Dictionnaire critique de la langue française Dictionnaire critique de la langue française 1787 Français 2007-4-4 ARTFL Converted to TEI ARCHI


ARCHI est un mot qui ne se dit jamais tout seul, mais qui, joint à d' autres mots, marque un degré d' excellence et de supériorité. Outre les compositions usitées en ce genre, on en invente tous les jours dans la conversation. On dit: archivilain, archifou, archidévot, etc. _ Il a ordinairement le son français du chi; et l' on n' en excepte que les mots Archiépiscopal, Archiépiscopat, qu' on prononce arkiépiscopal, arkiépiscopat.

ARCHIDIACONAT


ARCHIDIACONAT, ARCHIDIACONÉ, s. m. On dit le 1er de l' office ou dignité d' Archidiacre; et l' autre du district de sa Juridiction, et quelquefois de la maison qui lui est affectée. _ Le Rich. Port. dit aussi Archidiaconé, pour la dignité; l' Acad. ne le dit que du district. Voy. ARCHIDIACRE.

ARCHIDIACRE


ARCHIDIACRE, s. m. [Archi-dia-kre; dia ne fait qu' une syllabe; mais dans les mots précédens, il en fait deux: di-akoné, di-akona.] Celui qui est pourvu d' une dignité éclésiastique, qui lui done quelque sorte de Juridiction sur les Cûres de la campagne. C' est ordinairement la 2de dignité dans les Églises cathédrales. Il y a de ces Églises où il y a plusieurs Archidiacres, et plusieurs où l' Archidiacre est une dignité sans Juridiction.

ARCHIDUC


ARCHIDUC, s. m. ARCHIDUCHÉ, ARCHIDUCHESSE, s. f. [Archiduk, duché, duchèce, 4e é fer. au 2d, è moy. au 3e.] Ce titre de dignité est affecté aux Princes de la Maison d' Autriche: l' Archiduc Ferdinand. _ Archiduché est la Seigneurie de l' Archiduc. _ Archiduchesse, titre de la femme de l' Archiduc, ou d' une Princesse qui est revêtuë de cette dignité par elle-même.

ARCHIÉPISCOPAL


ARCHIÉPISCOPAL, ALE, adj. ARCHIÉPISCOPAT, s. m. [Arki-épiscopal, Arki--épis-kopa; 3e é fer.] L' Acad. ne met pas le 2d, qui est pourtant usité et nécessaire pour exprimer la dignité d' Archevêque: "Il a été élevé à l' Archiépiscopat. C' est aparemment un oubli. = Archiépiscopal, apartenant à l' Archevêque: Palais archiépiscopal, dignité archiépiscopale.

ARCHIMANDRITE


ARCHIMANDRITE, s. m. Mot usité parmi les Moines d' Orient, et dont il est souvent parlé dans l' Histoire des Solitaires; c' est ce qu' ils apèlent aussi et que nous apelons Abbé. On dit encore: l' Archimandrite de Messine.

ARCHIPEL


ARCHIPEL, s. m. J' ai lu dans des livres une archipel: peut être est-ce une faute d' impression, et l' effet de l' inadvertence des Imprimeurs. Peut-être les Auteurs l' ont-ils fait fém. parce que c' est une mer. Ce mot est certainement masc. = On a dit autrefois archipelage, et dans le Dict. de Trév. on met l' un et l' autre. On ne dit plus que archipel. _ L' Acad. se contente de dire, que quelques-uns disent Archipélage, ou Archipélague, sans les blâmer. C' est un vrai latinisme, archipelagus. _ Étenduë de mer, entrecoupée de plusieurs Îles; l' archipel du Mexique. _ Archipel tout court, c' est celui du Levant, que les Anciens nomaient la Mer Egée.

ARCHIPRESBYTÉRAL


ARCHIPRESBYTÉRAL, ALE, adj. ARCHIPRêTRE, ARCHIPRêTRÉ, s. m. C' est le nom qu' on done à des Curés qui ont quelque prééminence sur les autres Curés. On apele Archiprêtres, en certains Diocèses, ce qu' on nomme ailleurs Doyens ruraux. _ Archiprêtré n' est pas, comme on pourrait le croire, la dignité d' Archiprêtre; car ce n' est pas une dignité en ce sens, quoique l' Acad. la qualifie de la sorte; c' est l' étenduë, le district de l' espèce de Juridiction, ou, pour mieux dire, d' inspection et de commission de l' Archiprêtre. _ Il y a des Chapitres où l' Archiprêtré est une dignité et le nom du logement que l' Archiprêtre ocupe; mais cette dignité est sans fonctions, du moins, ordinairement parlant. _ Archiprésbytéral, se dit de ce qui regarde l' Archiprêtre. _ Le Rich. Port. met Archipresbytérat, ou mieux Archiprêtré, dignité de l' Archiprêtre. Archipresbytérat ne se dit point. Pour Archiprêtré, ce n' est point une dignité, dans son sens le plus ordinaire, comme on l' a vu plus haut.

ARCHITèCTE


ARCHITèCTE, s. m. Celui qui exerce l' art de bâtir. Acad. Les Maçons l' exercent aussi, et ne sont pas Architèctes. "Celui qui est versé dans l' art de bâtir, qui dirige des bâtimens, en fait les plans, en calcule la dépense, et dirige les ouvriers pour l' exécution. Trév. Cette définition est un peu longue, mais elle aprend mieux ce que c' est qu' un Architècte. _ Celui qui sait l' art de bâtir, qui entreprend et conduit l' ouvrage d' un bâtiment. Rich. Port. On peut se contenter de cette dernière définition. "Beaucoup de Maçons s' érigent en Architèctes pour les maisons bourgeoises; mais ils n' ôseraient entreprendre un édifice considérable.

ARCHITECTûRE


ARCHITECTûRE, s. f. [3e è moy. 4e lon.] Art de bâtir; architectûre ancienne, moderne, gothique; les cinq ordres d' architectûre. _ Architectûre militaire, l' art de fortifier les places; navale, l' art de construire les vaisseaux; hydraulique, l' art de faire les ouvrages, machines, etc. pour la conduite des eaux, etc. _ 2°. En parlant seulement de la première, de l' architectûre proprement dite: Disposition et ordonance d' un bâtiment. "Voilà une belle architectûre, un beau morceau d' architectûre.

ARCHITRâVE


ARCHITRâVE, s. f. [3e lon. 4e e muet. Les Architèctes font ce mot masc.] L' une des trois principales parties de l' entablement dans un ordre régulier d' architectûre. C' est celle, qui est la plus basse, qui est sur les chapiteaux des colonnes et sous la frise.

ARCHIVAIRE


*ARCHIVAIRE. V. ARCHIVISTE.

ARCHîVES


ARCHîVES, s. f. pl. [2e lon. 3e e muet.] Il n' a point de singulier. Autrefois on disait l' archîve, pour les archîves. "On lui donera une clef de l' archîve, où se gardent les titres originaux. _ Il se dit et des anciens titres, chartres et autres papiers importans d' une maison, et du lieu où on les conserve.

ARCHIVISTE


ARCHIVISTE, s. m. Garde des Archîves. Quelques-uns disent Archivaire, mais mal.

ARCHIVOLTE


ARCHIVOLTE, s. f. [et non pas masc. comme on le marque, par erreur, dans le Dict. Gramm.] Bandeau orné de moulûres, qui règne à la tête des voussoirs d' une arcade, et dont les extrémités portent sur les impostes. Trév. Rich. Port.

ARCHONTAT


ARCHONTAT, ARCHONTE, s. m. [Ar--konta, konte, 2e lon.] Amiot et l' Ab. Tallemant ont toujours dit archon; mais archonte est le seul admis par l' usage. _ Rich. qui suprime l' h tant qu' il peut, écrit arcontat, arconte. _ Archonte était un Magistrat d' Athène; archontat le nom de cette Magistratûre.

ARÇON


ARÇON, s. m. [Il faut mettre une cédille, un c renversé sous le c, pour ne pas prononcer arkon] Partie de la selle d' un cheval. Trév. Cela n' aprend rien, ou peu de chôse. "Morceau de bois plat et courbé, qui soutient la selle du cheval. Rich. Port. Cette définition suffit. Celle de l' Acad. dit à peu près la même chôse en plus de paroles. Arçons de devant, ou de derrière; attacher des pistolets à l' arçon, etc. _ En style figuré familier, être ferme sur ses arçons, ou dans ses arçons; être ferme dans ses opinions, dans ses principes, et les bien soutenir. Perdre les arçons, être embarrassé dans la dispute, déconcerté dans quelque affaire; ne savoir quelles mesures prendre; comme on dit au propre d' un cavalier désarçoné, ou renversé de cheval, qu' il perd, ou qu' il vide les arçons. Se remettre dans les arçons, reprendre du crédit, de la réputation. "Sans cette dernière aventure, il (M. de Pompone) se fut remis encôre dans les arçons.

ARCTIQUE


ARCTIQUE, adj. [Le c se fait doucement sentir, arktike; et non pas artike, comme on le marque dans le Dict. Gramm. ou par erreur ou par inatention.] Septentrional; il ne se dit qu' avec pole et cercle.

ARDÉLION


ARDÉLION, s. m. (St. Famil.) Qui fait le bon valet, et qui a plus de paroles que d' effet.

ARDEMMENT


ARDEMMENT, adv. [Ardaman, et non pas ardanman, comme le marque Richelet. Voy. Amment.] Avec ardeur. Il ne s' emploie qu' au figuré. Aimer, désirer ardemment; se porter ardemment à; être ardemment épris de. On ne doit pas dire d' un feu ardent, qu' il brûle ardemment, etc.

ARDENT


ARDENT, ENTE, adj. [Ardan, dante; 2e lon. 3e e muet. Malherbe écrivait comme on prononce, ardant.] 1°. Qui est enflamé; fer ardent, fournaise ardente. _ 2°. Qui enflâme; miroir ardent; le soleil est aujourd' hui très-ardent. 3° Figurément, violent, véhément, en parlant des chôses; désir ardent, zèle ardent, poursuite ardente, soif, fièvre ardente _ 4°. Qui se porte avec ardeur à, en parlant des persones; ardent au combat, au jeu, à la chasse, à la dispute, etc. "Les Francs étoient belliqueux, intrépides, ardens au pillage. Millot. "Il étoit si ardent à les corrompre, que, etc. J. J. Rouss. Trad. de Tacite.
   Cet amour, toutefois ardent à ton secours,
   Demande des effets, et non pas des discours.       Campistron.
En prôse, ardent à te secourir, vaudrait mieux. "Ardent à poursuivre ses prétentions. Moreau.
   Comme une abeille, ardente à son ouvrage.
       Boileau.
Sans le besoin d' une syllabe de plus, le Poète aurait dit: ardente à l' ouvrage, et il aurait mieux dit.
   Cet adjectif peut précéder ou suivre; zèle ardent, ardents transports. C' est l' oreille qu' il faut consulter; ardent zèle, et transports ardens ne vaudraient rien. Rousseau a dit:
   L' ardente et fougueuse Bellone.
M. de Lille: l' ardente saison. Mais c' est en vers. En prôse, ardente dispute, ardente fièvre, ardente soif ne seraient pas suportables, du moins pour les substantifs qui n' ont point de régime; car l' ardente soif des richesses serait très bon.
   4°. Roux, en parlant du poil: "Il a le poil ardent.
   Subst. masc. Exhalaisons enflammées. On voit souvent les ardens sur les marais. Autrefois, mal épidémique qui brûlait: Le mal des ardens.

ARDER


*ARDER, ou ARDRE. Voyez ARDRE. L' Acad. met le 1er.

ARDEUR


ARDEUR, s. f. [L' r finale se pron. Ar--deur en 2 syll. brèves.] Chaleur véhémente. Il se dit au propre et au figuré; ardeur du feu, du soleil, ardeur d' entrailles, d' urine, l' ardeur de la fièvre. _ Ardeur du zèle, faire les chôses avec ardeur; mais ce n' est qu' au propre et rarement qu' on se sert du pluriel: les ardeurs de la canicule. Les Poètes, qui disent ardeurs pour amours, consultent moins l' usage que les besoins de la mesure ou de la rime. Je ne prétends pas les blâmer, mais je crois qu' on ne doit pas les imiter dans la prôse, où ces besoins n' existent pas.
   Le Trône fit toujours mes ardeurs les plus chères.
       Rac.
  Rien ne peut modérer tes ardeurs insensées.
      Ibid.
Le dernier vers n' a de défaut qu' ardeur employé au pluriel: mais le 1er a de plus le vice de l' expression. Je ne pense pas qu' on puisse dire: le Trône fait mes ardeurs les plus chères, comme on dirait: il fait mes plus chers désirs. = Ardeur régit-il l' infinitif avec de ou à? Fontenelle et Crébillon disent le 1er, et M. Racine le Fils, le 2d. "Assurément si l' on a tant d' ardeur de s' agrandir... c' est qu' on ne conoit pas les tourbillons. Mondes.
   L' ardeur de vous venger nous rend tout légitime.
       Créb.
L. Racine dit à Dieu en parlant de J. C.
  À~ défendre sa caûse aprouve mon ardeur.
J' oserais moins condamner ce dern. régime que le 1er, et parce qu' il est moins extraordinaire, et parce que c' est un Poète qui parle. Mais dans la phrâse de Fontenelle, j' aimerais mieux, passion de s' agrandir, qui est plus usité et qui a le même sens. _ Au reste, à employer ce régime, il faut préférer de, quand ardeur est précédé de l' article, comme a fait Crébillon, et à, quand ardeur est avec un pronom, mon ardeur, comme a fait L. Racine. _ L' Acad. ne met point ardeur à faire, ou de faire.

ARDILLON


ARDILLON, s. m. [Mouillez les ll, ardi-glion, 3 syll. br.] Pointe de fer, ou d' autre métal, d' une boucle, servant à arrêter la courroie qu' on passe dans la boucle.

ARDOISE


ARDOISE, s. f. ARDOISÉ, ÉE, adj. ARDOISIèRE, s. f. [Ardoâ-ze, doazé, zée, ziè-re. 2e lon. au 1er, 3e lon. au 3e et 4e, é fer. au 3e, è moy. au 4e.] Pierre tendre et de couleur bleuâtre, qui se sépare par feuilles, et qui sert à couvrir les maisons, et à d' autres usages, comme pour y écrire, pour des cadrans, pour des tables, etc. _ Ardoisé se dit de ce qui tire sur la couleur de l' ardoîse. _ ARDOISIèRE est la carrière d' où l' on tire les ardoîses.

ARDRE


*ARDRE, v. a. L' Acad. met Arder. Vieux mot qui signifie brûler. On ne peut plus s' en servir que dans le burlesque ou le marotique. _ Richelet et l' Acad. l' admettent~ encôre au prés. du subjonct. "Que le feu St. Antoine les arde, Rich. Vous arde, Acad. Son partic. était ars, arse.

ARDU


*ARDU, ÛE, adj. Autre mot suranné. "C' est une des plus ardûes (difficiles) questions que j' aie jamais ouï faire en quelque science que ce soit. Voit. _ M. Linguet s' en est servi depuis peu. "Neuton a eu des imitateurs, comme il avoit eu des prédécesseurs, dans cette recherche ardûë (la quadrature du cercle) M. Mourraille, Secrétaire de l' Académie de Marseille, l' a employé aussi dans l' Éloge de M. de Forbin-Gardane: "Dans la route ardûe et dificile, qui mène à la gloire des armes. Arduë est vieux, dit l' Acad.

ARE


ARE: dans cette terminaison, la pénult. est toujours longue; Barbâre, avâre, etc. Il est bon de marquer l' â d' un acc. circ.

ARèNE


ARèNE, s. f. ARÉNEUX, EûSE, adj. [Arè--ne, ré-neû, eû-ze; 2e lon. dans le 1er, è moy. 3e lon. aux deux dern. dont la 2de est un é fer.] Ils ne se disent plus au lieu de sâble ou de sabloneux, ni au propre, ni au figuré. La Touche les trouvait vieux en prôse, et beaux en poésie. Il cite un vers, sans dire d' où il l' a tiré.
   De ce pays brûlant les plages aréneûses.
On disait aussi autrefois figurément: écrire, bâtir sur l' arène; on ne dit plus que sur le sâble. _ L' Acad. dit d' arène, qu' il est plus de la poésie que de la prôse; et d' aréneux, qu' il est vieux, et n' a guère d' usage qu' en Poésie.
   ARèNE ne se dit plus que des cirques, des amphithéâtres anciens: "Néron obligea les Chevaliers Romains de descendre dans l' arène. D' Ablanc. On dit aussi sur l' arène. "On le dit en ce sens, au figuré, en prôse comme en vers: "Un homme d' une âme élevée ne descendra point dans l' arène pour leur répondre. Necker. _ Arène, Amphithéâtre de Nîmes, qu' on apelle dans le pays les Arènes.

ARÉOPAGE


ARÉOPAGE, s. m. ARÉOPAGITE, s. m. Noms d' un Tribunal d' Athènes fort célèbre, et des membres qui le composaient. L' Acad. ne met pas le 2d: c' est un oubli. _ On dit d' une compagnie de Sages, de Magistrats intègres, c' est un Aréopage; mais on ne dit pas Aréopagite dans ce sens figuré: on ne le dit qu' au propre: St. Denis l' Aréopagite.

ARêTE


ARêTE, s. f. ARÉTIER, s. m. [2e ê ouv. et long au 1er, é fer. et br. au 2d, dont la 3e est aussi un é fer. Aré-tié.] On écrivait autrefois areste, arestier. _ Les arêtes sont dans les poissons ce que les ôs sont dans les autres animaux. Petite arête, grosse arête, poisson qui a beaucoup d' arêtes (on parle alors des petites, qui sont comme des épingles.) On apelle vive arête dans une pièce de bois, équarrie, les angles bien marqués. _ Arétier, pièce de bois qui forme l' arête ou l' angle des toits qui sont en croupe ou en pavillon.

ARGENT


ARGENT, s. m. [Arjan, 2e lon.] 1°. Métal blanc le plus parfait et le plus précieux après l' or; "vaisselle, flambeaux, cuvette, pot-à-l' eau d' argent. = 2°. Monnoie de quelque métal qu' elle soit; il a beaucoup d' argent. En ce sens il n' a point de pluriel: le peuple dit quelquefois: Il est venu retirer ses argents: il faut dire, son argent. _ Dans le 1er sens on peut le mettre au pluriel: de tous les argents qui sont-là, voilà le plus beau. = 3°. Plus particulièrement, Monoie faite de ce métal: "Tant en argent, tant en or. On dit même argent blanc, pour le distinguer de l' or et du cuivre.
   ARGENT entre dans plusieurs expressions du style familier; on dit, faire argent de tout. M. Moreau dit absolument, faire de l' argent, pour, amasser de l' argent: "Les Princes ne songèrent qu' à faire de l' argent (pour fournir aux frais de la croisade.) Cette expression n' est pas fort noble. Jouer bon jeu, bon argent, agir sérieusement et de bonne foi: "On le dit amoureux d' une de ces Dames.... Il ne me paroît pas qu' elle veuille jouer bon jeu, bon argent avec un Héros qui passe. Sev. c. à. d. écouter sérieusement un homme qui ne fait que passer. _ Prendre ce qu' on dit pour argent comptant, être crédule. _ Mettre du bon argent avec du mauvais, plaider contre un homme insolvable. _ Valoir beaucoup d' argent, se dit d' un homme qu' on aime, qu' on estime, ou qui nous a fait quelque plaisir. "Ce petit Coulanges vaut trop d' argent: je garde toutes ses lettres. Sév. _ On dit au contraire d' un vaurien, qu' il ne vaut pas grand argent. = Point d' argent, point de Suisse: on ne fait rien gratuitement: _ L' argent est le nerf de la guerre: on ne peut rien faire sans argent. _ Bourreau d' argent, homme excessivement prodigue.

ARGENTER


ARGENTER, v. a. [Arjanté, 2e lon. 3e é fer.] Couvrir de feuilles d' argent.

ARGENTERîE


ARGENTERîE, s. f. [2e et 4e lon., 3e et 5e e muet. Arjanterî-e.] 1°. Vaisselle et autres meubles d' argent. _ 2°. Dans les Églises, croix, bénitier, chandeliers et autres vâses d' argent.

ARGENTEûX


ARGENTEûX, EûSE, adj. [Arjan-teû, teû-ze, 2e et 3e lon.] Pécunieux, qui a beaucoup d' argent. _ Je le crois bas et populaire. L' Acad. dit qu' il est familier.

ARGENTIN


ARGENTIN, INE, adj. [Arjan-tein, tine, 2e lon.] On ne le dit que des flots pour la couleur, et de la voix ou des cloches pour le son; flots argentins, voix argentine, son argentin.
   Les cloches dans les airs de leurs voix argentines
   Apeloient à grand bruit les Chantres à matines.
       Boil.

ARGEROLE

*ARGEROLE, barbarisme. On dit Azerole.

ARGILE

ARGILE, s. f. [Trév. écrit Argille L' Acad. a bien fait de ne mettre qu' une l.] Terre à potier, grasse et gluante, dont on fait des vaisseaux de terre. Trév. On l' apelle aussi glaise, ou terre glaise.

ARGILEUX


ARGILEUX, EûSE, adj. [3e lon. gi-leû, leû-ze. Trév. et le Dict. Gram. écrivent argilleux avec 2 l. Il faut savoir gré à l' Acad. de n' en avoir mis qu' une.] Qui tient de l' argile: "Terre argileûse.

ARGOT


ARGOT, s. m. 1°. Certain jargon des Gueux et des filoux, qui n' est intelligible qu' entr' eux: "Savoir l' argot, entendre l' argot; ce qui se dit aussi figurément, dans le style familier, d' un homme alerte, intrigant et intelligent. _ 2°. En termes de Jardinier, bois dans un arbre, qui est au-dessus de l' oeil. = 3°. Pour les ongles pointus des coqs et des chiens, il faut dire Ergot, et non Argot. Voy. ERGOT.

ARGUER


ARGUER, v. a. [L' u se pron. argu-é.] Il ne se dit qu' au Palais: Arguer une pièce de faux. C' est le latin arguere, reprendre, acuser.

ARGUMENT


ARGUMENT, s. m. [Arguman, dern. lon.] 1°. Raisonement par lequel on tire une conséquence d' une ou de deux propositions. Acad. La conséquence de la connexion de deux extrêmes qu' on tire de celle d' un terme moyen. Trév. Cette définition est obscure, et n' aprend rien à ceux qui ne sont pas initiés dans la Logique Scolastique. Celle de l' Académie est incomparablement meilleure. _ Argument démonstratif, fort, invincible. Argument captieux, sophistique, etc. Faire un argument; répondre, satisfaire à un argument. = 2°. Indice, conjectûre, preuve: "J' en tire un grand argument contre lui, ou en sa faveur. = 3°. Le sujet en abrégé d' un ouvrage. "L' argument d' un Poème, d' une Pièce de Théâtre, etc. En ce dernier sens, il est peu usité aujourd' hui.
   * Rem. Dans le 2d sens, il était plus en usage autrefois qu' aujourd' hui: "La franchise avec laquelle il nous decouvroit ses fautes, nous étoit un argument de sa docilité. _ On dirait aujourd' hui, nous était une preuve. _ On ne dit argument en ce sens, qu' avec tirer, fournir, ou autres verbes semblables, et jamais seul, comme dans cette dernière phrâse; et même avec ces verbes, il vieillit.

ARGUMENTANT


ARGUMENTANT, ARGUMENTATEUR, s. m. *ARGUMENTEUR, s. m. [mantan, manta-teur, man-teur; 3e lon.] Argumentant est celui qui argumente dans un acte public contre le Répondant. Argumentateur, celui qui aime, qui cherche à argumenter. Argumenteur est de Fontenelle, qui dit de M. Varignon: "Il alloit souvent disputer à des Thèses, et il y brilloit fort par sa qualité de bon Argumenteur. Il faut dire là argumentant.

ARGUMENTATION


ARGUMENTATION, s. f. [Argumanta--cion; 3e lon.] Manière de faire des argumens. "Il brille, il excelle dans l' argumentation.

ARGUMENTER


ARGUMENTER, v. n. [Argumanté, 3e lon. 4e é fer.] 1°. Faire un ou plusieurs argumens. Argumenter contre le Répondant, contre une proposition. * Il en est qui le font actif, et qui disent argumenter le Répondant: argumentez-moi. C' est un barbarisme de régime. = 2°. Prouver par argumens. Voici comme j' argumente, c. à. d. comme je le prouve: vous argumentez mal; vous prouvez fort mal ce que vous avez avancé. = 3°. Tirer des conséquences d' une chôse à une autre. "On ne doit point argumenter de la possibilité à l' existence. On l' emploie sur-tout au Palais avec ce régime. "La transaction, dont elle argumente, c. à. d. dont elle veut tirer des conséquences favorables à sa caûse.

ARGUS


ARGUS, s. m. [On pron. l' s.] Nom tiré de la Fable. Espion domestique, ou homme aposté pour épier quelqu' un.
   Son Argus l' aperçoit, et d' abord d' importance
   Il le réprimande, il le tance.
       L' Ab. Reyre.

ARIDE

ARIDE, adj. Sec ou stérile; terres arides, cîterne aride. _ Au figuré, il se dit d' un sujet qui ne fournit pas au discours, et d' un esprit qui ne produit rien: "Ce sujet est aride; c' est un esprit aride; imagination aride. _ Qui manque d' agrémens, discours aride.
   Massillon le dit de l' âme dans un sens figuré qui tient du propre: "Au Grand rien ne suffit, parce qu' il peut prétendre à tout... Son âme est toujours aride et altérée. _ M. l' Ab Boulogne le dit aussi de l' âme, mais dans le sens de peu sensible: "Laissons aux âmes froides et arides le vil besoin ou le triste plaisir de la censûre. _ Rousseau l' aplique à la vertu dans le sens de stérile.
   Quel coeur impunément peut naître généreux?
   Et l' aride vertu, limitée en soi-même,
   Que sert-elle? qu' à rendre un malheureux qui l' aime
   Encor plus malheureux.
   Rousseau raisone là en payen. C' est à-peu-près le mot de Brutus après la bataille de Pharsale.

ARIDITÉ


ARIDITÉ, s. f. Sècheresse. Il se dit au propre et au figuré; l' aridité d' un terrain, de l' esprit, du style, d' un ouvrage, etc. _ En termes de dévotion, état d' insensibilité, de dégoût, etc. Il se dit au pluriel: les aridités dans la prière, etc.
   Rem. Apliqué au style, ce mot est fort à la mode. "Le style en est brusque, tranchant, sans liaison, et par-là d' une aridité qui fatigue et qui démontre combien l' affectation de l' esprit et de la philosophie dessèche le coeur et les lettres. Sab. (Trois Siècles.) parlant de l' Hist. de Louis XI par M. Duclos. "Quant au style de la pièce (les Barmecides) il se ressent de l' aridité du sujet. Fontenai.

ARIETTE


ARIETTE, ou ARIèTE, s. f. [3e. è moy. tout bref.] En conversation il est de 3 syll. seulement, a-riè-te; en vers il est de quatre, ari-è-te. Dans le Mercûre on reprend M. le Baron de T..... d' avoir dit:
   Crier bravo sur une ariette.
Il y a une syllabe de trop dans ce vers.
   ARIETTE, dit Trév. Petit air vif et enjoué; mais il est des ariettes tristes et dolentes. _ "Air léger et détaché, à l' imitation des Italiens. Les cantates, les petits opéra sont mêlés de récitatifs et d' ariettes. Acad. Cette définition vaut mieux; car un air léger et détaché peut être triste et dolent, si le sujet le demande.

ARISTARQUE


ARISTARQUE, s. m. C' est le nom d' un des Commentateurs d' Homère, critique fort estimé. Il est devenu un nom commun pour signifier un critique sévère, mais équitable. "Consultez votre ami, mais qu' il soit pour vous un Aristarque.

ARISTOCRATE


*ARISTOCRATE, s. m. Membre ou partisan du Gouvernement Aristocratique. Ce mot est nouveau, et il a besoin du sceau de l' usage. "Le peuple en corps peut abuser de la Souveraineté; des Aristocrates peuvent en abuser aussi. Moreau. "C' est en calomniant les classes inférieures de la Nation (Anglaise) que nos Aristocrates justifient et soutiennent les panégyriques tant multipliés en faveur de l' anarchie. Linguet. "Des Aristocrates, des Souverains devoient-ils écouter ces pressentimens pusillanimes? Le même. _ Dans le 1er et le 3e exemple, Aristocrate est pris pour un membre, dans le 2d pour un partisan de l' Aristocratie.

ARISTOCRATîE


ARISTOCRATîE, s. f. ARISTOCRATIQUE, adj. ARISTOCRATIQUEMENT, adv. [Aris-tokracî-e, tike, tikeman; 5e long. au 1er; 6e e muet au 3e.] Gouvernement où le pouvoir est exercé par plusieurs persones considérables. Quand le nombre en est petit, on l' apelle aussi Oligarchie. L' État de Gènes et celui de Venise sont des Aristocraties. _ Aristocratique, qui apartient à l' Aristocratie; État, Gouvernement Aristocratique. _ Aristocratiquement; d' une manière aristocratique. "Gouverner aristocratiquement.

ARITHMÉTICIEN


ARITHMÉTICIEN, s. m. ARITHMÉTIQUE, s. f. ARITHMÉTIQUEMENT, adv [Richelet écrit ces mots sans h. Aritméti--cien, tike, tikeman; 3e é fer.] L' Arithmétique est la science des nombres; Arithméticien, celui qui sait l' Arithmétique et qui s' y adone. _ Arithmétiquement, d' une manière arithmétique: procéder, calculer arithmétiquement. _ Suivant la proportion arithmétique. "Quantités proportionelles arithmétiquement. _ L' Acad. ne done que la 1re définition, et l' exemple qu' elle done apartient à la seconde.
   ARITHMÉTIQUE est aussi adjectif. "Proportion (et non pas proposition) arithmétique, comme on le lit dans une édit. du Dict. de l' Acad. par l' inattention, sans doute, de l' Imprimeur: "Progression Arithmétique.

ARLEQUIN


ARLEQUIN, s. m. ARLEQUINADE, s. f. C' est l' Acteur principal de la Comédie Italienne, qui y fait ordinairement les rôles de valet, mais de valet bouffon. Ce mot est devenu le synon. de boufon, et arlequinade, de boufonerie. "Cet homme est un arlequin, un vrai arlequin; il ne dit, il ne fait que des arlequinades. _ Boufonerie, soit dans le jeu, soit dans les paroles, dit Trév. _ L' Acad. ni le Rich. Port. ne mettent pas ces mots.

