Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI CHOU


CHOU, s. m. [Chou, dout. Au pluriel, choux, pron. choû, long.] Sorte de légume qu' on met ordinairement dans le pot. Il en est un grand nombre d' espèces; choux blancs, rouges, verds; choux cabus, choux pommés, choux fleurs, etc. etc.
   Ce mot fournit à plusieurs expressions proverbiales. _ Faire ses choux grâs d' une chôse, en profiter, s' en regaler: "Je vous conseille de faire vos choux grâs de cet homme à qui vous trouvez de l' esprit. Sev. _ Faire des choux et des râves d' une chôse, en être le maître. "Prenez toujours, vous en ferez des choux et des raves, vous en ferez ce qu' il vous plaira. _ Aler tout à travers les choux, agir imprudemment et en étourdi. Mde. de Sévigné done à cette expression un aûtre sens, qui fait fort bien en cet endroit. "Il a fait vingt allées, tout au travers des choux, dans un jeune bois qu' on ne regardoit pas, qui font une beauté achevée. _ S' y entendre comme à ramer des choux, ne point s' y entendre du tout. _ Planter des choux, être rélégué à la campagne: "Enfin, la conclusion fut, que le Maréchal de Crequi est allé à la campagne planter des choux, aussi bien que le Maréchal d' Humières. On conait l' anagramme de chante-loup, plante-chou. Voyez CHèVRE.

CHOUETTE


CHOUETTE, s. f. [Chou-ète, 2eè moy. 3e e muet.] Oiseau de nuit, qui tient beaucoup du hibou et du chat-huant. _ On dit comunément, larron comme une chouette. = Au jeu de piquet, faire la chouette à... c' est jouer seul contre deux ou contre plusieurs. = En style proverbial, être la chouette d' une société, c' est être l' objet ordinaire des railleries de ceux qui la composent. Il est leur chouette, et il ne s' en aperçoit pas.

CHOYER


CHOYER, v. act. [Choa-ié, 2eé fer.] Conserver avec soin. Elle choie ses porcelaines bien plus que ses enfans. = Se choyer trop, ne se choyer pas assez, avoir trop ou trop peu d' atention à ce qui regarde la santé ou les aises de la vie. = Choyer quelqu' un, c' est aussi le ménager, avoir soin de ne rien dire, de ne rien faire qui puisse le choquer.
   Rem. La Touche nous aprend que de son temps plusieurs désaprouvaient ce mot; mais il observe que l' Acad. ne le condamnait point, qu' il était employé par de bons Auteurs, et qu' il est fort expressif. Il n' est pourtant que du style familier. L' Acad. le met sans remarque.

CHRêME


CHRêME, s. m. [Krême, 1reê ouv. et long, 2e e muet.] Huile sacrée, mélée de baûme, et servant aux onctions que l' on fait dans quelques Sacremens, et dans quelques aûtres cérémonies de l' Église. = Dans le style sérieux, on dit toujours le Saint chrême. _ En style proverbial, on dit chrême, ou le chrême. "Il feroit renier chrême et Baptême; il pousse la patience à bout; ce qui se dit des persones et des chôses.

CHRÉTIEN


CHRÉTIEN, ENNE, adj. et subst. CHRÉTIèNEMENT, adv. CHRÉTIENTÉ, s. f. [En n' a pas le son d' an: Cré-tien, tiène, tiène--man, tien-té; 1reé fer. 2e è moy. au 2d et au 3e; la 3ee muet. Aûtrefois on mettait un acc. circ. sur le 1ere pour marquer la supression de l' s, On avait écrit d' abord Chrestien~, on écrivait ensuite Chrêtien, mais on s' est ravisé, et l' on a compris que l' é étant fermé et bref, et non pas ouv. et long, il fallait remplacer l' acc. circ. par un acc. aigu. _ Le Trad. de l' Hist. d' Hume, et un des Auteurs des Lett. Edif. écrivent Chrêtienneté; mauvaise orthographe.] Chrétien se dit des persones et des chôses. Le Peuple Chrétien, le monde Chrétien. La Religion, la Foi, la Loi Chrétiène, la Morale Chrétiène; mener une vie Chrétiène. = Subst. C' est un bon Chrétien, une bone Chrétiène. Les Chrétiens sont obligés à une vie pûre et austère.
   Le Peuple dit, d' une chôse qui n' est pas suivant la bone morale et la justice, cela n' est pas Chrétien: "Cet argent qu' elle m' ofroit n' étoit pas Chrétien, je ne l' ignorois pas, et je participois au petit désordre de conduite, en vertu duquel il avoit été aquis. Mariv. _ On dit, dans le même style, à un homme qui se sert de termes embarrassés et obscurs, parlez Chrétien, ne dites que des chôses qu' on entende. = Chrétiènement, d' une manière Chrétiène; vivre, mourir chrétiènement.
   CHRÉTIENTÉ et Christianisme ne sont pas synonymes; le premier signifie le pays Chrétien, le second, la Religion Chrétiène. "Les Infidèles menaçoient la Chrétienté; cela se pratique dans toute la Chrétienté. "Le Christianisme veut qu' on pardone à ses énemis.
   Le Peuple dit de celui, qui marche avec des souliers et des bâs, dont la semelle est trouée, qu' il marche sur la chrétienté.

CHRIST


CHRIST, s. m. CHRISTIANISME, s. m. Quand le mot Christ est seul, on prononce toujours l' s. On la prononce aussi, dit Ménage dans Antechrist; en quoi il se trompe. Voy. ANTECHRIST. Mais lorsque Christ est joint au nom de Jesus, les deux s deviennent muettes. _ La Touche assûre que presque tous les Protestans font toujours soner l' s en Jesus-Christ, et il ajoute que c' est sans doute la véritable prononciation. Je crois qu' on peut douter, et du fait et de la décision, à moins qu' on ne parle des Protestans réfugiés en Hollande, qui ne sont pas une autorité à citer. _ Le Rich. Port. dit qu' on prononce l' st dans ce mot. Je crois qu' il faut l' entendre avec la destinction mentionée plus haut: Krist, Jézukri, Antekri.
   Christ, suivant sa propre signification veut dire oint, qui a reçu quelqu' onction. Mais on ne s' en sert plus que pour désigner le Messie. _ En parlant de tableaux, on dit, un Christ, pour dire, une figûre de N. S. ataché à la Croix.
   CHRISTIANISME, la Loi, la Religion de J. C. Voy. CHRÉTIENTÉ.
   Rem. Ce mot n' est pas synonyme de dévotion, piété, Religion, en tant que sentiment de l' âme. On ne dit pas votre Christianisme, comme on dit, votre piété, votre religion, etc. N' imitez donc pas M. Formey, quand il dit: son équité naturelle et son christianisme ont éclaté dans sa disposition testamentaire.

CHRONIQUE


CHRONIQUE, s. f. CHRONIQUEUR, s. m. [Kronike, ni-keur.] Aûtrefois on apelait les Histoires, les Annales de chroniques, et les Historiens, chroniqueurs. On ne dit plus aujourd'hui chroniques, que de certaines Histoires anciènes qui ont conservé ce nom; les Chroniques de l' Ordre de St. François. Chronique scandaleuse (st. prov.) les mauvais bruits, les discours médisans. Pour chroniqueur, il n' est plus admis que dans le style plaisant ou critique. "Si je veux être chroniqueur exact et véridique, il faut m' exposer à passer pour un Annotateur malin. Linguet.
   Ainsi l' écrit un chroniqueur sincère.
       Ver-Vert.
L' Académie dit seulement que ce mot vieillit.

CHRONOGRAMME


CHRONOGRAMME, ou CHRONOGRAPHE, s. m. Inscription, dans laquelle les lettres numérales forment la date de l' évènement dont il s' agit.

CHRONOLOGIE


CHRONOLOGIE, s. f. CHRONOLOGIQUE, adj. [Kronologie, gike, 4e lon. au 1er, 5e e muet.] La Chronologie est la doctrine des temps: Chronologique, ce qui apartient à la Chronologie. Table, Abrégé Chronologique.

CHRONOLOGISTE


CHRONOLOGISTE, ou CHRONOLOGUE, s. m. Ils signifient tous les deux la même chôse, mais Chronologue vieillit. Celui qui sait ou qui enseigne la Chronologie, ou qui a écrit sur la Chronologie.

CHRONOMèTRE


CHRONOMèTRE, s. m. [Kronomètre, 3e è moy. 4e e muet.] Nom générique des instrumens qui servent à mesurer le temps.

CHRYSALIDE


CHRISALYDE, s. f. [Krizalide.] Aûtrement Nymphe. État d' un insecte, renfermé dans une coque, sous la forme d' une espèce de fève, avant que de se transformer en papillon. "Chenille en chrysalide.

CHUCHETèMENT


CHUCHETèMENT, s. m. CHUCHETER, ou CHUCHOTER, v. n. [2e è moy. au 1er, e muet au 2d.] Trév. seul met le 1er. et dit aussi Chuchillement, pour exprimer l' action de celui qui parle tout bâs à l' oreille de quelqu' un. _ L' Acad. ne met que Chuchoter dans le même sens. Trév. et le Rich. Port. le disent aussi du cri des moineaux. Le dernier dit Chuchoter pour le 1er sens.

CHUCHOTEUR


CHUCHOTEUR, ou CHUCHETEUR, EûSE, s. m. et f. L' Acad. met les deux, quoiqu' elle ne dise pour le verbe que Chuchoter. Celui, celle qui a coutume de chuchoter. "Les chuchoteurs sont incommodes en compagnie.

CHUCHOTERIE


CHUCHOTERIE, s. f. [3e et dern. e muet, 4e lon.] Entretien de ceux qui se parlent à l' oreille, de peur d' être entendus des aûtres. "C' est entr' eux une continuelle chuchoterie.

CHUT


CHUT! Interj. dont on se sert pour imposer silence.

CHUTE


CHUTE, s. f. Le Dict. d' Ortog. écrit Chûte, et dit que l' acc. circ. est nécessaire, parce que la syll. est longue. On l' a suivi dans le Dict. Gramm. _ Mais l' Acad. ne met point d' accent; et D' Olivet, dans sa Prosodie, dit que dans la terminaison en ute, l' u est bref, excepté dans Flûte. On écrivait aûtrefois Cheute. _ Chute, mouvement d' une chôse qui tombe: il a fait une lourde chute; il est incommodé d' une chute de cheval. _ Chute d' humeurs, débordement des humeurs qui tombent du cerveau. Chute des feuilles, la saison où les feuilles tombent. "Ils est à craindre que ce malade ne meure à la chute des feuilles. _ Chute est beau au figuré. 1°. Mort glorieuse dans un combat. "Leur mort fait leur bonheur; des trésors, des conquêtes ne valent pas une chute si belle. Jér. Dél. = 2°. Malheur, disgrace: il ne se relèvera jamais de sa chute. = 3°. Faute envers Dieu; la chute du premier homme, des Anges. Être une ocasion de chute et de scandale. = 4°. En parlant d' un Sonet, d' un Madrigal, d' une Épigramme, la pensée qui les termine. _ En parlant d' une période, la cadence et l' harmonie avec laquelle cette période finit. = 5°. Chute d' une Pièce de Théatre, son mauvais succès.
   Qui, tout meurtri des coups de sa muse tragique,
   Tomba de chute en chute au trône académique.
       Gilbert.

CHY


*CHY. Vieux mot: CI. On disait chy-après, pour, ci-après.

CHYLE


CHYLE, s. m. Suc blanc, qui se forme de la partie la plus subtile des alimens

CHYMIE


CHYMIE et ses dérivés. Voy. CHIMIE.

CHYPRE


CHYPRE, s. f. On a dit aûtrefois Cypre, et cette dernière manière est plus conforme à l' étymologie. Fénélon écrit toujours Cypre, Cyprien. Je crois qu' il serait fort convenable de distinguer et de dire Cypre dans la Géographie anciène, et Chypre dans la Géographie moderne. Je l' avais pensé ainsi, quand j' ai vu que c' était l' opinion de Th. Corneille. _ On dira de même Cypriens des anciens habitans de l' Ile, et Chypriots, de ceux qui l' habitent aujourd'hui.

CI


CI, adv. de lieu. Il ne se dit jamais seul: joint au pronoms démonstratifs, aux noms, aux adjectifs, ou aux adverbes, il désigne que les chôses ou les persones sont proches. Celui-ci, celle-ci, cet homme-ci, cette femme-ci; le mémoire ci-joint, les témoins ci-présens, ci-contre, ci-derrière, ci-devant, ci-après, ci-dessus, ci-dessous, etc.
   Rem. 1°. Qu' avec les pronoms et les noms, ci se met après, et qu' il se met devant avec les adjectifs et les adverbes.
   Rem. 2°. Qu' il ne se joint aux adjectifs que dans le style du Palais: dans le discours ordinaire, on dit ici: le mémoire ici joint, les témoins ici présens.
   3°. CI se met après les prép. entre et par: entre-ci et demain; par-ci par-là. Pour voici, il ne fait qu' un seul mot, et l' on ne doit point mettre de tiret entre voi et ci.
   4°. Du temps de Vaugelas, la Cour disait cet homme ici, ce temps ici, et la Ville cet homme-ci, ce temps-ci; et cet excellent Gramairien, en laissant le choix entre les deux manières, penchait pour la première. La Ville l' a emporté sur la Cour, et l' on ne dit plus que cet homme-ci, ce temps-ci. Il n' y a que le bâs peuple qui dise cet homme-ici, etc.

CIBOIRE


CIBOIRE, s. m. [Ci-boâ-re: 2e lon. 3e e muet.] Vâse sacré, où l' on met les hosties consacrées.

CIBOULE


CIBOULE, CIBOULETTE, s. f. [3e e muet au 1er, è moy. au 2d.] La ciboule est un petit oignon bon à manger en salade et en ragoût: la ciboulette est une petite ciboule.

CICATRICE


CICATRICE, s. f. *CICATRICÉ, ÉE, adj. [4e e muet au 1er, é fer. aux deux aûtres, long au 3e.] Cicatrice est la marque des plaies et des ulcères qui reste après la guérison. _ Il se dit au figuré; l' afront est passé, mais la cicatrice reste.
   *CICATRICÉ a été employé par Boileau et Patru: la raison est pour lui, mais le grand usage est pour cicatrisé. Rich. Il semble pourtant que la distinction entre ces deux mots serait utile. Le 1er signifierait, qui est couvert de cicatrices; recousu en plusieurs endroits. C' est dans ce sens que l' a pris Boileau, en parlant du Rhin.
   Son front cicatricé rend son air furieux.
Le 2d se dirait de ce qui est entièrement fermé, en parlant d' une plaie. _ Le Rich. Port. ne met, dans le 1er sens, que cicatrisé: "Ce coup lui a cicatrisé le visage. L' Acad. dit aussi cicatriser en ce sens.

CICATRISANT


CICATRISANT, ou CICATRISATIF, adj. et s. m. Il se dit des remèdes qui aident à former une cicatrice. Trév. et le Rich. Port. les mettent tous les deux: l' Acad. ne met ni l' un, ni l' aûtre.

CICATRISER


CICATRISER, v. a. [Cikatrizé; dern. é fer.] Faire des cicatrices. La petite vérole lui a cicatrisé le visage. _ Se cicatriser, se dit dans un aûtre sens, d' une plaie qui comence à se fermer, et qui se reprend: "Sa plaie comence à se cicatriser.

CICÉRO


CICÉRO, s. m. Caractère d' Imprimerie qui est entre le saint-Augustin et le petit-Romain. Acad. Cela n' est pas exact. Le Cicéro est entre le saint-Augustin et la Philosophie.

CICEROLE


CICEROLE, s. f. [2e et dern. e muet.] Éspèce de pois chiche.

CICÉRONÉ


CICÉRONÉ, s. m. [Le Rich. Port. ne met pas d' acc. sur le 2d é: mais la prononciation l' exige. Ce mot est italien; et les Italiens ne conaissent pas l' e muet.] Terme de Relations. En Italie (et sur-tout à Rome) on done ce nom à ceux qui font voir aux étrangers les curiosités d' une Ville.

CICLE


CICLE, CICLOPE. Voyez CYCLE, CYCLOPE.

CICOGNE


CICOGNE, voyez CIGOGNE.

CICOMORE


*CICOMORE. Voy. SYCOMôRE.

CID


CID, s. m. [On pron. le d.] Mot emprunté de l' Arabe. Chef, Comandant. Ce mot est bien conu en France depuis la fameuse Tragédie de Corneille, qui porte ce nom.

CIDRE


CIDRE, s. m. Boisson faite de jus de pommes pressurées.

CIEL


CIEL, s. m. [Cièl; è moy. au plur. Cieux, pron. Cieû, monos. lon.] En parlant d' un tableau, d' une carrière, d' un lit, on dit au plur., les ciels, et non pas les cieux. 1°. La partie supérieûre du Monde, dans laquelle se meuvent les astres. Les étoiles du ciel. _ On dit quelquefois, le ciel de la Lune, de Mars, etc. Les cieux des Planètes. = 2°. Il se prend pour l' air: le ciel est serein, il est clair; le ciel est obscur: la rosée du ciel, les oiseaux du ciel. = 3°. Le séjour des Bienheureux. Lucifer fut précipité du Ciel: le bonheur, le chemin du Ciel; le Royaume des Cieux. = 4°. Il se prend pour Dieu même. Le couroux du Ciel; le Ciel irrité; grâces au Ciel; le Ciel l' a voulu. = 5°. Climat, pays. On a beau changer de ciel, on ne change point d' esprit. = 6°. Le dais, sous lequel on porte le Saint-Sacrement, le jour de la Fête-Dieu. Porter le ciel. Acad. _ Le haut d' un lit, le ciel de lit: le ciel de ce lit n' est pas assez haut. = 7°. En termes de Peintûre, la partie du tableau qui représente l' air: Ce Peintre fait bien les ciels.
   Ce mot fournit à quelques expressions, dont la plupart sont du style familier. _ Elever un homme jusqu' au ciel, le louer excessivement. _ Remuer ciel et terre; faire jouer toute sorte de ressorts, chercher de tout côté des apuis, pour faire réussir une afaire. _ Être dans le troisième ciel; être dans une grande dévotion. "Les veuves vous sont aquises, et sur la terre, et dans le troisième Ciel. Sév. _ On dit, d' une chôse qui nous arrive, sans que nous sachions d' où elle nous vient: qu' elle nous est tombée du ciel, ou des nûes, "Cette Duchesse vouloit mettre ces mille écus entre les mains de Beaulieu, afin que je les trouvasse tombés du Ciel. SÉV. _ On dit aussi, de deux chôses bien diférentes, qu' elles sont aussi éloignées, que le ciel l' est de la terre; dans une grande obscurité, qu' on ne voit ni ciel, ni terre; de celui qui prend des précautions superflûes, qu' il voudrait étayer le Ciel; de celui qui invective contre les Puissances, quand on crache contre le Ciel, il nous retombe dessus. _ Les mariages sont fait au Ciel, sont arrangés par la Providence.
   Rem. La Touche prétend qu' on ne doit pas dire ciel de lit, mais fond de lit. Il se trompe: l' usage universel est pour le 1er; le 2d se dirait plutôt des planches qui soutiènent les matelas, que du haut du lit.

CIERGE


CIERGE, s. m. CIERGIER, s. m. [Cièr-ge, gié; 1er ê ouv. 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Cierge, est une chandelle de cire à l' usage de l' Eglise. Il difère de bougie, et pour sa forme, et pour son usage. = On dit proverbialement, d' un homme qui est, ou qui se tient extrêmement droit, qu' il est droit comme un cierge.
   Rem. Faut-il dire Ciergier, ou Cierger, ou Cirier, pour exprimer l' ouvrier qui fait des cierges, ou le marchand qui en vend? Le 2d ne vaut tout-à-fait rien. Suivant La Touche, le dernier est le seul et véritable mot. À~ Paris on s' en sert plus comunément que de Ciergier. Trév. _ L' Acad. ne met que Cirier, et ne le dit que de l' ouvrier. _ Le Rich. Port. met Ciergier et Cirier, chacun à sa place, et les dit tous deux, et de l' ouvrier, et du marchand. Il semble que l' usage le plus universel est de doner le premier nom à celui qui vend des cierges et des bougies; et le second, à celui qui les fabrique.

CIGALE


CIGALE, s. f. Espèce d' insecte qui vole, et qui fait un bruit aigre et importun dans les champs, durant les ardeurs de l' été. _ Tout aigre qu' est ce bruit, on l' apèle pourtant chant: "Le chant de la cigale; j' ai oui chanter les cigales.
   La Cigale ayant chanté
   Tout l' été.       La Font.

CIGOGNE


CIGOGNE, s. f. [On écrivait aûtrefois cicogne: mouillez le gn.] Grôs oiseau de passage, qui a un long bec rouge, et qui fait son nid sur le haut des maisons. _ On apèle proverbialement, contes de la cigogne, ou, à la cigogne, des contes fabuleux et inventés à plaisir. _ Trév. et le Rich. Port. mettent, l' un cicogneau, l' aûtre cigogneau, pour le petit de la cigogne. L' Acad. ne le met point.

CIGûE


CIGûE, s. f. [2e lon. 3ee muet.] Herbe vénéneûse, qui ressemble au persil. _ Suc de cette herbe: Les Athéniens firent avaler de la cigûe à Socrate.

CIL


CIL, s. m. [Pron. l' l finale sans la mouiller.] Le poil des paupières. Il se dit ordinairement au pluriel. _ Ç' a été, dit La Bruyère, dans ses beaux jours, le plus joli mot de la Langue françoise: il est douloureux pour les Poètes qu' il ait vieilli. L' Acad. le met sans remarque. _ Il n' est que du style simple. On dit même plus comunément les poils, que les cils des paupières.

CILICE


CILICE, s. m. Camisole ou ceintûre, faite de tissu de poil de chèvre, ou de crin de cheval, ou de quelqu' aûtre poil rude et piquant, que l' on porte sur la chair par mortification. Prendre, porter le cilice: se revêtir d' un cilice.
   Rem. Le cilice était le vêtement des peuples de Cilicie: c' est de là que lui vient son nom. Il ne le portaient pas aparemment sur la chair.

CILLEMENT


CILLEMENT, s. m. CILLER, v. act. [Mouillez les ll: ci-glie-man, ci-glié; 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Cillement, est l' action de ciller, c. à. d., de fermer les yeux et les paupières et de les r' ouvrir dans l' instant; ce qui est l' éfet d' une incomodité ou d' une mauvaise habitude. "Il a un cillement d' yeux continuel; il ne fait que ciller les yeux, ciller les paupières. _ V. n. On ne peut regarder le soleil sans ciller. _ Figurément, persone n' ôse ciller (remuer) devant lui. _ En parlant des chevaux, avoir quelques poils blancs aux paupières, au-dessus des yeux. "Ce cheval cille, il comence à ciller.
   Rem. Plusieurs écrivent mal-à-propos sillement, siller: cette ortographe est contraire à l' usage, et aussi à l' étymologie, ces mots étant dérivés de cil.

CIMAGRÉE


CIMAGRÉE, Trév. Voy. SIMAGRÉE.

CIMAISE


CIMAISE, ou CYMAISE, Rich. Port. Voyez CYMAISE.

CIME


CIME, s. f. [2e e muet.] Sommet. Il ne dit que des arbres, des montagnes, des rochers. _ On apèle le Parnasse, la double cime, en langage poétique. La Motte dit du Télémaque:
   Les Nymphes de la double cime
   Ne l' afranchirent de la rime
   Qu' en faveur de la vérité.
   Rousseau dit, dans le même sens, la double colline. Voy. COLLINE.

CIMENT


CIMENT, s. m. CIMENTER, v. act. [Siman, manté; 2e lon.] Ciment, brique, ou tuile batue et pilée, qui, mélée avec la chaux, forme une espèce de mortier. Cimenter, c' est employer du ciment dans un ouvrage de maçonerie.
   Ciment ne se dit guère que dans le propre; mais cimenter s' emploie élégamment au figuré. "On a vu les amitiés les mieux cimentées s' altérer par d' innocentes plaisanteries. St. Evr. "L' union de ces deux branches (de la Maison d' Autriche) cimentées par le sang et par les alliances, les rendoit si redoutables, qu' il n' y avoit aucun Potentat en Europe, qui fût en état d' y résister. Reboulet.
   À~ CHAUX ET À~ CIMENT, adv. Voyez CHAUX.

CIMETERRE


CIMETERRE, s. m. CIMETIèRE, s. m. [2e e muet: 3e ê ouv. au 1er, è moy. au 2e, long dans les deux.] Ronsard a fait cimeterre fém. Il pouvait l' être de son tems, mais aujourd'hui il est certainement masc.Cimeterre est un grand coutelas recourbé, qui ne tranche que d' un côté. _ Cimetière est un lieu destiné à enterrer les morts..
   Les Angevins et les Manceaux disent Cemétière, d' aûtres disent cimitière: c' est cimetière qu' il faut dire.
   Rem. 1°. Les Chrétiens ne comptaient leur mort que pour un sommeil, suivant le langage de l' Ecriture. Et delà vient le nom de cimetière, qui en grec ne signifie qu' un dortoir. Fleury, Moeurs des Chrétiens. _ On ne doit se servir de cimetière, qu' en parlant des Chrétiens.
   2°. Ce mot n' est pas noble, dit Ménage, dans ses remarques sur Malherbe, qui l' a employé quelquefois. Sur le siège d' Ostende, qui fut très long.
   Qu' attendez-vous destins? Ceci, n' est pas matière,
   Qu' avec que tant de doute il faille décider.
   Toute la question n' est que d' un cimetière.
   Prononcez librement qui le doit posséder.
Et dans un fragment sur la prise de La Rochelle:
   La Rochelle est en poûdre, et ses Champs désertés
   N' ont face que de cimetière.
   Où gissent les tyrans qui les ont habités.
Nos Poètes, ajoute Ménage, ne l' emploiroient pas aujourd'hui dans un poème sérieux. L' usage a toujours plus confirmé cette observation.
   On dit figurément, mais dans le style familier seulement, d' un pays dont l' air est mortel pour les étrangers, que c' est leur cimetière.

CIMIER


CIMIER, s. m. [Ci-mié; 2eé fer. et dout.] 1°. L' ornement qu' on porte au haut d' un casque. = 2°. Pièce de boeuf prise sur le quartier de derrière.

CINâBRE


CINâBRE, s. m. [2e lon. 3ee muet.] Combinaison de soufre et de mercûre, qui forme un corps solide d' un beau rouge. Il y en a un naturel, et un aûtre artificiel.

CINAMôME


CINAMôME, Trév. Voy. CINNAMôME.

CINÉFACTION


CINÉFACTION. Voy. CINÉRATION.

CINÉRAIRE


CINÉRAIRE, adj. CINÉRATION, s. f. [Cinérère, cinéra-cion; 2eé fer. 3e è moy. et long au 1er.] Le premier ne se dit que d' une urne qui renferme des cendres. Acad.Rich. Port. Il faut ajouter, des corps brûlés après la mort, ainsi que c' était la coutume des Anciens. Ce mot n' est donc pas du discours ordinaire. _ Trév. le définit, qui appartient à la cendre: cette définition est ridicule.
   CINÉRATION, réduction du bois, ou aûtres corps combustibles, en cendres, par la violence du feu. _ Ce mot n' est d' usage que parmi les Savans. _ Trév. dit aussi cinéfaction, que l' Acad. ne met pas.

CINGLAGE


CINGLAGE, s. m. CINGLER, v. n. [Cein-glaje, glé.] Cinglage, est le chemin qu' un vaisseau fait, ou peut faire (Acad.); qu' on croit qu' il fait (Trév.) en 24 heûres. _ Cingler, naviguer à pleines voiles: "Ils cinglèrent en pleine mer, vers une telle Ville, à l' est, à l' ouest. "Il cingla avec cent voiles vers les Iles. Vaugelas, Quinte Curce.
   Rem. Quelques-uns disent cingler, activement, pour sangler: "Ce cocher a cinglé un coup de fouet à travers le visage de ce laquais. L' Acad. le met dans ce sens; je m' en étone. On trouve sangler dans plusieurs Auteurs; on ne trouve point cingler dans cette signification.
   Suivant l' Acad., on dit d' un vent froid et perçant, qu' il cingle, qu' il cingle le visage. _ On le dit aussi de la grêle, de la neige, de la pluie, dans le même sens.

CINNAMôME


CINNAMôME, ou CINAMôME, s. m. Sorte d' aromate. On croit comunément que la canelle est le cinnamôme des Anciens.

CINQ


CINQ, adj. et subst.~ [Seink; monos. long.] Le q final de cinq ne se prononce que quand ce mot termine la phrâse, ou quand il est suivi d' un mot començant par une voyelle; aûtrement il ne se pron. pas. Il y en a cinq, cinq hommes, cinq chevaux. [Ilia-na-seink, sein-kome, sein-chevô.]
   Subst. m. Un cinq de chifre: un cinq, au jeu des cartes, une carte qui marque cinq points: un cinq de carreau, de trèfle. = Au jeu des dés, le côté qui est marqué de cinq points: "Amener un cinq, deux cinq, ou quines.

CINQUANTAINE


CINQUANTAINE, s. f. CINQUANTE, adj. [Sein-kantène, kante; 2e lon.] Le 2d exprime un nombre composé de cinq dixaines; le 1er l' exprime aussi, mais collectivement. "Cinquante hommes, cinquante louis, cinquante fois: une cinquantaine de louis, de fois. _ La cinquantaine, cinquante ans accomplis. "Quand on a la cinquantaine, on n' est plus jeune.

CINQUANTENIER


CINQUANTENIER, s. m. [Sein-kante--nié; 2e lon. 3e e muet, 4e é fer.] Celui qui comande cinquante hommes. = Il ne se dit qu' en parlant de la Milice et de la police des Villes. On manda les Cinquanteniers.

CINQUANTIèME


CINQUANTIèME, CINQUIèME, adj. d' Ordre, ou Ordinaux. L' un a raport à cinquante, l' aûtre à cinq. Le cinquantième Chapitre, la cinquième fois. _ Subst. Il a un cinquantième d' intérêt dans les Fermes. Il est le cinquième de la file. = La cinquième, la 5e clâsse d' un Collège.

CINQUIèMEMENT


CINQUIèMEMENT, adv. En cinquième lieu: Je dis, cinquièmement, que...

CINTRE


CINTRE, s. m. CINTRER, v. a. [Plusieurs écrivent comme on prononce, ceintre, ceintrer. Trév. met les deux. L' Acad. ne met que le 1er.] Le cintre est une figûre en arcade, en demi-cercle. = On le dit aussi pour l' arcade de bois, sur laquelle on bâtit les voûtes de pierre ou de brique. = Cintrer, faire un cintre, bâtir en cintre: cintrer une porte, une fenêtre; bordûre cintrée, etc.

CIPRèS


CIPRèS, Rich. Voyez CYPRèS.

CIR


CIR. Dans les Provinces méridionales, plusieurs prononcent cette syllabe, devant une consonne, comme si elle était écrite cier: ils prononcent, cierconspect, cier--constance; c' est une faûte grossière.

CIRCASSIEN


CIRCASSIEN, ÈNE, adj. et subst. Un des Auteurs des Let. Edif. dit toujours Circasse, les Circasses, les Tartâres Circasses. C' est contre l' usage.

CIRAGE


CIRAGE, s. m. 1°. Action de cirer, ou l' éfet de cette action. Il a employé beaucoup de temps à ce cirage. = 2°. Il se dit aussi de la cire apliquée à quelque chôse: cirage des botes, des toiles, des gants, etc. = 3°. Il se dit encôre des apartemens qui sont cirés.

CIRCONCIRE


CIRCONCIRE, v. act. CIRCONCISION, s. f. [Cirkoncire, ci-zion, en vers zi-on, et non pas cierconcire. Voyez CIR.] Je circoncis, nous circoncisons; au prétérit, je circoncis, nous circoncimes, etc. que je circoncise, je circoncisse, etc. = Couper le prépuce. = Circoncision, action de circoncire. = Au figuré, et dans le langage de la Sainte Écriture; la circoncision du coeur, des lèvres; le retranchement des mauvais desirs, des mauvais discours; et non pas seulement, comme dit l' Acad. des paroles qui peuvent blesser le prochain ou la pudeur; car, cette circoncision s' étend à tout ce qui est contraire à quelque vertu que ce soit.
   Rem. 1°. Abadie dit à l' infinitif, circoncir. Je n' ai pu vérifier, si cette ortographe lui est particulière, mais elle est mauvaise.
   2°. Voltaire dit au subjonctif circoncie, ou circoncise. On ne dit pas l' un ou l' autre indiféremment: on dit toujours le second.

CIRCONFÉRENCE


CIRCONFÉRENCE, s. f. [Pron. cir, et non pas cier. 2e. et 4e lon. 3eé fer. dern. e muet.] 1°. Le tour d' un cercle. "Toutes les lignes, tirées du centre à la circonférence, sont égales entr' elles. = 2°. Il se dit de toute sorte d' enceinte, quoiqu' elle ne soit pas parfaitement ronde. La circonférence d' une ville, d' une place publique.

CIRCONFLEXE


CIRCONFLEXE, adj. [cirkonflèkce, et non pas cier; voyez CIR; 2e lon. 3e è moy. 4e e muet.] On ne le dit qu' avec le mot accent: il a la figure d' un v renversé (^); on le met sur certaines syllabes, pour marquer qu' elles sont longues. Voyez ACCENT.

CIRCONLOCUTION


CIRCONLOCUTION, s. f. [Cirkonloku--cion, en vers ci-on: 2e lon.] Périphrâse, circuit de paroles. User de circonlocution. La circonlocution sert souvent à l' Orateur.

CIRCONSCRIPTION


CIRCONSCRIPTION, s. f. CIRCONSCRIRE, v. a. La Circonscription est ce qui borne la circonférence des corps. Circonscrire, mettre des bornes à l' entour. Il est sur-tout d' usage au passif. Dieu ne peut être circonscrit. (L' Acad. dit, se circonscrire: je ne le crois pas si bon,) ni par les lieux, ni par les temps. M. Voullonne, célèbre Médecin, fait régir à ce verbe la prép. à, dans le sens d' assigner. "Nous devions comencer par circonscrire à la fièvre intermittente des limites, au moins abstraites. _ Je crois qu' il faut dire circonscrire la fièvre dans des limites.

CIRCONSPECT


CIRCONSPECT, ECTE, adj. CIRCONSPECTION, s. f. [Cirkons-pèk, pèkte, pèk-cion, en vers ci-on: 2e lon. 3e è moy.] L' homme circonspect est celui qui est discret, retenu, qui prend garde à ce qu' il fait, à ce qu' il dit. La circonspection est la prudence, la retenue, la discrétion dans les discours et les actions.
   Circonspect, régit à, et l' infinitif: "il n' étoit pas moins circonspect à ne leur rien imputer que de certain. = Cet adjectif, lors même qu' il est seul et sans régime, suit toujours le substantif.
   Circonspection, considération, égards, ménagemens, (synon.) La circonspection a principalement lieu dans le discours, pour ne parler qu' à propos, et ne rien laisser échaper, qui puisse nuire ou déplaire. La considération se trouve particulièrement dans la manière de traiter avec les gens, pour témoigner la distinction et le cas qu' on en fait. Les égards ont plus de raport à l' état, ou à la situation des persones, pour ne manquer à rien de ce que la bienséance, ou la politesse exige. Les ménagemens regardent proprement l' humeur et les inclinations, pour éviter de choquer et de faire de la peine. Voyez ÉGARDS. _ L' esprit du monde veut de la circonspection, quand on ne conoît pas ceux devant qui l' on parle; de la considération pour la qualité et pour les gens en place; des égards envers les persones intéressées à ce dont il est question, et des ménagemens avec celles, qui sont d' un caractère dificile, ou d' un système oposé. GIR. Synon.

