Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI ATTOUCHEMENT


ATTOUCHEMENT, ou ATOUCHEMENT, s. m. [A-tou-cheman, 3e e muet.] Action de toucher. On conaît la dureté ou la mollesse des corps par l' atouchement. Acad. On dit plus ordinairement, par le tact. _ Atouchement a un usage fort borné. Il ne se dit que dans les phrâses suivantes: "Notre-Seigneur guérissoit les maladies par le seul atouchement. On peut le dire aussi de plusieurs Saints. "Atouchement illicite, déshonête.

ATTRACTION


ATTRACTION, s. f. [Atrak-cion, en vers ci-on, tout bref.] Il ne se dit qu' en Physique. Action d' atirer, ou état de ce qui est atiré. L' atraction du fer par l' aimant; Atraction Neutoniène. Dans le style plaisant ou critique, on peut le dire au figuré.

ATTRACTIONAIRE


ATTRACTIONAIRE, s. m. [Atrak-cio--nère; 4e è moy. et lon.] On apèle de ce nom les Partisans du Système de l' Atraction.

ATTRAIRE


*ATTRAIRE, v. a. [Atrère, 2e è moy. et long.] Mezerai s' en est servi au figuré, dans le sens d' atirer. Il est vieux. L' Acad. le met au propre. "Le sel est bon pour atraire les pigeons. Il n' est d' usage qu' à l' infinitif.

ATTRAIT


ATTRAIT, ou ATRAIT, s. m. [Atrê, 2e lon. ê ouvert.] Au sing Penchant, inclination; il a de l' atrait, un grand atrait pour la Musique. _ Au pluriel, Charmes, apas, beautés; les atraits de la passion; cette fille a de grands atraits; il s' est laissé prendre à ses atraits. On le dit quelquefois au singulier dans le 2d sens, mais jamais au pluriel dans le 1er. On dit: "C' est un puissant atrait que l' acueil favorable du Prince: mais on ne dit pas, il a de grands atraits pour le jeu, pour la danse.
   Rem. 1°. Dans le Journ. de Mons. on critique M. Proyart d' avoir dit de la mère du Duc de Bourgogne; qu' elle avoit un atrait particulier pour la solitude; et l' on prétend qu' il falait dire, qu' elle avoit du goût pour la solitude, ou que la solitude avoit de l' atrait pour elle. _ Ce que c' est que la diférence des goûts et des opinions; j' aimerais mieux la 1ere manière, qui dailleurs est très-française, et qu' il serait aisé de justifier par un grand nombre de citations. Je ne citerai que le Dict. de l' Acad. "Je me sens beaucoup d' atrait pour la Musique. _ Ce qui a peut-être trompé le critique, c' est qu' il a cru qu' atrait ne signifie que charme et apas: il signifie aussi, goût, inclination.
   2°. On dit, avoir trait à.,. Montesquieu par analogie dit, avoir atrait: "Les Romains ne retinrent de leurs anciens spectâcles que ce qui pouvoit afoiblir les courages et avoir atrait à la volupté. C' est un néologisme qui paraît n' avoir pas fait fortune.
   3°. Quoique atrait puisse signifier goût, inclination, il ne peut se combiner avec tous les verbes, avec lesquels goût et inclination pourraient le faire. On ne dit atrait en ce sens qu' avec le verbe avoir. On ne peut dire inspirer de l' atrait, comme on dirait inspirer du goût. "Indépendamment de l' atrait qu' inspiroit un Prince jeune et victorieux... la Nation se promettoit une grande félicité. Hist. d' Angl. C' est un barbarisme d' expression.
   4°. Atraits, Apas, Charmes (synon.) Il semble qu' il y a quelque chôse de plus naturel dans les atraits, quelque chôse qui tient plus de l' art dans les apas, quelque chôse de plus fort et de plus extraordinaire dans les charmes. "Les atraits se font suivre, les apas engagent, les charmes entraînent. Voy. APPAS.
   Ces mots ne sont pas seulement d' usage à l' égard de la beauté et des agrémens du sexe; ils le sont encore à l' égard de tout ce qui plaît. _ Alors atraits et charmes ne s' apliquent qu' aux chôses qui sont, ou qu' on supôse être aimables en elles-mêmes; au lieu qu' apas s' aplique quelquefois à des chôses, qui sont, et qu' on avoue même haïssables, mais qu' on aime, malgré ce qu' elles sont. On dit, de grands atraits, de puissans apas, d' invincibles charmes. "L' honeur a de grands atraits pour les belles âmes: La fortune a de puissans apas pour tout le monde: la gloire a des charmes invincibles pour les coeurs ambitieux. GIR. Synon.

ATTRAPE


ATTRAPE, ou ATRAPE, s. f. (st. fam.) Tromperie, aparence trompeûse. C' est une atrape.

ATTRAPER


ATTRAPER, ou ATRAPER, v. a. [3e é fer. tout bref.] 1°. Prendre à une trape, à un piège; on le dit des renards, des loups et autres animaux. = 2°. Obtenir par industrie. "Il a atrapé un bon emploi, un bon bénéfice. = 3°. Surprendre artificieûsement, tromper. "Il s' est laissé atraper par un filou. "Les plus fins y sont atrapés. = 4°. Prendre, gâgner, atraper un rhume, la fièvre. Recevoir, atraper un coup de mousquet. = 5°. Ateindre en courant après. Les chiens ont atrapé le lièvre. Partez toujours, je vous atraperai bientôt. = 6°. Figurément, saisir, rendre, représenter; atraper le sens, la pensée d' un Auteur; atraper le caractère, les manières; atraper la ressemblance, l' air du visage.
   Rem. Le dernier sens est le plus beau: il ne passe pourtant pas le style modéré. _ Atraper, ateindre, est plus bas; et quand on veut parler noblement, il faut dire, ateindre. "Toutes les conaissances ont leur chimère, après laquelle elles courent sans la pouvoir atraper; mais elles atrapent en chemin d' autres conaissances fort utiles. Cette phrâse ne serait bone que dans le style badin ou satirique. _ Atraper, tromper, est encore moins noble. "Il se servit du même stratagême qu' avoit autrefois employé Usum--Cassan pour atraper son fils aîné. Hist. de Perse. Ce mot n' est pas digne de la gravité et de la noblesse de l' Histoire. Il est, à la vérité, plus énergique que tromper, surprendre, mais l' usage ne l' admet que pour le style très familier.
   L' Ab. Des Fontaines blâme un célèbre Académicien d' avoir dit, dans son Traité du Bonheur: "Un soldat, qui va à la tranchée, voudroit-il devenir un géant pour atraper plus de coups de mousquet? Ce mot, dit cet illustre Critique, a passé jusqu' ici pour bas et grossier. Il ne s' est pas ennobli depuis cette remarque.
   Atrape qui peut, se dit pour signifier qu' on se soucie fort peu de tout le reste. "C' étoit un gros brutal... un de ces valets... pour qui leur maître est étranger. Il peut mourir, périr, prospérer sans qu' ils s' en soucient. Tant tenu, tant payé; et atrape qui peut. Marivaux.

ATTRAPOIRE


ATTRAPOIRE, ou *ATTRAPATOIRE, s. f. Il n' y a que le 1er qui soit bon. [Atra--poâ-re, 3e lon.] Au propre, Piège pour atraper des animaux. Au figuré, tour de finesse pour atraper, surprendre, tromper. Les filous ont cent sortes d' atrapoires. Il n' est que du style familier.
   ATRAPE et ATRAPOIRE ont à-peu près le même sens, mais ils n' ont pas le même emploi. On dit, faire une atrape, c' est une atrape; on ne dit pas, c' est une atrapoire, faire une atrapoire. On dit au contraire, défiez-vous des atrapoires, soyez en garde contre les atrapoires des filous. Atrapes ne vaudrait rien dans cette ocasion. Il semble qu' atrape a le sens passif, et a plus de raport à celui qui est atrapé, et qu' atrapoire, a le sens actif, et qu' il est plus relatif à celui qui atrape.

ATTRAYANT


ATTRAYANT, ou ATRAYANT, ANTE, adj. [Atré-ian, ian-te, 3e lon. Il y en a qui écrivent atraïant, mais alors il faudrait prononcer atra-ian, contre l' usage.] Qui atire agréablement. Discours, acueil atrayant, beauté, manière atrayante. _ Il peut se placer devant ou après le substantif, au choix de l' Orateur; mais d' ordinaire il est mieux après. "Les charmes atrayans de la volupté; les atrayantes amorces du vice. On ne doit le faire précéder que dans le style élevé.

ATTRIBUER


ATTRIBUER, ou ATRIBUER, v. a. [l' u est bref; devant l' e muet il est long; il atribûe.] 1°. Atacher, annexer à... Atribuer à une charge des gages, des émolumens, des privilèges. = 2°. Raporter à.... Nous ne devons atribuer nos malheurs qu' à nous-mêmes. = 3°. Acorder: "A-t-il toutes les qualités qu' on lui attribûe? = 4°. S' atribuer, régit l' acusatif, le se étant au datif. "Il s' atribue (à lui-même) de grands droits: "Vous devez vous atribuer ce mauvais succès; il s' atribue la gloire de ce succès.

ATTRIBUT


ATTRIBUT, ou ATRIBUT, s. m. [On ne pron. point le t: tout bref.] 1°. Ce qui est propre et particulier à chaque sujet. Acad. Propriété qui convient à une persone ou à une chôse. Trév. Rich. Port. "Atributs de Dieu, de la Souveraineté, d' une charge, etc. = 2°. Chez les Peintres, Antiquaires, etc. Symbole, marque distinctive, comme la massue est l' atribut d' Hercule, le caducée, de Mercûre, etc. = 3°. En Logique, ce qui s' afirme ou se nie du sujet. Dieu est infiniment bon; dans cette proposition, Dieu est le sujet, et bon est l' atribut.

ATTRIBUTIF


ATTRIBUTIF, IVE, adj. ATTRIBUTION, s. f. [Atributif, tîve, tribu-cion, 4e lon. au 2d.] On ne les dit qu' au Palais; Attribution de Juridiction; atribution de droits. _ Arrêt atributif, Lettres Patentes atributives de Juridiction.
   Rem. L' Ab. Girard, qui s' était fait un Dictionaire de Gramaire particulier, apelle l' adjectif, atributif, comme exprimant un atribut, une qualité du sujet.

ATTRISTANT


ATTRISTANT, ou ATRISTANT, ANTE, adj. Réflexion atristante. "Ce que l' inégalité des fortunes a d' atristant. Mercier. Ce mot est beau et bon: il serait utile: il ne lui manque que le sceau de l' usage, a dit un critique. L' usage l' a mis depuis long--temps. Atristant est dans tous les Dictionaires.

ATTRISTER


ATTRISTER, ou ATRISTER, v. act. [3e é fer. tout bref.] Rendre triste, afliger. "Il ne faut atrister persone. "Cette nouvelle l' a fort atristé; il s' atriste mal à propos.

ATTRITION


ATTRITION, ou ATRITION, s. f. [atri--cion, en vers, ci-on, tout bref.] Regret d' avoir offensé Dieu par la crainte des peines. On apelle l' atrition, contrition imparfaite.

ATTROUPEMENT


ATTROUPEMENT, s. m. ATROUPER, v. a. [A-trou-peman, troupé; 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] L' atroupement est une assemblée tumultueûse de gens sans autorité et sans aveu. Atrouper, c' est les assembler; s' atrouper, s' assembler de la sorte. "Les atroupemens sont défendus: il atroupa la canaille; les paysans s' atroupèrent.

AU


AU (o) final est douteux; aloyau, joyau, etc. Si le mot est dans le cours de la phrâse, il est bref; s' il la termine, il est long. Au milieu des mots, quand il précède une syllabe masc. il est douteux aussi: aubade, audace, etc. Quand il est~ suivi d' une terminaison muette, il est long; aûge, aûtre, aûne, etc. D' Oliv.

AV


AV, précédant une syllabe muète, est long, entrâve, grâve, mais lorsqu' il précède une syllabe masc., il est bref: graver, gravier, paveur, etc.

AU


AU: les noms en au prènent un x au pluriel; étau, étaux, etc.

AU


AU: Cette diphtongue a toujours en français le son de l' o. Les Anglais la prononcent comme notre â long; les Allemands et les Italiens, comme nous prononçons a-ou. Ces étrangers doivent le prononcer dans notre Langue comme un o; Audace, odace.

AU


AU: Article du datif: [Pron. o bref.] C' est une particule formée par contraction de la préposition à et de l' article le. Il sert à marquer le datif singulier des noms, qui comencent par une consone, ou une h aspirée; au Savant, au Hérôs. Il fait au plur. aux, aux Savans, aux Hérôs. Voy. A.

AVA


AVA. Rem. Il n' y a pas de dificulté pour l' ortographe et la prononciation dans les mots qui comencent par ava. L' u est consone: il ne doit point avoir le son du b, ni de l' f: la 1re prononciation est gascone ou espagnole; la 2d, allemande.

AVACHIR


AVACHIR (s' ) v. r. [Tout bref.] Devenir mou. Suivant Richelet, il se dit du cuir qui devient mou, et des branches d' arbres qui ont leur extrémité penchante. _ Au figuré, ajoute-t-il, devenir lâche et fainéant. Il est bâs. _ L' Acad. ne le met qu' au figuré. "Cet homme commence à s' avachir, et elle ajoute qu' il se dit plus ordinairement des femmes, qui deviènent trop grâsses. Il n' est que du style familier.

AVAL


AVAL, adv. Il ne se dit que de ce qui va sur la rivière en descendant. Un des bateaux alait à mont (en montant), et l' autre aval. _ Vent d' aval, vent du couchant. _ À~ vau l' eau vient de là, suivant le courant de l' eau. On dit figurément qu' une afaire, qu' une entreprise est alée à vau l' eau, pour dire qu' elle n' a pas réussi.
   AVAL est aussi un terme de Négociant. Reconaissance de celui qui cède un billet ou une lettre de change, par laquelle il s' oblige, en cas qu' ils ne soient pas payés, à en fournir d' autres, ou à les payer.

AVALAISON


AVALAISON, s. f. [Avalèzon, 3e lon.] Chûte d' eau impétueûse, qui vient des grosses pluies, qui se forment en torrens.

AVALÉ


AVALÉ, ÉE, adj. Qui pend un peu en bâs. Cette chiène a le ventre avalé; ce chien a les oreilles avalées: Avoir les joues, les épaules avalées.

AVALER


AVALER, v. a. 1°. Faire descendre par le gosier dans l' estomac. Avaler un oeuf, un bouillon, une arête , une épingle, etc. _ Au figuré: "Avaler le calice, avaler des couleuvres, dévorer des dégoûts, des chagrins, des mortifications; avaler le morceau, se soumettre à quelque chôse de fâcheux, malgré sa répugnance. _ On dit d' un homme qui mange goulument, qu' il ne fait que tordre et avaler; et d' un homme avide, qu' il avalerait la mer et les poissons. = 2°. Abaisser, faire descendre. Avaler du vin dans la cave. Il est populaire. = 3°. Neutre, descendre, en parlant des bateaux. Voy. AVAL. = 4°. * Couper, enlever. L' Ab. Tallemant s' en est servi dans sa Traduction de Plutarque. "Il lui avala l' épaule d' un coup d' épée. Ce mot n' est plus d' usage que chez le bâs peuple.

AVALEUR


AVALEUR, s. m. [3e dout.; au plur. elle est longue.] Celui qui avale. Il ne se dit qu' en plaisantant: Avaleur de tisane, de bouillon, etc. _ Proverbialement, on apèle un glouton, avaleur de poids gris, et un fanfaron, avaleur de charrettes ferrées.

AVALOIRE


AVALOIRE, s. f. [Ava-loa-re, 3e lon.] Terme de plaisanterie. Grand gosier. Quelle avaloire! _ Pièce de harnois des chevaux.

AVANCE


AVANCE, s. f. AVANCEMENT, s. m. [2e l. 3e e muet] Le 2d ne se dit que dans le fig. Travailler à l' avancement de sa fortune; le 1er se dit le plus souvent au propre; l' avance d' un toit, il a tant d' avance, tant de lieuës d' avance sur nous; c' est une grande avance pour bâtir, que d' avoir tous les matériaux; quelquefois au figuré, faire des avances; faire les premières démarches pour une réconciliation, pour lier un commerce amoureux. "Il est honteux à une femme de faire des avances. "Elle lui fit de grandes avances. _ On dit aussi, faire les avances. "Un bon Chrétien doit faire les avances pour se réconcilier. _ Il se dit ordinairement au pluriel. Avec nulle ou aucune, on peut mettre le singulier: "Il ne voulut faire nulle avance, aucune avance. "Les railleurs lui ont fait tant d' avance, (d' avances) qu' il sera toujours en reste, et qu' il pourra dificilement s' aquiter. Ann. Litt.
   D' AVANCE ou par avance; adv. C' est ainsi qu' il faut dire, et non pas à l' avance. "Je m' en réjouis d' avance, ou par avance. Mde. de Sévigné se moque du 3e: Je vous écris un peu à l' avance, comme on dit en Provence. M. Moreau s' est servi de cette locution. Et M. Necker aussi. On la trouve dans des Arrêts du Conseil, publiés durant son administration. L' on y fait dire au Roi, qu' il croit devoir ordoner à l' avance les recherches et les travaux propres à seconder l' exécution de ses desseins. On voit aussi à l' avance dans la proposition du sujet des prix de l' Acad. de Besançon, pour l' année 1772. "Il est nécessaire d' en faire des provisions considérables à l' avance. Bernard. _ L' Acad. ne met que les deux premiers.
   EN AVANCE, adv. Être en avance, avoir fait une avance de quelque somme. "Je suis en avance de trois mille livres.
   * Un Auteur moderne dit mettre en avance, pour mettre en avant. "Vous mettez en avance, dit-il, à Voltaire, des propositions qui n' ont ni queuë ni tête, et puis on nous relance.
   AVANCEMENT, est 1°. progrès en quelque matière que ce soit: avancement dans un écolier, dans un élève, avancement du travail, avancement des lettres dû aux Princes qui les protègent; avancement dans les voies de la piété, etc. = 2°. Établissement de fortune; procurer l' avancement de quelqu' un; être cause de son avancement. = 3°. Ce qu' on done par avance à un fils, à un héritier. Avancement d' hoirie.
   * Rem. Avancement n' a de pluriel en aucun sens. L' Ab. Du Bos a tenté de lui en doner un: "Cette élévation d' esprit, qui fait mettre un juste prix aux avancemens où l' on peut aspirer. L' Auteur l' a fait imprimer en italique, pour montrer que c' étoit un mot hasardé, dans ce nombre.

AVANCER


AVANCER, v. a. [2e lon. 3e é fer.] 1°. Pousser, porter en avant: Avancer la table, la tête hors du carosse, le brâs, la main. = 2°. Prévenir le tems de... Avancer le départ, le jour, le dîner, l' heure du dîner. Avancer l' horloge. = 3°. Faire du progrès; Avancer besogne (sans article) avancer l' ouvrage, ses afaires, etc. = 4°. Payer par avance; avancer les gages, le loyer; avancer de l' argent à un ouvrier. = 5°. Mettre en avant une proposition: "Vous avancez une chôse dificile à prouver. = 6°. Avec le régime des persones; avancer quelqu' un, procurer son avancement. Voy. AVANCEMENT, n°. 2°.
   AVANCER, neutre: Aler en avant: il recule au lieu d' avancer. _ Une horloge avance, quand elle va trop vîte. _ Anticiper. Vous avez avancé de plus de dix toises sur mon champ _ Sortir de l' alignement; cette maison avance; ce toît, cet arbre avance sur ou hors de la ruë, du chemin. _ Faire du progrès: "Il avance en vertu bien plus qu' en âge. _ Et parlant des chôses: "Ce travail, cet ouvrage n' avance point.
   S' AVANCER. Aler en avant: Avancez-vous, l' armée s' avançoit.
   Rem. 1°. On emploie assez indiféremment le neutre et le réciproque: On dit également bien: "L' armée avança ou s' avança; avancez ou avancez-vous. Cet ouvrage avance, cet ouvrage s' avance, etc. Il y a pourtant des ocasions où l' un est meilleur que l' autre, et c' est au goût à diriger pour le choix. Il me semble, par ex., qu' au figuré s' avancer vaut mieux; et encore, que s' avancer marque mieux le dessein de s' aprocher, et qu' avancer n' en désigne que l' action. "La victoire s' avance à grands pas. "Il avance vers nous, il s' aproche de nous: il s' avance vers nous, il a dessein de nous aborder. _ Mais avancer neutre, vaut mieux qu' être avancé passif. "Cette armée étoit avancée pour faire lever le siège. Hist. d' Angl. Il falait, avançoit, ou s' étoit avancée.
   2°. AVANCER ne régit pas l' ablatif; on ne ne doit pas dire, avancez-vous, ou avancez du feu, avancez-en, avancez-vous-en; mais aprochez-vous du feu, ou avancez vers le feu. _ Un Auteur moderne lui fait régir la prép. à (le datif.) "Nous nous hâtames d' avancer à Athènes. On dit vers, et non pas à. _ M. Moreau a dit aussi: "Il marche à la tête des Evêques au Palais de Lothaire, y avance acompagné de la Reine, etc. ce régime est irrégulier. Cet illustre Auteur devait dire; il avance à la tête des Évêques, vers le Palais, etc.
   3°. Ce verbe, quand il est actif, ne régit pas souvent les persones. On dit d' un homme qu' on l' a avancé, c. à. d. qu' on lui a doné un meilleur emploi, un grade plus honorable, un poste plus lucratif; mais je ne voudrais pas dire comme Bossuet, en parlant d' une méthode pour aprendre une science, qu' elle est utile pour y avancer ceux qui comencent.
   4°. S' AVANCER de avec l' infinitif, est une manière de parler assez particulière. "Il s' avança de lui dire que, etc. D' Avrigni. _ L' Acad. en met un exemple. "Je me suis avancé de lui offrir telle chôse de vôtre part.

AVANIE


AVANIE, s. f. [3e lon. 4e e muet, nî-e.] Au propre, vexation que les Turcs font dans le Levant, à ceux qui sont d' une autre religion que la leur, pour en tirer de l' argent. _ Au figuré, afront, insulte faite de gaité de coeur. Acad. Querelle sans fondement. Trév. Afront, traitement injurieux. Rich. Port. "Il m' a fait mille avanies. _ V. Affront.

