui aime à doner. Il ne se dit qu' avec la négative. L' Acad. se contente de dire que c' est son plus grand usage. "Il n' est pas donant; elle n' est pas donante.
   II. DONER, est 1°. Faire don de... "Il done tout ce qu' il a: il done tout son bien aux paûvres. "Doner une bague, des rubans; un bénéfice, une pension. Doner l' aumône. Doner un festin, une fête, une collation. Doner le bal. = 2°. Livrer, mettre entre les mains. Doner en dépôt, en garde, à crédit, à l' essai, à l' épreuve. Donez-moi ce paquet, ces lettres, ces papiers. Doner des assurances, des suretés, une caution, un répondant. = 3°. V. neut. Aporter, présenter. Donez des sièges, donez-moi mes habits. Doner un bouillon. _ Il régit à devant les verbes. "Doner à laver, à boire. Donez-nous à manger. = 4°. Payer. "Je n' en veux doner que tant. "Je vous en done deux louis. Doner des gages, des apointemens. = 5°. Causer, procurer. "Cela lui a doné la fièvre, de grandes douleurs. Doner du chagrin, de la joie, du plaisir, etc. = 6°. Acorder, octroyer. "Doner permission, congé de faire. "Doner du temps, du délai, du répit; doner la liberté du choix, doner le choix, etc. _ Et neutralement, doner à choisir; doner beaucoup à son plaisir; ne rien doner à la recomendation, à la faveur. Doner sa voix, son sufrage. Doner gain de caûse, doner gâgné, etc. = 7°. Atribuer. Doner tort à... À~ qui done-t-on la faûte. On lui en done tout le blâme, l' honeur, la gloire. "On done cet ouvrage à un tel. "Quel âge lui donez-vous? etc. etc.
   Rem. * 1°. DONER, régit plusieurs noms sans article. Doner avis, assurance, assignation, atention, audience. Doner conseil, caution, chasse, carrière, cours; doner heure, jour; doner parole, part, prise; doner quittance, raison, rendez-vous, tort, etc. On trouvera ces expressions à la place respective de ces noms, et de plusieurs aûtres avec lesquels doner s' associe. = Il se combine aussi avec une foule de noms employés avec l' article. Doner le branle; doner un bon tour à... Doner un démenti. Doner l' absolution, la bénédiction, l' exclusion. Doner des louanges, des preuves, des marques, des conseils, des avis. Doner la loi, le ton: l' exemple. Doner la chasse, la main, le bon jour, le bon soir, etc. = Il régit aussi plusieurs verbes à l' infinitif. Doner à penser, à songer, à discourir, à parler, à entendre, à conaitre, à deviner, etc. = Il s' unit, dans plusieurs expressions, avec la prép. dans: Doner tête baissée dans quelque afaire; doner dans les bâtimens et les tableaux, dépenser en bâtisse, en tableaux, etc. Doner dans le piège, dans le paneau, dans le ridicule. Doner dans le sens de quelqu' un, etc. En un mot, doner, avoir et faire, entrent dans la moitié des phrâses de la Langue.
   SE DONER, se dit aussi avec plusieurs noms employés sans article, ou avec l' article. "Se doner carrière, se doner garde, ou, de garde. Se doner la peine, le soin, la patience, l' honeur de faire, etc. etc.
   2°. On emploie élégamment doner la vie, dans le sens d' acorder, mais seulement dans le discours relevé. "Les Grands ne pouvoient pardonner à César la vie qu' il leur avoit donée dans les plaines de Pharsale. _ Mais on ne dit point, doner que pour acorder que. "Donnons que Benoît XIII ait pensé à les publier: Donnons même que la doctrine en soit exacte, je soutiens qu' il n' en résulte pas même l' ombre de preuve, etc. Anon.
   3°. Doner, dans le sens de sacrifier, avec le mot ressentiment, est un latinisme qui a été quelquefois employé par ceux qui ont travaillé sur l' Histoire Romaine. "Quintius conjûre les Tribuns de donner leurs ressentimens au bien public. Vertot. Ce célèbre Historien emploie ailleurs sacrifier, qui est plus français. "Il leur répartit, qu' il leur conseilloit de sacrifier ce ressentiment particulier au bien public. Mde. de Sévigné a dit comme Vertot, dans le 1er exemple. "Il revient de Paris, après s' être réconcilié avec... Il a donné tous ses ressentimens à M. de Turenne, c' est-à-dire, à la prière de M. de Turenne.
   4°. * Anciènement les Poètes disaient, je don' rai, je don' rois.
   Marmet, ta femme est si jolie,
   Et de tant de graces remplie,
   Que si le puissant Jupiter
   M' en avoit donné trois de même,
   J' en don' rois deux à Lucifier,
   Afin qu' il m' ôtât la troisième.
       Guy de Tours.
  5°. DONER, impersonel, parait vieillir. Il serait pourtant bon à conserver. Il régit le datif des noms et la prép. de, devant les verbes. "Il ne lui fut pas donné alors de prévaloir contre le Sacrifice perpétuel. "Il n' a jamais été donné à Philosophe qui ait vécu, de pouvoir trouver le moindre grain de cette matière première. Pluche. Ce tour est noble: il n' est que du style relevé. Il serait fâcheux qu' on le laissât perdre.
   6°. DONER un homme à une femme. Expression nouvelle, suposer que cet homme est son amant. "On m' a donné le premier homme qui a eu l' imprudence de laisser croire qu' il étoit bien reçu de moi. Voy. AVOIR, Rem. n. 5°.
   7°. Ménage condamne l' expression doner des deux, apuyer les deux éperons dans le flanc du cheval; mais l' Acad. l' aproûve.
   On dit proverbialement, doner de la gabatine, ou du galbanum, tromper par de fausses promesses. L' on dit aussi, à-peu-près dans le même sens, en doner d' une, en doner à garder. On dit encôre de celui qui ne sait que devenir, qu' il ne sait où doner de la tête; et de celui qui a des prétentions à quelque chôse, qu' il n' en donerait pas sa part aux chiens, ou aux chats. _ S' en doner à coeur joie, prendre du plaisir autant qu' on peut. S' en doner par les joûes, dépenser son bien en débaûches.
   DONNEUR, DONNEûSE, celui ou celle qui donne. Il n' est en usage que dans le st. fam. Doneur, Doneûse d' avis. Doneur de galbanum; doneur d' eau bénite de Cour. _ Le Rich. Port. met aussi: il n' est pas doneur, elle n' est pas doneûse: mais il avertit que ces expressions sont trop familières. Il me semble que Doneur, en ce sens, vaut bien Donant. Voyez plus haut. I.

DONT


DONT, particule de grand usage, qui se met au lieu de la prép. de, et des pronoms relatifs, de qui, duquel, desquels, de laquelle, desquelles, de quoi. "Dieu, dont nous admirons les oeuvres. La natûre, dont nous ignorons les secrets. "Les héros, dont il tire son origine; ce dont je vous ai parlé, etc. Voyez LEQUEL et QUI. _ L' Acad. l' admet aussi à la place de avec lequel, etc. "Le régime, la régularité dont il vit. J' ôse douter que l' usage actuel l' aproûve.
   REM. 1°. Dont doit s' employer avec précaution. Aûtrement il ocasione, dans le discours, quelque chôse de louche et de sauvage. Témoin la phrâse suivante des Révolutions d' Espagne, où l' Auteur dit, parlant des Vêpres Siciliennes: "L' an 1282 fut l' époque de cet évènement tragique, dont à peine quatre siècles ont pu arrêter le déluge de sang qui a inondé l' Italie et la Sicile. Qu' est-ce que le déluge de sang d' un évènement? Il falait finir la phrâse à tragique, et continuer, en disant: "À~ peine quatre siècles ont-ils pu en guérir les suites funestes, et arrêter, etc. _ Dont, est aussi mal employé dans la phrâse suivante. "Ce sentiment se trouvoit aussi autorisé par plusieurs grands hommes, dont S. Norbert étoit du nombre. Villefore, Vie de S. Bernard. Il falait dire, du nombre desquels était S. Norbert. Un grand nombre d' Auteurs ont fait la même faûte.
   2°. Dont ne doit pas être éloigné du nom auquel il se raporte. "C' est un grand défaut de ne pouvoir finir, dont Apelle blâmoit si fort Protogène. P. Rapin. Cette faute est familière à cet Auteur. Quand on est forcé d' éloigner dont de son antécédent, il vaut mieux se servir du pronom en. "C' est un grand défaut, etc. et Apelle en blâmoit fort, etc. = La mauvaise construction de ce relatif ocasione de l' embarras, de l' obscurité et de l' équivoque dans les phrâses. "Les manufactures et les denrées attirent à~ Dely, chaque année, une grande partie de l' argent de l' Asie et de l' Europe, dont il ne sort plus, dès qu' il y est entré. Let. Édif. Suivant la construction de la phrâse, dont se raporte à l' Asie et à l' Europe; et suivant l' intention de l' Auteur; il doit se raporter à Dely. Il falait dire, pour que la phrâse fût correcte: "Et il n' en sort plus, dès qu' il y est une fois~ entré. _ Autre exemple. "Nous entendîmes aboyer des chiens, compagnons inséparables des Indiens, dont ils se servent pour la chasse. Ibid. Suivant la construction, il semble que ce sont les chiens, qui se servent des Indiens, et non pas les Indiens, qui se servent des chiens pour la chasse. Au lieu de dire, des Indiens, dont ils se servent, il falait dire: des Indiens, qui s' en servent, etc.
   3°. Dont ne doit pas être régi par des prépositions. On ne dit point: la ville, dont je suis près; la campagne, dont je suis loin. On doit dire, près de laquelle, loin de laquelle, etc. "Si je méritois d' être cité parmi les Amateurs des Beaux-Arts, prétention, dont je suis loin, dit M. Guis, Voy. Litt. de la Grèce. Il falait, dont je suis fort éloigné. _ Les prépositions, qui, comme leur nom l' anonce, doivent marcher devant, ne sont pas à leur place, quand elles sont après leur régime. Ainsi l' on dira: le Rhône, auprès duquel est Avignon, et non pas, dont Avignon est auprès. "L' Église, vis-à-vis de laquelle sa maison est située, et non pas, dont sa maison est située vis-à-vis. _ Cette règle est générale, et ne soufre aucune exception. Elle doit s' apliquer également à dont, régi par des noms. "En s' abandonant au cours des vents, dont ces aventuriers se reposoient sur la fortune. Prévôt, Hist. des Voy. "Il lui dona des Comissaires, dont il espérait de la sévérité. Volt. Il falait, de la sévérité de qui il espérait.
   4°. dont et en, relatifs du même nom, forment un pléonasme. "Un lavement de fumée de tabac, dont il en sera reparlé en traitant des noyés. Tissot. Retranchez en, si vous voulez vous servir de dont; ou retranchez dont; mettez un point après tabac, et dites: il en sera reparlé, etc. "Ils imaginent peu de chôses, dont leurs parens n' en soient la caûse, dit Mallebranche. Cette phrâse paraît être dans le câs de la précédente. Cependant, si l' on retranchait en, elle serait encôre plus défectueûse; car on donerait à entendre, que les parens seraient la caûse de ces chôses, tandis qu' on voudrait dire seulement, qu' ils sont la cause qu' on les imagine. Si l' on conserve en, l' oreille est choquée. Il faut donc prendre un aûtre tour, et dire; "Ils imaginent peu de chôses, dont on ne puisse dire que leurs parens en sont la caûse. Alors, dont et en ne se raportent plus au même nom.
   5°. Quoiqu' on dise, tomber d' un rang, on ne doit pas dire, le rang dont ils sont tombés, ou dont, duquel ils tombent, mais d' où ils tombent. "Le rang usurpé, dont ils (les Anglois) tombent. Linguet. Ainsi l' on dit: la maison d' où je sors, le lieu d' où je viens; et non pas, dont je sors, dont je viens. Cependant, quand maison signifie race, il faut dire alors dont, et non pas d' où. "La maison dont il sort est illustre. Vaug. Th. Corn. L. T.
   6°. Il y a long-tems qu' on a dit que dont ne se dit que des chôses, et que pour les persones, il faut dire, de qui. On a repris Malherbe d' avoir dit:
   Pour moi, dont la foiblesse à l' orage sucombe.
On a observé qu' il falait dire de qui. Cependant on manque tous les jours aux règles qu' on sait le mieux; et un célèbre Académicien (M. d' Alembert) a fait cette faûte de nos jours. "Ils se rapelleront celui dont (de qui) ils les tiènent. M. Linguet a relevé cette faûte. _ Vaugelas aproûve, et cite même en exemple des phrâses qui paraissent semblables: "L' homme dont j' ai épousé la fille, dont je vous ai parlé; et Th. Corneille: "C' est un homme, dont le mérite égale la naissance. Il semble que l' usage continue à aprouver des phrâses pareilles, et qu' en ces endroits, de qui ne ferait pas si bien. Mais il n' est pas moins vrai que dans le vers de Malherbe (en encore plus dans la phrâse de M. d' Alembert) dont choque l' oreille, et qu' on doit dire, de qui. _ J' ajouterai que dont est plus suportable avec les persones, quand il se raporte à des noms, comme dans le premier exemple de Vaugelas, et dans celui de Corneille, et que de qui est plus convenable, quand il est régi par des verbes, comme dans l' exemple cité de M. d' Alembert: "Celui de qui je le tiens, de qui je l' ai reçu, de qui je dépends, etc. etc. Pour le 2d exemple de Vaugelas, dont je vous ai parlé, c' est une phrâse que l' usage autorise, et qui ne tire pas à conséquence pour d' aûtres.
   7°. * Autrefois on mettait dont à la place de certaines prépositions.
   Que le rigoureux sort dont vous m' êtes ravie.
       Malherbe.
Il faut, par lequel vous m' êtes ravie. _ "Des paroles si méprisantes, dont on traite ces saints Martyres. Boss. Ce dont est mal placé. Traiter ne régit pas l' ablatif en ce sens: il ne le régit que pour les adjectifs, et non pour les substantifs. On ne dit point traiter quelqu' un de paroles injurieûses, comme on dit: traiter quelqu' un d' insensé. Voy. TRAITER.

DONZELLE


DONZELLE, s. f. [Donzèle: 2e è moy. 3e e muet.] Demoiselle, en mauvaise part. Trév. Terme de mépris, qui signifie une fille ou une femme d' un état médiocre, et dont les moeurs sont suspectes. Il est du style familier. Acad. "C' est une donzelle. _ C' est aussi le nom d' un poisson de mer.