ARMADILLE


ARMADILLE, s. f. [Mouillez les 2 ll, tout bref, dern. e muet.] Petite flotte garde-côte dans les possessions Espagnoles du Nouveau Monde. _ Trév. le dit aussi d' une frégate légère, dont les Espagnols se servent dans les Indes Occidentales. Mais une seule frégate n' est pas une armadille, une petite armée navale; car c' est l' origine et le sens de ce mot.

ARMATEUR


ARMATEUR, s. m. Celui qui arme un ou plusieurs vaisseaux pour aller en course. _ Il se dit par extension du Capitaine et du Vaisseau même. = On le dit encôre des vaisseaux armés en marchandises, mais seulement de celui qui fait les frais de l' armement, et non pas du Capitaine, et encore moins du Vaisseau. Un tel est l' Armateur, un tel le Capitaine de.... L' Acad. ne met point ce 2d sens, quoiqu' elle l' insinue au mot Armement. _ Le Rich. Port. le met.

ARME


ARME, s. f. Il se dit le plus souvent au pluriel. On le dit pourtant quelquefois au singulier. Arme à feu, arme blanche: le 1er se dit des fusils, des pistolets, etc. le 2d, des épées, sabres, baïonettes. Arme offensive, qui est pour l' attaque; arme défensive, pour la défense, etc. Voy. ARMES et ARMûRE.

ARMÉ


ARMÉ: voy. ARMER, à la fin.

ARMÉE


ARMÉE, s. f. [2e lon. é fer. 3e e muet.] Grand nombre de troupes, assemblées en un corps, sous la conduite d' un Général. Acad. Corps de plusieurs soldats sous un Général et plusieurs autres Officiers particuliers. Trév. Cette 2de définition ne vaut rien, et tout le monde en apercevra le défaut. Celle du Rich. Port. revient à celle de l' Acad. Mais elle ne dit pas plus en plus de paroles. _ Armée tout court, c' est armée de terre; l' armée de mer s' apelle Armée Navale. "Mettre une armée sur pied; mettre, ranger une armée en bataille. _ L' Écriture Sainte apelle Dieu, le Dieu des Armées.

ARMER


ARMER, v. a. et n. [Armé, 2e é fer.] 1°. Fournir d' armes. Il y a dans cet arcenal de quoi armer tant de mille hommes. _ Neutralement, Lever des troupes. On arme de tous côtés. = 2°. Exciter à combattre, à faire la guerre; ce qui se dit au propre et au figuré: "La querelle de Ménélas et de Pâris arma l' Asie et l' Europe: "L' intérêt les a armés l' un contre l' autre.
   S' ARMER, se munir d' armes: s' armer d' une épée, etc. _ Prendre les armes contre: Rien ne peut les autoriser à s' armer contre leur Prince. _ Au figuré, il réunit les deux régimes de et contre.
   Comblé de tant d' honeurs, ce perfide que j' aime
   De mes propres bienfaits s' arme contre moi-même.
       Créb.
_ Se précautioner contre; s' armer contre le froid, contre les tentations; s' armer de courage, de patience, contre les événemens, contre les revers. _ Se fortifier; s' armer de la prière, du signe de la croix.
   ARMER, act. se dit aussi pour garnir une chôse avec une aûtre qui lui done de la force. Armer une poutre de barres de fer.

ARMÉ


ARMÉ, ÉE, part. et adj. Il se dit au propre, armé de toutes pièces, armé de pied en cap, armé d' épées et de pistolets; et au figuré, armé de constance et de fermeté. "Armé de sa seule innocence, il n' a besoin ni de cuirasse, ni de bouclier pour se défendre. Jér. Déliv. _ Armés à la légère, ou légèrement armés; suivant Th. Corn. et la Touche, l' usage s' est déclaré pour la première façon de parler: on ne se sert guère plus de la seconde. L' Acad. a continué de les mettre toutes les deux sans remarque. Mais la 1re est certainement plus comune et plus autorisée.
   On dit d' un home plus armé qu' on n' a coutume de l' être: armé jusqu' aux dents.

ARMES


ARMES, s. f. pl. 1°. Dans son sens le plus propre, Instrument qui sert à ataquer, ou à se défendre. Voy. ARME. _ Faire ou tirer des armes, s' exercer à l' escrime. Maître en fait d' armes, ou Maître d' armes; celui qui montre à faire des armes. On apelait autrefois Homme d' armes, Gens d' armes, les Cavaliers armés de toutes pièces. Voyez GENT. = 2°. La profession de la guerre: Suivre, quitter les armes. = 3°. Entreprises de guerre: Le succès des armes: c' est ce qui fait prospérer les armes du Roi. = 4°. Tout le harnois d' un homme de guerre: Armes complètes; armes à l' épreuve du mousquet, du pistolet. Endôsser les armes; recevoir un coup dans ses armes. = 5°. Au figuré, tout ce qui sert à combattre, à détruire une erreur, une opinion, une passion. "Vous me fournissez des armes contre vous-même. "Le jeûne et l' oraison sont les meilleures armes contre les tentations. Acad.
   Rem. Armes se dit par métonymie au lieu de guerre; le sort des armes est incertain. "Les armes sont journalières; ce qui se dit, non-seulement de la guerre, mais de toutes les chôses où l' on peut bien ou mal réussir. _ * Bossuet reproche à Luther d' avoir parlé indifféremment et à ceux dont les armes étoient légitimes, et à ceux dont elles étoient séditieuses. On voit par cet exemple, qu' armes ne peut être modifié par toute sorte d' adjectifs. Je ne crois pas en effet qu' on puisse dire que des armes sont légitimes, encôre moins, qu' elles sont séditieuses; quoiqu' on dise, qu' elles sont triomphantes ou malheureuses. L' usage aprouve l' un et condamne l' aûtre.
   Ce n' est que par des pleurs que vous me répondez
   Vous fiez-vous encor à de si foibles armes?
       Rac.
"Mde. la Comtesse, reprit-il, la douceur et la modestie sont les armes de votre sexe. Marm.
   On dit, au figuré comme au propre, faire tomber les armes des mains: "Cette soumission lui fit tomber les armes des mains, apaisa sa colère. _ Combattre à armes égales, se dit de deux Littérateurs et aûtres contendans, comme de deux Guerriers. _ Baisser les armes, céder, faire des soumissions. Ce dernier est du style familier. _ Prendre les armes, rendre les armes se disent aussi au figuré comme au propre. _ Porter les armes contre, ne se dit qu' au propre. "Le jeune Télémaque n' a jamais porté les armes contre les Troyens. Télémaque.
   On disait autrefois indifféremment, sous les armes et sur les armes; on ne se sert plus de cette dernière expression. Th. Corn. L. T. "Toute l' armée étoit sous les armes. _ Et dans le style fig. famil. "Cette Dame étoit sous les armes, extrêmement parée.
   Faire ses premières armes, pour dire, faire son aprentissage dans la guerre, est une bonne façon de parler; mais on ne doit s' en servir que dans un style un peu élevé. Dans le style simple, on dit plutôt faire ses premières campagnes.
   * On doit dire par la force des armes, et non pas, par la force des armées, quand on parle indéfiniment. "Louis (XII) hors d' état de se faire rendre justice par la force des armées, fut obligé d' entrer dans une négociation infructueûse avec Ferdinand. Hist. des Tud.
   On dit figurément, mettre les armes entre les mains d' un furieux, fournir à un homme des chôses, dont il abuse pour se perdre. _ S' escrimer des armes de Samson, se dit d' un homme qui fait jouer les machoires, et qu' on veut qualifier d' âne. Celui-ci est bas et populaire.
   ARMES, ARMOIRIES ne sont pas tellement synonymes, qu' on puisse toujours employer l' un pour l' autre. Il faut dire: quelles sont vos armes? Gentilhomme de nom et d' armes: blasoner des armes: les armes de France, etc. Mais on dit: un livre d' armoiries, un traité d' armoiries, etc. Voyez ARMOIRIES.

ARMET


ARMET, s. m. Casque, armûre de tête. Il n' est en usage qu' en parlant des Chevaliers errans de nos vieux romans.

ARMILLAIRE


ARMILLAIRE, adj. fém. [Pron. les 2 ll sans les mouiller. Le Dict. Gram, dit le contraire, mais c' est une erreur. Armil-lère, 3e è moy. et long.] Il ne se dit qu' avec sphère. _ Sphère évidée et composée de plusieurs cercles, pour représenter la disposition du Ciel et le mouvement des astres.

ARMISTICE


ARMISTICE, s. m. Il y a peu de gens qui aprouvent ce mot, disait-on dans le Dict. de Trév. dès 1704. Richelet dit aussi, que ce terme était rejeté de plusieurs. C' est un mot de Gazette: on dit plutôt suspension d' armes. _ M. Moreau s' en est servi. "Le Traité de Francfort ne fut qu' un armistice. _ L' Acad. le met sans remarque et sans doner d' exemple. Je crois qu' il n' est pas du beau style, et que trève, suspension d' armes sont préférables.

ARMOIRE


ARMOIRE, s. f. [Ar-moâ-re, 2e lon.] Le Peuple de Paris dit ormoire et omoire. Villon a dit aumoire; en Anjou on dit ermoire: il faut dire armoire. Men. _ Plusieurs, sur-tout en Provence, font armoire masc. Il est certainement fém. Une grande armoire, et non pas un grand armoire. = Meuble de bois, en forme de bufet, qui sert à serrer des habits, du linge et aûtres hardes. On l' apelle armoire, parce que son premier usage a été de serrer des armes.

ARMOIRIES


ARMOIRIES, s. f. pl. On dit souvent armes pour armoiries. (Voy. ARMES à la fin) Mais il y a des endroits où il n' irait pas bien, comme dans cet exemple du P. Menestrier. "La Noblesse commença à se distinguer par des noms propres et des armoiries. Reflex. Tout le monde peut-être et moi tout le premier, ne goûtera pas la critique de l' Auteur des Réflexions; ni la règle que done La Touche, qu' on ne doit se servir du nom d' armoiries, que lorsque celui d' armes pourrait être équivoque. Encore une fois, Voy. Armes à la fin.

ARMORIAL


ARMORIAL, s. m. ARMORIER, v. a. ARMORISTE, s. m. Le 1er se dit d' un livre contenant les armoiries d' un Royaume, d' une Province. L' armorial de France, de Dauphiné, de Provence, etc. = Armorier, c' est peindre ou apliquer des armoiries sur... Ce carrosse n' est point armorié; il n' a point d' armes: il faut le faire armorier. _ Qui a écrit sur le blason, qui en possède la science. Auteur d' un armorial. L' Acad. ne met pas Armoriste. Trév. et le Rich. Port. le mettent.

ARMORIQUE


ARMORIQUE, s. f. et adj. Ancien nom de la Bretagne. On ne l' emploie qu' en vers et dans l' Histoire anciène.
   Non loin de l' armorique plage.
   Il est une Isle, affreux rivage,
   Habitacle marécageux.
       Gresset.

ARMûRE

ARMûRE, s. f. [2e lon. Il convient d' y mettre un acc. circ.] Il se dit des armes défensives, qui couvrent et joignent le corps, comme cuirasse, casque, etc. _ Armûre complette, légère, pesante, etc. _ Il s' emploie au figuré, mais plus dans le sacré que dans le profane. "L' Écritûre Sainte parle de l' Armûre de Dieu, par laquelle on peut résister aux mauvais jours. C' est un terme consacré. "La patience est une armûre impénétrable. Trév. Une bonne armûre contre les maux. Rich. Port. Il est un peu vieux. L' Acad. ne le met pas au figuré.
   ARMûRE, Arme (Synon.) Le 2d se dit de tout ce qui sert au soldat pour le combat, soit pour attaquer, soit pour se défendre. Le 1er n' est en usage que pour ce qui sert à le défendre des atteintes et des effets du coup. Il ne se dit que dans les détails, en nommant quelque partie du corps: armûre de tête, armûre de cuisse, et on ne dit pas en général, les armûres; on se sert alors du mot d' armes. GIR. Synon. _ Cela n' est pas exact. À~ la vérité on ne dit pas les armûres, mais on dit armûre complette, etc. ce qui comprend l' armûre de toutes les parties du corps, sans qu' on en nomme aucune. "Dom Quichote prit un bassin à barbe pour une armûre de tête.

ARMURIER


ARMURIER, s. m. [Armu-rié, 3e é fer. tout bref.] Ouvrier qui fabrique ou qui vend des armes défensives, comme casques, cuirasses; et des armes à feu, comme fusils, pistolets, etc. Il se dit sur-tout des derniers.

AROMATE


AROMATE, s. m. Richelet met aussi aromat, en avertissant que des Auteurs l' écrivent ainsi; mais que le bel usage est pour aromate. _ Dans le Dict. Gramm. on met Aromats, s. m. p. comme s' il ne se disait point au singulier. On dit des aromates; mais on dit aussi, un aromate précieux. = Drogue odoriférante. Acad. comme la canelle, l' encens, le genièvre, la muscade. _ Composition odoriférante de quelque espèce qu' elle soit. Trév. Cela ne peut se dire que par extension; car les vrais aromates ne sont pas des compositions. Ainsi cette définition parle de l' accessoire, et ne dit mot du principal. _ Tout ce qui a une odeur agréable. Rich. Port. C' est encore doner une fausse idée de l' aromate. Les fleurs ont une odeur agréable, et ne sont pas des aromates.

AROMATIQUE


AROMATIQUE, adj. [Aromatike, tout bref.] "Ce qui est délicieux, odoriférant. Trév. Qu' elle définition! "Qui est odoriférant. qui a quelque chôse d' odoriférant. Rich. Port. Cela est encôre trop vague. Voy. AROMATE. "Qui est de la natûre, ou qui a l' odeur des aromates. Herbe aromatique, odeur aromatique. Acad.

AROMATISER


AROMATISER, v. a. [Aromatizé, tout bref, dern. é fer.] Mêler des aromates avec quelque chôse. "Aromatiser de la poudre, des gants, des habits, etc. Trév. dit, mettre des aromats dans une substance ou liqueur. C' est trop borner l' usage de ce mot, à moins que par substance on n' entende tout ce qui existe dans la natûre: mais alors pourquoi ajouter liqueur?

ARONDELLE


*ARONDELLE, vieux mot. On dit Hirondelle.

ARPENT


ARPENT, s. m. ARPENTAGE, s. m. Étenduë de terre, contenant ordinairement cent perches quarrées. Trév. L' Acad. dit seulement de superficie. Cela n' est pas exact. La perche est de dix-huit piés. Rich. Port. _ Arpentage, est le mesurage par arpent.

ARPENTER


ARPENTER, v. a. ARPENTEUR, s. m. [2e lon. Arpanté, pan-teur.] Mesurer des terres par arpent. Acad. Le Dict. de Trév. ajoute, ou aûtrement. Cette addition est nécessaire, car dans les Provinces où l' on mesure par journaux, charges, ou carterées, on ne laisse pas de dire arpenter. _ Mesurer par perches. Rich. Port. C' est encore restreindre le sens de ce mot par la raison qu' on vient de dire. _ Au figuré, arpenter, c' est marcher vite et à grands pas. Acad. C' est aussi parcourir une terre, un canton, quoique d' un pas ordinaire. L' Acad. ne met pas ce 2d sens, qui est plus usité que le premier. "Ce solliciteur arpente tout Paris.
   ARPENTEUR. Celui qui fait profession d' arpenter. Trév. Celui qui sait l' arpentage, et qui mesure avec la perche ou la toise. Rich. Port. _ L' Acad. ne le dit que d' un Officier dont la charge est d' arpenter les terres, quand il est nomé par la Justice. Mais c' est la définition des Arpenteurs d' Office, ou Jurés; et il y en a d' autres qui le font sans avoir d' Offices et sans être Jurés. La définition de l' Acad. n' est donc pas assez générale.

ARQUÉ


ARQUÉ, ÉE, adj. Courbé en arc. [Arké, ké-e, 2e é fer. long. au 2d.] Navire arqué, poutre arquée, jambes arquées. L' usage de ce mot est borné à ces phrâses.

ARQUER


ARQUER, v. n. Se courber en arc. Cette poutre arque déjà.

ARQUEBUSADE


ARQUEBUSADE, ARQUEBûSE, ARQUEBûSERîE, s. f. [Arkebuzade, bûze, bûzerî--e, 2e e muet, 3e lon. au 2d et au 3e, 4e e muet aux deux dern. 5e lon. au 3e.] Arquebûse est une arme à feu et à rouet, qui se bande avec une clef. _ Arquebusade est un coup d' arquebûse. _ Arquebûserîe, le métier d' Arquebusier.

ARQUEBUSER


ARQUEBUSER, v. a. ARQUEBUSIER, s. m. [Arkebuzé, buzié, 2e e muet, 4e é fer. tout bref.] Tuer à coups d' arquebûse. _ Celui qui est armé d' une arquebûse. _ L' ouvrier qui fait des arquebûses, qui en vend. Trév. L' Acad. ajoute; et toutes sortes d' armes à feu portatives. Les Arquebusiers sont à-peu-près comme les Armuriers.

ARR


ARR. Cette syllabe est toujours longue, bârre, bisârre, etc. et même quand elle n' est pas finale; bârrière, lârron, cârrosse, etc.
   Dans les mots, qui commencent par arr, on ne prononce qu' une r, mais fortement: il serait à souhaiter qu' on n' en écrivît aussi qu' une.

ARRACHER


ARRACHER ou ÂRACHER, v. a. [Âra--ché, 3e é fer. 1re lon. r forte.] Détacher avec effort ce qui tient à... Âracher des arbres, des herbes, les cheveux, une dent, un clou, etc. etc. = Tirer adroitement, ou avec peine de quelqu' un. "C' est un avâre, il ne done pas l' argent; il faut le lui arracher. "On ne sauroit lui âracher une parole.
   ARRACHER régit-il à ou de? Au propre le 2d est plus usité; au figuré, et sur-tout avec les persones, le 1er est le meilleur: âracher un clou d' une muraille; une pierre d' un mur; âracher de l' argent à un avâre.
   ARRACHER les yeux à quelqu' un, une pierre de ses mains. _ Plusieurs Auteurs ont préféré de.
   La plus sainte de Loix: ah! c' est de vous sauver
   Et d' arracher, Seigneur, d' une mort manifeste,
   Le sang des Ottomans, dont vous êtes le reste.
       Bajazet.
Le Poète a eu ses raisons pour préférer de à la prép. à; mais en prôse, j' aimerais mieux dire, à une mort manifeste. "L' érection du Tribunat avoit été arrachée du Senat. Vertot. "Il a paru plaisant que la Philosophie arrachât du Clergé une condescendance silencieuse. Linguet. _ Quand c' est la chôse qui est régie, l' ablatif fait fort bien. "La gloire seule put arracher Pétrarque de cette retraite. Ann. Litt. _ L' Acad. done des exemples des deux régimes; on ne saurait l' arracher de l' étude, du jeu. "Il est si attaché à cette femme, qu' on ne peut l' en arracher. Voilà un ablatif qui semble régir la persone: mais l' en arracher, c' est l' arracher d' auprès d' elle, des lieux où elle se trouve. "On ne saurait l' arracher à cette compagnie. _ Voilà ce me semble, la distinction du régime de la persone, et de celui de la chôse. Dans les exemples cités de l' Ab. Vertot et de M. Linguet, j' aimerais donc mieux ârachée au Sénat; âracha au Clergé
   Dans s' âracher, le pron. pers. se est tantôt au datif: je me suis âraché (à moi-même) une épine du pied; tantôt il est à l' acusatif: il s' ârache (lui-même) à ce qu' il a de plus cher. On voit aisément, par cette distinction, la raison de la différence des deux régimes. _ Être âraché, au figuré, a le régime de s' âracher dans les deux sens: être âraché à ce qu' on aime.

D' ARRACHE-PIED


D' ARRACHE-PIED, adv. Tout de suite, sans intermission. J' ai travaillé pendant un an six heures par jour d' ârache-pied.

ARRACHEUR


ARRACHEUR, s. m. Il ne se dit qu' avec dents; et seulement des Charlatans, qui les arrachent. Quand on ne veut pas mépriser, on dit Dentiste. _ On dit proverbialement, menteur comme un Âracheur de dents, qui promet toujours de ne point faire de mal

ARRAISONER


*ARRAISONER, v. a. On a dit autrefois arraisoner quelqu' un. V. Nicot et Monet. _ Furetière veut qu' on dise s' arraisoner avec, et non pas arraisoner. Ni l' un ni l' autre, dit La Monnoie, ne se trouve dans les Dictionaires postérieurs. _ On l' a conservé dans le Dict. de Trév. dont le fond est celui de Furetière; mais on y avertit que ce mot est vieux et bas, et tout au plus bon pour le style familier. _ Vieux mot, dit le Rich. Port. _ L' Acad. ne le met pas.

ARRANGÉ


ARRANGÉ, ÉE, adj. Qui a de l' arrangement dans ses opérations, qui fait les chôses avec ordre. Homme arrangé, femme arrangée. Pour arrangé participe, Voy. ARRANGER.

ARRANGEMENT


ARRANGEMENT, ou ÂRANGEMENT, s. m. [Arangeman, r forte; 1re 2e et 4e lon. 3e e muet.] Ordre, état de ce qui est arrangé. Arangement de livres, de meubles, etc. _ Ordre dans un discours: l' ârangement des preuves contribûe beaucoup à la beauté d' un discours. _ Au pluriel, mesures qu' on prend pour finir une affaire. "Il a pris des ârangemens pour payer ses dettes.
   Rem. L' arrangement des mots, dit Vaugelas, est un des plus grands secrets du style. Qui n' a point cela, ne peut pas dire qu' il sache écrire. Il a beau employer de belles phrâses et de beaux mots: étant mal placés, ils ne sauraient avoir ni beauté, ni grâce.
   Tantùm series jancturaque pollet.       Horat.
Tant causent d' agrémens l' ordre et la liaison.
Il est un ârangement des mots fixé par les Règles de la Gramaire, qui ne sont autre chôse que celles du bon sens ou de l' usage, qui établissent l' ordre, qui doit être gardé entre les différentes parties du discours. Ces Règles sont sans cesse rapelées dans ce Dictionaire. _ Il est un autre ârangement de mots arbitraire, où l' on ne peut être guidé que par le goût, et un peu par l' oreille. C' est celui dont parle Vaugelas. On ne peut prescrire des regles pour cet ârangement. Tout ce qu' on peut dire en général, c' est que rien ne doit choquer l' oreille et nuire à la clarté. La netteté du discours est sa première qualité: l' harmonie est la seconde. On peut aquérir la première par la réflexion; mais pour l' autre, il faut que le goût naturel la done. L' exercice et les observations peuvent seulement la perfectioner.

ARRANGER


ARRANGER, ou ÂRANGER, v. a. [Arangé; r forte; 2e lon. 3e é fer.] 1° Mettre un ordre convenable; âranger des livres, ce qui est dans une chambre, etc: = 2° Acomoder, mettre en ordre; âranger ses affaires. = 3° S' âranger a ces deux sens: mais la dépravation des moeurs lui en a doné un nouveau: c' est un nom fort doux, doné à un commerce peu honnête: "Pour éviter les imprudences, on s' arrangea décemment. Marm. Ce même verbe a un autre sens plus honête et plus ancien; c' est arranger ses afaires. "Est il vrai que vous vous arrangez, vous qui êtes né pour une belle profusion? Coyer. _ Se ranger a raport aux moeurs: s' arranger aux dettes et aux dépenses. _ Ârangez-vous, choisissez: "Mais Dâme, arrangez-vous, Monsieur; ou vous ne disiez pas la vérité ce matin, ou vous la niez maintenant. Th. d' Educ. Il est du style familier.

ARRASEMENT


ARRASEMENT, ARRASER. V. ARâSEMENT, ARâSER.

ARRENTEMENT


ARRENTEMENT, s. m. ARRENTER, v. a. [ou ARENTEMENT, ARENTER, 2e lon. en a le son d' an. Aranteman, aranté, r forte, 3e e muet au 1er, é fer. au 2d.] Arenter, c' est doner ou prendre à rentes; arentement en exprime l' action. Arenter une maison, se dit de celui qui la prend en rente, comme de celui qui la done. Doner, prendre, faire un arentement; tenir en arentement.

ARRÉRAGES


ARRÉRAGES, ou ARÉRAGES, s. m. pl. Ce qui est dû ou échu d' une rente, d' un loyer, d' une ferme, d' un revenu. Devoir; payer, recevoir les ârérages.

ARRES


ARRES, Voy. ARRHES.

ARRêT


ARRêT, s. m. [ou ÂRêT, r forte, 2e lon. le t ne se prononce pas: 2e ê ouvert.] 1e Jugement d' une Cour Souveraine, dont il n' y a point d' apel. On ne peut se pourvoir contre qu' en cassation, ou en révision, ou par Requête civile. _ Quand on parle indéfiniment, on dit l' Ârêt du criminel au singulier, et les Ârêts du Parlement au pluriel. Dans le 1er ce mot a un sens passif; l' Ârêt du criminel est celui qu' il essuye, et par lequel il est condamné; les Ârêts du Parlement sont des Jugemens que ce Tribunal prononce, et qui condamnent les coupables. _ Dans le Mercûre on critique ces vers d' une Traduction des Métamorphôses d' Ovide.
   Le glaive de Thémis sur l' airain redoutable.
   Ne gravoit point encor les arrêts du coupable.
Si l' Auteur n' avoit point été gêné par la rime, dit le Rédacteur, il auroit dit les Arrêts des coupables: et alors arrêts au pl. aurait été bien, car il n' est pas question ici d' un seul Arrêt, ni d' un seul coupable.
   ARRêT se dit au figuré des jugemens et des décisions, que les particuliers mêmes prononcent sur les diverses chôses qui se présentent. "Évitez ces esprits décisifs, qui veulent prononcer des ârêts définitifs sur toutes chôses. _ Il se prend aussi pour la résolution qu' on a prîse.
   Non, ne révoquons point l' arrêt de mon courroux;
   Qu' il périsse! aussi bien il ne vit plus pour nous.
       Rac.
Saisie, soit de la persone, soit des biens. Faire ârêt sur.... Mettre en ârêt. = 3° Action du cheval quand il s' arrête, et du chien lorsqu' il arrête le gibier. = 4° On dit d' un coureur, d' un insconstant, d' un esprit volage, qu' il n' a point d' ârêt, qu' il est sans ârêt: et là ârêt signifie, ou repos, ou solidité de caractère.
   Mais l' homme sans arrêt, dans sa course insensée,
   Ne fait que voltiger de pensée en pensée.
   Tenir en ârêt, arrêter. "L' imbécilité de Henri tenoit en suspens, et pour ainsi dire, en arrêt les factions vis-à-vis l' une de l' autre. Hist. d' Angl.

ARRêTÉ


ARRêTÉ, s. m. [ou ARêTÉ, r forte, 2e ê ouv. 3e é fer.] 1° Résolution prise dans une compagnie. Le Parlement fait des ârêtés comme compagnie, et done des Arêts, comme Tribunal. = 2° Arêté de compte, règlement de compte.

ARRêTÉ


ARRêTÉ, ÉE, adj. [Arêté, té-e, r forte, 2e ê ouvert, 3e é fer. long au 2d.] 1°. En parlant de la vûë, assuré: Il n' a pas la vûë ârêtée. _ 2° Sensé. Il n' a pas l' esprit bien ârêté. _ 3° En Peintûre, dessein ârêté, dont les contours sont déterminés avec justesse. _ Dans les deux premiers sens, il ne se dit qu' avec la négative.

ARRêTER


ARRêTER, ou ARêTER, v. a. [Arêté, r forte, 2e ê ouv. 3e é fer.] 1° Empêcher la continuation d' un mouvement, etc. Arêter une horloge, un cheval, un homme qui s' enfuit. = 2° En parlant des chiens, ârêter des perdrix, des cailles, etc. s' ârêter, et marquer par là au chasseur où elles sont. _ Il se dit plus souvent au neutre. "Ce chien ârête bien. "Qu' importe à l' État qu' Ergaste soit riche, qu' il ait des chiens qui ârêtent bien? = 3° Empêcher quelqu' un d' agir: je saurai l' ârêter; j' ai de quoi l' ârêter; je n' ai qu' à dire une parole et je l' ârêterai tout court. = 4° Saisir par voie de Justice. Il régit les persones et les chôses. On l' a ârêté pour dettes; on a ârêté son cârosse. = 5° Répondre et déterminer. On a ârêté telle chôse, qu' on dresserait un mémoire, d' en faire plusieurs copies; de l' envoyer à... et à... = 6° Arêter un compte, des parties, les régler. = 7°. Au figuré, ârêter ses yeux, ses regards sur; regarder fixement; ârêter sa pensée sur, réflêchir avec attention sur... = 8° Interrompre. "Un moment après, mon frère vint la prier à danser. _ Ah! Mademoiselle, permettez-moi de vous ârêter là. Mr. votre frère n' étoit point à Paris. Th. d' Educ.
   9° S' ârêter, cesser d' aller. Il est aussi neutre en ce sens, ârêter, sur tout à l' impératif, ârête! ârête, et non pas ârête-toi
  Arrête, furie infernale,
  Le ciel veut calmer ses rigueurs.
       Rouss.
  Arréte, insensé, me dit-elle,
  Ne va point d' une main mortelle
  Toucher un laurier immortel.      Id.
"J' ai voulu arrêter à Blois. SEV. "Nous marchâmes au claire de la Lune toute la nuit... pour arriver à Chamakon, nous arrêtames par nécessité. Let. Edif. _ Le Renard dit au Bouc, qui était au fond du puits.
   Tâche de t' en tirer, et fais tous tes efforts
   Mais pour moi j' ai certaine afaire
   Qui ne me permet pas d' arrêter en chemin.
Tout cela est bon dans le style simple et au propre; mais dans le figuré et dans le style noble et élevé, s' ârêter vaut mieux. Arrêtons, dit Bossuet, l' affaire est vidée. "Cet astre, dit J. J. Rousseau, qui jamais~ n' arrête. Je crois qu' ârêtons-nous, et qui jamais ne s' ârête vaudraient mieux. _ Un mauvais plaisant a dit, sur la phrâse du Citoyen de Genêve, qu' il prenait le Soleil pour un postillon. La plaisanterie est fade, mais la critique est bone.
   S' ARêTER regit à devant les noms et les verbes: ne vous ârêtez pas à ce qu' on vous dira; il ne faut pas s' ârêter aux mots; il s' ârête à des bagatelles: "Je ne m' ârêterai point à discuter ces différentes Traditions. _ Tarder, s' amuser: "Ne vous arêtez pas! où vous êtes-vous arêté? Revenez vite sans vous ârêter. _ Se contenir, cesser de faire quelque chôse. Dites-leur de s' arêter; de cesser. _ Se déterminer, se fixer. "Il s' est arêté à telle proposition, à telle étoffe, parmi tant d' autres. _ Avoir égard, faire attention. S' Arêter aux aparences. Voy. plus haut.