CIRCONSTANCE


CIRCONSTANCE, s. f. CIRCONSTANCIER, v. a. [Cir, et non pas cier. Voy. CIR. 2e et 3e lon.] Les circonstances sont les particularités, qui acompagnent un fait, une nouvelle, etc. Les circonstances des persones, du lieu, du temps, dela manière, etc. "Souvent les circonstances changent la natûre des chôses. = Circonstancier une afaire, un fait, c' est en marquer les circonstances.
   Circonstance, conjonctûre (synon.) Le 1er est relatif à l' action, le 2d au moment. La circonstance est une particularité de la chôse; la conjonctûre lui est étrangère, elle n' a de commun avec l' action, que la contemporanéité. _ Les conjonctures sont les circonstances du temps, et les circonstances seraient, s' il était permis de parler ainsi, les conjonctûres de la chôse. Encycl. Il est des actions, qui ne manquent d' aucune des circonstances qui peuvent les rendre bones, et qui cessent de l' être par la conjonctûre où on les fait.
   On dit, au Palais: Avec toutes ses circonstances et dépendances. Mde. de Sévigné fait allusion à cette manière de parler. "M. de la R. F. dit que je contente son idée sur l' amitié avec toutes ses circonstances et dépendances.
   Tout est de circonstance en cette matière, où il n' y a point de lois, dit-on, dans les Caûses célèbres; cette locution appartient aussi au langage du Barreau.
   Rem. Abbadie écrit circonstantier avec un t devant l' i: cette ortographe est tout à~ la~ fois contre l' analogie et contre l' usage; puisqu' on dit circonstance, on doit écrire, circonstancier avec un c devant l' i.
   Circonstancier, est le plus souvent employé au participe: c' est un fait bien circonstancié. Relation bien circonstanciée.

CIRCONVALLATION


CIRCONVALLATION, ou CIRCONVALATION, s. f. [2e lon. cion, et en vers, ci-on.] Fossé, que les assiégeans font autour de leur camp, avec des redoutes et d' aûtres fortifications, pour se garantir des ataques du dehors, et empêcher qu' il n' entre du secours dans la place assiégée.
   REM. Circonvalation et Contrevalation, s' emploient ordinairement avec le mot lignes; et remarquez que dans cette expression, ligne est seul déclinable, et que les aûtres mots ne se déclinent point. On dit au pluriel, lignes de circonvalation, de contrevalation, et non pas de circonvalations, comme dit Rollin.

CIRCONVENIR


CIRCONVENIR, v. a. CIRCONVENTION, s. f. [Cirkonveni, Cirkonvan-cion, en vers ci-on. 2e lon. 3e e muet au 1er, lon. au 2d.] Tromper artificieusement par des détours, etc. Tromperie artificieûse. "Des intrigues par lesquelles on travailloit à les circonvenir. Moreau. "Ces conventions équivoques, par lesquelles les Rois cherchoient alors à se circonvenir. Id.
   Rem. Ces mots ne sont guère d' usage qu' au Palais. L' Acad. les met pourtant sans remarque.
   Un Auteur moderne donne à circonvenir le sens d' entourer, parce que, peu fait aparemment au langage du Palais, il n' a pas compris la vraie signification de ce mot. "Il faloit que le Roi ne fût circonvenu que de gens qui le retinssent dans la funeste sécurité où il l' avoit mis. Je ne sais s' il faut apeller néologisme ou barbarisme l' emploi de ce verbe dans ce sens.

CIRCONVOISIN


CIRCONVOISIN, INE, adj. [Sirkon--voa-zein, zine; 2e et 3e lon.] Cet adj. n' a guère d' usage qu' au pl. et en parlant des lieux, des chôses, des persones, qui sont proches et autour de celles dont on parle. Lieux, peuples circonvoisins: Provinces, Nations, Paroisses circonvoisines.

CIRCONVOLUTION


CIRCONVOLUTION, s. f. [Sirkon--volu-cion, en vers ci-on: 2e lon.] Ce mot exprime plusieurs tours faits autour d' un centre commun. Il ne se dit guère qu' au plur. Faire plusieurs circonvolutions.

CIRCUIT


CIRCUIT, s. m. [Sir-kui: voy. CIR.] Enceinte, tour. Le circuit de la ville, des murailles. Faire un grand circuit, un long circuit. = Circuit de paroles: (fig.) ce qu' on dit avant que de venir au fait.
   Rem. Ce mot n' est guère fait pour entrer dans un vers, et sur-tout dans un vers lyrique. M. l' Ab Coquillot en a jugé aûtrement: il le fait de trois syllabes.
   Déjà la Seine doit, s' ouvrant à l' Univers,
   Oublier dans son cours, vingt circuits divers.
Il serait assez curieux, dit M. l' Abé de Fontenai, de voir quel parti le Musicien tireroit du mot circuit en trois syllabes.

CIRCULAIRE


CIRCULAIRE, adj. CIRCULAIREMENT, adv. [Sirkulère, lèreman: 3e è moy. et long; 4e e muet.] Circulaire, qui est décrit, ou qui se meut en rond, comme la circonférence d' un cercle: figûre circulaire; mouvement circulaire. _ D' une manière circulaire, en rond. Les cieux se meuvent circulairement.
   REM. Circulaire aime à marcher après le subst. La Fontaine le fait précéder.
   Le Lion, dit-il, mande par députés
   Ses vassaux de toute natûre,
   Envoyant de tous les côtés
   Une circulaire écritûre
   Avec son sceau, etc.
On dit une lettre circulaire, par laquelle on informe diverses persones d' une même chôse. _ Dans les couvens on dit, substantivement, la Circulaire, pour la lettre circulaire.

CIRCULANT


CIRCULANT, ANTE, adj. CIRCULATION, s. f. CIRCULER, v. n. [Sirku--lan, lan-te, la-cion, en vers ci-on; Sir--kulé: 3e lon. aux 2 1ers.] L' adj. est en usage dans le commerce, sur-tout depuis quelque temps. "Les papiers publics augmentent la masse des richesses circulantes. Rayn. "Comment peut-on être instruit des espèces circulantes dans un pays? Necker. "La proportion entre le dépôt d' argent et la somme des billets circulans. Id. _ M. Linguet a étendu l' usage de ce mot: "Des invectives contre la France, etc. etc.... voilà sur quoi porte l' éloquence circulante des Wighs et des Torys. _ Les Dictionaires ne mettent point cet adjectif verbal.
   Circulation est le mouvement de ce qui circule. La Circulation du sang, de la sève dans les arbres: la circulation de l' argent, des espèces, des effets de commerce, des papiers publics, etc.
   Circuler, se mouvoir en rond et périodiquement. Il se dit particulièrement du sang. "Le sang circule dans les veines. = On le dit aussi de l' argent, dans le 2d sens de circulation.

CIRCULATEUR


*CIRCULATEUR, s. m. On l' a dit aûtrefois pour Bateleur, Charlatan; et pour partisan de la circulation du sang. On ne le dit plus aujourd'hui, même dans le 2d sens, parce que persone ne s' avise de combattre cette opinion.

CIRE


CIRE, s. f. CIRER, v. a. CIRIER, s. m. [1re lon. au 1er: 2e e muet au 1er, é fer. aux deux aûtres.] 1°. La Cire est une matière molle et jaunâtre, qui reste du travail des abeilles, après qu' on en a exprimé le miel. = Cirer, enduire de cire; cirer des botes, de la toile, des gants. = Cirier, ouvrier qui travaille en cire. Acad. Voyez CIERGIER.
   2°. Cire, se dit aussi de la bougie et des cierges. "Dans cette maison, on ne brûle que de la cire. Les funérailles ont tant coûté pour la cire. La cire apartient au Curé, etc. Mais on ne dit pas une cire, pour dire une bougie. M. de St. Ange l' a dit. Voy. ASPECT. 3°. Cire à sceller, à cacheter; cire d' Espagne, cire rouge, verte, jaûne, bleûe. _ 4°. Humeur épaisse et jaûne, qui se forme dans les oreilles.
   On dit, proverbialement, d' un homme faible et facile, d' un enfant doux et docile, de toute persone, qui reçoit facilement toute sorte d' impressions, qu' il est mou comme la cire, que c' est de la cire molle. "Elle a le coeur comme de cire, et s' en vante, disant assez plaisamment, qu' elle a le coeur ridicule. Sév. "Si elle n' a pas été bien élevée, c' est à vous à racomoder cette cire, qui est encore assez molle pour prendre la forme que vous voudrez. La même. "Un de ces hommes foibles et faciles, qui sont de cire pour les moeurs du temps, et pour qui l' usage est la loi suprême. Marm. _ On dit aussi, comme de cire, de deux persones égales, de ce qui vient à propos, de ce qui va bien et se rencontre juste: "Elles sont égales comme de cire: cela lui vient comme de cire: "Si cet habit va bien, c' est autant de pris. Il sera comme de cire, dit le Tailleur. Mariv. _ On dit encôre, de celui qui maigrit, qu' il fond comme la cire au soleil; et de celui qui a la jaunisse, qu' il est jaûne comme cire.

CIRON


CIRON, s. m. Petit insecte, qui s' engendre entre cuir et chair, et qui est presque imperceptible. _ Il signifie aussi la petite ampoule que forme un ciron. = On dit d' une chôse extrêmement petite, qu' elle n' est pas plus grosse qu' un ciron.

CIRQUE


CIRQUE, s. m. [Cirke et non pas cier--ke.] Lieu destiné chez les anciens Romains pour les jeux publics, et particulièrement pour les courses de chevaux et de chariots.

CIRûRE


CIRûRE, s. f. [Cirûre, 2e lon.] Enduit de cire préparée. "La cirûre des bottes empêche qu' elles ne prènent l' eau.

CISâILLER


CISâILLER, v. a. CISâILLES, s. f. pl. [2e lon: mouillez les ll; 3e é fer. au 1er, e muet au 2d.] Les cisâilles sont de gros ciseaux qui servent à couper des plaques de métal. _ Il se dit aussi des rognûres qui restent de la monaie qu' on a fabriquée. En ce sens seulement, on dit au sing. de la cisâille. _ Cisâiller, en termes de Monaies, c' est couper avec les cisâilles les pièces fausses, légères.

CISEAU


CISEAU, s. m. [Cizo, 2e dout. au sing. lon. au plur. ciseaux. Pron. cizô.] Au sing. Instrument plat, qui tranche par un des bouts, et qui sert à travailler le bois, le fer, la pierre, etc. Ciseau de Sculpteur, de Maçon, de Menuisier, d' Orfèvre. _ Ouvrage du ciseau, de Sculptûre: "Ce Sculpteur a le ciseau savant, délicat, etc. = Au plur. Instrument composé de deux branches tranchantes en dedans, et jointes par un clou. "Une paire de ciseaux; couper avec des ciseaux. Ciseaux de Tâilleur, de Jardinier. Ciseaux à faire les cheveux.
   En ce sens, ciseau se dit quelquefois, quoique rârement, au sing. "On n' a pas encôre mis le ciseau à cette étofe. "Le Chirurgien lui a doné trois coups de ciseau. _ On dit Poétiquement, le ciseau de la Parque.

CISELÉ


CISELÉ, ÉE, adj. [2e e muet, 3e é fer. long. au 2d.] Argent ciselé, vaisselle ciselée. Voy. CISELER. _ Velours ciselé, à fleurs, à ramages.

CISELER


CISELER, v. a. CISELET, s. m. CISELûRE, s. f. [Cizelé, , lûre. 2e e muet, 3e é fer. au 1er, è moy. au 2d., lon. au 3e _ Richelet écrit ciseler, ou cizeler. Le 2d est plus conforme à la prononciation; mais le 1er l' est encôre plus à l' usage.] Le ciselet est un petit ciseau, dont les Orfèvres, les Graveurs, les Armuriers se servent dans leurs ouvrages. Travailler au ciselet: cela est fait au ciselet. = Ciseler, c' est travailler avec le ciselet; ciseler de la vaisselle d' argent. = ciselûre est l' ouvrage qu' on fait en ciselant.
   On dit aussi Ciseleur, de l' Ouvrier, dont le métier est de ciseler.

CISTRE


CISTRE. V. SISTRE.

CITADELLE


CITADELLE, s. f. [Citadèle, 3eè moy. 4e e muet.] Forteresse qui comande à une Ville.

CITADIN


CITADIN, INE, s. m. et f. [Cita-dein, dine.] Bourgeois, habitant d' une cité. Il n' est d' usage qu' en parlant des habitans de certaines Villes d' Italie, pour signifier ceux qui ne sont pas du corps de la Noblesse. _ Citadin, citoyen, habitant~, bourgeois, ne sont rien moins que synonymes. On dit les citadins des Villes de l' État de Venise, les citoyens de Rome, d' Athènes, les habitans des aûtres Villes, les bourgeois des villages.

CITATION


CITATION, s. f. CITER, v. a. [Cita--cion, en vers, ci-on, cité.] Citer, c' est 1°. Ajourner, apeler pour comparaître devant le Magistrat. Il ne se dit qu' en matière éclésiastique. = 2°. Alléguer; citer un passage, la Loi, les Auteurs anciens; et neutralement, sans régime, citer juste, citer faux. = Citation a les mêmes significations et les mêmes emplois. "Il n' a point comparu à la première citation. _ "Les Pédans sont sujets à faire beaucoup de citations inutiles. Bouh. "Il y a moins d' un siècle, dit La Bruyère, que les citations étoient très-fréquentes. Ovide et Catulle venaient avec les Pandectes au secours des pupilles.
   Que les citations soient courtes et serrées,
   Et n' en changez jamais les phrâses consacrées.
       L' Art. de Prêcher.
Rem. Citer a pour 2d. régime la prép à devant les noms, et au Palais devant les verbes. "Dieu nous citera tous à son Tribunal. "On l' a cité à comparoître.
   Citer son Auteur, nomer celui de qui l' on tient une nouvelle. "Il cite toujours ses Auteurs, mais ce ne sont pas des Auteurs grâves: "Je vous prie, ne me citez pas: Profitez de l' avis sans citer persone.

CITÉ


CITÉ, s. f. [2e é fer.] 1°. Ville. Il ne se dit en ce sens, qu' en Poésie et dans le style Oratoire. = 2°. En quelques Villes épiscopales, on le dit de la partie de la Ville où est l' Église cathédrale. On divise Paris en Ville, Cité et Université: On distingue aussi à Carcassone et ailleurs la Cité~ de la Ville. _ 3°. On le dit même en quelques Villes non épiscopales, de la partie de la Ville où est l' Église principale.

CITÉRIEUR


CITÉRIEUR, EûRE, adj. [2e é fer. 4e lon. au 2d.] Terme de Géographie. Ce qui est en deçà de notre côté. Il est oposé à ultérieur. "L' Inde citérieûre est en deçà du Gange.

CITERNE


CITERNE, s. f. CITERNEAU, s. m. [Citèrne, terno, 2e è moy.] On écrivait aûtrefois cisterne. = Une citerne est un réservoir sous terre, pour recevoir et garder l' eau de pluie. = Un citerneau est une petite citerne, où l' eau s' épûre avant que de passer dans la citerne.

CITOYEN


CITOYEN, ÈNE, subst. [Ci-toa-ien, iène, 3e è moyen dans le 2d; dans le 1er, en n' a pas le son d' an. _ Richelet écrit Citoien, le P. Follard Citoïen; mais cette manière d' écrire ferait prononcer Cito-ien, contre l' usage.] Suivant l' Académie, Citoyen est un habitant d' une Ville, d' une Cité. Riche Citoyen, sage Citoyen; bon Citoyen, zélé pour la Patrie; mais il n' a cet emploi que quand il se dit sans régime. Avec la prép. de, on ne le dit que des Républiques anciènes; les Citoyens de Rome, d' Athènes, de Lacédémone: on ne dit point les Citoyens de Paris, de Lyon, de Marseille, etc. ni de Rome moderne. _ J. J. Rousseau se qualifiait de Citoyen de Genève. Plusieurs se sont moqués de cette qualification. _ On dit aussi, Citoyen Romain, titre qui donait de grands droits: St. Paul était Citoyen Romain; mais on ne dit point Citoyen Parisien, Citoyen Lyonais, Marseillais, Bordelais, etc. Voy. Citadin et Bourgeois. _ La Beaumelle dit des ouvrages du Chev. de Méré. "Mlle. d' Aubigné en aimoit les pensées et en haïssoit le style. Elle revenoit toujours à son Plutarque, et sentoit déja qu' elle diférence il y a entre le style d' un Bourgeois de la Cour, et celui d' un Citoyen du Monde.
   Rem. Depuis quelque temps on l' emploie adjectivement. "Du Gay-Trouin fut sur le point de quiter la mer et de renoncer au service... mais il étoit trop Citoyen, pour prendre ce parti extrême. Thomas. "Ils n' étoient pas assez Citoyens pour sacrifier au bien public l' intérêt de leur grandeur, et celui de leur vengeance. Rayn.

CITRIN


CITRIN, INE, adj. CITRON, s. m. CITRONIER, s. m. [Citrein, trine, tron, tro--nié, 3e é fer. au dern.] Citrin se dit de ce qui est de couleur de citron. = Citron est une sorte de fruit de forme ovale, de couleur jaûne pâle et plein de jus. _ Citronier, arbre qui porte les citrons.
   Rem. Citron est quelquefois adjectif, tafetas citron, c. à. d. de couleur de citron.

CITRONÉ


CITRONÉ, ÉE, adj. CITRONELLE. s. f. [3e é fer. aux deux premiers, long au 2d. è moyen au 3e, où l' on ne prononce qu' une l.] L' Acad. écrit ces mots avec deux n. = Citroné se dit de ce qui sent le citron. = Citronelle est une espece de liqueur faite avec de l' eau-de-vie et du citron. _ On done aussi ce nom à la mélisse.

CITROUILLE


CITROUILLE, s. f. [Si-trou-glie; mouillez les ll, 3e e muet.] Sorte de fruit, qui devient extrêment grôs et qui rampe à terre avec sa tige et ses feuilles. Acad. Grosse courge. Trév. Sorte de plante fort connue, qui porte un fruit fort gros, qu' on nomme aussi citrouille. Rich. Port. _ En style bâs et populaire, on dit, d' une femme grôsse et malfaite, que c' est une citrouille, une grôsse citrouille.

CIVADIèRE


CIVADIèRE, s. f. [3e è moy. et long.] Voile du mât de beaupré.

CIVET


CIVET, s. m. CIVETTE, s. f. [Civè, vète, 2e è moy.] Le civet est une espèce de ragoût fait avec la chair de lièvre. _ Trév. écrit civé; mauvaise ortographe, qui induit à une plus mauvaise prononciation. = Civette est le nom, 1°. d' une herbe potagère, qu' on emploie principalement dans la salade; 2°. d' un animal qui ressemble à une grôsse fouine, et dont on tire une liqueur épaisse et odoriférante; 3°. de la liqueur qu' on tire de cet animal.

CIVIèRE


CIVIèRE, s. f. [2e è moyen et long, 3e e muet.] Espèce de brancard sur lequel on porte à brâs de la pierre, du fumier, de fardeaux. _ Le Proverbe dit: cent ans bannière et cent ans civière; pour marquer les révolutions de la fortune.
   Rem. * Le Peuple, en certaines Provinces, dit, une écivière, au lieu de dire, une civière.

CIVIL


CIVIL, ILE, adj. CIVILEMENT, adv. [3e e muet au 2d et 3e, civileman.] Civil, en parlant des choses, se dit, 1°. de ce qui concerne les citoyens; la vie civile, la société civile; guerre Civile. = 2°. Au Palais, il se dit par oposition à criminel. Procès civil, Lieutenant Civil. Matière, afaire, partie civile. = 3°. En parlant des pers. courtois, honête; un homme fort civil; une femme civile et honête. = On dit ordinairement civil envers: Flechier dit civil à: "Favorable à ceux qui méritoient sa protection, civil à ceux à qui il ne pouvoit être favorable. _ Le goût de la Symétrie, qui a produit tous les défauts de ce célèbre Orateur, a aussi produit ce faux régime. _ C' est peut être d' après cet exemple que l' Acad. a dit: "Il faut être civil à tout le monde. Voy. HONNêTE.
   Rem. Civil n' aime pas à précéder le subst. sur-tout au masculin.
   Et chacun afranchi des civils diférens,
   Rappelle son idée et conoit ses parens.
       Brébeuf.
  CIVILEMENT, d' une manière civile n°. 3°. Vivre civilement avec quelqu' un; le traiter civilement. = En matière civile: procéder, poursuivre, juger civilement. = Mort civilement, se dit d' un homme condamné à une peine qui emporte avec soi la privation des droits et des fonctions de la société. Il se dit aussi des Religieux, qui s' en sont privés volontairement eux-mêmes.

CIVILISÉ


CIVILISÉ, ÉE, adj. [Civilizé, zé-e: 3e é fer. long au 2d.] Les Peuples civilisés, les nations civilisées. _ Un procès civilisé. Voy. CIVILISER.

CIVILISER


CIVILISER, v. a. CIVILITÉ, s. f. [Dern. é fer.] Le verbe, en parlant des persones, signifie, rendre civil et sociable, polir les moeurs: "Le commerce des Grecs civilisa les Barbares. _ En parlant des chôses, c' est, en terme de Palais, rendre civil une matière criminelle; civiliser un procès, = Civilité, honêteté, courtoisie, manière honête et civile de vivre et de converser dans le monde.
   Rem. Quand civilité signifie la qualité de celui qui est civil, il ne se dit qu' au singulier. On dit à plusieurs, comme à un seul, votre civilité, et non pas vos civilités. _ On ne le met au pluriel que quand on veut exprimer les éfets, les démonstrations de la civilité: "Il m' a fait toute sorte de civilités. = On dit aussi, dans cette dernière acception, faire civilité à, sans article.
   Civilité, Politesse, (synon.) La politesse flate les vices des aûtres; la civilité nous empêche de mettre les nôtres au jour. Mont. Voy. POLITESSE.
   On dit, proverbialement, d' un homme, qui manque aux devoirs les plus ordinaires de la civilité, qu' il n' a pas lu la civilité Puérile, qui est le titre d' un ancien Livre.

CIVIQUE


CIVIQUE, adj. fém. [Civike.] Il ne se dit que de la courone de chêne, récompense de celui qui, dans la guerre, avait sauvé la vie à un Citoyen Romain. _ M. Le Mierre dans ses Fastes, l' emploie au lieu de civile.
   L' homme, par le lien des coutumes publiques,
   Peut être mieux uni que par les Lois civiques.
Le besoin d' une rime a produit l' emploi de ce mot au lieu de civiles, qui était le mot propre. _ Un Auteur très-moderne, ou peut-être son Imprimeur, a dit, au contraire, courone civile, pour civique. Él. de M. l' Ab. Bourdelin.

CLABAUD


CLABAUD, s. m. [Clabô, 2e lon.] Au propre, chien de chasse, qui a les oreilles pendantes, et qui se récrie mal-à-propôs sur les voies. = Au figuré; homme stupide et grossier, qui parle beaucoup et mal-à-propôs. = On dit aussi, figurément et familièrement, d' un chapeau qui a les bords pendans, qu' ils est clabaud, qu' il fait le clabaud.

CLABAUDAGE


CLABAUDAGE, s. m. CLABAUDERIE, s. f. [Clabodaje, bôderie, 2e lon. au 2d, dont la 3e e muet, la 4e lon.] Le bruit que font plusieurs chiens qui clabaudent, s' apèle clabaudage. _ On apèle clabauderie, une criâillerie importune et sans sujet.
   Rem. L' Acad. ne dit clabaudage que des chiens. Trév. et le Rich. Port. le disent aussi des hommes, dans le sens de clabauderie. _ Ces mots et les suivans ne s' emploient que dans le style familier et satirique. "Tu n' es en cela que l' écho d' un tas de clabaudeurs: leur clabaudage ne m' épouvante pas, et je ris de tes clabauderies.

CLABAUDER


CLABAUDER, v. n. CLABAUDEUR, EûSE, s. m. et fém. [Klabodé, bodeur, deû-ze; 2e dout. 3e lon. au 3e.] Au propre, aboyer fréquemment. "Ce chien ne fait que clabauder. _ Au figuré, crier, faire du bruit mal-à-propos et sans sujet; cet homme ne fait que clabauder. _ Crier contre quelqu' un; il clabaude sans cesse contre les gens de bien, contre ses supérieurs.
   CLABAUDEUR, grand criâilleur, qui crie beaucoup et sans sujet, qui invective, etc. c' est un clabaudeur éternel.

CLAIE


CLAIE, s. f. [Clê, ê ouv. et long.] Ouvrage de Vannier, plat, large et long, qui sert à divers usages. "Une claie à passer de la terre, du sâble. "On se sert à la guerre de claies pour faire des retranchemens. _ Trainer sur la claie, mettre un cadâvre sur une claie trainée publiquement par un cheval, conduit par le bourreau. On traine sur la claie ceux qui ont été tués en duel, ou qui se sont défaits eux-mêmes.

CLAIR


CLAIR, AIRE, adj. CLAIREMENT, adv. [Klèr, klère, klèreman: 1re ê ouv. au 1er, è moy. et long aux deux aûtres, 3e e muet.] Clair a plusieurs significations: 1°. Éclatant, lumineux, qui jète, qui répand la lumière. "Le feu est clair de sa nature; la lune est claire. _ On dit substantivement, clair de lune, le clair de la Lune: il fait clair de lune, un beau clair de lune. "Nous marchâmes toute la nuit au clair de la Lune. Il fait clair, il fait jour: "Il ne faisoit pas encôre clair quand nous partîmes. Il fait clair dans cette Église, dans cette chambre, etc. = 2°. Qui reçoit beaucoup de jour. "Ce cabinet est bien clair; Église, chambre fort claire = 3°. Luisant, poli. Plancher bien clair et bien froté; vaisselle fort claire. _ Cette Dame a le teint clair; vif et uni. = 4°. En matière de couleurs; moins foncé; verd clair; rouge clair, etc. = 5°. Transparent; clair comme cristal de roche; vitres bien claires. = 6°. Qui n' est point trouble, vin clair, eau claire; claire fontaine. = 7°. En parlant du temps, pur et serein; temps clair. = 8°. Qui a trop peu de consistance; ce sirop est trop clair. = 9°. Qui n' est pas assez serré; toile claire. = 10°. En parlant de la voix et des sons, net et aigu. Voix claire. = 11°. Intelligible, aisé à comprendre. Discours clair, idée, expression claire. = 12°. Évident, manifeste: Son droit est clair; la raison, la conséquence en est clair. = 13°. Net: esprit clair, jugement clair. = 14°. En parlant de l' argent; qu' on peut toucher quand on veut. "C' est de l' argent clair; il s' est payé des plus clairs deniers de la recette.
   Rem. Malherbe écrit cler, et le fait rimer avec aveugler. Il aimait à rimer aux yeux comme à l' oreille. _ C' est une rime Normande.
   On dit, proverbialement, d' un homme qu' on croit ne devoir pas réussir dans une afaire, qu' il y fera de l' eau claire, ou toute claire.
   CLAIR, adv. Voir clair, entendre clair. _ Il se dit sur-tout au figuré; voir clair dans une afaire. "Il voit clair: il voit fort clair; il a l' esprit pénétrant. _ Il entend fort clair; il a beaucoup d' intelligence; il entend à demi mot. = Parler clair, d' une voix grêle et aigûë: il parle clair comme une femme. Figurément, parler clair et net, ou haut et clair, franchement, sans adoucissement et sans détour. "En déclarant haut et clair, que celui qui se dit mon ami ne l' est point, et que je ne suis point le sien, j' avertis le public de se tenir en garde contre le mal que j' en pourrois dire. J. J. Rouss. _ On dit encôre prouver clair comme le jour, que, etc. Mais ce n' est pas à dire que clair adverbe puisse remplacer toujours l' adverbe clairement et s' unir à tous les verbes, auxquels celui-ci peut se joindre. Je ne voudrais pas dire avec Bossuet: "Article dont il suit, plus clair que le jour, que, etc. Je dirais, dont il suit clairement que, etc.
   Il est clair (évident) que régit l' indicatif: "Il est clair que vous vous êtes trompé. Dans la phrâse négative, ou quand il y a du doute, c' est le subjonctif qu' il faut mettre. "Non, il n' est pas clair que je me sois trompé; mais il est clair que vous avez mal entendu. Est-il donc aussi clair que vous dites que vous eussiez raison dans cette occasion? _ Il se dit ordinairement sans régime des noms: Il peut pourtant régir la prép. à, comme évident: "Il étoit clair à tous les gens sensés qu' une dispute pour une couronne ne s' accommodoit pas si aisément. Hist. d' Angl.
   À~ clair, adv. Sans rien laisser de trouble. Tirer du vin à clair. Rich. tant le grand que le portatif. L' Acad. dit à clair, ou au clair, indiféremment. Au figuré, on dit, toujours au clair: "Si elle ne tire pas tout cela au clair, elle doit compter que la Justice imputera envers elle tout ce qui lui sera louche.
   * On disait autrefois, voir à clair "On voit à présent à clair l' intention de, etc. On dit aujourd'hui clairement.
   CLAIREMENT, au propre, d' une manière claire, nettement, distinctement: distinguer clairement les objets, la voix, etc. = Au figuré, 1°. d' une manière intelligible: parler clairement; expliquer clairement un passage. = 2°. Évidemment, manifestement: démontrer clairement une proposition, prouver clairement ce qu' on a avancé.

CLAIRER


*CLAIRER, v. n. Mot usité en Franche-Comté. "Faites clairer le feu. Ce mot n' est pas français.

CLAIRET


CLAIRET, ETTE, adj. [Klèrè; 2e è moy.] Le masc. se dit proprement du vin rouge, à la diférence du blanc: vin blanc et vin clairet. _ Subst. masc., du blanc et du clairet. = Le fém. se dit d' une liqueur faite avec de l' eau de vie, du sucre, etc., qu' on apèle eau clairette.

CLAIRE-VOIE


CLAIRE-VOIE, s. f. [Klèr-voâ; 1re ê ouv. 2e lon.] Dans un parc ou dans un jardin, ouvertûre faite à rez-de-chaussée dans le mur, et qui n' est fermée que par une grille, ou par un fôssé apelé saut de loup.
   À~ CLAIRE VOIE, adv. Semer à claire-voie; en termes de Jardinage, c' est jeter la graine en terre le moins épais qu' il se peut. _ Ouvrage d' osier à claire voie, dont les parties sont éloignées les unes des aûtres. _ On le dit aussi de tous les tissus qui ne sont pas serrés.

CLAIRIèRE


CLAIRIèRE, s. f. [Klè-riè-re; 1re et 2de è moy. long à la 2de, 3ee muet.] C' est dans une forêt, un endroit tout-à-fait dégarni d' arbres.

CLAIRON


CLAIRON, s. m. [Clèron; 1reè moy.] Sorte de trompette dont le son est aigu et perçant. "Le son des trompettes et des clairons. Il ne s' emploie plus qu' en Poésie.

CLAIR-SEMÉ


CLAIR-SEMÉ, ÉE, adj. [Clèrsemé, mé-e; 1reê ouv. 2e e muet, 3e é fer. long au 2d.] Qui n' est pas bien serré, qui n' est pas près à près. = Dans ce composé, clair est adverbe et indéclinable. Bossuet, ou l' Éditeur de ses OEuvres, ou l' Imprimeur, le déclinent mal-à-propos. "Ces passages y sont bien clairs-semés. On dit, clair-semée au fém., et clair-semés, clair-semées au plur., et non pas, claire-semée, clairs-semés, claires-semées. = Au propre, blé clair-semé, avoine clair-semée. = Au figuré: "Les beautés, dans ce livre, sont clair-semées: il y a quelques beaux traits, mais de loin à loin.
   On dit proverbialement, que l' argent est clair-semé chez quelqu' un, pour dire, qu' il en a fort peu.

CLAIRVOYANCE


CLAIRVOYANCE, s. f. CLAIRVOYANT, ANTE, adj. [Klèr-voa-iance, ian; 3e lon. _ Richelet écrit clairvoiant: cette ortogr. n' est ni selon l' usage, ni suivant l' étymologie.] La clairvoyance est la sagacité et la pénétration dans les afaires. Acad. Discernement par lequel on voit la fin des chôses, et l' on en prévoit les conséquences. Trév. J' aimerais mieux cette dernière définition. "Rien n' échape à sa clairvoyance. L' Acad. dit que ce mot vieillit: ce serait domage: mais il reprend faveur depuis quelque temps, et il est bien bon à conserver. = Clairvoyant, est celui qui est intelligent, éclairé et pénétrant dans les afaires. Acad. Qui a l' esprit fin et pénétrant; qui découvre les chôses obscûres, qui prévoit les futûres. Trév. Cette définition est encôre préférable à la première. "Vous ne le tromperez pas, il est trop clairvoyant: femme habile et clairvoyante. Voyez ÉCLAIRÉ.
   CLAIRVOYANT, ne s' emploie qu' au figuré: cependant il y a une Comédie de l' Aveugle Clairvoyant, où ce mot est employé au propre. On ne peut le dire que dans cette ocasion. _ Il suit ordinairement le substantif. En vers et dans la prôse poétique ou oratoire, il peut élégamment précéder:
   Inspirez à ce jeune Roi,
   Avec l' amour de votre Loi
   Et l' horreur de la violence,
   Cette clairvoyante Équité,
   Qui, de la fausse vraisemblance,
   Sait discerner la vérité.
       Rousseau.

CLAMART


*CLAMART, s. m. Mot employé dans des vers cités dans l' Ann. Litt.
   Ces Rimailleurs, de qui la foule obscûre
   Est tous les mois inhumée au Mercûre;
   Vaste Clamart, où tous nos Trépassés
   Gissent en paix, l' un sur l' aûtre entâssés.
Clamart, est un quartier de Paris, dans le faubourg Saint-Marceau, où il y a un grand Cimetière, où l' on enterre sur-tout ceux qui meurent à l' Hôtel-Dieu.

CLAMATEUR


*CLAMATEUR, s. m. Néologisme. Criard, criailleur. "Dès que le peuple cesse d' être agreste et clamateur; il devient sérieux, vain, débauché. Le Mercier. _ Ce mot n' a pas l' air de faire fortune.

CLAMER


*CLAMER, v. n. Vieux mot. Apeler nomer.
   Tel se fait Maître aux Arts clamer;
   Qui ne sait ni texte, ni glôse.
Ce mot est encôre en usage pour signifier, retirer à droit lignager ou à droit féodal. On dit, en ce sens, clameur, pour, retrait.

CLAMEUR


CLAMEUR, s. f. [Kla-meur.] Grand cri. Acad. Plainte sans raison; cri public et tumultueux, causé par quelque trouble. Trév. Cris, de grands cris. Rich. Port. Trévoux l' emporte ici, à mon avis; les deux aûtres définitions sont trop vagues. = Clameur, se dit ordinairement au pluriel: "Les clameurs d' une populace mutinée: on entendit de tous côtés de grandes clameurs: ce discours excita les clameurs de toute l' assemblée. = Quand on l' emploie au singulier, on le dit de plusieurs, et non pas d' une seule persone. Clameur publique, clameur universelle, tumultueûse. _ La Fontaine le dit au singulier, et d' un seul.
   Une Montagne en mal d' enfant,
   Jetoit une clameur si haute, etc.
   Dom Pourceau crioit en chemin
   Comme s' il avoit eu cent Bouchers à ses trousses.
   C' étoit une clameur à rendre les gens sourds.
Cela ne vaudrait aujourd'hui, même dans une Fable; on dirait, c' étoient des cris, etc.
   CRI, CLAMEUR (synon.) Le dernier de ces mots ajoute à l' aûtre une idée de ridicule, par son objet, ou par son excès. "Le Sage respecte le cri public, et méprise les clameurs des sots. (Encycl.) Beauz. synon.
   Ce mot est fort beau au pluriel: "Combien de fois, dans les armées, contre ses propres lumières, contre toutes les règles de la guerre, un Général s' est laissé précipiter par les clameurs d' un vulgaire insensé, et a tout perdu, pour éviter le vain reproche de n' avoir pas eu le courage de tout hasarder. Neuville. _ Voy. CLAMER.