AVANT


AVANT, prép. Il sert à marquer, ou priorité de temps, avant la fin du jour; ou priorité d' ordre, mettre une chôse avant l' autre; ou priorité de préférence, la Justice doit aller avant tout.
   1°. AVANT, devant (synon.) Le 1er. est pour l' ordre du temps, et le 2d. pour l' ordre des places; l' un répond à après, l' autre à derrière. Nous allons après les persones qui passent avant nous. Nous allons derrière celles qui passent devant. Je suis arrivé avant lui: il marchait devant moi. Ainsi nous disons qu' en certaines ocasions l' adjectif marche devant, et non pas avant le substantif, comme le disent plusieurs, et l' Acad. elle-même. Nous croyons devant plus régulier.
   Ces deux prépositions difèrent encôre, quand on parle des chôses. "Sa maison est devant la miène, c. à. d. vis-à-vis: elle est avant la miène, c. à. d. plus près sur la même ligne.
   2°. AVANT, adv. Profondément. Il s' emploie ordinairement avec si, bien, trop, plus, assez, fort et autres semblables: "Il ne faut pas creuser si avant, trop avant, plus avant, etc.
   Mais il n' est pas adv. de temps. Le despotisme avait déjà long-temps avant établi cet usage barbâre en Orient. Ann. Litt. Il falait, long-temps auparavant. Celui-ci est adverbe, et se dit sans régime: Avant est préposition de temps, et les prépositions ne marchent point seules.
   3°. Doit-on dire avant que de mourir, ou avant de mourir, ou avant que mourir, ou avant mourir? Les deux dernières manières sont aujourd' hui universellement rejetées. Vaugelas était pour la première, et tous les Gramairiens n' avaient cessé de l' inculquer. Les Poètes ont commencé à se servir de la 2de. comme plus favorable aux vers, avant que de, étant dur et traînant. M. de Wailly penche pour avant de, et le gros des Auteurs le préfère. L' Académie ne met d' exemple que du premier: avant que de venir. Je crois qu' on peut dire l' un ou l' autre à son choix. _ On ne dit plus devant de, ni devant que de faire.
   4°. AVANT que régit le subjonctif; et l' on ne doit point mettre de négation entre que et le verbe; avant qu' il viène, et non pas avant qu' il ne viène. J' ai lu dans plusieurs livres, qu' il serait trop long de citer, avant qu' elle ne se vange; avant qu' elle ne parviène à nos descendans; avant que la nouvelle du Traité de paix ne fût publique. "J' irai vous voir très-assurément, avant que vous ne preniez aucune résolution là-dessus. SÉV. "Il l' avertit de l' entreprise des Espagnols deux ans avant qu' elle n' éclatât. Dict. Hist. Art. Walsingham. Ce ne sont pas-là des autorités sufisantes pour justifier entièrement cette façon de parler contre l' usage constant du torrent des bons Auteurs. L' Acad. ne dit que, avant que, sans négative; avant que je fusse venu, avant qu' il parte, avant qu' il soit un an, etc.
   5° On ne doit pas mettre indiféremment avant que avec le subjonctif, et avant que de, ou avant de avec l' infinitif. On doit se servir de celui-ci, quand le verbe, régi se raporte au sujet de la phrâse, (au nominatif du verbe régissant); et du 1er. quand il ne s' y raporte pas. Je dis p. ex. je lui ai compté cette somme; si c' est moi qui suis parti, je dirai, avant que de partir, ou avant de partir; si c' est lui qui s' en est allé, je dois dire, avant qu' il partît. Il est évident que, si dans cette dernière ocasion, je me servais de l' infinitif, je ferais entendre toute autre chôse que ce que je veux dire, et qu' on croirait que la somme a été comptée avant mon départ, et non pas avant le sien.
   EN AVANT, adv. de lieu. Pousser en avant, aller en avant. On projète d' agrandir la place qui est en avant de ce Palais. L' Ab. Laugier. _ Adverbe de temps; de ce jour là en avant. Acad.
   Mettre en avant, Proposer, alléguer. Il est un peu vieux. Il mit en avant un Traité de paix. D' Ablanc.
   De-là en avant n' est que du style familier. L' Acad. le met sans remarque, mais sûrement elle ne l' aprouverait pas dans une Histoire. "L' Évêque de Paris fut si solidement rétabli, que delà en avant il ne se vit exposé à nulles peines. Villefore, vie de St. Bernard.
   D' avant, autre prép. mais de temps seulement: c' est comme le génitif de, avant. "Les hommes d' avant nous, les hommes d' avant le déluge. Pluche. _ On dit aussi, Dès avant avec le même régime direct. Dès avant le déluge. Id.
   AVANT entre dans la composition de plusieurs mots, et il suit le genre du mot avec lequel il se combine: Avant-bras, avant-corps, avant-coureur, Avant-goût, avant-propos, avant-train, sont masc. _ Avant-cour, avant-garde, avant-veille sont féminins.

AVANTAGE


AVANTAGE, s. m. [2e. lon. 4e e muet.] 1°. Ce qui est utile, profitable, favorable à quelqu' un. Grand avantage, avantage considérable. = 2°. Supériorité. "Dans tous les combats, il a eu l' avantage. "César eut l' avantage sur Pompée. = 3°. Ce qu' un Père done de plus à quelqu' un de ses enfans. _ Ce qu' un joueur plus habile done de facilités à celui qui l' est moins, pour rendre la partie plus égale. _ Voy. UTILITÉ.
   Rem. On dit tirer avantage de, et prendre avantage de... sur... ce sont des expressions, consacrées par l' usage, qu' il ne faut pas changer. "Que ces vaisseaux tirent l' avantage d' avoir été construits sur une montagne qui m' est dédiée. P. Catrou, Trad. de l' Enéide. Il falait, tirent avantage de, etc. Le Traducteur de l' Hist. d' Angl. de M. Hume dit: "Robert Bruce avoit pris de grands avantages~ sur ses ennemis: mais prendre avantage, comme prendre patience, et autres expressions semblables, se disent toujours de même, sans addition et sans changement. Il en est autrement d' avoir, aquérir, avec avantage: celui-ci prend l' article avec ces verbes. Ainsi l' Auteur cité aurait pu dire: Robert Bruce avait eu, ou avait aquis, ou remporté de grands avantages sur, etc.
   Rester sur ses avantages, ne pas les pousser plus loin. "La nuit, qui survint, empêcha M. de la Touche de pénétrer jusqu' à leur camp et l' obligea de rester sur ses avantages. Let. Édif.
   À~ l' avantage, adv. Être monté à l' avantage, bien monté. "Il m' a pris à son avantage: il m' a ataqué quand il était plus fort et mieux armé. "Elle est coîfée ou habillée à son avantage, d' une manière qui lui sied bien, qui releve sa bonne mine, sa bonne grâce.
   On dit aussi adverbialement, à l' avantage de, comme on dit, à l' honeur, à la gloire, à la satisfaction de, etc. "Cette manière de négocier prospéroit au grand avantage des deux nations. Rainal. _ Mais dans tourner à l' avantage, celui-ci n' est pas adverbe. "Ces querelles Littéraires sont dans le fond plus utiles que dangereuses, parce qu' en excitant l' émulation des Savans, elles tournent à l' avantage des sciences. Nécr. des Hom. célèbres, art. Roi.
   Régimes. On dit avoir l' avantage de dire et trouver de l' avantage, ou un grand avantage à dire. Ainsi quand l' art. d' avantage est défini, on met de; quand il est indéfini, on se sert de à. _ Tirer avantage régit l' ablatif; (la prép. de) prendre avantage de et sur. "Il ne faut pas tirer avantage des dons de la nature et de la fortune. Il prend avantage sur lui de ses erreurs, de ses faûtes.

AVANTAGÉ


AVANTAGÉ, ÉE, adj. [2e lon. 4e é fer. long au 2d., gé-e.] Il se dit ordinairement avec du côté: "Je ne crois pas qu' il y ait d' homme plus avantagé du côté de la figure, et qui en même temps y fasse moins d' attention. Fielding. Jeune homme aussi avantagé du côté de la figûre que du côté de l' esprit. Bérault.

AVANTAGER


AVANTAGER, v. a. [2e lon. 4e é fer.] Doner des avantages à quelqu' un par-dessus les autres. "Le ciel et la natûre l' avoient avantagé des dons les plus précieux. "Suivant certaines Coutumes, un Père ne peut avantager aucun de ses enfans que d' une certaine portion de ses biens.

AVANTAGEûSEMENT


AVANTAGEûSEMENT, adv. [2e et 4e lon., 5e e muet; geû-zeman.] D' une manière avantageûse. "Il s' est marié avantageûsement. "Il parle de ce jeune homme avantageûsement, etc.

AVANTAGEUX


AVANTAGEUX, EûSE, adj. [2e et 3e lon. geû, geû-ze.] Il se dit des chôses, qui portent, qui produisent de l' avantage, et c' est son emploi le plus ordinaire. Poste avantageux, traité avantageux, condition avantageûse. "Il est avantageux d' avoir l' estime publique. _ Taille avantageûse, grande taille, acompagnée d' une mine noble et haute. _ Couleur, coîfûre, parûre avantageûse, qui sied très-bien. _ 2°. Il se dit des persones, dans le sens de confiant, présomptueux, qui croit avoir, ou qui cherche à prendre avantage sur les autres. "Homme avantageux, qui prend le ton décisif. Préf. de l' Hom. Univ. "Il répondit avec un air avantageux, dont je fus indigné. Marm.
   Rem. 1°. L' Ab. Des Fontaines n' aimait pas ce mot, apliqué aux persones: son goût n' a pas été celui du Public. Cet adjectif est très-usité, mais il n' est guère que du style familier, ou critique.
   2°. Dans le Mercûre, on l' emploie substantivement: "L' Art Dramatique est en proie à une foule d' avantageux, qui, indociles à tous les avis, incapables de réflexion, s' élancent dans une carrière, aûtrefois honorée par ceux qui la parcouroient. Ce subst. est une nouveauté. _ Voy. GLORIEUX. Voy. aussi, PETIT-MAîTRE, à la fin.
   3°. *AVANTAGEUX ne doit jamais être employé pour signifier, qui a de l' avantage. "Les Scythes sont avantageux dans les combats. C' est un barbarisme dans ce sens-là.

AVANT-COUR


AVANT-COUR, s. f. Comme on a écrit long-temps court pour cour, on a aussi long-temps écrit avant-court pour avant-cour. On troûve cette ortographe dans une édition de Boileau. Était-ce celle de l' Auteur? Je n' ai pas eu le temps de le vérifier, mais peu importe.

AVANT-COUREUR


AVANT-COUREUR, s. m. Celui qui va devant quelqu' un, et qui en marque par avance l' arrivée. "Les Tartares sont les avant-coureurs de l' armée des Turcs. "M. un tel va arriver, voici son avant-coureur, son chien, son postillon. _ Il se dit sur-tout au figuré.
   Cet esprit de vertige et d' erreur
   De la chûte des Rois funeste avant-coureur.
       Rac.

AVANT-COURRIèRE


AVANT-COURRIèRE, s. f. Suivant l' Acad. il ne se dit qu' en poésie, en parlant de l' Aurôre. "L' avant-courrière du Soleil, du jour. _ Un Auteur très-moderne lui done un usage plus étendu, et je ne saurais l' en blâmer. "Malgré les lettres de jussion, avant-courières funestes de la colère de S. M. Vie de L......

AVANT-GOûT


AVANT-GOûT, s. m. Il ne se dit que dans le style figuré: Avant-goût des fruits, de la paix; avant-goût des célestes délices.

AVANT-HIER


AVANT-HIER, adv. Le jour qui précédait hier; le 3e, à partir de celui où l' on est, en reculant. _ Doit-on prononcer avant-hier, ou avan-hier? _ Il semble que l' h dans hier, n' étant pas aspirée, le t doit se prononcer dans avant. C' est ainsi, en effet, que prononcent les persones qui parlent bien. _ Th. Corneille blâme des persones de qualité de son temps, qui prononçoient avan-hier, et dit que le mot hier n' étant pas aspiré, oblige à dire avantier, en faisant sentir le t devant hier. _ Ce qui est plus sûr encôre, c' est que, avanzier est un gasconisme, et une faute grossière.
   *AVANTURE, AVANTURER. C' est ainsi qu' on écrivait autrefois. On écrit aujourd' hui, Aventûre, aventurer avec un e.

AVâRE


AVâRE, adj. [2e lon. Il convient de mettre sur l' â un acc. circ.] Qui a trop d' atache aux richesses. Vieillard avâre, humeur avâre. _ Subst. L' avâre ne manque pas moins de ce qu' il a que de ce qu' il n' a pas. Acad.
   AVARE, AVARICIEUX, (syn.) Il semble qu' avâre convient mieux, quand il s' agit de l' habitude et de la passion même de l' avarice, et qu' avaricieux se dit plus proprement lorsqu' il n' est question que d' un acte ou d' un trait particulier de cette passion. Le premier de ces mots a aussi une merveilleûse grâce dans le sens substantif; et le second, dans le sens adjectif. "C' est un grand avâre; c' est un homme fort avaricieux. "L' avâre se refûse toutes chôses: l' avaricieux ne se les done qu' à demi. Le terme d' avâre paroît avoir plus de force et d' énergie pour exprimer la passion sordide et jaloûse de posséder sans aucun dessein de faire usage: celui d' avaricieux paroît avoir plus de raport à l' aversion mal placée de la dépense, lorsqu' il est nécessaire de s' en faire honeur. GIR. Synon. _ Nous ajouterons qu' avâre a un beau sens au figuré, et qu' avaricieux ne se dit qu' au propre, et a toujours un mauvais sens. Outre cela, avâre est de tous les styles, avaricieux n' est que du style familier. _ Avâre, Ataché, Intéressé, (syn.) Voyez ATTACHÉ.
   Rem. 1°. Avâre peut se placer indiféremment devant ou après le substantif, au choix du Poète ou de l' Orateur. C' est à l' oreille et au goût à lui désigner sa place dans la construction. L' avâre natûre, la natûre avâre. Il y a des mots avec lesquels il ne peut marcher devant: l' avâre ciel, l' avâre Prince seraient mal; l' avâre home serait d' une dureté afreûse.
   2°. AVARE, au figuré sur-tout, régit l' ablatif (la prép. de.) "Il est avâre de son temps, de ses faveurs. "Le ciel, la natûre, la fortune ont été, ou n' ont pas été avâres de leurs dons envers lui: elles l' ont favorisé, ou non. _ Être avâre de ses visites. "Quoique les Communes fussent prodigues de leur liberté, elles étoient avâres de leur argent. Hist. d' Angl. _ Mde. de Sévigné emploie élégamment ce régime apliqué aux persones. "Mon fils devient si avâre de moi que je ne puis plus m' adoner à la contemplation, comme je faisois dans ces bois, sans le voir à mes côtés. *AVAREMENT, adv. Trév. Rich. Port. _ L' Auteur des Réflexions trouvait que ce mot ne valait rien. Mrs. de l' Acad. l' aprouvaient: ils l' ont retranché dans la dernière édition. _ Il est peu d' usage: l' on dit ordinairement par avarice, avec avarice.

AVARICIEUX


AVARICIEUX, EûSE, adj. Voy. AVâRE. Homme avaricieux, femme avaricieûse. _ Subst. "C' est un avaricieux, une avaricieûse.

AVARIE


AVARIE, s. f. [3e long. 4e e muet.] Terme de Marine. Domage arrivé à un vaisseau, ou aux marchandises, dont il est chargé, depuis le départ jusqu' au retour. Acad. Trév. _ Le dernier ajoute, dépense imprévue qu' on est obligé de faire pendant le cours du voyage.
   AVARIE, et AVANIE ont beaucoup de ressemblance dans l' ortogr. avec des sens bien diférens. Des Imprimeurs peu atentifs les confondent quelquefois l' un avec l' autre. "Un paquebot a passé dans le détroit sans essuyer aucune avarie (de la part des Môres.) Journ. de Brux. Il faut là avanie.

À~ VAU L' EAU


À~ VAU L' EAU. Voy. AVAL.

AUBADE


AUBADE, s. f. [Obade, 2e br. 3e e muet.] 1°. Concert d' instrumens qu' on done à la porte ou sous les fenêtres d' une persone, ou à l' aube du jour, d' où vient l' origine de ce mot, ou pendant le jour même. _ Doner une aubade, des aubades. _ 2°. Insulte, vacarme qu' on fait à quelqu' un. "Il en a eu, il en aura l' aubade: On lui en a doné l' aubade. Il a eu une étrange, une furieûse aubade.

AUBAIN


AUBAIN, s. m. AUBAINE, s. f. [1re dout. O-bein, bène, 2e è moy. 3e e muet.] L' Aubaine, ou le droit d' aubaine, est le droit de succession aux biens d' un étranger, qui meurt dans un pays où il n' est pas naturalisé. _ Aubain est cet étranger. _ Figurément, Aubaine se dit de tout droit casuel, qui arrive à quelqu' un. "C' est une bonne aubaine. Il est du style familier.

AUBANS


*AUBANS. Rich. Voy. HAUBANS. Puisque ce mot est aspiré, il faut l' écrire par une H.

AUBE


AUBE, pénult. longue. Aûbe: prononc. ôbe.

AûBE


AûBE, s. f. [Ôbe, 1re lon. 2e e muet.] 1°. Vêtement éclésiastique, fait de toile blanche, et qui descend jusqu' aux talons. = 2°. La pointe du jour. Il ne se met pas seul: on ne dit pas, je me suis levé à l' aûbe; il faut dire, à l' aûbe du jour.
   Rem. L' Auteur des Réflexions ne voulait pas qu' on dît, aube du jour, mais pointe du jour. Il assurait que la 1re expression avait vieilli. Mrs. de l' Acad. ne la condamnaient point, et ils ont continué à la mettre sans remarque.

AUBÉPIN


AUBÉPIN, s. m. ou AUBÉPINE, s. f. L' Acad. met les deux. Petit arbrisseau épineux, qui produit de petites fleurs blanches par bouquets, d' une odeur agréable. _ On dîsait autrefois Aubespin: on ne le trouve plus que dans d' anciènes poésies. On a dit ensuite aubespine. Aujourd' hui c' est Aubépine ou Aubépin. Le 1er est plus usité, et l' étymologie lui est plus favorable, alba spina.

AUBERGE


AUBERGE, s. f. [2e ê ouv. et bref, 3e e muet.] Il y en a qui font ce mot masc. et disent, un bon auberge, c' est bonne auberge qu' il faut dire. = Maison où l' on done à manger à tant par repas, et où on loge en chambre garnie. Tenir auberge. Loger, manger dans une auberge. On le dit sur--tout de celles des routes où l' on reçoit des voyageurs. Dans les villes, on les apèle souvent Hôtels. Autrefois on disait Hôtelleries.

AUBERGISTE


AUBERGISTE, s. m. [2e ê ouv. et br. dern. e muet.] Celui qui tient auberge.

AUBIER


AUBIER, ou AUBOUR, s. m. L' Acad. ne met que le 1er. Trév. et le Rich. Port. les mettent tous deux. [O-bié, o-bour.] Le bois tendre et blanchâtre, qui est entre l' écorce et le coeur de l' arbre. "Il y a trop d' aubier ou d' aubour à cet arbre, il ne vaut rien pour faire une poûtre.

AUBIN


AUBIN, s. m. [O-bein, 1er dout.] Suivant Richelet, le blanc de l' oeuf. Suivant l' Acad. Alûre d' un cheval entre l' amble et le galop. Trév. et le Rich. Port. mettent les deux sens.

AUCUN


AUCUN, AUCUNE, adj. [Prononc. O--keun, okune, et non pas o-keu-ne.] Nul, pas un. Je ne conois aucun moyen de réussir. "Je ne conois aucun de vos Juges. Dans la 1re phrâse, il est simple adjectif: dans la 2de, il est employé substantivement. C' est comme si l' on disait, je ne conais Aucun Juge parmi ceux qui doivent vous juger.
   1°. AUCUN, employé substantivement, signifie ordinairement, Aucune persone. "Aucun n' est innocent devant Dieu. Il se décline comme les noms propres: aucun, d' aucun, à aucun. _ Il s' emploie dans tous les cas, excepté au vocatif. À~ l' acusatif, il ne peut être employé que régi par des prépositions, ou suivi de quelque pronom, ou de quelque nom substantif. "Il ne s' est déterminé pour aucun; il n' a de liaison avec aucune; il ne conoît aucun de nous, aucun de nos amis, etc. Que si l' on ne se sert pas de quelque addition semblable, ou de quelque préposition, il faudra nécessairement se servir de la particule relative en, qui supôse un substantif précédent, et dire: il n' en conaît aucun.
   2°. AUCUN, dans les câs obliques, se dit des chôses, comme des persones. "Lire plusieurs livres, sans s' atacher à aucun; passer par plusieurs villes, sans s' arrêter dans aucune; avoir de grandes terres, sans pouvoir disposer d' aucune, etc. Mais, au nominatif, il ne peut se dire que des persones.
   3°. AUCUN n' a point de pluriel. Racine lui en done un.
   Aucuns monstres par moi domptés jusqu' aujourd' hui.       Phèdre.
Cela sent le Palais, et le style marotique, où l' on dit: Aucuns disent, et alors il signifie quelques-uns. _ Racine n' est pas le seul qui ait mis aucun au pluriel. _ La Fontaine.
   J' ai vu beaucoup d' hymens, aucuns d' eux ne me tentent,
Il avait besoin du pluriel pour la rime, et d' ailleurs son style est demi-marotique: mais Bossuet, qui écrivait en prôse et dans le style sérieux, a dit aussi: "Ils n' ont besoin d' aucuns édits pour être en sûreté. _ Et l' Auteur de l' Art de penser: "On n' afirme ni des hommes en général, ni d' aucuns hommes en particulier, qu' ils sont pieux. _ Et plus récemment M. le Gendre: "Thalès n' a laissé aucuns ouvrages. "Et M. d' Aubenton: "Là où la nature paroît sans aucuns aprêts. _ Et Montesquieu: "Ils leur défendoient de faire aucunes levées chez les Alliés des Romains. "Le Duc de Bourgogne n' avoit aucuns intérêts à démêler avec le Roi; Moreau. Cet illustre Auteur le dit toujours au pluriel, etc. etc. Je crois qu' on ne doit pas imiter en cela ces Écrivains, d' ailleurs si estimables. La raison pourquoi il faut le singulier, c' est, outre l' usage, qu' aucun est acompagné d' une particule négative, et par conséquent exclusive. Aucun c' est, pas un. Qui n' en a pas un, n' en a point du tout: qu' a-t-on~ donc à faire du pluriel?
   4°. AUCUN précède le substantif, excepté dans le style marotique. La Fontaine dit, sans récompense aucune: ne lui ferez-vous grâce aucune. Ailleurs il faut dire, aucune récompense, aucune grâce; aucun bienfait, aucun moyen, etc.
   5°. AVEC aucun, on retranche pas; on n' emploie que la négative ne: * N' imitez pas Marivaux quand il dit: "Il n' y avoit pas aucun de ses gens dans la Cour. Dites; Il n' y avoit aucun. Peut-être avait-il mis pas un, et l' Imprimeur a mis pas aucun. _ M. l' Ab. du Bos. a dit aussi: "L' action de lire est en quelque façon une peine, et elle n' est pas acompagnée d' aucun sentiment agréable, comme celui qui naît de l' aplication des yeux sur les objets que nous offrent les tableaux. Retranchez pas. _ Le P. Tarteron a fait la même faûte. "J' ai réduit ce Poète (Horace) aux règles de la bienséance et de l' honnêteté, ce qu' aucun de ceux qui l' avoient traduit, n' avoit pas encôre fait. On doit dire, n' avoit encôre fait.
   6°. Excepté dans les phrâses interrogatives, aucun ne doit point être privé de la négative, sa compagne fidèle. Le P. Griffet a mal parlé, quand il a dit: Craignons de comettre aucun de ces péchés, dont parle l' Apôtre. Il devait dire, quelqu' un. Et le Trad. de l' Hist. d' Angl. "La liberté, qu' il étoit rare de trouver dans aucunes dissensions civiles. Retranchez aucunes, et dites simplement dans les dissensions civiles. _ Dans les phrâses interrogatives et de doute, on peut retrancher ne, parce que le doute et l' interrogation font le même effet que la négation. Y en a-t-il aucun qui vous estime? Dites-moi s' il y en avoit aucun parmi tant de Savans qui aprouvât votre décision, etc.
   7°. AUCUN régit la prép. de devant les substantifs, comme on l' a vu dans les exemples cités. Fénélon le traite comme rien et quelque chôse, et lui fait régir de devant les adjectifs. "Il n' a eu toute sa vie aucun moment d' assuré. Télém. Comme on dit; il n' y a rien de prêt. On y trouve quelque chôse de bon. Je n' oserais condamner de dans cet endroit: mais faut-il toujours le mettre dans des phrâses semblables? Je pense que non. Il fait fort bien, quand le pronom en est joint à aucun. Ainsi, ayant parlé de livres, de tableaux, je dirai: il n' y en a aucun de relié, il n' y en a aucun d' encadré. Mais hors de-là, il ne faut point, généralement parlant, mettre ce de devant l' adjectif; on dira donc: "Il n' a aucun livre relié; il n' a aucun de ses tableaux encadré.
   8°. AUCUN est quelquefois suivi de la conjonction que: "On ne voit parmi eux aucune distinction que celle qui vient de l' expérience et de la sagesse. Télém. On sous--entend autre; aucune aûtre distinction que celle, etc.
   *AUCUNEFOIS, adv. Il est vieux, ainsi que par fois. Il faut dire quelquefois. _ L' Acad. avait dit d' abord qu' aucune fois étoit vieux, et que parfois vieillissait. Dans la dern. édit. elle a retranché le mot et la remarque.