ARRÉTISTE


ARRÉTISTE, ou *ARRESTOGRAPHE, s. m. On ne dit plus que le 1er. Compilateur, ou Commentateur d' Arrêts, de Déclarations, etc.

ARRHER


ARRHER, v. a. ARRHES, s. f. pl. [Âré, âre, r forte, 1re lon. 2e.~ é fer. au 1er, e muet au 2d.] Les arrhes sont l' argent qu' on done pour assurance de l' exécution d' un marché. Donner, prendre des arrhes. "Il a pris des arrhes, le marché est conclu. _ Arrher, c' est donc s' assurer de quelque chôse en donant des arrhes.
   Suivant Richelet, arrhes ne se dit qu' au figuré; au propre, on dit erres; mais celui-ci n' est plus en usage; et l' autre se dit au propre, et il est un peu vieux au figuré.

ARRIèRE


ARRIèRE, adv. [Ariè-re, r forte, 2e lon. è moy.] En demeure. Il ne se dit qu' avec en. Être en arrière de; n' avoir pas payé au terme telle somme. "Ce Fermier est en arière de trois quartiers. _ Rester en arière, ne pas avancer. * Marivaux dit: rester arrière. "Vous marchez toutes deux d' un pas égal, (dans le chemin de la vertu) et aucune de vous ne reste arrière. _ Trouver quelqu' un en arière, c. à. d. mal disposé à faire ce qu' on souhaite. "Vous ne me trouverez jamais en arrière, lorsqu' il s' agira de louer Descartes. Paulian.
   ARRIèRE est employé par le peuple comme adv. de lieu. "Voilà une porte toute arière ouverte qu' elle peut l' être. _ Cette expression est tout-à-fait basse et populaire. Trév.
   ARRIèRE, interjection, est vieux. Loin de moi. Arière de moi, Satan; vade retrô Satana.
   Arrière, vain respect du devoir et des Lois.
       Breb.
  Arrière, ceux dont la bouche
  Soufle le froid et le chaud.
      La Font.
On dit figurément d' une afaire, qu' elle ne va ni en avant, ni en arière, pour dire, qu' elle est toujours dans le même état. On peut le dire d' un malade, d' un écolier, qui ne fait point de progrès, etc.
   ARRIèRE, s. m. L' arière d' un vaisseau, la poupe.
   ARRIèRE, préposition inséparable, qui entre dans la composition de plusieurs mots. Il est du même genre que le mot avec lequel il est combiné: ainsi arière-corps, ariêre-fief sont masculins, Arière-cour, arière-main sont fém. _ Dans ces mots composés, arière est indéclinable. On doit dire par exemple arière neveux, et non pas arrières neveux, avec une s à la fin d' arière, comme on le trouve dans une édition de Telemaque, et dans les Annales de M. Linguet.
   Quand on sait le sens du mot, avec lequel arière est composé, on devine aisément celui de cette composition. Quand on sait ou qu' on peut savoir en les cherchant à leur place, ce que c' est qu' une boutique, un choeur, une cour, neveu, petit-fils, grand-Père, grand' mère, on sait bientôt ce que c' est qu' arière-boutique, arière-choeur, arière-cour, arière-neveu, arière-petit-fils, etc. _ Nous remarquerons seulement qu' arière-grand-père et arière-grand' mère sont peu usités, et qu' il vaut mieux dire, bisaïeul, bisaïeule.
   Ainsi le ban étoit la convocation de ceux qui tenaient des fiefs, pour servir à la guerre; l' arière-ban, la convocation des Gentilshommes, qui n' avaient point de fiefs. L' arière fief est un fief mouvant d' un autre fief. _ L' arière-vassal, relève d' un Seigneur vassal d' un autre Seigneur. _ L' arière main est un coup du revers de la main. _ Arière-saison, la fin de l' automne.
   En général, arière est oposé à avant. Ainsi, l' on dit en Architecture, avant corps, de ce qui avance sur le nu des autres parties d' un mur, et arière corps, de ce qui est plus enfoncé.

ARRIèRE POINT


ARRIèRE POINT, s. m. Rang de points continus, qu' on fait avec une aiguille et du fil sur le poignet de la manche d' une chemise.

ARRIÉRÉ


ARRIÉRÉ, ÉE, adj. [2e et 3e é fer. long au 2d, a-rié-ré, ré-e. 1ere r forte.] Qui n' a pas tout payé. _ Qui n' a pas fini l' ouvrage. Il régit la prép. de. "Il est ariéré de trois mille livres, des deux tiers de l' ouvrage.

ARRIÉRER


ARRIÉRER, v. n. Demeurer en arière; l' Infanterie ariéra. _ S' ariérer, être ariéré; être en demeure, en arière pour les payemens; ce fermier s' est ariéré; il s' arière toutes les années.

ARRIMAGE


ARRIMAGE, s. m. ARRIMER, v. a. ARRIMEUR, s. m. [On a dit autrefois arrumage, etc.] Arimer, c' est arranger la cargaison d' un navire; arimage, c' est l' action d' arimer. _ Arimeur, petit Officier établi dans les ports pour arimer les navires.
   Richelet met Arrimer ou Arrumer, en disant que le 1er est le meilleur. L' Acad. ne met que celui-là.

ARRIVÉ


ARRIVÉ, ÉE, partic. et adj. [Arivé, é-e, r forte, 3e é fer. long au 2d.] Il est du petit nombre des partic. passifs des verbes neutres, qui peuvent être employés adjectivement. "Un homme, arivé depuis peu, a raporté que, etc. "Le changement arivé dans sa conduite. "Ils se souvenoient de leur ruine, plutôt arrivée qu' elle n' avoit été cruë.

ARRIVÉE


ARRIVÉE, s. f. [ou ARIVÉE, 3e é fer. et lon. 4e e muet.] Le temps où une persone arive en quelque endroit. "À~ l' arivée de... "Je me trouvai à son arivée. Son arivée causa une grande joie. _ On le dit aussi des marchandises, lettres, paquets, etc.

ARRIVER


ARRIVER, ou ARIVER, v. n. [Arivé, r for. 3e é fer. l' i est bref devant la syll. masc. Arivant, arivé; nous arivons, etc. Il est long devant l' e muet: j' arîve, il arîve, ils arîvent.] 1°. Aborder à, aprocher d' une rive. Ariver au port, à une plage déserte. _ En terme de Marine, venir sur: "Il ariva sur le vaisseau et lui lâcha toute sa bordée. = 2° Plus ordinairement, parvenir en un lieu où l' on voulait aller. Il se dit des persones et des chôses; comme marchandises, lettres, paquets. "Il ariva hier à Paris; il est arivé cette nuit. "bien des marchandises sont arivées par le dernier convoi. = 3° Survenir. "Il nous ariva une nombreûse compagnie. "Il est arivé un grand malheur.
   Rem.Ariver prend l' auxil. être, il est arivé, et non pas, il a arivé. _ Dans le Journ. Polit. de Gen. on lui done l' auxil. avoir. "Nos troupes n' auront totalement arivé à... qu' au mois d' Août. Il faut, ne seront totalement arivées.
   2°. Il régit les participes, qui, dans cette ocasion, marchent après le verbe. "Vulcain arîve suant et couvert de poussière.
   3°. Quand il est impersonel, il est suivi de la prép. de, et de l' infinitif; ou de la conjonction que, et de l' indicatif; le 1er lorsqu' il régit les noms au datif; le 2d quand il est sans régime des noms. "Il lui est arivé de dire, etc. "Il est arivé qu' il a dit, etc. "Il arive souvent qu' on prend le mensonge pour la vérité. _ Quand le sens est interogatif ou négatif, ou avec les adverbes qui expriment le doute, il régit le subjonctif. "Est-il jamais arivé, ou il n' est jamais arivé, ou s' il est arivé que j' aie dit, etc. "Quand même il seroit arivé qu' il l' eût dit, qu' en concluriez-vous? etc. _ Du Bos et Pluche et Leibnitz emploient mal-à-propos le subjonctif, quoique le sens soit afirmatif. "Il arrive souvent qu' on ne puisse parvenir aux grandes places, que par des bassesses et des vices. "Il arrive souvent que la matière qu' un Historien traite, tiène à des faits si célèbres, qu' il seroit contraint de s' y arêter. "Il arrive aisément que le présent d' un particulier soit plus grand que celui d' un Prince. _ Il faut, peut, tient, est, et non pas, puisse, tiène, soit.
   On doit dire, en arîve ce qu' il pourra, et non pas ce qui pourra, comme dit Marivaux (ou son Imprimeur); comme on dit: faites ce qu' il vous plaira, et non pas ce qui vous plaira. C' est qu' on sous-entend, dans l' un comme dans l' autre, le verbe à l' infinitif; en arive ce qu' il pourra en ariver; faites ce qu' il vous plaira de faire.
   4° Arivé qu' il fut, arivé qu' il étoit, sont des façons de parler qui ne valent rien du tout. Il faut dire: étant arivé, lorsqu' il fut arivé. _ De même, comme il fut arivé n' est pas si bon que, lorsqu' il fut arivé. _ Au contraire, à l' imparfait, comme vaut mieux, parce qu' il marque mieux l' instant de l' arivée que lorsque. Comme il arivait est mieux que lorsqu' il arivait. _ Vaug. Th. Corn. L. T.
   5° Ariver se dit figurément pour ateindre, parvenir, avec le datif (la prép. à.) "Il est difficile d' ariver à la perfection. "Cet homme est arivé à son but.
   6° M Necker l' emploie dans un sens figuré, qui tient beaucoup du propre. "La confiance leur arivera de toute part.

ARROGAMMENT


ARROGAMMENT, adv. ARROGANT, ANTE, adj. [Arogaman, arogan, gante, r fort. 3e br. au 1er, lon. aux deux autres.] D' une manière arogante, c. à. d. hautaine, fière, superbe. _ Arogant se dit des persones et des chôses, qui ont raport aux persones: homme arogant, fille arogante; ton arogant, mine arogante, paroles arogantes. _ Il est aussi subst. C' est un arogant, une arogante. Voy. SUFFISANT.
   Rem. Ce mot n' est pas noble: il est peu digne du style élevé. _ Phocas dit à Pulchérie.
   À~ ce compte, arogante,
   Un fantome nouveau... te donne cette audace.
       CORN.

ARROGER


ARROGER (s' ) v. réc. [Arogé, r forte, 3e é fer. tout bref.] S' atribuer mal-à-propos quelque chôse. "S' aroger un pouvoir, un titre; un droit qui ne nous apartient pas. Il est actif, et le pron. se est au datif. S' aroger (à soi-même.)

ARRONDIR


ARRONDIR, v. a. ARRONDISSEMENT, s. m. [Arondi, diceman; r fort. 2e lon.] Rendre rond. Arondir une boule, un manteau. _ Au figuré, arondir une phrâse, une période; lui doner du nombre, de l' harmonîe. _ Arondir son pré, son champ; y ajouter des champs, des prés voisins, qui étaient à la bienséance du Propriétaire.

ARONDI


ARONDI, partic. Boule, figure, période bien arondîe.
   ARONDISSEMENT, est l' action par laquelle on arondit, ou l' état de ce qui est arondi. Il a le sens actif et passif; l' arondissement de ce globe a beaucoup coûté, voilà le sens actif; l' arondissement de cette boule est parfait, voilà le sens passif. _ On dit aussi figurément, l' arondissement d' une période; l' ordre des mots qui la rend harmonieuse.

ARROSAGE


ARROSAGE, ARRôSEMENT, ARROSOIR, s. m. [Arozaje, rôzeman, ro-soar; r fort. 2e lon. au 2d, dont la 3e est un e muet: cette 3e est douteuse au 3e.] Les deux 1ers ont le même sens, mais non pas le même emploi. On dit canaux d' arosage, et arôsement des plantes, etc. Qui dirait, canaux d' arosement, et arosage des plantes, parlerait fort mal. _ Arosoir est un vâse à aroser. L' Acad. ne met point Arrosage.

AROSER


AROSER, v. a. [Arozé, r forte; l' o est bref devant la syll. masc., arosant, arosé, nous arosons, etc. Il est long devant l' e muet; j' arôse, il arôse, ils arôsent, arôsement.] Humecter, mouiller quelque chôse, en versant de l' eau dessus. Acad. Verser doucement une liqueur sur quelque corps. Trév. Jeter de l' eau avec un arrosoir. Rich. Port. Ces trois définitions s' éclaircissent l' une l' autre. La dern. est la moins bone. Il y aurait à dire sur chacune, en les examinant en détail. Aroser des fleurs, des plantes, des légumes, etc. En parlant des fleuves, des rivières, aroser un pays, y passer. "Le Danube arôse beaucoup de pays. _ Au fig. Aroser de larmes: il arosoit son lit de ses larmes. _ "J' ai arrosé tous les apartemens de Versailles de vos souvenirs, écrit M. de Coulanges à Mde. de Sévigné. _ Ce sont de ces expressions originales, qui font de mauvaises copies.
   Rem. On écrivait autrefois, Arrousage, arrouser, et Abadie, Brebeuf et autres du siècle passé, l' ont encôre écrit de la sorte.

ARRUMAGE


ARRUMAGE, ARRUMER. Voy. ARRIMAGE, ARRIMER.

ARSENAL


ARSENAL, s. m. [2e e muet, l' l finale doit se prononcer. Voy. ARCENAL.] Magasin d' armes et de toute sorte d' instrumens de guerre, soit pour la terre, soit pour la mer. Acad. Magasin d' armes, lieu où on les garde et les fabrique. Trév. Lieu destiné pour mettre les poudres, les boulets, les bombes, l' artillerie et les armes pour la guerre. Dans la Marine, lieu où le Prince entretient ses Officiers de Marine, ses vaisseaux, et ce qui est nécessaire pour les armer. Rich. Port. _ Toutes ces définitions sont défectueûses. À~ en croire les deux premières, il semblerait qu' un Arsenal n' est qu' un vaste magasin; et c' est un vaste enclos où sont une multitude de magasins, des parcs d' artillerie, des forges, des atteliers, etc. Le Rich. Port. explique assez bien ce que c' est qu' un arsenal pour le service de terre; mais pour la marine, il y a des chôses inutiles. L' entretien des Officiers, les vaisseaux n' entrent point dans l' idée d' un Arsenal. _ Il sufisait de dire, lieu où l' on garde et fabrique tout ce qui est nécessaire pour armer les vaisseaux du Roi.

ARSENIC


ARSENIC, s. m. [2e e muet, on ne prononce point le c.] Minéral composé de beaucoup de soufre et de sels caustiques. "L' arsenic est un poison violent.

ARSENICAL


ARSENICAL, ALE, adj. [2e e muet, Arsenikal, ale, tout bref.] Qui tient de la qualité de l' arsenic.

ART


ART, s. m. [Ar; on ne prononce pas le t.] Méthode de bien faire un ouvrage selon certaines règles. Académie. La conaissance, ou l' adresse qu' on a pour faire une chôse, avec les instrumens et les méthodes convenables. Trév. Recueil de préceptes qu' on pratique pour une fin utile. Ce mot s' aplique également aux sciences et aux métiers. Rich. Port. La définition de l' Acad. est tout à la fois et la plus courte et la plus claire. Il y aurait bien à dire sur les deux aûtres.
   ART se dit au propre et au figuré, ou avec des adjectifs, ou avec des verbes à l' infinitif, qui caractérisent les différentes espèces. Arts méchaniques, arts libéraux, l' art militaire; l' art de peindre, de dessiner, de faire des vers, etc.; l' art de plaire, de gouverner, de s' enrichir.
   Mon coeur n' est point nourri dans l' art de se contraindre.
       Sémiramis de Créb.
"Il a l' art de tout tourner à son avantage, de réussir dans tout ce qu' il entreprend, de faire servir ses fautes même au succès de ses desseins. _ On apelle maître de l' art, un homme qui excelle dans une profession. Il faut s' en raporter aux maîtres de l' art. _ Parler en termes de l' art, se servir des mots propres de chacun des arts et des sciences. C' est une pédanterie de se servir des termes de l' art devant des persones qui ne sont pas du métier, quand pour exprimer les mêmes chôses, il y a des termes communs et entendus de tout le monde. Par ex. Si dans cette ocasion nous disions des mots techniques, pour dire des termes de l' art.
   * Rem. Autrefois on fesait art fém. Montaigne apelle l' éloquence, "une art piperesse et mensongère. Amyot et autres Auteurs de ce temps-là lui ont doné le même genre.
   ART se dit souvent et dans le propre et dans le figuré, par oposition à Natûre. "L' art perfectione la natûre; les productions de la natûre et les ouvrages de l' art. "Il y a en cela plus de naturel que d' art.
   ARTS, au pluriel, c' est dans les Universités, les Humanités et la Philosophie. La Faculté des Arts, Maître ès Arts, et non pas aux Arts. On a conservé l' ancien article.

ARTEIL


*ARTEIL, ou ORTEIL. Dict. Gram. On ne dit que le 2d. Voy. ORTEIL.

ARTèRE


ARTèRE, s. f. ARTÉRIEL, ELLE, adj. [2e è moy. et long au 1er, é fer. et br. aux 2 dern. dont la 4e è moy. ri-èl, ri--èle.] Vaisseau du corps de l' animal, qui porte le sang du coeur vers les extrêmités, où il est repris par les veines pour être reporté au coeur. Acad. Le Dict. de Trév. dit à-peu-près la même chôse plus au long, et avec moins de netteté. Le Rich. Port. dit: vaisseau long et creux comme un tuyau, qui contient le sang. Cette définition est comune aux veines et artères: elle ne montre que le genre, et ne détermine pas l' espèce. _ Artériel, qui apartient à l' artère. "Le sang artériel est plus rouge et plus subtil que le sang veinal. Acad.

ARTICHAUT


ARTICHAUT, s. m. [Artichô, 3e lon. Quelques-uns, et Rich. entr' autres écrivent Artichaud avec un d; Trév. met les deux.] Plante assez conûe, qui est une espèce de chardon.

ARTICLE


ARTICLE, s. m. 1°. Jointûre des ôs dans le corps des animaux. Il se dit principalement de la jointûre des ôs des pieds et des mains de l' homme. = 2°. Petites parties d' un traité, d' un contrat, d' un compte, d' un livre, etc. Mettre par articles; examiner un compte article par article; débattre, allouer, rayer un article, etc. Diviser un livre en chapitres, et les chapitres par articles, etc. = 3°. Article de foi se dit de chaque point de la croyance. Tout ce qui est dans le symbole des Apôtres est article de foi. _ On dit familièrement, croire une chose comme article de foi, et d' une chôse, qui ne mérite pas d' être crue: Ce n' est pas un article de foi.
   4°. En Gramaire, on apelle article une particule ajoutée à un nom, pour marquer de quel genre, et quelquefois en quel câs et en quel nombre il est. Voy. Câs, Genre, Nombre.
   I. Nos plus illustres Gramairiens modernes sont du sentiment que nous n' avons qu' un article, qui est le pour le masc. la pour le fém. et les pour le plur. des deux genres; du, des, au, aux, n' étant que la contraction des prép. de et à avec l' article; du signifiant à le; au, à le; des, de les; aux, à les, etc. Qu' ainsi il n' y a point de câs dans notre Langue; et que nous exprimons avec des prépositions, et sur-tout avec de et à, les raports que les Grecs et les Romains exprimaient par les diverses terminaisons de leurs noms. Cette notion de l' article paraît plus nette, plus simple, plus conforme au génie de notre langue. Nous ne l' avons pourtant pas prise pour guide, malgré les raisons et les autorités imposantes qui l' apuyent. Nous avons pensé que les Gramaires étrangères, et plusieurs même des françaises, qui ne sont point abandonées, étant travaillées suivant l' anciène méthode, qui a aussi ses avantages, ce Dictionaire serait moins utile et aux Étrangers et à beaucoup de Français, s' il s' en écartait. Ceux qui ne conaissent qu' un article et des prépositions, les retrouveront dans ce que nous allons dire. Les autres y trouveront aussi des notions exprimées dans les termes auxquels ils sont acoutumés.
   Il me paraît même que ces Gramairiens modernes se sont trop échaufés sur ce sujet, assez peu important dans le fond. Quand il le serait, il n' est pas aisé de changer l' ancien langage. Et puisqu' on veut que tous les peuples de l' Europe parlent notre Langue, ne vaut-il pas mieux continuer à leur doner des notions gramaticales, analogues à celles de leur propre langue, que de les dérouter par un nouveau langage et des idées qui leur sont étrangères. _ Faisons pour l' article ce que font le Physiciens pour le mouvement de la Terre. Après avoir démontré qu' elle se charge de toutes les révolutions diurne et annuelle; ils ne laissent pas de parler comme le peuple, et de les attribuer au Soleil: ils disent comme le vulgaire, que le Soleil se leve, qu' il se couche, qu' il s' avance d' un tropique à l' autre. Ainsi, après avoir averti que nous entendons par article défini ce que les modernes apellent le seul et unique article, et par article indéfini les prép. de et à devant les noms, employés sans articles, nous traiterons ces deux articles sous leurs anciens noms et suivant l' anciène méthode.
   II. ARTICLE indéfini (ou les noms employés sans article.) Il se met devant les noms propres d' homme ou de ville, Louis, Paris, de Louis, de Paris, à Louis, à Paris, etc.
   1°. Les noms apellatifs eux-mêmes prènent l' article indéfini (ou autrement s' emploient sans article.) 1°. quand ils sont pris dans un sens indéfini; ainsi quand je dis: c' est un Palais de Prince, je parle d' un Prince indéfiniment, sans désigner tel ou tel Prince. Sur quoi:
   Règle assez générale: Quand le nom régissant est employé sans article, le nom régi prend l' article indéfini, (la prép. de) et quand le 1er a l' article, il faut le mettre aussi au 2d: ainsi l' on dira des vaisseaux chargés de bled; et les vaisseaux chargés du bled, qu' on avait acheté en Sicile. Vertot. Ainsi, au lieu de dire: "cet homme brutal et cruel avoit caché ces défauts sous les aparences de douceur et de bonté; Rollin aurait dû dire, sous les aparences de la douceur et de la bonté, ou ce qui est encôre mieux, sous des aparences de douceur et de bonté. "Attachée au St. Siège par les liens de paix, de charité, d' obéissance. Fléchier. Il faut des liens de paix, ou les liens de la paix, etc. "La fatale cessation d' hostilités. Targe. Pour l' indemniser des frais de siège. Id. Il faut la cessation des hostilités; des frais du siège.
   2°. À~ la tête de la phrâse, les noms apellatifs s' emploient plus souvent sans article, parce qu' alors ils sont employés comme adjectifs. "Magistrats eux-mêmes, ils crurent devoir s' apuyer de la Magistratûre. Moreau. _ Or, quand ces noms sont ainsi employés adjectivement et à la tête de la phrâse, la netteté du discours demande qu' ils se raportent au pronom nominatif, comme nous le disons des adjectifs et des participes. "Père cruel, mais infortuné, il eut plus souvent besoin du secours de la France, qu' il ne fut en état d' insulter ses frontières. Moreau. Voyez Participe, Rem. sur la 5e Règle.
   3°. Ces mêmes noms apellatifs sont quelquefois employés sans article, non-seulement quand ils sont sujet de la phrâse, (c. à. d. au nominatif) mais encôre quand ils sont employés comme régime direct (à l' accusatif:) "Elle voit disparoître autour d' elle grandeur, gloire, plaisirs, jeunèsse; Masc. "Entre-t-elle dans les lieux Saints, pour assister aux Sacrés Mystères, prosternement, adoration, silence. Fléchier. Le verbe est sous entendu, et cela est bien plus animé. "Nous voyons dans ce siècle, Lois existantes, Magistrats obligés d' administrer, autorité publique: formes conûes, etc.
   Voilà donc d' où leur vient cette audace intrépide,
   Qui n' a jamais conu crainte ni repentir.
       Rousseau
  L' éfort des vagues profondes
  Engloutissoit dans les ondes
  Bergers, cabanes, troupeaux.      Le même.
"Celui-ci, après avoir sacrifié à ses passions, gloire, honneur, santé~, richesses, devenu la fable, l' oprobre du monde, traîne dans l' infamie les misérables restes d' une vie honteuse et déplorable. Neuville.
   Le superbe Eridan, le souveraïn des eaux,
   Traîne et roule, à grand bruit, forêts, bergers, troupeaux.       De Lille.
_ Cependant cette supression de l' article ne fait pas toujours bien: elle demande du goût et de l' attention. Je ne la trouve pas à propos dans cette phrâse. "Il ne faut que lire cette Traduction pour voir combien il avoit de penchant à tout ce qui tendoit à révolte et à sédition. Sabatier, Trois Siècl.
   4°. Ces mêmes noms prènent l' art. indéfini quand ils sont acompagnés des pronoms: mon livre, de votre maison, à cet endroit, de quelque lieu, etc. _ Lorsqu' ils sont précédés des noms de nombre, deux écus, de trois lieues, à dix soldats, etc. _ Exceptez pourtant les ocasions où les noms de nombre sont relatifs à quelque chôse dont on a déjà parlé; p. ex. "Il lui envoya les dix escadrons qu' il avoit demandés.
   5°. Cette supression de l' article est sur--tout en usage avec le verbe apeler. "Ce que les hommes apèlent gloire, grandeur, puissance, profonde politique, ne paroît à ces suprêmes Divinités que misère et foiblesse. Télém. _ Avec tous et chacun: "Hommes, femmes, enfans, tous y accourûrent. "Centurions et soldats, chacun murmuroit contre les ordres du Général. Vertot. _ Avec ni: Chacun de ces deux ordres ne pouvoit soufrir ni Magistrats, ni autorité dans le parti contraire. Id. _ Avec ne suivi de que.
   Leur bouche~ ne vomit qu' injûres et blasphêmes.
       Rousseau.
Sans toi la science humaine
N' est qu' ignorance hautaine,
Trouble et frivole entretien.Le même.
_ Avec soit redoublé : "Soit inspiration de Dieu, soit erreur de l' Homme, qui se fait un Dieu de son desir. Jér. Déliv. _ Avec jamais. "Jamais peut-être Historien n' a été plus atachant. _ Après tout: "Tout alors pouvoit être embûche, et tout en effet étoit trahison. _ Avec en: aller en ville, regarder en pitié, etc.
   Mais c' est sur-tout dans le style marotique, que cette supression de l' article a le plus souvent lieu.
   Il nous vaut mieux vivre au sein de nos lâres,
   Que parcourir bords lointains et barbares.
       Ververt.
  Désir leur vint d' en voir la vérité:
  Désir de fille est un feu qui dévore, etc.
      Ibid.
   On a bien lieu de regretter cette aisance de l' ancien langage, qui délivrait le plus souvent le discours de l' embarras et de la répétition de l' article, laquelle nuit sur-tout À~ l' harmonie des vers.
   6°. On suprime encôre l' article devant les noms apellatifs dans plusieurs ocasions, où joints aux verbes avoir, faire, et quelques autres verbes, ils ne forment qu' une seule expression; Avoir peur, faire peur; avoir raison, faire pitié; doner droit, tirer vanité, etc. Sur ces noms apellatifs, employés sans article, il y a la fameuse Règle de Vaugelas, que: Tout nom qui n' a point d' article, ne peut avoir après soi un pronom relatif, qui se raporte à ce nom-là. Exemple: quand je me fais justice, il faut qu' on se la fasse. Le pronom la est relatif à justice, substantif employé indéfiniment sans article. "Vous avez droit de chasse, et je le trouve bien fondé: "Le Roi lui a fait grâce, et il l' a reçue allant au suplice. Toutes ces phrâses sont vicieuses par le même endroit.
   Sur le même principe, un nom employé sans article ne devrait pas non plus être suivi d' un adjectif: cependant on ne peut trouver à redire à ce vers de Racine, et à tant d' aûtres semblables.
   Jamais tant de beauté fut-elle couronnée?       Esther.
C' est pourquoi M. l' Ab. d' Olivet voulait avec raison qu' on réformât la règle de Vaugelas, et qu' on dît: Tout nom employé sans article, ou sans quelque équivalent de l' article, etc. Ici p. ex. tant de beauté; c' est comme si l' on disait, une si grande beauté. Et dès lors quelle phrâse est plus régulière que celle-ci? "Jamais une si grande beauté n' a été couronée. _ Mais ne pourrait-on pas réformer aûtrement la Règle de Vaugelas, en y mettant deux conditions, dont la réunion dispenserait de l' addition qui paraît si sagement proposée; savoir, un nom pris indéfiniment et sans article, etc. Or, on ne peut pas dire que, tant de beauté soit pris indéfiniment, comme faire justice, avoir droit, faire grâce. _ De-là il me paraît que sans avoir recours à l' équivalent de l' article, on justifie toutes les phrâses que l' Ab. d' Olivet entasse dans la même Remarque, en disant que les noms n' y sont pas employés dans un sens indéfini, quoique avec l' article indéfini. "Il n' y a point d' injustice qu' il ne comette. "Il n' y a homme qui sache. Est-il ville dans le Royaume qui soit plus obéissante? Une sorte de fruit qui; une espèce de bois qui, etc. "Il est acablé de maux, qui lui font perdre patience, etc. etc.
   7°. Les pronoms personels prènent l' art. indéfini. Je, vous, de moi, de vous, à moi, à vous, etc. _ Les pronoms possessifs absolus et les démonstratifs tiennent lieu d' article; aussi n' en met-on point devant eux: mon père, sa mère, son frère, leur soeur etc. Nous n' imitons pas les Italiens qui disent: il mio fratello, la mia madre, le mien frère, la mienne mère, etc. _ Cet homme, une femme, quelle idée, quelques amis; à cet homme, d' une femme, de quelle idée parlez-vous? à quelques amis, etc.
   III. ARTICLE défini, (ou les noms employés avec l' article.) 1°. Les noms apellatifs. _ Art. masc. devant les consones: le Ciel, du Ciel, au Ciel. _ Devant les voyelles, l' esprit, de l' esprit, à l' esprit. _ Art. fém. Devant les consones, la femme, de la femme, à la femme. _ Devant les voyelles, l' âme, de l' âme, à l' âme.
   2°. Les noms des deux planètes, le Soleil et la Lune, ceux des élémens, des saisons, des quatre parties du monde, des royaumes, provinces, montagnes, fleûves et rivières prènent l' art. déf. quoique apartenant plutôt aux noms propres, qu' aux noms communs et apellatifs.
   3°. En parlant de Dieu, on se sert ordinairement de l' art. indéf. de Dieu, à Dieu. Cependant on dit, dans le langage de l' Écriture, le Dieu fort, le Dieu de paix, le Dieu de miséricorde, le Dieu d' Abraham, le Dieu des Chrêtiens.
   4°. Nous mettons l' article devant quelques noms propres italiens qui le prènent en leur langue: nous disons le Tasse, l' Arioste, le Dante, le Bembe, le Titien, etc. Il est aussi quelques noms de ville qui prènent l' art. déf.; le Catelet, la Capelle, le Quesnoi, le Mans, le Caire, la Mecque, etc. _ Pour les noms Français même, quoique noms propres, c' est assez l' usage de mettre l' article, quand ces noms sont significatifs; le Maitre, le Moine, le Peintre, le Bon, le Roux, etc. Alors cet article se conserve toujours dans les cas obliques: on doit dire de M. le Maître, de M. le Moine, et non pas, du Maître, du Moine; on dit même les plaidoyers de le Maître, les tableaux de le Moine, le ratafia de le Prince, etc. Et pour les femmes de petite considération, on met aussi l' article, sur-tout pour les Actrices; la le Couvreur, la Dumesnil, etc.
   5°. Les noms de rivière féminins prènent l' art. indéfini, et les masc. le défini. "La rivière de Seine, la rivière du Rhône. _ On dit de même: la montagne de Tarare, avec l' art. indéf., et le mont Taurus sans article. Buf.
   6°. Les noms d' empire et de royaume prènent tous l' article défini au nominatif, au datif et à l' acusatif: "La France, l' Espagne, le Pérou; de la France, à l' Espagne, au Pérou, etc. Mais pour le génitif et l' ablatif, l' usage varie. Il veut qu' on dise: "Les Rois de la Chine, du Japon, l' or du Pérou, la porcelaine de la Chine, du Japon, etc. tandis qu' on dit, les Rois de Perse, de France, d' Angleterre, etc. et non pas de la Perse, de la France, etc. _ On dit de même: partir de la Chine, revenir du Pérou; et partir de France, revenir d' Espagne, etc. _ Il est d' autres ocasions où l' on se sert indiféremment de l' un ou de l' autre article; car on dit: "Les peuples d' Asie ou de l' Asie, les villes de France ou de la France, etc. pendant qu' on dit: les nations de l' Asie, et les bornes, les limites de la France, et non pas, d' Asie, de France, etc. Voyez EN.
   7°. Les Adjectifs, quoiqu' ils soient d' eux-mêmes incapables de recevoir aucun article, ne laissent pas souvent de prendre l' art. déf. mais ce n' est jamais qu' en vertu d' un nom substantif, ou exprimé, ou sous-entendu. Les diférentes ocasions où ils reçoivent cet article sont: _ Quand ils précédent un nom substantif qu' ils qualifient: Le grand bien qui en arrivera, la belle action, etc. _ Quand ils sont mis soit devant, soit après un nom propre pour épithète perpétuelle: Le Grand Pompée, Alexandre le Grand, Louis le Bien-Aimé, etc. _ Quand ils sont superlatifs comparatifs: "Le meilleur de ses amis, le plus heureux des Hommes. _ Quand ils sont employés au superlatif avec la particule très, ou qu' ils sont d' eux-mêmes superlatifs: "Le très-haut et très-puissant Seigneur; l' illustrissime, le révérendissime, etc. _ Quand n' étant d' eux-mêmes que simples adjectifs, on les emploie comme superlatifs: "Le bon des bons, le sage des sages, _ Enfin, quand ils tiènent eux-mêmes lieu de substantif. "Le Sage ne s' étone de rien; l' avare manque de tout.
   8°. Les pronoms possessifs relatifs et les pronoms relatifs un et quel, prènent l' art. déf. le mien, le tien, le sien, le vôtre, etc. du mien, du tien, au sïen, au vôtre, etc. l' un d' eux, à l' une des filles, etc. lequel, duquel, auquel, etc.
   9°. Les infinitifs de quelques verbes prènent l' art. déf. mais alors ils sont considérés comme substantifs: "Le boire, le manger, au sortir de, etc. _ Dites-en de même des participes actifs ou passifs: "savoir les tenans et les aboutissans d' une afaire; l' ofensé a droit de se plaindre, etc.
   10°. Parmi les adverbes de comparaison, il n' y a que bien, qui régisse l' article défini, les autres exigent l' indéfini. On dit: bien de l' argent, bien du pain, bien de la viande; et beaucoup, plus, peu, moins d' argent, de pain, de viande, etc. _ Les adverbes mieux, moins, pis, plus, dessus, dessous, quand et comment prènent quelquefois l' art. défini, et deviènent par-là des substantifs: "Le mieux que vous puissiez faire, le pis qu' il puisse arriver. "Il y a du plus ou du moins à cela; le dessus, le dessous, le quand et le comment. _ Tous les adverbes qui sont susceptibles de superlatif, prènent aussi l' article défini. "Le moins souvent qu' on peut, le plus doucement qu' il se pourra, etc.
   IV. Outre ces deux articles, quelques Gramairiens en distinguent un 3e qu' ils apèlent article partitif; et c' est quand on parle des chôses ou des persones dans un sens partiel et limité; comme quand on dit: Donez-moi du pain, de la viande, des fruits, etc. Des hommes instruits l' ont raconté ainsi. Cet article n' a lieu qu' au nominatif, au datif, et à l' acusatif. C' est au sing. du pour le masc. de la pour le fém. Au plur. des devant un subst. et de devant un adjectif; du bois, de la chandelle, des hommes savans et de savans hommes. "Travailler à de la dentelle, apartenir à d' honêtes gens, etc. _ C' est un gasconisme de dire: donez-moi de viande, de chandelle, pour de la viande, etc. C' en est aussi un assez fréquent dans les provinces méridionales, de mettre des devant l' adjectif, des savans hommes. _ Mais quant au 1er, si l' article partitif précède immédiatement l' adjectif, de est régulier. On dit de la viande et de bone viande, du poisson et d' excellent poisson. _ Pour le 2d, quand l' adjectif et le substantif ne forment qu' un sens indivisible, l' art. défini est d' usage, quoique l' adjectif précède. "Cet homme a de l' esprit, des belles-lettres, c. à. d. de la littératûre. _ C' est ainsi que Boileau a dit d' Alexandre.
   Heureux! si de son temps, pour de bones raisons
   La Macédoine eut eu des petites maisons.
C' est ainsi qu' on dit des petits-maîtres, des petites-maîtresses, et non pas de petits-maîtres, etc. Dans ces ocasions, il faut mettre un tiret entre l' adj. et le subst.
   L' ARTICLE Partitif ne doit point être suprimé, excepté dans les cas mentionés à l' Art. II, n°. 6. _ P. Corneille le retranche en plusieurs endroits, où ce retranchement n' est pas autorisé par l' usage.
   J' ai tendresse pour toi, j' ai passion pour elle.
       Nicom.
A-t-elle montré joie, etc.Perth.
L' usage veut qu' on dise, avoir peur, faire peur, etc. et avoir de la tendresse, avoir de la passion, montrer de la joie, etc. etc.
   V. Quand l' adjectif et le substantif sont joints ensemble, on ne met qu' un article pour l' un et pour l' autre; le savant homme, l' homme savant, etc. _ On en met pourtant deux dans les ocasions suivantes. _ Avec l' adjectif tout, à tout le monde, de toute la France. = Quand un adjectif, qui n' est point nom de nombre, suit immédiatement son substantif, pour en marquer le surnom et la qualité: de Henri le Grand, à Madame la Princesse. _ Quand un superlatif suit immédiatement son substantif: "Aux hommes les plus illustres. Si le superlatif précède, il suit la règle générale; aux plus savans hommes. _ Après ces mots, Monsieur, Monseigneur, et autres semblables: "Le sentiment de Messieurs les Gens du Roi; à Monsieur le Président; à Monseigneur l' Évêque de, etc. Buf.
   VI. On ne met point d' article devant un adjectif séparé de son substantif, comme Épicure~ était voluptueux. _ Quand un adjectif séparé de son substantif a un article, c' est qu' il devient alors, ou qu' il est censé substantif... "Un savant est quelquefois confondu avec un ignorant; le verd blesse moins la vûe que le rouge, etc. Buf.
   VII. Quand deux adjectifs sont joints ensemble par une conjonction, et qu' ils ont un même substantif, on ne met l' article que devant le premier, pourvu que ces deux adjectifs aient à-peu-près la même signification. "Le pieux et saint homme que voilà. _ Mais si les deux adjectifs ont un sens diférent, il est mieux de répéter l' article devant le 2d: "Le pieux et l' illustre personnage dont je vous ai parlé. _ Cependant le pronom ou l' article un ne se répète point alors. "Un pieux et illustre personage. Buf.
   VIII. Le changement d' article du masc. au fém. a bone grâce. "Je dois beaucoup à la conduite et au soin de cet homme; est dit avec beaucoup plus de grâce que si l' on disait: à la conduite et à la diligence. Vaugelas.
   IX. Il faut répéter les articles devant les substantifs, quand il y en a plusieurs de suite: Les faveurs et grâces est une faute: il faut dire: les faveurs et les grâces. = La faûte est encôre plus grande, quand les deux substantifs sont de genres diférens: Le malheur et misère, est insoutenable: il faut dire: et la misère. _ Dites-en de même des cas obliques; des faveurs et grâces, aux malheurs et misères, sont contre l' usage. Il faut des faveurs et des grâces, aux malheurs et aux misères, etc. Vaug.