DORÉ


DORÉ, ÉE, adj. DORER, v. a. DOREUR, EûSE, subst. DORûRE, s. f. [2e é fer. aux 3 1ers, lon. aux 2 dern.] Dorer, c' est enduire d' or moulu, ou couvrir de feuilles d' or. Dorer un calice, de la vaisselle. Dorer des bois de chaises, un plafond, des bordures de tableaux, un rétable, etc. Dorer un livre sur tranche, etc. _ Figurément et poétiquement: le Soleil dore la cime des montagnes; il les éclaire de ses rayons. "Les moissons commencent à se dorer; à jaunir. _ Proverbialement: Dorer la pilule, c' est adoucir l' amertume d' un refus, d' un ordre, d' une proposition désagréable. _ * Un Auteur, souvent cité dans ce Dictionaire pour ses expressions bisârres, fait régir à dorer la prép. de. "Ils ne craignent point le sarcasme, que les Grands dorent d' un clinquant de politesse. C' est du précieux ridicule.
   DORÉ, Bordure dorée, tapisserie de cuir doré. = Tirant sur le jaûne. "Les épis dorés: les fruits dorés, dont l' automne récompense les travaux des laboureurs. = Pâtisserie dorée. "Rôti doré, qui a une belle couleur.
   DOREUR, DOREûSE; celui ou celle dont le métier est de dorer. Dorûre: action de dorer, ou l' éfet de cette action. "Tant pour la dorûre de ces plafonds. Voilà de belles dorûres. _ Les Dictionaires définissent dorûre, or fort mince, apliqué sur la superficie de quelque corps. Mais la dorûre n' est pas l' or, c' est l' aplication de cet or et ce qui en résulte.

DORÉNAVANT


DORÉNAVANT, adv. [2e é fer. _ C' est la contraction de d' ores en avant.] Désormais, à l' avenir, dans la suite. Il peut se placer après ou devant les verbes, au choix de l' Orateur. Je serai dorénavant plus exact; je serai plus exact dorénavant. "Dorénavant je serai plus exact.
   Rem. 1°. La Touche dit que l' e est féminin (muet), et qu' il faut écrire dorenavant, (sans accent): Il avoûe en même temps que l' Acad. écrit doresnavant. Dans la dernière édition elle a retranché l' s et a mis un acc. aigu sur l' e.
   2°. Richelet dit que dorénavant n' est pas trop usité. Dans le Dict. Gram. on dit qu' il vieillit. L' Acad. le met sans remarque.

DORIEN


DORIEN, DORIQUE, adj. m. Le 1er se dit d' un mode de la musique des Anciens, et d' un dialecte de la Langue grecque; le 2d d' un des cinq ordres d' Architectûre. C' est le second; il est entre le toscan et l' ionique.

DORLOTER


DORLOTER, v. act. (st. famil.) Traiter délicatement et avec complaisance. "Elle dorlote son enfant. "Comme j' aime à être dorlotée, je ne suis pas fâchée que vous me plaigniez. Sévigné. On dit aussi se dorloter.

DORMANT


DORMANT, ANTE, adj. DORMIR, v. neut. [2e lon. aux deux premiers.] I. L' adjectif ne se dit qu' au figuré (st. famil.) Eau dormante, qui ne coule point. Verre dormant, châssis dormant, qui ne s' oûvre point. Pêne dormant, qui ne peut s' ouvrir ni se fermer qu' avec la clef. Pont dormant, qui ne se lève point, par oposition au pont-levis. _ Il aime à suivre le substantif. En vers le féminin peut précéder.
   Tantôt son bras actif desséchant les marais,
   De leurs dormantes eaux délivre les guérets.
       De Lille.
  DORMANT ne se dit point au propre. On ne dit point un homme dormant, on doit dire, un homme qui dort. "Tel qu' un homme dormant, qui, dans un songe afreux, ouvre la bouche et fait des éforts pour parler. Télém.
   II. DORMIR, je dors, nous dormons, je dormais, je dormis, je dormirai, dormirois ou dormirais; dors, que je dorme, je dormisse, etc. _ Reposer, être dans le sommeil. Dormir le jour, la nuit, d' un profond sommeil, profondément. _ Et proverbialement, dormir comme une souche, comme un sabot. Dormir en lièvre, les yeux ouverts. Dormir à bâtons rompus, mal dormir. Dormir tout debout, être acablé de sommeil. Dormir d' un bon somme, ou un bon somme, d' un sommeil tranquille, et long-temps. Dormir la grasse matinée, ne se lever que fort tard.
   Les Poètes font dormir les chôses inanimées. M. Roucher, en particulier, aime fort cette métaphôre. Il fait dormir les vents, et les fait dormir en silence.
   De sa chute prochaine, un calme précurseur
   S' est emparé des airs: ils dorment en silence.
"Les airs dorment est une expression dure, et dorment en silence, une expression ridicule, dit-on dans l' Ann. Lit. Que signifie dormir en silence? M. Roucher entend-il par-là que les airs ne ronflent pas? L' Auteur est tellement engoué de cette locution, qu' il la répète en d' autres endroits.
   Et ses brâs énervés
   Dorment silencieux sur la rame inutile.
Et ailleurs:
   Le vent se tait, il dort dans un calme trompeur.
   Ces teintes dans les fleurs dorment-elles cachées, etc.
Racine a fait aussi dormir les vents.
   Mais tout dort, et l' armée, et les vents et Neptune.
Mais avec quelle adresse ce grand Poète a mis les vents entre l' Armée et Neptune, afin d' adoucir l' un par l' autre. La Fontaine a dit pareillement:
   Guillot dormoit profondément,
   Son chien dormoit aussi, comme aussi sa musette.
Quelle délicatesse, quel art d' avoir sous entendu le mot dormoit en cet endroit, et d' avoir mis seulement, comme aussi sa musette. Voilà de quelle manière on doit tempérer l' audace de quelques figûres, qui, sans rien perdre de leur force, deviènent plus naturelles et plus grâcieûses. Ann. Litt.
   Dans le style simple ou médiocre, et dans le familier et le proverbial, dormir est fort usité au figuré. Laisser dormir un ouvrage, le garder pendant quelque temps pour l' examiner à loisir. Laisser dormir une afaire, ne la réveiller pas, ne la poursuivre pas. Cet homme ne dort pas, ne s' endort pas, (le 2d est le plus en usage) il cherche à se prévaloir de toutes les ocasions dont il peut profiter. _ Laisser dormir noblesse, se dit, en certaines Provinces, d' un Gentilhomme qui veut faire comerce, et qui, pour ne pas perdre sa noblesse, déclare qu' il ne veut comercer que pendant quelque temps. _ Dormir se dit des eaux dont le mouvement est imperceptible: "Il fait bon pêcher à l' endroit où l' eau dort. Et le Proverbe dit: qu' il n' y a point de pire eau que celle qui dort, qu' il n' y a point d' hommes plus dangereux que ceux qui paraissent doux et tranquilles, ce qui est quelquefois vrai.
   On apèle des contes puériles ou ennuyeux, des contes à dormir debout. "J' aime mieux le Tasse et les Contes à dormir debout de l' Arioste. Volt. "Voilà ce qui s' apèle des contes à dormir debout: mais cela vient au bout de la plume, quand on est en Bretagne. Sév. "Je vais à deux ou trois pièces nouvelles qu' on m' assûre être des chefs-d' oeuvre. Je trouve que ce sont des pièces à dormir debout, aussi fais-je. Ann. Litt.
   On dit aussi, en style proverbial, qu' il ne faut pas réveiller le chat (ou le chien) qui dort, c. à. d. réveiller la haine d' un énemi qui se tient en repôs. Et d' un homme à qui quelque bonne fortune arrive dans le temps qu' il y pense le moins; que les biens lui viènent en dormant. Voyez DINER et DIABLE.
   DORMIR, s. m. "Il a perdu le dormir. La Fontaine dit que le Financier se plaignait que les soins de la Providence
   N' eussent pas au marché fait vendre le dormir,
   comme le manger et le boire.
Ce substantif ne s' unit point à des adjectifs, et n' a point de pluriel. On ne dit point, un grand dormir, de petits dormirs. Wailly.

DORMEUR


DORMEUR, EûSE, s. m. et f. Celui ou celle qui aime à dormir. "C' est un grand dormeur, une~ grande dormeûse.

DORMITIF


DORMITIF, adj. et s. m. Qui provoque à dormir. Remède dormitif. "L' opium est un dangereux dormitif.

DORTOIR


DORTOIR, s. m. [Dor-toar.] Lieu où couchent les Religieux ou les Religieuses. Il se dit sur-tout d' un corps de bâtiment où il y a des chambres à droite et à gauche, avec un corridor au milieu. "Le Dortoir n' était autrefois qu' une grande salle, et n' étais point divisé en cellules ou en chambres, comme il est aujourd' hui. Un beau Dortoir. Un Dortoir fort obscur.

DORûRE


DORûRE, voy. DORÉ, DORER.

DôS


DôS, s. m. [, long, et devant une voyelle, dôz.] Derrière de l' animal depuis le cou jusqu'~ aux~ fesses. Trév. La partie de derrière de l' animal entre les épaules et les reins. Acad. Cette défintion est plus honête. "Le dôs d' un homme, d' un cheval, etc. Être couché sur le dôs. Dôs courbé, vouté. L' épine du dôs. Porter quelqu' un sur son dôs.
   Ce mot entre dans plusieurs expressions. Tourner le dôs, ou se dit sans régime, et alors il ne s' emploie qu' au propre: "Où fuyez-vous, fils de Laerte? Quoi! vous tournez le dôs. Mde. Dacier, Iliade; ou il régit le datif, et alors on s' en sert au fig. et au prop. "La fortune lui a tourné le dôs. _ "N'~ auriez~-vous rien sur la morale, les arts, le commerce? Nos Pères les lisoient, me dit-il, et il me tourna le dôs. Coyer. _ S' atirer quelqu' un à dôs, ou l' avoir à dôs; ou se le mettre à dôs, l' avoir pour énemi. "M. de Roberval en avoit moins dit que moi. Cependant c' en fut assez pour s' atirer à dôs Descartes. Paulian, Dict. de Phys. Se mettre à dôs est le meilleur des trois. _ Avoir quelqu' un sur son dôs, l' avoir à sa charge, en être chargé. _ Le porter sur son dôs; en être fatigué, ou gémir sur son triste sort. _ Mettre tout sur le dôs de quelqu' un, se décharger sur lui de tout le faix. Cela est sur son dôs, c. à. d. à sa charge. _ Faire le grôs dôs, l' homme important. _ Battre dôs et ventre, extrêmement.
   On dit d' un homme extrêmement pauvre, qu' il n' a pas une chemise à mettre sur son dôs; et de ceux qui aiment leurs aises et la bone chère, qu' ils veulent avoir le dôs au feu et le ventre à table; et d' un homme qui soufre tout sans se plaindre, sans se fâcher, qu' il se laisseroit manger ou tondre la laine sur le dôs.
   Au dôs de, adv. Au dôs du livre. _ Dôs-à-dôs, dôs contre dôs. _ Figurément, mettre deux persones dôs-à-dôs, dans un acomodement; ne pas doner plus d' avantage à l' un qu' à l' autre.
   Dôs-d' âne. Une chôse est en dôs-d' âne, quand elle est en talus des deux côtés.

DôSE


DôSE, s. fém. DOSER, v. act. [1re lon. au 1er: 2e e muet au 1er, é fer. au 2d; dôze, dozé. Au verbe, devant l' e muet, l' o est long comme au substantif: il dôse, dôsera, etc.] Dôse est la mesûre ou la quantité des drogues qui doivent entrer dans un médicament. "Savoir, prescrire la dôse d' un remède. = Il se dit par extension du sucre, du poivre et aûtres chôses pareilles. = Il se dit aussi de chaque prise. "Partager un bol, un remède en plusieurs dôses.
   DôSE se dit au figuré, mais tout au plus dans le style médiocre. "Dôse d' amour, de jalousie, etc. "Je crois pourtant qu' il y a une dôse de tendresse dans mon coeur, qui tient à votre persone, et dont les aûtres mères ne tâtent pas. Sév. "Ce livre étoit tombé dans l' oubli, soit parce que l' Italie avoit eu intérêt à l' étoufer, soit parce que éfectivement la dôse des paroles y est beaucoup trop forte, par raport à celle des chôses. Fonten. _ Augmenter, doubler, diminuer la dôse, se dit figurément de plusieurs chôses dont on trouve qu' il n' y en a pas assez, ou qu' il y en a trop.
   DOSER, c' est mettre la dôse prescrite. Trév. Rich. Port. C' est un terme de Médecin et d' Apothicaire. L' Acad. ne le met pas. _ On pourrait le dire, au figuré, dans le style badin ou critique. Ce conte est trop fortement dosé. "Il dôse un peu trop sa critique. Le sel y est répandu à pleines mains. "Les derniers ouvrages de Voltaire sont remplis d' injures grossières: il les a dosés de trop de fiel et d' amertume, et d' un sel trop âcre et trop mordicant. Anon.

DôSSERET


DôSSERET, s. m. [Dôcerè; 1re lon. 2e e muet, 3e è moyen.] Terme d' Architectûre. Petit pilastre saillant.

DôSSIER


DôSSIER, s. m. [Dô-cié: 1re lon. 2e é fer.] Partie d' une chaise ou d' un banc, qui sert à apuyer le dôs. _ Dôssier d' un lit. La pièce de bois qui joint les deux colonnes du lit où apuye le chevet; et la pièce d' étofe qui couvre le derrière du lit. = En termes de Pratique, plusieurs pièces attachées sous une même cotte ou étiquette.

DOT


DOT, s. f. [On prononce le t final.] Quelques-uns écrivent et prononcent dote sans raison. _ Il faut dire la dot, et non pas le dot, comme ont dit Vaugelas et d' Ablancourt. MÉN. = Bien qu' une femme aporte en mariage. Doner en dot. Constituer une dot. Assurer, payer la dot. _ Il ne se dit point au pluriel. _ On apèle aussi dot ce qu' on done à un Monastère, quand une fille se fait Religieûse.

DOTAL


DOTAL, ALE, adj. DOTER, v. a. [2e é fer.] Dotal, qui apartient à la dot. Fonds dotal, biens, deniers dotaux, constitution dotale.
   DOTER, c' est doner à une fille de quoi se marier. "Doter de pauvres filles. Il régit quelquefois la prép. de. "Son Père l' a dotée de cent mille francs. "Elle a été dotée de dix mille écus. _ Par extension, il se dit des revenus donés à une Èglise, à un monastère, pour faire le service divin. Doter une Église, une Chapèle, un Collège. _ Figurément. "La nature l' avoit dailleurs trop bien doté pour qu' il eût à se plaindre de ne pas joindre à sa courone le stérile et vain laurier d' Apollon. M. Rigoley de Juvigny, parlant du Card. de Richelieu.