AUCUNEMENT


*AUCUNEMENT, adv. Même avec la négation, il est peu en usage: on dit à sa place, nullement. "Il ne faut aucunement, ou plutôt, nullement avoir comerce avec les méchans. = L' Acad. le met avec la négative sans remarque. _ Sans négation, il est tout-à-fait hors d' usage. On le disait autrefois pour, en quelque sorte. "L' Académie s' est aucunement consolée, voyant que la violence qu' on lui faisoit, s' acordoit avec l' utilité publique. Sentimens sur le Cid. _ On le dit encôre au Palais. "Ayant aucunement égard à la demande, etc. Ferrière. On s' en sert aussi dans le style marotique.
   Je ne sais bête au monde pire
   Que l' Écolier, si ce n' est le Pédant.
   Le meilleur de ces deux, pour voisin, à vrai dire,
   Ne me plairoit aucunement.
Là il est avec la négative, et signifie nullement. Dans la Fable suivante, il est employé sans négation.
   Tout homme ment, dit le Sage:
   S' il n' y mettoit seulement
   Que les gens de bas étage,
   On pourroit aucunement
   Soufrir ce défaut aux hommes, etc.
Corneille l' a employé dans une Tragédie.
   L' heureux moment aproche où votre destinée
   Semble être aucunement à la nôtre enchaînée.
       Rodogune.
  AUCUNEMENT était comode pour les Poètes. Ils ont fait une perte dans la décadence de ce mot. Ils n' ont guère d' espoir de le voir se relever.

AUD


AUD, final, est long. Badaud, nigaud, [Badô, nigô.]

AUDACE


AUDACE, s. f. [2e brève, 3e e muet.] Excessive hardiesse. Voy. HARDIESSE. Être plein d' audace, parler, répondre avec audace. _ Il se prend en mauvaise part, à moins qu' on n' y joigne quelque épithète, ou un autre substantif. Noble, généreûse audace. "Il y montra l' audace d' un héros qui est au-dessus de la fortune.
   Et vous avez montré par une heureûse audace,
   Que le fils seul d' Achille a pu remplir sa place.
       Rac.
  L' été n' a point de feux, l' hiver n' a point de glace;
  Qui puisse retenir sa vigilante audace.  Boil.
Ces épithètes corrigent ce qu' audace pourrait avoir d' odieux. Cependant on trouve dans de bons Auteurs, audace employé en bone part sans épithète.
   Que Corneille pour lui ranimant son audace,
   Soit encor le Corneille et du Cid et d' Horace.
       Boil.
  C' est Hector, disoit-elle, en l' embrassant toujours,
  Voilà ses yeux, sa bouche, et déja son audace.
      Rac.
Mais alors la force du sens tient lieu de correctif. "L' espérance est dans son coeur, l' audace est sur son front. Jér. Dél.
   Audace se dit au figuré, non-seulement des animaux, mais des chôses inanimées.
   Même, lorsque~ dans l' air, qu' il comence à braver,
   Le rejeton, moins foible, ôse enfin s' élever,
   Pardone à son audace, en faveur de son âge.
       De Lille.
C. à. d. ne le taille point encôre.
Avoir l' audace, régit la prép. de devant l' infinitif. "Comment! avoir l' audace de batre un Philosophe comme moi! Mol.

AUDACIEûSEMENT


AUDACIEûSEMENT, adv. AUDACIEUX, EûSE, adj. [Odaci-eû-zeman, odaci-eû, eû--ze. 4e lon. 5e e muet.] Adv. Avec une audace téméraire. Parler, répondre audacieûsement. = Avec courage et intrépidité. "Il se jeta audacieûsement au milieu des ennemis. Acad. _ Adj. Qui a une audace téméraire. Il est audacieux; jeune homme audacieux, femme audacieûse; air audacieux, mine audacieûse. _ Subst. C' est un audacieux. _ Figurément, discours audacieux, figûre audacieûse, comme l' hyperbole.
   Rem. Le P. Bouhours dit qu' audacieux ne se prend jamais qu' en mauvaise part, soit en vers, soit en prôse. Cela est vrai quand il est substantif; c' est un jeune audacieux. Mais l' adjectif est déterminé par le mot auquel il est joint, à avoir un bon ou un mauvais sens: "comme ce guerrier audacieux se jète au milieu des lances et des épées. Et au figuré:
   N' est-ce pas l' homme enfin, dont l' art audacieux
   Dans le tour d' un compas a mesuré les cieux.
       Boil.

AUDE


AUDE [pron. ÔDE] Finale dont la pénult. est longue: Badaûde, il clabaûde.

AUDIENCE


AUDIENCE, s. f. [Odi-ance, 3e lon. 4e e muet.] Attention que l' on done à celui qui parle. Il est borné à ces phrâses: Vous aurez audience; prêtez-moi audience; doner audience; une audience favorable. _ Il n' est point synonyme d' atention. N' imitez point Molière et Bossuet, dont l' un a dit:
   D' une audience avide avaler ce poison.
Et l' autre: "Ce seroit abuser de l' honeur de votre audience, que de raporter tous les passages de ce Père sur ce sujet. _ * On disait autrefois audience pour auditoire. "Le Prince qui honore cette audience, dit Boss. Or. Fun. de la Princesse Palatine. On ne le dit plus que de l' auditoire du Palais, où audience signifie, et la séance des Juges, dans les caûses qui se plaident: tenir l' audience, lever l' audience; et le lieu où se tient l' audience: ouvrir, fermer l' audience; on le mit hors de l' audience; et l' assemblée de ceux qui y assistent: toute l' audience en fut scandalisée.
   L' emploi le plus ordinaire de ce mot, est pour signifier le temps que les Princes et leurs Ministres emploient à écouter ceux qui ont à leur parler. Les Ambassadeurs furent admis ou introduits à l' Audience du Roi: Ils ne purent avoir, ou obtenir audience. Le Roi leur dona audience. Les Ministres ont des jours réglés pour doner audience, etc.
   On dit proverbialement d' un Vieillard, qui fait son testament, qu' il prend son audience de congé, par allusion aux Ambassadeurs qui se retirent.

AUDIENCIER


AUDIENCIER, adj. Huissier Audiencier, qui apèle~ les causes, dans les Audiences. _ S. m. Grand Audiencier, un des principaux Officiers de la Chancellerie.

AUDITEUR


AUDITEUR, s. m. [Odi-teur, dout. à la 3e; au plur. il est long, Auditeurs.] Celui qui écoute un discours dans une assemblée. Il n' y a que les Prédicateurs qui disent, chers Auditeurs. Les autres Orateurs disent Messieurs.
   AUDITEUR se dit à la Chambre des Comptes. Charge d' Auditeur des Comptes. On le dit aussi du Secrétaire de la Nonciatûre.

AUDITIF


AUDITIF. adj. m. [Oditif.] Qui apartient à l' organe de l' ouïe.

AUDITION


AUDITION, s. f. [Odi-cion, tout bref.] Il ne se dit qu' au Palais des témoins et des comptes. L' audition des témoins, l' audition des comptes.

AUDITOIRE


AUDITOIRE, s. m. [Odi-toâ-re, 3e lon. 4e e muet.] Lieu où l' on plaide. _ Assemblée de ceux qui écoutent une persone qui parle en public. Il se dit sur-tout de ceux qui assistent au sermon. Ce Prédicateur a toujours un bel auditoire, un auditoire nombreux et choisi.
   Rem. Le Peuple fait auditoire fém. et dit: une grande auditoire: il faut dire, un grand auditoire. _ L' Acad. avait dabord dit qu' auditoire est fém. quand on parle du lieu où l' on plaide. Dans la dern. Édit. elle le marque masculin.
   P. Corneille apelle auditoire, les spectateurs à la Comédie. "Je devois choisir des sujets plus répondans au goût de mon auditoire. Épître qui précède la Suite du Menteur. On ne le dirait pas aujourd' hui.

AVÉ


AVÉ, ou AVÉ MARIA, s. m. C' est ainsi qu' on apelle la Salutation Angélique, en style familier. L' Acad. dit qu' il n' a point de pluriel. Cependant on dit, plusieurs Avé, un grand nombre d' Avé. Il est vrai qu' il ne prend point d' s en ce nombre. _ Je suis ici, dans un Avé, dans un Avé Maria; dans un moment.

AVEC


AVEC, prép. conjonctive. _ Ensemble, conjointement. C' est une des conjonctions, dont l' usage est le plus étendu dans la langue. Elle sert à marquer la convenance: marier une fille avec un honête homme; la liaison et l' union: être bien avec tout le monde; le mélange: du vin avec de l' eau; l' assemblage: manger avec ses amis; l' acompagnement: aller avec quelqu' un; le moyen: avec de la fermeté et du courage on réussit; le sentiment: avec plaisir, avec peine; la manière d' être ou d' agir: soufrir avec constance, parler avec éloquence, danser avec grâce, etc. etc.
   Rem. 1°. On disait autrefois avecque et avecques. C' était une commodité pour les Poètes. Malherbe s' en est souvent servi.
   J' avois toujours fait compte, aimant chôse si haute,
   De ne m' en séparer qu' avecque le trépas...
   Avec tous ses sujets, avecque tous les miens.
   AVECQUE n' est plus dans Racine que dans ce seul vers de l' Alexandre.
   M' entretenir moî seule avecque mes douleurs.
Cet excellent Auteur l' a corrigé par-tout ailleurs où ses premières éditions nous aprènent qu' il l' avoit employé. _ L' Acad. dit qu' avecque n' est plus en usage qu' en Poésie, où même il vieillit. On peut dire qu' il est même si vieux dans la Poésie noble et sérieuse, qu' aucun Poète n' oserait aujourd' hui l' employer. Il ne se maintient que dans la Poésie marotique.
   2°. Vaugelas avertit qu' il faut toujours prononcer le c d' avec devant quelque lettre qu' il se rencontre, et se garder bien de dire avé moi, avé un de mes amis; il faut dire (avek moi, comme avek un, etc.) Dans le Dict. Gramm. on dit au contraire, qu' on ne fait sentir le c que quand il précède une voyelle: c' est un article à réformer dans ce Dictionaire.
   3°. AVEC ne doit point être séparé de son régime. Bossuet dit: avec presque le consentement de tous les Princes. Avec et presque sont mal placés dans cette phrâse. Il falait dire: avec le consentement de presque tous les Princes. Car presque afecte en cet endroit, non le consentement, mais les Princes, et avec y est mal à propos éloigné de son régime.
   4°. En plusieurs ocasions, avec peut signifier deux chôses, en même temps que et par le moyen de. Il peut donc être équivoque, s' il est mal placé. "Les haines nationales s' éteindront, mais ce sera avec l' amour de la Patrie. J. J. Rouss. Cette phrâse a deux sens: Celui de l' Auteur; l' amour de la Patrie s' éteindra en même temps que les haines, etc. et un autre sens; les haines nationales s' éteindront par le moyen de l' amour de la Patrie, comme on dit, éteindre l' eau avec le feu.
   5°. C' est une négligence vicieûse de mettre deux avec qui se suivent, et qui ont des raport diférens, dont l' un regarde la persone et l' autre la chôse: p. ex. "Elle vécut avec lui avec la même bonté qu' elle avoit acoutumé.
   6°. AVEC est quelquefois employé adverbialement, mais seulement dans le style familier, et même populaire, ou marotique.
   Il avoit dans la terre une somme enfouïe,
   Son coeur avec.       LA FONT.
"Il y aura tantôt réponse, et peut-être bonnes nouvelles avec. Mariv. "Voilà une belle tête. _ Mais ce n' est pas le tout, il faut la mine avec. Id. "Cet oeuf ayant été aporté, le petit Caracalla, s' étant mis à jouer avec, le cassa. Le Gendre "C' est une disgrace de la première jeunesse, qu' on perd avec. Th. d' Éduc. C' est un jeune homme bien élevé, qui parle ici. Ce qui est moins à propos que les exemples précédens, si vous exceptez celui de Le Gendre. _ L' Acad. ne met point avec adverbe et sans régime.
   Être avec soi a un beau sens; être seul, jouir de soi-même dans la retraite: "Je m' en vais être avec moi, et avec votre cher et douloureux souvenir. SEV.
   D' AVEC, prép. Espèce de génitif de la prép. avec: "Discerner le bien d' avec le mal.

AVEINDRE


AVEINDRE, v. a. [A-veindre: 2e lon. 3e e muet.] Il ne faut pas le confondre avec Ateindre, et dire, par exemple: "Cela est si haut, que je ne puis y aveindre. On ne se sert d' aveindre, que pour signifier l' action de tirer quelque chôse du lieu où l' on l' avait enfermée. Mén. L. T. Aveignez cet habit de mon armoire. _ Il est du style familier.

AVEINE


AVEINE, ou AVOINE, s. f. [Avène, Avoâ-ne, 2e dout. au 1er, lon. au 2d, 3e e muet.] Ménage dit qu' avoine vaut mieux dans le discours familier, et aveine dans les compositions relevées, et particulièrement en vers. L' Acad. les croyait dabord l' un et l' autre assez indiférens. Ensuite elle s' est contentée de dire que quelques-uns prononcent Aveine, ce qui prouve qu' elle préfère Avoine. _ Trév. renvoie à Avoine. Le Rich. Port. met l' un et l' autre. Dans le Dict. Gramm. on se déclare pour aveine à cause de l' étymologie, avena. _ Dans la dern. Édit. l' Acad. ne met qu' avoine. Celui-ci est donc le plus sûr, mais les Poètes peuvent profiter de l' avis de Ménage, et dire aveine quand cela les acomode.
   AVOINE, sorte de grain, qui sert ordinairement à la nourriture des chevaux. Doner l' avoine aux chevaux. "Il a bien travaillé, on lui a fait gagner son avoine, ce qui se dit au propre d' un cheval, et au figuré d' un Homme.

AVELINE


AVELINE, s. f. AVELINIER, s. m. [2e e muet, 4e e muet au 1er, é fer. au 2d.] On apelle aveline une espèce de grosse noisette, et avelinier, l' arbre qui la porte.

AVENANT


AVENANT, ANTE, adj. [2e e muet, 3e lon.] Qui a bon air, et bonne grâce. L' Acad. ne met d' exemple que des persones: "C' est un homme avenant, fort avenant, mal (ou peu, ou qui n' est pas) avenant: "Cette femme est extrêmement avenante. On le dit encore plus souvent des chôses qui ont raport aux persones: air avenant, physionomie avenante, manières avenantes. "On était charmé de son air de modestie, joint à une physionomie aussi avenante qu' elle étoit pleine de dignité. Let. Edif.
   AVENANT s' emploie au Palais comme part. du v. avenir. "Les cas avenant que, etc. "Le décès avenant de l' un des deux, etc. _ On l' emploie même adverbialement à la tête de la phrâse: Avenant vacation d' offices; ils présentoient un nombre de sujets au Roi. Le Gendre.
   À~ l' avenant, adv. À~ proportion. Il fait de grandes dépenses en chevaux, en habits et en toute sorte de chôses à l' avenant. _ Il n' est d' usage que dans le style familier. Il s' emploie, ou sans régime: "Une cornette unie, un habit d' une couleur à l' avenant; ou avec la prép. de: Le dessert fut à l' avenant du repas: "Elle nous traita à l' avenant de notre indiférence pour elle. Ces trois exemples sont de Marivaux.

AVèNEMENT


AVèNEMENT, s. m. [2e è moy. 3e e muet, Avèneman. L' Acad. écrit avénement avec l' acc. aigu sur le 1er é: mais l' é n' est pas fermé. Pourquoi s' obstiner à ne pas employer l' accent grâve pour l' è moyen? ] Il ne se dit que de la venûe de J. C. et de l' accession des Princes au trône. En ce dernier sens, il régit le datif. Avènement se dit des Princes et des Papes. Exaltation ne se dit que des Papes. "Depuis son avènement à la Courone, à l' Empire, au Pontificat. "Paul III, depuis son exaltation, ne songeoit qu' à remédier aux maux de la chrétienté.
   Rem. AVèNEMENT, employé absolument et sans régime, ne se dit que de J. C. Dans son premier avènement, il a paru comme le Sauveur du monde; dans son second avènement, il paraîtra comme Juge des vivans et des morts. _ Quand on parle des Princes, on y joint toujours le régime de la chôse, la prép. à, comme on l' a vu dans les exemples précédens. Mde. de B... n' a pas fait cette atention. "* Lorsque ce Seigneur aprit l' avènement d' Etienne, il fut fort embarrassé. Hist. d' Angl.

AVENIR


AVENIR, v. n. adj. & subst. [2e e muet, tout bref.] Plusieurs écrivent encore advenir avec un d, quelques-uns même l' y prononcent. Il ne faut point l' écrire; encore moins le prononcer. _ Arriver par accident. Il ne se conjugue que dans les 3es persones: il avient, s' il avenoit, il avint, il est avenu, il aviendra, &c. Il est ordinairement suivi de la conjonction que, il avint que, s' il avenoit que. Il s' emploie sur-tout à l' infinitif. "Quoiqu' il en puisse avenir, quoiqu' il en avienne, quelque chose qu' il en avienne; souvent aussi au futur "il en aviendra ce qu' il pourra. On ne peut pas prévoir tous les câs qui aviendront. On voit par les exemples cités, qu' avenir s' emploie le plus souvent comme verbe impersonel.
   Dont il avient que tous les jours on voit
   Du nom d' esprit fatuité dotée,
   Et de vertu sotise étiquetée.       Rouss.
"Vous savez ce qui en est advenu, & comme quoi cette charlatanerie réussit. Linguet. "Le rayé est récalcitrant: nous ne savons pas encore ce qui en adviendra. Id. Voilà pour le style plaisant ou critique, qui est le véritable emploi de ce verbe, quoique l' Acad. n' en borne pas l' usage. Racine s' en sert dans une Tragédie, mais à l' infinitif, où il est plus suportable dans le style sérieux.
   ...Quelque malheur qu' il en puisse avenir,
   Ce n' est que par ma mort qu' on le peut obtenir.
       Mithridate.
Et Corneille _ En l' état où je suis, quoiqu' il puisse avenir,
  Je vous dois tout promettre & ne puis rien tenir. Théodôre.
  2°. AVENIR est aussi adjectif indéclinable: "les biens avenir, les biens futurs. "Des avantages incertains, avenirs. Necker. Retrancher l' s, mise mal à propos, par l' inadvertance de l' Imprimeur sans doute.
   3°. AVENIR, s. m. le temps futur. L' avenir est incertain. Qui peut répondre de l' avenir? L' homme voudroit pénétrer dans l' avenir: "il se jète sans cesse dans l' avenir, & néglige le présent.
   À~ l' avenir, adv. Ne faites plus cela à l' avenir.

AVENT


AVENT, s. m. Les quatre Dimanches qui précèdent la Fête de Noël. "Prêcher l' Avent, jeûner l' Avent; & au pluriel, les Avents de Noël. Hors delà, il faut toujours dire l' Avent; & c' est un gasconisme de dire: prêcher les Avents; le premier Dimanche des Avents. Desgr.

AVENTIERS


*AVENTIERS, adj. pl. Trév. Biens aventiers. On dit aussi adventifs ou adventices. Trév. On ne dit qu' adventifs. Les deux autres sont des barbarismes.

AVENTûRE


AVENTûRE, s. f. [2e et 3e lon. 4e e muet. On écrivait autrefois advanture; puis on a écrit adventure. On a ensuite retranché le d, qu' on ne prononçoit pas.] 1°. Accident, ce qui arive inopinément. _ Le sens de ce mot, est déterminé par l' épithète qui l' accompagne. Plaisante aventûre, fâcheuse aventûre.
   Les ridicules aventûres
   D' un amoureux en cheveux gris.       Malherbe.
  Pour avoir part en si belle aventûre. Id.
Rem. Quand il se dit seul des femmes et des filles, il se prend en mauvaise part. "Cette femme a eu plusieurs aventûres: "Cette fille est sujette aux aventûres. _ Voy. Évènement.
   2°. Hasard. "C' est grande aventûre, si je n' en viens pas à bout. En ce sens, l' emploi de ce mot est borné.
   À~ l' aventûre, adv. Errer à l' aventûre, faire toutes chôses à l' aventûre, sans dessein, sans réflexion, sans règle.
   L' art de se rendre heureux ne s' apprend point d' un maître,
   Habile seulement à ne se point connaître,
   Qui, mettant de sang froid la prudence à l' écart,
   Veut vivre à l' aventûre & mourir au hasard.
   Par aventûre et d' aventûre. Peut-être, ou par hasard. Le 1er est un peu vieux; le 2d l' est encôre davantage. Corn. L. T. L' Acad. les admet l' un et l' autre pour le style familier. "Un jour ses yeux s' étoient attachés par aventûre sur le bouquet de Verglan. Marm.
   Le chêne un jour dit au roseau:
   Vous avez bien sujet d' acuser la natûre.
   Le moindre vent, qui d' aventûre
   Fait rider la face de l' eau,
   Vous oblige à baisser la tête, &c.       La Font.
On appelle mal d' aventûre, un mal qui vient ordinairement au bout des doigts, avec inflammation et abscès. _ Diseur de bonne aventûre. Bohème et autre prétendu devin.
   Un fils qu' il aima trop, jusques à consulter
   Sur le sort de sa genitûre
   Les diseurs de bonne aventûre.       La Font.
On dit proverbialement: pousser l' aventûre jusqu' au bout; achever avec courage ce qu' on a comencé, entrepris. C' est une allusion aux Preux Chevaliers.

AVENTURÉ


AVENTURÉ, ÉE, adj. [2e longue, 4e é fer. long au 2d.] Hasardé, dit au hasard, ou mis au hasard. "Cette nouvelle est bien aventurée, cette afaire est extrêmement aventurée. _ Rousseau parlant de l' architecture des Romains, formée sur celle des Grecs, dit:
   Elle sut même enchérir sur leurs grâces,
   Mais ce ne fut qu' en marchant sur leurs traces;
   Et sans risquer ses pas aventurés,
   Dans des sentiers de leur route égarés.

AVENTURER


AVENTURER, v. act. [Avanturé, 2e lon. 4e é fer.] Hasarder, mettre à l' aventûre. Il faut aventurer quelque chôse; mais aventurer tout son bien, c' est une grande imprudence. _ On dit aussi, s' aventurer, ou seul; il ne faut pas tant s' aventurer, ou avec la prép. à et l' infinitif: "Jean s' aventura pour lors à se mettre en campagne. Hist. d' Angl.
Rem. Joubert le met au nombre des mots bas ou comiques, ou de peu d' usage. L' Acad. le met sans remarque. On peut l' employer sans crainte.

AVENTUREUX


*AVENTUREUX, EûSE, adj. [Avantu--reû, reû-ze, 2e et 4e longues.] Qui aventûre, qui hasarde. Homme extrêmement aventureux. _ L' Acad. dit qu' il vieillit; le Rich. Port. qu' il a vieilli. On peut même dire qu' il est vieux et hors d' usage.

AVENTURIER


AVENTURIER, IèRE, adj. et subst. [Avantu-rié, riè-re. 2e long. 4e dout. au 1er, long. au 2d] On le disait autrefois de ceux qui cherchaient les aventures. Aujourd' hui il ne se dit que d' un homme ou d' une femme qui n' a point de fortune, et qui vit d' intrigue. "C' est un aventurier, une aventurière. On le dit aussi d' une personne, qui avance hardiment beaucoup de chôses, le plus souvent fausses.
   D' un jeune Auteur la Mûse aventurière.       Rouss.
Il est employé là adjectivement. La Bruyère l' emploie de même et assez plaisamment, en parlant des mots nouveaux. "Combien de ces mots aventuriers, qui paroissent subitement, dûrent un temps, et que bientôt on ne revoit plus. Que d' aventuriers aujourd' hui, en ce genre, comme en tous les aûtres?