ARTICULÉ


ARTICULÉ, ÉE, adj. Faits articulés, déduits par articles; mots articulés, prononcés distinctement.

ARTICULATION


ARTICULATION, s. f. ARTICULER, v. a. [Articula-cion, kulé, tout bref.] Le verbe a deux sens. 1° Déduire par articles, articuler des faits. _ 2°. Prononcer distinctement: Les petits enfans ne peuvent articuler les mots, les articuler distinctement._ Il se dit, en ce sens, plus souvent au neutre. "Cet enfant n' articule pas bien. "Le défaut de beaucoup d' Orateurs est de ne pas bien articuler.
   Le substantif, outre les deux sens du verbe, articulation des faits, articulation de la voix, en a un 3e en Anatomie, jointûre. Articulation des doigts. _ Articulation des faits ne se dit qu' au Palais. Articulation de la voix, c' est quand elle est nette et libre. Avoir une belle articulation.

ARTIFICE


ARTIFICE, s. m. 1°. Art, industrie. "Cette machine est faite avec un artifice merveilleux. _ 2°. Plus souvent, ruse, déguisement, fraûde. "Détestable artifice; artifice grossier; user d' artifice, etc.
   Rem. 1° En morale, il se prend toujours en mauvaise part; dans la Litérature, il peut se prendre en bone part; mais souvent le mot d' art, qui a le même sens, est plus convenable. Ainsi, au lieu de dire comme Voitûre. "Il me déplait seulement que tant d' artifice et d' éloquence ne me puissent déguiser la vérité. J' aimerais mieux dire: tant d' art et d' éloquence. Voy. ADRESSE.
   2°. On dit d' ordinaire, feu d' artifice, des feux d' artifice; mais on dit quelquefois aussi artifice tout seul, pour signifier toute sorte de feux faits pour la guerre, ou pour le divertissement. "Magasin plein de lances à feu, de grenades et d' autres semblables artifices.

ARTIFICIEL


ARTIFICIEL, ELLE, adj. [4e è moy. ciel, ciè-le, et dans les vers ci-èl, ci-èle.] Qui se fait par art. Il est oposé à naturel: "Aimant artificiel, sphère artificielle, fleurs artificielles, beauté artificielle. _ Jour artificiel est l' espace du temps qui est depuis le lever du soleil jusqu' à son coucher, à la diférence du jour naturel, qui est de vingt-quatre heures. Il semble que ce devrait être tout le contraire: mais l' usage est de les nommer ainsi. _ Mémoire artificielle. Méthode pour retenir certaines chôses, dont on veut se souvenir. _ Trévoux le dit des persones: "Hommes artificiels, toujours guindés, toujours concertés: qui doivent plus à l' art qu' à la natûre. Voy. ARTIFICIEûSEMENT.

ARTIFICIELLEMENT


ARTIFICIELLEMENT, adv. [4e è moy.~ 5e. e muet, ciè-leman.] Avec art: il est oposé à naturellement, et il ne se dit qu' en parlant des ouvrages de l' art. "Fontaine qui va artificiellement; corps qui ne se meut qu' artificiellement.

ARTIFICIER


ARTIFICIER, s. m. [Artificié.] Qui fait des feux d' artifice.

ARTIFICIEûSEMENT


ARTIFICIEûSEMENT, adv [4e lon. 5e e muet; cieû-zeman.] D' une manière artificieûse. "Il a exposé le fait fort artificieûsement _ Artificiellement a raport au premier sens d' artifice et artificieûsement au second. Celui-ci se prend en mauvaise part, l' autre en bone part. Dites-en de même d' artificiel et d' artificieux.

ARTIFICIEUX


ARTIFICIEUX, EûSE adv [4e lon. cieû, cieû--ze, en vers, ci-eû, ci-eûze: devant une voyelle cieuz, ou ci-euz.] Plein d' artifice et de finesse. "Homme artificieux, femme artificieûse, esprit artificieux, conduite artificieûse. Voy. ARTIFICIEûSEMENT.

ARTILLERIE


ARTILLERIE, s. f. [Artiglerîe, mouillez les ll, 3e et 5e e muet, 4e lon.] Tout l' attirail de guerre, qui comprend les canons, les mortiers, les bombes, etc. Un canon est une pièce d' artillerie. _ Il se prend quelquefois pour le corps des Oficiers qui servent à l' artillerie. "Il est, il sert dans l' artillerîe.

ARTILLEUR


ARTILLEUR, s. m. [Arti-glieur, mouillez les deux ll.] Celui qui sert dans l' Artillerie. Je doute qu' on le dise des Officiers. L' Acad. le met sans remarque.

ARTIMON


ARTIMON, s. m. Le mât d' artimon est celui de la poupe ou de l' ârière d' un vaisseau. Voile d' artimon.

ARTIQUE


*ARTIQUE ou ARCTIQUE. Richelet met les deux. L' Acad. ne met que le second. Il est le plus usité.

ARTISAN


ARTISAN, s. m. [Artizan, tout bref. La Fontaine écrit Artisant. Le t est contre l' usage.] Ouvrier dans un art méchanique. Homme de métier. Simple artisan, habile artisan, honête artisan.
   Rem.Artisan et ouvrier, mots qui sont bâs au propre; se disent au figuré des persones les plus illustres, et de Dieu même. Dieu est souvent apelé le divin Artisan, le merveilleux Ouvrier de cet univers.
   2° Au propre, il se dit sans régime: au figuré, il régit la prép. de. On ne dit pas, artisan d' un soulier, d' un habit; mais on dit d' un homme habile, qu' il a été l' artisan de sa fortune, de sa gloire; et d' un méchant homme: artisan d' impostûres et de calomnies. "Souvent le Héros et le Sage sont les artisans de leur propre bonheur. Jér. Dél. "C' étoit un Plébéïen artificieux, grand artisan de discordes. Vertot.
   Lâche, aux cabales vendus,
   Artisans de fraudes obscures,
   Habiles seulement à noircir les vertus.
       Rouss.
Il ne doit se dire au figuré que de ce qui demande de l' art et des soins. On dit artisan de sa fortune; et Rousseau a pu dire, artisan de fraûdes: mais on ne dit pas artisan d' un vol, d' un assassinat; ni comme le dit M. le Mierre, les artisans du crime. L' Ab. Royou. Journ. de Monsieur.
   3° Artisan ne doit se dire que des arts méchaniques. Pour les arts libéraux, pour la plupart du moins, on dit Artiste. On n' apèle de ce nom, ni les Poètes, ni les Chirurgiens. Voy. ARTISTE.
   M. l' Ab Du Bos demande pardon aux Peintres et aux Poètes de ce qu' il les désigne souvent par le nom d' Artisans, dans le cours de ses Réflexions sur la Poésie et la Peintûre. Il ajoute que c' est uniquement, par la crainte de répéter trop souvent la même chôse, qu' il ne joint pas toujours, au nom d' artisan, le nom d' illustre, ou quelqu' autre épithète convenable. Je crois que ces épithètes ne dôreraient pas assez la pilule aux Artistes, et qu' ils ne s' en contenteraient pas. Le même Auteur dit dans un autre endroit, que: "L' Artisan du tableau doit choisir un sujet, etc. Ce mot est encôre plus mauvais avec ce régime: on ne dit pas plus l' artisan d' un tableau, que l' artisan d' un soulier. Voy. n°. 2°.
   Boileau (Lettre IV) apèle illustres artisans les Peintres, Sculpteurs et Architectes célèbres du siècle de Louis XIV, les Poussin, les Le Brun, les Girardon, les Mansard. On dirait aujourd' hui, illustres Artistes.
   M. Dandré-Bardon, Artiste lui-même, et Auteur par dessus le marché, distingue mieux artisan d' artiste. "La pratique, sans principes et sans génie, dégénère en pûre routine, et la routine ne constitue que l' artisan, que nous distinguons de l' artiste! D' après ce principe, les mauvais Peintres ne sont que des artisans.

ARTISON


ARTISON, ou ARTUSON, s. m. [Artizon, tuzon, tout bref. Trév. et le Rich. Port. mettent les deux. L' Acad. ne met que le 1er.] Petit ver, qui s' engendre dans le bois.

ARTISONÉ


ARTISONÉ, ou ARTUSONÉ, ÉE, adj. [Artizoné, tuzoné, ne-e, é fer. long au 2d. Trév. et Rich. Port. _ L' Acad. ne le met pas.] Il se dit du bois où il y a plusieurs petits trous faits par les artisons.

ARTISTE


ARTISTE, s. m. Celui qui travaille dans un art où le génie et la main doivent concourir. Acad. Ouvrier qui travaille avec grand art et grande facilité. Trév. Ouvrier qui travaille avec esprit et avec art. Rich. Port. Chacune de ces définitions pèche par quelqu' endroit. Celle de l' Académie comprendrait les Chirurgiens qu' on n' a pas coûtume d' apeler artistes. _ Les deux autres seraient aplicables à plusieurs ouvriers, qui ne sont que des artisans. Voy. ARTISAN, Rem. n° 3°. _ Un Académicien de Marseille et un Médecin, apèlent les Médecins des artistes. "On a recours à l' art (de la Médecine), et les Artistes (les Médecins) tremblent de son insufisance. El. du Duc de Villars. "Maladies qui ont été regardés comme incurables, non par l' insufisance de l' art, mais parce que l' Artiste n' avoit pas encore assez conu les moyens que la nature a placés sous sa main. _ Ni l' Académicien, ni le Médecin ne sont des autorités.
   *ARTISTE était autrefois adj. On disait: Une main artiste; une montre, une machine artiste, pour dire, qui travaille ou qui est travaillé avec art. "Cela part d' une main artiste. _ La Touche aprouve cette dernière expression. Elle est dans le grand Richelet, et dans le Rich. Port. mais non dans le Dict. de l' Acad.

ARTISTEMENT


ARTISTEMENT, adv. [Artis-teman, 3e. e muet.] Avec art et industrîe. Ouvrage artistement fait, artistement travaillé.

ARUSPICE


ARUSPICE, s. m. [Pron. l' s, dern. e muet: tout bref.] Aruspicium, dit le Gendre, ex victimis in âra inspiciendis. Il se dit de la divination, par l' inspection des entrailles des animaux qu' on immolait, et du Devin ou Interprète.

AS


AS. Les adjectifs en as redoublent l' s au fém. gras, grasse. _ As final est long; grâs, tu lirâs, etc. Dans as et Pallas l' s se prononce.

AS


AS, s. m. [Pron. l' s; âs devant une cons. âz devant une voy. long.] Un point seul marqué sur un des côtés d' un dé ou sur une carte. Acad. Carte ou face des dés, marquée d' un seul point. Trév. Rich. Port. "Ces dés n' amènent que des as. _ As de pique, as de coeur, etc.

ASCENDANT


ASCENDANT, ANTE, adj. [A-sandan, dante, 2e et 3e lon.] Qui va en montant. Terme de généalogie; ligne ascendante des pères, mères, aïeux, bisaïeuls, etc.
   ASCENDANT, s. m. était fort en usage autrefois en Astrologie: il n' en reste que l' expression figurée, avoir ou prendre de l' ascendant sur. "Il a un grand ascendant sur son esprit. "Il a pris un grand ascendant sur elle. Il signifie ordinairement autorité, pouvoir, empire qu' on a, ou qu' on prend sur l' esprit et la volonté de quelqu' un. Au jeu, il signifie bonheur. "Il a un grand ascendant sur moi; et quoiqu' il ne joûe pas mieux, il me gagne toujours.

ASCENSION


ASCENSION, s. f. [A-san-cion, et en vers ci-on: 2e lon.] Élévation, mouvement en haut. _ Il se dit ordinairement de l' élévation miraculeûse de N. S. J. C. lorsqu' il monta au Ciel. _ En Physique, il se dit de l' action par laquelle un fluide monte dans des tuyaux: "L' ascension de l' eau dans les pompes, du mercûre dans le baromêtre.

ASCÉTIQUE


ASCÉTIQUE, adj. [Acétike, 2e é fer. dern. e muet: tout bref.] Qui a raport aux exercices de la vie spirituelle. Vie ascétique, Auteur ascétique. _ S. m. les Ascétiques de St. Basile; titre d' un de ses ouvrages. _ Les Ascétiques, les Auteurs Ascétiques.

ASE


ASE. La pénult. est toujours longue. Emphâse, il râse, etc. D' OLIV.

ASIATIQUE


ASIATIQUE, adj. [Azi-atike, tout bref.] Qui apartient à l' Asie. Il se dit sur-tout du luxe, du style, des moeurs. Luxe asiatique, excessif: moeurs asiatiques, éféminées: style asiatique, difus et chargé d' ornemens inutiles.

ASILE


ASILE, s. m. [Trév. le Dict. Gramm. mettent asyle, aparemment par respect pour l' étymologie; d' autres écrivent azile. L' Acad. et le Rich. Port. qui la cite. Asile.] Lieu établi pour servir de refuge aux débiteurs, aux criminels, qui s' y retirent. "La Loi de Moïse établit des asiles. "Se jeter, se sauver dans un asile: La sainteté des asiles. Violer un asile. _ Il se dit par extension de tout lieu où l' on se retire pour se dérober aux poursuites de la Justice. = Au figuré, secours, protection, ressource. "Dans son malheur, il a trouvé un asile chez un de ses amis: "Vous êtes mon asile. "La justice du Prince est l' asile de l' inocence. "Le Cloître est un asile contre la corruption du siècle.

ASINAIRE


*ASINAIRE, adj. Mot forgé, et uniquement bon pour le style satirique. "L' impostûre la plus asinaire (la plus bête) qu' on ait vûë Tart. Epist.

ASINE


ASINE, adj. f. Terme de Pratique. Bête asine, âne ou ânesse. On le dit aussi, au figuré, dans le discours familier. Âne, butor.

ASME


ASME ou ASTME. Richelet. Écrivez Asthme, et voyez ce mot.

ASPECT


ASPECT, s. m. [On pron. l' s et le c, mais non pas le t: as-pèk, 2e è moy.] Vuë d' un objet. L' aspect de son maître le consterna; l' aspect du danger le trouble. Aspect fâcheux, désagréable. _ À~ l' aspect de, adv. "À~ l' aspect de l' échafaud, il s' évanouit. "À~ l' aspect du danger, la constance s' évanouit. "À~ cet aspect, les forces qu' il avoit recueillies le quittent et l' abandonnent. Jér. Dél.
   2°. Situation d' une maison. "L' aspect de cette maison est riant, agréable. = 3°. Objet de vuë. Cela fait un bel aspect. Oh! le vilain aspect! _ Dans le premier sens, il a le sens actif, c' est l' action de voir; dans les deux autres, le sens passif; il se dit de ce qui est vu.
   Rem. Dans son sens naturel, aspect ne se dit que des chôses animées; et dans le Journ. de Mons. on a critiqué, avec raison, ces vers de M. de St. Ange.
   Telle, à l' aspect du feu, la mêche d' une cire
   Étincelle et ravit la flâme qu' elle attire.
Le Poète a dit à l' aspect, pour à l' aproche.

ASPERGE


ASPERGE, s. f. [Le 1er ê est ouv. et bref; le 2d muet.] Plante apéritive, qui se mange, et est fort conûë.

ASPERGER


ASPERGER, v. a. [2e ê ouv. 3e é fer. tout br.] Il n' a d' usage que dans les rites de la Religion. Répandre sur. "On aspergeoit le peuple du sang de la victime. "On asperge les Chrétiens d' eau bénite. _ On a dit autrefois asperser.

ASPERGèS


ASPERGèS, ou ASPERSOIR, s. m. [2e ê ouv. dans les deux, 3e ê ouv. et long dans le 1er, on pron. l' s, dout. au 2d.] Goupillon à jeter de l' eau bénite. _ Le premier n' est pas du bel usage: on se sert du second. _ L' Acad. dit que dans cet usage, il est du style familier: présenter l' aspergès. Au mot Aspersoir, elle dit: présenter l' aspersoir. L' Évêque présenta l' aspersoir au Roi. _ Aspergès se dit plutôt du temps où se fait la cérémonie de jeter de l' eau bénite: "On en est à l' aspergès _ Richelet écrit aspergez: mauvaise ortographe; l' ê étant ouvert, et le z étant le signe de l' é fermé.
   * On a dit autrefois aspersoire, fém. mais aspersoir a toujours été le plus en usage; et il est~ aujourd' hui le seul usité. Richelet a mis les deux.

ASPÉRITÉ


ASPÉRITÉ, s. f. Rudesse, qualité de ce qui est raboteux. Il se dit au figuré du style. "C' est par-tout la même incorrection, la même aspérité, la même barbarie. Ann. Litt. L' Acad ne le dit que du caractère.

ASPERSION


ASPERSION, s. f. [2e ê ouv. tout bref: cion, et en vers ci-on.] Action d' asperger, de jeter de l' eau bénite avec l' aspersoir. À~ l' aspersion de l' eau bénite.

ASPERSOIR


ASPERSOIR. Voy. ASPERGèS.

ASPHALTITE


ASPHALTITE, adj. Le lac asphaltite. Mer de Sodôme, Mer morte. Ce mot nous vient des Grecs, qui disent asphaltite, et c' est ainsi que parle l' Acad. des Belles-Lettres. Voltaire dit toujours asphaltide. Le Dict. de la Géogr. Sacrée met l' un et l' autre.

ASPIC


ASPIC, s. m. [Pron. le c. As-pik.] Le Gendre le fait des deux genres, suivant qu' il parle du mâle ou de la femelle. "Pline fait mention d' une aspic, qui avoit été longtemps nourrie à la table d' un Égyptien. Il dit ailleurs un aspic. On ne fait pas cette distinction, et l' on dit toujours un aspic. _ Petit serpent, dont la morsûre est très-dangereûse. _ On apelle un médisant, aspic, langue d' aspic.
   ASPIC, espèce de lavande: huile d' aspic: on ne le dit que dans cette phrâse.

ASPIRANT


ASPIRANT, ANTE, adj. [As-piran, rante, 3e lon.] On ne le dit qu' avec pompe. _ Pompe aspirante, qui élève l' eau en l' atirant, à la différence de celle qui l' élève en la poussant, et qu' on apèle pompe foulante. * Autrefois on a dit aspirante, en Gramaire, de certaines lettres, comme l' H. On dit aujourd' hui aspirée.

ASPIRANT


ASPIRANT, s. m. Qui aspire à entrer dans une charge, à être reçu dans un corps. Que d' aspirans pour cette charge! Aspirant au Doctorat, à la Maîtrise.

ASPIRATION


ASPIRATION, s. f. ASPIRER, v. a. [As--pira-cion, et en vers ci-on, Aspiré, tout bref.] Aspiration est, 1° action d' atirer l' air extérieur en dedans: il est oposé à expiration, qui est l' action de le pousser au dehors. Ces deux mots vont de compagnie, et ne se disent guère l' un sans l' autre. = 2° Action des pompes aspirantes. Voy. ASPIRANT, adj. = 3° En Gramaire, manière de prononcer certaines lettres, comme l' h, en les aspirant. = 4° Élévation de l' âme vers Dieu, aspiration dévote.

ASPIRER


ASPIRER, v. act. a le 1er et le 3e sens d' Aspiration. _ Neutre, il signifie. Prétendre à. "Aspirer aux honeurs, à une charge. "Il aspiroit à l' Empire. "N' aspirer qu' à vivre tranquillement.
   Rem. 1°. Le verbe n' est actif et n' a le régime direct qu' en Gramaire, aspirer l' h; et en Médecine, aspirer l' air avec la bouche. _ Il se dit élégamment au figuré. "Il aspire aux plus grandes places. Aspiration ne se dit jamais que dans le propre; et par une diversité, qui se rencontre souvent dans toutes les langues, le substantif n' a pas un emploi aussi étendu que le verbe. L' Ab. Prévot dit: "Cette Déclaration... venoit probablement de la modération naturelle du Roi, depuis qu' il n' étoit plus poussé par les violentes aspirations de Buckingham. Hist. des Stuarts. Peut-être est-ce une faute d' impression; et faut-il lire inspirations? Ce qui me le persuaderait, c' est qu' aspiration, mot Anglais, n' a pas ce sens. Peut-être aussi M. Hume le lui a-t-il doné. _ Aspiration, même au propre, ne se dit guère plus qu' en Gramaire. Il est vieux en Médecine même, et chez les Ascétiques. Les Médecins d' à-présent disent plutôt inspiration. _ L' Acad. pourtant, dans la dern. édit., dit encore aspiration en ce sens, et en parlant des pompes aspirantes.
   2° Le P. Barre (Hist. d' Allem.) dit aspirer à, au lieu de soupirer après. "Les peuples aspiroient à l' ancien gouvernement. "Aspirer à un gouvernement, c' est y prétendre; soupirer après, c' est le regretter. L' Historien n' a pas dit ce qu' il voulait dire. _ M. de Saci dit: aspirer vers, pour soupirer après. "Ils aspiroient sans cesse vers les biens immuables. Imit. Et le P. Bourdalouë. "Une âme qui cherche Dieu en vérité, qui ne cherche que lui, qui n' aspire que vers lui. _ L' Acad. dit: aspirer au Ciel.