CLAN


CLAN, s. m. Nom qu' on donne en Écosse et en Irlande, à une Tribu, formée d' un certain nombre de familles.

CLANDESTIN


CLANDESTIN, INE, adj. CLANDESTINEMENT, adv. CLANDESTINITÉ, s. f. [Klandès-tein, tine, tineman, tinité; 2e è moy. 4e e muet au 2d et 3e.] On apèle clandestin, ce qui se fait en cachette, et contre les Lois. Mariage clandestin, assemblée clandestine: se marier, s' assembler clandestinement; la clandestinité empêche la validité d' un mariage. _ L' usage de ces trois mots est borné à ses phrâses, pour le propre. = Au figuré, il a plus d' étendûe: démarches, intrigues clandestines, etc.

CLAPIER


CLAPIER, s. m. SE CLAPIR, v. réc. [2e e fer. au 1er. _ On a dit aûtrefois, glapier, se glapir.] On apèle clapier, certains petits trous faits exprès, où les lapins se retirent; et une machine de bois où l' on nourrit des lapins domestiques, et qui est faite à l' imitation des clapiers. _ On done aussi ce nom à un lapin élevé dans ces sortes de trous ou de machines. On dit, un clapier, ou un lapin de clapier. = Par extension, on le dit aussi d' un mauvais lapin. = Se clapir, c' est se blotir, se tapir, se cacher dans un trou. = Il ne se dit guère au propre, que des lapins, et toujours à la 3e persone.

CLAQUE


CLAQUE, s. f. [Klake, 2e e muet.] Coup du plat de la main: "Une claque sur les fesses. _ Dans le jargon moderne, on le fait masculin, dans le sens de claqueur: "Les claques philosophiques se promirent bien de porter la pièce aux nûes.
   CLAQUE, s. f. Est aussi une espèce de sandale qu' on met par-dessus les souliers, pour se garantir de l' humidité et des crotes.

CLAQUEDENT


CLAQUEDENT, s. m. [Klakedan; 2ee muet, 3e lon.] Terme de mépris. _ 1°. Gueux, misérable, qui tremble de froid. Il est bâs. = 2°. Braillard, qui ne fait que parler, sans savoir ce qu' il dit. Il est familier.

CLAQUEMENT


CLAQUEMENT, s. m. CLAQUER, v. n. *CLAQUEUR, s. m. [Klakeman, klaké, kla-keur; 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Claquement, ne se dit qu' avec dents et mains; le 1er, pour signifier le bruit que font les dents d' un homme qui tremble de froid, le 2d, pour exprimer le bruit que font les mains, en les frapant l' une contre l' autre. = Claquer, c' est faire un certain bruit aigu et éclatant: claquer des mains; un fouet qui claque bien. = Faire claquer son fouet, se dit au propre, d' un charretier, d' un postillon; au figuré, d' un homme qui fait l' important, et qui fait valoir le petit pouvoir qu' il a. = On dit, de celui dont les dents se choquent par un tremblement causé par le froid ou la peur, qu' il claque des dents, ou, que les dents lui claquent.
   *CLAQUEUR, est un mot inventé depuis peu, parce que la chôse qu' il exprime est devenûe plus comune. On claque les Orateurs dans les Académies, et les Prédicateurs dans l' Eglise, comme les Acteurs au Théâtre. C' est avilir l' éloquence, au lieu de l' honorer. Voyez BROCHURIER.

CLAQUEMURER


CLAQUEMURER, v. a. [2e e muet; l' u est bref devant la syll. masc. claquemurant, il claquemuroit, il claquemura etc. Il est long devant l' e muet, il claquemûre, claquemûrera, etc.] Renfermer, resserrer dans une étroite prison. "On l' a claquemuré, il a été claquemuré dans les petites maisons, dans un fort, etc. = Ce terme est du style plaisant et malin: il est un peu bâs, et paraît peu digne d' entrer dans une Histoire serieûse. "Dépourvus de magasins, claquemurés dans un coin, eux et leurs bestiaux, soufroient également de la famine. Anon.

CLAQUE-OREILLE


CLAQUE-OREILLE, s. m. Il se dit, dans le style plaisant et un peu bâs, d' un chapeau, dont les bords sont pendans; et quelquefois, de celui qui le porte.

CLAQUET


CLAQUET, s. m. [Klakè. Trév. renvoie à CLIQUET. Le Rich. Port. dit l' un et l' aûtre. L' Acad. ne met que le 1er.] Petite latte, dans un moulin, qui est sur la trémie, et qui batant sur la meûle, fait du bruit. = On dit, des femmes babillardes, que leur langue va comme le claquet, ou le cliquet d' un moulin.

CLARIFICATION


CLARIFICATION, s. f. CLARIFIER, v. a. [Klarifika-cion, en vers, ci-on, kla--rifié.] Clarification, est l' action de clarifier, ou de rendre claire, une liqueur qui est trouble. Clarifier le vin, un sirop, etc. La clarification d' une liqueur, d' un sirop.

CLARINE


CLARINE, s. f. CLARINETTE, s. f. [3e e muet au 1er, è moy. au 2d: Clarinète.] Le 1er se dit d' une sonette, qu' on pend au cou des animaux, qu' on fait paître dans une forêt; le 2d, d' une espèce de hautbois.

CLARTÉ


CLARTÉ, s. f. 1°. Lumière, splendeur: la clarté du jour, du soleil, de la lune, des étoiles. "Lire à la clarté du feu, d' une lampe, d' un flambeau. Fuir la clarté: "Les hibous fuient la clarté. Voy. LUEUR. = 2°. Transparence: la clarté du verre augmente le prix des lunettes. = 3°. Figurément, netteté de l' esprit: parler, écrire avec clarté; expliquer quelque chôse avec une grande clarté.
   Rem. Clarté, ne se dit point des persones et il se dit rârement au pluriel, excepté en Poésie.
   Les Animaux ont l' instinct pour partage;
   De sa raison, l' Homme est plus glorieux:
   Mais la sagesse est la raison des Dieux.
   Sans ses clartés, la nôtre dégradée,
   Est toujours foible, et toujours mal gardée.
       Rousseau.
  Mais sans tes clartés sacrées;
  Qui peut conaitre, Seigneur,
  Les foiblesses égarées
   Dans les replis de son coeur. Id.

CLâSSE


CLâSSE, s. f. [Clâce; 1re lon.] 1°. Ordre, suivant lequel on range diverses persones, ou l' on distribûe diverses chôses. "Grand d' Espagne de la première Clâsse. _ Figurément, Peintûre, Poète, Théologien, Prédicateur de la première Clâsse. = 2°. Les diférentes salles d' un Collège où s' assemblent les Écoliers. "Ils étudient en même Clâsse. _ On le dit quelquefois des Ecoliers eux-mêmes: Le Régent y est alé avec toute sa Clâsse; Et aussi du temps que les Écoliers sont assemblés pour prendre la leçon: au comencement ou à la fin de la Clâsse.
   Rem. 1°. On dit vulgairement, que les Écoliers manquent la clâsse, quand ils n' y vont pas. Fontenelle dit, dans le même sens, de M. de Tournefort, qu' il manquoit à sa Classe pour aller herboriser. Ce régime est irrégulier.
   2°. Double de la première Classe, est une expression tirée du Bréviaire. L' Auteur du Tartufe Epistolaire l' emploie figurément. "C' est une sotise double de la première Classe. _ Cette allusion ne sera pas du goût de tout le monde, même sous la plume d' un Curé vrai, ou soi-disant.

CLASSER


*CLASSER, v. a. [Clacé; 2eé fer. devant l' e muet l' a est long: je clâsse, il clâssera, etc.] Ranger par clâsses. Voyez CLâSSE, n°. 1°. Ce mot est nouveau: il est à la mode; il est utile: on peut en bien augurer. "On a beau classer les hommes, chercher à établir l' égalité entr' eux, les talens détruisent toujours le niveau. Linguet. Souvent je m' étone moi-même, quand je réfléchis au mécanisme de la mémoire, à la manière dont les idées se clâssent et s' arrangent à mesûre qu' elles naissent. Marm. "Tous les objets y sont classés avec une justesse qui supôse un jugement sain, etc. L' Ab. de Fontenai. "On nous trouvera peut-être un peu sévères dans le degré d' évidence que nous exigeons, pour classer une maladie dans le rang de celles que l' art peut guérir. Voullonne.

CLASSIFICATION


*CLASSIFICATION, s. f. Mot barbâre, forgé depuis peu. "Cette méthode s' accorde fort bien avec la classification des conaissances humaines. Anon. "Mon déplacement va ocasioner un dérangement considérable dans la classification phisique de tous les États. Test. Polit. de l' Angl. _ On dit depuis peu, classer; mais persone, que je sache, n' a encôre dit classifier: ainsi, à vouloir exprimer substantivement cette idée, c' est classation qu' il faudrait dire, et non pas classification.

CLASSIQUE


CLASSIQUE, adj. [Klacike.] Il ne se dit qu' avec Auteur. On apèle Auteurs Classiques, les Auteurs anciens, généralement aprouvés, et qui font autorité dans une certaine matière, comme Homère, Demosthène, Platon, Aristote, Virgile, Cicéron, Tite-Live, etc. _ L' Ab. des Fontaines done à ce mot un aûtre sens, qui n' est pas autorisé par l' usage. "Ce que je pardone moins à l' Auteur... c' est de citer des vers classiques (c. à. d. des vers de Collège) qui doivent mourir dans les lieux où ils sont faits.

CLATIR


CLATIR, v. n. C' est, en parlant d' un chien qui poursuit le gibier, redoubler son cri.

CLAUDICATION


CLAUDICATION, s. f. [Clodika-cion.] Action de boîter. Ce terme n' est usité que parmi les Savans. Il y aurait du pédantisme à s' en servir dans le discours ordinaire.

CLAVEAU


CLAVEAU, s. m. [Klavo.] Maladie contagieuse, qui ataque les bêtes à laine.

CLAVECIN


CLAVECIN, s. m. CLAVECINISTE, s. m. [Klave-cein, ciniste. Puisque l' e est muet, il convient mieux d' écrire clavecin, que clavessin, comme on le voit dans le Dict. Gram. _ Trév. met l' un et l' aûtre. L' Acad. ne met que le 1er. _ Elle ne met pas Claveciniste, quoique ce mot soit fort usité. Il est vrai qu' il n' est pas ancien dans la Langue. On ne le trouve pas non plus dans Trév. ni dans le Rich. Port.] Un clavecin est un instrument de musique, une longue épinette à un, ou plusieurs claviers, dont les cordes sont de métal, et doubles. Jouer du clavecin, toucher le clavecin; acompagner du clavecin. = Claveciniste, Musicien qui joûe du clavecin: "l' organisation du Forte-piano est un service réel, rendu aux Artistes Musiciens, et spécialement aux Clavecinistes. Ann. Litt.

CLAVELÉ


CLAVELÉ, ÉE, adj. CLAVELÉE, s. f. [2e e muet, 3e é fer. long au 2d et au 3e.] L' adj. se dit des bêtes à laine, qui ont le claveau, ou la clavelée. _ Le subst. est le nom de la maladie: c' est la même chôse que claveau. "Plus de la moitié de son troupeau est mort de la clavelée.

CLAVETTE


CLAVETTE, s. f. [Klavète: 2eè moy. 3e e muet.] Espèce de clou plat, qu' on passe dans l' ouvertûre faite au bout d' une cheville, d' un boulon, pour les arrêter.

CLAVICULE


CLAVICULE, s. f. Terme d' Anatomie. C' est le nom de chacun des deux ôs, qui ferment la poitrine par en haut, et qui l' atachent aux deux épaûles. Ils en sont comme les clefs: d' où vient leur nom. Clavicule, petite clef, du mot latin clavis.

CLAVIER


CLAVIER, s. m. [Kla-vié: 2eé fer.] 1°. Petite chaîne, ou cercle d' acier ou d' argent, servant à tenir plusieurs clefs ensemble. = 2°. La rangée des touches d' une épinette, d' un clavecin, d' un jeu d' orgues.

CLAûSE


CLAûSE, s. f. [Klôze: 1re lon. 2e e muet.] Disposition particulière, faisant partie d' un traité, d' un édit, d' un contrat, etc. Claûse expresse, ou conditionelle, favorable, ou odieûse, etc. etc.
   Rem. 1°. Claûse se dit plutôt des contrats entre particuliers: et condition, des Traités entre les Souverains.
   2°. M. Caraccioli parle des claûses d' un procès: "On voit bien, lui dit le Curé Bas-Breton, que vous n' avez jamais eu de procès: car dans votre 1re Edition, vous nous auriez épargné cette expression barbâre les claûses d' un procès: mais vous corrigez cette méprise, et vous mettez, si l' on n' en conait pas les motifs, expression plus française, dit ironiquement le critique. _ On ne dit, ni les claûses, ni les motifs d' un procès, on dit, les moyens.

CLAUSTRAL


CLAUSTRAL, ALE, adj. [Clos-tral, trale.] Qui apartient au cloître. Les liens claustraux, Prieur claustral.

CLAUSûRE


*CLAUSûRE, s. f. Vieux mot: Il s' est dit autrefois pour clotûre. "La clausûre s' observera, selon les propres termes du Sacré Concile de Trente. St. François de Sales.

CLAYON


CLAYON, s. m. CLAYONNAGE, ou CLAYONAGE, s. m. [Klé-ion, io-nage; 1re é fer. tout bref.] Clayon est une petite claie, sur laquelle on fait égouter des fromages. _ On done aussi ce nom à une aûtre petite claie sur laquelle les Pâtissiers portent diverses pâtisseries. = Clayonage est un assemblage fait avec des pieux et des branches d' arbres en forme de claies, pour soutenir des terres et les empêcher de s' ébouler.

CLEF


CLEF, s. f. [Pron. Klé, même devant une voyelle.] 1°. Instrument de fer ou d' acier, pour ouvrir et fermer une serrûre. = 2°. Clef de voûte, la pierre du milieu, qui ferme la voûte. = 3°. Clef de lit, l' instrument avec lequel on tourne les vis, pour monter ou démonter le bois de lit. = 4°. Clef d' épinette, de clavecin. Instrument avec lequel on tourne les chevilles, pour tendre ou relâcher les cordes. = Clef d' un pressoir, la vis qui sert à serrer et à relâcher. = 5°. En terme de Musique, certaine marque mise au comencement d' un air, pour faire conaître l' intonation des notes par raport à leur position. = 6°. À~ l' égard de certains ouvrages, dont les noms sont déguisés, ou qui sont écrits d' une manière énigmatique, c' est l' explication des noms suposés, ou des termes obscurs. "On fit autrefois beaucoup de clefs diférentes des Caractères de la Bruyère. _ Dans ce sens, on apèle clef d' un chifre, l' alphabet, dont est convenu, et qui sert à chifrer et à déchifrer les dépêches.
   7°. Clef s' emploie, au figuré, en plusieurs sens. Il se dit de certaines places fortes de la frontière d' un État. Calais est une des clefs de la France; de ce qui done une grande ouverture pour les Sciences: La Grammaire est la clef des Sciences, la Logique, de la Philosophie; de ce qui est nécessaire pour avoir l' intelligence d' un ouvrage, d' un systême. "C' est-là la clef de tel traité, de tel systême. = On apèle clef de meute, un chien qui relève les défauts des autres chiens de la meute, acoutumés à le suivre. On le dit, figurément, de ceux qui, dans les compagnies, entraînent ordinairement les aûtres.
   CLEFS, au pl. (st. fig.) L' autorité de l' Église, "la Puissance des Clefs; les Clefs du Paradis, du Royaume des Cieux: le pouvoir de lier et de délier.
   8°. En st. prov., avoir, ou donner la clef des champs, c' est être, ou mettre quelqu' un en liberté d' aler où l' on veut, où il veut. On le dit même des animaux.
   À~ CLEF, adv. Avec la clef. Fermé à clef.
   SOUS LA CLEF, adv. Dans un endroit fermé à clef. "Cela est sous la clef.

CLÉMENCE


CLÉMENCE, s. f. CLÉMENT, ENTE, adj. [Clémance, man, mante: 1reé fer. 2e long.] La Clémence est une vertu, qui porte à pardoner les offenses, et à modérer les châtimens. On dit: la clémence d' un vainqueur, qui épargne les vaincus: la clémence d' un Roi, qui pardonne à son sujet. Cette expression supôse, en général, une grande supériorité dans celui qui pardone. * M. Dotteville, Traducteur de Salluste, dit, dans le parallèle de César et de la Caton: "l' un s' atira de la réputation par sa douceur et sa clémence; l' aûtre, du respect par sa sévérité. _ Clémence n' était pas là le mot propre. Dans la suite, César fut clément envers ses énemis: mais alors, simple Sénateur Romain, il n' avait pas beaucoup d' ocasions d' exercer sa clémence. Le latin misericordia~ doit être traduit en cet endroit par, bonté, humanité. ANN. LITT. _ L' Acad. avertit que clémence ne se dit proprement que de Dieu, des Souverains, et de ceux qui sont dépositaires de leur autorité. _ Elle ajoute, que dans un sens un peu plus étendu, on dit, d' un fils, qu' il a recours à la clémence de son père.
   CLÉMENT, qui a la vertu de clémence. Prince, Juge, Vainqueur, Père clément: "Dieu est clément et miséricordieux.

CLEPSYDRE


CLEPSYDRE, s. f. [Clep-cidre.] Horloge d' eau, qui servait à mesurer le temps chez les Anciens. _ On done aussi ce nom à plusieurs machines hydrauliques des Anciens.

CLERC


CLERC, s. m. [Clèr, è moy. le c final ne se pron. pas.] 1°. Celui qui, par la tonsûre, est entré dans l' État Eclésiastique. = 2°. Celui qui écrit, ou qui travaille sous un homme de Pratique: Clerc d' Avocat, de Procureur, de Notaire, du Grèfe, du Palais, etc.~ = 3°. En parlant de la Cour de Rome, Clerc de la Chambre, Prélat-Oficier de la Chambre Apostolique.
   Rem. Pendant long temps, les Éclésiastiques ont été les seuls en France à faire profession des Lettres; c' est pourquoi, dit Pasquier, on apelait Grand-Clerc, l' homme savant; Mauclerc, celui qu' on tenait pour bête, et la science fut apelée Clergie.
   On dit, en style proverbial, faire un pâs de clerc, une fausse démarche par ignorance. On le dit par allusion aux Clercs des Procureurs. = Compter de clerc à maître; rendre compte en détail de ce qu' on a reçu et déboursé de son maniement. = On dit d' un homme, dont les conaissances sont bornées, que ce n' est pas un grand Clerc.

CLERGÉ


CLERGÉ, s. m. [1re è moy. 2e é fer.] L' Ordre Éclésiastique, le Corps des Éclésiastiques. Le Clergé de France, l' Assemblée du Clergé; l' Évêque à la tête de son Clergé. Le Clergé séculier, le Clergé régulier, etc.

CLERGIE


*CLERGIE, Vieux mot. Science, doctrine. Voy. CLERC.

CLÉRICAL


CLÉRICAL, ALE, adj. CLÉRICALEMENT, adv. CLÉRICATûRE, s. f. [1reé fer. 4e e muet au 2d et 3e, lon. au dern.] Clérical se dit de ce qui concerne le Clerc, l' Éclésiastique. L' Ordre clérical, titre clérical; tonsûre cléricale, fonctions cléricales. = Cléricalement, d' une manière cléricale: "Être vêtu, vivre, se comporter cléricalement, comme doit le faire un bon Éclésiastique. = Cléricatûre, l' état, la condition du Clerc, de l' Éclésiastique. Droit, privilèges de cléricatûre.
   Rem. Trév. met Cléricat, pour signifier l' ofice des Clercs. Le Rich. Port. ne le dit que des Clercs de la Chambre Apostolique. L' Acad. ne le met en aucun sens. Ce mot est en éfet peu usité.

CLIENT


CLIENT, ENTE, subst. CLIENTèLE, s. f. [Kli-an, ante, antèle; 2e lon. 3e e muet au 2d, è moy. au 3e. _ Plusieurs, et M. Moreau et Mde de B... Hist. d' Angl. entr' aûtres, écrivent Clientelle avec deux ll: On ne voit pas de raison pour ces deux ll; l' Acad., n' en met qu' une.] Client se disait autrefois, chez les Romains, de celui qui s' était mis sous la protection d' un des plus puissans Citoyens. _ Il se dit aujourd'hui de celui qui a chargé de sa caûse un Avocat. "C' est mon client, je suis sa cliente. Acad.
   CLIENTèLE, Protégés pris collectivement. "Ce Seigneur avoit assemblé toute sa clientèle. = Protection: "Il est sous votre clientèle: "Engagement réciproque de clientèle et de protection. Moreau. Dans cette dernière phrâse M: Moreau l' emploie dans le sens de dévoument de la part d' un Client envers son Patron; ce qui ferait un 3e sens; mais clientèle n' est point usité en ce sens, n' en déplaise à l' illustre Auteur qui s' en est servi. _ Clientèle ne se dit pas non plus du Client à l' égard de son Avocat, ni de l' Avocat à l' égard du Client.
   Rem. Quelques persones trouvaient le mot de client un peu vieux, quoique l' Académie ne le déclarât pas tel. Pour moi, dit La Touche, je crois qu' on peut fort bien s' en servir, sur-tout lorsque partie pourroit être pris dans le sens de partie adverse. Je dirais, par exemple; c' est un habile Avocat, je suis son client; cet homme est mon client. Partie ne serait pas si bien là. Ailleurs, je me servirais toujours de partie.
   Gresset a employé client au figuré, dans le 1er sens.
   Et vil client de la fierté,
   À~ de méprisables idoles
   Prostituer la vérité.

CLIGNEMENT


CLIGNEMENT, s. m. CLIGNER, v. a. [mouillez le gn; 2e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Ils ne se disent que des yeux: "Il est sujet à un clignement d' yeux; il cligne sans cesse les yeux, il les ferme à demi par un mouvement involontaire.
   CLIGNOTEMENT, CLIGNOTER, ont le même sens que Clignement, Cligner. _ Rousseau a employé le participe Clignotant adjectivement et en le déclinant: Il dit de l' Envie:
   Ses yeux cavés, troubles et clignotans,
   De feux obscurs sont chargés en tout temps.

CLIMAT


CLIMAT, s. m. CLIMATÉRIQUE, adj. [L' Auteur du Dict. d' Ortogr. veut qu' on écrive Climactérique avec un c; mais ce c est inutile, et il est contre l' usage actuel et la prononciation, aussi bien que contre l' analogie.] Climat, espace de terre entre deux parallèles. _ Plus ordinairement région, pays. Climat chaud ou froid; changer de climat. = An ou année climatérique, reste des rêveries de l' Astrologie; chaque septième année de la vie humaine, et particulièrement la soixante-troisième, qui est la neuvième septénaire.

CLIN


CLIN, s. m. [M. Dandré-Bardon écrit comme on prononce: Clein d' oeil. C' est une mauvaise ortographe.]
   CLIN ne se dit qu' avec oeil: un clin-d' oeil, prompt mouvement de la paupière, qu' on baisse et qu' on relève en même temps. _ Faire un clin d' oeil à quelqu' un; lui faire un signe de l' oeil. _ En un clin d' oeil, en un moment, en fort peu de temps.

CLINCAILLERIE


CLINCAILLERIE, ou CLINQUAILLERIE. C' est ainsi que Pluche et M. Linguet écrivent ce mot. Cette manière est plus conforme à l' étymologie et au sens du mot. Mais l' usage le plus commun est pour quinquaille, quinquaillerie.

CLINCALIER


CLINCALIER, ou QUINQUALIER. Les sentimens ont été longtemps partagés sur ces deux mots. L' Acad. ne disait que le premier, qu' elle écrivait Clincaillier. Elle ne l' a pas mis dans la dern. édit. ou elle met Quincaille, Quincaillerie, Quincaillier.

CLINQUANT


CLINQUANT, s. m. [Klein-kan, deux longues.] Au propre, petite lame d' or ou d' argent qu' on met dans les broderies. _ On done aussi ce nom à des lames de cuivre qui brillent beaucoup. Les habits de masques, de balets sont chargés de clinquant. = Au figuré, en parlant des ouvrages d' esprit, faux brillant.
   À~ Malherbe, à Racan préférer Théophile,
   Et le clinquant du Tasse à tout l' or de Virgile.
       Boileau.
  Ce bon air, ces graces,
  Ce clinquant de l' esprit, ces trompeuses surfaces
  Cachent un homme afreux, qui veut vous égarer,
   Et que l'~ on~ ne peut voir sans se déshonorer.
       Méchant.

CLIQUE


CLIQUE, s. f. Société de gens qui s' unissent pour cabaler, pour tromper. Dangereuse clique. Il est de la clique.

CLIQUET


CLIQUET. voy. CLAQUET.

CLIQUETER


CLIQUETER, v. n. CLIQUETIS, s. m. [Kliketé, kliketi, 2e e muet.] Le verbe signifie, faire un bruit qui ressemble à celui que fait le claquet (ou cliquet) d' un moulin. _ Cliquetis, exprime le bruit que font les armes en choquant les unes contre les aûtres. "Cliquetis d' armes, d' épées. = Dans deux Journaux on l' emploie assez plaisamment au figuré. "Ce cliquetis continuel d' antithèses, qui fatigue l' oreille. Ann. Litt. "Ce cliquetis antithétique. Journ. de Mons. _ Cela est excellent dans le style critique.

CLIQUETTE


CLIQUETTE, s. f. [Klikète, 2eè moy.] Instrument fait de deux ôs ou de deux morceaux de bois qu' on se met entre les doigts, et dont on tire quelques sons mesurés, en les battant l' un contre l' autre. Jouer des cliquettes.

CLISSE


CLISSE, s. f. CLISSÉ, ÉE, adj. [Klice, klicé, cé-e; 2ee muet au 1er, é fer. aux deux autres, long au dernier.] Clisse est un clayon, une petite claie, faite d' osier, de jonc, propre à faire égouter les fromages. = Clissé se dit de ce qui est garni de clisse; bouteille clissée.

CLISTèRE


CLISTèRE, Voy. CLYSTèRE.

CLOAQUE


CLOAQUE, s. m. et f. [Klo-ake.] Les Dict. de Trév. et de Rich. le marquent masc. ou fém. _ Richelet ajoute, mais plus souvent masc. _ Le Rich. Port. ne lui done que ce dernier genre. L' Acad. le marque fém. en parlant d' un conduit de pierre vouté, par où l' on fait écouler les eaux et les immondices d' une Ville. Elle ajoute qu' en ce sens, il n' est d' usage qu' en parlant des ouvrages des Anciens. Elle le marque masc. en parlant d' un lieu destiné à recevoir les immondices; d' une maison sale et infecte. "Il est tombé dans un cloaque; cette maison est un cloaque. _ Fig. persone puante; cette femme est un cloaque. = On le dit aussi des vices, mais il n' est que du style simple: "Cloaque d' impureté, cloaque de toute sorte de vices.

CLOCHE


CLOCHE, s. f. 1°. Instrument résonant, de cuivre ou d' étain fin, fait en forme de vâse rond et vouté, qui va en s' élargissant par en bâs, avec un battant au milieu, pour en tirer du son. = 2°. Il se dit d' un verre, en forme de cloche, pour couvrir les melons, les concombres, et les préserver des injûres du temps; des vessies pleine de sérosités, qui viènent aux pieds, aux mains, etc. d' une manière de vâse où l' on fait cuire du fruit; d' un vaisseau de bois en forme de cloche; du haut d' une fleur, lequel forme un calice.
   Rem. Le Rich. Port. dit au propre, ébranler une cloche, soner une cloche. L' Acad. ne dit point ébranler, mais soner les cloches à la volée, en branle.
   Ce mot fournit à plusieurs expressions du style proverbial. _ Étoné comme un fondeur de cloches, quand il voit qu' il a manqué son coup. _ Fondre la cloche, se déterminer à aprofondir une afaire: "Il faut fondre la cloche. _ N' être pas sujet à un coup de cloche, à l' heûre, comme les Moines, les Chanoines. _ Faire soner la grosse cloche, faire parler le maître, ou celui qui a le plus autorité, de crédit. _ Entendre les deux cloches, les deux parties, le pour et le contre. = On dit, de celui qui varie dans ses discours, suivant diférentes insinuations, qu' il est comme les cloches; on lui fait dire tout ce qu' on veut. = On apèle Gentishommes de la cloche, ceux qui se sont anoblis par les charges municipales; parce qu' on sone la cloche pour les élections.

CLOCHE-PIED


CLOCHE-PIED, (à) adv. Sur un seul pied. "Aller, sauter à cloche-pied.

CLOCHER


CLOCHER, s. m. [Kloché, 2eé fer.] Bâtiment de maçonerie, ou de charpente, où les cloches sont pendues. "Clocher élevé; monter au clocher~. "Un Curé n' a pas besoin d' autre titre que de son clocher, pour la jouissance de ses dîmes.
   On dit proverbialement, d' un Bénéficier, qui jouit par provision du Bénéfice qu' on lui conteste, qu' il se bat des pierres du clocher; d' un homme qui n' a jamais voyagé, qu' il n' a jamais perdu de vûe le clocher de son Village; de celui à qui il ne reste plus qu' une ressource, qu' il emploie du mieux qu' il peut, qu' il tire du clocher: allusion à une Place dont toutes les fortifications extérieures seraient ruinées, et où l' on tirerait sur les énemis du haut du clocher.

CLOCHER


CLOCHER, v. n. Boiter en marchant. _ Le proverbe dit: il ne faut pas clocher devant le boiteux, parler de chôses désagréables devant les persones intéressées; parler de corde dans la maison d' un pendu. _ On le dit aussi pour exprimer qu' il ne faut contrefaire persone.
   On dit, figurément, qu' il y a quelque chôse qui cloche dans un raisonnement, dans une afaire, dans une comparaison, pour dire qu' il y a quelque chôse de défectueux; et qu' un vers cloche, quand la mesûre n' y est pas.

CLOCHETTE


CLOCHETTE, s. f. [Klochète; 2eè moyen. 3e e muet.] Petite cloche, qui se peut porter à la main.

CLOISON


CLOISON, s. f. CLOISONAGE, s. m. [Kloa-zon, zonaje.] Espèce de muraille, faite au dedans d' un bâtiment, de charpente et de maçonerie, ou de planches seulement. = Cloisonage se dit de toute sorte d' ouvrage de cloison. "Les chambres de cette maison ne sont séparées que par du cloisonage: tant pour la toise de cloisonage, etc.

CLOîTRE


CLOîTRE, s. m. CLOîTRER, v. a. CLOîTRIER, s. m. [Kloâ-tre, tré, trié, 1re lon. 2ee muet, au 1er, é fer. aux deux aûtres.] Le Cloître est cette partie d' un Monastère, faite en forme de galerie, ayant quatre côtés, avec un jardin, ou une cour au milieu. _ Il se prend aussi absolument pour le Monastère lui-même; se jeter dans un Cloître; vivre dans le Cloître, etc. _ On done aussi ce nom à l' enceinte des maisons où logent des Chanoines. Le Cloître Notre-Dame.
   CLOîTRER, enfermer dans un cloître. "Il n' y a presque plus de Religieûses qui ne soient cloîtrées.
   CLOîTRIER, Religieux vivant dans un Monastère à la diférence de ceux qui, ayant un bénéfice, font ailleurs leur résidence. _ Chez les Chartreux, on distingue aussi les Cloîtriers des Oficiers; distinction, dont les inconvéniens sont plus sensibles que les avantages.

CLOPIN CLOPANT


CLOPIN CLOPANT, adv. CLOPINER, v. n. Aler clopin clopant, en clopinant. "Je m' en irai donc clopin clopant, à petites journées, jusqu' à Paris. Sév. _ La Fontaine dit dans la fable du Pot de terre et du Pot de fer.
   Mes gens s' en vont à trois pieds
   Clopin clopant, comme ils peûvent.
   CLOPINER, marcher avec peine et en clochant un peu. Il clopine, il ne fait que clopiner, il va en clopinant. Il est du style familier.

CLOPORTE


CLOPORTE, s. m. [Trév. met aussi Clausporte, qui ne vaut rien. Danet, Furetière, le Dict. de l' Acad. font ce mot masculin. Plusieurs Médecins le font féminin. Suivant Richelet, le genre de ce mot n' est pas bien fixé, les uns le fesant masc. les aûtres fém. Le Rich. Port. ne le met que du premier genre, et l' Acad. aussi, dans la dernière édition.] Insecte, qui a grande quantité de pieds, et qui s' engendre ordinairement sous les pierres ou dans les murailles. Il entre dans des remèdes. Tant de cloportes écrasés et mis dans un bouillon, etc. Poudre, huile de cloporte.

CLôRRE


CLôRRE, v. a. [1re lon. 2ee muet.] Ce verbe est très-irrégulier. Il n' a que trois temps simples; l' indicatif présent, je clôs, tu clôs, il clôt, sans pluriel; le futur et le conditionel présent, je clôrrai, je clôrrois; le participe, clôs, clôse, au moyen duquel il a tous les temps composés: j' ai clôs, j' avois clôs, etc. Son emploi le plus ordinaire est à l' infinitif. = 1°. Fermer, faire que ce qui était ouvert ne le soit plus: clôrre les passages; clôrre la bouche, etc. _ Fig. Clôrre la bouche à quelqu' un, l' empêcher de parler.
   Rem. Ce verbe est peu usité: on dit plus communément fermer. "Je n' ai pas clôs l' oeil de toute la nuit: il vaut mieux dire, fermé l' oeil. _ Malherbe aimait fort ce verbe.
   L' exemple des amans est clos dans ce tombeau...
   Un chef d' oeuvre de la Nature,
   Au lieu du monde le plus beau,
   Tient ma liberté si bien clôse, etc.
   Quand j' aurai clôs mon dernier jour, etc.
   Il vaut mieux en vers qu' en prôse. _ L' Acad. le met sans remarque.
   CLôRRE est quelquefois neutre à la 3e persone. Cette porte, cette fenêtre ne clôt pas bien: après telle réparation elle clôrra mieux. _ Fermer vaut encôre mieux
   2°. Enfermer, entourer: environer de murâilles, de haies, de fossés. Il est plus usité en ce sens: clôrre un jardin, un parc, un Bourg, une Ville: clôrre de haies, de murâilles.
   3°. Achever, terminer. Clôrre un marché, un compte, un inventaire, un traité, un testament, etc. L' Acad. dit aussi clôrre une afaire, un concile, une assemblée.

CLôS


CLôS, CLôSE, partic. et adj. [Klô, klôse, 1re lon. 2e e muet.] Fermé. Jardin clôs de murâilles. Porte clôse, Ville clôse. _ Pâque clôs, le Dimanche de Quasimodo, qui suit immédiatement celui de Pâques. _ Champ clôs: Lice, lieu enfermé de murâilles, où les Champions combataient aûtrefois. "Combatre en champ clôs. _ Il a les yeux clôs, il est mort: "Il n' eut pas plutôt les yeux clôs, que, etc. _ À~ yeux clôs, aveuglément et sans examiner. "Je signerai à yeux clôs tout ce que vous voudrez. _ On dit plutôt, les yeux fermés.
   On dit, figurément, (st. famil.) bouche clôse! n' en parlez pas, tenez cela secret. _ Ce sont lettres clôses, c' est une chôse secrète et cachée. _ Se tenir clôs et coi, tranquille et sans mouvement; clôs et couvert, en lieu de sureté, de peur d' être pris. Plus figurément encôre, cacher ses pensées et ses desseins. "Je l' ai voulu faire parler, mais il se tient clôs et couvert.
   CLôS, s. m. CLOSEAU, s. m. [Klô, klozo, 1re lon. au 1er, 2e dout. au sing. du 2d. lon. au pluriel, closeaux, pron. klozô.] Clôs est un espace de terre cultivé et fermé. Clôs de vigne, d' arbres fruitiers. _ Closeau est un petit jardin de paysan, clôs de haies.