AVENU


AVENU, ÛE, adj. et participe du verbe avenir. Il ne se dit qu' avec non.
   Il n' est rien que le temps n' absorbe & ne dévôre,
   Et les faits qu' on ignôre
   Sont bien peu différens des faits non avenus.       Rouss.
* Autrefois on l' employait sans négative. "Le Poëte, pour traiter des chôses avenues, ne seroit pas estimé moins Poëte. Acad. Sentimens sur le Cid. _ L' Acad. ne le met plus que comme participe, avec le v. être, auxiliaire de son verbe, excepté avec non. "Ce qu' on craignoit est avenu; les chôses qui sont avenûes. "Il faut regarder cela comme une chôse non-avenûë.

AVENûE


AVENûE, s. f. [2e e muet, 3e long, 4e muet.] Passage, endroit, par où on arrive en quelque lieu. "Les avenûes d' un Palais, des montagnes. "Les avenûes de cette ville sont belles. 2°. Allée d' arbre au-devant d' une maison.

AVÉRÉ


AVÉRÉ, ÉE, adj. [2e et 3e é fer. long à la 3e du 2d] Vérifié, déclaré vrai. Il suit toujours le substantif; Faits avérés, histoires avérées. _ M. Cerutti l' emploie substantivement. Franchissez-vous les bornes de l' avéré et du vraisemblable? Ce substantif est une nouveauté.

AVÉRER


AVÉRER, v. act. [2 é fermés.] Faire voir qu' une chôse est vraie. Acad. Vérifier, prouver ou trouver qu' une chôse est vraie. Trév. "On a avéré le fait; on ne peut l' avérer.

AVERSAIRE


*AVERSAIRE, AVERSE, AVERSITÉ; voy. ADVERSAIRE, ADVERSE, ADVERSITÉ. _ Th. Corneille dit, que tout le monde prononce aversaire, mais qu' on fait entendre le d dans le mot adversité. Richelet. Aujourd' hui on écrit et l' on prononce le d dans ces trois mots. On dit averse, mais non avec partie, et comme adjectif. On le dit comme substantif.
   AVERSE, s. f. [2e è ouv. 3e e muet.] Pluie subite et abondante. "Il essuya une averse. Style familier.
   A-verse, adv. Abondamment: "Il pleut à-verse. Ce mot n' est usité que dans cette phrâse du styl. famil. _ L' Acad. le met sous la lettre V, au mot verse.

AVERSION


AVERSION, s. f. [Avèr-cion et en vers ci-on, 2e è ouv. tout bref.] Haine, antipathie. Prendre en aversion. "Vous avez pris le monde en aversion; c' est un travers. _ Aversion, se dit aussi pour objet de l' aversion: "J' avois pris un autre Commis, qui étoit l' aversion de ma femme. Mariv. On dit plus familièrement en ce sens, bête d' aversion. L' ingratitude est ma bête d' aversion. Anon.
   AVERSION régit pour, et non pas à. "Votre aversion aux sciences, Anon. Dites, pour les sciences. "L' aversion que j' ai à ces titres ambitieux. Vaug. Il falait pour ces titres, etc.~

AVERTI


AVERTI, IE, adj. On dit: je suis bien averti, c. à. d. bien informé, ou informée de ce qui se passe. _ Subst. Dans cette phrâse proverbiale: "Un averti en vaut deux. Celui qui est instruit, a un grand avantage sur celui qui ne l' est pas.

AVERTIN


*AVERTIN, s. m. Vertigot, caprice; Frénésie. Trév. Maladie de l' esprit qui rend opiniâtre, emporté, furieux. = Il est vieux. Acad. _ Rousseau l' a employé, mais c' est dans le style satirique.
   O le plaisant avertin
   D' un fou du pays latin,
   Qui se travaille et se gêne,
   Pour devenir à la fin
   Sage comme Diogène.

AVERTINEUX


*AVERTINEUX, EûSE, adj. Qui est ataqué de l' avertin. Trév. _ L' Acad. ne le met pas.

AVERTIR


AVERTIR, v. a. Doner avis; informer de..... Il régit de: "Il m' a averti, ou je suis averti de tout. Avertissez-le de l' accident qui est arrivé. _ Un Auteur très-moderne met sur pour de: "Les Sauvages ont la vûe, l' odorat, l' ouïe, tous les sens d' une finesse, d' une subtilité, qui les avertit de loin sur leurs dangers ou sur leurs besoins. Rainal. Ce régime n' est pas aprouvé par l' usage. _ Quelquefois avertir ne régit que l' acusatif: Il faut avertir les Parens. _ Pour les verbes, il régit que avec l' indicatif, quand il est question du passé, et quand il signifie simplement informer; et il régit de avec l' infinitif, quand il est question du futur, et qu' il a en quelque sorte le sens d' ordoner. Avertissez-le qu' on est venu, qu' on viendra bientôt: Avertissez-le de venir. "On l' a averti de prendre garde à lui.
   Racine a employé ce verbe et ce régime dans un sens très-beau, quoiqu' un peu éloigné du sens ordinaire.
   Soufrez quelques froideurs, sans les faire éclater,
   Et n' avertissez pas la Cour de vous quiter.
dit Burrhus à Agripine dans Britannicus.
   On dit proverbialement, avertir quelqu' un de son salut, pour, lui doner un avis important~.

AVERTISSEMENT


AVERTISSEMENT, s. m. [Avèrticeman, 2e è ouv. 4e e muet, tout bref.] Avis qu' on done à quelqu' un de quelque chôse, afin qu' il y prène garde. Avertissement salutaire, paternel. Doner, recevoir un avertissement.
   Rem. AVERTISSEMENT se dit fort bien à l' égard des moeurs et de la conduite, dit Bouhours. Aparemment qu' on en doutait de son temps.
   On a mis long-temps Avis au Lecteur à la tête des Livres, et l' Académie ne le condamnait pas. Mais aujourd' hui, dit la Touche (dès le comencement du siècle) les Écrivains polis mettent toujours Avertissement tout seul. _ L' Acad. met encôre dans la dern. édit. Avertissement au Lecteur, ou Avertissement tout court. Le 1er est vieux; et il ne se dit plus que dans le style figuré et proverbial, lorsqu' en parlant d' un accident, ou de quelque autre chôse qui peut engager à se tenir sur ses gardes ou à se corriger, on dit avis ou avertissement au Lecteur.

AVEU


AVEU, s. m. [2 br. A-veu. Plur. aveux, 2e lon. a-veû. Devant une voyelle, a-veûz.] 1°. Reconnoissance verbale, ou par écrit, qu' on a faite de quelque chôse. _ Il difère de la confession, dit l' Ab. Girard, en ce que celle-ci tient un peu de l' acusation, et que l' autre supôse l' interrogation. En confession on s' acûse soi-même; en avouant, on répond à celui qui nous interroge. On avoûe ce qu' on a eu envie de cacher: On confesse ce qu' on reconait avoir eu tort de faire. "La question fait avouer le crime: le repentir le fait confesser: on avouë la faute qu' on a faite: on confesse le péché dans lequel on est tombé.
   2°. Aprobation, Consentement. "Je ne veux rien faire sans votre aveu. "Il a l' aveu de ses parens pour son mariage. = 3°. De l' aveu de, ou de son aveu, a ce 2d sens; Je l' ai fait de votre aveu, de l' aveu de mon père. Il signifie aussi, Témoignage et opinion: "Il a très-bien réussi, de l' aveu de tout le monde.
   Homme sans aveu; vagabond, qui n' a persone de qui il se réclame.

AVEUGLE


AVEUGLE, adj. et subst. m. et f. [A--veu-gle, 2e br. 3e e muet.] Qui est privé de l' usage de la vuë: Homme aveugle, femme aveugle. _ Subst. Un pauvre aveugle, une pauvre aveugle. _ Au figuré, il se dit des persones et des chôses. "Les amans sont aveugles dans leurs desirs. Passion aveugle, obéissance aveugle.
   Rem. 1°. Aveugle, au figuré, se place indiféremment devant ou après le substantif. Desirs aveugles, aveugles desirs; soumission aveugle, aveugle soumission: "Les aveugles transports de la passion. "L' Être Suprême donne des lois à l' univers... et en dirige les aveugles mouvemens. Jér. Déliv. _ Au propre, il suit toujours. Au figuré même, il aime à suivre dans le discours ordinaire: il ne se plait à précéder que dans le discours élevé. = Aveugle, au propre, se dit sans régime; au figuré, il régit la prép. sur: "Aveugle sur ses défauts, clairvoyant sur ceux d' autrui. La Rue. emploie la prép. à: "Vous servez Dieu, comme s' il étoit aveugle à vos infidélités, indiférent à vos ingratitudes. La symétrie des régimes en produit un grand nombre d' irréguliers.
   2°. Suivant Bouhours, on doit dire, faire les chôses en aveugle, et non pas à l' aveugle. Racine a confirmé cette remarque par son exemple.
   Puisqu' après tant d' éforts ma résistance est vaine
   Je me livre en aveugle au transport qui m' entraîne.
   Quelle fureur inquiète
   Parmi vos ennemis en aveugle vous jette?
Le 1er exemple est plus régulier: en aveugle doit se raporter au sujet de la phrâse. _ L' Auteur des Réflexions sur l' usage présent de la Langue, aprouvait à l' aveugle. Le P. Bouhours le condamnait, et il avait pour lui l' Académie d' alors, qui ne l' avait point mis dans son Dictionaire. Elle l' a mis depuis, mais elle avertit qu' il ne se dit qu' au propre, pour dire aveuglément. Elle ne met point d' exemple de, en aveugle, au figuré. _ Ce même Auteur des Réflexions trouve cette diférence entre à l' aveugle (ou plutôt en aveugle) et Aveuglément, adv. que le 1er marque un défaut de conaissance, faire une chôse en aveugle, et l' autre le dérèglement d' une passion; suivre aveuglément son caprice.
   M. Beauzée admet à l' aveugle, et le comparant avec aveuglément, y trouve à-peu-près la même diférence. Le 1er, dit-il, indique un défaut d' intelligence, le 2d un abandon des lumières de la raison; qui agit à l' aveugle, ne voit pas; qui agit aveuglément, ne veut pas voir. "Soumettre aveuglément sa raison aux décisions de la Foi, ce n' est pas croire à l' aveugle, puisque c' est la raison même, qui nous éclaire sur les motifs de crédibilité.
   Juger, ou décider comme un aveugle des couleurs; c. à. d. sans conoissance. Crier comme un aveugle qui a perdu son bâton, jeter les hauts cris. Expressions proverbiales. Voy. BORGNE.

AVEUGLEMENT


AVEUGLEMENT, s. m. [A-veu-gle--man, 3e e muet, tout bref.] Privation du sens de la vûe. _ Trouble et obscurcissement de la raison.
   Rem. La Touche dit que ce mot n' est guère en usage au propre; il avoue pourtant que l' Acad. le dit: "Il fut guéri de son aveuglement. Il ajoute que ce terme est très-nécessaire. Fontenelle dit du célèbre Cassini, devenu aveugle à 80 ans: "Son aveuglement ne lui ôta rien de sa gaieté _ L' Acad. dans la dern. édit. avertit qu' on dit aujourd' hui cécité au propre. Voy. CÉCITÉ.
   AVEUGLEMENT se dit élégamment, au figuré, de la raison prévenuë et ofusquée par les nuages des passions. Quel aveuglement! Étrange aveuglement! "Il faut être dans un grand aveuglement pour...

AVEUGLÉMENT


AVEUGLÉMENT, adv. [Il se distingue d' aveuglement subst. par la 3e, qui est un e muet dans celui-ci, un é fer. dans celui-là.] Il n' est en usage qu' au figuré. Sans rien considérer, sans rien examiner. Obéir aveuglément; courir aveuglément au combat, au danger, etc. Voy. À~ l' aveugle, et en aveugle, au mot AVEUGLE, Rem. n°. 2°.

AVEUGLER


AVEUGLER, v. a. Rendre aveugle. Il se dit au propre. "L' éclat du soleil ou de la neige a aveuglé plusieurs persones; et plus souvent, au figuré: "La passion l' aveugle, la trop grande prospérité aveugle les hommes, etc. _ Il est aveuglé~ par son amour propre.
   Rem. AVEUGLER n' a que le régime direct (l' acusatif.) La Rue lui done un 2d régime, le datif (la prép. à.) "Les passions l' aveuglent à toute autre réflexion; c. à. d. lui font fermer les yeux à... Si ce verbe avait un 2d régime, ce serait plutôt la prép. sur Voy. AVEUGLE. Rem. n°. 1°.
   Être aveuglé, régit ordinairement par. Il peut régir aussi en.
   La fortune des Rois n' a rien qui m' éblouisse;
   J' en regarde l' éclat sans en être aveuglé.
       Campistron.
Aveuglé se dit aussi adjectivement et sans régime.
  Seigneur, n' exauce pas
   Les funestes desirs de mon âme aveuglée.
      L' Ab. Têtu.
Ou la prép. de: "Aveuglé de l' éclat d' une fausse gloire.

AVEUGLETTE


AVEUGLETTE, (à l' ) adv. On a dit autrefois à aveuglette, ou à aveuglettes; mais l' usage a ensuite ajouté l' article: aller à l' aveuglette, chercher quelque chôse à l' aveuglette; à tâtons. Style familier.

AUGE


AUGE. La pénult. est longue; Aûge, saûge, etc.

AûGE


AûGE, s. f. AUGÉE, s. f. AUGET, s. m. [Ôge ogé-e, ogè, 1re lon. au 1er, 2e e muet au 1er é, fer. et long au 2d, è moy. au 3e.] Aûge est, 1°. Pierre, ou pièce de bois creusée, qui sert à doner à manger et à boire aux chevaux et autres animaux domestiques. = 2°. Grand vaisseau de bois, où les Maçons délayent leur plâtre. _ Augée; ce que peut contenir une aûge de maçon. _ Auget, petit vaisseau où l' on met la mangeaille des petits oiseaux qu' on nourrit en cage.

AUGMENTATEUR


*AUGMENTATEUR, s. m. Celui qui augmente. Trév. L' Acad. ne met pas ce mot. Il ne peut être bon qu' en parlant de celui qui fait de grandes augmentations à un livre, sur-tout à celui d' un aûtre Auteur.

AUGMENTATIF


AUGMENTATIF, IVE, adj. [Ogman--tatif, tîve, 2e lon. 4e lon. au 2d.] Terme de Gramaire. Noms augmentatifs, comme lourdaud, savantasse, etc. Il ne faut se servir que des mots de cette espèce, qui sont reçus. Il n' est pas permis d' en créer de nouveaux, excepté dans le style burlesque, ou marotique, qui a de grands privilèges. _ Particules augmentatives, qui servent à augmenter le sens des noms et des verbes, comme très, fort, etc.
   AUGMENTATIF ne se dit qu' en Gramaire. Dans le Dict. de Trév. on cite une phrâse, qui le ferait croire en usage dans la Physique. "Les poulies sont augmentatives de la force dans les machines. On ne cite point d' autorités.

AUGMENTATION


AUGMENTATION, s. f. AUGMENTER, v. a. [Ogmanta-cion, ogmanté, 2e lon.] L' augmentation est l' acroissement, l' addition d' une chôse à une autre de même natûre. Augmenter, c' est donc acroître, rendre une chôse plus grande, en y joignant une autre chôse du même genre. _ Augmentation, régit la prép. de: Augmentation de gages, de fortune. Pour la gloire, l' honeur, la vertu, on dit plutôt, acroissement. _ On dit aussi, augmentation, sans régime; Faire des augmentations à.... Payer les augmentations.
   AUGMENTER est actif, neutre et réciproque: Augmenter son revenu, sa maison, son train, sa dépense. Augmenter le prix, le nombre. _ Neutre, il a pour sujet ou les chôses: ses biens augmentent tous les jours; ou les persones: "Il augmente en bien et en honeur. _ Recipr. Son mal s' augmente, ses richesses s' augmentent.
   Rem. AUGMENTER et GROSSIR, neutres, valent mieux que s' augmenter et se grossir, réciproques. "Les maladies nous gâgnoient, la mortalité s' augmentoit tous les jours. Voy. d' ANSON. _ Augmentoit aurait mieux valu.
   Le passif, être augmenté est moins bon aussi qu' augmenter, neutre; sur-tout avec les persones pour sujet (pour nominatif.) * L' Auteur de la vie de Bossuet dit qu' il étoit augmenté de dignité dans l' Église de Metz. Je crois que le neutre valait mieux là que le passif, sur-tout avec l' ablatif (la prép. de) pour régime, et qu' avoit augmenté, serait plus exact. Que si l' Auteur a cru qu' augmenter, neutre, prend l' auxil. être, il s' est trompé, et la faute est toujours la même, _ * Marsolier done à l' actif la prép. à (le datif) pour 2d régime. "L' autorité du Prince leur augmentoit le courage. L' usage n' admet pas ce régime. Dites: Augmentoit leur courage. _ Voy. AGGRANDIR.

AUGURAL


AUGURAL, ALE, adj. Qui apartient à l' augûre. Cet adjectif suit ordinairement le substantif, sur-tout au masc. Bâton augural, robe augurale. _ Le fém. pourrait plutôt précéder, mais seulement en vers et dans le discours élevé; "l' augurale dignité, l' augurale gravité. _ Augurale robe sonerait mal.

AUGûRE


AUGûRE, s. m. [2e lon. Brébeuf, Rollin et l' Ab. Guénée écrivent augur sans e: c' est une mauvaise ortographe.] Il se dit et du signe et de l' interprète. Bon, mauvais, funeste augûre. Augûre favorable. Prendre à bon augûre, à mauvais augûre, sans article. _ Dignité d' Augûre: l' Augûre fut consulté, etc.
   On dit figurément qu' une chôse est de bon, de mauvais augûre, suivant qu' elle fait espérer du bien, ou craindre du mal. _ Je souhaite que cela soit vrai: J' en accepte l' augûre.
   Il est des Dieux plus doux, plus équitables,
   Qui, vous sauvant de leurs mains redoutables;
   Sauront pourvoir à votre sureté.....
   Soit. Je veux bien en accepter l' augûre.
       Rousseau.
En style proverbial, on apelle oiseau de mauvais augûre, un homme dont la présence est odieûse, et sur-tout celui, qui aporte une mauvaise nouvelle, ou dont l' arrivée n' anonce rien que de funeste. L' Acad. dit aussi, Oiseau de bon augûre, de celui dont l' arrivée anonce une nouvelle agréable; mais celui-ci est moins usité.

AUGURER


AUGURER, v. a. [Oguré, l' u est bref devant la syllabe masculine. Nous augurons, j' augurais, augurant, etc. Il est long devant l' e muet; J' augûre, j' augûrerai, etc.] Tirer une conjectûre, un augûre, un présage de... Il régit l' ablatif, et sur-tout la prép. en: "Ôse, sôufre, espère, et j' augûre tout de tes éforts. Jér. Dél. "J' en augûre bien: J' en augure mal. Là, il est employé neutralement. "Je n' en augure rien de bon: qu' en peut-on augurer? Là il est actif.

AUGUSTE


AUGUSTE, adj. Grand, respectable, digne de vénération. [Ogus-te, 3e e muet tout bref.] Il se place devant, ou après le substantif: Cet auguste Sénat, ce Sénat auguste; devant l' auguste Majesté du Seigneur, devant son trône auguste. _ On ne peut jamais pécher en le faisant suivre: il peut quelquefois, en précédant, former une inversion dûre et mal sonante; comme Auguste Prince, auguste temple, augustes faits, etc. L' Acad. met en exemple, cet auguste Prince. Mais je m' en raporte aux oreilles délicates. Rousseau dit aussi.
   Rome enfin ne voyoit dans ces augustes Princes
   Que des fils généreux.
Mais au pluriel, l' inversion est moins choquante. _ Avec un mot començant par une voyelle, auguste fait mieux devant: "Cette auguste assemblée.
   La mort de ses rigueurs ne dispense persone,
   L' auguste éclat d' une Courone
   Ne peut en exempter nos Rois.
       Maucroix.

AUGUSTEMENT


*AUGUSTEMENT, adv. D' une manière auguste. Trév. Cet adverbe est peu usité. Il n' est ni dans le Dict. de l' Acad. ni dans celui de Joubert, ni dans le grand Richelet, ni dans le Rich. Port., ni dans d' autres Dictionaires que j' ai consultés. Trév. le met sans exemple et sans citation d' Auteurs.

AVICTUAILLEMENT


*AVICTUAILLEMENT, AVICTUAILLER. Voy. AVITAILLEMENT, AVITAILLER.

AVIDE


AVIDE, adj. Qui désire quelque chôse avec beaucoup d' ardeur. Au propre, il se dit sur-tout du désir immodéré du boire et du manger. "Il est si avide qu' il dévôre au lieu de manger. Il se dit sans régime. On ne dit point avide de pain, de viande; comme on dit au figuré, avide du bien d' autrui, avide de gloire, d' honeur, de louanges; avide de savoir: "Catilina avide du bien d' autrui, et prodigue du sien. "La natûre est aussi ingénieûse qu' avide d' inspirer les moyens d' être heureux. Anon.
   Cet adjectif suit ou précède le substantif, au goût du Poète ou de l' Orateur, guidé par le goût et l' oreille: Hommes avides: l' avide soif des richesses. Avides hommes sonerait mal: La soif avide des richesses n' irait pas si bien, parce que des, régime de soif et non pas d' avide, en serait plus éloigné.

AVIDEMENT


AVIDEMENT, adv. Avec avidité. Manger avidement, courir avidement aux honeurs.

AVIDITÉ


AVIDITÉ, s. f. [4e é fer. tout bref.] Désir ardent et insatiable. Il se dit comme avide, au propre et au figuré, et avec le même régime. Manger avec avidité: l' avidité des biens, des honeurs; l' avidité du gain, des richesses, l' avidité de s' enrichir.
   Concupiscence, cupidité, avidité, convoitise, (syn.) La concupiscence est la disposition habituelle de l' âme à desirer les biens, les plaisirs sensibles: la cupidité en est un desir violent: l' avidité en est un desir insatiable: la convoitise en est un desir illicite. Beauzée. La 1re n' est qu' un penchant involontaire; les autres sont des actes de la volonté. Voy. ces mots.

AVILIR


AVILIR, v. a. Rendre vil, abject, méprisable. Il se dit plus au figuré qu' au propre. On ne dit guère, avilir la marchandise; les denrées sont avilies. Mais on dit élégamment, laisser avilir sa charge. Vous avilissez votre nom, votre naissance par des sentimens honteux et une conduite déshonorante. "En voulant les avilir (les Ministres de la Religion) il relève leur gloire. Ann. Litt. _ Son emploi le plus ordinaire est avec le pron. pers. s' avilir. "Il s' est avili, déshonoré par ses bassesses. _ Il régit quelquefois la préposition à devant l' infinitif. Gresset, parlant des froids censeurs, des Zoïles secrets, dit à sa Mûse:
   Et sans jamais t' avilir à répondre,
   Laisse au mépris le soin de les confondre.

AVILISSANT


AVILISSANT, ANTE, adj. [Avili-san, sante, 4e lon.] Qui avilit. Je ne sais pas pourquoi les Dictionaires ne mettent pas ce mot si beau, si sonôre, si utile, et que l' usage a adopté depuis long-temps. "De-là... la dépendance avilissante des petits et l' endurcissement inhumain des Grands. Linguet. "Les Lois ont fixé le nombre des lignes, qui doivent entrer dans une page, celui des lettres, qui doivent entrer dans une ligne: précaution avilissante! etc. Id.

AVILISSEMENT


AVILISSEMENT, s. m. [Aviliceman. 4e e muet.] L' état d' une chôse avilie. L' avilissement d' une dignité, d' une charge. "Il est tombé dans un grand avilissement.