DOUAIRE


DOUAIRE, s. m. DOUAIRIER, s. m. DOUAIRIèRE, s. f. [Dou-è-re, dou-érié, dou-érière; 2e è moyen et long au 1er, é fer. aux 2 aûtres: 3e é fermé au 2d. è moy. et long au dern.] Le douaire est ce que le mari done à sa femme en faveur du mariage, qu' il contracte avec elle, pour en jouir en cas qu' elle lui survive. = Douairier se dit d' un enfant qui se tient au douaire de sa mère, en renonçant à la succession de son père. = Douairière, veuve qui jouit du douaire. _ L' Acad. avertit qu' on ne le dit que des persones d' un rang distingué. "Reine, Princesse, Duchesse douairière. _ On n' est pas si délicat en Province.

DOUANE


DOUANE, s. f. DOUANIER, s. masc. [Doua-ne, Doua-nié, en deux syllabes, et non pas dou-ane, dou-a-nié, comme on le marque dans le Dict. Gram. 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] La Douane est un lieu où l' on est obligé de porter les marchandises pour aquiter certains droits. "Aler à la Douane. _ C' est aussi les droits qu' on aquite. "Payer la douane.
   DOUANIER est celui qui est préposé pour visiter les marchandises qu' on porte à la Douane, et pour recevoir les droits qu' il faut payer.

DOUBLAGE


DOUBLAGE, s. m. Terme de Marine. Second bordage ou revêtement de planches qu' on met par dehors, aux vaisseaux destinés à des voyages de long cours.

DOUBLE


DOUBLE, adj. DOUBLEMENT, adv. DOUBLER, v. act. [Dou-ble, bleman, blé; 2e e muet aux deux premiers, é fer. au dernier.] Double est, 1°. ce qui vaut, ce qui pèse, ce qui contient deux fois autant. Double logis, double portion, double mesûre. Corps de logis double. Il est oposé à simple. = 2°. Il se dit de deux chôses semblables, qui sont en même endroit. "Double châssis, double porte, double semelle. 3°. On le dit des chôses plus fortes, de plus grande vertu que les aûtres de la même espèce. Encre double. Double bierre, double bidet. _ Et dans le style familier, double coquin, double fripon. = 4°. Figurément et en parlant des persones, traitre, dissimulé. "Coeur, esprit, âme double. = Mot à double entente, qui a deux sens diférens.
   DOUBLE, s. masc. Une fois autant. Payer le double, condamner au double. "Je vous le rendrai au double, beaucoup au delà de ce que vous aurez fait. _ Mettre une chôse en double, la replier sur elle-même. Mettre une serviette en double.
   DOUBLE, adv. Voir double.
   DOUBLE, anciène monoie qui valait deux deniers. Le noms s' en est conservé dans quelques phrâses proverbiales. "Cela ne vaut pas un double. "Je n' en donerais pas un double. "Il y a tant et pas un double avec, et pas davantage.
   Rem. 1°. Double a souvent diférens sens, suivant qu' il est placé devant ou après le substantif. Avoir un double esprit, et être un esprit double, sont des chôses bien diférentes. _ On dit qu' Élisée reçut le double esprit d' Élie. Si l' on disait l' esprit double, on dirait toute aûtre chôse que ce qu' on voudrait dire. Le P. Charlevoix a donc mal placé cet adjectif, quand il a dit: "Il continua à jouer le double personage, qui lui avoit si bien réussi. Il s' agit d' un hypocrite, d' un fourbe, qui ne jouait qu' un personage. On devrait dire, le personage double; mais cet adjectif ne va pas bien avec personage, et il ne se dit point des persones mêmes, du moins quand il est seul. En y ajoutant un aûtre adjectif, je crois qu' on pourrait le dire. "Il continua à jouer le personage double et rusé, qui lui avait si bien réussi.
   2°. * Être en double, ou, comme on dit en Provence, en deux doubles, est une expression, ou vieille, ou bâsse et populaire. "Patrocle se jette sur Thestor, qui, saisi de frayeur sur son char magnifique, étoit tout en double. Mde Dacier, Iliade.
   DOUBLEMENT, pour deux raisons, ou en deux manières. "Il est doublement blâmable. "Il en sera doublement puni. _ Il est subst. masc. en termes de Pratique. Enchérir par doublement et par tiercement. = Quelques Auteurs l' ont employé hors des afaires du Palais. "L' Irlande doit le doublement de ses produits à l' Académie d' Agricultûre de Dublin. Anon. "Il est de l' essence de notre sage Politique, de doubler les êtres en tout genre, en proportion de ce que ce doublement est inutile ou même dangereux. Linguet. _ Il est à souhaiter que l' usage adopte ce substantif: il serait utile.
   DOUBLER est, 1°. mettre le double; mettre une fois autant. Doubler le nombre, l' ordinaire, la dépense, la somme. Doubler les gardes. _ Doubler le pâs, aler plus vîte. _ Doubler le Cap (Marine); aler au-delà du Cap. = 2°. Mettre une doublûre, c. à. d. une étofe contre l' envers d' une aûtre. Doubler un habit de velours, de satin, etc = 3°. Au Théâtre, doubler un rôle, un acteur, c' est jouer un rôle au défaut de celui qui en est chargé le premier. _ Coyer dit, au figuré, en ce sens, qu' un mari est un personage qu' on double aisément. "L' on n' est jamais exposé à Londres, à ces surprises si désagréables et si communes de nos spectacles de Paris, quand au lieu de l' Acteur atendu, on voit paroître son double; expression très-ridicule, qui présente à l' esprit précisement le contraire de ce qu' elle signifie. Linguet.

DOUBLET


DOUBLET, s. m. DOUBLETTE, s. f. [Dou-blè, blète; 2e. è moyen, 3e e muet.] Doublet est, 1°. deux morceaux de cristal mis l' un sur l' autre, avec une feuille colorée entre deux, pour imiter les émeraûdes, les rubis, etc. = 2°. Au jeu de Trictrac, doublet est quand les deux dés amènent les mêmes points. Deux six, deux quatre font un doublet. _ Doublette, est un des jeux de l' orgue, qui sone l' octâve au-dessus du prestant.

DOUBLEUR


DOUBLEUR, EUSE, s. m. et f. C' est un mot de Manufactûre, doubleur de laine, doubleûse de soie, celui, celle qui double la laine, la soie sur le rouet. Ce mot est dans Trév. L' Acad. ne le met pas.

DOUBLON


DOUBLON, s. m. Monoie d' Espagne, qui est d' or, et que nous apelons pistole. Acad. Le Dict. de Trév. dit qu' il vaut deux pistoles. _ En termes d' Imprimerie, c' est une faûte des ouvriers, quand ils font deux fois la même chôse.

DOUBLûRE


DOUBLûRE, s. f. [2e lon. 3e e muet.] L' étofe dont une aûtre est doublée. La doublûre de cet habit est toute déchirée. _ Le Proverbe dit: Fin contre fin n' est pas bon à faire doublûre: on ne réussit pas à tromper aussi fin que soi, et l' on ne doit pas l' entreprendre.

DOUCEâTRE


DOUCEâTRE, adj. [Dou-sâ-tre, 2e lon. 3e. e muet: l' e qui est devant l' a est muet, il n' est mis là que pour doner au c un son doux qu' il n' a pas devant les voyelles a, o, u. On pourrait écrire douçâtre, et cela serait plus conforme à l' analogie: cet e, employé aûtrefois devant a, o, u, a été remplacé par la cédille.] Qui est d' une douceur fade. "Goût douceâtre, eau douçâtre. "Cela a quelque chôse de douçatre.

DOUCEMENT


DOUCEMENT, adv. [Douceman; 2e e muet.] 1°. D' une manière douce. "Marcher doucement. Heurter doucement à la porte. "Allez-y plus doucement. Reprendre quelqu' un doucement. = 2°. Délicatement, sourdement, sans éclat. "Cette afaire veut être traitée doucement. "C' est une chôse qu' il faut faire doucement. "Tout s' est pâssé fort doucement, paisiblement. = 3°. Lentement. "Vous marchez, vous allez trop doucement. = 4°. Médiocrement bien. "Comment se porte ce malade? Tout doucement. = 5°. Il se dit par interjection. "Vous parlez bien haut! Doucement! = 6°. Aler doucement en besogne, (st. famil.) signifie, tantôt sagement et sans rien précipiter; tantôt lâchement, mollement.

DOUCEREUX


DOUCEREUX, EûSE, adj. DOUCET, ETTE, adj. [Douce-reu, reû-ze, doucè, cète; 2e e muet aux deux premiers, è moyen aux deux derniers, 3e long. aux deux premiers.] Doucereux se dit des chôses et des persones. Doux, sans être agréable. "Vin doucereux, liqueur doucereûse. "Homme doucereux, air doucereux, mine doucereûse. _ S. m. C' est un doucereux, il fait le doucereux auprès des femmes. On dit aussi des vers doucereux, une lettre doucereûse, chôses doucereûses, en parlant d' un amour fade.
   DOUCET ne se dit que des persones. Faire le doucet, la doucette; mine doucette. "C' est une doucette. _ Son emploi est borné à ces phrâses, ou aûtres pareilles.
   Rem. Doucereux se prend toujours en mauvaise part, soit en parlant des chôses, soit en l' apliquant aux persones, soit au propre et dans le physique, soit au figuré et dans le moral. = Ce mot est de la fin du siècle passé. La Bruyère, en l' employant, le met en italique. "Le Poème tragique n' est donc pas un tissu de jolis sentimens, de mots doucereux, etc.

DOUCEUR


DOUCEUR, s. f. [Dou-ceur.] Qualité de ce qui est doux. Il se dit au propre et au figuré, dans la plupart des sens de doux. "Douceur du sucre, du lait. Douceur de la voix, de l' haleine. Douceur des regards, du visage. Goûter la douceur de la vie, du commandement, de commander. etc. Gouverner les peuples avec douceur.
   Au pluriel, il ne s' emploie qu' au figuré. "Les douceurs de la société. La solitude a ses douceurs. _ Conter, dire des douceurs à une femme, lui dire des chôses flateuses et galantes, comme si l' on était amoureux d' elle. _ Mde de Sévigné le dit de femme à femme. "J' ai dit à Mde de Coulanges toutes vos douceurs.

DOUCHE


DOUCHE, s. f. DOUCHER, v. a. [2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] La douche est un épanchement d' eaux chaûdes et minérales, qu' on fait tomber de haut sur une partie malade. Doner, recevoir, prendre la douche. _ Doucher doner la douche. On m' a douché le genou, l' épaûle.
   Rem. Le Dict. de Trév. met douche, ou douge. La Touche pense aussi que l' un et l' aûtre se dit. Le Rich. Port. les met tous les deux: mais dans l' exemple qu' il done, il n' emploie que le premier: donner la douche. L' Acad. ne met que celui-ci; et je crois que c' est le vrai mot. _ Pluche dit douge; Mde. de Sévigné, douche.

DOUèGNE


DOUèGNE, s. f. [Douè-gne: mouillez le g; deux syllabes. Trév. met duegne; le Rich. Port. met les deux; l' Acad. le 1er seulement.] Fille, ou femme d' un certain âge, qui est chargée de la conduite d' une jeune persone. _ Il ne se dit qu' en plaisantant, et le plus souvent malignement; ou, comme dit l' Acad., en dénigrement.

DOUELLE


DOUELLE, s. f. [Douè-le; 2e è moy., 3e e muet.] Terme d' Architectûre, qui se dit de la coupe des pierres propres à faire des voûtes, et de la courbure d' une voûte. _ Trév. le met aussi pour douve. Celui-ci, en ce sens, est le vrai mot.

DOUER


DOUER, v. a. [Dou-é; devant l' e muet l' u est long: Il doûe. Au futur et au conditionel, il douera, douerait, l' e est entièrement muet, doûra, doûrè, en deux syllabes.] Avantager, favoriser, pourvoir, orner. Il régit l' ablatif (la prép. de.) "Le Ciel l' a doué d' un naturel heureux. "Les talens, la beauté, dont la nature l' a doué, ou douée. Il a sur-tout ce régime au participe. "Il est doué de mille belles qualités.
   Malheureuse! les Dieux ont-ils doué tes pleurs
   De ces charmes puissans qui fléchissent les coeurs?
       Creb.
Au Palais, doner, assigner un douaire. "Il a doué sa femme d' une telle somme.

DOUILLE


DOUILLE, s. f. [Dou-glie; mouillez les ll; 2e e muet.] Manche creux d' une baïonette, du fer d' une pique.

DOUILLET


DOUILLET, ETTE, adj. DOUILLETTEMENT, adv. [Dou-gliè, gliè-te, gliè-teman; 2e è moy., 3e e muet: mouillez les ll.] En parlant des chôses, doux et mollet, tendre et délicat. "Cela est bien douillet: Oreiller bien douillet. "Il a la peau douillette. _ En parlant des persones, excessivement délicat. "Il est fort douillet, elle est bien douillette. _ S. m. "C' est un douillet: faire le douillet. _ Douillettement, d' une manière douillette. "Il étoit douillettement couché sur un bon lit.

DOULEUR


DOULEUR, s. f. [Dou-leur.] Mal que soufre le corps ou l' esprit. "Douleur de tête, d' estomac. Douleur vive, vague, etc. Il est pénétré, acablé de douleur.
   Douleur, mal (synon.) La douleur est souvent regardée comme l' éfet du mal, jamais comme la caûse. On dit de celle-là, qu' elle est aigûe; de l' aûtre, qu' il est violent. On dit aussi, par sentence philosophique, que la mort n' est pas un mal, mais que la douleur en est un. GIR. Synon. Voy. TRISTESSE.
   DOULEUR, ne se dit quère au pluriel. M. Geofroi critique, avec raison, ce vers de M. de Saint-Ange:
   Climène a cru, dans ses douleurs,
   Que le marbre insensible est sensible à ses pleurs.
N' aimeriez-vous pas autant, sa douleur, si la rime le permettoit. Journ. de Mons. _ L' Acad. ne met point d' exemple de douleurs au pluriel.

DOULOIR


*DOULOIR (SE), v. réc. se plaindre. Il est vieux depuis long-temps. La Bruyère le regretait. Verd, ne fait plus verdoyer; ni deuil, se douloir, se condouloir, ni joie, s' éjouir, etc.