CLOSSEMENT


CLOSSEMENT, s. m. CLOSSER, v. n. Ces deux mots expriment le cri de la poule. Acad. _ Trév. ajoute, qui a des poussins. Voy. GLOUSSEMENT, GLOUSSER.

CLôTûRE


CLôTûRE, s. f. [1re et 2e lon. 3e e muet.] 1°. Enceinte de murâille, de haies, etc. = 2°. L' obligation qu' ont les Religieûses de ne point sortir de leur Monastère; garder la clôture, rompre, violer la clôture. = 3°. Arrêté de compte. Clôture d' un compte, d' un inventaire. = 4°. En parlant d' une Assemblée, dernière séance, comme l' ouvertûre en est la première.

CLOTURER


CLOTURER, v. a. Il ne se dit qu' en parlant d' un compte, d' un inventaire, et il n' est d' usage qu' au Palais. L' Acad. ne le met pas.

CLOU


CLOU, s. m. [Monosyllabe bref. Au plur. Clous, et non pas cloux.] Petit morceau de fer ou d' aûtre métal, qui a ordinairement une tête et une pointe, et qui sert à atacher ou à pendre quelque chôse. "Atacher avec un clou, avec des clous: Ficher, cogner, faire entrer un clou dans... Pendre à un clou. River, rabatre, arracher un clou.
   Le style proverbial emploie quelquefois ce mot. _ Un clou chasse l' aûtre, les chôses nouvelles font oublier les anciènes. _ River les clous à quelqu' un, lui dire son fait, lui montrer qu' il a tort. L' Acad. dit, river le clou, au sing. _ Compter tous les clous d' une porte, s' ennuyer en atendant quelqu' un. _ On dit, qu' une chôse ne tient ni à fer ni à clou, quand on peut aisément la détacher: "Ne soyez pas en peine pour votre portrait: il ocupe toujours le même lieu, et tient à mon coeur, ce qui est bien plus vous dire qu' à fer et à clou. Mde. de Coulanges à Mde de Grignan. _ On dit aussi, d' une chôse dont on ne se soucie pas, ou qu' on méprise, qu' on n' en donerait pas un clou à souflet; et d' un homme fort maigre, grâs comme un cent de clous. _ Il ne manque pas un clou à ce bâtiment; il n' y manque rien.
   CLOU, signifie aussi un furoncle: il lui est venu un clou: son clou est percé, a percé, etc.

CLOUER


CLOUER, CLOUTER, v. a. Il ne faut pas confondre ces deux verbes. Le 1er signifie atacher avec des clous, et le 2d, garnir de clous. _ Clouer des lates, des images contre une murâille; clouer une caisse. _ Clouter un étui, une boite de montre, etc.
   CLOUER s' emploie au figuré, ordinairement au mode passif. Il ne bouge de ce lieu, il y est cloué; il est cloué à son bureau, il est fort assidu à son travail. "Tous les jours, malgré moi, je suis cloué sur mon ouvrage, Boil. "À~ moins que d' être cloué à Paris, rien ne peut m' empêcher d' aller à Poissi. Voit.

CLOUTERIE


CLOUTERIE, s. f. CLOUTIER, s. m. [2e e muet au 1er, é fer. au 2d; 3e lon. au 1er.] Clouterie se dit, 1°. du commerce des clous; 2°. du lieu où l' on fabrique les clous. = Cloutier est le nom du faiseur de clous et du Marchand qui les vend. Dans le 2d. sens, il se dit adjectivement: Marchand Cloutier.

CLYSTèRE


CLYSTèRE, s. m. Lavement. _ L' Acad. ne désaprouvait pas aûtrefois ce mot. Dans les dernières éditions, elle dit qu' on se sert plus ordinairement du mot de lavement, et de celui de remède. _ Le dernier est aujourd'hui plus à la mode. _ Dans l' Encyclopédie, on dit que clystère n' a plus lieu que dans le style burlesque, et lavement que dans les livres de Médecine. Beauz. Synon.

COACEMENT


COACEMENT, COACER. Trév. Voy. COASSEMENT, COASSER.

COACTIF


COACTIF, IVE, adj. [Ko-aktif, tive, 3e lon. au 2d.] Qui a droit de contraindre. Pouvoir coactif, puissance coactive.

COADJUTEUR


COADJUTEUR, TRICE, s. m. et fém. COADJUTORERIE, s. f. [Pron. le d.: 5e et dern. e muet. au dern.] Celui ou celle qui est adjoint à un Prélat, ou à une Abesse, pour lui aider à faire ses fonctions, et qui est ordinairement destiné à lui succéder après sa mort. Coadjuteur d' un Archevêque, d' un Évêque, d' un Abé; Coadjutrice d' une Abesse, d' une Abaye.
   COADJUTORERIE est la charge ou dignité d' un Coadjuteur, d' une Coadjutrice.

COADUNATION


*COADUNATION, s. f. Latinisme. Ces deux provisions sont incompatibles avec l' état de coadunation. Me. Gassier, Avocat à Aix. Il dit aussi coaduner: "Les deux titres pouvoient-ils être coadunés autrement que par une union?

COAGULATION


COAGULATION, s. f. COAGULER, v. act. Ce sont des termes didactiques, qui ne sont usités que parmi les Savans. [Ko-agu--lacion, en vers, ci-on; ko-agulé.] Coagulation est l' état d' une chôse coagulée, ou l' action par laquelle elle se coagule. _ Coaguler, figer, câiller. La présure coagule le lait. Le venin de la vipère coagule le sang. "Le sang extravasé se coagule.

COALITION


*COALITION, s. f. [Ko-ali-cion.] Anglicisme. Confédération, réunion de deux partis oposés. "Il leur a fait proposer la paix (aux Insurg.) avec une coalition contre la France. Anon.

COALLIÉS


COALLIÉS, s. m. plur. Terme de Gazettes et de Traités. M. Hénaut l' a employé. "Le Roi reçoit à Ensisheim une députation des treize Cantons et de leurs Co-alliés.

COASSEMENT


COASSEMENT, s. m. COASSER, v. n. [Ko-aceman, ko-acé: 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Ces deux mots expriment le cri des grenouilles.

COCAGNE


COCAGNE, s. f. [Mouillez le gn: dern. e muet. _ Quelques-uns ont écrit cocaigne, comme on écrivait montaigne, campaigne: mais cette ortographe est contre la prononciation: car, alors il faudrait prononcer, Kokègne; montègne, campè--gne.] On ne dit cocagne qu' avec pays. On apèle pays de cocagne, un pays fertile, abondant en toutes chôses, et où l' on fait bone chère. _ C' est cocagne de faire cela, pour dire, cela est agréable, est un provençalisme, un gasconisme.
   Cette façon de parler (pays de cocagne) n' est pas anciène dans la Langue: on ne la trouve ni dans Rabelais, ni dans Marot, ni dans Regnier. Ménage n' en a rien dit dans ses Etymologies. Voy. les Rem. sur la VIe Sat. de Boileau, vers 119.
   Paris est pour un riche un pays de cocagne,
   Sans sortir de la ville, il trouve la campagne.

COCAGNE


COCAGNE, s. m. Petit pain de pastel, avant qu' il soit réduit en poûdre. Richelet Port.

COCARDE


COCARDE, s. f. [Trév. écrit coquarde.] Noeud de rubans, qui se met au retroussis du chapeau, et que les Militaires portent ordinairement.

COCHE


COCHE, s. m. et f. [Il est masculin, quand il signifie une espèce de chariot couvert, dans lequel on voyage; et féminin, quand il signifie une entâillure faite en un corps solide. La coche d' une flèche, d' une arbalête.] Coche, chariot: aller par le coche: prendre le coche, retenir place, donner des arrhes au coche. _ Coche~ d' eau, bâteau de voitûre, pour aler d' une ville à l' aûtre. _ Populairement, on apèle une femme extrêmement grôsse et grâsse, une grôsse coche, au lieu de l' apeler un grôs coche.
   On dit quelquefois le Coche, pour les persones qui sont dedans: Le Coche dîne, couche en telle hôtellerie: le Coche a été volé, etc.
   On dit, proverbialement, d' un homme qui a déja pris quelque engagement dans une afaire, qu' il a donné des arrhes au coche.
   COCHE, s. f. Se dit aussi d' une marque faite sur du bois, pour tenir le compte du pain, du vin, de la viande, etc. qu' on prend à crédit: le bâton sur lequel on fait ces coches, s' apèle Tâille.

COCHEMARE


COCHEMARE; Richelet: ou COCHEMAR; Rich. Port. Voyez CAUCHEMAR.

COCHENILLE


COCHENILLE, s. f. [2e et dernier e muet: mouillez les ll.] Petit insecte, qui s' atache à quelques arbres de l' Amérique. Le suc de cet insecte done la plus belle écarlate.

COCHER


COCHER, s. m. [Koché: 2eé fer.] Celui qui mène un coche, ou un carrosse. = On dit, proverbialement, il n' est si bon Cocher qui ne verse: il n' y a point d' homme si habile, qui ne fasse quelque fois des faûtes.

COCHET


COCHET, s. m. COCHEVIS, s. m. [Kochè, Cochevi: 2e è moy. au 1er, e muet au 2d.] Le premier signifie un petit coq, un jeune poulet, à qui la crête vient, et qui comence à chanter. = Le 2d est le nom d' une espèce d' alouette, qui a une hupe sur la tête.

COCHON


COCHON, s. m. COCHONÉE, s. fem. COCHONER, v. n. [3e é fer. au 2d et au 3e, lon. au 2d.] Cochon, porc, pourceau. Il y a cette diférence entre ces trois mots: 1°. Qu' on dit cochon, à tout âge, de cet animal, et qu' on ne dit pourceau, que quand il est grand. On dit, un cochon de lait, un grôs cochon; la truie a fait de petits cochons, et non pas de petits pourceaux, ni un pourceau de lait. = 2°. En parlant de la chair de cet animal, en général, on dit plus ordinairement, du porc, que du pourceau; du porc frais, de bon porc. Dans le détail, on dit plutôt cochon, groin de cochon, langues, oreilles de cochon. _ Ailleurs on dit pourceau; marchand de pourceaux, acheter des pourceaux.
   On dit, figurément, en style familier et proverbial: c' est un cochon: Il est sale et mal propre. Voyez plus bâs. _ Il a des yeux de cochon, de petits yeux. _ Camarades comme cochons, se dit de ceux qui sont et qui vivent ensemble dans une grande familiarité; et sur-tout de ceux qui ont fait la vie, la débauche ensemble. _ Et quand quelqu' un se rend trop familier, il semble, dit celui à qui cela déplaît, que nous ayons gardé les cochons ensemble. _ Il mène une vie de cochon: c' est un cochon, un vilain, un grôs cochon. Il ne fait que manger, boire, dormir.
   Cochoner, se dit de la truie, quand elle fait de petits cochons. Le Dict. de Trév. le marque actif: mais puisqu' il se dit sans régime, il est donc neutre. "La truie a cochoné: elle cochonera bientôt. = Cochonée, ce qu' une truie fait de petits cochons dans une portée.

COCHONERIE


COCHONERIE, s. f. Terme populaire Mal-propreté.

COCHONET


COCHONET, s. m. [3e è moy. Le t ne se pron. pas.] 1°. Boule à douze faces, sur chacune desquelles il y a des points marqués depuis un jusqu' à douze: Jouer au Cochonet. = 2°. La petite boule, que l' on jète devant soi au hazard, pour servir de but au jeu de boules. Les uns l' apèlent le but, les aûtres le petit: ce dernier est un provençalisme. Ceux qui ne veulent pas dire le cochonet, peuvent dire le but.

COCO


COCO, s. m. COCOTIER, s. m. [Ko--ko, Koko-tié: 3e é fer.] Le Coco est le fruit du Cocotier, arbre des Indes. Ce fruit est grôs comme un melon, et quelquefois davantage. Les Indiens tirent du fil de la première écorce du coco, et en font de la toile. La chair du coco est agréable, et il renferme une liqueur bone à boire. On a dit du cocotier, qu' il pouvait suffire seul à armer un vaisseau, pouvant fournir le bois, les voiles, les cordages, et les provisions.

COCON


COCON, s. m. Quelques-uns écrivent et prononcent coucon: mais cocon est plus usité. Rollin écrit coquon ou couquon: cette ortographe est plus analogue à l' étymologie de coque, qu' à l' usage. Pluche dit coucon. Trév. l' Acad. le Rich. Port. ne mettent que cocon. _ La coque où s' enferme le ver à soie, quand il a achevé de filer. C' est du cocon qu' on tire la soie.
   COCQ: c' est ainsi qu' on écrivait aûtrefois: et Rollin a encôre employé cette ortographe dans son Histoire Anciène. Voy. COQ.

COCTION


COCTION, s. f. [Kok-cion.] 1°. Action de faire cuire dans de l' eau bouillante, ou dans une aûtre liqueur. = 2°. Il se dit plus ordinairement de la digestion des alimens dans l' estomac; des humeurs et des métaux. _ Ce mot n' est usité que parmi les Savans: on ne s' en sert point dans le discours ordinaire: on dit, cuisson.

CODE


CODE, s. m. Recueil des Lois, des Constitutions, des Rescrits des Empereurs Romains. C' est ce qu' on apèle le Code, absolument et sans addition. _ Par imitation, on a dit, le Code Théodosien, ou de Théodose, et en France, le Code Henri, le Code Louis, le Code Civil, le Code Criminel: le Code Noir, le Code des Curés, etc. Ce mot vient du latin codex, livre.

CODÉCIMATEUR


CODÉCIMATEUR, s. m. Celui qui perçoit des dixmes avec un aûtre.

CODICILLAIRE


CODICILLAIRE, adj. CODICILLE, ou CODICILE, s. m. [Dans le premier, on prononce les 2 ll sans les mouiller: dans le 2d, on n' en prononce qu' une: Kodicil--lère; 4e è moy. et long: Kodicile.] Codicile, est une disposition écrite, par laquelle un Testateur ajoute, ou change quelque chôse à son testament. _ Codicillaire, qui est contenu dans un codicile: legs, claûse, disposition codicillaire.
   Rem. Quelques-uns confondent codicille avec testament. L' essence de celui-ci est l' institution d' héritier. Le Codicille supôse cette institution faite auparavant, et ne fait que changer, ou ajouter des claûses, concernant les legs; ou laisse subsister l' institution faite par la Loi. "Par son codicile, il a changé trois claûses dans son testament. L. T.

CODONATAIRE


CODONATAIRE, subst. m. et f. [Ko--donatère: 4e è moy. et long.] Celui ou celle, qui est associé d' un aûtre dans une donation. "L' oncle est le codonataire~ du neveu; la soeur est la codonataire~ du frère: l' intérêt des codonataires~ est de consentir à cet acomodement.

COECITÉ


COECITÉ, ou CÉCITÉ, s. f. État d' une persone aveugle. "La seule incomodité à laquelle les Lapons soient sujets, c' est la cécité. Bufon. _ La Touche trouvait ce mot barbâre: il dit pourtant qu' il serait à souhaiter qu' il fût en usage, parce que aveuglement ne se dit point dans le propre. Voy. AVEUGLEMENT. _ Cécité n' est encôre que dans les livres: on ne le dit point en conversation: ce serait pédanterie que de s' en servir. Voyez CÉCITÉ. Si ce mot pâsse dans le langage ordinaire, on préférera Cécité à Coecité, comme on écrit cénobite au lieu de coenobite. L' oe, prononcé comme un e simple, n' est pas dans le génie de la Langue. L' Acad. écrit cécité.

COEFFE


COEFFE, COEFFER: voyez COIFFE, COIFFER.

COÉFICIENT


COÉFICIENT, s. m. Terme d' Algèbre. On apèle ainsi le nombre ou la quantité conûe, qui est au devant d' une quantité algébrique, et qui la multiplie: comme 5 a 7 b, etc.

COERCITIF


COERCITIF, IVE, adj. COERCITION, s. f. [2e ê ouv. 4e lon. au 2d: dans le 3e tion a le son de cion.] Termes de Palais. La coercition est le droit de contraindre quelqu' un à faire son devoir. Pouvoir coercitif, puissance coercitive, qui a le droit de coercition. "Dans les États gouvernés par un Prince, les divisions s' apaisent aisément, parce qu' il a dans ses mains une puissance coercitive, qui ramène les deux partis. Montesq. "Les Évêques ne s' arrogent point un pouvoir coercitif. Moreau. "Le Magistrat étoit seul revêtu de la puissance coactive et coercitive. Id.

CO-ÉTAT


CO-ÉTAT, s. m. État, ou Prince, qui partage la Souveraineté avec un aûtre.

COÉTERNEL


COÉTERNEL, ELLE, adj. Qui existe de toute éternité avec un aûtre: le Verbe Et le St. Esprit sont coéternels au Père. "Des Philosophes payens ont cru que la matière étoit coéternelle à Dieu. On a même agité la question entre les Philosophes Chrétiens, si elle ne pouvait pas l' être en ce sens, que Dieu eût pu la créer de toute éternité.

COEUILLIR


COEUILLIR. Voyez CUEILLIR et ACCUEILLIR.

COEUR


COEUR, s. m. [Keur, dout. au sing. long au pl. Coeurs: pron. keûr. Aûtrefois on disait cueur. "Les sciences qu' il s' est par cueur aprinses. Journ. de Paris, 1446.] 1°. Partie du corps de l' animal, qui est dans lui le principe de la vie. Il est situé au milieu de la poitrine: mouvement, batement, palpitation du coeur. Le coeur lui bat, lui palpite, lui tressaille d' aise, de joie. Épanouissement du coeur. = 2°. Considéré comme le siège des passions. "Coeur opressé, serré de douleur, de tristesse; navré, outré, transi; saisi, contrit; gros de soupirs, de dépit; plein d' amertume, d' indignation, etc. = 3°. Il se dit quelquefois par oposition à l' esprit; et cette antithèse est si comune, qu' elle en est devenue trivale. L' esprit est la dupe du coeur. La Rochef. "Ce discours, ce sermon plaît à l' esprit, et ne touche pas le coeur. = 4°. Il se prend pour les inclinations de l' âme: c' est un bon, un mauvais coeur: coeur franc, généreux, droit; ou dissimulé, gâté, corrompu. = 5°. Il se prend pour l' estomac. Mal de coeur, avoir mal au coeur: le coeur lui fait mal, cela lui fait mal au coeur. = 6°. Courage: il a du coeur, il n' a point de coeur. Prendre, reprendre coeur: le coeur lui manque: le coeur lui revient. = 7°. Afection: Il a le coeur des peuples, des soldats. Elever son coeur à Dieu; Avoir, mettre son coeur en Dieu, ou aux chôses de la terre. Faire une chôse de coeur et d' afection. = 8°. L' intérieur, les dispositions de l' âme: Dieu sonde les coeurs: il lit dans les replis les plus cachés des coeurs: il est le scrutateur des coeurs. = 9°. Le milieu de quelque chôse, particulièrement d' un État, d' une Ville: il est logé au coeur de la Ville; l' énemi pénétra au coeur du Royaume: au coeur de l' hiver, de l' été; au plus fort du froid, du chaud; le coeur de la cheminée; le coeur d' une laitûe, d' un fruit; une table faite de coeur de noyer, de chêne, de poirier; de la partie intérieûre de ces arbres.
   Rem. Ce mot entre dans beaucoup d' expressions. _ Avoir à coeur, régit l' acusatif des noms et la prép. de devant les verbes. "J' ai à coeur le succès de cette afaire: "Il n' a rien plus à coeur que de me difamer. "Il a singulièrement à coeur de faire réussir cette afaire. Plusieurs disent, avoir au coeur, pour à coeur, et l' Abé Millot l' a dit ainsi dans ses Elémens de l' Hist. de Fr. Cette manière n' est pas aussi sûre que l' aûtre. _ Avoir le coeur, régit aussi l' infinitif avec de. "Aurez-vous bien le coeur de l' abandonner? _ Tenir au coeur, régit le datif: Cela lui tient fortement au coeur. _ Prendre une afaire à coeur, l' entreprendre avec zèle, avec ardeur.
   Avoir du coeur, ne signifie, qu' avoir du courage, ou de la fierté: il a du coeur: elle a du coeur. Quand on veut se servir du mot coeur, pour exprimer l' amitié, la bonté ou la générosité, qui consiste dans une humeur bienfaisante, on joint à coeur une épithète: il a le coeur bien~ fait~: elle a le coeur bon, tendre, compatissant. _ Coeur signifie aussi courage, quand il est joint au verbe être; C' est un homme de coeur: mais si on le fait précéder de tout, il signifie amitié: c' est un homme tout de coeur. = Faut-il dire, doner coeur, ou doner du coeur, pour animer? Il y a des autorités pour l' un et pour l' aûtre. Le 1er néanmoins semble au P. Bouhours, plus français, et même plus soutenu en plusieurs rencontres, mais le 2d paraît plus usité. _ On dit; dans le même sens (de courage) prendre coeur, perdre coeur, reprendre coeur, où coeur est employé sans article. "Sa perte acheva de faire perdre coeur à ceux mêmes qui jusque-là n' avoient point encôre désespéré. Ducerc. Hist. de Pers. "Ils reprirent coeur, quand ils virent paroître le secours. Idem.
   Se ronger le coeur, s' afliger, se tourmenter. Mde. Dacier dit en ce sens: Dévorer son coeur; hellenisme. Voy. DÉVORER. = Avoir le coeur grôs, triste, afligé. "Je ne m' apaisai pourtant pas d' abord: j' eus le coeur grôs encôre quelque temps. Mariv. _ Avoir sur le coeur, être fâché.
   J' ai déja sur le coeur
   Qu' elle s' est peu prêtée à bien traiter Ariste.
       Méchant.
En prôse on dirait, qu' elle se soit peu prétée, etc. Il faut là le subjonctif, comme avec être fâché.
   Agir contre son coeur, contre son inclination. "Il soupiroit comme un homme qui ne sait pas dissimuler, et qui agit contre son coeur. Télém.
   Être selon son coeur, ne se dit que de Dieu: c' est une expression consacrée dans le langage de la Religion. N' imitez pas Voiture, quand il dit: "Je ne puis m' empêcher de vous dire ici l' extrême joie que l' on m' a donée, en me mandant que j' étois tout entier dans le coeur de cet homme que vous savez, qui est si fort selon le mien. _ Ami de coeur, ami intime. _
   Et je suis son ami de coeur, et pour la vie.        Méch.
* Je ne sais si parler du coeur, est une expression reçûe: du moins, je ne la crois bone que pour la conversation; encôre ne l' emploie-t-on pas sans quelqu' acompagnement. Je crois même qu' on doit dire, parler de coeur, et non pas, du coeur: "Je vous ai parlé de coeur et d' afection. Dans le style élevé, je ne l' aprouverais pas, même avec ce correctif; et je mettrais volontiers, au nombre des expressions irrégulières, celle de ce vers de Racine, où Bérénice dit à Antiochus, parlant des Courtisans:
   Je fuis, de leurs respects, l' inutile longueur,
   Pour chercher un Ami, qui me parle du coeur.
Racine le Fils trouve cette expression hardie et belle: à la bone heure; mais est-elle exacte et régulière? Je ne le crois pas.
   Parler à coeur ouvert, franchement, sincèrement. _ Avoir un coeur de roche, de marbre: ne pouvoir être touché de pitié, ni d' amour. _ Mon coeur terme de tendresse. Il est familier.
   Faire mal au coeur, inspirer du dégoût. "Vous dites des merveilles sur Esther. Il est fort vrai qu' il faloit des persones inocentes pour chanter les malheurs de Sion: La Champmêlé vous auroit fait mal au coeur. Sév.
   On dit proverbialement, mettre le coeur au ventre, encourager: s' en doner à coeur joie, se rassasier: n' avoir point le coeur à la besogne, travailler mollement et à regret. Au contraire, avoir le coeur au métier, afectioner fort ce qu' on fait, ou ce qu' on doit faire. Faire contre fortune bon coeur, s' armer de constance dans les adversités. _ Loin des yeux, loin du coeur; les absens sont bientôt oubliés. _ Avoir le coeur sur la main; être franc, n' être point dissimulé: "Vous n' aimez pas les cachoteries, de votre naturel... vous êtes comme moi, le coeur sur la main. Th. d' Éduc. _ On dit, dans le même sens, avoir le coeur sur les lèvres. _ J' en aurai le coeur net; je veux en être éclairci. _ Il est tout coeur, généreux, sensible, etc. _ Si le coeur vous en dit, nous sortirons, nous irons à... Si vous êtes d' humeur de sortir, d' aler, etc. _ On dit d' une liqueur agréable, qu' elle va au coeur; qu' elle réjouit; qu' elle flatte le goût. _ Cela lui pèse sur le coeur; il en conserve le souvenir, parce qu' il lui a déplu. _ S' en décharger le coeur, se soulager, en disant nettement ce qui fâche. _ Le coeur me le disoit; j' en avois le pressentiment. _ Ouvrir son coeur à quelqu' un, lui faire voir tout ce qu' on a dans la pensée. Cette expression est plus noble que les précédentes.
   COEUR, entre aussi dans plusieurs expressions adverbiales. _ De bon coeur, volontiers. _
   Je consens, de bon coeur, pour punir ma folie,
   Que tous les vins, pour moi, deviènent vins de Brie.
       Boileau.
_ On dit, dans le même sens, de grand coeur. Celui-ci est même plus usité aujourd'hui. _ À~ contre coeur, contre son inclination. _ Coeur à coeur, franchement et sans réserve; se parler coeur à coeur. _ Par coeur; par mémoire, de mémoire: "Aprendre, savoir, réciter des vers, une oraison, etc. par coeur. _ Faire diner quelqu' un par coeur; ne lui garder rien à manger. "S' il vient tard, il dinera par coeur.

COFFRE


COFFRE, ou COFRE, s. m. COFRER, v. a. COFRET, s. m. [On ne pron. qu' une f: on pourrait n' en écrire qu' une; 2e e muet au 1er, é fer. au 2d, è moy. au 3°.] Cofre, est 1°. un meuble propre à serrer des hardes, de l' argent, etc., et qui s' ouvre en levant le couvercle. _ Cofre-fort; cofre de fer, ou d' un bois épais, armé de bandes de fer, où l' on serre de l' argent. _ 2°. Le cofre d' un carrosse; la partie sur laquelle on met les coussins pour s' asseoir, et qui a un couvercle qui s' élève et s' abaisse comme celui d' un cofre. En Province, on l' apèle caisson. = 2°. L' espace, la capacité du corps humain, qui est enfermé sous les côtes: "Il a le cofre percé; il a reçu un coup d' épée dans le cofre. _ On le dit aussi des animaux: Cette cavale a un beau cofre, un grand cofre; elle a les flancs fort larges.
   COFRER, n' est point usité au propre, pour dire, mettre dans un cofre: on ne le dit qu' au figuré familier, pour emprisoner. "On ne veut plus vous faire crédit, ni à moi non plus, et nous pourrions bien être cofrés cette nuit, vous et moi. Volt.
   COFRET, petit cofre. Cofret d' écâille, de bois d' ébène, etc.
   Rem. En style proverbial, on dit d' un homme qui ne s' entend nullement à faire une chôse, qu' il s' y entend comme à faire un cofre. _ Riche comme un cofre: "Le Seigneur de notre Village, qui est mort riche comme un cofre, étoit parvenu par ce moyen; parvenons de même. Mariv. _ Belle au cofre; laide, mais riche. Raisoner comme un cofre, fort mal. Rire comme un cofre, à gorge déployée. Piquer le cofre; atendre, assis sur un cofre. _ On apèle les grands chevaûx, cofres à avoine, parce qu' il leur en faut beaucoup.

COFFRETIER


COFFRETIER, ou COFRETIER, s. m. [2e e muet, 3e é fer.] Ouvrier qui fait des cofres.

COGNASSE


COGNASSE, s. f. COGNASSIER, s. m. [Kog-nace, na-cié: mouillez le g; 3ee muet au 1er, é fer. au 2d.] Trév. écrit coignasse et coignassier, coignacier, ou coignier. _ Suivant Richelet, on dit ces trois mots; mais le coignier est un petit coignassier rabougri. _ L' Acad. ne met que cognassier. = La cognasse est un coin sauvage, moins grôs et moins jaûne que l' aûtre. Le cognassier, est un arbre qui porte des coins, ou des cognasses.

COGNAT


COGNAT, s. m. COGNATION, s. f. [On ne mouille point le g: on pron. comme s' ils étaient écrits, coguena, coguenacion.] Ils se disent, en général, de ceux qui sont unis par des liens de parenté, et plus particulièrement de ceux qui sont parens du côté des femmes; comme agnat et agnation, se disent de ceux qui le sont par les mâles. Les agnats et les cognats. _ Ce sont des termes de Droit qui ne sont point d' usage dans le discours ordinaire: on dit, parens du côté des femmes; du côté des pères, des mâles, etc.

COGNÉE


COGNÉE, s. f. [Mouillez le g; 2eé fer. et long.] Quelques-uns écrivent coignée. Richelet et Trévoux mettent l' un et l' aûtre: mais coignée est contre la prononciation et l' usage le plus comun, et le plus autorisé. = Outil de fer acéré, plat et tranchant, en forme de hache. On dit figurément, (st. fam.) mettre la cognée à l' arbre, comencer une entreprise. _ Aler au bois sans cognée, entreprendre quelque chôse sans les secours nécessaires pour l' achever. _ Jeter le manche après la cognée, se dépiter, abandoner une afaire, quand on a peu d' espoir de réussir. "Vous afectez de prendre de l' humeur; vous jetez le manche après la cognée; vous nous déclarez indignes de voir votre manuscrit. Anon.

COGNE-FÉTU


COGNE-FÉTU, s. m. Terme du style proverbial. Celui qui se done bien de la peine pour ne rien faire. "C' est un vrai cogne-fétu. _ Populairement, il ressemble à cogne-fétu, il se tue, et ne fait rien.

COGNER


COGNER, v. a. [Cog-né: mouillez le g; 2e é fer. _ Richelet met cogner ou coigner; mais celui-ci ne vaut rien. Voy. COGNÉE.] Fraper pour faire entrer, enfoncer: cogner un clou, une cheville. _ V. n. Fraper, heurter. Cogner contre la murâille, sur le plancher: cogner à la porte. Il s' est cogné la tête contre la murâille. Il est du style familier. = Fig. famil., se cogner la tête contre le mur, entreprendre une chôse impossible, ou dont on n' est pas capable.
   Rem. Mde de Sévigné emploie cogner au figuré: "Nous tâchons de cogner dans la tête de votre fils, l' envie de conoitre un peu ce qui s' est passé avant lui, c. à. d., de lire, et de savoir l' Histoire.

COHABITATION


COHABITATION, s. f. COHABITER, v. n. [Ko-abita-cion, bité.] Ces deux mots expriment l' état du mari et de la femme, qui vivent ensemble. Ce sont des termes de Jurisprudence, qui ne sont point d' usage dans le style familier.

COHÉRENCE


COHÉRENCE, COHÉSION, s. f. [Ko--érance, é-zion, en vers, zi-on; 2e é fer. 3e lon.] Ces mots paraissent avoir le même sens, et pouvoir être employés indiféremment. L' Acad. y met pourtant quelque distinction. Elle dit du premier, liaison, connexion d' une chôse avec une aûtre; et du 2d, adhérence, force par laquelle des corps sont unis entr' eux. Ce sont des termes de Physique qui ne sont usités que parmi les Savans: ils me paraissent avoir la même origine et la même signification, et ne diférer que par la terminaison.

COHÉRITIER


COHÉRITIER, IèRE, s. m. et fém. [Ko-éri-tié, tière; 2e é fer. 4e é fer. au 1er, è moy. et long au 2d.] Celui ou celle qui hérite avec un aûtre: il est mon cohéritier; elle est cohéritière de son frère: entre cohéritiers: elles sont cohéritières.

COHORTE


COHORTE, s. f. Corps d' Infanterie parmi les Romains, qui était de cinq cens hommes. = En Poésie, il se dit des gens de guerre en général; les vaillantes Cohortes: c' est comme si l' on disait, les vaillantes troupes. _ Par extension, il se dit de toute sorte de gens: "Il est venu avec toute sa cohorte, avec sa troupe.

COHûE


COHûE, s. f. [2e lon. 3ee muet.] Assemblée où tout le monde parle confusément. "Cette assemblée est une cohûe. = En quelques Provinces, c' est le lieu où se tiènent les petites Justices. Est-ce le 1er sens qui a doné lieu au 2d, ou le 2d au 1er? C' est ce que je ne saurais dire.

COI


COI, COIE, adj. [Koa, koâ; dout. au 1er, long au 2d. _ Coite, au fém., est un gasconisme.] Il n' a d' usage qu' en ces phrâses: se tenir coi, demeurer coi, tranquille, paisible.
   Le Charton dit au Porc: Qu' as-tu tant à te plaindre?
   Tu nous étourdis tous: que ne te tiens-tu coi?
       La Font.

COIFFE


COIFFE, ou COIFE, s. f. COIFÉ, ÉE, adj. [2e. e muet au 1er, é fer. aux 2 aûtres, long au 3e.] On écrivait aûtrefois coeffe, coeffer, et quelques-uns l' écrivent encôre de même: mais si on l' écrit de la sorte, il ne faut pas du moins mettre le trema ou les deux points sur l' ë, coëffe; car alors il faudrait prononcer co-èfe, ce qui serait très-mal. Coife, est plus de l' usage actuel, et plus conforme à la prononciation et à l' analogie: koa-fe, koa-fé. _ En écrivant coeffe, il semble qu' on devrait pron. coè-fe, coè-fé; et plusieurs le prononcent ainsi, trompés par l' ortographe.]
   COIFE, espèce de couvertûre de tête, sur--tout des femmes. _ Pour les hommes, on apèle coife de nuit, ou de bonet de nuit, une coife de toile, que l' on met dans le bonet de nuit, et coife de chapeau, une coife de tafetas ou de treillis, dont on garnit le dedans des chapeaux.
   On dit proverbialement, d' un homme triste et mélancolique, qu' il est triste comme un bonet de nuit sans coife.
   COIFÉ, au propre, régit souvent la prép. en: Coifée en demoiselle, en paysane, en cheveux, en hérisson, etc. etc.
   On dit qu' un enfant est né coifé, quand il vient au monde avec une espèce de membrane, qu' on apèle coife, que le peuple regarde comme un présage de bonheur. De-là, l' expression proverbiale, qui dit, d' un homme heureux, qu' il est né coifé. _ Voy. CHèVRE. = Bien coifé, se dit d' un homme qui a la tête belle, ou qui a une péruque ou un chapeau qui lui sied bien, et d' un chien qui a les oreilles longues et pendantes. = Vin coifé, bière coifée, où l' on a mélé quelque aûtre liqueur.