ASPRE


ASPRE, s. m. Petite monnoie d' argent, chez les Turcs, chez qui ce mot signifie blanc. L' aspre vaut neuf deniers. Acad. Cette monnoie doit donc être imperceptible. _ Le Dict. du Citoyen dit que l' aspre pouvait valoir autrefois huit deniers de France, et qu' on en donait 80 pour notre écu de 60 sols; mais que comme on est sujet à trouver beaucoup d' aspres fausses et de bâs aloi, on ne les reçoit plus aujourd' hui que sur le pied de six deniers: il en faut 120 pour l' écu. _ On voit que l' Auteur de ce Dictionaire fait aspre fém. _ L' Acad. le marque masc. _ Trév. écrit âpre, mais mal, puisque l' s se prononce. Le Rich. Port. met apre et aspre, chacun en son lieu. Le 2d est le seul bon.

ASPRE


ASPRE, ASPREMENT, ASPRETÉ. Vieille ortographe. Voy. ÂPRE, ÂPREMENT, ÂPRETÉ. _ ASPRELLE. V. ÂPRELLE.

ASQUE


ASQUE. Cette terminaison est toujours brève: Masque, fantasque, etc. Pron. aske.

ASS


ASS. On ne prononce qu' une s, mais il faut en écrire deux, parce que l' s entre deux voyelles ayant le son du z, si l' on n' en écrivait qu' une, on induirait à une mauvaise prononciation. Asablement p. ex. se prononcerait azablement, asaillir, azaillir, etc.

ASSABLÉ


*ASSABLÉ, ÉE, adj. Trév. Rich. Port. L' Acad. dit Ensablé. Rempli de sâble, demeuré, ârêté sur le sâble.

ASSABLEMENT


*ASSABLEMENT, s. m. ASSABLER, v. a. [A-sableman, A-sablé, 3e e muet au premier, é fer. au 2d.] L' Acad. dit Ensablement, ensabler. Le Rich. Port. met ensablement et assabler, ou mieux ensabler. _ Assablement est un amas de sâble. _ Assabler, remplir de sâble, couvrir de sâble. _ S' assabler, se remplir de sâble. _ Demeurer ârêté sur le sâble.

ASSAILLANT


ASSAILLANT, s. m. [A-sa-glian; l' i est muet: il n' est là que pour faire mouiller les ll.] Au sing. Il ne se dit que des tournois: En parlant d' un assaut doné à une place qu' on assiège, on ne le dit qu' au pluriel. "Les assaillans prirent la fuite.

ASSAILLIR


ASSAILLIR, v. a. [A-sagli, mouillez les ll; l' i n' est là que pour cette fonction: il ne fait point avec l' a la dipht. ai, et il ne faut pas prononcer acégli.] Ce verbe n' a au prés. de l' indicatif, que les trois persones du pluriel. "Nous assaillons, vous assaillez, ils assaillent. Dict. Gramm. L' Acad. et le Rich. Port. mettent le sing. J' assaille. Ce singulier est bien peu usité. _ J' assaillois, j' assaillis; j' assaillirai (ou j' assaillerai, dit M. de Wailly, l' Acad. ne met que le 1er.) J' assaillirois; que j' assâille, que j' assaillisse; assaillant, assailli.
   Rem. 1° L' a est bref, excepté devant l' e muet, où il est long. Que j' assâille, qu' ils assâillent, etc.~
   2° Autrefois on disait au sing. j' assaus, tu assaus, il assaut. _ Malherbe, parlant de l' Église, dit:
   Un jour, qui n' est pas loin, elle verra tombée
   La troupe qui l' assaut et la veut mettre bas.
On disait aussi au futur, j' assaudrai.
   ASSAILLIR, ataquer vivement. Au propre: assaillir un camp; les énemis dans leur retranchement. _ Au figuré, l' orage nous assaillit: nous fûmes assaillis d' une furieûse tempête.
   Rem. Selon l' Auteur des Réflexions, ce verbe ne se dit guère dans le propre; mais il est élégant au figuré. "Ce sont les plus grands périls, dont une âme Chrétienne puisse être assaillie. Lorsque les tentations viendront vous assaillir, ayez recours à la prière.
   Richelet trouvait ce mot déja vieux. Il a donc repris faveur, et se soutient encôre.

ASSAINIR


*ASSAINIR, v. a. Mot nouveau, ou renouvelé. Rendre sain. M. le Comte de Milly, de l' Acad. des Sciences a doné un Mémoire sur la manière d' assainir les murs nouvellement faits.

ASSAISONEMENT


ASSAISONEMENT, s. m. ASSAISONER, v. a. [Acèzoneman, Acèzoné, 2e è moyen, 4e e muet au 1er, é fer. au 2d, tout bref.] L' assaisonement est le mélange des ingrédiens qui servent à asaisoner, à acomoder une viande ou autre chôse à manger, de la manière qu' il faut pour la rendre agréable au goût. _ Et le substantif et le verbe se disent et au propre, et au figuré. "La viande étoit bonne, mais l' assaisonement n' en valoit rien: "L' assaisonement d' une salade. "Assaisoner les viandes, une Salade. _ "Quand il fait des grâces, il y met tous les assaisonemens possibles. "Il assaisone ses reproches même, de tout ce qui peut les faire suporter et les rendre même agréables. _ Mde de Sévigné emploie le participe sans régime, et l' aplique à une persone. "Ah! que toute sa persone (de Pauline) est assaisonée! Que sa physionomie est spirituelle!

ASSASSIN


ASSASSIN, s. m. ASSASSINAT, s. m. [A--sa-cein, cina, tout bref.] Le 1er est le nom du meurtrier, et le 2d du meurtre en trahison. * Ceux qui disent, il a commis un assassin, pour dire, un assassinat, parlent très-mal.
   ASSASSIN se dit figurément dans le style burlesque ou satirique.
   Ton frère, dis tu, l' assassin,
   M' a guéri d' une maladie.
   La preuve qu' il ne fut jamais mon Médecin,
   C' est que je suis encore en vie.       Boil.
Dans le même style, on l' emploie adjectivement: "Visage assassin. Voit. Des yeux assassins, Scar.
   Que dit elle de moi cette gent assassine?
       Mol.
Mais dans le style élevé cet adjectif serait un barbarisme. N' imitez point Brebeuf, quand il dit:
   Il faut que les éforts des puissantes machines
   Élancent contre lui des roches assassines.
   L' Acad. dit fer assassin, mouche assassine, et avertit qu' il n' est guère d' usage qu' en poésie, sans dire de quelle poésie elle parle. Mais il est certain que cet adjectif serait plutôt de la prôse badine que de la poésie sérieûse.

ASSASSINANT


ASSASSINANT, ANTE, adj. [A-saci--nan, nante, 4e lon.] Qui assassine. Molière l' emploie au propre: "Une rigueur assassinante. Cela n' est bon que pour le comique. _ Dans le style familier, ennuyeux, fatigant. L' Acad. ne met point ce mot.

ASSASSINER


ASSASSINER, v. a. [A-saciné, tout br.] Tuer de guet à pens, de dessein formé, en trahison. _ Il se dit figurément et hyperboliquement d' une grande importunité: "Il m' assassine de ses lettres: "il assassine de son babil tous ceux qui veulent lier avec lui quelque entretien; La Bruy.; d' une grande soufrance: "La jalousie le tûe, l' assassine; de la médisance.: "C' est-là qu' on assassine les absens à coups de langue.

ASSAUT


ASSAUT, s. m. [A-sô, 2e lon.] Ataque pour emporter de vive force une ville, une place de guerre, un poste, etc. Aller à l' assaut, monter à l' assaut, doner un assaut, prendre, emporter d' assaut. _ Faire assaut, se battre au fleuret. _ Figurément, sollicitation vive et pressante: "J' ai soutenu plusieurs assauts pour cette afaire: "Sa vertu a soutenu un terrible assaut. _ Ataque des passions. "La goutte done de violens assauts à la constance. _ Faire assaut (disputer) de: "Faire assaut d' esprit, de grec, de géographie, etc. Faire assaut de magnificence; Poulle: "L' on fait assaut d' éloquence jusqu' au pied de l' Autel et en la présence des mystères. "J' avois à parler à un Juge de 25 ans... on l' habilloit... il me convint d' essuyer tout le spectacle, qui consomma plus de temps qu' il n' en faloit pour raporter mon afaire. Je crus qu' il étoit assigné chez une Duchesse pour faire assaut de frisûre et d' odeurs. Coyer.

ASSE


ASSE. Dans cette terminaison, la pénult. est longue: 1°. Dans les substantifs, bâsse, châsse (de Saint) clâsse, échâsse, mâsse, tâsse. 2°. Dans les adjectifs féminins, bâsse, grâsse, lâsse. 3°. Dans ces verbes, il amâsse, il châsse, il pâsse, etc. 4°. Dans l' imparf. du subj. des verbes de la 1re clâsse: que j' aimâsse, qu' ils aimâssent, etc. _ Les autres ont la pénult. brève, et ne riment point avec les premiers. "Que penses-tu qu' il fasse? Rimant avec, dis-moi ce qui se pâsse, est une fausse rime. (Rac. Androm.) D' OLIV.

ASSEMBLAGE


ASSEMBLAGE, s. m. [A-sanblaje, 2e. lon.] Amâs et union de plusieurs chôses qu' on joint ensemble. "Un bâteau se fait de l' assemblage de plusieurs pièces de bois.

ASSEMBLÉE


ASSEMBLÉE, s. f. [A-sanblé-e; 2e lon. 3e é fer. et lon.] Ce mot a un sens passif: il signifie, non l' action d' assembler, mais l' assemblage, la collection des persones réunies dans un même lieu; "l' assemblée du Clergé, l' assemblée des États, des Chambres, etc. L' assemblée était nombreûse. _ Je crois ce mot mal employé dans cette phrâse du P. d' Avrigny. "Les plus Saints Papes ont assez marqué l' opinion qu' ils avoient de l' autorité des Conciles, par les soins qu' ils ont pris d' en procurer l' assemblée. Mém. Chron. _ Si assemblement s' était soutenu, ç' aurait été le vrai mot. Là du moins il falait mettre, d' en procurer la convocation.
   On dit, tenir l' assemblée, y présider; l' assemblée se tient, ou l' on tient l' assemblée dans un tel endroit; on s' assemble dans, etc.; l' assemblée tient ou se tient: on est actuellement assemblé. _ Rompre l' assemblée, la faire séparer d' autorité. Se rompre se dit d' une assemblée, qui se sépare sans avoir rien décidé; se lever; d' une assemblée qui finit. _ Assemblée se dit du rendez-vous où les chasseurs se trouvent; quartier d' assemblée, du lieu qu' on désigne aux troupes pour s' assembler. Batre l' assemblée, batre le tambour, afin que les soldats se rendent sous le drapeau.
   Rem. 1°. Assemblage se dit des chôses, et assemblée, des persones.
   2°. ASSEMBLÉE régit la prép. de avec l' article défini du, de la, des, quand c' est un nom collectif qu' il régit: l' assemblée du Parlement, de la Communauté, des États. Mde. de Sévigné se sert mal-à-propos de l' art. indéf. (de la prép. de) Reparlons un peu de cette assemblée de noblesse. Je pense que c' est une faute, et qu' il falait dire, de la noblesse. _ Avec les aûtres noms, qui ne sont pas collectifs, on met des quand l' art. d' assemblée est défini, et de, quand il est indéfini: on dit, l' assemblée des Avocats, et une assemblée d' Avocats. Voy. Article II. n°. I. Règle assez générale.

ASSEMBLEMENT


*ASSEMBLEMENT, s. m. Il est vieux, et c' est domage: il serait utile; car assemblage et assemblée signifient les chôses et les persones assemblées. Nous n' avons point de mot pour exprimer l' action d' assembler; Malherbe a dit:
   C' est en l' assemblement de ces couples célestes,
   Que si nos maux passés ont laissé quelques restes,
   Ils vont du tout finir.

ASSEMBLER


ASSEMBLER, v. a. [A-sanblé, 2e lon. 3e é fer.] Mettre ensemble. Acad. Joindre, mettre ensemble, ramasser, convoquer. Trév. Mettre ensemble, joindre ensemble; convoquer, amasser plusieurs persones dispersées, les faire trouver dans un même lieu. Rich. Port. Les deux dernières définitions sont un peu longues, mais elles expriment mieux les diférens emplois de ce mot. "Assembler des troupes; des matériaux; des feuilles d' un livre pour les relier; des livres, des papiers, etc. Assembler le Parlement, la Communauté, les États, etc. _ On dit proverbialement, qu' un homme a bientôt assemblé son conseil, pour dire qu' il prend bientôt son parti sans consulter persone.
   ASSEMBLER, v. récipr. ou pronominal. "Le parlement s' assemble; les créanciers se sont assemblés. _ Fontenelle l' emploie impersonellement: "Il s' assemble un conseil devant le palais de Pluton. Dial. des Morts. Pourquoi ne pas dire: un conseil s' assemble?

ASSENER


ASSENER, v. a. [Acené; 2e e muet, 3e é fer.] Porter un coup rude et violent. Acad. Porter un coup justement où l' on a dessein de fraper. Trév. Le Rich. Port. réunit les deux sens: Porter un coup avec force: fraper justement où l' on vise. Le 2d sens est peu usité. _ Il régit ou le datif de la persone, et l' acusatif de la chôse: il lui assena un coup de massûe; ou l' acusatif de la persone, l' ablatif (la prép. de) de la chôse: "Il l' a assené d' un coup de pierre entre les deux yeux. Acad. Ce dern. régime est moins usité que le 1er: il est relatif au 2d sens d' assener, que l' Acad. ne met pourtant pas.
   Rem. 1°. Ce mot qui s' était perdu, s' est renouvelé, dit Ménage, et l' on s' en sert fort bien aujourd' hui. L' Acad. est du même sentiment. Dans le Dict. de Trév. on dit qu' il est vieux, et qu' il ne se dit guère que dans le comique. On y cite ces vers de Molière.
   Je voudrois, à plaisir, sur ce mufle assener
   Le plus grand coup de poing, qui se puisse donner.
On le dit pourtant sérieûsement, mais seulement dans le style familier. "Il a bien assené son coup à la tête où il visoit. Trév. Mais on ne le dit pas des armes à feu. On dit en ce sens, adresser. _ L' Acad. met assener sans remarque.
   2°. Ce mot, dit l' Ab. Des Fontaines, (Dict. Néol.) emporte avec soi l' idée d' une action rude et vigoureûse. L' Auteur de l' Homme Universel, dit des Satiriques: qu' ils ressentent sur l' heûre une satisfaction secrète d' un coup de langue bien assené. Belle métaphôre! s' écrie ce célèbre critique, qui nous représente la langue d' un Satirique comme une grosse et lourde massûe, qui assène de bons coups.

ASSEOIR


ASSEOIR, v. a. [A-soar; 2e dout.] L' e est entièrement muet: il n' est-là qu' à cause des temps de ce verbe, où cette voyelle se trouve.
   ASSEOIR est très-difficile à conjuguer, et peu de verbes ont essuyé et essuyent encore tant de variations. On dit au présent: j' assieds, tu assieds, il assied, nous asséyons, vous asséyez, ils asséyent. _ Vaugelas dit à la 3e persone du pluriel: ils s' assient. Cela pouvait être bon de son temps; mais aujourd' hui il faut dire: ils s' asséyent. M. Moreau et le P. Grifet disent, je m' assis, il s' assit. J. J. Rous. il s' asséye. "Le parricide s' assit tranquillement sur le Trône; le sens de la phrâse est au présent. "Le St. Esprit s' assit, il se repose sur la rête des Apôtres. Ann. Chrét. "Il se calme, la fait rasseoir, s' asséye à côté d' elle.
   Imparfait, j' asséyois, nous asséyons, ils asséyoient. Acad. Les deux 1res pers. du pl. de ce temps ne sont pas semblables à celles du prés. Celles-là ont la pénult. fort longue, et ont un i après l' y grec: nous nous asséyions, vous vous asséyiez. Mais celle du prés, est brève, et l' on écrit sans i: nous nous asséyons, vous vous asséyez. _ Vaugelas écrit: asséïons, asseïez avec un ï. Cette ortographe seroit encore meilleure. _ L' Acad. ne parle pas de cette distinction fort juste de l' imparfait et du présent.
   Prétérit; j' assis, j' ai assis, je m' assis, je me suis assis, etc.
   Les sentimens sont partagés pour le futur. On dit, je m' asséyerai, je m' assirai, et je m' assoirai. Je crois, dit la Touche, que les deux derniers sont très-mauvais, et que le 1er est le meilleur de tous. Nous croyons au contraire que c' est le dernier qu' on doit préférer. L' Acad. met j' assierai, ou j' asséyerai. _ On ne dit point je m' assierrai par 2 rr, comme l' écrit un Gramairien, parce que l' e devant 2 r est ouvert, au lieu qu' il est fermé ici.
   Le peuple dit à l' impératif, assis-toi, qu' il s' assise, assisons-nous, assisez-vous, qu' ils s' assisent: c' est très-mal parler. Il faut dire assiez-toi. (L' Acad. Assied) qu' il s' asséye, asséyons-nous, qu' ils s' asséyent.
   Au prés. du subjonctif, il convient d' écrire, que nous asséyions, que vous asséyiez, pour le distinguer de l' impératif, asséyons, asséyez.
   L' Imparfait du subj. est que j' assise, tu assises, il assise, nous assisions, vous assisiez, ils assisent.
   On dit au participe, s' asséyant, et non pas s' asséant.
   Rem. On dit dans le Dict. Gram. qu' il est une autre manière de conjuguer ce verbe, qui est plus moderne, mais plus régulière et moins embarrassante. Assoir, j' assois, tu assois, il assoit, nous assoyons, vous assoyez, ils assoient. (Pron. A-soâ, a-soa-ion, a-soa-ié, a-soâ.) J' assoyois, tu assoyois, il assoyoit; nous assoyions, vous assoyiez, ils assoyoient. Le Prétérit, comme dans l' ancienne manière: J' assoirai, j' assoirois _ Assied-toi, qu' il s' assoie, que nous assoyons, vous assoyez, qu' ils s' assoient. _ Subj. prés. Que nous assoyions, vous assoyiez, qu' ils s' assoient. _ Assoyant, assis. _ S' asseoir se conjugue de même: je m' assois, nous nous assoyons, etc.
   Dans une édition du Rich. Port. postérieure au Dict. Gram. on dit que plusieurs disent j' asseois, tu asseois, j' asseoyois, j' asseoirai, etc. et que cette dernière façon seroit plus régulière et moins embarrassante. _ Alors il serait donc mieux d' écrire, comme nous l' avons fait: assoir, j' assois, etc. Car que fait-là cet e devant l' o?
   ASSEOIR. 1°. Mettre sur un siège. Assoir un enfant sur une chaîse. En ce sens, il se dit plus souvent avec le pron. pers. s' asseoir. _ 2°. En termes de bâtiment: poser sur quelque chôse de ferme. Asseoir les fondemens; assoir une pierre, une statue sur son piédestal. _ Figurément, assoir les tailles, les imposer, les répartir; assoir une rente, (la placer) sur... Assoir un camp, le placer.
   Rem. Vaugelas dit qu' assoir son jugement sur, ne se dit qu' à l' infinitif. Th. Corneille pense au contraire qu' on peut s' en servir hors de l' infinitif. "Je n' ai assis aucun jugement là-dessus. L. T. Il est râre pourtant qu' on l' emploie dans les autres temps. On le dit presque toujours avec le verbe pouvoir: Je ne puis, je ne pouvois assoir, etc.

ASSERTION


ASSERTION, s. f. [Acèr-cion, et en vers ci-on.] Terme didactique. Proposition qu' on soutient vraie. "Cette assertion est hazardée, est fausse. Le fameux Recueil des Assertions, etc. _ Au Palais; afirmation en Justice: "On le renvoya sur son assertion. Il n' est guère en usage. Acad. L' Auteur des Réflexions, etc. trouvait que ce mot sentait trop l' école.

ASSERVIR


ASSERVIR, v. a. [A-cèrvi, 2e ê ouv. et bref.] Assujétir, réduire en sa puissance. Il se dit, ou avec le régime direct seulement; "Ce Conquérant a asservi plusieurs Nations; ou il a pour 2d régime la prép. à, sur-tout au figuré: "il voudroit m' asservir à toutes ses volontés, à tous ses caprices. _ S' asservir a ce 2d régime: s' asservir aux règles. "Il faut souvent s' asservir aux volontés d' autrui.
   ASSERVIR se dit aussi figurément avec le régime direct. Asservir ses passions, les dompter. "Ses charmes ont asservi beaucoup d' amans; ont asservi tous les coeurs. Dur esclavage!

ASSERVISSEMENT


ASSERVISSEMENT, s. m. [Acêrvice--man, 2e ê ouv. 3e lon. 4e e muet.] État de ce qui est asservi. Servitude, esclavage. "Ce Prince tint toute sa vie ses sujets dans un cruel asservissement. "On n' a jamais trouvé le bonheur dans ce honteux asservissement à ses passions.
   Rem. Il est étonant que ce mot si beau, au figuré sur-tout, si utile et si nécessaire à la langue, ait été oublié dans tous les Dictionaires. Je ne crois pas me tromper en disant qu' il est universellement employé par les bons Auteurs; et j' étais si fortement persuadé que la chôse ne pouvait être douteûse, que j' ai négligé de recueillir les phrâses où ils l' emploient.

ASSESSEUR


ASSESSEUR, s. m. [Acè-ceur, 2e è moy. 3e dout.; au plur. elle est longue.] Officier de Justice gradué, qui est adjoint à un Juge principal. Dans plusieurs Villes, c' est un Avocat, qui est du nombre des Consuls ou Échevins, avec ce titre.

ASSEURER


*ASSEURER, vieille ortographe. Voyez ASSURER.

ASSEZ


ASSEZ, adv. [Acé, et devant une voyelle, acéz. Quelques-uns écrivent mal-à-propos assès avec un accent grave: l' é est fermé.] Sufisamment, autant qu' il faut. Il régit les adjectifs, assez bon, assez grand; et les substantifs précédés de la prép. de: assez de bien, assez d' argent, assez de Soldats, et non pas, comme disent les Gascons, assez du bien, de l' argent, des Soldats, etc. Il modifie aussi les verbes. C' est assez parlé, assez disputé. _ On dit assez peu et assez souvent, pour dire simplement, peu et souvent. Il n' est alors qu' une particule explétive et redondante pour renforcer ce qu' on veut dire.
   Rem.Assez doit précéder le nom qu' il régit, excepté le pronom en, qui le précède. "Il y a assez d' argent: "Il n' y en a pas assez. * Pluche le fait suivre mal-à-propos: "Il y a du temps assez pour amener les embrions à leur perfection. Il faut, il y a assez de temps pour, etc. _ On peut passer cette construction au Poète, gêné par la mesure et par la rime.
   Et l' honête homme, foible assez
   Pour toucher dans la main de celui qu' il méprise.
       Anon.
Pour les verbes, il suit dans les temps simples; il suit ou précède avec l' infinitif; et il se place ordinairement, dans les temps composés, entre l' auxil. et le participe. "Je mange assez; c' est assez manger, ou c' est manger assez: le premier est le meilleur: "Il a assez mangé. Je crois en avoir dit assez Ann. Litt. En avoir assez dit, ne serait-il pas mieux? _ Quand il est suivi de pour, ce qui lui arrive souvent, il peut, même dans les temps composés, précéder ou suivre. "J' ai assez mangé, ou j' ai mangé assez pour me soutenir; mais la première construction est préférable d' ordinaire.
   2° Assez ne se dit jamais qu' avec le régime. *"Avons-nous jamais assez pour remplir l' insatiable convoitise, qui nous dévôre? Bourdal. Il falait: en avons-nous jamais assez, etc. "C' étoit assez pour faire conaitre à Gama que, etc. Hist. des Voyag. Dites: C' en était assez, etc.
   3° Assez est souvent suivi de pour que et du subjonctif. "L' autorité royale y mettoit un frein assez fort, pour qu' elles ne pussent troubler la tranquillité publique. _ C' est assez que régit aussi le subjonctif. "C' est assez qu' il soit Philosophe, pour être fier et méprisant. Anon. On peut dire aussi, pour qu' il soit fier, etc.
   ....Es-ce assez qu' en secret j' en rougisse,
   Lorsqu' il faut de ce feu que mon coeur s' afranchisse.       Créb.
* Leibnitz dit: Quand Dieu n' auroit rien promis, c' est assez qu' il y a une convenance, qui l' auroit pu porter à faire cette promesse. Il faut, qu' il y ait, etc.
   4° Assez, modifiant un adjectif, régir que de et l' infinitif. Ceux qui sont assez heureux que de mourir sur ses bords (du Gange) sont admis dans une région délicieûse, etc. Let. Edif. _ On dit ordinairement, pour mourir, etc.
   5° Assez, sufisamment (synon.) L' un et l' autre regardent également la quantité; mais avec cette diférence, qu' assez a plus de raport à la quantité qu' on veut avoir, et sufisamment en a plus à la quantité qu' on veut employer. "L' avare n' en a jamais assez: il acumule et souhaite sans cesse. "Le prodigue n' en a jamais sufisamment: il veut toujours plus dépenser qu' il n' a. On dit: c' est assez, quand on n' en veut pas davantage; et l' on dit: en voilà sufisamment, lorsqu' on en a précisément ce qu' il en faut pour l' usage qu' on en veut faire. _ À~ l' egard des dôses et de tout ce qui se consume, assez paraît marquer plus de quantité que sufisamment; car il semble que quand il y en a assez, ce qui serait de plus y serait de trop; mais que quand il y en a sufisamment, ce qui y serait de plus, ne ferait que l' abondance, sans y être de trop. On dit d' une petite portion, et d' un revenu médiocre, qu' il y en a sufisamment; mais on ne dit guère qu' on en a assez.
   Il se trouve dans la signification d' assez plus de généralité, ce qui lui done un service plus étendu, et en rend l' usage plus commun; au lieu que sufisamment renferme, dans son idée, un raport à l' emploi des chôses, qui, lui donant un caractère plus particulier, en borne l' usage à un petit nombre d' ocasions. "C' est assez d' une heure à table pour prendre sufisamment de nourriture: mais ce n' est pas assez pour ceux qui en font leurs délices. "L' économe sait en trouver assez où il y en a peu: Le prodigue n' en peut avoir sufisamment où il y en a même beaucoup. GIR. Synon.
   6° Assez suffisant est un pléonasme, une répétition d' idées: il faut dire sufisant tout seul: "Cela est sufisant; cela n' est pas sufisant, et non pas cela est assez sufisant; cela n' est pas assez sufisant. Furetière avait fait cette faute dans son second Factum contre l' Académie. Réflex.

ASSIDU


ASSIDU, ÛE, adj. [Acidu, dû-e, 3e lon. au 2d.] Il se dit des persones, et régit à devant les noms des chôses et les verbes, et auprès devant les noms des persones; être assidu au travail, à l' office, à faire sa cour; auprès de ce grand, de cette femme. _ Il se dit aussi des chôses; travail assidu, soins assidus, visites assiduës. = Il suit ordinairement le subst. comme on le voit par les exemples cités. En vers, le masculin peut précéder, jamais le féminin.
   Mais on s' éforce en vain par d' assidus combats.
       Corn.

ASSIDUITÉ


ASSIDUITÉ, s. f. ASSIDUMENT, adv. [Acidu-ité, aciduman: tout bref.] L' assiduité est l' aplication continuelle à quelque chôse. Il a les mêmes régimes qu' Assidu. _ Assidument, avec assiduité: "Travailler assidument.
   Rem. On écrivait autrefois assiduement: on a bien fait de retrancher cet e, qui était fort inutile. Mais il marquait que cet adv. était formé du fém. assiduë. Eh bien! en le retranchant cet e, on fait croire qu' assidument est formé du masc. assidu, ce qui est fort indifférent.

ASSIÉGEANT


ASSIÉGEANT, ANTE, ASSIÉGÉ, ÉE, adj. [A-cié-jan, jan-te, , gé-e: 2e é fer. 3e lon. aux deux prem. et au 4e.] Qui assiège; qui est assiégé. "Les troupes assiégeantes devinrent assiégées. _ L' un et l' autre s' emploie plus ordinairement comme substantifs; les assiégeans se décourageaient à mesure que les assiégés reprenaient courage. On les dit toujours au pluriel: un des assiégeans, un des assiégés, et non pas un assiégeant, un assiégé. _ L' Ab. Du Bos, assez amateur du Néologisme, dit d' une figure de Jules II. "On reconoît dans son portrait l' assiégeant obstiné de la Mirandole.

ASSIÉGER


ASSIÉGER, v. a. [A-cié-jé. 2e et 3e é fer. tout bref.] Faire le siège d' une place. _ Au passif, il se dit des persones enfermées dans une place assiégée. "Il fut assiégé dans Tournai. _ Au figuré, enfermer: environer "Les eaux nous ont assiégés. "Que de malheurs nous assiégent. "Ses créanciers l' assiègent. _ Importuner: "Il m' assiège tout le jour: "J' en suis assiégé à toute heure.
   Rem. Ce verbe n' a que le régime direct, (l' acusatif.) La Motte, dans son Iliade en racourci, lui done pour 2d régime la prép. de (l' ablat.)
   * Quand les vents, échapés des cavernes profondes,
   Du choc bruyant des flots assiègent les rochers.
Des vents qui assiègent du choc des flots!
En vérité, cela est inimitable, dit ironiquement l' Ab. Des fontaines.
   * Le Gendre done à ce verbe un autre faux régime, la prép. sur: "Sigismond Malatesta, en 1463, assiégéa Sparte sur les Turcs.
   *ASSIÉGÉ par, pour attaqué, ateint, est une expression condamnée par le Père Bouhours. "Assiégé par un déluge d' hérésies, par un déluge de maux: Ces façons de parler ne valent rien, dit ce célèbre critique. On peut demander grâce pour la seconde. Car, puisqu' on peut dire: un déluge de maux nous assiége; pourquoi ne dirait-on pas qu' on en est assiégé?