DOULOUREUX


DOULOUREUX, EûSE, adj. DOULOUREûSEMENT, adv. [Dou-lou-reû, reû-ze, reû-zeman; 3e lon., 4e e muet.] Qui caûse de la douleur: Plaie douloureûse, mal douloureux. _ Qui marque de la douleur: Cris douloureux, plainte douloureûse. = Il se dit aussi des parties du corps, non pas où l' on ressent de la douleur, mais qu' on ne peut toucher sans y causer de la douleur. "Il a le pied douloureux. "Un lait, qui a séjourné trois jours dans le sein... doit irriter et enflâmer le parties où il s' arrête, et ces parties doivent nécessairement être douloureuses. Me. Le Rebours.
   Rem. DOULOUREUX, ne se dit point des persones. Rousseau a pourtant dit:
   * Pour le malheur des mortels douloureux.
On peut croire que le Poète aurait dit, des mortels malheureux, s' il n' avait déja dit, pour le malheur.
   DOULOUREUX, suit ou précède le substantif. "Des cris douloureux. "De douloureux accens. Gress. Un douloureux souvenir. Rouss. Douloureux cris serait dur. Il faut donc consulter l' oreille.

DOUTE


DOUTE, s. m. DOUTER, v. n. [2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] On a fait aûtrefois doute féminin. * Malherbe dit:
   Nos doutes seront éclaircies, etc.
   C' est la doute que j' ai eue ce dernier effort, etc.
Coeffeteau en use de même, et Gombaud, dans son Amarante et dans les Danaïdes. Ces Auteurs, dit Ménage, avoient voulu imiter les Espagnols, qui disent, la duda. _ Balzac, dans son Socrate Chrétien, se moque d' un vieux Pédagogue~ de Cour, que l' an climatérique surprit, délibérant si doute et erreur étaient masc. ou fém. _ Depuis long--temps, doute est du 1er, et erreur du der genre.
   DOUTE, est 1°. Incertitude. Être en doute, laisser en doute. Il n' y a point de doute: il lui reste encôre quelque doute. "Cela est hors de doute. Doute bien ou mal fondé. Former, lever, résoudre un doute. = 2°. Crainte. "Le doute où je suis qu' il ne lui arrive du mal, etc. = 3°. Scrupule. "La décision de ce câs de conscience me laisse encore quelque doute. Voy. INCERTITUDE.
   Rem. Ce mot entre dans plusieurs expressions. _ Révoquer en doute. * Bossuet dit, de l' Épître de St. Jacques, que l' Église ne l' a jamais révoquée en doute. L' ellipse est un peu forte. Il veut dire que l' Église n' a jamais révoqué en doute l' authenticité de cette Épitre. C' est ce qu' il falait exprimer; car on ne dit pas, révoquer en doute un livre, une Épitre, etc. _ Mettre en doute régit, comme douter, la conjonct. que et le subjonctif; et quand le sens est négatif, la particule ne devant le verbe régi. "Il n' est persone qui puisse mettre en doute que ces réformes ne fussent les premières ressources qu' il falloit chercher. Necker. _ On dit, former un doute sur. * Un célèbre Avocat dit, en ce sens, faire un doute, qui n' est pas aussi sûr. "Les.... ne faisoient pas le moindre doute sur la justice de leurs droits, et sur l' évidence de leurs moyens. Me. Cochu. Ferrière dit aussi: "On ne fait aucun doute que le Souverain n' ait droit de restreindre la liberté et l' usage de la chasse. Dict. de Droit. C' est une locution usitée au Bârreau. _ Hors de doute. "C' est une chose hors de doute. Jeter des doutes dans l' esprit. "Le Gouverneur étoit obsédé d' Epicuriens, qui lui avoient jeté des doutes dans l' esprit. Fonten. _ Répandre des doutes sur les vérités les plus claires.
   Il n' y a pas de doute que; je ne doute pas que, il n' est pas douteux que vous ne deviez le faire. Ces expressions ayant toutes le même sens, ont toutes aussi le même régime, le subjonctif et la particule ne.
   SANS DOUTE, adv. Il peut être placé, ou devant, ou après le verbe; et dans les temps composés, entre l' auxiliaire et le participe. Sans doute, il le fera; il le fera, sans doute. "Le but de cet arrangement a sans doute été de prolonger le jour. Pluche, parlant des crépuscules. _ Il peut même se placer à la tête de la phrâse. "Sans doute, une haûte naissance est une prérogative illustre... mais ce n' est qu' un titre; ce n' est pas une vertu. Massillon. Il en est qui ajoutent à sans doute, la conjonction que, quand il est placé à la tête de la phrâse. Sans doute que vous l' avez fait par mégarde. Je n' oserais ni condamner, ni aprouver cette manière de parler. Voyez HEUREûSEMENT, qui est dans le même câs. _ L' Acad. dit que sans doute se joint quelquefois avec que, et cite un exemple.
   DOUTER, être dans l' incertitude. "Douter de tout; ne douter de rien. Je doute qu' il viène; je doute s' il viendra. _ Se douter, conjecturer, soupçoner. "Il ne se doutoit de rien. "Il se doutoit bien qu' on en viendroit là. "Je ne m' en doutois pas. _ On dit, d' un homme hardi à décider, ou à entreprendre, qu' il ne doute de rien. Cette locution est du style familier.
   DOUTER, ne se dit point des persones en régime. * "Il n' y a que S. Thomas, dont Luther ait voulu douter. Boss. "Ne doutez non plus d' elles que de moi. Voiture.
   Il doute de sa fille et de ses sentimens.
       Voltaire.. Zaïre.
"Je ne puis douter d' Almanzor. Th. d' Éduc. "Comment, repris-je, en faisant un pas en arrière, vous doutez de moi, Mademoiselle? Mariv. Ce dernier exemple est plus suportable: c' est un paysan qui parle.
   Rem. Le que après douter, régit le subjonctif. "Je doute qu' il veuille le faire. S' il est employé avec la négative, ou dans le sens interrogatif, on met devant le verbe régi, ne. "Je ne doute pas qu' il ne le fasse. Doutez-vous qu' il n' obéisse? _ Crébillon a manqué à cette règle. Il fait dire à Pharasmane, dans Rhadamiste:
   Doutez-vous, quels que soient vos services passés,
   Qu' un retour criminel les ait tous effacés?
Il faut, ne les ait tous éfacés. M. Necker retranche aussi la négative; et de plus, il met le futur de l' indicatif à la place du présent du subjonctif. "Je ne doute point qu' en suivant cette marche sage... cette grande affaire cessera pour toujours d' être un objet de débats. Il faut que cette affaire ne cesse, etc. Le même Auteur a mis le subjonctif et la négative avec mettre en doute. Cela n' est pas conséquent. _ L' Acad. ne met point d' exemple de phrâse négative, ou interrogative.
   Quelques Écrivains substituent à la conjonct. que et au subjonctif, la prép. de et l' infinitif. "Ils ne doutoient pas de se voir assiégés. Vert. "Ce Prince ne doutoit pas d' être admis dans la ville d' Orléans. Ce régime n' est pas assez autorisé. * Ne pas douter, pour, ne pas craindre, est surané. "St. Chrysostôme n' a pas douté d' appeller St. Jean la colonne de toutes les Églises. La Rue.
   2°. Si douter est suivi de la conjonction si, il régit le futur de l' indicatif. "Je doute s' il viendra. Avec les aûtres temps, on emploie que, plutôt que si: "Je doute qu' il soit venu. Avec la négative, on ne se sert pas non plus de si, mais de que. On ne dit point: je ne doute pas s' il viendra, mais, je ne doute pas qu' il ne viène. Dites-en de même du sens interrogatif.
   3°. * D' Ablancourt a fait douter actif, lui donant le sens d' ignorer, de ne savoir pas. "Je doute ce qu' on veut reprendre. * Molière l' a employé dans le sens de soupçoner.
   Sous couleur de changer de l' or, que l' on doutoit.
C. à. d., qu' on soupçonait d' être faux, ou de n' être pas de poids.
   3°. * Corneille dit, être à douter, pour être douteux:
   Outre que le succès est encore à douter.
Si cette locution a été aûtrefois en usage, elle n' y est plus aujourd' hui.
   5°. DOUTER, ne s' emploie point au passif, puisqu' il est neutre, ni impersonellement. "Il ne peut plus être douté de, etc. Journ. de Gen. Dites, on ne peut plus douter: l' aûtre locution est un vrai barbarisme.
   6°. SE DOUTER, ne régit point les persones, mais les chôses. On ne dit point, je me doute de lui, d' elle. On dit, je me doute de son dessein, de ce qu' elle veut faire. _ Il régit que et le subjonctif, ou l' indicatif, suivant que la phrâse est négative ou interrogative, ou bien, qu' elle est afirmative. "Je ne me doutois pas qu' il vînt: Pouvois-je me douter qu' il dût venir si-tôt Je me doutois bien qu' il viendroit m' ataquer. Mais dans le sens négatif ou interrogatif, on ne met pas la particule ne, comme avec douter actif. Vaugelas, dans une phrâse afirmative, met le subjonctif et la particule ne; double irrégularité. "Je me doute que cette mauvaise façon de parler ne soit particulière à une certaine Province de France. On dit, je ne doute pas qu' elle ne soit, et je me doute qu' elle est. C' est comme le verbe craindre, dont les régimes varient, suivant que le sens est négatif, ou positif.

DOUTEûSEMENT


DOUTEûSEMENT, adv. DOUTEUX, EûSE, adj. [Dou-teû-zeman, teû, teûse; 2e lon. 3e e muet.] Douteûsement, avec doute. "Il en parle douteûsement.
   DOUTEUX, 1°. Incertain, dont il y a lieu de douter. "Droit, succès douteux, afaire douteûse; réputation, probité douteûse. = 2°. Ambigu. "Réponse douteûse. = 3°. En parlant des persones, sur qui l' on ne peut compter. "Trois Juges sont pour moi, trois contre, les quatre autres sont douteux.
   Rem. 1°. Douteux, peut suivre ou précéder.
   D' un douteux avenir c' est trop s' inquiéter.
       Gress.
On pourrait dire aussi, d' un avenir douteux.
  J' abjurerois, et Phébus, et Minerve,
  S' il me falloit, pour de douteux succès,
  Passer ma vie en d' éternels accès.
      Rouss.
En prôse, des succès douteux, serait mieux.
  2°. Boileau aplique douteux aux persones, ce qui n' est pas trop suivant l' usage.
   Ainsi, toujours douteux, chancelant et volage,
   À~ peine du limon, où le vice m' engage,
   J' arrache un pied timide et sors en m' agitant,
   Que l' autre m' y rapporte, et m' enfonce à l' instant.
Douteux, apliqué aux persones, signifie celui dont on doute, et non pas, celui qui doute. _ Incertain, se dit des persones et des chôses; douteux, en ce sens, ne se dit que des chôses. Si Boileau avait parlé en prôse, il aurait dit probablement: "Ainsi, toujours incertain, chancelant et volage, etc. Voy. INCERTAIN.
   3°. Il est douteux que, a les mêmes régimes que douter. "Il est douteux qu' il le fasse. "Il n' est pas douteux qu' il ne le fasse. Voy. DOUTER, Rem. 1°. * "Il n' est pas douteux que si ces deux idiômes (la romane provençale et la romane française) eussent pu se méler et se fondre ensemble, notre Langue eût retiré de ce mélange une richesse, une harmonie, qui ne lui eussent rien laissé à envier à la Langue italienne, et qui eussent hâté sa perfection. Journ. de Mons. Je crois qu' il falait dire, n' eût retiré, etc.
   DOUTEûSES. Il y a en français, comme dans toutes les Langues, des syllabes longues; il y en a de brèves, et en plus grand nombre: il y en a enfin de douteûses, qui ne sont brèves ou longues que par leur position, par raport au reste de la phrâse. Si elles la terminent, elles sont longues; si elles se troûvent dans le cours de la phrâse, elles sont brèves. Ainsi, votre a la 1re douteûse. Si je dis, je suis votre serviteur, la 1re de votre est brève; et quand celui que j' ai salué me répond, je suis le vôtre, vôtre alors termine la phrâse; la 1re est longue. _ La même chôse arrive quelquefois à des syllabes, qui sont longues de leur natûre. On dit, un honnête homme, et alors la pênultième d' honnête est brève; mais si l' on dit, un homme honnête, cette même pénultième sera longue. D' OLIVET.

DOUVAIN


DOUVAIN, s. m. DOûVE, s. f. [dou--vein, doû-ve: 1re lon. au 2d, 2e e muet.] On apèle douves des planches servant à la construction d' un toneau, et douvain du bois propre à faire des doûves.