COIFFER


COIFFER, ou COIFER, v. a. COIFEUR, EûSE, s. m. et f. COIFûRE, s. f. [Koafé, feur, feûze, fûre.] Coifer, actif, se dit du péruquier, du coifeur, ou de la coifeûse, qui arrangent bien ou mal la coifûre, soit péruque, soit cheveux, soit coifes. = On dit, coifer une bouteille, mettre une envelope par-dessus le bouchon, pour empêcher que le vin ne s' évente. = Coifer une liqueur, la méler avec une âutre: on a coifé ce vin, cette bière. = Coifer, neutre, se dit d' une péruque, ou d' un chapeau, qui va bien ou mal à l' air du visage. "Cette péruque coife bien, ce chapeau coife mal. = Coifer, se dit plus ordinairement au réciproque, avec le pron. se: "Cette femme se coife bien; elle entend bien l' ajustement de sa tête. On dit, dans le même sens, au passif, elle est bien coifée. = Figurément (st. famil.), se coifer, ou être coifé d' une persone, d' une opinion, en être entêté, s' en préocuper. "Vous vous êtes coifé de la qualité de citoyen; cela est bien comun. Coyer, Lett. à un Grand. _ On le dit aussi activement: Je ne sais qui l' a coifé d' une opinion, si extravagante. _ Mde de Sévigné fournit un exemple du propre et du figuré, unis dans la même phrâse: "Elle étoit au lit, belle et coifée à coifer tout le monde. = On dit encôre, fig. et famil., qu' un homme se coife, qu' il est aisé à coifer, qu' on l' a coifé, pour dire, qu' il boit trop, ou qu' on l' a trop fait boire.
   COIFEUR, EûSE, celui ou celle qui fait métier de coifer des Dames. L' Acad. avertit que Coifeur n' est plus guère en usage. Aparemment que depuis cette remarque la mode a changé; car il y a plus de Coifeurs que de Coifeûses.
   COIFûRE, est, en général, la couvertûre et ornement de la tête: ainsi l' on dit, que le turban est la coifure des Turcs: mais il se dit plus ordinairement de la manière dont les femmes se coifent, suivant le pays et la mode. Coifûre à la mode, coifûre à boucles, coifûre en cheveux, etc., etc.

COIN


COIN, s. m. [Koein, mon. dout. au sing. long au plur. coins.] 1°. Angle: endroit où se fait la rencontre des deux côtés de quelque chôse. Le coin d' une rûe, d' une maison, d' une chambre, d' un cabinet, d' une cheminée, etc. _ Les quatre coins de la terre, du monde, d' un royaume, d' une Ville, etc. les extrémités de, etc. = 2°. Petite portion d' un logis: il est logé dans un petit coin. 3°. Endroit qui n' est pas exposé à la vûe: jetez cela dans un coin. = 4°. En parlant d' un bâs, l' endroit où le tissu se divise. "Ce coin ne monte pas assez haut. = 5°. Coin; pièce de fer ou de bois, qui aboutit en angle aigu, et qui est propre à fendre du bois et des pierres.
   6°. En termes de monoie, morceau de fer trempé et grâvé en creux, dont on se sert pour marquer la monoie, ou des médâilles. "Cette monoie est à un tel coin, marquée au coin de...
   Rem. 1°. Coin (n°. 1°.) n' est pas un terme noble; et je suis étoné que Rousseau l' ait employé dans une Ode.
   Peuples, de qui l' apui sur sa bonté se fonde,
   Allez dans tous les coins du Monde,
   À~ son nom glorieux élever des Autels...
   C' est l' inconstante renomée,
   Qui sans cesse les yeux ouverts,
   Fait sa revue accoutumée
   Dans tous les coins de l' univers.
   On lit aussi dans la Jérus. Dél. long-temps atribuée à J. J. Rousseau. "Un coin, ignoré de la terre, possède leurs dépouilles. On est moins surpris de lire dans Corneille.
   Envoyez des Soldats à chaque coin des rues,
       Héracl.
2°. Marqué au coin de, expression figurée, qui a l' air quelquefois précieux et afété, quelquefois bisârre et ridicule. Un Auteur moderne dit, que: "Les décrets, dressés solennellement dans le Saint Concile, sont marqués au coin de l' Infaillibilité. _ J' avoue que cette façon de parler ne me plaît point en endroit, et qu' elle me paraît avoir quelque chôse de burlesque en cette phrâse. On pourrait dire, en se servant de la même locution, qu' elle est marquée au coin du mauvais goût.
   Tenir son coin se dit au propre, au jeu de paûme, d' un joueur, qui dans une partie de deux contre deux, défend son côté, sans qu' il lui soit permis d' aider son compagnon, ou de s' en faire aider. _ Au fig. il se dit d' un homme qui se fait honeur dans une société, qui s' y fait distinguer. "La balle (c. à. d. le caquet) n' a pas été mal aujourd'hui, mais Mde. de Coulanges tenoit bien son coin. Sév. _ On dit, d' un homme qui n' a pas vu le monde, qu' il n' a pas bougé du coin de son feu; et de celui qui, ayant mauvais air et mauvaise physionomie, demande l' aumône, qu' il a la mine de demander l' aumône au coin d' un bois. _ Regarder du coin de l' oeil, à la dérobée et sans faire semblant de rien. _ Cette chôse est marquée au bon coin, (n°. 6°.) elle est des meilleures de son espèce. _ Il est frapé à ce coin là, il est entêté de cette opinion.
   COIN, s. m. Gros fruit, qui a l' odeur forte, et la peau couverte d' une espèce de duvet. _ On écrivait autrefois coing. = On dit (st. famil.) d' une persone qui a le teint jaûne, qu' elle est jaûne comme un coin.

COL


COL, s. m. Partie du corps qui joint la tête aux épaules. Il est vieux en ce sens, On prononce et on écrit cou. Voy. Ce mot. _ Col se dit encôre: 1°. de la partie supérieûre d' une chemise, d' un rabat, d' un pourpoint, qui embrasse le cou; 2°. d' une espèce de cravate sans pendans; 3°. d' un passage étroit entre deux montagnes: le col de Pertuis; le col de Tende: ils se saisirent des cols des montagnes.

COLAPHANE


*COLAPHANE, Voy. COLOPHANE.

COLAPHISER


*COLAPHISER. v. n. Soufleter, doner des souflets. Ce mot n' est bon que pour le burlesque. Le Rich. Port. le met sans remarque. L' Acad. n' en fait pas mention.

COLATÉRAL


COLATÉRAL, COLATIONER, voyez COLLATÉRAL, COLLATIONNER.

COLE


COLE, COLèGE, COLER. V. COLLE, etc. avec 2 ll.

CO-LÉGATAIRE


CO-LÉGATAIRE. Rich. Port. Voyez COLLÉGATAIRE. Acad. Le 1er vaut mieux à mon avis.

COLèRE


COLèRE, s. f. [2e è moy. et long. 3e e muet.] Passion par laquelle l' âme se sent vivement émouvoir contre ce qui la blesse. "Se mettre, être, entrer en colère contre quelqu' un. Émouvoir, exciter, irriter, alumer la colère de... On dit, figurément, la colère de Dieu, la colère du Ciel.
   COLèRE, couroux, emportement, (syn.) La colère, dit une passion plus intérieure et de plus de durée. Le couroux enferme dans son idée quelque chôse qui tient de la supériorité. L' emportement n' exprime proprement qu' un mouvement extérieur, qui éclate et fait beaucoup de bruit, mais qui pâsse promptement. _ La colère marque beaucoup d' humeur et de sensibilité; le couroux beaucoup~ de hauteur et de fierté; l' emportement beaucoup d' aigreur et d' impatience. GIR. Synon.
   COLèRE se dit quelquefois des animaux; chien en colère; la colère du Lion; et de la mer même; la mer est en colère, elle est fort agitée.
   COLèRE, adj. Qui est à se mettre en colère. Homme colère, femme colère: il est bien colère, elle est fort colère.

COLÉRIQUE


COLÉRIQUE, adj. Enclin à la colère; être d' humeur colérique. C' est un terme didactique, qui n' est pas de l' usage commun.

COLET


COLET, COLIER, voy. COLLET, COLLIER.

COLIBRI


COLIBRI, s. m. Très-petit oiseau de l' Amérique. _ Dans le style figuré familier, on dit, d' un petit homme frivole, que c' est un Colibri.

COLIFICHET


COLIFICHET, s. m. [Kolifichè, dern. è moy. le t ne se prononce pas.] 1°. Babiole, bagatelle: il n' a dans son cabinet que des colifichets. = 2°. Petits ornemens mal placés; jardin rempli de colifichets. = 3°. Figurément, en parlant des ouvrages d' esprit: "Ces traits d' esprit, qu' on vante tant dans cet ouvrage, ne sont que des colifichets. _ On voit, par ces exemples, que ce mot s' emploie le plus souvent au pluriel.
   4°. Gresset le dit des persones au singulier.
   Valère, d' autre part, vous aime à la folie.
   Et, grace à vous, Geronte en va voir le portrait
   Comme d' un libertin et d' un colifichet.
       Méchant.

COLIGER


*COLIGER, voy. COLLIGER.

COLIMAÇON


COLIMAÇON, voy. LIMAÇON.

COLIQUE


COLIQUE, s. f. [Kolike.] Maladie qui caûse des tranchées dans le ventre. "Colique bilieuse, venteûse, graveleûse ou néphrétique. _ La colique le tient; il a une violente colique. Sa colique est pâssée.

COLIRE


*COLIRE, Rich. Voy. COLLYRE.

COLISÉE


COLISÉE, s. m. [Kolizé-e, 3e é fer. et long. Trév. écrit Collisée. Il n' y a pas même de prétexte pour cette double l.] Célèbre amphitéâtre de Rome, dont il subsiste encôre de beaux restes. On l' apelait aûtrefois le Colossée, à caûse de la Statûe colossale de Néron, qui était près de cet endroit.

COLLABORATEUR


*COLLABORATEUR, s. m. [Pron. les deux l.] Qui travaillent ensemble au même ouvrage. "M. Moreau est bien en état d' y sufire seul; mais sa modestie lui fait souhaiter de trouver des secours et des collaborateurs. Ann. Litt. "On a vu l' Encyclopédisme et l' Économisme s' atacher avec une égale ardeur à la chârrûe, qui devait produire la félicité publique, et qui réellement a valu une pâtûre abondante aux collaborateurs. Linguet. "À~ l' exemple de quelques-uns de nos collaborateurs, nous nous sommes amusés à faire un préambule absolument étranger au genre de l' ouvrage qui fait le sujet de cet article. Mercûre. Ce mot est tout nouveau. S' il pâsse, on dira coopérateur pour les afaires, les fonctions, et collaborateur pour les ouvrages. _ Ce mot peut être utile: il sera même nécessaire, s' il paraît toujours un grand nombre d' ouvrages faits par une Société de Gens de Lettres.

COLLATÉRAL


COLLATÉRAL, ou COLATÉRAL, ALE, adj. [3e é fer. On ne prononce qu' une l.] Qui concerne la parenté hors de la ligne directe. Héritier collatéral, succession collatérale, ligne collatérale. _ S. m. Parent collatéral, comme cousin, oncle, neveu, tante, nièce; c' est un collatéral: il n' a que des collatéraux pour héritiers. _ On ne dit point au fém. une collatérale.

COLLATEUR


COLLATEUR, s. m. COLLATIF, IVE, adj. [Pron. les deux ll; 3e lon. au dern. on pron. l' f au 2d.] Collateur est celui qui a droit de conférer un bénéfice: Collateur d' une cûre, d' un Prieuré. "À~ l' égard des Cûres, le Patron n' est que présentateur, c' est l' Évêque, qui est Collateur. _ Collatif, qui se confère: bénéfice collatif, dignité collative. Il ne se dit qu' en matières bénéficiales.

COLLATION


COLLATION, COLATION, s. f. COLLATIONER, v. act. COLATIONER, v. neut. On prononce les deux ll, quand ces mots expriment l' action ou le droit de conférer un bénéfice, ou l' action de conférer une copie avec l' original, ou deux écrits ensemble. [Kol-la-cion, kol-la-cio-né.] On ne pron. qu' une l, quand on parle d' un repas léger, qu' on fait au lieu du souper, particulièrement les jours de jeûne; et de tout repas que l' on fait entre le diner et le souper. [Kola-cion, kola-cioné.] Il serait bon, pour distinguer ces deux sens si diférens, d' écrire, comme on prononce, deux ll dans le premier câs, une seule dans le second.
   Collation d' un bénéfice. Cette collation apartient à l' Évêque. Ce Prieuré est à la collation d' un tel Abé. = La Collation d' une copie avec l' original, ou sur l' original. En Librairie, faire la collation de divers exemplaires. = Pour le verbe, il n' a que le 2d. sens: on ne dit point collationer, mais conférer un bénéfice. On dit collationer sur l' original, à l' original, sur les Registres. Extrait collationé. On met au bâs: collationé à l' original, par...
   COLATION, petit repas. Faire colation d' une pomme: c' est une légère colation. _ Goûté. Payer la colation; doner la colation à... Magnifique, superbe, somptueûse colation. "Avez-vous colationé? Je ne soupe pas, je ne fais que colationer.

COLLAUDER


*COLLAUDER, v. a. [Pron. les 2 ll.] Latinisme et néologisme. Vanter, féliciter. "Je les entends (les Anglais) se collauder sur leur patriotisme prétendu, sur la beauté de leur constitution, etc. Test. Polit. de l' Angl. _ L' Acad. n' a eu garde de mettre ce mot. Il n' est bon que pour le burlesque ou pour le critique outré.

COLLE


COLLE, s. f. [Kole: 2e e muet.] Matière gluante et tenace, dont on se sert pour joindre des chôses, et pour faire qu' elles tiènent ensemble. Colle de farine, d' amidon, de poisson. Colle forte; colle à châssis, etc. Faire de la colle. _ Bassement et populairement, bourde, menterie: il lui a doné une colle.

COLLECTE


COLLECTE, s. f. [Kolèkte, 2° è moy. 3e e muet.] 1°. Levée des deniers de la tâille et aûtres impositions qui se font par assiète. = 2°. Oraison que le Prêtre dit à la Messe avant l' Épitre. Acad. Le Rich. Port. ajoute, et à la fin de chacune des Heûres canoniales. Je crois que cette addition est superfluë, et que Collecte ne se dit point de l' Oraison dite dans cette ocasion. _ Le même Dictionaire ajoute aussi: Quête de deniers, qui se payent volontairement ou par aumône. L' Acad. ne le met pas en ce sens. On dit cueillette.

COLLECTER


*COLLECTER, v. act. Néologisme. Recueillir. "Ces exécutoires, ou Ordonances, en vertu desquelles ces épices se collectent, frapent ce qu' il y a de plus liquide dans les biens des Parties. Linguet. _ Il faut atendre ce que l' usage décidera de ce mot. _ Il est aussi dans les Éloges des Académiciens de Berlin.

COLLECTEUR


COLLECTEUR, s. m. [Kolèkteur, 2eè moy. Richelet, qui retranche les consones redoublées, quand elles ne se prononcent pas, écrit collecte, collecteur, collection avec deux ll: il pensait donc qu' on devait les prononcer toutes deux. Le Rich. Port. en met deux en ligne, et une seule entre deux crochets.] Ce mot a un usage fort borné. On ne le dit que de celui qui fait la levée des deniers de la tâille, et des aûtres impositions qui se font par assiète. Bossuet s' en sert pour exprimer un Auteur de collections Litéraires. "Ce canon est raporté de même chez les Collecteurs _ L' Abé Prévot l' emploie aussi dans ce sens. _ Dans le Mercûre on parle également d' un Collecteur d' Anecdotes; mais c' est dans le style critique, où ce mot se prend en mauvaise part, et l' on met le mot en italique, pour montrer qu' il est hazardé.

COLLECTIF


COLLECTIF, IVE, adj. [On ne pron. qu' une l. Voy. COLLECTEUR; l' f finale se prononce au masc.; l' i est long au fém.] Terme de Gramaire, par lequel on désigne plusieurs chôses ou plusieurs persones sous un nom singulier. Peuple, multitude, armée, forêt sont des noms collectifs. Les deux premiers font concevoir plusieurs hommes, le 3e plusieurs soldats, le 4e plusieurs arbres.
   M. de Wailly distingue fort bien deux sortes de noms collectifs, les collectifs généraux (nous les avons cités) et les collectifs partitifs, qui n' expriment qu' une partie de la collection, la plupart, partie, nombre, amas, etc. 1°. Quand le collectif général est suivi d' un pluriel, l' adjectif, le pronom et le verbe s' acordent, non avec ce pluriel, mais avec le collectif. "L' armée des infidèles fut entièrement défaite. Au contraire, le pluriel, qui suit le collectif partitif, inflûe sur le nombre du verbe, du pronom et de l' adjectif. "Une partie des Infidèles y furent tués, et non pas y fut tuée. "Une partie du pain mangé, et non pas mangée. Buf. _ La raison que done M. de Wailly de cette diférence, c' est que le collectif partitif et le pluriel qui le suit, ne font qu' une expression; au lieu que le collectif général présente une idée indépendamment de ce qui peut suivre. On dit, armée, peuple, forêt tout seuls. On ne peut dire nombre, partie, sans les acompagner de quelqu' aûtre mot. _ Remarquez pourtant qu' après les collectifs généraux, quoiqu' ils soient au singulier, on met souvent les pronoms personels au pluriel.
   Tout ce peuple captif, qui tremble au nom d' un Maitre,
   Soutient mal un pouvoir, qui ne fait que de naître;
   Ils ont, pour s' afranchir, les yeux toujours ouverts.
       Racine.
Le P. Bufier, de qui M. de Wailly a emprunté sa règle, qu' il a, à la vérité, mieux présentée, pense que peut être ce ne serait pas une faûte de dire: une partie des Soldats s' enfuit, au lieu de s' enfuirent. Je crois même que dans cette ocasion, le premier vaut beaucoup mieux. Ainsi, sur cet article, il faut un peu consulter l' oreille et le goût. _ Je ne suis pas de l' avis du même P. Bufier, quand il dit qu' il faudrait, ce semble, faire acorder le verbe avec d' aûtres noms collectifs, et qu' il est mieux de dire: le tiers des vignes est gelé, que sont gelées; les trois quarts du Château furent brûlés, et non pas fut brûlé. Avec la permission de cet habile Gramairien, tiers et trois quarts ne sont pas des noms collectifs; ainsi, ce n' est pas une exception à la règle; et non seulement la première manière est la meilleure, elle est même la seule bone.
   2°. Les noms de nombre collectifs sont ceux qui expriment la quantité des chôses par collection. Ils sont formés des noms de nombre absolus, en changeant en aine l' e muet des uns, et en ajoutant cette même terminaison aine à la consone finale des aûtres; mais il n' y a guère que dix, douze, quinze, trente, quarante, cinquante, soixante et cent, qui forment des noms collectifs: dixaine, douzaine, etc. Ajoutez-y mille, qui fait millier. _ On dit, au Palais, à la huitaine, pour signifier au bout de huit jours. _ On dit aussi un sixain de cartes, mais l' usage de ces deux mots est borné là.
   Les noms de nombre collectifs difèrent des absolus, 1ment en ce que ceux-ci s' emploient avec l' art. indéf. c. à. d. qu' au nominatif et à l' accusatif ils s' emploient sans article: On dit dix hommes, douze soldats; mais on ne dit pas dixaine d' hommes, douzaine de soldats, sans article. Il faut dire une dixaine, une centaine, la douzaine, etc. _ 2ment les absolus s' unissent aux substantifs, sans le secours d' aucune préposition: vingt Cavaliers, etc. Les collectifs sont toujours suivis, dans cette ocasion, de la prép. de: une vingtaine de Cavaliers, etc.

COLLECTION


COLLECTION, s. f. [Kolèk-cion, en vers ci-on; 2e è moy. on ne pron. qu' une l. Voy. COLLECTEUR.] Collection, recueil de plusieurs passages (il a fait une bone collection de ce qu' il y de plus remarquable dans les Auteurs anciens) ou de plusieurs ouvrages, de plusieurs chôses, qui ont du raport ensemble. (Collection des Conciles, des Canons; collection d' antiques, de médâilles, d' estampes, etc.)

COLLECTIVEMENT


COLLECTIVEMENT, adv. [Kolektîve--man: 2e è moy. 3e lon. 4e e muet.] Dans un sens collectif. L' Homme, c. à. d. tous les hommes, pris collectivement _ Il ne se dit qu' en Logique, et il n' est pas du discours ordinaire.

COLLÉGATAIRE


COLLÉGATAIRE, ou CO-LÉGATAIRE, s. m. et f. [Le premier est de l' Acad. le second du Rich. Port.Trév. écrit colégataire sans tiret: voilà trois manières; la seconde me paraît la meilleûre. 2e é fer. 4e è moy. et long.] Celui ou celle, à qui un legs a été fait en commun, avec une ou plusieurs persones, mon, ou, ma co-légataire; les co-légataires.

COLLèGE


COLLèGE, s. m. [Kolège, è moyen. L' Acad. écrit Collége avec l' acc. aigu; mais cette ortographe est contre l' analogie et la prononciation: l' e devant l' e muet est constamment moyen, et l' Acad. elle-même le marque dans plusieurs mots de l' acc. grâve.] 1°. Compagnie de persones notables qui sont en même dignité. Il n' a pas, en ce sens, un emploi fort étendu: le Collège des Cardinaux, des Électeurs, des Princes, et des Villes de l' Empire; des Secrétaires du Roi en France. = 2°. Lieu destiné pour enseigner les Lettres, les Sciences, etc. Aler au Collège, étudier au Collège; au sortir du Collège, etc. _ On dit, d' une chôse qui est dite d' une manière pédantesque, qu' elle sent le Collège.
   * M. Formey dit Collège de Droit, pour Leçon de Droit; tenir un Collège, avoir des Collèges: ce sont des germanismes, ou plutôt, des barbarismes. "Vers ce temps-là, il eut envie d' assister à des Collèges de Droit. "M. Hoffmann... tint, au mois de Juillet, un Collège de Physique expérimentale... Les Collèges qu' il eut dans sa Profession (c. à. d., les Leçons qu' il dona dans le temps qu' il fut Professeur) furent généralement goûtées. Rien de tout cela n' est français.

COLLÉGIAL


COLLÉGIAL, ALE, adj. [Kolégi-al, ale; 2e é fer. On ne pron. qu' une l.] L' Acad. dit qu' il n' est guère en usage qu' au fém. Église Collégiale, Chapitre de Chanoines sans Siège Épiscopal. _ Subst. fém. Une Collégiale. _ Par mépris, on le dit de ce qui sent le Collège: Poète Collégiale; production Collégiale.
   Écartons la Mûse empesée...
   Des Poètes Collégiaux.       Gresset.

COLLèGUE


COLLèGUE, s. m. [Kolèghe; 2e è moy. 3ee muet. L' u est muet: il n' est mis là que pour doner au g un son plus fort qu' il ne l' a devant l' e: les Étrangers doivent prendre garde de ne pas prononcer Colégû-e. _ L' Acad. écrit Collégue avec un acc. aigu sur l' e. Voy. COLLèGE.] Compagnon en dignités, en mêmes fonctions. _ Ce mot de Collègue se dit de ceux qui sont en petit nombre, comme celui de Confrère, de ceux qui sont d' une compagnie nombreûse Acad. Voyez CONFRèRE.

COLLER


COLLER, v. a. [Kolé; 2eé fer. On ne pron. qu' une l.] 1°. Joindre et faire tenir avec de la colle. Coller du papier, des ais, une image contre, ou à la murâille, sur du bois, sur du carton. = 2°. Enduire de colle: coller une toile avant que de l' imprimer. "Ce papier boit, parce qu' on ne l' a pas bien collé. = 3°. Coller du vin, y mettre de la colle de poisson, pour l' éclaircir.
   On dit figurément, (st. famil.) se coller, ou, être collé contre un mur; s' y tenir droit et s' y apuyer comme si l' on y était ataché. _ On dit d' un habit, qui est juste à la mesûre du corps, qu' il est colé, ou, qu' il semble qu' il soit collé sur le corps; d' un homme qui est ferme et droit à cheval, qu' il est collé sur son cheval, collé sur la selle; de celui qui est fort ataché à l' étude, qu' il est collé sur les livres, ou, sur ses livres. _ Avoir les yeux collés sur; regarder atentivement. "Tout l' Auditoire avoit les yeux collés sur le Prédicateur; la bouche collée, ou, les lèvres collées sur, les y tenir long-temps atachées. Puissions-nous mourir entre les brâs de Jesus, et la bouche collé sur son Image.

COLLERETTE


COLLERETTE, s. f. COLLET, s. m. COLLETER, v. a. et n. [Kolerète, kolè, koleté; 2e e muet au 1er et 3e, è moy. au 2d; 3eè moy. au 1er, é fer. au 3e.] Collerette, est une sorte de petit collet de linge, dont les femmes se servent quelquefois pour se couvrir la gorge et les épaûles. = Collet, est 1°. cette partie de l' habillement qui est autour du cou. Collet de pourpoint, de manteau. = 2°. Pièce de toile qu' on met autour du cou par ornement, aûtrement apelée rabat. Grand collet, petit collet. _ On apèle familièrement les Éclésiastiques, petits collets, gens à petit collet. "C' est un petit collet, un homme à petit collet. Voy. BOUTON. = Dans le même style, sauter au collet de quelqu' un, le prendre, le saisir au collet; lui sauter dessus, pour lui faire violence: par extension, l' arrêter et le faire prisonier. = On dit proverbialement, d' un profit inopiné, qu' il nous saûte au collet. "Voilà mille écus de rente qui lui saûtent au collet. = Prêter le collet à quelqu' un, se présenter pour luter ou combattre contre lui: plus figurément, lui tenir tête dans quelques chôse, afaire ou dispute. = 3°. Collet de mouton ou de veau, la pièce qui reste, après qu' on en a ôté le bout, et le plus proche de la tête. _ Plusieurs disent, cou de mouton, de veau; mais collet est mieux dit. = 4°. Sorte de lacs à prendre des lièvres, des lapins.
   COLLETER, actif; prendre quelqu' un au collet, pour le jeter par terre. Il n' est que du style familier. "Cyrus soutint l' ataque d' un ours, et l' ayant colleté, tomba avec lui. D' Ablanc. Je crois qu' il aurait été mieux de dire, l' ayant pris, ou saisi au collet. _ Il se dit plus souvent avec le pron. pers. se colleter: ils se sont colletés et gourmés un bon quart d' heûre. Scarron.
   COLLETER, neutre; tendre des collets. (n°. 4°.) Il est défendu par les Ordonances de colleter.

COLLET-MONTÉ


COLLET-MONTÉ, s. m. Autrefois collet, où il y avait du carton ou du fil de fer pour le soutenir. Du temps des collets-montés, du vieux temps. _ Au figuré, cela est collet-monté, cela est antique, ou, a un air contraint et guindé. Cet homme est bien collet-monté, il afecte une gravité outrée. "Une Présidente très-haut collet-monté qui n' estime que les gens de robe. Afiches de Prov.

COLLIER


COLLIER, s. m. [Ko-lié: 2eé fer.] 1°. Rangée de perles ou d' aûtres chôses de même natûre, que les Dames portent au cou pour se parer. = 2°. Cercle de fer, d' argent ou de cuivre, etc. qu' on met au cou des esclâves ou des chiens. = 3°. Chaîne d' or que les Chevaliers portent dans les jours de cérémonies; collier du St. Esprit, de St. Michel, de l' Anonciade, etc. = 4°. Marque naturelle, en forme de cercle, qui se voit au cou de certains animaux. = 5°. Partie d' un harnois des chevaux de charrette ou de labour. _ Cheval de collier, qui est propre à tirer; franc de collier, qui tire de lui-même, sans qu' on soit obligé de lui doner des coups de fouet.
   On dit proverbialement, chien à grand collier, (n°. 2°.) homme qui domine dans un corps. _ Collier de misère, (n°. 5°.) travail pénible. Il en est qui le disent du mariage. _ Doner un coup de collier, faire un nouvel éfort pour réussir dans une afaire. Être franc du collier, sans reproche: procéder franchement en toutes chôses. En parlant d' un Militaire, aler au feu de bone grâce, et sans se faire prier.

COLLIGER


COLLIGER, v. a. [Pron. les 2 l.] Faire des collections, des recueils. Il est vieux et pédantesque. L' Acad. le met sans remarque: je m' en raporte. * Colliger, conclure de... est encôre plus suranné: "De ce qui arriva à deux, nous pouvons colliger les exercices des aûtres. Chron.

COLLINE


COLLINE, s. f. [Koline; dern. e muet.] Petite montagne, qui s' élève doucement au-dessus de la plaine. _ Dans le style poétique, la double colline, ou, la double cime, le Parnasse.
   Descends de la double Colline,
   Nymphe, dont le Fils amoureux
   Du sombre époux de Proserpine,
   Sut fléchir le coeur rigoureux.
       Rousseau.
Voy. CHIFONIER et CIME. _ On dit proverbialement, gagner la colline, s' enfuir, se sauver. Joubert.

COLLISION


COLLISION, s. f. [Pron. les 2 ll: kol--li-zion, en vers, zi-on.] Terme de Physique. Frotement mutuel. "La collision des corps. "La collision d' un morceau d' acier et d' une pierre à fusil. Marat.

COLLOCATION


COLLOCATION, s. f. COLLOQUER, v. a. [Pron. les 2 l: Kol-loka-cion, kol-loké.] Ce sont termes de Pratique. Ils expriment l' action, par laquelle on range les créanciers dans l' ordre, suivant lequel ils doivent être payés. On a fait la collocation des créanciers. Vous serez payés suivant votre collocation. "Il a été colloqué par préférence: créancier colloqué, etc. Hors de là; colloquer ne se dit point. * "Il a mal colloqué (placé) son argent. Joubert. Ce mot, en ce sens, est un barbarisme.

COLLOQUE


COLLOQUE, s. m. [Pron. les deux ll: Kol-loke.] Il ne se dit, dans le sérieux, que des Colloques d' Érasme, de Cordier, de Vivès, etc., c. à. d., des Dialogues Latins, qui ont été composés par ces Auteurs, et du Colloque ou Conférence de Poissi. Hors de là, il ne se dit qu' en badinant: "Ils ont ensemble de fréquens Colloques: ils ont tenu un long Colloque.

COLLUDER


COLLUDER, v. n. COLLUSION, s. f. COLLUSOIRE, adj. COLLUSOIREMENT, adv. [Pron. les 2 l: Kol-ludé, lu-zion, lu-zoâ-re, zoâ-reman.] De ces quatre mots, celui qui est le plus usité, c' est collusion; et celui qui l' est le moins, c' est colluder, qui ne se dit qu' au Palais: s' entendre avec sa partie, au préjudice d' un tiers. "Il y a collusion, ou, de la collusion entr' eux; une collusion visible, manifeste. "Cela est collusoire: procédure, sentence, tout est collusoire dans cette afaire: "Cet Arrêt a été rendu collusoirement.

COLLYRE


COLLYRE, s. m. [Kolire; 2e lon. 3e e muet.] Remède extérieur, qui s' aplique sur les yeux. Ce mot n' est en usage que parmi les Médecins, Apothicaires, etc. Collyre sec, ou liquide.

COLOMBAGE


COLOMBAGE, s. m. Rang de solives posées à plomb dans une cloison de charpente.

COLOMBE


COLOMBE, s. f. COLOMBIER, s. m. *COLOMBIN, INE, adj. [2e lon. Kolonbe, lon-bié, bein, bine.] Pigeon. Pigeonier. _ Colombe, ne se dit qu' en Poésie et dans le style soutenu. "Le Saint-Esprit descendit en forme de Colombe sur N. S. J. C.: simple comme une Colombe; la simplicité de la Colombe. Là, Pigeon serait ridicule; Colombe ne le serait pas moins dans le discours ordinaire. Voyez une remarque, au mot PIGEON.
   COLOMBIER. Suivant le Dict. de Trév. (1704.) on dit aussi Coulombier; mais aujourd'hui on ne le dit plus. _ Tour ronde ou cârrée, où l' on retire et nourrit des pigeons. = On dit proverbialement, faire venir, ou atirer les pigeons au Colombier; atirer des chalands. _ Chasser les pigeons du Colombier, les éloigner par de mauvaises manières.
   *COLOMBIN. On donait aûtrefois ce nom à une couleur aprochante du gris de lin. Tafetas Colombin, soie Colombine. On dit aujourd'hui, gorge de pigeon.
   COLOMBIN, s. m. Il se dit de la mine de plomb pûre.
   COLOMBINE, s. f. Fiente de pigeon, qui fournit un très-bon engrais. Trév. Rich. Port. _ L' Acad. ne le met pas: c' est un oubli.

COLON


COLON, s. m. COLONIE, s. f. [3e lon. au 2d.] Colon, se dit proprement de celui qui cultive une terre. On le dit plus particulièrement des habitans des Colonies: les Colons de l' Amérique; et par extension, de ceux qui cultivent des terres, dans quelque pays que ce soit: cette terre manque de Colons. Mais, dans ce dernier sens sur-tout, l' usage et l' emploi de ce mot sont très-bornés. On ne s' en sert point dans le discours familier.
   COLONIE, est, 1°. les persones de l' un et de l' aûtre sexe, qu' on envoie d' un pays, pour en habiter un aûtre. Envoyer établir une Colonie. = 2°. Les lieux où l' on envoie des habitans. "Marseille est une Colonie des Phocéens: nos Colonies d' Amérique.

COLONEL


COLONEL, s. m. Celui qui comande un Régiment. _ Ce mot est adjectif dans cette phrâse: la compagnie Colonelle, c. à. d., la première compagnie d' un Régiment, qui n' a point d' autre Capitaine que le Colonel; et subst. fém. "La Colonelle, la compagnie Colonelle.
   Rem. Ce mot, et celui de Régiment, de Brigadier, de Maréchal ne me paraissent point à leur place, dans les Histoires anciènes. "Quand les Athéniens se virent ainsi assemblés, les Généraux et les colonels s' assemblèrent pour délibérer. Rollin. Cela est contre le costume.

COLONIAL


*COLONIAL, ALE, adj. Néologisme: qui concerne la Colonie. "Le Ministère voulut que les Habitans pussent doner leur voix dans les Assemblées coloniales. Rayn.

COLONNADE


COLONNADE, s. f. COLONNE, s. f. [Kolonade, kolone. Aûtrefois, par respect pour l' étymologie, on écrivait Colomne, Solemnel: aujourd'hui on a secoué ce respect, souvent excessif et outré? On écrit colonne, Colonnade; solennel, solennité. On en viendra puis à écrire Colone, Solanel.] Colonne est un pilier de forme ronde, pour soutenir ou orner un bâtiment. _ Colonnade, grand nombre de colonnes, rangées pour servir d' ornement à un grand édifice, à une place, à un jardin, etc.
   COLONNE, a plusieurs aûtres sens: il se dit des piliers d' un lit, aûtrement apelés quenouilles; d' un livre, dont les lignes ne sont pas de toute la largeur de la page, mais en ocupent la moitié, ou le tiers. "Les Dictionaires sont ordinairement imprimés en colonnes. Quelquefois on numérote chaque colonne; ordinairement on ne numérote que les pages, et l' on dit, page telle, 1re, 2de, ou 3e colonne. = On le dit aussi des divisions d' une armée en lignes, qui ont peu de front: L' armée marchait sur six colonnes; et en Physique, d' une quantité de matière fluide de figûre cylindrique, qui a une hauteur et une bâse déterminée, réellement, ou par la pensée: Colonne d' air, colonne d' eau. = Figurément, apui, soutien: Colonnes de l' Église, de l' État, les grands personages qui les soutiènent par leur capacité, par leur vertu, par leur courage. "La justice et la piété sont les Colonnes de l' État. _ Les deux montagnes du détroit de Gibraltar s' apèlent les Colonnes d' Hercule.

COLOPHANE


COLOPHANE, ou COLOFANE, s. f. [Plusieurs disent Colophone, et il est ainsi dans le Dict. de Trév., qui dit aussi colafane. L' usage est fort partagé sur les deux premiers, dit La Touche: le 1er est pourtant le plus usité: le second n' était pas dabord dans le Dict. de l' Acad., on le mit dans les Additions: on l' ôta dans la suite. _ Régulièrement parlant, dit Richelet, il faudrait dire colofone, mais l' usage, plus fort que les règles, veut dire colofane.] Sorte de résine, dont les joueurs d' instrumens se servent pour froter le crin de l' archet dont ils joûent.

COLOQUINTE


COLOQUINTE, s. f. [Kolo-kein-te: 3e lon.] Citrouille, dont le fruit est très-amer: c' est un violent purgatif. _ Le proverbe dit: amer comme coloquinte.