ASSIETTE


ASSIETTE ou ASSIèTE, s. f. [A-ciè-te, 2e è moy. 3e e muet, tout bref.] 1°. Situation, manière d' être assis, couché, placé. "Ce malade ne peut trouver une bone assiette. Il est peu usité en ce sens, et l' on dit plutôt situation. = 2° Situation d' un corps solide, placé sur un autre: l' assiète d' une pierre, d' une poutre. "Cela n' est pas dans son assiette. 3° Situation d' une maison, d' une Ville, d' une forteresse: "Cette place est dans une assiette avantageûse. _ 4° Figurément, état et disposition de l' esprit. "Il n' a pas l' esprit dans une bonne assiette. = 5°. Imposition des tâilles. Les Collecteurs ont fait l' assiette des tâilles dans cette Paroisse. = 6° En Jurisprudence; fonds sur lequel une rente est assise, est assignée: "Rente en bone et sûre assiette.
   ASSIèTE, sorte de vaisselle plate, qu' on sert à table, sur laquelle chacun des convives met les viandes qu' il veut manger. Donez une assiète, changez d' assiètes, etc. _ Joubert dit: piquer l' assiette, chercher de bons repas chez les autres. L' Acad. dit: piquer les tables; M. Linguet: piquer la table.
   Rem. L' Académie aprouve assiette, et pour le propre et pour le figuré. Le P. Bouhours, au contraire, préfère le mot situation pour le propre, et il dit que même dans le figuré on s' en sert plus communément que du mot assiette. Il est vrai que ce dernier vieillit, excepté dans quelques locutions; mais il est bon de le conserver, ne fût-ce que pour varier les expressions. Nous manquons de synonimes dans la langue; et c' est par là sur--tout qu' elle est pauvre. _ On peut donc dire: "Ville agréable par sa situation ou par son assiette; place forte d' assiette, ou par son assiette. "Cette place se trouva si forte d' assiette, qu' il lui fut impossible de la prendre. Rollin. _ Et pour le figuré: Son esprit n' est jamais dans une même situation; il n' est pas dans une assiette tranquille. "L' assiette de l' esprit de l' Homme est sujette au changement. La Rochef.
   Mais lui seul immobile
   Garde au sein du combat une assiette tranquille.
       Boileau.
"M. de Voltaire est hors de son assiette; il a perdu cette égalité d' âme, qui est le fruit le plus doux de la Philosophie. L' Ab. Nonotte.

ASSIETTÉE


ASSIETTÉE, ou ASSIÉTÉE, s. f. [A-cié--té-e, 2e et 3e é fer. long à la 3e-] Plein une assiète. Il est populaire. On dit plutôt, une assiete qu' une assiétée de soupe, de potage.

ASSIGNANT


*ASSIGNANT, ASSIGNÉ, adj. Boileau les a employés.
   Qui toujours assignans et toujours assignés,
   Souvent demeurent gueux de vingt procès gagnés.
Ces mots ne sont bons que pour le style comique ou satirique.

ASSIGNATION


ASSIGNATION, s. f. ASSIGNER, v. a. [Acigna-cion, acigné; mouillez le gn; et non pas acination, aciné, comme on le dit dans le Dict. Gramm.] L' assignation est l' action d' assigner; et assigner a plusieurs sens. 1°. Placer un payement sur certains fonds: on a assigné le douaire sur telle terre: "On lui a doné des assignations sur un tel capital. = 2°. Indiquer. "On en sauroit assigner la caûse de cet événement. Assignation n' a pas ce 2d sens. = 3° Doner un exploit pour comparaître en Justice. "On l' a assigné, ou il a reçu une assignation pour comparaître, etc. _ Dans le discours ordinaire, il ne signifie que rendez-vous, je parle du substantif. "Il devait se rendre à tel endroit; il a manqué à l' assignation. _ On ne dit pas assigner en ce sens, si ce n' est en riant.

ASSIMILATION


ASSIMILATION, s. f. ASSIMILER, v. a. Ces termes, conus seulement dans l' École et au Barreau, ont passé depuis quelque tems dans le discours ordinaire, et sont fort à la mode aujourd' hui. Il semble pourtant qu' il y a encore de l' affectation à s' en servir. Ils expriment l' action de rendre semblable, de comparer. _ Le Rich. Port. les met sans remarque. Trév. ne les dit qu' en Physique, en Médecine. _ L' Acad. done assimilation comme un terme de Physique, et met assimiler sans remarque et sans exemple. _ Le verbe est plus usité que le substantif~. Un Poète moderne l' a employé au réciproque. Il dit à~ M. Fabre, sur son Livre intitulé: Essai sur les Facultés de l' âme.
   C' est donc par toi que l' homme aprend à se connoître.
   Là, sans apercevoir qu' il dégrade son être,
   Méconnoissant les biens dont le Ciel l' a comblé
   Aux plus vils animaux il s' est assimilé.
   Ici, etc.       Le Chev. de Puissaye.

ASSISE


ASSISE, s. f. [Acîze, 2e lon. 3e e muet.] Rang~ de pierres de tâille, qu' on pôse horisontalement pour construire une muraille. "On en est à la 1re, à la 2de assise. _ Au pluriel, séances extraordinaires des Officiers des Seigneurs de fief. "On a tenu les Assises dans cette terre. _ On dit figurément, dans le style familier, qu' un homme tient ses assises dans une maison, dans une compagnie, pour dire qu' il y domine, qu' il y est écouté, aplaudi.

ASSISTANCE


ASSISTANCE, s. f [Acistance, 3e lon. 4e e muet.] 1° Présence. En ce sens, il ne se dit que dans la Pratique. = 2°. Aide, secours, soins, services. On dit, doner, prêter, promettre, demander assistance, ou de l' assistance: avoir besoin de l' assistance de; sans l' assistance de persone, etc. Mais on ne dit point avoir de l' assistance à l' égard de, comme on dit avoir soin de. "Jésus recommande Jean à sa mère: il ordone réciproquement à ce Disciple d' avoir, à l' égard de Marie; l' amour, la tendresse, l' assistance d' un enfant. Mascar. _ Avoir fait fort bien avec amour et tendresse: il ne vaut rien avec assistance.
   3° Compagnie assemblée en quelque lieu. Auditoire. Il est un peu vieux en ce sens. "C' est son visage qu' on voit aux almanachs représenter l' assistance. La Bruy. "L' homme apostolique fut souvent interrompu par les aplaudissemens de toute l' assistance. _ L' Acad. le met en ce sens, sans remarque.

ASSISTANT


ASSISTANT, ANTE, adj. [Acistan, tante, 3e lon.] L' usage de cet adjectif est fort borné. Évêque assistant, Prêtre assistant à l' autel.
   ASSISTANT, s. m. Il s' emploie toujours au pluriel. "Tous les assistans furent fort édifiés; un des assistans, et non pas un assistant.
   *ASSISTANT, pour aide, est un anglicisme: "On dressa deux tentes, l' une pour les malades, l' autre pour le Chirurgien, et ses assistans. Voy. d' Anson. Si le Traducteur avait ouvert le Dict. de Boyer, il aurait vû que ce mot est traduit par celui qui aide.

ASSISTER


ASSISTER, v. n. et a. [Acisté, 3e é fer.] Dans le sens d' être présent il est neutre, et régit les chôses, avec la prép. à. "Assister à un Jugement, à une cérémonie, à la Messe, etc. _ Dans le sens de secourir, il régit les persones en régime direct, comme verbe actif. Assister les pauvres. * Autrefois on le faisait neutre dans ce dernier sens, et on lui donait le datif pour régime. "Les autres assistent soigneûsement à leurs Pères et Mères infirmes. St. Fr. de S. On dit aujourd' hui assistent leurs Pères, etc. _ Assister, (secourir) a pour second régime la prép. de: Assister ses amis de son crédit, de sa bourse, de ses conseils.
   ASSISTER, au passif, et avec faire réciproque, a le sens d' acompagner: "Il étoit assisté de son Procureur. "Il se fit assister par des Archers. Acad. _ Je crois qu' il ne se dit qu' au Palais.

ASSOCIATION


ASSOCIATION, s. f. [A-soci-a-cion, en vers, ci-on, tout bref.] Union de plusieurs persones, qui se joignent ensemble pour quelque intérêt commun. Acte d' association. "Leur association est finie, est rompûë. _ Pour le commerce, on dit société, plutôt qu' association, quoiqu' on dise associé, et non pas sociétaire, mot barbâre, dont quelques-uns se servent.

ASSOCIÉ


ASSOCIÉ, s. m. [A-soci-é.] Qui est en société avec... Il se dit, ou avec la prép. de, ou avec les pron. possessifs. "C' est l' associé d' un tel: "C' est mon associé: "Il est en procès avec ses associés. V. CONFRèRE.

ASSOCIER


ASSOCIER, v. a. [A-soci-é, tout bref.] Prendre quelqu' un pour compagnon, pour collègue: "Dioclétien associa Maximien à l' Empire. = Recevoir dans une compagnie, dans une société de commerce, pour partager les engagemens, les dépenses, les profits et les pertes. "Ils l' ont associé avec eux, dans leur commerce. = S' associer, au pluriel, se dit sans régime: ils se sont associés pour le commerce des Indes, ou avec la prép. avec. "Ils se sont associés avec lui pour cette entreprise. = Au sing. il se dit toujours avec cette préposition. "Il s' est associé avec des fripons. Dans ce dernier emploi, il se dit non seulement des sociétés d' intérêt, mais des liaisons, des fréquentations. "Il ne faut pas qu' un jeune homme s' associe avec toute sorte de gens, avec des joueurs de profession, des libertins, etc.

ASSOMMANT


ASSOMMANT, ANTE, adj. [Asoman, mante, 3e lon.] Qui assomme. Il ne s' emploie qu' au figuré, et il se dit des persones et des chôses, et signifie ennuyeux, fatigant. "Elle étoit assomante à force de complimens. "Les visites de la Ville m' ont paru encôre plus assomantes que celles de la campagne. _ Ce mot n' est pas dans les Dictionaires, mais il n' en est pas moins bon.

ASSOMMER


ASSOMMER, ou ASSOMER, v. a. [A--somé, 3e é fer. tout bref.] 1°. Tuer avec quelque chôse de pesant. "Assomer à coups de bâton. = 2°. Batre avec excès. "On peut châtier les enfans; mais il ne faut pas les assomer. = 3°. Figurément, il se dit de tout ce qui incommode, qui importune, qui aflige beaucoup. "Les habits de drap assomment: Cet homme nous assomme avec son babil éternel. "Elle vient me rejoindre sous le portique, et m' assomme de caresses affectées. Fielding. "La perte de ce procès l' a assommé. _ Assommer, dans le 2d sens, régit la prép. de: assommer de coups. = 4°. S' assommer se dit, ou sans régime, ou avec de; mais figurément. "Vous vous assommez à force de travail; il s' assomme d' écritûre. _ Mde de Sévigné lui fait régir l' infinitif. "Ne vous remettez pas sitôt à vous assomer d' écrire. _ Ce régime ne ferait pas bien avec toute sorte de verbes. = 5°. Assommer et s' assommer, au figuré, ne sont que du style familier.

ASSOMPTION


ASSOMPTION, s. f. [A-sonp-cion, et en vers ci-on; 2e lon.] Il ne se dit qu' en parlant du moment où la Ste. Vierge fut enlevée en corps et en âme dans le Ciel; et du jour où l' Église en célèbre la mémoire. _ On dit l' Ascension de N. S. parce qu' il monta et s' éleva lui-même; et l' Assomption de la Ste. Vierge, parce qu' elle fut enlevée dans le Ciel.

ASSONANCE


ASSONANCE, s. f. Rime imparfaite. Ressemblance imparfaite de son dans les mots; comme Soleil et immortel, commerce, richesse. Il faut éviter ces assonances, presque autant que les rimes, dans la prôse.

ASSORTIMENT


ASSORTIMENT, s. m. ASSORTIR, v. a. [A-sortiman, sorti: tout bref, excepté la dern. du 1er.] Ils expriment l' un et l' autre l' action de joindre des chôses ou des persones qui se conviènent; assortir des couleurs, assortiment de couleurs. À~ table il faut assortir les convives. "Le Mariage d' une jeune fille avec un vieillard, fait un étrange assortiment.
   ASSORTIR est tantôt actif, et régit la prép. de: assortir une boutique, un magasin de toute sorte de marchandises. "Cette étoffe est belle: il faut l' assortir de quelque doublure qui lui convienne. Ou il s' emploie avec le seul régime direct des persones. "Ce Marchand a de quoi vous assortir, vous fournir ce que vous demandez. _ Tantôt il est neutre et régit à: "Cette couleur n' assortit pas à l' autre; et non pas: n' assortit pas l' autre, comme le disent plusieurs.
   Au mode passif, il régit aussi à, mais ce mode s' emploie plus au figuré qu' au propre. "Cet emploi est assorti à ses talens, à son humeur. M. Formey le fait neutre en ce sens: "Il se donna par-tout pour un Officier Prussien: son équipage y assortissoit. On trouve aussi dans Trév. "Vous ne trouverez rien qui assortisse à cela. _ L' Acad. en fournit aussi des exemples; mais c' est dans le propre, ce qui est à remarquer. Être assorti vaut mieux pour le figuré. _ Mlle. Scuderi emploie l' actif au figuré et au propre dans la même phrâse. "Il est aussi nécessaire de bien assortir les gens dans un repas, que les couleurs dans un habillement. _ Marchand assorti, qui a toutes les marchandises qui sont de son commerce.

ASSORTISSANT


ASSORTISSANT, ANTE, adj. [A-sorti--san, sante, 3e lon.] Qui convient, qui assortit bien. Il régit la prép. à: "Donez-moi une couleur assortissante à ce gris de lin. Acad. "Voilà de plaisantes idées, et bien assortissantes à ce que vous allez voir Cléante.

ASSOTÉ


ASSOTÉ, ÉE, adj. et partic. du verbe Assoter, qui ne se dit plus qu' au mode passif. Il est du style familier ou comique, ou critique. "Jamais on ne vit père plus assoté (infatué, entêté) de ses enfans. Trév. Cessons d' être étonés de ce que des gens d' esprit sont assotés d' une belle figure, sans esprit. _ Il se dit toujours avec la prép. de.

ASSOUPIR


ASSOUPIR, v. a. ASSOUPISSEMENT, s. m. [A-sou-pi, piceman; 4e e muet au 2d] Le verbe a le sens actif (endormir à demi); le substantif a le sens passif: il n' exprime pas l' action d' assoupir, mais l' état d' une persone qui est assoupie. Voyez à la fin. _ Ils se disent au propre: "Les fumées du vin l' ont assoupi: "Il étoit dans un grand assoupissement; et au figuré, le verbe dans le sens d' adoucir, suspendre, calmer; assoupir la douleur; le substantif dans un sens métaphorique, qui tient du sens propre: "Le honteux assoupissement où les passions nous jettent. = Assoupir a encore un sens que n' a pas assoupissement; celui d' empêcher l' éclat, les progrès, les suites de quelque chôse de fâcheux: Assoupir une afaire, une querelle, une sédition, un diférend. _ On ne dit ni assoupissement de la douleur, ni l' assoupissement des diférends, de la guerre, etc. _ On dit avec le pron. pers. s' assoupir, mais seulement au propre: "Il s' assoupit après le repas.
   * Rem. La Touche dit que le verbe se prend toujours en bonne part (au figuré), et le substantif toujours en mauvaise part. Il a tort pour le premier. "Assoupir un diférend; la guerre est assoupie, sont des exemples qui confirment sa remarque. Mais ces vers de Rousseau y sont contraires.
   Craignez que de sa voix les trompeuses délices
   N' assoupissent enfin votre foible raison.
On dit aussi des sentimens de Religion, qu' ils ne sont pas toujours détruits dans une âme, mais qu' ils y sont souvent assoupis par les passions. L' Acad. ne met pas assoupir en ce sens, mais il est du bel usage.
   La Touche a mieux dit pour assoupissement au figuré; il se prend toujours en mauvaise part. "L' assoupissement de la raison. "L' état des pécheurs est un étrange assoupissement. "Sa molle langueur se dissipe: il sort de l' ivresse et de l' assoupissement du plaisir. Jér. Dél.
   Il semblerait, par ce dernier exemple, qu' assoupissement aurait quelquefois un sens actif; et que si l' assoupissement de la raison, c' est la raison qui est assoupie, l' assoupissement du plaisir, des passions, c' est le plaisir, ce sont les passions qui assoupissent la raison.

ASSOUPISSANT


ASSOUPISSANT, ANTE, adj. [A-sou-pi--san, sante, 4e lon.] Qui assoupit: "Fumées, vapeurs assoupissantes, discours assoupissant, monotonie assoupissante. "À~ quoi servent tous ces petits hors d' oeuvre (dans une pièce de Théâtre.) À~ ralentir la marche de l' action, à la gêner, et à y jeter une langueur assoupissante. Ann. Litt. "L' opium est une liqueur assoupissante, et propre à calmer le sang.
   ASSOUPISSANT suit ordinairement le nom qu' il modifie. Il peut quelquefois précéder, ou dans le style poétique, ou dans le style badin et satirique.
   Les assoupissantes vapeurs
   Que l' amour excite en nos âmes.
       Anon.
  L' assoupissant discours que nous venons d' entendre!
  L' assoupissante mélodie
  Dont nos sots dévanciers étoient si fort épris.

ASSOUPLIR


ASSOUPLIR, v. a. [A-sou-pli, tout bref.] Rendre souple. Au propre: assouplir une étofe, un cheval. Au figuré: assouplir le caractère des enfans, doit être le grand but de leur éducation. L' Ab. Desfontaines le blâmait au figuré: C' est un esprit dur, une âme fière, qu' il falloit assouplir. Journ. de Trév. Ou ce critique était trop dificile, ou depuis, ce mot s' est mieux établi. L' Acad. le met au figuré, et l' usage l' aprouve.

ASSOURDIR


ASSOURDIR, v. a. [A-sour-di, tout br.] Rendre sourd. "Le bruit du canon assourdit. _ Il se dit absolument et sans régime. Il régit pourtant fort bien la prép. de dans les phrâses suivantes. "Ils n' ont d' autre but que de nous assourdir de leurs flâmes amoureuses. Journ. de Mons.
   Tu préfère, dit-on, les rives de la Sprée
   À~ celles où jadis, ta gloire consacrée,
   Dans le Louvre, assourdi de claquemens confus,
   Acabla tant de fois tes ennemis vaincus.
       Linguet, Ép. à M. d' Al.
M. Thomas lui fait régir la prép. à
   Ah! c' est les remors et les vices;
   Qui du tableau des champs ternissent les couleurs;
   Au chant du rossignol assourdissent l' oreille,
   flétrissent la rose vermeille.
   Le parfum des vertus embaume encor les fleurs.

ASSOUVIR


ASSOUVIR, v. a. [A-sou-vi, tout bref.] Rassasier pleinement. "On ne peut assouvir cet enfant. Il régit quelquefois la prép. de: "On ne peut l' assouvir de pain, de viande: bête féroce, qui ne s' assouvit que de carnage.
   ASSOUVIR est très-élégant au figuré. "Assouvir sa vengeance, sa cruauté, sa rage. Assouvir ses passions, ses apétits brutaux. Il se prend toujours en mauvaise part.
   Assez et trop long-temps, implacables Achilles,
   vos discordes civiles
   De morts ont assouvi les Enfers étonnés.
       Rouss.
Mais se dit-il de la soif? Je ne le crois pas.
  Tous ses plaisirs n' entraînent que dégoûts,
  Aucun d' eux n' assouvit la soif qui le dévore.
       L. Rac.
La métaphôre ne me paraît pas juste. Étancher était le mot propre, mais il n' acomodait pas le Poète. Que ne disait-il: n' assouvit la faim. Celui-ci s' emploie au figuré comme l' autre. Je ne dissimulerai pas qu' on trouve dans Trév. assouvi de vin, de sang. J' ajoute qu' on ne doit pas être si sévère à l' égard des Poètes; mais je dis toujours que le verbe assouvir ne me paraît pas être bien allié avec soif. _ L' Acad. ne le dit que du pain, des viandes, etc. _ "Les esprits vifs... qu' une vaste imagination emporte hors des règles et de la justesse, ne peuvent s' assouvir de l' hiperbole. La Bruy. Et l' article et le singulier ne me paraissent pas convenables. Je crois qu' il faut dire s' assouvir d' hiperboles. "Cette fureur eut bientôt de nouvelles ocasions de se signaler sans s' assouvir.

ASSOUVISSEMENT


ASSOUVISSEMENT, s. m. [A-souviceman, 4e e muet.] Il ne se dit qu' au figuré; l' assouvissement des désirs, des passions.

ASSUJETTIR


ASSUJETTIR, ou mieux, ASSUJÉTIR, v. a. [A-sujéti, 3e é fer. tout bref.] 1°. Soumettre, ranger sous sa domination. Au propre, assujétir un peuple, une Province; au fig. assujétir ses passions. = 2°. Astreindre à... Il veut vous assujétir à d' étranges conditions. "Aujourd' hui, plus que jamais, les Auteurs ne veulent pas s' assujétir aux règles. "Il est dur de s' assujétir aux caprices des grands. = 3°. En mécanique, il régit les chôses. Assujétir une chôse, c' est l' arrêter, la fixer de manière qu' elle soit stable.

ASSUJETTISSANT


ASSUJETTISSANT, ou ASSUJÉTISSANT, ANTE, adj. [A-sujéti-san, sante, 3e é fer. 4e lon.] Qui astreint, qui gêne, Trév. Qui rend extrêmement sujet. Acad. Rich. Port. Métier bien assujétissant, charge fort assujétissante. "On secoûë les règles comme trop assujétissantes.

ASSUJETTISSEMENT


ASSUJETTISSEMENT, ou ASSUJÉTISSEMENT, s. m. [A-sujéticeman, 3e é fer. 5e e muet; dern. lon.] Contrainte, obligation de faire quelque chôse. Acad. Obligation un peu forcée, sujétion. Trév. Sujétion, soumission, contrainte. Rich. Port. Grand assujétissement. "Il est des assujétissemens qu' on ne peut long-temps souffrir. "Il ne faut pas tenir les enfans dans un trop grand assujétissement: "Un assujétissement continuel devient bientôt insuportable.

ASSURANCE


ASSURANCE, s. f. [3e lon. 4e e muet. Autrefois on écrivait asseurance.] 1°. Certitude. Avoir l' assurance de; en avoir l' assurance. Prendre une chôse avec assurance, sans craindre d' être trompé. = 2°. État où l' on est hors de péril. Mettre quelqu' un en assurance. Joubert le dit de la prison. Je crois que mettre en sûreté est le meilleur dans le premier sens, et le seul bon pour la prison. = 3°. Promesse, obligation, nantissement, etc. Quelle assurance me donerez-vous? Toutes les assurances que vous pouvez souhaiter. "Mon âme est-elle immortelle? La raison m' en done des assurances que je saisis avec joie. L. Rac.
   Ce substantif régit de et l' infinitif.
   Chacun suivant le Chef,
   Combat avec l' assurance
   De triompher à ses yeux.
       Rouss.
"Mon fils m' en console par l' assurance de venir m' embrasser ici en passant. Sév.
   4°. Hardiesse. Il parle; il répond, il ment avec assurance; il n' a pas d' assurance. Il se dit sur-tout de ceux qui paraissent en public. _ Avoir l' assurance d' un meurtrier, c' est, en style proverbial, soutenir impudemment une chôse fausse.

ASSURÉ


ASSURÉ, ÉE, adj. [3e é fer. lon. au 2d.] Hardi, sans crainte. Il ne se dit que des chôses, qui ont raport aux persones, et non pas des persones mêmes, du moins en bone part: regards assurés, contenance assurée. _ On dit assuré menteur, un assuré voleur, et il ne se dit ainsi des persones qu' en mauvaise part. _ Excepté dans ces deux phrâses, assuré suit toujours le substantif~. _ Dans le sens de certain, le masc. peut précéder, mais jamais le féminin.
   Et le berger connoît, par d' assurés présages,
   Quand il doit éviter les lointains pâturages.
       De Lille.
ASSURÉ, sûr, certain (synon.) Voy. CERTAIN.

ASSUREMENT


*ASSUREMENT, s. m. ASSURÉMENT, adv. [Le subst. a l' e muet à la 3e, l' adv. l' é fer.] On disait autrefois assurement pour certitude et pour promesse, nantissement. On disait j' en ai l' assurement, je vous donerai des assuremens. On dit aujourd' hui, assurance. Voy. ce mot. _ Assurément, adv. certainement. Il se met ordinairement à la tête de la phrâse. Cela est-il vrai? Assurément, oui assurément. "Assurément cela est vrai, est mieux que, cela est vrai assurément. _ "Assurément vous vous trompez, etc.

ASSURER


ASSURER, v. a. Autrefois ASSEURER [A--suré, 3e é fer. tout bref. devant l' e muet, l' û est long: j' assûre, j' assûrerai, etc.] 1°. Affirmer une chôse. "Il assûre une menterie aussi hardiment qu' une vérité. _ Il ne régit l' ablatif qu' avec en; je vous en assûre. Hors de là l' on met l' acusatif de la chôse, et le dat. de la pers. "Il nous l' assura tant de fois, que nous le crûmes. "Je n' ôse pas en assurer. Le P. Giry, Minime. Il faloit l' assurer _ En ne doit se dire que quand il y a un 2d régime de la pers. comme dans le premier ex. = 2°. Rendre témoignage. En ce sens est-il actif, est-il neutre? Faut-il dire, il l' assura, ou il lui assura que... Th. Corn. et l' Acad. sont pour le 1er: Vous pouvez l' assurer que je prendrai~ ses intérêts. _ Dans le sens d' affirmer, l' Acad. met leur assurer qu' une chôse est vraie. _ Dans le 2d. sens, assurer régit de devant les noms: "Assurez-le de mon respect, de ma reconaissance.
   Rem.Assurer, affirmer, confirmer, (synon.) Voici la diférence que l' Ab. Girard trouve entre ces trois verbes, qui conviènent pour le fond de la signification. On se sert du ton de la voix, ou d' une certaine manière de dire les chôses pour les assurer: On emploie le serment pour afirmer: "On a recours à une nouvelle preuve, ou au témoignage d' autrui pour confirmer. "Les Demi-Savans, les Pédans et les Petits-Maîtres assurent tout: ils ne parlent que par décisions. Les menteurs se font une habitude de tout afirmer: les juremens ne leur coûtent rien. Les gens impolis veulent quelquefois confirmer, par leur témoignage, ce que des persones fort au-dessus d' eux disent en leur présence.
   2° Racine done à assurer le sens de pourvoir à la sûreté.
   Les ennemis des Juifs m' ont trahi, m' ont trompé.
   En les perdant, j' ai cru vous assurer vous-même.
       Esther.
C. à. d. pourvoir à votre sûreté. Assurer n' a ce sens qu' avec les chôses; assurer une muraille, l' étayer; un vase, le poser de façon qu' il ne puisse tomber.
   Ailleurs le même Poète dit s' assurer, pour se rassurer.
   Mais je m' assure encore aux bontés de ton frère.
       Bazajet.
Princesse, assurez-vous, je le prends sous ma Garde.Athalie.
Dans le 2d. exemple, il n' y a qu' impropriété du mot: dans le 1er, il y a irrégularité du régime; car se rassurer régit sur et non pas à. On dirait en prôse: les bontés de ton frère me rassûrent.
   O bonté, qui m' assure, autant qu' elle m' honore!
       Rac.
  Girot enfin l' assûre.
      Boil.
Molière l' a aussi employé au lieu de rassûrer.
   3°. Assurer, afirmer, régit que et l' indicatif, si le sens est afirmatif; il régit le subjonctif, si le sens est négatif ou interrogatif: "J' assûre que cela est ainsi: je n' assûre pas, ou, pouvez-vous assurer que cela soit ainsi? _ Le P. Charlevoix a manqué à cette règle, commune à un grand nombre de verbes. "Je ne voudrois pas assurer qu' ils sont (soient) regardés comme des persones payennes. _ Il régit aussi l' infinitif sans préposition. "Plusieurs persones m' ont assuré avoir mangé de son fruit (de l' If) impunément. De Lille. _ Il a sur-tout ce régime, lorsqu' il est précédé du que relatif: "Ils y ajoutèrent plusieurs autres calomnies, qu' ils assuroient être la Doctrine que les Missionaires enseignoient à leurs Disciples. Let. Edif.
   4° S' assurer que, être persuadé que, etc. "Je m' assure que vous le ferez; assurez-vous que je ferai mon devoir. "Je m' assûre que l' Académie entière ne me désavouera pas. Voit. _ Autrefois on lui faisait régir les noms à l' ablatif. "Il n' y a que vous dont je puisse m' assurer, c. à. d. que je doive croire. Il est vieux en ce sens. Aujourd' hui il ne régit la prép. de que devant l' infinitif des verbes: "(Thamas Koulikan) partit pour aller faire le siège de Candahar, s' assurant de prendre la place, de soumettre ces barbares, etc. Lett. Edif "Il s' assûre trop aisément d' avoir bien rencontré. Dict. Gramm.
   Être assuré a le même régime: "Je suis assuré de l' obtenir. Il régit aussi le datif de la persone: "Ce poste lui est assuré.
   5°. Assurer a encôre d' autres sens: Assurer le douaire d' une femme, une dette, une hypothèque; prendre des moyens pour qu' ils ne périclitent point. _ Assurer la main, la rendre plus ferme, plus sûre. _ Assurer un cheval, le dresser à n' avoir peur de rien. _ Assurer un vaisseau, ou des marchandises, s' engager, moyénant une somme convenuë, qu' on apèle prime, à en payer la valeur, s' ils viènent à périr, à être pris, etc. _ S' assurer en quelqu' un, se confier en lui de quelqu' afaire. _ S' assurer de quelqu' un, s' assurer de sa protection, de son sufrage, etc. "Avant que d' entreprendre cette afaire, assurez vous d' un tel. _ S' assurer de quelqu' un ou de sa persone, signifie plus comunément l' arrêter, l' emprisoner. "Il forma le projet de s' assurer de sa persone. Moreau. "Ils lui coupèrent la tête pour s' assurer de lui. Hist. des Voy. Quelle étrange manière de s' assurer d' un homme? C' est le faire pendre, pour lui aprendre à vivre.
   6°. Je vous assûre, expression adverbiale: Assurément: certainement. "Elle n' a pas prouvé le moindre étonement, je vous assûre. Théat. d' Éduc. _ On le met à la fin de la phrâse. _ On retranche en, car régulièrement on devrait dire: je vous en assûre.

ASSUREUR


ASSUREUR, s. m. [A-su-reur, 3e dout. eurs au plur. est long.] Il ne se dit que de celui qui, pour une certaine somme, s' engage à payer la valeur ou partie de la valeur d' un vaisseau, ou des marchandises, si elle viennent à périr. "Ce Négociant a un procès avec ses Assureurs.

ASTÉRISQUE


ASTÉRISQUE, s. m. Terme d' Imprimerie. Petite marque en forme d' étoile, qui se met ordinairement dans les Livres, pour marquer un renvoi, une addition, ou une chôse digne de remarque. Ici nous l' employons devant les mots suranés, ou forgés, devant les barbarismes, les Anglicismes, etc.

ASTHMATIQUE


ASTHMATIQUE, adj. ASTHME, s. m. [l' h est muète, et n' est là que par respect pour l' étymologie.] L' asthme est une grande difficulté de respirer. Asthmatique se dit donc de celui qui est sujet à l' asthme. On dit vulgairement que l' asthme est un brevet de longue vie.