DOUX


DOUX, OUCE, adj. [Doû et devant une voyelle doûz, long; dou-ce, 2e e muet.] Qui fait une impression agréable à nos sens. "Le sucre, le lait, le miel sont doux. Orange douce, amande douce, etc. Il est oposé à aigre, amer, piquant, âpre ou salé. Douce haleine, doux parfum; voix douce; doux murmure; doux regard; avoir la peau douce. Doux ramage, lime douce, etc. _ On dit par extension, 1°. un air, un temps doux, qui n' est ni trop chaud, ni trop froid. Il fait doux. "Une douce température d' air. = 2°. Un doux zéphir, un petit vent frais et agréable; une pluie douce, qui tombe sans orage. = 3°. Il se prend pour tranquille. "Un doux someil, un doux repôs, le doux silence des bois. Mener une vie douce; être dans une situation assez douce; une douce mélancolie, douce langueur, mort douce. = 4°. Au figuré, en parlant de l' humeur et de l' esprit, humain, affable, clément. Et il est oposé à rude, farouche, sévère, violent: "Esprit, naturel doux, humeur douce. "Il faut qu' un Prince soit doux à ses sujets. Doux reproches, raillerie douce. = 5°. Agréable à l' esprit et au coeur. "Il est doux de vivre avec ses amis. "C' est une chôse bien douce que l' indépendance. = 6°. Il se dit des métaux, dont les parties sont bien liées et qui se plient aisément sans se casser. "Le fer le plus doux est le plus propre à faire l' acier. "Le cuivre fin est doux, mais l' alliage le rend aigre. = 7°. Doux se combine avec d' aûtres mots, et dans divers sens. _ Vin doux, qui n' a pas encore cuvé. _ Cheval doux, qui ne fatigue point le cavalier, ou qui n' est pas fringant, ni ombrageux. _ Voitûre douce, qui ne fatigue pas. _ Style doux, qui n' a rien de rude, qui est aisé et coulant. _ Vûe douce, qui a d' agréables repôs, des prairies, de petits bois à une mediocre distance. _ Billet doux, billet de galanterie. _ Faire les yeux doux, ou les doux yeux à une femme (le 1er est le meilleur), lui témoigner de l' amour, lui rendre des soins. _ Filer doux, soufrir patiemment une injûre par crainte, ou par respect, etc. On troûvera les autres significations, en cherchant les mots avec lesquels doux se combine.
   REM. 1°. Doux se plait à précéder. "Les doux accens, le doux murmure, la douce pente.
   Un docile ruisseau, qui, sur un lit pierreux,
   Tombe, écume et roulant avec un doux murmure,
   Des champs désaltérés ranime la verdûre.
       De Lille.
"On n' entendoit plus que le gazouillement des eaux ou la douce haleine des zéphirs. Télém. = Il est pourtant des ocasions où l' usage veut qu' il suive le substantif, et où il serait ridicule de le faire précéder. Doux air, doux temps, douce orange, douce amande, doux style, doux billet, etc. etc. choqueraient l' oreille. Doux cheval, douce voitûre ne l' ofenseraient pas moins. _ Tout ce qu' on peut dire en général, c' est que dans le style poétique et oratoire, on peut plutôt le faire marcher devant; et dans le style simple et familier le placer après.
   2°. Doux signifiant bon, clément, favorable, régit quelquefois la prép. à devant les noms. "Ulysse étoit doux à ses peuples, comme un père à ses enfans. Mde Dacier, Odyssée. Voy. n°. 4°.
   3°. Avec le v. être, impersonel, il régit la prép. de et l' infinitif. "Il est doux de jouïr dans la solitude des plaisirs innocens, que rien ne peut ôter aux Bergers. Télém. Voy. n°. 5°.
   Il est doux de trouver dans un Amant qu' on aime,
   Un Epoux que l' on doit aimer.
   Doux, humain, bénin. Voy. BÉNIN.
   En style proverbial, avaler doux comme lait, se dit d' un homme, qui par bassesse d' âme soufre un afront sans se plaindre, ou d' un homme vain, qui ajoute aisément foi aux flateries les plus excessives, ou d' un homme crédule et simple à qui l' on fait acroire les chôses les moins vraisemblables. _ Entre doux et hagard, moitié rude et moitié doux. "Des yeux entre doux et hagard. _ Il l' a regardé entre doux et hagard, avec un mécontentement déguisé sous une aparence de douceur.
   Tout doux! Interjection. Arrêtez, prenez garde. Tout doux! Tout doux, s' il vous plait. Ne vous emportez pas. Modérez-vous. "Tout doux, monsieur, répondit l' aûtre avec chagrin, laissons-là les réflexions sur le commis. Mariv.

DOUZAIN


DOUZAIN, s. m. DOUZAINE, s. f. DOUZE, adj. et subst. [Le peuple, en certaines Provinces, prononce douge, dougeaine, dougième, &c. _ Pron. Dou-zein, dou-zène, dou-ze: 2e è moy. au 2d, e muet au dern.] * Douzain est une anciène pièce de monoie, ainsi apelée de ce qu' elle valait douze deniers. = Douzaine, nom de nombre collectif. Assemblage de chôses de même natûre au nombre de douze. "Une douzaine de chemises, d' assiètes; nous étions une douzaine à table; vendre... à la douzaine; par douzaine. = On dit figurément (st. famil.) à la douzaine, d' une chôse, d' une persone, de peu de valeur, de peu de considération. "Poète, Peintre, Médecin, Avocat à la douzaine. Racine dit à Mrs de Port-Royal, qui n' étaient pas tous des Pascal. "Vous croyez dire quelque chôse de fort agréable... quand vous l' avertissez. (M. Chamillard) de ne pas suivre le grand nombre, de peur d' être un docteur à la douzaine. On voit bien que vous vous éforcez d' être plaisants, mais ce n' est pas le moyen de l' être. = Au contraire, quand on veut louer, on dit, qu' il ne s' en trouve pas à la douzaine, qu' il n' y en a pas treize à la douzaine.
   DOUZE, le second nombre après dix. Trév. Nombre, qui contient dix et deux. Acad. Les douze Apotres; les douze mois de l' année. "Nous étions douze à table. = S. m. Il se prend pour douzième, "le douze du mois, le douze de la lune. Louis douze. = Il n' est guère d' usage en ce sens-là que dans ces exemples. Acad.
   On dit, en termes de Libraire, un livre in-douze, ou un in-douze, lorsque la feuille est pliée en douze feuillets, ce qui fait vingt-quatre pages.

DOUZIèME


DOUZIèME, adj. et subst. DOUZIèMEMENT, adv. [2e è moy. 3e e muet: dou-ziè--me, meman.] Adj. le douzième mois, la douzième année. = Subst. "Le douzième du mois. On dit comunément, le douze. "Il est le douzième de la troupe. "Il a un douzième; il est pour un douzième dans cette société, dans cette afaire.

DOXOLOGIE


DOXOLOGIE, s. f. [dox-sologi-e: 4e lon. 5e e muet.] Terme de Rubriques. Il se dit du Gloria Patri et du dernier verset d' une hymne.

DOYEN


DOYEN, s. m. DOYÉNÉ, s. m. [doa-ien; en n' a pas le son d' an. Doa-ié-né: 2e et 3e é fer. _ On écrit comunément doyenné avec 2 n: mais cette ortographe est contraire à la prononciation. En écrivant de cette manière, il faudroit prononcer do-ia-né, comme on prononce ennuyer (anuié); la 1re n se liant avec l' e qui précède, pour changer cet e en a, et la 2de avec l' é ou l' u, qui suit. L' usage ordinaire a introduit la même faûte dans ennemi, où, par la même raison, on ne doit mettre qu' une n et un acc. aigu sur l' é, énemi. Voy. ce mot.] Doyen, est 1°. Le plus ancien en réception dans une compagnie. Le Doyen du Parlement, des Cardinaux, ou du Sacré Collège. Doyen de l' Académie Française, etc. = 2°. Il se prend quelquefois pour le plus ancien selon l' âge; mais il ne se dit que dans le style familier et badin. "Je vous croyois plus vieux. Je vous croyois mon doyen, et je suis le vôtre. = 3°. Titre de dignité dans plusieurs Chapitres, et dans les Facultés des Universités. "Le Doyen de Notre-Dame. "Le Doyen de la Faculté de Théologie, ou de Médecine, etc.
   DOYÉNÉ, ne se dit que dans le 3e sens de Doyen, et seulement dans les Chapitres. La dignité de Doyen, et en quelques endroits, la maison du Doyen.

DRACHME


DRACHME, Acad. DRAGME, Trév. Rich. Port. s. f. [On prononce dragme, et il est convenable de l' écrire de même. Le respect pour l' étymologie et pour l' ancien usage a fait préférer le 1er.] 1°. Espèce de monoie d' argent, dont se servaient les Grecs, et qui pesait la huitième partie d' une once. = 2°. On dit aujourd' hui dragme, ou grôs, pour signifier ce poids. "Une dragme de rhubarbe; deux dragmes de séné.

DRAGÉE


DRAGÉE, s. f. DRAGEOIR, s. m. *DRAGIER, s. m. [Drajé-e, joar, gié; 2e é fer. au 1er et au der.] 1°. Petite confitûre de sucre durci, où l' on enferme quelque petite graine, comme anis, amandes, pistaches, etc. Trév. Le Rich. Port. ajoute, ou quelque morceau de canelle, de citron, d' orange, etc. "Amande, pistache, aveline, et petits fruits couverts de sucre durci. Acad. = 2°. Le menu plomb, dont on se sert pour tirer aux oiseaux. Grosse, petite, menue dragée. = On dit d' un fusil, qui ne porte pas son plomb bien serré et bien ensemble, qu' il écarte la dragée. _ On le dit figurément (st. fam.) de celui qui laisse échaper de petites parties de salive en parlant. "Il ne fait pas bon être près de la Chaire, quand cet Abé prêche: il écarte furieûsement la dragée.
   DRAGEOIR, boîte à dragée. Trév. Petite boîte où les Dames mettent les dragées. L' Acad. ne le dit que d' une boîte, ordinairement d' argent, dans laquelle on servait autrefois des dragées sur la fin du repâs. _ * On a dit autrefois dragier, d' une boîte à bonbons. "À~ la fin du 16e siècle, les dragées vinrent tellement à la mode, que chacun avoit son dragier. Le Gendre. Plusieurs aujourd' hui, disent bonbonière. Mais, boîte à bonbons vaut mieux. On ne dit plus drageoir ni dragier.

DRAGEON


DRAGEON, s. m. DRAGEONER, v. n. [Drajon, joné; 3e é fer. _ L' e qui est devant l' o est entièrement muet: il n' est là que pour doner au g un son doux, qu' il n' a pas devant l' o.] Drageon est une boutûre ou un bourgeon, qui pousse au pied des arbres et des plantes. Drageoner, c' est pousser des drageons.

DRAGON


DRAGON, s. m. 1°. Espèce de monstre fabuleux. "Le dragon, qui gardoit le jardin des Hespérides. = 2°. Figurément et hyperboliquement, persone maligne, d' humeur fâcheûse et acariâtre. Enfant mutin et méchant. "Cette femme est un vrai dragon. "Cet enfant est un petit dragon.
   Ces dragons de vertu, ces honêtes diablesses.
       Mol.
Suivant le Rich. Port. on dit, en ce sens, dragonne. L' Acad. ne le dit point, et l' usage ne l' a point admis. On dit toujours dragon. = Le dragon infernal, le démon. = 3°. Tache qui vient dans la prunelle des yeux des hommes et des chevaux. "Avoir un dragon dans l' oeil. = 4° - Dragons, sorte de troupes, qui combattent tantôt à pied, tantôt à cheval. "Colonel, Capitaine, Régiment, Compagnie de Dragons. = 5°. * Dragons, était un mot favori de Mde. de Sévigné, pour exprimer des soucis, des craintes, des inquiétudes. D' après cette illustre Dame, et ce parfait modèle du style épistolaire, quelques persones ont adopté ce mot, en ce sens.

DRAMATIQUE


DRAMATIQUE, adj. *DRAMATURGE, s. m. DRAME, s. m. [Dern. e muet dans les trois.] Drame est un nom générique, qui comprend la Tragédie et la Comédie "Les règles du Drame. = Depuis quelque temps il est devenu un nom spécifique, pour signifier une espèce particulière de pièce de Théâtre, qui n' est ni Comédie, ni Tragédie, ni Tragi-Comédie. On l' a assez bien qualifié, en l' apelant Tragédie Bourgeoise. "Les Drames noirs et à l' anglaise sont devenus fort à la mode. "Le Drame est un genre bâtard, contre lequel on s' est toujours récrié, contre lequel on se récrie encôre.
   DRAMATIQUE se dit dans le sens générique de Drame, des pièces faites pour le Théâtre. Poëme, pièce, genre, Poète Dramatique. _ S. m. Il réussit dans le dramatique. = Par extension, il se dit de tout ouvrage, où l' Auteur quite le récit, pour faire parler les personnages qu' il introduit. "Homère, quoique Poète Épique, a doné le premier modèle du Dramatique. "Ce qu' on trouve le plus à dire dans la Henriade, c' est ce dramatique vif, animé, éloquent, naturel, qui produit de si grandes beautés dans les autres Poèmes Épiques. = Dans le Mercûre, on le dit substantivement des Auteurs. "On trouve ensuite une notice sur trois dramatiques Grecs, Philoclès, Artidamas et Pratinas.
   DRAMATURGE est un mot nouveau qu' une juste critique a inventé. Auteur de Drame. Il se prend en mauvaise part, et ne se dit que dans le 2d sens de Drame. M. Rigoley de Juvigny dit dramatiste, mais celui-ci n' est pas aussi usité, ni aussi heureûsement inventé.
   DRAMOMANIE, s. f. Autre mot nouveau, bon pour le style critique.
   Où, malgré Momus et Thalie,
   La lugubre Dramomanie,
   Au Parterre trop ennuyé
   De cette longue épidémie,
   Inspire plus que la pitié.
       Bodkin, Mercûre.

DRAP


DRAP, s. m. [On ne prononce point le p, même devant une voyelle.] 1°. Espèce d' étofe de laine, Acad. dont on fait les habits d' hiver. Trév. Cette addition n' est pas juste; car il y a des draps légers dont on se sert en printemps et en automne. "Drap fin, grôs drap, habit de drap, etc. = Quand drap est mis seul, on l' entend toujours d' un drap de laine. Aûtrement on dit, drap d' or, drap de soie. = Drap de pied, pièce de drap, de velours, etc. qu' on met sur le prié-dieu des persones du premier rang, et qui leur sert de marchepied. = Drap mortuaire, pièce de drap ou de velours noir, etc. dont on couvre la bière, ou le cénotaphe, au service des morts. = 2°. Drap, Linceul, grande pièce de toile, qu' on met dans le lit pour y coucher. _ Se mettre entre deux draps, se coucher, se mettre au lit.
   On dit, proverbialement, (n°. 1°.) Tailler en plein drap, avoir toutes les facilités pour travailler, pour traiter. "Dans nos conversations, nous tâillons en plein drap: nous alons au mieux: sur le terrain, on s' arrange le moins mal qu' il est possible. Pluche. _ On dit d' un homme qui ne paye pas ce qu' il a acheté, ou qui retient ce qu' il a vendu, qu' il veut avoir l' argent et le drap. _ La lisière est pire que le drap; les habitans des frontières de certaines Provinces, auxquelles on atribûe certains défauts, sont pires que ceux du dedans du pays. Voyez AûNE. = (n°. 2°.) Entre deux draps; dans un lit. "Avec tant de foiblesse, comment partir pour la guerre? Le remède est trouvé: on court la poste entre deux draps. Coyer. _ Ce malade, cet enfant, ne se soutient non plus qu' un drap mouillé; il ne peut se soutenir. _ Mettre quelqu' un en beaux draps blancs; (ironiquement) en parler désavantageûsement.

DRAPEAU


DRAPEAU, s. m. [Drapo, 2e dout. au sing.; elle est longue au plur. Drapeaux.] Drapeau est, 1°. un vieux morceau de linge, ou d' étofe. Ramasser des drapeaux. "Le papier est fait avec de vieux drapeaux de linge. _ Drapeaux se dit aussi de ce qui sert à emmailloter un enfant. = 2°. Enseigne d' un Régiment, d' un batâillon. "Dans chaque Régiment, il y a deux drapeaux par batâillon.
   On dit, figurément, dans le beau style, se ranger, ou combatre sous les drapeaux de...
   Mais de la vérité rigide
   Encor plus vivement épris,
   Sous ses drapeaux seuls tu te ranges:
   Et ce ne sont point les louanges,
   C' est la vertu que tu chéris.
       Rouss.