COLORANT


COLORANT, ANTE. adj. COLORER, v. a. [3e lon. l' o est bref devant la syll. masc.: il est long devant l' e muet: il colôre, il colôrera.] Colorer, doner de la couleur; Colorant, qui colôre: le Soleil colôre les fruits: on a trouvé l' art de colorer le verre, le cristal. "Il est des drogues colorantes. = Le verbe s' emploie au réciproque: "Les raisins comencent à se colorer. = Colorer, au figuré, doner une belle aparence à quelque chôse de mauvais. Il a su colorer son injustice. Il régit quelquefois la prép. de: "Il colorait sa révolte du prétexte du bien public. Coloré, s' emploie aussi au figuré, mais non pas colorant. "Il n' a pas même de titre coloré, aparent. _ On dit, au propre, vin coloré, teint coloré. Voyez COLORIER.

COLORIER


COLORIER, v. act. COLORIS, s. m. COLORISTE, s. m. Il ne faut pas confondre colorier avec colorer, et coloris avec couleur. _ Le 2e verbe se dit des couleurs naturelles, et le 1er des artificielles: c' est la lumière qui colôre tous les corps: Titien coloriait parfaitement. _ Colorier ne se dit qu' au propre: colorer s' emploie aussi au figuré: "Il n' est point de si méchante action qu' un flateur, qu' un sophiste ne sache colorer: "Je ne sais pas ce qu' on peut dire pour colorer tant de violences. Patru. _ Pour la diférence entre couleur et coloris, voyez COULEUR.
   COLORIS, est ce qui résulte du mélange des couleurs dans un tableau, pour doner aux objets qu' on peint, la couleur qui leur convient. Coloris frais, tendre, etc. Il se dit d' un tableau et d' un Peintre: "le coloris de ce tableau pèche par tel endroit. "Ce tableau pèche par le coloris "Ce Peintre est estimé pour son coloris. = On le dit aussi d' un teint frais et vermeil. "Voilà un beau coloris. = On le dit encôre des fruits: "Des pêches d' un beau coloris. _ Raynal le dit des Nègres: "Leur coloris est l' éfet du climat, de l' air, de l' eau, des alimens de la Guinée. Le mot est impropre: il falait dire couleur. _ Coloris ne se dit du teint que quand il est beau.
   COLORISTE est un terme de Peintûre. Peintre qui entend bien le coloris. "C' est un bon, un grand Coloriste. _ On ne le dit guère en mauvaise part. On peut pourtant dire, un mauvais Coloriste, un Coloriste fort médiocre.

COLOSSAL


COLOSSAL, ALE, adj. COLOSSE, s. m. [2e br.] Colosse, est une statûe d' une grandeur démesurée. Le Colosse de Rhodes. Colossal, de grandeur extraordinaire: Figûre colossale. Au plur. il n' a d' usage qu' au fém. On ne dit point colossaux, ni colossals. = Figurément (st. fam.) on apèle colosse, un homme de grande statûre: "C' est un colosse. _ Avec un régime, il est du style relevé. Colosse d' orgueil.

COLOSTRE


COLOSTRE, s. m. (Médecine.) 1er lait qui se trouve dans le sein des femmes après leur délivrance.

COLPORTAGE


COLPORTAGE, s. m. COLPORTER, v. a. et n. COLPORTEUR, s. m. [Kolpor--taje, , teur: 3e é fer. au 2d.] Colporteur, se dit de ceux qui portent des marchandises dans des paniers, ou de petites caisses pendues à leur cou, et qui vont les vendre par les rûes, ou dans les villages. On le dit plus particulièrement de ceux qui crient par les rûes les Édits, Arrêts, Relations; et de ceux qui vont vendre des Livres dans les maisons. = Colportage, est le métier de Colporteur. = Colporter, c' est faire ce métier. Il est ordinairement neut. Il gagne sa vie à colporter. Quelquefois il est act. "Il est défendu de colporter des Livres imprimés sans privilège: il l' est bien davantage encôre de colporter de mauvais Livres.

COLûRE


COLûRE, s. m. [2e lon. 3ee muet.] Il se dit de deux grands cercles, qui coupent l' Équateur et le Zodiaque en quatre parties égales, et qui servent à marquer les quatre saisons de l' année. Colûre des Équinoxes. Colûre des Solstices.

COMBAT


COMBAT, s. m. COMBATTANT, ou COMBATANT, s. m. COMBATTRE, ou COMBATRE, v. act. et neut. [Conba, batan, batre: 1re lon.] Combat, est l' action par laquelle on combat: combatant, celui qui combat, guerrier, qui par sa profession est destiné à combatre. = Combatre, ataquer son énemi, ou en soutenir, en repousser l' ataque.
   I. REM. 1°. Combat dit moins que batâille: la batâille est une action plus générale, et ordinairement précédée de quelque préparation. Le combat est une action particulière, et souvent imprévûe. GIR. Synon. Cependant il se prend quelquefois pour batâille: le combat fut rude entre les deux armées.
   2°. On dit, Livrer un combat, et doner une batâille. Bossuet dit, doner combat, sans article: "M. Jurieu veut qu' un particulier ait droit de doner combat à, etc. _ Mascaron a dit, doner des combats: "Combien de combats n' a pas à doner une jeune persone, qui entre dans le monde? _ L' Acad. dit, doner, hazarder un combat, et livrer, rendre combat. J' ose dire que livrer un combat, des combats, est plus exact et plus régulier.
   3°. On dit également, gâgner une batâille, remporter la victoire: Voltaire dit, dans le même sens, gâgner un combat. "Le Maréchal de Lorges avoit aussi gâgné un grand combat. On dit, avoir le dessus dans un combat. L' Acad. dans ses Sentimens sur le Cid, n' aprouve pas gagner des combats. _ On disait autrefois, atacher le combat: "le combat étoit sur le point de s' atacher, dit un Auteur déja un peu ancien. On dirait aujourd'hui, sur le point de comencer.
   4°. Combat se dit de certains états de trouble, d' agitation et de soufrance. "La vie est un combat perpétuel. "Elle étoit dans de cruels combats. = 5°. Éfort contre les tentations: Il faut rendre de grands combats pour vaincre ses passions. = 6°. Contention et dispute. Combat de civilité, d' esprit, d' érudition. = 7°. Contrariété de certaines chôses entr' elles. Le combat des humeurs dans le corps; le combat des élémens, des vents. = 8°. Combattre les combats du Seigneur est une expression singulière, mais consacrée, et tirée de l' Écriture: Proeliare proelia Domini; on peut s' en servir dans la Chaire: "Allons où nous apellent les cris de la Religion: allons combattre les combats du Seigneur: allons soutenir et venger sa gloire par des exemples de foi et de piété, aussi éclatans que les scandales qui ôsent l' outrager. Neuville. = 9°. Etre hors de combat, n' être plus en état de combatre, se dit au propre et au figuré. "Je n' écoute pas tout ce que ma tendresse voudroit me faire sentir: je serois trop souvent hors de combat. Sév. c. à. d. hors de la société, incapable d' être avec le monde. = Quand quelque chôse finit, sans pouvoir aler plus loin, on dit: Le combat finit faûte de combattans: "Enfin le combat finit faûte de combatans; c. à. d. après que le premier et le second étage de l' antichambre et de la petite chambre, et du cabinet, eurent été absolument consumés. Sév.
   II. Combatant, se dit quelquefois des soldats, qui sont prêts à combattre, quoiqu' ils ne combatent pas encôre. "Une Armée de vingt mille combatans. _ On le dit aussi des assaillans et des soutenans dans un Tournoi. "Quand les deux combatans furent en présence, etc. _ Leibnitz fait ce mot adjectif, et l' emploie au fém. "Le Dict. de M. Bayle, où la Raison et la Religion paraissent combatantes, et où M. Bayle veut faire taire la raison, après l' avoir trop fait parler.
   III. Combatre, s' emploie dans tous les sens de combat, ou activement, ou neutralement, ou avec régime, ou sans régime. "Combatre les énemis, combatre ses passions; sa colère; ce remède combat le mal avec succès. "On a à combatre toute la vie contre ses mauvais penchans. "Allons combatre: il faut combatre. _ Combatre avec quelqu' un de civilité, d' honêteté, de politesse; disputer à qui sera plus civil, plus honête, plus poli.
   Émules généreux, combatons d' industrie,
   De zèle pour les Arts, d' amour pour la Patrie.
       Coeuille, la Liberté des mers, Poème.
Combattre en soi-même: être extrêmement embarrassé à se déterminer. _ Combatre contre la faim, la soif, les vents, ou combatre les vents, la faim, la soif: le 2d est le meilleur et le plus élégant.
   Rem. Au passif, il régit ordinairement la prép. par; "Je suis combatu par des sentimens tout oposés. _ Les Poètes lui font régir la prép. de:
   Je sens bien que ce coeur n' en est pas moins coupable,
   Et de quelques remords que je sois combatu,
   Qu' avec plus d' apareil c' est trahir ma vertu.
       Créb.
  Quand du moindre intérêt le coeur est combatu,
  La générosité n' est plus une vertu.    Id.
IV. COMBATU, ÛE, adj. et part. "Opinion combatûe, sentimens combatus; passions combatûes; hérésie combatûe: "Il se sentoit combatu en lui-même. L' emploi de cet adjectif ne s' étend pas hors de ces phrâses.

COMBIEN


COMBIEN, adv. [En n' y a pas le son d' an. Kon-bien, et non pas, kon-bian: 1re lon.] Cet adv. exprime le nombre, le prix, la quantité; Combien y avait-il de persones? Combien vaut cela? Combien en aportez-vous? En combien de temps l' avez-vous fait?
   Rem. 1°. Après combien, il faut mettre l' article indéfini de: Combien y avoit-il de soldats, combien d' argent, etc. et non pas des soldats, de l' argent, etc.
   2°. Combien se met ordinairement après le verbe qui régit, excepté dans les phrâses interrogatives, où il comande l' interrogation. Il sent combien il a de tort. Combien y en a t-il? * Bossuet le place à la tête de la phrâse, et le fait suivre à quelque distance du pronom le: "Combien Calvin fut touché de cette gloire, un petit mot qu' il écrit à Melanchton nous le fait conoître. _ Cette construction latine, et un peu irrégulière, peut être, en certaines ocasions, plus belle que la construction ordinaire: un petit mot, etc. nous fait conoître combien Calvin, etc.
   3°. Ce n' est pas par lui-même, mais par la force du sens interrogatif, que combien fait marcher le pronom nominatif après le verbe: ainsi, quand la phrâse n' est pas interrogative, ce déplacement du pronom est irrégulier. "Les Observateurs ont cherché combien faut-il (il faut) d' années, pour opérer le changement des pierres volcaniques en terre argilleûse. Mercûre.
   4°. Au contraire, quand combien est placé à la tête de la phrâse, il rend ordinairement le sens interrogatif, et alors le pron. pers. doit être placé après le verbe. M. l' Ab. Henn. parle donc mal, quand il dit: "De là, combien il importe de s' aproprier de bonne heure des talens à pouvoir se sufire à soi-même! Du Plaisir. Il devait dire, combien n' importe-t-il pas? Dans le sens admiratif, la négation est plus régulière et plus énergique.
   5°. Il est des Auteurs qui font suivre combien du pron. relatif. "Combien de jeunes persones qui en ont fait la triste expérience! Reyre. Éc. des Dém. "Combien qui ont lieu de s' en repentir! Anon. Dans le 1er. exemple, on sous-entend, n' y en a-t-il pas? et dans le 2d, y en a-t-il? Ordinairement, il est mieux de ne pas employer le relatif, sur tout quand le nom, régi par combien, est exprimé comme dans la phrâse de M. l' Ab. Reyre: "Combien de jeunes persones en font fait la triste expérience, ou n' en ont-elles pas fait, etc. Voy. NOMINATIF, IV, n°. 2°.
   6°. Combien que, pour quoique, est vieux et hors d' usage.
   M. de Bufon emploie substantivement combien et comment. "La Physique done le combien et la Métaphysique le comment. _ Cela est du style familier. "Il veut me vendre sa charge: nous en sommes sur le combien. Acad.

COMBINABLE


*COMBINABLE, adj. Qui peut être combiné. Mot nouveau. "Le Ministère Britanique avait deux vûes très-combinables dans les dispositions qu' il faisait en Flandres. Anon.

COMBINAISON


COMBINAISON, s. f. COMBINER, v. act. [Konbinèzon, konbiné; 3eè moy. au 1er, é fer. au 2d.] Ces deux mots expriment l' action d' assembler les chôses de deux en deux, (c' est le sens propre de ces mots) et par extension, de les varier et assembler en autant de manières qu' elles peuvent l' être. La combinaison des lettres. Faire une combinaison, des combinaisons. _ Combien les nombres, des raisonemens, des preûves, etc.
   Rem. Quand combiner a un second régime, c' est la prép. avec. * Un Auteur moderne y substitûe la prép. à: "En ce câs la volonté se trouveroit combinée à (avec) la force. _ L' Acad. ne met point d' exemple de combiner avec aucun régime relatif.

COMBLE


COMBLE, adj. et subst. COMBLÉ, ÉE, adj. COMBLER, v. act. [Konble, konblé, blé-e, blé; 1re lon. 2ee muet au 1er, é fer. aux trois aûtres, long au 3e.] I. Comble, adj. ne se dit que des mesûres et des chôses sèches seulement; on ne le dit point des liquides. Mesûre comble, boisseau, minot comble, tout comble, etc. _ Figurément, la mesûre est comble, les crimes sont montés à l' excès: on a tout à craindre des vengeances divines; ce qui se dit, par extension, de la colère des Souverains les plus clémens, et des hommes les plus indulgens.
   II. COMBLE, s. m. est 1°. ce qui peut tenir au-dessus des bords d' une mesûre, d' un vaisseau déja plein. Le comble d' un boisseau, d' un minot: "Il a tant doné pour le comble. = 2°. Le faîte d' une maison. Comble est plus du style simple et faîte du style élevé: "Maison abatue, ruinée de fond en comble, ce qui se dit au propre et au fig. = 3°. Figurément, le dernier surcroit, le plus haut degré de quelque chôse: le comble des honeurs, ou de l' infortune, etc. etc.
   Être au comble de, Mettre le comble à... "Il est au comble de la gloire.
   Oui, cher Prince, ta mort, de tant de pleurs suivie,
   Met le comble aux grandeurs dont tu fus revêtu.
       Rouss.
* Brébeuf, gêné par la mesûre du vers, dit, mettre un comble.
   Ou que, pour mettre un comble au mal qui les menace,
   Les rigueurs de la faim ne suivent la bonace.
   Je ne sais si l' on pardonerait aujourd'hui cette faûte à un Poète, mais certainement on ne l' épargnerait pas dans un Prosateur.
   Être au comble se dit quelquefois sans régime: "La mesure est au comble: "Il s' aplique à gagner l' afection des vieux Capitaines, dont la réputation et l' expérience étoient au comble. Télém.
   Pour comble, adv. Pour surcroit. "S' atendoit-on qu' un... erreroit, et pour comble, qu' il se rétracteroit. Coyer. "Et pour comble, ce passage est celui de la déraison. Linguet.
   Mais, pour comble, à la fin, le Marquis en prison,
   Sous le faix des procès vit tomber sa maison.
       Boil.
  III. COMBLÉ n' était autrefois que participe, Comblé de bien, de gloire, de faveurs. Aujourd'hui on l' emploie comme adjectif, sans régime et dans le sens de ravi, enchanté: c' est un mot de petite maîtresse: Gresset et Coyer s' en moquent.
   Et! bon jour, cher Cléon, je suis comblé, ravi
   De retrouver enfin mon plus fidèle ami.
       Méchant.
Gresset, dans la même Comédie, emploie, dans le même sens, le verbe combler. Il fait dire à Cléon:
   Ma foi, si vous voulez,
   Que je vous parle aussi très-vrai, vous me comblez:
   Vous m' avez épargné, par cet aveu sincère,
   Le même compliment que je voulois vous faire.
"En bien et en mal, ils escaladent tous les superlatifs: ils sont comblés, enchantés, furieux, sur des choses qui n' auroient pas causé la moindre émotion dans leurs aïeux, mais seulement dans leurs aïeules. Coyer.
   IV. COMBLER veut dire: 1° Remplir un vaisseau, une mesûre jusque par-dessus les bords; combler un boisseau, une mesûre. _ Il est peu usité en ce sens, excepté dans cette expression: combler la mesûre, qui est du style figuré; faire quelque nouvelle faûte, après laquelle il n' y a plus de pardon à espérer. "Leur rébellion a comblé la mesûre. _ On ne dit pas au passif, la mesûre est comblée, mais comble. Voy. plus haut COMBLE, adj. n°. I.
   2°. Remplir un creux, un vide: "Combler un fossé, des valées, la tranchée.
   3°. Combler de biens, au figuré, faire de grands biens à... et ainsi combler de bienfaits, de grâces, de faveurs.
   Je t' ai comblé de biens, je t' en veut acabler.
       Cinna.
"Il l' a comblé de faveurs: il est comblé de gloire.
  4°. Dans le jargon moderne, ravir enchanter. Voy. plus haut, un exemple de Gresset.

COMBUGER


COMBUGER, v. a. Remplir d' eau des futâilles, pour les imbiber, avant que de les employer.

COMBUSTIBLE


COMBUSTIBLE, adj. COMBUSTION, s. fém. [Konbus-tible, bus-tion, et non pas-bus-cion: le t n' a pas ici, comme dans beaucoup de mots terminés en tion, le son du c.] Combustible, se dit au propre, de ce qui est disposé à brûler aisément; combustion ne se dit qu' au figuré, d' un grand désordre, d' un grand trouble, excité dans une assemblée, une Ville, un Royaume: matière combustible; tout le Royaume était en combustion. "Ces diférentes dispositions alumèrent une guerre civile, qui mit plusieurs fois le Royaume en combustion. Il se dit toujours avec la prép. en.
   Rem. 1°. * Le Peuple confond quelquefois combustible avec comestible: "Ce vaisseau est presque tout chargé de combustibles: c' est un grossier barbarisme.
   2°. Combustible ne se dit point des persones. Cependant M. de B... (Hist. d' Angl.) l' emploie assez heureûsement. "Le spectacle de la beauté en pleurs émut vivement le combustible Édouard: l' amour se glissa dans son coeur sous les traits de la compassion. _ Le combustible Edouard, pour, Edouard facile à s' enflamer, est sans doute un Anglicisme; mais j' avoue qu' il ne me déplaît pas. Peut-être déplaira-t-il à d' aûtres.

COMÉDIE


COMÉDIE, s. f. COMÉDIEN, ENNE, s. m. et fém. [Komédî-e, dien, diè-ne; 2e é fer. 3eè moy. au dern. Dans le 2d, ien n' a pas le son d' ian.] Comédie est une pièce de théâtre, où l' on représente quelque action de la vie commune. Comédien, Comédiène, celui ou celle qui joûe la comédie (ou d' autres pièces) sur un théâtre public.
   Rem. 1°. Comédie se dit ordinairement par oposition à la Tragédie. Quelquefois pourtant on entend par ce mot le théâtre en général: allons à la Comédie; elle est à la Comédie, etc.
   2°. Aûtrefois on donait ce nom aux Tragédies mêmes. Mde. de Sévigné, parlant de Bajaset, de Bérénice, d' Andromaque, dit: "Quant aux belles Comédies de Corneille, elles sont autant au-dessus, etc. "On parle d' une Comédie d' Esther, qui sera représentée à St. Cyr. La même. _ C' était tellement l' usage alors de parler de la sorte, que le P. Bouh. ne craint pas de dire, que quoiqu' on se serve encore du mot de Tragédie, en parlant d' une pièce en particulier, dont on veut marquer le caractère, comme, Andromaque est une Tragédie, cependant, si l' on parlait de cette pièce en général, on dirait: Andromaque est une des plus belles comédies qui ait paru sur le théâtre. _ L' usage a entièrement changé, et il serait ridicule aujourd'hui de s' exprimer de la sorte. = Il n' en est pas des Acteurs comme des pièces, et l' on dit fort bien d' un Acteur qui excelle dans le tragique, c' est un bon, un excellent Comedien.
   3°. Comédie se dit figurément des actions qui ont quelque chôse de plaisant. "C' est une Comédie. _ Doner la Comédie, se doner en spectâcle de ridicule, faire rire à ses dépens. "Les chevaux étoient mis pour vous mener au spectâcle: vous comptiez sur votre mari. Un mari français! vouliez-vous doner la comédie à la Comédie même? (c. à. d. aux Spectateurs.) Coyer. _ Jouer la Comédie, se contrefaire, parler et agir aûtrement qu' on ne pense. * La Touche dit, dans le même sens, faire la Comédie: on dit, jouer. = On dit, d' une chôse que tout le monde sait, c' est le secret de la Comédie. "Bon! qui ne sait pas cela, reprit Doris; c' est le secret de la Comédie? Marmontel.
   4°. Comédie se dit aussi du lieu où l' on joûe la Comédie pour le public. "Il est logé à côté de la Comédie.
   5°. Acteur, Comédien (synon.) Voy. ACTEUR.

COMESSATION


*COMESSATION, s. f. Repas. Latinisme employé par Fleuri. "Ils condamnoient absolument, suivant la doctrine des Apôtres, ces collations après souper, apèlées comessations, qui fesoient passer les nuits en débauches. Moeurs des Chrét.

COMESTIBLE


COMESTIBLE, s. m. Ce qui se mange. Terme de Comerce. Il n' est pas dans les Dictionaires. Voy. COMBUSTIBLE. Rem. 1°.

COMÉTAIRE


*COMÉTAIRE, adj. Qui concerne les comètes. "Tout corps cométaire ou planétaire. Exam. des Ép. de la Nat. "Le système cométaire. Ibid.

COMèTE


COMèTE, s. f. [2e è moy. 3e e muet.] On a fait aûtrefois ce mot masc.
   Et d' un sombre ascendant l' influence secrette
   Fait, d' un feu lumineux, un sinistre comète.
       Bréb.
  COMèTE est un corps lumineux qui paraît extraordinairement dans le Ciel. On a cru long-temps que les comètes présageaient des événemens fâcheux. Il parut une comète à la mort de César. On ne manqua pas de la regarder comme l' anonce de ce grand évènement. On est détrompé aujourd'hui de cette erreur.

COMICES


COMICES, s. m. pl. Assemblée du Peuple Romain, pour élire des Magistrats, ou pour traiter des afaires publiques. _ Suivant le Rich. Port. on disait le comice, au sing. pour le lieu où l' on tenait ces assemblées. _ S' il est vrai qu' on l' ait dit aûtrefois, on ne le dit plus aujourd'hui.

COMINGE


COMINGE, s. f. Bombe d' une grosseur peu ordinaire, ainsi nommée de M. de Cominge, son inventeur. _ M. Fréron, ou son Imprimeur, l' a écrit avec deux mm; il dit, des Lettres de quelques Juifs à Mr. de Voltaire, par l' Ab. Guinée. "Ainsi M. de Voltaire doit être écrasé par le poids de cette terrible comminge.

COMIQUE


COMIQUE, adj. COMIQUEMENT, adv. [Komike, keman: 3e e muet.] Comique est 1°. ce qui apartient à la Comédie, prise dans le premier sens: Pièce, Poète, sujet, style comique. _ La Bruyère en fait un subst. en parlant des Auteurs. "Un comique outre sur la scène ses personages. Rousseau aussi. Voy. ÉCHEC. On dit, un Auteur Comique. _ Mais on le dit fort bien des Acteurs: "C' est un bon comique: les comiques de cette troupe ne sont point bons. _ Boil. dit, le comique, pour le genre comique:
   Le comique, ennemi des soupirs et des pleurs,
   N' admet point dans ses vers de tragiques douleurs.
Ce subst. est reçu en ce sens: "Ce Poète entend bien le comique: Voltaire n' a pas réussi dans le comique: Ce Comédien n' est bon que pour le comique.
   2°. Plaisant, propre à faire rire: Visage, aventûre, histoire comique.
   COMIQUEMENT, adv. D' une manière comique. "Il a traité ce sujet comiquement.

COMITE


COMITE, s. m. Bas Oficier préposé sur les galères pour faire travailler la chiourme. _ On disait Come à Marseille; provençalisme.

COMITÉ


COMITÉ, s. m. Terme emprunté de l' Anglais. Bureau composé de plusieurs Membres de l' une ou l' aûtre Chambre, commis pour examiner une afaire. On ne le dit dans le sérieux, que des Anglais. En France, on dit Bureau. _ Dans le style badin, on le dit de toute assemblée. _ Les Comédiens apèlent leurs assemblées, Comité.

COMITIAL


*COMITIAL, adj. m. On a doné autrefois ce nom au mal caduc. Voici l' origine que M. Le Gendre done à cette locution. "Les Comices ou États des Romains, se séparoient sans rien faire, si quelqu' un du peuple tombait du mal caduc, nomé pour cette raison mal comitial.

COMITICULE


*COMITICULE, s. m. Petit Comité. Mot forgé pour rendre ridicules certains Comités. Ils pourront se diviser en d' autres Comiticules, qui auront aussi une existence distinguée. Linguet.

COMM


COMM. Dans les mots qui comencent par cette syllabe, on ne prononce qu' une m. Dans la suite, et peut-être bientôt, on n' en écrira qu' une. Car que font là, autre chôse, ces deux mm, qu' embarrasser.

COMMANDE


COMMANDE, COMMANDEUR, COMMANDERIE; c' est ainsi qu' écrivent les Dict. de Trév. de l' Acad. et du Rich. Port. Plusieurs écrivent ces mots avec un e; et l' Acad. aussi bien que les autres Dictionaires, mettent un e à Commende, bénéfice en commende, et Commendataire; ce qui n' est pas fort conséquent; car tous ces mots ont la même origine. Mais l' usage est plus fort que la raison, et nous le suivrons, puisqu' il a prévalu.

COMMANDANT


COMMANDANT, s. m. [2e et 3e lon.] Qui commande dans une place, ou qui commande des troupes. Le Commandant du Fort, de la Citadelle: il faut s' adresser au Commandant. _ L' Acad. le met aussi adj. les Oficiers Commandans. Il est peu usité de cette manière.
   Rem. On dit, Mde. la Commandante, pour, la femme du Commandant. L' Acad. ne le met point.

COMMANDE


COMMANDE, (de) adv. Ouvrage, bureau, commode de commande; c' est-à-dire, que l' ouvrier a fait exprès pour quelqu' un qui le lui a commandé, qui lui en a doné l' ordre. _ On dit aussi, maladies, larmes, louanges de commande. "Les fantaisies, les maladies de commande. Coyer. "Les louanges de commande sont peu flateûses. * M. Formey dit, par analogie, louer de commande; mais l' analogie trompe souvent, et telle expression est en usage avec les noms, qui ne l' est pas avec les verbes, et vice versâ. "Il n' y en a aucun qui ne doive s' être soulevé plus d' une fois contre l' obligation de louer de commande, et de louer souvent des sujets très-peu louables.
   * Fêtes, jeûnes de commande. Trév. On dit, de commandement. V. FêTE.

COMMANDEMENT


COMMANDEMENT, s. m. COMMANDER, v. a. [Komandeman, komande: 2e lon. 3ee muet au 1er, é fer. au 2d.] Ces deux mots ont plusieurs sens. _ Ordre, ordoner: obéir aux Commandemens de Dieu; C' est Dieu qui nous commande de l' aimer par dessus toutes chôses, et d' aimer le prochain comme nous-mêmes. 2°. Autorité, pouvoir. Avoir commandement sur quelqu' un: il a le commandement sur les troupes: cela est sous son commandement: prendre, refuser, quiter, reprendre le commandement. _ Commander dans une Ville, dans une Province. Commander une armée, une brigade, un détachement, etc.
   Rem. 1°. On dit d' un Oficier qui commande de bone grâce, qu' il a le commandement beau, on dit, au contraire, qu' il a le commandement rude, lorsqu' il commande d' un air impérieux et altier. _ Avoir à son commandement, en sa disposition. "J' eus le lendemain six louis d' or à mon commandement. Mariv. _ Avoir à commandement, avoir la faculté de faire une chôse quand on le veut: "La Mère (Guèpe) y pond un oeuf de mâle, et ensuite un de femelle. Il faut croire qu' elle a cela à commandement, puisqu' elle proportione la grandeur de la loge à la tâille du mâle ou de la femelle qui doit y naître. Pluche. "Il a la langue anglaise à commandement: il la parle comme sa langue naturelle.
   * 2°. Bossuet apèle les Commandans, des hommes de commandement; et La Touche aprouve cette locution, pour signifier un homme qui sait l' art de commander. D' aûtres, au contraire, apèlent les bons Domestiques des hommes de bon commandement; c. à. d. qui exécutent bien et volontiers ce qu' on leur commande: l' un n' est pas plus français que l' aûtre. L' Acad. ne met ni l' une ni l' aûtre de ces façons de parler.
   3°. COMMANDER, relativement aux persones, a deux sens, et diférens régimes, relatifs à ces deux diférens sens. Quand il signifie, être chef, conduire, il est actif et régit l' accusatif. "M. de Turenne commandoit l' Armée; M. d' Artagnan commandoit les Mousquetaires. _ Vertot lui fait régir la prép. à: Pompée commandoit à un aûtre Corps. Retranchez à. _ M. Belloi, dans Gaston et Baïard, lui done la prép. sur pour régime.
   Frère du Roi d' Espagne et neveu de mon Roi,
   Nemours, n' est-il pas fait pour commander sur moi.
C' est un faux régime. On dit bien avoir le commandement sur les troupes; sur quelqu' un: on ne dit pas, commander sur, etc. Un Homme de Lettres, qui sait parfaitement bien sa langue, croit qu' on peut le dire en vers, et qu' on le dit tous les jours en prôse.
   Quand commander signifie gouverner, ou ordoner, il régit le datif (la prép. à.) "Les Romains commandoient à plusieurs États: "C' est un Prince digne de commander à tout le monde. "On commanda aux Chevaux-légers de pousser les énemis. On dit aussi, en cette ocasion: on commande les Chevaux-légers pour pousser, etc.
   4°. COMMANDER, au figuré, dit des chôses, dans le sens de dominer sur, régit plus régulièrement l' acus. que le dat. "Il y a une hauteur qui commande la Ville. Bouh. Mén. _ Vaugelas et d' Ablancourt se sont servis du datif: "La montagne commandoit au chemin par où l' énemi devoit passer. Quintecurce. "Il gardoit les hauteurs, qui commandoient à la rivière. Xenophon. L' Acad. le dit avec le datif, aussi bien qu' avec l' acusatif. L. T. L' acusatif vaut mieux. Le Rich. Port. ne met d' exemple que de celui-ci.
   5°. COMMANDER a un beau sens dans le moral avec la prép. à:
   Commandez un moment à votre impatience.
       Gresset.
  Commande à ta propre valeur
  D' éteindre en toi cette chaleur
  Qu' allume ton goût pour la gloire.
      Rousseau.

COMMANDERIE


COMMANDERIE, s. f. COMMANDEUR, s. m. [Komanderi-e, man-deur; 2e lon. 3e e muet, 4e lon. au 1er. Il serait plus conforme à l' étymologie et à l' analogie d' écrire avec un e Commenderie, Commendeur, comme on écrit Commende et Commendataire, et ainsi, Commendite, Commenditaire: mais l' usage le plus commun est de les écrire avec un a.] Commanderie est un bénéfice, dont jouit un Chevalier de quelque Ordre que ce soit. _ Commandeur est le Chevalier qui a été pourvu d' une Commanderie.
   *COMMANDEUR: c' est par ce nom que des Traducteurs de Livres Anglais rendent le mot Commodore. Il faut dire, Commandant ou Chef d' Escadre. Voy. le Dict. de Boyer.

COMMANDITE


COMMANDITE, s. f. COMMANDITAIRE, s. m. [Komandite, ditère: 2e lon. 4e. e muet au 1er, è moyen et long au 2d: on devrait écrire Commendite, etc. avec un e: Voy. COMMANDERIE.] La Commandite est une société de commerce, dans laquelle l' un des Associés, n' étant point dénommé dans la raison ou signatûre, n' est engagé solidairement que jusqu' à la concurrence d' une certaine somme portée par l' Acte. C' est cette restriction qui forme la commandite. Dict. du Citoy. Suivant l' Acad. c' est une société de deux Marchands, dont l' un donne son argent, l' autre ses soins. Cette définition est insufisante, aussi bien que celle de Trév. qui lui ressemble. _ Suivant le Rich. Port. c' est une société qui a le même intérêt pécuniaire; définition inintelligible et qui n' aprend rien.
   COMMANDITAIRE est celui qui a une commandite, à qui l' on a fait une commandite. L' Acad. ne met pas ce mot, qui est aussi en usage que celui de Commandite.