ASTRE


ASTRE, pénult. toujours brève, astre, pilastre, etc.

ASTRE


ASTRE, s. m. se dit, en général, de tous les corps célestes. Le mouvement, le cours, l' aspect des astres. Observer, spéculer les astres. Acad. Spéculer est vieux. _ Au fig. Il signifie, sort, destinée: c' est un reste du langage des Astrologues. "Ô Reine des vertus! ô Foi des Chrétiens!... tu triomphes du sort et des astres ennemis. Jér. Dél. La Foi et les astres ennemis ne vont guère bien ensemble.

ASTREINDRE


ASTREINDRE, v. a. [2e lon. 3e e muet. Quelques-uns écrivent astraindre avec un ai contre l' usage le plus autorisé, et contre l' analogie de la langue et l' étymologie car, dans les verbes de cette terminaison, la part. lat. in se rend en français par ein, fingere, feindre; pingere, peindre; cingere, ceindre, etc.] Assujétir. "On a voulu l' astreindre à des conditions honteûses. _ Il se dit sur-tout avec le pron. pers. et régit à devant les noms et les verbes. "S' astreindre à un travail assidu, à doner un volume par mois "Les Poètes Anglais ne s' astreignent guère aux règles du Théâtre.

ASTRINGENT


ASTRINGENT, ENTE, adj. [Astrein--jan, jante, 2e et 3e lon.] Qui resserre. "Remède astringent, poudre astringente. _ S. m. Ârêter le sang avec des astringens. "L' amadou est un astringent efficace.

ASTROLOGIE


ASTROLOGIE, ASTRONOMIE, s. f. [4e lon. 5e e muet.] Tous deux ont raport aux Astres; mais le 1er n' exprime qu' un art chimérique, sur les règles duquel on croyait pouvoir prédire l' avenir par l' inspection des Astres. _ Le 2d est une vraie science, fondée sur des principes sûrs, et des observations ou vraies ou probables. "L' Astronomie est une belle science: l' astrologie est une charlatanerie. Rich. Port. Voy. ASTROLOGUE, ASTRONOME.

ASTROLOGIQUE


ASTROLOGIQUE, ASTRONOMIQUE, adj. Qui apartient à l' Astrologie ou à l' Astronomie. _ Ces deux adj. aiment à suivre le substantif. Figure astrologique, tables astronomiques. _ En vers, ils peuvent précéder.
   Là, du toit d' un cinquième étage,
   S' éleve un antre aérien
   Un astrologique hermitage.
       Gresset.
  Ou tel est le sublime siège
  Où flanqué de trente deux-vens,
  L' Auteur de l' Almanach de Liège
  Lorgne l' Histoire du beau temps,
  Et fabrique, avec privilège,
  Ses astronomiques romans.       Id.

ASTROLOGUE


ASTROLOGUE, ASTRONOME, s. m. Le second conait le cours et le mouvement des astres: le premier raisone sur leur influence. L' Astronome observe l' état des Cieux, marque l' ordre des temps, les éclipses, etc. Il n' erre guère dans ses calculs. L' Astrologue prédit les événemens, tire des horoscopes, anonce la pluye, le froid, le chaud, etc. Il se trompe souvent dans ses prédictions. _ L' un explique ce qu' il sait, et mérite l' estime des savans; l' autre débite ce qu' il imagine, et cherche l' estime du peuple. GIR. Synon.

ASTUCE


ASTUCE, s. f. Finesse. Vieux mot, qui mériterait d' être conservé. _ L' Acad. le met sans remarque. Le Rich. Port. dit que c' est un vieux mot qui signifie mauvaise finesse. M. Linguet l' a employé. "Le sieur de... prodiguoit les petites astuces, les subtilités frauduleûses. Et M. Moreau. Philipe (Auguste) étoit ambitieux, mais il étoit incapable de ces petites astuces.

ASTUTIEUX


*ASTUTIEUX, adj. Mot forgé d' après Astuce par le cte de Mir. "L' implacable Richelieu, l' astutieux Mazarin. _ Il falait du moins écrire astucieux avec c.

ASYLE


ASYLE. Voy. ASILE.

AT


AT. Cette Syll. est longue à la fin des 3es persones du sing. de l' imparfait du subjonctif, qu' il aimât, etc. Dans apât, dégât, bât, mât. D' OLIV.

ATACHER


ATACHER, ATAQUER, Voy. ATTACHER, ATTAQUER, etc.

ATE


ATE. Pénult. longue. 1°. Dans hâte, pâte. 2°. Dans les verbes, il hâte, gâte, mâte, demâte. 3°. Dans les secondes persones du plur. de l' aoriste, vous aimâtes, etc. D' OLIV.

ATEINDRE


ATEINDRE, ATEINTE. Voy. ATTEINDRE, ATTEINTE.

ATELAGE


ATELAGE, ATELER. Voy. ATTELAGE, ATTELER.

ATELIER


ATELIER, s. m. [2e e muet, 3e é fer. Ate-lié. Trév. et le Dict. Gramm. écrivent Attelier avec deux t. _ Il n' est pas aisé de deviner la raison pourquoi l' Académie écrit attelage, atteler avec 2 t, et atelier avec un seul. _ Pour le Rich. Port. la raison est toute trouvée, c' est que l' Acad. l' a mis ainsi. Nous ne demandons pas mieux que de les imiter, et nous le ferions plus volontiers s' ils avaient fait main basse sur ce double t.] Le lieu où certains ouvriers travaillent sous un même maître. _ Il se dit aussi de la collection des ouvriers.

ATENANT


ATENANT. Voy. ATTENANT.

ATENDRE


ATENDRE, ATENDRIR, etc. Voy. ATTENDRE, ATTENDRIR, etc.

ATENTAT


ATENTAT, ATENTE, ATENTER, etc. Voy. ATTENTAT, ATTENTE, ATTENTER, etc.

ATENTIF


ATENTIF, ATENTION, etc. Voy. ATTENTIF, ATTENTION, etc.

ATÉNUATION


ATÉNUATION, ATÉNUER. Voy. ATTÉNUATION, ATTÉNUER.

ATERRER


ATERRER, ATERRISSEMENT. Voy. ATTERRER, ATTERRISSEMENT.

ATESTATION


ATESTATION, ATESTER. Voy. ATTESTATION, ATTESTER.

ATHÉE


ATHÉE, s. m. [2e é fer. et long. Até-e.] Celui qui ne reconaît point de Dieu. "C' est un Athée. _ Adj. Sentiment athée, proposition athée. Acad. Je crois qu' on peut douter si cet adjectif est aprouvé par l' usage.

ATHÉISME


ATHÉISME, s. m. [Até-isme.] Impiété qui consiste à ne reconaître point de Dieu. "Le libertinage conduit à l' Athéisme. "L' insensé a dit dans son coeur: il n' y a point de Dieu. Dixit insipiens in corde suo: non est Deus.

ATHÉISTE


*ATHÉISTE, est vieux. Voy. ATHÉE.

ATHLAS


ATHLAS. Voy. ATLAS.

ATHLèTE


ATHLèTE, s. m. [L' h n' est là que pour l' étymologie: At-lète, 2e è moy. 3e e muet.] C' était chez les anciens Grecs celui qui combatait dans les jeux solennels. _ On le dit figurément: 1°. des homes robustes. 2°. On apèle quelquefois les Martyrs, les Athlètes de la Foi. On pourrait dire aussi, et ils sont en plus grand nombre, les Athlètes de l' impiété, de l' incrédulité; les Athlètes de la Littérature; mais excepté la première phrâse, il ne se dit que par mépris.

ATHLÉTIQUE


*ATHLÉTIQUE, adj. Qui apartient aux Athlètes; qui concerne les Athlètes. "Les valétudinaires vivent plus long-temps que ceux qui jouissent d' une santé athlétique. Du Plaisir. _ L' Auteur aurait pu dire, d' une santé d' Athlète: il a préféré, santé athlétique, parce qu' il aime les mots singuliers. _ Trév. et le Rich. Port. mettent athlétique adjectif. Il est peu usité. L' Acad. ne le met que s. f. Branche de la Gymnastique des anciens.

ATHMOSPHèRE


ATHMOSPHèRE, s. f. Plusieurs retranchent l' h après le t, et écrivent atmosphère: c' est ainsi qu' écrit l' Acad. _ D' autres, en plus petit nombre, écrivent atmosfère. Cette dernière ortographe ne plaît qu' à ceux qui ont fait main basse sur le ph, et qui écrivent Filosophe, Fisique, etc. _ M. Bailly, ou son Imprimeur, fait atmosphère~, masc. "Vers les poles, dont l' atmosphère est moins agité, puisqu' on y est tout-à-fait immobile. Il faut agitée. M. Linguet dit aussi: C' est dans cet atmosphère qu' un prisonier respîre. Il faut cette atmosphère.
   ATMOSPHèRE se dit des particules très--déliées, dont un corps est environé. Paulian, Dict. de Phys. _ On le dit sur-tout du Soleil et de la Terre, atmosphère solaire, atmosphère terrestre. Quand on le dit seul et sans épithète, on entend celle de la Terre.
   Rem. On dit ordinairement, sortir de sa sphère: Rousseau a dit dans le même sens, sortir de son atmosphère.
   À~ quoi s' expôse un esprit sufisant,
   Qui, soutenu du vent de sa chimère,
   Pour s' élèver, sort de son atmosphère.
   Cette expression, comme moins usitée, serait moins bien dans le discours ordinaire.

ATIÉDIR


ATIÉDIR, ATIÉDISSEMENT. Voy. ATTIÉDIR, etc.

ATIFÉ


ATIFÉ, ÉE, adj. Paré avec trop de soin. "Le Tasse est trop atifé et trop poli dans des endroits où la grandeur du sujet demandoit un style plus simple et plus sérieux. P. Rapin. Cela n' est bon que dans le style comique ou critique.

ATIFER


ATIFER (s' ) v. réc. ou pronominal. S' orner, se parer. Il ne se dit que par moquerie. "La plupart des femmes ne songent qu' à s' atifer. L' Acad. avait d' abord dit, que ce mot vieillissait, et qu' on ne s' en servait guère qu' en raillant. Dans la dern. édit. elle dit qu' il est du style familier, qu' il ne se dit que des femmes, et ordinairement en parlant de leur coifûre. _ Elle écrit attifer avec deux t: c' est encore beaucoup qu' elle ne l' écrive pas avec deux f.

ATIFETS


ATIFETS, s. m. pl. Ajustemens de femme. Ornement de tête. Il est vieux. Acad.

ATINTER


ATINTER, (s' ) v. réc. Se parer avec trop d' afectation. Rich. Il est vieux et hors d' usage. Rich. Port. Populaire. Acad. "Elle est deux heures à s' atinter. "Qui vous a ainsi atintée?

ATIRAIL


ATIRAIL, ATIRER, etc. Voy. ATTIRAIL, ATTIRER, etc.

ATIRER


ATIRER, ATITRER, ATITUDE. Voy. ATTIRER, ATTITRER, ATTITUDE.

ATLAS


ATLAS, s. m. [l' s se prononce.] Recueil de Cartes Géographiques. Grand Atlas, Atlas portatif. = Il ne faut point d' h dans ce mot, ni dans le suivant. Dans le Dict. de Trév. (1704) on écrit Athlas, athlantique. _ Joubert n' en met point, et il fait bien; car, puisqu' il n' y en a point dans le latin, pourquoi en mettre dans le Français.

ATLANTIQUE


ATLANTIQUE, adj. [et non pas Athlantique.] Il aime à suivre: en vers, il peut précéder.
   Ami, quelle peur enfantine
   Te fait désaprouver cette écorce divine
   Dont l' Atlantique bord fit présent aux humains.
       Rouss.

ATMOSPHèRE


ATMOSPHèRE. Voy. ATHMOSPHèRE.

ATôME


ATôME, s. m. [2e lon. 3e e muet.] Corps, qu' on regarde comme indivisible, à cause de sa petitesse. Acad. Très-petite particule de matière, dont on croit qu' un corps est composé. Trév. _ On lit dans l' Ann-Litt. Atômes Epicuriennes. _ Ce mot est masculin.

ATOUCHEMENT


ATOUCHEMENT. Voyez ATTOUCHEMENT avec 2 t.

ATOUR


ATOUR, s. m. Il ne se dit qu' au pluriel en parlant de la parûre des femmes: "Elle a pris ses plus beaux atours; excepté avec dame, où on le dit au singul. et sérieusement: une Dame d' Atour, les Dames d' Atour de la Reine, et non pas d' atours. Dame dont la charge est de coîfer, d' habiller la Reine. Les Princesses de la Famille Royale ont aussi des Dames d' Atour. _ Dans son emploi ordinaire on ne dit atours que par moquerie.

ATOURNÉ


ATOURNÉ, ÉE, adj. ATOURNER, v. a. Orner, parer. Il ne se dit que de la parûre des femmes, et en plaisanterie. "Atourner l' épousée. "Vous voilà bien atournée.
   Ce chien-ci donc, étant de la sorte atourné,
   Un matin passe, et veut lui prendre le dîné.
       La Font.
Cela est bon dans une Fable et dans le style marotique.

A-TOUT


A-TOUT, s. m. Terme de jeu de cartes. C' est la même chôse que triomphe. On dit: jeter un a-tout, perdre un a-tout, comme on dit perdre, jeter une triomphe. _ Quelques persones font triomphe masc. en ce sens, et disent un triomphe. Ils font et disent mal.

ATRABILAIRE


ATRABILAIRE, adj. *ATRABILE, s. f. Le 1er est usité; le 2d est hors d' usage. Le P. Bouhours ne l' aprouvait pas, et il ne se trouve point dans le Dict. de l' Acad. _ Trév. l' a mis, et le Rich. Port. qui le cite. M. de la Chambre s' en est servi, dans l' Art de connoître les hommes, mais il n' a pas eu d' imitateurs. On dit d' un homme, dans le tempérament de qui la bile noire domine, qu' il est atrabilaire, qu' il a l' humeur atrabilaire, le visage atrabilaire; mais on ne dit point atrabile pour signifier la bile noire l' humeur noire.
   ATRABILAIRE est aussi subst. "C' est un atrabilaire. On ne le dit guère des femmes.

ATRAïANT


ATRAïANT, Rich. Voy. ATTRAYANT. _ En écrivant comme Richelet, il faudrait prononcer, atra-ian, et non pas atré-ian, comme c' est l' usage.

ATRACTION


ATRACTION, ATRAIT. Voyez ATTRACTION, ATTRAIT, avec 2 t.

ATRAPE


ATRAPE, ATRAPER. Voy. ATTRAPE, ATTRAPER.

ATRAPATOIRE


ATRAPATOIRE. Voy. ATTRAPATOIRE.

ATRAïANT


ATRAïANT, Voy. ATTRAYANT.

ATRE


ATRE. Excepté quatre et batre, la pénultième est longue dans cette terminaison, Idolâtre, théâtre. D' Oliv.

ÂTRE


ÂTRE, s. m. [2e lon.; l' â doit porter un acc. circ.] Foyer. L' endroit de la cheminée où l' on fait le feu dans les maisons. Ôter les cendres de l' âtre. "Ce chat est toujours couché le long de l' âtre.

ATRIBUER


ATRIBUER, ATRIBUT. Voyez ATTRIBUER, ATTRIBUT.

ATRISTER


ATRISTER, ATRITION. Voy. ATTRISTER, ATTRITION.

ATROCE


ATROCE, adj. [2e br. 3e e muet.] Énorme, excessif. Il ne se dit que des crimes, des injûres, des suplices. Acad.
   Rem. Jusqu' à présent il ne s' était dit que des actions et des chôses: on ne le disait point des persones. Montesquieu a été le premier qui le leur ait apliqué dans l' Esprit des Lois. "Il faut éviter les lois pénales en fait de Religion: elles rendent les âmes atroces. _ Cette expression a reparu dans un plaidoyer célèbre, et les Auteurs modernes l' emploient sans dificulté. P. ex. l' Ab. Sabatier (Trois Siècles, etc.) "Pourquoi les punir, avons-nous dit? Ne sont-ils pas assez malheureux d' être aveugles, lâches, fourbes, vindicatifs, atroces? _ L' Acad. dit seulement, on apèle âme atroce, une âme noire. _ On ne l' a guère dit en effet jusqu' à présent qu' avec le mot âme, quand on l' a apliqué aux persones.
   ATROCE ne fait guère bien devant le subst. sur-tout en prôse. "Un fils acuser son père et l' immoler à la tyrannie, est une atroce lâcheté, qui indigne, qui révolte, qui fait horreur et ne touche point. Journ. de Mons. sur la Tragédie de Tibère par M. Fallet. Atroce lâcheté, ne choque pas; mais atroce crime, atroce injûre, atroce suplice seraient d' une dûreté afreûse.

ATROCEMENT


*ATROCEMENT, adv. d' une manière atroce. Il n' est pas d' usage. On le trouve dans l' Hist. d' Angl. traduite de l' anglais de M. Hume.

ATROCITÉ


ATROCITÉ, s. f. Énormité. Il se dit, comme atroce, des crimes, des injures, des suplices. L' Acad. ajoute, et d' un caractère noir. "L' atrocité de caractère devient toujours plus commune parmi le peuple, et même parmi les gens qu' on apèle comme il faut. Ne serait-ce pas l' effet de l' irréligion et du défaut d' une éducation solide, raisonable et chrétiène?

ATROUPEMENT


ATROUPEMENT, ATROUPER. Voyez ATTROUPEMENT, ATTROUPER.

ATT


ATT. Les mots suivans n' ont qu' un t dans le Dict. de Richelet, et dans les écrits de la Touche, de l' Ab. Girard et autres. On peut n' en mettre qu' un sans doner un souflet trop fort à l' usage. Nous pensons que dans peu on retranchera toutes ces lettres doubles, assez inutiles et fort embarrassantes. Quoiqu' il en soit, ceux qui écrivent deux t, n' en prononcent qu' un.

ATTABLER


*ATTABLER (s' ) Trév. S' asseoir autour d' une table pour jouer, pour faire la débauche. On se sert rarement de ce mot, dit Richelet. L' Acad. ne le met point. Le Rich. Port. le met sans remarque.

ATTACHANT


*ATTACHANT, ANTE, adj. [3e lon. 4e e muet au 2d.] Ce mot avait vieilli: il a repris faveur. L' Acad. ne l' a pourtant pas mis. Il ne se dit qu' au figuré; Qui atache, qui touche, qui ocupe l' esprit agréablement. "Ayant joui de tout ce que le monde a de plus atachant, elle avoit su le mépriser. Marsolier. "C' est ce qui rend la lecture de ce recueil très-atachante. Anon. "Les discours qu' il (Pelisson) composa pour la justification de M. Fouquet, sont les chefs-d' oeuvre d' une éloquence mâle, rapide et atachante. Sabat. Trois Siècles, etc. "Sa manière, quoique simple, n' en est pas moins atachante. Ann. Litt. _ Le P. Rapin avait dit autrefois de Tite-Live: "Jamais peut-être Historien n' a été plus atachant par le talent qu' il a de peindre au vif la natûre. "Cet ouvrage est dans le même genre, mais moins atachant. L' Ab. de Fontenai.

ATTACHÉ


ATTACHÉ, ÉE, adj. L' Acad. ne le met pas, même dans le sens d' avâre: c' est un oubli. Il ne se dit absolument et sans régime que dans ce sens. Hors de-là il ne doit être employé qu' avec le v. être, et le datif des noms ou pronoms. On ne doit pas dire: "Il ne croyoit point avoir dans le monde un ami plus ataché et plus solide. Anon. On doit dire, un ami plus solide, et qui lui fut plus ataché.
   Ataché, Avâre, Intéressé, (synon.) Un homme ataché aime l' épargne et fuit la dépense: un homme avâre aime la possession, et ne fait aucun usage de ce qu' il a: un homme intéressé aime le gain, et ne fait rien gratuitement. L' ataché s' abstient de ce qui est cher; l' avâre se prive de ce qui coûte. L' intéressé ne s' arrête guère à ce qui ne produit rien. = Remarquez qu' on dit l' avâre substantivement, mais on ne dit pas l' ataché, ni l' intéressé.

ATTACHE


ATTACHE, s. f. ATTACHEMENT, s. m. ou ATACHE, ATACHEMENT. [3e e muet: Atacheman.] Le 1er se dit au propre et au figuré: l' atache d' un lévrier, mettre un chien à l' atache. "Atache (passion) criminelle. Le 2d ne se dit qu' au figuré; avoir de l' atachement à un parti, à ses intérêts, pour une femme, etc.
   Rem. 1°. Atache, Atachement, (synon.) Ces deux mots ne se disent pas indiféremment. On se sert d' ordinaire du second avec raport aux persones: il a beaucoup d' atachement auprès du Prince. "Il a beaucoup d' atachement pour cette femme. Auprès marque l' assiduité, et pour, la passion, la tendresse. Atache a plus de raport aux chôses et signifie souvent aplication; atache au jeu, à l' étude; ou passion; atache aux vanités du monde. _ On dit au pluriel ataches ou atachemens assez indiféremment: atachemens de la terre, ataches de la chair et du sang. Bouh. L. T. Il y a seulement d' un de ces deux môts à l' autre des nuances délicates, que le goût seul peut apercevoir. "Origène fut obligé de se justifier de l' atachement qu' il avoit à la lectûre des Philosophes. Le Gendre. Là atache était préférable et pour la propriété du mot et pour la régularité du régime. _ L' Acad. met assez indiféremment atache et atachement.
   2°. L' Ab. Girard compâre atachement avec atache et dévouement. "Quoique le mot d' atachement, dit-il, puisse quelquefois être pris en mauvaise part, il est pourtant mieux placé que les deux autres, à l' égard d' une passion honête et modérée: on a de l' atachement à son devoir; on en a pour un ami, pour sa famille, pour une femme d' honeur qu' on estime. Celui d' atache convient mieux, quand il est question d' une passion moins aprouvée, ou poussée à l' excès: on a de l' atache au jeu, on en a pour une maîtresse; quelquefois même pour un petit animal. Le mot de dévoument est d' usage pour marquer une parfaite disposition à obéir en tout: On est dévoué à son Prince, à son maître, à son bienfaiteur, à une Dame qui a acquis sur nous un empire absolu. _ Les deux premiers expriment de la sensibilité, de la tendresse; ils entrent souvent dans le langage du coeur. Le dernier marque de la docilité et du respect; il apartient au langage du courtisan. _ On dit de l' atachement qu' il est sincère, de l' atache, qu' elle est forte, et du dévoument, qu' il est sans réserve. _ L' un nous unit à ce que nous estimons, l' autre nous lie à ce que nous aimons, le troisième enfin nous soumet à la volonté de ceux que nous désirons de servir. GIR. Synon. _ On a pu remarquer qu' avec les chôses atache et atachement régissent à, et pour avec les persones. Atache au jeu, atachement à l' étude, au travail, à l' ouvrage; "Il a trop d' atache au travail; l' atachement à la vertu fait le bonheur de la vie. Atache pour une femme, atachement pour un ami. L' Acad. dit atache au jeu, ou pour le jeu.
   3°. Letres d' Atache sont des Lettres de Chancellerie pour faire exécuter, ou des Bulles du Pape, ou quelque Arrêt, quelque Ordonnance. _ On le dit figurément et par civilité: Prendre l' atache de quelqu' un, prendre, recevoir ses ordres: "Je ne veux rien faire sans votre atache, sans prendre votre atache. Acad.

ATTACHER


ATTACHER, ou ATACHER, v. a. 1°. Au propre, Joindre une chôse à une autre, en sorte qu' elle y tiène. Atacher un clou à une muraille; atacher avec un clou, avec un cordon. "La poix s' atache à l' étofe, etc. = 2°. Figurément; c' est ce qui m' atache à vous, auprès de vous. "Ils sont atachés fortement l' un à l' autre; il s' atache à l' étude, à bien exprimer les passions. _ 3°. Atacher avec les chôses pour sujet (nominatif) Apliquer, ocuper fortement: "La lectûre de ce livre atache tellement, qu' on ne peut le quiter. "Le jeu l' atache beaucoup trop. Atacher son afection, son esprit à... Il ne s' atache qu' à des bagatelles, etc. Être ataché à son opinion, à ses intérêts.

ATTAQUABLE


ATTAQUABLE, ou ATAQUABLE, adj. Trév. Qui peut être ataqué. Il est peu usité. L' Acad. ne le met pas.

ATTAQUANT


ATTAQUANT, ou ATAQUANT, s. m. [Atakan, 3e lon.] Celui qui ataque. Il ne se dit qu' au pluriel: "Les ataquans furent repoussés: "La Pucelle d' Orléans se retira derrière les ataquans. Mde de B. Hist. d' Angl. d' Hume. "Les conseils des ataquans étoient partagés par les plus violentes animosités. Targe, Trad de Smollet.
   Rem. ASSAILLANS se dit plutôt dans un siège et un assaut; Ataquans, dans des combats, des ataques de postes.

ATTAQUE


ATTAQUE, ou ATAQUE, s. f. 1°. Action d' ataquer: "Dès la première ataque les ennemis lâchèrent le pied. = 2°. Assaut: "On fit une ataque générale: on fit deux fausses ataques pour favoriser la véritable. = 3°. Travaux pour s' aprocher d' une place assiégée: "On avoit fort avancé les ataques. = 4°. Figurément, action de sonder l' intention, ou de faire quelque reproche couvert: "Il m' en a donné quelque ataque. = 5°. Maladie, comme ataque de goutte, ataque d' apoplexie, ou simplement ataque, pour cette dernière seulement.

ATTAQUER


ATTAQUER, ou ATAQUER, v. a. [Ata--ké, tout bref.] Être l' agresseur. Acad. Comencer une ataque, une querelle, un combat. Trév. Rich. Port. _ 1°. Au propre, Ataquer l' énemi, ataquer une place~. = 2°. Au figuré ataquer de paroles, ataquer quelqu' un sur sa naissance, un Auteur sur ses ouvrages.
   Rem. 1°. Ce verbe a un autre sens à l' actif, qu' au réciproque. Ataquer quelqu' un, et s' ataquer à quelqu' un ne signifient pas la même chôse. Vaugelas dit que la dernière façon de parler est très-étrange et très-Française tout ensemble; et qu' elle est plus élégante que la première. Mais Th. Corneille observe très bien qu' on ne peut apeler l' une plus élégante que l' autre, puisqu' elles signifient des chôses diverses. L' une (s' ataquer à) marque le sentiment, qui nous fait entreprendre d' ataquer une persone plus considérable et plus puissante que nous: l' autre (ataquer) signifie l' action même.
   Mais t' ataquer à moi! Qui t' a rendu si vain?
   Toi, qu' on n' a jamais vu les armes à la main.
dit le Comte à Rodrigue dans le Cid. Mais si l' on racontait leur combat, on ne devrait pas dire que Rodrigue s' ataqua au Comte, mais qu' il l' ataqua.
   2°. En style épistolaire, ataquer, c' est écrire le premier. C' est le provocare des Latins. "Je vous trouve accablé de lettres: tout le monde vous écrit: on vous ataque de tous côtés; et vous vous défendez contre dix. Sev. On dit aussi, ataquer quelqu' un de conversation; lui adresser la parole pour l' engager à parler.

ATTEINDRE


ATTEINDRE, ou ATEINDRE, v. act. 1°. Fraper de loin. "Il l' ateignit d' un coup de pierre. = 2°. Joindre en chemin: "Il m' a devancé, mais je l' ateindrai bientôt. = 3°. Au figuré, égaler. "Quelle présomption de s' être flaté d' ateindre Racine et Corneille: c' est bien assez d' ateindre ses concurrens actuels. = 4°. Neutre, Toucher à une chôse assez éloignée: je ne saurois ateindre à cette hauteur; je ne puis y ateindre. _ Il se dit en ce sens figurément: Ateindre à la perfection. Bien des gens y visent, il en est peu qui y ateignent. "Il ateindra au faîte de la gloire.

ATTEINT


ATTEINT, EINTE, adj. Il se dit toujours avec la prép. de; Ateint (frapé, afligé) de peste, de maladie. _ Atteint de crime, acusé, prévenu de crime. Ateint et convaincu d' avoir volé. _ Il n' est pas noble. M. Sabatier de Cavaillon l' emploie tout seul, et dans une Ode.
   Et le coupable ateint n' éprouve pour tortûres
   Que les cris du remord.

ATTEINTE


ATTEINTE, ou ATEINTE, s. f. [2e longue, 3e e muet.] 1°. Coup dont on est ateint. Il se dit sur-tout du cheval qui a reçu un coup, ou de lui-même, ou d' un autre cheval. = 2°. Figurément, doner ateinte régit à. Doner ateinte aux droits, aux privilèges de, etc. M. de Bufon done le même régime à hors d' ateinte: "Ces matières se trouvent peu-à-peu hors d' ateinte aux eaux. Ce régime est inusité. Hors d' ateinte se dit absolument. = 3° Ataque de certaines maladies: Ateinte de goutte, de gravelle, etc. = 4° Figurément, douloureûse ateinte, vive impression que fait une chôse, dont on est fortement touché.

ATTELAGE


ATTELAGE, ou ATELAGE, s. m. [2e et 4e e muet, tout bref.] Nombre de chevaux propres à tirer la charrûe, ou pour traîner des voitures. Il a six atelages, il en a perdu deux. Atelage de six chevaux, etc.

ATTELER


ATTELER, ou ATELER, v. a. [2e e m. 3e é fer.] Atacher chevaux ou mulets, ou autres bêtes de voitûre à un carosse, chariot, charette, etc. Ateler les chevaux au carosse: ou, neutralement, il faut ateler, aller dire au cocher d' ateler _ L' Auteur des Réf. etc. voulait qu' on dit, mettre, et non pas ateler les chevaux au carosse. On dit l' un et l' autre, plus souvent le dernier.

ATTELÉ


ATTELÉ, ÉE, part. Carosse atelé de six chevaux, voiture atelée de deux mules d' Espagne, bien atelé, mal atelée. On dit des Associés, qui ne s' acordent pas, que c' est une chârette mal atelée.

ATTELIER


ATTELIER. Voy. ATELIER.