DRAPER


DRAPER, v. a. DRAPERIE, s. f. DRAPIER, s. m. [Drapé, peri-e, pié; 2e é fer. au 1er et dern. e muet au 2d, dont la 3e est longue.] 1°. Draper, au propre, c' est couvrir de drap noir, les carrosses, les litières, les chaises à porteurs, dans le temps du deuil. "Draper un carrosse, une chaise. _ V. n. "Les Princes, les Ducs drapent. "Le Roi drape de violet. = 2°. En Peintûre, draper une figûre, en représenter les habillemens. 3°. Figurément, railler fortement. "On l' a bien drapé. _ Il n' est que du style familier.
   DRAPERIE est, 1°. Manufactûre de drap, diverses sortes de draps. "Travailler en draperie. "Comerce de draperie. = 2°. En Sculptûre et en Peintûre, représentation des habillemens. "Il faut que les draperies indiquent le nu aux principaux atachemens. On ne le dit guère au singulier dans ce 2d sens, ni au pluriel, dans le 1er.
   DRAPIER ne se dit que d' un Fabricant, ou d' un Marchand de drap.

DRâVE


DRâVE, s. m. et fém. [1re long. 2e e muet.] Rivière considérable d' Alemagne, qui se jette dans le Danube. _ Suivant La Touche, ce mot est de deux genres, mais le féminin est le plus usité, c' est celui qu' a employé Boileau.
   Et de la Drâve soumise
   Jusqu' à Paris nous chercher.

DRE


DRE: Terminaison de certains verbes de la 4e conjugaison: répandre, entendre, craindre, peindre, joindre, répondre, absoûdre, etc. _ Il faut observer sur ces verbes, qu' il est plus régulier de conserver que de suprimer le d dans les 1ers et 2des persones du prés. de l' indicatif et de l' impératif, parce que ce d est la lettre caractéristique de ces verbes. "Je répands, tu répands, répands; j' entends, tu entends; entends; je réponds, tu réponds; réponds, etc. = Exceptez ceux en aindre, ou eindre; craindre, peindre, joindre, etc. et ceux en oûdre, absoûdre, réjoudre, etc. Ils perdent le d aux 1re et 2e persones, et à la 3e ils le changent en t: "Je crains, peins, joins, absous, etc. Il craint, peint, joint, absout, etc.

DRèCHE


DRèCHE, s. m. [1re è moy. 2e e muet.] Marc de l' orge, qui a servi à faire de la bière.

DRESSER


DRESSER, v. a. DRESSOIR, s. m. [Dré--cé, dré-soar: 1re é fer. Devant l' e muet, cet e devient moyen: il dresse, dressera: prononcez drèce, drècera.] 1°. Lever, tenir droit. Dresser la tête; cheval, qui dresse les oreilles; qui se dresse sur les pieds de derrière. _ Faire tenir droit; dresser un mât, des quilles, etc. = 2°. Ériger, élever. "Dresser des statûes, des trophées, des autels. _ Dresser un lit, le monter; une tente, la tendre; un échafaud, le construire. = 3°. Aplanir; Dresser une terrasse, une alée, un parterre. = 4°. Faire, composer, mettre par écrit: Dresser le plan d' un ouvrage, la minute d' un acte; un projet, des articles, un contrat, une requête, un mémoire, etc.
   5°. Dresser, instruire, former, façoner. Dresser un écolier, un soldat, un cheval, un chien, etc.
   6°. Dresser, neutre, se dit figurément, dans cette phrâse. "Les cheveux lui dressèrent à la tête, tant il eut horreur de ce qu' il entendoit. "Ce récit fait dresser les cheveux à la tête. "Ces objets faisoient dresser les cheveux de Télémaque sur sa tête. "Ses cheveux se dressent sur sa tête, quand il aborde le noir séjour de Pluton. Télém.
   Rem. 1°. Dans le sens du n°. 5°. il régit à devant les noms et les verbes. "Dresser un enfant à la vertu, à la piété. "Les chèvres, qu' on avoit dressées à la divination. Fonten. "On l' a dressé à répondre en normand.
   2°. Suivant le P. Bouhours, on dit dresser des embuches, et tendre des pièges. L' Acad. dit pourtant, dresser un piège à quelqu' un. A-t' elle manqué d' atention et de critique sur ce point, ou a-t' elle désaprouvé la remarque de Bouhours? C' est ce qu' il est dificile de savoir. Il paraît qu' avec pièges, tendre est plus usité que dresser.
   3°. * Se dresser, pour se lever; est un gasconisme. En Provence, on dit: dressez-vous; pour dire, levez-vous; comme on dit, rester droit, pour rester debout. _ On ne dit, se dresser, que quand on est courbé. "Vous vous courbez: dressez-vous. Ac.
   DRESSOIR, Espèce de bufet qu' on dresse à côté, pour le service d' une table, Trév. où l' on met le vin, les verres, etc. Rich. Port. _ L' Acad. ne met pas ce mot.

DRILLE


DRILLE, s. m. et f. DRILLER, v. n. DRILLIER, s. m. DRILLEUR, adj. [Dri-glie, glié, glieur; mouillez les ll; 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Drille est masc. dans ces phrâses du style fam. "C' est un bon drille; un bon compagnon; un pauvre drille, un pauvre malheureux; un vieux drille, un soldat, qui a vieilli dans le service, ou un vieux libertin. _ Drille, signifiait autrefois un soldat. = Il est fém., pour signifier un vieux chifon de toile qui sert à faire du papier = Drillier, Chifonier. Trév. Celui qui ramasse les vieux chifons et en fait comerce. Rich Port. L' Acad. ne met pas ce mot.
   DRILLER, courir, aler vite et légèrement. Il est bas et populaire. "Voyez comme il drille.

DRILLEUX


*DRILLEUX, EûSE, adj. Mal vétu, qui n' est couvert que de lambeaux. _ Il n' est que dans le Dict. de Pomey. Il n' est bon que pour le burlesque.

DROGMAN


DROGMAN, s. masc. [Trév. renvoie à Dragoman, qui est aujourd' hui un barbarisme.] Nom qu' on done aux Interprètes et aux Truchemens, dans les Échelles du Levant, et qui parait souvent dans les Relations de ce pays.

DROGUE


DROGUE, subst. fém. DROGUER, verbe act. [Droghe, ghé; 2e e muet au 1er, é fer. au 2d. l' u est muet et ne sert qu' à doner au g un son fort qu' il n' a pas devant l' e.] Nom commun à toute sorte d' épiceries, dit Trév. Sorte de marchandise que vendent les Épiciers, dit l' Acad. et dont le plus grande partie sert à la Médecine, disent l' un et l' aûtre. C' est de là que les Épiciers sont apelés Droguistes. À~ proprement parler, drogue ne se dit que de ce qui sert à la Médecine. On ne dit point du sucre, du café, du cacao, du poivre même, que ce sont des drogues. On le dit du sené, de la rhubarbe, de la casse, de la manne, etc. _ En style proverbial, on dit, faire valoir la drogue, c. à. d. l' ouvrage, l' afaire, la marchandise. = On apèle aussi (dans le st. fig. famil.) drogue, des chôses mauvaises en leur espèce. "Ce marchand ne vend que de la drogue.
   DROGUER, Médicamenter, se prend en mauvaise part, et se dit dans le style chagrin et critique: c' est doner trop de remèdes. "Depuis long-temps on ne fait que le droguer. "Il est dangereux de se trop droguer. _ St. familier.

DROGUERIE


DROGUERIE, s. f. DROGUIER, s. m. DROGUISTE, s. m. [Drogherie, ghié, ghiste. 2e e muet au 1er, é fer. au 2d: l' u est muet. Voy. Drogue.] Droguerie est un terme générique, qui signifie toute sorte de drogues. Commerce de droguerie. Impôt mis sur la droguerie. = Droguier est 1°. une boîte portative où il y a diverses drogues, onguents, etc. = 2°. Un cabinet, ou armoire, où l' on met diférentes sortes de drogues ou de curiosités de l' Histoire Naturelle. "Il a un beau droguier. = Droguiste, Marchand de drogues. En plusieurs Villes, nommément à Marseille, on done ce nom aux Épiciers.

DROGUET


DROGUET, s. m. [Droghè: 2e è moy. l' u est muet. Voy. Drogue.] Étofe de laine de bas prix. Trév. Étofe faite ordinairement de laine et de fil. Acad. Rich. Port. "Il est vétu de simple droguet. "Il n' avoit qu' un habit de droguet.

DROIT


DROIT, OITE, adj. DROIT, s. m. et adv. DROITEMENT, adv. [Droa, monosillabe, droa-te, teman; 2e e muet.] Droit est, 1°. ce qui ne penche ou ne décline, ni d' un côté, ni d' aûtre. Trév. qui n' est point courbé, et qui va d' un point à un aûtre par le plus court chemin. Acad. Le Rich. Port. réunit les deux définitions: celle de Trév. me parait préférable. "Ligne droite. "Cette rûe est fort droite: le droit chemin, en droite ligne. "Ce mur n' est pas droit, il penche d' un côté. = 2°. Qui est oposé à gauche. "Le bras droit, la main droite. = Le fém. s' emploie substantivement. "Prendre sur la droite. "Doner à quelqu' un la droite, le mettre à sa droite pour lui faire honeur. Et adverbialement; touner à droite, se placer à droite, à main droite.
   Rem. On dit à droite et à gauche. Le Dictionaire de Trév. et plusieurs Écrivains disent à droit.
   Les voyageurs sans guide, assez souvent s' égarent,
   L' un à droit, l' autre à gauche.       Boil.
"Tel Ulysse et ses compagnons poursuivent les Princes dans la salle, frappant à droit et à gauche. Mde. Dacier, Odyssée. "À~ droit est un puits qui est à sec. Miss. du Lev. "À~ chaque globe il y a deux ailes, l' une à droite, l' autre à gauche. Ibid. _ Ces Auteurs ont cru sans doute que l' adv. à droit signifiait au côté droit; mais ceux qui disent à droite pensent, avec plus de fondement, que cet adverbe signifie à la main droite. _ Il peut se faire aussi que comme l' e de droite s' élide dans cette expression à droite et à gauche, plusieurs de ces Auteurs aient cru, d' après la prononciation, qu' on dit à droit. = Depuis quelque temps, plusieurs, et les Militaires sur-tout, disent de droite et de gauche. "Il falloit passer un défilé étroit et couvert de palissades de droite et de gauche. Hist. d' Angl. _ L' usage n' a pas encôre admis cette manière de parler.
   3°. Suivant l' Académie, droit signifie quelquefois qui n' est pas couché, qui est debout. "Se tenir droit sur ses pieds. Demeurer droit en son séant. "Cette figûre serait mieux droite que penchée. _ Ce sont là des phrâses consacrées par l' usage, et qui ne me paraissent pas tirer à conséquence~ pour d' aûtres. Je crois toujours que, tenez-vous droit, demeurez, et sur-tout, restez droit: "Il y avoit tant de persones assises, les aûtres étoient droites, sont autant de gasconismes, et qu' il faut dire debout. "Mansfeld expira droit, apuyé sur deux domestiques. Dict. Hist.
   4°. Droit, au figuré, juste, équitable, sincère. "Homme droit et incorruptible: coeur droit, ame droite, intention droite, la droite raison. _ Avoir l' esprit droit, le sens droit, penser juste sur chaque chôse.
   DROIT, s. m. 1°. Ce qui est juste. "Cela est contre tout droit et raison, contre le bon droit. = 2°. Justice: Faire droit à chacun, conserver le droit des parties. = 3°. Loi écrite ou non écrite. Droit divin, humain, positif, commun. Droit naturel, droit des gens, droit civil, droit canon. Droit coutumier, droit écrit. Droit romain, droit français. Droit canon, droit canonique (Synon.) M. l' Ab. Roubaud troûve entre ces deux mots cette diférence, que le 1er est le corps, la législation même des Canons; le 2d, la chôse établie par les canons. _ Vous décidez par le Droit canon, une question du Droit canonique. Ce qui est canonique a raport à la Loi et le canon est la Loi même. _ Cette distinction est neuve. = 4°. Jurisprudence. tudier, savoir, enseigner le Droit. Docteur en droit, etc.
   Rem. I. Être en droit régit de et l' infinitif. "C' est une bonté de la Providence, que nous fassions trève aux tristes réflexions qui seroient en droit de nous acabler journellement. Sév. _ On dit, dans le même sens, être en plein droit, se croire en droit, ou en plein droit de faire. "Se croire en plein droit de se faire, par violence, justice à soi-même. Télém.
   On dit prendre droit de, et faire droit sur, (s' apuyer). * Bossuet met avec le premier par, au lieu de la prép. de. "Non content de les écouter, je prends droit par leur témoignage. Il falait dire, de leur témoignage. _ "Faisant droit sur ce principe, ils contestent opiniâtrément. Anon.
   II. Être aux droits de est une expression du Palais. "Cette manière de modéler leurs actes de législation sur les formules romaines, ne prouve-t-elle pas que nos Rois se crurent aux droits des Empereurs? Moreau. "Un des moyens qu' employèrent les nouveaux Souverains des Gaules, pour faire respecter leur autorité, fut de se faire regarder comme étant aux droits des Empereurs. Id. = Chacun en droit soi, ou plutôt endroit soi, est encôre une locution du Palais, qui n' est pas du langage commun. Bossuet s' en sert souvent, mais il n' est pas à imiter en cela. = 5°. Droit, autorité, pouvoir. "De droit, de plein droit. Droit de vie et de mort. "Il a droit, ou il est en droit de faire, etc. = Prétention fondée. "Avoir droit sur... ou là-dessus. "Poursuivre son droit, renoncer à son droit. Faire valoir ses droits, etc. _ C' est le droit du jeu (st. prov.), c' est l' ordre, l' usage. * Etre à droit de jeu, pour, à deux de jeu est un gasconisme. _ Le Prov. dit: où il n' y a rien, le Roi perd ses droits; il est inutile de demander le payement de ce qui est dû à des gens insolvables. = Prérogative, privilège: Droit d' ainesse, de bourgeoisie, etc. = 6°. Droit se dit des impositions. Droit sur la viande, le vin, le bois, etc. Payer ou frauder les droits. = 7°. Salaire qu' on taxe pour certaines vacations. Droit de signatûre, de contrôle, de consultation.
   À~ tort ou à droit, adv. sans examiner si une chôse est juste ou injuste. _ À~ droit ne se dit pas tout seul. On ne dit pas il l' a fait à droit, pour dire avec raison, et parce qu' il avait droit. On l' emploie toujours à la compagnie de à tort. "Il le veut ainsi, à tort ou à droit: il ne nous importe. Bossuet. "Il n' est pas possible qu' il s' empêche d' en parler, soit à droit, soit à tort. Boil. _ Il vaut mieux qu' à tort précède.
   * Fontenelle a dit: "À~ quel droit prétends-tu nous juger? On dit, à quel titre et de quel droit? le neveu a imité l' oncle.
   À~ quel droit voulez-vous qu' un tel manque d' estime.
   S' il est gloire pour elle, en moi deviéne crime?
       Corn. Atila.
À~ bon droit, adv. avec raison, avec justesse~. "C' est à bon droit que je me plains.
   "Vous gémissez pathétiquement, et pleurez à bon droit sur l' abomination de la désolation qu' anonce la Philosophie moderne et diabolique, en versant, comme elle fait, le poison de l' indépendance et de l' irréligion, dans le coeur de nos jeunes gens. Let. de Piron à M. Tanevot.
   REM. Avoir droit et avoir raison ne sont pas synonimes. L' un se raporte à la justice, l' aûtre à la vérité. "J' ai raison de le dire: J' ai droit de le faire. De plus, avoir raison se dit sans régime, et avoir droit, toujours avec régime. * Le P. Paulian a mis l' un pour l' aûtre. "Galilée regarde la gravité des corps sublunaires, comme une force uniforme, lorsqu' ils ne tombent que des environs de la Terre, etc. il a droit, etc. Traité de paix entre Desc. et Newt. _ Il falait dire: il a raison.
   DROIT, adv. DIRECTEMENT. Aler droit au but; aler tout droit. Tirer, viser droit. "Il lui dona droit dans l' oeil. = Figurément, aler droit à ses fins; aler droit en besogne. "Il ne va pas droit: il n' agit pas avec droitûre. = Familièrement, je vous ferai marcher droit, charier droit: je vous ferai bien faire votre devoir.
   DROITEMENT, adv. Équitablement, ou judicieûsement. "Marcher droitement en toutes chôses. Penser droitement. "Il juge droitement de tout. Acad.
   Rem. Ce mot ne déplaisait pas au Père Bouhours. Juger droitement: marcher droitement, selon l' Évangile. Bossuet l' a employé. "Ils ne peuvent pas se vanter d' aller droitement. Et Mde de Sévigné. "On dit que l' on sent de la chair fraiche dans le pays de Quanto (Mde de Montespan); on ne sait pas bien droitement où c' est. Là il signifie certainement. _ L' Acad. avait dabord dit, que ces façons de parler vieillissaient~. Dans la dern. édit. Elle les met sans remarque. Cependant elles ne sont pas plus usitées qu' elles l' étaient alors. = Ce qu' il y a de plus sûr, c' est qu' on ne le dit pas dans le propre. = Trév. lui fait signifier, d' une manière droite, directement vis-à-vis. Il est vieux en ce sens. On dit, aler droit, viser droit, et non pas droitement; et dans le sens d' équitable, de juste, on dit, avec droitûre, ou avec justesse.