AVINÉ


AVINÉ, Voy. ENVINÉ. On dit d' un homme, qui est acoutumé à boire beaucoup, qu' il est aviné, que c' est un corps aviné.

AVINER


AVINER, v. a. Imbiber de vin. Aviner une cuve, des futailles.

AUJOURD' HUI


AUJOURD' HUI, adv. de temps. [O-jour--dui.] Autrefois on écrivait aujourd' huy avec un y grec, mais sans sujet. _ Il signifie le jour où l' on est: "Il arivera aujourd' hui. Il fait froid aujourd' hui; il a plu tout aujourd' hui. La Fête, le Saint d' aujourd' hui, etc.
   Rem. 1°. Il faut prononcer aujourd' hui, et non pas aujord' hui, comme prononcent quelques-uns, sur-tout dans le haut Dauphiné. _ On dit au Palais, cejourd' hui.
   2°. Cet adverbe est traité comme un nom, et il a tous les cas des noms. Nomin. Aujourd' hui ressemble à hier. Génit. "Le temps d' aujourd' hui ne ressemble à pas celui d' hier. Dat. On a remis l' afaire à aujourd' hui. Accusat.: j' aime mieux pour cette opération, aujourd' hui que demain. Ablat. Ce n' est pas d' aujourd' hui que je vais, etc. "C' est un garçon que nous avons d' aujourd' hui. Mariv.
   3°. AUJOURD' HUI se place indiféremment, selon le besoin, devant ou après le verbe; jamais entre l' auxiliaire et le participe; aujourd' hui j' irai; j' irai aujourd' hui; je suis allé aujourd' hui, ou aujourd' hui je suis allé, et non pas je suis aujourd' hui allé
   4°. Faut-il dire, jusqu' à aujourd' hui, ou jusqu' aujourd' hui? Vaugelas raporte les deux sentimens, et ne décide rien. Th. Corneille et l' Acad. étaient pour jusqu' à aujourd' hui. On le dit ainsi en prôse, disait-elle, comme on dit, jusqu' à hier, jusqu' à demain: mais il est permis aux Poètes de dire jusqu' aujourd' hui, sans quoi, à cause de l' hiatus, ils ne pourraient jamais user de cette expression. Dans la dern. Édit. elle a retranché cette remarque, et ne done d' exemple que de, jusqu' à aujourd' hui. M. de Vailly se décide pour le 2d, et la raison qu' il en done c' est l' analogie; on doit dire jusqu' aujourd' hui, comme on dit jusqu' ici, jusque-là, jusqu' auprès: mais l' analogie ne me parait pas juste, parce que ces adverbes ici, là, auprès, ne sont pas susceptibles d' être précédés par la prép. à, comme l' est aujourd' hui. L' Acad. cite pour le sentiment contraire des exemples plus analogues, jusqu' à hier, jusqu' à demain. _ Une meilleure raison pour jusqu' aujourd' hui, serait, ce me semble, que l' article est déjà renfermé dans ce mot, au jour d' hui: pourquoi donc le répéter?
   5°. AUJOURD' HUI se dit aussi d' un temps indéterminé.
   Aujourd' hui sur le trône, et demain dans les fers.,
   Aujourd' hui dans un casque, et demain dans un froc.
       Boil.
Il signifie encôre le siècle présent. "C' est l' usage d' aujourd' hui "On ne vit plus aujourd' hui, comme on faisait autrefois.

AVIRON


AVIRON, s. m. Sorte de rame, dont on se sert pour faire aller les bateaux dans les rivières. Manier l' aviron, coup d' aviron; aller à force d' avirons.

AVIS


AVIS, s. m. [Avi, et devant une voyelle aviz, 2 brèves.] 1°. Opinion, sentiment. Dire son avis. Être d' un tel avis, du bon avis: Il est toujours d' un avis singulier. _ Il se dit sur-tout des Juges. Prendre les avis, aller aux avis. = 2°. Conseil, Délibération. Prendre avis de... Les Avocats ont doné leur avis. = 3°. Avertissement. Doner avis de ce qui se passe; recevoir avis de Paris, etc. = 4°. Conseil: avis amical; avis paternel, charitable. En ce sens, il se met ordinairement au pluriel. "Je lui ai souvent doné de bons avis. Il a mal reçu les avis que je lui ai souvent donés: "Il a profité de mes avis. L' Acad. ne le met point en ce sens, qui est très-fort d' usage.
   Rem. 1°. Ce mot, dit La Touche, va ordinairement au reproche et à la réprimande, ou du moins à une instruction, qui regarde les moeurs. Cependant on dit, une lettre d' avis, (n° 3°) des doneurs d' avis; je lui ai doné avis de ce qui se passe. _ Voyez AVERTISSEMENT. _ Avis, sentiment, opinion. Voy. OPINION.
   2°. On dit, doner avis, avoir avis, prendre avis, sans article. Pour les deux premiers, il n' y a pas de dificulté: mais le 3e. ne se dit de la sorte que dans un sens indéfini: quand il est question d' avis en particulier, on doit dire, prendre l' avis. "Xerxès étoit venu à la flotte pour prendre avis de ses Capitaines. Rollin; c' est-à-dire, pour les consulter: Là, prendre avis, va fort bien; mais quand on veut dire qu' on recueille les avis; il faut dire, prendre les avis. _ Demander exige l' article; demander l' avis, et non pas demander avis.
   3°. Être d' avis (n°. 1°.) régit de et l' infinitif, ou que et le subjonctif. "Je ne suis pas d' avis de faire cette démarche; je suis d' avis que vous la fassiez. Le premier régime se met quand le verbe régi se raporte au sujet de la phrâse (au nominatif du v. être d' avis.) Le second quand il ne s' y raporte pas. Il régit aussi la prép. de devant les noms. "Volsey... n' étoit pas d' avis du mariage. Hist. d' Angl.
   4°. Doner avis régit le datif de la pers. l' ablatif de la chôse: "On lui a doné avis de l' arrivée de son vaisseau à Bordeaux. _ Il régit aussi que et l' indicatif, quand le sens est afirmatif; et le subjonctif, quand il est négatif ou exprimant le doute. "On lui a doné avis que les marchandises sont arrivées; on ne lui a pas même doné avis qu' elles soient expédiées; lui a-t-on doné avis qu' elles soient en chemin? _ Recevoir avis a les mêmes régimes, la prép. de et la conjonct. que.
   * 5°. On disait autrefois, il m' est avis que, pour, il me semble que, etc. "Toutes les fois que je me représente le visage de l' une et de l' autre, il m' est avis que celui de ma fortune change. Voiture.
   * 6. On mettait autrefois, Avis au Lecteur à la tête des Livres: aujourd' hui on met Avertissement; et Avis au Lecteur ne se dit plus que proverbialement, pour dire, prenez garde à vous, cela vous regarde, etc. Voy. AVERTISSEMENT. _ * L' Acad. dit encôre, non pas qu' on donait, mais qu' on done ce titre à une petite préface, etc. Assurément cet usage s' est entièrement perdu, et il paraîtrait aujourd' hui ridicule, à moins que ce ne fût une Préface burlesque.
   * Sur les bords de la Garone, plusieurs disent une avis, pour une vis. Desgr.

AVISÉ


AVISÉ, ÉE, adj. [Avizé, zé-e, 3e é fer. long au 2d.] Prudent, circonspect. Acad. Éclairé dans la conduite de ses affaires. Trév. Homme sage et avisé: "Il est fort avisé.

AVISER


AVISER, v. a. [Avizé, 3e é fer. la 2e est brève devant la syll. masc. nous avisons, j' avisai, avisant, etc. Elle est longue devant l' e muet, j' avîse, j' avîserai, etc.] 1°. * Doner avis, conseil, etc. Il est vieux en ce sens: il ne s' est conservé que dans ces Proverbes. "Un fou avise bien un sage: "Un verre de vin avise bien un homme. = 2°. * Apercevoir. Il est encôre vieux en ce sens: L' Acad. se contente de dire, qu' il est familier.
   Quand notre hôte charmé m' avisant sur ce point,
   Qu' avez-vous, me dit-il, que vous ne mangez point?       Boil.
  Si pour mon infortune il ne m' eût avisé.
      Mol.
Nous avisâmes un élan, qui couroit devant nous. La Martinière.
   Il avise un mûrier tout aussi sec encôre
   Que dans les froids les plus cuisans.
       La Motte.
L' Ab. Desfontaines condamne ce mot dans le Dict. Néol. _ Vaugelas dit qu' il est bâs et de la lie du Peuple: la critique est sévère. Ainsi, dit-il, au lieu de dire: il avisa un homme sur une tour, il faut dire, il découvrit (ou il aperçut) un homme, etc. _ 3°. Neutre. Faire réflexion à, faire atention, prendre garde. Celui-ci s' est mieux soutenu, mais il n' est pas du beau style; avisez à vos afaires, avisez y. "Quand ils reconnoîtront quel est l' endroit où il y a erreur, nous aviserons à l' autre. Bossuet. = 4°. Le vrai emploi de ce mot est avec le pron. pers. s' aviser. Il régit la prép. de: on ne s' avise jamais de tout, il ne s' avise de rien; ou dans le sens d' ôser: de quoi vous avisez-vous, de quoi s' avise-t-il? "Il s' avise de contrôler toutes mes actions; ou dans le sens d' imaginer: il s' avisa d' un heureux stratagème. Th. Corn.
   Rem. Bossuet lui fait régir la conjonct. que dans son sens ordinaire, de, faire atention. "Les Vaudois s' avisèrent que les Apôtres n' étoient pas seulement pauvres, mais encôre Prédicateurs. Ce régime est inusité. _ Marivaux dit aussi, avise-toi sur ce point; mais c' est une femme de chambre qui parle.
   Comme on dit c' est bien fait à vous, La Fontaine dit, c' est bien avisé à lui. Peut-être le disait-on de son temps.
   Notre maitre Mitis....
   Se niche et se blotit dans une huche ouverte,
   Ce fut à lui bien avisé.

AVITâILLEMENT


AVITâILLEMENT, s. m. AVITâILLER, v. a. [Avitâ-glieman, glié, mouillez les ll: 3e lon. aux deux, 4e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Ils expriment l' action de faire entrer des vivres dans une place.
   Rem. Trév. met avitaillement pour les places, et avituaillement pour les vaisseaux. Et ainsi d' avitailler, et d' avituailler. L' Acad. ne met que les deux premiers respectivement, et les dit des vaisseaux comme des places. Le Rich. Port. met les deux seconds en leur lieu, où il ne les aplique qu' aux vaisseaux; et les deux premiers où il suit l' Académie, de sorte que sur mer on a deux mots pour exprimer la même chôse, et sur terre on n' en a qu' un. Je crois que la distinction du Dict. de Trév. est juste et autorisée par les diférens Écrivains, qui ont parlé des afaires de terre ou de mer. Richelet met avitaillement ou envitaillement. Avitailler ou envitailler. Le Rich. Port. ne met que le premier des deux.

AVITâILLEUR


AVITâILLEUR, s. m. [Avitâ-glieur, mouillez les ll, 3e lon. 4e dout. au sing. longue au pluriel, avitâilleurs.] Marchand qui fournit les vivres et ce qui est nécessaire pour en user. Rich. Port. Ni l' Acad. ni Trév. ne mettent ce mot, qui est utile, et employé par les faiseurs de Relations.

AVIVER


AVIVER, v. a. Rendre plus vif. Chez les Charpentiers, couper le bois à vive arête. Chez les Sculpteurs, nétoyer, grater quelque figure de métal. _ M. Roucher l' emploie au figuré avec le pron. pers.
   Tout germe devant lui; tout meut et tout s' avive.
C' est-à-dire, tout prend de la vie. C' est un néologisme. Mais est-ce une heureûse hardiesse? Le temps nous l' aprendra.

AULIQUE


AULIQUE, adj. [Olike.] Il ne se dit que du Conseil Aulique de l' Empire; Cour Aulique, Conseiller aulique. _ Trév. le dit, outre cela, en général, de ce qui est de la Cour, qui concerne la Cour. Ainsi l' on dirait, les charges auliques, les intrigues auliques. En ce sens, c' est un latinisme. _ S. f. Acte que soutient dans l' Université, celui qui est reçu Docteur en Théologie.

AUME


AUME. Dans cette finale, la pénult. est longue. Baûme, paûme, etc.

AUMELETTE


*AUMELETTE ou OMELETTE. Trév. Joubert. On n' écrit plus qu' omelette. Ce mot est composé d' oeufs et de méler. Il est donc plus naturel de l' écrire avec un o.

AUMôNE


AUMôNE, s. f. [Omône, 2e lon.] Ce qu' on done aux Pauvres par charité, Il se dit sur-tout de l' argent. Faire l' aumône, doner l' aumône; doner par aumône. Vivre d' aumône; être à l' aumône; réduit à l' aumône. _ On écrivait autrefois aumosne.
   Rem. Ces expressions ne sont connues et usitées que dans le Christianisme. On ne doit donc pas, à mon avis, les employer dans l' Histoire des anciens Peuples, non plus que le terme de charité. "Cet ambitieux, qui seul nourrissoit autant de pauvres que tout l' État, se servoit du prétexte de cette aumône publique... pour faire des assemblées dans sa maison. Vertot, Révol. Rom. _ Je crois que largesse étoit là le mot propre.
   AUMôNE est aussi une peine pécuniaire, que la Justice ordone en certains cas. "Il a été condamné à une aumône.

AUMôNER


AUMôNER, v. a. Doner par aumône. Acad. Il me semble qu' il faut ajouter forcée.
* Le Rich. Port. dit, condamner à une aumône: mais ce n' est pas le sens de ce mot: aumôner exprime la peine, et non pas la condamnation. "Il a été condamné à aumôner cent écus aux Pauvres. Le Dictionaire cité dit, être aumôné. On ne le dit pas non plus, par la raison que vous venons de dire, qu' aumôner ne signifie pas condamner.

AUMôNERIE


AUMôNERIE, s. f. [Omônerî-e, 2e et 4e lon. 3e e muet.] C' est dans les Abbayes un bénéfice claustral, dont l' Office était autrefois de distribuer les aumônes. Ce n' est plus presque par-tout qu' un titre sans fonctions. _ La grande Aumônerie de France, la charge du Grand Aumônier. * Comme en Province on apèle Aumônier, les desservans de certaines Églises ou Chapelles, des Religieuses, par exemple, on apèle ces places des Aumôneries. _ Ce mot, en ce sens, n' est pas du bel usage.

AUMôNIER


AUMôNIER, IÉRE, adj. [Omô-nié, niè-re. 2e lon. 3e é fer. au 1er, è moy. et long au 2d.] Qui done, qui fait souvent l' aumône aux Pauvres. "Il est fort aumônier, elle est fort aumônière. _ * L' Acad. dit: "Dieu lui fera miséricorde; car il est grand Aumônier. Outre l' équivoque de ce mot, avec la charge de ce nom, aumônier serait là substantif, et il ne l' est pas en ce sens.
   Subst. masc. Éclésiastique, dont la fonction ordinaire est de distribuer les aumônes de ceux à qui il est attaché (Quant à ce point, ils n' ont la plupart que le titre, sans fonctions.) de leur dire la Messe, de faire la Prière du soir et du matin (autre fonction très-rare.) Acad. Officier ecclésiastique, qui sert un Prince, dans les fonctions, qui regardent le service de Dieu. Trév. Les Princes ne sont pas les seuls qui aient des Aumôniers. "Officier ecclésiastique, qui distribuë les aumônes de quelque Grand, et qui lui dit la Messe. Rich. Port. La 1re partie de cette définition n' a point de fondement. _ Il suffirait de dire, Prêtre, qui est au service d' un Grand, pour lui dire la messe. Chez le Roi, il y a le grand Aumônier, le premier Aumônier, Aumôniers ordinaires, Aumôniers de quartier, Aumôniers du commun. _ L' Aumônier d' un Évêque, d' une Princesse, d' un Seigneur. Aumônier des vaisseaux, des Régimens. Ceux-ci font toutes les fonctions de Curés en mer ou à l' armée. Aumônier d' une citadelle, etc. etc.

AUMUSSE


AUMUSSE, s. f. [Omuce, 2e br. 3e e muet.] Trév. et le Dict. Gramm. mettent aumuce. _ Fourrûre, dont les Chanoines se couvrent quelquefois la tête, et qu' ils portent ordinairement sur le bras. Acad. Porter l' aumusse. _ Nota que dans plusieurs Chapitres les Bénéficiers, qui ne sont pas Chanoines, et les Prêtres du bas choeur même portent aussi des aumusses, mais de poil et de couleur différentes. Ainsi le mot de Chanoines restreint mal-à-propos cette définition.

AUNAGE


AUNAGE, s. m. AûNE, s. f. AUNER, v. a. [Onaje, ône, oné. 1re dout. au 1er et 3e; longue au 2d.] L' aûne est une mesûre de trois pieds et huit pouces de longueur, telle qu' elle est à Paris. Acad. Mesure de longueur, en usage dans diférens pays, et qui n' est pas la même par-tout. Celle de Paris contient trois pieds sept pouces huit lignes. Dict. du Citoyen.
   AUNAGE est le mesurage à l' aûne: Faire bon aunage, l' aunage n' est pas bon.
   AUNER, mesurer à l' aûne: "Auner une pièce de toile, de drap. Auner fidèlement, auner mal.
   Rem. 1°. Quelques-uns écrivent aulne: c' est l' anciène ortographe. On écrivait aussi ausne.
   2°. Aûne a fourni à quelques locutions proverbiales: mesurer les autres à son aûne: juger d' eux par soi-même. _ Se mesurer à son aûne: se rendre justice. "Que suis-je pour être glorieux? ne faut-il pas se mesurer à son aûne? _ Il ne faut pas mesurer tout le monde à la même aûne: "Bayle dit que n' y ayant pas de proportion entre le fini et l' infini, il ne faut pas se promettre de mesurer à la même aûne la conduite de Dieu et la conduite des hommes. L' expression est bâsse pour un objet si sérieux et si respectable. _ Les hommes ne se mesûrent pas à l' aûne: il ne faut pas juger de leur mérite par leur taille. _ Au bout de l' aûne faut le drap: les chôses iront tant qu' elles pourront aller. _ Savoir ce qu' en vaut l' aûne; en avoir fait l' épreuve.
   J' en ai tâté: je sais ce qu' en vaut l' aune,
   J' aimerois mieux gueuser et demander l' aumône.
       Grégoire.
Tout du long de l' aûne; expression adverbiale et proverbiale. Beaucoup, excessivement. Molière dit tout le long, etc.
   C' est véritablement la Tour de Babylone,
   Car chacun y babille, et tout le long de l' aune.

AUNAIE


AUNAIE, s. f. AUNE, s. m. [Onê, ône, 1re dout. au 1er, longue au 2d; 2e ê ouv. au 1er e muet au 2d.] Aunaie, lieu planté d' aûnes. L' Aûne est un arbre de bois blanc, qui croît dans les lieux humides; "tuyaux de bois d' aûne; sabots d' aûne.
   Rem. On écrivait autrefois aulne à cause de l' étymologie, alnus. _ On distingue aûne arbre, de aûne mesure, par le genre. Le 1er est masculin; le 2d. est féminin.

AUNEUR


AUNEUR, s. m. [O-neur, 1re dout. 2e dout. au sing. longue au pluriel.] Officier établi pour avoir inspection sur l' aunage. Acad. Pour marquer et visiter les aûnes des Marchands. Trév. Officier qui aûne les pièces de toile, etc. et qui retire un certain droit. Rich. Port. Voilà trois définitions diférentes. Sont-ce trois Oficiers diférens? ou le même remplit-il ces trois fonctions d' inspecteur, de marqueur, de mesureur? Le vérifie qui voudra. J' ai consulté le Dict. du Citoyen: il définit Auneur: Officier ou commis préposé pour mesurer les draps, serges, toiles, coutils, etc. "Les Auneurs ne peuvent être Courtiers, ni les Courtiers ne peuvent être Auneurs, Commissionaires ou Facteurs. Ibid. Je crois qu' il faut s' en tenir à cette dernière définition dont celle du Rich. Port. se raproche en partie.

AVOCASSER


AVOCASSER, v. n. *AVOCASSERIE, s. f. [Avocacé, ceri-e, 4e é fer. au 1er, e muet au 2d, dont la 5e est longue.] Faire le métier d' Avocat. = Profession d' Avocat. Ils ne se disent que par mépris. L' Acad. et Trév. ne mettent que le verbe. Le Rich. Port. met aussi le substantif.

AVOCAT


AVOCAT, ATE, s. m. et f. Au propre, on ne le dit guère qu' au masculin, de celui qui fait profession de défendre des caûses en Justice. _ Dans le Dict. Grammat. on avertit qu' on dit Madame l' Avocate Générale, Mde l' Avocate du Roi; mais que quand il s' agit d' un simple Avocat, on doit dire; femme d' Avocat, et non pas Avocate. Tout le monde ne convient pas de cet usage: l' Acad. ne met Avocate qu' au figuré; et en parlant de la Ste. Vierge.
   Rem. 1°. Il faut dire, Avocat au Parlement, et non pas en Parlement. Vaug. Acad. Voyez Parlement.
   2°. On emploie figurément Avocat, Avocate, pour signifier celui ou celle qui prend nos intérêts en main et qui les défend. "Vous avez un bon Avocat dans cet homme; soyez mon Avocat auprès de lui. C' est en ce sens qu' on dit, que la Ste. Vierge est l' Avocate des pécheurs. _ La Touche remarque que dans ce sens, Avocate ne se dit que des persones: "Je serai votre Avocate, dira une femme; mais qu' en parlant des chôses, on doit toujours dire Avocat au masculin. "La vérité sera mon Avocat, et non pas mon Avocate. _ C' est ainsi que le disait d' Ablancourt. Après sa mort, les Editeurs de son Lucien mirent Avocate. Richelet.
   On appelle proverbialement un Avocat peu employé, Avocat sans caûse, ou Avocat de Pilate, par une froide allusion au mot de ce Gouverneur Romain: non invenio in eo causam.

AVOINE


AVOINE. Voy. AVEINE. Il n' a de pluriel qu' en parlant de l' avoine quand elle est encôre sur terre. "Les avoines sont belles; voilà un beau temps pour les avoines. Faucher les avoines.