ATTENANT


ATTENANT, ANTE, adj. ATTENANT, adv. [2e e muet 3e lon.] Contigu, tout proche. L' adjectif, suivant les exemples donés par l' Acad. régit à ou de. Logis atenant à un autre; sa maison est atenante de la miène. Je crois de plus sûr et plus autorisé. Ou il se dit sans régime: "il demeûre dans la maison atenante. La Fontaine en fait deux mots: à tenant.
   Un jardin assez propre et le clos à tenant.
L' usage est pour attenant ou atenant. _ L' adv. régit la prép. de: "Ils sont logés attenant l' un de l' autre. "Il loge tout attenant d' un tel palais. Suivant Trév. il vaut mieux dire tout proche; mais celui-ci n' exprime pas comme atenant le voisinage immédiat. _ M. des Essarts lui fait régir la prép. à: "Il se tint caché dans une maison attenant à celle où il résidoit. Causes célèbres. C' était le cas d' employer l' adjectif, et de dire atenante de celle, ou à celle, etc. ou avec l' adv. il falait mettre de; atenant de cette, etc.

ATTENDANT


ATTENDANT, (en) adv. Cependant. "Prenez cela en atendant.
   EN ATENDANT QUE, Conjonct. Richelet dit qu' elle est presque surannée. Elle a donc rajeuni; car on le dit sans dificulté. Elle régit le subjonctif. "Je m' amuse à lire en attendant qu' il vienne. "En attendant que vous soyez éclairci. Acad.

ATTENDRE


ATTENDRE ou ATENDRE, v. a. et n. [Atandre, 2e lon. 3e e muet.] 1° Être dans l' atente, l' espérance ou la crainte de quelque chôse qu' on croit devoir arriver. Acad. Demeurer dans un lieu ou dans une situation jusqu' à ce que quelque chôse ou quelqu' un arrive. Trév. Cette dernière définition n' est pas juste; car on attend, et souvent long-temps, en changeant de lieu et de situation. Atendre la paix, la fièvre, l' heure de faire telle chôse. Atendre l' ocasion, atendre l' énemi, atendre la mort sans la craindre.
   ATENDRE, espérer. Le 1er dit plus que le 2d: on atend avec assurance, on espère avec incertitude. Atendre se dit du bien et du mal; espérer ne se dit que du bien: il espère sa grâce; il atend tous les jours le moment de son suplice ou de sa délivrance. _ Enfin atendre régit et les chôses et les persones; espérer ne régit que les chôses. Voy. ESPÉRER.
   2° ATENDRE, se promettre, a pour 2d régime la prép. de: "Il ne faut attendre sa récompense que de Dieu. "Chacun n' attend son salut que de sa légéreté et de sa vitesse. M. le Dacier, Iliade. J' attendois de vous plus d' empressement.
   3° ATENDRE, neutre, régit après devant les persones et les chôses, dans le sens de désirer: on atend après vous, on n' atend plus qu' après cela. Cette expression n' est bone que pour le discours familier: L' Acad. n' en distingue point l' usage. Racine dit:
   Attendez-vous encôre après l' aveu d' un frère?
       Berénice.
L' expression n' est pas fort noble. _ Il régit que et le subjonctif, et non pas l' infinitif sans prép. "J' atens qu' il viène, et non pas je l' atens venir. L' Auteur de la Cantate des Femmes a fait cette faute. "J' attendrois sans impatience renaître l' astre du matin. _ Plusieurs Écrivains ont employé la prép. à devant l' infinitif. "Qu' attendons-nous donc à nous soumettre? Boss. "Dieu attendoit seulement à perdre Juda, qu' il eût rétiré du monde le pieux Josïas. Id. "Quelle obligation vous aura-t-on, si vous attendez à nous defendre que le feu, qui aura consumé notre flotte, menace vos vaisseaux. Mde. Dacier, Iliade. "Il attendoit toujours du succès des affaires à se déclarer. Vertot. _ Dans cette dernière phrâse les deux régimes, et du nom et du verbe, me paraissent mauvais; et il me semble qu' il falait dire: "Il atendait le succès, etc. pour se déclarer _ Dans les autres exemples, pour me paraît aussi meilleur que à, excepté le premier où je préférerais de: Qu' atendez-vous de vous soumettre? _ P. Corneille emploie atendre actif, avec ce même régime de la prép. à.
   Attend l' ordre d' un Père à choisir un époux.
Il faut pour choisir _ Racine dit que pour ce que:
   Attend que deviendra le destin de la Reine.?
_ Avec tard, la prép. à fait fort bien.
   À~ me chercher lui-même attendroit-il si tard.
       Racine.
"Il me semble qu' on n' auroit pas dû attendre si tard à rire. Fonten.
   4° Il est un autre régime assez particulier doné à ce verbe; c' est la conjonction que avec ne et le subjonctif. "Toi, dont l' office est d' avoir soin du peuple et qui es payé pour cela, qu' attends-tu que tu ne te hâtes de le secourir? Anon. Ce régime est peu usité, et il n' est employé que dans les phrâses interrogatives.
   5° ATENDRE, actif, ne se dit pas d' ordinaire des chôses comme sujet de la phrâse (nominatif.) Il fait pourtant fort bien dans la phrâse suivante: "Une demande n' attendoit pas l' autre, et le Chevalier ne trouvoit point assez de mots pour répondre à cette foule de questions. Fielding.
   6° S' ATENDRE ne régit point les persones. "Je ne m' attends qu' à vous, dit Vaugelas, (Quinte curce) pour, je ne me fie qu' à vous. On ne le dit point aujourd' hui. L' Acad. met pourtant, je m'~ attends à vous; il ne faut pas s' attendre à lui, compter sur vous, sur lui. _ Cela est tout au plus bon pour la conversation, et n' est pas digne du ton de l' Histoire. _ Il régit à devant les noms et les verbes: "On doit s' attendre à tout; je m' attends à beaucoup souffrir. "On doit s' attendre à exciter l' envie, quand on a du succès.
   "À~ les voir obéir ne vous attendez plus.
       P. Marion Cromwel.
Racine met de au lieu d' à. _ Ses transports aujourd' hui s' attendoient d' éclater. Il falait, s' atendaient à éclater. Le Poète a préféré l' autre manière: on voit bien pourquoi. Un Prosateur, qui n' avait pas les mêmes gênes de mesûre, a dit aussi: dont nous nous attendons bien de profiter. Neufville, Vie de Leibnitz. _ À~ profiter ne vaudrait rien non plus. Il falait: dont nous espérons bien de profiter; car s' atendre n' était pas là le mot propre. _ S' atendre régit aussi la conjonct. que, quand le sens est afirmatif avec l' indicatif, et quand il est négatif, avec le subjonctif: "Je m' attends qu' il viendra, je ne m' attends pas qu' il viène. "Ne vous attendez pas que je le fasse, et non pas, que je le ferai. _ "Qu' on ne s' attende pas que nous donerons la liste des Despotes Russes. Ann. Litt. Je crois qu' il falait dire, que nous donions, comme on le dirait avec le v. espérer: n' espérez pas que nous donions, et non pas, que nous donerons, etc. _ * S' atendre pour être atendu, est un vrai gasconisme. "Mon frère s' attend tous les jours. Dites: on atend tous les jours son arivée, il est atendu incessamment.
   7° Être atendu a deux régimes, de et à; le 1er pour le lieu d' où vient celui qu' on atend.
   Plistène est d' Épidaure attendu chaque jour.
       Oreste.
Le 2d pour le lieu où il doit venir. "Il est atendu à Paris dans le cours de la semaine. _ Racine a employé ce dernier régime au figuré.
   Quoiqu' attendu, Madame, à l' empire du monde,
   Il sembloit à lui seul appeler tous les coups.
       Bérénice.
Cette expression figurée ne serait pas bone en toute ocasion. On dit ordinairement, dans le même sens, d' un héritier présomptif, qu' il est~ apelé au trône, à la royauté, à la succession, etc.
   8° Atendez-moi sous l' orme, se dit en style proverbial et ironiquement, pour signifier qu' on n' ira pas et qu' on nous atendra vainement. _ Voy. BOITEUX. _ Atendre quelqu' un au passage, le saisir dans une ocasion où il ne peut se défendre d' acorder une grâce. _ C' est où je l' atends, c' est-là que je l' atends; je ne le crains pas, ou je puis lui faire plus de mal qu' il ne peut m' en faire; ou, je ne demande pas mieux, et je saurai tirer parti de ce sur quoi il compte le plus. Voy. ABBÉ. _ Il ennuie à qui atend. _ Tout vient à point à qui peut atendre; avec le temps et la patience on vient à bout de tout.

ATTENDRI


ATTENDRI, ou ATENDRI, adj. [Atan--dri, 2e lon.] Comme touché, avec lequel il a beaucoup de raport, il régit la prép. de (l' ablatif.) "Je suis attendrie de cette haute vertu. Sév. "Il fut fort attendri de ce tragique événement. _ Fenelon lui fait régir le datif. "Il se sentoit attendri aux discours de Mentor. Là la prép. par était le vrai régime, à cause du v. se sentir, combiné avec atendri. _ Il régit aussi de devant l' infinitif. "Attendrie de voir cet homme soufrir.
   Cet adjectif, même employé seul et sans régime, marche toujours après le substantif: "Vous auriez cru que les rochers attendris alloient descendre du haut des montagnes, aux charmes de ses doux accens. Télém. Les atendris rochers serait épouvantable, et sentirait le Ronsard ou le Dubartas.

ATTENDRIR


ATTENDRIR ou ATENDRIR, v. a. [A--tandri, 2e lon.] Au propre, rendre tendre et facile à manger. "La gelée attendrit les chous; cela attendrit la viande. _ Au fig. rendre sensible à la compassion, à l' amour, à l' amitié. Les larmes atendrissent le coeur des persones sensibles.
   Rem. 1° Dans le premier sens, il ne se dit que des chôses physiques et sans régime relatif. Cela n' empêche pas que ce ne soit une heureûse hardiesse dans M. Gilbert d' avoir dit:
   Du mot de tolérance attendrir une phrase.
Pour se moquer de ceux qui croient se faire valoir, en prêchant la tolérance à tout propos. Le genre satirique comporte ces hardiesses: on lui acorde plus de licences.
   2° ATENDRIR et s' atendrir régissent quelquefois la prép. sur. "Vous espérez en vain de l' attendrir, ou qu' il s' attendrisse sur vos malheurs.

ATTENDRISSANT


ATTENDRISSANT, ANTE, adj. ATENDRISSEMENT, s. m. [Atandri-san, sante, driceman.] Qui atendrit. V. ATTENDRIR au figuré. Spectâcle atendrissant, larmes atendrissantes. Il ne se dit point au propre, non plus qu' atendrissement; sentiment par lequel on s' atendrit. Ces paroles lui causèrent un grand atendrissement. Ce subst. a le sens passif; il se dit de celui qui est atendri, et non pas de celui qui atendrit.

ATTENDU


ATTENDU, ou ATENDU, adv. [Atandu, 2e lon.] Vu, eu égard à. Il régit l' acusatif. "Il fut exempt, attendu son âge, ses infirmités. Attendu la clause du testament, etc.
   ATENDU que, conjonct. Elle n' est d' usage qu' en conversation et au Palais. Elle régit l' indicatif. Atendu que le testateur a omis cette formalité. _ Cette conjonction, qui était fort en usage du temps de Vaugelas, a fort vieilli, et l' on ne s' en sert plus guère; vu que, puisque, parce que sont beaucoup meilleurs. Th. Corn. Réflex. _ L' Académie ne la désaprouvait pas d' abord: elle la retrancha ensuite de son Dictionaire, et ne mit qu' atendu, adv. (Attendu son âge, son infirmité) Dans la dern. Édit. elle l' a remise sans mauvaise qualification. "Attendu qu' il s'~ agissoit~ d' une matière importante, il fut arrêté que, etc.

ATTENTAT


ATTENTAT, ou ATENTAT, s. m. [A--tanta, 2e. lon.] Entreprise contre les Lois dans une ocasion importante. Énorme, horrible atentat, faire comettre un atentat, etc. Il a le régime du v. Atenter, le datif (la prép. à) "N' est-ce pas un atentat assez révoltant à la liberté des mers et à la propriété des Nations, que la violence, qui ôte à des Navigateurs libres, le droit de disposer de leurs biens. Ling. _ Il régit aussi la prép. contre, et l' Acad. ne done d' exemple que de celui-ci: "Un attentat contre la liberté publique.

ATTENTATOIRE


ATTENTATOIRE, adj. [Atanta-toâ-re. 2e et 4e lon.] Terme de Palais. Qui atente; procédure, sentence atentatoire à l' autorité du Parlement.

ATTENTE


ATTENTE, ou ATENTE, s. f. [Atante, 2e lon. 3e e muet.] L' état de celui qui atend, et le temps pendant lequel il est à atendre. Acad. L' action d' atendre. Trév. Espérance, prévoyance de ce qui doit arriver. Rich. Port. Les deux dernières définitions ne valent rien; car, 1° l' atente n' est pas une action, mais un état passif. 2° Elle n' est point une espérance, puisqu' on est en atente de ce qu' on craint autant et plus que de ce qu' on espère: elle n' est pas une prévoyance: elle est souvent une certitude qui nous vient du témoignage d' autrui, plus souvent que de nos lumières. Il faut donc s' en tenir à la définition~ de l' Acad. _ Longue atente, ennuyeûse atente. Être en atente de... "Si vous prêtez à cet homme, vous n' y perdrez que l' argent et l' atente. _ Il a rempli, il a surpassé notre atente. "Cela est arrivé contre l' atente de tout le monde.
   Pierres d' atente, qui avancent d' espace en espace pour faire la liaison avec le mur qu' on bâtira dans la suite à côté. _ On le dit aussi au figuré.

ATTENTER


ATTENTER, ou ATENTER, v. n. [A--tanté, 2e lon. 3e é fer.] Former une entreprise contre les Loix. Il régit à ou sur, ou contre. _ Atenter à la vie de quelqu' un, à la pudicité, à l' honeur d' une femme; sur la persone, sur les droits d' un homme, atenter contre la liberté publique. _ Ces régimes ne sont que pour les noms. Voltaire lui fait régir à devant les verbes.
   Jusqu' à trahir l' état vous avez attenté.
       Ciceron
Que si l' on dit qu' à trahir est régi par jusque, alors atenté sera sans régime, ce qui est une autre irrégularité. Du reste tout cela est bon en vers, mais on ne le passerait pas en prôse..

ATTENTIF


ATTENTIF, ÎVE, adj. [Atantif, îve, 2e lon. 3e longue aussi au 2d.] Qui a de l' atention, de l' aplication. Avoir l' esprit atentif, prêter une oreille atentive. Être atentif à la voix du Seigneur, à son devoir, à son ouvrage, à un discours.
   1° Cet adjectif suit toujours le substantif qu' il modifie, et rarement, même en vers, même au fém. pourrait-il précéder sans choquer l' oreille.
   Chantons: tout s' attendrit: mes brébis attentives
   Semblent s' intéresser à mes chansons plaintives.
       Gresset.
M. Racine le fils, le fait marcher devant, mais l' inversion est dûre.
   Est-ce moi qui préside au maintien de ces Lois?
   Je les connois à peine: une atentive adresse
   M' en apprend tous les jours et l' ordre et la sagesse.
   2° Atentif régit à, non-seulement devant les noms, comme on l' a vu dans les exemples ci-dessus, mais encôre devant les verbes. Il est atentif à profiter de tous ses avantages. "Ce Roi, si doux, si afable, si atentif à écouter tout le monde. Télém.
   Politique profond, mais prêt à tout ôser,
   Savant dans l' art de feindre et de se déguiser,
   Attentif à saisir l' ocasion offerte. etc.
       P. Marion Cromwel.
3° On dit tenir atentif à.. * Bossuet dit, dans le même sens, retenir attentif. "Afin de vous retenir attentif à l' enchaînement des grandes afaires du monde. Retenir atentif n' est pas de l' usage actuel.

ATTENTION


ATTENTION, ou ATENTION, s. f. [Atan-cion, en vers ci-on, 2e lon.] Aplication d' esprit à quelque chôse. _ Avoir, faire atention à. "Il n' a, ou il ne fait atention à rien. _ Avoir l' atention de avec l' infinitif. "Il a eu l' atention de me prévenir. _ Prêter atention sans article; prêter une atention favorable. _ Faire atention que... Faites atention que ce mot est du stile familier. Il régit toujours l' indicatif, même dans les phrâses négatives. "Il ne fait pas atention que la chôse est (et non pas soit) impraticable.
   Rem.Atention, exactitude, vigilance (synon.) L' attention fait que rien n' échape; l' exactitude empêche qu' on n' omette la moindre chôse; la vigilance fait qu' on ne néglige rien. Il faut de la présence d' esprit pour être atentif, de la mémoire pour être exact; et de l' action (de l' activité) pour être vigilant. "L' homme sage est atentif à sa conduite, exact à ses devoirs, et vigilant sur ses intérêts. GIR. Synon.
   2° ATENTION n' a point de pluriel dans son sens ordinaire. On dit à plusieurs, comme à un seul, je suis flaté que mon discours ait atiré votre atention, et non pas vos atentions. Dans la critique du Discours de M. Le Mierre: "Je ne vous parlerai pas, dit M. l' Ab. Royou, du Poète qui force les attentions de la multitude, comme si la multitude avoit plusieurs attentions. Journ. de Mons. _ Atentions se dit des marques d' atention, des égards, des soins, etc. comme on dit, la charité et des charités; la grossièreté et des grossièretés, etc. "Il a eu mille atentions pour moi, pendant ma maladie: "Il me comble d' atentions, etc. _ Atentions, égards, ménagemens (synon.) Voy. ÉGARDS.
   3° Avec le v. avoir il régit de: seul, la prép. à. "Il a eu l' atention de m' avertir, son atention à~ me prévenir m' a touché. "Ce ne sera pas seulement en remportant des victoires que vous deviendrez un grand Roi. Ce sera votre amour pour vos peuples, votre atention à rendre vos sujets heureux. Massillon.
   4° Faire atention se dit sans article, même quand il est modifié par des adverbes de comparaison. "Cette réflexion que je faisois de temps en temps passa alors sans que j' y fisse trop atention. Anon. On pourrait dire aussi trop d' atention, mais cela ne serait pas si bien. Faites plus atention à ce que vous dites: "Il ne fait pas beaucoup, ou il fait peu atention à ce qu' il fait. * M. Grosier a dit, prendre atention à, avec le même sens. "On ne saurait prendre trop d' atention à la propreté, soit parmi les hommes de l' équipage, soit dans l' intérieur du vaisseau. On dit, prendre soin de, et avoir ou faire atention à...
   5° Mériter atention se dit aussi sans article. "Je ne m' arrêterai qu' à quelques circonstances, qui méritent atention. Let. Édif.

ATTENTIVEMENT


ATTENTIVEMENT, adv. [Atantîve--man. 2e et 3e lon. 4e e muet.] Avec atention. Lire, écouter atentîvement.

ATTÉNUANT


ATTÉNUANT, ou ATTÉNUATIF, adj. et s. m. [Aténu-an, nu-atif, 2e é fer. 4e lon. au 1er. L' Acad. ne met que le premier: Trév. met les deux.] Qui aténue, qui procûre la fluidité aux humeurs. Remède aténuant, ou aténuatif; les aténuans, les aténuatifs. Il ne se dit qu' en Médecine.

ATTÉNUATION


ATTÉNUATION, ou ATÉNUATION, s. f. [Cion, en vers ci-on, 2e é fer. tout br.] Diminution de forces. Il ne se dit au propre que dans cette phrâse: "Il est dans une grande aténuation. _ En termes de Pratique, diminution des charges contre un acusé.

ATTÉNUÉ


ATTÉNUÉ, ou ATÉNUÉ, ÉE, adj. [2e et 4e é fer. long à la 4e du 2d.] Abatu de maladie, afoibli. Rich. Port. _ La Touche. le préfère à exténué: L' Acad. les avait dit dabord tous deux indiféremment: dans les Éditions postérieures elle dit, avoir le visage exténué, pour dire, avoir le visage décharné. Dans la dern. édit. l' Acad. met simplement atténué, part. et au v. atténuer elle dit: affoiblir, diminuer les forces, l' embonpoint. _ Pour nous, nous pensons qu' aténué est vieûx, quand il est seul et sans régime; et qu' on ne dit plus: avoir le visage aténué, mais exténué; et qu' avec le régime même, exténué est préférable. "Il est fort aténué (ou mieux exténué) de sa longue maladie. "Son corps est aténué (ou bien mieux encôre exténué) par l' âge, par les fatigues, par les maladies.

ATTÉNUER


ATTÉNUER, ou ATÉNUER, v. a. [2e et 4e é fer.] 1° Afoiblir, diminuer les forces, l' embonpoint. "Les jeûnes, les veilles, les fatigues l' ont extrêmement aténué. _ 2° En Médecine, aténuer les humeurs, les rendre moins grossières et plus fluides.
   Rem. Aténuer ne s' est dit long-temps qu' en Physique et en Médecine: Depuis peu il a passé dans le langage commun. "Ce motif même anonçait un désordre qui aténuoit les liens de la subordination. Moreau. "Lui-même étoit intéressé à aténuer l' énormité de son crime. Id. Dans cet emploi, c' est un néologisme.

ATTÉRAGE


ATTÉRAGE, s. m. ATTÉRIR, v. n. [L' Acad. ne met ici qu' une r, elle en met deux à aterrer, aterrissement. Pourquoi cette diférence? Tous ces mots sont composés de terre. Le Rich. Port. est plus conséquent: Il ne met qu' une r par-tout, et même à Atterrer.] Atérir c' est prendre terre. Atérage, l' endroit où un vaisseau peut prendre terre. Ce sont termes de Marine.

ATTERRER


ATTERRER, ou ATERRER, v. a. [Le Rich. Port. écrit attérer; M. l' Ab. Grosier aussi: attérer, il attère, mais tant qu' on écrira terre, avec deux r, il faudra écrire atterrer ou aterrer. On ne prononce pourtant qu' une r, quoiqu' on en écrive deux, atérer, il atère: 2e è moy. long au 2d. r forte. V. ATTÉRAGE.] Abatre, renverser par terre. Il ne se dit d' ordinaire qu' au figuré, dans le sens d' acabler. "Ce dernier coup, ce reproche l' a aterré. _ On se sert de terrasser pour le sens propre. "Il ne le relève que pour avoir la gloire de l' atterrer. Boss. Il falait là terrasser~. Aterrer c' est fraper de terreur, terrasser, c' est renverser par terre. Trév. et le Rich. Port. mettent aterrer dans ce dernier sens. L' Acad. aussi, mais seulement dans deux phrâses, qui sont comme consacrées, et en avertissant que hors de là il ne se dit point. "Ils en vinrent aux prises, et il l' atterra sous lui: "Il prit le taureau par les cornes et il l' atterra. Je crois que terrassa vaudrait encôre mieux, même dans ces deux ocasions.

ATTERRISSEMENT


ATTERRISSEMENT, s. m. [Atèriceman, 2e è moy. r forte, 4e e muet.] Amâs de terre, qui se forme par la vâse ou par le sâble, que la mer ou les fleuves aportent sur le rivage par succession de temps. "Ce champ a crû du double par des aterrissemens successifs. Le Rich. Port. écrit attérissement. = Il faut prendre garde de confondre aterrage avec aterrissement. L' avis paraît superflu; mais c' est en comparant les mots, qui ont quelque analogie, qu' on aprend mieux à en distinguer la signification. Qui dirait aterrage pour amas de terre ou de sable, etc. et aterrissement pour le lieu où l' on peut prendre terre, ferait un ridicule quiproquo.

ATTESTATION


ATTESTATION, ou ATESTATION, s. f. [Atès-ta-cion, en vers ci-on, 2e è moy. tout bref.] Certificat, témoignage doné par écrit. Atestation du Curé, du Médecin, du Professeur. Atestation de vie et moeurs.

ATTESTER


ATTESTER, ou ATESTER, v. a. [Atès--té, 2e è moy. 3e é fer.] 1°. Assurer, certifier, soit de vive voix, soit par écrit. Il régit que et l' indicatif. "Il a atesté que la chôse s' étoit passée de la sorte. = 2°. Prendre à témoin. Il n' a que le régime direct. Atester le Ciel, les Dieux. On dit quelquefois j' en ateste, mais en est là comme particule explétive, ou si l' on veut, il signifie de cela. "J' en atèste le Ciel, qui m' entend et qui punit le parjûre. Jér. Dél. mais ce n' est pas une conséquence pour d' autres ablatifs (pour la prép. de devant les noms.) "Ce sont les Anglais même, que j' atesterai de mon impartialité. Rainal. Ce régime est inusité.

ATTICISME


ATTICISME, ou ATICISME, s. m. Délicatesse, finesse de goût particulière aux Athéniens. Acad. L' aticisme était chez les Athéniens ce qu' urbanité était chez les Romains; mais l' aticisme est plus renomé. _ Gresset dit de M. de St. Aignan, Mécène et rival des Poètes.
   On croit entendre encore Horace,
   Ou l' élégant Anacréon;
   Du Romain il a la justesse,
   Du Grec l' aticisme charmant.
   Rem. Le Dict. de Trév. done trois sens à aticisme, dont aucun n' explique la vraie signification de ce mot. 1°. Façon de parler serrée, concise, usitée par les Athéniens. On l' apèle aussi laconisme. C' est confondre deux chôses bien diférentes. 2°. Raillerie agréable et polie. Ce n' est pas seulement dans la plaisanterie que l' aticisme se distinguait. 3°. Politesse fine et élégante, en usage chez les Athéniens. Il falait du moins ajouter, dans le langage; et c' est aussi une addition à faire à la définition de l' Académie.

ATTIÉDIR


ATTIÉDIR, v. a. [A-tié-di: 2e é fer.] Rendre tiède ce qui était chaud. Il ne se dit guère plus dans le propre: On dit plutôt rendre ou devenir tiède. _ On dit atiédir de chaud en froid. "Cette eau commence à s' atiédir, ou plutôt, à devenir tiéde. Au contraire, tiédir se dit de froid en chaud. "Faites tiédir cette eau. _ Suivant le Dict. de l' Acad. on disait aussi, atiédir de froid en chaud. Elle ne le dit plus en ce sens dans les éditions postérieures.
   On dit figurément, en matière de dévotion; les plus fervens s' atiédissent quelquefois; la ferveur de leur dévotion se ralentit.

ATTIÉDISSEMENT


ATTIÉDISSEMENT, s. m. [A-tié-dice--man, 2e é fer. 4e e muet.] État de ce qui passe de la chaleur à la tiédeur. Il ne se dit qu' au figuré: l' atiédissement de l' amitié, de la dévotion. "Il est tombé dans un grand atiédissement. _ Il nous semble que ce mot n' exprime qu' une tiédeur passagère, et que tiédeur marque un atiédissement habituel.

ATTIFER


ATTIFER, ATTIFET. Voyez ATIFER, ATIFET. _ ATTINTER. Voy. ATINTER.

ATTIRAIL


ATTIRAIL, s. m. [Mouillez l' l finale; l' ai n' a pas le son de l' e; l' a et l' i y ont leur son ordinaire. _ Ce subst. n' a pas ordinairement de pluriel; s' il en a un, c' est attirails, et non pas attiraux.] Hardes, bagage, suite. Trév. Rich. Port. Grande quantité et diversité de chôses nécessaires à certains usages. Acad. "Atirail de la chasse, d' un voyage, d' une Imprimerie, d' un ménage de campagne, d' une cuisine, etc. On voit par les exemples, que la définition de l' Acad. est la plus juste et la plus générale.

ATTIRANT


ATTIRANT, ANTE, adj. [3e lon. ati--ran, rante.] Qui atire. Il ne se dit qu' au figuré; esprit adroit, atirant, insinuant; manières atirantes. L' Acad. done un exemple de la persone. "Cette Marchande est fort atirante. Il se dit presque toujours des chôses. "Il admiroit, dans une persone si jeune, ce profond mépris pour tout ce que le monde a de plus atirant. "Touche intérieure de la grâce, plus forte encôre et plus atirante que celles qui avoient précédé. Griffet, Ann. Chrét.
   Aussitôt il se lève, et la troupe fidèle
   Par ces mots atirans sent redoubler son zèle.       Boil.
Ces mots atirans, étaient la promesse d' un ample déjeûné.

ATTIRER


ATTIRER, ou ATIRER, v. a. Tirer à soi. L' aimant atire le fer, l' ambre la paille, le Soleil les vapeurs. _ Figurément il régit le datif (la prép. à.) Atirer quelqu' un à son parti. "Cette action lui a atiré de grandes louanges. Ou la prép. sur: "Vous atirerez sur vous les châtimens du Seigneur. _ S' atirer a le régime direct, le pron. se étant au datif. S' atirer (à soi-même) l' afection, le mépris, l' estime, l' aprobation de tout le monde.
   On dit tirer de et atirer à. Voyez TIRER. "Les Hérétiques cherchent à atirer les femmes à leur parti; c' est qu' ils savent qu' on tire d' elles un grand parti, quand on est venu à bout de les gagner, ce qui n' est pas dificile.

ATTISER


ATTISER, ou ATISER, v. a. [Atizé, 2e br. elle est longue devant l' e muet; il atîse, il atîsera; etc.] Il ne se dit qu' avec le mot feu, au propre et au figuré. Au propre, raprocher les tisons pour les faire mieux brûler; au figuré, aigrir les esprits déjà irrités. "C' est cet ambitieux qui a atisé le feu de la guerre civile. "Je suis bien éloigné d' atiser moi-même par mes discours la fureur de votre emportement. Rac.

ATTITRÉ


ATTITRÉ, ÉE, adj. Participe d' atitrer, qui ne se dit plus. Juges atitrés; Le Gendre. "Marchand, Comissionnaire atitré, marchand chez qui l' on achète ordinairement, Comissionaire expressément chargé d' une comission. _ Il se prend plus souvent en mauvaise part, dans le sens de suborné, aposté; témoins atitrés, assassins atitrés. _
   Quoi, je passe à tes yeux pour un homme atitré!
       Corn. Pertharite.
Ce mot est bien bas pour une Tragédie.

ATTITUDE

ATTITUDE, ou ATITUDE, s. f. Situation, position du corps. Acad. L' action et la postûre où l' on met les figûres qu' on représente. Rich. Port. Le Dict. de Trév. ajoute; propre à faire comprendre aux spectateurs les passions que l' on veut représenter. _ En effet, rien ne contribue plus que le choix des attitudes à l' expression; partie des arts agréables la plus dificile, et aussi la plus négligée. _ Ces trois Dictionaires bornent l' usage de ce mot à la sculptûre et à la peintûre. Je crois pourtant qu' il peut se dire et des Acteurs sur le Théâtre, et des persones dans la société, au lieu de postûre, qui est un terme assez bas. Les Prédicateurs reprochent souvent à leurs Auditeurs de se tenir, dans la maison de Dieu, en des atitudes qu' ils n' oseraient prendre dans une maison, et dans une assemblée tant soit peu respectable.