DROITIER


DROITIER, IèRE, adj. [Droa-tié, tiè--re; 2e é fer. au 1er, è moyen et long au 2d.] Qui se sert de la main droite. Trév. Acad. Le Rich. Port. ajoute ordinairement, et cette adition est nécessaire. _ Il est oposé à gaucher. "Il est droitier, elle est droitière. = Ce mot est moins usité que celui de gaucher, parce que le plus grand nombre étant de ceux qui sont droitiers, on ne le remarque pas, et l' on n' en parle pas comme étant une chôse commune et ordinaire.

DROITûRE


DROITûRE, s. f. *DROITURIER, IèRE, adj. [2e lon. au 1er 3e e muet au 1er, é fer. au 2d, è moy. et long au 3e; re, rié, riè--re.] Droitûre, équité, justice, rectitude. Droitûre de coeur. Agir avec droitûre. Droitûre d' intention. "Cela est contre toute droitûre et équité. = Le Père Bouhours remarque avec raison, que droitûre se dit plutôt du coeur que de l' esprit. Il ajoute qu' il est pourtant des Ecrivains, qui emploient ce terme dans le sens qui va à~ l' étude et aux conaissances. _ L' Acad. n' en done pas d' exemple, et je ne crois pas que l' usage lui done cet emploi. Quoiqu' on dise, avoir l' esprit droit, le sens droit, on ne dit point, droitûre d' esprit, encôre moins droitûre de sens. On dit, justesse d' esprit; en parlant du sens, on ne dit, ni justesse, ni droitûre. "Dans ce langage, il y a autant de justesse d' esprit, que de droitûre de coeur. _ Ce qui est encôre plus sûr, c' est que droitûre, quand il est seul et sans régime, ne se dit qu' en morale. On dit agir avec droitûre; on ne dit point penser, ou juger avec droitûre.
   En droitûre, adv. Avec la prép. en, ce mot change de signification, et se dit dans le sens propre de droit, adjectif. "Envoyer, écrire en droiture; cet avis ne nous est pas venu en droiture; directement, par la voie ordinaire.
   *DROITURIER, amateur de la droitûre, de l' équité. C' est un vieux mot, qui n' a pas même été fort en usage. "Celui qui gouvernoit alors, étoit juste et droiturier. _ Un Auteur très-moderne l' a employé depuis peu. "Ce n' est point un mâtin ébourrissé qui en imposeroit à une tête aussi droitûrière que celle-là. Le M. de M...

DRôLE


DRôLE, adj. DRôLEMENT, adv. DRôLERIE, s. f. DROLESSE, s. f. [1re lon. aux 3 1ers, 2e e muet aux 3 1ers, è moy. au der; le, leman, le-ri-e, lèce.] Drôle, est 1°. Gaillard, plaisant. "Il est fort drôle; conte fort drôle: Voilà qui est drôle. Il n' est que du style familier. _ S. m. "Un drôle de corps, un homme fort plaisant. = 2°. Homme fin et rusé, dont il faut se défier: "C' est un drôle. = 3°. En parlant des enfans: petit drôle, petit vaurien. _ En parlant des hommes faits, terme de mépris; insolent, maraud, ou homme de néant. "Vous êtes un drôle. "Mon histoire étoit celle d' un paysan, d' un petit drôle, rencontré sur le Pont-Neuf. Mariv.
   Rem. 1°. Avec un ou ce, il régit la prép: de: "Un drôle de Poète: "Nous sommes de drôles de têtes. Linguet. "Ce drôle de laquais. "Ayez toujours un livre dans votre sac et sur votre toilette; soutenez que vous aimez la lecture avec passion, et vous passerez bientôt pour la personne la plus instruite. _ Voilà une drôle de manière d' être savante: elle me convient beaucoup. Th. d' Educ.
   2°. DROLESSE, n' est pas le fém. de drôle. On ne le dit point dans les deux premiers sens de cet adjectif. On ne dit point une femme drolesse, pour dire, une femme plaisante, ou rusée. On dit drôle pour le premier sens; on ne le dit point dans le 2d. _ Une drolesse, se dit d' une femme de mauvaise vie. Il faut donc prendre garde comment, et à l' égard de qui on emploie ce mot.
   DRôLEMENT, d' une manière drôle. Drôlerie, chôse drôle, trait de boufonerie. "Il s' est tiré drôlement d' affaire. "Il a conté cela fort drôlement. "Voilà une plaisante drôlerie. "Il dit, il a fait cent drôleries. Ces mots ne sont que du style familier.

DROMADAIRE


DROMADAIRE, s. m. [Dromadère; 3e è moy. 4e e muet.] Espèce de chameau.

DRU


DRU, ÛE, adj. DRU, adv. [2e lon au 2d.] Dru, est 1°. Fort et vigoureux, en parlant des petits oiseaux. "Ces moineaux sont drus; drus comme père et mère. = 2°: Vif, gai, en parlant des enfans. "Ces enfans sont drus: cette fille est déjà drûe. "On se nourrit des Anciens, et quand on croit marcher tout seul, on les maltraite; semblable à ces enfans drus et forts d' un bon lait, qui battent leur nourrice. La Bruy. _ Par extension, on le dit des hommes. "Vous êtes bien dru aujourd' hui; vous voilà bien dru. = 3°. Epais, en parlant de blés, des bois. "Ces blés sont fort drus; l' herbe est bien drûe dans cette prairie. "Ce petit bois est dru. _ Par extension, pluie drûe et menue.
   DRU, adv. En grande quantité, et fort près à près. "Ces bleds sont semés bien dru. "La pluie tomboit dru et menu; les balles de mousquet tomboient dru et menu. Et proverbialement, dru comme mouches.

DRUIDE


DRUIDE, s. m. [Dru-ide, en 3 syllabes, et non pas drui-de, en 2 syll. seulement.] Nom des anciens Prêtres Gaulois. _ En style familier, vieux druide, homme fort âgé, expérimenté et rompu dans les afaires.

DRYADE


DRYADE, s. f. Nymphe des bois.

DU


DU, s' écrit sans accent, quand il est article, et il prend l' accent circonflexe, quand il est participe passif du verbe devoir. "À~ la sortie du bois; les richesses du Pérou. "Donnez-lui ce qui lui est .


, s. m. 1°. Ce qui est dû. "Je ne demande que mon dû.
   --- Simonide promit. Peut-ètre qu' il eut peur
   De perdre, outre son dû, le gré de sa louange.
       La Font.
= 2°. Ce à quoi on est obligé. "C' est le dû de ma charge. "Pour le dû de ma conscience.

DUBITATIVE


DUBITATIVE, adj. fém. [4e lon., 5e e muet.] Terme de Gramaire. Il se dit de certaines conjonctions, qui servent à marquer quelque suspension, ou quelque doute dans le discours. Ce sont, si, savoir, à savoir, quoiqu' il en soit.

DUC


DUC, s. m. DUCAL, ALE, adj. [Duk, dukal, kale.] Duc, est 1°. Un Seigneur revétu d' une dignité, qui est la première parmi la Noblesse de France. Il y aussi des Ducs en Espagne, en Portugal, en Angleterre et âilleurs. = 2°. Il se dit de quelques Princes souverains. Le Duc de Modène, le Duc de Parme, etc. On disait aussi, le Duc de Savoie, avant qu' il eût le titre de Roi de sicile, ou de Sardaigne. = 3°. On donait aussi ce titre anciènement aux Chefs et aux Généraux d' armées, et aux Gouverneurs des grandes Provinces. = 4°. Oiseau nocturne, dont les Fauconiers se servent pour atirer les corneilles et les milans.
   DUCAL, ALE, adj. Qui apartient à un Duc: "Manteau Ducal; couronne Ducale.

DUCAT


DUCAT, s. m. DUCATON, s. m. [Le t final ne se pron. point dans le 1er.] Ducat, est une pièce d' or fin, dont la valeur est diférente, suivant les divers pays. _ On apèle or de ducat, l' or qui est au titre du ducat. Il y aussi des ducats d' argent. = Ducaton, est un demi-ducat: espèce de monoie d' argent.

DUCHÉ


DUCHÉ, s. m. DUCHESSE, s. f. [2e é fer. au 1er, è moy. au 2d; ché, chèce.] Duché, est la Terre à laquelle le titre de Duché est ataché. "Le Duché d' Orléans, de Bretagne, etc. "Le Duché de Savoie, etc. = Ce mot est féminin dans cette phrâse: Une Duché-Pairie. _ On dit, un Duché femelle, quoique l' adjectif soit fém. C' est celui qui par les lettres d' érection passe aux femelles, au défaut des mâles.
   DUCHESSE, est, ou la femme d' un Duc, ou celle qui est revétûe de cette dignité par elle-même. La Duchesse d' Usez, d' Aiguillon. "Les Duchesses ont le tabouret chez la Reine.

DUCTILE


DUCTILE, adj. DUCTILITÉ, s. f. Ils ne se disent que des métaux, qui se peuvent étendre avec le marteau. "L' or est le plus ductile de tous. La ductilité de l' or surpasse celle des autres métaux. = Le Gendre écrit ductible, ou ductile, suivant la pratique des Auteurs qu' il copie. * "Le mercure n' est ni compact, ni ductible, ni fusible. = Ductile et ductilité, sont synonymes de malléable, malléabilité.

DUEL


DUEL, s. m. DUELLITE, ou DUÉLISTE, s. m. [Du-èl, éliste; 2e è moy. au 1er, é fer. au 2d.] Duel, 1°. Combat singulier. Duéliste, qui s' est batu en duel. "Apeler en duel. Offrir, accepter, refuser le duel. "C' est un duéliste, un grand duéliste.
   2°. DUEL, est un terme de Gramaire grecque, et de quelques aûtres. Temps des verbes, qui ne se dit que de deux chôses seulement.

DUEMENT


DUEMENT, voy. DûMENT.

DUIRE


*DUIRE, v. n. Convenir, plaire. Vieux mot. "Il
   S' imagina qu' il feroit bien
   De se pendre, et finir lui-même sa misere...
   Genre de mort qui ne duit pas
   À~ gens peu curieux de goûter le trépas.
       La Font.
La Bruyère le met au nombre des mots qu' il regrette. "L' usage a preféré, suivant lui (mal-à propos), travailler, à ouvrer; convenir, à duire; être acoutumé, à souloir, etc.
   DUIRE, se dit encôre au présent, dans le style familier, et à la 3e persone du singulier. "Cela vous duit-il? Cela ne me duit pas.

DULIE


DULIE, s. f. Il n' a d' usage qu' en cette phrâse: Culte de Dulie, culte qu' on rend aux Saints. Le culte de la Ste. Vierge s' apèle Culte d' Hyperdulie, comme supérieur à celui des Saints; le culte rendu à Dieu, culte de Latrie, d' adoration, proprement dite.

DûMENT


DûMENT, adv. [Dûman; 1re lon. _ On écrivait aûtrefois duement; mais puisque l' e ne s' y prononçait pas, on a bien fait de le suprimer: on l' a remplacé par l' acc. circ. sur l' û.] Cet adverbe n' est d' usage qu' en style de Pratique. "Il a été dûment acusé, convenablement, suivant ce qui se doit, selon les formes. "Il a été dûment atteint et convaincu. "Il est bien et dûment pourvu de cette charge, de ce bénéfice. = On le dit quelquefois en plaisantant, et dans le style familier. "Étant bien et dûment avertis de ces favorables traitemens des Arabes du pays, nous prîmes, en gens sages, nos précautions. Let. Edif.

DUNE


DUNE, s. f. DUNETTE, s. f. [2e e muet au 1er, è moy. au 2d.] Dunes, collines sabloneûses, qui s' étendent le long des côtes de la mer. Les dunes de Calais, de Dunkerque. Cette dernière Ville en a tiré son nom. _ Il ne se dit guère qu' au pluriel. = Dunette, est le plus haut étage de l' arrière d' un grand vaisseau. "Il étoit sur la dunette, lorsque, etc.