AVOIR


AVOIR, v. act. [A-voar, 2e douteûse: elle est brève, si le mot est dans le cours de la phrâse; elle est longue, quand il la termine.] C' est le seul verbe de son espèce, qui ne prend point une s à la premiere persone du présent de l' indicatif. On écrit j' ai, quoiqu' on écrive, je suis, je fais, je dis, je lis, je vois. Voy. S.
   Conjugaison. J' ai, tu as, il a: nous avons, vous avez, ils ont. J' avois. J' eus, j' ai eu. J' aurai. Aye (ou aie), que tu ayes (ou aies), qu' il ait. Que nous ayions, vous ayiez, ils aient. Que j' eusse, j' aurois. Que j' aye eu. Que j' eusse eu. Ayant, ayant eu.
   Rem. Les sentimens sont partagés pour l' impératif et le présent du subjonctif: faut-il dire aye, (éïe) ou aie (è) soin; qu' ils ayent ou qu' ils aient soin de, etc. Les Auteurs de la Gramaire de Port Royal, et la plupart des Gramairiens qui sont venus après eux, se sont décidés pour la seconde manière: ils écrivent, que j' aie, que tu aies, qu' ils aient. _ Vaugelas, Chiflet, Bouhours, Regnier, M. de Wailly, M. Beauzée, écrivent j' aye, tu ayes, ils ayent; et leur pratique est justifiée par celle de l' Acad. Franç. dans son Dictionaire. M. Harduin, qui se range de ce côté, fortifie ce sentiment par cette observation, que ceux qui ont la réputation de bien parler, prononcent ces subjonctifs avec le double i, représenté par l' y, sur-tout à la 1re persone quand elle est suivie d' une voyelle, que j' aye eu, que j' aye été. _ Et pourquoi ajoute-t-il, se prononcerait-il autrement, que je paye, j' essaye? _ La vérification de ces deux faits n' est pas aisée. Car, comment compter les sufrages de ceux qui ont la réputation de bien parler. Est-ce à la Cour, est-ce dans la Capitale, est-ce parmi les Gens de Lettres qu' il faudra les choisir? Et puis, après les avoir comptés, il faudra les apprécier: nouvel embarras! que faire donc? Choisir de ces deux pratiques celle qui plaira le plus, en attendant que la question soit mieux examinée, et qu' elle soit décidée s' il est possible; car, où est le Tribunal qui ait ce droit? _ Dans le Dict. Gram. on a suivi la pratique de MM. de Port Royal et du grand nombre de Gramairiens qui les ont suivis. Ici, nous nous contenterons de dire, qu' aye nous paraît mieux devant une voyelle pour éviter l' hiatus, et que aie nous paraît plus doux devant une consone.
   Loin que des cris de joie ou des accens d' amour
   Ayent dans cet Hémisphère annoncé mon retour.
       Le Chev. de Langeac.
L' Imprimeur n' aurait pas dû écrire ayent: avec cette ortographe, il y aurait une syllabe de trop. _ Il faut aient.
   AVOIR, c' est posséder de quelque manière que ce soit: "Avoir du bien, une charge, un bénéfice, de l' argent, des terres, des maisons, etc., etc. _ Avoir, posséder, (synon.) Il n' est pas nécessaire de pouvoir disposer d' une chôse, ou qu' elle soit actuellement entre nos mains pour l' avoir: il sufit qu' elle nous apartiène. Mais, pour la posséder, il faut qu' elle soit en nos mains et que nous ayions la liberté actuelle d' en disposer, ou d' en jouïr. Ainsi, nous avons des revenus, quoique non payés, et nous possédons des trésors. On n' est pas toujours le maître de ce qu' on a: on l' est de ce qu' on possède.
   AVOIR, s' unit avec un grand nombre de noms employés sans article ou avec l' article. Avoir faim, soif, froid, chaud. Avoir raison, tort, envie, peur, etc. Avoir de la joie, de l' honeur, etc. Avoir la gloire, la honte de, etc., etc. suivant comme il est combiné avec ces divers noms, il a, ou il leur comunique divers régimes. Aussi, Avoir parait-il le plus souvent dans les Dictionaires, et sur-tout dans celui-ci.
   Rem. 1°. Quoique plusieurs noms régis par avoir ne prènent point d' article, comme avoir coutume, compassion, pitié, dessein, honte, et aûtres que nous avons raportés, il ne faut pas croire que cela s' étende à tous les substantifs. Les Poètes en abusaient autrefois. On trouve plusieurs exemples de cet abus dans Corneille et Molière.
   J' aurai pour vous respect jusques au monument.
"J' ai joie à vous voir; j' ai soupçon que; j' ai dépit de. "Son exemple auroît force. "Ils ont aversion pour, etc. Il faut, du respect, de la joie, du soupçon, du dépit, de la force, de l' aversion, etc. M. Moreau, qui aime à retrancher l' article après plusieurs verbes, le suprime sur-tout après le v. avoir. "La Commune, qui souvent avoit la force en main, s' acoutuma à croire qu' elle avoit autorité. "Ils n' eurent d' abord que surveillance. "Il y eut et variété dans les stipulations, et progrès dans les entreprises.
   2°. Suivant que ces noms, que régit avoir, ont l' article indéfini ou défini, ce verbe demande de ou à devant l' infinitif. On dit: avoir du plaisir, de la satisfaction, de la peine à faire, etc. et avoir le plaisir, la satisfaction, la peine de faire, etc. La phrâse suivante pèche contre cette règle, ou elle est mal apliquée. "Celui qui vous aime, ne doit pas avoir de plus grande satisfaction qu' à se soumettre à votre volonté. Saci, Imitat. de J. C. Il falait, que de se soumettre; parce que, quoique le de devant satisfaction paraisse indéfini, il est réellement défini et déterminé par le superlatif plus grande; c' est comme si l' on disait: la plus grande satisfaction que puisse avoir celui qui vous aime, est de faire votre volonté. _ Quand avoir est impersonel, il régit toujours à: "Il y a du plaisir à faire, etc.
   * 3°. On disait autrefois avoir avec des adjectifs. "Je vous ai contraire, favorable, etc. c. à. d. vous m' êtes contraire, favorable. Voiture le dit souvent.
   4°. AVOIR, régit souvent la prép. à devant l' infinitif, pour signifier la disposition, l' obligation ou la volonté où l' on est. J' ai à vous remercier; j' ai à parler à un tel, etc. Ce qu' il y a de particulier dans cette manière de parler, c' est que les noms précèdent les verbes, qui les régissent, et semblent régis par avoir: J' ai plusieurs lettres à faire, plusieurs visites à rendre. On pourrait dire aussi: j' ai à faire plusieurs lettres, à rendre plusieurs visites; mais cela ne serait pas si bien. = N' avoir que, avoir seulement.
   Je n' ai qu' à dire un mot, & vous êtes perdu.
   "S' il n' a qu' à jurer, il a gagné son procès. _ Corneille employant ce tour de phrâse, construit singulièrement l' adjectif et le substantif.
   Leur plus haute valeur n' a d' effets que sinistres.
       Attila.
Cette construction est barbare, même en vers. Il falait dire, n' a que des effets sinistres, ou de sinistres effets; le que doit toujours précéder le régime. = Avoir pour, regarder comme: "Quoiqu' ils ne se fussent pas encôre déclarés, on ne laissoit pas d' avoir leur fidélité pour suspecte. Vertot. = En avoir: "À~ qui en avez-vous? à qui voulez-vous parler ou, plus souvent, contre qui êtes-vous en colere? "À~ qui en ont-elles donc? ....Il semble qu' elles s' égorgent. Mariv. Il régit quelquefois la prép. de devant les verbes. "À~ qui en avez vous, de parler si mal de votre esprit, qui est si beau et si bon? SEV. Pourquoi, à quel propos parlez-vous si mal? etc.
   5°. Avoir une femme; être arrangé avec elle, est une expression nouvelle, qui a un mauvais sens. "Si l' on est persuadé que vous m' avez, il n' y a plus aucun remède: le public n' en revient pas. Marm. _ Dans le Méchant, Cléon dit à Valère:
   Et Cidalise! Val. Mais... Cl. C' est une affaire faite:
   Sans doute vous l' avez........
   Val. Mais, cela fût-il vrai, le dirois-je?
   Cl. Ayez-la; c' est d' abord ce que vous lui devez;
   Et vous l' estimerez après, si vous pouvez.
   6°. Avoir à être, devoir être: "puisque j' ai à souffrir, sans pouvoir l' empêcher, ou l' éviter, soufrons avec patience. "Puisque j' ai à être tourmenté d' une façon ou de l' autre, j' aimerois mieux encôre l' être auprès de vous. Voit.
   7°. AVOIR, s' emploie impersonellement avec l' adv. y; dans le sens du verbe être; il y a des persones qui; il est des persones qui, etc. _ Dès le temps de Vaugelas, on a agité la question s' il faut dire: il y eut cent hommes tués, ou de tués. Les sentimens étaient partagés. Les uns disaient qu' il falait toujours mettre le de; les autres, qu' il était mieux de le suprimer: l' usage était aussi peu uniforme que les opinions. Th. Corneille done là-dessus une règle, c' est que, quand le substantif précède~ l' adjectif ou le participe, on ne doit pas se servir de la prép. de; et qu' aûtrement il faut le mettre, sur-tout quand le pronom en tient la place du substantif. "Il y eut cent hommes tués; il y en eut cent de blessés. Dans le sens négatif, le de fait fort bien; mais il faut que l' adjectif ou le participe précède le substantif, et soit aussi près de il n' y a, qu' il est possible. "Il n' y a d' intéressant dans cette Pièce que la 3e Scène du 2d Acte. Au contraire, le de fait assez mal, quand l' adjectif ou le participe suit le substantif. "Il n' y a que les âmes vertueûses de sensibles. Volt. _ Dans le sens afirmatif, le de fait un mauvais éfet. "Il y eut dix Parlemens de convoqués sous Henri VIII, et vingt-trois séances de tenuës. Hist. d' Angl. Retranchez de. _ La plupart des Auteurs n' ont pas de règle là-dessus. Le P. d' Avrigni, par exemple, tantôt met le de, tantôt il le suprime, lors même qu' il est nécessaire: "Il y en eut six mille tués ou pris. Mettez, de tués ou de pris, à cause du pronom en, qui tient la place du mot hommes ou soldats.
   8°. Il y a, avec les noms de jour, mois, année, siècle, etc. signifie depuis. "Il y a six semaines qu' on me souhaite; il y a beaucoup de jours que j' atends, etc. Mais quand le que n' y est pas, cette expression ne vaut rien. "Je m' en vais à Brevanes.... M. de Coulanges m' y souhaite il y a six semaines. SÉV. "J' atends avec impatience, il y a beaucoup de jours, que vous me fassiez l' honneur de faire réponse à la lettre que je vous ai écrite. Voit. Il faut dire: il y a six semaines que; il y a plusieurs jours que, etc. _ Remarquez encôre que, quand cette manière de parler est à la tête du membre de la phrâse, la conjonction que est encôre plus nécessaire. "Il y a six semaines, l' Allemagne étoit en paix. Linguet. Ajoutez que: l' Imprimeur l' a sans doute oublié. = Il y en a, régit l' article indéfini de, et non pas du, ou de la. "Borax.... Il y en a de noir, de jaune et de blanc; et non pas du noir, etc.
   9°. Il y a, se joint à des noms au nominatif, et régit à et l' infinitif. "Il y a de la cruauté à lui refuser les secours qu' il demande. "Il y auroit à méconnoître nos avantages, ou une fausse modestie, ou une grande ingratitude (envers Dieu.) Pluche.
   N' y eut-il que.... Quand il n' y aurait que, etc. "N' y eût-il que cette raison; c' en est assez pour vous convaincre.
   AVOIR, est aussi verbe auxiliaire. Il sert, 1°. à se conjuguer lui-même: "J' ai eu, j' avois eu, etc. 2°. à conjuguer le verbe être, Il a été, il avoit été, etc. 3°. à conjuguer tous les verbes actifs, et presque tous les verbes neutres. "J' ai fait, j' avois trouvé; j' aurois dormi, etc.
   AVOIR, s. m. Il est peu usité, et il ne l' est que dans le style familier. "Ces Comerçans mal-avisés, qui mettent tout leur avoir sur un seul vaisseau, Ann. Litt. "Voilà tout mon avoir: c' est tout son avoir. Acad. "Il vendit tous ses biens, ramassa tout son avoir, et vint à Paris avec toute sa fortune. Les Numeros.
   Il n' avoit pas des outils à revendre.
   Sur celui-ci rouloit tout son avoir.       La Font.

AVOISINER


AVOISINER, v. act. [A-voâ-ziné, tout bref.] Être proche, être voisin. Il ne se dit que de la proximité du lieu. "Les terres qui avoisinent la forêt; les Provinces qui avoisinent la France.
   Rem. Suivant le Dict. Gramm. ce verbe est aujourd' hui entièrement hors d' usage. Suivant Vaugelas et Th. Corneille, il ne se dit plus qu' en poésie: ce rocher avoisine les cieux. Suivant le Dict. de l' Acad. il se dit au propre, en parlant des lieux. Croyons donc avec Chapelain et Charpentier, que c' est par une mauvaise délicatesse que ce mot est consacré en poésie. _ Un Auteur moderne s' en est servi au figuré. "Penser autrement, c' est avoisiner l' hérésie. _ Rousseau de Genève, l' emploie au propre avec la prép. à "Quand on avoisine à de grandes Puissances. Ce régime est contraire à l' usage.

AVORTEMENT


AVORTEMENT, s. m. AVORTER, v. n. AVORTON, s. m. L' avortement est l' acouchement avant terme. Avorter, c' est donc acoucher avant le terme ordinaire; mais en parlant des femmes, il ne se dit que d' un avortement volontaire et criminel, ou causé par un accident. _ Avorton, animal né avant terme. "Causer, procurer un avortement. "Elle prit des breuvages pour se faire avorter; elle reçut un coup qui la fit avorter. "C' est un avorton; il est fort au-dessous de la grandeur et grosseur qu' il devrait être.
   Rem. 1°. Me. de B..... (Hist. des Tud.) dit avortion, des signes d' avortion. C' est un anglicisme barbâre. Abortion. Dict. Angl.
   AVORTER, se dit ordinairement des femelles des animaux. "Les vaches avortent quand elles mangent de certaines herbes.
   2°. Le Gendre, non-seulement dit avorter des femmes, mais il fait régir à ce verbe l' ablatif (la prép. de). Albert le Grand, dit qu' une femme avorta de vingt-deux enfans; une autre de soixante-dix, et une troisième de cent cinquante. Et l' emploi du mot et le régime, sont aussi irréguliers que les faits raportés sont incroyables. Il falait dire, acoucha avant terme de, etc. Cependant, dit La Touche, quoique avorter ne se dise des femmes que d' un avortement volontaire, faire avorter se dit par raport à elles des caûses qui produisent cet éfet. "Les odeurs fortes font quelquefois avorter les femmes. _ Mais le dit-on de l' enfant? Oui, dans une Traduct. de Pline, mais je ne l' ai vu que là. "Il ne faut souvent que l' odeur d' une lampe mal éteinte pour le faire avorter. Cela est mal dit: avorter ne veut pas dire naître, mais acoucher avant terme.
   AVORTER se dit par extension des fruits. "Ces vents ont fait avorter les fruits. Remarquez que, par raport aux animaux, on le dit de la mère et non pas de l' enfant, et que par raport aux fruits, on le dit des fruits et non pas de l' arbre.
   AVORTER est aussi beau au figuré; mais il le faut employer avec sagesse et avec goût. "Vous avez fait avorter ses desseins.
   Si par bonheur cette impostûre avorte.       Rouss.
M. l' Ab. Sabatier (Trois Siècles) dit: "La Poésie doit acorder son langage avec la raison; mais la gêne du raisonement fait avorter les traits de lumière et de sentiment propres à fraper. "À~ quoi sert de s' exalter péniblement l' imagination pour produire quelques étincelles qui avortent, ou n' éblouïront qu' un instant. Je crains que faire avorter des traits et des étincèles qui avortent ne soient pas du goût de tout le monde. _ "Cette entreprise est avortée. Acad. Remarquez qu' il prend être pour auxiliaire: "Est avortée, et non pas a avorté.
   3°. AVORTON, ne se dit guère qu' au figuré, même en parlant des animaux et des fruits. _ Un avorton de mouche en cent lieux le harcèle. La Font.
   Si quelque avorton de l' envie
   Ose encôre lever les yeux.       Malherbe.
On peut absolument le dire au propre:
  Triste avorton, informe enfant,
   Rebut du néant & de l' être.Trév.

AVORTION


*AVORTION, anglicisme. Voy. Avortement. Rem. 1°.

AVOUER


AVOUER, v. act. [A-vou-é, 2e brève, mais devant l' e muet elle est longue, j' avoûe.] Au futur et au conditionel, j' avouerai, j' avouerois, il n' est que de trois syllabes. [Avouré, avourès, l' e est entièrement muet.] On pourroit même se dispenser de l' écrire.
   Hé bien! je l' avouerai, que ma juste colère
   Aime la guerre autant que la paix vous est chère.
       Racine.
  AVOUER, 1°. Confesser et reconnoître qu' une chôse est: en demeurer d' acord. Il se dit, ou avec le seul régime direct: "Il a avoué sa faute; il a tout avoué; ou avec le datif pour 2d régime: avouez-moi la vérité; je vous avoûe mon ignorance. _ Pour les verbes, il régit, ou l' infinitif sans prép. Il avoûe l' avoir fait. (L' Acad. ne met point d' exemple de ce régime.) Ou la conjonction que avec l' indicatif dans le sens afirmatif; ou le subjonctif, si le sens est négatif, ou exprime du doute: "Il avoûe qu' il l' a fait; il n' avoue pas qu' il l' ait dit: je ne sais s' il avouera qu' il en ait été complice.
   M. Moreau le fait impersonel au mode passif: "Dans un temps où il étoit encôre avoué que la Courone seule donoit un pouvoir absolu et universel.
   Rem. On dit quelquefois, je l' avoûe, comme en parenthèse; mais alors il ne régit point les verbes. * À~ l' aspect de cette tirade,  je vous l' avoue, Monsieur, que je reste immobile d' étonnement. Ann. Litt. _ Le que est de trop. Il falait,  j' avoue que je reste, etc., ou,  je vous l' avoue, Monsieur,  je reste, etc.
   On dit, dans le style familier, avouer la dette, reconaître qu' on a tort. "Avouer un enfant, un ouvrage, s' en déclarer le pere, l' auteur.
   2°. Avouer, aprouver, autoriser: j' avoûe d' avance tout ce que vous ferez en mon nom. _ Avec les persones pour régime, il régit de: "Je vous avouerai de tout ce que vous ferez.
   3°. S' avouer, dans le premier sens, régit les adjectifs et les participes: "Il s' avoue coupablë: je m' avoûe vaincu. _ Un Auteur anonyme donne ce régime à l' actif, contre l' usage. "Ce bien qu' il avoûe destiné à de bonnes oeuvres. Il faut, qu' il avoûe être destiné, etc. _ M. Fallet dit aussi, dans sa Tragédie de Tibère:
   Phorbice vous trompoit, et ce lâche en mourant
   Vient d' avouer enfin Serenus innocent.
   Là, être innocent, ne vaudrait rien: il faut dire, du moins en prôse, avouer que Serenus est innocent. La raison de la différence, est que le régime direct dans la premiere phrâse est le pronom que, qui précède le verbe; qu' il avoûe être, etc., et dans la 2de, Serenus qui suit. L' usage et l' oreille admettent l' un pour cette raison, et rejètent l' autre.
   S' AVOUER, dans le 2d sens, régit l' ablatif de la persone (la prép. de). "Il s' est avoué (renomé, autorisé) de vous.
   Rem. AVOUER, aveu, comme confesser, confession, ne se disent que des chôses vraies. Ce serait mal parler, que de dire: "Il a avoué des chôses fausses. Réflex. Il faut dire alors: il s' est accusé, il s' est vanté de chôses fausses, ou par désespoir, ou par une détestable vanité.

AUPARAVANT


AUPARAVANT, adv. [oparavan, dern. longue, le reste bref.] Il est sans régime; et il y a long-temps qu' on a dit qu' il est toujours adverbe, et qu' avant, est la préposition qui y correspond. Cependant quelques Auteurs ont manqué et manquent encôre à cette règle: Auparavant moi, auparavant de faire, etc., mettez avant. On a repris le P. Dorléans d' avoir dit: Quelque temps auparavant que l' entreprise de l' Empereur Henri éclatât. Révol. d' Anglet. "Cette Nation, tombée auparavant la conquête dans une espèce d' indiférence pour la Maison Royale. Hist. d' Angl. Le Président Hénaut a encôre dit: auparavant l' Ordonnance de, etc.; pour avant l' Ordonnance, etc. Voy. Disponible.
   On dit, sans régime: "Un mois auparavant, long-temps auparavant. Vous voulez partir, mais auparavant réglez vos afaires, etc.

AUPRèS


AUPRèS, prép. et adv. [Oprè, 2e è ouv. et long. Richelet écrit auprés avec un è fer. mauvaise orthographe, qui induit à une mauvaise prononciation.] C' est une prép. de lieu qui régit la prép. de: Sa maison est auprès de la mienne. On la fait précéder quelquefois de tout adverbe. "Crantor, voyant que j' étois tout auprès de lui, redoubla son ardeur. Télém. _ Au figuré, il se dit de l' attachement ou faveur: "Il est auprès de ce Seigneur: "Je l' ai mis auprès de mon fils. "Il est bien auprès du Roi, et fort mal auprès des Ministres.
   AUPRèS, a une espèce d' ablatif; il vient d' auprès de la place. _ * Par auprès, est populaire. "Il n' est pas besoin d' entrer dans le village, il s' agit de prendre par auprès.
   Rem. On a long-temps disputé, et l' on dispute encôre, si dans les comparaisons on doit dire, auprès, ou au prix; comme: la vie n' est rien auprès de l' honeur. Vaugelas prétend que c' est un barbarisme, et qu' il faut dire au prix, dont auprès n' est qu' une corruption. La Touche soutient au contraire, qu' on peut employer indiféremment auprès ou au prix. "La terre n' est qu' un point auprès ou au prix du ciel. Il est certain que si la raison est pour le dernier, l' usage est pour le premier, et qu' il y a peu de persones qui disent au prix en cette occasion. L' Acad. les met tous les deux, chacun en son lieu. Racine a mis auprès.
   Dites, dites plutôt, coeur ingrat et farouche,
   Qu' auprès du Diadème il n' est rien qui vous touche.
Me. de Sévigné dit, auprès d' être, pour près d' être. "La dépense du Maréchal a été tout auprès d' être ridicule, à force d' être excessive. Auprès ne fait pas mal en cet endroit: ailleurs il faut dire près.
   AUPRèS, est aussi adverbe, employé absolument et sans régime: "Je ne puis voir quoique ce soit, si je ne suis auprès, tout auprès. On dit proverbialement et bassement: si vous n' en voulez point, couchez-vous auprès.

AURE


AURE, (ôre) pénult. longue, Maûre, Epidaûre, etc.

AURÉOLE


AURÉOLE, s. f. [oréole, 2e é fer. 4e e muet, tout bref.] 1°. Cercle de lumière, que les Peintres mettent autour de la tête des Saints. = 2°. Degré de gloire, qui distingue les Saints dans le Ciel. L' auréole des Vierges, des Martyrs. Il est plus usité dans le premier sens que dans le second.

AURICULAIRE


AURICULAIRE, adj. [orikulère, 4e è moy. et long.] Il ne se dit qu' avec témoin, confession et doigt. _ Témoin auriculaire, qui a ouï de ses propres oreilles ce qu' il dépose. _ Confession auriculaire, qu' on fait en secret à l' oreille d' un Prêtre. "La confession auriculaire a toujours été pratiquée dans l' Eglise. _ Doigt auriculaire, le petit doigt, qu' on met quelquefois dans l' oreille pour se grater. L' Acad. ne met point le dernier.

AVRIL


AVRIL, s. m. [mouillez l' l finale.] Le quatrième mois de l' année. _ Il se dit figurément et poétiquement: L' avril de mes jours, le beau temps de ma vie. Richelet: En l' avril de ses ans, à la fleur de son âge. _ Doner un poisson d' Avril à quelqu' un; lui faire faire diférentes courses inutiles. Cette mauvaise plaisanterie n' a lieu que le premier d' avril.

AURôRE


AURôRE, s. f. [Orôre, 2e lon. 3e e muet.] Lumière qui paraît avant que le soleil soit sur l' horison. "Le lever de l' aurôre. "L' aurôre començait à paraître. _ Il se dit aussi pour le levant: du couchant à l' aurôre.
   Adj. Couleur de l' aurôre. Ruban aurôre, étofe aurôre.

AUSONIE


AUSONIE, s. f. [Ozonîe] Ancien nom de l' Italie, encore employé par les Poètes.
   En admirant la mélodie
   De ces voix, de ces sons parfaits,
   Où le goût brillant d' Ausonie
   Se mêle aux agrémens français.       Gresset.