COMME


COMME, adv. de comparaison. [Kome, 2ee muet.] Il se prend en diférentes manières. On le met pour ainsi que: il sera puni comme les aûtres.
   Vous aurez le destin
   De ces fleurs si fraiches, si belles,
   Comme elles, vous plairez, vous passerez comme elles.
       Des Houl.
_ De même que: "Comme l' humilité est le fondement de toutes les vertus, ainsi l' orgueil est la source de tous les vices. _ Dans le temps que: "Comme il arrivoit, son frère parut. _ Par exemple: Les noms en tié sont féminins, comme pitié, amitié, etc. _ À~ caûse que: Comme il ne vouloit pas obéir, on le fit mettre en prison. _ Presque: on le trouva comme mort. _ En quelque sorte: il est comme le grand ressort de cette entreprise. L. T. "Leur origine est comme ensévelie sous d' immenses richesses. Mariv. Dans ce dernier emploi, il sert de correctif.
   Rem. 1°. Comme, au lieu de comment, ne vaut rien dans le sens interrogatif. "Albin, comme est-il mort? Corn. Il faut là comment. Mais hors de là il a souvent plus de grâce et de douceur. Bossuet et Mde de Sévigné lui donnent presque toujours la préférence sur comment. _ Malherbe disait toujours comme; mais en quoi il n' est pas à imiter, c' est qu' il l' employait dans l' interrogation: Comme y fournirez-vous? _ Il n' y a pas de doute, dit Vaugelas, que lorsqu' on interroge, ou qu' on se sert du verbe demander, il faut dire comment, et non pas comme. _ Rousseau (Jean-Jaques) dit, dans la même phrâse, comment et comme, et pour ne pas répéter le premier, et parce que le second est plus doux à l' endroit où il l' a placé. "Je montrois aux hommes comment ils faisoient leurs malheurs eux mêmes, et par conséquent, comme ils pouvoient les éviter. Let. à M. de Volt.
   2°. Cette préposition servant de lien à deux membres de comparaison, il faut qu' il y ait une certaine ressemblance de construction entre les deux membres. Par exemple, Racine dit, dans les Frères Enemis:
   Si la vertu vous touche autant que fait le crime,
   Si vous donez les prix, comme vous punissez.
Il falait dire, si vous récompensez comme vous punissez. Le Poète a voulu éviter la rime de l' hémistiche. _ En prôse, on dirait, si vous donez les prix, comme vous imposez les peines. Alors on garderait le même ordre dans les deux membres.
   3°. Il ne faut pas mettre comme, au lieu de que, après autant et aussi: "Vous me devez autant comme (que) lui: "Cette espérance est aussi présomptueûse comme (que) elle est vaine. _ Racine s' en sert au lieu de que conjonction.
   Montrez, en vous tuant, comme vous êtes frères.
       Théb.
C' est une faûte, même dans un Poète: l' usage n' admet point comme, au lieu de que. _ Montrez que vous êtes frères, en vous tuant. = Fleury, dans son Hist. Eccl. emploie aussi comme d' une manière singulière: "Sa mémoire (de Caligula) fut condamnée comme d' un tyran. Il falait dire, comme celle d' un tyran.
   4°. Comme, mal placé, peut ocasioner des contresens. Exemple: "Il s' en est trouvé (parmi les Martyrs) qui se sont laissé brûler la main, y tenant long-temps des charbons ardens avec de l' encens, de peur qu' ils ne semblassent ofrir l' encens, en secouant les charbons, comme St. Barlaam, dont St. Basile fait l' éloge. Fleury, Moeurs des Chrét. De la manière que ce comme est placé, il semble que St. Barlaam secoua les charbons, et ofrit l' encens, ce qui est précisément le contraire de ce que Fleury a voulu dire.
   5°. Quelques persones n' aprouvent pas l' expression suivante: quand je ne serois pas votre serviteur, comme je suis. Ils disent que ces dernières paroles sont superflûes: mais assurément ils se trompent; comme je suis, ajoute quelque chôse au sens, et le rend plus fort. On peut dire indiféremment, comme je suis, ou comme je le suis. Vaug. Corn. L. T. Le dernier est plus exact. Je suis, ne dit rien. Je le suis, dit, je suis cela: c. à. d. votre serviteur. Marin.
   6°. Comme quoi pour comment, n' est plus guère en usage. L' Acad. dans la 1re édit. de son Dict. ne condamnait pas cette expression. Dans ses Observations sur les Remarques de Vaugelas, elle dit qu' on ne s' en sert plus. Dans les dern. édit. de son Dict. elle avertit que comme quoi est du st. fam. mais elle n' en done d' exemple que dans l' interrogation: Comme quoi avez-vous fait cela? _ Dans le style badin ou critique, il vaut mieux que comment: Vous savez ce qui en est advenu, dit M. Linguet, et comme quoi cette charlatanerie réussit.
   Vous savez comme quoi je vous suis toute aquise.
       Rodog.
Cela ne vaut rien dans une Tragédie.
7°. Comme que, de quelque manière que, est vieux aussi. "Cela sera fort bien, comme qu' il soit. J. J. Rousseau l' a encôre employé. "Comme que tout âille, peu importe au prétendu sage, pourvu qu' il reste en repos dans son cabinet. Il dit âilleurs, comme qu' on s' y prenne.
   8°. Comme ainsi soit que, puisque, d' autant que, ne se dit plus qu' en plaisantant. L' Acad. se contente de dire qu' il vieillit.
   9°. Comme si, régit l' indicatif, et non pas le subjonctif: "Combien de langues indiscrètes, comme si le secret dût faire gémir l' amour-propre, sont impatientes de divulguer leurs services! Du Plaisir. L' usage veut qu' on dise, comme si le secret devoit, etc.
   10°. L' usage trop fréquent de comme, est un défaut dans le discours. Il y a des gens, dit La Touche, qui ne parlent presque point sans faire quelque comparaison. Ils diront toujours, par exemple, elle est belle comme un Ange: il est laid comme un diable: doux comme du sucre, amer comme du fiel; blanc comme la neige, noir comme l' encre; léger comme une plume, pesant comme du plomb; vîte comme un cerf, lent comme une tortûe. En un mot, ils se servent d' une infinité de comparaisons vulgaires, qui deviènent insuportables par le fréquent usage qu' on en fait. On peut quelquefois parler de la sorte, mais on doit le faire rarement; et il est beaucoup mieux de dire simplement: elle est très-belle: il est fort laid: cela est extrêmement doux, etc.
   11°. C' est une négligence vicieûse d' entasser dans le discours, plusieurs comme, quand ils ne sont pas du même ordre: "Ne considérons pas la mort, comme des payens, mais comme des Chrétiens; c' est-à-dire, avec l' espérance, comme St. Paul l' ordonne. Ce 3ecomme fait un mauvais éfet, parce qu' il est dans un ordre diférent de celui des premiers; étant dans ceux-ci préposition, et dans l' aûtre, conjonction. Bouh.
   12°. Un homme comme moi, est une expression qui sent l' orgueil et la fatuité. "On ne vous entend jamais dire, un homme comme moi. Coyer. Aûtrefois, on disait, un homme de ma sorte. Les expressions changent, les passions sont toujours les mêmes.

COMMÉMORAISON


COMMÉMORAISON, COMMÉMORATION, s. f. [Komémorèzon, Komémora--cion: 2e é fer. 4e è moy. au 1er.] Ces deux mots ont la même origine et le même sens: ils signifient mémoire; mais ils n' ont pas le même emploi. Le 1er se dit de la mémoire qu' on fait d' un Saint dans l' Ofice Divin et à la Messe, le jour qu' on fait l' Ofice en entier d' un aûtre Saint. Cette commémoraison consiste à réciter une Antienne, un verset et une Oraison en l' honeur de ce Saint dans l' Ofice, et à dire l' oraison seulement à la Messe. On fait aussi la commémoraison des Dimanches et des Fêtes. _ Commémoration ne se dit au propre que du jour des Morts: la Commémoration des Morts. _ Dans le style familier et en plaisantant, on dit: nous avons fait commémoration, c. à. d. mention de vous. _ Dans le Rich. Port. on dit que commémoraison a la même signification que commémoration, et on définit celui-ci: Souvenir, mémoire qu' on fait d' une chôse, ou d' une persone: mention. Cela est obscur et peu exact.

COMMENSAL


COMMENSAL; écrivez COMMENSAL, et voyez ce mot. Il n' y a pas de raison pour écrire ce mot avec le ç souscrit avec la cédille; lettre étrangère, qu' on ne doit employer que dans l' absolûe nécessité.

COMMENÇANT


COMMENÇANT, ANTE, subst. COMMENCEMENT, s. m. COMMENCER, v. n. [Coman-san, sante, manceman, mancé; 2e lon. 3e lon. aux 2 1ers, e muet au 3e, é fer. au dern. _ On pourrait écrire ces mots avec une seule m, sans comettre une grande faûte.] Començant, est celui qui en est encôre aux premiers élémens d' un art, d' une science. Il n' a pas un emploi aussi étendu que les mots suivans. = Comencement, est ce par où une chôse comence. = Comencer, c' est, en général, faire ce qui doit être fait dabord. "Ce Livre est trop fort pour un començant. "Le comencement de l' année, du printemps, d' un livre: ce fut le comencement de sa fortune, etc. "Comencer un ouvrage, un bâtiment, un discours, etc.
   I. On dit, dans le Dict. Gram. que començant n' a point de féminin, et qu' on ne dit pas une començante, comme on dit un començant. _ L' Acad. le marque pourtant fém. et en titre et dans la définition. Il est vrai qu' elle n' en cite point d' exemple. Tout ce qu' on peut dire de plus vrai, c' est que le fém. est peu en usage.
   II. On dit, doner comencement à, faire comencer, et prendre comencement, comencer. "C' est ce qui dona comencement à un tel usage. "Cette Monarchie prit son comencement dans une telle année.
   On dit, adverbialement, au comencement, dès le comencement, dans le comencement. Ces adverbes se placent après le verbe, ou à la tête de la phrase: il avoit montré, au comencement, dès le comencement, dans le comencement, d' heureûses dispositions, mais il a trompé l' espérance de ses maîtres. Au comencement, il était plein d' ardeur; dès le comencement, il se montra tel qu' il était: dans le comencement, il étudiait avec aplication; mais il ne tarda pas à se dégoûter.
   Le proverbe dit: heureux comencement est la moitié de l' oeuvre. C' est la traduction de ce vers latin:
   Dimidium facti, qui bene coepit, habet.
   III. Comencer. 1°. Ce verbe est ordinairement suivi de la prép. à devant l' infinitif: comencer à bâtir, à dîner. Cependant on trouve dans de bons Auteurs, comencer de. "Le jour comença d' éclôrre. Il semble qu' il est inutile d' avertir qu' il ne faut pas du moins employer les deux régimes dans la même phrâse. Un Poète, gêné par la mesûre du vers, a fait cette faute dans un sonnet.
   Il comence de vaincre aussi-tôt qu' à paroître.
Voyez aussi un exemple de Rousseau, plus bâs, n°. 6°. = M. de Wailly, d' après Mén. Bouh.Th. Corn. l' Acad. admet l' un et l' aûtre régime de comencer à et de. "À~ peine a-t-on comencé à vivre, qu' il faut songer à mourir. "Il avait comencé d' écrire sa lettre. De, vaut mieux devant une voyelle; si l' on disait, il avoit comencé à écrire, cet à entre deux e ne ferait pas un bon éfet.
   2°. Dans les phrâses précédentes, comencer est neutre, mais avec un régime: il se dit aussi absolument et sans régime; l' année començait, le sermon comence. Quand comencerez-vous? Je ne fais que de comencer. _ Il est aussi impersonel, et régit à ou de. Il comence à faire jour, il començait de pleuvoir, quand je suis parti.
   3°. Comencer, comme finir, employé au passif, a une propriété singulière; c' est que le verbe qu' il régit à l' infinitif, a un sens passif, quoique employé à l' actif. Ainsi, au lieu de dire: ce livre a comencé ou a fini d' être imprimé; on dit qu' il a été comencé, ou fini d' imprimer: et ainsi le mode passif est transporté du verbe régi au verbe régissant. "Le N°. 27 étoit prêt et comencé d' imprimer dès le mois de Septembre. Linguet. _ Dans ce tour de phrâse, assez particulier, de vaut mieux que à, après comencer. "Ignorez-vous que les gros piliers du dôme sont comencés à élever. M. Patte. Il me semble que d' élever serait mieux.
   4°. Un chôse assez remarquable aussi, c' est que comencer régisse les persones en régime direct (à l' accusatif.) C' est un tel qui m' a comencé; c. à. d. qui m' a montré les premiers principes, les premières leçons de Musique, de danse, d' équitation, etc. "Ce Maître n' est propre qu' à comencer les enfans. _ On dit aussi qu' une Nourrice a comencé un enfant, pour dire, qu' elle a été la première a lui doner à têter.
   5°. Comencer, neutre et actif, se construit fort bien avec la prép. par, soit devant les noms, soit devant les verbes. "C' est par-là qu' il faloit comencer: Ce Prince comença par rétablir le bon ordre dans ses États. Quelques persones, dit La Touche, n' aiment pas cette manière de parler; mais de très-bons Auteurs parlent de la sorte; et il serait bien dificile d' exprimer aûtrement ce qu' on veut dire. L' Académie, ajoute-t-il, aprouve cette expression. Elle n' en done pourtant point d' exemples dans son Dictionaire. L. T. Elle en a doné dans la dernière édit. "Je comencerai par-là: cet homme comence par où les autres finissent: comencer l' année, la journée, par telle, ou telle chôse, par faire telle, ou telle chôse. Il faut comencer par un bout, et finir par l' aûtre. "Jamais les haines ne sont plus vives qu' entre ceux, qui ont comencé par s' aimer. Moreau. "Polinière començoit ordinairement son cours (de Physique) par ces paroles: Messieurs, nous allons comencer par le comencement, et nous finirons par la fin. Cette platitude marque assez le caractère de son esprit et de son style. Dict. Hist. _ Finir, comme on voit, a ce même régime, comme comencer. _ Il est à remarquer, à cette ocasion, que comencer à, et comencer par, ont des sens diférens: le 1er a raport au pâssé, et le 2d au futur. Cet enfant comence à étudier, à aprendre, veut dire que jusqu' à présent, il n' étudiait pas, il n' aprenait pas; mais que maintenant, il étudie, il aprend. "Comencez par aprendre ces dix vers, je vous en donerai d' aûtres ensuite: c. à. d. quand vous les aurez apris. Ainsi, l' on dira d' un Prince, qui est depuis long-temps sur le Trône: il comence à retablir l' ordre dans ses États: il avait long-temps négligé de le faire; et l' on dira d' un aûtre qui comence son règne: il a comencé par rétablir l' ordre dans ses États, avant que de penser à ataquer les énemis de la Patrie. Je crois donc que Rousseau (Jean Jaques) s' est mal exprimé, quand il a dit: "Je crois qu' il faut comencer à conoitre empiriquement (par la pratique) un certain nombre d' espèces, pour déterminer les aûtres. Let. sur la Botanique. Il devait dire, comencer par conaître, etc.
   6°. Rousseau le Poète fait régir à comencer, la prép. de devant les noms.
   Et le plus insensé commence d' être sage
   De l' instant qu' il commence à sentir son travers.
   Un Auteur moderne a dit aussi: "Commençant sa carrière, du terme où ils ont fini la leur. Je ne saurais blâmer ce régime.
   7°. Se comencer, n' est guère en usage aujourd'hui. "St Jean vouloit consoler les Fidèles, sur les persécutions qui se commençoient alors. On dirait à-présent, qui començoient alors, en se servant du neutre.
   8°. Le proverbe dit: il n' a pas fait qui commence, tout ce qu' on comence ne s' achève pas. _ Commencer la danse, être le premier à faire quelque chôse.
   IV. COMMENCÉ, ÉE, adj. et partic. Il ne se dit que dans un sens passif. On dit, un ouvrage commencé, c. à. d., qui est comencé; mais on ne doit pas dire, comme l' a fait le Traduct. de l' Hist. d' Angl. "Cette pratique féroce une fois commencée, se continua des deux côtés, parce qu' on ne peut pas dire qu' une pratique a été commencée. On doit dire, en pareil câs: "Dès qu' on eut commencé de tenir cette pratique féroce, on la continua des deux côtés.

COMMENDATAIRE


COMMENDATAIRE, adj. et s. m. COMMENDE, s. f. [Komandatère, Komande: 2e lon. 4eè moy. et long au 1er. _ Plusieurs écrivent Commandataire, Commande, sous prétexte qu' on écrit Commanderie, Commandeur, qui ont la même origine. Il est vrai qu' il y a de l' inconséquence dans ces deux manières d' écrire ces mots, et qu' on ne peut justifier l' usage là-dessus par aucune bone raison: mais enfin, c' est l' usage, et il faut s' y soumettre, jusqu' à ce qu' il change. Que s' il doit changer, ce doit être plutôt en écrivant les derniers mots avec un e, que les premiers avec un a.] Commendataire, ne se dit qu' avec le mot Abbé: celui qui possède une Abbaye en Commende. Abbé Commendataire de Saint-Victor de Marseille. Au Palais, on dit substantivement et absolument, le Commendataire. _ La Commende, est un titre de Bénéfice que le Pape done à un Éclésiastique nomé par le Roi, pour une Abbaye Régulière, avec permission au Commendataire de disposer des fruits pendant sa vie. "Posséder un bénéfice en Commende: "La Commende n' était aûtrefois que l' administration du temporel d' un Bénéfice, jusqu' à ce que le Titulaire eût été nomé. Elle n' était ordinairement que pour six mois.

COMMENDERIE


COMMENDERIE, COMMENDEUR. Voy. COMMANDERIE, COMMANDEUR.

COMMENSAL


COMMENSAL, s. m. [Komansal: 2e. lon. _ Le Traduct. de l' Hist. d' Angl., ou son Imprimeur, écrit Commençal, Commençaux, avec un ç souscrit de la cédille. Cette ortographe est également contre l' usage et contre l' étymologie, ce mot étant dérivé de Mensa.] Il se dit proprement de ceux qui mangent à même table: "Il est mon Commensal, nous sommes Commensaux. Suivant l' Acad. il n' a guère d' usage qu' en parlant des Oficiers de la Maison du Roi. Les aûtres Dictionaires et les Auteurs, lui donent un emploi plus étendu. _ L' Acad. le marque adj., et les exemples qu' elle en done montrent qu' il est subst. Le Rich. Port. a suivi le Dict. Acad.

COMMENSURABILITÉ


COMMENSURABILITÉ, s. f. COMMENSURABLE, adj. [Komansurabilité, Komansurable: dern. é fer. au 1er, 4e dout. au 2d; 2e lon. dans tous les deux.] Termes de Géométrie. Commensurable, se dit de ce qui est égal en mesure, proportion ou raport. Nombres, lignes, grandeurs commensurables. _ Commensurabilité, est le raport de deux quantités, qui peuvent se mesurer par une mesûre comune.

COMMENSURÉ


*COMMENSURÉ, ÉE, adj. Mot forgé par Leibnitz. "La propriété de Dieu est l' immensité, mais l' espace, qui est souvent commensuré avec les corps et l' immensité de Dieu, n' est pas la même chose. _ Ni le verbe commensurer, ni son participe, ne sont reçus dans la Langue.

COMMENT


COMMENT, adv. [Koman; 1re br.] De quelle sorte, de quelle manière: "Comment vous a-t-il reçu? Voilà comment les choses se sont passées. _ Remarquez qu' on ne met le pronom personel après le verbe, que lorsque comment est employé en interrogation. Voilà pourquoi cela n' a pas lieu dans la 2de phrâse, et que la suivante est contre les règles. "On demande comment un homme qui a vécu comme... peut-il faire des miracles? Retranchez il.
   On s' en sert quelquefois par exclamation, pour marquer son étonement. La Touche dit qu' alors il ne signifie rien. L' Acad. dit, au contraire, qu' il signifie alors, eh quoi!est-il possible! ce qui est plus vrai. "Comment, misérable!vous osez etc.
   Rem. 1°. Il n' en est pas de comment comme de la conjonction que: celle-ci, après certains verbes, régit l' indicatif, quand le sens est afirmatif, et le subjonctif, quand le sens est négatif ou interrogatif: mais dans les ocasions où l' on y substitûe comment, le mode du verbe ne change pas, et il doit toujours être mis à l' indicatif. On dira, par exemple, je ne conçois pas, ou, puis-je concevoir que vous vouliez une chose si injuste: mais on dira toujours, soit avec je conçois, soit avec je ne conçois pas, comment vous voulez, etc. _ Quelques Auteurs mettent le subjonctif. "Je ne conçois pas comment de simples discours puissent jamais être punis de mort. Grosier. "Je ne conçois pas comment vous ayiez fait si peu de découvertes. Feller. _ Il faut que de simples discours puissent, ou comment ils peuvent, que vous ayiez, ou, comment vous avez, etc.
   2°. Comment, régit quelquefois l' infinitif sans préposition: Comment faire? Comment concevoir des choses si obscures? Comment exécuter des ordres si dificiles? On sous-entend pourrai-je, ou, pourrons-nous?
   7°. Comme, au lieu de comment: voyez COMME: rem. n°. 1°.

COMMENTAIRE


COMMENTAIRE, s. m. COMMENTATEUR, s. m. COMMENTER, v. a. [Koman--tère, ta-teur, : 2e lon. 3e è moy. et long au 1er, é fer. au 3e.] Commentaire, est une suite d' éclaircissemens, d' observations et de remarques sur un livre, pour en faciliter l' intelligence: Commentateur, celui qui fait un Commentaire: Commenter, faire un Commentaire. "Commentaire sur la Bible: on ne peut la bien entendre sans Commentaire. Cela n' a pas besoin de Commentaire. "Les Commentateurs sont souvent difus; ils expliquent fort au long ce qui n' a pas besoin d' explication. "Plusieurs savans hommes ont commenté Homère, Virgile, etc.
   I. COMMENTAIRES; Histoire, ne se dit que du livre de César et de celui de Montluc, qu' on apèle les Commentaires de César, les Commentaires de Montluc. Dans ce sens, il n' a point de singulier. L. T. _ Au figuré, (st. famil.) il se dit, dans les deux nombres, de l' interprétation maligne qu' on done aux discours ou aux actions de quelqu' un. "On feroit là-dessus un beau Commentaire. "Il fait des Commentaires sur tout: on fit bien des Commentaires sur cette parole, sur cette démarche.
   II. COMMENTER, au figuré, est neutre, et signifie, tourner en mauvaise part. On l' emploie, ou avec la prép. sur: "Il commente sur tout: il n' y a point à commenter là-dessus; ou absolument et sans régime. "Il commente un peu, il en dit plus qu' il n' y en a.

COMMER


COMMER, v. n. [Komé; 2eé fer.] Faire des comparaisons: il est du style familier. "Vraiment, voilà bien commé: vous ne deviez pas commer si désobligeamment. Acad. _ Ce mot vient de comme, parce qu' on se sert de cet adverbe dans les comparaisons: Il est comme ceci, elle est comme cela. _ Commer, est peu en usage hors de Paris. Il sent un peu le jargon des sociétés de la Capitale.

COMMÉRAGE


COMMÉRAGE, s. m. [Koméraje; 2e é fer. dern. e muet.] Propôs et conduite de commère. "La gloire de l' exercer en a été l' unique salaire, et le commérage, le tatillonage grossier auquel il autorise, le seul revenant bon. Linguet. _ Ce mot n' est point dans les Dictionaires; il est pourtant fort usité dans le discours familier, et sur-tout dans le style badin et critique.

COMMERÇABLE


COMMERÇABLE, adj. COMMERÇANT, ANTE, subst. et adj. [Komèrsable, Komèrsan, sante: 2e ê ouv. 3e dout. au 1er, lon. aux deux aûtres.] Commerçable, est ce qui peut être commercé avec facilité: Éfets, billets commerçables. Le commerce des Européens a presque épuisé de proche en proche les richesses commerçables de cette nation, (l' Afrique Occidentale.) Rayn. _ Commerçant, qui trafique, qui commerce en grôs. Riche Commerçant.
   Rem. 1°. L' Acad. ne marque Commerçant, ante, que substantif, et ne done point d' exemple du féminin. _ On l' emploie aussi adjectivement, et le fém. n' est usité que de cette manière: un Peuple commerçant, les Nations commerçantes.
   2°. Il n' est adjectif et déclinable que quand il est employé absolument et sans régime. Quand il régit la prép. avec, il est participe et indéclinable. "La Martinique mérita d' ocuper les Spéculateurs, et comme agente des autres Colonies, et comme commerçante avec l' Amérique Espagnole et Septentrionale. Rayn. Il falait, comme commerçant avec; mais le goût de la symétrie a fait préférer commerçante, pour faire le pendant d' agente.

COMMERCE


COMMERCE, s. m. COMMERCER, v. n. [Komèrce, mèrcé; 2eè moy. 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Commerce, est 1°. trafic, négoce de marchandises ou d' argent, en grôs et en détail. Voy. NÉGOCE. = 2°. Correspondance avec quelqu' un, soit pour la société, soit pour quelques afaires: avoir, entretenir commerce avec quelqu' un; avoir commerce de lettres, de nouvelles, etc. Il a rompu tout commerce avec ces gens-là, etc. Commerce innocent, ou suspect, ou scandaleux. _ Commercer, n' a que le 1er sens de commerce: trafiquer: il commerce dans le Levant, aux Indes, en Espagne, en Italie, etc.
   Rem. 1°. On dit, il y a un grand commerce entre nous et les autres Nations; mais dit-on, il y a commerce, sans article? Fontenelle l' a dit, et je pense qu' on peut le dire après lui. "Après cela, je ne veux plus jurer qu' il ne puisse y avoir commerce entre la lune et la terre. "Les Américains eussent-ils cru qu' il dût y en avoir entre l' Amérique et l' Europe, qu' ils ne conoissoient seulement~ pas? _ L' Acad. ne met point d' exemple de cette manière de parler; mais l' analogie l' autorise: puisqu' on dit, avoir commerce avec, on peut bien dire, il y a commerce entre.
   2°. Être en commerce avec: "Atticus, par le choix qu' il avoit fait d' une vie privée, en renonçant aux charges, ne laissoit pas que d' être en quelque sorte de commerce avec tous ceux qui gouvernoient l' État. P. Rapin.
   3°. Il est bon d' avertir que, avoir commerce, ou, être en commerce avec... s' entend en mauvaise part (sur-tout le 1er), quand on parle de persones de diférent sexe. _ On dit aussi, d' un homme qui se mêle de quelque pratique, ou intrigue qui n' est pas fort honnête, qu' il fait un mauvais, un méchant, un vilain, un honteux commerce.
   4°. Être d' un commerce sûr, d' un agréable commerce, d' un bon commerce, c' est aporter dans la société une probité reconûe qui excite la confiance, ou y aporter de l' agrément.

COMMERCIAL


*COMMERCIAL, ALE, ou COMMERCIEL, ELLE, adj. [Komêrcial, ci-ale, ci-èl, ci-èle; 2e ê ouv. 3e è moy. aux deux dern.] Qui concerne le commerce. Talens, intérêts commerciaux, opérations commerciales ou commercielles: ces mots ne se trouvent guère que dans des gazettes. "Le Comité, chargé d' examiner les intérêts commerciaux de cet État. Journ. de Gen. "Il réunit les talens militaires, littéraires et commerciaux. Ibid. "Toutes restrictions commercielles... sont contraires à la saine politique. Ibid. Traduct. de l' Anglais.

COMMèRE


COMMèRE, s. f. [Komère; 2eè moy. et long, 3e e muet.] Au propre, celle qui a tenu un enfant sur les Fonts. Elle a ce nom, tant à l' égard de celui qui l' a tenu, qu' à l' égard du père et de la mère de l' enfant. = Au figuré, femme qui veut savoir toutes les nouvelles du quartier, et qui parle de tout à tort et à travers. "C' est une commère, une vraie, une franche commère. _ On dit aussi familièrement, bonne commère, maîtresse commère, d' une femme hardie et rusée, qui va à ses fins sans se mettre en peine de rien. Voyez COMPèRE.

COMMETTANT


COMMETTANT, s. m. [Komètan, 2eè moy.] Terme de Commerce. Commettant, est celui qui charge un aûtre d' une afaire, et Commissionaire, celui qui s' en charge. _ Dans le Dict. Gramm. on le marque adj. masc. et fém., mais il est subst., et ne se dit point au fém.: on ne dit point Commettante.

COMMETTRE


COMMETTRE, v. a. [Komètre, 2eè moy. 3e e muet. _ Il se conjugue comme mettre.] On doit dire au futur et au conditionel, il commettra, il commettrait, et non pas commettera, commetterait, comme je l' ai lu dans des livres. = Commettre a plusieurs sens: 1°. Faire, en parlant des péchés, des crimes, des faûtes. 2°. Employer avec le datif (la prép. à) des chôses: on l' a commis à telle charge, à tel emploi. _ Ou avec seul le régime direct: Commettre un Raporteur, nomer un Juge pour être Raporteur dans une afaire. Au passif, il est suivi de la prép. pour: il a été commis pour Raporteur. = 3°. Confier, avec le régime direct des chôses: j' ai commis cela à vos soins; je vous en ai commis le soin. = 4°. Compromettre, exposer: je ne veux pas que vous me commettiez là-dedans: je ne vous commettrai point: "Il est de la prudence d' un Ambassadeur de ne pas commettre le nom de son Maître. Commettre les armes, la réputation des armes, du Prince; la fortune de l' État. _ Se commettre, s' exposer à recevoir quelque déplaisir, quelque disgrâce. "Vous prendrez vos mesures pour ne vous plus commettre, jusqu' à ce que la guerre finisse. Télém. "Il y a de tels projets, d' un si grand éclat, et d' une conséquence si vaste, que toute la gloire et toute la fortune d' un homme y sont commises. _ Se commettre, est aussi, se mesurer avec: "Ils craignoient de se commettre avec un si grand Capitaine. Vertot. = 5°. Commettre deux persones, l' une avec l' aûtre; les mettre dans le cas de se brouiller ensemble: "Par ses indiscrétions et ses raports, il a commis le père avec le fils.
   * 6°. En style mercantile, on dit, commettre des marchandises, doner ordre de les acheter: c' est un vrai barbarisme. On dit en ce sens, Commettant, Commission, Commissionnaire; on ne dit point commettre.
   * Rem. Commettre (n°. 4°.) n' a que le régime direct. Racine lui done pour 2d régime, la prép. à: Iphigénie, Acte II, Sc. 4e:
   Aux afronts d' un refus craignant de vous commettre.
   Ce régime ne vaut rien, même en vers. Voyez Rem. sur Racine par d' Olivet. XXXIX.

COMMIS


COMMIS, ISE, adj. et participe. Il n' est adjectif que dans le 2d sens de commettre. Avoir des caûses, commises aux Requêtes du Palais, ou de l' Hôtel; avoir droit d' y plaider en première instance. _ Dans les aûtres sens, commis n' est que participe.

COMMINATOIRE


COMMINATOIRE, adj. [Komina-toâ-re; 4e lon. 5e e muet.] Terme de Pratique, qui se dit d' un acte dans lequel on a inséré une claûse, contenant quelque menace, en câs de contravention. Clause, jugement, sentence, peine comminatoire: cela n' est que comminatoire.

COMMINGE


COMMINGE. Voy. COMINGE.

COMMIS


COMMIS, s. m. [Komi, devant une voyèle, Comiz.] Celui qui est chargé par un aûtre de quelque emploi, de quelque fonction dont il doit lui rendre compte. Acad. Celui à qui le supérieur a doné quelque charge, quelque emploi, quelque maniement ou recouvrement à faire. Trév. Qui a une commission, un emploi, quelque sorte de charge qu' on done, ou qu' on révoque à volonté. Celui qu' on a mis en sa place pour faire quelque chose. Rich. Port. Il y aurait beaucoup à dire sur toutes ces définitions: elles sont peu satisfaisantes. _ On pourrait définir plus simplement Commis, un Aide subalterne et amovible, dans les afaires. _ L' Acad. dit qu' on ne l' emploie guère qu' en parlant de ceux qui sont employés de cette sorte, ou chez les Secrétaires d' État, ou dans les Finances, ou dans quelque Greffe. _ Mais les Négocians ont aussi des Commis. Nous avons même à Marseille un maître Boulanger, qui, à la vérité, est aussi marchand de blé, qui apèle sa boutique, Magasin, son métier Fabrique, et ses garçons, Commis.

COMMISE


COMMISE, s. f. [Komize, 2e lon.] Il ne se dit qu' en matière féodale: Fief tombé en commise, c. à. d., que le Seigneur a droit de réunir, faûte de devoirs rendus par le vassal.

COMMISÉRATION


COMMISÉRATION, s. f. [Komizéra--cion, en vers ci-on, 2e é fer.] Pitié, miséricorde, sentimens de compassion.
   Rem. Richelet dit que c' est un mot écorché du Latin, et qu' on dit en sa place, pitié, compassion. Il cite pourtant Saint-Évremont. "Des airs, ni une commisération afectée, ne conviènent point à un Vainqueur généreux. Aujourd'hui, commisération est très-bien établi, et en plusieurs ocasions, il vaut mieux que pitié et compassion.

COMMISSAIRE


COMMISSAIRE, s. m. [Komicère, 3eè moy. et long, 4e e muet.] Celui qui est commis par le Prince, ou par une aûtre Puissance légitime, pour exercer une fonction, une juridiction, que sans cela il ne pourrait pas exercer. Le Roi a donné des Commissaires, pour examiner, pour juger: le Parlement a nommé des Commissaires, pour instruire l' afaire sur les lieux. Il y a aussi des Commissaires des Guerres, des Vivres, d' Artillerie, de Marine, etc.
   COMMISSAIRE, COMMISSIONAIRE (synon.) Le 1er a raport aux afaires publiques, et est nomé par quelque Puissance légitime; le 2d a raport aux afaires privées, et ne tient ses pouvoirs que des particuliers.
   On apèle, en style proverbial, chère de Commissaire, un repâs où l' on sert grâs et maigre.

COMMISSION


COMMISSION, s. f. COMMISSIONAIRE, s. m. [Komi-cion, cio-nère, 4e è moy. et long au 2d.] Commission, est, 1°. une faûte commise. En ce sens, il n' est en usage que dans cette locution: péché de commission, qu' on dit par oposition à péché d' omission. = 2°. Charge qu' on done à quelqu' un de faire quelque chose. Commission honorable, agréable; ou, dificile, fâcheuse, pénible. Doner commission à quelqu' un, ou, avoir commission de faire quelque chôse. Les Ambassadeurs exposèrent leur commission. "S' aquiter de sa commission. Il a, dans cette phrâse, le sens passif: "J' ai fait votre commission. Dans celle-ci, il a le sens actif. _ Faire bien les commissions, se dit d' un laquais qui fait bien les messages dont on le charge. _ Il est allé en commission, il est alé faire une commission, dont on l' a chargé. _ 3°. Commission, Mandement du Prince, ou Ordonance du Magistrat, qui commet, qui députe. "Expédier, décerner, obtenir une commission, etc. = 4°. Emploi qu' on exerce, comme y ayant été commis pour un temps, à la diférence des ofices ou charges, qui sont à vie. Commission dans les Aides, dans les Gabelles Aler, être envoyé en commission, etc. etc.
   COMMISSIONAIRE, ne se dit que de celui qui est chargé d' une commission pour un particulier. Il se dit sur-tout dans le commerce. Voyez COMMETTANT. _ On apèle aussi Commissionaires, des gens qu' on prend au coin des rûes, pour faire des messages. Acad.

COMMITÉ


COMMITÉ, voyez COMITÉ.

COMMODE


COMMODE, adj. COMMODÉMENT, adv. COMMODITÉ, s. f. [Komode, modéman, modité, 3e e muet au 1er, é fer. au 2d: en y a le son d' an. Cet adverbe doit avoir un acc. aigu sur cette 2de syllabe, quoique dérivé de commode, dont l' e est muet.] L' adjectif se dit des chôses et des persones; l' adverbe et le substantif ne se disent que des chôses. _ Commode (apliqué aux chôses), dont l' usage est utile et facile. Habit, maison, voiture commode: cela est commode pour telle chôse, à telle chôse. _ Apliqué aux personnes; 1°. d' un bon commerce, d' une société douce et aisée: homme, femme commode, d' un esprit, d' une humeur commode. = 2°. Trop indulgent, trop facile, mari commode; mère commode. _ Morale commode, relâchée; dévotion commode, trop aisée.
   COMMODE, s. f. Espèce d' armoire en forme de bureau, où l' on serre du linge, des habits. Commode à deux, à trois tiroirs.
   COMMODÉMENT, avec commodité, d' une manière commode. "Être logé, vétu commodément. "Vous pouvez faire cela commodément.
   COMMODITÉ, 1°. Chôse, état, situation, moyen commode. Un carrosse est une grande commodité: il y a bien des commodités dans cette maison. Prendre ses commodités; se mettre à sa commodité. = 2°. Ocasion commode pour voyager, ou pour envoyer des lettres, des paquets. Je profite de la commodité du coche, du messager, d' un ami qui part pour tel endroit, etc.; pour vous aler voir, pour vous écrire, pour vous envoyer ce que vous me demandez, etc. = 3°. Chaise de commodité, fauteuil de commodité; grande chaise à bras, bien rembourrée, dont le dôs est un peu renversé, et où l' on est fort à son aise. 4°. Commodités, les aisances, les privés ou latrines d' une maison: aller aux commodités.
   On dit proverbialement, on n' a pas toutes ses commodités en ce monde. On dit aussi, d' un homme qui prend ses aises, quand il en a l' ocasion, qu' il prend ses commodités où il les trouve.
   Rem. 1°. Commode, aime à suivre le substantif; en vers, il peut le précéder.
   De là sont nés modernes Aristipes,
   Ces merveilleux et commodes principes,
   Qui, vous bornant aux voluptés du corps,
   Bornent aussi votre ame et ses ressorts,
   À~ contenter l' agréable imposture
   Des apétits qu' excite la nature.
       Rousseau.
  Et l' or, jadis sous la terre caché...
  Fut par leur choix et leur commun sufrage,
  Destiné seul à ce commode usage. Id.
Commode, joint au verbe être, impersonel, régit de et l' infinitif. "Il est commode de prouver la sincérité d' une conversion par du zèle, et dificile de la prouver par des vertus. La Beaumelle.
   2°. Commode, apliqué aux persones, se dit ordinairement sans régime. Fléchier lui fait régir la prép. à. "Il est facile, populairement, oficieux à ceux qui sont au-dessus de lui, commode à ses égaux. Ce régime est inusité.
   * 3°. Commode, dans le sens de riche, qui est à son aise, est un vrai gasconisme. On s' en sert communément en deçà de la Loire: cet homme est commode, il a du bien. Voy. ACCOMMODÉ. * "Il faut prouver qu' on est commode des biens de fortune, pour pouvoir soutenir avec honeur la dignité de Prélat. Rome Moderne. _ Avec le régime, il est encôre plus mauvais.
   4°. On dit, l' Empereur Commode: on disait aûtrefois Commodus, comme on le lit dans le P. Rapin. Voy. COMPLIMENTER. _ On dit, dans le style familier, de quelqu' un qui prend ses aises, c' est l' Empereur Commode.
   * 5°. Commodités, dans le sens de denrées, marchandises, est un anglicisme, qu' on troûve dans plusieurs traductions de livres anglais: "Nous pourrions fournir à ces Indiens, non-seulement des armes et des munitions de guerre, mais encore des commodités (marchandises, étofes), dont ils ont apris l' usage, depuis qu' ils conoissent les Espagnols. Voy. D' ANSON. "Que l' Écosse ne pourroit être chargée de droits passagers sur certaines commodités. Targe, Trad. de Smollet. _ Le mot anglais est commodities, que Boyer traduit par denrées, marchandises.