DUO


DUO, s. m. Terme de Musique. Morceau de musique fait pour être chanté par deux ou trois voix, ou exécuté par deux instrumens. _ Il ne prend point d' s au pluriel. "Deux duo, trois duo. "Il y avoit, dans ce motet, deux beaux duo.

DUPE


DUPE, s. f. DUPER, v. a. DUPERIE, s. f. [2e e muet au 1er et au 3e, é fer. au 2d.] Duper, c' est tromper, en faire acroire. Duperie, tromperie, fourberie. Dupe, celui, ou celle qui est trompée, ou facile à tromper. "Duper quelqu' un, se laisser duper. "C' est une vraie, une franche duperie. "C' est une dupe, une vraie, une franche dupe. "Être pris pour dupe. Passer pour dupe.
   Rem. 1°. Dupe, est toujours féminin, quoiqu' il soit apliqué à des noms du genre masculin. "Il a été la dupe de son bon coeur.
   2°. Il peut se dire au singulier, quoique se raportant à des noms qui sont au nombre pluriel. "Nous en serons, ils en seront la dupe, ou les dupes.
   3°. Il est quelquefois adjectif. "Il n' est pas si dupe que vous pensez.
   On commence par être dupe,
   On finit par être fripon.
       Des Houl.
  4°. Il régit la prép. de, ou il s' associe avec les pronoms possessifs. "Vous êtes la dupe de cet homme. "Vous serez sa dupe. "Il a fait une entreprise téméraire, il en a été la dupe. "L' esprit est toujours la dupe du coeur. La R. F. = Quelques Écrivains ont retranché l' article. "L' esprit en est souvent dupe. Du Plaisir. "C' est une méprise dont on ne cesse d' être dupe. Linguet. "Je ne sais si vous êtes dupe de ce voile. L' Ab. Royou. _ L' Acad. dit toujours, être la dupe.
   5°. On dit qu' un homme a été la dupe d' une, afaire, d' un marché, pour dire, qu' il n' y a pas trouvé son compte. = On dit aussi vulgairement, d' une chôse contre la Loi de Dieu, qui ne done aucun profit en ce monde, que c' est un péché de dupe. Mais les plus grands biens de ce monde n' étant rien, en comparaison des biens éternels, on peut dire que tous les péchés sont des péchés de dupe.
   DUPER, voy. SURPRENDRE.
   *DUPERIE. Trév. et le Rich. Port. définit ce mot, tromperie, filouterie; et l' Acad., tromperie, fourberie. Mais comme une dupe n' est pas un trompeur, la duperie n' est pas l' action de duper, de tromper, mais une chôse où l' on est trompé, dupé. "C' est une duperie, signifie, c' est une chôse où l' on a été dupé; ou bien, dont on serait la dupe. "Travailler si long-temps, et pour si peu de chôse, c' est une duperie. Ainsi, duperie a le sens passif. Il se dit de celui qui est dupé, et non pas de celui qui dupe.
   *DUPEUR, s. m. Trompeur. Trév. Ce mot est de Montaigne. Il apèle dupeur d' oreilles, un beau prêcheur de morale, qui ne pratique guère ce qu' il prêche. _ Il est vieux. L' Acad. ne le met pas.

DUPLICâTA


DUPLICâTA, s. m. [3e lon.] Le double d' une dépêche, d' un brevet. _ Il ne prend point d' s au pluriel. "On lui a envoyé plusieurs duplicâta.

DUPLICITÉ


DUPLICITÉ, s. f. 1°. Il se dit des chôses qui sont doubles, et qui devraient être uniques. "Ce verre cause duplicité d' objets. "Il y a duplicité d' action dans cette Tragédie. = 2°. Son plus grand usage est dans le moral, pour signifier, mauvaise foi. "Duplicité de coeur. "Il n' y a que de la duplicité dans ses paroles, dans ses promesses, dans ses démarches.

DUPLIQUE


DUPLIQUE, s. f. DUPLIQUER, v. neut. [Duplike, ; 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Termes de Pratique. Réponse à des Répliques. _ Fournir des Dupliques.

DUR


DUR, DûRE, adj. [1re lon. au 2d.] 1°. En parlant des chôses, ferme, solide, dificile à pénétrer, à entamer. Dur comme marbre, comme fer. "Le porphyre est une sorte de marbre extrêmement dur. = Quelquefois il est simplement oposé à tendre, mou. Pain, oeuf dur: lit dur, chaise dûre, viande dûre. _ Avoir l' oreille dûre, ou, être dûr d' oreille, n' entendre pas bien clair, être un peu sourd. = 2°. En parlant des persones, ou de ce qui y a raport, fâcheux, rude, inhumain, insensible. "C' est un homme dur et impitoyable; il a un caractère dur, l' ame dûre, le coeur dur. "Paroles, manières dûres, termes durs, réponse dûre et sèche. _ On dit, dans un sens aprochant: "Cela est bien dur, bien fâcheux. "C' est une dûre nécessité. = 3°. Rude, austère. "Mener une vie dûre. "Cet homme me rend la vie dûre. = 4°. Dificile. "Dur à émouvoir; dur à digérer, ou, de dûre digestion. "Marchandise dûre à la vente. = 5°. Il a plusieurs aûtres sens, suivant les noms qu' il afecte. Vin dur, âpre. Voix dûre, rude et désagréable. Vers durs, peu coulans, désagréables à l' oreille. Style dur, qui n' est point facile, point coulant. Tête dûre, qui ne comprend et ne retient que dificilement. Le temps est dur, ou, les temps sont durs, tout le monde a de la peine à vivre. "Les temps sont durs, dites-vous: mais s' ils le sont pour vous, qui regorgez de biens, que doit-ce être des pauvres, qui ont si peu de ressources, et qui manquent de pain? = En style proverbial, homme dur à la desserre, de qui on ne saurait tirer de l' argent.
   DûRE, s. f. Coucher sur la dûre, sur la terre, sur le plancher, sur des planches, sur des paillasses piquées: coucher dûrement.
   REM. Dur, fâcheux, joint au verbe être, régit de ou à; le 1er, quand ce verbe est impersonel, le 2d, quand il est dans son emploi ordinaire. "Il est dur d' entendre ces reproches. "Ces reproches sont durs à entendre.
   DUR, adv. "Il entend dur: il est un peu sourd. "Il croit cela dur comme fer; fermement, st. fam.

DURABLE


DURABLE, adj. [2e dout. 3e e muet.] Qui doit durer long-temps. Ouvrage, paix, bonheur, félicité durable. "Cela ne sauroit être durable.

DURANT


DURANT, prép. Il sert à marquer la durée du temps. Durant l' hiver, durant toute sa vie. _ Il se place quelquefois après le régime: Neuf ans durant, sa vie durant; mais on ne dirait pas de même, le jour durant, la nuit durant, l' hiver durant. Il faut toujours dire, durant le jour, durant la nuit, durant l' hiver. _ On a dit autrefois, durant que: on ne dit plus que pendant que. _ Durant, pendant (synon.) Voyez PENDANT.

DURCIR


DURCIR, v. a. *DURCISSEMENT, s. m. [Durci, ciceman; 3e e muet au 2d.] Durcir, rendre dur: "la grande chaleur durcit la terre: "L' air durcit le corail. _ V. n. Devenir dur. "Le chêne durcit dans l' eau. Faire durcir des oeufs. _ V. réc. "La pierre se durcit à l' air, la boûe au soleil.
   *DURCISSEMENT est l' état de ce qui est durci. Ce mot n' est point dans les Dictionaires, et l' on peut le regarder comme un mot nouveau, qui serait utile en plusieurs ocasions. M. Tissot l' a employé. Le durcissement, ou l' adhérence du poumon.

DURÉE


DURÉE, s. f. DURER, v. n. [Duré-e, : 2e é fer. Long au 1er.] Durer, c' est continuer d' être; Acad. Subsister pendant quelque temps. Trév. Subsister long-temps. Etre long temps en état. Rich. Port. La définition de l' Acad. est celle des trois qui me plaît le plus: elle est la plus claire et la plus juste. "Tout ce qui est fragile dûre peu. "Il n' y a rien ici-bas qui dûre éternellement. "Leur amitié n' a guère duré. "Cela ne dûrera pas. "C' est une étofe à durer.
   DURÉE est l' espace de temps qu' une chôse dûre. La durée du monde. La durée du règne de Louis XIV. = Il se dit, sur-tout adverbialement, avec la prép. de. "De durée, de courte, de longue durée; de peu de durée. "Les chôses violentes ne sont pas de durée.
   Rem. Ces deux mots ne modifient pas les persones. On ne dit pas: ce Pape a duré dix ans, Griffet.; ou, comme dit Fleuri: "Il est impossible de savoir la durée de chaque Pape, pendant les deux premiers siècles. On doit dire: "Le règne de ce Pape a duré dix ans. On ne peut savoir la durée du règne de chaque Pape, etc. _ Rouss. a dit, comme Fleury, en parlant du privilège d' être toujours jeune:
   Un privilège inoui,
   Et dont, pendant leur durée,
   Jamais mortels n' ont jouî.
Sans la contrainte de la rime, il aurait dit, pendant leur vie. _ Le P. Griffet, écrivant en prôse, n' a pas cette excûse.
   DURER, se dit des persones dans un autre sens. Il signifie, rester long-temps en place. "On ne pouvoit durer dans sa chambre. "L' Abé Têtu est retourné en Touraine: il ne pouvoit durer à Paris. Sév. _ Il n' est que du style fam., et ne se dit qu' avec la négative. = On dit, dans ce sens-là, ne pouvoir durer en place, être si inquiet, qu' on ne peut demeurer dans le même lieu, dans la même situation. = En style proverb., ne pouvoir durer dans sa peau; ne pouvoir se contenir par excès de joie, ou de quelqu' autre passion. _ Ne pouvoir durer de chaud, de froid, etc. en être extrêmement incomodé. "Il ne sauroit durer du mal de tête. _ "Cet homme est fâcheux et dificile, on ne sauroit durer avec lui, on n' y sauroit durer.
   Le temps dûre à quelqu' un, lorsque l' impatience de voir ârriver ce qu' il souhaite, lui fait trouver le temps long. _ Faire vie qui dûre, économiser, se ménager, pour fournir long-temps à la dépense, à la fatigue, etc.

DûREMENT


DûREMENT, adv. DURET, ETTE, adj. DûRETÉ, s. f. [Dûreman, , rè--te, reté: 1re long. au 1er et au dern. è moy. au 2d et 3e.] Dûrement, d' une manière dure, avec dûreté. Duret, diminutif de dur. Dûreté, fermeté, solidité. Rudesse, inhumanité. "Étre couché dûrement. Parler à quelqu' un dûrement: le traiter dûrement. Écrire dûrement. = "Ce mouton est duret; cette poularde est durette. = "La dûreté du fer, du marbre, de la viande, du lit. _ Dûreté de coeur; dûreté pour les paûvres. = Dûreté d' oreille, dificulté d' entendre. Dûreté de style, manière d' écrire, où il n' y a ni facilité, ni agrément. Dûreté de pinceau, manière de peindre sèche et sans grâces.
   DûRETÉ, Tumeur durcie. "Elle a une dûreté au sein.
   DûRETÉS, au fig. et au plur. se dit des actions et des paroles (des paroles sur-tout) dûres, désagréables, mortifiantes. "Il m' a fait, ou il m' a dit mille dûretés. _ L' Académie ne le dit que des discours.

DURILLON


DURILLON, s. m. [Duri-glion: mouillez les ll.] Petit calus, petite dûreté. Durillons aux pieds. _ Trév. met, se durilloner. "Il faut couper les corps (cors) des pieds, avant qu' ils se durillonent. Le Rich. Port. met aussi ce mot, en citant Trév.: preuve qu' il ne le garantissait pas. L' Acad. ne le met point. Il peut pourtant être utile dans des ocasions pareilles. Se durcir n' exprime pas tout le sens de se durilloner.

DURIUSCULE


DURIUSCULE, adj. Il ne se dit proprement que du pouls. "Ce pouls est duriuscule, un peu dur. _ En plaisantant, on le dit de la viande. "Cette poularde est duriuscule.

DUVET


DUVET, s. m. [Duvè; 2e è moy.] 1°. La menuë plume des oiseaux. "Oreiller de duvet. = 2°. En style figuré ou poétique, ou familier; le premier poil qui vient au menton et aux jouës des jeunes gens. "Un léger duvet lui ombrage encôre les joûes. Trév. = 3°. Espèce de coton, qui vient sur certains fruits. "Les coings sont couverts d' un petit duvet.

DUUMVIR


DUUMVIR, s. m. DUUMVIRAT, s. m. [Pron. Duomevir, Duomevira, l' e ajouté fort muet.] Duumvirat, est la qualité de Duumvir, titre que les anciens Romains donaient à diférens Magistrats. Ils tiraient ce nom de leur nombre, qui, dans leur origine, n' était que de deux.

DYNAMIQUE


DYNAMIQUE, s. f. [Dinamike.] Science des forces et des puissances qui meuvent les corps. "Traité de Dynamique. _ C' est la même chôse que méchanique. Paulian, Dict. de Phys. Celui-ci est d' un usage plus commun: l' autre est un mot plus savant.

DYNASTE


DYNASTE, s. m. DYNASTIE, s. f. [Dans le 2d, le t conserve son propre son, ti-e, et non pas ci-e.] Dynaste, petit Prince, qui ne régnait que sous le bon plaisir des grandes Puissances. _ Dynastie, suite des Princes qui ont régné dans un Pays. "Les Dynasties d' Égypte sont fort embrouillées.

DYPTIQUES


DYPTIQUES, s. m. pl. Registre où l' on conservait chez les Anciens les noms des Magistrats. _ Il y avait aussi des Dyptiques dans les anciènes Églises.

DYSCOLE


DYSCOLE, adj. Réfractaire, Schismatique.

DYSPEPSIE


DYSPEPSIE, DYSPNÉE, DYSURIE, s. f. Termes de Médecine. Dificulté de digérer, de respirer, d' uriner.

DYSSENTERIE


DYSSENTERIE, s. f. DYSSENTÉRIQUE, adj. [L' Acad. avait d' abord écrit ces mots avec une seule s: elle en a mis deux dans la dern. édit. Elles sont nécessaires, pour ne pas prononcer dizanterie, etc.] Dévoiment avec douleur d' entrâilles et flux de sang. "La Dyssenterie se mit dans l' Armée. "Flux dyssentérique.




FIN du Tome premier.