AUSPICE


AUSPICE, s. m. [Il se prononce comme hospice, mais le sens est bien diférent. Les ignorans sont sujets à les confondre, comme autel et hôtel.] L' origine de ce mot est avispicium, inspection des oiseaux. On prenait les auspices par le vol, ou par le chant des oiseaux, ou par la manière de manger des poulets sacrés. "Heureux auspice; les auspices furent favorables. _ On dit figurément, sous d' heureux auspices, ayant la fortune favorable: reste du langage de la superstition. _ Sous les auspices de... sous la conduite, ou sous l' apui et la faveur de; sous ses auspices, sous vos auspices. _ M. Linguet, ou sans doute, son Imprimeur, a dit, sur les auspices, contre l' usage, qui veut la prép. sous. "C' est sur les auspices de ce nom (d' Aguesseau) à jamais mémorable, qu' il (le Parlement) a vengé la raison, la justice.

AUSSI


AUSSI, conjonction. [Oci, 1re dout.] 1°. Pareillement, de même. _ Cette conjonction copulative se met ordinairement à la fin, ou au 2d membre de la phrâse, toujours après le verbe, même dans les temps composés: "Vous le voulez, et moi aussi. "Ce n' est pas assez d' aimer ses amis; il faut aussi les servir dans l' ocasion. "Il l' a fait aussi, et non pas, il l' a aussi fait. * Bossuet dit: Qui aussi est, pour, qui est aussi. = 2°. Encôre. "Il lui a donné des hardes et de l' argent aussi. Dites lui aussi de ma part. = 3°. C' est pourquoi. Dans cet emploi, on met le pronom nominatif après le verbe. "Il a maltraité ce domestique; aussi celui-ci veut-il le quiter. "Aussi est-il certain que ceux, qui ont régné avec une sincère vertu, possèdent tout ce que la puissance des Dieux peut doner pour rendre une félicité complète. Télém. _ Dans ce sens, il doit être placé à la tête du membre de la phrâse.
   * "Pour montrer cela, il ne faloit pas un ouvrage peut-être: y trouve-t-on aussi beaucoup d' autres chôses. Mercûre. "Les autres Cachefs (Gouverneurs) en usent à-peu-près de même: il ne faut pas aussi s' étoner qu' on les fuit du plus loin qu' on les découvre. Sicard. Il falait: aussi y trouve-t-on; aussi ne faut-il pas s' étoner, etc.
   AUSSI, se dit dans le sens afirmatif, et non plus, dans le négatif. "Vous n' avez pas dîné, ni moi aussi. Gasconisme. Dites, ni moi non plus; Desgr.
   AUSSI et si ne se joignent qu' aux adjectifs et aux verbes; tant et autant qu' aux verbes et aux substantifs. Aussi et autant s' emploient dans les phrâses afirmatives; tant et si dans les phrâses négatives et interrogatives. "L' amour du prochain est aussi nécessaire dans la société pour le bonheur de la vie, que dans le Christianisme pour la félicité éternelle. * Autrefois on mettait si pour aussi. "Un nom si fameux que celui d' Othon. Vaugelas. À~ un malheur si (aussi) grand que le mien, il ne faloit pas une moindre consolation. Voit. Dans ces exemples, il falait aussi, au lieu de si. Celui-ci fait mieux dans la phrâse négative. "Rien ne la touche si sensiblement que l' intérêt de la Religion.
   Après aussi, il faut ajouter que. "Nous comencions à nous apercevoir que la contagion philosophique n' étoit ni aussi étendue, ni aussi incurable. Sabatier, Trois Siècl. Il falait ajouter qu' on l' avait cru. _ Au reste, il faut mettre que et non pas comme, ainsi qu' on le mettait autrefois.
   Rien n' est si beau comme Caliste est belle.
On dirait aujourd' hui, rien n' est aussi beau que Caliste. "Ma foi est aussi pûre comme le sujet en est beau. Trév. Dites: que le sujet, etc.
   Tant qu' a duré la guerre, on m' a vu constamment
   Aussi bon citoyen, comme fidèle amant.
       Corn. Hor.
Il falait, que fidèle amant: mais il aurait manqué au vers une syllabe. _ L' Acad. elle-même a dit autrefois, dans ses Sentimens sur le Cid: aussi bien comme; et Corneille parlant de justice:
   N' oubliez point alors que je la dois à tous,
   Et même à Théodore aussi bien comme à vous.
Et Malherbe, aussitôt comme.
   Aussitôt confondus, comme délibérés.
Le choix entre que et comme, favorisait les Poètes.
   Remarquez que lorsque aussi lie par la conj. que deux termes de comparaison, il faut placer le 1er celui qui est le moins conu. Ainsi l' on dira d' un homme célèbre par ses talens: aussi estimable pas ses vertus que par ses talens; et d' un homme, qui est plus conu par ses vertus que par ses talens: aussi estimable par ses talens que par ses vertus. Voy. Non moins au mot MOINS.
   Après la conjonct. que, on met quelque--fois le v. être précédé de le. "Une place aussi forte qu' étoit Corinthe. Rollin. Dites que l' était, etc. "Pouvoit-il être recevable à intenter une action aussi rigoureuse qu' une saisie; Me. Cochu. Dites, que l' est, etc.
   AUSSI BIEN s' emploie comme aussi, et à la tête de la phrâse, et dans les comparaisons. "Il l' a récompensé: aussi bien le méritoit-il. "Je vous le dis à vous aussi bien qu' à lui.
   On dit également aussi peu que, aussitôt que, comme aussi bien que. Aussi peu que vous, aussitôt que lui, aussi bien qu' à moi. "Vous en prendrez aussi peu que vous voudrez; je suis arrivé aussitôt qu' il m' a été possible.
   Rem. Aussitôt n' est qu' adverbe. Plusieurs Auteurs l' ont traité comme une préposition. "Aussitôt la chûte des feuilles; aussitôt le partage fait. Pluche. Aussitôt cette afaire finie. P. Barre, Hist. d' Allem. "Aussitôt la conquête; Moreau. "Les Vêpres ayant été dites aussitôt la Messe; Anon. L' usage n' admet pas cette façon de parler. On dit d' abord après, etc.
   Pour marquer la promptitude de l' exécution, on dit: aussitôt dit, aussitôt fait; aussitôt pris, aussitôt pendu. Le 2d. est proverbial.
   AUSSITôT que ne régit que les verbes: il ne régit pas les participes. L' Acad. aprouva autrefois la critique de Scuderi sur ce vers du Cid.
   J' en cache les deux tiers aussitôt qu' arrivés.
Cette façon de parler, dit-elle, n' est pas française: il falait dire: aussitôt qu' ils furent arrivés; ou bien, ils furent cachés aussitôt qu' arrivés. Dans la dernière manière, on sous-entend furent devant arrivés.

AUSTèRE


AUSTèRE, adj. AUSTèREMENT, adv. [Ostère, tèreman, 2e è moy. et long, 3e e muet.] 1°. En parlant des chôses, austère est ce qui est rigoureux, qui mortifie les sens et l' esprit. "Religion, règle, jeûne austère; vie, silence, pénitence austère. = 2°. En parlant des persones; rude, sévère: "Homme austère; mine, visage austère: vertu, doctrine austère; moeurs austères.
   AUSTèRE, Sévère, rude (synon.) On est austère par la manière de vivre, sévère par la manière de penser, rude par la manière d' agir. La molesse est l' oposé de l' austérité; le relâchement de la sévérité; les fades complaisances de la rudesse. La vie austère consiste dans la privation des plaisirs et des commodités. La morale trop sévère peut également, comme la morale relâchée, nuire à la régularité des moeurs. Le comandement rude fait haïr le Supérieur, et ne rend pas l' obéissance plus prompte, ni plus soumise. GIR. Synon.
   Nous ajouterons que sévère se dit plus ordinairement des persones, et de ce qui a raport aux persones; et austère des chôses; mais que celui-ci, apliqué aux persones, enchérit sur celui-là, et dénote quelque chôse de plus dur et de plus rigoureux.
   AUSTèRE peut marcher devant ou après le mot qu' il modifie: mais c' est à l' oreille et au goût à lui désigner la place qu' il doit ocuper. Mine austère, austère vertu. "Il s' élevoit par une austère vertu au-dessus des craintes et des complaisances humaines; Fléchier. Généralement parlant, il aime à suivre, et souvent il ferait un mauvais efet en précédant: austère mine, austères moeurs soneraient très-mal; austère homme serait insuportable.
   AUSTèREMENT, avec austérité. "Vivre, jeûner austèrement.

AUSTÉRITÉ


AUSTÉRITÉ, s. f. [Ostérité, 2e et 4e é fer.] Mortification des sens et de l' esprit. Faire, pratiquer, exercer de grandes austérités. Avec le dernier verbe on ajoute la prép. sur. _ L' austérité de cette règle. Il règne une grande austérité à la Trape.
   AUSTÉRITÉ, Sévérité. Voy. AUSTèRE. Il se dit des persones, et des chôses qui ont raport aux persones. L' austérité des Censeurs de Rome; l' austérité des moeurs, des sentimens, etc.

AUSTRAL


AUSTRAL, ALE, adj. [Ostral, ale, tout bref.] Méridional. Pole Austral, Terres Australes. _ Il n' a point de plur. au masc. On ne dit ni australs ni austraux. Il faut dire méridionaux. Celui-ci a un emploi plus étendu. L' usage d' austral est fort borné.

AUT


AUT, finale longue, Haut, artichaut. Pron. ô, artichô.

AUTAN


AUTAN, s. m. [Otan, 1er dout.] Vent du midi. Il ne se dit qu' en Poésie, et ordinairement au pluriel. "Les furieux autans.

AUTANT


AUTANT, adv. [Otan, 1re dout. 2e lon.] Il sert à marquer Égalité. "Ils en ont autant l' un que l' autre. "Il s' estime autant que son voisin. "Autant que vous pourrez en porter..
   Rem. 1°. Autant se met plus ordinairement avec les verbes, et aussi avec les adjectifs. "J' aime Horace autant que je l' admire: Il est aussi enjoué que solide. Buf. "Cet Auteur se sert d' une expression autant élégante que pleine de piété. Anon. Dites, aussi élégante, etc.
   2°. AUTANT se met après le verbe dans les temps simples et dans les temps composés, ou entre l' auxil. et le part. ou après celui-ci. "Il m' aime autant que vous: Il m' en a autant doné, ou doné autant qu' à vous.
   3°. Il ne faut pas confondre autant avec tant: le 1er s' emploie quand il y a comparaison; le 2d quand il n' y en a point. La phrâse suivante pèche contre cette règle. "Les Sciences et les Beaux Arts, qui ont été cultivés avec autant (tant) de gloire et de succès parmi les Grecs et les Romains, ont fleuri pareillement dans les Indes. "Je le préfère à tous autant (tant) que vous êtes. Hist. des Stuarts.
   4°. AUTANT se décline comme les noms. "Un homme d' autant d' esprit; Fonten. On ne peut joindre à autant de mérite autant de modestie.
   5°. AUTANT, comme aussi, doit marcher devant les noms, sur-tout en prôse: Autant de vertu que de talent. En vers, et dans le style élevé, on pourrait dire.
   Et des vertus autant que de talens.
Crébillon le place après un adjectif.
   Mais Hélénus sensible autant que généreux,
   N' a jamais su, Seigneur, braver un malheureux.
Il y a deux chôses à remarquer dans le 1er vers: autant, mal placé et mis pour aussi. Il faut passer tout cela aux Poètes; mais en prôse, il faudrait dire: aussi sensible que généreux.
   6°. AUTANT régit les noms substantifs au génitif; mais, comme les adverbes de comparaisons, il exige l' article indéfini de: "Autant de pain que de viande, et non pas autant du pain que de la viande. "Autant de l' un que de l' autre. _ En suplée pour de: "Je n' en ai pas pris autant que vous; c. à. d. je n' ai pas pris de cela autant que vous. Quelques Auteurs, ou leurs Imprimeurs, oublient cet en, qui est nécessaire pour marquer le régime: "On peut bien croire autant des Jurisconsultes. Il faut, en croire autant. "On peut dire autant des compagnies de commerce; Linguet. Certainement l' Auteur avait écrit: On peut en dire autant, etc. ou son intention était de le mettre de la sorte.
   7°. Il y a des Auteurs, qui ont dit autant comme, au lieu de autant que. "Le vrai brâve conserve son jugement au milieu du péril avec autant de présence d' esprit comme s' il n' y étoit pas.. Il faut, que s' il n' y étoit pas. Wailly.
   8°. AUTANT, servant à lier deux membres de phrâse, exige, pour la régularité du discours, que ces deux membres de phrâse aient la même construction et suivent les mêmes raports. On lit dans l' Alexandre de Racine:
   Eh bien! je l' avouerai, que ma juste colère
   Aime la guerre autant que la paix vous est chère.
On ne peut critiquer cette construction en vers, mais on la condamnerait en prôse, où il faudrait dire: J' aime la guerre autant que vous aimez la paix; ou bien, la guerre me plait autant que la paix vous est chère. Voyez une Remarque au mot MIEUX, n°. 3°.
   9°. AUTANT ne modifie point les adverb. "Ils les régalèrent autant bien que pouvait le permettre la pauvreté de leur pays. Lettr. Édif. Il falait là, aussi bien que.
   10°. AUTANT est quelquefois redoublé. "Autant l' esclavage me répugne, autant la liberté m' effraie; Marm. Quelquefois on met autant que au 1er membre, et autant au 2d.; et alors le pron. pers. après celui-ci se met après le verbe: "Autant que la terre de Cypre nous avoit paru négligée, autant celle de Crète se montroit fertile. Télém. Se montrait-elle aurait été mieux. "Autant que les Romains (du Bâs Empire) avoient négligé l' Art Militaire, autant les Perses l' avoient-ils cultivé; Montesq. "Autant qu' elle avoit de docilité pour la vraie raison, autant avoit-elle de pénétration pour découvrir le foible des faux raisonemens.
   On a pu remarquer dans ces diférens exemples, qu' autant que régit l' indicatif: un Auteur très-moderne lui fait régir le subj. "Il vous aime autant qu' un frère puisse aimer une soeur; l' Ab. Reyre, Ecole des Dém. Je crois qu' il faut dire, peut aimer, etc. Ce régime n' est bon que pour le superlatif, et autant que, n' est que comparatif.
   11°. Quelquefois on emploie autant redoublé, sans qu' il paraisse régi par aucun verbe. "Autant d' êtres pensans, autant de manières de penser: autant d' êtres sensibles, autant de manières de sentir. Cerutti, Apol. des Jés. On sous-entend: il y a: Autant qu' il y a d' êtres pensans, autant y a-t-il de manières de penser. Par cette syncope, la pensée a plus de vivacité, et le discours est moins traînant.
   12°. * Autrefois on redoublait d' autant plus: "d' autant plus qu' on les médite, on les trouve d' autant plus véritables; P. Rapin. "D' autant plus que ce morceau de cire aura de figûres diférentes, elles seront d' autant moins parfaites et moins distinctes. Mallebranche. On se sert aujourd' hui de plus redoublé: "Plus on le médite, plus on les trouve, etc. "Plus ce morceau de cire aura de figûres, et moins elles seront parfaites. Ou bien on met d' autant plus au 1er membre, et plus, ou l' équivalent, au 2d: "Elles paroîtront d' autant plus véritables, qu' on les méditera davantage: "Elles seront d' autant moins distinctes qu' elles seront en plus grand nombre.
   Rem. Bourdaloue fait régir à d' autant plus les noms substantifs. Miracles de la Providence, mais d' autant plus miracles, qu' ils paroissaient en lui comme naturels. Il y a du sous-entendu, mais qui méritaient d' autant plus le nom de miracles, que, et cela est bien dans cette ocasion, mais ne réussirait pas si bien dans d' autres.
   13°. * On employait anciènement Autant tout seul, dans le sens de le plus. "Une des chôses que j' aime autant dans elles, c' est l' afection qu' elles vous portent.
   On dit encore dans le style familier, d' autant avec boire, pour dire beaucoup. "Le Gascon, dès la soupe, se mit à fronder et à boire d' autant.
   Je n' aurois qu' à chanter, rire; boire d' autant.
       Boil.
On dit dans le même style: À~ la charge d' autant; à condition qu' on rendra la pareille.
   14°. D' AUTANT que, Parce que, est vieux et rélégué au Palais: D' autant que la forme n' a pas été gardée, etc.
   Mais Autant que, selon que, est toujours usité: "Autant que j' en puis juger.
   15°. TOUT AUTANT, régit le génitif, (la prép. de.) Tout y est indéclinable, parce qu' il est là adverbe, et n' afecte qu' autant, et non les noms que celui-ci régit. "Afranchissement des serfs, établissement des communes, cas royaux, anoblissemens, etc. Tous autant de coups mortels portés à la licence et à la rebellion, qui s' autorisoient de la loi des fiefs. Abr. Chron. de l' Hist. de Fr. Il falait tout autant de, etc.
   16°. L' Auteur d' une Hist. de Perse traite Autant, comme la plupart; il en fait un nominatif, qui exige le verbe au pluriel. "Autant d' armées, qu' on avoit envoyées contre lui, avoient été ordinairement défaites. L' usage n' admet pas cette façon de parler. Il faut dire, toutes les armées, etc.
   17°. *POUR AUTANT QUE est vieux et barbâre. "Les travaux du camp n' ont pas cessé, pour autant que l' ont permis les pluies et les gros vents. Gazette de Leyde. _ Dites, autant que l' ont permis, etc. voy. DAUTANT, sous la lettre D.

AUTEL


AUTEL, s. m. [Il difère d' Hôtel, et pour l' ortogr. et pour la prononc. et pour la signification. Otel, 1re dout. Ôtel, 1re lon.] Espèce de table de pierre destinée pour les sacrifices. Acad. Pourquoi de pierre seulement? N' y a-t-il pas des Autels de bois? ou n' apèlera-t-on Autel que la pierre sacrée? Ne sufisait-il pas de dire: Table destinée pour les Sacrifices. "Dresser, élever un Autel; se prosterner devant l' Autel, ou les Autels, aux pieds de l' Autel ou des Autels. Les Ministres des Autels, etc. "Devant d' Autel, nape, ornement d' Autel. Les marches de l' Autel, les cornes de l' Autel.
   On apèle l' Eucharistie, le Sacrement de l' Autel; et la Messe, le Sacrifice de l' Autel. _ Ataquer les Autels, la Religion. _ Maître-Autel, l' Autel principal dans une Église.
   On dit figurément: Élever Autel contre Autel; faire un schisme dans l' Église; et par extension, dans une compagnie divisée en factions. _ On dit aussi d' un homme avide et peu scrupuleux, qu' il en prendroit jusque sur l' autel. "Le Prêtre vit de l' autel; ou, qui sert à l' autel doit vivre de l' autel. Il est juste que chacun vive de sa profession. L' Acad. borne l' emploi de ce Proverbe aux professions honorables. _ On dit encôre, par abus, qu' un homme mérite qu' on lui dresse, qu' on lui élève des autels, pour dire qu' il est digne des plus grands honeurs.

AUTEUR


AUTEUR, s. m. [O-teur, les 2 syll. sont douteûses: eur est long au pluriel: Auteurs.] 1°. Celui qui est la première caûse de quelque chôse. Dieu est l' auteur de la Natûre, il n' est point l' auteur du péché. J. C. est l' auteur de notre salut. "Les Auteurs de la sédition. = 2°. Celui qui a composé un Livre, ou quelqu' ouvrage d' esprit, grand ou petit, en prôse ou en vers: "Auteur ancien ou moderne, grec ou latin, français ou anglais. Auteur classique, aprouvé, ortodoxe, ou anonyme, apocriphe. Auteur original, bon ou mauvais, estimé ou méprisé. = 3°. En termes de Palais, on entend par Auteurs, non-seulement les ancêtres, mais encôre ceux de qui l' on a aquis des possessions, ou aux droits de qui l' on a succédé. Bossuet s' est servi de cette locution dans son Hist. des Variations. "Lorsqu' ils (les Protestans) nous allèguent tous ces siècles, ce n' est pas leurs Auteurs qu' ils nous nomment, mais leurs complices. Cet illustre Écrivain aimait à employer les termes du Barreau. On dit, en ce sens, l' auteur d' une nouvelle, celui de qui on la tient. "Je vous nomme mon Auteur. On le dit même d' une femme: c' est elle qui est mon Auteur.
   Rem. 1°. On écrivait autrefois Autheur, et Boileau a employé cette ortographe.
   2°. Quand on parle des ouvrages d' esprit, Auteur est de deux genres: "Il ou elle est Auteur de ce Livre, de ces vers, etc. "L' Auteur a dévelopé l' intrigue qu' elle n' avoit fait qu' indiquer d' abord. Merc. Persone n' en peut trouver les moyens mieux que l' Auteur elle-même. Ibid. Mais ailleurs on dit toujours Auteur au masculin. L' Ab. Desfontaines a blâmé le P. Catrou d' avoir dit: on s' empressa de connoître la première Auteur de cette entreprise. Voy. ÉCRIVAIN.

AUTHENTICITÉ


AUTHENTICITÉ, s. f. AUTHENTIQUE, adj. AUTHENTIQUEMENT, adv. [Otanti--cité, tike, tikeman. 2e lon. 4e e muet aux 2 dern. 5e é fer. au 1er.] Authentique est ce qui est solennel, muni de l' autorité publique, et revêtu de toutes ses formes; ou ce qui est célèbre et notable. "Contrat, écrit titre, acte, preuve, atestation authentique. _ Témoignage, texte, passage authentiques.
   AUTHENTICITÉ est la qualité de ce qui est authentique. "L' authenticité de cette pièce ferme la bouche aux adversaires.
   AUTHENTIQUEMENT, adv. D' une manière authentique. Traité, contrat fait authentiquement.

AUTHENTIQUER


AUTHENTIQUER, v. a. [Otantiké, 2e lon.] Authentiquer un acte, y faire mettre l' atestation des Magistrats et le sceau public. _ Authentiquer une femme. La déclarer ateinte et convaincuë d' adultère.

AUTOGRAPHE


AUTOGRAPHE, adj. [Otografe.] Qui est écrit de la main même de l' Auteur: manuscrit autographe. _ Subst. masc. Terme d' érudit: Dans le langage ordinaire on dit, original: "On conserve dans le cabinet des chartes, l' autographe de cette promesse. _ Terme didactique, dit l' Acad.
   AUTOGRAPHE, dit Ferrière (Dict. de Droit Civil) est synonyme d' olographe; mais celui-ci s' aplique plus particulièrement à une disposition testamentaire: et autographe, à tout écrit d' écritûre privée. Voy. AUTOMATE.

AUTOMATE


AUTOMATE, s. m. [Otomate, tout br.] Autrefois quelques Savans afectaient de prononcer, aftografe, aftomate. L' Académie elle-même aprouvait cette prononciation pour le dernier, et ne disait rien de l' autre. Elle ne le dit pas dans les autres éditions: elle a raison de s' être rétractée là-dessus. La Touche.
   AUTOMATE, machine qui a en soi le principe de son mouvement. "Le fameux automate de Vaucanson. "Descartes pensait que les bêtes ne sont que des automates. _ Il est fort à la mode au figuré. "Ce Père automate meurt, et il laisse à ses enfans son champ à partager également. Coyer. Les riches, les Grands traitent le peuple comme s' il n' était qu' un composé d' automates.

AUTOMNAL


AUTOMNAL, ALE, adj. [Pron. otome--nal, l' e surajouté fort muet.] Qui est de l' automne~, qui a raport à l' automne. Les fièvres automnales sont dangereûses ou opiniâtres: aut diuturn‘ aut mortales. "La partie automnale du Bréviaire. _ Il n' a point de pluriel au masculin. On ne dit point les trois mois automnaux; il faut dire: les trois mois d' automne.