COMMOTION


COMMOTION, s. f. [Komo-cion.] Terme de Médecine. Secousse, ébranlement, ordinairement ocasioné par une chûte: Commotion dans le cerveau; commotion générale dans tout le corps.

COMMUABLE


COMMUABLE, adj. Terme Didactique: Qui peut être commué, changé: "Cet habile Chimiste (M. Homberg) n' étoit que trop favorable à la dangereuse opinion que les natûres les plus simples sont réciproquement commuables. PLUCHE.

COMMUER


COMMUER, v. a. [Komu-é; dern. é fer. l' u est bref devant la syll. masc. il est long. devant l' e muet: il commûe.] Échanger; il ne se dit qu' avec peine et voeu: Le Prince voulut bien commuer la peine des Galères en celle du bannissement. Commuer un voeu, etc.

COMMUN


COMMUN, UNE, adj. [Ko-meun, mu--ne.] 1°. Il se dit des chôses auxquelles tout le monde participe, ou a droit de participer. "La lumière est commune à tous les hommes. = 2°. Des chôses dont l' usage apartient à plusieurs. "Puits, escalier, passage, chemin commun; Cour commune aux deux maisons. = 3°. De ce qui est propre à diférens sujets: "La vie végétative est commune aux animaux et aux plantes. "Intérêt, péril commun. "Cette joie, cette douleur m' est commune avec tous les gens de bien. = 4°. Général, universel. "Le bruit commun, l' opinion commune, le droit commun. = 5°. Ordinaire: "Chôse commune. "Il n' y a rien de si commun: "Cela est commun entre ou parmi les Soldats, les Bourgeois, etc. = 6°. Qui se trouve aisément et en abondance. "Les fruits, les alimens les plus communs, les herbes les plus communes: Les figues les muscats sont communs en Provence. 7°. Qui est de peu de valeur. "Marchandises communes, ou médiocre en son espèce. "Prédicateur, Auteur, Poète fort commun.
   Rem. 1°. Simple et commun ne sont rien moins que synonymes; et rien de moins commun en tout genre que la simplicité. Aussi J. J. Rousseau a fort bien parlé, quand il a dit des Français que "c' est précisément leur aversion pour les chôses communes, qui les ramène quelquefois aux chôses simples. Let. à M. d' Alembert. _ Commun, ordinaire, trivial, vulgaire (synon.) Voy. Trivial.
   2°. Commun sans régime a un sens diférent de commun, régissant la prép. à: "Des disgraces communes sont des disgraces ordinaires et peu considérables: des disgraces communes à tous les hommes, auxquels tous les hommes peuvent être sujets, peuvent être aussi des disgrâces extraordinaires et considérables. Je crois donc que le P. Rapin a parlé peu exactement, quand il a dit que: "La fin de la Tragédie est d' aprendre aux hommes à ne pas craindre trop foiblement des disgraces communes. _ Assurément les disgrâces représentées sur la scène ne sont pas ordinairement des disgrâces communes et légères. Il devait dire, à ne pas craindre avec trop de faiblesse des disgraces qui leur sont communes avec les Grands, avec les Héros.
   3°. Quand commun signifie général, unanime, il peut se placer devant le substantif: d' une commune voix, et non pas d' une voix commune. On dit la commune opinion, ou l' opinion commune. On ne dit que, le bruit commun, même en vers. Dans les aûtres acceptions, on peut le placer, en vers, devant le substantif; encôre n' y fait-il pas toujours bien.
   La sublime valeur, le zèle pour son Roi
   N' ont pu le garantir, au milieu de son âge,
   De la commune loi.       Rouss.
En prôse on dirait, de la loi commune.
  Et pour le commun bien
  Vous et moi ne négligeons rien.
      Agesilas.
Cette inversion est dûre, même en poésie; il faut dire, le bien commun. Ainsi, la commune patrie, le commun peuple, comme dit Bossuet, ont quelque chose de dur et de sauvage. On dit, la patrie commune: le peuple, tout seul et sans adition; car le peuple commun serait encôre plus ridicule. _ M. Targe a dit tout récemment, le commun peuple: c' est un vrai anglicisme: the commun people. "De part et d' aûtre on se séduit à communs frais. La Rue. "Dans toutes les chôses extraordinaires, et qui sortent des communes règles. La Bruy. Dites à frais commun, des règles communes.
   * 4°. On dit, je n' ai rien de commun avec lui; ce que vous avec de commun avec moi, etc. etc. mais on ne doit pas dire, comme l' a fait M. Gautier dans sa Réfutation du Discours de J. J. Rousseau sur les Sciences, etc. "M. Rousseau atribue à notre siècle des défauts et des vices qu' il n' a point, ou qu' il a de commun avec les Nations qui ne sont pas policées. Il fallait dire, qui lui sont communs avec, etc. _ La raison de la diférence entre ces phrâses, c' est que dans les deux premières, ce n' est pas le verbe avoir, mais les pronoms rien et ce que, qui régissent la prép. de. L' emploi de cette préposition devant commun, dans ces deux premières phrâses, n' est donc pas une conséquence pour la troisième.
   5°. Dans le style simple, on apèle lieux communs, dans les ouvrages d' esprit, des chôses triviales, et rebatûes. "Employer des lieux communs. "Ses Livres, ses Sermons, ses vers ne sont remplis que de lieux communs. = Sens commun, le bon sens. On a dit depuis long-temps, avec vérité, qu' il n' y a rien de moins commun que le sens commun. = Faire bourse commune se dit de ceux qui ont mis leur argent ensemble pour la dépense. = Noms communs. Voy. APPELLATIF.
   6°. Commun est aussi subst. masc. mais quand il est employé seul et sans régime, il n' est pas du beau style. On dit qu' un Parasite vit sur le commun. Le proverbe dit aussi, qui sert au commun, sert à pas un; et il n' y a point d' âne plus mal bâté que celui du commun. Hors de là, l' on joint à commun d' aûtres noms au génitif pluriel: Le commun des Hommes, des Philosophes, des Grammairiens, etc. Bossuet a dit: "La durée que le commun donne au premier Empire des Assyriens, etc. On dirait aujourd'hui, le commun des Chronologistes. _ L' Acad. dit aussi, dans ses Sentimens sur le Cid. "Les Savans même doivent souffrir avec quelqu' indulgence les irrégularités d' un ouvrage, qui n' auroit pas eu le bonheur d' agréer si fort au commun, s' il n' avoit des grâces qui ne sont communes. On ne dit plus le commun en ce sens, on dit le Public, et l' on ne pourrait pas aujourd'hui se parer de cette gentillesse antithétique. _ M. Targe, après avoir dit que plusieurs chefs des Rebelles furent jugés et exécutés, ajoute que: "tout le commun fut emprisonné. Et âilleurs: "Il continua sa marche jusqu' aux hauteurs de Badenoch, d' où il congédia tout le commun de ses troupes. Hist. d' Angl. de Smolet. _ Tout cela est de l' Anglais assez mal habillé à la Française. _ Le commun est plus en usage comme substantif abstrait. Voyez TRIVIAL, n°. 2°. c' est ainsi qu' on dit, qu' une chôse est du commun, quand elle n' est pas de grand mérite, ni de grand prix. Il est hors du commun, il est au-dessus du commun: Sa charge le tire du commun.
   Dans l' Ofice éclésiastique, le commun des Apôtres, des Martyrs, etc. c' est l' Ofice général des Apôtres, des Martyrs, etc. qui sert quand il n' y a pas d' Ofice particulier. Faire du commun, prendre du commun, dire la Messe du commun, etc.
   COMMUN subst. se dit, dans les grandes maisons des Domestiques. La salle, la table, le diner, le pain, le vin du commun. _ Chez le roi, il y a le grand commun et le petit commun.
   En commun, adv. Vivre en commun: "Tout étoit en commun chez les premiers Chrétiens.

COMMUNAUTÉ


COMMUNAUTÉ, s. f. [Komunoté, 3e dout. 4e é fer.] 1°. Société de plusieurs persones qui vivent ensemble sous certaines règles. "Une Communauté de Prêtres, de Religieux, de Religieuses, d' hommes, de filles, etc. "Entrer dans une Communauté, être d' une Communauté, vivre en communauté. = 2°. Il se dit de certains corps laïques: la communauté des Procureurs, des Notaires; du corps des habitans des Villes, Bourgs et Villages: cette Communauté est riche, est pauvre, etc. = 3°. Société de biens entre deux ou plusieurs persones. "Dans le droit coutumier, il y a communauté de biens entre le mari et la femme. "Accepter la communauté. Renoncer à la Communauté.

COMMUNAUX


COMMUNAUX, s. m. pl. [Komunô, dern. longue.] Pâturage, où les habitans d' un ou de plusieurs Villages voisins ont droit d' envoyer leurs troupeaux.

COMMUNE


COMMUNE, s. f. [Komune, 3e e muet.] Le Corps des Bourgeois d' une Ville, ou des Habitans d' un Bourg ou d' un Village. Acad. Il me semble qu' on ne le dit guère en parlant des Villes. _ Gresset l' emploie au figuré.
   Après ce bill des Midelis de l' ordre,
   Dans la Commune arriva grand désordre.
       Ver-vert.
En parlant des anciens usages de la Monarchie, on le dit de l' assemblée municipale. "Pour délibérer sur l' oposition, on ajournoit à comparoître devant la Commune, celui qu' on vouloit renvoyer. Moreau. "Le Magistrat et la Commune (de Genève) voulurent s' en assurer. P. Barre, Hist. d' Allem.
   Rem. * Autrefois on le disait pour la République; et St. Évremont l' a employé en ce sens, où il est aujourd'hui vieux et suranné.
   COMMUNES, s. f. pl. 1°. Le Peuple des Paroisses de la campagne. "Assembler les Communes. "L' Arrêt enjoignoit aux Communes de lui courir sus. _ On apelait aûtrefois les milices Bourgeoises et celles de la campagne, les Communes. = 2°. Communaux. Voyez ce mot. Mener paître les troupeaux dans les communes. = 3°. La chambre des Communes en Angleterre, la seconde des deux Chambres du Parlement d' Angleterre, qui est composée des Députés des Comtés et des Villes du Royaume.

COMMUNÉMENT


COMMUNÉMENT, adv. [Komunéman; 3e é fer. en a le son d' an.] 1°. Ordinairement: "Cela se pratique communément. = 2°. Généralement: "On en parle communément de la sorte.
   Communément parlant, ou à parler communément, (le 1er est le meilleur) selon l' opinion commune, ou la façon de parler ordinaire. Acad. Il signifie plus souvent, généralement parlant. "Communément parlant, on ne gâgne rien de bon dans la société des Grands.

COMMUNIANT


COMMUNIANT, s. m. [Komuni-an; dern. lon.] 1°. Celui qui communie. "Il y a eu tant de Communians à Pâque dans cette Paroisse. = 2°. Celui qui est en âge de communier: il y a tel nombre de Communians dans cette Paroisse. On dit, en ce sens, aussi, tant d' âmes de communion, et on le dit plus souvent de la sorte.

COMMUNICABILITÉ


COMMUNICABILITÉ, s. f. COMMUNICABLE, adj. [Le 1er est de Trév. L' Acad. et le Rich. Port. ne le mettent pas: Komu--nikabilité, nikable: pénult. dout. au 2d.] Communicabilité est la qualité de ce qui est communicable, de ce qui peut se communiquer, de quoi on peut faire part à d' aûtres. "Il est de la natûre du bien d' être communicable. _ On dit de deux rivières qu' elle sont communicables, quand elles peuvent être jointes par un canal; et de deux apartemens, quand on peut faire une communication de l' un à l' autre.

COMMUNICATEUR


*COMMUNICATEUR, s. m. Mot forgé: Qui communique avec les Hérétiques. "St. Athanase prie les Saints Moines de rejeter ceux qui suivoient la Doctrine des Ariens, d' exhorter leurs Communicateurs à cesser de l' être, et de les éviter, s' ils le refusoient. Anon.

COMMUNICATIF


COMMUNICATIF, IVE, adj. COMMUNICATION, s. f. [Komunikatif, tîve, ka--cion; pénultième du 2d lon. dern. e muet.] L' adj. ne se dit des chôses que dans cette phrâse: Le bien de soi est communicatif. On dit au contraire, dans le Dict. Gram. que le mal est plus communicatif que le bien: on parle du mal moral, qui se communique, se répand plus aisément que le bien. = En parlant des persones, qui se communique aisément, qui fait part de ses pensées, de ses conaisances, de ses lumières, de ses secrets. "Il n' est point communicatif: elle est fort communicative. "Vous savez que je suis communicative, et que je n' aime point à jouir d' un plaisir toute seule. Sév. "J' ai prié ma mère, naturellement communicative, de garder le secret sur cet article. Miss. Bidulph.
   COMMUNICATION est 1°. l' action de communiquer, ou l' éfet de cette action: communication de biens, de maux, etc. _ Doner communication à... de... faire part à quelqu' un de ce qui concerne une afaire. _ On dit, dans le même sens, avoir Communication d' une afaire, d' un traité, etc. = 2°. Commerce, familiarité, correspondance. "Ils ont grande communication ensemble. "Entretenir, ou avoir communication avec les énemis de l' État. Rompre toute communication. = 3°. Moyen, par lequel deux chôses se communiquent: communication d' un apartement à un aûtre, d' une chambre à un cabinet. Porte, degré de communication. = On dit en Physique, la communication du mouvement, l' action par laquelle le mouvement se communique d' un corps à l' aûtre.
   Lignes de communication, sont, dans l' art Militaire, des fôssés ou tranchées que l' on fait, afin que deux quartiers, ou deux ataques puissent communiquer ensemble à couvert, et s' entre-secourir.
   Rem. 1°. Quoique communication se dise des persones, il ne les régit pas au génitif, comme il régit les chôses: on dit, la communication des pièces, des nouvelles; mais on ne dit pas, comme a fait Fléchier, la communication des Grands Hommes. "Quel progrès n' y fait-on pas, (dans les Sciences) quand on soutient de longues veilles, et quand, outre ses propres lumières, on a le conseil et la communication des Grands Hommes. On dirait, plus régulièrement, quand on a communication avec les Grands Hommes, et qu' on peut profiter de leurs conseils.
   2°. Bossuet emploie communication dans le sens qu' a communion, dans le langage éclésiastique; et au contraire, il emploie communier au lieu de communiquer, ce qui n' est pas fort conséquent. "Ils reçurent de lui des lettres de communication. "Toutes les autres Églises communioient avec elle. (Rome). On dit aujourd'hui, des lettres de communion, étaient en communion avec Rome. Le substantif a conservé une signification, que le verbe a perdûe. Communier ne se dit plus que de l' action de recevoir l' Eucharistie.

COMMUNIER


COMMUNIER, v. a. [Komuni-é.] Recevoir le Sacrement de l' Eucharistie. "Communier dévotement, à Pâque, à sa Paroisse, de la main de l' Evêque, etc. _ Voyez COMMUNICATION, Rem. 2°.

COMMUNIÉ


COMMUNIÉ, adj. ne se dit que dans cette phrâse, du style familier. "Il est mort bien confessé et communié. Acad.

COMMUNION


COMMUNION, s. f. [Komu-nion, en vers, ni-on.] 1°. Union de plusieurs persones dans une même foi. La communion des Fidèles, la communion des Saints, article du symbole: Être dans la communion, ou hors de la communion de l' Église. Voyez COMMUNICATION, Rem. 2°.
   2°. La réception du corps de N. S. J. C. "Aller à la Communion: s' aprocher de la Communion. Donner la Communion, refuser la Communion: recevoir, admettre à la Communion. = 3°. Antiène ou Verset que le Choeur chante, quand le Prêtre communie. Acad. et que dans les Messes-basses le Prêtre récite avant les dernières Oraisons, qui s' apèlent Post-Communion.

COMMUNIQUANT


*COMMUNIQUANT, ANTE, adj. qui communique. "Lorsque deux fluides hétérogènes se trouvent dans deux tubes communiquans; ils ont leur hauteur en raison inverse de leur densité. Paulian, Dict. de Phys. _ On est prodigue aujourd'hui d' adjectifs verbaux, de participes déclinables et déclinés. L' Acad. ne met point celui-ci.

COMMUNIQUER


COMMUNIQUER, v. a. [Komuniké, dern. é fer.] 1°. Rendre commun à, faire part de... Le Soleil communique sa lumière à toute la terre: un corps, qui en rencontre un aûtre, lui communique son mouvement. _ Communiquer ses lumières, ses pensées, ses desseins à quelqu' un. = Se communiquer se dit, en ce sens, ou avec la prép. à pour régime. Le mouvement d' un corps se communique à un aûtre; ou absolument et sans régime; cette maladie se communique aisément: la joie et la douleur se communiquent peu à peu. = Doner comunication de quelque chôse. Communiquer ses afaires à un ami. "On lui a communiqué les titres, les pièces du procès. Se les communiquer mutuellement. Dans cette acception, se est au datif. Plusieurs, et Bouhours entr' aûtres, le font neutre, et l' emploient avec en et avec. "Il en communique avec Lefevre et Lainez. Vie de St. Ignace. Cela sent le style du Bârreau. Voy. plus bas, Rem. = 3°. Neut. Avoir commerce et relation. Communiquer avec les Savans, avec les énemis. = Se communiquer, être communicatif, familier, populaire: "C' est un Prince fort afable, il se communique aisément. "Vous vous communiquez trop: il ne faut pas se communiquer à tout le monde. = 4°. Deux apartemens se communiquent, quand on peut passer de l' un dans l' aûtre. _ Il se dit neutralement en ce sens, avec la prép. à, ou avec: cette chambre communique à ou avec l' aûtre.
   REM. Communiquer (n°. 2°.) régit l' acusatif de la chôse, le datif de la persone. "Il a communiqué ses doutes à un savant personage: il ne communique à persone les nouvelles qu' il reçoit: je lui ai communiqué mes plus secrètes pensées. * Leibnitz lui done pour régimes les prép. en et avec, et le change d' actif en neutre. "Il y a plusieurs années que j' ai conçu ce système, et que j' en ai communiqué avec des savans hommes. Ces régimes ne sont en usage qu' au Palais, où on les emploie aussi avec le verbe consulter. Voyez ce verbe. _ M. Linguet, dans le séjour qu' il a fait au Barreau, a pris cette façon de parler. "Il recommandoit à tous les hommes chargés de quelque régie, d' en communiquer avec lui.

COMMUTATIVE


COMMUTATIVE, adj. f. COMMUTATION, s. f. [Komutatîve, ta-cion: 4e lon. au 1er, 5e e muet.] L' usage de ces deux mots est borné: l' adjectif ne se dit guère qu' avec justice, pour signifier celle qui a raport au commerce, et qui est fondée sur l' égalité dans les ventes, achats, contrats, traités entre les hommes. _ Le substantif ne se dit qu' au Palais: Commutation (changement) de peine. Voyez COMMUER. _ Dans un Livre, intitulé: Science des Medailles, on le fait synonyme d' échange. Il est très-probable que le commerce et la société se sont entretenus durant plusieurs siècles par la simple commutation des chôses, dont chacun avait besoin. _ L' usage n' a point admis commutation en ce sens.

COMPACITÉ


COMPACITÉ, s. f. COMPACTE; adj. Termes didactiques. L' adjectif est plus ancien dans la Langue que le substantif, qui est assez nouveau. Compacte, se dit des corps, des matières, dont les parties sont fort serrées: Compacité, est la qualité de ce qui est compacte. "Corps, substance compacte. "La compacité du sucre d' Orléans le distingue de celui de nos villes maritimes. Ann. Litt.

COMPAGNE


COMPAGNE, s. f. COMPAGNIE, s. f. COMPAGNON, s. m. [Konpagne, nî-e, non: mouillez le g: pénult. lon. au 2d.] Compagne et Compagnon, dans leur idée la plus générale, se disent relativement au sexe respectif, pour celui ou celle qui ont quelque liaison avec une aûtre persone du même sexe. Fidèle compagne, c' est sa compagne: fidèle compagnon; c' est son compagnon. _ Compagnon d' école, d' étude, de fortune. Religieux qui sort avec son compagnon. _ Mais dans les emplois particuliers de ces deux mots, ils n' ont plus de raport ensemble. _ Compagne se dit d' une femme mariée par raport à son mari: il ne s' est marié dans un âge avancé, que pour avoir une Compagne. _ On le dit aussi des tourterelles.
   Que fais-tu dans ces bois, plantive tourterelle?
   _ Je gémis, j' ai perdu ma compagne fidèle.
   - - Ne crains-tu pas que l' oiseleur
   Ne te fasse mourir comme elle?
   - - - Si ce n' est lui, ce sera ma douleur.
   COMPAGNON, outre le sens propre, en a encore d' aûtres. = Égal: Traiter de pair à compagnon: il ne peut soufrir ni compagnon, ni maître. = Gaillard, drôle, éveillé: c' est un compagnon, un bon compagnon: il fait le bon compagnon. = Faire le compagnon, faire l' entendu. = Déterminé, homme d' exécution: gentil compagnon, hardi compagnon. _ Capable de faire de mauvais tours. Défiez-vous-en, c' est un compagnon, un dangereux compagnon. = Paûvre et de bâs lieu. Petit compagnon. = Dans les Arts et Métiers, celui qui n' a pas passé maître, et qui travâille pour un aûtre. Compagnon Tailleur, Cordonier, Menuisier; compagnon chez un tel Maître, dans une telle boutique, etc.
   REM. Compagne et Compagnon sont beaux au figuré: "La justice et l' abondance sont les compagnes de la paix. "L' imprudence est presque toujours la compagne du crime. Me. Tronchet. "Je vivrai au milieu des remords: les énemis seront mes compagnons et mes bourreaux. Jér. Dél. La vengeance, le deuil, l' horreur, compagnons de la mort, errent dans la triste Jérusalem. Ibid.
   On dit, proverbialement, qui a compagnon a maître. Mde. de Sév. fait allusion à ce proverbe: "Vous m' avez doné pour conseil la raison de d' Hacqueville... vous m' avez doné un maître, en me donant un compagnon. Vous savez le proverbe. _ Vivre, ou traiter de pair à compagnon. La Fontaine, dans la Fable de l' âne et du petit chien, fait dire au premier:
   Comment, disoit-il en son âme,
   Ce chien, parce qu' il est mignon,
   Vivra de pair à compagnon
   Avec Monsieur, avec Madame;
   Et j' aurai des coups de bâton!
_ Pauvre Compagnon, pauvre hère: "Si l' on vous laisse faire, il ne sera qu' un paûvre compagnon. Sév. _ Se batre à dépêche compagnon, à outrance. _ À~ dépêche compagnon, vîte et négligemment. "Travailler à dépêche compagnon: ouvrage fait à dépêche compagnon.
   COMPAGNIE, est 1°. Assemblée de plusieurs persones, qui sont en conversation, ou en quelque espèce de société et de liaison. Bonne, ou mauvaise compagnie. Avoir compagnie chez soi. Il fut bien reçu lui et sa compagnie. Il est aimable en compagnie. = 2°. Il se dit de deux persones, qui sont ensemble. Tenir, ou faire compagnie à quelqu' un. = 3°. Société de marchands; la Compagnie des Indes; ou des gens d' afaires; la Compagnie des Aides, ou des Gabelles. = 4°. Corps de Magistrats. "Assembler la compagnie. = 5°. Nombre de gens de guerre, sous un Capitaine: Compagnie de Cavalerie, d' Infanterie, de Dragons, etc.
   DE COMPAGNIE, adv. Aler de compagnie.
   Rem. 1°. Doit-on dire, être en la compagnie, ou à la compagnie de...? Je crois le premier meilleur que le 2d. Pluche a préféré celui-ci. "L' espérance d' une aûtre vie, qui se retrouve en Égypte à la compagnie de tant d' imaginations bisârres. _ Il emploie cette locution en d' aûtres endroits.
   2°. Atendre compagnie, se dit sans article: "Molière n' a rien de mieux à faire, en atendant compagnie. Journ. de Mons. sur Molière à la nouvelle Salle.
   3°. On n' a jamais tant parlé de la bonne compagnie, et elle n' a jamais été si râre: "Il a été fort recherché par Dorsain et Valmont, qui, par leur naissance du moins, font partie de ce qu' on apelle la bone compagnie. Th. d' Éduc.
   4°. On dit, figurément, (st. fam.) Fausser compagnie à quelqu' un; manquer de se trouver dans une compagnie, après l' avoir promis. = Prendre congé de la compagnie, se dit de quelqu' un qui se meurt, ou qui vient de mourir. "Il va prendre ou il a pris congé de la compagnie. = Bête de compagnie, c' est quelqu' un qui fait comme les aûtres, et se laisse aisément entraîner à tout ce qu' on veut. "Le café est tout-à-fait disgracié: le Chevalier croit qu' il l' échaufe, et moi en même temps, bête de compagnie, comme vous me conoissez, je n' en prends plus. Sév. "Le Maréchal de Brézé, qui ne pouvoit soufrir de compagnon, dit qu' il n' étoit pas bête de compagnie, et qu' on le laissât faire tout seul. D' Avr.

COMPARABLE


COMPARABLE, adj. [Konparable: 3e dout.] Qui se peut comparer. Il régit à, ou avec. "Les biens de ce monde ne sont pas comparables à ceux de l' éternité. Plusieurs pensent que les modernes ne sont pas comparables aux anciens. L' esprit n' est pas comparable avec la matière.

COMPARAISON


COMPARAISON, s. f. [Konparèzon: 3e è moy.] 1°. Discours par lequel on marque la ressemblance d' une chôse, ou d' une persone avec une aûtre. Comparaisons des hommes illustres Grecs et Romains. = 2°. Similitude; Homère est riche et abondant en comparaisons, mais elles ne sont pas toujours justes. = 3°. Parallèle: Faire comparaison de deux persones, ou entre deux persones, ou d' une persone, ou d' une chôse avec une aûtre. "Mettre quelqu' un en comparaison avec un aûtre. "Il n' y a point de comparaison de l' un à l' aûtre, ou avec l' aûtre, ou entre l' un et l' aûtre.
   Rem. 1°. Dit-on, en comparaison, ou à comparaison? Suivant Bouhours, on dit l' un et l' aûtre, mais le premier est le plus usité. Le second ne se trouve point dans le Dict. de l' Acad. Il est hors d' usage aujourd'hui. Bossuet l' emploie toujours de préférence. "Cette interprétation, à comparaison de celle des Protestans, est la clarté même. On dirait aujourd'hui, en comparaison de celle, etc. Descartes pensoit que tout ce qu' on avoit fait jusqu' alors sur la Médecine, n' étoit rien en comparaison de ce qui restoit à faire. Le Chevalier des Sablons.
   2°. Entrer en comparaison; être comparé avec. "Voilà deux chôses qui, assurément, n' étoient jamais entrées en comparaison l' une avec l' aûtre. _ Le Gendre substitue mal-à-propos de à avec: "Les inventions de la Logique Stoïcienne ne pourroient entrer en comparaison des (avec les) subtilités de la Logique moderne.
   3°. On dit, sans comparaison, quand on veut corriger une comparaison peu juste, ou odieûse. "Le bon Pape, a fait, ma très-chère, sans comparaison, comme Trivelin: il a fait et doné la réponse, avant que d' avoir reçu la lettre. Sév.
   4°. Par comparaison régit à ou avec: Par comparaison à, ou avec ce que j' ai fait. "Tant par diverses considérations sur les Nécrologes de Londres, que par leur comparaison à ceux de plusieurs villes d' Allemagne. _ Il s' emploie aussi sans régime. "La plupart des chôses ne sont bonnes ou mauvaises que par comparaison.
   5°. Hors de comparaison, se dit d' une chôse excellente et sans prix. "Cela est hors de comparaison. _ Trève de comparaison! ou bien, point de comparaison, s' il vous plaît; c' est ce qu' on dit, quand un inférieur veut traiter de pair à compagnon avec ceux qui sont au-dessus de lui, ou qu' il s' autorise de leur exemple. _ Le proverbe dit, que toutes comparaisons sont odieûses, parce qu' on ne peut comparer deux persones entr' elles, sans que l' une ne soit ofensée; et que toute comparaison cloche, parce qu' il n' y a point de comparaison, qui ne pèche par quelqu' endroit.
   Adverbes de comparaison. Ils demandent de, ou d' , excepté bien, après lequel on met du, de la, des. On dit beaucoup, peu, assez, de monde, d' argent; et bien du monde, del' argent:beaucoup d' hommes, etc. et bien des hommes, etc. Beaucoup, peu, assez de gens, et bien des gens, etc. = Pour extrêmement et infiniment, les sentimens sont partagés. Les uns veulent qu' on dise, il a extrêmement, infiniment d' esprit; et les aûtres, extrêmement, infinement de l' esprit. Mon goût serait pour le premier. Voyez EXTRêMEMENT.

COMPARANT


COMPARANT, ANTE, adj. Il se dit au Palais pour Comparoissant, devant un Juge, devant un Notaire. Un tel comparant en sa persone; la Dame telle comparante par Procureur. = Il est aussi substantif, ledit comparant, ladite comparante~, lesdits comparans.
   COMPARANT, s. m. Acte extrajudiciaire, par lequel on fait une représentation, ou une demande, pour des chôses qui sont de juridiction volontaire. Présenter un comparant. Les Dictionaires ne mettent point ce mot, qui est d' un usage journalier.

COMPARATIF


COMPARATIF, s. m. C' est l' inflexion d' un adjectif, laquelle tient le milieu entre l' état d' égalité, qui est le positif, et l' état de la plus grande supériorité, qui est le superlatif. _ Sage, est le positif; plus sage est le comparatif: très-sage, ou le plus sage de tous, est le superlatif. Les adverbes suivent la même règle: agréablement, plus agréablement, très-agréablement, ou le plus agréablement du monde.
   Rem. 1°. On peut distinguer, avec Restaut, trois sortes de comparatifs: celui d' égalité, autant habile, aussi sage: celui d' excès, plus sage, plus habile; et celui de défaut, moins habile, moins sage, etc.
   2°. Ils sont ordinairement suivis de la conjonction que:aussi sage que lui; plus habile que celui-là; moins parfait que l' aûtre, etc. _ Si ce que est suivi d' un verbe, il doit être ordinairement acompagné de la négative ne: il est moins beau que vous ne le pensez. Cependant si le verbe est précédé d' une conjonction, comme quand, lorsque, on omet la particule ne. "Il est moins beau que quand on l' acheta. = Les deux dernières remarques ne regardent que les comparatifs d' excès et de défaut.
   3°. Quoique l' adjectif afecte les deux termes de comparaison, on ne le joint qu' au 1er: Il est aussi sage que vous: je suis plus malheureux que lui: vous êtes moins à plaindre que moi. C' est comme si l' on disait: Il est aussi sage que vous êtes sage, etc. _ Cela répond à la dificulté de Vaugelas, qui croyait qu' un homme ne pouvait pas dire à une femme, je suis plus vieux que vous, parce que vieux masc. ne peut convenir à la femme: mais cette expression est tout-à-fait usitée. Tout le monde voit ce qu' on sous-entend: Je suis plus vieux que vous n' êtes vieille.
   4°. Ordinairement parlant, il faut qu' il y ait un certain raport de construction entre les deux termes de comparaison; et il est souvent nécessaire de suivre, après la conjonction que, qui est le lien de ces deux membres, le même ordre de phrâse qu' on a suivi auparavant. * Il y a plus de sots non imprimés qu' imprimés. Du Plaisir. Dites, qu' il n' y en a d' imprimés. "On remarque plus de persones être victimes d' un excès de joie que de tristesse. Ibid. Il falait dire, que d' un excès de tristesse. Car la comparaison n' est pas la tristesse et la joie, mais entre l' excès de l' une et l' excès de l' aûtre.
   COMPARATIF, IVE, adj. [Konpa--ratif, tîve: 4e lon. au 2d.] Il ne se dit qu' en Gramaire, de certaines conjonctions qui servent à marquer raport, convenance, parité; par exemple, comme, demême, ainsi que, autant que, etc. et des adverbes qui expriment le degré entre le positif et le superlatif. Voyez l' Article précédent. "Adverbe comparatif, conjonction comparative.

COMPARATIVEMENT


COMPARATIVEMENT, adv. [Konpa--rativeman: 4e lon. 5e e muet.] Par comparaison à.... Ces chôses là ne sont bones ou mauvaises que comparativement. _ Ce mot n' est usité que parmi les Savans. Dans le discours ordinaire, on dit par comparaison. Voyez COMPARAISON. Rem. 4°.

COMPARER


COMPARER, v. a. [Konparé: 1re lon. 3e é fer.] 1°. Examiner le raport qu' il y a entre une chôse ou une persone, et une aûtre. "Quand vous aurez comparé ces deux montres, ces deux Auteurs, vous en verrez la diférence. = 2°. Égaler. "Il n' y a point d' Église, qu' on puisse comparer à St. Pierre de Rome. "Ôsez-vous bien vous comparer à ces grands hommes? = 3°. Faire une comparaison, une similitude. "Homère compare Diomède au milieu des Troyens, à un lion au milieu d' une Bergerie.

COMPAROIR


COMPAROIR, COMPAROITRE, v. n. [Konpa-roar, Konparêtre; 3e dout. au 1er, ê ouv. et lon au 2d.] Ces deux verbes ont le même sens, mais le 1er ne se dit qu' au Palais, et dans ces phrâses, assignation, et être assigné à comparoir. Il ne devrait donc être employé que dans des actes, ou des productions, et aûtres écrits des Praticiens, et non dans des Histoires. "Les Platéens ajournèrent les Lacédémoniens à comparoir devant les Amphyctions: Le Gendre. Je crois que citèrent devant, serait plus du style de l' histoire.
   COMPAROITRE; Paraître devant un Juge; se présenter en Justice; "Comparoître devant le (ou au) Tribunal de Dieu; en jugement, en Justice; en persone, ou personnellement; par Procureur, etc.
   Rem. M. de Wailly est du sentiment que comparoître prend indiféremment être, ou avoir, pour auxiliaire: Il est comparu, ou, il a comparu. L' Acad. ne met d' exemple que du second: "Il n' a point comparu. Il peut y avoir des exemples de l' aûtre dans certains Auteurs; mais celui-ci est plus sûr et plus autorisé.

COMPARTIMENT


COMPARTIMENT, s. m. [Konparti--man: 1re lon. en a le son d' an.] Ce mot vient du verbe compartir, qui n' est plus en usage. Assemblage de plusieurs figures disposées avec symétrie. Compartimens de marqueterie, d' un tapis, d' une broderie, d' un plafond, d' un parterre, etc.

COMPARTITEUR


COMPARTITEUR, s. m. [Konparti--teur; dern. dout. au sing. lon. au plur.] Terme de Palais. Celui des Juges, qui a ouvert un avis contraire à celui du Raporteur, et sur l' avis de qui la Compagnie s' est partagée. Le Raporteur et le Compartiteur vont dans une aûtre chambre pour faire vider le partage.

COMPARUTION


COMPARUTION, s. f. [Conparu-cion.] Quelques-uns écrivent comparition: mais l' usage et l' Acad. sont pour comparution. Action de comparaître, de se présenter en Justice. Faire, demander acte de comparution. Comparution personelle.