AUTOMNE


AUTOMNE, ou AUTONNE, s. m. et f. [otone, 2e br. 3e e muet.] La 1re ortographe est la plus commune: c' est celle de l' Acad. et elle a pour elle l' étymologie Autumnus. La 2de a été adoptée par quelques écrivains, et serait la plus favorable à la prononciation. = Suivant le Dict. Gramm. ce mot est fém. et il n' y a que les Poètes qui aient droit de le faire masc. L' Acad. le marque des deux genres; mais dans les exemples, elle n' en met qu' un du masc. "Un bel automne; une automne froide et pluvieûse; une automne venteûse. _ La plupart. des Auteurs le font fém. Mais outre les Poètes, plusieurs, parmi les prosateurs, l' emploient au masculin.
   Et toi riant Automne, acorde à nos desirs
   Ce qu' on atend de toi, des biens et des plaisirs.
       Poème des saisons.
"L' automne suivant, l' automne prochain P. Parennin. L' automne a été trop sec. J. J. Rouss. "L' automne a été universellement beau et sec. Linguet.

AUTORISATION


AUTORISATION, s. f. AUTORISER, v. a. [Otoriza-cion, en vers ci-on. On trouve dans Boileau autorizer avec un z: Ce n' est pas l' ortographe d' usage: otorizé.] Autorisation est un terme de Pratique: il ne se dit que dans ces phrâses, autorisation d' un mari, d' un tuteur. = Autoriser est de tous les styles: Doner autorité, pouvoir de faire. Il se dit, ou avec le seul régime absolu, (l' acusat.) Le Roi autorise les Magistrats; ou avec la prép. à devant les noms et les verbes. "Vous m' avez autorisé à cette démarche, à faire cette proposition. _ Réciproque, il est peu usité, sur tout avec les persones pour sujet de la phrâse: "cet homme s' est bien autorisé dans sa compagnie, y a aquis de l' autorité. "Les mauvaises coutumes s' autorisent plus promptement que les bonnes.

AUTORITÉ


AUTORITÉ, s. f. [otorité, tout bref.] 1°. Puissance légale. Acad. Droit de se faire obéir, pouvoir, puissance. Trév. "L' autorité du Roi, des Lois, des Magistrats. Autorité spirituelle, temporelle, royale, souveraine, paternelle. Avoir de l' autorité; user d' autorité. Sous votre autorité; par autorité de Justice, etc. "Un Père a ou doit avoir de l' autorité sur son fils. _ Être en autorité est une expression tout au moins douteûse et que je n' oserais garantir. "Lorsqu' Esdras étoit en autorité, il mit en ordre les livres saints. Rollin.
   D' AUTORITÉ, adv. D' une manière impérieûse. "Il veut tout emporter d' autorité. "Il le fit élire d' autorité. Moreau... "Vous jouez la Comédie! _ Que voulez-vous. J' ai cédé aux persécutions de trois ou quatre femmes, qui d' autorité m' ont forcé à prendre une demi douzaine de rôles. Th. d' Educat. C' est un jeune Magistrat qui parle. "Il étoit résolu d' agir d' autorité, comme il avoit toujours fait. Voy. à la Mer du Sud. _ De son autorité privée: sans avoir droit de le faire. "Ce ne sont pas ici des lois, que je fais pour notre langue, de mon autorité privée. Vaugelas.
   2°. Crédit, considération. Avoir ou prendre de l' autorité dans son corps, dans sa famille, etc. _ 3°. Sentiment d' une persone respectable, qu' on aporte pour confirmer ce que l' on dit. "Citer des autorités. L' autorité des Écritures, des Pères, des Conciles, des anciens Philosophes, etc.

AUTOUR


AUTOUR, prép. [O-tour, 1re dout.] Excepté avec tout et ici, il est toujours préposition: à l' entour est l' adverbe correspondant: autour de la Ville: il rode à l' entour. Autrefois on ne les distinguait pas fort soigneûsement. "Sion fut la demeure de David: il bâtit autour. Boss. "Ce Roi n' aura pas besoin de garde, qui veille à la porte de son Palais; les coeurs de ses sujets entoureront son trône et brilleront autour, à la place des glaives qui le défendent. Dans ces deux exemples, il faut à l' entour. _ Avec tout et ici, on dit fort bien autour, adverbialement et sans régime. "Il roule tout autour, il loge ici autour.
   Rem. Autour n' est que prép. de lieu: on l' employait autrefois comme prép. de temps; autour des bonnes fêtes. St. Fr. de Sales. Vers les bonnes fêtes, à l' aproche des fêtes.
   AUTOUR, s. m. Oiseau de proie.

AUTRE


AUTRE, pénult. longue. Aûtre.

AUTRE


AUTRE, pron. relat. [Ôtre, 1re lon. 2e e muet.] Diférent, contraire, oposé. Quand il est joint à un substantif, il est adjectif; un aûtre homme, une aûtre afaire. Il n' est pronom que quand il s' emploie substantivement. "Nul aûtre que vous n' y auroit consenti: un aûtre l' auroit fait. Je ne conais aûtre; passer d' un sujet à un aûtre.
   Mes crimes... les voici... je n' en connois point d' aûtres;
   C' est d' avoir trop long-temps laissé régner~ les vôtres.       P. Marion Cromv.
  1°. AûTRE est quelquefois répété à la tête de chacun des membres de la phrâse: "Aûtre est l' ordre dont on se sert pour instruire son Lecteur: aûtre est l' ordre qu' on doit employer, pour achever de le convaincre, quand il est instruit.
   2°. AûTRE précède ordinairement le substantif, comme on peut le voir par les ex. ci-dessus. Joint à tout, il peut précéder ou suivre: C' est un tout aûtre homme: c' est un homme tout aûtre. L' oreille et le goût doivent guider dans cette construction. Car, p. ex. on ne dirait pas indiféremment, C' est toute aûtre chôse, ou, c' est chôse tout autre. La dernière manière ne vaut rien.
   3°. * Quelque peu d' autres est une manière de parler, qui n' est pas française. On dit: un petit nombre d' aûtres. "Raphaël, Poussin et quelque peu d' autres. Fleury.
   4°. Quand aûtre est suivi de que; il exige la négative ne: "* On ne voit pas les objets, ou on les voit autres qu' ils sont. Du Plaisir. Dites: qu' ils ne sont. _ Il n' admet ni pas; ni point. Voy. PAS ou POINT. n°. 1°.
   5°. AûTRE s' emploie quelquefois sans article et sans équivalent de l' article. "C' est aûtre chôse est mieux que, c' est une aûtre chôse. "Sans qu' aûtre que lui s' en mélât, mieux que, sans qu' aucun aûtre, etc.
   6°. Avec ce pronom l' adv. bien prend l' art. indéfini contre son ordinaire. "bien d' autres, et non pas bien des aûtres: Bien d' autres que Luther se briseront contre cette pierre. Boss.
   7°. AûTRE marque quelquefois une persone ou une chôse indéterminée. "Quelque aûtre vous le dira mieux que moi. L' aûtre jour; un des jours précédens. = Aûtre; meilleur, de plus grande conséquence. "C' est bien un aûtre homme, une aûtre affaire. = Il marque aussi la ressemblance: "C' est un autre César, un autre Alexandre; c. à. d. un nouveau César, etc. = Il y en a d' uns et d' aûtres, de bons et de mauvais.
   8°. Sans aûtre, joint à un nom sans article, doit être employé au singulier plutôt qu' au pluriel; sans aûtre forme de procès, et non sans autres formes, etc. Voy. PROCèS: "Les hommes, plus guidés par la coutume que par la raison, suivent, sans autres recherches, les moeurs dominantes de leur siècle. Hist d' Angl. J' aimerais mieux, sans autre recherche. V. TOUT.
   9°. Quand l' un l' aûtre sont employés sans la conjonction et; l' un est au nominatif, l' autre à un câs oblique: "Ils s' aiment l' un l' autre; ils se sont donnés le mot l' un à l' autre; à l' envi l' un de l' autre.
   1°. L' un et l' aûtre se met, ou avec le singulier, ou avec le pluriel. Tous nos bons Auteurs sont pleins d' exemples des deux manières; et il est également bien de dire: "L' un et l' autre vous a obligé, ou vous ont obligé. Avec ni, c' est encôre de même: "Ni l' un ni l' aûtre ne vaut rien, ou ne valent rien. Vaug. Bouh. _ Chapelain pensait que le singulier est plus élégant; et Th. Corn. est d' avis qu' il est plus dans l' usage. = Plusieurs, et Bouhours même et La Touche pensaient que, l' un et l' autre est une espèce de neutre, et qu' on peut l' employer au masc. quoique les substantifs qui précèdent soient fém. On citait en exemple cette phrâse de Patru, puriste renomé: "Que ce soit avarice ou ambition, ou peut-être l' un et l' aûtre. M. de Wailly aimerait mieux l' une et l' autre, et moi aussi. Je crois qu' on trouverait peu d' exemples à l' apui de celui de Patru. _ Que si les substantifs sont de diférens genre, le masc. l' emporte, comme de raison, d' autant plus que l' aûtre étant des deux genres, peut être atribué au féminin. "Que ce soit penchant ou raison, ou peut-être l' un et l' autre.
   11°. Quand il y a une préposition devant l' un, on en met aussi une devant l' aûtre. "Il est ami de l' un et de l' autre; je ne l' ai fait ni pour l' un ni pour l' autre. Vaug. Acad. Wailly.
   12°. L' un et l' aûtre, ou est adj. et alors il doit suivre le verbe et non pas le précéder. "* M. Le Pelletier et M. Bignon, l' un et l' autre moururent à la fin de l' année. Acad. des Inscript. Il falait, moururent l' un et l' autre; ou il est subst. à la tête de la phrâse: alors il précède le verbe. Ainsi, après avoir dit: "M. Le Pelletier et M. Bignon étoient deux illustres Académiciens, on aurait dit: "L' un et l' autre moururent, ou mourut à la fin de l' année.
   13°. Quand l' un et l' autre est régi à l' acusatif, il suit la règle des pronoms personels, c. à. d. qu' il doit être précédé de les, placé devant le verbe. "On les a payés l' un et l' autre, et non pas, comme dit un Éditeur des OEuvres de Bossuet: "* Calvin fit diférentes professions de Foi, pour satisfaire l' un et l' autre (Zuingle et Luther.) Il falait dire: pour les satisfaire l' un et l' autre.
   14°. Quand il y a raport de réciprocité de l' un à l' autre, on retranche la conjonction et: "Nous devons nous aider les uns les autres, et non pas les uns et les aûtres. Alors l' un ou les uns devient nominatif, et l' aûtre ou les aûtres se déclinent suivant le câs qu' exige le régime. "À~ l' envi l' un de l' autre; ils se sont doné le mot l' un à l' autre; et non pas, comme dit un Auteur anonyme: "* Il manque éfrontément aux égards que l' on se doit mutuellement les uns les autres. Dites: les uns aux aûtres. _ Fontenelle dit: ils s' instruisoient l' un et l' autre. Retranchez et. _ "J' admirai cette singularité, qui faisoit que nous nous fuyons l' un et l' autre. Anon. Et est de trop. "Il (Josephe) se retira avec le reste dans une caverne, où ils s' égorgèrent les uns et les autres. Beraud de Bercastel. Hist. de l' Égl. Il falait, les uns les aûtres. _ Que ce soit la faute des Auteurs ou des Imprimeurs, la remarque ne sera pas inutile.
   * Fénélon dit: les uns regardoient les aûtres. Il les sépare mal-à-propos: Dites: "Ils se regardaient les uns les aûtres. _ * Le P. Barre décline l' un comme l' aûtre. "Ils brûloient les vaisseaux des uns des autres. Dites: les uns des aûtres.
   15°. Quand il y a raport de comparaison entre l' un et l' autre, le 1er doit toujours précéder, et le second doit toujours suivre. Mde. de Sévigné, après avoir observé cet ordre dans le 1er membre de la phrâse, l' intervertit dans le second: "Voilà deux bones veûves, Mde. de Senneterre et Mde. de Leuville. L' une est plus riche que l' autre, mais l' autre est plus jolie que l' une. Cela ne peut se dire qu' en plaisantant.
   Rem. Autres ou Autrui se dit relativement à des persones à peu près égales. Je ne pense pas qu' on doive dire d' un Prince qu' il avait du penchant à faire du bien et à rendre service aux autres, comme le dit Rollin dans l' Hist. Anc. j' aimerais mieux dire, à tout le monde. Voy. AUTRUI. n°. 2°.
   On dit dans le style familier; il en a bien vu d' aûtres, on sous-entend évènemens. En voici bien d' une aûtre, c. à. d. quelque chôse de plus surprenant ou de plus fâcheux. _ À~ d' autres! c. à. d. j' en crois rien.
   Au loup, s' écria-t-il, au loup! Tout le hameau
   Rit à son tour: à d' autres, je vous prie,
   Répondit-on! l' on ne nous y prend plus:
   Guillot le goguenard fit des cris superflus.
   On crut que c' étoit fourberie.
       Richer.
Comme dit l' aûtre. Façon de parler populaire, dont on se sert pour citer en général, sans nomer persone. "Car, comme dit l' autre, il faut suporter ce qu' on ne peut empêcher.

AûTREFOIS


AûTREFOIS, adv. [Ôtre-foâ, 1re et 3e lon. 2e e muet.] Anciènement, au temps passé. On croyait aûtrefois que... c' était la coûtume aûtrefois, etc.
   Rem. 1°. Il se place quelquefois à la tête de la phrâse. "Autrefois les Pères étoient plus vigilans et les enfans plus dociles. _ Quand il est joint à un nom, il est mieux placé entre ce nom et l' adjectif, qui l' afecte, qu' après ce dernier. "* Baléopolis, Ville grande et magnifique autrefois. Anon. Il falait dire: Ville aûtrefois grande et magnifique. _ Quand il modifie un verbe, il se met toujours après, même dans les temps composés; il était, il a été aûtrefois, et non pas il a aûtrefois été. "Baléopolis, qui était aûtrefois, et non pas qui aûtrefois était. Il ne précède le verbe que quand il est à la tête de la phrâse.
   2°. Peut-il être suivi de la conjonct. que? Je le crois, quoique l' Acad. n' en done point d' exemple. "Autrefois que les... avoient eu la témérité de s' ériger en Souverains. Ferrière.
   3°. AûTREFOIS et les aûtres fois ne doivent pas s' employer indiféremment. Le prem. exprime un temps ancien continu, qui a cessé: le second exprime un temps ancien, qui n' a pas été continu, et qui peut n' avoir pas encôre cessé. "Autrefois il étoit aimable: il est devenu insuportable. "Les autres fois il entendoit la plaisanterie, aujourd' hui il s' est fâché de tout ce qu' on lui a dit. _ Dites donc: "Il était joli autrefois, et non pas les autres fois, etc.
   D' AûTREFOIS, adv. Il se met ordinairement à la tête de la phrâse. "Quelquefois il se met dans une furieuse colère: d' aûtrefois il est doux comme un agneau. L' Acad. ne le met point.

AûTREMENT


AûTREMENT adv. [Ôtreman, 1re et 3e lon. 2e e muet.] 1°. D' une autre façon. "Faire, vivre aûtrement. "La chôse est tout autrement que vous ne le croyez. 2°. Pas trop, guère: cela n' est pas aûtrement vrai. Il ne se dit qu' avec la négative. _ 3°. Sinon. "Corrigez-vous, autrement on vous punira. Il se met en ce sens à la tête du membre de la phrâse.
   Rem. 1°. Quand aûtrement régit la conjonction que, la négative ne est indispensable, comme pour les adverbes de comparaison. * Mallebranche l' a retranchée mal-à-propos. "Les hommes jugent de la réalité, de l' existence de toutes choses, tout aûtrement qu' ils devroient. Il falait dire: qu' ils ne devraient.
   2°. Avec le pronom en et le v. être impersonel, il régit la prép. de devant les noms. "L' enseignement de ces maîtres (les Philosophes) n' est que le langage de l' orgueil: les vertus du disciple ne peuvent être que des vertus superbes. "Il en est bien autrement du Disciple de Jesus, etc. Neuville. _ Il serait plus exact de dire que c' est l' impersonel, il en est, qui régit la prép. de: mais cela est égal; elle y est nécessaire.
   3°. Pas aûtrement, guère, médiocrement, se dit quelquefois tout seul, en réponse à une interrogation. "Est-il content? Pas autrement.

AûTRE-PART


AûTRE-PART, adv. [Ôtrepar, 1re lon. 2e e muet.] Âilleurs. Il se dit ou sans régime. "Vous ne le trouverez pas aûtre-part. Ou avec la conjonction que; aûtre-part que chez les brocanteurs. Et toujours avec la négative.

AUTRICE


*AUTRICE, s. f. Ce mot se trouve dans une pièce du Mercûre du mois de Juin 1726. C' est un barbarisme. Dict. Néol. Voy. AUTEUR.

AUTRUCHE


AUTRUCHE, s. f. [Otruche.] Espèce de grand oiseau, fort haut sur ses jambes, qui a le cou fort long, et les pieds faits comme ceux d' un chameau, etc. _ On dit d' un bon estomac, que c' est un estomac d' Autruche, parce qu' on supose que les Autruches digèrent le fer. Elles ne le digèrent point: mais elles en avalent des morceaux pour aider à leur digestion.

AUTRUI


AUTRUI, s. m. [O-trui.Il ne se dit que des persones, et n' a point de pluriel.] Les autres persones. "Juger d' autrui par soi-même: le bien d' autrui. Être logé chez autrui, etc.
   Rem. 1°. Autrui n' a point de nominatif: ne dites pas avec un Auteur moderne: "* S' ils savoient combien un froc figure mal au milieu d' une assemblée mondaine, ils se respecteroient eux-mêmes, afin qu' autrui les respectât. Du Plaisir. _ Le monde était là le vrai mot. _ Il n' a proprement d' usage qu' au génitif, au datif et à l' ablatif, avec les prép. à et de; mais beaucoup plus au génitif qu' aux deux autres câs; de sorte que pour une phrâse ou deux du datif, ne point faire tort à autrui, ne faites point à autrui ce que vous ne voudriez pas qui vous fût fait; et pour quelques phrâses où l' ablatif est employé: dépendre d' autrui, médire d' autrui, etc. on en peut former une centaine au génitif: le bien d' autrui, les afaires d' autrui, l' honeur d' autrui, être sous la puissance d' autrui, etc. etc. etc.
   Ce pronom ou ce substantif se dit indiféremment des hommes et des femmes; mais il ne se joint jamais avec aucun adjectif; il n' a point de genre ni de pluriel. C' est un nom que les Latins apèleraient neutre.
   2°. Du temps de Vaugelas, plusieurs croyaient que ce mot n' était pas bon et qu' il était vieux; et à cause de celà, ils disaient aûtres pour autrui; mais ils se trompaient. Car, au contraire, c' est une faute, et ce n' est pas parler français, que de dire aûtres en beaucoup d' endroits où il faut dire autrui. Celui ci se dit absolument et sans relation: celui-là s' emploie toujours avec relation à ce que l' on a dit. "Il ne faut pas désirer le bien d' autrui. Là autres ne vaudrait rien: "Il ne faut pas ravir le bien des uns pour le doner aux autres: Là autrui ne serait pas bon. _ De plus, aûtres se dit des persones et des chôses, et il prend l' article: les aûtres, des aûtres, aux aûtres. Au contraire, autrui ne se dit que des persones, et ne prend point l' article: autrui, d' autrui, à autrui.
   3°. L' autrui pour autrui, comme dit Malherbe.
   À~ qui rien de l' autrui ne plaît.
Et l' autrui pour le bien d' autrui ne sont plus que de la lie du peuple. Vaug. Autrefois il était du bel usage. "Il n' est pas bien fait de prendre l' autrui pour le doner aux Pauvres. Chron.
   On dit proverbialement: le mal d' autrui n' est qu' un songe. C' est qu' on ne le conaît que par ouï dire, et qu' on ne le sent pas. Qui s' atend à l' écuelle d' autrui, souvent dîne fort mal. Il faut travailler pour soi, et compter peu sur les aûtres.

AUVENT


AUVENT, s. m. [Ovan, 1re dout. 2e lon.] Petit toît en saillie, attaché ordinairement au-dessus des boutiques, pour garantir de la pluie.

AUVERGNAT


AUVERGNAT, NATE, adj. et subst. Pluche écrit Auvergnac, avec un c. Comment formait-il le féminin? Disait-il Auvergnaque? Je n' en sais rien; mais Auvergnac ne vaut rien. _ En parlant d' un certain vin d' Orléans, on dit Auvernat, s. m. sans g.

AUX


AUX, finale longue, soit au singulier: faux, taux, etc.; soit au pluriel, animaux, brutaux, etc. _ La Monnoie met une s à la place de l' x, faus, taus, animaus, brutaus, etc. Cet x ou cette s devant une voy., se prononcent auz; devant une consone, ils ne se prononcent pas.

AUXILIAIRE


AUXILIAIRE, adj. [Okcili-ère, 4e long. è moy. 5e e muet.] Qui aide, dont on tire du secours. Il n' est d' usage qu' avec armée et troupes. _ St. Evremont l' a employé au figuré: "Chez vous les injûres sont les troupes auxiliaires de la raison. À~ ce compte-là, jamais Souverain n' en a eu de si nombreûses que M. de Voltaire.
   Dans le Dict. de Trév. on parle de moyens auxiliaires ou subsidiaires. Au Palais même, subsidiaire est plus usité.
   AUXILIAIRE, en termes de Gramaire, se dit des verbes avoir et être, parce qu' ils servent à conjuguer les autres verbes. Avoir, entre dans la conjugaison des actifs et de presque tous les neutres: être, forme la conjugaison des passifs, de quelques neutres, et des verbes pronominaux ou réciproques.

AX


AX, AXE, sont toujours brefs; Ajax, taxe; etc.

AXE


AXE, s. m. [Akce.] Ligne qui partage un corps en deux parties, géométriquement égales. Paulian, Dict. de Phys.

AXIôME


AXIôME, s. m. [Akci-ôme, 3e long.] Maxime, proposition générale, reçue dans une science. Axiôme de Philosophie, de Mathématiques, etc.

AYANT


AYANT, participe actif du verbe avoir. [E-ian, et non pas a-ïan.] Ceux qui écrivent aïant, ocasionent la seconde prononciation, qui est mauvaise.
   AYANT-caûse, s. m. Terme de Palais. Il se met ordinairement au pluriel. Mais doit-on écrire ayants-cause, ou ayant-causes? Je serais pour le premier, parce que caûse me paraît employé là neutralement; qu' il me semble devoir y être indéclinable, et que l' s par conséquent, signe du pluriel, ne doit afecter que, ayant. _ Mon opinion est confirmée par le Dict. de Droit, où l' on écrit ayants-cause. _ Dans les Annales de M. Linguet, n° L, on lit ayant caûses: c' est peut-être une faute d' impression.

AYE


AYE, la pénult. est brève; je paye, je bégaye, etc. Qu' on prononce, pé-ïe, béghé-ie.

AYEUL


AYEUL. Voy. AïEUL.

AZEROLE


AZEROLE, s. f. AZEROLIER, s. m. Le 1er se dit d' un petit fruit aigret de la couleur et de la grosseur d' une cérise, et qui a plusieurs petits noyaux. _ Le 2d se dit de l' arbre qui le porte. Quelques-uns disent argerole, argerolier: ce sont des barbarismes.

AZILE


AZILE ou AZYLE. Voyez ASYLE et ASILE.

AZUR


AZUR, s. m. Sorte de minéral de couleur bleuë. _ Il se dit aussi de la couleur de ce minéral.
   On dit proverbialement d' un apartement doré et fort enrichi: ce n' est qu' or et azur.

AZURÉ


AZURÉ, RÉE, adj. [3e lon. au 2d.] Qui est peint de couleur d' azur. Lambris azuré. _ Il se dit plus souvent en Poésie: "La voûte azurée, le ciel; les plaines azurées, la mer.

AZYME


AZYME, adj. [2e br. 3e e muet.] Qui est sans levain. Pains azymes. = Subst. plur. La fête des Azymes. Il ne se dit que dans ces phrâses qui sont de l' Histoire Sainte. = On se sert aussi d' azyme en parlant du pain sans levain qu' on consâcre dans l' Eglise Latine.

AZYMITE


AZYMITE, s. Qui se sert de pains azymes ou sans levain.